Séance du 2 juin 1998
M. le président. La parole est à M. Delfau, auteur de la question n° 274, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Gérard Delfau. Madame la ministre, j'ai tenu à attirer l'attention de M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, sur l'inquiétude suscitée par le rapport remis au Premier ministre par M. Roland Carraz, député, et M. Jean-Jacques Hyest, sénateur, et portant sur « une meilleure répartition des effectifs de la police et de la gendarmerie pour une meilleure sécurité publique ».
S'agissant de l'Hérault, l'émotion s'est cristallisée sur le devenir du commissariat de police de Pézenas et, dans une moindre mesure, de celui de Frontignan, même si bien d'autres questions de fond sont posées par ce département, qui se situe au sixième rang en termes de délinquance et au soixante-sixième rang quant à sa dotation en forces de sécurité, gendarmerie et police nationale. Le contraste est saisissant !
Pour en revenir à Pézenas, je rappelle que le ministre lui-même vient d'annoncer au maire, par un courrier du 31 mars 1998, « l'arrivée d'un officier de police » au 1er juin prochain, avec ce commentaire : « Le taux élevé de délinquance justifie qu'une attention particulière soit portée à la situation de cette circonscription de sécurité publique ».
Simultanément, l'annonce par voie de presse d'une possible disparition du commissariat et de son transfert à la gendarmerie a plongé les élus dans la stupéfaction, d'autant que la discussion en cours d'un contrat local de sécurité a fait apparaître une flambée de la délinquance en 1996, après dix ans de croissance et - bonne nouvelle - une légère diminution - moins 0,84 % - en 1997. Dès lors faut-il casser l'outil qui fait reculer la violence et les petits délits ? Faut-il appliquer aveuglément des critères purement démographiques dans la répartition entre police et gendarmerie sur le territoire ?
La connaissance du terrain des policiers, la culture spécifique d'une commune très touristique dotée de quatre lycées et qui regroupe 5 000 enfants scolarisés en tout ne sont-elles pas à prendre en compte ? Aussi j'ai demandé à M. le ministre de l'intérieur quelle procédure il comptait mettre en oeuvre pour engager une discussion loyale avec les élus avant toute décision prématurée.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, dans le cadre de la mission que leur avait confiée M. le Premier ministre, MM. Hyest et Carraz ont formulé un certain nombre de propositions relatives à une meilleure répartition des effectifs de la police et de la gendarmerie nationales.
Parmi ces propositions, figure tout particulièrement le principe d'une nouvelle répartition des compétences de la police nationale et de la gendarmerie nationale, et ce par un transfert d'assise territoriale entre ces deux forces de sécurité.
L'ensemble de ces propositions, qui confirment les termes de la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité, a été retenu par le conseil de sécurité intérieure lors de sa réunion du 27 avril 1998.
Un programme de travail confié aux ministères de l'intérieur et de la défense a été défini, afin que soient examinés conjointement les secteurs pouvant faire l'objet d'un transfert de compétences entre la police et la gendarmerie.
Cette phase d'expertise complémentaire comprendra une concertation approfondie avec les élus locaux, au cours de laquelle le préfet de l'Hérault examinera avec une particulière attention la situation de Pézenas et des communes situées à la périphérie de Montpellier.
Bien évidemment, aucune décision n'a été prise tant que cette phase n'a pas été menée à son terme. Le conseil de sécurité intérieure se prononcera à la fin de l'année 1998, au vu des résultats de cette expertise et des éléments recueillis lors de cette concertation.
Pour l'heure, les effectifs de la circonscription de sécurité publique de Pézenas, au nombre de trente-huit fonctionnaires, seront maintenus au niveau de la dotation actuelle, un lieutenant supplémentaire étant, de surcroît, appelé à rejoindre ce commissariat dès le 1er juin prochain.
Voilà, monsieur le sénateur, ce que mon collègue M. le ministre de l'intérieur m'a chargée de vous répondre.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Je vous remercie, madame la ministre, des informations que vous me donnez en ce qui concerne le début de la phase de concertation.
Ainsi, les élus locaux participeront en tant que partie prenante à une discussion avec le préfet ; je m'en réjouis.
Je suis également très satisfait de ce que la dotation actuelle en effectifs du commissariat de police de Pézenas soit maintenue et qu'un lieutenant de police supplémentaire y soit affecté.
Néanmoins, sur le fond, madame la ministre, je voudrais vous faire part de ce que les élus locaux m'ont dit sur le sujet et de ce que j'ai pu constater moi-même, puisqu'il se trouve que j'habite cette commune.
Bien sûr, je comprends tout à fait le souci de rationnaliser les forces de sécurité. Il est normal, quand on est en charge de responsabilités nationales, de chercher à mieux organiser l'intervention de l'Etat sur le plan local, surtout quand celle-ci se manifeste de deux façons : la gendarmerie d'un côté, la police de l'autre.
Cependant, je voudrais attirer l'attention du ministre de l'intérieur sur une autre réalité : l'ancrage local d'un commissariat de police qui fait bien son travail, qui est reconnu par l'ensemble de la population et qui a obtenu la confiance de celle-ci.
Vous savez comme moi, madame la ministre, ne serait-ce que par les importantes fonctions d'élue locale que vous avez assumées, à quel point les forces de sécurité ont besoin de cette relation de confiance.
C'est la raison pour laquelle je tiens à mettre en garde le ministre de l'intérieur : ne touchons pas sans y réfléchir à une organisation ancienne, la rationnalisation que nous souhaitons appliquer pouvant se traduire par une efficacité moins grande. C'est, en tout cas, ce que je crains.
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