Séance du 30 juin 1998
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Nouvelle-Calédonie. -
Adoption d'un projet de loi constitutionnelle (p.
1
).
Discussion générale : M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer ;
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice ; M. Jean-Marie
Girault, rapporteur de la commission des lois.
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
MM. Jacques Larché, président de la commission des lois ; Georges Othily, Robert Pagès, Simon Loueckhote.
Suspension et reprise de la séance (p. 2 )
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
MM. Daniel Hoeffel, Guy Allouche.
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
MM. Jacques Habert, Charles Pasqua, Mme Lucette Michaux-Chevry, M. le
secrétaire d'Etat.
Clôture de la discussion générale.
Articles 1er à 3. - Adoption (p.
3
)
Vote sur l'ensemble (p.
4
)
MM. Lucien Lanier, Basile Tui, Roland du Luart.
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
Adoption, par un scrutin public à la tribune, du projet de loi
constitutionnelle.
3.
Transmission d'un projet de loi
(p.
5
).
4.
Dépôt de propositions de loi
(p.
6
).
5.
Dépôt d'une proposition d'acte communautaire
(p.
7
).
6.
Clôture de la session
(p.
8
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à dix heures quarante-cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
NOUVELLE-CALÉDONIE
Adoption d'un projet de loi constitutionnelle
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi constitutionnelle (n°
497, 1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la
Nouvelle-Calédonie. [Rapport n° 522 (1997-1998).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, la Nouvelle-Calédonie nous est lointaine et proche à
la fois.
Elle est lointaine, à l'évidence, par la géographie - elle se trouve à 18 000
kilomètres de l'hexagone - par son isolement dans un océan Pacifique
majoritairement anglophone, par les distances même qui répartissent sur une
terre grande comme le Portugal une population d'un peu plus de 200 000
habitants.
Mais elle est proche, parce que, depuis sa prise de possession en 1853, elle
entretient une relation forte et tumultueuse avec la France. Elle a été
présente à l'esprit de chacun des responsables politiques de ce pays au travers
des drames et des épreuves qu'elle a traversés pendant ces quinze dernières
années. Elle est proche aussi, parce que chacun voit qu'avec ce qui se passe
là-bas dans le Pacifique, c'est une certaine image de la France qui se joue.
Elle est proche encore, parce que, chacun le sait, une majorité des habitants
de la Nouvelle-Calédonie souhaite aujourd'hui rester dans l'ensemble
français.
A la suite du drame d'Ouvéa, l'Etat, grâce à la détermination de M. Michel
Rocard, le RPCR, conduit par le député Jacques Lafleur, et le FLNKS, par
Jean-Marie Tjibaou, signaient en juin 1988 les accords de Matignon. Les deux
légitimités, ceux qui veulent le maintien dans la République et les partisans
de l'indépendance se reconnaissaient. « Ni nous sans vous, ni vous sans nous »,
cette proclamation s'inscrivait sur les murs de Nouméa. Le projet de loi qui
donnait une traduction institutionnelle à ces accords était adopté par le
peuple français lors du référendum du 9 novembre 1988.
Ces accords ont durablement rétabli la paix civile et institué un esprit de
dialogue entre les signataires et, par voie de conséquence, les principales
composantes politiques.
Ces accords prévoyaient une période de dix années consacrées au rééquilibrage
entre les communautés et à l'exercice des responsabilités au plus près des
habitants par des institutions locales : la province Nord, la province Sud et
celle des îles Loyauté. L'Etat restait chargé des compétences régaliennes et
assurait également dans un souci de neutralité l'exécutif du territoire.
Ces accords ont été loyalement appliqués par les trois parties et ont survécu
à l'assassinat, en 1989, de Jean-Marie Tjibaou.
Des efforts importants consentis par l'Etat en matière d'investissements
publics et de formation ont permis d'améliorer de manière sensible la vie
quotidienne des Calédoniens. Dans le même temps, la Nouvelle-Calédonie a pris
sa place parmi les pays du Pacifique.
Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, selon les accords de
Matignon, un référendum d'autodétermination devait avoir lieu en 1998, avec un
corps électoral restreint aux électeurs résidant sur le territoire depuis
1988.
Cependant, il est vite apparu qu'il n'était pas souhaitable de limiter le
choix des Calédoniens à la question de l'indépendance. Sur l'initiative de M.
Jacques Lafleur, qui souhaitait éviter la division de l'opinion calédonienne,
les forces politiques de la Nouvelle-Calédonie et l'Etat sont convenus de
rechercher ensemble ce que M. Lafleur a dénommé le premier une solution
consensuelle.
Le FLNKS avait posé un préalable relatif à l'accès à la ressource minière,
avec un projet d'usine métallurgique de nickel en province Nord. Ce préalable a
pu être levé grâce à l'accord conclu à Bercy le 1er février 1998 entre l'Etat,
la Nouvelle-Calédonie et les opérateurs miniers concernés, dont le groupe
public ERAMET.
Les négociations tripartites entre l'Etat, le FLNKS et le RPCR ont pu
s'engager sous la présidence du Premier ministre le 24 février 1998. Elles se
sont poursuivies sans relâche, tantôt à Paris, tantôt à Nouméa, afin de
déterminer une solution qui puisse être acceptée par tous les partenaires.
Approuvé par les instances respectives des deux formations ainsi que par les
principales forces vives de la Nouvelle-Calédonie, le texte de l'accord a été
signé le 5 mai 1998, à Nouméa, par le Premier ministre, M. Lionel Jospin, et
les représentants du RPCR et du FLNKS, dont les délégations étaient
respectivement conduites par M. le député Jacques Lafleur et M. Roch Wamytan.
Il est devenu l'accord de Nouméa, publié au
Journal officiel
de la
République française le 27 mai.
Que contient cet accord ?
Il s'ouvre par un préambule qui, je le sais, a pu soulever des interrogations
parmi certains d'entre vous.
Nous savons que l'histoire de la Nouvelle-Calédonie est courte mais souvent
tragique. Les Kanaks ont vu leurs terres confisquées par la colonisation, les
Français qui se sont installés ont surmonté de très grandes difficultés,
d'autres communautés sont venues pour travailler dans des conditions souvent
pénibles, on le sait, notamment dans les mines.
Les Kanaks se sont sentis rejetés aux marges géographiques, démographiques,
économiques et sociales de leur propre terre. De ce sentiment d'exclusion est
née leur revendication, culturelle d'abord, politique ensuite. Les
incompréhensions, les peurs, les rancoeurs ont nourri l'explosion de violence
des années quatre-vingt.
Comment porter, chacun, cette histoire ? Comment porter, ensemble, cette
histoire partagée ? Comment être d'accord sur un futur s'il n'y a pas d'accord
sur le passé ?
A ces interrogations fondamentales répond le préambule de l'accord de Nouméa.
Ce texte n'est ni une version officielle de l'histoire, ni une repentance du
passé ; il n'épuise pas le sujet, il n'interdit pas la recherche ou la
critique. Parce qu'il a été signé par le Premier ministre de la République et
les présidents des deux principales formations politiques de la
Nouvelle-Calédonie, il fonde un projet politique partagé sur deux évidences qui
sont autant de concessions majeures. Les Calédoniens d'origine européenne
reconnaissent que la Nouvelle-Calédonie est d'abord une terre kanak ; les
Kanaks reconnaissent que les autres communautés qui ont fait souche en
Nouvelle-Calédonie y ont leur place et leur avenir.
Telles sont les bases sur lesquelles, désormais, un avenir partagé est
possible. Tel est le sens de l'accord de Nouméa. Il s'agit de permettre à la
Nouvelle-Calédonie de maîtriser son destin, un destin choisi, un destin
partagé.
Ce destin est, en effet, d'abord un destin choisi.
Dans la logique des accords de Matignon conclus il y a dix ans, le projet qui
vous est soumis résulte non pas des options unilatérales de l'un ou de l'autre
des partenaires, mais de longues négociations entre le Gouvernement et les deux
principales forces politiques de la Nouvelle-Calédonie. Ce choix sera soumis à
la ratification des populations intéressées par un scrutin local fondé sur le
corps électoral de l'article 2 de la loi référendaire de 1988 ; ce scrutin
pourrait avoir lieu au mois de novembre.
Ensuite, une loi organique sur la Nouvelle-Calédonie vous sera soumise. Elle
devrait permettre la tenue d'élections d'ici à un an. En cette seconde
occasion, les Calédoniens pourront donc affirmer leur volonté de s'inscrire
dans la perspective des accords de Nouméa.
Le destin choisi, c'est également la possibilité pour les Calédoniens de
maîtriser leurs problèmes et leur développement dans des conditions qui vont
bien au-delà d'une très large autonomie.
L'exécutif, actuellement assuré par le haut-commissaire, serait ainsi
transféré à un gouvernement représentant les diverses forces politiques.
Les compétences actuellement exercées par l'Etat seraient progressivement
transférées à la Nouvelle-Calédonie, ou partagées avec elle sur de nombreux
sujets majeurs, tels que la réglementation minière, l'enseignement ou les
relations extérieures.
L'Etat ne conserverait, au terme de cette évolution, que le noyau dur des
compétences régaliennes : la justice, la défense, l'ordre public, la
monnaie.
Les principales délibérations du Congrès acquerraient un statut quasi
législatif et ne pourraient plus être contestées après leur publication, sauf,
évidemment, dans le cadre du contentieux administratif.
Le destin choisi, c'est aussi la possibilité d'envisager, sereinement et dès à
présent, le terme de cette période. Dans des conditions minutieusement décrites
par les accords de Nouméa, les populations intéressées seront appelées, dans
vingt ans - moins si le Congrès le décide, c'est-à-dire entre quinze et vingt
ans - à se prononcer sur la question de la pleine souveraineté.
Ainsi donc, au début comme à la fin de cette évolution, des consultations
locales viendraient sceller les choix des Calédoniens.
Ce destin choisi, c'est aussi un destin partagé entre toutes les communautés
qui composent la réalité contemporaine et la richesse humaine de la
Nouvelle-Calédonie.
Tel est le sens du préambule de l'accord de Nouméa, dont j'ai voulu vous
montrer l'apport indispensable. Diverses dispositions culturelles et
symboliques ainsi que la création d'un Sénat coutumier compétent en matière
foncière et d'état des personnes consacrent la place des Kanaks dans la société
calédonienne.
Cette identité calédonienne réunit le peuple d'origine, les Kanaks, et tous
ceux qui ont fait le choix de vivre sur cette terre et de contribuer à son
développement. C'est une chance pour l'avenir de ce pays que de pouvoir ainsi
conjuguer des civilisations qui se fécondent. C'est une chance pour la France
que de pouvoir faire vivre notre langue, notre culture, au coeur du
Pacifique.
L'identité calédonienne trouve sa traduction concrète dans deux dispositions
de l'accord de Nouméa qui constituent les prémisses d'une citoyenneté : la
possibilité donnée au Congrès de réglementer l'emploi local, en instituant des
mesures spécifiques pour les Calédoniens, et la limitation du corps électoral
pour les scrutins de début et de fin de la période couverte par les accords,
comme pour les élections aux assemblées de province et au Congrès.
Cette citoyenneté en émergence constitue une novation dans notre système
juridique, et le Gouvernement ne s'y est engagé qu'après une réflexion
approfondie.
Chacun voit bien que la situation et l'histoire de la Nouvelle-Calédonie sont
sans équivalents et qu'il eût été risqué de ne pas accompagner l'évolution
souhaitée par les deux grandes formations politiques du territoire.
Il fallait tenir compte des spécificités de la Nouvelle-Calédonie : un marché
de l'emploi très restreint - 200 000 habitants - un équilibre démographique qui
fonde le pacte conclu entre les communautés. L'intelligence politique commande
de ne voir qu'adaptation à une réalité particulière puisque, dans l'esprit des
promoteurs de l'accord, il ne saurait être question de revendiquer une
quelconque discrimination.
Le destin partagé, c'est aussi le choix d'un gouvernement de
Nouvelle-Calédonie qui serait élu à la proportionnelle pour permettre à la
minorité d'être associée aux responsabilités, dans une logique océanienne de
recherche du consensus.
Le destin partagé, c'est encore la poursuite des efforts de rééquilibrage,
dans sa double acception, entre le grand Nouméa, qui concentre aujourd'hui 120
000 habitants sur les 200 000 de la Nouvelle-Calédonie, et entre toutes les
communautés.
Beaucoup a été fait pendant la période des accords de Matignon, mais les
résultats obtenus en matière de développement économique, de formation,
d'emploi et d'éducation doivent être consolidés et amplifiés.
Le destin partagé, c'est, enfin, le destin partagé avec la France. La France a
fait sienne la Nouvelle-Calédonie dans les conditions rappelées par le
préambule. Dans la logique des accords de Matignon puis de l'accord de Nouméa,
il est à l'honneur de notre pays d'accompagner la Nouvelle-Calédonie sur le
chemin qu'elle s'est choisi pour les vingt prochaines années.
Si le projet de loi constitutionnelle est adopté, beaucoup restera à faire. Le
Premier ministre s'est engagé à ce que l'accord de Nouméa soit appliqué
totalement et loyalement, dans sa lettre et dans son esprit.
La solidité de l'accord, l'épanouissement des sentiments de confiance et
d'espoir qu'il a suscités en Nouvelle-Calédonie dépendent de l'attention et de
la diligence de chacun des partenaires.
Il s'agit bien de garantir la paix civile et d'offrir les conditions d'un
développement harmonieux à une population qui, le moment venu, aura à choisir
son destin en toute lucidité puisque les éléments pour une pleine émancipation
seront alors réunis.
Nous sommes au début d'un processus, à ce moment historique où la
Nouvelle-Calédonie ne subit pas une évolution statutaire imposée, mais partant
d'un regard douloureux mais nécessaire sur son passé, choisit d'inventer les
conditions d'un avenir pour que chacune des communautés puisse trouver sa
place.
Je l'ai dit lors de déplacements récents à Wallis-et-Futuna et en Polynésie
française : l'accord de Nouméa n'est pas porteur d'exclusion envers quelque
communauté que ce soit. Il est le point de départ d'un cheminement qui rejette
la violence et par lequel la Nouvelle-Calédonie doit trouver sa voie.
L'Assemblée nationale, à une très large majorité, a compris cette démarche et
a souhaité tout faire pour la traduire juridiquement et politiquement. Les
modifications qu'elle a apportéees au projet de loi initial ont été acceptées
par le Gouvernement, rendant ainsi possible, si vous le souhaitez, un vote
conforme par le Sénat.
Le vote de l'Assemblée nationale a été accueilli avec une très grande
satisfaction en Nouvelle-Calédonie.
Il vous appartient, mesdames, messieurs les sénateurs, de permettre la
révision constitutionnelle que rend nécessaire l'accord de Nouméa.
Pour toutes ces raisons, avec Mme la garde des sceaux, avec les principales
forces politiques de Nouvelle-Calédonie, je vous demande d'adopter ce projet de
loi constitutionnelle tel qu'il a été modifié par l'Assemblée nationale.
(Applaudissements sur les travées socialistes, sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées de l'Union
centriste et du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord présenter mes
remerciements à la commission des lois et à son président pour l'excellent
travail qui a été réalisé dans des délais brefs.
Le président Jacques Larché et six membres de la commission se sont rendus en
Nouvelle-Calédonie au début du mois de juin et ont pu constater combien les
populations, dans leurs diversités, accueillaient favorablement l'accord de
Nouméa.
Le projet de loi constitutionnelle qui vous est soumis aujourd'hui s'inscrit
dans la logique de l'accord signé à Nouméa le 5 mai 1998 par M. le Premier
ministre et par les présidents des deux formations politiques de
Nouvelle-Calédonie, le député M. Jacques Lafleur pour le RPCR et M. Roch
Wamytan pour le FLNKS.
Première question : pourquoi une révision de la Constitution s'est-elle
imposée ?
D'abord, elle s'est imposée pour des raisons politiques, car l'accord de
Nouméa prévoit explicitement une telle révision.
Au-delà de la technique juridique, les partenaires politiques de
Nouvelle-Calédonie ont souhaité l'inscription dans notre loi fondamentale des
efforts et des concessions réciproques auxquels ils ont consenti. Les accords
deMatignon en 1988 avaient été consacrés par la loi référendaire, c'est-à-dire
par l'expression directe de la souveraineté nationale.
L'accord de Nouméa doit également être consacré par un engagement solennel de
la représentation nationale garantissant sa pérennité au-delà des divergences
politiques. Le Président de la République, le Premier ministre et l'ensemble du
Gouvernement, l'Assemblée nationale et le Sénat s'en porteront ainsi
garants.
Par ailleurs, cette révision est juridiquement nécessaire.
L'avenir de la Nouvelle-Calédonie, tel que cet accord le dessine, à l'issue
d'une période de quinze à vingt ans, repose sur des orientations qui ne peuvent
être mises en oeuvre dans le cadre actuel de notre Constitution.
En premier lieu, le corps électoral qui aura à se prononcer avant la fin de
1998 sur les dispositions de l'accord de Nouméa et celui qui aura à se
prononcer à l'issue de la période transitoire de quinze à vingt ans sont
définis selon des critères spécifiques dérogatoires, respectivement au
troisième alinéa de l'article 3 et au troisième alinéa de l'article 53 de la
Constitution.
En deuxième lieu, la date de la consultation des populations intéressées, à
l'issue de la période transitoire prévue par l'accord, sera déterminée par le
Congrès du territoire de Nouvelle-Calédonie à la majorité des trois cinquièmes
et non par l'Etat.
En troisième lieu, la réponse qui sera apportée par le corps électoral à
l'issue de cette période transitoire aura une valeur différente selon qu'elle
sera positive ou négative. Si la réponse est positive, la Nouvelle-Calédonie
accédera à la pleine émancipation. Si, en revanche, elle est négative, le tiers
des membres du Congrès pourra décider d'une nouvelle consultation, conformément
au point 5 du document d'orientation de l'accord de Nouméa.
D'autres dispositions de l'accord définissent l'organisation politique de la
Nouvelle-Calédonie dans la phase intermédiaire. Elles sont spécifiques et
n'entrent pas non plus dans le cadre actuel de la Constitution.
Elles n'entrent pas dans le champ de l'article 72 de la Constitution, qui
place les territoires d'outre-mer à égalité avec les communes et les
départements, ainsi que les autres collectivités territoriales.
Elles n'entrent pas non plus dans le champ du régime spécial des collectivités
territoriales d'outre-mer de l'article 74 de la Constitution, du moins tel
qu'il a été précisé par la jurisprudence.
La décision récente du Conseil constitutionnel du 9 avril 1996 sur la loi
organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française a en effet
étroitement limité les possibilités d'évolution des territoires d'outre-mer.
Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a estimé qu'il était
impossible de porter atteinte aux conditions essentielles de l'exercice des
libertés publiques, qui ne sauraient être différentes sur aucun point du
territoire de la République.
De même, il a censuré des dispositions dont il a jugé qu'elles portaient
atteinte au droit de recours juridictionnel garanti par l'article 16 de la
Déclaration de 1789.
Enfin, le Conseil constitutionnel a écarté des dispositions de la loi
organique qui touchaient au régime du droit de la propriété garanti par
l'article 17 de cette même Déclaration.
On voit donc que cette jurisprudence fixe des limites au-delà desquelles il
faut aller si l'on souhaite traduire l'accord politique de Nouméa du 5 mai
dernier.
Ces limites concernent évidemment la souveraineté nationale, qui ne permet pas
le caractère irréversible des transferts de compétences de l'Etat vers le
territoire tels qu'ils sont prévus dans l'accord.
Ces limites concernent ensuite la répartition des compétences entre les
pouvoirs publics. En effet, l'accord de Nouméa prévoit d'accorder une valeur
législative à certains actes que peut prendre le Congrès, alors que, aux termes
de l'article 34 de la Constitution, la loi est votée par le Parlement.
Si une telle valeur est conférée à certains actes, il est clair qu'il n'est
pas possible de maintenir le contrôle juridictionnel de droit commun sur les
actes administratifs et qu'il est nécessaire de prévoir un nouveau contrôle.
C'est le Conseil constitutionnel qui l'exercera.
Il ne s'agit pas de transformer le Conseil constitutionnel en juge ordinaire
de la légalité des décisions du Congrès. Il s'agit de reconnaître à certaines
délibérations d'une importance particulière et qualifiées par l'accord de
Nouméa de « lois du pays » une dignité égale à celle des lois votées par le
Parlement. A cet égard, la loi organique, prise sur le fondement de
l'habilitation constitutionnelle, pourrait prévoir, notamment, une liste
limitative des textes dont pourrait être saisi le Conseil constitutionnel, et
qui porteraient sur des sujets décisifs pour l'avenir de la
Nouvelle-Calédonie.
C'est l'une des manières de traduire l'idée essentielle de souveraineté
partagée, qui est l'un des socles de l'accord de Nouméa.
Les limites constitutionnelles tiennent aussi à l'apparition d'une citoyenneté
en émergence pour la Nouvelle-Calédonie qui permet de fonder un corps électoral
spécifique pour les élections locales, à l'exception des élections municipales,
et de favoriser l'accès des Calédoniens à l'emploi local.
Enfin, la révision constitutionnelle permet de remplacer le référendum
d'autodétermination prévu cette année par la loi de 1988 par une consultation
du corps électoral sur l'accord de Nouméa.
Ainsi, les trois raisons que sont l'organisation de la prochaine consultation
locale, les dispositions relatives à la phase intermédiaire et les conditions
d'évolution de la Nouvelle-Calédonie au terme des quinze et vingt prochaines
années imposent une révision constitutionnelle.
La seconde question porte sur la forme du projet de loi constitutionnelle qui
vous est présenté aujourd'hui.
