SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Dépôt du rapport annuel du médiateur de la République
(p.
1
).
3.
Souhaits de bienvenue à une délégation du Sénat chilien
(p.
2
).
4.
Sécurité et promotion d'activités sportives.
- Adoption d'une proposition de loi déclarée d'urgence (p.
3
).
Discussion générale : Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des
sports ; MM. François Lesein, rapporteur de la commission des affaires
culturelles ; Marcel Charmant, James Bordas, Mme Hélène Luc.
Mme le ministre.
Clôture de la discussion générale.
Article 1er (p. 4 )
Amendement n° 1 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 (p. 5 )
Amendement n° 2 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 3 (p. 6 )
MM. Jean Faure, Michel Barnier, le rapporteur.
Amendement n° 3 de la commission et sous-amendement n° 8 de M. Barnier. - MM.
le rapporteur, Michel Barnier, Mme le ministre, M. Jean Faure. - Adoption du
sous-amendement et de l'amendement modifié.
Amendements n°s 4 et 5 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le
ministre, MM. Jean Faure, Michel Barnier. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 7 )
Amendement n° 6 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, MM. Marcel Charmant, René-Pierre Signé, Ivan Renar. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Intitulé (p. 8 )
Amendement n° 7 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, M. Marcel Charmant. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.
Vote sur l'ensemble (p. 9 )
MM. Jacques Legendre, Jean Faure, Michel Barnier, Jacques Habert, Mme le
ministre, MM. Michel Mercier, le rapporteur.
Adoption de la proposition de loi.
5.
Nomination de membres d'une commission mixteparitaire
(p.
10
).
6.
Candidature à une commission
(p.
11
).
Suspension et reprise de la séance (p. 12 )
7.
Accords relatifs à la quatrième convention ACP - CE de Lomé.
- Adoption de trois projets de loi (p.
13
).
Discussion générale commune : M. Charles Josselin, secrétaire d'Etat à la
coopération et à la francophonie ; Mme Paulette Brisepierre, rapporteur de la
commission des affaires étrangères ; MM. Pierre Mauroy, Jacques Habert.
Clôture de la discussion générale commune.
M. le secrétaire d'Etat.
MODIFICATION DE LA QUATRIÈME CONVENTION ACP - CE
DE LOMÉ (p.
14
)
Article unique (p.
15
)
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
PROTOCOLE À LA QUATRIÈME CONVENTION ACP - CE
DE LOMÉ (p.
16
)
Adoption de l'article unique du projet de loi.
ACCORD INTERNE RELATIF
AU PROTOCOLE FINANCIER
DE LA QUATRIÈME CONVENTION ACP - CE DE LOMÉ (p.
17
)
Adoption de l'article unique du projet de loi.
8.
Traité d'entente, d'amitié et de coopération avec l'Albanie.
- Adoption d'un projet de loi (p.
18
).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, secrétaire d'Etat à la coopération
et à la francophonie ; André Rouvière, rapporteur de la commission des affaires
étrangères.
M. le secrétaire d'Etat.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
9.
Avenant à la convention fiscale avec le Canada signée le 2 mai 1975.
- Adoption d'un projet de loi (p.
19
).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, secrétaire d'Etat à la coopération
et à la francophonie ; Emmanuel Hamel, rapporteur de la commission des finances
; Jacques Habert.
M. le secrétaire d'Etat.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
10.
Convention fiscale avec la Mongolie.
- Adoption d'un projet de loi (p.
20
).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, secrétaire d'Etat à la coopération
et à la francophonie ; Emmanuel Hamel, en remplacement de M. Jacques Chaumont,
rapporteur de la commission des finances.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
11.
Nomination d'un membre d'une commission
(p.
21
).
12.
Dépôt de propositions de loi
(p.
22
).
13.
Retrait d'une proposition de loi
(p.
23
).
14.
Dépôt d'une résolution
(p.
24
).
15.
Dépôt d'une proposition d'acte communautaire
(p.
25
).
16.
Dépôt de rapports
(p.
26
).
17.
Dépôt d'un avis
(p.
27
).
18.
Ordre du jour
(p.
28
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
DÉPÔT DU RAPPORT ANNUEL DU MÉDIATEUR
DE LA RÉPUBLIQUE
M. le président.
M. le président a reçu de M. le médiateur de la République son rapport au
Président de la République et au Parlement pour l'année 1997.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
3
SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION DU SÉNAT CHILIEN
M. le président.
Mes chers collègues, j'ai le plaisir de saluer la présence dans notre tribune
officielle d'une délégation du Sénat chilien, conduite par son président, M.
Sergio Romero, en visite en France à l'invitation de M. le président du
Sénat.
Au nom de la Haute Assemblée, je lui souhaite la bienvenue et je forme des
voeux pour que son séjour en France contribue à fortifier les liens et l'amitié
entre nos deux pays, liens qui se sont particulièrement renforcés au cours de
ces dernières années par des rencontres régulières à Santiago et maintenant à
Paris.
Nous nous réjouissons des liens ainsi créés entre nos deux assemblées.
(Mme le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
4
SÉCURITÉ ET PROMOTION
D'ACTIVITÉS SPORTIVES
Adoption d'une proposition de loi déclarée d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi (n° 243,
1997-1998), adoptée par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence,
relative à la sécurité et à la promotion d'activités sportives. [Rapport n° 255
(1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le ministre.
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, la proposition de loi qui vous est soumise aujourd'hui
est dictée par la nécessité de répondre à un certain nombre de problèmes
urgents concernant la sécurité des installations sportives, l'accueil et la
sécurité du public à l'occasion des manifestations sportives, l'encadrement des
activités physiques et sportives dans les disciplines classées à risques et le
développement des exclusivités audioviduelles.
Ces diverses mesures urgentes ne diminuent pas le besoin d'une refonte plus
globale du dispositif législatif en vigueur qui, malgré les ajustements
survenus, ne correspond plus aux besoins et à la réalité sociale et économique
de la pratique sportive dans notre pays.
Nous avons pour responsabilité de donner au mouvement sportif les moyens de
maîtriser les mutations qu'il connaît - notamment dans ses rapports à l'argent
- pour un nouveau développement du sport et un renforcement, voire une
réhabilitation de son éthique, de sa mission citoyenne.
Je vous confirme donc l'intention du Gouvernement de déposer, à l'automne,
après le projet de loi sur la santé des sportifs et la lutte contre le dopage
au mois d'avril - que je souhaiterais, d'ailleurs, déposer au Sénat en première
lecture - un projet de loi d'orientation sur le sport.
En ce qui concerne la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui, je
précise, au sujet de l'article 1er, que la spécificité des enceintes sportives
accueillant des compétitions de véhicules à moteur ou de bateaux à moteurs n'a
pas été prise en compte dans la loi de 1992 adoptée à la suite des événements
tragiques de Furiani.
En effet, dans ces manifestations, le comportement des spectateurs est
différent, leurs déplacements étant justifiés par le contenu et le déroulement
de l'épreuve. De ce fait, l'impératif de sécurité me semble davantage garanti
par l'obligation de déterminer le nombre maximal de spectateurs accueillis dans
chaque tribune.
Le renvoi au 1er juillet 2000 de la date butoir pour l'homologation des
enceintes est une décision de bon sens réclamée par de nombreux élus. En effet,
à la date butoir prévue, à savoir le 24 janvier 1998, moins de 10 % du parc
d'enceintes concernées était homologué.
Je sais bien que ce report ne règle pas tous les problèmes que rencontrent les
collectivités locales sur le plan des responsabilités et sur celui des charges
financières.
Sur le premier point, je pense que le débat doit venir dans la préparation de
la prochaine loi d'orientation sur le sport.
En ce qui concerne le second point, je peux d'ores et déjà vous annoncer que,
lors de la dernière réunion du FNDS, le Fonds national pour le développement du
sport, j'ai proposé au comité de gestion que des crédits soient prioritairement
engagés en direction de la réhabilitation des installations sportives
existantes.
Concernant l'article 2, il me semble important qu'à la veille de la Coupe du
monde de football nous disposions de moyens dissuasifs à l'égard d'une minorité
de spectateurs qui sèment le trouble dans les enceintes sportives, mais aussi
en dehors.
Je me félicite de la proposition d'étendre la peine complémentaire
d'interdiction d'accès aux stades aux infractions constatées à l'extérieur du
stade. C'est en effet souvent lors de l'arrivée ou de la sortie du stade que
des incidents ont lieu.
Dans la dernière période, des acteurs du mouvement sportif et des élus m'ont
fait part de leurs inquiétudes quant à la recrudescence des actes de violence.
Faire reculer cette violence nécessite que soit lancée auprès des supporters,
des sportifs une forte campagne de prévention, et que soient développés des
actes éducatifs. La charte du
fair-play
élaborée par des collégiens de
Choisy, qui sera lue lors du premier match de la Coupe du monde de football, en
est un bel exemple.
Il faut encourager ces initiatives. Je m'y emploie avec mes collègues de
l'éducation nationale, mais une réelle application de la loi du 6 décembre
1993, modifiée par cette proposition de loi, est un élément dissuasif
important.
L'article 3 porte sur la nécessité d'accorder le principe de libre prestation
de services des ressortissants communautaires avec l'obligation de diplômes et
de qualifications fixés par la loi française.
Cet article répond à une préoccupation majeure : la sécurité des usagers. Il
insiste sur la connaissance de l'environnement, l'ignorance de réalités propres
à certains milieux pouvant avoir des conséquences dramatiques.
Cet article ne vise que les prestataires de services pour lesquels le texte
réglementaire en vigueur a fait l'objet d'accords conclus avec les
organisations professionnelles et les institutions européennes compétentes. En
pleine saison de sport d'hiver, cette mesure est attendue.
L'article 4 introduit une cohérence qu'appellent, d'un côté, le développement
des exclusivités audiovisuelles et, de l'autre, le nécessaire respect de la
liberté de l'information et de l'accès à l'information.
S'il faut admettre que le sport français puise une grande partie de ses
ressources financières privées dans la conclusion d'accords d'exclusivité avec
des organismes de communication audiovisuelle, nous devons, en même temps,
préserver le libre accès des journalistes dans les enceintes sportives.
La loi du 16 juillet 1984, modifiée en 1992, dans ses articles 18-2 et 18-4,
n'a pas permis de résoudre les conflits liés à la conciliation de ces deux
droits.
Le texte proposé ici garantit le libre accès des journalistes et la pluralité
de l'information du public.
Pour les organismes non cessionnaires des droits, le pouvoir de citation déjà
prévu dans la loi existante est préservé et renforcé par les dispositions
suivantes :
Les journalistes choisissent librement les extraits qu'ils souhaitent
diffuser. Ces extraits leur seront fournis gratuitement.
L'accès dans les enceintes doit leur permettre de filmer les événements
périphériques, c'est-à-dire ceux qui sont distincts de la compétition.
Ils pourront ainsi avoir un contact direct avec les acteurs de la
manifestation.
Afin de préserver le rôle du mouvement sportif, il est précisé que «
l'organisateur » est la fédération sportive délégataire française qui, dans le
cadre de sa mission de service public, selon la loi du 16 juillet 1984,
proposera un règlement.
Pour éviter tout arbitraire, ce règlement devra être visé par le Conseil
supérieur de l'audiovisuel avant d'être approuvé par le ministre chargé des
sports.
Ce nouveau dispositif doit être mis en place préalablement à toute
manifestation faisant l'objet d'un contrat d'exclusivité.
Cet article doit permettre de garantir le droit à l'information tout en
prenant en compte la réalité des rapports entre le mouvement sportif et les
médias.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen,
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur de la commission des affaires culturelles.
Monsieur le
président, madame la ministre, mes chers collègues, d'abord je veux vous
demander de bien vouloir excuser l'absence du président de notre commission, M.
Adrien Gouteyron, qui assiste aux obsèques de Régis Ploton, sénateur de la
Haute-Loire, qui est décédé avant-hier.
Les lois « portant diverses mesures » constituent un exercice difficile. On
s'aperçoit parfois, après les avoir adoptées dans l'urgence, bien sûr, et en
urgence, qu'elles n'ont apporté que des solutions imparfaites, en tout cas
rarement définitives à des problèmes qui n'avaient pas toujours été bien
posés.
Pour tenter d'éviter cet écueil, la commission des affaires culturelles s'est
attachée à analyser les problèmes qu'entend résoudre la proposition de loi qui
nous est soumise et elle s'est efforcée de leur apporter les solutions qui lui
ont paru les plus efficaces et les plus équilibrées.
Cela nous paraissait essentiel, car, en dépit de sa brièveté, le texte qui
nous est soumis aborde des sujets - la sécurité des manifestations sportives,
la qualité de l'encadrement sportif, le droit à l'information - qui ne peuvent
être traités à la légère.
Ce faisant, nous avons aussi eu le souci de vous donner des moyens d'action
adaptés, madame la ministre. En effet, le Sénat, a toujours fait passer avant
toute autre considération la nécessité de soutenir le sport - qui est, pour
chacun, un facteur d'épanouissement personnel et, pour tous, l'occasion de
grandes fêtes collectives auxquelles vous tenez - et de le défendre contre la
montée de la violence et de l'emprise de l'argent.
Mes chers collègues, le texte dont nous sommes saisis ne se prête guère à la
synthèse. C'est donc dans l'ordre où elles se présentent que j'analyserai ses
dispositions.
L'article 1er de la proposition de loi, qui modifie l'article de la loi de
1984 relatif à l'homologation des enceintes sportives, tend en premier lieu à
faire une exception, au profit des circuits de vitesse, à l'obligation de ne
prévoir que des places assises dans les tribunes des enceintes sportives.
La commission des affaires culturelles a estimé, pour des raisons sur
lesquelles nous reviendrons lors de l'examen des articles, que cette exception
n'était ni nécessaire ni souhaitable. En revanche, retenant une autre
suggestion de l'Assemblée nationale, nous vous proposerons de compléter le
texte en vigueur pour préciser que chaque tribune ne peut accueillir
simultanément un nombre de spectateurs supérieur au nombre de places qu'elle
offre.
Mais l'article 1er comporte une autre disposition qui illustre,
malheureusement, ce que je disais tout à l'heure à propos des lois votées dans
la précipitation. On nous demande en effet de prolonger pour la deuxième fois,
et jusqu'au 1er juillet 2000, le délai prévu pour l'homologation des enceintes
sportives ouvertes avant l'application de la loi de 1992. Mes chers collègues,
on nous avait demandé, voilà près de six ans, d'adopter en urgence une nouvelle
procédure d'homologation, alors qu'il aurait sans doute suffi, selon nous, de
compléter et de mieux appliquer les règlements de sécurité en vigueur.
Voilà le résultat : ce texte qu'on disait indispensable ne s'applique encore,
nous dit-on, qu'à 9 % des enceintes existantes. Vous avez annoncé, madame la
ministre, et je m'en félicite, votre intention d'orienter prioritairement le
FNDS vers la réhabilitation des installations sportives, mais il sera quand
même très difficile de rattraper cet énorme retard en deux ans et demi.
Alors, nous voterons bien sûr cette disposition, mais vous comprendrez qu'elle
nous renforce dans l'opinion que l'urgence est bien mauvaise conseillère.
L'article 2 prévoit, dans la perspective de la Coupe du monde de football,
d'élargir le champ d'application de la peine complémentaire d'interdiction de
stade prévue par la loi Alliot-Marie du 6 décembre 1993.
Cette peine ne peut actuellement être infligée qu'aux auteurs d'infractions
commises dans des stades, à l'occasion d'une manifestation sportive ou de sa
retransmission. Ce n'est pas suffisant, et cela peut même inciter à un simple
déplacement de la violence aux abords des stades et au développement des
affrontements à l'entrée ou à la sortie des matchs : il faut absolument y
remédier.
Il faut aussi prévoir le cas des retransmissions en public sur grand écran,
qui n'ont pas toujours lieu dans des stades, mais qui peuvent aussi être
organisées à l'extérieur de ceux-ci. Vous avez prévu de le faire, et c'est une
bonne idée, pour associer un plus vaste public à la fête de la Coupe du
monde.
Nous vous proposerons de tenir compte de ces préoccupations. Mais nous ne
pensons pas qu'il faille aller aussi loin que l'Assemblée nationale, qui a
retenu une rédaction beaucoup trop large, laquelle serait du même coup bien
difficile à appliquer.
J'en viens à présent à l'article 3, qui réglemente l'exercice en France de la
libre prestation de services d'éducateur sportif.
Pour les professions de l'encadrement sportif, la libre circulation des
travailleurs et des services s'applique dans le cadre de la reconnaissance
mutuelle des formations professionnelles. Ce système ne nous est, en l'espèce,
pas très favorable, d'une part, parce que nos exigences en matière de formation
des éducateurs sportifs sont généralement très supérieures à celles des autres
pays d'Europe...
M. Michel Barnier.
C'est vrai !
M. François Lesein,
rapporteur.
- ... et il faut s'en féliciter, même si cela ne suffit pas
toujours à éviter des drames tels que celui que nous venons de vivre voilà une
semaine - et, d'autre part, parce que la France offre plus d'occasions
d'exercer son métier à un moniteur de ski ou de plongée sous-marine que
l'Irlande ou les Pays-Bas, où, comme chacun le sait, la montagne est
importante...
(Sourires.)
Le précédent gouvernement s'est efforcé de limiter les inconvénients d'une
trop grande disparité entre les qualifications exigées par la France et celles
qui le sont par les autres Etats européens. Il a obtenu - grâce, il faut le
dire, à l'action soutenue de M. Michel Barnier, alors ministre délégué aux
affaires européennes, et de ses services - de la Commission européenne la
possibilité d'imposer des tests de capacité technique aux candidats au libre
établissement ou à la prestation de services qui auraient une formation trop
lacunaire, notamment à ceux qui n'ont pas d'autre qualification qu'une
expérience professionnelle.
Cette faculté ne nous est pas accordée de manière définitive - c'est important
- et elle est limitée à cinq disciplines : le ski, l'alpinisme, la plongée
sous-marine, le parachutisme et la spéléologie, qui ne sont d'ailleurs pas
toutes, il faut bien le dire, des sports de masse.
Cet accord de la Commission a été traduit dans deux décrets fondés, un peu
acrobatiquement, sur la loi de 1984 : le décret du 25 novembre 1996 relatif à
la libre prestation de services, qui fait référence aux articles 43 et 47-1 de
la loi, et le décret du 4 avril 1997 relatif à la liberté d'établissement, qui
est présenté comme un décret d'application de l'article 43.
L'article 3 de la proposition de loi a pour objet de donner un fondement
législatif au décret sur la libre prestation de services, et de permettre de
sanctionner les prestataires de services qui ne passeraient pas le test de
capacité auquel ils seraient soumis.
Je vous le dis tout de suite, madame la ministre, nous sommes tout à fait
d'accord sur ces deux objectifs.
Mais, je vous le dis aussi, la portée et le dispositif de l'article 3 ne nous
paraissent pas très satisfaisants, et nous pensons que l'on peut mieux faire.
C'est ce à quoi nous nous employons.
Sur la portée de l'article, d'abord : pourquoi s'en tenir à la prestation de
services ? Vous nous dites que le décret de 1996 est le seul qui manque de base
légale. Cela se discute !
Vous nous dites aussi que c'est surtout la prestation de services qui pose
problème, car c'est de ce régime que se réclament les moniteurs plus ou moins
qualifiés - plutôt moins que plus - qui viennent encadrer des groupes dans les
stations françaises de sports d'hiver. C'est vrai, mais je vous répondrai trois
choses.
D'abord, il ne faut pas attendre que les problèmes se posent pour les
résoudre.
Ensuite, il faut prendre garde au fait que ni le traité de Rome ni la
jurisprudence ne font de différence très nette entre liberté d'établissement et
liberté de prestations. Nous sommes ici en présence d'activités par nature
saisonnières, et qui peuvent être exercées par des frontaliers. Mieux vaut donc
renforcer les deux procédures, plutôt que l'une et pas l'autre...
Enfin, je sais bien que nous ne légiférons pas aujourd'hui pour l'éternité,
puisque une refonte prochaine de la loi de 1984 est annoncée. Elle est
souhaitable et à faire... en dehors de l'urgence !
Mais pourquoi ne pas traduire tout de suite dans la loi l'ensemble du régime
de la libre circulation des éducateurs sportifs, d'autant qu'il est déjà
applicable ? Et, surtout, pourquoi ne faire les choses qu'à moitié ?
Si ce régime est déjà applicable, certaines instances juridiques profitent
d'un hiatus : celui qui existe entre la loi de 1984 et celle de 1992 pour
renvoyer les dossiers et fâcher la plupart des professionnels français qui,
eux, ont des diplômes.
Le dispositif proposé comporte aussi quelques faiblesses.
En premier lieu, il introduit dans la loi un article nouveau et une nouvelle
procédure de déclaration, alors que le décret de 1996 se fonde évidemment sur
les textes en vigueur. Si l'on veut lui donner une base légale, le plus simple
est, me semble-t-il, de lui laisser les bases qu'il a déjà, notamment la
procédure de déclaration prévue à l'article 47-1.
En deuxième lieu, ce nouvel article ne fait pas référence aux interdictions
professionnelles que l'article 43 oppose aux candidats aux professions
d'éducateur sportif. C'est une lacune grave, car cela veut dire que des
personnes condamnées pour crime, pour infractions sexuelles ou pour trafic de
stupéfiants pourraient se réclamer du régime de la libre prestation de
services.
En troisième lieu, la proposition de loi emprunte des voies bien tortueuses,
et assez hasardeuses, pour prévoir la sanction du défaut de test.
Je rappelle que le défaut de déclaration est, lui, déjà sanctionné, et par des
peines qui permettent la comparution immédiate des délinquants s'ils sont pris
en flagrant délit.
En revanche, un prestataire de services qui aurait effectué une déclaration,
mais qui n'aurait pas passé le test technique qu'on lui aurait imposé, ne
pourrait être sanctionné immédiatement : il faudrait attendre qu'il exerce, lui
interdire d'exercer et il ne pourrait être sanctionné que pour violation de
cette interdiction. Evidemment, il risque d'avoir quitté la France bien avant
!
On propose donc de sanctionner le défaut de test. Mais on ne peut pas, sous
peine de discrimination contraire au droit européen, créer une sanction pour
défaut de titre qui ne frapperait que les ressortissants communautaires. Par
conséquent, on prévoit de sanctionner aussi toute personne qui exercerait sans
titre les activités pour lesquelles on peut imposer le test.
C'est là que le bât blesse ! En effet, d'abord, le texte est rédigé de telle
manière que n'importe quelle activité pourrait être visée. Une « activité
exercée dans un environnement spécifique » - il s'agit de la formulation qui a
été retenue par l'Assemblée nationale - cela peut être aussi bien la natation
que le ski, la randonnée pédestre dans le Val de Loire ou la plongée
sous-marine en Corse...
Un premier problème se pose donc : la loi crée un délit, mais ne le définit
pas comme l'article 34 de la Constitution et le principe de légalité des délits
et des peines imposent au législateur de le faire.
On répond à cela que l'on sait bien que les activités visées, ce sont les cinq
pour lesquelles on peut imposer un test de capacité aux prestataires de
services communautaires. Certes, encore que cela ne dispense pas le législateur
d'exercer sa compétence. Mais cela pose alors un second problème, celui de
l'égalité devant la loi. Pourquoi cela serait-il un délit d'enseigner sans
diplôme le ski de fond, plutôt que le bobsleigh, le parapente, le rafting, le
tir ou le vol à voile ?
J'ajoute que, à l'échelon national, l'intérêt pratique de sanctionner le
défaut de diplôme est nul, car il y aurait concours d'infraction avec le défaut
de déclaration.
Voilà pourquoi, mes chers collègues, nous vous proposerons une autre solution,
qui ne présente pas les mêmes inconvénients, pour permettre de sanctionner le
défaut de test.
Ce que nous proposons, c'est d'opposer une interdiction automatique, et
immédiatement sanctionnable, d'exercer son activité à toute personne qui aurait
effectué la déclaration requise, mais qui ne remplirait pas les conditions
légales - diplôme ou test - pour exercer l'activité déclarée.
J'en viens enfin à l'article 4, qui résulte d'un amendement du Gouvernement.
Nous examinerons tout à l'heure son contenu dans le détail. Je me bornerai à
dire, pour l'instant, qu'il restreint le droit à l'information sportive tel que
l'Assemblée nationale et le Sénat l'avaient défini en plein accord en 1992 - un
accord qui n'était alors pas plus facile à trouver qu'aujourd'hui. Nous étions
dans la même situation politique. En outre, il donne compétence aux fédérations
sportives pour définir les mesures d'application de la loi, selon une
conception assez originale de l'exercice du pouvoir réglementaire.
Mais je voudrais insister à présent sur un autre aspect de la question, et je
le fais, mes chers collègues, avec gravité.
Personne n'ignore, madame la ministre, les pressions indécentes qu'ont
exercées et qu'exercent encore sur le gouvernement français M. Mosley,
président de la Fédération internationale de l'automobile, et son
vice-président, M. Ecclestone, qui est aussi le président de la Formula One
Administration Ltd, la FOA, détentrice des droits d'exploitation des
compétitions du sport automobile.
Personne n'ignore que M. Ecclestone est prêt à tout pour défendre le caractère
absolu du monopole qu'il détient, un monopole d'ailleurs contesté, comme celui
de la Fédération internationale de l'automobile, la FIA, par la Commission
européenne, puisqu'il est convoqué, chacun le sait - les journaux en ont
suffisamment parlé - à Bruxelles.
La FOA, qui s'appelait alors la FOCA - Formula One Constructors Association -
a déjà été condamnée par les tribunaux français pour atteinte au droit à
l'information : elle estime donc plus simple que l'on change une loi qui ne lui
convient pas. C'est ce qu'elle a essayé de faire avec nos collègues belges qui,
eux, ont porté plainte auprès de la Cour de justice des Communautés
européennes.
Nous sommes très conscients, madame la ministre, de la situation dans laquelle
vous vous trouvez et nous ne demandons, sachez-le, qu'à vous soutenir. Mais
comment ?
Nous pensons que, dans de telles circonstances, le moyen le plus efficace dont
nous disposions à cet effet, c'est d'affirmer que, dans de semblables conflits,
l'intérêt général et les principes de notre droit doivent l'emporter sur des
intérêts particuliers.
M. Raymond Courrière.
Très bien !
M. François Lesein,
rapporteur.
C'est pourquoi nous demanderons au Sénat de ne pas revenir
sur la proposition équilibrée qu'il avait prise en 1992.
Monsieur le président, mes chers collègues, la commission des affaires
culturelles vous demande d'approuver la proposition de loi, sous réserve de
l'adoption des amendements qu'elle vous propose.
(Applaudissements sur les
travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
J'informe le Sénat que la commission des affaires culturelles m'a fait
connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats
qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte
paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en
discusssion de la proposition de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai
réglementaire.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Charmant.
M. Marcel Charmant.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, le texte dont
nous débattons aujourd'hui ne peut que bénéficier de toutes les cautions. Il
vise en effet à pallier, dans l'urgence, des situations de vide juridique et à
améliorer les conditions de sécurité lors de manifestations ou de pratiques
d'activités sportives, sans présupposer - vous l'avez confirmé - du contenu du
futur projet de loi sur le sport sur lequel vous vous êtes déjà exprimée et
dont vous avez annoncé le dépôt pour les prochains mois.
De l'application rapide du dispositif de ce texte dépendent, en effet, le bon
déroulement de la saison de ski, de la Coupe du monde de football, notamment,
et surtout la survie du Grand prix de France de Formule 1.
Notre rapporteur, dont je veux saluer la compétence et le travail, souligne
que « les lois portant diverses mesures constituent un exercice difficile, et
que l'on s'aperçoit trop souvent, après coup, qu'elles n'ont apporté que des
solutions imparfaites, voire un peu improvisées », et qu'en matière législative
l'urgence est rarement bonne conseillère.
Il y a du vrai dans cette affirmation, mais je ne peux m'empêcher de penser
que, dans une société qui évolue - et qui plus est lorsqu'elle évolue vite -
les gouvernements, le législateur sont contraints à ce genre d'exercice dans
l'intérêt général. Et il n'est pas certain que, dans ces moments-là, on
légifère moins bien.
