Séance du 10 juin 1998
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Lutte contre les exclusions.
- Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p.
1
).
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises,
au commerce et à l'artisanat ; M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ;
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.
Article 1er (p. 2 )
M. Paul Vergès, Mmes Odette Terrade, Gisèle Printz, Marie-Madeleine
Dieulangard.
Amendement n° 1 de la commission. - M. Bernard Seillier, rapporteur de la
commission des affaires sociales ; Mmes le ministre, Monique Cerisier-ben
Guiga. - Adoption.
Amendements n°s 421 de M. Braun et 422 de M. de Raincourt. - M. Gérard Braun,
Mme Janine Bardou, M. le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait de l'amendement
n° 421 ; adoption de l'amendement n° 422.
Amendement n° 440 de M. Darniche. - MM. Jacques Habert, le rapporteur, Mme le
ministre. - Retrait.
Amendements n°s 2 à 4 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption des trois amendements.
Amendements n°s 5 rectifié de la commission et 335 de M. Fischer. - MM. le
rapporteur, Guy Fischer, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement n° 5
rectifié, l'amendement n° 335 devenant sans objet.
Amendements n°s 6 et 7 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption des deux amendements.
Amendement n° 300 de Mme Cerisier-ben Guiga. - Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
M. le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait.
Reprise de l'amendement n° 300 rectifé par M. Habert. - M. Jacques Habert, Mme
Monique Cerisier-ben Guiga. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 1er (p. 3 )
Amendement n° 441 de M. Darniche. - MM. André Maman, le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait.
Article 1er bis (p. 4 )
Amendements n°s 8 et 9 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Rejet de l'amendement n° 8 ; adoption de l'amendement n° 9.
MM. Guy Fischer, Alain Vasselle.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 A (p. 5 )
Amendement n° 10 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, MM. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales ; Guy Fischer, Mme Joëlle Dusseau. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 2 B. - Adoption (p.
6
)
Article 2 (p.
7
)
M. Guy Fischer.
Amendement n° 11 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption.
Amendement n° 277 de Mme Dusseau. - Mme Joëlle Dusseau, M. le rapporteur, Mme
le ministre. - Rejet.
Amendement n° 12 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 13 rectifié de la commission et sous-amendement n° 324 rectifié
bis
de M. Ostermann. - MM. le rapporteur, Joseph Ostermann, Mme le
ministre. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié.
Amendement n° 301 de Mme Derycke. - Mme Dinah Derycke, M. le rapporteur, Mmes
le ministre, Joëlle Dusseau. - Adoption.
Amendements n°s 303 de Mme Derycke, 336 de M. Fischer et 278 de Mme Dusseau.
-Mmes Dinah Derycke, Nicole Borvo, Joëlle Dusseau, M. le rapporteur, Mme le
ministre, M. Guy Fischer. - Retrait des amendements n°s 303 et 336 ; adoption
de l'amendement n° 278.
Amendement n° 302 rectifié
bis
de Mme Derycke. - Mme Dinah Derycke, M.
le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Amendements n°s 304 de Mme Dieulangard et 511 du Gouvernement. - Mme
Marie-Madeleine Dieulangard, M. le rapporteur, Mme le ministre, M. le président
de la commission. - Retrait de l'amendement n° 304 ; adoption de l'amendement
n° 511.
Amendement n° 14 de la commission. - M. le rapporteur, Mmes le ministre, Dinah
Derycke, Nicole Borvo, MM. le président de la commission, Alain Vasselle. -
Adoption.
Amendement n° 423 rectifié de Mme Bardou. - Mme Janine Bardou, M. le
rapporteur, Mme Nicole Pery, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.
- Adoption.
Amendement n° 337 de M. Fischer. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, Mme le
secrétaire d'Etat. - Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Suspension et reprise de la séance
(p.
8
)
Article 3 (p.
9
)
Amendement n° 305 de Mme Cerisier-ben Guiga. - Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat, M. Jacques Habert. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 10 )
Amendement n° 15 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption.
Amendement n° 306 de Mme Cerisier-ben Guiga. - Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
M. le rapporteur, Mme le ministre, M. Jacques Habert, Mme Paulette Brisepierre,
M. le président de la commission. - Adoption.
Amendement n° 16 de la commission. - M. le rapporteur. - Retrait.
Reprise de l'amendement n° 16 rectifié de M. Descours. - MM. Charles Descours,
le rapporteur, Mme le ministre, M. Jacques Machet. - Retrait.
Amendement n° 17 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, MM. Guy
Fischer, Serge Lagauche. - Adoption.
Amendement n° 18 de la commission et sous-amendements n°s 494 du Gouvernement
et 493 de M. Vasselle. - M. le rapporteur, Mme le ministre, M. Alain Vasselle.
- Rejet des deux sous-amendements ; adoption de l'amendement.
Amendements n°s 19 de la commission et 338 de M. Fischer. - M. le rapporteur,
Mmes Nicole Borvo, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 19, l'amendement
n° 338 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 (p. 11 )
Amendements n°s 20 et 21 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre.
- Adoption des deux amendements.
Amendement n° 339 de M. Fischer. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, Mme le
ministre. - Rejet.
Amendement n° 22 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 5 (p. 12 )
Amendement n° 429 rectifié de M. Belot. - MM. Claude Belot, le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article additionnel avant l'article 5 bis (p. 13 )
Amendement n° 287 de M. Blin. - MM. Jacques Machet, le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait.
Suspension et reprise de la séance (p. 14 )
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
Article 5
bis
(p.
15
)
M. Guy Fischer.
Amendements n°s 23 et 24 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre.
- Adoption des deux amendements.
Amendement n° 340 de M. Fischer. - Mme Odette Terrade, M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Retrait.
Amendements n°s 25 rectifié et 26 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le
ministre, MM. Alain Vasselle, Jean Chérioux, Mmes Joëlle Dusseau, Dinah
Derycke. - Adoption de l'amendement n° 25 rectifié et, par division, de
l'amendement n° 26.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 5 bis (p. 16 )
Amendement n° 27 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mmes le
ministre, Odette Terrade. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendement n° 28 de la commission. - M. le rapporteur, Mmes le ministre,
Marie-Claude Beaudeau, Dinah Derycke, M. le président de la commission. -
Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements n°s 479 et 480 de M. Vasselle. - MM. Alain Vasselle, le rapporteur,
Mmes le ministre, Joëlle Dusseau, MM. Guy Fischer, Jean Chérioux, Mme Dinah
Derycke. - Retrait de l'amendement n° 479 ; adoption, par scrutin public, de
l'amendement n° 480 insérant un article additionnel.
Article 5 ter (p. 17 )
Amendement n° 29 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 6 (p. 18 )
M. Guy Fischer.
Amendement n° 307 de Mme Printz. - Mme Gisèle Printz, M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Adoption.
Amendement n° 30 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Retrait.
Amendement n° 398 de M. Eckenspieller. - MM. Daniel Eckenspieller, le
rapporteur, Mme le ministre. - Retrait.
Amendements n°s 31 et 32 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 7 (p. 19 )
Mme Janine Bardou.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 7 (p. 20 )
Amendement n° 424 de Mme Bardou. - Mme Janine Bardou, M. le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait.
Article 8 (p. 21 )
Amendements n°s 33 rectifié à 37 de la commission. - M. le rapporteur, Mmes le
ministre, Marie-Claude Beaudeau, M. le président de la commission. - Adoption
des cinq amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 8 (p. 22 )
Amendement n° 38 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 9 (p.
23
)
Article L. 322-4-16-4 du code du travail
(p.
24
)
Amendements n°s 399 rectifié de M. Vasselle et 495 de la commission. - MM.
Alain Vasselle, M. le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait de l'amendement n°
399 rectifié ; adoption de l'amendement n° 495.
Amendements n°s 39 rectifié et 40 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Adoption des deux amendements.
Amendement n° 400 rectifié de M. Vasselle. - MM. Alain Vasselle, le rapporteur,
Mme le ministre. - Retrait.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article L. 322-4-16-5 du code précité. - Adoption
(p.
25
)
Article L. 322-4-16-6 du code précité
(p.
26
)
Amendement n° 41 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Adoption de l'article 9 modifié.
Articles additionnels après l'article 9 (p. 27 )
Amendement n° 280 de Mme Dusseau. - Mme Joëlle Dusseau, M. le rapporteur, Mme
le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 341 de M. Fischer. - Mme Odette Terrade, M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Rejet.
Amendement n° 416 rectifié de M. Lise et sous-amendement n° 431 rectifié de M.
Lauret ; amendements n°s 432 de M. Lauret, 417 et 418 de M. Lise. - MM.
Dominique Larifla, Edmond Lauret, le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait de
l'amendement n° 432 ; adoption du sous-amendement n° 431 rectifié et de
l'amendement n° 416 rectifié modifié, des amendements n°s 417 et 418 insérant
trois articles additionnels.
Articles 10 et 11. - Adoption (p.
28
)
Article 11
bis
(p.
29
)
Amendement n° 42 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 12 (p. 30 )
Amendement n° 43 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 442 de M. Darniche. - MM. Philippe Darniche, le rapporteur, Mme
le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° 44 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 13 (p. 31 )
M. Guy Fischer.
Amendement n° 281 de Mme Dusseau. - Mme Joëlle Dusseau, M. le rapporteur, Mme
le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Adoption de l'article.
Article 13 bis (p. 32 )
Amendement n° 45 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 14. - Adoption (p.
33
)
Article 15 (p.
34
)
Amendement n° 434 de M. Lauret. - MM. Edmond Lauret, le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Articles additionnels après l'article 15 (p. 35 )
Amendement n° 436 de M. Lauret. - MM. Edmond Lauret, le rapporteur, Mme le
ministre. - Retrait.
Amendement n° 443 de M. Darniche. - MM. Philippe Darniche, le rapporteur, Mme
le ministre. - Retrait.
Renvoi de la suite de la discussion.
3.
Décision du Conseil constitutionnel
(p.
36
).
4.
Transmission d'un projet de loi
(p.
37
).
5.
Dépôt de propositions d'acte communautaire
(p.
38
).
6.
Dépôt d'un rapport
(p.
39
).
7.
Ordre du jour
(p.
40
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
LUTTE CONTRE LES EXCLUSIONS
Suite de la discussion
d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 445,
1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence,
d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions. [Rapport n° 450
(1997-1998), avis n° 472 (1997-1998), n° 471 (1997-1998), n° 478 (1997-1998) et
n° 473 (1997-1998)].
Je rappelle que la discussion générale a été close hier.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à
l'artisanat.
Je répondrai très brièvement aux différentes questions qui
m'ont été posées, me réservant d'être plus explicite au cours de la discussion
des articles.
Je suis certaine, après avoir entendu les orateurs des différents groupes du
Sénat, que l'engagement et la bonne volonté partagés dans cet hémicycle vont
nous permettre d'améliorer substantiellement le dispositif de traitement du
surendettement. La lutte contre les exclusions doit nous rassembler, comme l'a
souligné M. le président de la commission des affaires sociales, relayé
d'ailleurs par les rapporteurs des diverses commissions saisies.
Il s'agit, plusieurs intervenants l'ont dit, d'améliorer le dispositif actuel,
qui a montré ses limites.
Monsieur Loridant, vous l'avez rappelé, il était nécessaire d'apporter une
réponse aux situations d'impasse qui engorgent les commissions de
surendettement et, surtout, laissent les intéressés sans solution.
Vous avez noté avec satisfaction que votre rapport, rédigé avec M. Hyest, nous
a inspirés pour élaborer les dispositions que nous proposons dans ce projet de
loi. Cependant, vous auriez souhaité l'instauration d'un suivi social plus
systématique de l'établissement et de l'exécution du plan de redressement.
Cette remarque est pertinente ; nous pourrons peut-être trouver une solution
qui vous convienne lors de l'examen des articles.
Vous avez également demandé un observatoire, afin que l'on connaisse vraiment
la réalité. Je vous rejoins sur ce point. En effet, les commissions de
surendettement, submergées par les dossiers, ont du mal à établir des suivis de
qualité non seulement s'agissant de la situation du surendetté au jour où il se
présente devant la commission de surendettement mais également s'agissant des
origines du surendettement ; sur ces origines, les statistiques font défaut.
La présence au sein de la commission de surendettement du représentant des
services sociaux du département, comme le proposent Mmes Terrade et Borvo ainsi
que M. Fischer, me paraît de nature à répondre à l'ensemble de vos
préoccupations.
Sans doute, monsieur Loridant, s'agissant de votre amendement relatif à la
composition de la commission, le débat nous permettra-t-il d'aboutir à une
solution globalement satisfaisante et acceptable par tous.
C'était d'ailleurs le souci du Gouvernement lorsqu'il proposait de prévoir la
présence du président du conseil général au sein de la commission. Nous n'avons
pas toujours été compris sur ce point. Dans mon esprit, il s'agissait de
renforcer le lien avec les services sociaux locaux appelés à connaître de ces
situations de détresse et non pas avec le conseil général ou son président en
tant que tel. Je partage la crainte des uns et des autres qu'une contribution
financière ne soit alors demandée aux conseils généraux.
Qui plus est - ce sont vos collègues de l'Assemblée nationale, notamment Mme
Neiertz qui l'ont souligné - il serait mauvais qu'une des institutions soit
représentée par un élu alors même que l'esprit des commissions est de regrouper
des représentants des services et de l'administration. Nous sommes donc bien
d'accord sur ce point.
Avec la présence de représentants des services sociaux locaux, les commissions
disposeront de renseignements sur l'antériorité de la situation de la famille
concernée, ainsi que sur le suivi de celle-ci.
Actuellement, nous ne savons rien de la situation des familles après leur
saisine de la commission de surendettement. Je pense qu'avec l'aide de la
Banque de France, qui assure le secrétariat des commissions, nous allons
pouvoir disposer de données importantes. Je vous proposerai, au cours du débat,
de fixer un calendrier de rendu du rapport à l'ensemble de la représentation
nationale afin qu'elle puisse suivre l'application des mesures qui seront
éventuellement décidées.
Madame Derycke, vous avez souhaité que l'Etat ne reste pas sourd à la remise
des dettes fiscales.
Je tiens à vous rassurer, l'Etat n'est pas sourd, l'Etat ne le sera pas. Comme
vous le reconnaissez les uns et les autres, les dettes fiscales et sociales ne
doivent pas être banalisées. C'est tout à fait le sens de la démarche du
Gouvernement. Mais il ne s'agit pas de refuser la remise de leurs dettes aux
personnes sans ressources.
Je rappelle les chiffres relatifs aux remises gracieuses, qui ont déjà été
cités dans la discussion générale : 1,1 milliard de francs pour 560 000 remises
gracieuses en 1997. J'ai constaté, avec les représentants de l'association des
maires de France, que c'est bien l'Etat qui prend en charge les remises, même
lorsqu'il s'agit d'impôts locaux.
Je remercie Mme Dusseau et M. Loridant d'avoir rappelé que ces remises portent
surtout sur la taxe d'habitation, ainsi que sur d'autres dettes parafiscales,
et en premier lieu la redevance audiovisuelle - c'est l'une des remises qui est
le plus souvent consentie. Même si son montant paraît modeste, il faut savoir
que c'est l'accumulation de petites sommes qui conduit au surendettement. Pour
une famille dans une situation difficile, qui dispose du minima social, la
somme de 500 francs représente une semaine de nourriture, et cette somme est
primordiale pour la survie de la famille.
Le Gouvernement a, pour des raisons constitutionnelles et pratiques, que j'ai
déjà exposées - je les rappellerai lors de l'examen des amendements - voulu
préserver la spécificité de la procédure du traitement des dettes fiscales.
Mais, parallèlement, son engagement politique fort consiste à dire et à écrire
que les liens seront resserrés entre les deux dispositifs pour que soit pris en
compte l'ensemble des dettes et qu'il y ait un véritable aller et retour entre
la commission de surendettement et les services fiscaux, y compris pour
connaître la décision qui aura été prise après la proposition de la commission
de surendettement, de telle manière qu'il ne subsiste plus de doute sur
l'application des décisions prises par l'ensemble des créanciers, publics et
privés, au bénéfice du surendetté. Cette information nous permettra, de plus,
de vérifier si notre système, tel qu'il est proposé, fonctionne bien.
Monsieur Paul Girod, je maintiens qu'il y a une différence d'essence - si je
peux me permettre de m'exprimer ainsi - entre les dettes bancaires et les
dettes fiscales. En revanche, je suis d'accord avec vous sur le fait que la
solidarité nationale doit jouer dans les deux cas face aux situations
difficiles qu'il nous faut traiter. C'est ce que nous proposons. Sur ce sujet,
nous serons tous d'accord.
Enfin j'ai bien noté les préoccupations de Mmes Derycke et Terrade quant aux
risques que représentent pour les ménages déjà fragilisés certains crédits à la
consommation.
J'ai donné un mandat au Conseil national de la consommation - ainsi le veut la
procédure. Le consul doit être en mesure de faire des propositions au bout d'un
temps suffisamment long - deux mois, quatre mois suivant les cas, voire
davantage lorsque le problème est complexe. Au sein du Conseil national de la
consommation, siègent à la fois des consommateurs et des professionnels. C'est
vraiment le lieu où l'on pourra procéder à des échanges, en particulier sur les
crédits dits
revolving
mais aussi sur les cartes de magasin. D'après
l'étude de certaines commissions de surendettement, certains ménages possèdent
sept ou huit cartes de crédit de ce type. En revanche, nous ne pouvons pas dire
que le prêteur est responsable tant que nous n'avons pas la volonté de nous
attaquer au problème du fichier des incidents de crédit aux particuliers.
Le Gouvernement s'efforcera de prendre les mesures nécessaires en la matière
lorsque le CNC aura formulé ses propositions quant à l'information et au suivi
de ce type de crédit. Nous pourrons alors introduire dans le code de la
consommation les mesures appropriées aux nouvelles formes de crédit.
Comme l'a proposé Mme Derycke, des campagnes d'information des consommateurs
pourraient être conduites. Certaines associations de consommateurs se sont
d'ailleurs déjà atelées à cette tâche. Mais nous disposons aussi de l'Institut
national de la consommation. Cet institut dépend des pouvoirs publics, donc de
l'argent public, des associations de consommateurs y siègent et le Gouvernement
pourrait lui confier un mandat spécifique en matière de crédit à la
consommation.
Pour aller jusqu'au bout du raisonnement, si nous constatons, après le rapport
du CNC, que la loi bancaire doit être modifiée, ce sera au ministère de
l'économie et des finances de proposer de la réviser.
En fait, il est inquiétant que nous ayons tous l'envie, sinon raisonnable du
moins affective dans ces dossiers d'exclusion, de lever la barrière de l'accès
au fichier et de proposer que le prêteur sache si l'emprunteur a déjà des
dettes.
Mesdames, messieurs les sénateurs, à la suite de la Commission nationale de
l'informatique et des libertés, personne n'a envie que chaque vendeur de
magasin qui délivre une carte de crédit puisse avoir accès au solde du compte
bancaire de son client.
Autant nous avons une confiance absolue dans la gestion par la Banque de
France du fichier négatif des incidents de paiement, autant nous ne voulons pas
d'un fichier positif ouvert à tous les prêteurs, y compris aux vendeurs des
magasins qui délivrent des cartes de crédit spécifiques. C'est pourquoi nous
avons institué une limite.
J'indique par ailleurs que le code de la consommation nous permettra de
travailler plus à fond sur ce sujet.
L'éducation, la formation et l'information des consommateurs, pour que chacun
apprécie bien ses droits, s'approprie ses droits, c'est l'une des priorités que
nous avons développées depuis un an, reprenant en cela les voeux de nos
prédécesseurs.
C'est l'information des particuliers qui nous permettra de réaliser les
progrès les plus flagrants.
Par ailleurs, l'observatoire des commissions de surendettement des
particuliers pourra apporter des informations au CNC, lequel pourra présenter
des propositions sur ce dossier particulièrement délicat.
(Applaudissements
sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen. - MM. Hoeffel et Trucy applaudissent également.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, après avoir loué le travail de MM. les rapporteurs, je voudrais
adresser mes remerciements aux intervenants, tout particulièrement à celles et
à ceux qui ont abordé plus spécialement le volet logement : MM. Mouly,
Darniche, Joly, Gournac et Vezinhet, Mme Terrade, MM. Vasselle, Mercier, Mme
Dusseau, MM. Huguet, Payet et Ostermann.
Je souhaiterais apporter quelques éléments de réponse aux principales
questions qu'ils ont soulevées, étant entendu que l'examen des articles et des
amendements nous permettra d'examiner plus au fond les points en débat.
J'ai été très sensible, monsieur Braun, au fait que la commission des affaires
économiques et du Plan ait reconnu que les interventions des fonds de
solidarité pour le logement, les FSL, étaient mieux cadrées, et ce d'autant
plus que la commission des affaires sociales, quant à elle, a des inquiétudes
en la matière.
Je souhaite à cet égard dire à M. Seillier que, par les précisions apportées à
la loi du 31 mai 1990, comme par le décret qui les complétera, notre volonté
est d'assurer le respect du principe d'équité territoriale, qui doit être bien
évidemment mis en oeuvre pour l'application de toute loi de la République.
Aujourd'hui, il existe de très fortes disparités entre les départements.
Certains, par exemple, n'ont pas accepté durablement que les FSL interviennent
sous forme de subventions. En privilégiant la formule de l'avance, ces
départements traitent donc en priorité les cas des demandeurs les moins en
difficulté, on supposait en effet que ces derniers pourraient rembourser l'aide
qu'on leur verserait.
Dans d'autres départements, en revanche, peut-être en raison des crédits
disponibles, l'admissibilité a été conditionnée au niveau des dettes de loyers,
les demandeurs ayant dépassé un certain niveau n'étant pas retenus.
A l'évidence, nous sommes obligés d'harmoniser les règles de fonctionnement
pour qu'il n'y ait pas, d'un département à l'autre, des différences aussi
radicales.
Toutefois, il faut préserver les possibilités d'adaptation aux situations
locales. A cet égard, je veux vous assurer, monsieur Seillier, que les
initiatives très intéressantes que j'ai eu l'occasion de découvrir sur le
terrain doivent, dans mon esprit, pouvoir perdurer et qu'il ne faut pas
enfermer dans un moule trop rigide l'ensemble de ces actions.
Le deuxième point fort de la discussion concerne, me semble-t-il, l'approche
intercommunale de la question du logement.
Tout le monde s'accorde aujourd'hui pour reconnaître que le problème de
l'habitat, plus spécialement celui de la mixité sociale et urbaine, se pose et
doit être traité à l'échelle du bassin d'habitat. Dans ce cadre, je l'ai dit
dans mon intervention d'hier, la commune ne perd pas ses prérogatives du simple
fait qu'elle est invitée à inscrire ses initiatives dans une dynamique et une
approche plus larges pour l'obtention d'un équilibre à la bonne échelle
géographique.
Comme vous le savez, mesdames, messieurs les membres de la Haute Assemblée, en
votre qualité de représentants et de défenseurs des institutions locales, si
une collectivité sait s'adapter pour faire face à des attributions, des rôles
nouveaux, elle se conforte. A l'inverse, si la collectivité se montre incapable
de relever les défis, elle s'expose à être contestée, voire remise en cause.
La défense des institutions locales ne peut pas se gagner dans l'immobilisme,
elle relève de l'adaptation permanente.
C'est le sens qu'il faut donner aux dispositions qui vous sont proposées.
La délimitation des bassins d'habitat selon des critères objectifs pourrait
nous permettre d'atteindre un objectif difficile : le droit au logement dans la
mixité. Pour assurer la cohésion sociale à un échelon territorial pertinent, il
convient en effet de coordonner les actions.
Pour ce qui est de la mobilisation du patrimoine existant, notamment du
patrimoine privé ancien, dans lequel on observe la proportion de vacances qui a
été indiquée, la plupart des intervenants ont souligné l'aspect positif des
mesures qui ont été prises ou qui sont proposées pour faciliter, par les
organismes d'HLM ou par des associations, la « production » de logements à
occupation sociale, à la fois moins chers et mieux adaptés. Parmi vous, seul M.
Philippe Darniche en a douté.
Je veux donc attirer son attention sur les prêts locatifs aidés d'intégration
qui figurent dans la loi de finances à côté des prêts locatifs aidés à loyer
minoré. En effet, par un retour significatif de l'aide à la pierre, ces prêts
locatifs aidés d'intégration permettront d'offrir des loyers de sortie
accessibles aux plus modestes. Trente mille prêts locatifs - 20 000 en PLA-LM
et 10 000 en PLA d'intégration - sont disponibles. Il ne saurait être question
de les passer par pertes et profits. Il faut, au contraire, se mobiliser pour
les consommer car ils constituent le financement d'un gisement non négligeable
de nouveaux logements affectés à l'usage social que nous souhaitons.
La loi de finances pour 1998 a consenti un effort en anticipation sur la loi «
exclusion ». Je rappelle que cet effort est de l'ordre de 1,6 milliard de
francs et que nous entendons bien le répéter dans les années à venir.
Je voudrais également appeler l'attention de M. Philippe Darniche sur la
proposition qui est faite d'élucider le régime fiscal de la fin du bail à
réhabilitation. Il est évident que cette mesure constitue une possible relance
du bail à réhabilitation, dont chacun s'accorde à reconnaître qu'il n'a pas eu
l'efficacité souhaitée.
Il convient d'ajouter à tout cela - pour m'en tenir aux principales mesures -
la décision d'exonération pendant quinze ans, avec compensation par l'Etat, de
la taxe foncière bâtie, dans le cadre d'opérations
d'acquisition-amélioration.
Il s'agit là d'une incitation à mieux mobiliser les énergies en faveur de
l'ancien. Il fallait prendre cette mesure, car la disparité avec le traitement
fiscal de l'offre nouvelle financée par des prêts locatifs aidés n'incitait pas
à faire bon usage de la fongibilité des crédits.
Quinze ans d'exonération de taxe foncière bâtie pesaient très lourd en faveur
du neuf au détriment de l'ancien. Sur ce point, on ne peut donc pas nier les
avancées.
Je suis sûr, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous aurons, à l'occasion
de l'examen de l'article 30, un débat sur la taxation de la vacance.
J'ai bien entendu les propos qui ont été tenus à ce sujet par plusieurs
d'entre vous. Je souhaite leur faire écho en précisant que la rédaction de
l'article 30 qui vous est proposée s'inspire de celle de l'article 1389 du code
général des impôts, qui régit le dégrèvement de la taxe foncière pour vacance
ou inexploitation.
Vous le savez, la jurisprudence exonère chaque fois qu'il y a vacance ou
inxeploitation pour cas de force majeure. Nous ne disons rien d'autre lorsque
nous mentionnons que la taxe n'est pas due en cas de vacance indépendante de la
volonté du contribuable.
D'aucuns se sont interrogés pour savoir s'il n'y avait pas là une initiative
allant trop loin au regard du droit de propriété.
Il n'est pas normal, mesdames, messieurs les sénateurs, d'être confronté, dans
une agglomération urbaine, d'une part, à une demande très forte et, d'autre
part, à un important parc sans emploi.
Bien sûr, il convient de respecter le principe fondamental qu'est la liberté.
Mais celle-ci est limitée ; elle consiste, en effet, à faire ce qui ne nuit pas
à autrui. Or, lorsque l'accès au logement est difficile, il est évident que la
détention prolongée d'un logement peut être perçue comme étant à l'origine d'un
préjudice social. C'est en tout cas le sens que nous donnons au dispositif que
nous avons prévu.
J'insiste sur le fait que ce n'est pas la première fois qu'un traitement
fiscal différent est institué selon l'usage que le propriétaire fait de son
bien. Il en est ainsi pour une disposition que vous connaissez bien : la taxe
sur les locaux à usage de bureaux en Ile-de-France. C'est également le cas pour
un certain nombre d'incitations fiscales ou certaines aides de l'Agence
nationale pour l'amélioration de l'habitat, par exemple, pour inciter à la
remise en location de logements vacants.
Quoi qu'il en soit, mesdames, messieurs les sénateurs, pour que les choses
soient claires, je précise que nous proposons de taxer une situation et non un
comportement qui pourrait entraîner des appréciations subjectives, même si on
espère de cette taxe non pas un produit fiscal mais un changement
d'attitude.
Ces précisions sont de nature, me semble-t-il, à lever un certain nombre
d'interrogations et de réserves.
Plusieurs d'entre vous ont dit leur préférence pour des mesures d'incitation
positives. Mais elles existent ; elles sont même nombreuses. La mise en place
d'une taxe sur les logements vacants, en cas de vacance durable et délibérée,
permettra d'en faire prendre conscience et de mieux les faire connaître.
Aujourd'hui, si quelqu'un veut aliéner un bien vétuste vacant, il dispose non
seulement des moyens de financement existants, que nous avons améliorés, comme
je l'indiquais à l'instant, mais aussi des aides de l'Agence nationale pour
l'amélioration de l'habitat, notamment les aides renforcées en cas de programme
social thématique « logement social ». Enfin, si quelqu'un est complètement
démuni, la formule du bail à réhabilitation peut le dispenser de tout
financement lui incombant.
Cette taxation sera donc, je l'espère, l'occasion de populariser ces
incitations fort positives qui existent déjà et que je souhaite que l'on
n'oublie pas.
La prévention de l'expulsion a été soulignée par la plupart d'entre vous comme
une avancée très positive du projet de loi. La seule interrogation qui a été
exprimée à ce sujet est la suivante : ne va-t-on pas vers un allongement des
délais ?
Dans les intentions du Gouvernement, il ne s'agit nullement d'un allongement
des délais. Il s'agit d'une meilleure utilisation de ces délais inhérents au
déroulement des procédures d'expulsion.
Aujourd'hui, dans le cas de logements privés, le préfet n'est alerté qu'après
que l'huissier a constaté son incapacité à obtenir le départ volontaire des
occupants après une mesure d'expulsion. Mais il s'est souvent écoulé des mois,
pour ne pas dire des années, avant d'en arriver là. C'est pourquoi nous vous
proposons de faire obligation aux huissiers de justice procédant à
l'assignation aux fins de constat de la résiliation du bail d'envoyer une copie
de cette assignation au préfet, à faute de nullité ; cette mesure existait pour
les baux commerciaux mais n'existait pas pour les baux d'habitation.
Il est évident que le préfet sera ainsi prévenu beaucoup plus tôt et que la
mobilisation des services sociaux permettra l'intervention du fonds de
solidarité pour le logement, voire l'organisation du relogement. Il y aura
ainsi moins de bailleurs exaspérés par les délais et, surtout, moins de
familles traumatisées par l'intervention des forces de l'ordre pour régler un
problème qui, lorsque les familles visées sont de bonne foi, n'est après tout
qu'un problème social, qui doit être traité comme tel et non pas comme un
problème d'ordre public.
Mesdames, messieurs les sénateurs, après ces premières explications sur les
points sensibles du texte, je vous confirme que, comme vous l'a indiqué hier
Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité, nous nous montrerons bien
évidemment ouverts aux propositions destinées à améliorer le texte, sous
réserve qu'elles n'aillent à l'encontre ni de sa philosophie ni des objectifs
que nous nous sommes assignés, ce texte ayant été élaboré, sur ce point, en
bonne concordance, je crois, avec les vues de tout le mouvement associatif pour
la lutte contre l'exclusion.
(Applaudissements sur les travées socialistes, sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE, de
l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, à la suite de cette discussion générale et
après mes collègues, je voudrais répondre à certaines des interrogations qui
sont nées de vos débats.
Je crois que la discussion a fait apparaître, comme à l'Assemblée nationale,
un grand nombre de réflexions convergentes, mais aussi quelques oppositions,
dont un certain nombre peuvent être levées dès à présent. Je pense notamment
aux critiques qui relèvent du devoir d'opposition, auquel faisait référence M.
Descours lorsqu'il nous disait qu'il ne serait pas dans son rôle s'il ne
critiquait pas le projet de loi.
M. Charles Descours.
Ce n'est pas tout à fait cela !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je vous cite exactement !
Sur un sujet comme celui-là, il est en effet indispensable de dépasser les
clivages partisans pour nous rassembler sur l'essentiel. C'est le sens du
message qu'a adressé Mme Anthonioz-de Gaulle aux parlementaires et que chacun
ici a qualifié à juste raison de propos d'une sagesse extrême.
En ce sens, je ne peux que souscrire à l'invitation de M. le président
Fourcade, qui nous a dit : « Pourquoi ne pas tenter de rapprocher les points de
vue de l'Assemblée nationale et du Sénat ? »
Je voudrais rapidement répondre aux quelques points essentiels que vous avez
soulevés, et je commencerai par le financement.
Le premier thème qui a été abordé par beaucoup d'entre vous porte sur les
moyens financiers mobilisés pour le programme de prévention et de lutte contre
les exclusions.
Je ne peux laisser dire, monsieur Seillier, que la lutte contre les exclusions
serait « le parent pauvre des choix budgétaires ». En effet, 51,4 milliards de
francs sur deux ans et demi, qui viennent s'ajouter aux crédits existants,
c'est un effort considérable, et personne ne peut le contester sérieusement.
Vous l'admettez vous-même en parlant de « vertige quantitatif ». Je pourrais
également citer M. Gournac, qui reproche au programme un « effet quantitatif »
qui primerait le qualitatif, ou bien d'autres interventions de cette nature.
D'autres ont évoqué des redéploiements pour minimiser la porté de ce chiffre.
Mais, comme l'a très bien souligné Mme Derycke, certains, sur les mêmes bancs,
s'en félicitent alors que d'autres le regrettent !
Je voudrais ici très simplement et très clairement répéter l'engagement qu'a
pris M. le Premier ministre : il n'y aura pas d'impôt supplémentaire pour
financer ce programme. Il y aura donc un redéploiement au sein du budget de
l'Etat, mais à aucun moment ce programme de prévention et de lutte contre
l'exclusion ne sera financé par des crédits déjà affectés à l'exclusion aux
mêmes publics, aux mêmes secteurs.
A cet égard, permettez-moi de vous dire, comme l'a rappelé M. Huguet, que le
précédent gouvernement avait présenté son projet de loi en disant - je cite là
M. Barrot - que même si l'on affichait 3 milliards de francs, le texte n'aurait
aucun coût puisqu'il serait financé par la réforme de l'allocation de
solidarité spécifique, l'ASS. Il s'agissait bien là d'un redéploiement interne
à la lutte contre les exclusions, ce que nous refusons à faire.
Nous avons été, je crois, d'une transparence totale en distinguant les mesures
financées sur des crédits inscrits en loi de finances pour 1998 et en insistant
sur des mesures qui avaient déjà été annoncées.
Faut-il entrer dans le débat que MM. Seillier et Oudin ont ouvert concernant
le point de savoir si la revalorisation de 6 % de l'allocation de solidarité
spécifique, annoncée le 26 février par le Premier ministre, ou l'instauration
de l'allocation spécifique d'attente, adoptée par le Parlement le 18 avril,
doivent ou non être prises en compte ? Très franchement, cela n'a pas grande
importance.
Ce qui compte pour les titulaires de l'ASS, c'est qu'il y ait un rattrapage du
passé - et c'est 1 milliard de francs qui a été mis sur la table - et ce qui
compte pour ceux qui ont cotisé pendant quarante ans, c'est d'avoir droit à
leur retraite. Or nous en sommes bien là aujourd'hui !
Certains soulignent enfin qu'une partie des mesures du programme font appel à
des cofinancements. Or, comme l'a également souligné Mme Derycke, ce sont les
mêmes qui, à la fois, s'en inquiètent et regrettent par ailleurs que le
programme ne s'appuie pas assez sur les collectivités locales.
Je crois que M. Huguet a trouvé les mots justes pour décrire la situation :
c'est un effort important qui est attendu, qui témoigne de notre volonté d'une
action de proximité et de notre confiance dans la décentralisation. Mais ce
n'est pas un effort insurmontable, compte tenu de l'enjeu majeur de ce
programme.
Je souligne, d'ailleurs, que rien n'est imposé aux collectivités locales,
qu'il s'agisse du programme TRACE, le trajet d'accès à l'emploi, ou bien des
plans locaux d'insertion par l'économique, les PLIE. Les collectivités locales
qui s'inscriront dans le partenariat le feront sur la base du volontariat et
auront une opportunité unique de démultiplier leur action grâce aux crédits
d'Etat. Ceux d'entre vous qui ont un plan local d'insertion savent bien de quoi
je parle.
Cette bataille de chiffres n'est donc pas le plus important dès lors que
personne ne conteste que les dépenses sur ce programme de lutte contre
l'exclusion sont significatives, et vous pourrez constater très concrètement,
dès le budget pour 1999, que l'ensemble des engagements annoncés du
Gouvernement sont, bien évidemment, tenus.
Deuxième critique, ou thème sur lequel nous souhaitons discuter : la
décentralisation.
M. Seillier a dénoncé un texte qui serait « éloigné de l'esprit de la
décentralisation ». Vous vous référez, monsieur le rapporteur, à l'appui de
cette thèse, au programme TRACE, qui « confirme », dites-vous, « de manière
expresse la défiance du Gouvernement vis-à-vis de certains aspects de la
décentralisation ».
Si vous entendez par là que l'Etat, garant de la solidarité nationale, doit
assumer ses responsabilités, je suis prête à assumer ce reproche, comme je l'ai
dit à l'Assemblée nationale, car l'Etat doit effectivement faire en sorte que
personne ne reste à l'écart de l'application des droits qui fondent notre
République.
Si, en revanche, vous sous-entendez que le Gouvernement a souhaité mettre à
l'écart les régions, les départements ou les communes, je crois qu'il y a là
une réelle incompréhension. Nous appelons à la mobilisation de tous.
Je ne prendrai que deux exemples, les plus significatifs.
Tout d'abord, s'agissant du programme TRACE, la loi quinquennale a
effectivement prévu de transférer aux régions les stages de formation
professionnelle des jeunes, qualifiants ou préqualifiants, dans le cadre de la
décentralisation. Mais elle n'a jamais indiqué que le champ de compétence
couvrirait l'ensemble des actions d'insertion professionnelle des jeunes.
Ainsi, les formules d'accès direct à l'emploi, comme les contrats
emploi-solidarité, les contrats emploi consolidé, les contrats
initiative-emploi, notamment, sont restées du domaine de l'Etat. Quant à
l'accompagnement des jeunes, il n'a pas fait non plus l'objet d'un transfert
aux régions.
Tout le monde s'accorde à dire que l'enjeu, pour l'insertion des jeunes, est,
aujourd'hui, de parvenir à une meilleure articulation entre les actions de
formation qui sont engagées par les régions et celles qui le sont par l'Etat en
matière d'accès à l'emploi.
C'est une des conclusions, d'ailleurs, du dernier rapport du Comité de
coordination des programmes régionaux d'apprentissage et de formation
professionnelle continue, dont la majorité des membres est issue des conseils
régionaux.
C'est précisément l'objet du programme TRACE : construire des parcours vers
l'emploi pour les jeunes en difficulté par une articulation et une coordination
des actions de l'Etat et des régions dans un cadre conventionnel ; en effet,
c'est bien évidemment ainsi que nous avancerons. Les principaux intéressés ne
s'y sont d'ailleurs pas trompés : la présidente du Comité de coordination des
programmes, Mme Marie-Thérèse Geffroy, a approuvé le programme TRACE, tout
comme M. Robert Galley, le président du Conseil national des missions
locales.
Votre critique, monsieur Seillier, aurait au contraire été pertinente, me
semble-t-il, à l'égard des itinéraires personnalisés d'insertion
professionnelle, les IPIP, qui étaient prévus dans le projet de loi de cohésion
sociale, car ces parcours étaient entièrement pilotés par l'Etat,
via
des organismes de formation sélectionnés par les préfets et financés sur des
crédits d'Etat, sans aucune participation des régions. Les IPIP avaient été
fortement critiqués pour cela, et c'est sans doute la raison des difficultés
rencontrées pendant la phase expérimentale. En revanche, cette critique est
erronée s'agissant du programme TRACE, car nous avons tiré les leçons de
l'échec du précédent dispositif.
Aussi, je me réjouis que la quasi-unanimité d'entre vous aient approuvé ce
programme, certains plus fortement que d'autres, je pense particulièrement à M.
Fischer et à Mme Derycke.
Notre volonté d'ancrer ce projet dans le sens de la décentralisation
s'illustre également de manière très forte dans les articles 80
bis
et
80
ter
du projet de loi qui instituent, d'une part, un comité
départemental destiné à coordonner les différents organismes existants et,
d'autre part, une commission déparementale des aides d'urgence.
M. Michel Mercier a souligné l'esprit d'ouverture et de dialogue que le
Gouvernement avait manifesté pour l'élaboration du dispositif institutionnel.
Je l'en remercie sincèrement et, comme lui, je souhaite que cet état d'esprit
continue de prévaloir à l'avenir, tant nous avons de sujets en commun et devons
nous accorder dans l'intérêt des Français.
La coordination des dispositifs est en effet essentielle. Elle repose sur la
volonté de tous les acteurs d'agir ensemble. Le fonctionnement du fonds
d'urgence sociale a été à cet égard exemplaire, et je regrette le jugement très
sévère porté par M. Oudin sur ce dispositif. Je ne pense pas qu'il y ait eu des
gâchis. Au contraire, nous avons évité, en coordonnant mieux les aides,
certaines redondances. Nous avons eu une meilleure connaissance des familles et
des personnes concernées et donc mieux adapté les aides qui pouvaient leur
convenir. Aussi faut-il maintenant tirer les leçons de ce mécanisme. En effet,
une meilleure coordination n'est pas un facteur de dérive des finances
publiques. Bien au contraire, c'est un gage de leur meilleure utilisation.
Je regrette également, malgré ce satisfecit sur la forme, que la commission
des affaires sociales ait proposé de supprimer l'article 80
ter
, qui
crée un comité départemental de coordination des politiques de prévention et de
lutte contre l'exclusion, qui a pourtant reçu l'accord de l'Association des
présidents de conseils généraux et a été voté à l'unanimité par l'Assemblée
nationale.
Je voudrais aussi me féliciter du consensus sur les dispositions qui visent à
améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens les plus défavorisés. Sur
toutes ces dispositions, les amendemens proposés vont essentiellement dans le
sens de l'amélioration du dispositif, qu'il s'agisse de l'insaisissabilité des
minima sociaux, du droit à l'énergie, au téléphone ou au compte bancaire.
Sur ce dernier point, monsieur Gournac, le Gouvernement fait étudier avec
beaucoup d'attention l'amendement que vous avez déposé avec conviction et qui
vise à remédier à des pratiques qui ont déjà été dénoncées à l'Assemblée
nationale et auxquelles il convient de mettre un terme.
Par ailleurs, plusieurs d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ont
évoqué la question majeure de l'accès aux soins et à la prévention, qui
continue à poser un problème à nombre de nos concitoyens.
Ces difficultés sont liées, d'une part, à la porosité du système actuel de
couverture sociale, qui fait que certains n'arrivent pas à avoir accès à la
sécurité sociale bien qu'ils en aient théoriquement le droit, d'autre part, à
l'inadaptation de l'offre de prévention et de soins pour les personnes en
situation de précarité.
En ce qui concerne le premier point, il s'agit d'une question très complexe,
comme l'a souligné M. Mercier. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité
prendre le temps pour engager les consultations nécessaires.
Une mission relative à la couverture maladie universelle a été confiée à M.
Jean-Claude Boulard, député, qui remettra ses conclusions au mois de
juillet.
J'ai entamé moi-même des rencontres, avec la mutualité, notamment. Certaines
ont déjà eu lieu au niveau départemental, nous allons poursuivre avec
l'association des présidents de conseils généraux. Nous devons parvenir à un
accord.
Je redis très clairement à tous ceux qui s'en inquiètent, que ce soient MM.
Huguet, Fourcade, Mercier, Darniche ou Descours, qu'un projet de loi relatif à
la couverture maladie universelle sera soumis au Parlement à l'automne, car,
s'il nous paraît cohérent de lier ce texte au programme de lutte contre les
exclusions, il n'est pas moins nécessaire de le lier au projet de loi de
financement de la sécurité sociale.
Je tiens à dire à Mme Borvo qu'elle a raison de souligner l'intérêt des
dispositifs d'avance de frais, ainsi que la nécessité de veiller à ce que les
personnes les plus démunies bénéficient d'une couverture complémentaire leur
permettant un accès aux lunettes et autres prothèses ; nous travaillons sur le
sujet.
Ces deux dimensions constituent une différence majeure avec le projet
d'assurance maladie universelle, qui n'envisagerait que la couverture de base
du régime général.
Toutefois, au-delà de ces problèmes de couverture sociale, nous devons parler
d'un véritable droit à l'accès aux soins, et non pas nous exprimer de façon
symbolique, monsieur Lorrain, même si, comme M. Autain, je pense qu'en
politique les symboles ont leur importance.
Deux avancées notables sont proposées, qui s'inspirent, comme l'a d'ailleurs
souligné M. Lorrain, d'initiatives émanant des professionnels de santé,
notamment de l'hôpital, et des associations. Oui, il faut le dire, ces
professionnels de santé, ces associations nous ont ouvert la voie. A nous de
donner à leurs actions innovantes la dimension institutionnelle nécessaire, à
travers la généralisation des dispositifs d'accueil médico-social à l'hôpital,
qui seront financés, monsieur Descours, sur le budget hospitalier, et au
travers de la systématisation des programmes régionaux d'accès à la prévention
et aux soins, dont, à l'instar du Conseil économique et social, nombre d'entre
vous se félicitent.
Ces programmes seront, bien sûr, dotés de moyens qui prennent en compte les
indices de précarité, dont on connaît le niveau élevé, notamment dans des
régions telles que le Nord - Pas-de-Calais - M. Huguet l'a souligné - ou en
outre-mer, comme M. Payet l'a dit.
Ces programmes permettront notamment, comme le souhaite avec raison M. Autain,
de développer la formation des acteurs sanitaires et sociaux, qui est une
condition majeure de meilleure prise en compte de la prévention et de l'accès
aux soins.
Pour répondre aux préoccupations légitimes exprimées à plusieurs reprises,
hier soir, relativement à la santé scolaire, je rappellerai, d'une part, que le
Gouvernement a veillé à ce que, dès 1998, 600 postes nouveaux soient créés -
300 postes d'infirmières et 300 postes d'assistantes sociales - d'autre part,
que, conformément au souhait des députés, un rapport soit remis sur ce sujet au
Gouvernement et au Parlement.
Enfin, monsieur Mercier, vous avez souligné combien il était important de
s'inspirer d'expériences locales pour faire avancer ce dossier. Vous avez
raison. A cette fin, le ministère de l'éducation nationale et le ministère de
la santé ont mis en oeuvre deux expériences pilotes, dans l'Oise et en
Seine-Saint-Denis ; d'autre suivront.
Concernant les moyens dégagés, permettez-moi de clarifier un point qui a été
évoqué, notamment, par M. Seillier dans son rapport.
En 1997, les crédits déconcentrés alloués en matière de lutte contre
l'exclusion et de santé se montaient à 41 millions de francs. Dans la loi de
finances initiale pour 1998, ils n'étaient plus que de 28 millions de francs,
accusant donc effectivement une baisse. Mais cette baisse résulte en grande
partie de ce que la campagne de vaccination contre l'hépatite B en milieu
carcéral avait été inscrite sur cette ligne en 1997 et qu'il n'a pas été
nécessaire de reconduire une campagne de même ampleur en 1998.
Nous souhaitons renforcer significativement l'effort budgétaire dans ce
domaine. Dès 1998, 90 millions de francs seront consacrés à la mise en oeuvre
progressive des programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins,
effort qui sera porté à 250 millions de francs à partir de 1999.
Vous voyez, monsieur Seillier, nous entendons nous donner les moyens de faire
vivre les symboles.
Nous reviendrons au cours des débats sur les sujets essentiels qui ont été
évoqués avec force par certains d'entre vous. Je pense notamment aux actions
spécifiques en direction des femmes en difficulté qu'ont appelées de leurs
voeux Mmes Derycke et Dusseau, mais aussi à la lutte contre les exclusions dans
les départements et territoire d'outre-mer, évoquée par MM. Payet et Tui.
Alors, rupture ou continuité ? Je vais répondre aux nombreux intervenants de
la majorité sénatoriale qui se sont posé la question de savoir à qui attribuer
la paternité de ce projet de loi.
Je souhaite être très claire à ce sujet : ce débat n'a pour moi que peu de
sens.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Très bien !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je n'ai jamais parlé de rupture
entre le projet de loi de cohésion sociale et l'actuel projet de loi. Pour le
Gouvernement, il ne peut s'agir que d'une simple continuité entre le travail
des associations, un premier travail réalisé par le Conseil économique et
social et par le précédent gouvernement, et le présent projet de loi, même si
nous considérons, comme l'a souligné M. Gruillot et comme l'ont dit abondamment
les associations, que ce projet de loi constitue une avancée significative par
rapport au précédent.
Bien sûr, ce projet de loi reste perfectible. C'est tout le sens du travail
parlementaire.
Comme l'a rappelé Mme Derycke, nous nous devons de rester humbles sur ces
sujets et ne pas prétendre régler l'ensemble des difficultés auxquelles sont
confrontés nos concitoyens.
Ce texte constitue néanmoins un tournant majeur dans la lutte contre les
exclusions, eu égard à la mobilisation et à l'implication de l'ensemble des
départements ministériels, eu égard aux moyens déployés, mais aussi par le fait
que, malgré la subsistance de quelques divergences, l'ensemble de la
représentation nationale peut se retrouver sur le vote de ce texte.