Le projet initial du Gouvernement était de créer une loi constitutionnelle
autonome en trois articles qui ne s'incorporaient pas à l'intérieur des titres
existants de la Constitution. L'Assemblée nationale, en concertation, je crois,
avec votre commission des lois et son président, a estimé que cette
architecture était critiquable et qu'il était préférable de retenir le principe
d'une révision constitutionnelle plus classique. L'Assemblée nationale a donc
amendé le projet du Gouvernement en recréant un titre XIII. Le titre XIII
initial, qui organisait les relations des Etats membres de la Communauté avec
la France et les nouveaux pays d'Afrique, est tombé en désuétude en 1960.
Devenu sans objet, ce titre a été abrogé par la loi constitutionnelle du 4 août
1995.
L'Assemblée nationale a donc décidé de créer un titre XIII nouveau, dont
l'intitulé est « Dispositions transitoires relatives à la Nouvelle-Calédonie ».
Cette place dans la Constitution est, en effet, cohérente dès lors que ce titre
vient après le titre XII, qui traite des collectivités territoriales. Il
signifie ainsi que la Nouvelle-Calédonie cesse d'être un territoire d'outre-mer
au sens de l'article 74 et devient une entité juridique
sui generis
.
Par conséquent, l'article 76 de la Constitution intègre le contenu de
l'article 2 du projet gouvernemental et permet la tenue d'une consultation
locale qui doit intervenir avant le 31 décembre 1998 sur la base du corps
électoral spécial, tel qu'il avait été défini par l'article 2 de la loi
référendaire de 1988.
De même, l'Assemblée nationale a rétabli un article 77, qui reprend les
dispositions de l'article 3 du projet de loi constitutionnelle et renvoie à une
loi organique la fixation du nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie,
conformément à l'accord. Cet article 77 identifie quatre domaines d'une
importance particulière.
Le premier concerne les modalités du transfert des compétences de l'Etat aux
institutions de la Nouvelle-Calédonie, sachant que ces transferts se feront de
manière définitive et échelonnée.
Le deuxième domaine a trait aux nouvelles institutions locales, avec notamment
un pouvoir quasi législatif partiel donné à l'assemblée délibérante locale pour
certaines catégories d'actes.
Le troisième domaine touche aux effets de la citoyenneté en matière de droit
électoral pour les élections locales autres que communales, ainsi qu'en matière
d'accès à l'emploi et de statut civil coutumier.
Enfin, le quatrième domaine est relatif à l'organisation de la consultation
locale qui, avant vingt ans et à l'initiative de l'assemblée délibérante de la
Nouvelle-Calédonie, pourra la conduire à la pleine souveraineté.
Cette consultation portera sur le transfert à la Nouvelle-Calédonie des
dernières compétences qui, à cette date, seront encore exercées par l'Etat. La
composition du corps électoral et la procédure à suivre en fonction du résultat
de la consultation seront les deux particularités essentielles de ce
scrutin.
Le projet de loi constitutionnelle relatif à la Nouvelle-Calédonie est à
l'évidence une innovation dans le système juridique français.
Il permet d'organiser un avenir partagé de paix et de progrès pour la
Nouvelle-Calédonie à partir d'un consensus local qui a été recherché et réalisé
sur la base de concessions réciproques, dont M. Queyranne vous a rappelé les
principaux éléments.
L'Assemblée nationale a adopté le projet de loi constitutionnelle le 16 juin
1998 à une très large majorité. Dépassant les clivages politiques habituels,
tous les orateurs ont exprimé le souhait que leur vote soit compris comme
l'approbation d'un processus politique et un encouragement pour la
Nouvelle-Calédonie à continuer sur le chemin qu'elle s'est choisi.
Je ne doute pas que vous aurez à coeur d'envoyer vers cette terre du Pacifique
un message d'une égale portée. En effet, si le Sénat accepte de voter le texte
tel que l'Assemblée nationale l'a modifié, et compte tenu du travail en commun
des deux commissions des lois, les conditions seront remplies pour que le
Président de la République puisse, s'il le souhaite, réunir le Congrès à
Versailles. Ainsi, deux mois à peine après la signature de l'accord de Nouméa
par le Premier ministre et par les partenaires politiques locaux, la
représentation nationale aura scellé à son tour le choix politique majeur qui a
été fait pour la Nouvelle-Calédonie pour les vingt prochaines années.
C'est pourquoi, avec mon collègue Jean-JackQueyranne, je vous prie, mesdames,
messieurs les sénateurs, de bien vouloir adopter en l'état ce projet de loi
constitutionnelle.
(Applaudissements sur les travées socialistes, sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées du RDSE, de
l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Marie Girault,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, dans ma vie de
parlementaire, le dossier de la Nouvelle-Calédonie a joué un grand rôle.
J'ai accompli, dans le cadre de missions sénatoriales, avec tel ou tel de mes
collègues, dont certains ne sont plus des nôtres, cinq missions. J'en garde un
grand souvenir. Chaque fois, j'ai découvert le territoire et ses îles dans une
ambiance tout à fait différente, tant il est vrai que, selon que les hommes se
déchaînent ou cherchent au contraire à se rapprocher, le paysage d'un
territoire peut profondément se modifier.
Cela, je l'aurai vécu à l'occasion de la dernière mission, présidée par notre
collègue Jacques Larché, qui vous dira sans doute tout à l'heure à quel point
rien ne peut empêcher l'évolution qui est aujourd'hui recherchée et voulue.
Elle sera approuvée, j'en suis persuadé, par la quasi-unanimité des
parlementaires français.
La commission des lois m'a confié la responsabilité de ce rapport, et je lui
en suis reconnaissant. Il est ainsi, dans une vie de parlementaire, des
dossiers sur lesquels on aime réfléchir ; c'est, pour moi, le cas de celui de
la Nouvelle-Calédonie et de son évolution.
Si, par-delà les problèmes strictement juridiques et administratifs, il se
dégage, derrière l'objectif visé, une pensée humaniste qui peut rapprocher les
hommes pour les conduire à un destin vécu en commun, on ne peut que s'en
réjouir : la favoriser fait partie du travail du parlementaire, car nous
n'abordons pas que des textes techniques ou de conjoncture ; il nous arrive
d'avoir tout simplement rendez-vous avec les hommes.
La commission des lois a voulu que le processus souhaité par le Gouvernement
et par le Président de la République soit mené, autant qu'il était possible, la
main dans la main. Ce fut le cas, et nous savions, au moment où nous sommes
partis pour la dernière des missions accomplies en Nouvelle-Calédonie, que,
très vraisemblablement, comme le rappelait Mme Guigou il y a un instant, nous
pourrions faire l'économie d'une navette, j'allais dire faire d'une pierre deux
coups. La sagesse l'ayant emporté de part et d'autre, nous savions, lorsque
nous avons atterri à l'aérodrome de Tontoukta, que les deux assemblées
trouveraient un terrain d'entente, ce qui se vérifie aujourd'hui.
J'ai été, en 1988, un très fervent partisan des accords de Matignon, alors
que, souvenez-vous, mes chers collègues, l'ambiance n'était pas à la
consensualité sur le territoire métropolitain, ni d'ailleurs sur le territoire
de la Nouvelle-Calédonie.
J'ai fait campagne dans ma ville pour les accords de Matignon, et Jean-Marie
Tjibaou, qui faisait lui-même campagne en métropole, est venu me voir à l'hôtel
de ville de Caen.
Des jugements sévères ont pu être portés sur lui à un moment donné, mais son
martyre, en 1989, au côté de Yéweiné Yéweiné, a bien montré qu'au fond de
lui-même Jean-Marie Tjibaou cherchait les chemins qui mènent à la paix, à la
fraternité et à la réconciliation.
M. Robert Pagès.
Très bien !
M. Jean-Marie Girault,
rapporteur.
Nous avons tous été très émus lorsque nous nous sommes rendus
àTiehdanite, son village, quand nous avons pu nous recueillir sur sa tombe, en
pensant à tous les sacrifices qui avaient dû être consentis au cours des années
1984, 1985 et 1986 et dont furent victimes, des Français de souche, des Kanaks,
dans des conditions inacceptables.
On ne va pas refaire le procès de tel ou tel. Aujourd'hui, nous sommes tournés
vers l'avenir...
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. Jean-Marie Girault,
rapporteur.
... et, lorsque M. le Premier ministre me convia à aller
célébrer les accords de Matignon sur la Grande Terre, je l'ai fait volontiers
et avec joie.
Le référendum de 1988 a été approuvé avec une très forte abstention de la part
des Français de métropole.
Aujourd'hui, après le chemin parcouru pendant ces dix ans marqués par la
volonté de construire quelque chose, alors que les accords de Matignon
débouchent sur un bilan incontestablement positif - grâce, certes, à la
présence de la France, notamment sur le plan financier, ne nous leurrons pas -
voilà que l'Etat, le FLNKS, le RPCR ont décidé de renoncer au référendum
couperet, au scrutin d'autodétermination, à condition, bien sûr, que la volonté
nationale aille dans le même sens.
Ils ont fixé - j'ai immédiatement pensé que c'était une bonne solution - une
période transitoire de quinze ans à vingt ans. Vingt ans, a dit une jeune fille
que nous avons rencontrée au cours de notre mission, c'est bien long ! Il lui
fut répondu que vingt ans, cela passait vite. Les accords de Matignon, c'était
hier ! Que se passera-t-il dans quinze ans, dans vingt ans, alors que voteront
des générations qui ne savent pas encore marcher, qui ne sont pas encore nées
ou qui vont à l'école et qui vivront la mise en oeuvre du système proposé par
l'accord de Nouméa ?
Celui-ci ne constitue pas un document facile à lire car il est le produit du
rapprochement de femmes et d'hommes qui ont mis par écrit le contenu d'un
palabre, lequel consiste en un échange strictement oral.
L'originalité de l'accord de Nouméa, c'est qu'il traduit quelque chose qui est
de l'ordre du palabre. Il est la transcription d'une discussion dans laquelle,
c'est ainsi, derrière le même mot, selon les interlocuteurs - et donc selon les
signataires - ne se trouve pas forcément le même sens.
C'est pourquoi, lorsque nous serons appelés, bientôt, à dire ce que nous
pensons de la loi organique, ou des lois organiques, il faudra, monsieur le
secrétaire d'Etat, veiller à employer un langage juridique qui respecte
l'esprit du palabre.
En fin de compte, paradoxalement, la révision constitutionnelle est
l'opération la plus simple. Demain, ce sera l'heure des réflexions
complémentaires, et les choses seront alors plus complexes.
Je ne vais pas analyser le contenu des accords : nous le connaissons et M.
Queyranne l'a décrit tout à l'heure. Je veux essentiellement, mes chers
collègues, vous montrer que nous suivons là un parcours philosophico-politique
et, je vous l'avoue, j'adore cela. Je le disais tout à l'heure, lorsque,
derrière le droit, apparaît une philosophie, surtout si celle-ci est partagée,
nous pouvons nous réjouir d'être parlementaires.
Le débat relatif à la Nouvelle-Calédonie s'insère dans ce parcours
philosophico-politique auquel je vous sens réceptifs.
Bien sûr, c'est d'abord un débat constitutionnel, technique, mais qui se situe
au niveau le plus élevé. Il permet, nous le constatons, de dépasser les idées
reçues. En effet, nous souhaitons aboutir et communier avec la volonté qui
s'exprime très clairement sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie.
Mais il faut passer par le Parlement. Nous devons réviser la Constitution :
c'est la souveraineté nationale qui s'affirme.
Par ailleurs, l'accord de Nouméa est le produit d'un débat conventionnel. Des
hommes se rassemblent avec la volonté d'aboutir. Ils réfléchissent à ce que
peuvent être les années à venir. Ce débat conventionnel, de caractère
exceptionnel, réunit des cultures fondamentalement différentes, mais qui ne
sont pas forcément opposées.
Ce débat conventionnel dure quelques semaines et il débouche sur l'accord de
Nouméa ; et cela parce que ce débat conventionnel est aussi un débat consensuel
et que, profondément, chacune des parties voulait aboutir, même si, comme je le
disais il y a un instant, certains termes de l'accord recèlent des
ambiguïtés.
Mais le délai de quinze ans pouvant être encore prolongé de cinq années montre
que le temps qui passe est un élément de la consensualité visible sur le
territoire, et c'est bien ainsi.
Bien sûr, il faut se poser la question : que se passera-t-il demain ? Depuis
dix ans, nous nous rapprochons les uns des autres. Dans quinze ans, nous
pourrons faire encore mieux. Qui peut dire si, au bout de la période de quinze
ans, la consultation prévue aboutira à la disparition du « noyau dur », selon
le mot de M. Queyranne, des compétences régaliennes ? Qui le sait ?
Les Calédoniens observent le destin du Vanuatu, la pauvreté qui s'y est
installée profondément et qui est de nature à briser le moral des populations.
Que penseront les jeunes Calédoniens d'aujourd'hui lorsque, dans quinze, seize
ou dix-sept ans, ils seront appelés à voter ?
L'accord de Nouméa exprime aussi le début d'une belle convivialité. Nous
l'avons vécue lorsque la mission sénatoriale s'est rendue à l'île de Maré pour
inaugurer un gymnase à la française, au milieu d'une population riche de bonne
humeur, de couleurs et de fleurs, un gymnase où s'ébat aujourd'hui la jeunesse
kanak de l'île.
Lors de cette visite à Maré, nous avons rencontré des responsables de l'île à
la fois politiques et coutumiers, pourvus de pouvoirs paradoxaux mais bien
réels. Ce n'est pas facile à assimiler ! Il faut le savoir, il faut s'y faire,
il faut essayer de participer autant qu'il est possible au génie de ce
peuple.
Nous gardons aussi le souvenir d'avoir vu, toujours sur cette île de Maré,
applaudir Jacques Larché, le président de notre mission, couronné de lauriers,
servi ensuite comme un roi !
M. Charles Pasqua.
Et il est revenu ?...
(Sourires.)
M. Jean-Marie Girault,
rapporteur.
Devant tout cela, je me disais que cette généreuse marche
accomplie depuis dix ans se trouvait bien récompensée.
Si ce débat aboutit, comme personne n'en doute, lors de la réunion du Congrès,
à la révision constitutionnelle qui est souhaitée, ne peut-on rêver que les
années qui viennent voient s'établir sur le territoire une sorte de trinité
consubstantielle, l'Etat, le RPCR et le FLNKS, en vue de constituer un peuple
néo-calédonien ayant sa spécificité ?
M. Jean-Luc Mélenchon.
Ce n'est pas tout à fait la République, ça !
M. Jean-Marie Girault,
rapporteur.
C'est peut-être du domaine du rêve, mais la France, qui n'a
pas toujours réussi sa décolonisation, ne pourrait-elle réussir cette
identification d'un peuple, qui aurait pleinement conscience d'être un, malgré
sa profonde diversité interne ?
Je crois que tout cela doit faire partie de la mise en oeuvre de l'accord de
Nouméa, prolongeant les accords de Matignon.
J'ai lu, ces jours-ci, deux articles évoquant cette affaire qui portaient le
même titre, « La démocratie bafouée », sous deux signatures différentes :
transmission de pensée !
Démocratie bafouée ? Je ne le pense pas, et je veux, autant par raison que par
conviction, m'élever contre cette critique.
Le grief se résume à ceci : les accords de Matignon de 1988 correspondaient
déjà à une démission de la France, mais appelaient à un référendum
d'autodétermination en 1998 ; le retarder de quinze ans ou un peu plus, le
temps de la réflexion - le temps aussi de procéder à des transferts de
compétences et à des transferts financiers corrélatifs - c'est donner la prime
à d'inexorables indépendantistes qui ne cherchent qu'à profiter des subsides de
l'Etat pour établir à leur profit des situations confortables.
Bien sûr, comme chacun, j'admets que le référendum d'autodétermination prévu
par la consultation nationale de 1988 aboutirait, s'il avait lieu cette année,
nul n'en doute sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie, à un non à
l'indépendance.
Et certains de nous dire : passons donc aux actes ! Mais ce serait courir le
risque, parfaitement ressenti par toutes les autorités, par tous les habitants,
de nouveaux troubles.
C'est pourquoi, lorsque nous avons débarqué à Tontouta, nous avons
immédiatement compris que nous allions rencontrer un peuple soulagé.
Je crois que le référendum prévu dans un délai de quinze ans permettra de
calmer les esprits, de se mieux connaître encore et de vivre la réalité de la
loi organique sur le tansfert de compétences. Tout cela peut être mené
sagement. Ce n'est pas une démission de la démocratie, c'est une manière de
l'appliquer.
Qu'on me permette de rappeler les événements qui se sont produits à Ouvéa
entre les deux tours de l'élection présidentielle de 1988, qui ont coûté la vie
à plusieurs de nos gendarmes et qui ont provoqué ensuite la réplique,
parfaitement justifiée, du pouvoir français, réplique qui a abouti à la
libération des gendarmes emprisonnés en même temps qu'elle a occasionné les
morts que l'on sait.
M. Jean-Luc Mélenchon.
Croyez-vous que l'on puisse vraiment formuler les choses ainsi ?
M. Jean-Marie Girault,
rapporteur.
Ce que je sais c'est que, lorsque ces événements se sont
produits, je me suis trouvé reporté à la Toussaint de 1954, qui vit le début de
la guerre d'Algérie. Et nous savons comment les événements ont évolué là-bas !
Je le dis souvent, je ne connais pas de guerre d'indépendance qui n'aboutisse
pas à l'indépendance, après des massacres et des règlements de compte. On a
beau se cacher, chacun connaît la cache de l'autre et l'issue est inévitable :
le massacre.
Eh bien, en ne voulant pas courir le risque d'une semblable situation, si cela
doit se traduire par quinze années de convivialité assurées et approfondies,
aboutissant à une paix définitive demain, nous ne bafouons pas la démocratie.
C'est, pour le Parlement, une manière de servir l'homme.
Lors des débats en commission sur ce projet de loi constitutionnelle, notre
collègue Robert Badinter, fin spécialiste de la Constitution, donnait
l'impression d'un homme un peu assommé - je le dis amicalement et, s'il était
présent, je le dirais de la même façon - par cette révolution constitutionnelle
qui crée une espèce d'exception au sein de notre système institutionnel.
Cependant, même si sa tête de constitutionnaliste se trouve un peu
bouleversée, il est pour le texte.
Il reste que cette exception calédonienne lui pose un problème, comme elle en
posera un lorsqu'il s'agira d'élaborer les lois organiques.
Dans le cadre de la mission sénatoriale, des documents m'ont été remis. Ainsi,
j'ai pu relever que, dans un livre évoquant les paradoxes de la vie politique,
Georges Pompidou écrivait : « En somme, notre système, précisément parce qu'il
est bâtard, est peut-être plus souple qu'un système logique. Les corniauds sont
souvent plus intelligents que les chiens de pure race. » Quelle belle écriture
! Face à un système qui peut paraître un peu bâtard et contraint, l'opinion de
Georges Pompidou est intéressante.
J'en évoquerai une autre.
Lorsque le général de Gaulle s'est rendu à Bayeux, pour poser les principes de
la République dont il rêvait pour les Français, il a raconté cette anecdote : «
Un jour, les Athéniens demandèrent au Sage Solon, qui était juriste et
philosophe, quelle était la meilleure constitution. Dites-moi d'abord, répondit
Solon, pour quel peuple et pour quelle époque. »
Aucune institution ne doit demeurer intangible sous prétexte qu'elle est
sacrée si les circonstances nous commandent d'évoluer.
Tel est le cas aujourd'hui.
Voilà les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, je vous demande
d'adopter le projet de loi constitutionnelle voté par l'Assemblée nationale.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
(M. Jean Delaneau remplace M. René Monory au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, voilà bien des années que, tous ensemble, nous nous penchons, nous
nous interrogeons sur le destin de la Nouvelle-Calédonie. Ce destin - pourquoi
le dissimuler ? - fut entre nous l'occasion de profondes divergences. Peut-être
sommes-nous en train de les surmonter.
Notre rapporteur, mon excellent ami Jean-Marie Girault, qui fut certainement
l'un de ceux qui se rendirent le plus souvent sur ce lointain territoire - il
doit détenir le record ! - nous a fait excellemment profiter de l'expérience
qu'il a acquise au cours de ces nombreux déplacements. Il a eu la gentillesse
de préciser que nous fûmes merveilleusement accueillis et que je fus moi-même
couronné de lauriers lors de l'inauguration d'un gymnase. Puis-je, en
confidence, lui avouer que le président du conseil général de Seine-et-Marne
aurait bien aimé, même sans lauriers, inaugurer dans son département un tel
équipement ?
(Sourires.)
M. Charles Pasqua.
La jalousie est un vilain défaut !
(Nouveaux sourires.)
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois.
Pour ma part, j'adhère totalement à
sa proposition d'un vote conforme à celui qui a été émis par l'Assemblée
nationale, et ce d'autant plus qu'il vous a dit, en termes choisis, que le
texte qui nous venait de l'autre chambre était le résultat d'un travail commun,
préalable et informel, mené avec Mme le président de la commission des lois de
l'Assemblée nationale, qui nous a permis de résoudre quelques problèmes posés
par le projet de loi du Gouvernement.
Ne nous y trompons pas : l'adoption de la révision constitutionnelle n'est
qu'un premier pas, nécessaire mais facile et mesuré. Viendra ensuite la loi
organique, qui sera beaucoup plus difficile à élaborer. Il s'agira, en effet,
de traduire en termes juridiques concrets les intentions des signataires de
l'accord. Un contrôle juridictionnel des actes des autorités locales devra
notamment être mis en place. Bien évidemment, cette loi ne visera qu'à mettre
en oeuvre le texte même de l'accord.