Le texte d'aujourd'hui nous montre que, dans la législation existante, il y
avait quelques imperfections, quelques lacunes. C'est bien normal car le droit
ne peut être figé.
Je serai donc beaucoup moins critique que M. le rapporteur sur les
dispositions contenues dans cette proposition de loi, et je reviendrai
successivement sur ces différents points que je viens de citer.
Tout d'abord, à propos de la Coupe du monde de football, je me félicite du
très grand soin qui entoure sa préparation. L'inauguration du Stade de France,
la semaine dernière, nous a montré l'excellence de l'organisation qui entoure
la préparation de cette manifestation.
Les dispositions contenues dans la proposition de loi oeuvrent dans le même
sens.
Première mesure urgente de bon sens : le report de la date butoir
d'homologation des enceintes sportives. Prévue, aux termes de la loi Bredin du
13 juillet 1992, pour le 24 janvier 1998 au plus tard, l'homologation des
enceintes sportives sera reportée au 1er juillet 2000, en vertu de l'article
1er de la proposition de loi.
La principale conséquence de ce report sera de permettre le bon déroulement de
la Coupe du monde, en toute légalité : en effet, à l'heure actuelle, pas même
20 % de l'ensemble des enceintes « homologables » se trouvent en situation
régulière. Grâce au report prévu, il n'y aura pas de problème de tenue de
certains matches de la Coupe du monde dans des enceintes non encore homologuées
ou en passe de l'être.
A ce stade de notre débat, je souhaite vous dire, madame la ministre, qu'il
serait bon et utile d'associer les élus des collectivités territoriales à la
réflexion sur la sécurité et l'homologation des installations sportives en
particulier, et, d'une façon générale, des installations accueillant du public,
afin de définir les réglementations et les normes.
En effet, les collectivités locales sont directement concernées, d'abord au
titre de la sécurité, mais aussi au titre des investissements à réaliser. Et
l'on a quelquefois tendance, à partir d'un événement isolé, à tirer des
conclusions générales que je qualifierai d'exorbitantes.
Le deuxième problème que permet de régler la proposition de loi concerne
également la Coupe du monde : il s'agit des exactions commises hors des
enceintes sportives et, plus particulièrement, des actes de violence qui ont
lieu à l'occasion des matches de football, mais en dehors des stades. Jusqu'à
présent, notre législation prévoit les actes de violence commis à l'intérieur
des stades et nous disposons d'un arsenal juridique pour sanctionner les
personnes coupables de tels faits ; en revanche, tout ce qui se passe en dehors
des enceintes sportives fait l'objet d'un vide juridique.
Tirant notamment les conséquences des récentes recommandations du Comité
permanent de la convention européenne sur la violence et les débordements de
spectateurs lors des manifestations sportives, la proposition de loi propose
d'étendre le champ d'application de notre législation aux infractions commises
« lors du déroulement ou de la retransmission en public d'une manifestations
sportive ».
Tout cela me semble de très bon augure pour le déroulement de la Coupe du
monde dans un maximum de sérénité. En effet, de très nombreux matches seront
retransmis hors enceinte, sur écran géant, et nombreux aussi seront les
spectateurs sportifs qui emprunteront les transports en commun pour se rendre
sur les lieux concernés. Le texte adopté par l'Assemblée nationale me semble
répondre parfaitement à ces préoccupations : il améliore le texte initial, en
prenant en compte le lien de « relation directe » avec la manifestation
sportive.
Enfin, j'en viens au dernier point concernant la Coupe du monde de football :
la réglementation des exclusivités des chaînes de télévision, lors des
retransmissions d'événements sportifs.
L'amendement d'origine gouvernementale adopté par l'Assemblée nationale en
première lecture permettra aux fédérations sportives de définir, avec l'accord
du ministre chargé des sports et après avis du Conseil supérieur de
l'audiovisuel, les modalités d'accès et les lieux autorisés aux journalistes et
à leurs équipes.
Par ailleurs, le nouvel article 4, introduit dans le texte par cet amendement,
laisse la possibilité de fixer des limites à la libre circulation des
journalistes, compte tenu « des contraintes liées à la sécurité du public et
des sportifs, et aux capacités d'accueil ».
Ce nouveau dispositif, qui modifie la loi Bredin de 1992, laquelle alignait le
droit à l'information en matière sportive sur le droit commun, sur le principe
du droit de citation, permettra d'apporter une réponse précise et adaptée aux
manifestations sportives dans leur réalité actuelle. A titre d'exemple, cela
aidera à résoudre le problème épineux des quelque 8 000 demandes
d'accréditation déjà enregistrées pour la Coupe du monde et d'éviter que
certaines zones sensibles des stades ne soient envahies au-delà du
raisonnable.
Je termine mon propos quant à la Coupe du monde, mais je reviendrai tout à
l'heure sur les dispositions de l'article 4 pour ce qui a trait à un autre
secteur sportif qui me tient tout particulièrement à coeur, je veux parler du
Grand prix de France de Formule 1.
L'article 3 tend à renforcer la réglementation applicable aux ressortissants
étrangers de la Communauté européenne qui exercent, de façon temporaire,
l'activité d'éducateur sportif. Il est temps de mettre fin à ce traitement «
deux poids, deux mesures », selon que l'on est citoyen français ou
ressortissant étranger. Je me réjouis du dispositif proposé, et je souhaite que
l'application du nouveau texte soit, cette fois-ci, effective.
J'en viens au dernier point que je souhaite aborder : il s'agit des circuits
destinés aux sports mécaniques. Deux articles concernent ce type d'enceintes
sportives : l'article 1er et l'article 4.
La modification opérée par l'article 1er de la proposition de loi répond à une
nécessité : la loi Bredin, en juillet 1992, a fixé différents seuils de places
en salle ou en plein air correspondant aux différents degrés d'homologation
selon la capacité d'accueil des stades. Les limites de ce dispositif viennent
du fait que cette loi n'appréhendait que les seuls places assises puisque le
législateur, à l'époque, souhaitait d'abord apporter une réponse à la situation
découlant de la catastrophe de Furiani et visait donc à assurer la sécurité des
spectateurs assis des matches de football.
Aujourd'hui, il convient de tenir compte de la spécificité de certaines
enceintes, notamment des circuits destinés aux sports mécaniques ; la
proposition de loi le fait en prévoyant une procédure d'homologation
ad
hoc
pour ce type d'enceintes où le public est souvent appelé à rester
debout ou à se déplacer durant les épreuves.
Je terminerai mon intervention en revenant sur le dispositif de l'article 4,
que j'ai abordé tout à l'heure à propos de la Coupe du monde mais qui revêt une
importance capitale également pour la Formule 1, puisque son dispositif permet
d'assurer la pérennité du Grand prix de France. J'indique donc que les
sénateurs socialistes ne sauraient cautionner l'amendement de suppression de
cet article que propose le rapporteur de la commission des affaires
culturelles.
J'ai lu avec attention le rapport de M. François Lesein ainsi que le compte
rendu des débats de la commission des affaires culturelles, et je comprends le
souci des membres de celle-ci d'assurer le droit d'accès du public à
l'information sportive et des journalistes aux enceintes sportives,
conformément aux dispositions de la loi de 1984.
Nul n'ignore, en effet, que cette loi renvoie les conditions d'application à
un décret en Conseil d'Etat, après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel,
le CSA, décret qui, comme cela a été relevé à l'Assemblée nationale la semaine
dernière, n'a toujours pas été pris.
Or le Conseil d'Etat a récemment fait savoir que les dispositions à prendre
étaient du ressort de la loi ; c'est la raison pour laquelle nous en débattons
aujourd'hui.
On ne peut prétendre que l'article 4 adopté par l'Assemblée nationale, revient
sur les dispositions du texte de 1992. En effet, cet article réaffirme les
principes énoncés en 1992, à savoir le droit d'exploitation d'une manifestation
ou d'une compétition sportive pour l'organisateur, le droit à l'information du
public par les autres services de communication audiovisuelle, enfin le droit
de citation à titre gratuit.
En outre, il organise l'accès des journalistes et des personnels des
entreprises d'information dans le cadre des contraintes liées à la sécurité du
public et des sportifs, ainsi qu'aux capacités d'accueil.
Le texte organise ces dispositions en prévoyant un règlement qui doit être
approuvé,
a priori
, par le ministre chargé des sports, après avis du
CSA, et officiellement publié. Il précise les conditions de captation des
images distinctes de celles de la manifestation ou de la compétition sportive
proprement dite, et cela dans la logique du droit reconnu à l'exclusivité
accordée.
Il s'agit donc d'un texte de cohérence et de précision des principes que
l'Assemblée nationale et le Sénat avaient édictés dans la loi de 1992.
Telles sont les réflexions que m'inspire le texte dont nous débattons cet
après-midi. Les sénateurs socialistes l'approuvent dans sa globalité et
voteront donc pour cette proposition de loi qui permettra d'assurer, de façon
générale, plus de sécurité dans le secteur de la pratique et du spectacle
sportifs.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Bordas.
M. James Bordas.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition
de loi que nous examinons aujourd'hui est digne d'intérêt à double titre :
d'une part, parce qu'elle s'inscrit dans la perspective d'une réforme
d'ensemble de la législation sur le sport et, d'autre part, parce qu'elle
contient des mesures urgentes qu'il convient de ne pas négliger.
Le monde sportif espère une véritable loi d'orientation qui permette d'aborder
les principaux problèmes qui se posent aujourd'hui : statut des bénévoles,
sécurité, fiscalité.
Madame la ministre, vous nous avez annoncé un important projet de loi sur le
sport pour l'automne prochain.
Soyez assurée que le groupe des Républicains et Indépendants l'examinera avec
beaucoup d'attention, tant sont grandes les attentes dans ce domaine.
Soyez également assurée qu'il sera particulièrement attentif à un juste
partage des responsabilités financières entre l'Etat et les collectivités
locales, qui doivent souvent assumer seules la réhabilitation des installations
sportives.
Dans l'attente d'une réforme globale, cette proposition de loi tend à résoudre
certains problèmes urgents, principalement motivés par la tenue, en France, de
la Coupe du monde de football.
Sécurité des installations sportives, accueil et sécurité du public,
encadrement des activités physiques et sportives dans les disciplines classées
à risque sont les trois principaux sujets traités par ce texte.
Le Gouvernement a souhaité en ajouter un quatrième au dernier moment, sous
forme d'un article additionnel, qui concerne le développement des exclusivités
audiovisuelles en matière sportive et de droit à l'information.
A cet égard, permettez-moi de regretter la précipitation avec laquelle il nous
est demandé de légiférer, à quelques mois d'événements sportifs majeurs pour
notre pays.
Je comprends que le Gouvernement souhaite que la Coupe du monde de football se
déroule le mieux possible - nous le souhaitons tous - mais ce n'est pas une
raison pour proposer à la représentation nationale l'adoption, à la va-vite, de
mesures insuffisamment précises ou remettant brusquement en cause des
équilibres établis dans la concertation et ajustés au cours du temps.
Le législateur se doit de contenir les ardeurs, voire les excès de ceux dont
les intentions sont louables mais les actes précipités.
M. Pierre Mauroy.
Oh !
M. James Bordas.
Tel doit être, notamment, le rôle du Sénat, et je tiens, à ce propos, à
souligner la qualité du travail de la commission des affaires culturelles, en
particulier de son rapporteur, qui a su examiner cette proposition de loi avec
la sagesse et le recul nécessaires.
En effet, si ce texte est modeste, il mérite cependant d'être précisé,
simplifié, voire allégé d'un certain nombre de dispositions qui ne semblent pas
indispensables ou risquent, dans la pratique, de paraître trop complexes et
donc inefficaces.
L'article 1er de la proposition de loi permet de déroger à l'exigence de
places uniquement assises dans les tribunes pour permettre le déplacement des
spectateurs lors des compétitions auto-moto.
Nous pouvons comprendre les motivations d'une telle disposition. Cependant,
nous ne devons pas oublier que la loi de 1984 a créé une obligation de places
assises dans un souci de sécurité qui doit rester notre priorité.
J'approuve donc entièrement la décision de notre commission, qui a souhaité
maintenir l'exigence de places assises, y compris lors des compétitions
auto-moto.
De plus, il ne paraît pas judicieux de créer une exception pour les circuits
de vitesse au motif que les spectateurs souhaitent se déplacer le long de ces
circuits et changer de place pendant la compétition.
Comme l'a très justement souligné M. le rapporteur, les organisateurs d'autres
manifestations sportives risqueraient alors de faire valoir les mêmes arguments
afin d'obtenir, eux aussi, une dérogation.
L'article 1er vise également à un nouveau report - jusqu'au 1er janvier 2000 -
de la date butoir d'homologation des stades de plus de 3 000 places, date
butoir qui avait déjà été précédemment repoussée au 24 janvier 1998.
Le groupe des Républicains et Indépendants approuve un tel report. Lorsqu'on
sait que seulement 9 % des 821 enceintes recensées sont actuellement
homologuées, cette mesure semble de bon sens.
Ce délai supplémentaire devrait permettre au Parlement d'aboutir à une
solution équilibrée mais provisoire.
En effet, le report de la date butoir d'homologation des stades de plus de 3
000 places ne résout pas tous les problèmes que rencontrent les collectivités
locales pour financer la réhabilitation des installations existantes. La
question se pose en termes non seulement de délais mais également de
financement.
Notre pays souffre d'un excès de réglementation. Dans le domaine sportif comme
dans beaucoup d'autres, l'Etat a voulu ajouter une nouvelle procédure
d'homologation aux procédures existantes au lieu de réformer ces dernières et
de les faire pleinement appliquer.
Mieux vaut être modeste en la matière plutôt que d'adopter des réglementations
trop lourdes dont on finit par reporter l'application en raison de
l'impossibilité de respecter les délais prévus.
L'article 2 de la proposition de loi tend à incriminer certains faits
répréhensibles accomplis à l'extérieur des stades en étendant la possibilité de
prononcer une peine complémentaire d'interdiction de stade pendant une durée
maximale de cinq ans.
J'approuve, sur ce point, la position de notre commission, qui donne une
définition plus précise des conditions dans lesquelles sera appliquée cette
peine.
La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale prévoit en effet
d'étendre le champ de cette mesure à toutes les infractions commises « en
relation directe » avec une manifestation sportive. Là encore, et malgré de
bonne intentions, une rédaction imprécise risquerait d'aboutir à des effets
inverses et limiterait l'efficacité de la peine.
Notre position sur l'article 3 procède de la même logique d'efficacité.
Cet article vise à subordonner l'exercice de certaines activités dangereuses
au passage d'un test pour les moniteurs européens lorsqu'il existe une
différence de qualification entre les brevets étrangers et français. Il tend
également à soumettre l'exercice d'activités se déroulant dans un milieu
spécifique au passage d'un test de connaissance de cet environnement.
Sont concernés, comme cela a été rappelé, le ski, l'alpinisme, la plongée, le
parachutisme et la spéléologie.
La tragédie qui vient de se produire dans les Alpes ne peut que nous inciter à
renforcer les règles d'encadrement des activités sportives, surtout lorsqu'il
s'agit d'enfants. Ce souci de sécurité passe notamment par un contrôle strict
des capacités des ressortissants européens qui souhaitent exercer une activité
d'encadrement sportif en France.
Cependant, là encore, l'efficacité passe par la définition de règles simples
et facilement applicables. A cet égard, le dispositif proposé par la commission
me paraît mieux adapté que celui qui a été adopté par l'Assemblée nationale.
Il permettra à l'autorité administrative de sanctionner plus facilement les
ressortissants européens qui exercent une activité d'encadrement sportif sans
avoir satisfait à une épreuve de contrôle de leurs capacités.
L'article 4, enfin, donne aux fédérations sportives la possibilité de réserver
à un cessionnaire exclusif le droit de retransmission de la manifestation
sportive elle-même. Les autres médias chargés d'une mission d'information du
public devront se contenter de brefs extraits de la manifestation, prélevés
gratuitement sur les images réalisées par le cessionnaire.
Mes chers collègues, il s'agit là d'une question essentielle, qui touche au
principe du pluralisme del'information. Elle ne peut être résolue à l'occasion
d'un amendement de dernière minute, voté dans l'urgence, qui limite le droit de
citation et le droit d'accès des journalistes aux enceintes sportives.
Elle doit, au contraire, faire l'objet d'une large concertation et d'une étude
de la législation actuelle, de ses limites et des améliorations qui peuvent y
être apportées.
Dans ces conditions, je me félicite de la décision de la commission de
supprimer l'article 4, qui risquerait de conduire à des pratiques détestables
et qui nuirait au bon déroulement des prochains événements sportifs.
Plutôt que de légiférer dans l'urgence sur des questions qui nécessitent une
analyse plus profonde, le Gouvernement serait à mon sens mieux inspiré de
proposer des solutions concrètes aux problèmes pratiques qui se poseront lors
de la prochaine Coupe du monde de football. Je pense notamment aux transports
en commun, que nos concitoyens sont invités à emprunter pour se rendre au Stade
de France.
Je souhaiterais ainsi connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre
afin de garantir que la libre circulation des spectateurs ne sera pas entravée
par un quelconque mouvement de grève.
Cette interrogation étant posée, j'indique que le groupe des Républicains et
Indépendants approuvera la proposition de loi assortie des amendements de la
commission, c'est-à-dire modifiée dans le sens d'une plus grande sagesse et
d'une meilleure efficacité.
(Applaudissements sur les travées des
Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi
d'abord de vous faire part, à l'annonce de l'exécution, cette nuit, au Texas,
de Karla Tucker, de mon émotion et de mon indignation devant ces pratiques d'un
autre temps,...
M. François Lesein,
rapporteur.
Indignes d'un pays qui prétend défendre les droits de l'homme
!
Mme Hélène Luc.
... qui devront bien disparaître un jour.
(Applaudissements sur les travées
du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées
socialistes. - M. le rapporteur applaudit également.)
L'idée de justice prend sa source dans le contournement de la vengeance
personnelle. L'exécution capitale va à l'encontre de ce principe fondamental.
Voilà pourquoi de telles pratiques devront bien, je le répète, disparaître.
J'en viens maintenant à ce qui fait l'objet de notre débat.
Voilà juste une semaine, nous étions 80 000 spectateurs enthousiastes,
rassemblés pour l'inauguration du magnifique Stade de France, à vivre avec des
millions de téléspectateurs le départ d'une grande aventure.
Qu'ajouter aux réactions et commentaires unanimes qui ont suivi cet événement,
saluant comme je le fais moi-même la grande réussite, sur tous les plans, de
cette réalisation et de cette première ?
Ce grand stade honore la France, faisant de notre pays le siège d'un événement
sportif considérable qui va faire vibrer des milliards d'habitants de la
planète pendant trois semaines.
Permettez-moi de voir dans cet équipement un exceptionnel outil
d'épanouissement humain pour notre pays, ce qui confirme la nécessité de faire
vivre ce stade par la suite.
J'ai parlé de réussite sur tous les plans : l'architecture et l'organisation -
notamment en ce qui concerne les transports publics, qui ont fait la preuve de
leur efficacité pour acheminer en peu de temps des dizaines de milliers de
spectateurs - se conjuguent avec le formidable engouement de notre jeunesse
pour cette grande fête de la fraternité et des coopérations multiples.
Le Stade de France témoigne aussi de la réussite d'une démarche singulière en
matière de sécurité : dès le départ, il s'est agi de construire une structure
telle qu'elle crée les conditions d'une ambiance conviviale, ouverte, non
agressive, en se souciant d'intégrer pleinement l'environnement humain du
site.
Je vois là une des clés de la réflexion et de l'action sur ces questions de
violence et de sécurité dans les enceintes sportives qui nous occupent.
Vous avez tout à l'heure rappelé à juste titre, madame la ministre, le travail
accompli par les enseignants et les élèves du collège Henri-Matisse à
Choisy-le-Roi, dans le Val-de-Marne, qui démontre que la discipline et l'esprit
civique passent avant tout par l'éducation et par la responsabilisation des
jeunes.
Le drame survenu mercredi dernier dans le massif des Orres a suscité d'autres
moments d'émotion intense, mais dans le sens du chagrin : ce fut l'hommage
rendu par la foule aux jeunes victimes de Montigny-le-Bretonneux et à leurs
familles endeuillées.
A ces familles, à tous les proches des jeunes et des accompagnateurs victimes,
je souhaite dire que nous tous, élus nationaux ou locaux, responsables
d'associations, avons un devoir particulier : faire en sorte que de tels drames
soient évités.
S'agissant de la pratique de la haute montagne, peut-être conviendrait-il de
reconsidérer la réglementation des pratiques sportives en altitude, notamment
l'accès aux hautes terres.
Certes, pour nombre de nos concitoyens, la montagne symbolise la liberté, au
point que les prescriptions des maires des communes de montagne sont peu
respectées ou ne le sont même pas du tout. Cet espace de liberté exige pourtant
un grande vigilance afin de prévenir le plus possible les éventuels accidents.
A l'évidence, la mise en place d'une réglementation stricte s'impose.
Je reviens au texte en discussion, sans m'en être d'ailleurs vraiment éloignée
puisque les articles 2 et 3 de cette proposition de loi ont directement trait
aux problèmes de sécurité.
Ce texte répond à une actualité pressante en matière de conformité des
équipements sportifs : nous sommes en effet à quelques mois de la Coupe du
monde de football.
Après la tragédie de Furiani, en 1992, une procédure d'homologation sévère -
mais c'était nécessaire - fut mise en place pour les enceintes sportives.
Le délai de deux ans initialement ouvert pour homologuer les enceintes
sportives fit l'objet d'un premier report en 1995, la date butoir étant alors
repoussée au 24 janvier 1998. Il est clair que, au moment où nous parlons,
l'homologation n'est pas achevée ! Cela a été dit, seules 9 % des enceintes
homologables sont effectivement homologuées.
Le délai d'homologation doit donc être une nouvelle fois reporté - vous avez
donc eu tout à fait raison, madame la ministre, de faire discuter ce texte par
le Parlement - faute de quoi des manifestations sportives ne pourraient avoir
lieu, y compris certaines de celles qui entrent dans le cadre de la Coupe du
monde de football.
Il nous faut néanmoins nous interroger sur les raisons du faible nombre
d'enceintes homologuées aujourd'hui.
Le nombre de dossiers incomplets s'explique, dans une large mesure, par le
coût prohibitif pour les collectivités locales de cette mise en conformité.
Celle-ci est évidemment nécessaire, mais je sais, pour connaître un certain
nombre d'exemples dans le Val-de-Marne, que ce coût est réellement très
élevé.
En dépit des efforts accomplis par votre ministère pour la mise en sécurité,
en dépit de la création d'un fonds spécial, il reste beaucoup à faire si l'on
ne veut pas devoir proroger encore le délai d'homologation en juillet 2000.
En l'état actuel de la législation, le report de la date d'entrée en vigueur
de l'homologation conduit les organisateurs de manifestations sportives à agir
sans disposer d'un encadrement juridique satisfaisant sur cette question de la
sécurité, qui est pourtant essentielle.
De nombreux organisateurs de manifestations sportives évoquent des lenteurs,
voire des « errements » dans l'obtention des autorisations administratives.
Peut-être conviendrait-il, sans pour autant transiger sur le respect des
normes de sécurité, de rendre plus cohérente l'obtention des autorisations
administratives ; celles-ci doivent être accordées sur la base de règles
claires.
L'article 2 prévoit une extension de la peine complémentaire d'interdiction de
stade aux infractions commises à l'extérieur des enceintes sportives.
Lors de l'examen par le Sénat de la disposition initiale, en octobre 1993,
nous avions émis les plus vives réserves quant à la portée réelle d'une telle
mesure. Depuis, de nombreux événements sont venus nous rappeler que la violence
imprègne des pans entiers de notre société.
Il s'agit, certes, d'un phénomène complexe, mais nombre de ses facteurs nous
sont connus.
Les manifestations sportives, qui devraient demeurer avant tout des occasions
de liesse partagée, des moments festifs, autour de la performance des athlètes,
sont aussi parfois le prétexte à des phénomènes de violence.
Cette violence, si nous devons la réprimer de manière sévère, nous devons
avant tout la prévenir.
La peine d'interdiction de stade est, à l'heure actuelle, rarement prononcée.
De nombreuses dispositions du code pénal permettent, en outre, de réprimer les
responsables de la violence.
Au mieux peut-on considérer que l'extension de ce régime de « double peine » à
l'extérieur des enceintes sportives aura une valeur dissuasive. Quoi qu'il en
soit, ce « symbole » ne répond que très partiellement aux mesures d'éducation
et de prévention auxquelles il nous faut réfléchir avec le monde associatif
sportif, pour combattre la violence dans et hors des stades.
Aucune piste ne doit être négligée et nous sommes à vos côtés, madame la
ministre, pour rendre, selon vos propos, les manifestations sportives plus «
conviviales ».
J'évoquais, en entamant mon intervention, une actualité tragique. L'article 3
y a directement trait puisqu'il vise l'exercice d'activités d'éducateur
sportif.
Cette question est à ce point importante que, en 1997, la Commission
européenne, tout en restant attachée au principe de la reconnaissance des
diplômes, a admis la possibilité pour notre pays de vérifier, pour certaines
activités, la capacité des éducateurs sportifs ressortissants d'autres pays de
l'Union européenne.
Certes, cette mesure est temporaire puisqu'il est prévu qu'elle ne
s'appliquera que jusqu'au 31 juillet 1999.
Nous souhaitons, pour notre part, qu'elle demeure effective au-delà de cette
date, compte tenu des impératifs de sécurité auxquels elle répond pour des
disciplines sportives aussi périlleuses que le ski, l'alpinisme, la plongée, le
parachutisme et la spéléologie.
Le renforcement de cette disposition dans le texte que nous examinons reçoit
donc notre plein accord.
J'en viens à présent à l'article 4, qui a été inséré dans la proposition de
loi par un amendement du Gouvernement.
Cet article s'efforce de répondre à une préoccupation importante, dans la
mesure où il garantit les droits des cessionnaires en matière d'audiovisuel
tout en garantissant les conditions de travail des services de communication,
qui n'ont pas la propriété de ces droits.
Il convient de légiférer au plus vite pour apporter une réponse à cette
question, qui met en conflit liberté de l'information et droit de cession des
exclusivités, et divise le monde audiovisuel et les fédérations sportives.
La commission propose la suppression de cet article 4, lui préférant
l'actuelle législation dont on connaît pourtant les limites.
Le débat appelle donc quelques éclaircissements, que vous ne manquerez
certainement pas d'apporter, madame la ministre.
La proposition de loi que nous examinons, bien que peu fournie en articles, se
trouve au coeur des problématiques relatives au mouvement sportif. Sécurité des
équipements, réglementation en matière d'encadrement des activités, violence,
audiovisuel sont autant de thèmes bien lourds qui, à n'en pas douter, seront
abordés plus longuement lors de la réforme de la loi sur le sport que vous nous
avez annoncée tout à l'heure.
Sur toutes ces questions, je crois pouvoir dire, madame la ministre, que vous
nous trouverez à vos côtés en même temps que l'ensemble des acteurs du
mouvement sportif pour tenter de répondre aux problèmes auxquels nous sommes
confrontés.
Pour ce qui nous concerne plus directement aujourd'hui, nous accorderons nos
suffrages à la première pierre de l'édifice que constitue le présent texte.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen,
ainsi que sur certaines travées socialistes.)
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Mesdames, messieurs les sénateurs,
je n'entrerai pas dans le détail des argumentations particulièrement riches qui
ont été exposées dans vos interventions : la discussion des articles et
l'examen des amendements me permettront d'y revenir. Je m'en tiendrai à trois «
réactions » de caractère général.
En ce qui concerne, d'abord, la déclaration d'urgence dont a fait l'objet la
présente proposition de loi, croyez bien, monsieur le rapporteur, que je
préférerais que la législation actuelle nous autorise à prendre notre temps
pour construire dans la plus large des concertations, avec les citoyennes, les
citoyens et leurs représentants au Sénat et à l'Assemblée nationale, la loi
d'orientation sur le sport, la loi sur le bénévolat, la loi sur la santé des
sportifs et la loi contre le dopage.