Contrairement à ce que certains ont pu feindre de croire, il ne s'agit pas de
voter ou non un quitus au gouvernement. Je n'aurais ni l'indélicatesse ni
d'ailleurs, je l'avoue, le souhait de ranger M. Gournac dans la majorité
plurielle si son vote devait finalement être positif.
(Sourires.)
Qu'il se rassure ! Pour la majorité, comme l'ont rappelé MM.
Huguet et Fischer, ce projet de loi de lutte contre les exclusions s'inscrit
dans un ensemble cohérent de lutte contre le chômage que nous avons engagé dès
notre arrivée. Même si cet ensemble cohérent n'a pas recueilli une totale
adhésion dans cette assemblée, nous devons nous employer à nous retrouver quand
le sujet en vaut la peine, comme c'est le cas aujourd'hui, et que l'attente de
nos concitoyens est extrêmement forte.
Au-delà des hommages convenus, il appartient maintenant à chacun de prendre en
conscience ses responsabi-lités.
L'exclusion est notre défaite collective. Grâce à ce texte, qui n'est pas un
texte partisan, nous pouvons y apporter une réponse collective, et je crois que
c'est ce qu'attendent de nous les Françaises et les Français.
J'ai entendu parler du devoir d'opposition. Mais, au-delà de ce devoir, il y a
le devoir tout court, Or, sur un sujet semblable, exacerber nos différences
reviendrait à nourrir l'indifférence. Dans ce domaine plus que dans tous les
autres, nous devons être clairs : face à l'exclusion, il n'y a pas de place
pour la résignation. J'espère que nous parviendrons à nous retrouver sur cette
attitude.
(Applaudissements sur les travées socialistes, sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen, sur celles du RDSE, ainsi que sur certaines
travées de l'Union centriste.)
M. le président.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - La lutte contre les exclusions est un impératif national fondé
sur le respect de l'égale dignité de tous les êtres humains et une priorité de
l'ensemble des politiques publiques de la Nation.
« La présente loi tend à garantir l'accès effectif de tous aux droits
fondamentaux dans les domaines de l'emploi, du logement, de la protection de la
santé, de la justice, de l'éducation, de la formation et de la culture, de la
vie familiale et de la protection de l'enfance.
« L'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics dont les
centres communaux et intercommunaux d'action sociale, les organismes de
sécurité sociale ainsi que les institutions sociales et médico-sociales
participent à la mise en oeuvre de ces principes.
« Ils poursuivent une politique active destinée à connaître, à prévenir et à
supprimer toutes les situations pouvant engendrer des exclusions.
« Ils veillent à garantir à chacun, pour permettre l'exercice de ses droits,
un accompagnement personnalisé, la mise à disposition d'une information
complète et la possibilité d'un droit d'alerte auprès du délégué départemental
du Médiateur.
« Les entreprises, les organisations professionnelles ou
interprofessionnelles, les organisations syndicales de salariés
représentatives, l'ensemble des acteurs de l'économie solidaire, les organismes
de prévoyance, les associations qui oeuvrent dans le domaine de l'insertion et
de la lutte contre l'exclusion et les citoyens concourent à ces objectifs. »
Sur l'article, la parole est à M. Vergès.
M. Paul Vergès.
Monsieur le président, mes chers collègues, notre appréciation du présent
projet de loi a été éclairée par les interventions prononcées par nos collègues
de la Réunion et les élus des autres départements d'outre-mer à l'Assemblée
nationale, tant en commission qu'en séance publique, de même que par le travail
effectué en commission dans notre assemblée, s'agissant notamment de
l'outre-mer.
Cette position globale nous impose cependant de faire les remarques
nécessaires sur la situation spécifique de la Réunion par rapport aux objectifs
définis à l'article 1er du projet de loi.
Notre île, en effet, partie intégrante de l'Union européenne, est un marché
ouvert qui, du fait de ce que l'on appelle la mondialisation des échanges, est
le théâtre de retructurations financières et industrielles, tandis que son
appareil productif connaît des mutations technologiques.
En conséquence, la Réunion subit les mêmes phénomènes que les pays développés
: un premier contingent de chômeurs où les jeunes et les chômeurs de longue
durée sont en progression constante.
Par ailleurs, la Réunion vit un autre phénomène, inconnu aujourd'hui en
Occident, qui est la marque de tous les pays dits du tiers monde : la
croisssance démographique.
La Réunion est en pleine transition démographique, passant d'une situation de
forte natalité et de forte mortalité à un nouvel équilibre découlant de la
baisse de la natalité et de la mortalité.
Cette transition démographique s'achèvera vers l'an 2025. La Réunion sera
passée alors de 600 000 habitants au recensement de 1990 à 700 000 l'an
prochain et à un million vers 2025.
Une augmentation de 400 000 habitants en trente-cinq ans, c'est l'équivalent
de toute la population réunionnaise des années soixante-dix ; ce serait pour la
France la certitude de passer de 60 millions d'habitants aujourd'hui à 100
millions dans moins de quatre décennies.
Sur le plan de l'emploi et de l'exclusion, la conséquence est évidente. Chaque
année, près de 10 000 jeunes arrivent sur le marché du travail. En période de
croissance soutenue à 5 %, la Réunion créait 3 500 emplois nets par an. Elle
l'a fait pendant les années soixante et soixante-dix.
Aujourd'hui, ce total en emplois véritables a diminué du tiers ; 3 500 emplois
véritables lors des années de croissance, 10 000 jeunes chaque année en âge de
travailler : tout est dans le rapprochement de ces deux chiffres.
Les conséquences de la mondialisation, d'une part, de la croissance
démographique, d'autre part, expliquent le taux de chômage de 40 % par rapport
à la population active, soit 120 000 chômeurs environ. Ces deux chiffres
augmentent chaque année. Ils expliquent le nombre croissant de familles
relevant du RMI ou des ASSEDIC, c'est-à-dire de la solidarité.
Mes chers collègues, vous comprenez dans quelle situation nous sommes. La
solution de nos problèmes ne peut pas relever seulement d'amendements à une loi
généreuse élaborée en fonction de la situation métropolitaine ! La Réunion a
besoin d'un développement propre, adapté à ses spécificités, exigeant des
mesures réglementaires et législatives, créant une société de solidarité,
c'est-à-dire préférant l'emploi à l'assistance et rendue possible non seulement
par la solidarité nationale, mais aussi par la solidarité locale.
C'est pourquoi nous considérons que ces dispositions générales concernant la
lutte contre les exclusions doivent être complétées par un projet de loi
complémentaire répondant aux besoins propres de l'outre-mer et adapté à ses
spécificités.
Un débat général sur la situation de plus en plus grave des départements
d'outre-mer nous semble un préalable nécessaire à l'information, à la
prévention et à la prise de mesures dans la perspective d'une loi de programme
ouvrant enfin la Réunion sur un développement véritable, c'est-à-dire sur un
avenir de travail et de dignité.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
et sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon groupe
souhaite, par cette intervention, attirer l'attention du Gouvernement et de la
Haute Assemblée sur les risques d'exclusion auxquels sont exposées les
femmes.
Ma volonté n'est pas ici d'associer de façon systématique les femmes au
phénomène d'exclusion. Le faire serait une grossière erreur. Il est toutefois
impossible d'ignorer qu'elles sont effectivement, plus fréquemment que les
hommes, victimes d'inégalités. Mon propos est non pas d'enfermer les femmes
dans un ghetto, mais plutôt à l'occasion de la discussion de ce projet de loi,
de prendre en considération leur situation avec réalisme.
D'autres oratrices l'ont dit avant moi, et vous venez d'y faire allusion,
madame la ministre, les femmes connaissent trop souvent des situations
dramatiques lorsqu'elles sont seules, chargées de famille. Elles sont, par
ailleurs, les plus grandes victimes des violences, qu'elles soient commises
dans l'entreprise ou dans leur vie privée.
Les femmes, en particulier les jeunes, sont les plus touchées par le chômage,
notamment le chômage de longue durée. Lorsqu'elles occupent un emploi, elles
subissent davantage que leurs collègues masculins les bas salaires, la
précarité, le temps partiel contraint. Ainsi, parmi les 3 millions de salariés
qui gagnent moins de 5 000 francs par mois, 78 % sont des femmes.
Cette réalité induit, bien entendu, des problèmes graves d'accès au travail, à
la santé, à la contraception et à la formation qui appellent des réponses
urgentes et des efforts budgétaires.
C'est la raison pour laquelle je m'étais inquiétée, au moment de la discussion
du projet de loi de finances pour 1998, de la baisse des crédits ouverts au
chapitre 43-02 pour le ministère de l'emploi et de la solidarité, et de la
disparition de certaines mesures spécifiques prises à l'intention des
femmes.
Mes inquiétudes ne se sont d'ailleurs pas dissipées à la lecture de
l'interview que Mme Fraisse, déléguée interministérielle aux droits des femmes,
a accordée en début de semaine à un quotidien du soir, concernant sa mission et
les moyens qui lui sont alloués.
Il nous paraît impératif de porter une attention particulière sur la relance
des plans de lutte contre le chômage des femmes, d'autant que plusieurs plans
sociaux dans des secteurs d'activité où les femmes sont majoritairement
salariées, telles les banques et les assurances, ont été annoncés.
L'exigence de l'application ferme des lois sur l'égalité des salaires et
l'égalité professionnelle ainsi que l'élimination de tout temps partiel
contraint doivent être des priorités.
En ce qui concerne le volet logement, les femmes victimes de violences,
notamment conjugales, qui rencontrent des difficultés financières et souhaitent
la séparation doivent pouvoir avoir accès prioritairement à un logement social,
sans que les dettes de loyer contractées antérieurement par le couple soient à
la seule charge de la femme, même lorsque l'époux ou le concubin est
insolvable.
S'agissant du droit à la santé, les femmes, particulièrement les plus
modestes, rencontrent de plus en plus de difficultés pour l'accès à la
contraception. En effet, les pilules contraceptives de troisième génération
sont fort onéreuses et ne sont absolument pas remboursées par la sécurité
sociale, alors que ce sont souvent les seules à être supportées. Les stérilets
sont, eux, très faiblement remboursés, voire ne le sont pas du tout.
Plus généralement, le manque d'information en matière de contraception se fait
sentir, et c'est encore plus vrai pour les jeunes filles et les femmes les plus
démunies. La prise en compte de ce déficit d'information avait d'ailleurs
motivé, de la part du Gouvernement, l'annonce pour cette année d'une campagne
sur la contraception. Or nous apprenons que, faute de crédits, cette campagne
est reportée à l'année prochaine.
Nous regrettons également l'absence de volonté politique de s'attaquer
résolument aux filières de prostitution et de proxénétisme. Comme l'esclavage,
la prostitution est un système d'exploitation qui brise la liberté, la dignité
des femmes, et qui les expose à toutes les violences. Il place ainsi, de fait,
les femmes concernées en situation d'exclusion. La société doit assurer la
prévention des phénomènes prostitutionnels et permettre la réinsertion
sociale.
Vous l'aurez compris, le souci qui m'anime en prononçant cette intervention
est de voir conjuguer au féminin les mesures contenues dans le projet de loi de
lutte contre les exclusions. Il est grand temps de répondre aux aspirations des
femmes. Elles attendent depuis trop longtemps ! Nos décisions doivent donc
impérativement avoir de réelles répercussions sur leur vie quotidienne.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen,
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz.
Face à l'exclusion, nous nous devions d'agir et de faire en sorte que même la
personne la plus démunie puisse retrouver un espoir, une raison d'espérer en
l'avenir.
Chaque jour, un chômeur en fin de droit ou un jeune sans qualification sombre
dans la spirale de l'exclusion, parfois dans l'indifférence générale. Nous ne
pouvons plus l'accepter.
Cet article 1er est particulièrement nécessaire en ce qu'il fixe les objectifs
et propose les méthodes pour l'ensemble du projet de loi.
Madame la ministre, vous voulez vous attaquer aux exclusions et vous vous en
donnez les moyens. Cependant, au-delà de cette volonté, l'esprit du texte est
encore plus ambitieux, car il tend aussi à prévenir l'exclusion de façon
durable.
Pour combattre le mal efficacement, il faut bien sûr s'en donner les moyens.
Mais il faut surtout s'attaquer avec détermination à la racine du mal si l'on
veut guérir notre société de la misère et de la pauvreté qui sévissent
quotidiennement. Pour cela, nous devons « garantir », comme l'a fort justement
souligné l'Assemblée nationale, « l'accès de tous aux droits fondamentaux ».
Cette action doit être menée dans le domaine de l'emploi, tout d'abord, en
donnant à chacun la possibilité d'accéder à un travail correctement rémunéré et
en portant un coup d'arrêt aux licenciements ainsi qu'au développement des
emplois précaires, trop souvent dévolus aux femmes.
Avec les emplois-jeunes et la réduction du temps de travail, le Gouvernement a
déjà affiché sa volonté de faire de la lutte contre le chômage une priorité. En
inscrivant l'emploi dans le présent texte, il reconnaît la valeur centrale et
fondamentale qu'il occupe au sein de notre société.
Cette action doit, ensuite, être menée dans le domaine du logement, en
favorisant la mixité sociale, en encadrant le surloyer, en interdisant les
expulsions pour les personnes de bonne foi, en fixant une taxe de vacance et en
permettant la réquisition de logements inoccupés. Il était en effet nécessaire
- à Paris, notamment - de mobiliser un parc locatif laissé en jachère :
situation intolérable au regard de cette population défavorisée qui, encore
aujourd'hui, vit dans des logements insalubres, dangereux pour la santé des
enfants.
Madame la ministre, je suis ravie que vous teniez les engagements dont vous me
faisiez part, dans le
Journal officiel
du 19 février dernier, alors que
j'avais appelé votre attention sur le saturnisme infantile. Aussi pouvons-nous
espérer que, très bientôt, nous ne verrons plus des familles vivre, malgré
elles, dans des taudis.
La protection sociale, enfin, fait partie des besoins de première nécessité
dont chacun d'entre nous doit pouvoir bénéficier, et l'urgence à cet égard est
encore plus grande pour les plus démunis. Un directeur de mission locale me
faisait part récemment de la douleur physique d'un jeune en recherche d'emploi
qui, n'ayant pas les moyens d'accéder aux soins dentaires, était contraint de
vivre avec un mal que nous ne pouvons même pas imaginer, nous qui nous faisons
soigner pour des douleurs parfois bénignes. Comment se réinsérer dans de telles
conditions ?
Ce projet de loi constitue indiscutablement une avancée majeure, en attendant
le texte qui nous sera soumis à l'automne, concernant la couverture médicale
universelle.
La lutte contre l'exclusion est un impératif pour chacun d'entre nous et la
solidarité est l'affaire de tous, élus et citoyens, quelles que soient nos
responsabilités dans la société. C'est pourquoi nous nous réjouissons que la
liste des acteurs initialement prévus ait été complétée par l'Assemblée
nationale et que, par exemple, le mouvement associatif, dans sa diversité et sa
richesse - notamment les associations qui oeuvrent auprès des plus démunis et
des exclus - soit reconnu.
Face à la misère, nous avons non seulement une obligation de moyens mais aussi
et surtout une obligation de résultat. Ce texte va dans le bon sens, car il
inscrira la lutte contre les exclusions de façon pérenne dans toute politique
publique.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
La lutte contre l'exclusion n'est pas seulement un impératif de justice
sociale : c'est également une exigence pour permettre à chacun de vivre sa
citoyenneté. C'est pourquoi ce texte correspond à un projet d'éthique
politique.
Aujourd'hui, l'extrême vulnérabilité qui frappe celui qui est au chômage
depuis plusieurs années, la mère de famille seule qui se débat avec des dettes
ou le jeune qui vivote de contrats d'intérim en petits boulots d'été prive
chacun d'eux des moyens de se construire un projet de vie, une identité, et
rend très difficile toute participation à la vie commune.
Garantir l'accès de tous aux droits de tous est une obligation qui incombe à
l'Etat, lequel doit être un élément mobilisateur des autres acteurs politiques,
économiques et civils ; il doit être animateur et coordonnateur. Il n'y a là
aucune usurpation de compétence, aucun abus de pouvoir. C'est de volonté
commune qu'il doit s'agir.
Un consensus s'est établi autour du refus de voir consacrer un droit des
exclus afin d'éviter concrètement toute stigmatisation, telle celle qui surgit
au détour d'un ticket de cantine de couleur différente, d'une consultation dans
un dispensaire réservé à ces exclus ou du paiement de ses courses au
supermarché avec un bon alimentaire.
Cela étant, chacun s'accorde à reconnaître aujourd'hui que, afin d'assurer une
véritable égalité, valeur phare de notre République, il est nécessaire
d'intervenir de façon offensive, par le biais de discriminations positives. Car
il faut bien rétablir une égalité des chances qui est sérieusement hypothéquée
quand on naît, grandit et vit, d'une génération à l'autre, dans la précarité,
ou quand survient un accident de la vie.
Préparer à l'emploi des personnes éloignées du marché du travail, renforcer
les moyens humains et financiers dans les zones d'éducation prioritaires,
reconnaître la légitimité des modulations tarifaires pour des activités
culturelles, réserver 20 % des emplois-jeunes à des personnes issues des
quartiers défavorisés : voilà autant de dispositifs qui doivent permettre de
réintégrer des personnes marginalisées, ou en voie de l'être, dans la
collectivité nationale.
Il est en effet impossible d'espérer que progresse la démocratie dans une
société qui se développe économiquement dans des proportions aussi
spectaculaires, mais qui régresse socialement et dans laquelle 15 % des ménages
vivent grâce aux filets de sécurité que sont les minima sociaux.
Parce que les racines de l'exclusion se trouvent le plus souvent dans une
situation de chômage, le Gouvernement donne sans équivoque la priorité à
l'accès à l'emploi et fait aux jeunes et à leurs aînés des propositions pour un
« nouveau départ », à travers des outils tels que le programme TRACE ou le
contrat de qualification pour adultes, grâce aussi au renforcement et au
recentrage de formules tels que les contrats de formation en alternance, les
CES, les CEC, etc.
L'examen de l'ensemble des dispositifs ainsi proposés permet de dégager trois
grandes constantes.
Tout d'abord, comme vous l'avez souligné, madame la ministre, les dispositions
que nous examinons tendent à répondre à la forte revendication qui s'est
exprimée lors du mouvement des chômeurs, concernant l'individualisation de la
prise en compte de chaque situation.
S'adapter à la singularité de chaque cheminement personnel et à la nature des
difficultés de chacun, telle est précisément la préoccupation qui anime nos
discussions sur l'articulation des missions et contrats remplis par ces
personnes au sein des structures d'insertion par l'économie, entreprises et
associations intermédiaires.
Par ailleurs, le projet de loi met l'accent sur la notion de parcours afin de
combattre la dérive qui consiste à figer la personne dans un statut
d'allocataire de tel ou tel minimum social. Je pense notamment au programme
TRACE, qui prévoit l'accompagnement des jeunes sur une durée pouvant être
modulée en fonction de leur situation particulière. D'ailleurs, contrairement à
la majorité de la commission des affaires sociales, nous estimons qu'il est
fondamental, durant ce parcours, de ne pas rompre la sécurité financière que
pourra apporter le FAJ.
Le projet de loi prévoit aussi l'extension du bénéfice de l'ACCRE - l'aide aux
chômeurs créateurs et repreneurs d'entreprise - aux titulaires des principaux
minima sociaux. Cette extension vise à encourager la sortie d'un système de
solidarité pour entreprendre un itinéraire d'insertion par l'économique qui,
dans notre pays, est parsemé d'embûches ; Mme la secrétaire d'Etat aux petites
et moyennes entreprises le sait bien.
Le projet de loi institue aussi la possibilité élargie de cumuler, sous
certaines conditions, les revenus de solidarité et les revenus d'activité afin
de réparer les effets pervers trop souvent constatés, liés à un travail à temps
partiel ou à un contrat d'intérim mal rétribué, mal organisé, induisant des
frais annexes qui, malheureusement, peuvent faire hésiter certains quand une
opportunité d'emploi se présente dans ces conditions.
Enfin, l'accent est mis sur l'exigence de formation, qui doit être présente
dans l'ensemble des parcours.
Elle est au centre de vos propositions, dans le contrat de qualification et
dans le programme TRACE, qui visent des jeunes sortis trop tôt du système
scolaire.
Elle sera plus étroitement surveillée dans le cadre des CEC et CES, car il n'y
a peut-être pas eu jusqu'à présent suffisamment d'évaluations permettant d'en
apprécier l'efficacité au regard des moyens déployés en faveur de cette
formation.
M. le président.
Madame Dieulangard, je vous demande de conclure : alors que les prises de
parole sur un article sont limitées à cinq minutes, vous parlez déjà depuis
plus de six minutes.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je conclus, monsieur le président.
Mes chers collègues, au moment où, dans notre pays, on débat sur les choix à
opérer afin de redistribuer les fruits de la croissance, le projet de loi de
lutte contre les exclusions s'inscrit dans une perspective de retour à
l'emploi.
Toutefois, il ne faudrait pas que, tandis qu'on s'efforce de faire rentrer les
plus fragiles dans l'entreprise en activant les ressorts des fonds sociaux,
l'entreprise elle-même vienne grossir les rangs de l'exclusion par des
politiques inadmissibles de gestion du personnel, à travers des contrats
précaires et des plans de licenciement injustifiés.
Madame la ministre, vous nous avez annoncé votre intention d'engager une
réforme de notre législation sur ce point. Nous nous y associerons avec
détermination.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
Par amendement n° 1, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le deuxième alinéa de l'article 14, après les mots : «
tend à garantir », d'insérer les mots : « sur l'ensemble du territoire ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Cet amendement tend à
souligner que toutes les zones du territoire doivent participer à la lutte
contre les exclusions. Il s'agit essentiellement d'apaiser les sensibilités
craintives des zones rurales eu égard aux politiques de la ville, en affirmant
l'identité politique de finalité, aussi bien en zone rurale qu'en zone
urbaine.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Favorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Monsieur le rapporteur, avec cet amendement - je crains que vous n'en ayez pas
conscience - vous excluez, de fait, de l'accès aux droits fondamentaux, 1,7
million de Français établis à l'étranger, dont 900 000 manifestent un fort
attachement à la communauté nationale en s'immatriculant dans les consulats.
Il est vrai que l'accès à certains de ces droits ne peut être garanti par
l'Etat français que sur le territoire national, nous le savons bien. Toutefois,
pour quelle raison aurions-nous constitué, depuis des siècles, un réseau de
consulats à l'étranger, pourquoi aurions-nous mis en place, et renforcé ces
dernières années, un réseau d'écoles françaises à l'étranger, si ce n'est pour
renforcer la continuité de la citoyenneté pour les Français qui s'expatrient
?
On semble oublier que ces Français qui s'expatrient diffusent notre langue,
notre culture, notre technologie, nos produits industriels et nos services. On
semble oublier que 25 %, j'y insiste, du produit national brut de la France et
des millions d'emplois dépendent de notre activité, de notre dynamisme, de la
façon dont nous enseignons notre langue, dont nous vendons nos produits, dont
nous faisons connaître la France.
Il serait donc extrêmement dommageable d'exclure d'entrée du jeu, d'un tel
texte, les Français qui s'expatrient.
Dans les consulats, par exemple, depuis une quinzaine d'années, nous avons
développé l'aide sociale et la formation professionnelle. Nous plaçons
plusieurs milliers de Français sur le marché de l'emploi à l'étranger sans que
cela coûte un sou à la France. Cela revient beaucoup moins cher que l'Office
des migrations internationales et l'Agence nationale pour l'emploi.
Par conséquent, nous faisons prendre en compte notre citoyenneté. Cela
correspond à un mot d'ordre qui a maintenant dix-huit ans d'âge et qui était :
« Français à l'étranger, Français à part entière ».
Madame le ministre, vous avez indiqué que vous vouliez que les citoyens soient
réellement des citoyens à part entière. Comme l'a très justement dit mon
collègue Pierre Biarnès, voilà quelques années, pour notre part, nous sommes
non pas des citoyens à part entière, mais des « citoyens entièrement à part »
et nous ne voudrions pas que, à l'occasion d'un amendement sur le premier
article de ce projet de loi d'orientation, nous nous retrouvions complètement
écartés.
Nous sommes d'autant plus attachés à cet idéal d'être des Français à part
entière qu'il est le garant de notre citoyenneté et de notre appartenance à la
communauté nationale.
M. Alain Vasselle.
On a compris !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Français à part entière, nous voulons l'être de plus en plus. C'est pourquoi
nous ne pourrions admettre que l'excellente déclaration de principe sur
laquelle s'ouvre ce projet de loi nous exclue, de fait, de la nation.
M. Jacques Habert.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je met aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Quel esprit hexagonal !
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 421, M. Braun et les membres du groupe du Rassemblement pour
la République proposent, dans le deuxième alinéa de l'article 1er, de remplacer
les mots : « et de la culture, de la vie familiale et de la protection de
l'enfance » par les mots : « , de la culture, de la famille et de l'enfance
».
Par amendement n° 422, M. de Raincourt, Mme Bardou, MM. Bordas, de Bourgoing,
Cossé-Brissac, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants
proposent, à la fin du deuxième alinéa de l'article 1er, de remplacer les mots
: « de la vie familiale et de la protection de l'enfance » par les mots : « de
la protection de la famille et de l'enfance ».
La parole est à M. Braun, pour défendre l'amendement n° 421.
M. Gérard Braun.
La famille est nécessaire à l'enfant pour qu'il grandisse, se développe et
s'épanouisse harmonieusement. C'est en priorité dans sa famille que l'enfant
doit être élevé et protégé et sa famille doit être soutenue pour cela.
Il nous paraît donc important de ne pas laisser croire, par une formulation
qui instaure une séparation entre la famille et la protection de l'enfance, que
l'on opposerait l'enfant à sa famille.
M. Hilaire Flandre.
Très bien !
M. le président.
La parole est à Mme Bardou, pour défendre l'amendement n° 422.
Mme Janine Bardou.
L'amendement que nous proposons va dans le sens de celui qui a été présenté
par M. Braun. L'argumentaire est identique, mais la formulation est un peu
différente.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Ces deux amendements ont la même finalité.
Les plus démunis qui se trouvent en situation de très grande pauvreté, vivent
trop souvent dans l'angoisse d'être séparés de leurs enfants. En raison des
expériences malheureuses de placement administratif qu'ils ont connues, cette
perspective devient un véritable cauchemar.
La commission approuve donc l'esprit de ces deux amendements. Cependant, la
formulation de l'amendement n° 422 lui paraît préférable. Elle montre bien, en
effet, que la famille et l'enfance constituent un tout : souvent, dans les
situations d'exclusion, c'est la seule identité à laquelle les personnes
peuvent se raccrocher.
M. le président.
M. Braun, votre amendement est-il maintenu ?
M. Gérard Braun.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 421 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 422 ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Comme M. le rapporteur, le
Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 422, dont la rédaction
lui paraît plus pertinente.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 422, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 440, MM. Darniche, Durand-Chastel, Habert et Maman proposent
de compléter le deuxième alinéa de l'article 1er par la phrase suivante : «
Elle tend également à assurer l'accès des personnes physiques handicapées aux
services publics chargés de l'application de ses dispositions et à la prise en
compte de leurs besoins spécifiques dès lors qu'ils apparaissent comme un frein
à leur intégration sociale. »
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
On ne peut prétendre traiter efficacement l'exclusion dans notre pays sans
évoquer au préalable l'une de ses premières causes : les handicaps.
En France, et plus encore ailleurs, les personnes handicapées sont exclues
dans la vie et, bien souvent, du droit. L'amendement qu'il vous est proposé
d'adopter tend à les intégrer dans le dispositif initial du projet de loi sous
la forme d'une déclaration générale de principe.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Il
lui semble dangereux, en effet, d'ouvrir la voie à la création de droits
spécifiques pour certaines catégories.
En outre, les handicapés ne sont pas
a priori
des exclus. Ils ne font
donc pas partie du public directement visé par ce projet de loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Comme l'ensemble des
organisations et associations représentatives des personnes handicapées, le
Gouvernement souhaite que l'on ne lie pas handicap et exclusion.
Je veux profiter de l'intervention de M. Habert pour indiquer que, lors du
Conseil national consultatif des personnes handicapées, j'ai été conduite à
présenter un programme d'ensemble de la politique du Gouvernement à l'égard des
handicapés, que j'ai d'ailleurs rappelé au congrès de l'Union nationale des
associations de parents d'enfants inadaptés, l'UNAPEI, samedi dernier à
Toulouse.
Le Gouvernement s'est engagé sur un programme pluriannuel de création de
places : deux mille places en centres d'aide par le travail, les CAT, cinq
cents places en ateliers protégés et des mesures nouvelles concernant des
maisons d'accueil spécialisées et des foyers à double tarification.
Le Gouvernement a également fixé trois priorités : premièrement, la
socialisation et l'intégration des jeunes handicapés : nous y travaillons
actuellement avec l'éducation nationale et nous devons annoncer des mesures
très rapidement ; deuxièmement, l'accompagnement des personnes handicapées dans
leur vie quotidienne, en milieu ordinaire comme en institution médico-légale -
plusieurs missions travaillent actuellement, vous le savez, aussi bien sur la
tarification que sur les aides qui peuvent être apportées ; enfin,
troisièmement, la formation et l'accompagnement des travailleurs handicapés et
des personnes handicapées à la recherche d'un emploi.
Par conséquent, comme M. le rapporteur, il ne me paraît pas souhaitable de
lier la politique vis-à-vis des handicapés à la politique de lutte contre les
exclusions.
M. le président.
Monsieur Habert, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jacques Habert.
Etant donné les indications très précises que Mme la ministre vient de donner,
je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 440 est retiré.
Par amendement n° 2, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le quatrième alinéa de l'article 1er, après les mots :
« poursuivent une politique », de supprimer le mot : « active ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Il s'agit d'un simple amendement rédactionnel.
Il paraît difficile, en effet, d'établir une distinction entre une politique «
active » et une politique « passive » en matière de lutte contre les
exclusions.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 3, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit le cinquième alinéa de l'article 1er
:
« Ils prennent les dispositions nécessaires pour informer chacun de la nature
et de l'étendue de ses droits et pour l'aider, éventuellement par un
accompagnement personnalisé, à accomplir les démarches administratives ou
sociales nécessaires à leur mise en oeuvre dans les délais les plus rapides.
»
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement porte sur l'alinéa de l'article 1er relatif à
l'information et à l'accès aux droits des personnes en situation
d'exclusion.
Le projet de loi initial comportait une formulation assez modérée : il
s'agissait de veiller à garantir à tous une information complète et un réel
accès aux droits. En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté une
rédaction plus énergique : il s'agit de veiller à garantir à chacun, pour
permettre l'exercice de ses droits, un accompagnement personnalisé, la mise à
disposition d'une information complète et la possibilité d'un droit d'alerte
auprès du délégué départemental du médiateur.
Cette rédaction présente deux inconvénients : d'une part, la notion de droit
d'alerte n'est pas clairement définie ; d'autre part, les délégués
départementaux du médiateur constituent une structure relativement souple et ne
seraient sans doute pas en mesure de faire face à un afflux excessif de
recours.
C'est la raison pour laquelle le présent amendement tend à revenir à la
rédaction qui avait été prévue à l'article 3 du projet de loi de MM. Barrot et
Emmanuelli, tel qu'il avait été adopté par l'Assemblée nationale en juin
dernier. Cependant, cet amendement introduit la notion d'accompagnement
personnalisé éventuel, afin de reprendre l'idée intéressante votée par
l'Assemblée nationale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
J'ai entendu les remarques de
M. le rapporteur sur le fait que le délégué départemental n'a pas vocation à
jouer le rôle qu'on entend lui assigner ici.
Aussi, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 4, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose :
A. - Dans le dernier alinéa de l'article 1er, après le mot : « citoyens »,
d'insérer les mots : « ainsi que l'ensemble des acteurs de l'économie solidaire
et de l'économie sociale. »
B. - En conséquence, dans le même alinéa, de supprimer les mots : « l'ensemble
des acteurs de l'économie solidaire, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
L'Assemblée nationale a introduit l'expression « acteurs de
l'économie solidaire » dans l'énumération de ceux qui interviennent dans la
lutte contre l'exclusion.
Il s'agit d'une notion nouvelle qui, selon certains universitaires, désigne la
multitude d'expériences menées à travers le monde, lesquelles visent non pas à
maximiser les profits, mais à répondre à des besoins non satisfaits, tels que
l'aide aux personnes âgées, la garde d'enfants ou l'entretien de
l'environnement. La notion d'économie solidaire fait donc intervenir à la fois
des ressources marchandes, des ressources non marchandes, voire non
monétaires.
Il a semblé intéressant à la commission de conserver cette référence, mais en
l'enrichissant de la notion d'économie sociale, qui recouvre le travail des
mutuelles et des organismes de prévoyance.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
A l'Assemblée nationale, le
Gouvernement a donné un avis favorable à l'intégration de la notion d'économie
solidaire. Aujourd'hui, il donne un avis favorable pour que cette notion soit
complétée par celle d'économie sociale.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 5, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le dernier alinéa de l'article 1er, après les mots : «
organismes de prévoyance, », d'insérer les mots : « les groupements régis par
le code de la mutualité, ».
Par amendement n° 335, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, au dernier alinéa de l'article
1er, après les mots : « organismes de prévoyance, », d'ajouter les mots : «
notamment les groupements mutualistes, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Les termes « organismes de prévoyance » qui figurent à
l'article 1er ne recouvrent pas toutes les activités des mutuelles. Cet
amendement tend donc à faire apparaître les groupements mutualistes parmi les
acteurs de la lutte contre les exclusions.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 335.
M. Guy Fischer.
L'article 1er du présent projet de loi, après avoir affirmé avec force le
caractère prioritaire de la lutte contre les exclusions et posé les conditions
d'un réel accès aux droits, énumère les acteurs qui seront chargés de mettre en
oeuvre ces grands principes.
Incomplète, la rédaction initiale omettait de citer des acteurs importants
tels que les entreprises, les associations, les citoyens, la mutualité.
Ces oublis ont été très justement réparés par nos collègues de l'Assemblée
nationale, mais en partie seulement.
En effet, malgré la « bataille » menée pour que le mot « mutualité » figure en
toutes lettres dans le texte, seule la notion, selon nous vaste et floue, d'«
organismes de prévoyance » a été intégrée.
La mutualité, de par sa spécificité juridique et la place qu'elle tient au
sein de notre système de protection sociale, ne peut être assimilée à d'autres
acteurs et doit, de fait, être ajoutée à la liste prévue au cinquième
alinéa.
C'est l'objet de cet amendement, que deux justifications principales viennent
appuyer.
Tout d'abord, le code de la mutualité assigne pour mission aux groupements
mutualistes la prévention et la réparation des risques sociaux liés à la
personne. La mutualité n'est pas une quelconque compagnie d'assurance. Elle
remplit une mission d'intérêt général. Pour ce faire, il convient de
sauvegarder les valeurs mutualistes de solidarité que des directives
européennes tendent à faire disparaître. L'attaque frontale contre la mutualité
française se développe au niveau européen et national.
De plus, concrètement et depuis longtemps, les groupements mutualistes mènent
des actions de santé publique et oeuvrent sur le terrain en partenariat avec
les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale, pour améliorer
l'accès aux soins de tous, en particulier des personnes exposées au risque de
précarité.
Comment ne pas reconnaître la mutualité comme acteur de la lutte contre les
exclusions, alors qu'elle s'engage sur la voie de la mutualisation des
populations qui n'ont pas de couverture maladie complémentaire et qui renoncent
aux soins et à la prévention ? Certes, le débat aura lieu à l'automne.
Les groupements mutualistes sont, au même titre que d'autres, des partenaires
de l'Etat. C'est pourquoi je vous demande d'adopter notre amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 335 ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Tout en visant le même objet que l'amendement de la
commission, l'amendement n° 335 est restrictif. En effet, il ne fait des
mutuelles qu'une catégorie des organismes de prévoyance, alors que les
mutuelles n'ont pas uniquement une activité de prévoyance. C'est la raison pour
laquelle la commission préfère son propre amendement et considère que
l'amendement n° 335 est satisfait. Aussi, elle demande aux auteurs de ce
dernier de bien vouloir le retirer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 5 et 335 ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le mot « prévoyance » renvoie
aux opérations liées aux risques maladie, invalidité, incapacité et décès ; à
cet égard, il couvre à la fois les entreprises d'assurance classiques, les
institutions de prévoyance du code de la sécurité sociale et les mutuelles du
code de la mutualité. Ces trois opérateurs doivent être traités sur un strict
pied d'égalité. C'est d'ailleurs ce que nous imposent les règles
européennes.
Je suis assez sensible au fait, souligné par M. Fischer, de prendre en compte,
notamment dans un texte relatif à la lutte contre les exclusions, les valeurs
portées par la mutualité, qui vise, en particulier, à s'adresser à des
personnes non couvertes par des organismes du secteur privé. Aussi, je
comprends le souci d'intégrer les groupements mutualistes au sein de ce
texte.
Pour ma part, je préfère l'amendement n° 335, présenté par M. Fischer, car il
n'oppose pas les organismes de prévoyance et les organismes de mutualité, mais
il met l'accent sur ces derniers au sein des organismes de prévoyance. J'ai
bien entendu ce qu'a dit M. le rapporteur, mais je crois que, ici, nous faisons
bien référence à l'aspect « organisme de prévoyance » des mutualités.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur
l'amendement n° 5 et un avis favorable sur l'amendement n° 335.
M. Alain Vasselle.
Pour faire plaisir à M. Fischer !
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
L'expression « groupements régis par le code de la mutualité
» me semble juridiquement plus convenable que l'expression « groupements
mutualistes ». Je propose de rectifier l'amendement n° 5...
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Ou l'amendement n° 355,
monsieur le rapporteur !
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
... afin qu'il vise à insérer les mots : « notamment les
groupements régis par le code de la mutualité ».
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 5 rectifié, présenté par M. Seillier, au
nom de la commission des affaires sociales, et tendant, dans le dernier alinéa
de l'article 1er, après les mots : « organismes de prévoyance, », à insérer les
mots : « notamment les groupements régis par le code de la mutualité, ».
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement n° 5 rectifié ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
C'est l'idée de M. Fischer
corrigée par la commission : avis favorable !
M. Henri Belcour.
Et tant pis pour M. Fischer !
(Sourires.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5 rectifié.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Je regrette que lorsque nous faisons oeuvre de précision, la majorité
sénatoriale ne veuille pas en convenir, surtout que nous avions obtenu l'aval
du Gouvernement.
Cela étant dit, ne soyons pas plus royaliste que le roi. Un pas vient d'être
franchi, grâce aux arguments que nous avons développés. Aussi, nous voterons
l'amendement de la commission, bien que nous eussions préféré que notre
amendement, après rectification, fût adopté.
M. le président.
Monsieur Fischer, ce n'est pas la majorité sénatoriale qui vient de
s'exprimer, mais le rapporteur de la commission des affaires sociales !
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Si notre collègue M. Guy Fischer souhaite rectifier
l'amendement n° 335 en reprenant l'expression « régis par le code de la
mutualité », je n'y vois aucun inconvénient.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 335 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 6, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le dernier alinéa de l'article 1er, après les mots : «
les associations qui oeuvrent », d'insérer le mot : « notamment ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Il s'agit de préciser que toutes les formes d'association
concourent à l'objectif de lutte contre les exclusions. Le texte transmis par
l'Assemblée nationale vise toutes les entreprises et, s'agissant des
associations, ne cite que celles qui interviennent dans le domaine de
l'insertion et de la lutte contre l'exclusion.
Cette rédaction nous a semblé restrictive, même s'il semble normal de réserver
une place particulière aux associations qui se consacrent plus particulièrement
à la lutte contre l'exclusion. Dès lors que les citoyens concourent à la lutte
contre les exclusions, on ne comprendrait pas pourquoi toutes les associations
ne devraient pas être également concernées par cette obligation. D'où cet
amendement, qui ne fait qu'une catégorie des associations qui sont spécialisées
dans la lutte contre l'exclusion.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 7, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, à la fin du dernier alinéa de l'article 1er, de remplacer
les mots : « à ces objectifs. » par les mots : « à la réalisation des objectifs
mentionnés au deuxième alinéa. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Il paraît plus juste de dire que les acteurs de l'économie et
les personnes privées concourent à la réalisation des objectifs de lutte contre
l'exclusion visés par le projet de loi. C'est un simple amendement
rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Cet amendement me semble
restrictif car il ne vise que la partie « accès aux droits » du projet de loi,
alors que la rédaction actuelle est plus générale. Aussi le Gouvernement
émet-il un avis défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 300, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de compléter
in fine
l'article 1er
par un alinéa ainsi rédigé :
« En ce qui concerne la lutte contre l'exclusion des Français établis hors de
France, les ministères compétents apportent leur concours au ministère des
affaires étrangères. »
La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Je tiens de nouveau à attirer votre attention sur le fait que la France a des
ressortissants hors de l'hexagone et que, malheureusement, le ministère en
charge des Français qui vivent à l'étranger dispose de fort peu de moyens.
C'est pourquoi il me paraissait opportun, dans le cadre de ce projet de loi, de
préciser qu'un certain nombre de ministères compétents peuvent apporter leur
concours au ministère des affaires étrangères. J'y reviendrai ultérieurement
mais je précise que, s'agissant de l'aide aux Français de l'étranger en
difficulté, le ministère des affaires étrangères dispose, en tout et pour tout,
de 90,7 millions de francs, soit le dixième du budget d'un département ayant la
même population.
Si j'ai voulu inscrire une telle disposition dans ce projet de loi, c'est
parce que les crises que nous avons connues au cours des dernières années ont
été difficilement traitées faute d'un fondement législatif et d'une
collaboration organisée entre ministères.
Je citerai un seul exemple, celui du rapatriement des Français d'Algérie dans
les années 1994-1995.
Que s'est-il passé ? Le Gouvernement a donné l'ordre aux Français d'Algérie de
quitter ce pays et de rentrer en France. Environ 15 000 personnes ont franchi
la Méditerranée au cours de ces deux années. Or, au cours des premiers mois,
rien, absolument rien, n'a été mis en oeuvre par les ministères compétents en
France pour venir en aide au ministère des affaires étrangères, qui n'avait pas
le premier franc pour organiser ce rapatriement.
Pendant toute cette période, les sénateurs représentant les Français établis
hors de France, le Conseil supérieur des Français de l'étranger, ont agi. La
direction des Français à l'étranger du ministère des affaires étrangères,
dirigée à l'époque par Mme Renouard, à qui je rends encore hommage, a fait
preuve d'acharnement et de dévouement. Mme Renouard a d'ailleurs été secondée
par le centre d'entraide aux Français rapatriés, qui, lui non plus, ne
disposait pas des crédits nécessaires pour faire face à cette charge soudaine
et nouvelle.
Pour que ces 15 000 Français démunis de tout, qui ne connaissaient pas ou plus
la France, soient accueillis dans les préfectures, pour qu'on leur attribue le
RMI, un logement, une allocation de réinsertion familiale, pour que leurs
enfants soient scolarisés, pour que les jeunes accèdent à des stages de
formation professionnelle, il a fallu attendre plus de six mois, pendant
lesquels ils n'avaient rien.
C'est pourquoi nous souhaitons qu'une telle structure d'acceuil et de
réinsertion, qui est régulièrement demandée par le Conseil supérieur des
Français de l'étranger, dans des voeux votés à l'unanimité, soit mise en place
et qu'elle puisse être activée dans les délais les plus brefs. Il s'agit d'une
structure dormante mais qui est prête. Si elle avait été en place l'an dernier,
pour accompagner les Français qui rentraient du Congo, cela se serait peut-être
un peu moins mal passé pour eux !
Je voudrais que vous compreniez pourquoi nous demandons que cela soit inscrit
dans la loi. En effet, lorsque nos compatriotes se présentent dans les
préfectures, dans les mairies, ils se font purement et simplement « jeter »
!
Vous n'avez pas de quittance de loyer, vous n'êtes pas résident ? Vous ne
pouvez pas inscrire votre enfant à l'école primaire ou au lycée ! C'est cela
que nous avons vécu tout au long de l'été dernier, après le retour de
Brazzaville !
Nous ne voulons pas que l'on puisse continuer, dans les administrations
françaises, à se laver tranquillement les mains du sort de Français démunis de
tout, au motif qu'ils viennent de loin.
Nous voudrions aussi que, d'une façon très officielle, les ministères
compétents puissent être facilement mobilisés lors d'actions qu'il faut mener à
l'étranger. Je pense au ministère de la défense lorsqu'il faut organiser
l'exfiltration de compatriotes piégés dans un conflit armé. Je pense aussi au
ministère de la santé, dans le cadre d'actions humanitaires lors d'épidémies ou
de cataclysmes naturels qui mettent en danger la vie de nos compatriotes.
Nous voulons que ces collaborations soient inscrites dans la loi, qu'elles
soient mieux organisées et qu'elles soient enfin réalisées non pas dans
l'urgence et à la hâte, mais préparées de longue date.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission considère que si la majorité est plurielle, les
ministres sont solidaires. Une telle disposition relève de l'article 37 de la
constitution, donc du pouvoir réglementaire.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
L'amendement prévoit que les
ministères compétents apportent leur concours au ministère des affaires
étrangères pour la lutte contre l'exclusion des Français établis hors de
France. C'est une évidence, et d'ailleurs, s'agissant de mon propre ministère,
l'Office des migrations internationales est bien évidemment sollicité à chaque
fois qu'il y a, par exemple, un problème de rapatriement. Quand mon ministère
est représenté, par exemple, par un conseiller social dans un pays, celui-ci
participe au comité consulaire pour l'emploi et la formation professionnelle
qui organise des formations à l'intention des ressortissants français pour
faciliter leur insertion dans le pays d'accueil.
Je suis très sensible, et Mme Cerisier-ben Guiga m'en a souvent parlé, aux
problèmes qui se posent lors du retour sur le territoire français d'un certain
nombre de Français résidant à l'étranger. Ils font partie de ces catégories qui
ont du mal à acquérir la carte de sécurité sociale, à obtenir un logement ou à
accéder à un certain nombre de droits sociaux tels que le RMI, auxquels ils
peuvent pourtant prétendre.
Aux termes de la loi relative à la couverture maladie universelle, ils seront
concernés dès qu'ils arriveront sur le territoire en ce qui concerne la
sécurité sociale. Cet amendement me paraît donc redondant.
En revanche, il me paraîtrait souhaitable de faire le point sur l'ensemble des
situations matérielles des Français à l'étranger. Je donnerai ultérieurement un
avis favorable à un amendement visant à insérer un article additionnel après
l'article 82, qui prévoit l'établissement d'un rapport permettant d'identifier
les situations de précarité et d'y apporter les solutions les plus
favorables.
Aussi, je vous demande, madame le sénateur, de bien vouloir retirer le présent
amendement.
M. le président.
Madame Cerisier-ben Guiga, l'amendement n° 300 est-il maintenu ?
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Je regrette de faire la mauvaise tête, mais il m'est difficile de retirer cet
amendement.
Ce texte de lutte contre les exclusions vise en effet à rendre effectifs des
droits qui figurent dans la Constitution mais qui ne sont pas appliqués. J'ai
tous les jours la preuve que des droits constitutionnels des Français résidant
à l'étranger ou venant de l'étranger ne sont pas réellement assurés, et ce tout
simplement parce que la préfecture, la mairie, l'assistante sociale ou l'agent
du guichet considèrent qu'ils n'entrent pas dans les cadres. Or, ces Français
n'entrent jamais dans les cadres, ils n'ont jamais le bon papier !
Il est très difficile pour des personnes n'ayant jamais vécu à l'étranger de
comprendre les difficultés que l'on peut éprouver quand, après avoir vécu hors
de France, on revient dans un pays qui vous est devenu étranger et où personne
ne s'occupe réellement de votre cas spécifique ! En France, on s'occupe de tous
les cas spécifiques, sauf de celui des Français établis hors de France !
Je vais finalement retirer cet amendement, pour faire un geste, monsieur le
président, mais, réellement, c'est à contrecoeur !
M. le président.
L'amendement n° 300 est retiré.
M. Jacques Habert.
Je le reprends !
(Sourires sur les travées socialistes.)
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° 300 rectifié.
La parole est à M. Habert, pour le défendre.
M. Jacques Habert.
Il y a là un réel problème et, une fois encore, je ne crois pas que le
Gouvernement en ait saisi l'ampleur, ni même que la commission l'ait
entièrement compris.
Imaginez les difficultés du millier de nos compatriotes qui, du jour au
lendemain, ont dû quitter Brazzaville, chassés de chez eux : notre armée est
allée les chercher dans les endroits les plus dangereux et, dans l'heure, on
leur a dit de partir. Ils sont arrivés en France les mains vides, ayant perdu
tous leurs biens, le produit de décennies de travail.
Il existe une cellule de crise au ministère des affaires étrangères, dont Mme
Cerisier-ben-Guiga a souligné tout le dévouement. Mais c'est bien souvent en
vain, ou avec les plus grandes difficultés, que cette cellule s'est adressée
aux autres ministères, aux diverses administrations, aux autorités locales,
souvent en province, où se trouvaient les rapatriés.
Depuis près d'un an, ceux-ci ont dû accomplir un véritable parcours du
combattant pour obtenir les aides auxquelles ils pouvaient légitimement
prétendre, le RMI par exemple.
Tout cela a pris beaucoup de temps. Ainsi, rien que pour inscrire les enfants
à l'école, alors que ces événements s'étaient déroulés au mois de juillet,
certaines personnes, à la rentrée de septembre, ne pouvant justifier de leur
domicile d'accueil, se sont encore vu refuser l'inscription de leurs enfants
dans l'établissement scolaire le plus proche.