Le statut de la Nouvelle-Calédonie, rendu possible par la modification
constitutionnelle et traduit dans la loi organique, s'éloignera, c'est vrai, de
nos schémas traditionnels.
Cette mutation que nous acceptons et que nous sommes même en train de
favoriser ne doit pas être comprise comme une condamnation de ce que nous avons
pu faire auparavant. Pourquoi ne pas le dire ? nous ressentons, et quelques-uns
d'entre nous avec une acuité particulière, ces affirmations qui, sans les
nuances nécessaires, semblent condamner l'oeuvre accomplie.
Nous sommes donc à même d'adresser un message fort à tous ceux qui nous ont
dit, au cours de notre dernière mission, en employant les mêmes termes, comme
s'ils s'étaient passé le mot que les accords de Nouméa représentaient pour eux
un soulagement.
Le chemin pour parvenir à ce résultat aura été long et rude. Les communautés
se sont affrontées avec violence, des situations inégalitaires ont été
maintenues et des craintes justifiées se sont fait jour.
Comment et par quel parcours avons-nous pu néanmoins en venir à ce que, d'un
commun accord, nous tentons aujourd'hui d'accomplir ?
Souvenons-nous, d'abord, que la Nouvelle-Calédonie était une terre fidèle,
fidèle à la métropole dans les bons et dans les mauvais jours. Comment ne pas
rendre hommage en cet instant à l'héroïsme du bataillon du Pacifique, qui fut
parmi les premiers à rejoindre les rangs de la France libre ?
Dans ces cheminements, sur ce parcours, je distinguerai trois étapes : l'étape
de l'incompréhension, celle de la première chance, et, enfin, celle de la
réconciliation possible, à laquelle nous aboutissons aujourd'hui.
L'incompréhension se traduisit sans doute d'abord dans la situation faite aux
populations autochtones ; mais elle se poursuivit lorsque, croyant corriger le
cours de l'histoire, la politique suivie s'orienta, pour des motifs
idéologiques, vers des choix qui ignoraient les caractères spécifiques de la
société calédonienne.
Des hauts-commissaires qui n'avaient ni l'expérience ni la compétence voulues
pour exercer d'aussi lourdes responsabilités furent nommés selon des critères
strictement politiques. L'un d'entre eux crut même pouvoir se comporter en
véritable proconsul et annoncer, quasiment de sa propre autorité, une
indépendance à court terme qui menaçait de faire des Calédoniens d'origine
européenne des étrangers sur leur propre terre.
Le Sénat - nous en avons le souvenir - sut s'opposer à une évolution
précipitée, qui faisait fi de l'influence française et qui n'apportait pas à
tous les Calédoniens les garanties légitimes auxquelles ils pouvaient
prétendre.
Je voudrais que nous nous souvenions, en cet instant, du rôle que certains
d'entre nous jouèrent dans ces combats. Je songe à nos amis Dick Ukeiwé et
Etienne Dailly.
Vint alors le temps des drames, des tueries, des affrontements armés. Et
comment ne pas entendre, comme une sorte de glas, résonner le nom d'Ouvéa, un
glas qui sonne pour tous ceux qui y moururent, singulièrement pour ceux qui
tombèrent dans l'accomplissement de leur devoir ?
Peut-être est-ce l'intensité même de ces conflits qui conduisit deux hommes de
bonne volonté, Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, à comprendre, à l'appel
du gouvernement de M. Michel Rocard, que cette voie de l'affrontement était
sans issue. Ce fut la première chance de la Nouvelle-Calédonie.
Jean-Marie Tjibaou la paya de sa vie. Je m'honore, depuis notre première
rencontre, difficile, qui remonte à bien des années, dans sa mairie de
Hienghène, d'avoir appris à le connaître. Il me rendait souvent visite lors de
ses passages à Paris et je pense que, s'il était vivant, il aurait, avec
l'autorité morale qui était la sienne, contribué, encore avec Jacques Lafleur,
à l'élaboration de ce qui peut être le début de la réconciliation.
En cet instant, que pouvons-nous souhaiter ?
Après vingt ans de vie commune sur des bases nouvelles, après vingt ans de
progrès économique et social, après vingt ans au cours desquels ils auront
appris à vivre ensemble mieux encore qu'ils ne le font déjà aujourd'hui,
savons-nous ce que les Calédoniens de demain décideront ?
Tous mes collègues et moi-même avons été étonnés, au cours de notre dernier
séjour, du degré de culture française dont faisaient preuve nos interlocuteurs
mélanésiens, rencontrés dans les endroits les plus reculés du territoire.
Je ne pouvais pas ne pas penser, avec quelque nostalgie, à ces millions de
Vietnamiens, de Laotiens, de Cambodgiens qui, voilà un demi-siècle,
témoignaient de la même culture et que nous n'avons pas su garder à nos côtés,
faute d'avoir consenti très vite, comme il le fallait, les évolutions
nécessaires que seul le général Leclerc avait su proposer.
(MM. Hoeffel,
Hyest et Lanier applaudissent.)
Ne répétons pas cette erreur.
Mais pourquoi ne pas formuler l'espoir que, dans les vingt ans à venir,
l'oeuvre accomplie fasse ressentir à tous les Calédoniens - je dis bien à tous
les Calédoniens - que le niveau de vie qu'ils auront acquis, et qui est très
largement supérieur à celui de tous les Etats voisins, ainsi que l'exercice de
ces libertés que nous leur consentons, c'est à la France qu'ils les doivent
?
Je voudrais que, le moment venu, ils se souviennent de ces merveilleux propos
que Léopold Sédar Senghor tint un soir, à Dakar, au général de Gaulle : «
Restez avec nous, car il se fait tard. »
Il est de la responsabilité de la France en cet instant de permettre à la
Nouvelle-Calédonie d'assumer pleinement le destin de tous ceux qui y vivent, de
ceux qui ont été fidèles comme de ceux qui ont cru devoir nous combattre.
Cette responsabilité, nous devons l'inscrire dans notre Constitution. C'est
pourquoi la commission des lois vous demande à nouveau de bien vouloir
approuver la modification que le Président de la République vous propose.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de
l'Union centriste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe
socialiste.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 44 minutes ;
Groupe socialiste, 37 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 31 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 18 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 16 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe,
8 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Othily.
M. Georges Othily.
Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le secrétaire
d'Etat, mes chers collègues, il nous est impossible en ce moment, dans cette
enceinte, de ne pas saluer d'abord la mémoire de Jean-Marie Tjibaou et des
militants kanak tombés pour une juste cause reconnue aujourd'hui par tout le
monde.
Si la souveraineté est la fierté d'un peuple, elle est aussi l'orgueil de son
Etat. C'est entre ces deux nuances aux contours flous et abstraits qu'il nous
faut naviguer pour saisir la complexité du processus d'évolution de
l'outre-mer, et donc de la Nouvelle-Calédonie.
Les débats de l'Assemblée nationale constituante réunie au cours de l'été 1946
attestent, tant par leur densité que par la teneur des propos échangés, de la
force du paradoxe lié au statut de ce que l'on appelait à l'époque « les
possessions françaises outre-mer ».
Au nom de la souveraineté, il était communément admis que tout système
colonial devait être écarté des institutions de la France d'après-guerre.
Au nom de cette même souveraineté, on refusait pourtant d'admettre qu'un jour
peut-être le drapeau de la France cesserait de flotter sur les territoires
qu'elle avait conquis.
Si, bien souvent, les citoyens qui composent la nation sont favorables à
l'autodétermination des peuples, l'Etat, lui, est plus réservé, appréhendant
avec angoisse ce qu'il est aujourd'hui courant d'appeler « toute perte de
souveraineté ».
Si la Seconde Guerre mondiale a eu un mérite, ce fut celui de prouver à tous
que les populations indigènes ne renonçaient pas à leur appartenance à la
nation française.
Et c'est bien Gaston Monnerville qui, le 18 septembre 1946, à la tribune de
l'Assemblée nationale constituante, le précisait en ces termes : « En juin
1940, lorsque la France s'est, par suite des circonstances, trouvée à genoux,
qu'ont fait les populations d'outre-mer ? Ont-elles essayé de profiter de cet
instant pour se séparer de la France ? Y ont-elles même pensé ? Ne se
sont-elles pas immédiatement groupées autour de ceux qui représentaient à leur
yeux cette France, autour de son drapeau, pour dire : "S'il est en France des
hommes qui trahissent, s'il est des esprits qui hésitent, qui vacillent, si
dans tous les milieux (...) il se trouve une minorité pour estimer que la
France est vaincue, qu'elle doit se déclarer vaincue (...) eh bien ! nous,
populations d'outre-mer, nous resterons debout et jamais nous n'accepterons
qu'on dise que ce pays ne se redressera pas et qu'il doit se reconnaître
vaincu, parce que s'il accepte d'être vaincu, c'est la liberté qui le serait
avec lui". »
C'est dans cet esprit que furent adoptés les trois derniers alinéas du
préambule de la Constitution de 1946, préambule auquel le Constituant de 1958 a
fait expressément renvoi.
Si l'après-guerre se caractérise par une certaine ouverture d'esprit, qui
préfigurera la décolonisation, elle permet également l'émergence des
revendications de ceux dont les voix étaient jusqu'alors étouffées.
De 1946 à 1988, onze statuts se succéderont pour tenter de donner à la
Nouvelle-Calédonie des institutions visant à ménager les intérêts des uns avec
les aspirations des autres.
Leur multiplication s'accroît au fur et à mesure que la volonté d'autonomie
s'affermit.
C'est ainsi que plus de la moitié d'entre eux, soit six, seront adoptés de
1984 à 1988, année des événements tragiques d'Ouvéa.
Alors que la violence atteint son paroxysme, le Gouvernement entreprend enfin
d'envisager le statut de la Nouvelle-Calédonie sous un angle différent, en
donnant naissance aux accords de Matignon.
Par cet acte, le plus difficile est enfin accompli puisque l'Etat admet qu'un
jour peut-être les populations de Nouvelle-Calédonie auront à se prononcer sur
le point de savoir si elles souhaitent prolonger leur appartenance à la
République française ou si, au contraire, elles préfèrent constituer une entité
autonome, dotée d'une souveraineté propre.
La mise en oeuvre de ce principe permet l'apaisement des esprits qui,
ensemble, se préparent à la construction d'un avenir commun, parvenant même
jusqu'à tenter d'oublier leurs différences et leurs différends.
Pour moi, la révision constitutionnelle qui nous est imposée par l'accord de
Nouméa et sur laquelle nous devons nous prononcer aujourd'hui constitue une
très heureuse surprise dans l'évolution du statut de la Nouvelle-Calédonie.
Comme la loi du 9 novembre 1988 contient des dispositions préparatoires à
l'autodétermination en 1998, nombreux étaient ceux qui pensaient qu'à cette
date, soit dix ans plus tard, la Nouvelle-Calédonie constituerait un Etat
nouveau au sein de la société des nations.
Notre réunion de ce jour prouve, au contraire, qu'il n'en est rien. Les
volontés autonomistes et indépendantistes exprimées au cours des années
quatre-vingt n'avaient pas, comme beaucoup l'ont cru, pour unique objet
d'opérer une séparation avec la République française.
Pour autant, dans le respect des principes du préambule de 1946, la population
de Nouvelle-Calédonie souhaite l'élargissement des compétences que ses
institutions auront à exercer, reportant ainsi la date à laquelle elle aura à
se prononcer sur le principe d'une souveraineté propre.
Consciente des difficultés qu'entraînerait une séparation trop rapide, elle
exprime, au contraire, une certaine forme de reconnaissance en considérant que
seule l'aide de l'Etat français lui permettra de réaliser les objectifs qui
sont les siens.
Par la signature de l'accord du 5 mai dernier, l'Etat français, représenté par
le chef du Gouvernement, s'honore d'accepter les critiques légitimes dont il
était destinataire à une certaine époque. De leur côté, les populations
néo-calédoniennes s'honorent de reconnaître le rôle positif joué par la France
sur ce territoire.
« Le moment est venu de reconnaître les ombres de la période coloniale, même
si elle ne fut pas dépourvue de lumière. » A elle seule, cette phrase permet de
prendre la mesure du chemin parcouru en dix ans.
Il me paraît indispensable que le législateur, à son tour, participe aux
progrès considérables effectués, en procédant à la nécessaire révision de la
Constitution.
Sur ce point précis de la révision constitutionnelle, je souhaiterais faire un
parallèle avec le sujet qui nous intéresse aujourd'hui.
Comme je l'indiquais précédemment, la Nouvelle-Calédonie a connu onze statuts
différents depuis son intégration parmi les territoires d'outre-mer. Notre
Constitution, quant à elle, a subi onze modifications depuis 1958.
Alors que nous nous apprêtons à adopter un douzième et certainement dernier
statut pour la Nouvelle-Calédonie, je forme le voeu que cette douzième
modification constitutionnelle soit également la dernière pour notre
Constitution.
Il me plaît de penser que ce constat n'est pas uniquement le fruit du hasard.
J'y vois, pour ma part, un signe avant-coureur de la nécessaire réécriture de
notre Constitution.
Pour l'heure, nous réaffirmons avec force les termes contenus dans le dernier
alinéa du préambule de la Constitution de 1946 ; ce sera faire justice au
peuple calédonien et aux peuples d'outre-mer de rappeler au Gouvernement de la
France que, fidèle à sa mission traditionnelle, la France entend conduire les
peuples dont elle a pris la charge à la liberté de s'administrer eux-mêmes et
de gérer démocratiquement leurs propres affaires ».
C'est pourquoi, confiant dans le débat qui va avoir lieu au sein de notre
assemblée, le groupe du Rassemblement démocratique et social européen votera ce
projet de loi constitutionnelle.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen se
félicitent vivement de l'examen de ce projet de loi constitutionnelle, dont
l'adoption constituera une étape déterminante dans l'histoire de la
NouvelleCalédonie.
L'article 1er du texte initial fixe clairement l'objectif : il s'agit «
d'assurer l'évolution de la Nouvelle-Calédonie selon les orientations définies
par l'accord signé à Nouméa le 5 mai 1998 ».
Cet accord de Nouméa est riche en contenu, mais il a également une portée
symbolique qui ne peut échapper à personne.
Il intervient, en effet, dix ans après l'année terrible de 1988, celle de la
tragédie d'Ouvéa, celle de l'assassinat de Jean-Marie Djibaou, dont on ne
soulignera jamais assez le rôle éminent en faveur de son peuple et de la
Nouvelle-Calédonie tout entière. Cette année 1988 fut également celle du
sursaut des accords de Matignon, qui évitèrent, malgré leurs lacunes,
certainement une dérive rapide vers une véritable guerre civile.
Dix ans après, l'accord de Nouméa est le fruit de luttes opiniâtres, de
dialogues, d'un effort très important de reconnaissance et de tolérance
mutuelle entre culture et traditions différentes.
Cet accord reconnaît l'histoire : le troisième point dudit accord est, en
cela, essentiel.
Il me paraît indispensable de le citer pour permettre de mesurer d'emblée les
pas accomplis par chaque partie, l'une vers l'autre : « Le moment est venu de
reconnaître les ombres de la période coloniale, même si elle ne fut pas
dépourvue de lumière. »
Le choc de la colonisation a constitué un traumatisme durable pour la
population d'origine.
Les droits d'un peuple implanté depuis plus de quatre mille ans dans ces îles
ont, en effet, été fondamentalement remis en cause en quelques décennies.
Les Kanaks rencontrent aujourd'hui dans leur propre pays des situations
comparables à celles que connaissent les immigrés en métropole.
Ils ont été chassés de leur terre, refoulés et parqués dans des réserves. Les
massacres de 1878 et 1917, à la suite des révoltes, et des conditions de vie
particulièrement difficiles ont fortement réduit la population mélanésienne et
mis en péril l'existence même de ce peuple.
Le fait colonial est incontournable en NouvelleCalédonie, des questions
financières à celles de la scolarisation, des questions de l'habitat à celle de
l'emploi ou de la santé.
La reconnaissance de ce fait par l'accord de Nouméa revêt donc une grande
importance.
Un grand sens des responsabilités se dégage de la lecture de cet accord, qui
affirme l'apport des populations nouvelles depuis le xixe siècle. Cela aussi
doit être pris en compte pour permettre le rapprochement des différentes
communautés.
Ce projet de loi constitutionnelle, les débats futurs sur les lois organiques
qui en découlent permettront, nous l'espérons, d'offrir avec l'an 2000 une
nouvelle perspective à ces femmes, à ces hommes et à ces jeunes attachés à
leurs racines.
Alfred Picanon, dans un film intitulé
Emma une tribu kanak aujourd'hui
avait une belle expression pour résumer la situation d'aujourd'hui : « Le
peuple kanak est au milieu de la rivière et il lui est difficile d'atteindre
l'autre rive, mais il ne peut plus retourner en arrière. »
L'irréversibilité de l'accord de Nouméa confirme à notre avis le sentiment de
nécessité historique qui se dégage de cet accord.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen souhaitent que le
Gouvernement « accompagne », comme l'exprimait Jean-Marie Tjibaou, « un petit
pays à son émancipation et à son indépendance ».
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. Robert Pagès.
Depuis dix ans, depuis les accords de Matignon, un effort significatif sans
comparaison possible avec la période coloniale a été effectué dans des domaines
aussi divers que les institutions, les infrastructures, la santé, le
développement économique et social en général. Il est nécessaire de prendre en
compte ce bilan pour mesurer ce qui a été fait, pour en examiner les
insuffisances et pour bien déterminer ainsi l'importance du chemin qui reste à
parcourir.
Nous approuvons tout particulièrement la maîtrise nouvelle, encore très
partielle, des capacités économiques données à la province Nord, région dans
laquelle, je le rappelle, une part importante de la population kanak est
regroupée.
La province Nord est devenue propriétaire, en 1989, de la société minière du
sud-Pacifique. Que la collectivité ait pu ainsi devenir partie prenante de
l'économie du nickel constitue un événement d'importance.
Le nickel alimente les tensions, tant son rôle sera déterminant dans les
années à venir. L'accord de Nouméa lui-même n'aurait pas vu le jour si, en
février de cette année, la revendication concernant l'accès à la ressource pour
une usine métallurgique du Nord n'avait pu aboutir.
Le poids néocolonialiste est encore fort puisque l'actionnaire principal de la
société propriétaire de l'usine qui bloquait l'issue de la négociation, la
SLN-Eranat, est l'Etat français.
Ces deux faits sont représentatifs, selon nous, de la voie à suivre pour
permettre l'association pleine et entière du peuple kanak à l'élaboration du
destin de la Nouvelle-Calédonie.
La citoyenneté de Nouvelle-Calédonie annoncée par le texte de Nouméa ne doit
pas se résumer aux domaines culturel et linguistique ainsi qu'au respect des
traditions, et je sais que là n'est pas la volonté des parties signataires. Les
domaines économiques et sociaux doivent également être au centre de la
construction de cette citoyenneté nouvelle.
Comme je l'ai indiqué, les accords de Matignon ont ouvert des pistes
novatrices. Mais nous ne pouvons que constater que les objectifs fixés n'ont
pas toujours été atteints, loin s'en faut.
Le fait que les Kanaks soient,
de facto
, écartés des centres de
décisions et que leur place dans la fonction publique territoriale régresse
confirme ce point de vue.
Cette situation tient, sans nul doute, aux difficultés persistantes que
rencontre la lutte contre l'échec scolaire dans la communauté kanak. Le fait
que le pourcentage d'échec au baccalauréat ait été de 80 % en 1996 - ce n'est
pas loin - est préoccupant, même si le taux de scolarisation a doublé entre
1989 et 1996.
L'amélioration de la formation doit constituer l'un des objectifs prioritaires
pour les années à venir. C'est sans nul doute l'une des clefs du succès de la
mise en oeuvre des accords de Nouméa.
Les difficultés de formation favorisent par ailleurs l'immigration
métropolitaine, qui se poursuit à un rythme trop élevé pour le respect de
l'équilibre démographique. Ainsi, de 1989 à 1996, l'équivalent de 8 % de la
population de la Nouvelle-Calédonie s'est installé sur le territoire.
Il faut donc fournir à la jeunesse kanak les moyens de conduire la destinée de
l'île.
Les accords de Matignon n'ont pas non plus abouti sur le plan économique, le
déséquilibre demeurant patent entre le Nord et le Sud et, en particulier, le
grand Nouméa. Même si des signes forts dans le domaine de l'extraction du
nickel et de son traitement métallurgique sont à prendre en compte, le pouvoir
économique réel reste à partager.
Un troisième et dernier point marque les insuffisances des accords de Matignon
: le domaine foncier. Comme je l'ai indiqué, la colonisation a eu pour
conséquence fondamentale d'exclure les Kanaks de leurs terres et de les parquer
dans des réserves. Une redistribution importante a eu lieu depuis vingt ans,
mais les ressortissants métropolitains disposent toujours de deux fois plus de
terres rurales par tête d'habitant.
La sagesse de l'accord de Nouméa et sa portée historique laissent espérer que
les carences des accords de Matignon seront demain dépassées. Les sénateurs du
groupe communiste républicain et citoyen tiennent à saluer l'intelligence de
l'ensemble des forces politiques significatives de l'île qui ont su passer
outre leurs divergences ou leurs oppositions, qui sont réelles, pour imaginer
de manière constructive le devenir de leur pays.
J'ai personnellement mesuré, lors du voyage en Nouvelle-Calédonie de la
délégation sénatoriale chargée de préparer ce débat, les obstacles qui
demeurent pour progresser vers l'instauration de la citoyenneté
néo-calédonienne. Mais j'ai constaté dans le même temps la détermination de ce
peuple authentique qu'est le peuple kanak et la clairvoyance de la population
d'origine métropolitaine qui a compris ne pouvoir exclure les Kanaks d'une
solution politique nécessaire pour le bien de tous.