Mais la législation actuelle étant ce qu'elle est, les événements qui
s'annoncent, et notamment la Coupe du monde de football, nous obligent, pour
des raisons de sécurité sur lesquelles nous reviendrons lors de la discussion
de l'article 3, à légiférer dans l'urgence.
M. René-Pierre Signé.
C'est l'héritage !
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
L'urgence n'est d'ailleurs pas
systématiquement contradictoire avec la qualité et avec l'efficacité, et je
pense que le débat d'aujourd'hui le confirmera.
En ce qui concerne ensuite les pressions, la situation est en effet tout à
fait préoccupante, et mes préoccupations quant au pouvoir des fédérations
internationales ne s'arrêtent pas à la Formule 1 !
Dans bien d'autres disciplines, les fédérations internationales s'arrogent des
droits et portent ainsi atteinte au mouvement sportif français dans son
ensemble. Nous connaissons l'exemple d'un récent championnat du monde organisé
par une fédération française et ayant eu un grand succès médiatique : la
fédération française n'en a pas moins enregistré un déficit parce que c'est la
fédération internationale qui avait obtenu tous les contrats.
Pour éviter que les pressions internationales ne portent atteinte à
l'intégrité du mouvement sportif français, nous devons nous doter d'une
législation qui ne laisse pas la porte ouverte aux pressions internationales,
c'est-à-dire une législation précise, qui donne au mouvement sportif français
le pouvoir de se défendre et les moyens de réglementer son fonctionnement.
C'est le but de l'article 4.
M. Marcel Charmant.
Très bien !
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
En ce qui concerne enfin la Coupe
du monde, les stades prévus comme sites sont ou seront homologués dans les
prochains jours : l'Etat a investi suffisamment d'argent public dans la
réalisation des travaux nécessaires pour que nous en soyons certains !
A cet égard, je partage un souci qui a été exprimé à plusieurs reprises : il
faut établir les responsabilités de chacun dans la mise aux normes des
enceintes sportives. On a reporté l'homologation à l'an 2000, mais si l'on ne
se penche pas sur la question du financement et sur la clarification des
réglementations, on peut se donner rendez-vous pour un nouveau report !
M. François Lesein,
rapporteur.
On peut prendre date, en effet !
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
La question de l'homologation
appelle donc une réflexion de fond.
J'évoquerai un dernier point à propos de la Coupe du monde : à l'occasion de
l'inauguration du Stade de France, les services publics de notre pays, qu'il
s'agisse de la SNCF ou de la RATP, ont une nouvelle fois démontré leur grand
sens des responsabilités quant à leurs missions publiques.
Non seulement les transports ont bien fonctionné, mais la RATP et la SNCF ont
créé les conditions nécessaires pour qu'un public très large et souvent très
jeune emprunte les transports en commun en lui accordant la gratuité jusqu'au
Stade de France.
Je sais que dans plusieurs des villes de province qui accueilleront les matchs
de la Coupe du monde, les compagnies de transport urbain sont prêtes à adopter
la même démarche.
Vous parliez, mesdames, messieurs les sénateurs, de la nécessité d'assurer la
liberté de circulation du public. Je crois que l'on peut faire confiance aux
services publics en la matière !
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen,
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - I. - La dernière phrase du cinquième alinéa de l'article 42-1 de
la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion
des activités physiques et sportives est remplacée par deux phrases ainsi
rédigées :
« Seules des places assises peuvent être prévues dans les tribunes, à
l'exception de celles situées dans les enceintes affectées aux circuits de
vitesse accueillant des compétitions de véhicules terrestres à moteur ou de
bateaux à moteur, sous réserve que leur utilisation soit conforme à leur
destination et sur avis conforme des commissions spécialisées compétentes. Les
tribunes ne peuvent accueillir simultanément un nombre de spectateurs supérieur
au nombre de places dont elles disposent. »
« II. - Dans la première phrase du treizième alinéa du même article les mots :
"A l'expiration d'un délai de trois ans à compter de la date de
publication de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de
programmation relative à la sécurité" sont remplacés par les mots :
"A compter du 1er juillet 2000". »
« III. -
Supprimé. »
Par amendement n° 1, M. Lesein, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit le paragraphe I de cet article :
« I. - Dans la première phrase du cinquième alinéa de l'article 42-1 de la loi
n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des
activités physiques et sportives, après les mots : "dans l'enceinte",
sont insérés les mots : ", et dans chaque tribune,". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
Les auteurs de la proposition de loi ont souhaité introduire,
pour les circuits de vitesse, une exception à l'obligation de ne prévoir que
des places assises dans les tribunes, au motif que la durée des compétitions
conduit leurs spectateurs à se déplacer et à changer de tribune.
J'observe que cette obligation n'interdit aux spectateurs ni de se lever ni de
changer de tribune à leur gré.
Prévoir une exception pour permettre aux spectateurs des courses automobiles
de se déplacer ne me paraît pas, à cet égard, utile.
Ce n'est pas non plus souhaitable. Cette obligation est un moyen pragmatique
d'éviter l'entassement de spectateurs dans les tribunes. Les places assises
permettent, en effet, d'imposer pour chaque spectateur un minimum de 50
centimètres linéaires le long des gradins, tandis que, avec des places debout
et non matérialisées, c'est le régime du : « quand il y a de la place pour dix,
il y en a pour cent ». Et l'on sait ce que cela peut donner !
Il s'agit donc là d'un moyen simple pour assurer la sécurité des spectateurs,
qui ne nécessite, par ailleurs, aucun aménagement coûteux. L'obligation de ne
prévoir que des places assises dans les tribunes n'impose même pas des sièges
séparés. Elle suppose juste le marquage de places individualisées sur les
gradins.
Il n'y a donc pas lieu de revenir sur cette obligation, d'autant que, si nous
introduisons aujourd'hui une exception pour les circuits de vitesse, nous
risquons - cela a été dit - de devoir l'étendre, demain, aux nombreuses autres
disciplines, comme l'athlétisme ou les sports équestres, qui peuvent invoquer
exactement les mêmes motifs.
En conséquence, l'amendement n° 1 tend à supprimer les dispositions relatives
à cette exception.
Il reprend, en revanche, l'idée de fixer le nombre maximal de spectateurs qui
pourront être simultanément accueillis dans chaque tribune. Il n'est pas, en
effet, inutile, en particulier pour les compétitions au cours desquelles les
spectateurs se déplacent, de prévenir les risques d'entassement momentané dans
les tribunes.
Nous proposons à cet effet une nouvelle rédaction, qui s'insère dans le
dispositif relatif à l'arrêté d'homologation soumis au préfet.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Le Gouvernement est contre cet
amendement qui vise surtout à supprimer la dérogation à l'obligation de ne
prévoir que des places assises dans les tribunes.
Dans certaines compétitions, notamment sur les circuits de vitesse, le
comportement des spectateurs est lié au déroulement même de la compétition, qui
les amène à se déplacer. Ce n'est pas contradictoire avec la sécurité,...
M. René-Pierre Signé.
Oui ! Ils ne traversent pas la piste !
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
... d'autant qu'en l'état la
proposition de loi précise bien que le nombre des places reste limité dans
l'enceinte et dans chaque tribune.
Il n'y a donc pas remise en cause des conditions de sécurité, lesquelles sont
maintenues voire renforcées par la précision relative à la tribune.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, ainsi modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - Le premier alinéa de l'article 42-11 de la même loi est ainsi
rédigé :
« Les personnes coupables de l'une des infractions prévues aux articles 42-4,
42-5, 42-7, 42-7-1, 42-8, 42-9 et 42-10 ou de l'une des infractions prévues aux
articles 222-11 à 222-13, 322-1 à 322-4, 322-6, 322-11 et 433-6 du code pénal
lorsqu'elles ont été commises soit dans une enceinte sportive au cours du
déroulement d'une manifestation sportive, soit en relation directe avec cette
manifestation, encourent également la peine complémentaire d'interdiction de
pénétrer dans une ou plusieurs enceintes où se déroule une manifestation
sportive pour une durée qui ne peut excéder cinq ans. »
Par amendement n° 2, M. Lesein, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit cet article :
« Le premier alinéa de l'article 42-11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984
précitée est remplacé par les dispositions suivantes :
« Les personnes coupables de l'une des infractions prévues aux articles 42-4,
42-5, 42-7, 42-7-1, 42-8, 42-9 et 42-10 encourent la peine complémentaire
d'interdiction de pénétrer dans une ou plusieurs enceintes où se déroule une
manifestation sportive, pour une durée qui ne peut excéder cinq ans.
« Cette peine complémentaire est également applicable aux personnes coupables
de l'une des infractions définies aux articles 222-11 à 222-13, 322-1 à 322-4,
322-6, 322-11 et 433-6 du code pénal lorsque cette infraction a été commise
:
« 1° Dans une enceinte sportive lors du déroulement ou de la retransmission en
public d'une manifestation sportive ;
« 2° Lors de la retransmission en public d'une manifestation sportive dans un
lieu spécialement aménagé à cet effet ;
« 3° Aux abords d'une enceinte sportive ou d'un lieu défini au 2°, à
l'occasion de l'entrée ou de la sortie du public d'une manifestation sportive
ou de sa retransmission. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
La commission approuve l'objectif visé par les auteurs de la
proposition de loi d'étendre le champ d'application de la peine complémentaire,
prévue à l'article 42-11 de la loi du 16 juillet 1984, à des infractions
commises en dehors des enceintes sportives.
Elle n'a cependant pas souhaité retenir la notion « d'infraction commise en
relation directe avec une manifestation sportive ».
Cette notion introduit, en effet, un lien de causalité entre les infractions
commises et les compétitions sportives, lien qui est très discutable dans son
principe et difficile à interpréter dans la pratique. Par exemple, si des
casseurs se joignent à des supporters d'un match et les incitent à briser une
vitrine, pourra-t-on affirmer que le match est la cause de l'incident ?
Par ailleurs, cette notion ne fixe aucune limite spatiale et temporelle. Ainsi
devra-t-on considérer comme étant « en relation directe avec une manifestation
sportive » les incidents qui pourraient avoir lieu dans un café où un match est
retransmis à la télévision, qu'il soit situé à 500 ou à 1 000 kilomètres du
stade ? La simplicité de la formule est malheureusement facteur
d'incertitude.
Il faut, en outre, garder à l'esprit qu'il s'agit d'une peine complémentaire
d'interdiction de stade qui ne peut dissuader que des supporters fréquentant
habituellement les stades. Pour toute autre personne, la crainte d'être
interdit de stade sera sans effet. Aussi, plus on s'éloigne des stades et moins
cette peine complémentaire présente d'intérêt.
En conséquence, la commission vous propose, mes chers collègues, une nouvelle
rédaction de l'article 42-11 de la loi du 16 juillet 1984, qui étend le champ
d'application de la peine complémentaire, hors des enceintes sportives,
lorsqu'une infraction définie par les articles du code pénal visés à l'article
42-11 aura été commise, d'une part, lors de la retransmission publique d'une
manifestation sportive dans un lieu spécialement aménagé à cet effet et,
d'autre part, aux abords de ces lieux ou des enceintes sportives, à l'occasion
de l'entrée ou de la sortie du public.
C'est une définition peut-être plus restrictive, mais plus précise, ce qui est
souhaitable pour une disposition pénale, et plus efficace au regard de
l'application de la loi. Il ne faut pas confondre ce qui relève des règles
habituelles de police dans la gare d'arrivée des supporters ou à quelques
kilomètres du stade et ce qui relève de la politique de prévention et de
répression de la violence dans les stades.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Monsieur le rapporteur, je partage
le souci que vous avez exprimé. Il avait d'ailleurs été pris en compte par
l'Assemblée nationale. En effet, elle a retenu la formulation « en relation
directe » afin que la peine complémentaire ne concerne pas les faits qui n'ont
aucun lien avec l'événement sportif lui-même.
Cette peine doit rester dissuasive. Or, à l'évidence, l'interdiction de
pénétrer dans une enceinte sportive perd son caractère dissuasif dans la
situation évoquée. Il en est d'ailleurs de même pour un jeune qui suit la
retransmission d'un match devant un écran géant.
Dans ces conditions, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
J'espère que l'Assemblée nationale et le Sénat parviendront à une rédaction
commune. En effet, ils partagent les mêmes préoccupations.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé.
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - I. - Il est inséré, dans la même loi, un article 43-2 ainsi rédigé
:
«
Art. 43-2. -
Les ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne
ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen qualifiés pour
exercer légalement dans un de ces Etats mais non établis en France peuvent y
exercer à titre occasionnel les activités professionnelles visées à l'article
43 sous réserve d'avoir effectué une déclaration à l'autorité administrative
préalablement à leur prestation en France.
« L'exercice de cette prestation par un de ces ressortissants, lorsque la
qualification dont il se prévaut est d'un niveau substantiellement inférieur à
celle exigée en France, peut être subordonné à la réussite d'un test technique
pour des raisons d'intérêt général tenant à la sécurité des personnes.
« Sous les mêmes réserves, lorsque les activités concernées ont lieu dans un
environnement spécifique, la réussite d'un test de connaissance de cet
environnement peut être exigée.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du
présent article, notamment la liste des activités visées au troisième alinéa.
»
« II. - Au deuxième alinéa de l'article 48-1 de la même loi, les mots :
"le ministre" sont remplacés par les mots : "l'autorité
administrative".
« III. - Au premier alinéa de l'article 49 de la même loi, la somme : "50
000 F" est remplacée par la somme : "100 000 F".
« IV. - L'article 49 de la même loi est complété par deux alinéas ainsi
rédigés :
« Seront punies des mêmes peines les personnes qui, en violation de l'article
43-2, exercent leur activité sans avoir effectué la déclaration ou sans avoir
satisfait aux tests auxquels l'autorité administrative les a soumis, ainsi que
leurs employeurs.
« Sont également punies des mêmes peines les personnes qui, sans posséder la
qualification requise, exercent les fonctions mentionnées à l'article 43 dans
les activités physiques et sportives se déroulant dans l'environnement
spécifique mentionné au troisième alinéa de l'article 43-2, ainsi que leurs
employeurs. »
Sur l'article, la parole est à M. Faure.
M. Jean Faure.
L'article 3 encadre l'exercice, par les ressortissants européens, de
prestations de services d'éducateurs sportifs. Il soulève le problème de la
liberté de circulation des éducateurs sportifs et du maintien du niveau de
l'encadrement sportif en France.
La commission des affaires culturelles du Sénat réaffirme, par ses deux
premiers amendements, d'une part, la nécessaire adaptation de la loi nationale
aux exigences qui résultent de l'application aux professions d'éducateur
sportif des principes de la liberté d'établissement et de la libre prestation
de services et, d'autre part, l'institution d'une procédure permettant de
sanctionner immédiatement les ressortissants européens qui effectueraient une
prestation de services sans avoir satisfait à l'obligation de passer une
épreuve technique.
En revanche, en nous proposant un amendement de suppression du paragraphe 4 de
cet article, la commission des affaires culturelles ne peut éviter un écueil
important. En effet, rien n'indique expressément qu'une personne qui exerce
illicitement son activité pourra être immédiatement déférée à la justice et
condamnée.
J'illustrerai cet écueil avec un exemple que je connais fort bien puisqu'il se
vérifie chaque année sur les pistes de nos stations de sports d'hiver.
Fréquemment, les gendarmes constatent que des personnes, qu'elles soient
françaises ou étrangères à l'Union européenne, enseignent le ski sans diplôme
et sans avoir
a fortiori
effectué la déclaration exigée. Sur plainte de
la fédération française des enseignants de ski ou du syndicat des moniteurs de
ski, le parquet poursuit lesdites personnes pour activité irrégulière et pour
absence de déclaration. Jusqu'ici, il n'y a pas de problème. Or, dans la
quasi-totalité des affaires, le tribunal correctionnel prononce la relaxe de
ces personnes au motif que l'enseignement du ski sans diplôme n'est plus
sanctionné et qu'aucun texte ne prévoit qu'une personne dépourvue de diplôme
est tenue de faire une déclaration.
L'article 3 adopté par l'Assemblée nationale répondait à ce problème en
pénalisant non seulement le défaut de déclaration, mais également l'exercice
illégal.
En supprimant le paragraphe 4 de cet article, la commission laisse subsister
une ambiguïté. En clair, toute personne qui enseigne le ski illégalement ne
pourra être immédiatement présentée devant le procureur. La pénalisation pour
exercice illégal d'activité est vital pour les milliers de moniteurs de ski
diplômés de nos stations qui subissent tous les jours la concurrence déloyale
de personnes qu'on ne peut empêcher d'enseigner une discipline qu'ils ne
maîtrisent pas dans un environnement très spécifique qu'ils ne connaissent pas.
Ils mettent malheureusement en danger la vie de nombreux skieurs.
J'ajoute que, compte tenu de la réglementation en vigueur, seules les
sanctions administratives sont envisageables pour les non-diplômés. La
procédure nécessitant des délais très longs, les sanctions imposées par le
ministre de la jeunesse et des sports - je vous prie, madame le ministre, de
m'excuser de douter de votre efficacité - sont de peu d'effet sur le terrain,
d'autant plus s'il s'agit d'étrangers non installés à demeure. De surcroît,
s'agissant de travailleurs saisonniers, ils ont bien souvent, au terme de la
procédure, disparu dans la nature. Il n'est donc plus possible de les
retrouver.
Telles sont les raisons pour lesquelles j'estime que la proposition de la
commission des affaires culturelles du Sénat ne répond pas aux problèmes que
rencontrent les moniteurs de ski.
En fait, de quoi s'agit-il ? Simplement de donner aux professionnels de la
montagne les moyens de faire appliquer les peines qui ont été prévues dans les
lois de 1948, de 1984 et de 1992.
Aujourd'hui, le syndicat des moniteurs de ski et les professionnels de la
montagne sont découragés. En effet, chaque fois qu'ils défèrent les
contrevenants à la justice, ils n'obtiennent aucun résultat.
Cela dit, si la commission acceptait de réintroduire une précision quant à
l'incrimination des délinquants, j'approuverais, bien sûr, sa position.
M. Marcel Charmant.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Barnier.
M. Michel Barnier.
Madame le ministre, je souhaiterais présenter trois observations. L'une
rejoindra, pour l'appuyer, l'appel exprimé par notre collègue M. Faure. Il est,
dans cet hémicycle, celui qui est le plus à même de parler des moniteurs de ski
puisqu'il est sans doute le seul sénateur à être aussi moniteur de ski
diplômé.
J'en viens à ma première observation. Monsieur le rapporteur, je vous sais gré
d'avoir bien voulu rappeler le travail très difficile que mes collaborateurs et
moi-même avons mené patiemment au ministère des affaires européennes pour
préserver, dans le respect des directives européennes et des textes relatifs à
la libre circulation des travailleurs au sein de l'Union européenne, ce qui
fait la qualité, la spécificité de la profession de moniteur de ski ainsi que
le respect que l'on doit à ces moniteurs français, et, d'une manière générale,
aux titulaires de diplômes concernant d'autres disciplines sportives pouvant
présenter des risques.
Avant que le précédent gouvernement publie le décret concerné, la situation
était très simple. En effet, arrivaient en France, sous le prétexte de libre
circulation, des « moniteurs de ski » venant de pays du nord de l'Europe, moins
montagneux que le nôtre, et qui ne connaissaient pas forcément nos montagnes ni
les risques qu'elles présentent. Ils concurrençaient directement, sans diplôme
ou avec des diplômes infiniment moins solides, les moniteurs français. Il y
avait là une situation de concurrence que je qualifie de déloyale et qui,
surtout, était très préjudiciable aux touristes, aux utilisateurs de la
montagne, aux clients, compte tenu des conditions de sécurité qu'ils sont en
droit d'exiger lorsqu'ils pratiquent le ski.
Nous avons publié le décret. Au fond, la rédaction proposée par la commission
pour l'article 3 reprend l'essentiel de ce décret et le consolide sur le plan
de la législation française. L'Assemblée nationale avait d'ailleurs fait de
même. Rétrospectivement, me souvenant du temps que j'ai passé sur ce sujet à
Paris, avec votre prédécesseur, madame le ministre, et avec la Commission -
cela a représenté de nombreuses heures de négociations - je suis heureux de
voir le texte de ce décret repris et consolidé.
La rédaction telle qu'elle est modifiée par la commission des affaires
culturelles du Sénat - en disant cela, je ne fais pas offense à l'Assemblée
nationale, dont j'ai été membre pendant très longtemps - paraît plus solide et
évitera des recours ou des contentieux. Aussi, je m'y rallie.
J'ai simplement suggéré - c'est l'objet du sous-amendement n° 8 que je
présenterai brièvement tout à l'heure - que, dans le dernier alinéa de
l'article 3, on puisse exiger des personnes concernées non seulement une
connaissance des règles de sécurité et des dispositifs de secours, mais aussi,
ce qui me paraît au départ beaucoup plus important, une bonne connaissance de
l'environnement montagnard et du milieu naturel.
Dans ce domaine comme dans bien d'autres, madame le ministre, la prévention
est beaucoup moins onéreuse que la réparation des accidents ou des dégâts. Pour
prévenir les accidents, et on voit bien que l'on n'y arrive pas toujours, il
faut que ceux qui exercent ces professions connaissent bien le milieu
montagnard.
Enfin - sur ce point, je rejoins M. Jean Faure - je ne suis pas favorable à
l'amendement proposé par la commission et visant à supprimer le paragraphe IV
de l'article 3. En effet, la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale me
semble plus opérationnelle.
Les moniteurs de ski français, qui ont consacré tant de temps et d'énergie
pour obtenir leur diplôme en raison des règles de sécurité, sont exaspérés de
voir que ces faux moniteurs exercent chez nous et que, quand l'infraction est
constatée, ils ne sont pas poursuivis et ils continuent ; s'ils s'arrêtent
trois jours, on les voit revenir.
Nous avons tous à l'esprit des exemples de personnes qui ont été contrôlées,
voire qui ont été écartées l'an dernier et qui sont de nouveau sur les pistes
cette année, au mépris des textes et de l'obligation de sécurité qui est due
aux skieurs et aux touristes.
Je m'adresse à M. le rapporteur, tout en faisant appel à votre compréhension,
madame le ministre, pour que l'on ne supprime pas purement et simplement le
paragraphe IV. Une autre rédaction est possible. A cet égard, je fais confiance
à la compétence de M. le rapporteur.
Je souhaite, comme M. Jean Faure dont je soutiens les propos, que l'on
parvienne à une rédaction préservant le caractère opérationnel, l'efficacité de
la loi afin qu'une personne qui ne respecte aucune des conditions requises
s'agissant des tests, des diplômes ou des équivalences puisse être présentée au
procureur. Il importe que l'on puisse faire des exemples et imposer le respect
du devoir de sécurité.
En l'état actuel, les membres du groupe du RPR ne peuvent donc approuver
l'amendement visant à supprimer le paragraphe IV. Ils seraient heureux que la
commission les entende et puisse, par la voix de M. le rapporteur, proposer une
autre rédaction s'inspirant de l'esprit d'efficacité qui caractérisait le texte
de l'Assemblée nationale.
M. François Lesein,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
Je voudrais répondre à nos amis de la montagne.
M. Michel Barnier.
Les skieurs viennent aussi de la plaine !
M. François Lesein,
rapporteur.
Et ils ont effectivement besoin de sécurité lorsqu'ils vont
en montagne !
La commission s'est efforcée de mettre au point une rédaction donnant à
l'autorité administrative les moyens de sanctionner rapidement les abus et les
irrégularités.
J'ai bien entendu l'appel de MM. Faure et Barnier.
L'amendement n° 4 tend à limiter les abus liés à ces « faux moniteurs ». Nos
collègues souhaitent le maintien du paragraphe IV de l'article 3, car
l'amendement n° 4 ne leur semble pas correspondre totalement à la réalité.
Je proposerai donc tout à l'heure au Sénat de rectifier l'amendement n° 5,
afin de remplacer la suppression du paragraphe IV de l'article 3 par une
rédaction allant dans le sens souhaité par nos collègues.
M. le président.
Par amendement n° 3, M. Lesein, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le paragraphe I de l'article 3 :
« I. - A. - Il est inséré après le quatrième alinéa de l'article 43 de la loi
n° 84-610 du 16 juillet 1984 précitée un paragraphe II ainsi rédigé :
« II. - Les fonctions mentionnées au premier alinéa du I peuvent être exercées
sur le territoire national par les ressortissants des Etats membres de la
Communauté européenne ou des Etats parties à l'Accord sur l'espace économique
européen qui sont qualifiés pour les exercer dans l'un de ces Etats.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions auxquelles cet exercice est
soumis lorsqu'il existe une différence substantielle de niveau entre la
qualification dont les intéressés se prévalent et celle requise en application
du I.
« Ce décret précise notamment la liste des fonctions dont l'exercice, même
occasionnel, peut être subordonné, si la sécurité des personnes l'exige compte
tenu de l'environnement naturel et des conditions dans lesquels elles sont
exercées, au contrôle préalable de l'aptitude technique des demandeurs et de
leur connaissance des règles de sécurité et des dispositifs de secours.
« B. - En conséquence, le début du premier alinéa du même article est précédé
de la mention "I" et le début de son cinquième alinéa de la mention
"III". »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 8, présenté par M. Barnier,
et tendant, dans le dernier alinéa du A du texte proposé par l'amendement n° 3
pour le paragraphe I de l'article 3, après les mots : « et de leur connaissance
», à insérer les mots : « du milieu naturel, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3.
M. François Lesein,
rapporteur.
Cet amendement vise à intégrer dans l'article 43 de la loi du
16 juillet 1984, qui est relatif aux conditions d'exercice des professions
d'éducateur sportif, un paragraphe reprenant les principes de l'application aux
ressortissants européens de la liberté de circulation des travailleurs et des
services.
Cette solution présente en effet plusieurs avantages par rapport à l'insertion
d'un article additionnel concernant la seule prestation de services.
En premier lieu, le texte que nous proposons vise à la fois le libre
établissement et la libre prestation de services qui, l'un comme l'autre, sont
exercés actuellement sur la base de textes réglementaires assez fragiles, comme
cela vient d'être rappelé. Cela ne nous oblige d'ailleurs pas à modifier le
fond du texte proposé puisque le schéma général est le même dans les deux cas.
En revanche, nous essayons d'améliorer sa forme, qui laisse à désirer.
En deuxième lieu, le texte que nous proposons peut servir de fondement aux
deux décrets actuels, sans changer un mot aux procédures qu'ils prévoient et,
surtout, sans changer leur base législative actuelle.
Nous évitons ainsi de créer une nouvelle procédure de déclaration, comme le
fait l'article 43-2 qu'on nous propose, alors que le régime actuel de la
prestation de services se fonde sur celle qui existe. Il est pas besoin non
plus de prévoir de mesures de coordination : toutes les dispositions de la loi
faisant référence à l'article 43 s'appliqueront automatiquement aux
ressortissants communautaires comme à tous les éducateurs sportifs.
Enfin, l'insertion à l'article 43 des dispositions applicables aux
ressortissants communautaires garantit aussi que ces derniers se verront
opposer les mêmes interdictions professionnelles que les nationaux ou les
non-Européens, s'ils ont subi des condamnations jugées incompatibles, en
France, avec les fonctions d'éducateur sportif. Ces interdictions sont en effet
prévues à l'article 43.
M. le président.
La parole est à M. Barnier, pour défendre le sous-amendement n° 8.
M. Michel Barnier.
Ce sous-amendement vise à préciser que les personnes qui devront respecter ces
textes, passer les tests, fournir les diplômes ne devront pas seulement
connaître ou comprendre les dispositifs de sécurité - en d'autres termes, le
champ de la réparation ou de l'urgence en cas d'accident - mais avoir également
une bonne connaissance de l'environnement et du milieu naturel.
Je suggère donc à cet effet l'introduction des mots « connaissance du milieu
naturel » dans l'amendement n° 3.