En l'absence d'un organisme central permettant de rassembler les problèmes et
de mettre en contact les différents ministères, les administrations, les
préfectures, etc., tout s'est passé par coups de téléphone, par interventions
parlementaires ou autres... Il faudrait vraiment qu'une structure soit
installée pour examiner les cas qui se produisent et pour coordonner les
actions. C'est ce que permettrait l'adoption de l'amendement n° 300
rectifié.
Cet amendement vise à préciser que « les ministères compétents apportent leur
concours au ministère des affaires étrangères ». Cela est bien nécessaire, car
ce ministère ne dispose que de moyens très insuffisants pour apporter une aide
subtantielle à nos compatriotes réfugiés en France.
Nous avions déposé une proposition de loi pour des indemnisations. En
attendant, il faudrait au moins que la France offre l'accueil qui convient. Je
souhaite vivement que les dispositions précitées soient inscrites dans la loi.
En tout cas, tous les sénateurs représentant les Français de l'étranger sont
d'accord pour voter cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 300 rectifié.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
J'ai retiré mon amendement par souci de conciliation. Mais je le voterai
maintenant qu'il est repris !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 300 rectifié, repoussé par la commission et
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article additionnel après l'article 1er
M. le président.
Par amendement n° 441, MM. Darniche et Maman proposent, après l'article 1er,
d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Avant le 1er janvier 1999, le Gouvernement présentera au Parlement un projet
de loi en faveur des personnes handicapées. »
La parole est à M. Maman.
M. André Maman.
Un projet de loi relatif aux personnes handicapées, portant réforme de la loi
du 10 juillet 1987 en faveur des travailleurs handicapés, a été maintes fois
annoncé puis reporté.
La loi de 1987 prévoit que toute entreprise publique ou privée d'au moins
vingt salariés doit employer au moins 6 % de travailleurs handicapés, au terme
d'une période transitoire de quatre années - 1er janvier 1992 - en bénéficiant
d'aides à l'embauche. Or, selon les dernières enquêtes disponibles, si 93 % des
chefs d'entreprise employant des personnes handicapées sont satisfaits de ces
dernières, 42 % des chefs d'entreprise n'emploient toujours pas de personnes
handicapées. Rappelons que le taux des personnes handicapées dans les
entreprises oscille autour de 4 % depuis plusieurs années et que la fonction
publique de l'Etat n'a recensé que 3,20 % de travailleurs handicapés parmi ses
agents.
La réforme de la loi de 1987 est donc devenue urgente, d'autant plus que
l'insertion professionnelle des personnes handicapées n'est toujours pas
réalisée plus de dix ans après le vote de cette loi.
Cette situation ne peut changer qu'au prix d'un nouvel élan et du souci de
mettre concrètement en oeuvre l'insertion de ces personnes en milieu ordinaire,
et ce avec d'autant plus d'urgence que ces personnes se retrouvent en situation
d'exclusion du fait de l'aggravation de la sélectivité du marché du travail.
Le dispositif proposé par cet amendement s'inscrit dans ce projet de loi qui,
fort malheureusement, ne présente aucune mesure en faveur des personnes
handicapées, alors que celles-ci doivent pouvoir prétendre à un certain nombre
de droits visés par ce texte.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Après les déclarations de Mme la ministre concernant les
dispositions nouvelles en faveur des personnes handicapées, cet amendement, qui
revêt d'ailleurs la forme d'une injonction au Gouvernement, me paraît devoir
être retiré.
En tout état de cause, la commission a émis un avis défavorable sur ce
texte.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement émet un avis
défavorable, et ce pour les mêmes raisons que précédemment.
M. le président.
Monsieur Maman, l'amendement n° 441 est-il maintenu ?
M. André Maman.
Il me paraît difficile de le maintenir. J'ai entendu les commentaires de M. le
rapporteur et de Mme le ministre lors de la discussion de l'amendement de M.
Habert. Tout comme lui, je retire cet amendement n° 441.
M. le président.
L'amendement n° 441 est retiré.
Article 1er
bis
M. le président.
« Art. 1er
bis.
- Il est inséré, dans le code du travail, un article L.
353-3 ainsi rédigé :
«
Art. L. 353-3
. - Afin d'améliorer l'information des demandeurs
d'emploi et leur capacité à exercer leurs droits, l'Etat, les organismes
chargés du placement et de la formation des demandeurs d'emploi fixent les
règles de constitution de comités de liaison auprès de leurs échelons locaux
dans lesquels siègent des demandeurs d'emploi représentant les organisations
syndicales représentatives au plan national et les organisations ayant
spécifiquement pour objet la défense des intérêts des personnes privées
d'emploi. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements présentés par M. Seillier,
au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 8 vise, dans le texte présenté par cet article pour l'article
L. 353-3 du code du travail, après les mots : « auprès de leurs échelons », à
insérer les mots : « départementaux ou ».
L'amendement n° 9 tend, dans le texte proposé par cet article pour l'article
L. 353-3 du code du travail, après les mots : « la défense des intérêts », à
insérer les mots : « ou l'insertion ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre ces deux amendements.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
L'amendement n° 8 vise à apporter une modification au
dispositif proposé par le Gouvernement pour répondre à l'amendement de M. Le
Garrec relatif à la participation des associations de chômeurs à la gestion de
l'UNEDIC. La notion d'échelon local, retenue à l'Assemblée nationale, paraît
trop imprécise. Pour mémoire, l'ANPE comprend 840 agences locales pour l'emploi
et l'AFPA, l'Association nationale pour la formation professionnelle des
adultes, quant à elle, possède 207 sites de formation. Par conséquent, il
semble préférable d'ouvrir la possibilité d'un comité de liaison sur le plan
départemental qui pourrait être installé dans n'importe quelle antenne ou
direction déléguée de chacun des deux organismes.
C'est la raison pour laquelle la commission propose d'insérer le mot «
départementaux ».
L'amendement n° 9 a pour objet de prendre en compte non seulement les
organisations de défense des chômeurs mais également les organisations
travaillant au quotidien en faveur de l'insertion des demandeurs d'emploi dans
le cadre de la consultation organisée auprès de l'ANPE et de l'AFPA.
Cet amendement nous a d'ailleurs semblé conforme au souhait exprimé par Mme la
ministre en séance publique, à l'Assemblée nationale, de prendre en compte
toutes les associations travaillant sur le terrain en faveur des chômeurs.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 8 et 9 ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement n'est pas
favorable à l'amendement n° 8, et ce pour deux raisons.
Tout d'abord, il me paraît important que les usagers puissent être présents
auprès des échelons locaux, notamment les organismes de l'AFPA, mais aussi les
agences locales de l'ANPE, car c'est dans chaque agence que des difficultés
peuvent avoir lieu, et non pas aux échelons administratifs départementaux, qui
sont en fait des sièges départementaux ne donnant pas lieu à des prestations
directes aux demandeurs d'emploi.
Par ailleurs, l'AFPA est une association qui a un conseil et qui va, à partir
de la loi, prévoir des spécificités d'organisation de la représentation des
associations. Aussi, je ne souhaite pas qu'il soit fait référence à l'aspect
départemental. Je crois que l'échelon local couvre bien ce que nous souhaitons,
c'est-à-dire être au plus proche du terrain, là où se posent les
difficultés.
En revanche, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 9.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'article 1er
bis.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Notre souci étant de garantir aux personnes privées d'emploi et ou en
situation de précarité un véritable droit à la citoyenneté, nous voterons bien
évidemment cet article, qui crée des comités de liaison auprès des ANPE et de
l'AFPA.
Toutefois, nous regrettons que la formulation initiale qu'avait retenue la
commission spéciale de l'Assemblée nationale et qui visait l'ensemble des
organismes gérant les droits des chômeurs, notamment l'UNEDIC et l'ASSEDIC,
n'ait pu être adoptée. La représentation des associations de chômeurs au sein
de tels organismes était clairement établie, ce qui n'était pas sans poser de
problème, eu égard aux règles du paritarisme. Mais cette mention avait au moins
le mérite de poser la question de la reconnaissance et de la prise en
considération des revendications et des aspirations des chômeurs en des lieux
où l'on décide de leurs droits.
Il n'est plus acceptable en effet que l'UNEDIC décide seule de « chambouler »
la structure des fonds sociaux sans concertation préalable avec les principaux
bénéficiaires, situation dont on a vu les résultats. Il est temps de renouer
avec l'information, la coordination, la consultation, bref, avec la
concertation préalable. Un conseil consultatif placé à côté des conseils
d'administration remplirait cette mission en permettant l'expression des
chômeurs.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je souhaite réagir sur l'amendement n° 9 qui vient d'être adopté.
Je suis inquiet de constater que la rédaction adoptée par l'Assemblée
nationale en ce qui concerne les organisations ayant spécifiquement pour objet
la défense des intérêts des personnes privées d'emploi a été maintenue et que
seuls les mots : « ou l'insertion » ont été ajoutés sur la proposition de M. le
rapporteur.
C'est très bien, mais ce n'est pas suffisant ! En effet, la situation
suivante va se produire : des organisations regroupant deux ou trois personnes
dans le département, sur le plan local et sur le plan départemental, pourront
demander à être présentes dans ces comités locaux. Nous risquerons alors d'être
confrontés à une avalanche de demandes, et la situation deviendra ingérable.
Je regrette donc que l'on n'ait pas contenu ce mode de représentation,
contrairement à ce qui a été fait à un autre endroit du texte en ne visant que
les demandeurs d'emploi représentant les organisations syndicales
représentatives au plan national.
En effet, x associations fleuriront et pourront toutes prétendre, par
l'application stricte du texte, à être présentes dans ces comités locaux. Je
souhaite bien du courage à ceux qui auront à animer et à gérer ces derniers
!
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er
bis,
modifié.
(L'article 1er
bis
est adopté.)
TITRE Ier
DE L'ACCÈS AUX DROITS
Chapitre Ier
Accès à l'emploi
Article 2 A
M. le président.
« Art. 2 A. - Au début du dernier alinéa de l'article L. 321-4 du code du
travail, après les mots : "représentants du personnel", sont insérés les mots :
"et l'autorité administrative". »
Par amendement n° 10, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet article, introduit à l'Assemblée nationale, soulève un
problème de forme et un problème de fond.
Il vise à modifier, de manière assez limitée il est vrai, la procédure de
licenciement économique qui concerne tous les salariés et comprend plus d'une
vingtaine d'articles, lesquels sont certainement susceptibles d'améliorations
diverses du point de vue de la majorité à l'Assemblée nationale.
Pour autant, cet article ne semble pas directement de nature à apporter une
réponse aux problèmes auxquels se heurtent les personnes les plus démunies de
la société.
Il a été prévu que, informé de l'exécution des plans sociaux, le directeur du
travail pourrait en tirer les conséquences et suspendre dans certains cas le
versement des aides de l'Etat à l'appui du plan.
Il serait utile de préciser dans la loi sur quels critères l'aide peut être
suspendue car, si la mauvaise exécution d'un plan peut, certes, venir de la
mauvaise volonté de l'entreprise, elle peut aussi découler de circonstances
économiques difficiles ou encore de la difficulté pour une PME d'assurer la
reconversion de ses salariés.
Il convient donc de mieux mesurer les sanctions éventuellement attachées à la
mise en oeuvre de cet article.
C'est pourquoi la commission vous propose, mes chers collègues, de supprimer
ce dernier.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
L'amendement adopté lors de
l'examen du texte à l'Assemblée nationale complète, me semble-t-il, très
utilement notre législation sur le licenciement économique. En effet, dans les
plans sociaux, figurent, dans la quasi-totalité des cas, des mesures du fonds
national de l'emploi que l'entreprise met en oeuvre dans le plan social et qui
constituent l'aspect essentiel non seulement de l'intervention des directeurs
du travail sur le terrain, mais aussi de l'intervention financière de
l'Etat.
Cependant, les conditions dans lesquelles ces mesures sont exécutées
constituent un paramètre fondamental pour leur efficacité, et donc pour la
prévention de l'exclusion, comme l'a d'ailleurs rappelé la Cour des comptes
dans un récent rapport.
Aussi, cette disposition, qui donne des moyens importants à l'administration
pour suivre les conditions d'exécution des plans sociaux, et donc l'efficacité
des fonds publics, nous apparaît tout à fait positive et je propose de la
maintenir.
Je suis donc opposée à l'amendement n° 10.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
madame la ministre, il n'échappera à personne que nous sommes ici très loin de
la lutte contre l'exclusion : nous sommes en train de rétablir l'autorisation
administrative de licenciement,...
M. Jacques Machet.
Tout à fait !
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
... et je demande que
chacun prenne conscience du vote qu'il va émettre !
En ce qui me concerne, je soutiens complètement la position qu'a défendue
notre rapporteur.
(Très bien ! sur les travées des Républicains et
Indépendants et du RPR.)
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le président, je ne
peux pas laisser dire cela. Peut-être un jour rétablira-t-on l'autorisation
administrative de licenciement, mais nous n'en sommes pas là !
Il s'agit, dans ce texte - et je crois que le président Fourcade ne peut qu'y
être attentif - de mesurer, lorsqu'une entreprise s'engage et reçoit des fonds
publics, l'efficacité des engagements qu'elle a pris et la bonne utilisation
des fonds publics qu'elle a reçus.
M. Guy Fischer.
Voilà !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Il ne s'agit donc pas d'une
mesure d'autorisation de licenciement
a priori,
mais d'une mesure de
contrôle
a posteriori
d'un plan social sur lequel l'entreprise s'est
engagée et pour la réalisation duquel elle a obtenu des fonds publics.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Cela n'a rien à faire
dans ce texte !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 10.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Alors que tout le monde s'accorde à dire qu'il convient, en matière de lutte
contre les exclusions, de privilégier une démarche de prévention, la commission
des affaires sociales nous propose de supprimer la seule disposition du projet
de loi qui vise les licenciements économiques, en prévoyant, outre
l'information du comité d'entreprise, une obligation d'information de
l'autorité administrative compétente.
Cet article, adopté par l'Assemblée nationale sur l'initiative des
parlementaires communistes,...
M. Alain Vasselle.
Cela explique tout !
M. Guy Fischer.
... est essentiel car il permet un contrôle de l'administration sur les
engagements pris par l'employeur à l'occasion du plan social. On ne peut pas
donner à guichet ouvert sans contrepartie ! Et, si vous voulez toujours plus,
il faut le dire !
Véritable machine à exclure, les licenciements économiques contribuent
largement à marginaliser, à faire basculer dans la pauvreté et la précarité
tous les salariés qui en sont victimes.
Le Gouvernement entend mener une véritable bataille pour que le droit à
l'emploi pour tous ne soit pas un vain principe.
Parallèlement, il convient d'enrayer toutes les situations qui portent
atteinte à ce droit. En ce sens, des mesures doivent être prises pour prévenir
et contrôler les licenciements économiques, d'autant plus mal vécus que les
entreprises affichent une insolente santé financière : la Bourse, le CAC 40 ont
connu une augmentation de 40 % depuis le 1er janvier.
(Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux.
Il faudra rembourser lorsqu'il y aura une baisse !
M. Guy Fischer.
Ce n'est pas à l'Etat de supporter la charge financière des restructurations
nécessaires des grands groupes.
Sur ce point, madame la ministre, nous partageons l'idée qu'une réforme des
procédures de licenciement économique s'impose, qu'il convient de sécuriser les
plans sociaux et de donner plus de droits aux salariés.
Nous avons, en ce sens, déposé deux propositions de loi. Dans l'attente de la
présentation d'un texte, madame la ministre, nous nous attacherons à défendre
toute disposition complétant positivement la législation existante.
Par conséquent, nous voterons contre l'amendement de la commission des
affaires sociales.
M. Hilaire Flandre.
Grâce à M. Fischer, nous voterons pour !
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
J'avoue que j'ai du mal à comprendre comment, à partir du texte du
Gouvernement amendé par l'Assemblée nationale, on peut être amené à engager un
débat sur l'autorisation administrative de licenciement !
M. Alain Vasselle.
Ecoutez M. Fischer : il a tout compris !
Mme Joëlle Dusseau.
L'Assemblée nationale a proposé d'insérer, au début du dernier alinéa de
l'article L. 321-4 du code du travail, après les mots : « représentants du
personnel », les mots « et l'autorité administrative ». Cet alinéa se lit donc
ainsi : « Les représentants du personnel et l'autorité administrative sont
informés de l'exécution du plan social... »
Lorsqu'il y a eu aide de l'Etat et plan social dans la foulée, l'autorité
administrative, qui a apporté l'argent, doit pouvoir être informée de ce plan
social ! Considérer, comme M. Fourcade, que c'est un retour vers le
rétablissement de l'autorisation administrative de licenciement me paraît
contraire au dispositif qui nous est proposé.
C'est pourquoi je suis hostile à l'amendement n° 10.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2 A est supprimé.
Article 2 B
M. le président.
« Art. 2 B. - Tout chômeur âgé de seize à vingt-cinq ans ou tout chômeur de
longue durée ou rencontrant des difficultés d'insertion professionnelle a le
droit à un accueil, un bilan de compétences et une action d'orientation
professionnelle afin de bénéficier d'un nouveau départ sous forme d'une
formation, d'un appui individualisé ou d'un parcours vers l'emploi ou la
création ou la reprise d'entreprise. »
- (Adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - I. - L'Etat prend l'initiative d'actions d'accompagnement
personnalisé et renforcé ayant pour objet l'accès à l'emploi de jeunes de seize
à vingt-cinq ans en difficulté et confrontés à un risque d'exclusion
professionnelle par l'articulation des actions relevant de la politique définie
à l'article L. 322-1 et de celles mentionnées à l'article L. 900-1 du code du
travail ainsi que, si nécessaire, de toute autre action, notamment culturelle
ou sportive. Les régions et la collectivité territoriale de Corse s'associent à
ces actions dans le cadre des compétences qu'elles exercent en application du
II de l'article 82 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la
répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et
l'Etat. Une convention cadre, conclue entre l'Etat et la région ou la
collectivité territoriale de Corse, précise les conditions de leur intervention
conjointe qui vise à la lutte contre l'illettrisme, à l'acquisition rapide
d'une expérience professionnelle, à l'orientation et à la qualification.
« L'accompagnement personnalisé institué par le précédent alinéa vise à
assurer la cohérence et la continuité des actions s'inscrivant dans le projet
d'insertion sociale et professionnel proposé au jeune.
« II. - Pour l'application du I du présent article, l'Etat, en concertation
avec les régions, conclut avec les missions locales mentionnées à l'article 7
de la loi n° 89-905 du 19 décembre 1989 favorisant le retour à l'emploi et la
lutte contre l'exclusion professionnelle et les permanences d'accueil,
d'information et d'orientation visées à l'article 4 de l'ordonnance n° 82-273
du 26 mars 1982 relative aux mesures destinées à assurer aux jeunes de seize à
dix-huit ans une qualification professionnelle et à faciliter leur insertion
sociale ainsi qu'avec l'Agence nationale pour l'emploi des conventions fixant
les objectifs des actions d'accompagnement personnalisé, leur durée maximale,
qui ne peut excéder dix-huit mois, ainsi que la nature et l'importance des
moyens dégagés par l'Etat pour leur mise en oeuvre.
« Des conventions de même portée peuvent également être conclues avec des
organismes prévus au premier alinéa de l'article L. 982-2 du code du
travail.
« II
bis.
- Les jeunes qui rencontrent des difficultés matérielles
pendant les périodes durant lesquelles ils ne bénéficient pas d'une
rémunération au titre d'un stage, d'un contrat de travail ou d'une autre mesure
dans le cadre des actions d'accompagnement personnalisé organisées en
application du présent article bénéficient de l'accès aux fonds départementaux
ou locaux d'aide aux jeunes prévus par les articles 43-2 et 43-3 de la loi n°
88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion.
« III. - Les jeunes bénéficiaires des actions d'accompagnement sont affiliés
au régime général de la sécurité sociale dans les conditions prévues aux
articles L. 962-1 et L. 962-3 du code du travail, pour les périodes pendant
lesquelles ils ne sont pas affiliés à un autre titre à un régime de sécurité
sociale.
« IV. - Un bilan des actions engagées dans chaque région et dans la
collectivité territoriale de Corse au titre du présent article est réalisé
chaque année par l'Etat et la collectivité concernée. »
Sur l'article, la parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Le programme TRACE, le nouveau dispositif proposé par l'article 2, prévoit un
accompagnement personnalisé des jeunes de seize à vingt-cinq ans les plus
éloignés de l'emploi par la formation et l'insertion. Il présente l'intérêt
d'offrir au public visé de nouvelles perspectives pour leur quête d'accès à
l'emploi.
Vous connaissez tous le dispositif dans le détail, le décrire serait
inutile.
Je centrerai mon propos sur les points que je considère encore comme faibles
dans ce trajet d'accès à l'emploi et sur le nécessaire renforcement du service
public de l'emploi, seul garant de réussite.
Mon premier grief porte sur le quota : 60 000 jeunes seraient concernés à
terme. Je doute que cela soit suffisant ;
a priori,
de nombreux jeunes
seront exclus de ce programme, à notre avis.
Mon second souci a trait à la durée de l'accompagnement, qui serait de
dix-huit mois. Il convient dès à présent de se soucier du devenir des jeunes à
la sortie du dispositif.
Si les jeunes concernés, à l'issue de cette période, ne trouvaient pas
d'emploi, ou bien s'ils étaient encore dans l'incapacité de s'insérer
directement dans l'emploi, que deviendraient-ils ?
Je déplore qu'ils courent, une fois de plus, le risque d'un retour à la
précarité. Pour eux, cette situation serait d'autant plus insupportable qu'elle
ferait suite à un processus d'insertion.
C'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen a déposé un
amendement fixant comme terme au parcours d'insertion la réalisation de son
objectif.
Toujours dans le même souci de sécuriser les jeunes, de les aider à se
reconstruire, à s'assumer, une véritable garantie de ressources pour les jeunes
inclus dans le programme nous paraît nécessaire.
Pourquoi ne pas envisager une allocation garantissant des ressources minimales
aux jeunes qui font cet effort d'insertion ? Ce point fait l'objet lui aussi
d'un amendement déposé par notre groupe.
C'est une revendication forte non seulement de ma formation politique, mais
aussi de nombreuses associations. Même si le mot choisi pour définir cette
allocation diffère, nous sommes nombreux à nous accorder sur son principe.
Les députés ont jugé bon d'amender cet article, afin de le rendre plus
cohérent, plus performant. Dans ce sens, l'amendement précisant que les jeunes
les plus en difficulté pourront, durant les périodes où ils ne seront ni en
formation ni en situation d'emploi, bénéficier d'aides du Fonds d'aide aux
jeunes répond en partie à nos inquiétudes concernant la permanence de leur
situation.
Toutefois, cette réponse est partielle car, même si le FAJ est abondé à la
hauteur annoncée par le Gouvernement, il ne sera pas en mesure d'allouer une
rémunération minimale et il ne pourra que distribuer avec parcimonie des aides
ponctuelles.
C'est pourquoi nous souhaitons, madame la ministre, que le Gouvernement aille
plus loin.
Cela explique aussi pourquoi, tout à l'heure, nous voterons contre
l'amendement de la commission des affaires sociales qui entend supprimer toute
référence législative relative au recours au FAJ.
Le groupe communiste républicain et citoyen désire ardemment que le programme
TRACE soit un succès. Cela nécessite, à notre sens, que des moyens importants
soient donnés au service public de l'emploi, que très clairement les missions
de l'ANPE soient redéfinies et que le partenariat souhaitable se fasse selon
des règles précises : 3 000 emplois nouveaux ne sont-ils pas en jeu ?
Dans son rapport de février 1998, Mme Joint-Lambert met sur le compte, entre
autres, « de la limitation des effectifs » de l'ANPE le peu de réussite du
contrat de progrès Etat-ANPE.
Si l'on veut vraiment que chaque jeune, tout au long de son parcours
d'insertion, soit suivi par l'ANPE et que, plus généralement, tous les
demandeurs d'emploi soient l'objet d'un meilleur traitement, les ANPE devront
être dotées d'effectifs supplémentaires. En effet, leur philosophie, au cours
de ces dernières années, a évolué et, si elles doivent véritablement participer
à un certain traitement social, il nous paraît indispensable de conforter leurs
effectifs d'au moins 3 000 personnes.
M. le président.
Par amendement n° 11, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, à la fin de la première phrase du premier alinéa du I de
l'article 2, après les mots : « du code du travail », de supprimer les mots : «
ainsi que, si nécessaire, de toute autre action, notamment culturelle ou
sportive ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement est le premier d'une série de trois
amendements qui visent à réorganiser les dispositions introduites par
l'Assemblée nationale concernant le contenu des actions du programme TRACE pour
les jeunes de seize à vingt-cinq ans.
L'amendement n° 11 tend à supprimer une disposition qui sera réintroduite
dans un texte d'ensemble, à la fin du premier alinéa de l'article 2.
Cette explication vaut, monsieur le président, pour les amendements n°s 12 et
13.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est favorable à
cet amendement de coordination avec les amendements n°s 12 et 13.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 277, Mme Dusseau propose, après la première phrase du
premier alinéa du paragraphe I de l'article 2, d'insérer une phrase ainsi
rédigée : « Ces actions d'accompagnement personnalisé sont de droit pour les
jeunes n'ayant obtenu aucun diplôme de l'enseignement général, professionnel ou
technologique. »
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Cet amendement vise à centrer prioritairement, voire uniquement, le dispositif
TRACE sur les jeunes n'ayant obtenu aucun diplôme de l'enseignement général,
professionnel ou technologique.
Un certain nombre de dispositifs, dans les dix années passées, ont été, en
fait, détournés de leur but. Mis en place pour les personnes les plus en
difficulté, ils ont été utilisés par des individus qui, certes, avaient des
problèmes d'emploi, mais qui possédaient une qualification et qui auraient dû
normalement se trouver, sans passer par ces dispositifs, détenteurs d'un
emploi.
C'est le cas des CES, qui ont été largement détournés par une partie de leurs
utilisateurs, ainsi que de nombre de dispositifs d'aide à l'embauche qui
auraient dû profiter à des gens en plus grande difficulté mais qui ont, en
fait, été utilisé en faveur de personnes qui auraient été embauchées de toute
façon.
Cela a aussi été le cas du dispositif PAQUE, le programme d'accès à la
qualification et à l'emploi, mesure lourde et coûteuse qui était en théorie
tournée vers les jeunes les plus en difficulté alors que, dans certaines
régions, ces derniers n'ont représenté qu'un tiers, voire un quart, du public
qui a effectivement utilisé ce dispositif.
Voilà pourquoi je propose que le dispositif TRACE, qui - M. Fischer l'a
rappelé - concernera 60 000 personnes dans les années à venir, soit très peu de
monde par rapport au nombre de jeunes en difficulté, soit exclusivement réservé
à ceux qui sont vraiment le plus en difficulté, c'est-à-dire ceux qui ne
possèdent ni diplôme ni qualification.
Sinon, ce dispositif sera, en réalité, détourné de son objectif et nous aurons
laissé de côté ceux qui, aujourd'hui, ont le plus besoin que l'on s'occupe
d'eux.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
L'intention est louable, mais l'article 2 semble déjà
suffisamment précis puisqu'il vise « les jeunes de seize à vingt-cinq ans en
difficulté et confrontés à un risque d'exclusion professionnelle ».
Par ailleurs, la rédaction de cet amendement laisse à penser qu'
a contrario
les jeunes titulaires d'un diplôme n'auraient pas droit au programme
TRACE.
Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Même si je comprends fort bien
le souci de Mme Dusseau, je partage l'avis de la commission.
En effet, même si, bien évidemment, le programme TRACE sera d'abord orienté
vers des jeunes de niveau VI et V
bis
qui n'ont pas de diplôme, il nous
semble important qu'un certain nombre d'autres jeunes, notamment ceux qui,
vivant dans des quartiers difficiles, ont pu, après une longue période de
chômage, vivre des exclusions lourdes, puissent bénéficier de ce programme.
Je suis donc défavorable à l'amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 277.
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Mme la ministre a dit fort justement qu'il y a beaucoup de jeunes en
difficulté. C'est bien parce que tel est le cas que ce dispositif, qui concerne
très peu de monde, qui est lourd et long - dix-huit mois - doit par priorité,
voire exclusivement, viser ceux qui sont les plus en difficulté. Sinon, nous
commettrons une erreur, d'autant que les autres jeunes ont déjà des atouts et
d'autres dispositifs à leur disposition.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 277, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 12, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, à la fin de la troisième phrase du premier alinéa du I de
l'article 2, après les mots : « leur intervention conjointe », de supprimer les
mots : « qui vise à la lutte contre l'illettrisme, à l'acquisition rapide d'une
expérience professionnelle, à l'orientation et à la qualification ».
M. le rapporteur a déjà présenté cet amendement, sur lequel le Gouvernement a
donné son avis.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 13, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après le premier alinéa du paragraphe I de
l'article 2, un alinéa ainsi rédigé :
« Les actions d'accompagnement personnalisé et renforcé visent à la lutte
contre l'illettrisme, à l'acquisition accélérée d'une expérience
professionnelle, à l'orientation et à la qualification, et sont assorties, si
nécessaire, de toute autre action, notamment culturelle ou sportive. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 324 rectifié
bis
,
présenté par MM. Ostermann, Vasselle, Grignon, Doublet, Eckenspieller, Vinçon
et Gournac, et tendant, à la fin du texte proposé par l'amendement n° 13, à
remplacer les mots : « culturelle ou sportive » par les mots : « culturelle,
sportive ou d'insertion par l'habitat ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 13.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement tend à réinsérer dans le texte ce qui a été
supprimé à différents endroits par les amendements n°s 11 et 12.
Il reprend en un seul alinéa les objectifs des actions d'accompagnement
personnalisé et renforcé introduites sur l'initiative de M. Jacques Barrot en
première lecture à l'Assemblée nationale.
Il prévoit, en outre que, si nécessaire, ces actions peuvent être assorties
d'activités culturelles ou sportives, conformément à un autre amendement adopté
par l'Assemblée nationale.
Il s'agit, en fait, d'éviter que les programmes TRACE ne puissent donner lieu
qu'à des activités récréatives.
M. le président.
La parole est à M. Ostermann, pour présenter le sous-amendement n° 324
rectifié
bis
.
M. Joseph Ostermann.
C'est un sous-amendement de précision, qui vise à prendre en compte dans sa
globalité le projet d'insertion des jeunes bénéficiaires des actions
d'accompagnement personnalisé, notamment leur démarche d'accès à un logement
autonome.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 324 rectifié
bis
?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 13 et sur le
sous-amendement n° 324 rectifié
bis
?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est favorable à
l'amendement n° 13, sous réserve que les termes « visent à », qui figurent déjà
dans l'alinéa précédent, soient remplacés par les mots : « comprennent
notamment des mesures concernant... » Nous aurons ainsi défini l'objectif dans
l'alinéa précédent et le contenu des actions d'accompagnement dans celui-ci.
En revanche, je ne suis pas favorable au sous-amendement n° 324 rectifié
bis.
Le programme TRACE est un programme d'insertion et de qualification pour
l'emploi. Or, si l'on peut concevoir une remobilisation autour d'une activité
culturelle et sportive, on ne peut que constater que l'insertion par l'habitat
ne vise pas à une formation ou à une qualification, même si, par définition, un
certain nombre de jeunes ont besoin aussi de trouver un logement ; ce n'est pas
dans la logique du programme TRACE.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 324 rectifié
bis
, accepté par la
commission et repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Monsieur le rapporteur, accédez-vous au souhait qu'a exprimé Mme la ministre,
s'agissant de l'amendement de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Tout à fait, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Seillier,
au nom de la commission des affaires sociales, et tendant, après le premier
alinéa du paragraphe I de l'article 2, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les actions d'accompagnement personnalisé et renforcé comprennent notamment
des mesures concernant la lutte contre l'illettrisme, l'acquisition accélérée
d'une expérience professionnelle, l'orientation et la qualification, et sont
assorties, si nécessaire, de toute autre action, notamment culturelle ou
sportive. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 13 rectifié, accepté par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 301, Mmes Derycke, Dieulangard, Printz, MM. Huguet,
Vezinhet, Autain et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de
compléter
in fine
le second alinéa du paragraphe I de l'article 2 par
une phrase ainsi rédigée : « Il vise également à assurer l'égalité d'accès des
jeunes gens et jeunes filles à ces actions et la mixité des emplois. »
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Cet amendement tend à résoudre un certain nombre de problèmes qui ont déjà été
soulevés hier et aujourd'hui même.
L'expérience montre que les mentalités n'évoluent pas toujours aussi vite
qu'on pourrait le croire. L'insertion professionnelle des jeunes gens continue,
en effet, à être considérée comme plus importante que celle des jeunes filles,
dont on imagine toujours qu'elles finiront par vivre en couple et trouver un
travail à temps partiel qui fournira un salaire d'appoint.
Cette vision est celle d'un autre temps, car la réalité est tout autre. Je
rappelle que 60 % des allocataires des minima sociaux sont des femmes et que,
parmi elles, nombreuses sont celles qui perçoivent l'allocation de parent
isolé, l'API. C'est en effet une réalité biologique que les femmes font les
enfants, mais c'est une réalité sociale que ce sont elles qui, souvent, ont
seules la responsabilité de les élever en cas de séparation ou d'abandon.
Les femmes ont donc tout autant besoin que les hommes - les choses étant ce
qu'elles sont, on pourrait même dire davantage besoin - d'une formation
professionnelle de qualité et d'un métier.
De plus, nous constatons sur le terrain qu'à l'intérieur de cette population
de jeunes en difficulté les responsables ont tendance - sans intention
malveillante d'ailleur ! - à privilégier les garçons dans l'accès aux
dispositifs d'insertion. Pourquoi ? Parce que ceux-ci expriment souvent avec
violence, hélas ! contre les autres ou contre les équipements publics par
exemple, les sentiments de rejet dont ils sont victimes. Cette violence est
faite pour être entendue, et l'on s'efforce donc de la juguler.
Les filles ont une manière différente de s'exprimer, je l'ai dit hier. Elles
s'intériorisent davantage, elles deviennent invisibles et, souvent, c'est
silencieusement, dans la dépression, la drogue, voire la prostitution, qu'elles
cachent leur mal-vivre.
Il est donc indispensable de préciser cet objectif de mixité.
Nous avons repris pour cet amendement, je le précise, le texte même de la
circulaire relative aux emplois-jeunes, circulaire faite par Mme la ministre, à
qui nous demandons de bien vouloir prendre, devant le Sénat, le même engagement
dans les mêmes termes pour le programme TRACE.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je comprends la logique de cet amendement, mais, si l'on
souhaite mettre en avant l'exigence de parité hommes-femmes, il faudra le faire
quasiment à chaque article de ce projet de loi.
Par ailleurs, Mme Derycke a cité la circulaire concernant les emplois-jeunes.
Cela relève effectivement du domaine de la circulaire, et il serait en effet
utile que les circulaires d'application du programme TRACE rappellent que les
jeunes femmes ne doivent pas être oubliées.
L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis très sensible au souci,
exprimé au travers de cet amendement, d'offrir un égal accès au dispositif
TRACE comme à l'ensemble des actions et mesures autour desquelles ce dispositif
s'articule afin d'assurer une réelle mixité des emplois.
Autant en ce qui concerne les emplois-jeunes, puisqu'il s'agissait de jeunes
en capacité de travailler, nous n'avions pas souhaité inscrire cette égalité
dans la loi, autant cela paraît souhaitable pour le programme TRACE,
précisément parce que le nombre de jeunes filles en grande difficulté est
important, parce que, spontanément, ce n'est pas elles que l'on va chercher en
premier et parce qu'elles ont peut-être moins de facilités à se rendre dans les
missions locales ou autres.
C'est parce ce qu'il me paraît important d'affirmer cette égalité d'accès que
je suis favorable à l'amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 301.
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
On le sait, les femmes sont tout à la fois davantage diplômées, davantage au
chômage, moins payées globalement et moins payées à qualification égale.
Malgré les actions volontaristes qui ont été lancées depuis la première
création d'un secrétariat d'Etat à la condition féminine, puis d'un ministère
aux droits des femmes, en 1981, bien des problèmes spécifiques n'ont pas été
résolus.
Il y a donc une dimension spécifiquement féminine de l'exclusion. Il convient
de le rappeler, non pas à tous les articles, monsieur Seillier - quoique, si
vous me faites des propositions en ce sens, je vous suivrai avec plaisir - mais
en tout cas à plusieurs reprises dans le projet, et de prendre des mesures
spécifiques pour y remédier.
Je voterai, bien sûr, cet amendement.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Tout à l'heure, j'ai fait valoir que cette disposition
relevait du domaine de la circulaire. Mme la ministre considérant que c'est du
domaine de la loi, je ne veux pas être plus royaliste que le roi. Je me rallie
donc à son avis favorable sur cet amendement.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je vous remercie.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 301, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 303, Mmes Derycke, Dieulangard, Printz, MM. Huguet,
Vezinhet, Autain et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent,
après les mots : « des actions d'accompagnement personnalisé, », de rédiger
ainsi la fin du premier alinéa du paragraphe II de l'article 2 : « leur durée
fixée à dix-huit mois, qui peut être prolongée par dérogation de six mois
lorsque la réalisation des objectifs l'exige, ainsi que dans le cas où l'action
d'accompagnement personnalisé a été interrompue d'un commun accord pour
permettre au jeune d'accomplir un contrat de travail de courte durée. Les
conventions fixent également la nature et l'importance des moyens dégagés par
l'Etat pour leur mise en oeuvre. »
Par amendement n° 336, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans le premier alinéa du II de
l'article 2, de remplacer les mots : « leur durée maximale, qui ne peut excéder
dix-huit mois » par les mots : « leur durée moyenne, de l'ordre de dix-huit
mois, qui doit pouvoir être allongée si la réalisation des objectifs fixés
l'exige ».
Par amendement n° 278, Mme Dusseau propose, dans le premier alinéa du
paragraphe II de l'article 2, après les mots : « dix-huit mois », d'insérer les
mots : « sauf dérogation expresse accordée par le préfet, ».
La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 303.
Mme Dinah Derycke.
Cet amendement traduit notre sentiment, conforté par les rencontres que nous
avons avec les partenaires locaux et par le travail que chacun de nous effectue
sur le terrain, que la durée de dix-huit mois, si elle peut, dans bien des cas,
être suffisante, peut aussi parfois se révéler trop courte.
Je pense au jeune qui aura interrompu son parcours pour accomplir un travail
de courte durée, par exemple pour faire les vendanges, ce qui est à la fois
formateur, intéressant et rémunérateur. On ne va tout de même pas priver le
jeune de cette opportunité sous prétexte qu'il est dans un programme TRACE !
Je pense aussi au jeune pour lequel la rupture n'aura pas été voulue, qui,
pour une raison tenant tout simplement à la vie, une déprime, par exemple,
interrompt son parcours un mois ou deux avant de le reprendre parce qu'il se
rend compte que, fort heureusement, on va l'aider.
Voilà pourquoi il nous paraît nécessaire, par dérogation, d'allonger de six
mois - au maximum - la durée du dispositif pour les jeunes les plus en
difficulté.
M. le président.
La parole estt à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 336.
Mme Nicole Borvo.
Cet amendement concerne spécifiquement la durée des actions d'accompagnement
personnalisé.
Madame la ministre, nous partageons, comme nous l'avons dit, vos intentions
concernant le dispositif TRACE, qui s'adresse aux jeunes sans qualification et
n'ayant, de plus, aucune approche de la vie collective ou en tout cas du monde
du travail. Individualiser leur suivi, les faire accéder aux connaissances de
base, les remotiver : tout cela fait partie intégrante du processus
d'intégration.
Evidemment, l'objectif est d'aboutir, et le plus vite possible, à l'emploi, et
je conviens tout à fait que, pour optimiser les chances de réussite d'un tel
programme, un délai trop long pourrait être pénalisant, car il ne
correspondrait pas à cet objectif que nous partageons complètement,
l'emploi.
Mais, en même temps, lâcher trop tôt, parce que les dix-huit mois sont
écoulés, un jeune qui n'est pas en mesure de s'insérer dans l'emploi classique
ou dans d'autres dispositifs d'insertion ou de formation risque, je crois, de
le priver de tout espoir de réussite personnelle.
Par conséquent, ce que nous voulons, c'est introduire un peu de souplesse dans
le dispositif, pour permettre aux jeunes accueillis dans le programme TRACE
d'accéder réellement à l'emploi, et nous proposons, non pas de fixer la durée
maximale à dix-huit mois, tel un couperet, mais de moduler celle-ci en fonction
des besoins personnels des jeunes en grande difficulté.
Je vous accorde que la formulation de cet amendement n'est peut-être pas
parfaite, mais il me semble que le critère déterminant de la durée de
l'accompagnement doit être la réalisation de l'objectif du programme, à savoir
l'emploi.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau, pour défendre l'amendement n° 278.
Mme Joëlle Dusseau.
Mon approche est différente de celle de mes collègues. Il me semble en effet
que, pour les jeunes en difficulté ou en apprentissage comme pour les
formateurs, la règle, l'objectif, le butoir, participe de la démarche
pédagogique. En effet, se lancer dans cette aventure en pensant qu'elle pourra
durer dix-huit mois, deux ans, voire plus, est psychologiquement tout à fait
différent que de s'y lancer en sachant qu'elle durera dix-huit mois.
Cela dit, il s'agit de jeunes en grande difficulté et, pour certains, le délai
de dix-huit mois ne sera peut-être pas suffisant. En conséquence, je propose de
maintenir le délai limite de dix-huit mois, mais en prévoyant d'éventuels
dépassements soumis à l'autorisation expresse du préfet.
Je ne comprends pas très bien pourquoi Mme Derycke considère une expérience
professionnelle de trois semaines ou d'un mois comme une rupture de la période
d'accompagnement de dix-huit mois. Il me semble, au contraire, que d'alterner
une remise à niveau et un stage, une expérience professionnelle courte et un
nouveau stage, cela fait partie de ce programme de réinsertion.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 303, 336 et 278 ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission est défavorable à l'amendement n° 303, parce
que la dérogation lui semble être systématique, et à l'amendement n° 336, parce
qu'il est difficile à mettre en oeuvre. En effet, il s'agit d'une moyenne, or
une moyenne ne pouvant être calculée qu'
a posteriori,
il est difficile
d'établir une programmation
a priori
.
La commission est néanmoins sensible au souci d'adapter le dispositif aux cas
particuliers, et c'est pourquoi elle émet un avis favorable sur l'amendement n°
278 de Mme Dusseau.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
J'apporterai deux
précisions.
Tout d'abord, si nous avons fixé cette durée à dix-huit mois - nous avons
d'ailleurs hésité à la fixer à un an, et non pas à deux ans - c'est parce qu'il
nous apparaît essentiel, compte tenu des moyens que nous allons mettre en
place, qu'il y ait une réelle mobilisation à la fois des acteurs et des jeunes
pour que ces derniers puissent sortir le plus vite possible de la situation
d'exclusion dans laquelle ils se trouvent.
Nous ne souhaitons pas que, comme pour le CFI, par le passé, une action soit
suivie de trois mois de suspension, puis qu'il y ait à nouveau une action. Nous
voulons que toutes les personnes concernées soient véritablement mobilisées.
Dans ces conditions, il nous semble que la période de dix-huit mois est
suffisante.
Ensuite - et je réponds là au souci de Mme Derycke, que je comprends très bien
- pendant cette période de dix-huit mois, ne sont pas pris en compte,
notamment, le choix d'une formation de qualification qu'un jeune pourrait être
amené à effectuer après un bilan de compétences, une mesure d'insertion ou un
stage de préqualification, dans lesquels il s'engagerait à la fin de cette
période de dix-huit mois et qui pourraient d'ailleurs être financés, qu'il
s'agisse d'un stage de l'AFPA, de l'ANPE ou d'un stage de formation
professionnelle, qui peut durer deux ans ou deux ans et demi.
Par conséquent, dans ces dix-huit mois - je tiens à rassurer Mme Derycke sur
ce point - ne sont pas pris en compte une action de formation de longue durée
dans laquelle le jeune souhaiterait s'engager ou une action de formation en
alternance.
Je ne suis donc pas favorable à l'allongement de cette période de dix-huit
mois et j'espère que les précisions que j'ai apportées ont pu apaiser les
craintes qui ont été exprimées.
Peut-être faudra-t-il, dans quelques cas, prévoir une dérogation. Si un jeune
s'arrête parce qu'il est malade ou qu'il dérape, ces éléments seront pris en
compte dans cette période de dix-huit mois. Nous ne sommes pas devant un
calendrier strict. Si un jeune se heurte à de lourdes difficultés et est obligé
de s'arrêter pendant trois mois, cette période sera prise en compte. Nous le
dirons clairement dans les circulaires. En revanche, les jeunes doivent savoir
dès le départ qu'ils disposent de dix-huit mois pour trouver un emploi ou une
qualification. Cette période est déjà longue. De nombreux jeunes y arriveront
avant, peut-être même au bout d'un an. Je ne souhaite donc pas voir allongée
cette durée.
S'agissant de l'amendement n° 278, je suis relativement réservée, mais je m'en
remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 303.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Après avoir entendu les précisions apportées par Mme la ministre, nous
retirons l'amendement n° 303.
M. le président.
L'amendement n° 303 est retiré.
Monsieur Fischer, l'amendement n° 336 est-il maintenu ?
M. Guy Fischer.
Nous le retirons, monsieur le président, pour nous rallier à l'amendement n°
278 de Mme Dusseau.
Nous souhaitions soulever le problème, car l'expérience montre qu'une durée de
dix-huit mois est parfois trop courte s'agissant de personnes qui connaissent
de très grandes difficultés.
M. le président.
L'amendement n° 336 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 278, accepté par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 302 rectifié, Mmes Derycke, Dieulangard, Printz, MM. Huguet,
Vezinhet, Autain et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de
compléter
in fine
le deuxième alinéa du paragraphe II de l'article 2 par
les mots : « ainsi qu'avec les bureaux d'accueil et d'information pour l'emploi
des femmes. »
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Cet amendement tend à nouveau à faire prendre en compte les problèmes
spécifiques des femmes.
Les bureaux d'accueil et d'information pour l'emploi des femmes, les BAIE,
présents sur l'ensemble du territoire, ont vocation à accueillir des femmes, à
les informer sur l'emploi, sur la formation, mais en tentant de prendre en
compte globalement la totalité de leur situation.
En effet, on découvre généralement que, derrière un problème d'emploi, se
dissimulent souvent des problèmes de contraception, de violence conjugale ou
familiale - je pense en particulier aux jeunes filles. Chaque jour,
malheureusement, la presse relate des faits dramatiques où des femmes sont
victimes de violences.
Les missions locales ne sont pas très adaptées à ce genre de situations et de
public. Les BAIE apportent un soutien global, en même temps, bien entendu,
qu'une information et un travail très professionnalisé en direction de l'emploi
et de la formation des femmes. Nous souhaiterions donc qu'ils figurent en
toutes lettres dans la loi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est favorable à
l'amendement de Mme Derycke, sous réserve d'une rectification formelle ; il
convient d'écrire : « ainsi qu'avec les bureaux d'accueil individualisé vers
l'emploi des femmes ».
Il est effectivement important de ne pas les omettre dans l'énumération des
organismes signataires des conventions avec l'Etat, car ces bureaux apportent
une réponse à des femmes sans emploi qui s'adressent à eux.
M. le président.
Madame Derycke, acceptez-vous de rectifier votre amendement ainsi que vous le
suggère Mme le ministre ?
Mme Dinah Derycke.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 302 rectifié
bis
, visant à
compléter
in fine
le deuxième alinéa du paragraphe II de l'article 2 par
les mots : « ainsi qu'avec les bureaux d'accueil individualisé vers l'emploi
des femmes. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 302 rectifié
bis
, accepté par le
Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 304, Mmes Dieulangard, Derycke, Printz, MM. Huguet,
Vezinhet, Autain et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de
compléter le paragraphe II de l'article 2 par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces conventions peuvent prévoir la mise à disposition des missions locales,
des permanences d'accueil, d'information et d'orientation et des bureaux
d'accueil et d'information pour l'emploi des femmes susvisés, d'un contingent
annuel de contrats emploi-solidarité bénéficiant du taux maximum de prise en
charge par l'Etat, et donnant lieu à une utilisation modulable en fonction des
opportunités de contrats auprès des employeurs mentionnés au premier alinéa de
l'article L. 322-4-7 du code du travail, et des intérêts des jeunes. »
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Madame la ministre, le programme TRACE est un élément central de votre projet
de loi. Il doit permettre la prise en charge des jeunes en grande difficulté
dans le cadre d'un parcours qui alternera remise à niveau, formation, contrat
en alternance.
Sur le plan de la démarche, ce dispositif fait l'unanimité, notamment chez
ceux qui, au jour le jour, accueillent et font cheminer les jeunes vers une
autonomie plus grande.
Les CES font partie des outils de cette insertion. Les règles qui régissent
les CES et les CEC, notamment celles qui sont relatives à leur contrôle, en vue
de leur nécessaire recadrage, sont bien reprécisées dans le présent projet de
loi, ce qui est tout à fait justifié compte tenu des dérives que chacun peut
avoir présentes à l'esprit.
Pourtant, il nous semble important que les CES, notamment dans le cadre du
programme TRACE, puissent être utilisés avec souplesse, précisément pour faire
en sorte que ces parcours se déroulent avec le moins de ruptures possibles au
cours des différentes étapes.