Je tiens ici à profiter de cette intervention à la tribune pour remercier
encore une fois tous ceux qui, quelle que soit leur position politique ou
sociale, nous ont si bien accueillis là-bas.
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. Robert Pagès.
Avec le vote de ce projet de loi constitutionnelle, c'est un long processus
qui s'engage et qui devra aboutir, d'ici à quinze ou vingt ans, au référendum,
occasion pour la population de l'île d'opter ou non pour l'indépendance. D'ici
là, un transfert de compétences interviendra progressivement de l'Etat vers les
assemblées et l'exécutif local.
La naissance de cette entité nouvelle, unique, dénommée « la
Nouvelle-Calédonie » constitue une démarche inédite qui permettra peut-être à
la France d'accompagner démocratiquement et efficacement la décolonisation d'un
territoire.
Je veux voir dans le déroulement de l'inauguration magnifique du centre
culturel Jean-Marie Tjibaou, le 4 mai dernier, une portée symbolique. Cette
cérémonie, qui intégrait aux traditions coutumières les plus hauts responsables
de l'Etat, dont le Premier ministre, M. Lionel Jospin, dix ans après l'assaut
meurtrier de la grotte d'Ouvéa, porte la marque d'une volonté positive et
constructive d'aborder ce qui constitue une véritable décolonisation. Je tiens
à témoigner à cette tribune de la beauté de ce centre culturel, qui est
vraiment remarquable.
Avant de conclure, je souhaiterai rappeler que les départements et territoires
d'outre-mer ont chacun leur identité propre. Cependant, dans plusieurs d'entre
eux, une véritable explosion sociale couve. Des troubles sporadiques ont déjà
eu lieu, notamment en Guyane ou, dimanche dernier encore, à la Réunion.
Comme nous le rappellerait mon ami Paul Vergès, sénateur de la Réunion, s'il
n'avait été empêché d'être parmi nous aujourd'hui, les parlementaires et autres
élus d'outre-mer ont souligné depuis des années ces grandes difficultés. Mon
ami Henri Bangou, maire de Pointe-à-Pitre, qui siégea sur les bancs de notre
assemblée, confirmerait, j'en suis persuadé, cette remarque.
Le débat d'une portée historique que nous avons aujourd'hui doit nous
rappeler, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, que des solutions
spécifiques, mais urgentes, doivent être apportées à chacun d'entre eux.
Le grand débat du Sénat, aujourd'hui, et celui du Congrès de Versailles, le 6
juillet prochain, doivent aussi être l'occasion d'entendre les alertes de ceux
qui sont au contact de la réalité parfois si dure des départements et
territoires d'outre-mer.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront le texte
modifié par les députés, qui intègre les dispositions nouvelles dans le corps
même de la Constitution. Cette approbation s'accompagne d'un souci de vigilance
pour que le respect des « orientations définies par l'accord signé à Nouméa » -
il s'agit de la formule retenue par le Gouvernement dans le projet de loi
initial - soit assuré dans les lois organiques à venir qui aborderont des
sujets aussi divers et importants que le régime électoral, le calendrier des
transferts de compétences ou le statut civil coutumier.
De ce point de vue, j'espère que nous pourrons continuer à entretenir avec nos
interlocuteurs calédoniens les meilleures relations de confiance et de travail
pour la préparation de ces tâches futures.
La confiance doit être de mise pour réaliser un tel objectif, pour garantir le
développement et la paix en Nouvelle-Calédonie. Cette confiance, nous l'avons,
et nous savons que chaque partie a à coeur la réussite des objectifs de
l'accord de Nouméa. Les uns et les autres peuvent être assurés de notre plein
soutien à la construction d'une Nouvelle-Calédonie empreinte de justice, de
tolérance et de démocratie.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes. - M. Hoeffel
applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Loueckhote.
M. Simon Loueckhote.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
tiens tout d'abord à vous remercier de me permettre de m'exprimer aujourd'hui,
car l'examen d'un tel projet de révision de la Constitution est une occasion
plutôt exceptionnelle, et il est, de surcroît, de la plus haute importance pour
l'ensemble de nos compatriotes qui vivent à 18 000 kilomètres et de l'avenir
desquels nous allons décider.
Qu'il me soit permis également de saluer et de remercier M. Jacques Larché,
président de la commission des lois, ainsi que M. Jean-Marie Girault,
rapporteur de ce projet de loi constitutionnelle. Leur connaissance du
territoire et leur attachement à l'outre-mer français ont permis au Sénat de
bien appréhender le contexte calédonien.
J'associe à ces remerciements les membres de la commission des lois qui les
ont accompagnés en Nouvelle-Calédonie au cours d'un séjour très bref.
Nous voici arrivés au terme des accords de Matignon, qui ont apporté
l'apaisement, le calme et la sérénité, après une période d'instabilité et de
troubles ayant semé la confusion et la division au sein de la population
calédonienne et fortement terni l'image de la France dans cette région du
monde.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Très bien !
M. Simon Loueckhote.
Bien que la sortie de ces accords ait été prévue sur un plan juridique par la
loi référendaire de 1988, nous avons très vite estimé que l'organisation d'un
scrutin d'autodétermination avant le 31 décembre de cette année représentait
une grande incertitude politique.
Le risque était trop important de renouer avec cette sombre période de
violence et d'affrontements, dont nous sommes sortis voilà à peine dix ans,
grâce à la volonté, au courage et à la clairvoyance de deux hommes
d'exception.
Je veux parler de Jean-Marie Tjibaou, qui a, à l'époque, au prix de sa vie,
accepté envers et contre tout de s'engager pour la paix et d'en assumer seul la
responsabilité politique.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Absolument !
M. Simon Loueckhote.
Je veux aussi rendre hommage à Jacques Lafleur, à la générosité de ce grand
visionnaire, qui a su imposer le choix de la raison et du partage.
Ainsi, conscient que cette réalité-là est encore bien présente dans l'esprit
de tous, il a suggéré de substituer au référendum « couperet » une solution
consensuelle.
Avec la signature de l'accord de Nouméa, en avril dernier, nous venons de
régler le problème de cette incertitude politique, puisque chaque partenaire
est désormais engagé par un texte définissant, pour les vingt prochaines
années, les grandes étapes de l'évolution statutaire de la Nouvelle-Calédonie
et le devenir de sa population.
Ce que les Calédoniens nous demandent aujourd'hui, c'est de lever
l'incertitude juridique qui pèse encore sur l'accord de Nouméa et de permettre
sa traduction dans le droit, à l'instar de ce qui a été accompli en 1988,
époque à laquelle la population française a été conduite à approuver le contenu
des accords de Matignon.
Jusqu'à cette date, l'histoire institutionnelle de notre territoire a pu se
résumer à une succession d'erreurs et d'incompréhensions, dont l'origine est
certes la complexité des relations entre les différentes communautés du
territoire mais aussi la tendance récurrente du législateur à imposer des
schémas d'organisation, sans nul doute conformes à l'esprit et à la lettre de
notre Constitution, mais parfois bien éloignés des aspirations des
Calédoniens.
L'accord de Nouméa propose une organisation, dont certaines dispositions
dérogent aux principes fondateurs de la République française. Mais il a
l'immense mérite de concilier des positions totalement antagonistes, de
garantir vingt ans de stabilité institutionnelle et de réaffirmer à la
population sa capacité de choisir son destin.
Ainsi, l'enjeu du vote d'aujourd'hui est multiple.
Pour les Calédoniens, c'est avant tout le maintien de la paix qu'ils ont
connue avec bonheur pendant ces dix dernières années.
C'est également la mise en oeuvre, pour la première fois, d'un véritable
projet de société, qui va se construire avec l'ensemble des communautés
composant la population calédonienne.
C'est, enfin, la possibilité pour eux de voir reconnaître la spécificité de
leur territoire, tout en réaffirmant leur appartenance à la grande nation
française.
Je vois aussi, dans l'approbation de cet accord par la représentation
nationale, un enjeu particulier pour la France, qui est la réaffirmation de sa
grandeur, de sa générosité et de son rayonnement de par le monde.
La France prouvera, par son assentiment, sa capacité à faire évoluer ses
institutions pour demeurer à l'écoute de ses populations d'outre-mer et
trouver, par là même, des réponses adaptées à des situations politiques bien
spécifiques.
Grandeur mais aussi générosité, car la France accepte de maintenir un effort
financier soutenu en Nouvelle-Calédonie, pour poursuivre le rééquilibrage
amorcé il y a dix ans.
Sachez, mes chers collègues, que les Calédoniens sont conscients de la valeur
de cette aide, dont ils apprécient quotidiennement les effets.
Ils savent que le niveau de vie dont ils bénéficient, grâce à l'aide de
l'Etat, relève du privilège dans le contexte insulaire océanien, qui est celui
du sous-développement. Ils savent aussi qu'ils le doivent à l'attention que
vous avez toujours portée au sort de cette île lointaine. Ils se souviennent,
notamment, de cette sombre période de l'histoire du territoire, où le Sénat
joua un rôle déterminant pour y faire respecter la démocratie.
M. Hubert Haenel.
Très bien !
M. Simon Loueckhote.
En admettant le principe de l'émancipation de la Nouvelle-Calédonie au sein de
la République, nous ne ferons que contribuer au rayonnement de la France, dont
la capacité à innover et la flexibilité ont d'ores et déjà été saluées dans
cette région du monde. Car, si la présence française a pu être très injustement
décriée par certains de nos voisins océaniens, le sentiment qui domine et qui a
été réaffirmé par la signature de l'accord de Nouméa, c'est bien l'attachement
de la population calédonienne, dans son immense majorité, à cette grande nation
qu'est la France.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains
et Indépendants et de l'Union centriste.)
Cet accord est bien évidemment le résultat d'un compromis, obtenu non sans
difficulté, et les nombreux obstacles qui ont entravé la conduite de ce
processus, tels que la question minière, ont créé, en Nouvelle-Calédonie, une
atmosphère d'attente et d'inquiétude qui a considérablement ralenti l'activité
économique.
Le résultat est à la hauteur des efforts déployés : nous sommes parvenus à
faire converger des avis radicalement opposés, la large majorité en faveur du
maintien dans la République n'ayant pas voulu nier la revendication
indépendantiste.
C'est là une formidable leçon de démocratie que la Nouvelle-Calédonie et, à
travers elle, la France donnent au monde entier.
Ce compromis n'a pas manqué d'entraîner de nombreuses réactions, dont la
principale est le sentiment de soulagement immense ressenti par les
Calédoniens.
Mais il a également suscité de vives émotions, en particulier au sein de notre
assemblée, à l'évocation de la période coloniale.
Monsieur le président, mes chers collègues, la référence au passé calédonien
ne présente pas un caractère douloureux pour les seuls Mélanésiens, c'est aussi
le cas pour toutes les autres communautés qui y vivent.
Ainsi, l'histoire des Européens, c'est aussi celle de la déportation, de la
transportation et de la difficulté à assumer ce passé.
M. Lucien Neuwirth.
C'est vrai !
M. Simon Loueckhote.
Quant aux Polynésiens, Wallisiens, Indonésiens et Vietnamiens qui ont
contribué à construire ce territoire, ils s'y sont installés dans des
conditions d'une rare dureté.
En aucun cas il ne s'agit de régler des comptes en évoquant un passé dont nous
n'avons de toute évidence pas été les acteurs, mais dont nous sommes
aujourd'hui les héritiers. Le reconnaître, ce n'est qu'une manière de
l'exorciser, d'annuler la charge émotionnelle qui y est très fortement liée.
De même, la référence à la période coloniale et à l'impact de la présence
française sur la population autochtone a pu heurter sur les travées de notre
assemblée, suscitant ainsi, chez certains, une réticence à admettre qu'elle
figure au sein même du texte de la Constitution.
Il n'y a pas lieu, à mon sens, de sortir cette réalité du contexte de l'époque
des grandes découvertes, où la conquête du Nouveau monde n'était que
l'expression d'une fierté nationale, motivation de la France mais aussi de ses
voisins européens.
Nul ne peut nier que la colonisation, quel qu'en soit l'auteur, a créé un
traumatisme au sein des populations autochtones, par la simple rencontre opérée
entre des mondes radicalement opposés.
Faut-il pour autant s'attarder sur ce passé lointain quand on constate, par
ailleurs, la formidable évolution qu'ont connue les peuples du Pacifique au
contact de la civilisation occidentale ?
Faut-il s'attarder sur ce passé lointain, alors que la Nouvelle-Calédonie a
atteint un tel niveau d'équipement et de développement en une période aussi
brève ?
Non, monsieur le président, mes chers collègues, nous n'avons pas à porter
notre histoire commune comme un fardeau !
En inscrivant cette page de l'histoire dans sa Constitution, la France
accomplit un acte symbolique qui ne se limite pas à la seule reconnaissance des
zones d'ombre de cette période ; elle illustre, bien au contraire, la capacité
qui a toujours été la sienne d'assumer la responsabilité de son histoire.
Au fond, bien plus que la préoccupation du bien-être des populations
autochtones, c'est cette image d'une nation responsable qui a pu déranger. En
effet, les autres puissances qui ont eu des possessions dans le Pacifique se
sont, au contraire, illustrées par leur désintéressement total du sort des
populations de ces archipels. Il suffit de parcourir le Pacifique et de
constater les énormes disparités de développement pour s'en convaincre et
comprendre la réalité de l'impact de la présence française, dont nous nous
réjouissons.
Il nous est ici demandé d'admettre les dispositions contenues dans le document
d'orientation de l'accord de Nouméa, dont certaines ne peuvent entrer dans le
cadre constitutionnel actuel.
A cet égard, la proposition visant à intégrer ces dispositions dans le corps
même de la Constitution va au-delà de l'argument juridique. Elle confirme notre
volonté de demeurer au sein de la République.
Il est en effet erroné de laisser entendre que notre territoire pourrait, dès
aujourd'hui, s'acheminer vers un processus autre que son émancipation.
Certes, l'accession à la pleine souveraineté, à l'issue d'une période de vingt
ans, est une possibilité, mais elle n'est pas inéluctable.
L'évolution statutaire de la Nouvelle-Calédonie ne sera que l'expression du
fait majoritaire. C'est un élément essentiel de ce compromis, une victoire
durable de la démocratie sur le langage de la force.
L'une des orientations que nous avons communément admises est de mieux prendre
en compte l'identité mélanésienne.
Cette volonté doit s'entendre selon une logique de reconnaissance de la
spécificité de la terre calédonienne vis-à-vis des premiers immigrants, ceux
que James Cook découvrit le 4 septembre 1774. Il ne s'agit en aucun cas
d'introduire une quelconque prééminence des Mélanésiens sur les autres
communautés !
Monsieur le président, mes chers collègues, la Nouvelle-Calédonie ne sera ni
une terre de discrimination ni une terre d'exclusion, car sa population a
toujours été consciente que sa diversité culturelle constitue une véritable
richesse. Terre française, pays des droits de l'homme, elle restera toujours
une terre d'accueil.
A travers l'accord de Nouméa, la légitimité de la présence de toutes les
communautés vivant sur le territoire est reconnue et ne pourra désormais être
contestée.
Le concept nouveau d'une citoyenneté calédonienne introduite par cet accord
n'est autre que l'instrument permettant la cohésion de cette société, qui s'est
jusque-là cherchée et dont les diverses composantes n'avaient jamais affirmé
aussi nettement leur volonté d'un destin commun.
Voilà à peine dix ans, pour les communautés de la Nouvelle-Calédonie, vivre
ensemble était plus perçu comme une fatalité que comme un acte délibéré.
Il est donc capital que la Haute Assemblée puisse accompagner cet élan de
fraternité, cette volonté de vivre ensemble, désormais clairement exprimée
grâce à l'accord de Nouméa.
L'expérience statutaire des accords de Matignon a été bénéfique à bien des
égards. Elle nous permet d'envisager aujourd'hui une rénovation des
institutions locales, dans le sens d'un meilleur fonctionnement et d'une plus
grande autonomie.
Nous conservons le principe de l'organisation en trois provinces, qui a très
nettement répondu aux aspirations des uns et des autres.
Les assemblées locales continueront de fonctionner en étroite relation avec
l'échelon territorial, grâce au système de la double représentativité de leurs
membres.
La grande innovation est l'adoption du principe d'un exécutif local, dont la
composition sera proportionnelle aux groupes politiques représentés au Congrès.
N'est-ce pas là le signe d'une maturité politique dont il faut se féliciter
?
De même, l'exercice d'un plus large domaine de compétence par le territoire,
voulu par les partenaires de l'accord, procède de l'expérience de partage que
nous venons de vivre par l'application de la loi référendaire de 1988 et qui
nous a permis d'appréhender les secteurs où les Calédoniens sont en mesure de
se prendre en main.
L'essentiel de l'accord de Nouméa est bien le fait qu'il ouvre la voie à vingt
ans de stabilité et de paix, et donc de prospérité.
Cette durée de vingt ans est une formidable garantie de vitalité économique
pour la Nouvelle-Calédonie, dont les forces vives vont pouvoir se mobiliser.
Il appartiendra aux Calédoniens, et en particulier aux Mélanésiens, de ne pas
rater ce rendez-vous qui leur est fixé par l'histoire. Ceux qui se sont
jusque-là cantonnés dans un rôle de victimes ne pourront plus être les «
éternelles victimes ». En effet, tous les moyens de réussir son émancipation
seront donnés demain à la Nouvelle-Calédonie, avec notre assentiment.
Monsieur le président, mes chers collègues, voter en faveur de ce projet de
loi constitutionnelle, c'est, en quelque sorte, parrainer ce que Jacques
Lafleur appelle un « contrat d'amitié », qui renforcera chez les générations
futures - j'en suis intimement persuadé - la volonté des Calédoniens de
demeurer au sein de la République française.
(Bravo ! et applaudissements prolongés sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur les travées
socialistes.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à seize heures,
sous la présidence de M. René Monory.)
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi constitutionnelle, adopté par
l'Assemblée nationale, relatif à la Nouvelle-Calédonie.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
lorsqu'on n'est pas allé depuis plusieurs années en Nouvelle-Calédonie, on
éprouve nécessairement quelque hésitation à s'exprimer sur l'avenir de ce
territoire. Et pourtant, l'évolution de la Nouvelle-Calédonie me tient trop à
coeur pour que je n'essaie pas de donner aujourd'hui mon point de vue !
Mon premier contact avec la Nouvelle-Calédonie remonte à 1979, à l'occasion du
voyage du Président de la République. La Grande Terre, au nord comme au sud, et
les îles Loyauté étaient alors en liesse et rien ne pouvait laisser présager
des mouvements imminents remettant en cause le statut d'alors.
En 1985, dans le cadre d'une mission de la commission des lois, déjà présidée
par Jacques Larché, j'y ai retrouvé un climat profondément changé, et nous
avons pris alors la mesure de la complexité exceptionnelle du dossier.
Lors du débat qui suivit au Sénat à propos de l'une des nombreuses réformes de
statut, nous fûmes nombreux, à commencer par notre rapporteur d'aujourd'hui et
d'hier, à considérer que le problème de la Nouvelle-Calédonie devait être
traité à l'abri des fluctuations politiques de la métropole et que nous avions,
les uns et les autres, le devoir de l'examiner en fonction de la conjoncture du
moment mais aussi des évolutions prévisibles.
Les événements dramatiques qui suivirent provoquèrent un électrochoc, et c'est
déjà avec un fort sentiment de soulagement que furent salués les accords de
Matignon de juin 1988, accords ratifiés par un référendum à propos duquel notre
groupe prit clairement position pour le « oui ».
Le changement fondamental engagé à cette occasion a été le fruit de la volonté
et de la capacité des responsables politiques de toutes obédiences de la
Nouvelle-Calédonie de rechercher ensemble un consensus, ce qui supposait de la
part des uns et des autres beaucoup de courage et même, hélas ! l'esprit de
sacrifice. Nous étions loin des positions tranchées et antagonistes que notre
mission sénatoriale avait perçues seulement trois ans auparavant !
Le projet de loi constitutionnelle qui nous est soumis aujourd'hui est la
conséquence logique de ce qui avait été conclu en 1988, avec cependant la
substitution d'un nouvel accord au référendum qui avait été prévu pour 1998.
Cette adaptation aux circonstances d'aujourd'hui constitue incontestablement -
M. le président de la commission et M. le rapporteur l'on dit - une solution
préférable.
Je remercie notre collègue Jean-Marie Girault d'avoir, avec la connaissance
approfondie du dossier calédonien qui est la sienne, analysé la situation avec
lucidité, et le président de notre commission des lois d'avoir dit avec
conviction quelle était la voie à suivre. C'est en toute confiance que nous
suivrons leurs conclusions tendant à adopter conforme le projet de loi
constitutionnel qui nous est soumis.
Les raisons d'une telle approbation sont au nombre de trois.
Il y a, tout d'abord, la nécessité d'apporter un appui clair à l'accord de
Nouméa et à ceux qui, avec le Gouvernement, au nom du RPCR et du FLNKS, l'ont
signé. C'est un accord équilibré, source de réconciliation, de coopération, et
symbole d'une volonté commune d'envisager l'avenir. Il permet, enfin, de donner
tout son sens au mot fraternité.
(Applaudissements sur les travées de
l'Union centriste.)
Ensuite, il est indispensable que la France, pour conserver la place qu'elle
doit continuer à tenir, dans l'avenir, dans le Pacifique Sud, démontre son
aptitude à faire évoluer le dossier calédonien de sa propre initiative, qu'elle
fasse la preuve de sa capacité à dégager, sous sa seule autorité, une solution
constructive à laquelle peuvent adhérer tous les Calédoniens. Dans cette partie
du monde où nous avons trop souvent été critiqués, la France fait ainsi la
démonstration qu'elle n'a pas de leçon de morale à recevoir.