M. Marcel Charmant.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 8 ?
M. François Lesein,
rapporteur.
Après avoir étudié cette proposition, la commission a émis un
avis favorable sur ce sous-amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 3 et sur le
sous-amendement n° 8 ?
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Le Gouvernement s'oppose à cet
amendement qui vise à fusionner les régimes applicables à la liberté de
prestation de services et à la liberté d'établissement des ressortissants de
l'Union européenne en matière d'éducation sportive.
Ce rejet s'appuie sur des raisons non seulement juridiques, mais aussi
d'opportunité.
Juridiquement, cet amendement instituerait à tort un régime unique pour les
ressortissants qui exercent à titre occasionnel et pour ceux qui s'établissent
durablement en France. Or, ces régimes doivent être nettement distingués, comme
le montre d'ailleurs clairement la présentation faite dans le rapport de la
commission.
Je donnerai deux exemples à cet égard.
Tout d'abord, la prestation de services relève d'un régime déclaratif alors
que l'établissement durable relève d'un régime d'autorisation.
Par ailleurs, la prestation de services ne peut être conditionnée à la
réussite à un test que pour des raisons de sécurité, alors que l'établissement
peut être soumis à des mesures de contrôle de compétence y compris en dehors de
cas où la sécurité des personnes l'exigerait.
Il nous semble donc difficile, juridiquement, d'appliquer des règles communes
à deux situations appréhendées différemment par le droit.
Mais, surtout, l'effet le plus dommageable de cet amendement est que son
adoption obligerait le Gouvernement à édicter un nouveau décret d'application
tirant les conséquences de cette fusion de la prestation et de l'établissement.
Or ce nouveau décret ne pourrait être pris sans une nouvelle concertation
laborieuse avec les institutions communautaires. L'efficacité de cette mesure
législative serait alors anéantie, en tout cas pour cette saison de ski.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 8, le Gouvernement ne peut qu'être
d'accord tant sur l'esprit que sur le fond, avec les mesures proposées.
Toutefois, ce sous-amendement est solidaire de l'amendement n° 3, sur lequel le
Gouvernement émet un avis défavorable. Par conséquent, j'émets également un
avis défavorable sur ce sous-amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 8.
M. Jean Faure.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Faure.
M. Jean Faure.
Je ne peux qu'être favorable à la proposition de Michel Barnier. En effet, la
pratique de l'encadrement des activités sportives dans des milieux spécifiques
nécessite une bonne connaissance du milieu naturel. Il en va ainsi pour le ski
comme pour la montagne ou la spéléologie.
Les activités visées par cette connaissance spécifique ont été arrêtées dans
le cadre des discussions sur le plan communautaire.
Par conséquent, je ne peux qu'encourager nos collègues à approuver cette
disposition qui me paraît fondamentale.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 8, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 3, repoussé par le
Gouvernement.
Mme Hélène Luc.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
M. Pierre Mauroy.
Le groupe socialiste également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 4, M. Lesein, au nom de la commission, propose d'insérer,
avant le paragraphe II de l'article 3, un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - A. - La seconde phrase du premier alinéa de l'article 48-1 de la même
loi est remplacée par trois alinéas ainsi rédigés :
« Le ministre chargé des sports peut, dans les mêmes formes :
« - interdire à toute personne ayant effectué la déclaration mentionnée à
l'article 47-1 d'exercer l'activité déclarée si elle ne remplit pas les
conditions prévues aux articles 43 et 43-1 ;
« - enjoindre à toute personne exerçant en infraction aux articles 43 et 43-1
de cesser son activité dans un délai déterminé. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers
collègues, cet amendement a pour objet de permettre de sanctionner les
ressortissants européens qui effectueraient une prestation de services sans
avoir satisfait à l'obligation de passer une épreuve technique. Cette
possibilité de sanction est en effet indispensable.
Le dispositif en est simple et il complète le paragraphe II de l'article 3 qui
déconcentre au niveau du préfet la possibilité de prononcer en cas d'urgence
les interdictions d'exercice prévues à l'article 48-1.
Il vise à insérer dans l'article 48-1 une disposition grâce à laquelle
l'autorité administrative pourra interdire à une personne qui a effectué sa
déclaration d'exercer l'activité déclarée si elle ne remplit pas les conditions
prévues aux articles 43 et 43-1.
Comme il s'agit d'une décision urgente, elle sera prise immédiatement par le
préfet, qui la notifiera aux intéressés en même temps que la décision de
subordonner leurs prestations à la réussite d'un test.
Si un moniteur passe outre, il pourra être sanctionné immédiatement pour
violation de l'interdiction, en application des dispositions de l'article 49 de
la loi, par les mêmes peines que celles que prévoient les auteurs de la
proposition de loi.
J'ajoute que cette disposition s'appliquera également sans délai à toute
personne qui ne joindrait pas à sa déclaration les diplômes correspondant à la
fonction qu'elle veut exercer.
Pour nous résumer, il y aura deux cas de figure.
D'une part, si la personne n'a pas fait de déclaration, elle tombera sous le
coup du texte actuel.
D'autre part - c'est le cas que nous ajoutons -, si la personne a fait une
déclaration mais qu'elle n'a pas les titres pour exercer - diplômes ou tests,
conformément au texte en vigueur - on lui interdira immédiatement d'exercer.
Nous proposons donc une interdiction automatique et immédiate d'exercer à
toute personne qui ne remplit pas les conditions pour le faire. Tout exercice
illicite sera donc automatiquement interdit et punissable d'un an de prison et
de 100 000 francs d'amende.
Les forces de l'ordre seront en possession d'un arrêté d'interdiction
nominatif. Il ne sera pas nécessaire de vérifier l'existence des titres de la
personne, et le flagrant délit sera donc plus facile.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Cet amendement est lié à
l'évidence à la suppression par la commission du paragraphe IV de l'article 3
visant à la pénalisation. Le Gouvernement y est donc défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Jean Faure.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Faure.
M. Jean Faure.
La réflexion de la commission est un tout. Cette disposition complète la
mesure proposée précédemment, et, bien entendu, le maintien du paragraphe IV de
l'article 3, promis par M. le rapporteur, permettra de préciser l'ensemble du
dispositif répressif contre ceux qui ne respecteraient pas la loi.
M. Michel Barnier.
Absolument !
M. Jean Faure.
Par conséquent, sous réserve de la rectification de l'amendement n° 5, je ne
peux qu'inciter le Sénat à voter la disposition prévue par la commission dans
l'amendement n° 4.
M. Michel Barnier.
Très bien !
M. le président.
Monsieur le rapporteur, il me paraît nécessaire, pour une bonne information de
nos collègues avant le vote de l'amendement n° 4, que vous exposiez
l'amendement n° 5.
Cet amendement, présenté par M. Lesein, au nom de la commission, tend à
supprimer le paragraphe IV de l'article 3.
Mais j'ai cru comprendre, monsieur le rapporteur, que vous envisagiez de le
rectifier.
M. François Lesein,
rapporteur.
La commission propose dans l'amendement n° 4 un mécanisme qui
lui semble efficace ; mais, comme je l'ai dit tout à l'heure, elle comprend les
inquiétudes des professionnels, exprimées par MM. Barnier et Faure. Par
conséquent, elle rectifie l'amendement n° 5 afin de maintenir la mesure
contenue dans le paragraphe IV, tout en proposant une rédaction permettant une
harmonisation avec les dispositions contenues dans les amendements
précédents.
Cette rectification vise donc à rédiger comme suit le texte proposé par le
paragraphe IV de l'article 3 pour compléter l'article 49 :
« Sera puni des mêmes peines quiconque exerce les fonctions mentionnées à
l'article 43 sans répondre aux conditions définies aux articles 43 et 43-1,
ainsi que son employeur. »
Cette rédaction me semble plus précise.
M. le président.
Je suis saisi d'un amendement n° 5 rectifié, présenté par M. Lesein, au nom de
la commission, et tendant à rédiger comme suit le texte proposé par le
paragraphe IV de l'article 3 :
« IV. - L'article 49 de la même loi est complété par un alinéa ainsi rédigé
:
« Sera puni des mêmes peines quiconque exerce les fonctions mentionnées à
l'article 43 sans répondre aux conditions définies aux articles 43 et 43-1,
ainsi que son employeur. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ?
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Je me félicite, bien sûr, que la
commission revienne sur la suppression totale du paragraphe IV de l'article 3.
Cependant, la rédaction proposée par M. le rapporteur tient compte, bien
évidemment, des amendements qui ont été adoptés précédemment.
Par conséquent, le Gouvernement ne peut émettre un avis favorable sur
l'amendement n° 5 rectifié.
M. le président.
Afin que chacun puisse s'exprimer sur l'amendement n° 4 en connaissance de
cause, je vais d'abord mettre aux voix l'amendement n° 5 rectifié.
M. Jean Faure.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Faure.
M. Jean Faure.
Dans la rédaction proposée par la commission, soixante-quatre activités
sportives sont concernées. Si nous visions non pas l'article 43, mais le seul
deuxième paragraphe de cet article, nous limiterions le champ d'application de
la mesure aux cinq grandes activités définies dans le précédent décret. C'est
d'une grande simplicité pour ceux qui connaissent le sujet, même si je
reconnais que c'est fort touffu pour ceux qui ne sont pas dans ce cas.
M. François Lesein,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
A la réflexion, la modification que nous propose notre
collègue Jean Faure n'est pas recevable, car le texte deviendrait alors
discriminatoire en ne visant que les Européens. Nous serions alors
condamnés.
M. Jean Faure.
Dans ces conditions, je me range à l'avis de M. le rapporteur.
M. Michel Barnier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Barnier.
M. Michel Barnier.
M. le rapporteur a rectifié l'amendement n° 5, et je l'en remercie au nom du
groupe du RPR.
Nous allons voter les deux amendements n°s 4 et 5 rectifié, dans la mesure où
ils constituent, avec le précédent amendement que nous avons adopté, un
dispositif complet et architecturé qui offre, en termes d'efficacité, le
caractère opérationnel qu'avait souhaité l'Assemblée nationale et qui me paraît
maintenant fondé sur une base juridique solide.
C'est bien parce que M. le rapporteur a accédé à la demande que nous avons
formulée Jean Faure et moi-même, au nom de beaucoup de nos collègues, que nous
allons pouvoir nous prononcer favorablement sur ces deux amendements.
M. François Lesein,
rapporteur.
Je vous en remercie.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets d'abord aux voix l'amendement n° 5 rectifié, repoussé par le
Gouvernement.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
M. Pierre Mauroy.
Le groupe socialiste également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets maintenant aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le
Gouvernement.
M. Ivan Renar.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
M. Pierre Mauroy.
Le groupe socialiste également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
M. Ivan Renar.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
M. Pierre Mauroy.
Le groupe socialiste également.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - I. - Le deuxième alinéa de l'article 18-2 de la même loi est ainsi
rédigé :
« Le vendeur ou l'acquéreur de ce droit ne peuvent s'opposer à la diffusion,
par d'autres services de communication audiovisuelle, de brefs extraits
prélevés à titre gratuit parmi les images du ou des services cessionnaires et
librement choisis par le service non cessionnaire du droit d'exploitation qui
les diffuse. »
« II. - L'article 18-4 de la même loi est ainsi rédigé :
«
Art. 18-4. -
L'accès des journalistes et des personnels des
entreprises d'information écrite ou audiovisuelle aux enceintes sportives est
libre sous réserve des contraintes directement liées à la sécurité du public et
des sportifs, et aux capacités d'accueil.
« Toutefois, sauf autorisation de l'organisateur, les services de
communication audiovisuelle non cessionnaires du droit d'exploitation ne
peuvent capter que les images distinctes de celles de la manifestation ou de la
compétition sportive proprement dites.
« Les fédérations sportives ayant reçu, en vertu de l'article 17, délégation
pour organiser les compétitions visées par cet article peuvent, dans le respect
du droit à l'information, définir, dans un règlement approuvé par le ministre
chargé des sports après avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, et publié
conformément à l'article 17-1, les contraintes propres à la discipline
considérée et au type de manifestation ou de compétition, ainsi que les lieux
mis à disposition des personnes mentionnées au premier alinéa. »
Par amendement n° 6, M. Lesein, au nom de la commission, propose de supprimer
cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
La loi de 1992 avait institué un équilibre entre la cession
exclusive des droits de retransmission des manifestations sportives et le droit
d'accès du public à l'information sportive.
Comme je vous l'indiquais tout à l'heure, cet article tend à modifier cet
équilibre au profit des détenteurs de droits d'exploitation.
D'une part, il restreint la portée du droit de citation. Il interdit, en
effet, aux services de communication audiovisuelle non cessionnaires des droits
d'exclusivité de filmer eux-mêmes les extraits susceptibles d'être diffusés
dans le cadre du droit de citation. Il interdit, par conséquent, la diffusion
de toute autre image que celles qui ont été tournées par le service
cessionnaire.
D'autre part, il limite la portée de la liberté d'accès des journalistes aux
enceintes sportives de deux façons : premièrement, il autorise les
organisateurs de manifestations sportives à interdire aux services non
cessionnaires de filmer la manifestation ; deuxièmement, il confie aux
fédérations sportives le pouvoir de définir, par voie de règlement, les
conditions d'exercice de la liberté d'accès des journalistes, alors que le
texte en vigueur prévoit l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat.
La commission des affaires culturelles a estimé que cette dernière disposition
procédait d'une confusion entre le pouvoir réglementaire des fédérations et le
pouvoir réglementaire défini par la Constitution. Cette confusion semble peu
compatible avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
J'observe, de plus, que, si l'on confie aux fédérations, qui sont
propriétaires des droits d'exploitation des manifestations sportives, le
pouvoir d'encadrer l'activité des journalistes dans les enceintes sportives, on
suspectera toujours que leurs décisions auront été inspirées par le souci de
favoriser le cessionnaire de leurs droits.
Pour toutes ces raisons, la commission a estimé que cet article portait
atteinte au droit à l'information. L'équilibre institué en 1992 garantissait
pleinement les droits des services de communication cessionnaires, mais visait
à mettre fin à des pratiques inacceptables. Revenir sur ces dispositions qui
sont, il faut le rappeler, le résultat d'un travail commun du Sénat et de
l'Assemblée nationale constituerait, selon nous, un retour en arrière.
La commission a jugé, en conséquence, qu'il n'y avait pas lieu de revenir sur
la position que le Sénat avait adoptée en 1992.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Le Gouvernement est défavorable à
la suppression de l'article 4.
Lorsqu'on parle des articles 18-2 et 18-4 de la loi de 1984 modifiée en 1992,
on parle d'équilibre. Mais la réalité des faits, depuis le vote de cette loi,
montre que les problèmes n'ont pas cessé dans les rapports entre les médias
eux-mêmes à propos d'événements sportifs, parce que ces deux articles
paraissent contradictoires : selon les événements, on prenait en compte soit le
droit à l'exclusivité, visé à l'article 18-2, soit l'article 18-4, concernant
le droit à l'information.
De nombreux problèmes sont ainsi apparus à l'occasion de plusieurs épreuves
sportives. J'en ai moi-même fait l'expérience mercredi dernier, lors de
l'inauguration du Stade de France : une chaîne de télévision voulait
m'interviewer, mais une autre chaîne, qui avait obtenu la concession de la
retransmission, s'est opposée à ce que l'on m'interroge dans l'enceinte du
Stade de France. A chaque événement, des problèmes se posent ; il faut donc
trouver une solution cohérente.
Par ailleurs, lorsque - tardivement, certes, mais aucun de mes prédécesseurs
ne l'avait fait - j'ai voulu prendre les décrets d'application de la loi de
1984 modifiée en 1992, le Conseil d'Etat m'a renvoyé les projets au motif qu'il
n'existait pas de fondement législatif à ces textes.
La base législative que nous vous proposons aujourd'hui préserve - je tiens à
l'affirmer avec force - le droit d'accès à l'information et le pluralisme de
l'information tout en préservant le droit à la cession à un organisme de
communication par l'organisateur d'un événement sportif.
Notre réflexion doit intégrer la réalité du monde des médias et du mouvement
sportif lui-même ; il ne faut pas dresser une chaîne de télévision contre une
autre, parce que le droit d'exclusivité est exercé par l'ensemble des chaînes
l'une après l'autre, selon les événements sportifs.
J'en viens aux fédérations qui, aux termes de la loi de 1984, ont une
délégation de service public. Le pouvoir que leur confère l'article 4 que nous
vous proposons est restreint : il ne s'agit pas de laisser une fédération
autoriser ou non l'accès des journalistes, mais simplement de lui demander de
nous proposer un règlement qui, tout en respectant la loi, tienne compte de la
réalité de l'événement sportif, du nombre de demandes d'accréditation. Ainsi,
plusieurs milliers de demandes d'accréditation ont déjà été déposées pour la
Coupe du monde de football. Ce n'est pas comparable avec la retransmission d'un
événement sportif mineur, et les conditions de sécurité se sont pas les mêmes
d'une enceinte sportive à l'autre !
La fédération proposera donc un règlement, et le CSA émettra ensuite un avis
sur la conformité à la loi de ce dernier. Enfin, le ministre des sports
acceptera ou non ce règlement. Vous le constatez, le pouvoir que nous donnons
aux fédérations est quand même très encadré, ce qui est normal.
Par ailleurs, comme je l'ai dit tout à l'heure, en remplaçant le mot «
organisateurs », qui figurait dans la loi, par le mot « fédérations », nous
allons certainement contribuer à rendre plus transparents les contrats entre le
mouvement sportif et les médias.
M. François Lesein,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
Je tiens simplement à signaler à Mme le ministre - mais nous
nous en sommes déjà entretenus - l'embarras dans lequel se trouvent toutes les
parties prenantes.
Je lui rappelle aussi que la délégation de service public est un contrat qui
est conclu entre l'Etat et les fédérations. Ces dernières ont une mission pour
organiser les manifestations, mais non pour élaborer la loi, ni même pour en
proposer une. Le Gouvernement dépose des projets de loi et les deux chambres du
Parlement des propositions de loi, qu'elles adoptent ou non ou bien qu'elles
modifient, mais il n'a jamais été question que les fédérations déposent de
telles propositions de loi. Il y a encore un législateur dans ce pays, à lui de
faire son travail !
Par ailleurs, je ne veux pas vous faire de peine, madame le ministre, mais,
qu'il s'agisse de fédérations ou d'organisations, cela ne change rien : ce
n'est pas pour autant qu'elles ne garderont pas l'argent qu'elles perçoivent de
façon indue.
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
C'est la loi d'orientation !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Marcel Charmant.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Charmant.
M. Marcel Charmant.
L'article 4, tel qu'il a été adopté à l'Assemblée nationale sur proposition du
Gouvernement, met en cohérence deux principes : la gratuité du droit de
citation, d'une part, le droit d'accès des journalistes aux enceintes
sportives, d'autre part.
Il institue le droit de captation d'images périphériques à la compétition
sportive elle-même : environnement, ambiance...
Il ne remet donc pas en cause les principes de la loi de 1992, mais il précise
les conditions d'application de ces principes, ce qui n'avait pas été fait
jusqu'à ce jour. Le Conseil d'Etat a d'ailleurs recommandé qu'il en soit ainsi
par voie législative, vous l'avez rappelé, madame le ministre.
Qui pourrait s'étonner que, pour certaines compétitions sportives - je pense
aux sports mécaniques, bien sûr - une plus grande vigilance soit nécessaire en
matière de sécurité ? Chacun d'entre nous a sans doute le souvenir d'un certain
nombre d'accidents, qui sont devenus de véritables tragédies pour le public
!
Ne ressentez-vous pas comme moi, même si les compétitions se déroulent dans un
autre cadre que celui de cette loi, des craintes profondes face aux images
d'une épreuve sur route où les véhicules frôlent les spectateurs ?
C'est dans cet esprit du souci permanent de la sécurité des sportifs, du
public et des journalistes que s'inscrivent les dispositions de l'article 4.
Il ne s'agit pas d'interdire ; il s'agit, dans le respect du droit reconnu par
la loi de 1992, de céder le droit d'exploitation d'une compétition à un service
de communication audiovisuelle, de garantir l'information du public et l'accès
des journalistes aux enceintes sportives dans les meilleures conditions de
sécurité.
L'approbation par le ministre chargé des sports, après avis du CSA, et le
caractère officiel de sa publication font du règlement prévu au dernier alinéa
le garant des intérêts de toutes les parties.
Vous me permettrez de terminer en vous disant que les compétitions sportives
visées par ce texte se nourrissent de la médiatisation et que personne n'a donc
intérêt à « brider » l'information, bien au contraire.
A ce sujet, mon ami René-Pierre Signé rappellera, dans un instant, les
dispositions qui ont été prises à Magny-Cours, lors du Grand Prix de France de
formule 1, pour accueillir les médias et leur assurer les meilleures conditions
possibles d'exercice de leur mission.
M. René-Pierre Signé.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Signé.
M. René-Pierre Signé.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il en est de
la loi comme de toute oeuvre humaine : au moment de son élaboration, on pense
qu'on va tout régler, et souvent, avec le temps, l'évolution des esprits, de la
vie, de l'activité, on s'aperçoit des imperfections. Il est alors de notre
devoir de revenir sur notre travail pour mettre en cohérence les dispositions
législatives dont nous avons la responsabilité.
Mme la ministre et mon ami Marcel Charmant ont expliqué le bien-fondé de
l'article 4.
Pour ma part, je veux surtout dire comment les choses se passent dans une
enceinte sportive réservée aux sports mécaniques lors d'une grande épreuve
internationale.
Nous organisons à Magny-Cours, depuis 1991, le Grand Prix de France, qui est
aussi, pour reprendre une formule cèlébre, le « Grand Prix de la France ».
Beaucoup de choses ont été dites sur ce circuit, parfois justes, parfois
injustes ; mais chacun se plaît à reconnaître qu'il s'agit d'un des plus beaux
circuits du monde et de l'une des meilleures organisations des dix-sept grands
prix mondiaux.
Lors de la manifestation, sont accrédités 500 titres de journaux, avec 600
journalistes, 300 photographes, 200 journalistes et personnels de télévision.
Ces 1 100 personnes disposent d'un parking particulier de plus de 400 places à
proximité de la salle de presse.
L'espace presse lui-même a une superficie de 2 000 mètres carrés et comporte
une salle de 250 postes de travail équipés du téléphone et de 27 canaux vidéo
pour l'information instantanée, 37 cabines de commentateurs de télévision, 20
cabines réservées aux radios, une salle de conférences de 150 places, un espace
convivial réservé aux journalistes de 300 mètres carrés et 7 laboratoires photo
; 250 000 feuillets d'information sont distribués et 15 navettes automobiles
sont à la disposition des journalistes pour faciliter leur travail et leur
circulation.
Tous les espaces mis à disposition des journalistes sont situés à proximité
des paddocks, donc proches des acteurs du Grand Prix. Par ailleurs, nous avons
aménagé une salle de presse annexe pour éviter tout refus d'accréditation.
Ce témoignage de ce que nous vivons chaque année motive les réserves que nous
émettons à l'encontre de l'amendement de la commission.
De quoi s'agit-il, en effet ? De la liberté d'informer, prévue par la loi de
1984, confirmée par la loi Bredin de 1992 et encore renforcée dans ses
garanties par le texte que l'on nous soumet.
Mais il s'agit, plus encore - Marcel Charmant en a parlé - de la sécurité des
personnes et des installations accueillant des compétitions sportives. Dans ce
domaine comme dans tous, le principe de précaution s'impose à nous. Il est de
notre responsabilité en tant que parlementaires, de légiférer en ayant
constamment à l'esprit ce souci de sécurité.
Pour ce qui concerne la liberté d'informer, je rappelle la première garantie
que prévoit notre droit : la citation gratuite de brefs extraits, librement
choisis, par prélèvement d'images auprès de la chaîne ayant obtenu
l'exclusivité d'une retransmission.
L'article 4 de la proposition de loi étend cette garantie en permettant la
captation, par les chaînes de télévision non cessionnaires du droit
d'exclusivité, d'images périphériques à la compétition elle-même - ce qu'on
appelle en jargon journalistique les sujets d'ambiance. Cette autorisation
implique, de fait, le libre accès de tous les journalistes, qui est la seconde
garantie instituée par les textes de 1984 et de 1992 et que confirme donc la
proposition de loi, amendée par le Gouvernement et votée par les députés.
Le renforcement de la sécurité tient, pour sa part, dans l'appréciation qui
sera laissée aux fédérations organisatrices de compétitions sportives pour
limiter éventuellement la libre circulation des journalistes en fonction, je
cite le texte, « des contraintes liées à la sécurité du public et des sportifs
et aux capacités d'accueil ».
Je tiens à souligner, d'une part, que ces fédérations exerceront une mission
de service public par délégation et, d'autre part, que les décisions de ces
fédérations seront prises avec l'accord du ministre chargé des sports et après
avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel.
En résumé, je constate que l'article 4 de la proposition de loi soumise à
notre vote satisfait à la fois aux revendications légitimes concernant le droit
à l'information et à l'impératif de sécurité qu'il nous appartient de défendre.
Je remarque, enfin, qu'il y satisfait dans le respect de la concertation entre
les fédérations organisatrices et les pouvoirs publics, garants, par
définition, de l'équité entre les médias.
C'est pour ces raisons que, avec mon groupe, je ne voterai pas l'amendement de
la commission et que je vous invite, mes chers collègues, à faire de même, si
j'ai réussi à vous convaincre.
Madame la ministre, vous avez su, au travers du texte qui nous est proposé,
concilier les intérêts de toutes les parties, et je vous en remercie.
L'article 4 est un article de conciliation entre les organisateurs de
manifestations sportives, les représentants de la presse et le public, qui a
droit à l'information. En refusant l'amendement de la commission, vous
exercerez pleinement votre mission de législateur, mes chers collègues.
M. Ivan Renar.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar.
Madame la ministre, pour aller vite, je vais laisser mon survêtement au
vestiaire.
(Sourires.)
Je veux simplement dire que la situation mais aussi les solutions de ce
jour sont peu satisfaisantes. A l'évidence, il faut encore creuser la question.
Nous pourrons le faire à l'occasion de la discussion des textes à venir, qu'il
s'agisse du projet de loi sur l'audiovisuel ou du projet de loi d'orientation
sur le sport.
Nous sommes actuellement confrontés à l'absence de base législative pour
réglementer. C'est d'ailleurs là l'aspect le plus convaincant de votre
argumentation, madame la ministre.
La suppression du texte adopté par l'Assemblée nationale conduirait à
perpétuer une situation qui n'est pas saine. C'est la raison pour laquelle nous
voterons contre l'amendement de la commission.
M. François Lesein,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
Après ces superbes interventions, je veux simplement rappeler
qu'il y a, dans les textes existants, la base pour prendre un décret.
Je rappellerai également un seul fait, qui illustre bien le danger qu'il y a à
laisser trop de pouvoir aux fédérations. En 1992, à Magny-Cours, précisément,
la FOCA, l'association des constructeurs de formule 1, avait expulsé FR 3.
Peut-être vous en souvenez-vous !
M. Marcel Charmant.
Oui !
M. François Lesein,
rapporteur.
Elle a d'ailleurs été condamnée puisque FR 3 a porté
plainte.
Dernièrement encore, il s'est produit un incident au Stade de France entre
France 3, toujours, et TF 1.
Les cessionnaires ont peut-être des droits, c'est vrai, mais ces derniers sont
tout de même excessifs, et je voulais le rappeler.
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Monsieur le rapporteur, on demande
à la fédération non pas de faire la loi, mais, à partir de la loi, d'établir un
règlement, visé par le CSA et par le ministère de la jeunesse et des sports,
pour concilier précisément - puisque vous venez de prendre des exemples précis
- le droit de France 3 de reprendre des extraits, de filmer les abords de la
compétition, d'interviewer quelqu'un, du mouvement sportif ou non, avec le
droit de cession. Voilà la raison d'être, et la seule, de ce règlement !