L'amendement que nous proposons prévoit d'attribuer aux missions locales et
aux PAIO un contingent de CES, défini proportionnellement au nombre de jeunes
susceptibles de bénéficier du programme TRACE.
Pourquoi une telle proposition ? Il s'agit concrètement de permettre une
utilisation rationnelle de ce contingent en évitant les rigidités et les délais
liés notamment à la procédure d'accord de la direction départementale du
travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.
Il n'est pas question pour nous d'exonérer les structures gestionnaires de ce
contingent d'un contrôle parfaitement légitime de l'Etat, qui s'effectuera dans
ce cas régulièrement mais
a posteriori.
Nous souhaitons simplement que
ces jeunes ne soient pas pénalisés par les procédures, parfois lourdes et
longues, qui encadrent le fonctionnement des contrats aidés.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement nous semble mettre en avant une idée
intéressante d'un contingent qui serait évidemment limité et auquel pourraient
recourir les missions locales. Il s'agirait d'un contingent de CES bien
identifiés, qui impliqueraient un cocontractant et qui permettraient de
résoudre quelques situations difficiles auxquelles les missions locales ont du
mal à faire face.
Dans la mesure où cette disposition serait bien encadrée, la commission
pourrait émettre un avis favorable.
La commission souhaite donc connaître l'avis du Gouvernement sur cette affaire
avant de se prononcer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Il est essentiel que les
missions locales, qui seront chargées de monter les parcours, puissent avoir
accès à différents instruments, notamment, pour certains jeunes, aux CES.
J'espère d'ailleurs que la durée du CES sera courte car l'objectif du
programme TRACE est non pas de placer un jeune en CES pendant un an, mais de le
placer en CES pendant trois mois par exemple, avant de le remobiliser sur le
travail par un stage de préqualification ou le choix d'un métier.
Il me paraît quelque peu restrictif de ne prévoir que des CES. En effet, dans
notre esprit, les missions locales chargées de mettre en oeuvre le programme
TRACE vont utiliser aussi bien des CES que des CIE, des contrats de
qualification, des stages de formation professionnelle, y compris d'ailleurs
des stages mis en place par les régions.
C'est d'abord à la convention entre l'Etat et les régions qu'il appartiendra
de le prévoir, la convention avec les missions locales affectant un certain
nombre de jeunes à la mission locale et précisant comment cette mission locale
peut utiliser les différents outils, dont les CES, mais pas seulement les
CES.
Peut-être faut-il l'inscrire dans la loi et trouver une rédaction qui réponde
à votre souci, madame le sénateur : les missions locales doivent avoir accès
non seulement aux CES mais aux différents mécanismes.
Peut-être pourrons-nous répondre à votre souci, qui est légitime, puisqu'il
traduit l'objet même des programmes TRACE. Je suis néanmoins défavorable à
l'amendement n° 304.
M. le président.
Quel est désormais l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je comprends très bien l'argument de Mme la ministre et, pour
permettre une évolution du dispositif, je maintiens l'avis favorable de la
commission.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 304.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Il m'est difficile de retirer mon amendement à ce point du débat.
Je ne veux pas réduire les programmes TRACE à un parcours en CES. L'expérience
montre néanmoins que les contrats de travail aidé comportent des lourdeurs qui
ne permettent pas de les utiliser rapidement et souplement.
M. Alain Vasselle.
On verra cela en deuxième lecture !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Il faut éviter - excusez-moi de
le dire ainsi - de se « débarrasser » de ces jeunes en les plaçant en CES. Le
programme TRACE est une mobilisation qui doit aller vers la qualification ; le
CES seul pendant dix-huit mois serait une facilité.
De la même manière, je le dis comme je le pense, il faut que les régions - et
pas seulement l'Etat - mobilisent aussi leurs stages de formation.
Je souhaitais avoir le temps d'en parler avec les auteurs de l'amendement et
avec la commission mais, puisque les choses vont vite, je peux proposer dès
aujourd'hui une rédaction qui satisfera peut-être tout le monde : « Afin
d'assurer la cohérence et la continuité des parcours, les conventions
mentionnées aux deux alinéas précédents... » - il s'agit de la convention
Etat-région et des conventions avec les missions locales - « ... peuvent
prévoir des modalités spécifiques de mobilisation, en faveur des jeunes
bénéficiaires des actions d'accompagnement, des mesures relevant de la
compétence de l'Etat ou de la région dans des conditions fixées par la
convention-cadre qu'ils ont conclue. »
Le souhait de Mme Dieulangard serait ainsi satisfait, mais le dispositif
serait élargi à l'ensemble des mesures prévues de manière spécifique dans la
convention-cadre.
M. Jacques Machet.
Très bien !
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
La commission partage
l'avis de Mme la ministre sur deux points.
D'une part, le texte proposé non seulement n'est pas bon, mais il vise le
bureau d'accueil et d'information pour l'emploi des femmes alors que nous avons
modifié le titre de cet organisme avec l'amendement précédent.
D'autre part, la rédaction proposée par le Gouvernement me paraît meilleure
parce qu'elle ne focalise pas le dispositif sur les contrats emploi-solidarité.
Il serait en effet stupide de voter un montage fondé uniquement sur les CES.
Sur ce point, je crois que la commission et le Gouvernement sont d'accord.
Par conséquent, il nous semblerait préférable que ce soit le texte du
Gouvernement plutôt que celui de l'amendement n° 304 qui soit soumis à la
commission mixte paritaire.
M. le président.
Je suis saisi d'un amendement n° 511, présenté par le Gouvernement, et visant
à compléter le II de l'article 2 par un alinéa ainsi rédigé :
« Afin d'assurer la cohérence et la continuité du parcours, les conventions
mentionnées aux deux alinéas précédents peuvent prévoir des modalités
spécifiques de mobilisation, en faveur des jeunes bénéficiaires des actions
d'accompagnement, des mesures relevant de la compétence de l'Etat ou de la
région dans des conditions fixées par la convention-cadre qu'ils ont conclue.
»
Dans ces conditions, madame Dieulangard, maintenez-vous l'amendement n° 304
?
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 304 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 511 ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 511, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 14, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de supprimer le paragraphe II
bis
de l'article 2.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement supprime le paragraphe II
bis
de
l'article 2 qui institutionnalise le rôle des FAJ, les fonds d'aide aux jeunes,
en accompagnement du programme TRACE.
Je voudrais lever toutes les ambiguïtés qui ont pu naître à propos de la
position de la commission à ce sujet.
Cet article dispose que les jeunes qui rencontrent des difficultés matérielles
pendant les périodes au cours desquelles ils ne sont pas rémunérés au titre
d'un stage, d'un contrat de travail ou d'une autre mesure, bénéficient de
l'accès au fonds d'aide aux jeunes. Ce dispositif laisse penser, dans sa
rédaction actuelle, que l'allocation du fonds d'aide aux jeunes est un droit
accordé automatiquement pendant les périodes où le jeune n'est pas rémunéré.
Cette disposition peut avoir des effets pervers et inciter des jeunes à entrer
dans le système, uniquement pour bénéficier de cette allocation.
Il convient donc de s'en tenir, nous semble-t-il, à l'article 43-2 de la loi
instaurant le RMI qui dispose de manière non équivoque que le fonds d'aide aux
jeunes prend en charge les aides financières directes accordées aux jeunes pour
une durée limitée et à titre subsidiaire ainsi que les mesures d'accompagnement
nécessaires.
Il importe de respecter l'autonomie de décision des départements et des
préfets dans la gestion quotidienne des fonds d'aide aux jeunes.
Autrement dit, nous ne sommes pas hostiles à l'utilisation des fonds d'aide
aux jeunes dans ces interstices pendant lesquels les jeunes ne disposent pas
d'une rémunération, mais nous estimons que seule une circulaire peut rappeler
le dispositif. Faire figurer ce dernier dans la loi semble en effet indiquer
qu'il s'agit d'un droit accordé automatiquement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est défavorable
à cet amendement.
Il n'est en effet pas du tout dans notre intention, je l'ai déjà dit,
d'accorder une rémunération uniforme pendant dix-huit mois à tous les jeunes
qui bénéfieraient du programme TRACE, quelle que soit leur mobilisation.
Je crois en revanche qu'il est utile de sécuriser les jeunes, à la fois en
assurant leur protection sociale et en leur permettant de garder un logement
lorsqu'ils sont entrés dans ce programme.
Je pense aussi aux jeunes des zones rurales qui vont vivre dans une commune de
plus grande taille pour pouvoir bénéficier de ce programme. Certains d'entre
eux n'auront pas les moyens de financer leur logement pendant ces périodes
interstitielles entre deux actions.
Le fonds d'action pour les jeunes pourra être utilisé non pas automatiquement
mais pour leur apporter une aide ponctuelle.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 511.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
J'ai déjà dit hier que nous ne comprenions pas cette volonté de la majorité
sénatoriale de supprimer le paragraphe II
bis,
c'est-à-dire le recours
au fonds d'aide aux jeunes.
Cette mesure n'est pas automatique, systématique ; elle doit intervenir quand
le jeune est en période interstitielle. En effet, des ruptures peuvent survenir
lors de la mise en oeuvre d'un parcours TRACE et le jeune peut se trouver dans
une situation difficile.
Le recours au fonds d'aide pour les jeunes non seulement n'est pas
automatique, mais il est personnalisé. Les aides financières qui pourraient en
découler ne ressemblent en rien à un RMI-jeune ou à un revenu garanti ; je l'ai
dit hier, et Mme le ministre vient de le répéter ; elles permettent seulement
d'assurer une continuité de revenus à ces jeunes en difficulté.
Il s'agit de redonner espoir au jeune, de l'encourager à poursuivre, de lui
donner confiance, ce qui est aussi une dimension essentielle dans la lutte
contre les exclusions.
Les jeunes, bien souvent, ont en quelque sorte perdu confiance dans la parole
à la fois de l'Etat, des institutions en général, et des adultes.
La perspective d'une aide, dans une période qui est interstitielle, peut les
sécuriser et les inciter à ne pas abandonner un projet et un trajet.
Je rappelle par ailleurs que l'Etat a prévu de tripler sa participation sur la
période de réalisation du programme.
Je ne comprends donc toujours pas pourquoi la majorité sénatoriale veut
supprimer cette mesure, qui représente vraiment une mesure d'encouragement pour
les jeunes.
Mme Nicole Borvo.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo.
J'ai cru comprendre que la commission des affaires sociales approuvait en
partie le principe de l'article 2. Toutefois, elle refuse de sécuriser le
parcours d'insertion des jeunes bénéficiant du programme TRACE, en les privant
de la possibilité d'accéder aux aides du fonds d'aide aux jeunes.
L'une des raisons avancées est le flou apparent quant au financement de ce
fonds, qui doit être abondé au moins à parité par les départements et l'Etat.
Certes, je comprends que notre commission éprouve quelque réticence, notamment
lorsqu'il s'agit de mettre à contribution les collectivités locales, car il est
vrai que celles-ci « contribuent » déjà beaucoup.
Pour autant, je crois que l'on ne peut pas cautionner cet amendement de
suppression, étant entendu que la majorité sénatoriale cherche surtout à éviter
que ne soit posée la question de la rémunération des jeunes durant les périodes
où ils ne sont ni en stage, ni sous contrat de travail.
Cette question me semble pourtant essentielle. Comment, en effet, se réinsérer
durablement si aucune sécurité matérielle n'est garantie, si tout recours à des
aides ponctuelles est proscrit ?
Comme nous sommes attachés à l'intervention du fonds d'aide aux jeunes, même
si cela ne règle que très partiellement les problèmes financiers des jeunes,
nous voterons contre cet amendement.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Madame la ministre,
j'ai bien pris note de vos explications sur ce point important, mais il est
écrit dans le texte que, lorsqu'il y a interruption de certains dispositifs
d'aide, le jeune « bénéficie » de l'accès aux fonds départementaux ou locaux
d'aide aux jeunes, ce qui veut dire qu'il a un droit automatique. Il y a donc
une contradiction entre vos paroles et la rédaction de l'article.
Il faut, me semble-t-il, conserver l'esprit de la loi relative au RMI, qui
rend possible l'octroi d'aides aux jeunes qui rencontrent de grandes
difficultés dans des conditions précises.
Aujourd'hui, vous allez beaucoup plus loin puisque vous créez un droit de
tirage automatique.
Je demande donc au Sénat de voter l'amendement de la commission. Nous verrons
ensuite si nous pouvons parvenir à un compromis.
Ne créons pas aujourd'hui un droit nouveau, ne nous engageons pas sur la voie
d'un RMI-jeunes !
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je veux formuler deux remarques après l'intervention tout à fait pertinente de
M. Jean-Pierre Fourcade.
Première remarque : il faut que nos amis de l'opposition sénatoriale et que le
Gouvernement parlent clair en la matière ! Dites très clairement que vous
voulez créer un RMI-jeunes...
(Mme le ministre proteste.)
Dites-le clairement, madame le ministre, et ne vous cachez pas derrière
votre petit doigt pour prendre des dispositions qui tendent à apporter des
solutions que vous avez toujours contrées lorsque vous étiez dans l'opposition
nationale !
Seconde remarque : lorsqu'un jeune est en difficulté, la solidarité familiale
doit jouer, à moins que la famille ne connaisse des difficultés majeures,
auquel cas il existe des mesures pour aider ce jeune.
Ces deux remarques devraient être de nature à faire réfléchir nos collègues
avant qu'ils ne soient amenés à se prononcer sur l'amendement n° 14.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le sénateur, je
regrette vivement le ton que vous employez.
Si nous avions voulu faire un RMI-jeunes, nous l'aurions fait !
Nous sommes en train de discuter d'un vrai problème : comment utiliser le
fonds d'aide aux jeunes.
La rédaction du paragraphe II
bis
pose un problème à M. Fourcade, mais
je ne pense pas, si j'ai bien compris ses explications, qu'il refuse
obstinément que tout jeune ait accès au FAJ.
Par conséquent, nous devons trouver une rédaction qui corresponde à ce que
nous avons dit les uns et les autres, mais en aucun cas nous ne devons nous
envoyer des invectives qui ne correspondent ni à la teneur ni à la tenue de ce
débat. Excusez-moi de vous le dire, monsieur le sénateur !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 423 rectifié, Mme Bardou, MM. Bordas, de Bourgoing, de
Cossé-Brissac, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants
proposent de compléter
in fine
le IV de l'article 2 par une phrase ainsi
rédigée : « Ce bilan mentionne obligatoirement le point de vue des
bénéficiaires des actions et présente une analyse des motifs pour lesquels les
demandes d'accès aux actions mentionnées au I ont été éventuellement rejetées.
»
La parole est à Mme Bardou.
Mme Janine Bardou.
Cet amendement concerne non pas le dispositif lui-même, mais le bilan des
actions d'accompagnement.
Pour que ces bilans contribuent à améliorer le dispositif dans le sens d'une
meilleure prise en compte des jeunes et, donc, d'une plus grande efficacité, il
nous paraît essentiel de demander l'appréciation des intéressés. L'expérience
montre qu'elle ne va pas de soi. C'est pourquoi il est important de l'inscrire
dans la loi.
Il est également bon que les jeunes puissent s'exprimer sur le parcours qu'ils
auront suivi. C'est, pour eux, une façon d'adhérer à ce parcours.
La rédaction que nous proposons permet, nous semble-t-il, une parfaite
transparence.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Pery,
secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.
Le Gouvernement est
défavorable à cet amendement, même s'il en approuve l'esprit.
En effet, le fait de prévoir que les bénéficiaires seront consultés sur la
portée des actions d'accompagnement renforcé dont ils ont pu bénéficier ne
semble pas nécessaire.
De plus, elle présente l'inconvénient de ne préciser le contenu du bilan
annuel qu'à l'égard des bénéficiaires effectifs ou potentiels.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 423 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 337, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent de compléter
in fine
le IV
de l'article 2 par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans un rapport annuel, l'Etat dressera la synthèse des bilans susvisés et
mettra en avant des propositions concrètes visant à sécuriser les trajectoires
d'accès à l'emploi, notamment par la création d'une allocation minimum pour les
jeunes. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si les
derniers chiffres publiés témoignent d'une certaine embellie de l'emploi,
toutes les catégories des demandeurs d'emploi n'en bénéficient pas. Ainsi, le
taux de chômage des moins de vingt-cinq ans demeure inchangé.
Une grande partie de ces derniers ne maîtrisant pas les savoirs de base, leur
embauche dans le cadre d'un emploi ordinaire n'est pas envisageable.
Pour 86 % d'entre eux qui sont sans aucune ressource, la vie quotidienne
ressemble fort à un véritable calvaire. Comment, en effet, satisfaire ses
besoins les plus élémentaires, comment se loger, se nourrir, se déplacer,
accessoirement se soigner et se vêtir avec rien, si ce n'est en recourant au
système D ?
Madame la ministre, l'esprit de votre texte est novateur, car vous essayez
d'aborder l'exclusion en termes de droits à restaurer.
Dans le cadre du programme TRACE, les jeunes sécurisés n'auront véritablement
l'envie et les moyens d'aller de l'avant qu'à condition d'avoir aussi la
garantie de s'éloigner de la précarité. Seule l'assurance d'une rémunération,
allocation minimale, est susceptible de leur permettre de vivre dignement.
Dans cette enceinte, nous sommes tous conscients, à part la majorité
sénatoriale peut-être, de l'intérêt de l'intervention du FAJ. Toutefois, nous
en connaissons aussi les limites.
Ne pouvant se satisfaire d'aides ponctuelles sécurisant partiellement les
trajets d'accès à l'emploi des jeunes, offrant à notre jeunesse très peu de
perspectives, le groupe communiste républicain et citoyen et moi-même vous
proposons de réfléchir à la mise en place d'une allocation de recherche
d'emploi ou de formation, qui serait définie proportionnellement au SMIC et qui
concernerait les jeunes du programme TRACE et, à terme, tous les jeunes.
L'objet de notre amendement n'est pas d'enfermer les jeunes dans l'assistance.
Nous voulons seulement garantir la réussite de leur parcours d'insertion.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission a émis un avis défavorable, monsieur le
président.
Tout d'abord, un bilan est prévu au paragraphe IV de cet article.
Quant à la création de l'allocation minimale pour les jeunes, les explications
précédentes ont été suffisamment claires pour que je n'aie pas besoin d'en
rajouter.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Monsieur Fischer, nous sommes sensibles à votre préoccupation. Toutefois,
ainsi qu'il l'a rappelé à différentes reprises, le Gouvernement n'est pas
favorable à l'instauration d'un RMI pour les jeunes. Mme Martine Aubry vient
encore de s'exprimer sur ce sujet.
Plutôt que d'attribuer une allocation supplémentaire, le Gouvernement se
propose de renforcer les outils et de favoriser l'élaboration de démarches
conduisant à l'insertion professionnelle.
Peut-être puis-je vous rappeler le débat que nous venons d'avoir sur le FAJ et
qui vise à répondre à votre souci de sécuriser les jeunes.
Je peux vous rappeler également deux autres dispositions.
La première, qui est le programme « nouveaux services, nouveaux emplois »,
vise, par le développement d'activités, à favoriser l'embauche des jeunes.
Ainsi, à l'occasion de la lutte contre les exclusions, il est prévu qu'un
effort particulier d'embauche en direction des jeunes des quartiers en
difficulté sera réalisé dans la mise en oeuvre de ce programme.
La seconde disposition est le renforcement de l'alternance pour les contrats
de qualification et les contrats d'orientation.
Enfin, je rappellerai aussi le renforcement de l'intervention de l'Etat en
direction des jeunes éloignés de l'emploi. L'Etat prend ainsi l'initiative et
consacre des moyens à la mise en place d'actions d'accompagnement, en
particulier le programme TRACE.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 337, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous avons examiné trente amendements sur cinq cent dix
!
Je vous propose d'interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures
quinze.)
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi d'orientation relatif à la
lutte contre les exclusions.
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - L'article L. 322-4-1 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Dans le premier alinéa de cet article, les mots : "et des chômeurs
cumulant les situations de précarité les plus graves" sont remplacés par les
mots : "et des personnes sans emploi rencontrant des difficultés particulières
d'accès à l'emploi" ;
« 2° A la fin de la deuxième phrase du dernier alinéa de cet article, les mots
: "les handicapés et les bénéficiaires de l'allocation du revenu minimum
d'insertion ou de l'allocation spécifique de solidarité" sont remplacés par les
mots : "les handicapés, les bénéficiaires de l'allocation du revenu minimum
d'insertion ou de l'allocation spécifique de solidarité, les parents isolés
assurant ou ayant assuré des charges de famille ainsi que les personnes faisant
l'objet ou ayant fait l'objet d'une peine privative de liberté". »
Par amendement n° 305, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, dans le texte présenté par le 2° de cet
article pour la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 322-4-1 du
code du travail, après les mots : « des charges de famille », d'insérer les
mots : « , des Français de l'étranger, dépourvus de ressources et d'emploi à
leur retour en France ».
La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Il s'agit de prévoir pour les Français de l'étranger qui reviennent en France
en situation de détresse une priorité d'accès aux stages de formation
professionnelle.
Il faut avoir conscience du fait que les Français expatriés qui connaissent
les plus grandes situations de détresse à leur retour en France sont ceux qui
étaient durablement installés à l'étranger ou qui y avaient toujours vécu. Il
s'agit de personnes qui n'ont plus aucune attache familiale ou professionnelle
en France.
La décision de revenir en France leur a été dictée par une situation de grave
détresse et il leur faut rompre les liens affectifs et sociaux qu'ils ont
tissés dans leur pays de résidence pour partir vers l'inconnu, vers un pays
dont certes ils sont ressortissants, mais dont ils ne connaissent plus - s'ils
l'ont jamais connu - le mode de vie.
Sont concernées deux catégories de personnes très différentes qui connaissent
toutes de grandes difficultés.
La première est constituée par les femmes qui ont épousé un étranger et qui,
après un veuvage ou un divorce accompagnés d'une perte d'emploi, sont dans
l'incapacité de retrouver un emploi. Dépourvues de toute ressource dans le pays
où elles vivent, elles doivent rentrer en France.
L'autre catégorie rassemble des personnes dont la formation professionnelle et
intellectuelle est malheureusement faible et qui sont restées dans les colonies
après la proclamation de l'indépendance. Trente ou quarante ans après cet
événement, ces personnes ou leurs enfants ne trouvent plus leur place dans la
société du pays, qui a évolué, et encore moins sur le marché de l'emploi.
Si, de surcroît, ils ont la malchance de vivre dans un pays à la dérive - je
pense à Madagascar ou à Djibouti, qui s'enfoncent dans la misère - la
possibilité pour eux de retrouver un gagne-pain après une faillite ou après la
perte d'un emploi, relève de l'illusion totale. C'est fini pour eux !
Il faut donc, à mon avis, donner à ces personnes particulièrement démunies la
possibilité de « remettre le pied à l'étrier », selon l'expression qu'a très
justement employée Mme la ministre dans son discours liminaire.
Il faut bien dire que, tels qu'ils arrivent en France, sans formation
intellectuelle ou professionnelle, ils ne sont guère employables.
De plus, leur expérience particulière, leur parcours, leur situation présente
ne sont pas bien compris par les travailleurs sociaux, dans les mairies ou à
l'ANPE : on ne comprend pas d'où ils sortent ni pourquoi ils sont dans une
telle situation.
Tous ceux qui les aident, les associations, nous-mêmes, avons besoin qu'ils
fassent officiellement l'objet d'une priorité d'accès aux stages de formation
professionnelle, pour forcer les blocages administratifs que nous rencontrons
lorsque nous les appuyons dans leur démarche de réinsertion en France.
Tel est l'objet de l'amendement. J'espère qu'il aura été compris par la
commission, par le Gouvernement et par notre assemblée tout entière.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier
rapporteur.
L'article 3, sur lequel porte cet amendement, a pour objet
d'ouvrir les stages d'insertion et de formation à l'emploi, les SIFE, à des
personnes rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi et qui
ne sont pas visées actuellement, comme les parents isolés assumant ou ayant
assumé des charges de famille ou les personnes faisant ou ayant fait l'objet
d'une peine privative de liberté.
L'amendement vise à insérer, parmi les bénéficiaires prioritaires des SIFE,
les Français de l'étranger dépourvus de ressources et d'emploi à leur retour en
France.
La commission a émis un avis favorable sur cet amendement estimant normal que
les Français de l'étranger puissent avoir aisément accès aux SIFE.
Au passage, monsieur le président, je tiens à faire remarquer que la
commission s'efforce de juger de manière impartiale les amendements qui lui
sont présentés et ne fait aucune ségrégation à l'égard des Français de
l'étranger.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Pery,
secrétaire d'Etat.
Madame le sénateur, je vous ai écouté avec beaucoup
d'attention. On ne peut qu'être sensible aux arguments que vous avez
développés.
Toutefois, je ne peux vous répondre positivement dans le cadre de ce projet de
loi. Je compte m'entretenir de ce sujet avec Mme Martine Aubry pour déterminer
si, dans un autre contexte, vos propositions pourront être prises en compte.
Je vous rappellerai, ce que vous savez pertinemment, que, si les personnes
auxquelles vous faites allusion sont sans ressources, elles peuvent se voir
ouvrir des droits au RMI et bénéficier de l'ensemble des systèmes de formation
auxquels ont accès les demandeurs d'emploi, dont les SIFE, dans les conditions
de droit commun.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 305.
M. Jacques Habert.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Je tiens à remercier le rapporteur de l'avis favorable, parfaitement justifié,
qu'il vient d'émettre.
J'avoue ne pas comprendre pourquoi Mme le secrétaire d'Etat, en revanche, a
exprimé un avis défavorable, déclarant que ce texte, très modeste, ne pouvait
pas figurer dans le projet de loi. Pour ma part, j'estime au contraire qu'il y
a tout à fait sa place.
Bien entendu, tous les sénateurs représentant les Français établis hors de
France voteront cet amendement. Nous remercions Mme Cerisier-ben Guiga de
l'avoir déposé, et je vous invite, mes chers collègues, forts de l'avis
favorable de la commission, à faire de même.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 305, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, ainsi modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 322-4-7 du code du travail
est ainsi rédigé :
« Ces contrats sont réservés aux demandeurs d'emploi de longue durée, aux
bénéficiaires de l'allocation de revenu minimum d'insertion, de l'allocation de
solidarité spécifique, de l'allocation de parent isolé, de l'obligation
d'emploi prévue à l'article L. 323-1, aux jeunes de plus de dix-huit ans et de
moins de vingt-six ans connaissant des difficultés particulières d'insertion
ainsi qu'aux catégories de personnes déterminées par décret en Conseil d'Etat
rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi. »
« I
bis.
- Avant le dernier alinéa de l'article L. 322-4-8 du même
code, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans les collectivités territoriales et les autres personnes morales de
droit public, un contrat emploi-solidarité ne peut être renouvelé sur un même
poste de travail qu'à la condition qu'il s'accompagne d'un dispositif de
formation visant à faciliter l'insertion professionnelle du bénéficiaire de ce
contrat à l'issue de celui-ci.
« En cas de non-renouvellement du contrat emploi-solidarité en raison de
l'absence de dispositif de formation visé à l'alinéa précédent, il ne peut être
recouru à un nouveau contrat emploi-solidarité pour pourvoir un même poste
avant l'expiration d'une période de six mois. »
« I
ter.
- Dans la première phrase du troisième alinéa de l'article L.
322-4-10 du même code, les mots : "et dans des conditions déterminées par
décret" sont remplacés par les mots : "à un an".
« II. - 1. La première phrase du premier alinéa de l'article L. 322-4-12 du
même code est ainsi rédigée :
« L'Etat prend en charge, dans des conditions fixées par décret en Conseil
d'Etat, tout ou partie du coût afférent aux embauches effectuées en application
des conventions prévues à l'article L. 322-4-7. »
« 2. Le second alinéa du même article est supprimé.
« III. - L'article L. 322-4-15 du même code est abrogé.
« IV. - Dans l'article L. 980-2 du même code, la référence : "L. 322-4-15" est
remplacée par la référence : "L. 322-4-14".
« V. - Les bénéficiaires d'un contrat emploi-solidarité peuvent conclure avec
un second employeur un contrat de travail à temps partiel dans la limite d'un
mi-temps. »
Par amendement n° 15, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le texte présenté par le I de cet article pour le
deuxième alinéa de l'article L. 322-4-7 du code du travail, après les mots : «
demandeurs d'emploi de longue durée », d'insérer les mots : « ou âgés de plus
de cinquante ans ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de réintégrer les chômeurs âgés
de plus de cinquante ans au chômage depuis moins d'un an dans la liste des
publics prioritaires pour l'accès à un contrat emploi-solidarité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je ne pense pas que le critère
de l'âge soit déterminant pour classer un chômeur parmi les personnes en
difficulté.
On peut avoir plus de cinquante ans et avoir du mal à retrouver un emploi sans
être véritablement en difficulté et devoir bénéficier d'un contrat
emploi-solidarité.
Je ne suis donc pas favorable à cet amendement, qui laisserait à penser que
des hommes et des femmes en parfaite santé physique et en capacité de
travailler, du seul fait qu'ils ont atteint cinquante ans, devraient être
considérés comme des personnes en difficulté et bénéficier de contrats
emploi-solidarité.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 306, Mme Cerisier-ben Guiga et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, dans le texte présenté par le paragraphe I
de l'article 4 pour le deuxième alinéa de l'article L. 322-4-7 du code du
travail, après les mots : « demandeurs d'emplois de longue durée », d'insérer
les mots : « aux Français de l'étranger dépourvus de ressources et d'emploi à
leur retour en France, ».
La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Cet amendement n° 306 répond au même souci que l'amendement n° 305 que j'ai
déposé sur l'article 3.
Il s'agit de faire figurer les Français en situation de détresse lors de leur
retour en France parmi les bénéficiaires d'un contrat emploi-solidarité. Cette
possibilité peut constituer pour eux une chance unique de réinsertion
professionnelle et sociale.
Les retours en France liés à la perte d'un emploi à l'étranger et à la
précarisation sociale dans le pays de résidence se produisent souvent entre
quarante et cinquante ans, à un âge où le divorce, le veuvage, la perte
d'emploi débouchent, à l'étranger comme en France, sur une exclusion quasi
définitive.
Or il est apparu que l'accès aux CES avait été extrêmement bénéfique aux
Français rentrés d'Algérie dans les années 1994-1995. Il l'avait été d'autant
plus que le délai qui s'était écoulé entre leur arrivée en France et le début
du contrat avait été plus réduit.
Ne perdons pas de vue que le risque de désocialisation et de perte de
dynamisme social est très élevé pour des personnes qui ont subi des
traumatismes graves, qu'ils soient d'ordre privé ou d'ordre politique. Voilà
des gens qui ont quitté le pays où ils vivaient parce que ce pays connaissait
une situation de guerre ou de guerre civile ; ils y ont éventuellement subi des
agressions, le pillage de leur logement. C'est ainsi qu'ils se trouvent
brutalement transplantés en France, alors que, huit jours auparavant, ils ne
s'y attendaient nullement. Il est évident que tout cela fragilise énormément la
personnalité.
Or, de retour en France, ces personnes sont en outre confrontées à une
situation de vacuité sociale. Elles sont accueillies dans un centre
d'hébergement ou chez des membres de leur famille. Mais, même dans ce dernier
cas, les choses ne se passent pas toujours pour le mieux : rapidement, la
famille en a par-dessus la tête de cette personne qui est revenue en France
après dix, vingt ou vingt-cinq ans d'absence.
En fait, dans de telles conditions, les intéressés risquent fort de perdre
toute capacité de rebondir !
C'est la raison pour laquelle ces personnes fragilisées qui reviennent en
France pour échapper à une situation personnelle grave ou dans le cadre d'un
rapatriement communautaire doivent figurer en tant que telles sur la liste des
publics cibles des CES, car, si elles n'y figurent pas, croyez-moi, elles ne
seront pas reçues par les différentes administrations à la porte desquelles
elles iront frapper. Même si un sénateur téléphone, même si les associations
les secondent, elles n'y arrivent pas !
M. Jacques Habert.
Très juste !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Etant donné qu'un décret en Conseil d'Etat déterminera toutes
les catégories de personnes rencontrant des difficultés particulières d'accès à
l'emploi à qui doivent être réservés les CES, il me semble que celles qui sont
visées par l'amendement n° 306 pourront éventuellement y figurer. Je
souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur cette question.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
L'avis du Gouvernement, et je
le dirai sur chaque article de ce projet de loi, est le suivant : ou bien les
Français de l'étranger revenus en France sont parmi les personnes en
difficulté, et ils bénéficient de l'ensemble des dispositions de ce texte, ou
bien ils ne le sont pas - c'est tout de même, heureusement, le cas d'un certain
nombre de rapatriés, notamment des cadres - et il n'en bénéficient pas.
Je sais qu'il existe un problème pour ce qui concerne la protection sociale,
et je propose que nous le traitions, mais nous ne pouvons pas le faire dans le
cadre de ce texte.
En tout cas, il ne faut pas considérer que les Français de l'étranger sont par
définition exclus du bénéfice de ces dispositifs. Ceux qui doivent être aidés
en application de ce texte le seront, mais ceux-là seulement.
Voilà pourquoi je suis défavorable à cet amendement, comme je le serai à tous
les autres de même nature.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Sagesse.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 306.
M. Jacques Habert.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Malheureusement, madame la ministre, les Français de l'étranger qui reviennent
au pays ne se trouvent pas dans la situation de tous les Français de France :
ces derniers ont cotisé, ils sont établis normalement, ils sont encadrés,
informés, ils ont des droits nettement déterminés.
Les Français de l'étranger, eux, ne connaissent rien des CES, des CEC, de tous
ces dispositifs que la France, dans son extrême bienveillance, a mis en place
pour ceux qui vivent sur son sol.
Nos compatriotes de l'extérieur travaillaient hors de l'Hexagone. Ils ne
peuvent pas obtenir les aides sociales et économiques parce qu'ils ne satisfont
pas aux critères métropolitains.
C'est pourquoi il faut absolument leur témoigner un intérêt particulier, leur
accorder certains avantages, les dispenser de certaines formalités, surtout
lorsqu'il s'agit d'obtenir des documents du pays où ils résidaient jusqu'alors
et dont ils ont été chassés.
Qu'au moins on examine leur cas en priorité et qu'on leur donne la possibilité
de se ressaisir !
Au demeurant, nous devons aussi prendre en compte ceux de nos compatriotes qui
ont échoué à l'étranger ou qui s'y retrouvent brusquement au chômage : ils
n'ont absolument pas les mêmes droits que ceux qui sont établis en France. Ils
sont exclus de toutes les aides auxquelles les autres ont droit, ils ne peuvent
s'inscrire à l'ANPE ou à un autre organisme. Il faut donc leur offrir une
chance de se rattraper, comme cela est proposé par Mme Cerisier-ben Guiga dans
son amendement n° 306, que je voterai et que je vous invite, mes chers
collègues, à voter également.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Je ne peux que répéter, après M. Habert, que quelqu'un qui arrive de
l'étranger où il a passé plusieurs dizaines d'années - quand il n'y a pas
toujours vécu - n'est pas dans la même situation qu'un Français qui n'a jamais
quitté la France. Ces personnes-là ne sont plus du tout adaptées à la société
française pour une raison toute simple : elles ne savent pas comment cela
fonctionne ! Quand elles arrivent devant un guichet, un employé va leur
demander les mêmes pièces qu'à celui qui a toujours vécu en France. Bien
souvent, elles ne comprennent même pas de quoi il s'agit et, la plupart du
temps, elles sont de toute façon dans l'incapacité de fournir une bonne partie
des pièces en question. Il faut des mois, des années pour se réadapter, quand
on y parvient !
Je persiste donc à penser qu'il entre tout à fait dans l'esprit de ce texte de
prévoir une disposition spéciale pour ces personnes qui sont en difficulté
particulière d'insertion.
Mme Paulette Brisepierre
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Brisepierre.
Mme Paulette Brisepierre.
Je crois, madame le ministre, que, si vous aviez assisté à l'arrivée des
avions en provenance de Brazzaville, vous auriez une vision un peu différente
des choses.
J'ai vu débarquer des femmes qui n'avaient absolument rien pu emporter, sinon
la chemise de nuit qu'elle portait au moment de leur fuite ! Il y avait aussi
des personnes âgées. Tous ont été merveilleusement pris en charge à leur
arrivée mais, après avoir quitté la direction des Français à l'étranger,
certains se sont trouvés dépourvus de tout, simplement replacés dans le lot
commun. Nous les avons aidés comme nous avons pu. Toutefois, Mme Cerisier-ben
Guiga l'a dit, les coups de téléphone d'un sénateur ne suffisent pas !
Je connais des personnes âgées qui n'ont plus rien et qui sont au bord du
suicide.
Ces gens se retrouvent en face d'une administration inhumaine. Elle ne
reçoivent d'aide de personne. C'est désespérant !
C'est pourquoi je soutiens totalement cet amendement.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Mes chers collègues,
nous n'allons tout de même pas, à chaque article du projet de loi, ajouter une
mention spécifique pour les Français de l'étranger qui rentrent en France !
Quelle est précisément, en l'espèce, la position de la commission ?
L'article 3 comprenait une énumération limitative. Nous avons accepté
l'amendement n° 305, faute de quoi les Français de l'étranger rentrant en
France sans emploi n'auraient pas pu bénéficier des stages d'insertion et de
formation à l'emploi.
A l'article 4, la situation n'est pas tout à fait la même puisque la
définition de son champ d'application est, pour partie, renvoyée à un décret en
Conseil d'Etat. Dès lors, il nous paraît inutile d'ajouter ici une référence
aux Français de l'étranger. C'est le décret en Conseil d'Etat qui déterminera
si les Français de l'étranger rentrant en France dans certaines conditions sont
des personnes qui rencontrent des difficultés particulières d'accès à
l'emploi.
Autrement dit, s'il n'est pas fait mention d'un texte d'application, l'ajout
de cette mention est justifié. Il ne l'est pas lorsqu'un texte réglementaire
est prévu pour préciser le champ d'application. Sinon, il faudrait modifier en
ce sens tous les articles du projet de loi, et nous n'en sortirions pas !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Madame Brisepierre, croyez bien
que je suis extrêmement sensible à la question que vous avez soulevée. Je
m'occupe moi-même, en tant que ministre de la santé, d'un certain nombre de
rapatriements, notamment de personnes choquées à leur arrivée en France, qui
ont vécu dans un pays où elles ont tout perdu et d'où elles reviennent dans des
conditions de détresse absolue.
Il s'agit là de problèmes spécifiques - de protection sociale, de logement, de
formation et d'insertion - qu'il faut traiter en tant que tels. Mme
Cerisier-ben Guiga est venue m'en parler à plusieurs reprises. Face à des
problèmes liés à des circonstances exceptionnelles, il convient de mettre en
place des dispositifs exceptionnels.
Je l'ai indiqué tout à l'heure, j'accepterai qu'un rapport soit établi non
seulement pour faire le point mais aussi pour élaborer des propositions afin
que, en cas d'occurrence de telles difficultés, les moyens des différentes
administrations puissent être mobilisés pour y répondre. Nous savons donc qu'un
travail sur ce point est nécessaire, et je me suis engagée à ce qu'il soit
fait.
De là à affirmer que l'ensemble des Français de l'étranger sont des exclus qui
doivent être pris en compte dans l'article 4, il y a un pas qu'il est difficile
de franchir. Je ne suis d'ailleurs pas sûre que les Français de l'étranger, que
je connais bien, car je les rencontre chaque fois que je me rends dans un autre
pays en tant que membre du Gouvernement, apprécieraient une telle position.
Soit ces personnes rentrent en France dans des conditions normales mais
connaissent des difficultés, et elles relèvent alors du dispositif, soit elles
rentrent du fait de circonstances exceptionnelles, telles que celles que vous
avez évoquées, madame Brisepierre, et il faut absolument que nous fassions en
sorte de mobiliser les moyens de l'administration pour leur apporter une aide,
car, pour le moment, je le reconnais nous n'en sommes pas capables. J'ai pris
un engagement à cet égard ; il sera tenu.
Hors ces cas exceptionnels, les Français de l'étranger sont concernés par ce
texte comme l'ensemble des Français.
Ne croyez donc pas que le Gouvernement n'ait pas la volonté de traiter les
problèmes douloureux dont vous avez parlé avec émotion. La question est de
savoir où et comment il vaut mieux les traiter. Je suis convaincue que, à
partir du rapport qui est proposé, nous arriverons à être plus efficaces
lorsque certains de nos compatriotes obligés de revenir soudainement en France
se trouvent dans des situations extrêmement difficiles.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 306, repoussé par le Gouvernement et pour
lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 16, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le texte présenté par le I de l'article 4 pour le
deuxième alinéa de l'article L. 322-4-7 du code du travail, après les mots : «
difficultés particulières d'insertion », d'insérer les mots : « , aux veuves
titulaires de l'allocation de veuvage ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement tend à faire figurer les veuves titulaires de
l'allocation de veuvage dans la liste des bénéficiaires prioritaires d'accès à
un contrat emploi-solidarité.
Cependant, dans la mesure où les titulaires de l'allocation de veuvage -
celle-ci s'élevait à 11 524 francs par trimestre au 1er janvier 1997 - se
trouvent nécessairement parmi les catégories de personnes rencontrant des
difficultés particulières d'accès à l'emploi, je crois pouvoir appliquer à cet
amendement la logique qu'a décrite le président Fourcade à propos de
l'amendement n° 306 : par conséquent, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 16 est retiré.
M. Charles Descours.
Je le reprends, monsieur le président !
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° 16 rectifié.
Je vous donne la parole, monsieur Descours, pour le défendre.
M. Charles Descours.
Dans cette discussion, on peut avoir juridiquement raison et politiquement
tort !
S'agissant des Français de l'étranger, j'ai suivi M. Fourcade, car les
dispositions en question relèvent, bien sûr, du domaine réglementaire.
Juridiquement, il en va de même s'agissant des veuves. Cependant, je n'oublie
pas que leurs associations se sont mobilisées en faveur d'une telle mesure. Si
cet amendement est retiré, les veuves vont penser que l'on se désintéresse de
leur sort, même si la mesure en question figure dans le décret pris en Conseil
d'Etat. Elles liront le
Journal officiel
et elles auront l'impression
qu'on ne les a pas prises en compte !
C'est en pensant à l'association des veuves chefs de famille de mon
département que je reprends cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
En fait, les veuves titulaires de l'allocation de veuvage
entrent, sans même être mentionnées dans le décret prévu à l'article 4, dans la
catégorie des publics prioritaires. C'est une logique incontournable, et Mme la
ministre pourra sans doute nous le confirmer.
C'est pourquoi la commission a retiré cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. le rapporteur a raison :
nous devons tenir le même raisonnement que précédemment.
M. Charles Descours.
L'amendement précédent, le Sénat l'a voté !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
J'ai tout de même le droit de
tenir le même raisonnement, monsieur le sénateur !
M. Charles Descours.
Le Sénat peut aussi se prononcer dans le même sens !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Sans doute, mais j'ai, moi
aussi, le droit de me prononcer dans le même sens !
M. Charles Descours.
Bien sûr, madame le ministre !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je voudrais apporter au Sénat
les précisions que j'ai été amenée à développer devant l'Assemblée
nationale.
Ce qui pose un problème aujourd'hui, ce n'est pas la prise en compte des
titulaires de l'allocation de veuvage parmi les personnes en difficulté puisque
le montant de cette allocation les met en situation d'être éligibles au
dispositif.
Le problème tient à ce qu'une réforme de l'allocation de veuvage doit être
réalisée.
Il nous faut reprendre la réflexion dans le droit fil de ce qu'a proposé Mme
Join-Lambert afin d'améliorer la situation financière des veuves concernées et
d'éviter la double inscription à l'allocation du veuvage et au RMI.
L'allocation veuvage doit atteindre un montant suffisant pour éviter le recours
au RMI, même si, après une certaine période, dans le cas où la situation de la
veuve ne s'est pas améliorée, elle peut percevoir le RMI.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16 rectifié.
M. Jacques Machet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet.
Madame le ministre, j'ai pris acte des propos que vous venez de tenir au sujet
des veuves - j'en ai parlé hier, au cours de la discussion générale - et je
vous remercie de l'attention que vous portez à ce problème très important.
M. le président.
Monsieur Descours, maintenez-vous l'amendement ?
Je vous suggère d'adresser aux veuves que vous représentez un courrier dans
lequel vous ferez valoir tout l'appui que vous leur avez apporté.
M. Charles Descours.
L'association concernée est celle qui se trouve dans votre département,
monsieur le président ! Je lui adresserai une copie du
Journal
officiel.
Sous la pression conjuguée de la commission, du Gouvernement et de M. Machet,
je ne peux faire autrement que de retirer mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 16 rectifié est retiré.
Par amendement n° 17, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de supprimer le second alinéa du texte présenté par le
paragraphe I
bis
de l'article 4 pour insérer deux alinéas avant le
dernier alinéa de l'article L. 322-4-8 du code du travail.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
L'Assemblée nationale a introduit pour les collectivités
locales et les personnes morales de droit public, dont les lycées et les
collègues, l'obligation de financer un dispositif de formation en cas de
renouvellement d'un CES.
Si le CES n'est pas renouvelé en raison de l'absence du dispositif de
formation, la commune ne peut plus recourir à un CES pendant six mois pour le
même poste.
Ce dispositif, qui témoigne d'une certaine défiance à l'égard des
collectivités locales, entraîne plus d'inconvénients que d'avantages : si la
commune n'est pas en mesure de financer la formation, le CES ne sera pas
renouvelé et le poste ne sera plus occupé, laissant un besoin social
insatisfait.
Le CES joue une fonction d'utilité sociale, mais il ne peut être considéré
comme un contrat de qualification. C'est pourquoi, dans un souci de prudence,
la commission propose de supprimer le second alinéa du texte présenté pour le
paragraphe I
bis
de l'article 4.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement s'en remet à la
sagesse du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 17.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
L'utilisation du CES par les employeurs publics est loin d'être toujours très
satisfaisante. Bien souvent, les bénéficiaires de tels contrats sont utilisés
comme des personnels non qualifiés. Une moralisation s'imposait.
L'article 4 du projet de loi poursuit cet objectif en recentrant ces contrats
sur les publics les plus en difficulté et en insistant sur l'insertion.
Sur ce dernier point, un amendement adopté à l'Assemblée nationale «
sanctionne », en quelque sorte, l'employeur, l'obligeant à assurer une
formation s'il entend obtenir le renouvellement du CES. Si ce dispositif de
formation ne peut être mis en place, un nouveau CES, sur un même poste, ne peut
intervenir avant l'expiration d'un délai de six mois.
L'insertion, pour être effective, doit s'accompagner d'une formation.
Cette disposition, qui incite les employeurs « défaillants » à tout mettre en
oeuvre pour que la perspective d'emploi se réalise, est également très positive
pour le salarié, qui ne verra son contrat renouvelé qu'à condition que cela
puisse lui être bénéfique.
En conséquence, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre
l'amendement de la commission des affaires sociales, qui refuse toute forme de
sanction.
M. Serge Lagauche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
L'insertion de cet alinéa par l'Assemblée nationale participe de la volonté de
recentrer les contrats emploi-solidarité sur leur vocation première : à la fois
répondre à des besoins collectifs non satisfaits et fournir un contrat de
travail à des personnes sans emploi et qui connaissent des difficultés
particulières d'insertion.
Je ne reviendrai pas sur la dérive de l'utilisation des contrats
emploi-solidarité, notamment par la fonction publique territoriale et la
fonction publique hospitalière, mais aussi par la fonction publique d'Etat par
le biais d'associations montées à cet effet.
Il est donc nécessaire de recentrer les contrats emploi-solidarité sur les
publics en difficulté, chacun en convient. Dans la même logique, il convient de
respecter enfin les termes de l'article L. 322-4-8 du code du travail, qui
dispose, s'agissant du décret en Conseil d'Etat : « Il fixe, en outre, les
conditions d'accueil, de suivi et de formation des bénéficiaires d'un contrat
emploi-solidarité. »
Cette formation, qui n'est pas une obligation, est trop souvent inexistante ;
nous le savons tous. Elle est d'autant moins utile - ayons la lucidité de le
dire ! - lorsque des contrats emploi-solidarité sont utilisés dans la fonction
publique, notamment pour des emplois qui devraient être occupés par des
fonctionnaires ou des contractuels à temps plein. Pourquoi devrait-on former
des jeunes qui sont parfois diplômés de l'enseignement supérieur ?
Si nous parvenons à faire en sorte que les collectivités territoriales et les
autres personnes morales de droit public ne puissent renouveler un contrat
emploi-solidarité si celui-ci ne s'accompagne pas d'une formation, un grand pas
aura été accompli.
Toutefois, j'appelle l'attention du Sénat sur le point suivant : si la loi
précise simplement qu'un contrat emploi-solidarité ne peut être renouvelé sans
formation, nous risquons d'aboutir au non-renouvellement des contrats
emploi-solidarité. Par conséquent, cela se retournerait, finalement, contre les
personnes que nous voulons aider.
Il importe donc de s'opposer à ce
turn-over,
à l'accélération de cette
précarisation, en empêchant les employeurs indélicats d'utiliser une nouvelle
personne sans emploi et en difficulté.
Une disposition analogue à celle de cet alinéa existe en droit du travail
s'agissant du licenciement. Il n'est donc pas choquant de la maintenir ici.
Cela conduira l'employeur à respecter son obligation de formation et à
s'efforcer de pérenniser des emplois précaires.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 18, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit le paragraphe I
ter
de l'article
4 :
« I
ter. -
La première phrase du troisième alinéa de l'article L.