La troisième raison de notre approbation tient au développement économique de
la Nouvelle-Calédonie, dont dépendent en grande partie, nous le savons, les
perspectives d'avenir. L'incertitude politique est, à cet égard, un frein au
développement alors qu'une vision claire de l'avenir est un stimulant pour les
investissements, investissements qui sont nécessaires, en particulier venant de
la métropole. L'accord que nous allons ratifier y contribuera, j'en suis
certain.
Les modalités de l'accord intervenu sont, à cet égard, rassurantes. Elles
constituent une garantie pour une évolution harmonieuse, sans secousse, en
laissant le temps de préparer les différentes étapes de la mise en oeuvre du
statut à venir, en permettant de répondre aux interrogations qui subsistent et
de combler les lacunes qui existent encore.
Définir pour vingt ans l'évolution de l'organisation politique de la
Nouvelle-Calédonie est une solution de sagesse. Les transferts de compétences
progressifs devraient être le gage d'une évolution en douceur. La conciliation
entre droit commun et droit coutumier, et le respect que nous devons à la
coutume constituent la base d'une conception réaliste de l'organisation
politique à venir.
La reconnaissance de l'identité kanak, qui doit davantage imprégner la
Nouvelle-Calédonie de demain, est un acte probablement nécessaire qui découle
du préambule de l'accord de Nouméa, où est affirmé que « le moment est venu de
reconnaître les ombres de la période coloniale, même si elle ne fut pas
dépourvue de lumière ». Qu'elle est lourde de sens, cette phrase !
N'ayons pas honte de dire, à ce propos, qu'il y a eu aussi des lumières, car
la France a beaucoup apporté à ces territoires lointains, et nous devons,
aujourd'hui, avoir une pensée reconnaissante envers tous ceux et toutes celles
qui ont contribué à leur développement.
(Applaudissements sur les travées de
l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Le contexte d'aujourd'hui est profondément modifié et le monde évolue de plus
en plus vite. Nous ne pouvons plus - on peut le regretter - au nom du passé,
rester figés. Il faut évoluer, et évoluer vite. Et si la France est capable -
pourquoi en douterions-nous ? - de conduire la Nouvelle-Calédonie vers
l'avenir, alors, elle gardera et renforcera son autorité morale et son
influence politique dans le Pacifique.
Parce que nous avons cette conviction, mes amis et moi voterons le projet de
loi constitutionnelle qui nous est soumis aujourd'hui.
(Applaudissements sur
les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, dix
ans déjà ! Oui, voilà exactement dix ans, la Nouvelle-Calédonie était en
situation de guerre civile.
Sur cette terre mélanésienne, terre violente et souvent tragique, l'Histoire
vient de loin et ses convulsions sont redoutables. Emeutes, embuscades
meurtrières, prises d'otages, bain de sang... Hienghène et Ouvéa sont dans nos
mémoires. A Nouméa, colère et peur gagnent les esprits, la guerre civile sans
merci est l'issue probable. En métropole, d'aucuns, et non des moindres,
considèrent qu'elle a déjà commencé. A Paris, le Gouvernement parle haut et
fort, mais les solutions appropriées font défaut. François Mitterrand qualifie
la tournure que prennent ces affrontements de « guerre inexpugnable ».
Sitôt nommé après la réélection de François Mitterrand, Michel Rocard, Premier
ministre, a comme priorité première la situation explosive en
Nouvelle-Calédonie. Il sait que la violence est souvent accoucheuse de
l'Histoire. Sa volonté politique, le recours à une méthode exceptionnelle vont
transformer le cours des événements en peu de jours.
C'est l'envoi de la « mission du dialogue ». Les acteurs de cette mission
mettront leur intelligence comme leur ambition et leur sensibilité au service
d'un objectif qui les transcende. Là où les tensions sont les plus fortes, ils
s'en vont écouter, montrer que l'on comprend les protagonistes, qu'une solution
technocratique ne leur sera pas imposée ; mais ils inciteront les Kanaks et les
Caldoches à en trouver une, accompagnée d'une garantie qui la rende crédible.
C'est un subtil mélange de travail en pleine lumière et d'activités discrètes.
Le Premier ministre ne croit qu'à une seule force, celle du dialogue.
De ce patient travail de persuasion naîtront les accords de Matignon, dont le
premier objectif est le retour à la paix civile.
Scellée par une poignée de main historique, cette réussite et aussi due à deux
hommes : Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, qui accomplissent l'impensable.
Dressant avec lucidité et clairvoyance le bilan des événements, ils s'élèvent
au-dessus des réactions passionnelles, des contraintes et engagements
doctrinaux. Le risque de haine raciale conduit les protagonistes à nouer un
dialogue, les incite à réfléchir et leur fait dire oui à Michel Rocard. Ayant
vu loin et juste, les deux précurseurs sont conscients qu'ils ne seront pas
immédiatement compris.
En acceptant de signer ces accords, Jean-Marie Tjibaou fait le pari de
l'intelligence qui triomphera de l'intolérance. Il est convaincu que cet accord
créera les conditions d'une décolonisation réussie ; il croit en la grandeur de
la France, qui peut et doit accompagner un petit pays vers son émancipation et
son indépendance. Connaissant bien son peuple, il sait qu'il prend des risques.
Ne dit-il pas - et j'ai relevé cette citation à l'exposition qui lui est
consacrée au centre culturel Tjibaou à Nouméa - : « Le plus dur n'est pas de
mourir, mais de rester vivant, de se sentir étranger dans son propre pays, être
dans l'impuissance de relever le défi. Moi, je ne suis que passager, je dois
faire tout ce qui est en mon pouvoir pour que le pays que je lègue à mes
enfants soit le plus beau pays ».
Ce pari de l'intelligence, il le paiera de sa vie le 4 mai 1989. La folie
meurtrière a eu raison de l'homme, mais pas du message qu'il avait délivré.
Incompris, Jacques Lafleur fait l'amer constat qu'il l'est lors du référendum
de 1988. Loin de faiblir, il persévère et récidive puisqu'il sera le premier à
envisager, dès 1991, la « solution consensuelle ». Il est plus que jamais
convaincu qu'aucune communauté ne pourra décider de son destin sans les autres,
et surtout pas contre les autres. Il sait qu'il n'y a pas de stratégie
alternative, que la solution négociée est la seule possible. Il a conscience
qu'une victoire dans les urnes, certes démocratique, ne garantira pas la paix
civile, la stabilité et la prospérité auxquelles aspirent tous les
Calédoniens.
Les accords de Matignon ne manquaient pas d'ambition. Dix ans, ce n'était pas
« un répit mais un défi ». Il ne s'agissait pas moins de maintenir le
territoire dans la paix civile tout en répartissant autrement les pouvoirs, en
apportant des changements concrets dans la vie des Calédoniens et en relançant
le développement du territoire.
La paix civile a été durablement établie ; les différentes communautés ont
réappris à se parler, à vivre ensemble. Nous avons pu constater que ces accords
ont largement répondu aux espérances qu'ils avaient fait naître. Le
rééquilibrage politique, économique, social, culturel, l'amélioration de la
qualité de vie, ont été entrepris de manière volontaire. Les résultats sont
probants et encourageants. Ils ont contribué à renforcer l'esprit de dialogue
entre les communautés en apaisant les peurs et frustrations. Le pari de
l'intelligence a été gagné. Tous s'accordent à reconnaître que le cap fixé
depuis 1988 doit être maintenu. Réussite incontestable, les accords de Matignon
ont ouvert une fenêtre d'espoir et ont tracé la voie menant à l'accord de
Nouméa.
D'un chef de gouvernement à l'autre, il y a eu la même volonté de montrer la
continuité de la paix. La finesse politique, l'art de la compréhension et de la
conciliation, qui ont présidé à la construction de l'accord de Nouméa méritent
d'être soulignés. Au nom de tous mes amis, j'adresse gratitude et satisfaction
au Gouvernement, au Premier ministre et à vous, monsieur le secrétaire d'Etat à
l'outre-mer, ainsi qu'à ceux qui, au nom du Gouvernement, ont été les maîtres
d'oeuvre de cette délicate négociation, je veux parler de MM. Christnacht et
Lataste.
Ces accords de Nouméa sont une évolution institutionnelle originale. La
volonté d'éviter un « référendum couperet ou un référendum KO » est vite
apparue de part et d'autre. La période transitoire de dix ans se révèle trop
courte pour permettre aux partenaires de rapprocher leurs points de vue sur la
réponse à apporter à un référendum d'autodétermination. Aucune des deux parties
n'a intérêt à un tel scrutin, ni celle qui l'aurait remporté, et encore moins
celle qui l'aurait perdu. Toutes deux savent que, dans la réalité, il n'y
aurait eu que deux vaincus. La solution négociée s'impose, elle devient
inéluctable.
Les premières discussions font apparaître que le FLNKS pose un préalable à
toute négociation sur l'avenir institutionnel du territoire, celui d'un accord
sur le nickel, qui donnerait sa viabilité au projet de construction d'une usine
de traitement dans la province Nord, dans le massif minier de Koniambo. Le
nickel menaçait donc la paix. Malgré tous ses efforts, M. Alain Juppé n'arrive
pas à fléchir la position du P-DG d'une entreprise semi-publique. Avec le
précieux concours de Philippe Essig, M. Lionel Jospin parvient, en moins de
sept mois, à concilier la volonté légitime du groupe ERAMET de préserver ses
réserves de nickel...
M. Jean Chérioux.
C'est formidable !
M. Josselin de Rohan.
Heureusement qu'il était là !
M. Guy Allouche.
... et celle, qui ne l'est pas moins, des indépendantistes de prendre pied, un
jour prochain, sur le marché mondial du nickel. M. Roch Wamytan déclare : « Il
est important que le P-DG d'ERAMET accepte enfin de donner un sens au mot
"partage", mot clé des accords de Matignon, entaché du sang de beaucoup de nos
morts, à commencer par celui de Jean-Marie Tjibaou. »
Prenant en compte la spécificité de la Nouvelle-Calédonie, l'accord de Nouméa,
original tant par sa rédaction que par les solutions qu'il propose, est
historique.
Original est le préambule. Officialisant une vérité historique, il n'est ni
acte de contrition ni déclaration de repentance. Il rappelle que la
colonisation a représenté pour la population d'origine un traumatisme durable,
une perte de dignité, d'identité, de culture, une perte de ses traditions. Il
ajoute que les libertés publiques ont été longtemps niées, les droits
politiques refusés aux Kanaks, malgré le lourd tribut qu'ils avaient payé à la
France lors de la Première Guerre mondiale. Oui, monsieur le président de la
commission des lois, vous aviez raison ce matin de dire à cette tribune que la
Nouvelle-Calédonie est une terre fidèle et qu'elle l'a prouvé. Le préambule
exprime la nécessité de faire mémoire des souffrances endurées par le peuple
kanak, de lui restituer son identité confisquée, préalable à la fondation d'une
nouvelle souveraineté partagée dans un destin commun.
Les « ombres » de la période coloniale sont irréfutables. Mais, mes chers
collègues, pardonnez ce truisme : il y a ombres parce qu'il y a lumières.
Aussi, le préambule ne fait pas abstraction des autres communautés vivant sur
le territoire. Elles ont acquis, par leur participation à l'édification de la
Nouvelle-Calédonie, une légitimité à y vivre, elles sont indispensables à son
équilibre social, au fonctionnement de son économie et de ses institutions.
Ce préambule est l'affirmation d'un peuple en devenir, qui tire sa réalité
d'un passé multiforme, sur la base duquel il entend construire son avenir. Il
juge que le moment est venu pour la Nouvelle-Calédonie de poser les bases d'une
nouvelle citoyenneté permettant au peuple d'origine de constituer avec les
femmes et les hommes qui vivent sur le territoire une communauté humaine
affirmant un destin choisi et partagé. Une formule du préambule résume
parfaitement l'aperçu historique et prospectif qu'il dresse : « Le passé a été
le temps de la colonisation, le présent est le temps du partage par le
rééquilibrage, l'avenir doit être le temps de l'identité, dans un destin
commun. »
Les négociateurs de Nouméa ont soigneusement évité les mots tabous : celui
d'indépendance, redouté par les Caldoches, et celui d'autonomie, rejeté par les
Kanaks, au profit du concept de « citoyenneté nouvelle de la Nouvelle-Calédonie
».
Mes chers collègues, soyons lucides, ne nous leurrons pas, les mots ont un
sens et la citoyenneté est une valeur républicaine. Elle ne peut s'appliquer
qu'à des hommes pleinement émancipés et maîtres de leur destin. On n'est pas
citoyen à moitié, ni citoyen d'un autre pays que le sien. En signant un accord
qui, en termes solennels, établit les bases d'une citoyenneté de la
Nouvelle-Calédonie, en organisant les étapes du passage de la citoyenneté à la
nationalité, avec transfert, certes progressif, mais irréversible, des
compétences, les négociateurs ont franchi la distance qui sépare l'autonomie de
l'indépendance envisagée. Même si les liens avec la métropole restent
privilégiés, on est passé dans un autre monde. En cela, l'accord de Nouméa est
historique.
Qu'il soit pour ou contre l'indépendance, pénétrons-nous de l'idée qu'un Kanak
aspire à la dignité, au respect, à la reconnaissance de son identité, qu'il
rejette l'assistanat, car la dignité ne s'achète pas avec des subventions. Les
indépendantistes du FLNKS, qui ont écrit ces accords à l'encre de leur
sensibilité et de leur vécu, voient ainsi aboutir leurs principales
revendications : la reconnaissance de leur identité trop longtemps ignorée, le
fait colonial et l'accession à la souveraineté selon un processus progressif,
rassembleur et sans rupture violente.
En contresignant cet accord de Nouméa, les anti-indépendantistes opèrent une
véritable révolution culturelle. Ils ont obtenu que le processus s'étale sur
vingt ans, le temps nécessaire pour que la réalité pénètre les esprits et
qu'une consultation électorale conclue le mouvement. L'idée essentielle des
accords est acceptée : les Caldoches veulent s'intégrer à la citoyenneté de la
Nouvelle-Calédonie et envisagent un destin commun avec les Kanaks.
« Reconnaissons-nous mutuellement et, ensemble, nous investirons pour le
futur. Sans dominateur et sans dominé, nous apprendrons plus vite à vivre
ensemble », telle semble être la pensée profonde des principaux responsables.
Ainsi que l'a dit Michel Rocard, cet accord de Nouméa est « un acte de
civilisation ». Condamnées à vivre ensemble sur un même territoire, ces deux
communautés au destin désormais partagé expriment ensemble leur « soulagement
». Comment ne pas les comprendre !
Le document d'orientation qui constitue le dispositif de l'accord traite de
l'identité kanak, des institutions, du partage des compétences entre l'Etat et
le territoire, du développement économique et social, de l'évolution de
l'organisation politique de la Nouvelle-Calédonie. Il envisage les perspectives
qui s'ouvriront au territoire au terme de la période transitoire, ainsi que
l'application de l'accord, les textes qui conditionnent sa mise en forme, les
consultations qui doivent intervenir dans le territoire et le suivi de
l'accord.
Mes chers collègues, à cet instant, je veux remercier notre excellent collègue
Jean-Marie Girault, d'abord pour le rapport de qualité qu'il nous a présenté et
surtout pour l'humanisme et la chaleur humaine qui le caractérisent. Ce matin,
à la tribune, il a encore dit ce qu'il pensait de ce merveilleux territoire
qu'est la Nouvelle-Calédonie. A mon tour, je lui exprime toute ma gratitude.
La première place accordée à l'identité kanak n'a rien de fortuit. L'accord
prévoit qu'elle doit être prise en compte dans l'organisation politique et
sociale de la Nouvelle-Calédonie. La place de la coutume, fondement de
l'identité kanak, est pleinement reconnue, tant dans le domaine de la justice
que dans le domaine institutionnel.
Un Sénat coutumier est créé. Il sera obligatoirement saisi des lois du pays
portant sur l'identité kanak. Le patrimoine culturel et la culture kanak seront
revalorisés.
Symboliquement inauguré le jour anniversaire de la mort de Jean-Marie Tjibaou,
le centre culturel Tjibaou, qui est d'une exceptionnelle beauté architecturale,
jouera à cet égard un rôle essentiel. Lieu de culture vivante, cette réussite
artistique, avec son parcours végétal initiatique, est vécue à Nouméa comme un
symbole puissant, celui de la dignité retrouvée des Kanaks et de l'avenir à
construire en commun.
Dans le domaine des institutions, l'innovation essentielle est que certaines
délibérations du Congrès auront le caractère de « lois du pays », soumises au
seul contrôle du Conseil constitutionnel. Le Congrès acquiert ainsi un réel
pouvoir législatif. Une nouvelle répartition des compétences entre l'Etat et le
territoire est prévue. Certaines seront transférées, d'autres seront partagées.
Les compétences régaliennes resteront de la compétence exclusive de l'Etat
jusqu'au terme de la période transitoire. L'accord fait preuve de pragmatisme
puisqu'il prévoit le transfert progressif. En revanche, les transferts sont
irréversibles.
Mes chers collègues, l'euphorie n'est pas exclusive d'interrogations
sérieuses. Le développement économique et social, axe majeur des accords de
Matignon, reste une préoccupation capitale pour les signataires de l'accord car
il conditionne l'avenir harmonieux et pacifique du territoire.
Lors de notre récente mission, tous nos interlocuteurs ont insisté sur le
maintien du rééquilibrage entre les provinces et la nécessité d'appliquer une
discrimination positive. Nous avons compris qu'ils souhaitaient que ces points
soient explicitement développés dans la loi organique.
Notre ancien collègue M. Dick Uckeiwé, que nous avons eu plaisir à retrouver
sur l'île de Maré, nous a dit qu'il fallait « être vigilant quant au respect de
l'esprit et de la lettre de l'accord et veiller à ce que la province Sud ne
récupère pas l'essentiel des moyens ». Le président de la province des îles
Loyauté, M. Nidoish Naisseline, a déclaré quant à lui : « L'émancipation à
laquelle nous aspirons n'est pas uniquement politique et culturelle, elle doit
être aussi économique... Il ne suffit pas de créer des infrastructures, car à
quoi serviraient-elles s'il n'y a pas de développement économique ? » La
réalité est qu'il n'y a pas d'émancipation sans fondement économique.
Désormais protégé par l'accord, l'emploi local devra être développé, la
création d'emplois constituant une priorité absolue pour l'avenir du
territoire, surtout pour les provinces Nord et les îles Loyauté. Aussi utiles
soient-ils, tous les efforts de formation auront peu d'effets si les jeunes,
qui sont nombreux sur le territoire, n'ont aucune perspective de trouver un
travail à l'issue de leurs études.
« Formons des jeunes pour le développement économique du territoire et non
pour en faire de futurs révolutionnaires si l'emploi n'est pas au rendez-vous.
» C'est ce que nous disait, dans la province Nord, l'un des représentants de
l'Etat.
La mise en oeuvre des orientations définies dans l'accord de Nouméa exige une
révision de notre Constitution pour trois raisons : pour créer une entité
juridique originale, pour autoriser le législateur à déroger à certains
principes constitutionnels, pour permettre l'organisation d'un référendum local
en 1998.
De ce fait, la Constitution devient la traduction juridique d'un certain
nombre d'objectifs politiques.
Entité juridique
sui generis,
la Nouvelle-Calédonie ne sera plus un
territoire d'outre-mer aux termes de l'article 74 de la Constitution. Selon un
processus gradué et irréversible, la Nouvelle-Calédonie se verra attribuer une
compétence générale dans tous les domaines, à l'exception des compétences
régaliennes, qui pourront être transférées après approbation des populations
concernées. Le caractère irréversible de ce transfert est le principe le plus
novateur de l'accord.
Les institutions du territoire seront dotées d'un pouvoir normatif autonome.
Les « lois du pays », votées par le Congrès, ne pourront être contestées que
devant le Conseil constitutionnel, avant leur publication.
La reconnaissance d'un pouvoir normatif autonome au profit des institutions
calédoniennes est contraire à l'article 1er de notre loi fondamentale, qui
définit la France comme une « République indivisible ». C'est la première
raison de la révision constitutionnelle.
La deuxième raison réside dans le fait que certaines orientations de l'accord
entrent en contradiction avec des principes de valeur constitutionnelle,
notamment le principe d'égalité. Ces dérogations touchent aux domaines du droit
électoral, de la citoyenneté et de l'emploi.
L'application de l'accord précise que seule la population de
Nouvelle-Calédonie sera appelée à s'exprimer par référendum. C'est la troisième
raison de la révision constitutionnelle.
Ainsi, à situation exceptionnelle, solution exceptionnelle. Essentiellement
politique, cet accord de Nouméa bouscule assurément notre culture républicaine.
Contrairement à la tradition jacobine, qui tend à insérer la réalité dans des
catégories juridiques prédéfinies, les négociateurs se sont appuyés sur la
réalité pour aboutir à ce statut. Il fallait faire fi des rigidités du droit,
lequel doit s'adapter aux réalités humaines, historiques et politiques, et non
l'inverse. Le droit doit suivre ce que l'Histoire demande à ses acteurs en
intelligence, en compréhension et en ouverture d'esprit. A cet égard, le xxie
siècle s'annonce prometteur.
Pour parvenir rapidement à un accord et à un vote conforme, les très judicieux
amendements proposés à Mme Tasca, rapporteur du projet de loi à l'Assemblée
nationale, par le président de notre commission des lois et notre rapporteur
ont été acceptés, repris et votés par l'Assemblée nationale, après avis
favorable du Gouvernement. Garant de la pérennité de cet accord historique, un
vote quasi unanime des deux assemblées et, je l'espère, du Congrès du
Parlement, aura un impact puissant en Nouvelle-Calédonie.