M. Marcel Charmant.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4 est supprimé.
Intitulé de la proposition de loi
M. le président.
Par amendement n° 7, M. Lesein, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit l'intitulé de la proposition de loi : « Proposition de loi modifiant
la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion
des activités physiques et sportives. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
La proposition de loi touche à beaucoup de sujets. C'est à la
fois pour faire court et pour être précis, en tout cas, que nous proposons
cette nouvelle rédaction de l'intitulé.
En fait, ce n'est qu'une modification dans l'attente de ce que nous souhaitons
tous - je sais que c'est aussi le souci de Mme le ministre - à savoir une loi
beaucoup plus complète qui reprendra, dans la sérénité, l'ensemble des
problèmes, et Dieu sait s'il y en a !
On n'est pas près d'avoir réglé tous les problèmes ; mais, si l'on ne s'y
attelle pas, on ne le fera jamais. Or, je souhaite vivement qu'on le fasse.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Tout en regrettant que ne figure
plus dans cet intitulé le mot « sécurité », alors que la sécurité a tout de
même été le thème principal des articles que nous venons de discuter, je m'en
remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 7.
M. Marcel Charmant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charmant.
M. Marcel Charmant.
Je fais miens les propos de Mme la ministre. Nous n'avons parlé que de
sécurité pendant tout l'après-midi ; le mot « sécurité » devrait donc figurer
dans le titre du projet de loi. Ce n'est pas très grave, mais rétablir ce mot
serait tout de même reconnaître les intentions du Gouvernement et du
législateur !
M. Ivan Renar.
Ce serait logique !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par
assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé de la proposition de loi est ainsi rédigé.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à M. Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la proposition
de loi que nous venons d'examiner a pour objet de reprendre et de finaliser
quelques dispositions techniques initiées par les précédents gouvernements.
Ce texte, qui ne fera pas l'objet d'une deuxième lecture en raison de
l'urgence déclarée par le Gouvernement - je le regrette - exigeait un travail
de fond.
En ce qui concerne l'article 1er, le report du délai au terme duquel devront
être homologuées les enceintes sportives paraît réaliste étant donné la
faiblesse du taux d'enceintes sportives actuellement mises aux normes. Cette
question de la sécurité de ces enceintes est un sujet extrêmement sensible sur
lequel il convient de demeurer vigilant.
Quant à la disposition introduite pour permettre aux circuits automobiles de
déroger à l'obligation de ne fournir que des places assises, elle paraît
discutable. En effet, l'obligation de ne fournir que des places assises permet
d'éviter les mouvements de foule sans pour autant empêcher les spectateurs de
se déplacer.
Notre objectif premier doit demeurer, toujours et encore, la sécurité des
personnes, et ce en dépit des préoccupations financières des circuits
automobiles.
L'article 2, que nous venons d'adopter, marque un véritable progrès dans la
prévention de la violence lors des manifestations sportives. Cependant, le
Sénat se devait de clarifier le champ d'application de la peine complémentaire
d'interdiction de stade, afin qu'il soit moins ambigu.
A propos de l'article 3, il était en effet essentiel de modifier la
législation en vigueur concernant les conditions d'exercice de la liberté de
prestation de services d'éducateur sportif. La sécurité est notre préoccupation
première, et l'on ne doit pas laisser enseigner des sports dits « à risques »
sans un contrôle sérieux des compétences des éducateurs.
La commission des affaires culturelles a réécrit cet article afin de ne pas
compliquer la législation en vigueur, tout en conservant les mêmes exigences
vis-à-vis de ceux qui souhaitent exercer la profession d'éducateur sportif en
France.
Enfin, le Sénat a choisi de supprimer l'article 4 qui semblait, selon l'avis
du groupe du RPR, comporter une atteinte au principe du pluralisme de
l'information.
Le texte ainsi modifié nous paraît satisfaisant, et notre groupe le votera.
Sachez, en outre, madame le ministre, que nous attendons avec impatience la
future loi que vous nous avez annoncée sur le secteur du sport qui a tant
besoin d'être réformé. Nous espérons que ce texte s'inspirera largement de
l'avant-projet de loi qui avait été préparé par M. Guy Drut, dont je salue
l'action en tant que ministre de la jeunesse et des sports.
M. le président.
La parole est à M. Faure.
M. Jean Faure.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, notre
rapporteur, membre du groupe du sport du Sénat, et rapporteur pour avis de la
commission des affaires culturelles pour le budget du sport, a accompli avec
talent un travail considérable. Nous lui avons fait confiance, et nous ne le
regrettons pas, car le texte issu de nos travaux et modifié selon ses
suggestions nous donne satisfaction.
Effectivement, un vide juridique en matière de sécurité dans les stades
existait : il est maintenant comblé.
Un grand trouble s'était fait jour au sein des professionnels, notamment des
professionnels de la montagne, s'agissant de l'encadrement des activités
sportives. La nouvelle rédaction du paragraphe IV de l'article 3 est de nature
à leur donner satisfaction. Désormais, les sanctions qui pourront être
appliquées seront de nature non plus administrative, mais pénale.
Pour toutes ces raisons, le groupe de l'Union centriste votera cette
proposition de loi.
M. le président.
La parole est à M. Barnier.
M. Michel Barnier.
A l'instar de M. Legendre, je veux également remercier notre rapporteur, M.
Lesein, de son travail, de nous avoir entendus, d'avoir tenu compte de
l'expérience qui peut être la nôtre s'agissant de la montagne et des
professionnels de la montagne.
Ainsi, le texte consolide les décrets que nous avons évoqués tout à l'heure
sur les conditions de travail des professionnels français et d'origine
européenne quand ils encadrent l'exercice de sports à risques. Le texte que
nous a transmis l'Assemblée nationale est maintenant plus efficace et plus
opérationnel. Ceux qui ne respecteront pas la législation pourront être
véritablement sanctionnés.
Pour ces raisons, je voterai cette proposition de loi.
Tout à l'heure, sur l'article 4, je me suis exprimé à titre personnel par
solidarité à l'égard des élus qui souhaitaient que soit modifiée la proposition
de la commission. Je souhaite qu'une solution soit trouvée en commission mixte
paritaire. Je dis cela en me fondant sur l'expérience, qui est la mienne, de
grands événements sportifs.
Ce faisant, naturellement, je ne me prononce pas sur la question de savoir
s'il était, ou non, opportun de construire, là où il a été construit, un
circuit de Formule 1. Il existe. Ce que je sais, c'est qu'il est extrêmement
difficile de faire vivre de grands équipements sportifs, et je peux le dire
ayant eu l'honneur, avec beaucoup d'autres, d'organiser les XVIes jeux
Olympiques d'hiver.
Maintenant que cet équipement existe, il faut se soucier de l'intérêt des
contribuables et aussi des spectateurs, qui sont nombreux en France à aimer les
compétitions automobiles. Je souhaite donc que, dans un travail commun, la
commission mixte paritaire trouve une solution de nature à assurer la pérennité
de ce circuit qui se situe en France.
Monsieur le rapporteur, je vous remercie à nouveau, ainsi que les membres de
la commission, du travail extrêmement précis que vous avez réalisé, et que je
crois utile, pour plus de sécurité dans la pratique d'un certain nombre de
sports dans notre pays.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
A notre tour, nous voulons remercier la commission des affaires culturelles,
notamment son rapporteur, M. Lesein, spécialiste des questions sportives, et
qui, depuis des années, se consacre à cette tâche.
Je m'adresserai maintenant à vous, madame le ministre.
Tout d'abord, il était bon de mettre à jour la loi de 1984, même si vous avez
moins tenu compte de certaines modifications datant de 1992. C'est un travail
qui devait être entrepris, et nous vous remercions de l'avoir fait.
Mais un événement tout à fait important est survenu récemment : je veux parler
de l'inauguration du Stade de France. Je n'étais pas personnellement concerné,
mais je dois dire que j'ai été surpris, en parlant avec mes collègues, de
constater qu'aucun sénateur n'avait été invité ès qualités, pas plus notre ami
François Lesein que les membres du groupe du sport du Sénat que préside avec
tant d'enthousiasme notre collègue Jean Faure.
Il ne s'agit pas, je le précise parce que j'aperçois de grands sourires, de
regretter de n'avoir pas obtenu d'invitations gratuites. Ce n'est pas du tout
cela. Il aurait suffi, par exemple, de réserver quatre ou cinq places à des
sénateurs, qui auraient assisté à cette inauguration, éventuellement en
participant aux frais. Mais on n'a pas pensé à eux ! J'ai été très choqué de
cet oubli.
Je m'occupe d'une équipe de football composée d'enfants de banlieue, surtout
haïtiens. Ce sont eux qui m'ont montré un journal - vous l'avez peut-être vu -
qui annonçait qu'il n'y avait plus de places au parking du stade, parce qu'on
avait réservé 3 000 places - c'était une erreur de zéro, sans doute
s'agissait-il de 300 - aux « politiques ». Je ne sais pas quels « politiques »
étaient invités. Beaucoup d'élus de la Seine-Saint-Denis se trouvaient
présents, ce qui est normal, parmi lesquels, me dit-on, l'un de nos collègues,
ancien ministre, mais aucun autre parlementaire, semble-t-il.
Je fais ces remarques, madame le ministre, pour que vous en parliez aux
responsables du consortium du Stade de France. Un geste a manqué.
L'inauguration, que nous avons suivie à la télévision, était magnifique. Elle
m'a rappelé la cérémonie d'ouverture des jeux Olympiques d'hiver d'Albertville
dans l'organisation desquels notre collègue Michel Barnier a pris une place
éminente. Cette fois-là, nous nous étions déplacés, nous étions une petite
délégation de quatre sénateurs à avoir été conviés à assister à cette fête
exceptionnelle.
Chacun connaît et reconnaît le grand intérêt que notre assemblée porte au
sport, bien que certains prétendent que nous ne sommes pas tous des plus
jeunes.
(Sourires.)
Nous portons, en réalité, la plus grande attention à tout ce
qui concerne la jeunesse.
En l'occurrence, les sénateurs et la représentation nationale n'étaient pas à
la place qu'ils méritent. Il fallait, à l'occasion de ce débat, en faire
l'observation.
Cela dit, bien évidemment, nous voterons cette proposition de loi telle
qu'elle ressort des travaux du Sénat.
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Monsieur le sénateur, je vous
remercie de me donner l'occasion d'apporter des précisions sur cette question
des invitations à l'inauguration du Stade de France.
Vous le savez, cette inauguration était placée sous l'autorité conjointe du
consortium, gestionnaire de ce stade, et de la Fédération française de
football. Le ministère de la jeunesse et des sports n'avait rien à voir à
l'affaire. On peut peut-être d'ailleurs en discuter, car, tout de même,
l'argent public a servi à la construction du stade. Mais enfin, c'était comme
cela !
Il semblerait, et je vais avoir l'occasion de le dire à son président, que le
consortium ait des difficultés pour prendre en compte à la fois la singularité
du mouvement sportif, dans les négociations qu'il mène avec lui, et la
représentation nationale. En effet, vous n'avez pas été invités, pas plus que
ne l'ont été les grands animateurs du groupe du sport du Sénat ou le président
de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale lui-même,
pourtant élu de la Seine-Saint-Denis !
M. Jean Faure.
C'est une erreur !
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
Il faudra peut-être ouvrir ce
débat avec les responsables du Stade de France. Certes, si celui-ci est géré
par un consortium, mais il doit son existence et, devra peut-être demain, une
partie de son fonctionnement à un financement public.
M. René-Pierre Signé.
Hélas !
Mme Marie-George Buffet,
ministre de la jeunesse et des sports.
La représentation nationale est
donc concernée.
M. le président.
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, je représente
ici un département qui n'est pas un grand département de montagne, et je
voudrais simplement expliquer mon vote en tant qu'utilisateur des services que
peuvent fournir les professionnels du sport, mais aussi en tant que juriste.
Je tiens tout d'abord à dire qu'à mon sens la commission a fait du bon
travail. Nous sommes placés ici sous l'auspice du grand Portalis qui disait : «
La loi permet, la loi ordonne, la loi interdit ».
La rédaction proposée par la commission à travers ses amendements semble
bonne. Elle énonce clairement ce qui est autorisé, dans le respect de la
législation européenne, et ce qui est interdit en se fondant sur les règles de
sécurité que nous devons à nos concitoyens, clients potentiels des
professionnels du sport.
Nous avons accompli sur l'article 3, qui est un peu le coeur de ce texte, un
excellent travail, nous l'avons amendé, sous-amendé. De cette façon, celles et
ceux qui, dans quelques jours, samedi prochain exactement, recourront aux
services des professionnels du sport pourront, grâce à ce texte, pratiquer leur
sport favori dans de meilleures conditions de sécurité.
Je pense aussi aux magistrats qui travaillent beaucoup dans le domaine du
droit du sport - je le dis sous le contrôle de M. Michel Barnier - notamment
aux juges du tribunal d'Albertville ou aux conseillers de la cour de Chambéry
qui apportent beaucoup à notre droit du sport et qui auront désormais à leur
disposition un texte plus clair.
Je crois que, grâce au débat de ce soir, le droit des professionnels du sport
est plus clair et la sécurité des clients, français ou étrangers, qui viendront
dans notre beau pays pour y faire du sport mieux assurée.
Telle est la raison principale qui nous conduit à voter ce texte.
La commission a également rappelé que le pouvoir normatif qui est accordé aux
fédérations sportives ne peut être qu'une délégation dans le cadre du service
public, qu'elles sont chargées d'organiser et pas plus. Il s'agit là d'un
rappel intéressant et nous devrons donc rechercher, s'agissant de l'article 4,
une mesure d'équilibre satisfaisante pour tous, c'est-à-dire qui à la fois
respecte la liberté et permette d'organiser de grandes manifestations dans tous
nos départements.
A mes yeux, ce texte est un bon texte et il mérite que nous lui apportions
notre soutien.
M. Michel Barnier.
Très bien !
M. François Lesein,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Lesein,
rapporteur.
Monsieur le président, en lieu et place du président de la
commission des affaires culturelles qui n'a pu être présent en cet instant, je
voudrais dire que je suis très sensible aux paroles de notre collègue M. Michel
Mercier.
Je veux préciser que notre commission n'est pas composée, loin s'en faut, que
de juristes. Le travail sérieux qu'elle a accompli - je remercie ceux qui l'ont
souligné - reflète la qualité de ses collaborateurs que je tiens à saluer.
J'espère qu'il en sera de même pour le prochain texte.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
5
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de
constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons
d'adopter.
Il va être procédé immédiatement à la nomination de sept membres titulaires et
de sept membres suppléants de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats établie par la commission des affaires culturelles a
été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Adrien Gouteyron, François Lesein, Pierre Martin, Albert
Vecten, James Bordas, Franck Sérusclat et Mme Hélène Luc.
Suppléants : MM. Philippe Arnaud, Jean-Claude Carle, André Egu, Jacques
Legendre, Mme Danièle Pourtaud, MM. Yvan Renar et Victor Reux.
6
CANDIDATURE A` UNE COMMISSION
M. le président.
J'informe le Sénat que le groupe des Républicains et Indépendants a fait
connaître à la présidence le nom du candidat qu'il propose pour siéger à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, en
remplacement de M. Pierre Croze, décédé.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à
l'article 8 du règlement.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant une dizaine
de minutes.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures
quarante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
7
ACCORDS RELATIFS
A` LA QUATRIE`ME CONVENTION
ACP-CE DE LOMÉ
Adoption de trois projets de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion :
- du projet de loi (n° 199, 1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale,
autorisant la ratification de l'accord portant modification de la quatrième
convention entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et
le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre part (dite
convention ACP-CE de Lomé). [Rapport n° 219 (1997-1998).]
- du projet de loi (n° 198, 1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale,
autorisant la ratification du protocole à la quatrième convention entre la
Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et le groupe des Etats
d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre part (dite convention ACP-CE
de Lomé), à la suite de l'adhésion de la République d'Autriche, de la
République de Finlande et du Royaume de Suède à l'Union européenne. [Rapport n°
219 (1997-1998).]
- du projet de loi (n° 197, 1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale,
autorisant la ratification de l'accord interne entre les représentants des
gouvernements des Etats membres, réunis au sein du Conseil relatif au
financement et à la gestion des aides de la Communauté dans le cadre du second
protocole financier de la quatrième convention ACP-CE. [Rapport n° 219
(1997-1998).]
La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion
générale commune de ces trois projets de loi.
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le secrétaire
d'Etat.
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie.
Monsieur le
président, madame le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la
Communauté européenne est devenue, avec le temps, un important acteur en faveur
du développement dans le monde. Son engagement depuis 1963 à travers le Fonds
européen de développement, le FED, dans le cadre des conventions de Yaoundé
puis de Lomé pour les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique - les pays
ACP - en témoigne.
Son action bénéficie aujourd'hui non seulement à 70 pays ACP, mais aussi aux
pays et territoires d'outre-mer associés à l'Union européenne, parmi lesquels
nous comptons les territoires d'outre-mer français, Mayotte,
Saint-Pierre-et-Miquelon et les terres Australes et Antarctiques françaises.
La Communauté européenne et les pays ACP ont achevé en novembre 1995, à l'île
Maurice, la révision à mi-parcours de la convention de Lomé IV.
Cette révision comporte notamment l'introduction d'une conditionnalité
politique forte dans la politique européenne de coopération au développement.
Elle permet en particulier à la Communauté, après consultation avec les pays
ACP, de suspendre sa coopération en cas d'atteinte aux « éléments essentiels »
de la convention que sont les droits de l'homme et la démocratie.
Cette révision apporte en outre des améliorations en ce qui concerne tant
l'appui financier accordé aux pays ACP que l'accès offert à leurs produits sur
le marché communautaire.
Je note enfin que c'est sur la base de cet accord de l'île Maurice que
l'Afrique du Sud a pu, le 25 avril dernier, devenir le 71e pays ACP membre de
la convention de Lomé, sans toutefois bénéficier du FED et des dispositions
commerciales de la convention.
Ces améliorations apportées en 1995 au partenariat entre l'Union européenne et
le groupe ACP préfigurent la négociation d'un nouvel accord qui façonnera,
après l'an 2000, nos relations mutuelles.
Comme vous le savez, le débat a déjà commencé entre Européens. Il s'élargira
aux pays ACP à partir de septembre 1998.
Je voudrais saisir l'occasion pour vous présenter, en quelques mots, la
position du Gouvernement à ce sujet.
D'une manière générale, le Gouvernement est attaché au maintien de la
spécificité des relations ACP-Union européenne, tout en souhaitant son
adaptation en profondeur pour tenir compte du nouveau contexte international et
gagner en efficacité. Cet accord s'appuiera donc sur les acquis des accords
passés. Mais il sera également tourné vers l'avenir et devra prendre en compte
le renforcement de la politique étrangère et de sécurité commune, la PESC, et
la réalisation de l'union économique et monétaire ou encore l'ouverture des
échanges internationaux.
Dans ce contexte, la France souhaite voir actualiser l'architecture générale
du partenariat qui devrait distinguer un accord global et des accords régionaux
- Caraïbes, Pacifique - ou sous-régionaux en Afrique. L'accord global inclurait
l'essentiel de la composante politique et les grandes règles du volet
commercial.
Concernant la composante politique, il nous semble essentiel qu'elle puisse
être approfondie pour deux raisons.
D'abord, l'Union européenne est maintenant un ensemble politique, ce qui
représente une donnée entièrement nouvelle dans les relations avec les pays
ACP, en tout cas par rapport aux premières conventions de Lomé.
Ensuite, le bilan des précédentes conventions a révélé l'insuffisance du
dialogue politique. Ce dernier devra être renforcé autour de valeurs communes :
état de droit, démocratie, droits de l'homme, mais aussi bonne gestion des
affaires publiques.
Il est également souhaitable que l'Union européenne joue mieux son rôle dans
la prévention des crises et des conflits qui pourraient survenir dans les pays
ACP.
Dans le même esprit, les nouvelles politiques communes européennes, telles que
la lutte contre la drogue ou la criminalité, pourraient être mieux prises en
compte dans nos relations avec les pays ACP. A ce titre, des structures de
discussion Union européenne - ACP - pourraient être mises en place à Bruxelles
sur les sujets relevant de la PESC.
En ce qui concerne la dimension commerciale des relations entre l'Union
européenne et les pays ACP, elle doit s'inscrire dans une dynamique régionale.
Notre objectif est ici, en priorité, d'aider les pays ACP à s'insérer dans
l'économie mondiale. Cela passe par la mise en place de zones d'union
douanière, en particulier en Afrique, suivie par des accords de libéralisation
des échanges entre l'Union européenne et ces ensembles régionaux, pour les pays
qui le souhaitent et après une phase de transition.
Il faudra, dans ce contexte, faire valoir notre point de vue dans le cadre de
l'organisation mondiale du commerce, l'OMC. A cet égard, une meilleure
concertation de l'Union européenne avec les institutions financières
internationales est également indispensable dans le contexte des relations avec
les pays ACP.
De façon générale, les intérêts des pays les plus pauvres devront être
préservés, et la lutte contre la pauvreté placée au coeur du nouveau
partenariat.
Lors des premiers débats entre Européens, il est apparu que l'aide aux pays
les moins avancés, les PMA, serait un fondement du futur Lomé. De même, la
préoccupation de lutte contre la pauvreté devra permettre de renforcer les
actions de l'Union européenne en faveur de l'intégration régionale, de
l'environnement, du développement du secteur privé, de la santé, de l'éducation
et du développement institutionnel.
Enfin, j'ajouterai que, de notre point de vue, l'enveloppe financière devra
être maintenue. Il nous faudra convaincre nos partenaires européens de
préserver, pour le moins, l'enveloppe financière accordée aux pays ACP.
Mais il me faut revenir aux trois accords qui nous préoccupent plus
spécifiquement aujourd'hui.
J'ai déjà évoqué l'accord de l'île Maurice, que l'on appelle « Lomé IV révisé
».
Le deuxième accord marque l'adhésion des nouveaux Etats membres de l'Union -
Suède, Autriche et Finlande - à la convention de Lomé.
Le troisième accord comporte enfin les moyens financiers que la Communauté met
à la disposition des pays ACP au titre du VIIIe FED.
Ce dernier accord, interne à la Communauté, signé en décembre 1995 par les
représentants des gouvernements des Etats membres, fixe les ressources,
l'affectation et les modalités de gestion du VIIIe FED pour la période
1996-2000, non seulement pour les pays ACP, mais aussi pour les pays et
territoires d'outre-mer associés à l'Union.
Cet accord interne fixe aussi le mode de financement du VIIIe FED, dont le
montant total, y compris les interventions de la Banque européenne
d'investissement, la BEI, s'élève à près de 15 milliards d'écus. Le FED est
alimenté par les contributions volontaires des Etats membres placées hors du
budget communautaire. La France, à hauteur de 24,3 %, en devient le premier
contributeur devant l'Allemagne.
Cet effort - faut-il le rappeler ? - était indispensable au maintien en termes
réels de l'effort européen en faveur des pays ACP et des pays et territoires
d'outre-mer, maintien acquis à l'issue du Conseil européen de Cannes, en juin
1995, sous présidence française de l'Union européenne. Il faut bien convenir
que seul l'engagement de la France a permis de débloquer une négociation
particulièrement difficile, afin que l'Union ne néglige pas son engagement en
faveur des pays en développement.
Il reste, chaque fois que possible, à faire savoir, notamment aux pays
bénéficiaires de ces accords, la part que la France prend précisément dans ce
FED.
L'accord établit par ailleurs l'affectation de ces financements, tant au
bénéfice des 70 pays ACP - 13 milliards d'écus du FED et près de 1,7 milliard
d'écus de la BEI - que des pays et territoires d'outre-mer - 165 millions
d'écus du FED et 30 millions d'écus de la BEI - associés à l'Union.
Les divers instruments de la convention - subventions pour des projets
nationaux ou régionaux, système de stabilisation des recettes d'exportation
(Stabex), facilité de financement spéciale pour les produits miniers (Sysmin),
ajustement structurel - sont dotés d'enveloppes couvrant la même période.
Pour les pays et territoires d'outre-mer, dont les nôtres - Mayotte,
Saint-Pierre-et-Miquelon et les terres Australes et Antarctiques françaises -
ces financements seront mis en oeuvre grâce à l'accord politique intervenu au
Conseil des affaires générales du 6 octobre dernier sur la révision de la
décision d'association des pays et territoires d'outre-mer à l'Union
européenne.
En vertu de la répartition de l'aide programmable du VIIIe FED obtenue à cette
occasion, nos territoires bénéficieront, dans un premier temps, d'un montant de
50,3 millions d'écus sur cinq ans qui sera complété par les sommes versées dans
le cadre des autres formes d'aide.
L'adoption de ces financements indispensables au développement de nos
territoires d'outre-mer et collectivités concernées ne fait pas obstacle à ce
que nous parvenions, dans un proche avenir, à la création d'un fonds européen
spécifique, distinct du FED.
Telles sont, monsieur le président, madame le rapporteur, mesdames, messieurs
les sénateurs, les principales dispositions de l'accord portant modification de
la convention de Lomé IV ACP-CE et de son protocole faisant suite à l'adhésion
de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède, signés à Maurice le 4 novembre
1995, et de l'accord interne à la Communauté relatif au financement et à la
gestion des aides de la Communauté dans le cadre du VIIIe FED, signé à
Bruxelles, le 20 décembre 1995, qui font l'objet des trois projets de loi
aujourd'hui proposés à votre approbation.
(Applaudissements sur les travées
socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.
M. Hamel applaudit également).
M. le président.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Paulette Brisepierre,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, je ne voudrais pas revenir ici sur l'analyse du dispositif des
trois accords concernant Lomé IV, dont le contenu vient de nous être clairement
résumé.
Ces trois textes doivent plutôt être l'occasion, d'une part, de dresser un
bilan du fonctionnement des accords de Lomé et, d'autre part, d'analyser les
enjeux que présente la mise en oeuvre d'un partenariat complètement renouvelé
entre l'Union européenne et les 71 pays du groupe des Etats ACP à l'horizon
2000.
Le bilan des accords de Lomé apparaît contrasté.
A l'actif, il convient sans doute, d'abord, de citer la mise en place d'une
coopération prévisible et durable à travers une programmation pluriannuelle de
l'aide. Mais l'acquis principal réside, sans doute, dans le maintien d'un lien
privilégié entre les pays du Sud et l'Europe.
Ce lien a subsisté malgré les vicissitudes de l'histoire, et il trouve
aujourd'hui sa traduction concrète dans le soutien financier apporté par le
Vieux Continent aux Etats ACP. Ainsi, si l'on ajoute aux fonds communautaires
les contributions nationales de chacun des Etats membres, l'aide européenne
représente plus de la moitié de l'aide totale apportée par les pays
industrialisés et 60 % de l'aide apportée à l'Afrique subsaharienne.
Toutefois, il faut le reconnaître, au regard des moyens déployés les résultats
peuvent apparaître modestes.
En premier lieu, la coopération européenne n'a pu prévenir le mouvement de
marginalisation économique et commerciale de l'Afrique. Ainsi, entre 1960 et
1992, le revenu par habitant en Afrique subsaharienne a progressé presque trois
fois moins que le revenu de l'ensemble des pays en développement. En outre, la
part de l'Afrique subsaharienne dans le commerce mondial ne dépasse pas 2 %.
De façon plus paradoxale, les exportations de la zone ACP vers l'Union
européenne ont moins progressé que les exportations venant des autres pays en
développement. Les parts de marché des pays ACP se sont donc dégradées : elles
se sont même réduites de moitié entre 1994 et 1996.
Comment expliquer ces mauvais résultats ? Une part de responsabilité revient
évidemment à la mauvaise gestion économique de beaucoup d'Etats en Afrique et
ailleurs. En outre, les préférences commerciales accordées par la Communauté se
sont érodées sous l'effet de la libéralisation des échanges organisés dans le
cadre du GATT.
Mais les défauts propres à l'aide européenne ne sauraient être oubliés : la
complexité et la lenteur des procédures - j'insiste sur la lenteur, car c'est
notre gros défaut - l'absence d'une vision cohérente de l'aide au
développement, l'insuffisance de la coordination avec les autres bailleurs de
fonds.