322-4-10 du même code est ainsi rédigée : "Toutefois, les bénéficiaires de
contrats emploi-solidarité peuvent, à l'issue d'une période de trois mois et
pour une durée limitée à un an, être autorisés à exercer une activité
professionnelle complémentaire dans la limite d'un mi-temps". »
Cet amendement est assorti de deux sous-amendements.
Le premier, n° 494, présenté par le Gouvernement, tend, dans le texte proposé
pour le paragraphe I
ter
de l'article 4, à remplacer les mots : « pour
une durée limitée à un an » par les mots : « pour une durée fixée par décret.
»
Le second, n° 493, déposé par M. Vasselle, vise, dans le texte présenté, à
remplacer les mots : « un an » par les mots : « cinq ans. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 18.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Au cours de la discussion du projet de loi relatif à l'emploi
des jeunes, avait été introduite la faculté de cumuler un contrat
emploi-solidarité avec une activité professionnelle complémentaire, dans des
conditions qui devaient être définies par décret. Or, ce décret n'a toujours
pas été publié.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement fixant à un an maximum la durée
du cumul. Le décret deviendrait donc superflu.
Toutefois, il paraît important de prévoir que s'écoule une période minimale
entre le moment où le titulaire du contrat emploi-solidarité conclut ce contrat
et celui où il a le droit de signer un contrat de travail complémentaire. En
effet, le risque que ce CES soit non plus un outil d'aide aux personnes en
difficulté, mais un instrument d'amélioration sociale de la situation de
personnes qui peuvent accéder à un emploi à mi-temps, serait réel.
C'est pourquoi l'amendement prévoit un délai de carence de trois mois et
précise que l'emploi complémentaire ne peut pas dépasser un mi-temps.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 494.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Par définition, le bénéficiaire
d'un contrat emploi-solidarité est quelqu'un qui ne peut pas occuper un emploi
classique. Autrement, rien ne justifierait que l'Etat finance ce type d'emploi
!
Dans le même temps, je comprends fort bien qu'il faille trouver des sorties
vers l'emploi aux titulaires de contrats emploi-solidarité, et, si possible,
vers une activité classique.
A cet égard, permettre, pour la sortie ou la préparation de la sortie vers
l'emploi, le cumul, pendant une période déterminée, d'un contrat
emploi-solidarité et d'une activité professionnelle me paraît une bonne
chose.
En revanche, il ne paraît pas souhaitable que, pendant une longue durée - par
exemple pendant neuf mois, puisque l'on se situe à l'issue d'une période de
trois mois - le bénéficiaire d'un CES puisse, en parallèle, exercer une
activité professionnelle à mi-temps, donc travailler à temps plein.
Aussi proposerai-je au Sénat - ce sous-amendement renvoie à un décret et ne
peut donc être que formel - de limiter à 350 heures la durée pendant laquelle
l'activité professionnelle peut être cumulée à un CES, c'est-à-dire environ
quatre mois et demi pour un emploi à mi-temps et neuf mois pour un quart de
temps.
Il faut dire les choses telles qu'elles sont ! Si le bénéficiaire d'un contrat
emploi-solidarité qui a occupé un emploi à mi-temps pendant quatre mois et demi
a réussi, il sera embauché. Si, au contraire, il conclut une succession de
contrats à durée déterminée, le cumul sera possible jusqu'à neuf mois.
Il ne me paraît pas souhaitable, je le répète, que puissent être cumulés sur
une année un CES et une activité professionnelle.
Par conséquent, j'émets un avis favorable sur l'amendement n° 18, sous réserve
de l'adoption du sous-amendement n° 494.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 493.
M. Alain Vasselle.
Cet amendement a pour objet d'étendre la durée d'exercice d'une activité
professionnelle complémentaire à cinq ans pour les titulaires d'un CES, par
souci de parité avec le dispositif emploi-jeunes.
Cette disposition appelle de ma part deux remarques.
Tout d'abord, je souhaite que l'on m'explique la différence qui existe entre
un jeune qui bénéficiera d'un emploi-jeune pendant cinq ans, lequel sera
rémunéré à 80 % par l'Etat et à 20 % par une collectivité, et un jeune
titulaire d'un CES à mi-temps à qui on donne la possibilité de cumuler une
activité professionnelle salariée. Il s'agit là d'un moyen d'insertion par
l'économique, dont le coût sera très nettement inférieur à celui de
l'emploi-jeune pour la collectivité nationale !
Pour quelles raison le bénéficiaire d'un CES ne pourrait-il pas bénéficier de
la même durée que celle qui est prévue pour les emplois-jeunes ?
A priori,
les propositions du Gouvernement me paraissent incohérentes.
Je ne vois pas très bien, en effet, ce qui différencie le CES d'un
emploi-jeune. Dans l'esprit et dans la lettre du texte sur les emplois-jeunes,
ces derniers devaient déboucher sur des emplois émergents !
Or comme nous le montre notre expérience du terrain, le comportement à la fois
des représentants de l'Etat - cela va même au-delà des préfets, puisque les
sous-préfets font preuve d'un zèle remarquable en la matière - et des DDE et
des DDA, qui exercent une très forte pression sur les maires pour les
encourager à s'engager dans la création d'emplois-jeunes, aboutit à ce que 80
%, voire 90 % des emplois-jeunes sont des emplois de collectivités
territoriales. Il s'agit donc de futurs emplois de la fonction publique !
Par conséquent ni l'esprit ni la lettre du texte ne sont respectés par les
représentants de l'Etat sur le territoire ! De nombreux exemples dans nos
communes rurales et dans nos villes en attestent.
Je souhaite donc que l'on m'explique ce qui justifierait le rejet d'une mesure
de la nature de celle que je propose.
J'en viens à ma seconde remarque.
Je remercie M. le rapporteur et M. le président de la commission des affaires
sociales d'avoir prévu, un peu plus loin dans le texte, une mesure tendant à
faire progresser le dispositif législatif que nous avions adopté en son temps
dans le cadre de la loi de Giraud ; je veux parler de la loi quinquennale.
La Haute Assemblée avait alors introduit une disposition qui permettait à un
chômeur percevant des allocations ASSEDIC de pouvoir bénéficier également du
revenu d'une activité salariée, dans certaines limites bien déterminées,
évidemment. Or cette disposition n'est pas appliquée par les partenaires
sociaux !
Il s'agit véritablement d'un domaine dans lequel il faudrait développer une
action forte, afin de répondre à la situation de chômage dans laquelle se
trouvent des jeunes et des moins jeunes.
Cela correspond d'ailleurs à une attente forte de la population ! Dans vos
collectivités, mes chers collègues, vous devez souvent entendre des chômeurs,
comme des familles ou des élus locaux exprimer une telle demande.
Par conséquent, il est plus que temps de prendre des dispositions législatives
et réglementaires qui aillent dans ce sens.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 494 et 493 ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
J'ai été sensible au fait que le Gouvernement émette un avis
favorable sur l'amendement n° 18 de la commission, sous réserve de l'adoption
du sous-amendement n° 494 du Gouvernement, et je remercie Mme la ministre
d'avoir très clairement exposé son intention en ce qui concerne la durée fixée
par le décret. Ce matin, la commission avait en effet souhaité obtenir des
précisions sur ce point. En l'occurrence, la durée prévue semble trop courte.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 493 semble reprendre le raisonnement qui a prévalu pour
les emplois-jeunes. Le CES est conclu pour trois mois au minimum, avec une
durée maximale de douze mois, cette durée étant portée à vingt-quatre mois pour
certaines catégories de titulaires et à trente-six mois par décision
exceptionnelle du directeur du travail. En aucun cas, elle ne peut être de cinq
ans. Aussi, la commission émet un avis défavorable sur ce sous-amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 493 ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 494, repoussé par la commission.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 493, repoussé par la commission et par
le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 19, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de supprimer le paragraphe V de l'article 4.
Par amendement n° 338, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent de compléter
in fine
le
paragraphe V de l'article 4 par une phrase ainsi rédigée : « Ce dernier propose
dans un délai d'un an l'embauche du salarié à temps plein. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 19.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination. A l'Assemblée
nationale, a été adopté un amendement de M. Jean-Pierre Brard, visant à
assouplir considérablement le régime du cumul entre un CES et un emploi à temps
partiel. Compte tenu de cet amendement, il convient, par cohérence, de
supprimer le paragraphe V, qui ne présente aucune garantie.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 338.
Mme Nicole Borvo.
Initialement, le CES n'avait pas été conçu pour tous les demandeurs d'emploi ;
il était réservé aux personnes très éloignées de l'emploi, qui devaient
retrouver leur marques et acquérir une formation.
A de nombreuses reprises, les parlementaires communistes ont eu l'occasion de
dénoncer les dérives dans l'utilisation pratique de cet outil, notamment dans
l'éducation nationale et dans la fonction publique hospitalière.
Tout d'abord censés correspondre à des besoins collectifs non satisfaits, la
plupart du temps, ces contrats ont été utilisés pour effectuer des tâches
relevant normalement d'emplois titulaires.
De plus, ont été recrutées, sur ce type de contrat, des personnes qui
pouvaient s'insérer directement dans un emploi classique. Ainsi s'est trouvé
exclu, de fait, le public qui, très désocialisé, avait un impérieux besoin d'un
contrat aidé.
Je tenais à rappeler que nous jugeons, pour toutes les raisons évoquées
précédemment, très pertinente la démarche du Gouvernement, qui, à travers
l'article 4 du projet de loi, recentre les CES sur les publics les plus en
difficulté.
A l'Assemblée nationale, un ajout important a été fait à cet article 4.
Calqué sur une disposition incluse dans le projet emploi-jeunes, un amendement
a ouvert la possibilité à tous les bénéficiaires de CES de cumuler leur contrat
avec un emploi complémentaire chez un autre employeur, dans la limite d'un
mi-temps.
A l'Assemblée nationale, mon amie Muguette Jacquaint a exprimé nos réserves
sur une telle mesure, que nous jugeons perverse, même si nous en comprenons
l'utilité du point de vue pécuniaire.
Il est certain qu'avec 2 600 francs par mois le titulaire d'un CES ne peut pas
vivre dignement et qu'il aspire légitimement à un salaire décent. Mais soyons
cohérents et gardons-nous de faire du CES un emploi d'appoint.
Si, effectivement, la personne a réussi à s'insérer dans le monde du travail,
si elle assume dans l'entreprise des fonctions reconnues utiles par
l'employeur, plus rien ne justifie qu'elle fasse aussi l'objet d'un contrat
aidé. L'employeur doit prendre le relais et lui proposer une embauche à plein
temps.
Ainsi, l'écueil de la précarité permanente peut être évité.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 338 ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Sur la forme, l'amendement n° 19 tend à supprimer le
paragraphe V de l'article 4, sur lequel s'appuie l'amendement n° 338.
Quant au fond, la commission estime dangereux d'obliger une entreprise à
recruter à temps plein une personne employée à mi-temps lorsqu'elle était
titulaire d'un CES. Cette mesure risque en effet de dissuader les entreprises
d'embaucher tout CES à temps partiel.
C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 19 et 338 ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est favorable à
l'amendement n° 19.
En revanche, il est défavorable à l'amendement n° 338, pour les raisons que
vient d'exprimer M. le rapporteur.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 338 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - L'article L. 322-4-8-1 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Le I est ainsi rédigé :
« I. - L'Etat peut passer des conventions avec les employeurs, dans les
conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 322-4-7, pour favoriser
l'embauche des demandeurs d'emploi de longue durée, des bénéficiaires de
l'allocation de revenu minimum d'insertion, ou de l'allocation de solidarité
spécifique prévue à l'article L. 351-10, ou de l'allocation de parent isolé
prévue à l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale, ou de l'obligation
d'emploi prévue à l'article L. 323-1 du présent code, des personnes qui ne
peuvent trouver un emploi ou une formation à l'issue d'un contrat
emploi-solidarité, d'un contrat mentionné à l'article 42-8 de la loi n° 88-1088
du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion ou d'un contrat de
travail conclu avec les employeurs mentionnés aux articles L. 322-4-16-1 et L.
322-4-16-2, de jeunes de plus de dix-huit ans et de moins de vingt-six ans
connaissant des difficultés particulières d'accès à l'emploi, ainsi que les
catégories de personnes déterminées par décret en Conseil d'Etat rencontrant
des difficultés particulières d'accès à l'emploi.
« Les conventions prévoient des dispositifs comprenant notamment des actions
d'orientation professionnelle et de validation d'acquis en vue de construire et
de faciliter la réalisation de leur projet professionnel. Si celui-ci n'aboutit
pas avant la fin du vingt-quatrième mois, un bilan de compétence est réalisé
pour le préciser.
« La durée de ces conventions est de douze mois. Ces conventions sont
renouvelables par voie d'avenant dans la limite d'une durée maximale de
soixante mois, sous réserve des dispositions du II ci-après.
« Le contrat de travail conclu en vertu de ces conventions est un contrat de
droit privé dénommé "contrat emploi consolidé", soit à durée indéterminée, soit
à durée déterminée, passé en application de l'article L. 122-2. Les
dispositions du dernier alinéa de l'article L. 122-2 relatives au nombre
maximum des renouvellements ne sont pas applicables.
« La durée hebdomadaire du travail des personnes embauchées dans le cadre d'un
contrat emploi consolidé ne peut être inférieure à trente heures, sauf lorsque
la convention le prévoit en vue de répondre aux difficultés particulières de la
personne embauchée. Pour les personnes de plus de cinquante ans embauchées dans
le cadre des contrats emploi consolidés, la durée hebdomadaire du travail est
égale à la durée légale du travail, sauf lorsque la convention prévoit une
durée inférieure en vue de répondre aux difficultés particulières de la
personne embauchée. Dans ce cas, la durée ne peut être inférieure à trente
heures. » ;
« 2° Le premier alinéa du II est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« L'Etat prend en charge, dans des conditions fixées par décret, une partie du
coût afférent aux embauches effectuées en application des conventions
mentionnées au I. Cette aide peut être modulée en fonction de la gravité des
difficultés d'accès à l'emploi dans des conditions fixées par décret.
« Ce décret précise notamment les conditions et la durée maximale de prise en
charge par l'Etat lorsque le contrat emploi consolidé succède à un contrat
emploi solidarité prévu à l'article L. 322-4-7 effectué chez le même employeur
ou à un contrat prévu à l'article 42-8 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre
1988 précitée effectué chez le même utilisateur, dans les vingt-quatre mois
précédant l'embauche. Cette durée peut, en pareil cas, être réduite pour tenir
compte du temps précédemment passé par le bénéficiaire du contrat emploi
consolidé dans un des contrats mentionnés précédemment. »
Par amendement n° 20, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté
par le 1° de cet article pour le I de l'article L. 322-4-8-1 du code du
travail, après les mots : « de longue durée », d'insérer les mots : « ou âgés
de plus de cinquante ans ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Il s'agit de réintégrer les chômeurs âgés de plus de
cinquante ans dans la liste des personnes pouvant bénéficier d'un CEC, quelle
que soit la durée du chômage, donc même si elle est inférieure à un an.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement émet un avis
défavorable, pour les raisons que j'ai exposées tout à l'heure.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 21, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté
par le 1° de l'article 5 pour le I de l'article L. 322-4-8-1 du code du
travail, après les mots : « prévue à l'article L. 524-1 du code de la sécurité
sociale, », d'insérer les mots : « ou de l'allocation de veuvage prévue à
l'article L. 356-1 dudit code, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Il s'agit d'introduire les titulaires de l'allocation de
veuvage parmi les personnes ayant droit à un CEC.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Avis défavorable.
J'espérais que M. Seillier suivrait le même raisonnement que sur son précédent
amendement de même nature et qu'il retirerait cet amendement n° 21.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 339, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent de rédiger ainsi le dernier alinéa
du texte présenté par le 1° de l'article 5 pour le I de l'article L. 322-4-8-1
du code du travail :
« La durée hebdomadaire du travail des personnes embauchées dans le cadre d'un
emploi consolidé est égale à la durée légale du travail fixée à l'article L.
212-1 du code du travail ou à la durée collective inférieure applicable à
l'organisme employeur. Toutefois, lorsque la convention le prévoit, en vue de
répondre aux difficultés particulières de la personne embauchée, cette durée
peut être diminuée. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Par cet amendement, nous voulons insister de nouveau sur le fait que, lorsque
l'Etat intervient en faveur de l'emploi, en prévoyant par exemple un dispositif
tel que les CEC, l'objectif doit être de rompre avec la précarité. Or, je ne
pense pas que ce but puisse être entièrement atteint si, pour l'essentiel des
bénéficiaires de ces contrats, la durée de travail hebdomadaire, trop réduite,
ne permet pas d'accéder à une rémunération supérieure au SMIC mensuel.
Nous avons tous pris connaissance ici des études récentes témoignant des
difficultés que rencontrent les salariés gagnant mensuellement moins que le
SMIC et qui, privés des droits complémentaires des bénéficiaires de minima
sociaux, sont pratiquement incapables de consommer sans recourir à
l'endettement.
L'article 5 que nous examinons fixe légalement à trente heures minimum la
durée hebdomadaire du travail, sauf exceptions liées aux difficultés de la
personne.
Nous saluons ce pas en avant, étant observé que, jusqu'à présent, près de 38 %
des personnes en CEC avaient une durée hebdomadaire de travail égale à vingt
heures.
Toutefois, nous regrettons que vous ne soyez pas allée plus loin, madame la
ministre, en fixant à trente-cinq heures - puisque c'est la nouvelle durée
légale du travail - la durée de travail autorisée pour les CEC. Notre
amendement entend mettre un terme à cette timidité.
Nous considérons qu'il est important de promouvoir les embauches à temps plein
dans le cadre des CEC. Ainsi, les 200 000 personnes concernées à terme par
cette mesure ne seraient plus contraintes au travail à temps partiel imposé,
c'est-à-dire trente heures, et verraient leurs conditions de vie
substantiellement améliorées.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement prévoit que les embauches de CEC devront se
faire à temps plein et, par exception, à temps partiel. Compte tenu du besoin
des collectivités locales, il paraît préférable de s'en tenir à la durée
minimale de principe de trente heures, sauf exception, et ce à titre de
prudence. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Comme l'a très bien dit M.
Fischer, le texte du projet de loi améliore la situation actuelle des contrats
emploi consolidé, qui, aujourd'hui, en règle générale, sont à mi-temps. Le
Gouvernement a fixé un minimum de trente heures, puisque nous souhaitons que ce
soit une montée en charge pour sortir effectivement d'une situation
d'insertion.
Le coût cumulé de cette mesure, puisqu'il s'agit de CEC pendant cinq ans,
représente un montant de 6,7 milliards de francs sur trois ans, ce qui est
considérable. Rien n'empêche les collectivités ou les associations de permettre
à la personne concernée, si celle-ci en a la capacité, de travailler plus -
trente-deux heures ou trente-cinq heures - mais le coût, évidemment, se portera
alors sur ces collectivités ou ces associations.
Enfin, je voudrais rassurer M. Fischer : trente heures, c'est le minimum,
c'est la base du remboursement à 80 % par l'Etat, mais rien n'empêche d'aller
plus loin, notamment vers trente-cinq heures, ce qui est possible pour les
personnes qui le souhaiteront.
Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 339, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 22, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de supprimer la seconde phrase du second alinéa du texte
présenté par le 2° de l'article 5 pour remplacer par deux alinéas le premier
alinéa du II de l'article L. 322-4-8-1 du code du travail.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Le projet de loi introduit une disposition qui permet de
déduire de la durée maximale autorisée au titre d'un contrat emploi consolidé,
soit cinq ans, le temps passé par le bénéficiaire du contrat au titre d'un
contrat emploi-solidarité ou d'un contrat d'insertion chez le même
employeur.
Cette mesure est de nature à limiter la durée du contrat de travail sur lequel
peut réellement compter le titulaire du contrat emploi consolidé, qui est
souvent une personne connaissant de graves difficultés.
Il semble important de ne pas la priver de la sécurité que peut procurer la
perspective d'un contrat emploi consolidé complet, c'est-à-dire sur cinq ans,
donc sans déduction du temps passé au titre d'un contrat emploi-solidarité
antérieur. C'est pourquoi cet amendement tend à supprimer la disposition
concernée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Une durée de cinq ans passée
chez le même employeur est sans doute suffisante pour construire un projet
professionnel. Comme nous avons ouvert la possibilité, cette fois-ci, d'entrer
dans un contrat emploi consolidé sans être passé auparavant par un contrat
emploi-solidarité, il nous a paru souhaitable d'aligner les règles pour faire
en sorte que la durée maximale soit de cinq ans dans les deux cas.
Cela étant dit, si, au terme de ces cinq ans, le bénéficiaire continue d'être
en situation de grande difficulté, il entre dans les publics qui ont droit à
prétendre à un nouveau contrat emploi-solidarité ou à un nouveau contrat emploi
consolidé. A ce moment-là, il ne s'agit pas d'un avenant au contrat, mais bien
d'un nouveau contrat emploi-solidarité ou contrat emploi consolidé.
Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article additionnel après l'article 5
M. le président.
Par amendement n° 429 rectifié, MM. Belot, Doublet, Blaizot, Arnaud, les
membres du groupe de l'Union centriste et MM. Husson, Rigaudière, Robert,
Besse, Cazalet, César, Blanc, Ostermann, Vinçon et Raffarin proposent
d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est inséré, dans le code du travail, après l'article L. 351-10, un
nouvel article ainsi rédigé :
«
Art. L. ...
- Les chômeurs de longue durée bénéficiaires de
l'allocation de solidarité spécifique peuvent être employés, à temps plein, par
les collectivités territoriales et leurs établissements publics pour des
emplois d'utilité publique.
« Les personnes publiques employeurs versent une rémunération qui est exonérée
des cotisations sociales incombant à l'employeur et qui correspond à la
différence entre le montant du salaire minimum de croissance et le montant de
l'allocation de solidarité spécifique dont le versement est maintenu.
« Le conseil général territorialement concerné peut participer à la
rémunération versée par la personne publique employeur.
« Le montant de l'allocation de solidarité spécifique ne pourra être minoré
pendant la durée du contrat d'emploi.
« Les personnes publiques employeurs ont également la faculté d'adhérer, pour
leurs seuls salariés recrutés en application du premier alinéa du présent
article, au régime prévu à l'article L. 351-4.
« Les conditions d'application du présent article seront fixées à titre
expérimental pour une durée de cinq ans, par décret qui devra intervenir dans
le délai de six mois à compter de la date de publication de la loi. »
« II. - Les pertes de recettes résultant de l'application du paragraphe I sont
compensées par le relèvement, à due concurrence, des droits visés aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Belot.
M. Claude Belot.
Conçu avec les collectifs de chômeurs qui se sont manifestés récemment, cet
amendement se veut extrêmement pratique.
Ni aujourd'hui, ni sans doute demain, l'économie de marché ne sera en mesure
d'absorber un certain nombre de personnes peu qualifiées qui se trouvent, pour
pas mal de temps, en dehors du marché du travail.
Dès lors, la seule solution, c'est un travail public, auprès de collectivités
locales ou d'associations. Il y a là un champ immense d'activités et d'emplois,
qui ne peuvent pas être couverts tout simplement parce que le coût de la
main-d'oeuvre aux conditions normales est trop élevé.
A l'heure actuelle, la plupart de ces personnes reçoivent un minimum social,
qui représente, en moyenne, environ la moitié du SMIC, et bénéficient de
l'ensemble des prestations sociales sans qu'il y ait cotisation, par des voies
diverses, d'aide sociale ou autres. Si nous parvenions à ce que les
collectivités publiques bénéficiant du travail de ces gens donnent l'équivalent
du RMI ou de l'aide sociale qu'elles perçoivent de façon à arriver
approximativement au niveau du SMIC, nous ferions alors oeuvre utile.
Je précise que ce système fonctionne depuis cinq ans dans mon département pour
les RMI et les contrats emploi-solidarité à mi-temps. A ce jour, cela a donné 2
500 emplois pour des gens qui, sans cela, seraient exclus du marché du travail.
Grâce à cela, je rencontre tous les jours des gens heureux d'être comme les
autres.
Madame le ministre, mes chers collègues, j'ai déjà fait voter dans le
département que j'ai l'honneur de présider une somme significative pour que ce
système démarre sur fonds locaux.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
C'est parfait !
M. Claude Belot.
Si l'aide sociale à la personne et l'exonération des charges sociales étaient
maintenues, l'Etat ne subirait aucune perte puisque, actuellement, il ne
perçoit rien et que les collectivités locales prendraient en charge la
différence. Je répète que le public est constitué de personnes ne pouvant ni
aujourd'hui ni demain trouver du travail dans un cadre normal.
Là où j'ai une responsabilité, je me charge de faire démarrer ce système dès
que j'en aurai l'autorisation, et je suis sûr que nombre de mes collègues
feront de même.
(M. Machet applaudit.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise à instaurer un système original
autorisant les collectivités locales à embaucher des titulaires de l'allocation
de solidarité spécifique, lesquels conserveraient leur allocation et
bénéficieraient d'un complément de rémunération versé à hauteur d'une
rémunération pour une activité à temps plein.
Cet amendement soulève quelques interrogations.
Tout d'abord, le coût de l'opération risque d'être relativement élevé pour les
communes, car le montant de l'ASS est de 2 400 francs par mois.
On peut s'interroger également sur les pressions qui seraient exercées sur les
maires, dès lors que le système instaurerait une forme de droit à occuper un
emploi public.
Je me demande s'il ne serait pas plus opportun d'élargir l'utilisation des
crédits départementaux d'insertion, comme nous le proposons par l'amendement n°
103 tendant à insérer un article additionnel avant l'article 79.
C'est en raison de ces interrogations que la commission a décidé de s'en
remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Nous sommes dans une logique où
nous essayons véritablement de réinsérer les personnes en situation de grande
difficulté, notamment celles qui touchent les minima sociaux.
Par conséquent, ou bien les personnes touchant l'allocation de solidarité
spécifique sont en difficulté effective, et elles ont droit aux contrats
emploi-solidarité, aux entreprises d'insertion, etc. - cela coûte d'ailleurs
moins cher aux collectivités locales que le système que vous préconisez,
monsieur Belot, et présente au moins l'avantage de remettre ces personnes dans
une dynamique d'insertion - ou bien vous souhaitez dire par ce biais que tout
chômeur aujourd'hui en fin de droits pourra constituer une main-d'oeuvre à
tarif extrêmement réduit pour les collectivités locales, et vous comprendrez
que, dans ces conditions, le Gouvernement ne puisse vous suivre.
Nous sommes favorables à l'insertion des personnes touchant l'allocation de
solidarité spécifique et des personnes en chômage de longue durée. C'est
pourquoi nous avons maintenu 500 000 contrats emploi-solidarité cette année et
nous vous proposons de créer dans la loi de nouveaux contrats emplois
consolidés pour les personnes qui sont le plus en difficulté.
En revanche, il ne me paraît pas véritablement sérieux de demander à l'Etat de
continuer à assumer la dépense que constitue le minimum social pour que les
collectivités locales puissent utiliser du personnel à moindre coût.
Le Gouvernement émet donc un avis très défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 429 rectifié, repoussé par le Gouvernement et
sur lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 5.
Article additionnel avant l'article 5
bis
M. le président.
Par amendement n° 287, M. Blin et les membres du groupe de l'Union centriste
proposent d'insérer, avant l'article 5
bis
, un article additionnel ainsi
rédigé :
« Les personnes bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, prévu à l'article
2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum
d'insertion, ou de l'allocation de solidarité spécifique prévue à l'article L.
351-10 du code du travail, peuvent accomplir un travail d'intérêt collectif
équivalent à 80 heures par mois, au service d'une collectivité locale ou d'une
association. »
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet.
Le présent amendement a pour objet de rendre leur dignité aux titulaires du
RMI, en les invitant à exercer une activité d'intérêt général au service d'une
collectivité locale ou d'une association.
L'Etat et les collectivités locales consacrent plus de 30 milliards de francs
au revenu minimum d'insertion, sans aucune contrepartie de la part des
bénéficiaires.
Le groupe de l'Union centriste, soucieux de l'insertion des exclus dans le
monde du travail et profondément attaché aux valeurs de dignité de la personne
humaine, a déposé cet amendement visant à inciter les titulaires du RMI à un
retour au travail par une activité d'intérêt général au service d'une
collectivité locale ou d'une association agréée.
Par cette mesure, les titulaires du RMI devront accomplir un travail d'intérêt
collectif équivalent à 80 heures par mois pour continuer à toucher
l'allocation.
Cette mesure proposée par les sénateurs du groupe de l'Union centriste
s'inscrit dans une logique de responsabilisation de nos concitoyens, au
détriment de la logique d'assistance ; elle permettrait également de lutter
indirectement contre le travail clandestin et de réduire les dépenses engagées
au titre des contrats emploi-solidarité.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Si la logique est intéressante - il s'agit de créer un revenu
minimum d'activités, ce qui est l'idéal de l'insertion - la dissociation entre
celui qui financerait le RMI et celui qui emploierait la personne est telle que
la situation sur le plan juridique est assez préoccupante.
Compte tenu de l'enrichissement sans cause qui existerait en faveur des
collectivités employant ces personnes, la commission souhaite le retrait de cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement émet, comme sur
le précédent amendement, un avis défavorable.
M. le président.
Monsieur Machet, l'amendement n° 287 est-il maintenu ?
M. Jacques Machet.
Le groupe de l'Union centriste a beaucoup étudié ce sujet ; c'est donc le
coeur gros que, me rendant aux arguments de M. le rapporteur, je retire
l'amendement n° 287.
J'espère toutefois que l'on pourra pousser la réflexion plus avant, car
l'insertion des exclus renvoie aux valeurs qui s'attachent à la dignité de la
personne humaine, notamment au travail.
M. le président.
L'amendement n° 287 est retiré.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je tiens à remercier M. Machet, car l'adoption de son
amendement aurait pu entraîner des difficultés d'application. Cependant,
assurer la dignité de la personne bénéficiaire d'un minimum social est une
préoccupation dont il nous faut en effet rechercher inlassablement la
satisfaction.
M. Jacques Machet.
Merci, monsieur le rapporteur !
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une
heures quarante, sous la présidence de M. Jean Delaneau.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi d'orientation relatif à la
lutte contre les exclusions.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 5
bis.
Article 5
bis
M. le président.
« Art. 5
bis
. - Les personnes bénéficiaires du revenu minimum
d'insertion prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988
précitée ou de l'allocation de solidarité spécifique prévue à l'article L.
351-10 du code du travail ou de l'allocation de parent isolé prévue à l'article
L. 524-1 du code de la sécurité sociale peuvent cumuler cette allocation avec
les revenus tirés d'une activité professionnelle dans les conditions
suivantes.
« I. - L'article L. 351-20 du code du travail est ainsi rédigé :
«
Art. L. 351-20
. - Les allocations du présent chapitre peuvent se
cumuler avec les revenus tirés d'une activité occasionnelle ou réduite, ainsi
qu'avec les prestations de sécurité sociale ou d'aide sociale dans les
conditions et limites fixées, pour l'allocation d'assurance prévue au 1° de
l'article L. 351-2, par l'accord prévu à l'article L. 351-8, et, pour les
allocations de solidarité mentionnées au 2° du même article L. 351-2, par
décret en Conseil d'Etat. »
« II. - Il est inséré, avant le dernier alinéa de l'article L. 524-1 du code
de la sécurité sociale, un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les rémunérations tirées d'activités professionnelles ou de
stages de formation qui ont commencé au cours de la période de versement de
l'allocation peuvent, selon des modalités fixées par voie réglementaire, être
exclues, en tout ou partie, du montant des ressources servant au calcul de
l'allocation. »
« III. - 1. Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 9 de la
loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 précitée, les mots : "et les rémunérations
tirées d'activités professionnelles ou de stages de formation qui ont commencé
au cours de la période de versement de l'allocation" sont supprimés.
« 2. Il est inséré, après l'article 9 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre
1988 précitée, un article 9-1 ainsi rédigé :
«
Art. 9-1
. - Les rémunérations tirées d'activités professionnelles ou
de stages de formation qui ont commencé au cours de la période de versement de
l'allocation peuvent, selon des modalités fixées par voie réglementaire, être
exclues, en tout ou partie, du montant des ressources servant au calcul de
l'allocation. »
Sur l'article, la parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, cet article 5
bis
du projet de loi constitue, parmi les
dispositions qui ont amélioré le texte initial, une avancée significative,
engendrée de notre point de vue non seulement par l'expérience de près de dix
ans de politique d'insertion, mais aussi par les revendications portées par le
mouvement social.
Lors de l'instauration du revenu minimum d'insertion, nous avions déjà eu
l'occasion de souligner les limites mêmes du dispositif mis en place. Le
caractère différentiel de l'allocation en limitait la portée et posait une
question de caractère systémique : le fait de disposer d'autres revenus ou
d'autres allocations ne risquait-il pas de décourager tout effort d'insertion
des allocataires et de limiter, par conséquent, la nouvelle allocation à n'être
qu'un « filet de sécurité » destiné à un public donné ?
Reconnaissons que le RMI nous a permis d'appréhender le développement de la
précarité et de la pauvreté dans notre pays, développement d'autant plus
profond que le nombre des allocataires n'a cessé de croître, dépassant
désormais le million et représentant plus de 30 milliards de francs de
dépenses.
Force est toutefois de constater que le développement du RMI est et a été
d'autant plus fort que les autres dispositifs existants, destinés à prendre en
compte, pour la solidarité nationale, les besoins des plus démunis et des
personnes privées d'emploi ont, dans la même période, été progressivement mis
en question. Ainsi en est-il, par exemple, des allocations chômage.
La détérioration du niveau de l'emploi dans notre pays a, on le sait, conduit
à l'accroissement du nombre des chômeurs, des privés du droit au travail et,
par voie de conséquence, conduit à la détérioration des comptes de l'assurance
chômage.
On sait quelles dispositions ont été prises pour remédier à ce déséquilibre
comptable !
Après un nouveau profilage des allocations, fondé sur une prise en compte de
la durée moyenne d'acquisition des droits, après l'intervention directe de
l'Etat dans le redressement des comptes de l'UNEDIC, est venu le temps de
l'allocation unique dégressive, allocation qui applique aux droits des chômeurs
le principe du sablier, c'est-à-dire un épuisement d'autant plus accéléré que
se prolongerait la durée d'indemnisation.
La réalité est qu'aujourd'hui la majorité des sans-emploi est privée d'une
allocation UNEDIC et est « mécaniquement » placée sous le régime des minima
sociaux.
Par ce processus, le RMI est donc devenu comme une sorte d'ultime échappatoire
à l'absence totale de ressources issues d'une activité professionnelle.
L'insertion, mission dont on sait qu'elle a été singulièrement dévolue aux
collectivités locales, est d'ailleurs passée au second plan. C'est cette
problématique d'insertion que porte d'ailleurs l'article 55
bis.
Il porte aussi, soit dit en passant, la marque du mouvement social, notamment
de celui qui a rendu aux personnes privées d'emploi, à l'automne dernier, toute
leur dignité.
Prenons donc bien en compte cette relative avancée qu'il constitue, même s'il
pousse vers l'exercice du pouvoir réglementaire, c'est-à-dire vers la
promulgation d'un décret, ce qui aurait pu être la simple modification des lois
existantes.
On aurait ainsi pu faire du RMI une allocation personnelle et non plus
différentielle, inscrite alors dans la loi pour résoudre une partie des
problèmes.
Pour autant, dès lors que l'exercice d'une activité professionnelle, même
réduite, ne fait plus obstacle à l'attribution des allocations versées, nous
nous devons d'appréhender positivement la mesure.
Nous pouvons, en effet, considérer que le processus de retour à l'emploi ou de
formation ainsi enclenché participe, au-delà de toute disposition, d'un
parcours individualisé d'insertion, du retour à la dignité et de la
personnalisation sociale des allocataires.
Des garanties devront encore être offertes à ces personnes pour éviter, par
exemple, de les installer dans une précarité relative ou de les mettre à
disposition d'employeurs désireux de jouer la « déflation sociale compétitive
». Mais nous en reparlerons.
Adoptons donc cet article 5
bis !
M. le président.
Par amendement n° 23, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le premier alinéa de l'article 5
bis
, après les
mots : « du 1er décembre 1988 précitée », d'insérer les mots : « ou de
l'allocation d'insertion prévue à l'article L. 351-9 du code du travail ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise à combler une lacune dans l'énumération
qui figure dans l'alinéa introductif de l'article 5
bis
, inséré sur
l'initiative de M. Le Garrec pour clarifier le dispositif d'incitation au
retour à la vie professionnelle prévu pour les titulaires de minima sociaux.
Il s'agit d'ajouter l'allocation d'insertion, destinée notamment aux détenus
sortant de prison, dans la liste des minima pouvant donner lieu à un cumul
temporaire avec des revenus d'activité professionnelle.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis favorable à cet
amendement, et ce d'autant plus que l'article L. 351-20 du code du travail,
dans sa rédaction actuelle, comme dans celle qui résultera de l'article
5
bis
, vise les bénéficiaires de l'allocation d'insertion. Cela est donc
déjà prévu dans le texte par des renvois. Mais peut-être convient-il de
l'expliciter plus clairement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 24, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose :
A. - Dans le premier alinéa de l'article 5
bis
, après les mots : « L.
351-10 du code du travail », d'insérer les mots : « ou de l'allocation de
veuvage prévue à l'article L. 356-1 du code de la sécurité sociale » ;
B. - En conséquence, dans le même alinéa, de remplacer les mots : « du code de
la sécurité sociale », par les mots : « dudit code ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise, c'est une novation, à ajouter le montant
de l'allocation de veuvage à la liste des minima sociaux ouvrant droit à
l'intéressement au retour à l'activité professionnelle.
Le montant de l'allocation de veuvage s'élève à 3 073 francs la première
année, à 2 019 francs la deuxième année et à 1 537 francs la troisième année.
Il est important, même si le plafond de ressources au titre de l'allocation est
un peu plus élevé que celle-ci, que les personnes concernées puissent compter
sur l'intégralité du montant de leur allocation lorsqu'elles reprennent une
activité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je comprends tout à fait le
souci de la commission. Mais, je l'ai dit tout à l'heure, nous sommes en train
de travailler à une réforme de l'allocation de veuvage pour qu'elle soit à la
fois plus favorable et moins complexe pour les intéressées. Je préférerais donc
que nous étudions le mécanisme d'intéressement dans le cadre de cette
réforme.
Cela dit, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 340, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, au premier alinéa de l'article 5
bis
, après les mots : « peuvent cumuler », d'insérer les mots : « durant
une période d'au moins un an ».
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
L'article 5
bis
, mon ami Guy Fischer l'a souligné, traduit une avancée
substantielle pour les personnes disposant de revenus issus de la solidarité
nationale, et singulièrement pour les allocataires du RMI.
Le RMI, comme d'ailleurs les autres revenus concernés par les dispositions de
l'article, doit effectivement sortir du rôle qu'il a pu remplir dans les faits,
celui d'être une étape non d'un parcours d'insertion, mais plutôt d'un parcours
d'exclusion.
Le retour à la vie active, qui, au-delà des moyens financiers qu'il permet de
dégager, constitue pour les allocataires le retour à leur dignité et leur
reconnaissance sociale, doit être facilité par tous les moyens.
La raison d'être ou, en tout cas, la finalité même des revenus visés par
l'article, est en fait de disparaître.
Dans un certain sens, nous pourrions même considérer avoir atteint les
objectifs fixés par ce projet de loi de lutte contre les exclusions le jour où
le revenu minimum d'insertion aura disparu, où nous ne serons plus contraints
d'aider les primo-demandeurs d'emploi, au travers de l'allocation d'insertion,
à mettre en oeuvre une démarche de recherche d'activité.
Notre amendement tend en fait à inscrire le processus de retour à la vie
active sur des bases précises, permettant à chaque allocataire de gérer, au
plus près de son propre parcours, sa démarche de retour à l'emploi ou de
formation.
Complétant le dispositif que prévoit l'article 5
bis,
il dispose en
effet que le cumul entre allocation et activité professionnelle réduite, ou
formation, soit possible sur une durée au moins égale à un an, délai que chaque
allocataire pourra utiliser pour déterminer, notamment avec les travailleurs
sociaux qui le suivent, les phases de son propre parcours.
Attendu que le rythme de chaque parcours individuel doit être respecté et pris
en compte, nous devons retenir ce principe de cumul minimal d'un an.
On doit, par exemple, apprécier le fait que, dans une démarche de formation,
c'est parfois dix-huit ou vingt-quatre mois qui sont nécessaires pour parvenir
au terme d'un processus.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à
adopter cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La précision que proposent les auteurs de cet amendement, si
elle relève du domaine réglementaire, n'en est pas moins intéressante. Un cumul
d'un an minimum pour l'intéressement semble correspondre au souhait du
Gouvernement annoncé dans le programme du 4 mars.
Dans ces conditions, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis quelque peu ennuyée par
cet amendement, d'abord parce qu'il correspond à un engagement du Gouvernement,
ensuite parce que des décrets permettront effectivement un cumul pendant une
durée d'un an du revenu minimum d'insertion et d'une autre rémunération, mais
sous conditions de ressources. En effet, une personne au chômage qui,
subitement, retrouvera un emploi payé 40 000 francs par mois ne pourra pas
bénéficier du cumul. On ne peut donc pas écrire que tout RMIste pourra cumuler
pendant un an.
Par ailleurs, la période fixée est bien d'un an pour la plupart des minima, en
commençant à 100 % pendant trois mois, puis selon une dégressivité.
Ce sera le cas pour l'allocation de solidarité spécifique, l'ASS, et pour
l'allocation de parent isolé, l'API. Ce sera exactement un an dès lors qu'on
reste en dessous des conditions de ressources.
Mais, pour le RMI, cela risque effectivement de dépasser un an puisque c'est
une gestion trimestrielle : si le trimestre commence juste avant la fin de la
période d'un an, on remplit encore les conditions : on touchera l'allocation
jusqu'à la fin du trimestre.
Tout cela pour dire qu'il est extrêmement compliqué de résumer toutes ces
situations en une phrase. En effet, l'expression « au moins un an » généralisée
à tous les cas est fausse si le bénéficiaire repasse au-dessus du plafond de
ressources et vraie pour les allocataires du RMI, mais non de l'ASS et de
l'API, pour lesquels ce sera douze mois en tout état de cause.
Je vous confirme de nouveau que les décrets prévoiront le cumul pendant un an
de toutes les allocations dès lors que l'intéressé reste en dessous du plafond
de ressources, en commençant par trois mois à 100 %, puis de façon dégressive
jusqu'au terme de cette période de douze mois.
Nous sommes donc d'accord sur l'objectif. Mais il est un peu compliqué de le
traduire en une formule aussi simple, alors qu'il nous faut donner des
barèmes.
Madame le sénateur, après ces explications, je vous demande de bien vouloir
accepter de retirer cet amendement, dont j'approuve l'esprit et, bien
évidemment, l'objectif.
M. le président.
Madame Terrade, l'amendement n° 340 est-il maintenu ?
Mme Odette Terrade.
Le groupe communiste républicain et citoyen a entendu les explications de Mme
le ministre : il retire son amendement.
M. le président.
L'amendement n° 340 est retiré.
Par amendement n° 25, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, après les mots : « activité professionnelle » de rédiger
comme suit la fin du premier alinéa de l'article 5
bis
: « salariée ou
indépendante dans les conditions prévues aux I à III. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de garantir que les circulaires
administratives qui mettront en oeuvre les dispositifs d'intéressement
prendront équitablement en compte la situation des créateurs d'entreprise ou
des personnes qui choisissent d'exercer une activité indépendante. Au cours de
leur première année d'activité, celles-ci ont plus particulièrement besoin de
la sécurité que peut offrir le maintien temporaire du minimum social auquel
elles avaient droit.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis favorable à cet
amendement, sous réserve que le mot « indépendante » soit remplacé par
l'expression « non salariée ». Cela permettrait de prendre en compte des
personnes qui sont en formation professionnelle et qui ne sont pas couvertes
par le terme « indépendante ».
M. le président.
Monsieur le rapporteur, acceptez-vous de rectifier l'amendement ainsi que vous
le suggère Mme le ministre ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 25 rectifié, présenté par M. Seillier,
au nom de la commission des affaires sociales, et tendant, après les mots : «
activité professionnelle », à rédiger comme suit la fin du premier alinéa de
l'article 5
bis
: « salariée ou non salariée dans les conditions prévues
aux I à III. »
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 25 rectifié.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Cette intervention se situe dans la ligne de mes interventions précédentes sur
les CES.
Je ne comprends toujours pas les raisons pour lesquelles nous voulons limiter
strictement dans le temps cette possibilité de cumul du RMI et des revenus
d'une activité salariée.
Lors de la discussion du projet de loi sur les emplois-jeunes, le Gouvernement
a lui-même souhaité jouer sur la durée pour donner aux jeunes le maximum de
chances d'entrer dans la vie active.
Nous avons affaire ici à des personnes particulièrement défavorisées, qui sont
dans une situation difficile, et on limite dans le temps la possibilité de
cumul, diminuant d'autant leurs chances d'intégration ! Je ne comprends pas
cette obstination à vouloir limiter le cumul dans le temps ! Il conviendrait
d'y réfléchir.
J'espère que, au moment où le bilan sera fait, on pourra revoir les
dispositions législatives actuelles pour aller beaucoup plus loin.
De surcroît, et je termine par ce point, le dispositif tel qu'il est imaginé
aujourd'hui, est beaucoup moins coûteux pour la collectivité nationale que ne
le sont les emplois-jeunes.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 26, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de compléter
in fine
l'article 5
bis
par deux
paragraphes ainsi rédigés :
« IV. - Les personnes admises au bénéfice des dispositions de l'article L.
351-24 du code du travail et qui perçoivent l'allocation de revenu minimum
d'insertion, l'allocation de parent isolé, l'allocation d'insertion ou
l'allocation de veuvage ont droit au maintien du versement de leur allocation
dans des conditions prévues par décret.
« V. - Les organisations syndicales représentatives de salariés et les
organisations représentatives d'employeurs signataires de l'accord prévu à
l'article L. 351-8 du code du travail sont invitées à négocier, d'ici le 31
décembre 1999, l'amélioration des conditions dans lesquelles les bénéficiaires
de l'allocation d'assurance prévue au 1° de l'article L. 351 peuvent cumuler
cette allocation avec les rémunérations tirées d'activités professionnelles ou
de stages de formation ou avec les revenus tirés de la création ou de la
reprise d'une entreprise lorsqu'ils bénéficient des dispositions de l'article
L. 351-24 du code du travail. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement comprend deux paragraphes.
Le premier prévoit que, s'agissant de la prime aux créateurs d'entreprise
prévue à l'article L. 351-24 du code du travail, le montant de celle-ci n'est
pas pris en compte pour le calcul du revenu ouvrant droit au RMI, à
l'allocation de parent isolé ou à l'allocation de veuvage.
Le second paragraphe invite les partenaires sociaux au sein de l'UNEDIC à
ouvrir une négociation pour harmoniser les règles de versement de l'allocation
unique dégressive en cas de reprise d'une activité professionnelle sur les
règles mises en oeuvre pour les minima sociaux relevant de l'Etat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le paragraphe IV proposé par la
commission pose quelques difficultés dans un certain nombre de cas : par
exemple, pour l'ASS ou pour l'allocation de parent isolé, il est déjà possible
de bénéficier d'une aide à la création d'activité et d'un cumul, en cas de
reprise d'activité, en règle générale d'une durée de six mois.
En revanche, en ce qui concerne le RMI, son mode de calcul, lorsqu'on crée une
activité, est tel que l'on s'adapte à la déclaration annuelle réalisée sur les
revenus d'activité. Cela signifie en fait que le cumul a lieu en règle générale
pendant un an.
En conséquence, le texte proposé entraînerait pour les RMistes une situation
plus défavorable que celle qu'il connaissent aujourd'hui. Dans ces conditions,
je ne crois pas souhaitable d'insérer dans le texte ce paragraphe IV.
S'agissant du paragraphe V, je partage complètement votre point de vue,
monsieur le rapporteur, à savoir que les partenaires sociaux doivent mettre en
place le cumul d'un revenu de remplacement et d'un revenu tiré d'une activité
professionnelle, comme nous allons le faire dans cette loi pour l'ensemble des
minima sociaux.
J'ai d'ailleurs écrit à la présidente de l'UNEDIC pour lui demander de bien
vouloir travailler sur ce thème et d'essayer de trouver des règles conformes à
celles que nous mettons en place pour les minima sociaux.
Je ne suis pas sûre qu'il soit souhaitable, dans une loi, d'adresser une
injonction aux partenaires sociaux, même si, je le répète, je partage
totalement l'objectif fixé par le paragraphe V proposé par la commission.
En conséquence, je ne suis pas favorable à l'amen-dement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 26.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Bien sûr, je voterai l'amendement n° 26. Mais je voudrais saisir cette
occasion pour évoquer un amendement de M. Neuwirth qui n'a pas été soutenu et
qui était relatif au cumul des revenus professionnels avec l'allocation aux
adultes handicapés.
Je veux, en effet, attirer l'attention de Mme la ministre sur un problème
qu'il est urgent de résoudre : du fait des progrès de la trithérapie, de plus
en plus de malades atteints du sida qui perçoivent l'allocation aux adultes
handicapés peuvent travailler et être réinsérés peu à peu.