Mes chers collègues, il n'y a pas lieu de nier les difficultés qui nous
attendent. La loi organique s'annonce difficile. Nous serons sur une « ligne de
crête ». La traduction en termes juridiques de l'esprit comme de la lettre de
cet accord nécessitera un effort d'imagination et de précision hors du commun :
je pense particulièrement au respect de la coutume, à sa tradition orale et à
sa transcription dans la loi. La limitation des recours devant le Conseil
constitutionnel dépendra aussi du législateur, qui portera en la circonstance
une très lourde responsabilité. Aussi, la mise en place d'un comité de suivi
pour valider la traduction juridique de l'accord de Nouméa est de bon
augure.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet accord de Nouméa
représente le point d'équilibre auquel les trois partenaires sont parvenus,
après que chacun eut exprimé ses attentes, ses demandes et ce qui n'était pas
négociable. Cet accord est le signe qu'il y avait un « avant » et que la
Nouvelle-Calédonie est aujourd'hui entrée dans « l'après », dans son propre
avenir. Lequel d'entre nous pourrait prendre le risque de ne pas approuver le
choix de la paix ?
Par le vote de ce projet de loi constitutionnelle, il nous est demandé de
ratifier cet accord et d'approuver ce nouveau pas accompli de concert par les
Calédoniens. Cet assentiment s'exprimera avec une solennité toute particulière,
puisque c'est dans notre loi fondamentale qu'il va trouver sa place. Les
sénateurs socialistes approuveront ce projet de loi constitutionnelle parce
qu'ils veulent être au rendez-vous de l'Histoire.
(Applaudissements sur les
travées socialistes, sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
(M. Jean Faure remplace M. René Monory au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
vote de l'Assemblée nationale sur le projet de loi que nous examinons
aujourd'hui a été impressionnant : sur 507 votants, 490 se sont prononcés pour,
13 contre et 4 se sont abstenus. Même en comptant les soixante-dix députés
n'ayant pas voulu ou pas pu participer à ce scrutin, la majorité a atteint un
chiffre exceptionnel - presque un consensus.
Les discours que nous avons entendus depuis ce matin à cette tribune montrent
qu'il en sera très probablement de même au Sénat.
Je suis parmi ceux qui ont eu la chance de se rendre en Nouvelle-Calédonie
avant les événements de ces dix dernières années, moins souvent, certes, que
notre rapporteur, Jean-Marie Girault ; mais, enfin, j'y suis allé au temps du
président Dick Ukeiwé, qui a laissé dans notre assemblée un si grand
souvenir.
Je m'y étais rendu pour un hommage rendu au bataillon du Pacifique, et je
remercie à ce propos le président Jacques Larché d'avoir évoqué ces hommes
d'élite, qui furent parmi les premiers combattants de la France libre.
Mais, après ces temps historiques, sont venus des moments d'incompréhension et
d'antagonismes. Des drames se sont produits, dont celui d'Ouvéa. Lorsqu'on y
songe, on voit quel formidable chemin a été parcouru pour en arriver à la
réconciliation d'aujourd'hui.
La première étape significative remonte aux accords de Matignon, négociés
grâce à la détermination de Michel Rocard, entre nos compatriotes de la
Nouvelle-Calédonie, rassemblés essentiellement dans le RPCR de Jacques Lafleur,
et le mouvement regroupant une grande partie des populations kanak, le FLNKS,
dont l'un des chefs était Jean-Marie Tjibaou, malheureusement assassiné en
1989.
Les deux mêmes grands partis se sont retrouvés le 5 mai dernier pour signer
l'accord de Nouméa, dont nous avons à connaître aujourd'hui. Il faut en
remercier les principaux responsables : d'un côté, Jacques Lafleur, toujours,
qui tient un rôle essentiel depuis de nombreuses années et, de l'autre côté,
Roch Wamytan ainsi que plusieurs chefs coutumiers que nous avons reçus au Sénat
voilà quelques semaines.
Comme l'a dit notre collègue Simon Loueckhote, représentant élu de la
Nouvelle-Calédonie au Sénat, ces hommes ont fait le choix de la modération, de
l'intelligence et du courage pour se tendre la main et penser ensemble à
l'avenir.
Mais, justement, quel avenir ? Dans la République française, souhaite le RPCR.
Dans l'indépendance, espère le FLNKS. C'est là que commence l'ambiguïté et
qu'il devient nécessaire de se poser quelques questions.
Reporter dans quinze ou vingt ans le référendum d'autodétermination qui devait
avoir lieu en cette année 1998, n'est-ce pas reculer à plus tard des divisions
et des frustrations qui, vraisemblablement, naîtront de toute façon ? Car, si
le « oui » à l'indépendance l'emporte, alors la situation sera irréversible.
Or, quelles assurances les Calédoniens auront-ils de pouvoir rester librement
sur cette terre qu'ils ont mise en valeur et à laquelle ils sont viscéralement
attachés ?
Et si la Nouvelle-Calédonie fait le choix de demeurer française, ce qui serait
sans doute son intérêt politique, économique et social face aux puissances de
cette région du Pacifique, les indépendantistes pourront renouveler à loisir
les consultations électorales - on leur permet de le faire tous les deux ans -
ce qui, il faut bien le reconnaître, est plutôt antidémocratique et, en tout
cas, constitue un ferment d'instabilité nuisible au développement du pays.
Du point de vue juridique, des réserves peuvent être également exprimées ; M.
Badinter, je crois, en est d'accord. On nous répète beaucoup, depuis quelques
semaines, qu'il n'existe pas d'avancée politique sans innovations juridiques.
Certes, mais, cette fois, celles-ci vont parfois un peu loin.
La limitation, contraire au
jus soli,
du corps électoral aux personnes
installées avant 1988 et à leurs descendants est passablement choquante, tout
comme est choquant le régime différencié établi en matière d'accès à l'emploi.
A l'heure où, en métropole, on rejette violemment toute idée même de débat sur
la préférence nationale, n'est-ce pas très précisément le système que l'on met
en place en Nouvelle-Calédonie ? N'y a-t-il pas là une contradiction qui peut
surprendre ?
Enfin, je terminerai par un point qui m'a attristé dans ces accords, non plus
dans le corps des articles, mais dans le préambule. Les désormais
traditionnelles paroles de contrition y sont légion, ce qui prouve une fois de
plus que nous n'avons pas compris l'enseignement du philosophe Spinoza, qui
nous a pourtant appris que « le repentir est une seconde faute ».
Dans le préambule, il est même écrit, très précisément, que sous la domination
française, « le patrimoine artistique kanak était nié ou pillé ». Je trouve
cela vraiment un peu fort.
Permettez-moi de rendre hommage ici au travail effectué par le musée national
des arts d'Afrique et d'Océanie, qui, au contraire, n'a pas cessé de faire
connaître l'art de cette région du monde en organisant des échanges avec des
musées d'autres pays, à Bâle, à New York, où j'ai été témoin de ces expositions
remarquables, ou simplement en présentant des collections spécialement
consacrées à la Nouvelle-Calédonie, comme ce fut le cas en 1993 - ceux qui ont
vu la magnifique exposition « De jade et de nacre » s'en souviennent. Le mois
dernier encore, à Nantes, des collections d'art kanak étaient présentées au
public, avec un grand succès. Soulignons aussi le magnifique musée inauguré au
nom de Jean-Marie Tjibaou, dans un site exceptionnel de Nouvelle-Calédonie. La
photographie de ses édifices en forme de coquillages a fait le tour du monde.
C'est une superbe promotion de l'art kanak.
Croit-on, sincèrement, que cet art et cette culture seraient mieux connus si
la France ne les avait pas diffusés dans le monde entier ? Au lieu de nous
demander de battre notre coulpe à coups de repentances pompeusement rédigées,
il eût mieux valu souligner ce qu'il y avait de bon dans le passé et, comme l'a
joliment dit Aragon, « réinventer le passé pour voir la beauté de l'avenir
».
Nous avons donc, vous le voyez, quelques réserves sur le texte de l'accord de
Nouméa, ce qui nous laisse perplexes. Nous voici comme les Mandarins de Simone
de Beauvoir : « Ah, si seulement on pouvait être tout à fait pour ou tout à
fait contre ! » Mais tel n'est pas le cas. Rien n'est nettement noir ou blanc.
Il existe des zones d'ombre et de lumière. D'ailleurs, dans l'évocation de ce
qu'a été la présence française là-bas, il est écrit que « le moment est venu de
reconnaître les ombres de la période coloniale » ; mais les auteurs du
préambule ajoutent aussitôt : « même si elle ne fut pas dépourvue de lumière.
»
Cependant nous comprenons que si le texte est critiquable dans certaines de
ses expressions, il est tout à fait acceptable dans son esprit et, surtout,
nous ne pensons guère qu'il eut été possible de faire autrement. C'est la seule
voie qui nous donne une bonne chance de sincère réconciliation et qui permette
de voir le futur avec optimisme.
Dans ces conditions, il y aura une ou deux abstentions parmi les sénateurs non
inscrits, mais la grande majorité de notre groupe votera le projet de loi
constitutionnelle qui ouvre à la Nouvelle-Calédonie, espérons-le, de véritables
perspectives de progrès et de paix.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Pasqua.
M. Charles Pasqua.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous sommes saisis d'un projet de révision constitutionnelle dont il s'agit
pour nous de mesurer les conséquences.
Dans cette enceinte, nous avons à plusieurs reprises eu l'occasion de traiter
des problèmes de la Nouvelle-Calédonie, toujours avec une très grande sympathie
pour l'ensemble des communautés qui peuplent ce territoire.
Nous n'avons naturellement pas oublié, ni les uns ni les autres, encore moins
ceux qui, comme moi, ont eu l'occasion à deux reprises d'occuper des fonctions
au Gouvernement, les drames qui ont ensanglanté ce territoire et leurs
conséquences.
J'ai entendu ce matin Mme le garde des sceaux et M. le secrétaire d'Etat nous
présenter l'accord de Nouméa et le projet de révision. Je leur rends volontiers
témoignage qu'ils n'en ont nullement dissimulé les conséquences.
J'ai également entendu le plaidoyer plein d'enthousiasme du rapporteur de la
commission des lois ainsi que l'intervention plus mesurée de son président.
Nous somme appelés à voter sur un texte qui ne peut être isolé ni de son
contexte ni du préambule de l'accord. Or, si nous avions été consultés sur le
préambule, je suis persuadé qu'il y aurait eu une très large majorité pour le
rejeter tant il recèle de choses inacceptables !
Le spectre des affrontements qui se sont déroulés en Nouvelle-Calédonie
n'enlève rien à la dignité de notre histoire commune.
Que pour chasser ce spectre, on soit tenté de récrire l'histoire de la France
en la réduisant à « une colonisation qui a porté atteinte à la dignité du
peuple kanak », je peux d'autant moins l'accepter que l'on officialise ainsi
des fantasmes qui continueront à peser sur l'avenir.
L'honnêteté intellectuelle que l'on doit aux faits et aux réalités suffirait à
refuser aux idéologues le droit de les travestir, même si certains croient, à
ce prix, préserver à court terme une paix sociale qui ne peut se fonder sur des
bases ainsi faussées.
A mes yeux, le projet de loi constitutionnelle qui nous est soumis révèle
d'emblée dans l'esprit ce qu'il confirme dans la lettre : une prédétermination
de l'indépendance en même temps qu'une certaine méfiance du suffrage populaire.
En effet, l'Etat accorde sa pleine caution à la souveraineté à venir de la
Nouvelle-Calédonie, qui apparaît comme un leitmotiv dans le texte de l'accord
du 5 mai : « ... Par un partage de souveraineté avec la France, sur la voie de
la pleine souveraineté... » - article 4 du Préambule - « ... Les institutions
de la Nouvelle-Calédonie traduiront la nouvelle étape vers la souveraineté... »
- article 5 du préambule - « ... Les compétences transférées ne pourront
revenir à l'Etat, ce qui traduira le principe d'irréversibilité de cette
organisation... » - article 5 du préambule - « ... L'Etat reconnaît la vocation
de la Nouvelle-Calédonie à bénéficier, à la fin de cette période, d'une
complète émancipation... » - l'article 5 de l'accord.
Pour que le scrutin final d'autodétermination ne trahisse pas cette logique
implacable, l'accord va jusqu'à mettre en place un mécanisme inouï, qui bafoue
la démocratie, puisque, si les électeurs répondaient non, le tiers des membres
du Congrès pourrait provoquer une nouvelle consultation, à deux reprises. Je
vous demande, en conscience, quel démocrate pourrait accepter que l'on
emprisonne ainsi le suffrage universel.
Je ne dis pas non à l'indépendance éventuelle de la Nouvelle-Calédonie ; cela,
nous le verrons bien. Je dis non à l'indépendance obligatoire ; je dis non au
mépris de l'expression du peuple. Je vois mal comment un parlementaire pourrait
cautionner une telle défiance à l'égard du vote qui va jusqu'à enfermer sa
libre expression tant que le peuple n'aura pas exprimé la réponse attendue par
ses dirigeants.
Ce détournement de la démocratie est d'une extrême gravité, car il instille
dans notre Constitution elle-même un renoncement aux principes républicains,
qui ne s'arrête d'ailleurs pas à ce seul fondement.
L'accord du 5 mai est, en effet, fondé sur la reconnaissance d'une «
souveraineté kanak » qui est, au regard de l'histoire du territoire, un mythe
et qui, surtout, par la reconnaissance de droits préférentiels à cette ethnie,
place les populations d'autres origines, européennes ou non européennes, en
position d'infériorité.
L'établissement d'un « Sénat coutumier » conduit à une représentation
inégalitaire selon les ethnies qui contredit violemment la République, à la
fois dans son principe d'égalité et dans l'unité du peuple français, sans
distinction d'origine, de race ou de religion.
Les dérogations au droit commun contredisent également les principes
républicains. La possibilité pour un Calédonien d'opter soit pour le système de
droit commun, soit pour le système de vie coutumier est une aberration
juridique et politique qui va dissocier le statut des personnes entre
Mélanésiens et non-Mélanésiens. Le statut coutumier est élevé au rang de statut
civil ordinaire de même nature que le statut civil de droit commun, alors que
l'article 75 de la Constitution ne garantit la conservation des droits civils
non laïcs que pour les citoyens qui n'y ont pas renoncé.
Le principe d'égalité est également atteint par les limitations introduites
par le texte au droit de vote et par le fait que la situation des travailleurs
ne sera plus garantie par le principe du droit républicain ; elle sera
désormais régie par le droit local imprégné par la coutume. Le territoire
détiendra désormais la totale responsabilité de la politique de l'emploi, alors
qu'il incombe à la République unitaire d'assurer l'égalité devant le
travail.
Il est vrai que c'est le principe inverse que l'on veut mettre en oeuvre
puisque l'accord établit une discrimination que l'on dit « positive » et que
j'appelle, moi, ségrégation entre les Français de Nouvelle-Calédonie et ceux
qui viennent de métropole et du reste de l'outre-mer. Dans quel état de
faiblesse et de schizophrénie est donc tombée la République pour condamner la
préférence nationale à Paris et en faire une référence à Nouméa ?
En faisant des non-Canaques des citoyens de seconde catégorie, le texte de
l'accord foule aux pieds les valeurs et les droits naturels de la citoyenneté.
Transcrites et appliquées dans le quotidien, à travers des lois locales, une
réforme foncière accélérée et la privation du droit du sol, les dispositions de
ce texte préparent la réduction des libertés individuelles.
Cet accord fonde l'avenir, croit-on, mais il le fonde non pas sur la notion
d'égalité entre les communautés, garantie d'un réel partage et d'un
développement commun, mais sur l'inégalité, la division, voire la revanche
entre les différentes composantes. On ne construit pas un pays sur de tels
principes.
Mes chers collègues, comment de tels errements peuvent-ils être l'objet d'un
consensus ? En tout cas, ce débat a le mérite de l'exemplarité, du cas d'école
: on ne peut que mettre à mal les principes de la République dès lors que l'on
abandonnne son fondement, qui est la souveraineté.
La souveraineté ne se partage pas. La Constitution dispose qu'« aucune section
du peuple, ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice. » Dès lors que
la souveraineté est atteinte, la République s'effondre. L'accord du 5 mai en
est une tragique illustration.
La souveraineté ne se partage, ne se délègue pas. Elle n'appartient qu'au
peuple tout entier, elle dépasse même ce peuple car elle s'identifie à la
République et à l'histoire de la France. Lorsqu'on s'attaque à elle, on
s'attaque à l'égalité ; lorsqu'on s'attaque à elle, on s'attaque au suffrage
universel ; lorsqu'on s'attaque à elle, on s'attaque à la citoyenneté. Cette
cohérence-là, c'est la cohérence de la France et de la République. Face à elle,
l'incohérence du projet institutionnel et politique que l'on vous demande
d'approuver fait figure, au sens classique du mot, de monstre.
Je comprends les difficultés de la situation de la Nouvelle-Calédonie, mais la
République ne peut pas régler ses problèmes en reniant ses principes. La
République ne peut pas, au nom de l'équité, instaurer l'inégalité ; la
République ne peut pas, au nom de la souveraineté, bafouer sa souveraineté ; la
République ne peut pas, au nom de la démocratie, renier le suffrage universel.
Elle ne le peut pas pour la Nouvelle-Calédonie, car elle construit l'avenir du
territoire sur des principes pernicieux qui hypothéqueront sa marche vers le
progrès ; elle ne le peut pas pour l'ensemble de l'outre-mer, car elle donne à
toutes les minorités agissantes la conviction de la faiblesse du droit et de la
force du fait ; elle ne le peut pas pour la France, car la France n'est plus
elle-même quand la République n'est plus une et indivisible.
Mes chers collègues, pas plus qu'un autre je ne suis hostile au progrès et à
l'évolution ; mais je considère que, par le projet de loi qui nous est soumis,
la voie qui est ouverte nous conduit, contrairement à ce que l'on croit, à
l'aventure.
C'est la raison pour laquelle, non pas par hostilité de principe, mais par
respect pour les principes fondamentaux de la République, je voterai contre le
projet de loi qui nous est présenté.
(Applaudissements sur certaines travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
j'ai entendu avec beaucoup de plaisir l'exposé que vient de faire notre
collègue Charles Pasqua. En tant que juriste, je ne peux qu'approuver cette
conception du respect de la République.
Mais la République a-t-elle toujours été présente en Nouvelle-Calédonie et en
outre-mer ?
Le débat qui a lieu aujourd'hui est extrêmement complexe. La France doit
peser, mesurer les erreurs qu'elle a commises de-ci de-là en outre-mer. Pendant
des années, peuples d'outre-mer, nous avons vécu appris par coeur les méandres
de la Seine... les pommiers roses... pour découvrir brusquement, en arrivant
ici, dans la mère patrie que nous étions des étrangers chez nous.
La France a toujours voulu, avec beaucoup de générosité, intégrer, assimiler
totalement les peuples de l'outre-mer, en pensant qu'elle détenait en métropole
le bonheur pour tout le monde.
La France est plurielle. La France a voulu, à un moment donné, séparer,
couper, et cela a donné lieu au fameux chapitre VI du programme commun de la
gauche, qui a fait tant de dégâts.
Aujourd'hui, nous avons à traiter un problème humain. La chirurgie réparatrice
laisse toujours des séquelles. Le Gouvernement nous propose un laser moins
traumatisant.
Certes, nous sommes confrontés à une contorsion constitutionnelle extrêmement
difficile, extrêmement compliquée, mais cette exception institutionnelle ne
répond-elle pas à un besoin de paix, à un besoin de dialogue, à un besoin de
prendre en compte le respect de ces peuples ? Car ceux qui, comme moi, ont vu
se battre la famille de Dick Ukeiwé, ceux qui ont vu naître les clans, ceux qui
constatent tous les jours que les lois de la République ne sont pas respectées
en outre-mer, même pas dans les départements d'outre-mer, ceux-là sont en droit
de se demander si ce texte ne constitue pas une solution.
La volonté de décentralisation est très forte. Tout le monde a applaudi le
célèbre discours de décentralisation de Cayenne.
Et pourtant, alors que dans quelques jours vont être signés les accords de
Lomé, nous, en Guadeloupe, nous, en Martinique, nous ignorons quel sera le
contenu de ces accords, qui portent sur des productions tropicales ! Nous ne
comprenons pas ce que fait le ministère de la coopération, qui subventionne,
avec des financements et des prêts à taux bonifié, la construction d'aérodromes
qui contribuera à la destruction de notre développement touristique.
Au-delà des contorsions juridiques, je pense que le peuple calédonien a
suffisamment souffert pour que nous lui lancions ensemble un message de paix.
Pour autant, cette évolution et cette contorsion juridique et constitutionnelle
ne doivent être ni une règle ni une jurisprudence, et elles ne sauraient
s'appliquer à tout le monde.
La paix, c'est le dialogue. Quelles seront pour la France les conséquences de
cet accord de Nouméa ?
La France ne doit pas perdre de vue qu'elle dispose d'un espace maritime dont
elle ne connaît pas encore la richesse, qu'elle dispose d'un espace
géo-stratégique, mais aussi d'un espace de paix, car, en outre-mer, la France
représente un espace de paix.
S'agissant de la Nouvelle-Calédonie, la France doit être d'une grande
prudence. Permettre à ces peuples de gérer leur destin au moyen de cette
évolution institutionnelle ne doit pas ouvrir la porte aux prédateurs qui sont
nombreux dans la zone. La France doit veiller à faire respecter le vaste
laboratoire humain et stratégique qui lui a permis en toutes circonstances, à
travers le monde, grâce à l'espace d'outre-mer, de donner leur véritable
dimension au respect et à la dignité des hommes.