L'échéance de la convention de Lomé IV en l'an 2000 sera l'occasion de
remettre à plat les termes du partenariat entre l'Union européenne et les Etats
ACP et, justement, de corriger certaines des lacunes de la convention
actuelle.
Toutefois, la négociation ne s'engage pas sous des auspices très favorables.
En moins d'une décennie, les priorités européennes se sont déplacées des pays
ACP vers les pays d'Europe centrale ou orientale dans un contexte marqué, par
ailleurs, par les restrictions budgétaires.
A cet égard, l'évolution de la dotation réservée aux pays ACP apparaît très
révélatrice. Elle a baissé en effet de façon continue entre 1990 et 1997, et ne
représente que 33 % de l'aide extérieure de la Communauté, contre 65 % en
1990.
L'Allemagne regarde plutôt vers l'Est et cherche à favoriser l'intégration des
pays d'Europe centrale et orientale à l'Union. Le Royaume-Uni, quant à lui,
défend la mise en place d'un dispositif de préférences généralisées pour
l'ensemble des pays en développement dans un délai de cinq ans. C'est, dès
lors, la spécificité même de la relation nouée avec les Etats ACP qui est en
jeu.
La France a, pour sa part, intérêt à sauvegarder le principe d'un lien
privilégié avec l'ensemble géographique formé par les pays ACP, en raison du
soutien traditionnel qu'elle apporte aux pays africains. Contre la tentation du
repli ou de la banalisation des relations entre l'Europe et la pays du Sud, la
France doit défendre les principes qui fondent le partenariat Union européenne
- ACP.
Ces principes, il faut le rappeler, reposent sur la conjonction de trois
éléments : un dialogue politique étroit, un régime commercial préférentiel et
une aide publique au développement importante.
Le volet commercial, certes essentiel, n'a pas vocation à éclipser les deux
autres dimensions de l'accord de Lomé. En outre, l'approche commerciale
elle-même ne saurait se résumer à la recherche exclusive du libre-échange.
Par ailleurs, la cohésion du groupe ACP doit être préservée. En effet, cette
cohésion constitue incontestablement un facteur d'influence dans les
négociations commerciales à l'échelle mondiale où les intérêts des pays en
développement ne sont pas toujours reconnus.
L'Europe peut se flatter d'avoir favorisé une telle évolution. Cet acquis doit
être sauvegardé. C'est pourquoi il est important d'inscrire le partenariat
Union européenne-ACP dans le cadre d'un accord global commun, même si des
accords complémentaires négociés sur une base régionale pourraient, dans ce
cadre commun, prendre en compte les différences de situations économiques des
pays bénéficiaires de l'aide européenne.
Enfin, la politique d'aide doit être révisée dans le sens d'une plus grande
efficacité. A cette fin, il faut simplifier les procédures et les rendre plus
transparentes pour les bénéficiaires. La bureaucratie bruxelloise a beaucoup de
progrès à accomplir dans ce sens.
En outre, la priorité doit être accordée à la coordination entre les efforts
de chacun des Etats membres et l'action communautaire. C'est un impératif non
seulement pour la cohérence de l'aide au développement, mais aussi pour la
bonne gestion des deniers publics.
En conclusion, l'Afrique et, au-delà, l'ensemble des pays ACP constituent un
atout précieux, voire indispensable, pour le rayonnement de l'Europe dans le
monde.
Par ailleurs, la crise des pays asiatiques peut conduire les entreprises à
regarder davantage vers le continent africain, qui a renoué avec la croissance
depuis plusieurs années.
En ce sens, aider l'Afrique, c'est aussi servir l'intérêt bien compris de
l'Europe. C'est à la France qu'il appartient de convaincre nos partenaires de
préserver le lien Union européenne-ACP. La ratification des trois accords liés
à la convention de Lomé IV constitue, à cet égard, un préalable. C'est pourquoi
la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous
invite, mes chers collègues, à donner un avis favorable sur les trois projets
de lois.
(M. Henri Belcour applaudit.)
M. Xavier de Villepin,
président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Mauroy.
M. Pierre Mauroy.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'examen des modifications de la convention de Lomé IV nous offre l'occasion de
dresser le bilan des mérites et des limites de cette forme de coopération.
Comme tout bilan, il n'a de sens que si nous engageons une réflexion sur les
perspectives de ce partenariat.
Le partenariat entre l'Union européenne et l'espace ACP constitue l'une des
formes les plus élaborées et les plus originales de la construction
communautaire en matière de politique étrangère. C'est aussi un axe fort de la
politique extérieure française. Notre débat d'aujourd'hui est l'occasion de
souligner les tendances à combattre pour l'avenir.
Un premier risque à éviter est d'évoluer vers une relation unilatérale entre
donateurs et bénéficiaires et d'accentuer ainsi les situations de
dépendance.
Un autre risque réside dans la perte sensible par les pays ACP de leurs parts
de marché dans l'Union européenne et dans leur impuissance à opérer
l'indispensable diversification de leurs économies.
La révision à mi-parcours de la IVe convention a permis quelques progrès,
limités mais encourageants.
Je citerai d'abord le renforcement du volet politique et institutionnel, la
réaffirmation de l'exigence de respect de l'état de droit, puis l'amélioration
de la coopération commerciale, même si, en ce domaine, les effets positifs sont
dus plus à la logique du système préférentiel qu'au développement économique
des pays ACP.
Il est donc important que le nouveau protocole financier, marqué par la
continuité, vise à assurer une utilisation plus efficace des ressources
financières du Fonds européen de développement, dont la France est aujourd'hui
le premier contributeur.
Le rapporteur de la commission, notre collègue Paulette Brisepierre, avait
raison de le rappeler, l'effort de la Communauté en faveur de la zone ACP a
décru de façon significative au cours des dernières années, en dépit de
l'augmentation de douze à quinze du nombre de donateurs.
Disons-le, le bilan de Lomé IV est contrasté, voire mitigé. Il atteste, c'est
vrai, de la validité de cette forme vitale de coopération instaurée par la
première convention de 1975. Mais il en atteste aussi la fragilité, dès lors
que les résultats sont en demi-teinte. C'est pourquoi, à l'approche des
négociations préparatoires à un nouvel accord, la question est bien de savoir
si nous saurons surmonter la fragilité de ce système, en conforter la validité,
afin de réussir à rénover le partenariat de Lomé.
Pour nous socialistes, l'enjeu aujourd'hui n'est pas seulement Lomé IV. Je le
dis tout de suite, monsieur le secrétaire d'Etat, nous allons voter les trois
projets de loi présentés aujourd'hui. Mais nous sommes ici aussi pour réclamer
Lomé V, et vous-même en avez ouvert la perspective.
Je sais que pour certains la nécessité de cette rénovation ne va pas de soi.
Elle est pourtant indispensable.
Elle est une nécessité pour les pays ACP, qui ont besoin de cette coopération
fondée sur le respect mutuel.
Elle est aussi une exigence pour l'Europe, qui, dans le cadre de sa politique
étrangère et de sécurité commune, doit s'affirmer comme solidaire et généreuse,
sauf, bien sûr, pour ceux qui acceptent comme inéluctable que la mondialisation
entraîne un nouvel asservissement des pays les plus pauvres par les plus
riches. Cela, naturellement, nous socialistes, nous ne l'acceptons pas.
La mondialisation doit au contraire être un outil au service d'un nouvel
équilibre et d'une nouvelle solidarité entre les peuples, pour bâtir sur ces
bases un développement économique et social durable.
C'est pourquoi Lomé V doit voir le jour avec la naissance du prochain
siècle.
Ce n'est pas pour l'Europe une question de moyens. Les moyens, elle les
détient. Qu'elle cesse d'être frileuse, cette Europe, et d'agir comme si elle
était sans force. Elle peut peser face au FMI, à la Banque mondiale, à
l'Organisation mondiale du commerce. Les Quinze disposent en effet, on l'oublie
trop souvent, de près de 29 % des droits de vote au sein des institutions
financières internationales.
C'est simplement une question de volonté politique : pour affirmer son
identité dans l'optique de la mondialisation, l'Europe doit reconnaître la
nécessité de rénover son partenariat.
Ainsi, à condition que l'Union européenne sache redessiner les contours de sa
politique de coopération à l'égard des pays de la zone ACP, Lomé V pourra être
un instrument de la refondation des relations Nord-Sud.
Trois priorités doivent pour ce faire être fortement affichées. Elles sont
indispensables pour marquer les politiques en cours qui doivent préparer
l'élaboration de Lomé V.
Il s'agit tout d'abord d'une priorité économique.
A cet égard, la relation entre l'Europe et les pays ACP doit tendre à
atteindre deux objectifs majeurs.
Le premier est de diversifier les économies.
Malgré leurs mérites, les précédentes conventions ont enfermé les pays ACP
dans leur rôle de fournisseurs de matières premières.
Aujourd'hui, l'Afrique exporte 75 % de matières premières et 25 % seulement de
produits industrialisés. Ce n'est pas un hasard si le rapport est exactement
inverse en Asie.
Il faut diversifier pour faciliter le décollage économique et sortir les pays
du Sud de la marginalisation. Aussi, plutôt que d'en appeler à une meilleure
rémunération des matières premières, faudra-t-il trouver un espace de dialogue
pour débattre des accords commerciaux et prendre en compte à la fois la
question de l'emploi en Europe et celle du développement dans les pays ACP.
Le second objectif est, comme vous l'avez souligné, monsieur le secrétaire
d'Etat, de privilégier des dynamiques régionales.
La promotion de projets régionaux intégrés dans l'espace ACP autour de
secteurs essentiels, comme le développement des infrastructures de
communication, la maîtrise de l'énergie et le contrôle de l'eau, s'impose
désormais comme une approche mieux appropriée que le strict cadre bilatéral.
Cependant, une coopération réduite à sa dimension économique s'avérerait vite
limitée à des relations commerciales. C'est pour conjurer ce risque, réel,
qu'il importe - c'est la deuxième priorité - de donner au partenariat entre
l'Union européenne et les pays ACP une dimension plus sociale.
La préoccupation essentielle, dès lors qu'on admet la complémentarité entre la
lutte contre la pauvreté et l'amélioration de la compétitivité, est d'assurer
la répartition équitable des fruits de la croissance.
Les gouvernements doivent être encouragés à appuyer leurs projets de
développement sur la société civile, les forces vives de la population, afin
que les aides profitent au plus grand nombre.
Cette participation et cette responsabilisation des populations supposent
naturellement que celles-ci aient accès dans les meilleures conditions
possibles à l'information et à la formation. Cela est particulièrement vrai
pour les jeunes filles, dont l'amélioration du niveau d'éducation est un
facteur essentiel pour le développement de politiques de santé et de maîtrise
démographique.
Dernière priorité : cet espace Union européenne - pays ACP doit avoir pour
caractéristique première de se fonder sur le renforcement de l'état de droit et
de la bonne gouvernance, sur la consolidation des principes démocratiques et le
respect de tous les droits de la personne humaine.
L'objectif premier de la coopération de l'Union européenne à l'égard des pays
ACP ne doit-il pas être de leur permettre de trouver leur existence propre,
leur identité ? Cela suppose que ces pays aient la capacité de gérer eux-mêmes
leur propre développement et donc qu'ils disposent d'institutions stables et
démocratiques. C'est sur cette base que l'espace ACP trouvera son existence
propre et pourra définir son identité spécifique, notamment par des efforts
d'intégration régionale.
Les conditions d'une telle évolution existent désormais dans bien des pays ACP
où le multipartisme est aujourd'hui légalisé, où une nouvelle génération
politique s'est engagée dans le combat pour la démocratie. Nous savons bien
qu'il n'existe pas de développement durable sans démocratie stable, et qu'un
partenariat qui ignorerait les aspirations des peuples à la liberté et à la
dignité serait tronqué. Je souhaite donc insister vivement pour que l'Union
européenne, au moment où elle est confrontée aux perspectives de son
élargissement, ne se dérobe pas à sa responsabilité et à ses engagements à
l'égard de la zone ACP.
En conclusion, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, il est acquis que la règle du jeu à l'aube du xxie siècle est la
mondialisation. Il serait exagéré, voire absurde, de penser qu'un partenariat
rénové entre l'Union européenne et l'espace ACP pourra redistribuer les cartes.
Mais il pourra certainement changer la donne pour renforcer les atouts des pays
les plus fragiles.
Certes, quarante et un des cinquante pays les moins avancés du monde
appartiennent à l'espace ACP. Mais, dans le même temps, la situation économique
s'est améliorée dans un nombre croissant de pays de ce groupe. Il est donc
réaliste d'envisager leur avenir avec espoir, d'autant que, ne nous y trompons
pas, l'équilibre économique et démocratique du monde ne se réalisera pas les
uns contre les autres, ni les uns sans les autres, mais bien les uns avec les
autres, dans une relation solidaire et confiante.
Cette relation solidaire et confiante est bien dans l'esprit des accords de
Lomé, de ceux dont nous débattons aujourd'hui et de ceux que nous préparons
pour demain.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous savons que c'est bien dans cette direction
que vous travaillez, que l'ensemble du Gouvernement travaille, et nous y sommes
très sensibles.
Plus largement, je sais bien que la tentation est de se détourner de ces pays
ACP. Pourtant, aider les pays ACP, c'est aider l'Europe, c'est aider la France
!
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen. - Mme Brisepierre applaudit
également.)
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
discussion de ces trois conventions nous permet d'esquisser le bilan des
conséquences et des suites de la convention de Lomé.
Cette convention, signée, en février 1975, voilà vingt-trois ans, avec
quarante-six pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, s'est élargie à
cinquante-huit pays ACP en 1979, à soixante-six pays en 1984, à soixante-neuf
pays en 1989, et nous voici aujourd'hui à plus de soixante-dix pays ACP
membres.
Le traité prévoyait dès l'origine un système de coopération déployant toutes
les techniques d'aide au développement. Hélas ! en dépit des excellentes
intentions de ses organisateurs, ce système a eu des résultats dont vous avez
dit, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'ils étaient relativement décevants.
Quant à Mme le rapporteur, elle les a qualifiés de très mitigés et M. Mauroy
vient de parler de résultats en demi-teinte.
Le moment est donc venu d'examiner ce qui n'a pas « marché », car la
convention de Lomé V se profile avec l'an 2000. A cet égard, je crois que l'on
n'a peut-être pas suffisamment souligné un élément qui me semble avoir quelque
importance : les trois locomotives, les trois promoteurs des relations entre
l'Union européenne et l'ensemble ACP ne sont pas toujours d'accord sur les
moyens et ne poursuivent pas toujours les mêmes fins.
L'Allemagne, tout d'abord, a donné aux accords de Lomé un caractère plus
commercial que ne l'ont fait certains de ses partenaires, la France en
particulier.
Surtout, depuis la chute du mur de Berlin, la grande priorité de l'Allemagne a
bien sûr été le rapprochement avec les pays d'Europe centrale et orientale et
leur intégration à l'Union européenne.
Telles ne sont pas du tout les orientations de la Grande-Bretagne, qui garde
sous-jacente dans ses choix l'idée du Commonwealth et préserve les intérêts
particuliers de cet ensemble qu'elle dirige au nom du rassemblement autour de
la langue et des traditions historiques anglaises.
Enfin, pour ce qui nous concerne, nous Français, nous avons le souci légitime
de sauvegarder le lien privilégié qui existe entre la France et toutes les
nations francophones.
Aujourd'hui, nous ne pouvons que constater cet état de choses à l'occasion de
la ratification de conventions qui auraient dû être ratifiées voilà quelque
temps déjà. Mais la préparation des accords de Lomé V, dont nous souhaitons le
succès, devrait être pour nous l'occasion d'insister sur la nécessité d'une
entente entre toutes les nations ayant le plus grand rôle à jouer dans le
renforcement des liens entre l'Europe et ces nations en voie de
développement.
Ce souci exprimé, je voterai, bien évidemment, les trois projets de loi qui
nous sont soumis.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat.
Les interventions qui ont succédé à la mienne me
paraissent justifier quelques brèves observations de ma part.
Je veux tout d'abord souligner la qualité de Mme Brisepierre en tant que
rapporteur.
M. Emmanuel Hamel.
Elle est évidente et reconnue par tous !
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat.
Certes, et je remercie Mme le rapporteur de son
soutien à ce texte et, au-delà, à la relation singulière entre l'Europe et les
pays ACP.
Je rejoins en particulier son souhait de voir le régime commercial
préférentiel lié à l'aide publique au développement, l'APD. Nous nous situons
là dans la ligne directe du débat qui s'est tenu à Denver.
La France n'entend pas, elle, opposer l'investissement privé ou le commerce à
l'aide publique au développement et considère que cette aide demeurera, pendant
longtemps encore, tout à fait nécessaire.
M. Mauroy a quant à lui insisté sur les résultats que la convention de Lomé a
permis d'obtenir, résultats qui sont en effet en demi-teinte.
Il y a quand même une bonne nouvelle : pour la première fois sans doute dans
leur histoire, le taux de croissance du PIB de la plupart des pays africains de
la zone franc dépasse le taux de croissance démographique. C'est très
encourageant et c'est un point d'appui.
Nous avons d'ailleurs décidé, en application d'une décision prise lors de la
réunion des ministres de la zone franc qui s'est tenue en septembre dernier,
d'organiser cette année une campagne de communication pour mieux faire
connaître la réalité de ces pays et modifier la vision pessimiste qui les
dessert et en détourne très souvent les investisseurs.
Nous aurons un sujet supplémentaire de communication : l'arrivée de l'euro
suscite de nombreuses inquiétudes, qu'il nous faut absolument dissiper pour
inverser l'argument et faire la preuve que l'euro est également une chance pour
les pays ACP concernés, notamment ceux de la zone franc.
Vous avez insisté aussi, monsieur Mauroy, sur la nécessité de donner une
dimension plus sociale à nos politiques d'aide. Evidemment, vous rejoignez là
les préoccupations du Gouvernement !
Quant à la relation entre développement et démocratie - vous avez évoqué la
bonne gouvernance - il est vrai que, même si quelques pays qui ne sont pas des
démocraties ont actuellement un taux de développement satisfaisant alors que
d'autres, qui sont des démocraties, ont des difficultés, il n'y a pas de
développement durable sans démocratie, ni de démocratie durable sans
développement. C'est une vérité sur laquelle il convient d'insister.
Je veux dire enfin à M. Habert que je rencontrerai demain à Londres Mme Clare
Short, mon homologue.
La position de la Grande-Bretagne demeure en effet quelque peu différente de
la nôtre, notamment en ce qui concerne le périmètre des futurs accords qu'elle
souhaiterait étendre au-delà de ce que nous envisageons, ce qui remettrait en
question la logique géographique des accords ACP. Nous y sommes donc plutôt
opposés.
Je peux cependant vous indiquer que nos voisins allemands, qui étaient d'abord
très réservés, sont aujourd'hui favorables à la poursuite de la relation à
laquelle vous avez marqué, les uns et les autres, votre attachement.
MODIFICATION
DE LA QUATRIÈME CONVENTION ACP-CE DE LOMÉ
M. le président.
Nous passons à la discussion de l'article unique du premier projet de loi.
«
Article unique
. - Est autorisée la ratification de l'accord portant
modification de la quatrième convention entre la Communauté européenne et ses
Etats membres, d'une part, et le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du
Pacifique, d'autre part (dite convention ACP-CE de Lomé), signé à Maurice le 4
novembre 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Je vais mettre aux voix l'article.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
notre groupe votera les trois projets de loi relatifs aux accords de Lomé
malgré les réserves que nous portons sur l'état de la coopération avec les pays
concernés, réserves que nous avons suffisamment développées pour que je n'y
insiste pas.
En effet, l'aide publique au développement est en forte régression dans le
monde. Cela est malheureusement particulièrement vrai de l'aide accordée par la
première puissance mondiale, les Etats-Unis.
Il ne nous semble pas acceptable, à l'orée du xxie siècle, que les pays
africains dépensent quatre fois plus pour la résorption de leurs dettes que
pour leurs services de santé, alors que l'on connaît les terribles menaces qui
pèsent sur le continent africain en la matière, notamment à cause du sida.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai été bien sûr très intéressée par vos
informations qui indiquent une amélioration de la situation économique de
certains pays africains. Mais cette amélioration n'élimine pas, hélas ! tous
les problèmes.
Par notre vote positif, nous souhaitons marquer notre attachement à la
préservation d'acquis inscrits dans les accords de Lomé IV et aujourd'hui
menacés.
Nous estimons que la coopération entre pays riches et pauvres constitue le
défi essentiel pour les décennies à venir. Le développement harmonieux des
Etats concernés est en cause, mais aussi, au-delà d'eux, l'évolution de
l'humanité.
Des décisions quant à l'annulation de la dette, à la taxation des mouvements
de capitaux et des délocalisations sont autant de décisions à prendre, et de
façon urgente, pour franchir une étape décisive en faveur du développement.
Le phénomène dit de la mondialisation rime aujourd'hui avec une exploitation
renforcée par les grandes puissances financières de zones du globe riches en
matières premières et où la main-d'oeuvre est à bon marché, mais qui sont,
hélas ! désertées par le droit du travail.
Faire face à la mondialisation, pensée sous le seul angle du libéralisme le
plus sauvage, doit être, selon nous, l'objectif des futures négociations entre
les pays d'Afrique, des Caraïbes, du Pacifique et l'Union européenne.
Cette dernière doit jouer un rôle nouveau afin d'être le moteur de la réussite
du processus de codéveloppement.
Nous voterons donc le présent texte, mais nous tenions à exprimer ces quelques
remarques.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
protocole
à la quatrième convention acp-ce de lomé
M. le président.
Nous passons à la discussion de l'article unique du deuxième projet de loi.
«
Article unique
. - Est autorisée la ratification du protocole à la
quatrième convention entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une
part, et le groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'autre
part (dite convention ACP-CE de Lomé), à la suite de l'adhésion de la
République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à
l'Union européenne, signé à Maurice le 4 novembre 1995, et dont le texte est
annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
accord interne relatif au protocole financier
de la quatrième convention acp-ce de lomé
M. le président.
Nous passons à la discussion de l'article unique du troisième projet de
loi.
«
Article unique.
- Est autorisée la ratification de l'accord interne
entre les représentants des gouvernements des Etats membres, réunis au sein du
Conseil relatif au financement et à la gestion des aides de la Communauté dans
le cadre du second protocole financier de la quatrième convention ACP-CE, fait
à Bruxelles le 20 décembre 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi.
»
Personne ne demande la parole ?
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
8
TRAITÉ D'ENTENTE,
D'AMITIÉ ET DE COOPÉRATION
AVEC L'ALBANIE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 202, 1996-1997),
adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification d'un traité
d'entente, d'amitié et de coopération entre la République française et la
République d'Albanie. [Rapport n° 182 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, par le
projet de loi qui vous est présenté, le Gouvernement demande au Sénat de bien
vouloir autoriser la ratification du traité d'entente, d'amitié et de
coopération signé entre la France et l'Albanie le 12 décembre 1994 à l'occasion
d'une visite en France du Premier ministre albanais.
Ce traité est de même nature que ceux qui ont été signés avec les pays
d'Europe centrale et orientale après la chute du mur de Berlin. Ses deux
principaux objectifs sont de créer un cadre favorable au développement de nos
relations bilatérales avec l'Etat albanais et de les situer dans une
perspective européenne.
La France et l'Albanie entendent placer le développement de leur coopération
dans le contexte de la construction d'une Europe pacifique, solidaire et
prospère.
Le traité tient compte du souhait de l'Albanie de développer ses relations
avec l'Union européenne et d'adhérer au Conseil de l'Europe, ce qui est chose
faite depuis le 13 juillet 1995.
S'agissant de nos relations bilatérales, ce traité vise à développer nos
relations culturelles, qui n'avaient jamais cessé, même dans la période la plus
fermée du régime d'Enver Hodja, et à identifier de nouveaux domaines de
coopération, notamment économique.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a
effectué une mission à Tirana en novembre 1997. Elle a pu se rendre compte que
les objectifs assignés à ce traité répondent à une nécessité. L'on sait les
difficultés que l'Albanie a connues au cours du printemps dernier.
La France, qui a participé activement au déploiement d'une force
multinationale de protection sur le territoire albanais, a, vous le savez, pris
avec ses partenaires européens, toutes ses responsabilités.
La volonté, telle qu'elle est exprimée dans ce traité, d'oeuvrer en faveur
d'une Europe pacifique et solidaire et de permettre à l'Albanie de prendre la
place qui lui revient dans la grande famille européenne ne doit pas être
démentie. Les difficultés économiques et politiques que connaît l'Albanie
depuis ces événements tragiques ne sauraient nous faire dévier de cet objectif.
La stabilité de ce pays est indispensable à la stabilité de la région et
indissociable de nos intérêts de sécurité dans les Balkans.
L'aspiration naturelle de l'Albanie à trouver sa place dans les différentes
institutions de l'Union européenne doit être encouragée et soutenue. Les étapes
qu'il lui faudra franchir sont évidemment nombreuses.
L'Albanie et l'Union européenne sont liées par un accord de coopération signé
en 1992. Le Conseil des ministres des affaires étrangères des Quinze a décidé
le 10 novembre dernier de réactiver cet accord. Un dialogue politique appelé à
devenir régulier s'est d'ailleurs ouvert le 27 janvier, à Bruxelles, par une
première réunion entre les représentants des ministres des affaires étrangères
des Quinze et leur homologue albanais, M. Paskal Milo.
Avant d'aborder l'aspect de nos relations bilatérales proprement dites, je
tiens à souligner que notre effort en direction de l'Albanie doit être jugé à
l'aune de ce que nous entreprenons et finançons en conséquence au plan
multilatéral.
Je pense notamment à l'assistance très importante que nous apportons à
l'Albanie dans le cadre de l'Union européenne - 557 millions d'écus entre 1991
et 1996, 142 millions et d'écus pour 1997 et 1998, c'est-à-dire la plus forte
aide de l'Union européenne
per capita -
assistance qui se concentre sur
les réformes administratives et institutionnelles, les infrastructures,
l'agriculture, le développement local.
Nous développons également notre action par l'intermédiaire de l'UEO, l'Union
de l'Europe occidentale, qui a mis en place en Albanie un élément de conseil en
matière de police, dont la mission est d'aider à la réhabilitation des forces
de police. Nous y sommes particulièrement actifs puisque cet élément est dirigé
par un colonel français et compte douze gendarmes français sur un effectif de
soixante-quatre hommes. Cet engagement nous paraît répondre à la nécessité
d'oeuvrer en Albanie en faveur du maintien de l'ordre dans le respect des
règles d'un Etat de droit.
La mission qu'a effectuée la commission des affaires étrangères, de la défense
et des forces armées du Sénat a contribué à nourrir le dialogue politique entre
nos deux pays, ce dont nous nous réjouissons. Peu de responsables politiques se
sont effectivement déplacés en Albanie ces dernières années. Le président du
Sénat, M. Monory, s'était rendu à Tirana en mars 1996. La visite que devait y
effectuer, en février 1997, M. Barnier, alors ministre délégué aux affaires
européennes, avait dû être annulée compte tenu des événements.
Mais nos relations politiques n'en sont pas pour autant limitées. Nos deux
Présidents de la République se sont rencontrés en marge du sommet de Strasbourg
en octobre 1997 et nos deux Premiers ministres, à Paris, au cours du même mois.
Des rencontres avec des représentants du gouvernement albanais sont aménagées à
chaque occasion. C'est ainsi que M. Vaillant, ministre des relations avec le
Parlement, s'est entretenu avec le ministre d'Etat chargé des réformes
institutionnelles en Albanie, M. Arben Imami, le 30 janvier dernier.
Il s'agit enfin de renforcer une présence culturelle française dans un pays où
l'on compte près de 30 % de francophones. Comme le souligne le rapport de votre
commission des affaires étrangères, il est exact que l'ouverture de l'Albanie
sur l'extérieur risque de réduire la place du français dans ce pays et les
solides acquis que nous y avons gagnés. Malgré la réduction des crédits
d'intervention dévolus à notre coopération culturelle, nous n'entendons pas
pour autant réduire notre effort.