Madame la ministre, vous devriez étudier dès maintenant la possibilité de
permettre aux sidéens de se réinsérer par le travail et, peut-être, de cumuler
un salaire et une allocation. On ne sait jamais si leur état est stabilisé. On
peut donc admettre qu'ils n'abandonnent pas cette planche de sécurité. En
revanche, il faudrait inciter ces hommes et ces femmes à travailler dans des
conditions normales, plutôt que, comme c'est souvent le cas, « au noir ».
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Je comprends le souci qui anime M. le rapporteur ; je serai néanmoins amenée à
voter contre l'amendement qu'il vient de défendre.
S'agissant du paragraphe IV, nous devons écouter avec attention les arguments
de Mme la ministre, à qui je fais totalement confiance sur le plan technique,
comme nous tous sûrement. Si ce paragraphe réduit les avantages des
bénéficiaires du RMI, on ne peut pas l'adopter, ce serait contraire à l'esprit
qui nous anime.
En ce qui concerne le paragraphe V, il serait effectivement souhaitable de
pousser les partenaires sociaux à trouver une solution. Mais, mes chers
collègues, j'attire votre attention sur la difficulté d'atteindre cet objectif
avec un tel libellé, qui montre à quel point l'auteur de l'amendement est
circonspect.
« Les organisations syndicales... sont invitées » - on utilise dans un texte
de loi le verbe « inviter » ! - « à négocier l'amélioration des conditions dans
lesquelles les bénéficiaires... peuvent cumuler... » Vous voyez combien le
texte est flou. Il l'est parce que ses auteurs sentent bien à quel point, si
j'ose dire, ils marchent sur des oeufs.
Alors, s'il vous plaît, ne cassons pas les oeufs ! Conservons le principe,
mais n'introduisons pas cet élément dans le texte, et encore moins dans une
rédaction floue.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je prends la parole pour souligner que cet amendement n° 26 me convient tout à
fait, même s'il est peut-être possible d'en améliorer la rédaction.
De ce point de vue, Mme Dusseau a fait une remarque judicieuse en disant que
nous ne sommes pas suffisamment directifs pour que cet amendement produise des
effets sur le terrain.
Je reviens à ce propos à une idée qui avait été approuvée par la Haute
Assemblée : la possibilité donnée aux partenaires sociaux d'autoriser ceux qui
bénéficient d'indemnités versées par les ASSEDIC de cumuler celles-ci avec un
revenu salarié.
A l'heure actuelle, de nombreux chômeurs renoncent à exercer une activité
professionnelle parce que le montant de l'indemnité de chômage est nettement
supérieur au revenu qu'ils obtiendraient en travaillant. Il faut permettre à
ces personnes de retrouver le chemin de la vie active et donner la possibilité
à un chômeur qui perçoit par exemple 7 000 ou 8 000 francs par mois
d'indemnités de chômage d'exercer un emploi dont la rémunération mensuelle est
voisine de 3 000 francs.
Aujourd'hui, cette personne préfère rester chez elle, éventuellement
travailler « au noir », et conserver son allocation plutôt que d'exercer une
activité professionnelle qui ne lui rapportera que 3 000 francs.
Que cette personne perçoive une indemnité différentielle de 5 000 francs pour
conserver un revenu global correspondant à l'indemnité des ASSEDIC, c'est
l'idée que, je pense - mais je me trompe peut-être - M. le rapporteur veut
promouvoir en invitant les organisations syndicales et les partenaires sociaux
à se réunir pour mettre en place un tel dispositif.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Concernant le paragraphe IV de l'amendement n° 26, il est bon en effet que les
allocataires de minima sociaux puissent conserver leur allocation lorsqu'il
créent leur propre entreprise, à l'instar des salariés rémunérés au SMIC.
Avec le paragraphe V, il s'agit d'inviter les partenaires sociaux à négocier.
Compte tenu du fait qu'en définitive le texte n'est qu'une invitation, nous le
voterions s'il y avait un vote par division.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je dois dire que j'ai été très
sensible aux propos de M. Chérioux.
Une réponse immédiate est déjà fournie dans la loi, réponse qui, si elle n'est
pas suffisante, a le mérite d'exister : les droits à l'allocation aux adultes
handicapés sont ouverts pour une période qui va du 1er juillet au 30 juin de
l'année suivante sur les revenus de l'année passée. Cela signifie que si une
personne trouve un travail un mois après - comme c'est d'ailleurs le cas pour
le RMI, comme je l'ai évoqué tout à l'heure - elle continue à bénéficier de
l'allocation aux adultes handicapés.
Voilà qui répond en partie - en partie seulement, je le reconnais - à votre
question, monsieur le sénateur.
Cela dit, je suis sensible à vos remarques et je pense que ce sujet mérite
effectivement réflexion.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Dans le paragraphe IV, j'ai effectivement pris la précaution
de prévoir que la comptabilité des allocations se ferait dans des conditions
prévues par décret.
J'ai bien conscience qu'il s'agit peut-être d'un travail techniquement très
compliqué. C'est pourquoi la mesure n'est pas d'application stricte,
immédiate.
Avec le paragraphe V, la commission met l'accent sur un problème, puisque
l'allocation unique dégressive, l'AUD, en cas de cumul, est moins intéressante,
notamment pour les personnes relevant d'autres minima sociaux.
Le Parlement peut tout à fait indiquer qu'il a remarqué une anomalie et
inviter avec courtoisie les partenaires sociaux à négocier. Ce n'est pas, à mes
yeux, sortir de notre rôle que de procéder ainsi.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Pour faire droit aux nuances qui se sont exprimées sur l'un et l'autre
paragraphes de l'amendement n° 26, je vais faire procéder à un vote par
division.
Je mets aux voix le paragraphe IV, repoussé par le Gouvernement.
(Ce texte est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le paragraphe V, repoussé par le Gouvernement.
(Ce texte est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'ensemble de l'amendement n° 26.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5
bis,
modifié.
(L'article 5
bis
est adopté.)
Articles additionnels après l'article 5
bis
M. le président.
Par amendement n° 27 rectifié, M. Seillier, au nom de la commission des
affaires sociales, propose d'insérer après l'article 5
bis
, un article
additionnel ainsi rédigé :
« A titre expérimental et à partir du 1er août 1998, tout bénéficiaire du
revenu minimum d'insertion depuis plus de deux ans peut dans le cadre d'un
contrat initiative-emploi à mi-temps prévu à l'article L. 322-4-2 du code du
travail bénéficier d'une convention de revenu minimum d'activité conclue entre
l'employeur, la commission locale d'insertion et le bénéficiaire.
« Pendant la durée de la convention, le bénéficiaire a droit au maintien d'une
fraction de l'allocation de revenu minimum d'insertion calculée en excluant la
moitié du montant de sa rémunération du montant des ressources servant au
calcul de l'allocation.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du
présent article. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise à relancer l'insertion des titulaires du
RMI de longue durée dans l'économie marchande.
Il s'agit d'une alternative au dispositif d'intéressement examiné précédemment
et dont la durée est limitée à un an au maximum.
L'idée est de permettre aux personnes qui sont au RMI depuis plus de deux ans
d'accepter un CEI à mi-temps et de bénéficier pendant la durée du contrat d'une
allocation complémentaire versée par l'Etat et à peu près égale à la moitié de
l'allocation du RMI prévue pour une seule personne.
Cet amendement permet d'inciter au retour dans le monde du travail de
personnes qui ne souhaitent pas, dans un premier temps, un emploi à temps
complet. C'est un mécanisme de dynamisation des dépenses passives au titre du
RMI. C'est pourquoi le dispositif est mis en oeuvre dans le cadre d'une
convention dite de revenu minimum d'activité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis défavorable à cet
amendement, je l'ai d'ailleurs déjà dit dans mon exposé introductif.
J'y suis d'autant plus défavorable que l'incitation à la reprise d'activité
que le Gouvernement propose de mettre en place est plus favorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 27 rectifié.
Mme Odette Terrade.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
« Chassez le naturel, il revient au galop », dit un proverbe bien connu.
Cette vérité populaire, nous sommes autorisés à l'appliquer à cet amendement
de la commission des affaires sociales, qui prévoit de renverser en quelque
sorte l'ordre des priorités et de mettre en place une nouvelle source
d'optimisation des coûts salariaux.
L'article 5
bis
du présent projet de loi a, en effet, comme fondement
et comme principe essentiel de faire en sorte que, pour une fois, ce soit à
partir de la situation et du vécu même des personnes privées d'emploi que l'on
tente de mettre en place une solution de nature à résoudre leurs
difficultés.
Or voilà qu'avec cet amendement portant article additionnel après l'article 5
bis
la commission des affaires sociales nous propose de revenir aux
erreurs traditionnelles de la politique de l'emploi de ces dernières années,
celles qui consistent à partir non de la situation des chômeurs, mais plutôt du
point de vue de ceux qui sont censés les embaucher, à savoir les employeurs.
Il est vrai que la majorité de la commission des affaires sociales a, lors de
la création du contrat initiative-emploi, manifesté une volonté affirmée de
voir cette procédure prendre toute sa place et être généralisée au plus grand
nombre possible d'entreprises et d'emplois.
Elle a d'ailleurs, dans ce cadre, soutenu l'ensemble des mesures qui ont «
facilité » la mise en place du CIE, notamment la hausse de deux points du taux
normal de la taxe sur la valeur ajoutée.
Ainsi, avec le CIE et l'effet d'aubaine dont les salariés ont immédiatement
été les victimes, avec la pression sur les salaires que ne peut manquer
d'occasionner tout dispositif qui tend à aider davantage l'employeur quand il
rémunère le plus près possible du SMIC, la commission des affaires sociales
s'est engagée en faveur de la hausse de la TVA dont je ne peux manquer de
rappeler qu'elle pèse plus lourd sur les revenus faibles ou modestes que sur
les revenus les plus élevés.
En clair, pour que certains chômeurs puissent retrouver une activité
professionnelle, il fallait, en 1995, que les salariés acceptent de supporter
une ponction plus forte sur leur consommation courante.
Nous ne croyons pas, mesdames, messieurs les sénateurs, que la lutte contre
les exclusions passe par un reprofilage ou par une relance des dispositifs
d'aide à l'emploi, dont la philosopie est d'aider les employeurs avant d'aider
les personnes privées de travail.
Nous ne voterons donc pas cet amendement n° 27, qui, sous une forme à peine
retouchée, nous « repasse le même plat » que celui que nous avons refusé en
1995 et dont nous continuons de mettre en question l'opportunité.
Nous pensons même qu'il est aujourd'hui indispensable de faire un véritable
bilan de la dépense publique pour l'emploi et d'avoir ensuite le courage de
réfléchir à la réaffectation des crédits qui peuvent y être consacrés.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Pour répondre à Mme la ministre, je veux souligner que, si ce
mécanisme d'intéressement peut apparaître comme moins favorable que celui qui
est proposé sur son initiative, il ne supprime pas ce dernier.
C'est une autre modalité qui vient enrichir la panoplie offerte pour la
réinsertion et la remise au travail, et qui correspond à l'activation des
dépenses passives du RMI.
Cette mesure est, certes, limitée à 50 % du RMI, mais sur deux ans, alors que
le mécanisme d'intéressement gouvernemental, qui n'est pas, je le répète,
supprimé par notre amendement, ne porte que sur un an.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 5
bis
.
Par amendement n° 28, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après l'article 5
bis,
un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter du 1er août 1998, les embauches de personnes titulaires
depuis deux ans au moins du revenu minimum d'insertion prévu à l'article 2 de
la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 ou de l'allocation de solidarité
spécifique prévue à l'article L. 351-10 du code du travail ou de l'allocation
de parent isolé prévue à l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale
ouvrent droit, pendant la durée du contrat et au maximum pour cinq ans, à
exonération du paiement des cotisations patronales au titre des assurances
sociales, des accidents du travail et des allocations familiales dans la limite
des cotisations afférentes à la rémunération ou la partie de la rémunération
égale au salaire minimum de croissance.
« II. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant
du I est compensée à due concurrence par une taxe additionnelle aux droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise également à faciliter l'insertion des
titulaires de minima sociaux dans les entreprises du secteur marchand. Il
prévoit une exonération totale des charges sociales patronales pendant une
durée de cinq ans dès lors que l'entreprise embauche des titulaires du RMI, de
l'allocation de solidarité spécifique ou de l'allocation de parent isolé depuis
plus de deux ans.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis défavorable à cet
amendement, qui crée des effets d'aubaine tout à fait importants en faissant
passer l'exonération de charges de un an à cinq ans, dans une période où la
croissance revient et où les embauches se font de manière plus naturelle.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 28.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
En partant d'une véritable question, celle de l'emploi, et plus précisément
celle du retour à l'activité professionnelle des personnes privées du droit au
travail, on nous propose une solution que je considère pour le moins éculée,
celle de la déflation salariale compétitive.
Il nous faut porter un regard particulier sur les mesures qui ont pu être
prises dans le passé en matière d'emploi et, notamment, sur l'ensemble des
mesures qui tendaient à un objectif bien connu : l'allégement du coût du
travail.
Dans le récent débat sur la réduction du temps de travail, nous avons déjà eu
l'occasion de souligner que nous ne jugions pas, à l'expérience, que la
pratique consistant à alléger de manière systématique les coûts salariaux était
nécessairement la plus efficace.
Nous pensons même, eu égard, par exemple, aux taux réels qui grèvent les
dettes financières de court ou de moyen terme des entreprises de notre pays,
qui n'ont pas toutes la même capacité d'autofinancement, que la focalisation
sur les coûts salariaux occulte la nécessaire réflexion et la nécessaire action
sur les autres coûts supportés par les entreprises de production.
La déflation salariale a de nombreux autres défauts : outre qu'elle mobilise
les ressources publiques, par la voie de la dépense budgétaire et des
compensations de cotisations sociales, elle tend à les raréfier
structurellement parce qu'elle favorise la pratique de basse rémunération,
accompagnée de la déqualification des salariés.
Nous pouvons même nous demander si notre pays aurait une dette publique aussi
importante s'il avait modifié, ces dernières années, ses choix en matière de
politique de l'emploi.
En effet, nous sommes bien obligés de constater que c'est depuis 1993 que la
dette publique a connu la plus forte augmentation en valeur absolue et que
c'est notamment à compter de la loi quinquennale pour l'emploi, qui a, en
quelque sorte, théorisé sur la réduction des coûts salariaux et sur la
déflation salariale, que ce processus s'est enclenché.
M. Alain Vasselle.
C'est la conséquence de la gestion précédente !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
L'article additionnel que vous nous proposez d'adopter ce soir n'est en fait
que la reprise de dispositions figurant dans la loi quinquennale de 1993.
D'aucuns ici - mais également en d'autres enceintes - font preuve d'une grande
imagination quand il s'agit de tirer vers le bas les garanties des salariés.
Nous sommes désolés de vous le dire, mais force est de constater que ce sont
toujours les mêmes qui sont favorisés ! Aussi, au vu de l'expérience connue
aujourd'hui, nous ne pouvons pas voter cet amendement.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Nous voterons contre cet amendement.
En effet, les exonérations de charges sociales
stricto sensu
sont
passées de 11,6 milliards de francs en 1994 à 43,7 milliards de francs en 1998,
sans que l'on puisse mesurer leur effet tangible sur les créations
d'emplois.
Il convient donc de s'engager dans une autre voie, comme le fait le
Gouvernement, et de prévoir, par exemple, le passage de la ristourne
progressive de 1,33 à 1,30 SMIC.
L'amendement n° 28 témoigne, à notre sens, d'une confusion entre la nécessité
reconnue par tous de baisser le coût du travail indirect, qui pèse sur les
emplois à faible valeur ajoutée, et l'idée que la baisse des charges est
créatrice d'emplois.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Je rappelle que nous
débattons d'un texte qui vise à combattre l'exclusion, dont le chômage est sans
doute aujourd'hui la cause principale.
Dès lors, comment pourrions-nous ne pas tenter de remettre au travail dans des
conditions décentes les personnes qui vivent mal avec des minima sociaux ?
S'il est un texte qui se prête vraiment à une opération de cette nature, c'est
bien celui-ci. Il s'agit de chercher à remettre au travail un certain nombre de
personnes qui font partie de la France fragilisée, qui restent au bord du
chemin.
Le fait de s'intéresser aux allocataires des minima sociaux, qu'il faudrait
d'ailleurs - Mme le minnistre l'a confirmé - harmoniser un jour de manière à
éviter le chevauchement de trente-six systèmes, le fait d'essayer de les
remettre au travail, me paraît l'un des enjeux essentiels de ce texte. Sinon, à
quoi bon parler d'insertion par l'économie ? Autant créer des comités, autant
faire des conciliabules, et reconnaître qu'il ne se passe finalement rien.
Par ailleurs - Mme le ministre le sait aussi bien que moi - quand il y a
reprise de la croissance, ce ne sont évidemment pas les chômeurs de longue
durée et les titulaires du RMI que l'on va chercher ! Ce sont les jeunes
diplômés que l'on va chercher en premier ! Ce sont les chômeurs de fraîche
date.
M. Alain Vasselle.
Tout à fait !
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Puis vient alors le
tour des gens qualifiés. Il faut vraiment une croissance durable et de très
forte ampleur pour que les chômeurs de longue durée et les bénéficiaires des
minima sociaux puissent en profiter.
Par conséquent, cet amendement me semble bien à sa place dans ce texte relatif
à la lutte contre l'exclusion.
(Applaudissements sur les travées des
Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 5
bis.
Par amendement n° 479, MM. Vasselle, Ostermann, Chérioux et Doublet proposent
d'insérer, après l'article 5
bis,
un article additionnel ainsi rédigé
:
« L'article 189-2 du code de la famille et de l'aide sociale est ainsi rédigé
:
«
Art. 189-2. -
Dans le cas visé au 1° de l'article 189-1, le maire et
le président du centre communal ou intercommunal d'action sociale de la commune
de résidence de l'intéressé transmettent, à tout moment, au président du
conseil général, les éléments d'information dont ils disposent sur les
ressources et la situation de famille du demandeur ou du bénéficiaire de l'aide
médicale ainsi que leur avis quant à l'octroi d'une telle aide.
« Lorsque le dossier du demandeur ou du bénéficiaire de l'aide médicale est
instruit par un autre organisme que le centre communal ou intercommunal
d'action sociale de la commune de résidence de l'intéressé, il est transmis
pour avis au maire et au président du centre communal ou intercommunal d'action
sociale de la commune de résidence de l'intéressé.
« Avant de se prononcer sur toute demande d'admission à l'aide médicale d'une
personne bénéficiaire du revenu minimum d'insertion, le président du conseil
général est tenu de recueillir l'avis du maire de la commune de résidence de
l'intéressé.
« L'intéressé est tenu informé des éléments le concernant qui ont été transmis
en application du présent article. »
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Avec votre autorisation, monsieur le président, je souhaiterais présenter les
deux amendements n°s 479 et 480.
M. le président.
J'appelle donc en discussion l'amendement n° 480, présenté par MM. Vasselle,
Ostermann et Doublet et visant à insérer, après l'article 5
bis,
un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le cinquième alinéa de l'article 12 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre
1988 est ainsi rédigé :
« Les demandes recueillies sont immédiatement enregistrées au secrétariat de
la commission locale d'insertion dans le ressort de laquelle réside
l'intéressé. Dès leur réception, elles sont transmises au président du centre
communal ou intercommunal d'action sociale de la commune de résidence de
l'intéressé si la demande n'a pas été déposée auprès de ce centre. Le président
du centre communal ou intercommunal d'action sociale de la commune de résidence
transmet au représentant de l'Etat dans le département les éléments
d'information dont il dispose sur les ressources et la situation de famille de
l'intéressé, sur sa situation au regard de l'insertion ainsi que son avis quant
à l'opportunité de l'octroi de l'allocation de revenu minimum d'insertion. Si
cet avis n'a pas été donné dans un délai d'un mois après transmission de la
demande, il est réputé être favorable. L'intéressé est tenu informé des
éléments le concernant, transmis par le président du centre communal ou
intercommunal d'action sociale de sa commune de résidence. »
La parole est à M. Vasselle, pour présenter ces deux amendements.
M. Alain Vasselle.
Les amendements n°s 479 et 480 ont la même finalité, même s'ils n'ont pas
exactement le même objet.
Le premier amendement concerne l'aide médicale, qui est aujourd'hui
systématiquement accordée aux bénéficiaires du RMI. L'amendement vise à faire
en sorte que cette aide médicale soit accordée non plus de manière automatique
mais après avis du maire.
J'ai déjà développé les arguments qui ont justifié le dépôt de ces
amendements. La commission les a bien compris, et je pense que M. le rapporteur
fera connaître dans un instant le sentiment plutôt favorable de la commission à
leur égard.
L'amendement n° 480 a pour objet de solliciter l'avis du maire avant que ne
soit accordé le RMI. Je ne développerai pas le sujet plus avant. Si besoin en
était, je m'en expliquerais davantage au moment d'expliquer mon vote.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 479 et 480 ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission a considéré que ces amendements entraîneraient
une revalorisation du rôle, un peu oublié, des centres communaux d'action
sociale. Aucune sanction n'est prévue suite aux observations qu'ils peuvent
faire dans l'instruction des dossiers.
Elle a donc émis un avis favorable sur ces deux amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est défavorable
à ces deux amendements, qui visent à revenir sur des droits acquis
automatiquement : l'aide médicale gratuite, fondée aujourd'hui sur un seul
critère objectif de ressources, et le RMI, fondé, lui aussi, sur un critère de
ressources, mais aussi sur l'âge et des critères familiaux.
Aujourd'hui, c'est au président du centre communal d'action sociale de
transmettre au président du conseil général les éléments d'information
concernant les ressources et la situation de famille du demandeur ou du
bénéficiaire de l'aide médicale.
L'idée d'étendre ce droit au maire, qui pourrait formuler un avis, me paraît
extrêmement dangereuse : d'abord, parce que nous quittons les critères
objectifs pour un avis tout à fait subjectif ; ensuite, parce que cette
procédure ferait courir des risques importants de discrimination, voire de mise
en cause du respect du secret médical.
Enfin, il me semble que le fait de requérir cet avis préalable sur tous les
dossiers retardera les procédures d'admission à l'aide médicale.
En ce qui concerne l'amendement n° 480, je redirai mon étonnement à l'idée
qu'un maire puisse donner un avis sur une situation qu'il s'agit de constater,
en prenant en compte les ressources, la composition de la famille et l'âge des
bénéficiaires.
Il s'agit là d'une remise en cause de deux droits essentiels pour les exclus :
le droit au RMI et le droit à l'aide médicale gratuite, qui sera d'ailleurs
élargie à l'occasion de la mise en place de la couverture maladie
universelle.
Je suis donc tout à fait opposée à ces deux amendements.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Ne dramatisons pas ! Le bénéficiaire du RMI a bien évidemment
automatiquement droit à l'aide médicale gratuite. Il ne s'agit que d'informer
le maire qui a, lui, le droit de connaître les bénéficiaires du RMI dans sa
commune.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 479.
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Je suis hostile à cet amendement. Je suis d'ailleurs frappée de voir que M. le
rapporteur, en reprenant la parole, a volontairement minimisé le texte qu'il a
rédigé puisqu'il a remplacé les mots « transmettre pour avis » par le verbe «
informer ». Or, chacun de nous connaît très bien la différence qui existe entre
les deux expressions.
Dans chacun des paragraphes de cet amendement figure l'obligation pour le
maire de communiquer les informations dont il dispose sur les ressources de tel
ou tel ménage. Quand on connaît le travail que les caisses d'allocations
familiales sont conduites à accomplir compte tenu de la quantité de
renseignements, de dossiers et de papiers demandés, on est pour le moins étonné
que le maire puisse, lui, donner des renseignements sur les ressources des
ménages.
L'amendement prévoit que le dossier de demande d'aide médicale est transmis
pour avis au maire et au président du CCAS. Mais j'aimerais savoir ce que les
auteurs de l'amendement envisagent pour le cas où l'avis serait négatif. Car on
ne peut présumer que l'avis sera positif. Si l'on transmet pour avis, il faut
envisager deux possibilités : un avis positif ou un avis négatif.
Dès lors, mes chers collègues, il vous faut aller jusqu'au bout de votre
logique et modifier votre amendement en précisant que le maire peut s'opposer à
l'octroi de l'aide médicale aux bénéficiaires du RMI. J'ai cru comprendre que
tel n'était pas le voeu de M. le rapporteur mais j'affirme que c'est bien ce
qui est induit par l'amendement.
L'adopter reviendrait donc à mettre le doigt dans un engrenage très
dangereux.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
A travers l'amendement n° 479, MM. Vasselle, Doublet, Ostermann et Chérioux
nous posent une question assez inattendue : devons-nous continuer, en quelque
sorte à fonds perdus, à verser aux allocataires du RMI l'aide médicale gratuite
et l'aide médicale hospitalière dès lors que, en application de l'article 5
bis
, ceux-ci auraient eu le mauvais goût de cumuler cette allocation
avec une activité professionnelle réduite ou à temps partiel ?
En effet, cet amendement prévoit de donner aux municipalités un droit de
regard en matière d'attribution de l'aide médicale gratuite et de l'aide
médicale hospitalière.
Il s'agit, ni plus ni moins, de savoir à partir de quel seuil de revenus un
demandeur peut être débouté de sa demande. C'est évidemment un problème qui
préoccupe notamment les conseils généraux, compte tenu de l'évolution des
dépenses en question puisque, s'agissant des RMIstes, ces aides sont à la
charge des départements.
Vous nous permettrez de trouver quelque peu surprenante cette vision des
choses de la part de collègues ayant soutenu tous les plans de redressement des
comptes sociaux qui ont pu être annoncés ces dernières années, à commencer par
le « plan Juppé » de 1995.
On n'a en effet eu de cesse de réduire le taux de la prise en charge par le
régime général des frais médicaux et d'hospitalisation, d'alourdir
corrélativement les prélèvements sur les salaires, de relever le montant du
forfait hospitalier et de faire réaliser par les organismes sociaux des
économies fondées sur le recul de la prévention sanitaire.
Et l'on s'étonne que la demande en matière d'aide médicale gratuite et d'aide
médicale hospitalière s'accroisse ! Mais cette augmentation est mécanique :
elle est induite par l'évolution même que vous avez imprimée à notre système de
protection sociale.
Réduire le coût de l'aide médicale pour les collectivités locales passe non
par l'autoritarisme des décisions et du suivi, mais par un exercice, certes
plus difficile, de retour au droit pour les plus démunis.
Ce retour au droit impose notamment une réflexion sur les possibilités de
mutualisation des assurés sociaux dépourvus de couverture complémentaire - on y
viendra à l'automne - ainsi qu'une relance réelle de la politique de prévention
sanitaire, qui doit, de notre point de vue, demeurer dans le champ de
responsabilité de l'Etat et des organismes sociaux.
Nous ne voterons donc pas l'amendement n° 479.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je comprends très bien la réaction de Mme la ministre. Il est certain qu'en
matière d'aide médicale il faut partir de données objectives et qu'il devrait y
avoir une certaine automaticité.
C'est ce que j'avais cru, dans ma candeur naïve, au moment de la création, à
laquelle j'ai beaucoup contribué, de la carte santé à Paris. C'est
effectivement dans cet esprit que nous l'avions mise en place.
Hélas ! nous nous sommes aperçus à l'usage que les données objectives étaient
une fort belle chose, mais à condition d'être exactes.
Par conséquent, il n'est pas mauvais que le maire, qui connaît bien la
situation réelle des administrés, puisse tout de même donner son avis,
notamment dans les communes moyennes ou petites.
Si vous saviez, madame la ministre, les dérapages auxquels la carte santé a
donné lieu à Paris ! Quels reproches n'ai-je pas entendus, non seulement de la
part de l'adjoint chargé des finances, mais aussi de la part des Parisiens
eux-mêmes, scandalisés par les dérapages qu'elle avait engendrés !
M. Guy Fischer.
Bien sûr, ce sont les pauvres qui dérapent !
M. Jean Chérioux.
Cela mérite quand même une certaine attention parce que tout le monde n'est
pas de bonne foi, toutes les situations ne sont pas exposées de façon
parfaitement objective.
Dès lors, il n'est pas mauvais que celui qui est sur le terrain puisse
examiner les dossiers pour voir s'ils reflètent vraiment la réalité des
situations.
(Protestations sur les travées socialistes et sur celles du
groupe communiste républicain et citoyen. - Mme Dusseau proteste
également.)
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je crois que M. Chérioux
confirme ce que nous disions, à savoir que, contrairement à ce que prétend M.
le rapporteur, ces deux amendements visent bien à sortir des données objectives
pour aller vers une décision fondée sur l'opportunité.
M. Jean Chérioux.
Ce n'est pas de l'opportunité, c'est la constatation de la réalité des choses
!
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Permettez-moi de vous rappeler
qu'il existe un rapport sur l'application du RMI. Alors que tout le monde
montrait du doigt les RMIstes, il a permis de se rendre compte que, finalement,
c'était l'une des allocations pour lesquelles les abus étaient les plus
réduits.
M. Guy Fischer.
C'est marginal !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Au demeurant, si un maire a
connaissance d'abus, rien ne l'empêche de les signaler ; il a même le devoir de
le faire.
Mais donner l'impression, aujourd'hui, que la population qui bénéficie de
l'aide médicale gratuite et qui touche le RMI est une population qui abuse me
paraît singulièrement malvenu.
De surcroît, vouloir sortir d'un droit objectif et automatique pour arriver à
un droit subjectif et fondé sur l'opportunité, c'est changer complètement de
logique. Je trouve cela extrêmement dangereux et même tout à fait désobligeant,
pour ne pas dire plus, à l'égard de tous ceux que nous sommes censés défendre
avec ce projet de loi de lutte contre les exclusions.
M. Jean Chérioux.
Je pensais comme vous, mais l'expérience m'a donné tort !
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je me demande si l'on a bien compris le sens de notre démarche à travers ces
deux amendements.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je crains que oui !
M. Alain Vasselle.
J'ai le sentiment, après les interventions de Mme Dusseau, de M. Fischer et de
Mme le ministre, qu'il y a une certaine méconnaissance du fonctionnement des
CCAS
(Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen)
dans les communes rurales en particulier, mais également dans les
communes urbaines.
(Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. le président.
Laissez parler M. Vasselle !
M. Guy Fischer.
J'ai été premier adjoint de Vénissieux pendant vingt ans !
M. Alain Vasselle.
Permettez-moi de m'expliquer !
Je ne sais pas si vous êtes maire de votre commune, monsieur Ficher, mais,
moi, je suis maire d'une commune rurale, je préside l'association des maires de
mon département et, à moins que le département de l'Oise ne soit un cas
atypique parmi les départements de France...
M. Paul Loridant.
Mais certainement !
(Rires.)
M. Guy Fischer.
Voyez Mancel !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
C'est un aveu !
M. le président.
Monsieur Loridant, monsieur Fischer, je vous en prie, laissez parler M.
Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je ne parlais que du domaine qui nous occupe ce soir !
En tout cas, il ne se passe pas de semaine sans que des maires de mon
département - il y en a tout de même 693 - me citent le cas d'un bénéficiaire
du RMI à qui cette allocation est attribuée à tort. Et cela implique que soit
engagée
a posteriori
une procédure de recouvrement, faute d'avoir pris
soin, au préalable, de solliciter l'avis du maire ou du CCAS.
Contrairement à ce que vous affirmez, madame le ministre, le phénomène n'est
donc pas si marginal que cela. D'ailleurs, quand bien même ce le serait, les
réactions sont telles de la part de nos populations communales et de la part
des élus locaux - je rapporte là le fruit de mon expérience quotidienne sur le
terrain - qu'il faut à tout prix éviter ces abus.
Mes collègues et moi-même ne demandons rien d'autre que la mise en place d'un
mode de fonctionnement semblable à celui qui existe en matière de prise en
charge au titre de l'aide sociale. Vous savez parfaitement, madame le ministre,
madame Dusseau, que, lorsqu'un dossier de demande d'aide sociale est déposé au
profit d'un habitant de l'une de nos communes, une enquête est menée sur les
revenus de celui-ci.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Bien sûr ! L'aide sociale n'est
pas automatique !
M. Alain Vasselle.
C'est sur la base de cette enquête que le CCAS émet un avis et ce n'est
qu'ensuite que le président du conseil général décide de donner suite ou non à
cette demande.
Nous ne voulons rien d'autre, d'une part, pour l'attribution du RMI et,
d'autre part, par voie de conséquence, pour l'aide médicale.
Je suis prêt à admettre que l'amendement n° 479, qui concerne l'aide médicale,
ne serait plus justifié dans la mesure où l'amendement n° 480, qui prévoit
l'avis du maire pour l'octroi du RMI, serait retenu. Je suis prêt à admettre un
droit automatique à l'aide médicale pour un allocataire du RMI, mais il faut au
préalable avoir sollicité l'avis du maire sur la pertinence ou la
non-pertinence de l'attribution du RMI.
Permettez-moi de vous donner un exemple. Le maire d'une commune de 200
habitants m'a cité le cas d'une personne qui percevait le RMI alors qu'elle
travaillait au noir et gagnait ainsi 10 000 francs par mois ! Eh bien, le
dossier n'avait pas été instruit par le CCAS !
Vous savez en effet que le CCAS n'est pas un passage obligé de l'instruction
du dossier d'allocation du RMI.
M. le président.
Monsieur Vasselle, veuillez conclure.
M. Alain Vasselle.
Le dossier peut être instruit par la caisse d'allocations familiales, par un
centre social ou, directement, par les services du département.
Si le maire avait eu connaissance de ce dossier, il aurait évidemment émis un
avis défavorable dès le départ. Il aurait évité l'instruction de ce dossier. Il
aurait évité à la commission locale d'insertion, présidée par le sous-préfet au
niveau de l'arrondissement, de travailler inutilement.
M. le président.
Nous vous remercions, monsieur Vasselle !
M. Alain Vasselle.
C'est la raison pour laquelle je pense que l'amendement que nous avons déposé,
au moins en ce qui concerne l'allocation du RMI, est justifié, et j'espère
qu'une majorité de mes collègues l'approuvera. Je suis d'ailleurs prêt à
retirer l'autre amendement que j'ai déposé si celui-ci est adopté.
M. le président.
Malheureusement, mon cher collègue, l'amendement n° 479 est examiné avant
l'amendement n° 480 !
M. Alain Vasselle.
Ne peut-on changer l'ordre d'examen ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je souhaite reprendre la parole
parce que cet amendement est très grave.
Je rappelle qu'il s'agit ici d'un projet de loi relatif à la lutte contre les
exclusions. Le Sénat vient d'adopter, à la demande de la commission, des textes
qui étendent les possibilités de cumul entre le RMI et d'autres allocations. Et
voilà que, tout à coup, sous prétexte qu'il y a des fraudes - et il y en a
sûrement quelques-unes comme pour toute allocation - il faudrait
systématiquement contrôler en amont !
Je vous rappelle que j'ai été à l'origine de la loi sur la radiation des
chômeurs qui n'acceptaient pas un certain nombre d'offres d'emploi. Ce n'est
donc pas moi qu'il faut convaincre de la nécessité d'effectuer certains
contrôles pour empêcher la fraude ! Cependant, dans un texte comme celui qui
est en discussion, donner l'impression que ceux qui perçoivent aujourd'hui le
RMI - ils sont 1,1 million dans notre pays, après cinq ans de crise et
d'augmentation du chômage - sont des gens qui trichent, les montrer du
doigt...
M. Alain Vasselle.
Ce n'est pas vrai ! Vous faites de la caricature en disant cela !
M. le président.
Monsieur Vasselle, vous n'avez pas à intervenir de cette façon !
M. Alain Vasselle.
Je ne peux pas admettre que l'on caricature ainsi mon propos !
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur Vasselle, vous avez
dit exactement que le maire doit apprécier « la pertinence de l'octroi du RMI
». Qu'est-ce, sinon le droit pour un maire d'apprécier subjectivement les
situations qui lui sont soumises ? En tant que maire, vous donneriez le
sentiment au conseil général que, malgré des critères objectifs, il ne faut pas
attribuer le RMI à l'un de vos concitoyens ? Eh bien, je serais extrêmement
gênée par une disposition de cette nature. Ce serait revenir complètement sur
l'esprit du RMI.
Bien sûr, il faut effectuer des contrôles. D'ailleurs, il y a des radiations
sur contrôle. Si un maire a connaissance d'une situation frauduleuse, il est de
son devoir de le faire savoir. Mais, dans un texte relatif à la lutte contre
l'exclusion, montrer du doigt toute une population en donnant l'impression
qu'il faut juger en opportunité du bénéfice d'un droit qui a été inscrit dans
la loi, et cela, je le rappelle, à l'unanimité, très franchement, ce ne serait
pas lutter contre les exclusions, ce serait les accroître.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Nous sommes résolument contre les amendements n°s 479 et 480, pour les raisons
que Mme la ministre vient d'expliciter et que nous partageons pleinement.
M. Alain Vasselle.
Je retire l'amendement n° 479 !
M. le président.
L'amendement n° 479 est retiré.
Je rappelle que l'amendement n° 480 a été présenté et que la commission s'est
déjà prononcée.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 480.
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
La procédure qui nous est présentée dans cet amendement concerne l'obtention
du RMI.
Revenons au texte que vous nous proposez, monsieur Vasselle !
Il y est précisé que les demandes sont enregistrées au secrétariat de la
commission locale d'insertion et transmises au président du CCAS. Cela signifie
que l'on exclut l'instruction des dossiers de RMI par les centres
médico-sociaux ou les associations. Mes chers collègues, je trouve que vous
prenez-là des décisions à la légère ! Supprimer la moitié des centres
d'instruction des dossiers du RMI, ce n'est pas mal !
Je poursuis la lecture de l'amendement : « Le président du CCAS » - le CCAS
étant seul habilité, dans votre texte, à instruire ces dossiers - « transmet au
représentant de l'Etat dans le département » - normalement, on transmet non pas
au représentant de l'Etat, mais à la CAF - « les éléments d'information dont il
dispose sur les ressources et la situation de famille de l'intéressé au regard
de l'insertion ». Cela est déjà plus délicat ! Je vous rappelle que le dossier
de RMI est instruit en fonction des ressources, et non pas - à ma connaissance,
c'est encore le cas aujourd'hui - par rapport à une situation au regard de
l'insertion.
Enfin, le président du CCAS transmet « son avis quant à l'opportunité de
l'octroi de l'allocation du RMI ». Je suis tout à fait d'accord avec Mme la
ministre s'agissant du côté aléatoire de cet avis.
Le CCAS est donc le seul instructeur des demandes de RMI : il transmet des
éléments objectifs - les ressources - et des éléments subjectifs - la situation
de l'intéressé au regard de l'insertion. Je vous souhaite bien du plaisir, mes
chers collègues !
Peut-être avez-vous rédigé cet amendement de manière un peu légère. Peut-être
n'en avez-vous pas vraiment pesé les termes ! Par conséquent, je voterai
contre.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
En ce qui concerne cet amendement n° 480, le groupe communiste républicain et
citoyen présente, bien entendu, la même argumentation que celle qu'il a
longuement développée pour l'amendement précédent.
S'agissant des éventuelles attributions frauduleuses du RMI, les contrôles se
sont vraiment renforcés, puisque la caisse d'allocations familiales vérifie
pratiquement tous les trimestres les conditions d'attribution du RMI. A défaut
de réponse à la suite de cette enquête, le RMI est automatiquement supprimé.
De telles dispositions pourraient laisser penser que l'on s'oriente
aujourd'hui vers une autre répartition des rôles : à l'instar de ce qui se
passe dans certains départements, les demandes de RMI seraient instruites
essentiellement par les communes, alors que celles qui concernent l'aide
médicale gratuite et l'aide médicale hospitalière seraient instruites par le
département.
Il s'agit d'une approche bien connue - n'est-ce pas, monsieur Michel Mercier !
- mais qui apparaît comme étant expérimentale et porteuse d'une réflexion plus
globale.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je serai bref, monsieur le président, et j'essaierai de m'exprimer un peu plus
calmement que tout à l'heure. Je vous prie de m'excuser de m'être laissé un peu
emporter.
Madame Dusseau, ne faites pas dire à ce texte ce qu'il ne veut pas dire !
N'allons pas chercher midi à quatorze heures en ce qui concerne les
dispositions qui sont prévues par cet amendement et ne donnons pas aux mots une
portée qui ne correspond ni à l'esprit ni à la lettre de ce texte.
L'amendement n° 480 tend, ni plus ni moins, à donner au maire la possibilité
d'émettre un avis quant à l'attribution de l'allocation du RMI, comme il le
fait en ce qui concerne toutes les attributions au titre de l'aide sociale.
A cet effet, il procédera à une analyse en fonction d'éléments objectifs, tel
que cela est prévu par la loi et la réglementation. L'avis d'opportunité ne
consiste pas à se prononcer d'une manière subjective, « à la tête du client »
ou selon la situation de la famille ! Il s'agit simplement de donner au maire
la possibilité d'émettre un avis pour éclairer le préfet ou la caisse
d'allocation familiale, qui tranchera. Le président du conseil général a la
liberté de suivre ou non cet avis, comme il le fait au titre de l'aide sociale
! Il peut très bien, au vu des éléments objectifs qu'il possède, prendre une
décision contraire à un avis défavorable ou réservé du maire. Il ne s'agit de
rien d'autre !
Notre objectif est de faire en sorte qu'il y ait le maximum de transparence et
de circulation d'informations entre le futur bénéficiaire, la collectivité et
celui qui décide, en bout de course, de l'attribution de l'allocation du RMI.
N'allez pas chercher des arrières-pensées ou de sombres desseins dans une
proposition qui n'en recèle point.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 480, accepté par la commission er repoussé
par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
94:
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 218 |
Contre | 97 |
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5 bis .
Article 5
ter
M. le président.
« Art. 5
ter
. - Il est inséré, après l'article L. 351-16 du code du
travail, un article L. 351-16-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 351-16-1
. - Tout demandeur d'emploi peut exercer une activité
bénévole. Cette activité ne peut s'effectuer chez un précédent employeur, ni se
substituer à un emploi salarié, et doit rester compatible avec l'obligation de
recherche d'emploi. »
Par amendement n° 29, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« Il est inséré après l'article L. 351-17 du code du travail, un article L.
351-17-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 351-17-1.
- Tout demandeur d'emploi peut exercer une
activité bénévole. Cette activité ne peut s'effectuer chez un précédent
employeur, ni se substituer à un emploi salarié, et doit rester compatible avec
l'obligation de recherche d'emploi. L'exercice d'une activité bénévole n'est
pas considéré comme un motif légitime pour se soustraire aux obligations
prévues à l'article L. 351-17. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
L'Assemblée nationale a confirmé qu'un chômeur pouvait
exercer une activité bénévole, ce afin d'éviter les cas de radiation
manifestement abusive de chômeurs des listes de l'ANPE, ces derniers n'étant
pas considérés comme étant effectivement à la recherche d'un emploi lorsqu'ils
exerçaient une activité bénévole.
Cet amendement ne tend pas à revenir sur un principe, qui semble justifié : il
est possible d'être actif dans une association, sans pour autant devenir
indisponible pour un nouvel emploi. En revanche, il n'apparaît pas anormal de
prévoir que l'exercice d'une activité bénévole ne doit pas être invoqué par le
demandeur d'emploi comme un motif légitime pour refuser de se présenter aux
convocations de l'ANPE.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement s'en remet à la
sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 5
ter
est ainsi rédigé.
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - I. - L'article L. 322-4-16 du code du travail est ainsi rédigé
:
«
Art. L. 322-4-16. - I. -
L'insertion par l'activité économique a pour
objet de permettre à des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés
sociales et professionnelles particulières, de bénéficier de contrats de
travail en vue de faciliter leur insertion sociale et professionnelle. Elle met
en oeuvre des modalités spécifiques d'accueil et d'accompagnement.
« L'Etat peut, après consultation des partenaires locaux réunis au sein du
conseil départemental de l'insertion par l'activité économique institué à
l'article L. 322-4-16-4, conclure des conventions avec les employeurs dont
l'activité a spécifiquement cet objet. Ces conventions peuvent prévoir des
aides de l'Etat.
«
II. -
Lorsque des conventions mentionnées au I sont conclues avec des
personnes morales de droit privé produisant des biens et services en vue de
leur commercialisation, les embauches de personnes mentionnées au I auxquelles
celles-ci procèdent ouvrent droit à exonération du paiement des cotisations
patronales au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des
allocations familiales dans la limite des cotisations afférentes à la
rémunération ou la partie de la rémunération égale au salaire minimum de
croissance.
«
III. -
Lorsque ces conventions sont conclues avec des personnes
morales de droit public ou de droit privé à but non lucratif dans le cadre
d'activités présentant un caractère d'utilité sociale, les embauches peuvent
être effectuées dans le cadre d'un des contrats régis par les articles L.
322-4-7 et L. 322-4-8-1. »
«
III
bis. - Les conditions de conventionnement des personnes morales
de droit public ou de droit privé à but non lucratif produisant des biens et
services en vue de leur commercialisation et développant des activités
présentant un caractère d'utilité sociale sont définies par décret.
«
IV. -
Ouvrent seules droit aux aides et exonérations de cotisations
prévues aux I, II et III du présent article les embauches de personnes agréées
par l'Agence nationale pour l'emploi, à l'exception de celles réalisées par les
employeurs mentionnés à l'article L. 322-4-16-3.
«
V. -
Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application
des II et IV ci dessus. Un décret précise les modalités spécifiques d'accueil
et d'accompagnement ainsi que les modalités des aides de l'Etat mentionnées ci
dessus ; il fixe également les conditions auxquelles doivent satisfaire les
embauches mentionnées au III. »
« II. - Les dispositions du présent article prennent effet à compter du 1er
janvier 1999. »
Sur l'article, la parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Lors de l'examen du projet de loi par nos collègues à l'Assemblée nationale,
les articles 6 à 10 du volet emploi ont suscité des débats denses, vifs et
techniques.
Il faut dire, madame la ministre, que les élus, souvent très actifs sur le
terrain de l'insertion par l'activité économique, voyaient d'un très mauvais
oeil vos tentatives, ou interprétaient mal votre volonté, d'introduire un peu
de cohérence dans ce secteur. D'aucuns allaient même jusqu'à vous soupçonner de
vouloir remettre en cause, voire étouffer les quelque 1 500 associations
intermédiaires répertoriées en France, auxquelles il convient d'ajouter les
entreprises d'insertion et les entreprises de travail temporaire
d'insertion.
Evaluées à 30 000 équivalents temps plein, les structures d'insertion par
l'économie ont vocation à s'adresser uniquement à des personnes qui cumulent
des difficultés sociales - endettement, isolement familial, problèmes de santé
- avec des difficultés professionnelles.
Bien que m'interrogeant sur l'efficacité de l'intérim pour insérer de manière
durable les personnes en difficulté, je reconnais l'importance de ce monde de
l'insertion, qui permet à un grand nombre de chômeurs de longue durée - jeunes
sans qualification ou adultes avec une qualification obsolète - de garder un
espoir en leur proposant des prestations d'insertion en liaison avec le service
public de l'emploi et les travailleurs sociaux.
Par ailleurs, loin de moi l'idée d'occulter le dévouement des personnes qui
interviennent chaque jour pour que ce secteur se dynamise.
La seule question que nous nous posons légitimement est de savoir s'il est
opportun de doubler les effectifs de ce secteur au regard de son efficacité en
termes d'insertion des personnes et de retour durable à l'emploi.
Je ne nie pas qu'il soit nécessaire de mettre en place, sous différentes
formes, des dispositifs particuliers d'insertion, des contrats aidés. J'entends
simplement préciser que leur mise en oeuvre ne se justifie qu'à un moment
particulier, et pour des personnes déterminées, dans l'optique d'un parcours
d'insertion.
En revanche, si les difficultés tiennent au fait que c'est l'entreprise
elle-même qui rechigne parfois à employer, par exemple, des jeunes issus de
certains quartiers - nous sommes confrontés tous les jours à cette situation -
des femmes ou des demandeurs d'emploi âgés de plus de cinquante ans, ces
personnes pouvant normalement accéder à l'emploi ne doivent nullement relever
de mesures particulières.
Le dispositif prévu aux articles 6, 7 et 8 témoigne de la volonté du
Gouvernement d'unifier, en recourant au conventionnement, le régime de
reconnaissance des structures de l'insertion.
Il est inutile de revenir ici sur le débat relatif au choix entre convention
et agrément. Les éléments de réponse donnés par Mme la ministre nous satisfont,
comme cela semble être également le cas pour l'ensemble des associations.
Par ailleurs, il est positif de voir réaffirmer le rôle primordial d'accueil
et d'accompagnement de ces structures et leur soumission aux règles de droit
commun inscrites dans le code du travail.
Le Gouvernement a souhaité que l'ANPE contrôle l'octroi des aides aux
entreprises d'insertion et aux entreprises d'intérim d'insertion. Cela répond à
notre souci de n'exclure personne du champ d'action du service public de
l'emploi, lequel doit absolument assumer pleinement ses missions fondamentales
de placement.
S'agissant du soutien financier apporté par l'Etat à ce secteur marchand, nous
relevons qu'il vient d'être renforcé, les exonérations de charges sociales dues
par l'employeur passant à 100 %. Vous connaissez nos réserves, pour ne pas dire
notre opposition, à aller toujours plus loin.
Les aides de l'Etat doivent être utilisées à bon escient, dans l'intérêt de
tous et afin de développer l'emploi stable. Constatant de nombreux abus et
dérives, car les grands groupes se cachent parfois derrière ces structures
d'insertion, le Gouvernement s'est engagé à recentrer les interventions de
celles-ci.
Les modifications apportées au texte soumis à l'Assemblée nationale étaient
nécessaires : le dispositif adopté semble équilibré.