J'oublierai ce soir que je suis juriste : je voterai ce projet de loi
constitutionnelle.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et sur certaines
travées socialistes.)
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, je voudrais tout d'abord remercier tous ceux qui se sont exprimés
dans ce débat, débat important sur le plan juridique et sur celui des
principes, puisqu'il s'agit de réviser la loi fondamentale.
Ce débat concerne les liens que la République française entretient avec le
territoire de la Nouvelle-Calédonie, des liens forts, passionnels, mais aussi
fondés - beaucoup d'orateurs l'ont souligné - sur une profonde connaissance
réciproque et sur un grand respect des cultures et des identités.
Depuis ce matin, nous avons entendu des propos souvent émouvants et confiants,
nourris de l'expérience de la Nouvelle-Calédonie et, plus largement, de ce qu'a
été, à une époque plus lointaine, l'Union française, des propos qui tiennent
compte également des évolutions qui ont marqué notre pays et abouti au
mouvement de décolonisation engagé après la Seconde Guerre mondiale.
Ce que nous sommes en train de mettre en oeuvre en Nouvelle-Calédonie, c'est
une démarche respectueuse des principes qui sont les grands principes de la
République.
M. Pasqua a dit tout à l'heure qu'il ne pouvait voter ce texte au motif qu'il
allait à l'encontre des principes d'égalité devant le suffrage universel et de
souveraineté. Je lui répondrai qu'en l'occurrence le concept d'égalité n'est
pas purement formel, mais que, dans l'évolution qui se poursuit en
Nouvelle-Calédonie, il est l'expression de la reconnaissance de toutes les
communautés qui vivent en Nouvelle-Calédonie, de celle qui était là à
l'origine, la communauté kanak, comme de celles qui sont venues par la suite
apporter leur pierre à la construction du pays.
La grande force de ces accords, c'est précisément que leurs signataires ont
manifesté la volonté de toutes les communautés de vivre ensemble sur le même
territoire, en même temps que le refus d'une démarche consistant à dire aux
autres : « Vous n'avez qu'à partir ! », le refus de la domination de tel ou tel
groupe de population sur les autres.
Il y a bien là recherche de l'égalité par la reconnaissance des droits
réciproques de chacun, quelles que soient l'histoire et la culture dont il est
issu, et témoignage de la volonté de construire un ensemble commun et d'y vivre
dans la paix.
Vous avez dit encore, monsieur Pasqua, que le suffrage universel était rogné.
Je vous répondrai simplement que la Constitution, en son article 53, prévoit
que ce sont les « populations intéressées » qui se prononcent sur ce que l'on
appelle le maintien ou non dans la République française.
La notion de « populations intéressées » a pu être précisée par le Conseil
constitutionnel, mais elle vise tout de même ceux qui ont un lien évident avec
le territoire.
Les restrictions qui sont apportées au suffrage universel ne concernent que
ceux qui viendraient s'installer ou qui seraient en transit en
Nouvelle-Calédonie, et non pas ceux qui y vivent depuis l'origine ou qui y ont
fait souche.
Il était nécessaire, à cet égard, non d'instituer une citoyenneté à deux
niveaux, mais de reconnaître le droit de ceux qui font vraiment la
Nouvelle-Calédonie de se prononcer au moment du scrutin final.
Enfin, vous avez dit, monsieur Pasqua, que la souveraineté était atteinte. Je
pense que la notion de souveraineté porte sur un ensemble d'attributions et de
compétences. Or une des grandes qualités de l'accord de Nouméa est de permettre
des évolutions en matière de compétences, étant entendu que les compétences du
« noyau dur » - la défense, la justice, la monnaie, l'ordre public,
c'est-à-dire ce qui fait ou non la réalité de l'indépendance - resteront
exercées par la République française au terme d'un processus évolutif.
Dans une démarche axée sur la volonté d'aboutir à un accord, nous nous sommes
efforcés de tracer avec les partenaires calédoniens un chemin de vingt ans qui
organise l'avenir, un avenir empreint d'un sentiment de soulagement.
Dès ma prise de fonctions, j'ai, comme M. Jacques Larché et M. Jean-Marie
Girault, pu observer en Nouvelle-Calédonie une très forte hantise par rapport à
ce qui allait se passer à la fin de l'année 1998.
On me demandait : « Les communautés qui ont appris à mieux vivre ensemble ne
vont-elles pas, d'un seul coup, se dresser les unes contre les autres ? Un
avenir incertain ne va-t-il pas gêner les investissements, empêcher les jeunes
d'entrevoir une possibilité de réelle formation ? »
Dans ce Pacifique, qui est un univers largement anglo-saxon et où nous avons
été beaucoup critiqués, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie, Wallis-et-Futuna
assurent la présence de 500 000 hommes et femmes de langue française, et donc,
dans une certaine mesure, de culture française. C'est une chance pour la France
et c'est aussi un élément de diversité pour cet ensemble géographique.
En tout cas, ce que nous mettons en oeuvre en Nouvelle-Calédonie, je puis en
témoigner, est perçu aussi bien en Australie ou en Nouvelle-Zélande que dans
des pays qui ont accédé récemment à l'indépendance comme le Vanuatu ou les îles
Fidji comme une évolution positive et, en même temps, comme la manifestation de
la permanence de la présence de la culture française dans le Pacifique.
Ne gâchons pas cette chance ! Si nous sommes conscients de ce que peut
représenter à l'avenir la présence dans le Pacifique de la culture et de la
langue françaises, la Nouvelle-Calédonie ne peut que nous apparaître comme un
point d'appui très important, et cela va bien au-delà de petites divergences
sur l'interprétation de la Constitution.
En tant que juriste, je peux bien l'avouer, à certains moments, j'ai
effectivement eu des doutes sur les évolutions possibles. Mais ce qui est
important, c'est que nous accompagnions le mouvement de l'histoire. J'ai le
sentiment que nous nous inscrivons dans les perspectives qui ont été tracées
par deux textes fondamentaux, que M. Pasqua connaît certainement mieux que moi
: le discours de Brazzaville et la Constitution de 1958.
M. Charles Pasqua.
Un homme, une voix !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat.
La Constitution de 1958, monsieur Pasqua, prévoyait
une Communauté qui, malheureusement, n'a pas pu se mettre en place,
probablement parce qu'elle arrivait trop tard, comme ce fut le cas de la
loi-cadre de Gaston Defferre de 1956, qui essayait d'anticiper les
évolutions.
C'est faute d'avoir permis les évolutions en temps utile que la France a dû se
séparer, souvent dans la douleur, de territoires qui ont été en relation forte
avec notre pays.
Cette leçon de l'histoire, la France la fait sienne en Nouvelle-Calédonie,
dans le Pacifique.
Je voudrais dire, pour conclure, que la démarche qui a été adoptée exprime une
triple volonté : de réconciliation, de paix et de développement. Il est à
l'honneur du Parlement français d'accompagner cette volonté comme l'ont fait
les partenaires calédoniens, comme l'a fait la grande majorité des forces
politiques en Nouvelle-Calédonie.
Certes, tout ne sera pas facile, et je pense notamment à l'élaboration de la
loi organique. Mais, en ma qualité de secrétaire d'Etat à l'outre-mer, je pense
qu'il faut faire confiance à l'imagination, à l'intelligence, à l'esprit de
concorde des hommes et des femmes qui vivent en Nouvelle-Calédonie, plutôt que,
s'arc-boutant sur les principes, refuser les évolutions, se contenter de gérer
des situations d'affrontement dont on sait qu'elles sont insupportables dans le
monde moderne.
Oui, c'est un pari ! C'est un pari sur l'avenir que le Gouvernement a fait
avec les partenaires calédoniens. J'ai espoir dans le concours lucide du Sénat,
aujourd'hui, pour nous permettre d'accompagner la NouvelleCalédonie dans son
évolution, sachant que, dans vingt ans ou un peu moins, ce sont les Calédoniens
qui décideront de leur avenir, parce que c'est un principe fondamental de la
République française.
Voilà pourquoi, au nom du Gouvernement, je demande au Sénat d'approuver, comme
l'Assemblée nationale, ce projet de révision constitutionnelle.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen et sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - Le titre XIII de la Constitution est rétabli et intitulé :
"Dispositions transitoires relatives à la Nouvelle-Calédonie". »
Personne ne demande la parole...
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Articles 2 et 3
M. le président.
« Art. 2. - Dans le titre XIII de la Constitution, il est rétabli un article
76 dans la rédaction suivante :
«
Art. 76
. - Les populations de la Nouvelle-Calédonie sont appelées à
se prononcer avant le 31 décembre 1998 sur les dispositions de l'accord signé à
Nouméa le 5 mai 1998 et publié le 27 mai 1998 au
Journal officiel
de la
République française.
« Sont admises à participer au scrutin les personnes remplissant les
conditions fixées à l'article 2 de la loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988.
« Les mesures nécessaires à l'organisation du scrutin sont prises par décret
en Conseil d'Etat délibéré en conseil des ministres. »
- (Adopté.)
« Art. 3. - Dans le titre XIII de la Constitution, il est rétabli un
article 77 dans la rédaction suivante :
«
Art. 77
. - Après approbation de l'accord lors de la consultation
prévue à l'article 76, la loi organique, prise après avis de l'assemblée
délibérante de la Nouvelle-Calédonie, détermine, pour assurer l'évolution de la
Nouvelle-Calédonie dans le respect des orientations définies par cet accord et
selon les modalités nécessaires à sa mise en oeuvre :
« - les compétences de l'Etat qui seront transférées, de façon définitive, aux
institutions de la Nouvelle-Calédonie, l'échelonnement et les modalités de ces
transferts, ainsi que la répartition des charges résultant de ceux-ci ;
« - les règles d'organisation et de fonctionnement des institutions de la
Nouvelle-Calédonie et notamment les conditions dans lesquelles certaines
catégories d'actes de l'assemblée délibérante pourront être soumises avant
publication au contrôle du Conseil constitutionnel ;
« - les règles relatives à la citoyenneté, au régime électoral, à l'emploi et
au statut civil coutumier ;
« - les conditions et les délais dans lesquels les populations intéressées de
la Nouvelle-Calédonie seront amenées à se prononcer sur l'accession à la pleine
souveraineté.
« Les autres mesures nécessaires à la mise en oeuvre de l'accord mentionné à
l'article 76 sont définies par la loi. »
- (Adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Lanier, pour explication de vote.
M. Lucien Lanier.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ma
participation à la récente mission du Sénat en Nouvelle-Calédonie m'a permis de
constater sur place les faits tels qu'ils sont.
Les accords de Matignon ont rétabli pendant dix ans sur le territoire un calme
nécessaire. Ils ont permis à des communautés diverses de se concerter et de
s'entretenir, non plus d'agitations passionnelles et partisanes, mais de
l'avenir autant économique que politique ou administratif du territoire.
Or l'accord de Nouméa conclut avec sagesse que cette concertation de
communautés diverses doit se poursuivre sans qu'intervienne une décision,
actuellement possible mais éventuellement brutale, qui couperait net une
évolution au cours aujourd'hui satisfaisant.
L'accord de Nouméa est le fait d'hommes aux origines différentes qui ont tous
l'amour de leur territoire. Sommes-nous plus savants qu'eux ? Possédons-nous
une vérité meilleure que la leur, alors que nous l'aurions conçue à 20 000
kilomètres du territoire ?
L'accord cherche à apaiser des racismes latents, voire à y mettre fin, à
équilibrer un avenir économique possible, sans lequel il n'y aura aucun avenir
politique pour la Nouvelle-Calédonie dans l'immensité du Pacifique, à concilier
un droit coutumier et un droit écrit, ce qui demande du calme et du temps, à
concilier aussi la diversité des communautés, à sublimer le passé et à préparer
l'avenir, mais surtout à faire s'épanouir avec pragmatisme l'harmonie de la
paix française dans la paix calédonienne.
C'est la raison pour laquelle je voterai la réforme constitutionnelle.
(Applaudissements sur certaines travées du RPR, ainsi que sur les travées de
l'Union centriste et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Tui.
M. Basile Tui.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
après avoir voté les trois articles de ce projet de loi constitutionnelle, je
voterai, bien sûr, également l'ensemble de ce texte. Cependant, je souhaiterais
revenir sur trois points.
Tout d'abord, la motivation essentielle de mon vote favorable réside dans le
fait que ce projet de loi représente à mes yeux à la fois la conciliation
d'opinions diverses, parfois opposées, la construction d'une Calédonie dans la
paix, l'élaboration d'un grand projet politique pour ce territoire et ses
différentes communautés ainsi que la prise en compte, dans l'article 2, des
populations vivant depuis de nombreuses années en Nouvelle-Calédonie.
Ce dernier élément concerne environ 17 000 Wallisiens et Futuniens, désormais
rassurés sur le sort qui leur est réservé.
Toutefois, et c'est ma deuxième remarque, une interrogation demeure s'agissant
de ceux qui se sont récemment installés dans ce territoire voisin ou des
candidats au départ, pour qui cette émigration est une question de survie.
Car il ne faut pas oublier, d'une part, que les îles Wallis-et-Futuna
n'offrent pas de possibilité d'acquérir une véritable formation professionnelle
et que, d'autre part, dans ces îles, seule une personne active sur huit
parvient à trouver un emploi.
Je formule donc ici l'espoir de toute une population : celui de ne pas se voir
refuser la possibilité de tenter sa chance - souvent sa seule chance - en
Nouvelle-Calédonie.
C'est pourquoi je souhaite vivement que le futur accord destiné à régir les
relations entre nos territoires bénéficie en priorité aux différentes
populations franco-océaniennes du Pacifique.
Enfin, je veux dire toute ma confiance dans la sagesse des futurs
cosignataires qui représenteront les territoires concernés et du Gouvernement
français. Je sais qu'ils sauront prendre en compte les préoccupations de
chacun, notamment celles des personnes qui n'entrent pas dans le champ de
l'article 2, et je les en remercie infiniment.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, ainsi que sur
certaines travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
tiens tout d'abord à saluer le travail de tous ceux qui ont permis, de près ou
de loin, de parvenir à l'accord intervenu à Nouméa le 5 mai dernier.
La recherche d'une solution consensuelle pour l'avenir de ce territoire
d'outre-mer a, bien entendu, constitué la meilleure voie possible pour
maintenir la paix et préparer un futur plein d'espoir pour la population de
Nouvelle-Calédonie. J'en atteste en tant que rapporteur spécial du budget des
départements et territoires d'outre-mer.
Cette entente sur l'évolution et le destin du territoire procure un véritable
soulagement pour tous, même si certaines interrogations sérieuses demeurent.
Notre excellent rapporteur, M. Jean-Marie Girault, les ayant évoquées ce matin,
je n'y reviendrai donc pas.
Les échéances, à savoir la consultation référendaire des habitants de
Nouvelle-Calédonie qui doit intervenir avant le 31 décembre 1998, imposent que
les discussions et l'adoption des textes relatifs à ce territoire s'effectuent
rapidement.
C'est pourquoi il serait plus qu'opportun que le projet de loi organique qui
précisera les orientations de l'accord de Nouméa soit présenté au Parlement
dans les meilleurs délais, afin que l'évolution institutionnelle se produise
dans de bons termes.
En dépit du soutien que la majorité des sénateurs du groupe des Républicains
et Indépendants apportera aujourd'hui à ce texte et lors du Congrès à
Versailles, je me dois d'exprimer une certaine réserve sur la déclaration de
repentance formulée dans le préambule de l'accord signé à Nouméa.
Enfin, je tiens à rendre hommage au remarquable travail accompli par le
rapporteur, M. Jean-Marie Girault, et le président de la commission des lois,
M. Jacques Larché, qui ont recherché en amont, avec l'Assemblée nationale, un
texte consensuel, sur ce sujet si important.
Ils y sont parvenus, ce qui est le gage de la volonté de tous les acteurs de
permettre à la Nouvelle-Calédonie de se construire un destin sûr et serein,
dans le respect mutuel des différentes cultures.
Ainsi, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, c'est un message d'espérance, de tolérance et d'avenir que nous
adressons aujourd'hui aux Calédoniens. J'espère personnellement que ce
processus conduira, au-delà de la période de quinze à vingt ans, au maintien de
la Nouvelle-Calédonie au sein de la République française.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
(M. René Monory remplace M. Jean Faure au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Le Sénat va procéder au vote sur l'ensemble du projet de loi
constitutionnelle.
En application de l'article 60
bis
, alinéa 1, du règlement, la
conférence des présidents a décidé qu'il serait organisé un scrutin public à la
tribune, dans les conditions fixées par l'article 56
bis
du
règlement.
Il va donc être procédé au scrutin public à la tribune.
Je vais tirer au sort la lettre par laquelle commencera l'appel nominal.
(Le sort désigne la lettre F.)
M. le président.
Le scrutin sera clos quelques instants après la fin de l'appel nominal.
Le scrutin est ouvert.
Huissiers, veuillez commencer l'appel nominal.
(L'appel nominal a lieu.)
M. le président.
Le premier appel nominal est terminé. Il va être procédé à un nouveau appel
nominal.
(Le nouvel appel nominal a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
J'invite MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le
résultat du dépouillement du scrutin n°
113:
Nombre de votants | 308 |
Nombre de suffrages exprimés | 297 |
Majorité absolue des suffrages | 149 |
Pour l'adoption | 287 |
Contre | 10 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
3
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale, relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable
des conflits.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 530, distribué et renvoyé à la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution
éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le
règlement.
4
DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de MM. Jacques Habert, Hubert Durand-Chastel et André Maman une
proposition de loi portant création d'un fonds de garantie destiné à
l'indemnisation des Français établis hors de France victimes d'événements
politiques graves dans leur pays de résidence.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 529, distribuée et renvoyée à
la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
J'ai reçu de MM. Jean-Pierre Raffarin, Michel Bécot, Claude Belot, Jean Boyer,
Christian Bonnet, James Bordas, Robert Calmejane, Jean-Claude Carle, Auguste
Cazalet, Jean Clouet, Henri Collard, Charles-Henri de Cossé-Brissac, Philippe
Darniche, André Diligent, Jean Delaneau, Marcel Deneux, Michel Doublet, Jean
Faure, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, Paul Girod, Bernard Hugo, Lucien
Lanier, Guy Lemaire, Roland du Luart, Serge Mathieu, Louis Moinard, Lylian
Payet, Raymond Soucaret et François Trucy une proposition de loi relative à la
sécurité des piscines.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 531, distribuée et renvoyée à
la commission des affaires économiques et du Plan, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
5
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION
D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Projet d'accord entre la Communauté européenne et la Fédération de Russie
sur le commerce des produits textiles.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le n° E-1107 et
distribuée.
6
CLÔTURE DE LA SESSION
M. le président.
Mes chers collègues, avant de déclarer close la session ordinaire de
1997-1998, je vous rappelle que, au cours de la séance du jeudi 25 juin, il a
été donné connaissance au Sénat du décret du Président de la République
convoquant le Parlement en session extraordinaire à compter du 1er juillet
1998.
Conformément à la lettre de M. le ministre chargé des relations avec le
Parlement, la prochaine séance aura lieu le mercredi 8 juillet 1998, à quinze
heures et le soir, avec l'ordre du jour suivant :
1. Ouverture de la première session extraordinaire de 1997-1998.
2. Sous réserve de sa transmission, nouvelle lecture du projet de loi
d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions.
M. Bernard Seillier, rapporteur de la commission des affaires sociales.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mardi 7 juillet 1998, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 7 juillet 1998, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
En application de l'article 28 de la Constitution, je constate que nous sommes
arrivés au terme de la session ordinaire de 1997-1998.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures quinze.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
COMMISSIONS MIXTES PARITAIRES
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF AU DÉVELOPPEMENT D'ACTIVITÉS POUR L'EMPLOI DES JEUNES
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le jeudi 2 octobre 1997 et par le Sénat dans sa séance du mercredi 1er octobre 1997, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Claude Bartolone,
Jean-Claude Boulard, Mme Muguette Jacquaint, MM. Denis Jacquat, Jean Le Garrec,
Jean Pontier.
Suppléants. -
MM. Pierre Cardo, Nicolas Dupont-Aignan, Robert Galley,
Mme Paulette Guichard-Kunstler, MM. Maurice Leroy, Alain Neri, Alfred Recours.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jean-Pierre Fourcade, Louis Souvet, Jacques Bimbenet,
Jean Chérioux, Jean Madelain, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, M. Guy
Fischer.
Suppléants. -
M. Henri Belcour, Mme Nicole Borvo, MM. Gilbert Chabroux,
Serge Franchis, Alain Gournac, Jean-Louis Lorrain, Henri de Raincourt.
Nomination du bureau
Dans sa séance du jeudi 2 octobre 1997, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Jean-Pierre Fourcade.
Vice-président :
M. Claude Bartolone.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Jean-Claude Boulard ;
-
au Sénat :
M. Louis Souvet.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI PORTANT MESURES URGENTES À CARACTÈRE
FISCAL ET FINANCIER
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le lundi 6 octobre 1997 et par le Sénat dans sa séance du jeudi 2 octobre 1997, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Henri Emmanuelli, Didier Migaud, Augustin Bonrepaux,
Philippe Auberger, Charles de Courson, Jean-Pierre Brard, Pierre Carassus.
Suppléants. -
MM. Pierre Bourguignon, Gérard Fuchs, Yves Tavernier,
Gilles Carrez, Yves Deniaud, Laurent Dominati, Jean-Jacques Jegou.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Christian Poncelet, Alain Lambert, Philippe Marini,
Roland du Luart, Henri Collard, René Régnault, Paul Loridant.