Nous avons également choisi de privilégier dans ce domaine une approche
multilatérale plutôt que bilatérale. C'est pourquoi nous avons fermement
soutenu la candidature de l'Albanie à un statut d'observateur au sein des
institutions de la francophonie lors du sommet de Hanoi. Cet engagement ne
pourra qu'inciter l'Albanie à développer son action en faveur de la langue
française.
Dans le domaine économique, nos relations demeurent modestes. La France arrive
au sixième rang, loin derrière l'Italie, la Grèce, l'Allemagne, la Turquie et
l'Autriche. Nos échanges commerciaux sont toutefois marqués par un fort
excédent et par une progression rapide de nos exportations. Les problèmes
économiques que rencontre l'Albanie ne permettent pas d'espérer un
développement rapide et substantiel de nos relations, mais les perspectives de
financements multilatéraux sur ce pays ne sont pas à négliger.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle le traité
d'entente, d'amitié et de coopération entre la République française et la
République albanaise, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à
votre approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. André Rouvière,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, les graves événements survenus voilà tout juste un an en
Albanie ont différé l'examen par la Haute Assemblée du traité d'entente,
d'amitié et de coopération franco-albanais.
L'Albanie a en effet connu, au cours de l'hiver 1997, une situation
insurrectionnelle sans précédent, liée à l'effondrement de sociétés financières
douteuses, dites « pyramidales », qui avaient recueilli une très large part de
l'épargne de la population albanaise. De ce fait, du jour au lendemain, presque
toute la population s'est retrouvée ruinée.
Cette crise, qui est intervenue dans un contexte régional sensible en raison
de la question des Albanais du Kosovo et de Macédoine, a justifié
l'intervention d'une force multinationale, à laquelle la France a contribué.
Elle a entraîné la démission du Gouvernement et, à la suite de la dissolution
du Parlement, de nouvelles élections, qui ont provoqué, en juin 1997, un
renversement de majorité et l'arrivée au pouvoir du parti socialiste.
C'est dans ce nouveau contexte que l'Albanie tente aujourd'hui de renouer avec
la paix civile et de reconstruire son économie, avec l'aide de la communauté
internationale.
En dépit de sa proximité géographique, l'Albanie, longtemps isolée du reste de
l'Europe, demeure un pays mal connu. Afin de mieux apprécier son évolution
depuis l'avènement de la démocratie en 1992 et d'évaluer les conséquences de la
crise de l'hiver 1997, la commission des affaires étrangères a organisé en
Albanie, au mois de novembre dernier, une brève mission d'information à
laquelle j'ai eu l'honneur de participer avec notre collègue André Boyer.
Ce déplacement et les rencontres avec les principales autorités politiques du
pays nous ont permis de mesurer les difficultés que rencontre l'Albanie dans la
transition politique et économique qu'elle a entreprise en 1992.
Sur le plan intérieur, les élections de l'année dernière n'ont guère apaisé
les vives tensions qui caractérisent la vie politique albanaise. Comme en 1996,
la régularité de cette consultation a été contestée ; elle l'a été cette
fois-ci par le parti démocratique, qui boycotte depuis lors les travaux du
Parlement.
Ce parti a d'ailleurs adopté la même attitude à notre égard puisque, malgré
nos demandes répétées d'entrevues et les nombreuses invitations de notre
ambassadeur, nous n'avons pu rencontrer aucun de ses membres. L'impartialité de
l'Etat pour les nominations dans la fonction publique et dans l'armée est loin
d'être évidente. Quant au respect du pluralisme de l'information télévisée,
c'est un sujet permanent de controverses passionnées.
La mise au point d'une constitution destinée à remplacer les actuelles lois
provisoires se heurte à de fortes divergences sur la conception de l'équilibre
des différents pouvoirs, à propos notamment des prérogatives dévolues au
Président de la République.
L'ordre public et la paix civile ont été rétablis, ou presque, même si la
criminalité demeure, hélas ! très importante. Mais une quantité considérable
d'armes, pillées lors des émeutes de l'hiver dernier, reste disséminée au sein
de la population. L'armée et la police sont très affaiblies et leur
réorganisation est aujourd'hui un axe majeur de la coopération internationale,
notamment par le biais de l'OTAN et de l'UEO.
Sur le plan économique, l'Albanie sort appauvrie de la crise financière de
l'an passé. L'Etat a vu chuter ses ressources fiscales, alors que les
destructions considérables infligées aux infrastructures ainsi qu'aux bâtiments
publics et privés engendrent d'importants coûts de reconstruction. Pour
employer une image, je dirai que quasiment tout le pays a été pillé par sa
propre population.
Enfin, bien que toute contagion vers les pays voisins ait été évitée, le
contexte régional demeure une vive source de préoccupations. La situation de la
minorité albanaise de Macédoine et surtout celle du Kosovo, province serbe
peuplée à 90 % d'Albanais, constituent incontestablement un facteur de risque
pour la stabilité régionale.
Ce tableau assez sombre, qui traduit cependant la réalité de la crise vécue
par l'Albanie, ne doit pas occulter plusieurs motifs d'espoir.
L'économie albanaise dispose d'atouts incontestables, qui lui avaient permis,
durant près de cinq ans, d'afficher de forts taux de croissance, et la
communauté internationale, dès le mois d'octobre, a retenu le principe d'une
importante assistance financière. Celle-ci est certes conditionnelle et
implique la mise en oeuvre, par le gouvernement albanais, de mesures
rigoureuses et difficiles ; mais elle doit permettre à ce pays de retrouver la
voie du développement économique.
En matière diplomatique, le nouveau gouvernement a adopté une attitude modérée
sur la question du Kosovo et de la Macédoine afin de ne pas attiser les
tensions régionales. Des relations solides se sont nouées non seulement avec
l'Italie, premier partenaire de l'Albanie, mais aussi avec la Grèce, après des
décennies de rivalités.
Enfin, comme celui qui l'a précédé, le nouveau gouvernement albanais exprime
fermement sa volonté d'ancrer ce pays à l'Europe. Tel est le sens de
l'appartenance de l'Albanie au Conseil de l'Europe et à l'Organisation pour la
sécurité et la coopération en Europe, l'OSCE, ainsi que de l'aide conséquente
qu'elle a reçue et continue de recevoir de l'Union européenne.
Dans ce contexte, comment se présentent les relations entre la France et
l'Albanie et quelle peut être la portée du traité qui nous est soumis
aujourd'hui ?
Il me paraît essentiel de souligner tout d'abord la place de tout premier plan
occupée par le français en Albanie. Il serait parlé ou compris par 30 % de la
population, et une très large part de l'élite politique et intellectuelle est
parfaitement francophone. Tous les membres du gouvernement actuel parlent
français, de même que de nombreux parlementaires, comme nous avons pu le
constater. L'Albanie vient d'ailleurs, lors du sommet de Hanoï, de faire son
entrée en qualité d'observateur dans les instances de la francophonie.
La place remarquable du français en Albanie impose, de l'avis de la
commission, une exigence forte : la préservation de ce capital francophone qui
s'est maintenu même au plus fort de l'isolement du pays.
A cet égard, deux priorités nous paraissent devoir être retenues.
La première concerne l'enseignement français qui, sans aller dans l'immédiat,
comme le demandent les Albanais, jusqu'à la création d'un lycée français
équivalent à celui de Korçà, ouvert après la Première Guerre mondiale, pourrait
très utilement être développé dans le cadre de filières d'enseignement en
français dans les établissements albanais. Il s'agit d'une solution pragmatique
qui permettrait d'obtenir des résultats rapides.
La seconde priorité est la création d'un centre culturel, qui répond à un
besoin évident et qui, nous semble-t-il, pourrait fonctionner à un coût
raisonnable tout en bénéficiant d'un rayonnement important. Nous avons pu
participer à des manifestations animées par les représentants français. Nous
avons pu constater le succès qu'elles rencontraient dans la population, aussi
bien parmi les intellectuels et les politiques que parmi les étudiants.
Dans ces conditions, la commission a vivement déploré la forte baisse des
crédits de coopération culturelle consacrés à l'Albanie qui, de 8 millions de
francs en 1992, sont passés à 4 millions de francs en 1997. Monsieur le
secrétaire d'Etat, il faudrait renverser cette orientation. En effet, il serait
regrettable que l'acquis que nous avons pu constater en ce qui concerne le
français ne puisse pas être conservé. Nous souhaiterions même, bien sûr, qu'il
soit développé.
J'ajoute que, en dehors du domaine culturel, notre coopération a développé
quelques projets dans les secteurs de l'agriculture et de la santé.
La France apporte, par ailleurs, une contribution active à l'Elément
multinational de conseil en matière de police, ainsi que vous l'avez dit voilà
un instant, monsieur le secrétaire d'Etat.
En matière économique, les échanges franco-albanais demeurent faibles, la
France n'étant que le sixième partenaire de l'Albanie. On peut espérer que les
entreprises françaises pourront profiter des opportunités offertes par la
reprise de l'aide internationale et par l'octroi de financements multilatéraux.
A ce titre, je déplore vivement que, en l'absence de nomination d'un conseiller
financier, le poste d'expansion économique soit pratiquement en sommeil. Nous
attendons par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous puissiez
remédier à cette situation.
Le traité d'entente, d'amitié et de coopération entre la France et l'Albanie,
signé voilà déjà trois ans, est un texte tout à fait comparable aux nombreux
instruments analogues qui nous lient à la plupart des pays d'Europe centrale et
orientale. Il constitue essentiellement un cadre général symbolisant la volonté
des deux pays de renforcer leur coopération. Il consacre un volet au
renforcement de nos relations politiques bilatérales, qui sont aujourd'hui
limitées. Je rappellerai que, depuis l'avènement de la démocratie, un seul
ministre français s'est rendu en Albanie. Monsieur le secrétaire d'Etat, un
rattrapage de ce retard serait, je crois, particulièrement bien accueilli par
nos amis albanais.
Par ailleurs, le traité formalise le soutien de la France pour favoriser
l'ancrage de l'Albanie aux différentes institutions européennes.
Le traité évoque, enfin, les différents domaines de coopération bilatérale et
encourage les deux Etats à développer leurs relations économiques et
financières.
Au-delà des doutes qui ont pu apparaître il y a quelques mois sur l'avenir de
l'Albanie, il a semblé très important à la commission des affaires étrangères
de permettre la ratification de ce traité, si longtemps différée.
Alors qu'il recevait des mains du président Monory les insignes d'officier de
la Légion d'honneur, le grand écrivain albanais Ismaïl Kadaré déclarait, le 16
décembre dernier, à propos de son pays : « Ce peuple au lourd destin,
traumatisé et déchiré en deux, a besoin aujourd'hui plus que jamais, dans la
situation dramatique qu'il traverse, d'une parole qui ravive ses espoirs. »
L'adoption du projet de loi dont nous sommes saisies attestera, j'en suis
convaincu, de notre volonté de voir l'Albanie démocratique retrouver le chemin
de la paix civile et du développement, dans une région d'Europe qui compte déjà
suffisamment de facteurs potentiels d'instabilité.
Elle doit également être l'occasion de relancer nos relations bilatérales avec
ce pays, où nous disposons d'un réel capital de sympathie et où un renforcement
de notre coopération culturelle paraît indispensable.
Pour cet ensemble de raisons et sous le bénéfice de ces observations, la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous
propose d'adopter le présent projet de loi.
M. Xavier de Villepin,
président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Très bien !
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat.
Je tiens à dire à M. le rapporteur combien j'apprécie
la qualité de l'éclairage qu'il vient de nous donner sur la situation d'un pays
auquel nous nous intéressons tous.
Cette situation demeure, sur le plan politique, particulièrement tendue. Nous
savons ainsi que le parti démocratique a adressé un appel au boycott, et nous
observons que c'est, hélas ! une habitude dans ce pays : un parti battu aux
élections appelle nécessairement - si j'ose dire - au boycott.
Il faudra sans doute du temps avant que la démocratie s'enracine dans ce pays
- elle a été trop longtemps absente - mais nous n'entendons pas, en tout cas,
relayer les partis qui boycottent les travaux de l'assemblée et appellent à
l'organisation d'élections anticipées. Nous devons, en revanche, continuer
d'exercer des pressions pour ramener l'opposition au Parlement, favoriser la
réconciliation nationale et, à cette fin, faire pression sur le gouvernement
albanais.
Les élections législatives de 1997, contrairement à celles de juin 1996, ont
été jugées satisfaisantes par les observateurs, en particulier par le
coordinateur spécial de l'OSCE, Mme Catherine Lalumière.
Quant à vos espoirs en ce qui concerne la présence francophone, le secrétaire
d'Etat chargé de la francophonie que je suis par ailleurs ne peut qu'y être
sensible. Je veux simplement vous dire que, en dépit d'une réduction budgétaire
que je déplore comme vous, nous n'avons pas réduit notre dispositif culturel en
Albanie, et nous entendons le renforcer.
A Tirana, l'Alliance française est extrêmement dynamique. Elle dispose de deux
antennes, l'une dans le nord, l'autre dans le centre ; une troisième sera
implantée dans le sud-est, et nous voudrions étendre son action à l'ensemble du
territoire.
Je ne puis malheureusement pas vous donner beaucoup d'assurances en ce qui
concerne le lycée français, pour des raisons que vous imaginez aisément, mais
nous pouvons nous demander si nous ne pouvons pas faire mieux au sein des
établissements albanais eux-mêmes.
Enfin, je transmettrai à M. Védrine votre souhait concernant la nomination
d'un conseiller financier et la visite, attendue, d'un ministre français.
M. Emmanuel Hamel.
Dites à M. Strauss-Kahn qu'il faut passer de 4 millions de francs à 8 millions
de francs !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique.
- Est autorisée la ratification du traité d'entente,
d'amitié et de coopération entre la République française et la République
d'Albanie, signé à Paris le 12 décembre 1994, et dont le texte est annexé à la
présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
9
AVENANT À LA CONVENTION FISCALE
AVEC LE CANADA SIGNÉE LE 2 MAI 1975
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 172, 1996-1997),
autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement du Canada tendant à éviter les
doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le
revenu et sur la fortune, signée le 2 mai 1975 et modifiée par l'avenant du 16
janvier 1987. [Rapport n° 252 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la France
et le Canada sont liés depuis 1975 par une convention fiscale tendant à
éliminer les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière
d'impôts sur le revenu et sur la fortune.
Le second avenant à cette convention, soumis aujourd'hui à votre approbation,
a été signé à Ottawa le 30 novembre 1995. Il vise essentiellement à tenir
compte de l'évolution de la structure de nos échanges bilatéraux avec le
Canada, qui s'appuient de plus en plus sur les investissements croisés et sur
les partenariats technologiques alors que les flux commerciaux sont d'une
ampleur limitée. C'est pourquoi les négociations ont porté plus
particulièrement sur la redéfinition du régime fiscal applicable aux revenus
d'investissement et aux plus-values consécutives à des opérations de
restructuration.
Avec 3 % du stock, depuis 1991, la France se maintient au cinquième rang des
investisseurs étrangers au Canada, tandis que le volume des investissements
canadiens en France a été multiplié par vingt au cours des dix dernières
années. On compte aujourd'hui près de trois cent cinquante entreprises
françaises au Canada, dont deux tiers se trouvent au Québec. La France est
ainsi particulièrement bien représentée dans le secteur des équipements
électriques, de l'électronique, de l'informatique, de la chimie-pharmacie, du
bâtiment, de l'énergie. Parallèlement, cent vingt entreprises canadiennes sont
présentes en France.
Afin de tenir compte de ces importants flux d'investissement, le nouvel
avenant plafonne désormais la retenue à la source en matière de dividendes à 5
% lorsque la société mère bénéficiaire de la distribution détient directement
ou indirectement au moins 10 % du capital de la société distributrice.
Il exonère de retenue à la source les redevances dues pour l'usage ou la
concession de l'usage de logiciels d'ordinateurs et de brevets en ce qui
concerne la communication d'informations dans le domaine industriel, commercial
ou scientifique.
Il confère à l'Etat de résidence de la société cédante le droit exclusif
d'imposer les plus-values dégagées au cours de cessions de titres opérées dans
le cadre d'une opération de restructuration.
Il crée, enfin, une commission d'arbitrage en cas de désaccord persistant dans
le cadre de la procédure de concertation entre les deux Etats relative à
l'élimination des doubles impositions.
La convention ainsi modifiée devrait permettre aux entreprises françaises de
se repositionner à leur avantage sur le marché intérieur canadien vis-à-vis des
autres partenaires économiques concurrents de la France et qui ont conclu avec
le Canada des conventions plus récentes et mieux adaptées à la situation
économique actuelle.
J'aimerais enfin ajouter que le nouvel avenant a également reçu l'avis
favorable du conseil général de l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelin, qui
relève dans son avis que les dispositions du nouvel accord lui paraissent « de
nature à donner à notre fiscalité un caractère plus attractif pour les
investisseurs canadiens ».
C'est à l'ensemble de ces titres que le Gouvernement vous recommande donc
aujourd'hui d'autoriser l'approbation de l'avenant à la convention fiscale
franco-canadienne du 2 mai 1975, signé à Ottawa le 30 novembre 1995.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Emmanuel Hamel,
rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, lequel d'entre nous, même à l'occasion
de l'examen d'une convention fiscale et financière, ne se sent empreint
d'émotion, de mélancolie et de gratitude lorsqu'est évoqué le Canada ?
Pour un Français, le Canada, ce ne sont pas seulement ces grandes et
magnifiques provinces de l'Ontario, du Saskatchewan - et bien d'autres encore -
mais c'est aussi le Québec.
M. Jacques Legendre.
Bravo !
M. Emmanuel Hamel,
rapporteur.
Sous le contrôle de notre collègue M. Habert, grand maître de
la vie de Verrazane et qui a écrit à ce sujet des livres admirables, je dirai
que, en 1524, lorsque Verrazane donna le nom de Nouvelle-France à l'Acadie,
c'était au nom du roi de France. Je rappellerai également que, en 1534,
lorsque, après avoir quitté Saint-Malo, Jacques Cartier s'est agenouillé dans
la cathédrale Saint-Vincent avant de descendre le Saint-Laurent, ce fut encore
au nom du roi de France, comme ce fut en son nom qu'il déclara que le Québec,
qu'il avait en quelque sorte découvert, était terre de France.
Nous avons la mélancolie de cette époque, du triste traité de 1763 que nous
n'évoquons jamais sans regret, mais nous éprouvons aussi une profonde émotion
au rappel de la beauté de cet admirable pays : nous connaissons les duretés de
son hiver, la flamme admirable de ses couleurs en septembre, lorsque les forêts
s'embrasent de ces teintes rouges inoubliables.
Mélancolie, tristesse, émotion, mais aussi gratitude pour la fidélité du
Canada envers la France : nous ne pouvons oublier, fût-ce à l'occasion de
l'examen d'un simple texte financier et fiscal, les 30 000 Canadiens qui ont
été présents sur le sol français pour le défendre pendant la guerre de
1914-1918. Et comment oublier l'héroïsme des Canadiens débarquant en 1942 à
Dieppe ? Grâce au sacrifice extraordinaire qu'ils accomplirent alors, ils
permirent de définir la stratégie de reconquête de la France qui fut appliquée
lors des débarquements de 1944. Plus de 37 000 Canadiens sont morts dans les
combats de la libération de la France ! Ayons une pensée pour ces hommes qui
ont témoigné, par le sacrifice de leur vie, de l'attachement tout particulier
de la France et du Canada, du Canada tout entier et non pas seulement du
Québec.
J'en viens au présent projet de loi, qui a pour objet de ratifier le second
avenant apporté à la convention fiscale franco-canadienne du 2 mai 1975 conclue
entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la Républicaine
française, tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion
fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.
Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat - et je le fais avec regret, car
vous n'êtes pas personnellement le véritable responsable - de déplorer le
retard pris dans la procédure d'approbation. En effet, le Canada a
officiellement notifié, dès le 14 mai 1996, avoir accompli toutes les
procédures légales et constitutionnelles requises pour l'entrée en vigueur du
texte. La phase parlementaire de notre procédure d'approbation commence donc
avec près de deux ans de retard.
M. Jacques Legendre.
Eh oui !
M. Emmanuel Hamel,
rapporteur.
Ce retard risque d'apparaître un peu désinvolte à l'égard du
Canada et de nos amis canadiens. Il est également préjudiciable à nos
compatriotes établis au Canada, qui attendent avec impatience l'entrée en
vigueur de ce texte.
Le présent avenant devait être examiné au printemps 1997. Il a été retiré
in extremis
de l'ordre du jour, dans l'attente de l'avis - obligatoire -
de la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon, que l'on avait omis de
solliciter. Et comment signer un tel texte sans l'avis de la collectivité de
Saint-Pierre-et-Miquelon ? Cet avis, favorable, a été rendu le 17 mars 1997.
La dissolution de l'Assemblée nationale peut expliquer le report du texte à
l'automne suivant, mais, curieusement, le présent avenant ne figurait pas à
l'ordre du jour de la séance que le Sénat a tenue le 10 décembre 1997, alors
que deux conventions fiscales ont été examinées ce jour-là, dont l'une était
plus récente.
Il me semble donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que le retard qui a été pris
n'a pas d'autre motif qu'une défaillance, que nous déplorons, dans
l'organisation du travail gouvernemental, à laquelle il faudra vraiment
remédier. Je me fais ici le porte-parole du président de la commission des
finances, actuellement retenu en commission par diverses auditions, pour vous
demander de veiller, monsieur le secrétaire d'Etat, à ce que, désormais, de
tels retards ne se reproduisent plus.
Les relations économiques et commerciales entre la France et le Canada
pourraient être beaucoup plus intenses qu'elles ne le sont. Le Canada
représente seulement 1 % de nos exportations et moins de 1 % - 0,6 % exactement
- de nos importations.
Le solde commercial est traditionnellement excédentaire en faveur de la
France, grâce, notamment, aux biens d'équipement aéronautiques.
Longtemps concentrés au Québec, les échanges économiques et commerciaux se
sont étendus à d'autres provinces canadiennes, en particulier l'Ontario.
Les investissements français au Canada - nous nous en réjouissons - comme les
flux de services et du tourisme, sont en augmentation rapide : avec un stock de
près de 4,5 milliards de dollars canadiens, la France est le cinquième
investisseur au Canada, tandis que le volume des investissements canadiens en
France a été multiplié par vingt - je dis bien par vingt en dix ans, pour
atteindre près de 2 milliards de dollars canadiens.
Une convention fiscale est indispensable pour faciliter ces flux
d'investissements croisés, qui permettent des coopérations industrielles
fructueuses entre nos deux pays.
Rappelons que l'on compte plus de 350 entreprises françaises au Canada, dont
les deux tiers au Québec.
Dans le rapport qui vous a été remis, mes chers collègues, sont évoquées les
entreprises françaises parmi les plus prestigieuses qui sont déjà présentes au
Canada, de GEC Alsthom à L'Oréal, en passant par Jeumont-Schneider,
Thomson-CSF, Bull, Rhône-Poulenc, Roussel Uclaf, sans oublier Pechiney, les
ciments Lafarge, Air Liquide, Gaz de France, autant de sociétés performantes et
célèbres qui témoignent de la créativité et du génie technique français au
Canada et auxquelles j'ajouterai, pour clore la liste, Elf-Aquitaine, Michelin
et Mérieux, que, sénateur du Rhône, j'éprouve plaisir et fierté à citer ; c'est
l'une de ces grandes firmes qui font l'honneur et l'avenir de la présence
française dans le monde.
Les échanges commerciaux suscitent des flux humains. La communauté française
au Canada est évaluée à plus de 110 000 personnes, dont 70 000 dans la seule
province du Québec. Réciproquement, la communauté canadienne en France est
estimée à 8 000 personnes. Le présent avenant était très attendu par ces
communautés d'expatriés, car il règle le problème de la double imposition des
successions, qui se posait depuis longtemps.
Cet avenant à la convention fiscale du 2 mai 1976 a principalement pour objet
- je serai très bref puisque vous avez le rapport en mains - de régler les
points suivants : la définition des biens immobiliers en conformité avec la
pratique française ; l'adaptation de l'article relatif à l'imposition de la
fortune afin de tirer les conséquences de l'instauration de l'impôt de
solidarité sur la fortune en France ; la modification des règles françaises
d'élimination des doubles impositions afin d'étendre la technique du crédit
d'impôt, qui permet de préserver la spécificité du barème, à la différence de
la technique de l'exemption ; le règlement de la double imposition des
mutations par décès résultant de la suppression par le Canada, en 1971, des
impôts sur les successions et les donations au profit d'une imposition des
plus-values ; enfin, le transfert de l'avoir fiscal aux résidents du Canada
percevant des dividendes de source française.
Le Canada, qui négociait dans le même temps un avenant à la convention le
liant aux Etats-Unis, a désiré aligner certaines dispositions de la convention
fiscale avec la France sur les solutions retenues avec son voisin
nord-américain. Ces apports ont notamment consisté dans une réduction de 10 % à
5 % du taux de la retenue à la source applicable aux dividendes servis à une
société mère.
Enfin, il convient de souligner certaines dispositions de l'avenant qui
tendent à renforcer la lutte contre l'évasion fiscale internationale.
Le Canada a souhaité inclure une clause anti-abus empruntée à la convention
fiscale franco-américaine du 31 août 1994 destinée à prévenir l'usage abusif de
la convention par l'intermédiaire d'établissements stables situés dans des
Etats à fiscalité privilégiée ; cet euphémisme, chacun l'aura compris, désigne
les paradis fiscaux.
De même, les Etats contractants, le Canada et la France, confirment
expressément leur droit d'appliquer leurs dispositions légales destinées à
prévenir l'évasion fiscale internationale. Pour la France, il s'agit des
articles 209 B et 212 du code général des impôts.
Cette précision est importante, car des décisions de justice récentes ont
considéré que ces dispositions de droit interne sont contraires aux principes
des conventions fiscales internationales dans la mesure où elles aboutissent à
maintenir des doubles impositions.
Au total, la convention fiscale ainsi modifiée s'écarte assez souvent, mais
dans son détail seulement, du modèle de l'OCDE. Cela s'explique par
l'ancienneté et la densité des liens économiques existant entre nos deux pays.
Il s'agit vraiment d'un texte sur mesure.
Telles sont, mes chers collègues, les principales dispositions de l'avenant à
la convention franco-canadienne du 2 mai 1975, dont la commission des finances
vous propose d'autoriser l'approbation. Ce faisant, elle vous demande de bien
vouloir vous souvenir de l'émotion de l'hémicycle, debout, saluant le Premier
ministre du Canada, M. Chrétien, lorsqu'il nous honora de sa prestigieuse
présence, en décembre 1994.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
veux d'abord souligner l'admirable intervention de notre excellent rapporteur,
à qui je me dois également d'exprimer toute ma gratitude pour les propos très
aimables qu'il a tenus à mon endroit. Il est infiniment rare d'entendre tant de
lyrisme, tant de poésie, tant d'évocations historiques, et une aussi forte
expression du sentiment d'amitié unissant deux pays - en l'espèce, le Canada et
la France - à la tribune de notre assemblée à l'occasion de l'examen d'une
convention fiscale.
(Sourires.)
C'est, en tout cas, assez inhabituel
pour qu'on le souligne.
Mais revenons en à des propos plus terre à terre.
L'article 14 de l'avenant, qui propose une nouvelle rédaction de l'article 19
de la convention de 1975, définit le régime d'imposition des salaires et des
pensions publiques. Il maintient le principe de l'imposition de ces revenus
dans l'Etat de la source, mais il donne - c'est bien - un caractère
d'exclusivité à cette imposition en énonçant que ces revenus ne sont imposables
que dans cet Etat.
Voilà donc une ligne très clairement tracée qui permettra maintenant de régler
les difficultés qui avaient surgi, à cet égard, pour nos 114 000 compatriotes -
ce sont là les estimations des services du ministère des affaires étrangères -
qui se trouvent au Canada, parmi lesquels 39 000 à 40 000 immatriculés, dont
plusieurs milliers de fonctionnaires.