Surtout, nous tenons beaucoup à ce que les dispositions ayant pour effet de
transposer aux associations intermédiaires les règles protectrices prévues par
le code du travail demeurent dans le texte. Je fait référence ici à la
requalification du contrat lorsque la durée de mise à disposition a été
dépassée ou à l'impossibilité faite à l'association intermédiaire de mettre à
disposition des salariés sur un emploi équivalent ou de même qualification dans
une entreprise qui, au cours des six mois précédents, a procédé à un
licenciement économique.
Je souhaite que notre souci de protéger les salariés et l'emploi soit partagé
par l'ensemble de nos collègues. C'est ce souci qui motivera de notre part une
grande vigilance lors de l'examen des amendements sur ces articles 6, 7 et
8.
M. le président.
Par amendement n° 307, Mmes Printz, Derycke, Dieulangard, MM. Huguet,
Vezinhet, Autain et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent,
dans le paragraphe II du texte présenté par l'article 6 pour l'article L.
322-4-16 du code du travail, après les mots : « de leur commercialisation »,
d'insérer les mots : « , notamment les chantiers-écoles, les centres
d'adaptation à la vie active, les régies de quartiers ainsi que les groupements
d'employeurs pour l'insertion et la qualification ».
La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz.
Cet amendement vise à compléter la liste des organismes qui favorisent
l'insertion par l'économique et donne la possibilité aux employeurs relevant de
l'aide sociale d'accéder sans contrainte particulière aux conventions et aux
aides prévues par l'article 7.
Ces organismes jouent en effet un rôle essentiel en faveur de l'insertion des
personnes les plus touchées ou les plus menacées de l'être. Les inscrire dans
la loi permettra leur reconnaissance en tant que tel.
Plus particulièrement, les centres d'adaptation à la vie active demeurent
l'unique dispositif d'insertion par une activité économique permettant de
répondre individuellement aux difficultés des personnes accueillies.
C'est pourquoi nous souhaitons qu'ils soient également inscrits dans cette loi
comme étant un des moyens de prévenir l'exclusion.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement est essentiel, car il permettrait de faire
reconnaître au plus haut niveau le rôle que jouent des institutions aussi
utiles que les chantiers-écoles, les centres d'adaptation à la vie active, les
régies de quartier, ainsi que les groupements d'employeurs pour l'insertion et
la qualification.
Ces derniers réclament depuis longtemps que leur rôle soit reconnu au niveau
législatif et souhaitent pouvoir bénéficier des avantages sociaux aujourd'hui
réservés aux entreprises d'insertion.
Nous ne sommes pas sans savoir que ces organismes ne travaillent pas toujours
selon des formes juridiques bien définies. Pour autant, il n'est pas normal
qu'ils ne puissent pas voir leur rôle parfaitement reconnu ni anormal que le
législateur examine leur situation pour leur donner une sécurité juridique.
Cet amendement n'est peut-être pas parfait, mais il constitue un pas en avant.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Comme à l'Assemblée nationale,
le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, et je voudrais
expliquer, ici, sa position.
Tout d'abord, autant les entreprises d'insertion, les régies de quartier, les
associations intermédiaires ont une réalité reconnue dans la loi avec un statut
précis, autant les chantiers-écoles, les centres d'adaptation à la vie active
ne sont que des associations regroupées sous un label privé et qui,
aujourd'hui, n'ont aucune base légale.
J'ajoute que, en tant qu'associations, elles ont bien évidemment droit au CES
et au CEC, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui pour les entreprises
d'insertion. Elles ont donc déjà des possibilités puisque, effectivement, elles
remplissent un rôle tout à fait important en matière d'insertion des
personnes.
Il est très difficile de traiter le problème de ces chantiers-écoles et de ces
centres d'adaptation à la vie active à travers ce type d'amendement. Je n'ai
pas compris que ces structures souhaitaient avoir un statut juridique reconnu
dans la loi. Je le répète : les placer sur le même plan que les entreprises
d'insertion ou les associations intermédiaires ouvrirait droit, sans statut et
sans règle, à des exonérations de charges qui ne me paraissent pas aujourd'hui
souhaitables.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 307, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 30, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose :
A. - Dans le II du texte présenté par le I de l'article 6 pour l'article L.
322-4-16 du code du travail, après les mots : « partie de la rémunération égale
au », d'ajouter les mots : « maximum à 130 % du ».
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, d'insérer
après le I de cet article un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« I
bis
. - La perte de recettes résultant pour les organismes de
sécurité sociale du relèvement de la rémunération ouvrant droit à exonération
de cotisations sociales est compensée à due concurrence par une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise à élargir l'exonération des charges
sociales - qui est limitée par le texte au montant du SMIC - à un montant égal
à 130 % de celui-ci, soit 6 877 francs.
Il s'agit de permettre une certaine simplification administrative. Il peut
être en effet plus complexe du point de vue de la gestion de prendre en charge
les salariés exonérés à 100 % et ceux qui ne bénéficient que d'une exonération
partielle. Le seuil de 130 % permet de couvrir la quasi-totalité de l'éventail
des salaires versés par les entreprises d'insertion aux personnes rencontrant
des difficultés sociales et professionnelles particulières.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est défavorable
à cet amendement, non pas qu'il soit opposé à ce que l'on paie au-dessus du
SMIC les salariés des entreprises d'insertion, mais parce que, dans ce projet
de loi d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions, nous faisons
déjà deux efforts extrêmement importants. En effet, nous portons l'exonération
des charges sociales de 50 % à 100 % pour les entreprises d'insertion, ce qui
est déjà une avancée considérable, et nous portons à 50 000 francs l'aide
annuelle par poste d'insertion. Il y aura donc pour chacun des postes une aide
de l'Etat de 74 000 francs par an, soit un montant largement supérieur à ce qui
existait auparavant.
Il ne nous paraît donc pas souhaitable d'aller au-delà, même si nous
souhaitons, et c'est d'ailleurs déjà le cas, qu'un certain nombre de salariés
qui acquièrent une qualification puissent être payés au-dessus du SMIC.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Compte tenu des précisions apportées par Mme la ministre sur
le système d'exonération dont bénéficient déjà les entreprises, il me semble
plus sage de retirer cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° 30 est retiré.
Par amendement n° 398, MM. Eckenspieller et Ostermann proposent, dans le
paragraphe IV du texte présenté par le I de l'article 6 pour l'article L.
322-4-16 du code du travail, de remplacer les mots : « agréées par », par les
mots : « orientées par les prescripteurs sociaux ou ».
La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller.
Lors de la discussion générale, un hommage unanime a été rendu aux nombreux
acteurs de terrain qui se battent sur tous les fronts pour nos concitoyens en
situation de grande difficulté. Or, ces acteurs de terrain sont très souvent
exaspérés et découragés par l'importance et la lourdeur des procédures
administratives qui freinent leur intervention et mobilisent une grande partie
de l'énergie dont ils auraient bien besoin pour accomplir d'autres tâches. Les
services locaux de l'emploi, qui fonctionnent dans le cadre d'une convention de
collaboration conclue avec l'ANPE, consacrent un temps et des moyens
considérables à la production de statistiques et de documents administratifs
divers. Ils attendent de nous que nous allégions les procédures, et non que
nous les alourdissions.
Or les prescripteurs sociaux, à savoir les missions locales, les centres
communaux d'action sociale et les centres de détention, aiguillent vers les
associations intermédiaires de nombreux candidats non inscrits à l'ANPE, mais
suivis par un référent dans le cadre de leur parcours.
Ces entreprises travaillent le plus souvent dans l'urgence et doivent avoir
une très grande réactivité. Tout ce qui ferait obstacle à ces impératifs irait
à l'encontre du public visé.
Par ailleurs, l'ANPE dispose-t-elle aujourd'hui des moyens nécessaires à la
mise en oeuvre d'un service chargé de la gestion des offres d'emploi émanant
des structures d'insertion par l'économique ?
A titre indicatif, dans les deux départements alsaciens, les quarante-cinq
entreprises d'insertion ont embauché 1 530 personnes alors que les associations
intermédiaires ont fait travailler 7 046 personnes au cours de l'année 1996.
Aucune de ces entreprises, je le souligne à l'attention de notre collègue M.
Fischer, n'est liée, de près ou de loin, à quelque grand groupe privé que ce
soit.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement prévoit un agrément par l'ANPE ou par des
prescripteurs sociaux. La notion de prescripteurs sociaux est peut-être
intéressante sur le plan formel, mais elle est trop imprécise. En tout cas,
elle pourrait ne pas être valable pour les entreprises d'insertion.
Aussi, la commission demande le retrait de cet amendement au profit de celui
qu'elle a déposé à l'article 8 et qui permettra d'élargir la liste des
institutions et organismes qualifiés pour agrééer une personne embauchée par
une association intermédiaire.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Même avis, pour les mêmes
raisons.
M. le président.
Monsieur Eckenspieller, l'amendement n° 398 est-il maintenu ?
M. Daniel Eckenspieller.
Puisque le problème auquel sont confrontées les entreprises d'insertion sera
pris en compte, je retire cet amendement. Celui-ci répondait à une
préoccupation majeure pour les hommes de terrain, qui ont à faire face à des
procédures administratives extrêmement lourdes, que viendrait encore alourdir
l'agrément systématique par l'ANPE.
M. Jacques Machet.
Très bien !
M. le président.
L'amendement n° 398 est retiré.
Par amendement n° 31, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de compléter
in fine
le V du texte présenté par le I
de l'article 6 pour l'article L. 322-4-16 du code du travail par les mots : «
ainsi que les modalités de suspension ou de résiliation des conventions
mentionnées à l'article L. 322-4-16-1 et au 1 de l'article L. 322-4-16-3
lorsque la personne morale ne respecte pas ses obligations ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise à résoudre la difficulté que soulève la
disparition de la notion d'agrément des associations intermédiaires. En effet,
il était prévu, dans l'article L. 128 du code du travail, que les associations
intermédiaires donnaient lieu à un agrément qui pouvait être suspendu pour une
durée de trois mois.
Le projet de loi remplace l'agrément par la convention, ce qui présente
l'avantage de pouvoir engager une négociation sur des objectifs ou des mesures
d'accompagnement complémentaires.
Toutefois, s'agissant d'une convention, la seule sanction possible est une
résiliation lorsque l'une des parties ne respecte pas ses obligations.
Cet amendement prévoit que le décret précise les modalités de suspension ou de
résiliation des conventions qui seront passées par les associations
intermédiaires.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Cet amendement n'est pas
indispensable car le décret envisagé précisera globalement les conditions de
mise en oeuvre des dispositions relatives à l'insertion par l'activité
économique, notamment les modalités de conventionnement. Toutefois, le
Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 32, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de compléter le V du texte présenté par le I de l'article 6
pour l'article L. 322-4-16 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités selon lesquelles le conseil
départemental de l'insertion par l'activité économique est informé des
modalités de rémunération des personnels des entreprises d'insertion ou des
associations intermédiaires lorsque ces personnes ne sont pas couvertes par une
convention collective et ne relèvent pas du dispositif visé au I ci-dessus.
»
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise à garantir la disparition de certains
abus constatés dans certaines entreprises d'insertion pour lesquelles la
rémunération des personnels permanents, à l'exclusion des salariés ouvrant
droit à l'aide de l'Etat, est parfois élevée.
Il paraît normal que le conseil départemental de l'insertion par l'activité
économique, qui sera chargé de donner un avis avant la signature d'une
convention avec une entreprise d'insertion ou une association intermédiaire,
puisse disposer d'éléments d'information sur ce type de rémunération.
Le décret en Conseil d'Etat devra évidemment prévoir que les informations
communiquées ne sont pas nominatives. Il est donc prévu de donner des
informations sur les rémunérations dans le cas où il n'y aurait pas de
convention collective applicable dans l'entreprise concernée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement est favorable à
cet amendement, car il assure une plus grande transparence dans ce secteur,
qui, il faut le reconnaître, est fortement subventionné.
Toutefois, pour atteindre l'objectif recherché par les auteurs de cet
amendement, il conviendrait de supprimer les mots : « lorsque ces personnes ne
sont pas couvertes par une convention collective et ne relèvent pas du
dispositif visé au grand I ci-dessus ». En effet, cela réduit la portée du
dispositif à un très petit nombre de structures, puisque, au maximum, 20 % des
entreprises d'insertion bénéficient d'une convention collective.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, acceptez-vous de rectifier l'amendement n° 32 dans le
sens souhaité par le Gouvernement ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 32 rectifié, présenté par M. Seillier,
au nom de la commission des affaires sociales, et tendant à compléter le V du
texte proposé par le I de l'article 6 pour l'article L. 322-4-16 du code du
travail par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités selon lesquelles le conseil
départemental de l'insertion par l'activité économique est informé des
modalités de rémunérations des personnels des entreprises d'insertion ou des
associations intermédiaires. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - Il est inséré, dans le code du travail, deux articles L.
322-4-16-1 et L. 322-4-16-2 ainsi rédigés :
«
Art. L. 322-4-16-1
. - Les contrats conclus par les entreprises
d'insertion, conventionnées par l'Etat en application du II de l'article L.
322-4-16, avec les personnes mentionnées au I de cet article, sont des contrats
à durée déterminée soumis aux dispositions de l'article L. 122-2. La durée de
ces contrats ne peut excéder vingt-quatre mois. Ils peuvent être renouvelés
deux fois dans la limite de cette durée.
«
Art. L. 322-4-16-2
. - Les conventions mentionnées à l'article L.
322-4-16 peuvent être également passées avec des employeurs mentionnés à
l'article L. 124-1 dont l'activité exclusive consiste à faciliter l'insertion
professionnelle des personnes mentionnées à l'article L. 322-4-16, au moyen de
la conclusion de contrats de travail temporaire.
« L'activité de ces entreprises de travail temporaire d'insertion est soumise
à l'ensemble des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du présent
code relatives au régime juridique des entreprises de travail temporaire et des
contrats de travail temporaire. Toutefois, par dérogation aux dispositions du
II de l'article L. 124-2-2, la durée des contrats de travail temporaire des
personnes mentionnées à l'article L. 322-4-16 peut être portée à vingt-quatre
mois, renouvellement compris. »
Sur l'article, la parole est à Mme Bardou.
Mme Janine Bardou.
Dans le volet consacré à l'insertion par l'activité économique, l'article 7
concerne plus particulièrement les entreprises d'insertion, que l'on a parfois
tendance à confondre avec les associations intermédiaires, alors que ce sont
deux structures sans doute complémentaires mais bien distinctes.
Je voudrais simplement insister sur l'action positive de ces entreprises dans
la politique d'insertion par l'économique dans le secteur marchand et souligner
les difficultés auxquelles elles sont confrontées.
Il convient de rappeler que l'entreprise d'insertion a pour mission l'embauche
de personnes ayant de très graves difficultés sociales ; ces dernières, qui
sont de tous ordres, empêchent ces personnes d'être recrutées par les
entreprises de type traditionnel, malgré les contrats aidés existants.
L'objectif est ainsi de permettre à ces personnes de s'adapter ou de se
réadapter à une activité professionnelle en milieu productif et concurrentiel
et d'accéder dans les meilleurs conditions possible au marché de l'emploi,
sachant que certaines d'entre elles n'ont jamais connu le monde du travail.
Elles réclament, en effet, un accompagnement spécifique, qui nécessite la
présence d'intervenants sociaux formés et motivés.
Le temps d'un contrat en entreprise d'insertion est vécu par ces personnes en
difficulté et par ceux qui les encadrent comme un tremplin, un espace
intermédiaire permettant de travailler, d'une part, la relation aux autres et
les savoir-faire et, d'autre part, la résolution des difficultés
personnelles.
Cela explique que cette entreprise, qui se situe dans une économie marchande
et dont l'activité économique devrait être en principe « rentable », est
freinée par l'embauche de cette main-d'oeuvre particulière qui entraîne un
manque de productivité.
Malgré les performances économiques et sociales reconnues par l'ensemble des
partenaires, ces entreprises d'insertion rencontrent de grandes difficultés du
fait du coût d'un poste de travail en insertion, qui s'est accru de 25 % depuis
1991, sans compensation au niveau de l'allocation forfaitaire d'insertion.
Bien que cela ne dépende pas de la loi, je soulignerai combien il me paraît
nécessaire de relever le montant de l'allocation forfaitaire d'insertion, qui
est actuellement de 38 000 francs par an et qui n'a pas été réévalué depuis
cinq ans.
Par ailleurs, je regrette que la demande du Comité national des entreprises
d'insertion de porter à 130 % du montant du SMIC l'exonération totale des
charges sociales n'ait pas été retenue lors de l'examen de l'amendement
précédent.
Je pense, madame le ministre, que ces structures, eu égard aux excellents
résultats qu'elles obtiennent - je tiens d'ailleurs à souligner l'engagement
personnel de leurs dirigeants - méritent une attention toute particulière et un
soutien financier sans lequel il est à craindre que plusieurs d'entre elles ne
soient appelées à disparaître.
Ce serait regrettable, car ces entreprises apportent à des personnes en grande
détresse une formation, un métier, dans un milieu économique ouvert, que nous
ne devons pas redouter.
Dans ce domaine de l'insertion, nous devons explorer toutes les voies qui nous
sont offertes afin que chaque exclu retrouve sa place dans notre société.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Article additionnel après l'article 7
M. le président.
Par amendement n° 424, MmeBardou, MM. Bordas, de Cossé-Brissac, Trucy et de
Bourgoing proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du 3 de l'article 200 du code général des
impôts, après les mots : "établissements publics des cultes reconnus
d'Alsace-Moselle", sont insérés les mots : "et aux entreprises d'insertion sous
statut associatif".
« II. - Les pertes de recettes résultant de l'application du I sont compensées
à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Bardou.
Mme Janine Bardou.
Cet amendement vise à faire reconnaître l'utilité publique de l'action menée
par les entreprises d'insertion sous statut associatif et à encourager les dons
en leur faveur.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise à accorder pour les dons effectués aux
entreprises d'insertion sous statut associatif la même déduction fiscale que
celle qui existe pour les dons aux associations reconnues d'utilité
publique.
Mais de deux choses l'une : soit il s'agit d'une entreprise d'insertion qui a
une activité marchande, bénéficie des exonérations des charges sociales prévues
par la loi et ne présente donc pas d'analogie avec l'association d'utilité
publique, puisque toute entreprise a un but lucratif, soit il s'agit
véritablement d'une association, et même d'une association intermédiaire : elle
joue alors un rôle d'utilité publique, mais celui-ci est reconnu par le
législateur, qui lui accorde des primes pour chaque embauche effectuée ainsi
qu'une exonération à 100 % des charges sociales. On peut donc se demander, à ce
moment-là, s'il est réellement légitime qu'elle cumule la déduction fiscale au
titre des dons et les avantages accordés en matière de charges sociales.
C'est pourquoi la commission, quelque peu réservée sur cet amendement, a
décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je ne reviendrai pas sur les
arguments de M. le rapporteur, qui m'amènent d'autant plus à conclure par un
avis négatif que ces associations peuvent soit se faire reconnaître d'intérêt
général et bénéficier de l'article 200 du code général des impôts, soit,
lorsqu'elles remplissent un certain nombre de conditions rappelées par M. le
rapporteur, se faire reconnaître d'utilité publique.
Madame Bardou, je partage complètement votre analyse à la fois sur l'intérêt
majeur des entreprises d'insertion et sur le fait qu'il fallait les aider
au-delà de ce qui était fait précédemment. Dans ce projet de loi, je le répète,
nous avons annoncé que les exonérations de charges passaient de 50 % à 100 % et
que l'aide totale accordée par l'Etat serait de 50 000 francs par poste.
Ayant précédemment travaillé à proximité des entreprises d'insertion, j'ai pu
remarquer, madame, à quel point les retards aussi bien dans le conventionnement
que dans le paiement leur causaient de multiples difficultés. Dès mon arrivée
au ministère de l'emploi et de la solidarité, j'ai donc demandé que les
conventionnements aient lieu au mois de janvier, ce qui a été fait, si bien que
les entreprises savaient au mois de janvier, au lieu du mois d'octobre l'année
dernière, à combien de postes elles pouvaient s'attendre pour l'année.
Par ailleurs, j'ai demandé, ce qui a été fait, que la moitié de la subvention
soit versée non plus après l'été, comme l'année dernière, mais au mois de
janvier, et que l'autre partie soit versée actuellement au vu des premiers
résultats de l'année.
Par conséquent, je partage tout à fait votre point de vue, madame le sénateur.
L'Etat se doit de verser correctement ses subventions pour éviter que, parce
qu'il ne remplit pas les obligations prévues par la loi, les chefs de
l'entreprise d'insertion ne se trouvent obligés, comme c'est trop souvent le
cas aujourd'hui, d'aller voir leur banquier et de payer des agios. C'est ce que
j'ai essayé de faire cette année, et je poursuivrai.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je pense que ce débat a permis d'éclairer exactement la
situation de ces associations et a mis en avant le grand intérêt de Mme Bardou
et donc du Sénat sur ces situations.
Toutefois, il me semblerait plus sage que notre collègue accepte de retirer
cet amendement, car il s'agit quand même de cumuls d'avantages et qu'il faut
pouvoir choisir entre les uns et les autres.
M. le président.
Madame Bardou, acceptez-vous de retirer votre amendement ?
Mme Janine Bardou.
A la demande de M. le rapporteur, je le retire. Cet amendement était surtout
un encouragement pour les entreprises à statut associatif.
(M. Chérioux applaudit.)
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Je tiens à remercier Mme Bardou pour sa compréhension.
M. le président.
L'amendement n° 424 est retiré.
Article 8
M. le président.
« Art. 8. - I. - Il est inséré, dans le code du travail, un article L.
322-4-16-3 dont le 1, le 2, le 3 et le 4 sont ainsi rédigés :
« 1. Les conventions mentionnées à l'article L. 322-4-16 peuvent être conclues
avec des associations intermédiaires.
« Les associations intermédiaires sont des associations ayant pour objet
d'embaucher les personnes mentionnées à l'article L. 322-4-16 afin de faciliter
leur insertion professionnelle en les mettant à titre onéreux à disposition de
personnes physiques ou de personnes morales.
« L'association intermédiaire assure l'accueil des personnes mentionnées à
l'article L. 322-4-16 ainsi que le suivi et l'accompagnement de ses salariés en
vue de faciliter leur insertion sociale et de rechercher les conditions d'une
insertion professionnelle durable.
« Il peut être conclu une convention de coopération entre l'association
intermédiaire et l'Agence nationale pour l'emploi définissant notamment les
conditions de recrutement et de mise à disposition des salariés de
l'association intermédiaire. Ces conventions de coopération peuvent également
porter sur l'organisation des fonctions d'accueil, de suivi et d'accompagnement
mentionnées à l'alinéa précédent. Des actions expérimentales d'insertion ou de
réinsertion peuvent être mises en oeuvre dans ces cadres conventionnels.
« Une association intermédiaire ne peut mettre une personne à disposition
d'employeurs ayant procédé à un licenciement économique sur un emploi
équivalent ou de même qualification dans les six mois précédant cette mise à
disposition.
« 2. Seules les associations intermédiaires qui ont conclu la convention de
coopération mentionnée au quatrième alinéa du 1 peuvent effectuer des mises à
disposition auprès des employeurs visés à l'article L. 131-2, à l'exception des
personnes morales de droit privé à but non lucratif, dans les conditions
suivantes :
«
a)
La mise à disposition pour l'exécution d'une tâche précise et
temporaire d'une durée supérieure à un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat
n'est autorisée que pour les personnes ayant fait l'objet de l'agrément visé au
IV de l'article L. 322-4-16 ;
«
b)
Aucune mise à disposition auprès d'un même employeur ne peut
dépasser une durée maximale fixée par décret en Conseil d'Etat. Toutefois,
cette durée peut être renouvelée une fois, après accord de l'Agence nationale
pour l'emploi et dans des conditions fixées par décret, s'il s'avère qu'un tel
prolongement est nécessaire pour l'insertion du salarié ;
«
c)
La durée totale des mises à disposition d'un même salarié ne peut
excéder une durée fixée par décret en Conseil d'Etat, par périodes de douze
mois à compter de la date de la première mise à disposition.
« La rémunération au sens des dispositions de l'article L. 140-2 que perçoit
le salarié ne peut être inférieure à celle que percevrait dans l'entreprise
concernée, après période d'essai, un salarié de qualification équivalente
occupant le même poste de travail. Le paiement des jours fériés est dû au
salarié d'une association intermédiaire mis à disposition des employeurs visés
au premier alinéa du 2, dès lors que les salariés de cette personne morale en
bénéficient.
« 3. Le salarié d'une association intermédiaire peut être rémunéré soit sur la
base du nombre d'heures effectivement travaillées chez l'utilisateur, soit sur
la base d'un nombre d'heures forfaitaire déterminé dans le contrat pour les
activités autres que celles mentionnées au 2 ci-dessus.
« 4. Les salariés des associations intermédiaires ont droit à la formation
professionnelle continue, que ce soit à l'initiative de l'employeur dans le
cadre du plan de formation de l'association ou des actions de formation en
alternance ou à l'initiative du salarié dans le cadre d'un congé individuel de
formation ou d'un congé de bilan de compétences.
« Dans le cas d'une mise à disposition d'une durée supérieure à la durée visée
au
b
ci-dessus, le salarié est réputé lié à l'entreprise utilisatrice
par un contrat de travail à durée indéterminée. L'ancienneté du salarié est
appréciée à compter du premier jour de sa mise à disposition chez
l'utilisateur. Cette ancienneté est prise en compte pour le calcul de la
période d'essai éventuellement prévue.
« II. - 1. L'avant-dernier alinéa du 3 de l'article L. 128 du code du travail
est complété par les mots : "dans des conditions d'accès et de financement
prévues par décret".
« 2. Dans le 3 de l'article L. 128 du même code, qui devient le 5 de l'article
L. 322-4-16-3, les mots : "du présent titre" sont remplacés par les mots : "du
titre II du livre Ier".
« 3. L'article L. 128 du même code est abrogé.
« III. - Les dispositions du présent article sont applicables à compter du 1er
janvier 1999, à l'exception de celles relatives à la mise à disposition auprès
des employeurs visés au 2 de l'article L. 322-4-16-3 du code du travail qui
prennent effet au 1er juillet 1999. »
Par amendement n° 33, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le premier alinéa du 2 du texte proposé par le I de cet
article pour l'article L. 322-4-16-3 du code du travail, après les mots : « à
l'exception », d'insérer les mots : « des personnes physiques et ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement vise à préciser que les mises à disposition
auprès des personnes physiques, pour des travaux ménagers notamment, ne sont
pas soumises à agrément préalable de l'ANPE.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement serait
favorable à cet amendement si ce dernier était complété par les mots suivants :
« pour des activités ne ressortissant pas à leurs exercices professionnels et
».
M. le président.
Monsieur le rapporteur, que pensez-vous de la suggestion de Mme la ministre
?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
J'y suis favorable, et je rectifie par conséquent mon
amendement en ce sens.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 33 rectifié, présenté par M. Seillier,
au nom de la commission des affaires sociales, et tendant, dans le premier
alinéa du 2 du texte proposé par le I de l'article 8 pour l'article L.
322-4-16-3 du code du travail, après les mots : « l'exception », à insérer les
mots : « des personnes physiques pour des activités ne ressortissant pas à
leurs exercices professionnels et ».
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 34, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, après les mots : « ayant fait l'objet », de rédiger comme
suit la fin du deuxième alinéa
a
du 2 du texte présenté par le I de
l'article 8 pour l'article L. 322-4-16-3 du code du travail : « d'un agrément
par l'agence nationale pour l'emploi, le service départemental d'aide sociale
ou un centre communal ou intercommunal d'action sociale ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
S'agissant de salariés souvent très éloignés du marché du
travail, le caractère exclusif de l'agrément par l'ANPE prévu pour les
entreprises d'insertion ne semble pas justifié pour les associations
intermédiaires. C'est pourquoi cet amendement prévoit que l'agrément pourra
être accordé par l'ANPE, mais aussi par d'autres réseaux susceptibles d'entrer
en contact avec les personnes les plus démunies.
C'est l'amendement que j'avais annoncé tout à l'heure à M. Eckenspieller, qui
avait alors bien voulu retirer son amendement, ce dont je le remercie, de
nouveau.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement émet un avis
défavorable sur cet amendement, car seule l'agence nationale pour l'emploi est
à notre avis habilitée à agréer les personnes ayant vocation à s'adresser aux
structures de l'insertion par l'activité économique.
Il s'agit en effet d'évaluer les handicaps de la personne sur le marché du
travail en fonction du marché local, ainsi que des offres d'emploi du secteur
marchand et non marchand afin de l'orienter vers les propositions les plus
adaptées. Seule l'ANPE nous paraît disposer de l'ensemble de ces
informations.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 35, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de supprimer la première phrase du dernier alinéa du 2 du
texte présenté par le I de l'article 8 pour l'article L. 322-4-16-3 du code du
travail.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Le texte relatif aux associations intermédiaires voté par
l'Assemblée nationale prévoit que la rémunération d'un salarié mis à
disposition par une association intermédiaire ne peut être inférieure à celle
que percevait, dans l'entreprise concernée, après période d'essai, un salarié
de qualification équivalente occupant le même poste de travail.
Cette mesure s'inspire des dispositions prévues en matière de travail
temporaire. Pourtant, les salariés des associations intermédiaires sont souvent
des personnes très éloignées du monde du travail, et leur activité dans
l'entreprise où ils sont envoyés en mission n'est généralement pas prise en
charge par les salariés permanents de cette entreprise.
Il reste qu'un risque d'interprétation litigieuse du texte existe. La mention
peut avoir un effet dissuasif vis-à-vis des employeurs qui recourent aux
services des associations intermédiaires.
Enfin, il est curieux de faire allusion à la période d'essai alors qu'il est
prévu par ailleurs que le salarié ne peut être mis à disposition pendant plus
d'un mois dans la même entreprise.
Pour toutes ces raisons, nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter
l'amendement n° 35.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement émet un avis
défavorable sur cet amendement, car il considère que la rémunération du salarié
mis à disposition par l'association intermédiaire ne peut être inférieure à
celle que percevrait un salarié de qualification équivalente occupant le même
poste de travail. La référence à la période d'essai est liée au fait que, pour
les ouvriers par exemple, celle-ci est en général d'une semaine, soit une durée
bien inférieure au délai que nous prévoyons. Lorsque sa durée est supérieure,
elle ne s'applique bien évidemment pas.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 35.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
M. le rapporteur nous propose de supprimer une disposition introduite par
l'Assemblée nationale.
Après Mme la ministre, je veux souligner que je trouve tout à fait injuste de
traiter différemment le secteur de l'insertion par l'économie et les autres
secteurs.
En effet, pourquoi ne pas transposer au secteur de l'insertion par l'économie
l'ensemble des dispositions protectrices et pénalisantes qui existent pour
d'autres secteurs ? Je rappelle tout de même que le sous-amendement qui avait
été voté par l'Assemblée nationale ouvrait la possibilité de requalifier un
contrat en cas de dépassement de la durée de mise à disposition.
Ainsi, le salarié placé en entreprise par une association intermédiaire sous
contrat à durée déterminée sera réputé lié à l'entreprise utilisatrice par un
contrat à durée indéterminée lorsque celle-ci ne respectera pas le délai d'un
mois renouvelable.
Je suis fort étonnée que l'on veuille remettre ici en cause une disposition
conçue pour éviter les pratiques de certaines entreprises qui abusent un peu
trop, à mon avis, d'une main-d'oeuvre en quête d'insertion. Il serait bon que,
ce soir, le Sénat s'oppose à sa suppression !
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Je suis un peu étonné
par les propos tant de Mme Beaudeau que de Mme la ministre !
Nous examinons un texte relatif à la lutte contre l'exclusion. Nous savons
tous, par notre pratique du terrain - qui est un peu plus poussée que celle de
certains fonctionnaires du ministère ! - comment fonctionnent les associations
intermédiaires : elles s'adressent à des chômeurs qui, pour ne pas se «
déshabituer » de l'activité, sont prêts à effectuer un certain nombre de
travaux dans les entreprises, mais aussi le plus souvent chez les
particuliers.
L'idée d'assimiler ces chômeurs à des salariés « classiques », de leur faire
effectuer une « période d'essai », de leur accorder les mêmes rémunérations est
une idée intellectuellement brillante, mais sans aucun rapport avec la
réalité.
Si nous continuons à mettre en place des législations protectrices « type 1936
», les associations intermédiaires ne trouveront plus d'entreprises prêtes à
faire faire quelques heures de travail à des chômeurs. Si c'est le résultat que
l'on cherche, continuons dans cette voie !
Je considère que cette disposition adoptée par l'Assemblée nationale est tout
à fait superfétatoire et je crois qu'il faut voter l'amendement de la
commission.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 36, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de compléter le 2 du texte présenté par le I de l'article 8
pour l'article L. 322-4-16-3 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :
« Le cas de mise à disposition d'une durée supérieure à la durée visée au
b)
ci-dessus donne lieu à résiliation de la convention mentionnée au
premier alinéa du 1. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement est lié à un amendement que nous examinerons
par la suite et qui tend à supprimer les dispositions introduites par
l'Assemblée nationale prévoyant que, lorsqu'un salarié a été mis à disposition
pendant plus d'un mois dans la même entreprise, celui-ci est réputé lié à
l'entreprise utilisatrice par un contrat de travail à durée indéterminée.
On comprend l'intention de cette mesure - à savoir éviter les abus - car
certaines entreprises ont tendance à recourir aux associations intermédiaires
pour bénéficier, sur une longue période, d'une main-d'oeuvre à bon marché.
Il reste que l'affichage de la sanction peut avoir pour effet de décourager
certaines entreprises de recourir aux associations intermédiaires, sachant que
l'entrepreneur n'est pas toujours en contact direct avec les salariés envoyés
par l'association.
C'est la raison pour laquelle il paraît préférable de remplacer la sanction
qui pèse sur l'entreprise par une sanction pesant sur l'association
intermédiaire qui, en cas de dépassement, verrait automatiquement résiliée la
convention passée avec l'Etat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
En un certain sens, je
comprends le souci de M. le rapporteur, qui souhaite remplacer la sanction de
la requalification, qui a été retenue à l'Assemblée nationale, par une autre
sanction, la résiliation.
Je crois vraiment qu'il n'y a pas de difficulté du côté du chef d'entreprise,
puisque cette requalification du contrat de travail ne s'applique qu'à
l'entreprise unique qui reçoit un salarié pendant plus d'un mois - donc, par
définition elle le sait - et non pas à une multiplicité d'employeurs. Par
conséquent, l'entreprise se met elle-même en contravention avec la loi et elle
sait qu'elle court, dès lors, un risque.
Je préfère la formule que nous proposons - d'autant qu'elle existe déjà pour
le contrat à durée déterminée et pour le travail temporaire en cas de
dépassement de ces durées - à la résiliation, dont les effets ne sont pas
extrêmement évidents pour l'entreprise.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement, comme il le sera à
l'amendement n° 37.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 37, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de supprimer le second alinéa du 4 du texte présenté par le I
de l'article 8 pour l'article L. 322-4-16-3 du code du travail.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement
précédent.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable, par
coordination.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article additionnel après l'article 8
M. le président.
Par amendement n° 38, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi
rédigé :
« Le III de l'article L. 129-1 du code du travail est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« Ce décret précise les conditions dans lesquelles les associations
intermédiaires, agréées à la date de l'entrée en vigueur de la loi n° 96-63 du
29 janvier 1996 en faveur du développement des emplois de services aux
particuliers, poursuivent leur activité en bénéficiant de la réduction d'impôts
mentionnée au II ci-dessus jusqu'au 31 décembre 1999. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La loi relative au développement des emplois de services aux
particuliers a prévu que les entreprises bénéficiant de l'exonération fiscale
mise en place pour développer ce type d'activités devaient avoir pour objet
exclusif d'assurer des services d'aide à domicile.
Cette mention a pu poser des problèmes pour certaines associations
intermédiaires qui exerçaient plusieurs types d'activités.
Il avait été prévu qu'à titre temporaire, dans l'attente d'une réorganisation,
les associations intermédiaires pourraient continuer à exercer plusieurs
activités différentes, dont l'aide à domicile aidée fiscalement, et ce jusqu'au
31 décembre 1998.
Il paraît nécessaire de proroger ce délai d'un an, c'est-à-dire jusqu'au 31
décembre 1999.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Effectivement, les associations
intermédiaires peuvent assurer des services aux particuliers jusqu'au 31
décembre 1998.
Comme j'ai été amenée à le rappeler à l'Assemblée nationale, une mission
conjointe de l'IGAS et de l'inspection générale des finances sur de tels
emplois est en cours. Elle doit rendre ses conclusions au mois de juillet. Nous
souhaitons, en effet, professionnaliser et généraliser des aides plus
cohérentes aux associations et aux structures d'aide à domicile.
C'est au vu de ce rapport que je pourrai être amenée, notamment dans le cadre
de l'examen de la prochaine loi de financement de la sécurité sociale, à
proposer un certain nombre de réformes. Mais j'ai déjà dit à l'Assemblée
nationale que, s'il le fallait, j'étais prête à reporter le délai visé dans cet
article jusqu'au 31 décembre 1999.
Je préférerais attendre ce rapport et la mise au point de dispositions
d'ensemble sur les emplois à domicile avant de prendre une telle mesure.
Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 8.
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - Il est inséré, dans le code du travail, trois articles L.
322-4-16-4 à L. 322-4-16-6 ainsi rédigés :
«
Art. L. 322-4-16-4
. - Il est institué dans chaque département un
conseil départemental de l'insertion par l'activité économique, présidé par le
préfet, composé d'élus locaux, de représentants de l'Etat, de partenaires
sociaux et de personnalités qualifiées notamment issues du mouvement
associatif.
« Ce conseil a pour mission :
« 1° De déterminer la nature des actions à mener, qui tiennent compte aussi
bien des problèmes spécifiques du milieu urbain que de ceux du milieu rural, en
vue de promouvoir les actions d'insertion par l'activité économique ;
« 2° D'élaborer un plan départemental pluriannuel pour l'insertion et l'emploi
en veillant à sa cohérence avec les autres dispositifs de coordination et
notamment avec les plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi et
les programmes départementaux d'insertion ;
« 3° D'assister le préfet dans la préparation et la mise en oeuvre des
conventions mentionnées à l'article L. 322-4-16, ainsi que dans la gestion du
fonds pour l'insertion économique ;
« 4° D'établir une évaluation annuelle de la mise en oeuvre du fonds
départemental pour l'insertion et de la coordination avec les autres actions en
matière d'insertion.
«
Art. L. 322-4-16-5
. - Un fonds départemental pour l'insertion est
institué dans chaque département.
« Il est destiné à financer le développement et la consolidation des
initiatives locales en matière d'insertion par l'activité économique, dans des
conditions déterminées par décret.
« Ce fonds est géré par le représentant de l'Etat dans le département. Celui
ci arrête le montant des aides accordées par le fonds, après avis du conseil
départemental de l'insertion par l'activité économique.
«
Art. L. 322-4-16-6
. - Les communes et les groupements de communes
établissent des plans locaux pluriannuels pour l'insertion et l'emploi dans le
ressort géographique le plus approprié à la satisfaction des besoins locaux,
auxquels les autres collectivités territoriales, les entreprises et les
organismes intervenant dans le secteur de l'insertion et de l'emploi pourront
s'associer. Ils permettent de faciliter l'accès à l'emploi des personnes en
grande difficulté d'insertion sociale et professionnelle dans le cadre de
parcours individualisés permettant d'associer accueil, accompagnement social,
orientation, formation, insertion et suivi. L'Etat apporte son concours à la
mise en oeuvre de ces plans, dans le cadre d'accords conclus avec les
collectivités intéressées et les agences d'insertion mentionnées à l'article
1er de la loi n° 94-638 du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l'emploi, pour
une durée maximale de cinq ans. »
ARTICLE L. 322-4-16-4 DU CODE DU TRAVAIL
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 399 rectifié, MM. Vasselle, Ostermann, Gournac et les
membres du groupe du RPR proposent, dans le premier alinéa du texte présenté
par l'article 9 pour l'article L. 322-4-16-4 du code du travail, de remplacer
les mots : « présidé par le préfet » par les mots : « coprésidé par le préfet
et le président du conseil général ».
Par amendement n° 495, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose :
A. - Dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 9 pour l'article
L. 322-4-16-4 du code du travail, de remplacer le mot : « préfet » par les mots
: « représentant de l'Etat dans le département ».
B. - En conséquence, dans l'ensemble des articles du projet de loi, de
remplacer les mots : « préfet, préfet du département, préfets, préfets de
départements, préfets compétents, préfet de région, préfet de Corse »
respectivement par les mots : « représentant de l'Etat dans le département,
représentant de l'Etat dans le département, représentants de l'Etat dans les
départements, représentants de l'Etat dans les départements, représentants de
l'Etat dans les départements concernés, représentant de l'Etat dans la région,
représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse ».
La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 399 rectifié.
M. Alain Vasselle.
Cet amendement tend à faire coprésider le comité par le préfet et par le
président du conseil général, compte tenu du rôle important que joue le conseil
général en matière d'insertion.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur
l'amendement n° 399 rectifié et pour présenter l'amendement n° 495.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission a considéré que l'amendement n° 399 rectifié
pourrait avoir des conséquences dangereuses sur les finances départementales.
En effet, le conseil départemental de l'insertion par l'activité économique,
que crée l'article 9, est présidé par le préfet, notamment parce qu'il est
chargé de donner un avis sur le montant d'aides financières qui sont, en
réalité, financées par l'Etat dans le cadre du fonds départemental pour
l'insertion.
Si le président du conseil général devait être appelé à coprésider avec le
préfet le conseil départemental, il serait certainement amené à en tirer les
conséquences sur le plan financier et à participer également au financement du
fonds départemental qui permet d'aider au démarrage des entreprises d'insertion
des associations intermédiaires.
Le Gouvernement a choisi une autre solution. Elle ne nous semble pas mauvaise
et nous sommes donc défavorables à l'amendement n° 399 rectifié.
Quant à l'amendement n° 495, il vise à une modification rédactionnelle
d'ensemble. Il convient de remplacer le mot « préfet » par les mots «
représentant de l'Etat ». Au demeurant, ce remplacement devra être systématique
pour tous les amendements qui pourraient être déposés et qui comporteraient le
mot « préfet », quels que soient les territoires concernés, qu'il s'agisse du
département, de la région ou de la collectivité territoriale de Corse.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Avis défavorable sur
l'amendement n° 399 rectifié et favorable sur l'amendement n° 495.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, nous nous rallions à la position de la commission, et
nous retirons l'amendement n° 399 rectifié.
M. le président.
L'amendement n° 399 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 495, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 39, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, après les mots : « présidé par le préfet, », de rédiger
ainsi la fin du premier alinéa du texte présenté par l'article 9 pour l'article
L. 322-4-16-4 du code du travail : « composé de représentants des collectivités
territoriales, des organisations professionnelles ou interprofessionnelles, des
organisations syndicales de salariés représentatives et de personnalités
qualifiées, notamment issues du mouvement associatif ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Actuellement, il est expressément prévu une consultation des
organisations professionnelles avant l'agrément d'une association
intermédiaire. Il est important que cette consultation ait lieu, car les
entrepreneurs du secteur artisanal, notamment, sont soucieux d'éviter les
situations de concurrence déloyale.
Le texte du projet de loi initial prévoit la consultation des organisations
professionnelles au niveau du conseil départemental de l'insertion par
l'activité économique. Cela étant, celles-ci n'ont pas été reprises
expressément dans la composition du conseil telle qu'elle a été prévue par
l'Assemblée nationale.
Cet amendement a donc pour objet de les mentionner clairement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement accepte cette
rédaction, à condition, toutefois, de prévoir la présence de différents
représentants de l'Etat. Il serait dommage, en effet, que seul le préfet
représente l'Etat au sein de la commission. Il est bon, par exemple, que le
directeur départemental du travail puisse y siéger.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, acceptez-vous la modification proposée par le
Gouvernement ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 39 rectifié, présenté par M. Seillier,
au nom de la commission des affaires sociales, et tendant, après les mots : «
présidé par le préfet », à rédiger ainsi la fin du premier alinéa du texte
proposé par l'article 9 pour l'article L. 322-4-16-4 du code du travail : «
composé de représentants de l'Etat, des collectivités territoriales, des
organisations professionnelles ou interprofessionnelles, des organisations
syndicales de salariés représentatives et de personnalités qualifiées,
notamment issues du mouvement associatif ».
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 40, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans le troisième alinéa (1°) du texte présenté par
l'article 9 pour l'article L. 322-4-16-4 du code du travail, de remplacer les
mots : « qui tiennent compte aussi bien des problèmes spécifiques du milieu
urbain que de ceux du milieu rural, » par les mots : « aussi bien en milieu
rural qu'en milieu urbain, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement rédactionnel vise les missions du conseil
départemental de l'insertion par l'activité économique.
Un amendement de l'Assemblée nationale a prévu que ces missions devaient tenir
compte aussi bien des problèmes spécifiques du milieu urbain que de ceux du
milieu rural.
Nous proposons, pour notre part, une rédaction allégée, puisque nous
remplaçons les mots : « qui tiennent compte aussi bien des problèmes
spécifiques du milieu urbain que de ceux du milieu rural » par les mots : «
aussi bien en milieu rural qu'en milieu urbain ».
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 40, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 400 rectifié, MM. Vasselle, Ostermann, Gournac et les
membres du groupe du RPR proposent de compléter le texte présenté par l'article
9 pour l'article L. 322-4-16-4 du code du travail par les alinéas suivants :
« Le plan départemental pluriannuel pour l'insertion et l'emploi est arrêté
conjointement par le préfet et par le président du conseil général, pour une
durée de cinq ans, sur proposition du conseil départemental de l'insertion par
l'activité économique. Le plan peut être révisé selon la même procédure pendant
sa durée de validité. Il est renouvelé au terme de chaque période quinquennale
avant le 31 janvier de l'année suivante.
« Chaque plan départemental pluriannuel pour l'insertion et l'emploi est
arrêté dans un délai d'un an à compter de la date de la publication de la
présente loi.
« Lorsque le préfet et le président du conseil général ne sont pas parvenus à
un accord dans les délais fixés au présent article, le plan départemental est
fixé par arrêté des ministres chargés de l'action sociale et des collectivités
territoriales.
« Dans les départements d'outre-mer, le plan départemental est fixé par arrêté
des ministres chargés de l'action sociale et de l'outre-mer. »
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Il semble essentiel que le conseil départemental pour l'insertion par
l'activité économique élabore un plan départemental arrêté conjointement par le
préfet et le président du conseil général afin de permettre une vue d'ensemble
sur les dispositifs d'insertion des départements, qu'ils soient menés dans le
monde urbain ou dans le monde rural.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement appelle de la part de la commission les mêmes
remarques que celles qu'elle a formulées à propos de l'amendement n° 399
rectifié, voilà quelques minutes.
Le plan départemental pour l'insertion et l'emploi vise notamment les
entreprises d'insertion et les associations intermédiaires qui bénéficient
d'exonérations de charges sociales entièrement financées par l'Etat, de primes
à l'embauche financées également par l'Etat, et de primes au démarrage qui
seront assumées financièrement par le fonds départemental pour l'insertion et
par l'Etat.
Là aussi, si le président du conseil général veut élaborer le plan
conjointement avec le préfet, il devra nécessairement en tirer les conséquences
et apporter lui aussi une contribution financière à ce secteur de l'économie
marchande. Certains départements peuvent légitimement souhaiter prendre de
telles initiatives. Il serait cependant dangereux de les généraliser dès
aujourd'hui dans la loi.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Nous nous rallions à la position de la commission et nous retirons cet
amendement.
M. le président.
L'amendement n° 400 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 322-4-16-4 du
code du travail.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 322-4-16-5 DU CODE DU TRAVAIL
M. le président.
Sur le texte proposé pour l'article L. 322-4-16-5 du code du travail, je ne
suis saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je le mets aux voix.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 322-4-16-6 DU CODE DU TRAVAIL
M. le président.
Par amendement n° 41, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose, dans la première phrase du texte présenté par l'article 9
pour l'article L. 322-4-16-6 du code du travail, de remplacer le mot : «
établissent » par les mots : « peuvent établir ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement opère une rectification rédactionnelle qui
n'est pas dénuée d'importance.
Une lecture rapide de l'article relatif aux nouveaux plans locaux pluriannuels
pour l'insertion et l'emploi peut laisser penser qu'ils ont un caractère
obligatoire. Or tel n'est pas le cas dans l'esprit des auteurs du
dispositif.
En tout état de cause, le fait que le fonds social européen vienne abonder de
manière complémentaire les sommes engagées par les collectivités locales
constitue une forte incitation à l'élaboration d'un tel plan.
Il s'agit non pas de dévaloriser l'intérêt de ces plans, mais de bien préciser
que les collectivités locales ont la possibilité d'établir de tels plans.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L. 322-4-16-6
du code du travail.
(Ce texte est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 9
M. le président.
Par amendement n° 280, Mme Dusseau propose d'insérer, après l'article 9, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article L. 322-4-16 du code du travail, un article
ainsi rédigé :
«
Art. L. ... -
L'Etat peut également conclure des conventions
mentionnées à l'article L. 322-4-16 avec des organismes habilités au titre de
l'aide sociale à l'hébergement pour mettre en oeuvre des actions d'insertion
sociale et professionnelle au profit des personnes bénéficiant de leurs
prestations. »
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Cet amendement vise à autoriser les centres d'hébergement et de réadaptation
sociale, les CHRS, qui ont des ateliers dans lesquels ils peuvent mettre très
rapidement des personnes en situation d'emploi, à conclure des conventions avec
l'Etat.