A ce propos, il est une catégorie qui souffre particulièrement d'un manque de
clarté dans ses impositions, même si ce qui est en cause, en fait, c'est le
double paiement de cotisations sociales en France et au Québec ; je veux parler
des enseignants résidents. Ces fonctionnaires résidents du Québec doivent
acquitter des cotisations sociales là-bas, mais, en tant que fonctionnaires
français, ils doivent également acquitter des cotisations sociales en France.
Toutefois, ils n'ont droit qu'à une seule retraite puisque les cotisations sont
établies au titre de la même fonction. Il y a là une anomalie que, depuis
plusieurs années, nous essayons de faire cesser.
Or, les cotisations sociales au Québec sont fiscalisées. J'espère qu'ainsi
rédigé cet article 14, appelé à devenir l'article 19 de la convention, pourra
nous permettre de rouvrir le dossier.
J'ajoute qu'à l'issue de la réunion interministérielle du 24 janvier 1997 - du
temps du précédent gouvernement - une solution allait être proposée, en accord
avec les ministères des affaires étrangères, des finances et des affaires
sociales, pour que cesse cette double imposition.
Le nouveau Gouvernement, monsieur le secrétaire d'Etat, a accepté les
dispositions qui avaient été prises précédemment. Il a été annoncé
officiellement au conseil d'administration de l'Agence de l'enseignement du
français à l'étranger, qui s'est tenu récemment, le 19 décembre 1997, que ces
propositions étaient reprises et que bientôt un échange de lettres
interviendrait à ce sujet.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cette question est
extrêmement importante. L'attente est grande d'une décision du Gouvernement
français pour que cessent ces doubles cotisations, qui pèsent lourdement non
pas sur les professeurs expatriés, qui sont bien payés, mais sur ceux qui sont
résidents et néanmoins fonctionnaires français.
Cette discussion m'a donné l'occasion d'attirer l'attention sur cette
question. Je n'attends pas, bien sûr, monsieur le secrétaire d'Etat, une
réponse immédiate. Je vous demande simplement de faire part à vos collègues du
Gouvernement de notre souhait que ce problème soit résolu très bientôt.
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat.
Monsieur Hamel, j'ai, moi aussi, été sensible au
souffle épique que vous avez fait passer sur l'assemblée en faisant référence à
l'histoire mais également à ce que les Canadiens ont su faire pour la France
aux moments tragiques que vous avez rappelés.
Pour ce qui est de la beauté des paysages, à Ottawa, où je me suis rendu, la
végétation n'était guère présente ! J'espère faire mieux la prochaine fois.
(Sourires.)
M. Emmanuel Hamel,
rapporteur.
Allez dans les Laurentides, c'est magnifique !
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat.
S'agissant de la longueur de la procédure
d'approbation parlementaire, je n'en suis évidemment pas responsable - vous
l'avez dit - et pour cause : d'abord, ce n'est pas exactement mon domaine et je
relève aussi que, entre le 30 novembre 1995 et aujourd'hui, ce Gouvernement n'a
pas été le seul aux affaires.
Il y a toutefois quelques éléments conjoncturels que je veux vous livrer.
Comme souvent, le texte signé en langue française comportait quelques erreurs
matérielles qu'il a fallu corriger avant d'engager la procédure
d'approbation.
L'avenant étant applicable à la collectivité territoriale de
Saint-Pierre-et-Miquelon, il a fallu demander l'avis de celle-ci. Or, cet avis,
sollicité à la fin de 1996, n'a été connu que quelques mois plus tard, en avril
1997.
Enfin, voilà que la dissolution de l'Assemblée nationale, par décret du 21
avril 1997, est venue, évidemment, modifier l'agenda du Parlement !
On peut effectivement regretter que ce texte ne soit pas applicable aux
revenus de 1998. Il eût fallu, pour que tel fût le cas, que la procédure
d'approbation fût achevée avant la fin du mois de novembre 1997.
Telles sont les raisons pour lesquelles, en effet, presque deux ans après les
Canadiens, nous allons enfin ratifier cet avenant à la convention
franco-canadienne du 2 mai 1975, avenant qui, je le rappelle, monsieur Habert,
ne concerne que l'impôt sur le revenu et non les cotisations sociales.
Pour que votre préoccupation puisse être prise en considération, il faudrait
donc un accord spécifique concernant, cette fois, les conventions de sécurité
sociale. Par conséquent, c'est un autre texte qui devrait être mis en oeuvre
pour vous donner satisfaction. Je transmettrai votre demande, mais je ne puis
préjuger le résultat de ma démarche.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique.
- Est autorisée l'approbation de l'avenant à la
convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement
du Canada tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion
fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 2 mai
1975 et modifiée par l'avenant du 16 janvier 1987, signé à Ottawa le 30
novembre 1995 et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
10
CONVENTION FISCALE
AVEC LA MONGOLIE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 396, 1996-1997)
autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la
République française et le Gouvernement de la Mongolie en vue d'éviter les
doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière
d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole). [Rapport n°
251 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Charles Josselin,
secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, la convention fiscale en vue
d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la
fortune, qui a été signée à Paris le 18 avril 1996, s'inscrit dans le processus
de démocratisation de la société mongole et de libéralisation de l'économie
engagé dans ce pays depuis 1990.
Au moment où la négociation de cette convention a débuté, la Mongolie évoluait
dans un environnement économique particulièrement difficile, dû au passage, que
je viens d'évoquer, d'une économie planifiée à une économie de marché et à
l'effondrement de son ancien allié soviétique avec lequel la Mongolie se
trouvait dans un état de dépendance totale.
La transition économique mongole a suivi quatre axes : réforme fiscale,
libération des prix, restructuration bancaire et privatisation des entreprises
publiques. Ce programme, également destiné à attirer les investisseurs
étrangers, se heurte à certaines limites structurelles dont la persistance
d'une très forte inflation - plus de 50 % - l'obsolescence de l'appareil
productif, le mauvais état des finances de l'Etat - déficits publics de près de
18 % du PIB - et une forte dette extérieure.
La Mongolie a bénéficié d'une aide importante de l'Union européenne de 10
millions d'écus en 1996-1997, et ses échanges se recentrent désormais vers
l'Europe avec laquelle la Mongolie effectue maintenant 25 % de son commerce
extérieur.
La France est un partenaire commercial marginal de la Mongolie - 0,4 % - la
seule entreprise française ayant développé une stratégie d'implantation dans
cet Etat étant Alcatel. Pourtant, plusieurs secteurs sont potentiellement
porteurs pour l'industrie française : les télécommunications, les transports,
l'énergie, l'agroalimentaire mais également le tourisme, comme l'ont confirmé
des missions récentes.
La conclusion d'une convention fiscale avec cet Etat qui, pour l'heure, paraît
être d'un intérêt limité, ne pourra qu'inciter nos entreprises à être plus
présentes sur ce marché, même si la difficulté de financer des projets,
eux-mêmes souvent mal identifiés, peut être un handicap.
Les principes posés par la convention vous sont largement connus, puisqu'ils
s'inspirent pour l'essentiel du modèle de convention fiscale de l'Organisation
de coopération et de développement économiques. Il est à relever néanmoins la
mise en place d'un mécanisme de crédit d'impôt fictif en matière de dividendes,
d'intérêts et de redevances, dispositif classique dans les conventions fiscales
conclues par la France avec les pays en développement.
Ce dispositif, très attractif pour les sociétés françaises disposant de
filiales en Mongolie, a été encadré dans le temps - dix ans à compter de
l'entrée en vigueur de la convention - et dans son champ d'application : il ne
concerne que les produits ayant fait l'objet en Mongolie d'une incitation
fiscale en vue de la promotion du développement économique du pays.
J'aimerais conclure en soulignant la qualité de nos relations politiques avec
cet Etat : le président Otchirbat s'est rendu en visite en France en avril
1996, un ambassadeur de France non résident a été nommé en octobre 1996 à
Oulan-Bator et les échanges parlementaires sont - comme vous le savez -
fréquents, le groupe d'amitié du Sénat s'étant rendu sur place en juillet
1996.
C'est pour l'ensemble de ces raisons que le Gouvernement vous recommande
d'autoriser l'approbation de la convention fiscale franco-mongole du 18 avril
1996.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Emmanuel Hamel,
en remplacement de M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
C'est avec tristesse que je prends la parole car j'imagine à quel point mes
collègues se sentent frustrés de ne pas avoir le privilège d'entendre notre
collègue M. Jacques Chaumont dont la connaissance de la Mongolie, notamment, et
de tous les problèmes internationaux est si grande, ce qui fait de lui un
orateur si apprécié du Sénat. Mais ses obligations internationales le privent
aujourd'hui de la possibilité de présenter lui-même son rapport et je le fais
avec confusion et un sentiment d'humilité comparant ses énormes moyens aux
miens, moi qui n'ai pas encore le privilège et l'honneur de connaître la
Mongolie.
Le présent projet de loi tend à autoriser l'approbation de la convention,
signée à Paris le 18 avril 1996, entre le Gouvernement de la République
française et le Gouvernement de la Mongolie en vue d'éviter les doubles
impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts
sur le revenu et sur la fortune.
En Mongolie, engagée depuis 1989 dans un processus de démocratisation
réconfortant et positif, les deux premières élections libres de 1990 et de 1992
ont maintenu au pouvoir l'ancien parti unique, puis l'opposition démocratique a
remporté successivement les élections présidentielles de 1993, avec l'élection
de M. Otchirbat, et législatives de juin 1996.
Des réformes économiques libérales importantes ont été engagées par le nouveau
gouvernement mongol depuis 1990.
Les néo-communistes qui ont reconquis la présidence en mai 1997 ne remettent
pas en question les réformes démocratiques ni même le choix en faveur de
l'économie de marché dans un pays riche d'avenir, ayant plus de 4 600
kilomètres de frontières avec la Chine et 3 600 kilomètres avec la Russie.
La Mongolie traverse actuellement une période de cohabitation, car son
Gouvernement dépend uniquement du Parlement monocaméral, le Grand Khoural,
tandis que son président, élu au suffrage universel pour quatre ans, dispose
d'un veto législatif sans pouvoir dissoudre le Parlement. Ainsi sont les
équilibres institutionnels subtils de la Constitution mongole.
Dois-je rappeler, mais vous le savez tous, que dès 1253, Louis IX, Saint
Louis, roi de France, envoyait déjà deux émissaires français, dont un moine
franciscain André de Longjumeau, à la cour des souverains mongols ; que la
Mongolie a été reconnue par la France comme un Etat indépendant en avril 1965 ;
que la politique extérieure mongole a cessé, depuis 1990, de s'aligner sur
celle de la Russie ; que le président Otchirbat, que vous avez évoqué tout à
l'heure dans votre discours d'introduction, monsieur le secrétaire d'Etat, a
honoré la France d'une visite fort appréciée du 17 au 21 avril 1996, année de
la nomination d'un ambassadeur à Oulan-Bator ?
La dynamique et éminente ministre de l'environnement du précédent
gouvernement, Mme Corinne Lepage, s'est rendue l'an dernier, au mois de mars,
au nom du Gouvernement de la France, en Mongolie où elle a reçu un accueil
mémorable.
La qualité de nos relations avec le peuple mongol et la République mongole a
été brillamment concrétisée l'an dernier par la visite en France du ministre
des affaires étrangères mongoles M. Altangerel. Déjà en 1991, le secrétaire
d'Etat aux affaires étrangères de la France, M. Alain Vivien, s'était rendu en
Mongolie pour lui dire l'espoir de la France en son renouveau et en son
expansion.
L'activité du groupe d'amitié sénatorial France-Mongolie, que vous avez à
juste titre évoquée, monsieur le secrétaire d'Etat, est exemplaire. N'est-elle
pas l'un des symboles, l'un des signes de l'amitié et de la sympathie de la
France pour le Gouvernement mongol, sa démocratie et son noble peuple à la si
grande histoire et dont les progrès au troisième millénaire sont certains et
seront grands, symboliques de la vitalité asiatique ?
Rendons hommage, un hommage mérité, à notre éminent collègue Hubert
Durand-Chastel qui a beaucoup contribué au rétablissement de relations
diplomatiques normales et confiantes entre nos deux pays, la Mongolie et la
France.
La Mongolie compte moins de 2,5 millions d'habitants, pour une superficie
trois fois supérieure à la nôtre : plus de 1,5 million de kilomètres carrés.
Son économie, comme vous l'avez souligné, monsieur le secrétaire d'Etat, est en
voie de développement, mais le produit national brut par habitant est encore
inférieur à 400 dollars.
L'aide soviétique, qui a cessé en 1990, représentait 30 % du PNB de la
Mongolie jusqu'en 1989. Sans elle, la Mongolie, par ses remarquables efforts,
connaît une significative croissance, avec un taux de 6 % en 1997, et dégage un
excédent extérieur.
Les relations bilatérales entre la France et la Mongolie ont longtemps
souffert de ses relations préférentielles, pour ne pas dire exclusives, avec
l'Union soviétique et le COMECON.
A la suite de la visite officielle en France du président Otchirbat en avril
1996, un ambassadeur non résident a été nommé à Oulan-Bator en octobre 1996. La
présente convention fiscale, dont la négociation a été engagée dès 1991, a été
signée à l'occasion de cette visite.
La France est un partenaire commercial encore, hélas ! marginal de la
Mongolie, ainsi que vous l'avez souligné tout à l'heure, monsieur le secrétaire
d'Etat, dont elle ne représente que 0,4 % des parts de marché. Ce pourcentage
correspond à des flux commerciaux annuels de l'ordre de 35 millions de
francs.
La seule entreprise française réellement implantée en Mongolie ainsi que vous
l'avez souligné, monsieur le secrétaire d'Etat, en la citant, ce qui est un
honneur pour elle, est Alcatel, qui a bénéficié en 1992 d'un protocole
bilatéral de 20 millions de francs qui lui a permis de remporter par la suite
200 millions de francs de marchés. Quelques entreprises françaises sont
également présentes en Mongolie dans le domaine des transports.
L'aide financière française prend la forme de dons. Leur volume est, à notre
regret, limité. Le protocole de 10 millions de francs signé en 1995 a été
complété en mars 1997 par un protocole de 20 millions de francs, destiné aux
projets d'infrastructures. Puisse cette majoration n'être qu'une étape, un
progrès vers un soutien français plus actif à la croissance économique de la
Mongolie.
La convention fiscale conclue entre la Mongolie et la France est pour
l'essentiel fidèle au modèle de l'OCDE et ne s'en écarte que sur des points
mineurs ou interprétatifs.
Le paragraphe 3 de l'article 11 relatif à l'imposition des intérêts prévoit
que ceux-ci sont exonérés dans l'Etat de la source lorsqu'ils sont perçus ou
payés par l'Etat contractant, une de ses collectivités locales ou une de ses
personnes morales de droit public. Cette disposition s'appliquera notamment aux
prêts de la COFACE.
Le point 4 du protocole annexé précise que la rémunération des services
techniques de conseil et d'ingénierie est considérée comme un revenu et non pas
comme une redevance. En effet, certains Etats ont une interprétation extensive
de la notion de redevance, car celle-ci peut être imposée dans l'Etat de la
source même en l'absence d'établissement stable.
L'article 17 prévoit que, lorsque les activités des artistes et des sportifs
sont financées essentiellement par les fonds publics d'un Etat, leurs revenus
ne sont imposables que dans cet Etat. Cette clause, dérogatoire au modèle de
convention de l'OCDE, est traditionnelle dans les conventions signées par la
France.
L'article 23, relatif à l'élimination des doubles impositions, prévoit un
mécanisme de crédit d'impôt fictif du côté français. Ainsi, une entreprise
pourra déduire de son impôt en France l'impôt qu'elle aurait dû payer en
Mongolie, même si elle en est par ailleurs exonérée. Ce dispositif est encadré
: d'une part, il ne s'applique que dans le cadre d'un régime d'incitation
fiscale destiné à favoriser le développement économique de la Mongolie, d'autre
part, il n'est prévu que pour une période de dix ans éventuellement
renouvelable.
La présente convention fiscale, au regard de la faiblesse actuelle des
relations économiques entre la France et la Mongolie, répond autant à des
considérations d'ordre diplomatique et de sympathie réciproque qu'à des
intérêts commerciaux, dans l'attente et l'espoir de leur prochain développement
pour l'intérêt commun de la Mongolie et de la France.
Il s'agit là d'un texte qui participe au rétablissement de relations
diplomatiques normales entre la France et la Mongolie et qui est aussi de
nature à accompagner le développement économique de ce pays ami.
C'est pourquoi la commission des finances propose au Sénat d'autoriser
l'approbation de cette convention, la voyant comme une étape sur la voie de
l'élargissement du renforcement et de l'intensification des relations
politiques, économiques, culturelles et techniques, amicales pourrais-je
ajouter, entre la Mongolie et la France qui, vous le savez, porte au peuple
mongol l'estime et la sympathie qu'il mérite.
(Applaudisements.)
M. le président.
Peut-être aurez-vous l'envie de découvrir la Mongolie, monsieur Hamel...
M. Emmanuel Hamel,
rapporteur.
Je rends hommage au dynamisme de Gengis Khan !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique.
- Est autorisée l'approbation de la convention entre
le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Mongolie en
vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude
fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un
protocole), signée à Paris le 18 avril 1996 et dont le texte est annexé à la
présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
11
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION
M. le président.
Je rappelle au Sénat que le groupe des Républicains et Indépendants a présenté
une candidature pour la commission des affaires étrangères, de la défense et
des forces armées.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame : M.
André Gaspard, membre de la commission des affaires étrangères, de la défense
et des forces armées, en remplacement de Pierre Croze, décédé.
12
DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de MM. Michel Barnier, Alphonse Arzel, Denis Badré, Claude Belot,
Jean Bernard, Roger Besse, Jean Bizet, François Blaizot, Gérard Braun, Mme
Paulette Brisepierre, MM. Charles Ceccaldi-Raynaud, Gérard César, Jacques
Chaumont, Charles de Cuttoli, Désiré Debavelaere, Charles Descours, Michel
Doublet, Daniel Eckenspieller, Pierre Fauchon, Gérard Fayolle, Hilaire Flandre,
Jean-Pierre Fourcade, Yann Gaillard, Patrice Gélard, Jacques Genton, Alain
Gérard, Paul Girod, Daniel Goulet, Georges Gruillot, Bernard Hugo, Roger
Husson, Bernard Joly, André Jourdain, Alain Joyandet, Pierre Laffitte, Gérard
Larcher, Dominique Leclerc, Jacques Legendre, Jean-François Le Grand, François
Lesein, Jacques Machet, Jean Madelain, Pierre Martin, Mmes Lucette
Michaux-Chevry, Nelly Olin, MM. Paul d'Ornano, Joseph Ostermann, Victor Reux,
Roger Rigaudière, Louis Souvet et André Vallet une proposition de loi relative
à l'élection des membres français du Parlement européen.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 267, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
J'ai reçu de MM. Robert Pagès, Michel Duffour, Jean Dérian, Mme Marie-Claude
Beaudeau, M. Jean-Luc Bécart, Mmes Danielle Bidard-Reydet, Nicole Borvo, MM.
Guy Fischer, Pierre Lefebvre, Paul Loridant, Mme Hélène Luc, MM. Louis Minetti,
Jack Ralite, Ivan Renar et Mme Odette Terrade une proposition de loi relative à
la délégation aux greffiers des attributions dévolues par la loi aux greffiers
en chef.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 270, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
13
RETRAIT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu une lettre par laquelle M. Michel Barnier déclare retirer la
proposition de loi relative à l'élection des membres français du Parlement
européen (n° 81, 1997-1998) qu'il avait déposée avec plusieurs de ses collègues
au cours de la séance du 13 novembre 1997.
Acte est donné de ce retrait.
14
DEPÔT D'UNE RÉSOLUTION
M. le président.
J'ai reçu, en application de l'article 73
bis
, alinéa 8, du règlement,
une résolution, adoptée par la commission des affaires culturelles, sur la
proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative au
cinquième programme-cadre de la communauté européenne pour des actions de
recherche, de développement technologique et de démonstration (1998-2002) et la
proposition de décision du Conseil relative au cinquième programme-cadre de la
communauté européenne de l'énergie atomique (EURATOM) pour des activités de
recherche et d'enseignement (1998-2002) (n° E-847).
Cette résolution sera imprimée sous le numéro 261 et distribuée.
15
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION
D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution : proposition de directive du Parlement européen et du
Conseil relative au rapprochement des régimes juridiques de protection des
inventions par le modèle d'utilité.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-1006 et
distribuée.
16
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Gérard Braun un rapport fait au nom de la commission des
affaires économiques et du Plan sur la proposition de loi, adoptée par
l'Assemblée nationale, permettant aux organismes d'habitations à loyer modéré
d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à bail des logements vacants
pour les donner en sous-location (n° 185, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 262 et distribué.
J'ai reçu de M. Claude Huriet un rapport fait au nom de la commission des
affaires sociales sur la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée
nationale, relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la
sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 222, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 263 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Marie Girault un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée
nationale, portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les
mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit
applicable outre-mer (n° 196, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 264 et distribué.
J'ai reçu de M. Charles Jolibois un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur le projet de loi, adopté avec modifications par
l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, relatif à la prévention et à la
répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs (n°
234, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 265 et distribué.
J'ai reçu de Mme Paulette Brisepierre un rapport fait au nom de la commission
des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de
loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République
française et le Gouvernement de la République de Namibie sur la coopération
culturelle, scientifique et technique (n° 203, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 266 et distribué.
J'ai reçu de M. Christian Bonnet, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au
nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la
nationalité.
Le rapport sera imprimé sous le numéro 269 et distribué.
17
DÉPO^T D'UN AVIS
M. le président.
J'ai reçu de M. Guy Penne un avis présenté au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi
relatif à l'application de la convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction
de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes
chimiques et sur leur destruction (n° 291, 1996-1997).
L'avis sera imprimé sous le numéro 268 et distribué.
18
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au jeudi 4 février 1998 :
A dix heures :
1. Discussion de la proposition de loi (n° 260, 1996-1997), adoptée par
l'Assemblée nationale, relative à la responsabilité du fait des produits
défectueux.
Rapport (n° 226, 1997-1998) de M. Pierre Fauchon, fait au nom de la commission
des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
règlement et d'administration générale.
Aucun amendement n'est plus recevable.
A quinze heures :
2. Discussion du projet de loi (n° 196, 1997-1998), adopté par l'Assemblée
nationale, portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les
mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit
applicable outre-mer.
Rapport (n° 264, 1997-1998) de M. Jean-Marie Girault, fait au nom de la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale.
Délai limite pour le dépôt des amendements : ouverture de la discussion
générale.
3. Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin.
Délais limites pour le dépôt des amendements
Conclusions de la commission des lois (n° 314, 1995-1996) sur la proposition
de loi de M. Serge Vinçon et de plusieurs de ses collègues tendant à autoriser
les élus des communes comptant 3 500 habitants au plus à conclure avec leur
collectivité des baux ruraux.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 9 février 1998, à dix-sept
heures.
Conclusions de la commission des lois (n° 20, 1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Nicolas About tendant à modifier les
dispositions du code civil relatives à la prestation compensatoire en cas de
divorce (n° 151, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Robert Pagès et plusieurs de ses collègues
relative à l'attribution de la prestation compensatoire en cas de divorce (n°
400, 1996-1997).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 9 février 1998, à dix-sept
heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, permettant aux
organismes d'habitations à loyer modéré d'intervenir sur le parc locatif privé
en prenant à bail les logements vacants pour les donner en sous-location (n°
185, 1997-1998).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 9 février 1998, à dix-sept
heures.
Projet de loi relatif à l'application de la convention du 13 janvier 1993 sur
l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de
l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (n° 291, 1996-1997).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 10 février 1998, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION PERMANENTE
Dans sa séance du mercredi 4 février 1998, le Sénat a nommé :
M. André Gaspard membre de la commission des affaires étrangères, de la
défense et des forces armées, en remplacement de M. Pierre Croze, décédé.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Fermeture de la succursale de la Banque de France à Narbonne
185.
- 4 février 1998. -
M. Roland Courteau
attire l'attention de
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
sur les problèmes liés aux menaces de fermeture qui pèsent sur certaines
succursales de la Banque de France, et notamment celle de Narbonne, dans
l'Aude. Il lui indique, sur ce point, toute la difficulté à obtenir du
Gouverneur de la Banque de France la moindre réponse aux démarches entreprises
auprès de lui. Ce qui est pour le moins choquant. Il relève par ailleurs que le
Gouvernement a fait savoir, quant à lui, et par écrit au Gouverneur de la
Banque de France, qu'il souhaiterait qu'aucune succursale ne soit fermée et que
lors du conseil général du 18 décembre 1997, aucune décision ne soit prise sur
le fond d'une décision qui exige un éclairage complet. C'est pourquoi, à la
suite de ces recommandations tant en termes d'emploi que de qualité de service
public ou d'aménagement du territoire, il lui demande quelle est l'évolution de
ce dossier et s'il est en mesure de lui apporter tous apaisements concernant
les intentions du Gouverneur de la Banque de France.
Gestion et traitement des déchets en Dordogne
178.
- 30 janvier 1998. -
M. Gérard Fayolle
appelle l'attention de
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement
sur le plan pour la gestion et le traitement des déchets de la Dordogne. Il lui
demande si certaines modifications vont être apportées au plan arrêté en 1995
et dans ce cas de lui préciser lesquelles.
Avenir du tribunal de commerce de Châtillon-sur-Seine
179.
- 30 janvier 1998. -
M. Henri Revol
souhaite faire part de son inquiétude à
Mme le garde des sceaux, ministre de la justice,
quant à la possible suppression du tribunal de commerce de Châtillon-sur-Seine,
dans le cadre de la refonte de la carte judiciaire. Cette réforme intégrerait
la circonscription de Châtillon à celles de Montbard et Semur-en-Auxois qui
dépendent du tribunal de commerce de Dijon, entraînant ainsi la disparition du
tribunal de Châtillon, et ce, en dépit d'une activité soutenue. Ainsi, pour
l'année 1997, 152 affaires ont été inscrites : 126 ont été évacuées, dont 103
par jugement contradictoire et RC, 1 par défaut, 22 par radiation, désistement,
26 affaires restant à juger au 31 décembre 1997. Aussi, il souhaiterait savoir
s'il ne serait pas plus opportun que le tribunal de Châtillon puisse
désencombrer le tribunal de commerce de Dijon en lui intégrant les
circonscriptions de Montbard et de Semur-en-Auxois. Il semblerait dommageable,
en effet, alors que les pouvoirs publics font de l'aménagement du territoire
l'une de leurs priorités, que l'on choisisse de priver le Châtillonnais de sa
juridiction de commerce. En tout état de cause, il souhaiterait obtenir des
assurances quant à la pérennité du tribunal de commerce de
Châtillon-sur-Seine.
Fermeture des bureaux de poste en milieu rural
180. - 30 janvier 1998. - M. Louis Souvet attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur les fermetures des bureaux de poste en milieu rural. Avec la caducité du contrat de plan, les élus locaux sont en droit de se poser des questions quant à la pérennité du service postal en milieu rural. Service postal qui est souvent l'unique service public encore en activité dans de nombreuses communes, service public qui permet à de nombreuses personnes isolées et âgées, ne disposant pas d'un moyen de transport autonome d'effectuer un certain nombre d'opérations bancaires (par exemple retrait d'une pension). La restriction des heures d'ouverture participe de cette même logique de désengagement, des horaires minimaux et inadéquats entraîneront une moindre fréquentation, amoindrissement statistique qui provoquera à terme une décision de fermeture, aggravant ainsi le phénomène de désertification. Dans le même temps, il est procédé dans le cadre du dispositif emplois-jeunes à un certain nombre d'embauches. Il lui demande si le coût de ces nouvelles mesures n'accélérera pas encore plus les fermetures de bureaux du fait d'un accroissement général des frais de fonctionnement. Il convient de rappeler fort à propos que, pour les emplois-jeunes, « sont exclues les activités correspondant à leurs compétences traditionnelles » (ici celles des préposés).