Cet amendement nous a été inspiré par un certain nombre de responsables de
CHRS. Ceux-ci nous ont fait savoir qu'il leur serait très utile de pouvoir
bénéficier de ce type de conventionnement, qui leur permettrait, dans des
structures qui leur sont proches, de mettre tout de suite des gens au travail,
pour quelques heures ou pour une demi-journée, dans le cadre de l'insertion.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier
rapporteur.
La commission souhaiterait d'abord connaître l'avis du
Gouvernement.
En effet, nous avions cru comprendre que l'Assemblée nationale avait adopté, à
l'article 6, une disposition indiquant que « les conditions de conventionnement
des personnes morales de droit public ou de droit privé à but non lucratif
produisant des biens et services en vue de leur commercialisation et
développant des activités présentant un caractère d'utilité sociale sont
définies par décret ».
La demande de Mme Dusseau nous paraît donc satisfaite par cette insertion de
l'Assemblée nationale. Nous souhaiterions, néanmoins, que Mme le ministre nous
confirme cette interprétation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Pour être tout à fait honnête,
j'avoue ne pas être en mesure de répondre immédiatement à la question de M. le
rapporteur, faute de disposer du texte.
Le Gouvernement envisageait de s'en remettre à la sagesse du Sénat parce que,
comme l'a dit Mme Dusseau, ces organismes habilités à l'aide sociale exercent
effectivement parfois des activités professionnelles. Il ne nous paraît pas
très utile de faire référence uniquement à ces organismes, et pas à d'autres,
ce qui pourrait provoquer des ambiguïtés.
Cela étant, je comprends parfaitement le souci de Mme Dusseau et je m'en
remets à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Sagesse favorable !
(Sourires.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 280, pour lequel la commission et le
Gouvernement s'en remettent à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 9.
Par amendement n° 341, M. Fischer, Mme Borvo et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 9, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article L. 322-4-16 du code du travail, un article
ainsi rédigé :
«
Art. L. ... -
Chaque fonds départemental crée en son sein un fonds de
développement des actions d'insertion du secteur marchand.
« Ce fonds de développement a pour mission :
« 1. De financer des programmes d'insertion élaborés par les établissements du
secteur privé en direction des chômeurs de longue durée et des titulaires des
minima sociaux de plus d'un an ;
« 2. De promouvoir une incitation financière spécifique sous forme de
bonification de nouveaux crédits à moyen-long terme avec la médiation de
l'institution financière librement choisie par l'établissement concerné. Cette
bonification est modulable en fonction du nombre d'opérations d'insertion et de
leur durabilité. Elle peut aller jusqu'à la prise en charge totale par le fonds
de développement des intérêts d'emprunt tel que des subventions de crédits. Les
pouvoirs publics peuvent solliciter la contribution du secteur bancaire et
financier pour la réalisation de cet objectif d'insertion.
« 3. Les ressources de ce fonds sont constituées par les dotations budgétaires
de l'insertion par l'activité économique, l'équivalent des montants des minima
sociaux auparavant servis aux personnes intéressées et le produit de la taxe
d'insertion à la charge des sociétés non financières et financières ayant des
résultats bénéficiaires et procédant à des licenciements.
« Ces dispositions sont fixées par décret. »
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Hier, dans son intervention générale, mon ami Guy Fischer regrettait de voir
les entreprises si peu présentes, si peu impliquées dans le financement des
mesures prévues pour l'insertion et l'emploi des personnes en difficulté.
L'Etat et les collectivités locales, si elles le souhaitent, alimentent le
fonds départemental pour l'insertion visé à l'article 9, pour soutenir,
notamment, le montage des structures de l'insertion par l'économique.
L'objectif de votre texte, madame la ministre, est d'agir en amont, chaque
fois que cela est possible, pour prévenir l'exclusion. Dans cette optique,
pourquoi ne pas solliciter l'ensemble des établissements du secteur marchand
?
Notre amendement entend associer les entreprises, au même titre que d'autres
partenaires, au financement d'un fonds départemental de développement des
actions d'insertion dans leur secteur.
En amont, nous incitons les entreprises à investir pour la création d'emplois
en leur consentant des bonifications de crédit à moyen et long terme.
Par ailleurs, en aval, nous taxons les entreprises qui, bien qu'ayant dégagé
des bénéfices, ont eu recours aux licenciements économiques.
Notre proposition d'instaurer à la charge des entreprises une taxe d'insertion
nous paraît être un bon moyen de pérenniser l'existence de ce fonds.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Nous ne pouvons que nous féliciter, dans un premier temps,
que cet amendement vise à assurer le développement des actions d'insertion dans
le secteur marchand, puisque c'est la philosophie que la commission a essayé de
développer dans ce texte. Nous sommes donc particulièrement attachés à cette
orientation et à toutes les mesures susceptibles de faciliter la réinsertion en
entreprise.
Toutefois, il nous est apparu que le fonds dont la création est proposée
serait alimenté par une « taxe d'insertion à la charge des sociétés non
financières et financières ayant des résultats bénéficiaires et procédant à des
licenciements ». Nous ne pouvons mesurer exactement l'augmentation de charges
qui pèserait sur les entreprises du fait de cette nouvelle taxe d'insertion.
Etant par ailleurs relativement réservés sur le développement des procédures
de crédits bonifiés spécialisés, nous avons donné un avis défavorable à cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Cette proposition a déjà été
présentée à l'Assemblée nationale. J'estime qu'elle conduit à instaurer des
modalités complexes de gestion des aides de l'Etat au titre de l'insertion
professionnelle des personnes rencontrant des difficultés particulières d'accès
à l'emploi.
Si nous souhaitons tous que les entreprises qui réalisent des bénéfices ne
fassent pas supporter les frais de restructuration qu'elles engagent à l'Etat -
ce qui explique les mesures que j'ai été amenée à prendre s'agissant de la
préretraite, qui visent à réduire le nombre de préretraites et leur financement
par l'Etat ; ce qui explique aussi le mécanisme de modulation de l'impôt sur
les sociétés en fonction des créations d'emplois que nous avons mis en place
dans la loi de finances de 1998 - il ne nous paraît pas souhaitable, en
revanche, de sanctionner l'ensemble des entreprises qui licencient, car parmi
celles-ci il en existe évidemment et malheureusement qui ont de réelles
difficultés et qui pourraient les voir s'accroître encore du fait d'une
taxation nouvelle.
Aussi suis-je défavorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 341, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 416 rectifié, MM. Lise, Larifla, Désiré et les membres du
groupe socialiste proposent d'insérer, après l'article 9, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 42-6 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au
revenu minimum d'insertion est ainsi rédigé :
«
Art. 42-6.
- Dans chaque département d'outre-mer est créée une agence
d'insertion, établissement public local à caractère administratif.
« L'agence élabore et met en oeuvre le programme départemental d'insertion
prévu à l'article 36.
« Elle propose la part des crédits d'insertion affectés par l'Etat au
financement des logements sociaux pour les bénéficiaires du revenu minimum
d'insertion et précise le montant de sa participation à la réalisation de cette
même action.
« Elle établit en outre le programme annuel de tâches d'utilité sociale
offertes aux bénéficiaires du revenu minimum d'insertion dans les conditions
prévues à l'article 42-8.
« L'agence se substitue au conseil départemental d'insertion. »
« II. - Les six premiers alinéas de l'article 42-7 de ladite loi sont
remplacés par les dispositions suivantes :
« L'agence d'insertion est administrée par un conseil d'administration présidé
conjointement par le préfet et le président du conseil général.
« Le conseil d'administration comprend, en outre, en nombre égal :
« 1° Des représentants de la région, du département et des communes ;
« 2° Des représentants des services de l'Etat dans le département ;
« 3° Des personnalités qualifiées choisies au sein d'associations,
d'administrations territoriales ou d'institutions intervenant dans le domaine
de l'insertion et de la lutte contre le chômage, nommées en nombre égal par le
préfet et le président du conseil général ;
« Un représentant du personnel avec voix consultative.
« L'agence d'insertion est dirigée par un directeur nommé par arrêté conjoint
du préfet et du président du conseil général. »
Par amendement n° 432, M. Lauret propose d'insérer, après l'article 9, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article 42-6 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre
1988 relative au revenu minimum d'insertion est ainsi rédigé :
« Dans chaque département d'outre-mer est créée une agence d'insertion,
établissement public placé sous la tutelle du représentant de l'Etat dans le
département. »
Par amendement n° 431, M. Lauret propose d'insérer, après l'article 9, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 42-6 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au
revenu minimum d'insertion est complété,
in fine,
par un alinéa ainsi
rédigé :
« Avant le 1er janvier 2000, elle est chargée de l'élaboration, la mise en
place, conjointement avec les représentants des ministères chargés des affaires
sociales, de l'emploi et de l'outre-mer, d'un programme visant à offrir un lieu
unique d'accueil aux personnes privées d'emploi et aux bénéficiaires du revenu
minimum d'insertion.
« II. - Les charges supplémentaires résultant de l'application du I ci-dessus
sont compensées, à due concurrence, par la majoration des droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Larifla, pour défendre l'amendement n° 416 rectifié.
M. Dominique Larifla.
Cet amendement vise à réformer le statut des agences départementales
d'insertion, les ADI, qui a été institué par la loi du 25 juillet 1994 et mis
en place uniquement dans les départements d'outre-mer.
La réforme est souhaitée par la majorité des élus des départements d'outre-mer
pour deux types de raisons.
En premier lieu, la décision de confier les politiques d'insertion dans les
départements d'outre-mer à des établissements publics nationaux soumis à la
double tutelle du secrétariat d'Etat à l'outre-mer et du ministère de
l'économie et des finances a, dès l'origine, été perçue comme portant atteinte
aux principes fondamentaux de la décentralisation.
En effet, cela a eu comme conséquence de déposséder les assemblées
départementales des départements d'outre-mer de compétences et de prérogatives
qu'exercent toujours leurs homologues de métropole.
En second lieu, les résultats obtenus ne correspondent nullement aux ambitions
affichées par les concepteurs des agences départementales d'insertion. Le
pourcentage d'allocataires bénéficiant d'une insertion par l'activité est
demeuré relativement faible, et parfois même inférieur à celui auquel on était
parvenu avant la création des agences départementales d'insertion.
Par ailleurs, les contrats d'insertion par l'activité sont d'une durée bien
plus courte que ne l'étaient les contrats de type CES qui étaient proposés
auparavant aux RMIstes. Cela crée pour les intéressés un facteur de précarité
supplémentaire et contribue à biaiser certaines statistiques, qui
comptabilisent en réalité le nombre de contrats effectués durant une même
année.
Enfin, des sommes importantes - plusieurs centaines de millions de francs -
demeurent inutilisées dans les quatre agences départementales d'insertion.
Cette situation s'explique par la lourdeur du fonctionnement du système mis en
place, par l'insuffisante prise en compte de l'importance des autres formes
d'insertion - notamment par l'économique et par le logement -, et par les
directives de la tutelle financière visant à maintenir en permanence
d'importants fonds de roulement.
M. le président.
La parole est à M. Lauret, pour présenter l'amendement n° 432.
M. Edmond Lauret.
Je retire l'amendement n° 432 au profit de l'amendement n° 416 rectifié,
présenté par MM. Larifla, Lise et Désiré, qui me paraît plus complet.
Pour les mêmes raisons, je retire par anticipation l'amendement n° 433.
M. le président.
L'amendement n° 432 est retiré.
Vous avez la parole pour défendre l'amendement n° 431, monsieur Lauret.
M. Edmond Lauret.
L'amendement n° 431 prévoit l'institution d'un guichet unique pour les
exclus.
L'extension du champ d'intervention de l'ADI à d'autres publics que les
allocataires du RMI au sens strict semble une bonne chose, dans la mesure où
elle permettrait de confier à une structure unique la responsabilité de la
politique d'insertion au plan local. Elle ouvrirait des perspectives
intéressantes, notamment par la création d'un guichet unique auquel pourraient
s'adresser tous les exclus.
Le dispositif d'insertion y gagnerait en cohérence et en lisibilité puisqu'il
appartiendrait à un seul organe, à savoir le conseil d'administration de
l'agence, de définir et de conduire la globalité de la politique d'insertion
dans chaque département d'outre-mer.
Ce guichet unique ne devrait pas pour autant confier à l'agence le soin de
gérer opérationnellement l'intégralité de la politique d'insertion, mais
permettrait de tracer les axes prioritaires d'intervention, opposables à tous
les autres partenaires institutionnels concernés, dans le cadre d'un programme
départemental d'insertion pluriannuel intéressant tous les publics.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 416 rectifié et 431
?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Si vous le permettez, monsieur le président, j'exposerai
simultanément l'avis de la commission des affaires sociales sur les amendements
n°s 416 rectifié, 417 et 418.
Ces trois amendements ont pour objet de modifier le statut actuel des agences
d'insertion mises en place dans les départements d'outre-mer. Ces agences, qui
sont des établissements publics, sont coprésidées par le préfet et le président
du conseil général, mais les décisions du conseil d'administration sont
soumises, pour être exécutoires, à l'approbation de la tutelle, directement
exercée par le ministère de l'économie et des finances.
Ce dispositif est excessivement lourd, et l'efficacité des établissements est
réduite en raison des contraintes de fonctionnement et de la concentration des
tâches que leur impose leur qualité d'employeur de titulaires du RMI.
Les trois amendements précités ne prévoient pas de revenir à la situation qui
prévalait avant la mise en oeuvre de la loi instaurant le RMI, mais il est
proposé d'institutionnaliser une coordination entre les deux partenaires
principaux que sont l'Etat et le département. Il s'agit de transformer l'agence
d'insertion actuelle en un établissement public local qui serait coprésidé par
le préfet et le président du conseil général.
Les trois amendements nous semblent aller dans le sens d'une meilleure
décentralisation et déconcentration. Ils permettront en outre aux agences
d'insertion d'être mieux gérées, au plus près des besoins locaux.
Pour toutes ces raisons, la commission des affaires sociales a émis un avis
favorable.
Par l'amendement n° 431, M. Lauret propose de créer un lieu d'accueil pour
toutes les personnes sans emploi et pour tous les bénéficiaires du RMI dans les
départements d'outre-mer. Cette idée paraît très intéressante en termes
d'amélioration de la cohérence des actions de lutte contre l'exclusion. Il
serait souhaitable que l'amendement n° 431 soit transformé en un
sous-amendement, afin de compléter l'article 42-6 de la loi du 1er décembre
1988 tel qu'il est rédigé par l'amendement n° 416 rectifié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 416 rectifié et 431
?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je veux revenir quelques
instants sur l'historique des agences d'insertion.
Elles ont été mises en place pour remédier aux difficultés de fonctionnement
du dispositif du RMI, difficultés qui se traduisaient par deux phénomènes :
d'une part, une quasi-absence des programmes départementaux d'insertion et,
d'autre part, des problèmes, notamment financiers, de gestion tout à fait
importants.
C'est ainsi que ces agences de développement ont été mises en place à
l'échelon national en étant toutefois coprésidées par les préfets et les
présidents des conseils généraux.
Leur bilan est largement positif, même s'il me semble qu'il faut prendre
rapidement des mesures pour limiter la bureaucratisation et accélérer la prise
de décisions - en cela, je suis d'accord avec les auteurs des différents
amendements.
L'inspection générale des affaires sociales et l'inspection générale des
finances ont réalisé, au début de l'année 1998, une enquête dans chacun des
départements d'outre-mer et ont confirmé l'aspect largement positif des ADI
nationales, qui ont effectivement permis de faire entrer dans le droit commun à
la fois la distribution du RMI mais aussi les programmes départementaux
d'insertion.
Compte tenu de l'ampleur des problèmes de pauvreté et de précarité dans les
départements d'outre-mer, que nous connaissons tous, de la coresponsabilité de
l'Etat et des départements dans la conduite des politiques d'insertion, du
volume des crédits mobilisés, dont une part importante vient de l'Etat, il
convient de maintenir le statut d'établissements publics nationaux
coprésidés.
En revanche, le Gouvernement étudie actuellement des mesures d'assouplissement
des procédures financières pour que les décisions soient prises au plus près du
terrain dans des délais beaucoup plus rapides, de façon à faciliter le
fonctionnement des agences d'insertion.
Je voudrais ajouter qu'un certain nombre de présidents de conseils généraux et
même de syndicats de ces organismes nous ont dit combien ils souhaitaient que
nous maintenions le caractère national de ces agences, pour éviter qu'ils
n'aient à subir des pressions auxquelles il est très souvent extrêmement
difficile de résister tant, effectivement, les difficultés sont grandes.
Je me tourne vers les auteurs de ces amendements. Autant, concernant les
emplois-jeunes, parce qu'il s'agissait d'emplois qui contribueraient
effectivement au développement de ces départements d'outre-mer, j'ai accepté le
versement aux ADI des fonds qui sont gérés directement par ces départements -
ces fonds seront d'ailleurs plus importants pour les départements d'outre-mer -
autant il me semble qu'en l'occurrence ce n'est pas un service à rendre à ces
départements que de permettre que les mesures d'assistance soient décidées sur
le terrain.
Nous avons cependant un effort important à faire pour débureaucratiser, pour
simplifier les procédures et, ainsi, permettre que les décisions soient plus
efficaces et prises dans de meilleurs délais.
Pour toute ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
M. le président.
Monsieur Lauret, acceptez-vous de transformer votre amendement n° 431 en un
sous-amendement à l'amendement n° 416 rectifié ?
M. Edmond Lauret.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 431 rectifié, présenté par M.
Lauret, et tendant :
A. - A compléter le texte proposé par le I de l'amendement n° 416 rectifié
pour l'article 42-6 de la loi du 1er décembre 1988 par un alinéa ainsi rédigé
:
« Avant le 1er janvier 2000, elle est chargée de l'élaboration, de la mise en
place, conjointement avec les représentants des ministères chargés des affaires
sociales, de l'emploi et de l'outre-mer, d'un programme visant à offrir un lieu
unique d'accueil aux personnes privées d'emploi et aux bénéficiaires du revenu
minimum d'insertion. »
B. - A compléter le texte de cet amendement par un III ainsi rédigé :
« III. - Les charges supplémentaires résultant de l'application du I ci-dessus
sont compensées, à due concurrence, par la majoration des droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du même code. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 431 rectifié, accepté par la commission
et repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 416 rectifié, accepté par la
commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 9.
Par amendement n° 417, MM. Lise, Larifla, Désiré et les membres du groupe
socialiste, proposent d'insérer, après l'article 9, un article additionnel
ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article 42-8 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre
1988 relative au revenu minimum d'insertion est remplacé par les deux alinéas
suivants :
« Les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 322-4-7 du code
du travail, qui auront conclu une convention d'objectif avec l'agence
d'insertion, pourront recruter des allocataires du RMI ayant souscrit un
contrat d'insertion par l'activité.
« Ces contrats sont régis par les articles L. 322-4-7, L. 322-4-8 et L.
322-4-10 à L. 322-4-14 du code du travail. »
La parole est à M. Larifla.
M. Dominique Larifla.
J'ai déjà défendu cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 417, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 9.
Par amendement n° 418, MM. Lise, Larifla, Désiré et les membres du groupe
socialiste, proposent d'insérer, après l'article 9, un article additionnel
ainsi rédigé :
« L'article 1er de la loi n° 94-638 du 25 juillet 1994 tendant à favoriser
l'emploi, l'insertion et les activités économiques dans les départements
d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte est abrogé. »
La parole est à M. Larifla.
M. Dominique Larifla.
Je me suis déjà exprimé.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 418, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 9.
Articles 10 et 11
M. le président.
« Art. 10. - I. - Au premier alinéa de l'article L. 241-11 du code de la
sécurité sociale, les mots : "article L. 128 du code du travail" sont remplacés
par les mots : "article L. 322-4-16-3 du code du travail".
« II. - Le deuxième alinéa de l'article L. 241-12 du même code est ainsi
rédigé :
« Il n'est pas dû de cotisations patronales d'assurances sociales,
d'allocations familiales et d'accidents du travail au titre des activités
mentionnées au présent article et calculées sur l'assiette forfaitaire
mentionnée au précédent alinéa ou sur la rémunération ou la partie de la
rémunération inférieure ou égale, par heure d'activité rémunérée, au salaire
minimum de croissance. Les présentes dispositions sont applicables aux périodes
d'activité accomplies à compter du 1er janvier 1999. »
« III. - Les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 241-11 du code de
la sécurité sociale sont abrogées à compter du 1er janvier 1999. Toutefois,
elles demeurent applicables aux embauches effectuées avant cette date. » -
(Adopté.)
« Art. 11. - L'article L. 351-24 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Le 3° est complété par les mots : ", de l'allocation de solidarité
spécifique prévue à l'article L. 351-10 du code du travail, ou de l'allocation
de parent isolé prévue à l'article L. 524-1 du code de la sécurité sociale"
;
« 1°
bis
Après le huitième alinéa du même article, il est inséré un
alinéa ainsi rédigé :
« Peuvent également bénéficier des aides prévues aux précédents alinéas les
personnes salariées ou licenciées d'une entreprise soumise à l'une des
procédures prévues par la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au
redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises qui reprennent
tout ou partie de cette entreprise dès lors qu'elles s'engagent à investir en
capital la totalité des aides et à réunir des apports complémentaires en
capital n'excédant pas le total de ces aides. » ;
« 2° L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les personnes mentionnées au 3° du présent article, et à compter du 1er
janvier 1999, la participation financière de l'Etat prévue aux alinéas
précédents peut être mise en oeuvre dans des conditions fixées par décret,
lorsque le projet de création ou de reprise d'entreprise est de nature à
assurer l'insertion professionnelle durable des personnes intéressées. » -
(Adopté.)
Article 11
bis
M. le président.
« Art. 11
bis
. - I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 161-1 du
code de la sécurité sociale, les mots : "au premier alinéa" sont remplacés par
les mots : "aux deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième
alinéas".
« II. - Dans le premier alinéa de l'article L. 161-1-1 du même code, les mots
: "au premier alinéa" sont remplacés par les mots : "aux deuxième, troisième,
quatrième, cinquième et sixième alinéas". »
Par amendement n° 42, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 161-1 du code de la sécurité
sociale, les mots : "au premier alinéa" sont remplacés par les mots : "aux
deuxième (1°), troisième (2°), quatrième (3°), cinquième (4°) et sixième (5°)
alinéas".
« II. - Dans le premier alinéa de l'article L. 161-1-1 du même code, les mots
: "au premier alinéa" sont remplacés par les mots : "aux deuxième (1°),
troisième (2°), quatrième (3°), cinquième (4°) et sixième (5°) alinéas". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel, monsieur le
président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 42, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 11
bis
est ainsi rédigé.
Article 12
M. le président.
« Art. 12. - Le livre IX du code du travail est ainsi modifié :
« 1° L'article L. 900-6 devient l'article L. 900-7 ;
« 2° Il est inséré un article L. 900-6 ainsi rédigé :
«
Art. L. 900-6
. - La lutte contre l'illettrisme fait partie de
l'éducation permanente. L'Etat, les collectivités territoriales, les
établissements publics, les établissements d'enseignement publics et privés,
les associations, les organisations professionnelles, syndicales et familiales,
ainsi que les entreprises y contribuent chacun pour leur part.
« Les actions de lutte contre l'illettrisme sont des actions de formation, au
sens de l'article L. 900-2.
« Les coûts de ces actions sont imputables au titre de l'obligation de
participation au financement de la formation professionnelle prévue à l'article
L. 951-1.
« Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en
Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 43, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose dans la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté
par le 2° de cet article pour l'article L. 900-6 du code du travail, de
remplacer le mot : « contribuent » par le mot : « concourent. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement, qui porte sur un article prévoyant la prise
en charge de la lutte contre l'illettrisme dans le cadre des actions de
formation professionnelle, prévoit que les différents acteurs « concourent » et
non pas « contribuent » à la lutte contre l'illettrisme. Il faut, en effet,
éviter de laisser à penser que le dispositif est géré par l'Etat et que les
entreprises ont seulement vocation à le financer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Pery,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
Je ferai simplement observer que le verbe « concourent » est peut-être plus
valorisant que le verbe « contribuent ». En tout cas, il est plus dynamique et
il exprime une adhésion plus qu'une contrainte.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?..
Je mets aux voix l'amendement n° 43, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 442,MM. Darniche et Maman proposent, dans le deuxième alinéa
du texte présenté par le 2° de l'article 12 pour l'article L. 900-6 du code du
travail, après les mots : « la lutte contre l'illettrisme », d'insérer les mots
: « comprenant sa prévention, sa détection et la lutte contre la dyslexie et la
dysphasie ».
La parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche.
J'ai déposé un certain nombre d'amendements concernant la lutte contre
l'illettrisme car j'estime que le projet de loi ne met pas suffisamment
l'accent sur ce problème, qui est extrêmement important dans notre pays et qui
est l'une des raisons essentielles de l'exclusion.
L'amendement n° 442 n'est pas le plus important de ces amendements. Je
souhaiterais voir ajouter à la lutte contre l'illettrisme les moyens de
prévenir celui-ci : la détection, la prévention et la lutte contre la dyslexie
et la dysphasie, qui sont, hélas, des raisons de retards importants et durables
du langage chez l'enfant. Ces retards sont souvent mal détectés et mal pris en
charge, et leurs conséquences produisent des effets graves, plus
particulièrement chez les enfants des milieux défavorisés.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Nous partageons le souci des auteurs de l'amendement
d'améliorer la prévention, la détection et la lutte contre la dyslexie et la
dysphasie. Mais il nous semble que cette détection est plus utile quand elle
s'applique à des enfants, notamment des milieux défavorisés.
Or l'article 12 qu'il nous est proposé d'amender concerne les actions de
formation professionnelle pour des adultes illettrés. S'agissant de ces
derniers, la priorité est de leur donner les bases devant faciliter leur
insertion sociale. Dans le monde du travail, la question de la détection de la
dyslexie est sans doute moins prioritaire que pour les enfants.
C'est pourquoi, nous sommes défavorables à l'insertion de ces dispositions
dans cet article du projet de loi, sachant que, dans le chapitre relatif à
l'accès à l'éducation et à la culture, plus précisément à l'article 78
bis
, il pourra être donné satisfaction aux auteurs de cet amendement sur
la question de la dyslexie.
M. le président.
Monsieur Darniche, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Darniche.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 442 est retiré.
Par amendement n° 44, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de compléter
in fine
le troisième alinéa du texte
présenté par le 2° de l'article 12 pour l'article L. 900-6 du code du travail
par les mots suivants : « dans les conditions prévues au présent livre ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement renvoie aux dispositions générales applicables
en matière de formation professionnelle afin de garantir que des fonds sont
bien utilisés dans le cadre des accords paritaires interprofessionnels.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Pery,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
Article 13
M. le président.
« Art. 13. - I. - A titre expérimental, jusqu'au 31 décembre 2000, et par
dérogation aux limites d'âge prévues à l'article L. 980-1 du code du travail,
les contrats mentionnés au premier alinéa de l'article L. 981-1 du même code
sont ouverts aux demandeurs d'emploi de vingt-six ans et plus rencontrant des
difficultés sociales et professionnelles.
« Les dispositions des articles L. 980-1, L. 981-1, L. 981-2, L. 981-4, L.
981-10, L. 981-11 et L. 981-12 du code du travail ainsi que celles du IV de
l'article 30 de la loi de finances pour 1985 (n° 84-1208 du 29 décembre 1984)
sont applicables aux contrats signés en application de l'alinéa précédent.
« Les dispositions de l'article L. 981-3 ne leur sont pas applicables.
« Un décret fixe les autres conditions de mise en oeuvre des contrats
mentionnés ci-dessus, en particulier les conditions auxquelles doivent répondre
les demandeurs d'emploi susceptibles d'en bénéficier.
« II. - Les organisations syndicales représentatives de salariés et les
organisations représentatives d'employeurs sont invitées à négocier au niveau
national et interprofessionnel avant le 31 décembre 1999 les modalités d'une
ouverture pérenne des contrats mentionnés à l'article L. 981-1 du code du
travail aux demandeurs d'emploi âgés de vingt-six ans et plus. »
« III. - Un rapport d'évaluation de l'application des dispositions du présent
article est présenté au Parlement avant le 31 décembre 1999. »
Sur cet article, la parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
L'article 13 du projet de loi porte sur une expérimentation nouvelle : la
pratique des contrats de qualification pour les demandeurs d'emploi âgés de
plus de 26 ans et privés d'activité depuis une longue durée.
Cet article nous permet donc d'ouvrir un débat qui n'est pas sans intérêt sur
la formation professionnelle.
Nous nous devons d'apprécier à leur juste valeur l'ensemble des dispositions
contenues dans le projet de loi qui portent sur les questions de la formation
et de l'emploi.
Le titre Ier du texte qui nous est soumis appréhende en effet, sur la base de
ce qui existe déjà - et qui ne manque d'ailleurs pas d'une complexité qu'il
conviendrait de notre point de vue de mesurer et de corriger - l'ensemble des
dispositions susceptibles de permettre aux demandeurs d'emplois les plus en
difficulté de se replacer dans un processus d'emploi passant notamment par la
formation.
Il est patent que les publics traditionnellement ciblés par la politique de
l'emploi - jeunes de moins de 26 ans ou demandeurs d'emploi de longue durée -
peuvent, dès lors que leur parcours connaît quelques errements, risquer
l'exclusion des dispositifs, ce qui conduit en fait à l'exclusion tout
court.
L'une des limites des politiques pour l'emploi mises en oeuvre jusqu'ici est
due au caractère pour le moins segmentaire de leur public - la diversité des
actions contribuant d'ailleurs à accroître cette segmentation - et sur les
contradictions que cette situation fait naître à la longue.
On nous propose donc avec cet article 13 de remédier à cette situation en
autorisant, de manière expérimentale, les plus de 26 ans à s'inscrire dans un
contrat de qualification.
La mise en oeuvre de tels contrats pose toutefois un certain nombre de
questions.
Quant aux finalités et aux objectifs généraux, ces contrats - convient-il de
le rappeler ? - procèdent, en vertu de l'article L. 933-2 du code du travail,
de la négociation de branche ou interprofessionnelle.
Une des questions récurrentes posées dans ce cadre et que cette
expérimentation ne manquera pas de soulever de notre point de vue est celle de
la reconnaissance effective de la qualification acquise.
Le débat est en effet ouvert en ces matières depuis longtemps entre la
formation tendant à favoriser, pour les personnes concernées, l'acquisition
d'une formation « diplômante », notamment au travers de procédures modulaires
d'acquisition de connaissances, et la formation tendant à favoriser
l'employabilité dans l'entreprise, le contrat de qualification ou tout autre
contrat de formation étant dès lors une sorte de période d'essai de plus longue
durée.
C'est aussi cette problématique qui est au coeur de la négociation collective
dans l'entreprise du plan de formation telle qu'elle résulte de l'article L.
933-3 du code du travail.
Le troisième alinéa de cet article précise en effet que « le comité
d'entreprise donne en outre son avis sur les conditions d'accueil, d'insertion
et de formation de jeunes dans l'entreprise, notamment de jeunes bénéficiaires
des contrats d'insertion en alternance mentionnés aux articles L. 981-1, L.
981-6 et L. 981-7 ».
Cette expérimentation des contrats de qualification élargis aux plus de 26 ans
devra, à notre avis, se doubler d'une réflexion plus profonde sur le devenir de
ces formations, notamment sur la possibilité de faire réellement accéder à une
qualification les bénéficiaires de ces contrats.
Cette démarche est d'autant plus indispensable qu'il nous souvient que le
récent projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et
financier a, entre autres mesures, prévu une ponction de 500 millions de francs
sur les fonds de la formation en alternance, ponction dont nous n'acceptons pas
les raisons mais que l'examen du présent projet de loi semble devoir
expliciter.
Tout en partageant les dispositions de l'article 13 puisqu'elles visent
concrètement à ne pas rompre des processus de formation et d'insertion engagés
par des chômeurs au seul motif de leur âge, nous considérons que la situation
que nous venons de décrire commande la vigilance la plus attentive pour que la
formation professionnelle atteigne effectivement à l'avenir des objectifs plus
ambitieux de qualification des stagiaires.
Nous voterons donc cet article 13 sous ces auspices.
M. le président.
Par amendement n° 281,Mme Dusseau propose de compléter le premier alinéa du
paragraphe I de cet article par les mots : « et non titulaires d'un diplôme de
l'enseignement général, technologique ou professionnel. »
La parole et à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Cet article 13 prévoit l'extension des contrats de qualification aux
demandeurs d'emploi de 26 ans et plus.
Il convient de relever que le texte proposé par le Gouvernement et non modifié
par l'Assemblée nationale est relativement vague. Il y est mentionné, d'une
part, que le dispositif s'applique à ceux qui « rencontrent des difficultés
sociales et professionnelles » et, d'autre part, qu'un décret fixe les
conditions de mise en oeuvre des contrats.
Or je voudrais attirer votre attention, madame la secrétaire d'Etat, sur le
fait que les contrats de qualification pour les jeunes de moins de 26 ans ont
été souvent en partie détournés de leur objet initial. Des glissements ont eu
lieu vers des publics plus qualifiés que ceux qui étaient prévus à
l'origine.
On constate, en effet, une surqualification des personnes bénéficiant de ces
contrats, un certain nombre d'employeurs ayant profité de l'aubaine pour faire
embaucher sous contrats de qualification des personnes qui avaient pratiquement
la qualification requise.
Animée par un souci identique à celui qui m'a amenée à déposer un amendement
demandant que le programme TRACE soit exclusivement réservé à des jeunes sans
qualification, je propose donc qu'il soit bien précisé, à l'article 13, que les
contrats de qualification pour adultes sont réservés à des personnes non
titulaires d'un diplôme de l'enseignement général, technologique ou
professionnel.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement ne vise pas à recentrer, comme le dit l'exposé
des motifs, mais à axer purement et simplement les contrats de qualification
adultes sur des personnes qui ne seraient pas titulaires d'un diplôme de
l'enseignement général technologique ou professionnel.
Nous avons déjà eu l'occasion d'examiner un amendement analogue à l'article
2.
Il nous semble qu'il ne faut pas écarter
a priori
du bénéfice des
contrats de qualification pour adultes des personnes qui sont titulaires d'un
diplôme. En effet, il peut s'agir d'un CAP, diplôme au demeurant modeste, qui
ne constitue pas nécessairement une garantie efficace contre le chômage.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Pery,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, je vais plaider pour le retrait
de cet amendement.
Votre préoccupation, madame le sénateur, est partagée par le Gouvernement. La
dérive des contrats de qualification que vous dénoncez a été effectivement
constatée. Vous savez que nous souhaitons recibler les contrats vers le public
en difficulté, cela figure clairement au coeur même de ce projet de loi relatif
à la lutte contre les exclusions.
En ce qui concerne le contrat de qualification pour adultes, l'article 13 du
projet de loi prévoit qu'un décret précisera le public éligible, en réservant
ce contrat aux demandeurs d'emploi de bas ou de premier niveau de
qualification.
Le recours à un texte réglementaire paraît préférable à l'intégration dans la
loi d'une définition du public visé par la mesure, et ce pour deux raisons.
D'abord, il permettra de mener une concertation avec les partenaires sociaux,
avec lesquels ce point n'a pas encore été abordé ; ensuite, je rappelle que la
mesure a, pour le moment, un caractère expérimental.
M. le président.
Madame Dusseau, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Joëlle Dusseau.
Vous avez bien compris, madame la secrétaire d'Etat, que mon souci était de
faire en sorte que ces contrats de qualification pour adultes ne connaissent
les dérives qui ont contribué à faire perdre leur substance, ou leur objectif
en tout cas, aux contrats de qualification destinés aux jeunes tels que nous
les avons vécus.
Je reconnais bien volontiers avec M. le rapporteur que mon amendement comporte
un aspect extrêmement restrictif, mais il est lié au souci prioritaire de
recibler le dispositif sur les publics en grande difficulté, notamment sur les
personnes sans qualification.
Comme j'ai la garantie de Mme la secrétaire d'Etat et de Mme la ministre que
le décret prendra en charge ce souci, je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 281 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13.
(L'article 13 est adopté.)
Article 13
bis
M. le président.
« Art. 13
bis
. - Le Gouvernement présentera au Parlement, avant la fin
1999, un rapport sur le système de rémunération des stagiaires et notamment sur
l'allocation formation reclassement. Ce rapport analysera les modalités et les
sources de financement et portera également sur les caractéristiques des
publics bénéficiaires, les dispositifs mobilisés et les formations proposées et
sur leur dimension qualifiante. »
Par amendement n° 45, M. Seillier, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de rédiger comme suit cet article :
« Le Gouvernement présentera au Parlement, avant la fin de l'année 1999, un
rapport sur l'allocation formation reclassement, portant, en particulier, sur
son financement par l'Etat et sur la rémunération des stagiaires. L'Agence
nationale pour l'emploi - ANPE - et l'Union nationale pour l'emploi dans
l'industrie et le commerce - UNEDIC - seront associées à l'élaboration de ce
rapport. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
Cet amendement reprend, s'agissant du rapport demandé au
Gouvernement sur l'allocation de formation reclassement, l'AFR, la rédaction
proposée par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, qui mettait
l'accent sur le financement effectué par l'Etat par rapport au financement
effectué par les régions .
Par ailleurs, il convient de bien distinguer les aspects liés au financement
de ce rapport sur l'AFR et ceux qui concernent la formation elle-même.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Pery,
secrétaire d'Etat.
L'avis du Gouvernement est défavorable. Nous
souhaitons conserver le texte qui a été adopté à l'Assemblée nationale.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 45, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 13
bis
est ainsi rédigé.
Article 14
M. le président.
« Art. 14. - Le premier alinéa de l'article L. 322-4-19 du code du travail est
ainsi modifié :
« 1° Après les mots : "visés aux articles L. 322-4-7 et L. 322-4-8-1", sont
insérés les mots : "et les personnes titulaires d'un contrat de travail
mentionné à l'article 42-8 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 précitée"
;
« 2° Dans la seconde phrase, après les mots : "à l'exclusion des périodes de
travail accomplies en exécution des contrats de travail visés aux articles L.
115-1, L. 322-4-7, L. 322-4-8-1, L. 981-1, L. 981-6, L. 981-7", sont insérés
les mots : "et les contrats mentionnés à l'article 42-8 de la loi n° 88-1088 du
1er décembre 1988 précitée". » -
(Adopté.)
Article 15
M. le président.
« Art. 15. - Le 1° du I de l'article L. 832-2 du code du travail est ainsi
rédigé :
« 1° A une aide de l'Etat pour les catégories de bénéficiaires rencontrant les
difficultés d'accès à l'emploi les plus graves ; ces catégories, ainsi que les
conditions d'octroi et le montant de l'aide qui peut être modulée en fonction
de la gravité des difficultés d'accès à l'emploi, sont fixés par décret ; ».
Par amendement n° 434, M. Lauret propose de supprimer cet article.
La parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret.
L'étude d'impact transmise au Parlement par le Gouvernement fait ressortir que
le ciblage des contrats d'accès à l'emploi, les CAE, sur les publics les plus
en difficulté engendrera une diminution de l'ordre de 30 % du recours à la
mesure. Pour la seule île de la Réunion, nous estimons la chute du nombre de
contrats CAE à 1 600, sur les 3 700 diminutions pour les quatre départements
d'outre-mer, et pour 12 300 contrats signés en 1996.
Or, à ce jour, plus aucun contrat CAE n'est disponible à la Réunion pour 1998
et j'ai dû, la semaine dernière, écrire à Mme le ministre pour lui demander
d'augmenter leur nombre dans l'île.
Il est donc indispensable de corriger les effets négatifs de l'article 15 en
laissant en l'état le nombre actuel de CAE, qui, déjà, ne donne pas
satisfaction.
Il ne saurait être question de mettre en balance l'accroissement du nombre de
CES. En effet, d'une part, les CEA et les CES constituent des formes tout à
fait différentes de contrats destinés à lutter contre l'exclusion. d'autre
part, pour les quatre départements d'outre-mer, le nombre de CES n'a cessé de
baisser, passant de 178 850 en 1996 à 133 000 en 1998.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission est favorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement n'est pas
favorable à cet amendement.
En effet, les contrats d'accès à l'emploi, qui sont, dans les DOM, le pendant
des contrats d'initiative emploi, ont été mis en place pour favoriser
l'insertion des publics en difficulté dans le secteur marchand. Or, au lieu de
voir une extension du nombre de ces personnes en difficulté embauchées grâce
aux CAE, nous avons constaté, comme l'a d'ailleurs dit l'auteur de
l'amendement, une chute de la proportion des RMIstes ayant passé de tels
contrats : de 36 % en 1992 à 9,6 % en 1997.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement entend, par sa proposition de
modulation, recentrer ces mesures sur les publics en difficulté et favoriser
les entreprises qui accepteront de recruter parmi eux, parmi les RMIstes
notamment. Nous savons, en effet, combien leur nombre est important dans les
DOM.
En conséquence, le Gouvernement souhaite le maintien du texte actuel.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 434, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 15 est supprimé.
Articles additionnels après l'article 15
M. le président.
Par amendement n° 436, M. Lauret propose d'insérer, après l'article 15, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'adaptation particulières
dans les départements d'outre-mer du cumul entre le revenu minimum d'insertion
et une activité salariée. »
La parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret.
Le RMI étant inférieur de 20 % dans les départements d'outre-mer, les règles
de cumul RMI-salaire doivent être adaptées afin de mieux inciter à la reprise
du travail dans la mesure où le SMIC est le même qu'en métropole.
On pourrait permettre dans les DOM le cumul à 100 % pendant six mois, puis à
50 % pendant les six autres mois, contre 100 % pendant trois mois, puis 75 %
pendant six mois et 50 % pendant trois mois en métropole.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission a émis un avis défavorable ; elle s'en est
tenue à sa volonté de ne pas déroger à la règle commune en matière
d'intéressement. Je souhaiterais donc que cet amendement soit retiré.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement partage l'avis
de la commission. Il souhaite le maintien des règles communes, et ce d'autant
plus que, dans les départements d'outre-mer, alors que le SMIC est au même
niveau qu'en métropole, le RMI ne représente que 80 % de celui qui est versé en
métropole. Il en résulte une incitation à la reprise du travail plus forte.
M. le président.
L'amendement n° 436 est-il maintenu, monsieur Lauret ?
M. Edmond Lauret.
Je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 436 est retiré.
M. le président.
Par amendement n° 443, MM. Darniche, Durand-Chastel, Habert et Maman proposent
d'insérer, après l'article 15, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu
minimum d'insertion est complétée par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, l'allocation est suspendue de droit en cas de deux refus
consécutifs de l'intéressé de participer aux actions définies à l'alinéa
précédent. »
La parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche.
Il s'agit d'inscrire dans le projet de loi que l'allocation du RMI sera
suspendue de droit après que le bénéficiaire aura refusé deux fois
consécutivement de participer aux actions définies à l'alinéa précédent.
L'objet de cette proposition est de rendre au RMI son caractère originel. En
effet, il avait été conçu, en 1988, comme une aide provisoire devant permettre
aux personnes sans emploi de retrouver facilement leur place dans la société ;
il ne doit pas servir à pérenniser des situations de pauvreté.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier,
rapporteur.
La commission a considéré que cet amendement était satisfait
par la législation en vigueur, puisque des sanctions sont déjà prévues dans la
loi relative au revenu minimum d'insertion.
Par conséquent, elle a émis un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Défavorable.
M. le président.
Monsieur Darniche, l'amendement n° 443 est-il maintenu ?
M. Philippe Darniche.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 443 est retiré.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux.
La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance.
3
DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel,
par lettre en date du 10 juin 1998, le texte de la décision rendue par le
Conseil constitutionnel qui concerne la conformité à la Constitution de la loi
d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail.
Acte est donné de cette communication.
Cette décision du Conseil constitutionnel sera publiée au
Journal
officiel,
édition des lois et décrets.
4
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi adopté avec
modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, instituant une
commission consultative du secret de la défense nationale.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 487, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
5
DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la prorogation de l'accord de
coopération entre la Communauté européenne de l'énergie atomique, le
gouvernement du Japon, le gouvernement de la Fédération de Russie et le
gouvernement des Etats-Unis d'Amérique concernant les activités ayant trait au
projet détaillé (EDA) du réacteur thermonucléaire expérimental international
(ITER).
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le n° E-1095 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
84-4 de la Constitution :
- Proposition de directive du Conseil concernant un système transparent de
règles harmonisées en matière de restrictions à la circulation applicables aux
poids lourds effectuant des transports internationaux sur des routes
déterminées.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le n° E-1096 et
distribuée.
6
DÉPÔT D'UN RAPPORT
M. le président.
J'ai reçu de M. Pierre Fauchon un rapport, fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale, sur le projet de loi relatif aux alternatives aux
poursuites et renforçant l'efficacité de la procédure pénale (n° 434,
1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le n° 486 et distribué.
7
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au jeudi 11 juin 1998 :
A neuf heures trente :
1. Suite de la discussion du projet de loi (n° 445, 1997-1998), adopté par
l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, d'orientation relatif à la
lutte contre les exclusions.
Rapport (n° 450, 1997-1998) de M. Bernard Seillier, fait au nom de la
commission des affaires sociales ;
Avis (n° 472, 1997-1998) de M. Philippe Richert, fait au nom de la commission
des affaires culturelles ;
Avis (n° 471, 1997-1998) de M. Gérard Braun, fait au nom de la commission des
affaires économiques et du Plan ;
Avis (n° 478, 1997-1998) de MM. Jacques Oudin et Paul Loridant, fait au nom de
la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques
de la nation ;
Avis (n° 473, 1997-1998) de M. Paul Girod, fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale.
Aucun amendement n'est plus recevable.
A quinze heures et le soir :
2. Questions d'actualité au Gouvernement.
3. Suite de l'ordre du jour du matin.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Débat consécutif à la déclaration du Gouvernement relative à la politique de
réduction des risques en matière de toxicomanie :
- délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 15 juin
1998, à dix-sept heures.
Projet de loi relatif aux alternatives aux poursuites et renforçant
l'efficacité de la procédure pénale (n° 434, 1997-1998) :
- délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mardi 16 juin 1998, à dix-sept heures ;
- délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 16 juin 1998, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 11 juin 1998, à zéro heure vingt-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Conditions d'aménagement de l'autoroute A 64
302.
- 10 juin 1998. -
M. Gérard Roujas
tient à attirer l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur les conditins d'aménagement de la RN 117 en autoroute A 64 dans sa portion
comprise entre Muret et Martres-Tolosane. Contrairement au choix fait pour le
reste de l'A 64 entre Toulouse et Bayonne, ce tronçon n'a pas été réalisé en
site propre mais à la place de la RN 117. Sur près de cinquante kilomètres, les
services qui existaient le long de cette voie (restauration,
stations-service...) ont été supprimés. Conscients du caractère spécifique de
ce tronçon autoroutier, les élus concernés ont demandé à être consultés sur cet
aménagement et ont proposé la réalisation de trois aires de service, environ
tous les trente kilomètres : Capens, Martres-Tolosane et Poulat-Taillebourg.
Cette proposition des élus unanimes a été acceptée à l'époque par
l'administration, qui a réalisé, voici quelques mois, un appel d'offres afin
d'attribuer les concessions des aires de service de Martres-Tolosane et de
Capens. Or le résultat de cet appel d'offres soulève quelques interrogations :
1° comment expliquer qu'un seul pétrolier ait répondu ? 2° le choix fait d'une
concession par aire plutôt que d'une concession croisée sur les deux aires
était-il le plus judicieux et le mieux à même de répondre à l'attente des élus
? La seule certitude à ce jour est que l'aire de service de Capens sera
réalisée. Par contre, l'incertitude la plus grande règne pour l'aire de service
de Martres. Il lui demande de bien vouloir faire toute la lumière sur cet appel
d'offres et de tout mettre en oeuvre afin que les aires de services de
Martres-Tolosane et de Capens soient réalisées avec l'ensemble des services
attendus des usagers et des populations locales.
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 10 juin 1998
SCRUTIN (n° 94)
sur l'amendement n° 480, présenté par MM. Alain Vasselle, Joseph Ostermann et
Michel Doublet, tendant à insérer un article additionnel après l'article 5
bis
du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après
déclaration d'urgence, d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions
(consultation du maire ou du président du centre communal ou intercommunal
d'action sociale de la commune de résidence du demandeur du RMI).
Nombre de votants : | 316 |
Nombre de suffrages exprimés : | 314 |
Pour : | 217 |
Contre : | 97 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre :
16.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
17.
Contre :
6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer,
Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Pour :
93.
GROUPE SOCIALISTE (75) :
Contre :
75.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :
Pour :
56.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. René Monory, président du Sénat,
et Michel Mercier.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :
Pour :
42.
Abstentions :
2. _ MM. Jean-Pierre Fourcade et Bernard Seillier.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Jean Delaneau, qui présidait la
séance.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :
Pour :
9.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jean-Paul Bataille
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
André Gaspard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Basile Tui
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Ont voté contre
François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Jean Derian
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Aubert Garcia
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Pierre Lefebvre
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
Odette Terrade
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber
Abstentions
MM. Jean-Pierre Fourcade, Bernard Seillier.
N'a pas pris part au vote
M. Michel Mercier.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Delaneau, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 317 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 158 |
Pour l'adoption : | 218 |
Contre : | 97 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés, conformément à la liste ci-dessus.