Suppléants. -
MM. Philippe Adnot, Denis Badré, Guy Cabanel, Yann
Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mardi 7 octobre 1997, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Christian Poncelet.
Vice-président :
M. Henri Emmanuelli.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Didier Migaud ;
-
au Sénat :
M. Alain Lambert.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI PORTANT RÉFORME DU SERVICE NATIONAL
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 8 octobre 1997 et par le Sénat dans sa séance du mardi 7 octobre 1997, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Paul Quilès, Didier Boulaud, François Lamy, René
Galy-Dejean, Guy Teissier, Jean-Claude Sandrier, Gérard Charasse.
Suppléants. -
MM. André Vauchez, Guy-Michel Chauveau, Mme Martine
Lignières-Cassou, MM. Pierre Lellouche, Charles Cova, Arthur Paecht, Michel
Voisin.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Xavier de Villepin, Serge Vinçon, Daniel Goulet,
Bernard Plasait, André Dulait, André Rouvière, Jean-Luc Bécart.
Suppléants. -
MM. Michel Alloncle, Jean Clouet, Claude Estier, Jean
Faure, Maurice Lombard, Jean-Luc Mélenchon, André Vallet.
Nomination du bureau
Dans sa séance du jeudi 9 octobre 1997, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Paul Quilès.
Vice-président :
M. Xavier de Villepin.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Didier Boulaud ;
-
au Sénat :
M. Serge Vinçon.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF À L'INSCRIPTION D'OFFICE DES
PERSONNES ÂGÉES DE DIX-HUIT ANS SUR LES LISTES ÉLECTORALES
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 15 octobre 1997 et par le Sénat dans sa séance du jeudi 9 octobre 1997, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires.
- Mme Catherine Tasca, MM. Christian Paul, Jérôme Lambert,
Olivier de Chazeaux, José Rossi, André Gérin, Claude Hoarau.
Suppléants.
- MM. René Dosière, Christophe Caresche, Jacques Floch,
François Colcombet, Mme Christine Lazerges, MM. Richard Cazenave, Henri Plagnol.
Sénateurs
Titulaires.
- MM. Jacques Larché, Christian Bonnet, Patrice Gélard,
Paul Girod, Pierre Fauchon, Guy Allouche, Michel Duffour.
Suppléants.
- MM. André Bohl, Philippe de Bourgoing, Charles de
Cuttoli, Michel Dreyfus-Schmidt, Lucien Lanier, Georges Othily, Jean-Claude
Peyronnet.
Nomination du bureau
Dans sa séance du jeudi 16 octobre 1997, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
Mme Catherine Tasca.
Vice-président :
M. Jacques Larché.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Christian Paul ;
-
au Sénat :
M. Christian Bonnet.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI D'ORIENTATION SUR LA PÊCHE MARITIME ET
LES CULTURES MARINES
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 22 octobre 1997 et par le Sénat dans sa séance du jeudi 16 octobre 1997, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. André Lajoinie, Dominique Dupilet, René Leroux,
Jean-Yves Le Drian, Didier Quentin, Aimé Kerguéris, Guy Lengagne.
Suppléants. -
M. Gilbert Le Bris, Mme Jacqueline Lazard, MM. Kofi
Yamgnane, Louis Guédon, Jean-Yves Besselat, Léonce Deprez, Claude Gatignol.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jean François-Poncet, Josselin de Rohan, Michel
Doublet, Louis Moinard, Charles Revet, Paul Raoult, Pierre Lefebvre.
Suppléants. -
MM. Gérard César, Fernand Demilly, Mme Anne Heinis, MM.
Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Louis Minetti, Fernand Tardy.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mardi 4 novembre 1997, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. André Lajoinie.
Vice-président :
M. Jean Huchon.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Dominique Dupilet ;
-
au Sénat :
M. Josselin de Rohan.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
POUR 1998
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 19 novembre 1997 et par le Sénat dans sa séance du mardi 18 novembre 1997, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Claude Bartolone, Alfred Recours, Claude Evin,
Bernard Accoyer, Jean-Luc Préel, Mme Jacqueline Fraysse, M. Bernard Charles.
Suppléants. -
M. Augustin Bonrepaux, Mme Dominique Gillot, MM. Pascal
Terrasse, Bruno Bourg-Broc, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM.
Pierre-Christophe Baguet, Denis Jacquat.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jean-Pierre Fourcade, Charles Descours, Jacques
Machet, Alain Vasselle, Jacques Oudin, François Autain, Mme Nicole Borvo.
Suppléants. -
MM. Jacques Bimbenet, Paul Blanc, Jean Chérioux, Mme
Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Claude Huriet, Jean Madelain.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mercredi 19 novembre 1997, la commission mixte paritaire a
nommé :
Président :
M. Claude Bartolone.
Vice-président :
M. Jean-Pierre Fourcade.
Rapporteurs :
-
à l'Assemblée nationale :
M. Alfred Recours ;
-
au Sénat :
M. Charles Descours.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 10 décembre 1997 et par le Sénat dans sa séance du mardi 9 décembre 1997, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Henri Emmanuelli, Didier Migaud, Philippe Auberger,
Augustin Bonrepaux, Roland Carraz, Pierre Méhaignerie, Jean Tardito.
Suppléants. -
MM. Tony Dreyfus, Jean-Pierre Kucheida, Yves Tavernier,
Michel Bouvard, Gilles Carrez, Gilbert Gantier, Jean-Jacques Jégou.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Christian Poncelet, Alain Lambert, Henri Collard,
Jean-Philippe Lachenaud, Philippe Marini, René Régnault, Paul Loridant.
Suppléants. -
MM. Bernard Angels, Denis Badré, Joël Bourdin, Guy
Cabanel, Michel Charasse, Yann Gaillard, Joseph Ostermann.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mercredi 10 décembre 1997, la commission mixte paritaire a
nommé :
Président :
M. Henri Emmanuelli.
Vice-président :
M. Christian Poncelet.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Didier Migaud ;
-
au Sénat :
M. Alain Lambert.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 1997
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mardi 16 décembre 1997 et par le Sénat dans sa séance du même jour, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires.
- MM. Henri Emmanuelli, Didier Migaud, Philippe Auberger,
Augustin Bonrepaux, Roland Carraz, Charles de Courson, Daniel Feurtet.
Suppléants.
- MM. Gérard Bapt, Pierre Bourguignon, Alain Rodet, Arthur
Dehaine, Yves Deniaud, Gilbert Gantier, Jean-Jacques Jégou.
Sénateurs
Titulaires.
- MM. Christian Poncelet, Alain Lambert, Henri Collard,
Yann Gaillard, Roland du Luart, Marc Massion, Mme Marie-Claude Beaudeau.
Suppléants.
- MM. Philippe Adnot, Bernard Angels, Jean Cluzel, Hubert
Haenel, Jean-Philippe Lachenaud, Philippe Marini, René Régnault.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mardi 16 décembre 1997, la commission mixte paritaire a
nommé :
Président :
M. Christian Poncelet.
Vice-président :
M. Augustin Bonrepaux.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Alain Lambert ;
-
au Sénat :
M. Didier Migaud.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI TENDANT À AMÉLIORER LES CONDITIONS
D'EXERCICE DE LA PROFESSION DE TRANSPORTEUR ROUTIER
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 21 janvier 1998 et par le Sénat dans sa séance du mardi 20 janvier 1998, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires.
- MM. André Lajoinie, Jacques Fleury, Mme Odile Saugues,
MM. Michel Bouvard, Dominique Bussereau, Michel Vaxès, Jean-Michel Marchand.
Suppléants.
- MM. Jean-Jacques Filleul, Eric Besson, Daniel Marcovitch,
Alain Marleix, Yves Deniaud, Alain Ferry, Marc-Philippe Daubresse.
Sénateurs
Titulaires.
- MM. Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Lucien Lanier,
Mme Anne Heinis, MM. Bernard Joly, Léon Fatous, Pierre Lefebvre.
Suppléants.
- MM. Jean Bizet, Dominique Braye, Marcel-Pierre Cléach,
Fernand Demilly, Aubert Garcia, Pierre Hérisson, Louis Minetti.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mercredi 21 janvier 1998, la commission mixte paritaire a
nommé :
Président :
M. Jean Huchon.
Vice-président :
M. André Lajoinie.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Michel Vaxès ;
-
au Sénat :
M. Jean-François Le Grand.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF À LA NATIONALITÉ
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mardi 20 janvier 1998 et par le Sénat dans sa séance du mercredi 14 janvier 1998, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
Mme Catherine Tasca, MM. Louis Mermaz, Bruno Le Roux,
Pierre Mazeaud, Renaud Donnedieu de Vabres, André Gerin, Jean-Pierre Michel.
Suppléants. -
MM. François Colcombet, René Dosière, Mme Christine
Lazerges, M. Alain Veyret, Mmes Yvette Benayoun-Nakache, Nicole Catala, M.
Henri Plagnol.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jacques Larché, Christian Bonnet, Patrice Gélard,
Paul Masson, Jean-Jacques Hyest, Guy Allouche, Robert Badinter.
Suppléants. -
MM. Philippe de Bourgoing, Michel Dreyfus-Schmidt, Michel
Duffour, Pierre Fauchon, Paul Girod, Lucien Lanier, René-Georges Laurin.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mercredi 4 février 1998, la commission mixte paritaire a
nommé :
Président :
M. Jacques Larché.
Vice-président :
Mme Catherine Tasca.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Louis Mermaz ;
-
au Sénat :
M. Christian Bonnet.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DE LA PROPOSITION DE LOI RELATIVE À LA SÉCURITÉ ET À LA
PROMOTION D'ACTIVITÉS SPORTIVES
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 4 février 1998 et par le Sénat dans sa séance du même jour, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Claude Bartolone, Henri Nayrou, Patrick Bloche,
Pierre Lasbordes, Marc Reymann, Patrick Leroy, Mme Marie-Hélène Aubert.
Suppléants. -
Mmes Hélène Mignon, Yvette Benayoun-Nakache, MM. Didier
Migaud, Patrice Martin-Lalande, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Charles
Erhmann, Hubert Grimault.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Adrine Gouteyron, François Lesein, Pierre Martin,
Albert Vecten, James Bordas, Franck Sérusclat, Mme Hélène Luc.
Suppléants. -
MM. Philippe Arnaud, Jean-Claude Carle, André Egu,
Jacques Legendre, Mme Danièle Pourtaud, MM. Ivan Renar, Victor Reux.
Nomination du bureau
Dans sa séance du jeudi 5 février 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Claude Bartolone.
Vice-président :
M. Adrien Gouteyron.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Henri Nayrou ;
-
au Sénat :
M. François Lesein.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DE LA PROPOSITION DE LOI RELATIVE AU FONCTIONNEMENT DES
CONSEILS RÉGIONAUX
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 28 janvier 1998 et par le Sénat dans sa séance du jeudi 22 janvier 1998, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
Mme Catherine Tasca, MM. Gérard Gouzes, René Dosière,
Robert Pandraud, Claude Goasguen, Jacques Brunhes, Guy Hascoët.
Suppléants. -
MM. Bernard Roman, Jacques Floch, Mme Frédérique Bredin,
M. Jacky Darne, Mme Claude Ledoux, MM. Christian Estrosi, Dominique Bussereau.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jacques Larché, Paul Girod, Patrice Gélard, Lucien
Lanier, Jean-Jacques Hyest, Guy Allouche, Michel Dreyfus-Schmidt.
Suppléants. -
MM. Robert Badinter, François Blaizot, Christian Bonnet,
Philippe de Bourgoing, Michel Duffour, René-Georges Laurin, Paul Masson.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mardi 10 février 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Gérard Gouzes.
Vice-président :
M. Jacques Larché.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. René Dosière ;
-
au Sénat :
M. Paul Girod.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF À L'ENTRÉE ET AU SÉJOUR DES
ÉTRANGERS EN FRANCE ET AU DROIT D'ASILE
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le 5 février 1998 et par le Sénat dans sa séance du 29 janvier 1998, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires.
- Mme Catherine Tasca, MM. Gérard Gouzes, Christophe
Caresche, Henri Cuq, Claude Goasguen, André Gerin, Georges Sarre.
Suppléants.
- Mme Marisol Touraine, MM. Julien Dray, Jacky Darne,
Jacques Floch, Jean-Yves Le Déaut, Richard Cazenave, Pascal Clément.
Sénateurs
Titulaires.
- MM. Jacques Larché, Paul Masson, Alain Vasselle,
Jean-Jacques Hyest, Paul Girod, Guy Allouche, Michel Duffour.
Suppléants.
- MM. Robert Badinter, André Bohl, Christian Bonnet, Michel
Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Georges Othily, Jean-Pierre Schosteck.
Nomination du bureau
Dans sa séance du jeudi 12 février 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Jacques Larché.
Vice-président :
M. Christophe Caresche.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Gérard Gouzes ;
-
au Sénat :
M. Paul Masson.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI D'ORIENTATION ET D'INCITATION RELATIF À
LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le jeudi 9 avril 1998 et par le Sénat dans sa séance du mercredi 8 avril 1998, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Jean Le Garrec, Gaëtan Gorce, Yves Rome, Mme Roselyne
Bachelot-Narquin, MM. François Goulard, Maxime Gremetz, Yves Cochet.
Suppléants. -
Mme Hélène Mignon, M. Alain Néri, Mmes Catherine
Génisson, Nicole Catala, M. Bernard Accoyer, Mme Marie-Thérèse Boisseau, M.
Germain Gengenwin.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jean-Pierre Fourcade, Louis Souvet, Alain Gournac,
Serge Franchis, Jacques Machet, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, M. Guy
Fischer.
Suppléants. -
M. Jacques Bimbenet, Mme Nicole Borvo, M. Louis Boyer,
Mme Dinah Derycke, MM. Charles Descours, André Jourdain, Jean-Louis Lorrain.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mardi 21 avril 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Maxime Gremetz, député.
Vice-président :
M. Jean-Pierre Fourcade, sénateur.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Jean Le Garrec ;
-
au Sénat :
M. Louis Souvet.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI MODIFIANT LE STATUT DE LA BANQUE DE
FRANCE EN VUE DE SA PARTICIPATION AU SYSTÈME EUROPÉEN DE BANQUES CENTRALES
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le jeudi 23 avril 1998 et par le Sénat dans sa séance du mercredi 22 avril 1998, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Augustin Bonrepaux, Gérard Fuchs, Dominique Baert,
Jean-Pierre Delalande, Jean-Jacques Jegou, Daniel Feurtet, Yves Cochet.
Suppléants. -
M. Jean-Louis Idiart, Mme Béatrice Marre, MM. Yves
Tavernier, Henry Chabert, Hervé Gaymard, Charles de Courson, Gilbert Gantier.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Christian Poncelet, Alain Lambert, Yann Gaillard,
Roland du Luart, Henri Collard, René Régnault, Paul Loridant.
Suppléants. -
MM. Bernard Angels, Denis Badré, Guy Cabanel,
Jean-Philippe Lachenaud, Philippe Marini, Marc Massion, Joseph Ostermann.
Nomination du bureau
Dans sa séance du jeudi 23 avril 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Augustin Bonrepaux.
Vice-président :
M. Christian Poncelet.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Gérard Fuchs ;
-
au Sénat :
M. Alain Lambert.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DE LA PROPOSITION DE LOI RELATIVE À LA RESPONSABILITÉ DU
FAIT DES PRODUITS DÉFECTUEUX
Composition
Députés
Titulaires. -
Mme Catherine Tasca, MM. Raymond Forni, Philippe Duron,
Mme Nicole Catala, MM. Philippe Houillon, Daniel Paul, Jean-Pierre Michel.
Suppléants. -
MM. Jacques Floch, Jacky Darne, Arnaud Montebourg, André
Vallini, Alain Vidalies, Jean-Luc Warsmann, Jacques Barrot.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jacques Larché, Pierre Fauchon, Luc Dejoie, Lucien
Lanier, Paul Girod, Marcel Charmant, Robert Pagès.
Suppléants. -
MM. Robert Badinter, François Blaizot, Michel
Dreyfus-Schmidt, Jean-Jacques Hyest, Charles Jolibois, René-Georges Laurin,
Jean-Pierre Schosteck.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mardi 28 avril 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Présidente :
Mme Catherine Tasca.
Vice-président :
M. Jacques Larché.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Raymond Forni ;
-
au Sénat :
M. Pierre Fauchon.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DE LA PROPOSITION DE LOI RELATIVE AU RENFORCEMENT DE LA
VEILLE SANITAIRE ET DU CONTRÔLE DE LA SÉCURITÉ SANITAIRE DES PRODUITS DESTINÉS
À L'HOMME
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le vendredi 24
avril 1998 et par le Sénat dans sa séance du mercredi 29 avril 1998, cette
commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Jean Le Garrec, Alain Calmat, Mme Geneviève
Perrin-Gaillard, MM. Hervé Gaymard, François Loos, Mme Jacqueline Fraysse, M.
André Aschieri.
Suppléants. -
MM. Philippe Nauche, Daniel Chevallier, Mme Catherine
Génisson, MM. Jean-Michel Dubernard, André Angot, Jean-Pierre Foucher,
Jean-François Mattei.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jean-Pierre Fourcade, Claude Huriet, Dominique Braye,
Charles Descours, Jean-Louis Lorrain, François Autain, Mme Nicole Borvo.
Suppléants. -
M. Jacques Bimbenet, Mme Annick Bocandé, MM. Louis Boyer,
Jean Chérioux, Mme Dinah Derycke, MM. Guy Fischer, Dominique Leclerc.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mardi 12 mai 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Jean-Pierre Fourcade.
Vice-président :
M. Jean Le Garrec.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Alain Calmat ;
-
au Sénat :
M. Claude Huriet.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS D'ORDRE
ÉCONOMIQUE ET FINANCIER
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le 11 mai 1998
et par le Sénat dans sa séance du 7 mai 1998, cette commission est ainsi
composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Augustin Bonrepaux, Didier Migaud, Jean-Louis Idiart,
Philippe Auberger, Jean-Jacques Jegou, Daniel Feurtet, Alain Tourret.
Suppléants. -
M. Dominique Baert, Mme Nicole Bricq, MM. Yves Tavernier,
Michel Bouvard, Gilles Carrez, Charles de Courson, Marc Laffineur.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Christian Poncelet, Alain Lambert, Philippe Marini,
Jean-Philippe Lachenaud, Guy Cabanel, René Régnault, Paul Loridant.
Suppléants. -
MM. Bernard Angels, Michel Charasse, Henri Collard, Yann
Gaillard, André Jourdain, Roland du Luart, Michel Mercier.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mercredi 13 mai 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Christian Poncelet, sénateur.
Vice-président :
M. Augustin Bonrepaux, député.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Didier Migaud ;
-
au Sénat :
M. Alain Lambert et Philippe Marini.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF À LA PRÉVENTION ET À LA
RÉPRESSION DES INFRACTIONS SEXUELLES AINSI QU'À LA PROTECTION DES MINEURS
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le jeudi 9 avril 1998, cette commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
Mmes Catherine Tasca, Frédérique Bredin, Christine
Lazerges, MM. Jean-Luc Warsmann, Renaud Dutreil, Mmes Muguette Jacquaint,
Gilberte Marin-Moskovitz.
Suppléants. -
MM. Jacques Floch, Gérard Gouzes, François Colcombet,
Arnaud Montebourg, André Vallini, Olivier de Chazeaux, Pierre Albertini.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jacques Larché, Charles Jolibois, Jacques Bimbenet,
Patrice Gélard, Jean-Jacques Hyest, Michel Dreyfus-Schmidt, Robert Pagès.
Suppléants. -
MM. Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Christian Demuynck,
Lucien Lanier, Jacques Mahéas, Georges Othily, Jean-Pierre Schosteck.
Nomination du bureau
Dans sa séance du jeudi 14 mai 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Jacques Larché.
Vice-présidente :
Mme Catherine Tasca.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
Mme Frédérique Bredin.
- au Sénat :
M. Charles Jolibois.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI INSTITUANT UNE COMMISSION CONSULTATIVE
DU SECRET DE LA DÉFENSE NATIONALE
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mardi 26
mai 1998 et par le Sénat dans sa séance du mercredi 13 mai 1998, cette
commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
MM. Paul Quilès, Guy-Michel Chauveau, Bernard Grasset,
Robert Pandraud, Michel Voisin, Bernard Birsinger, Gérard Charasse.
Suppléants. -
MM. François Lamy, Jean-Claude Viollet, André Vauchez,
Charles Cova, Jean-Yves Besselat, Christian Martin, Alain Moyne-Bressand.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Xavier de Villepin, Nicolas About, Jean-Paul Amoudry,
Serge Vinçon, Christian de La Malène, Bertrand Delanoë, Jean-Luc Bécart.
Suppléants. -
MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Charles-Henri de
Cossé-Brissac, André Dulait, Philippe Madrelle, André Rouvière, André Vallet.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mardi 2 juin 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Xavier de Villepin.
Vice-présidente :
M. Paul Quilès.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
M. Bernard Grasset.
- au Sénat :
M. Nicolas About.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS
RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI D'ORIENTATION RELATIF À LA LUTTE CONTRE
LES EXCLUSIONS
Composition
A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 17
juin 1998 et par le Sénat dans sa séance du mardi 16 juin 1998, cette
commission est ainsi composée :
Députés
Titulaires. -
M. Jean Le Garrec, Mme Véronique Neiertz, MM. Alain
Cacheux, Patrick Devedjian, Denis Jacquat, Georges Hage, Jean-Michel
Marchand.
Suppléants. -
M. Alfred Recours, Mme Hélène Mignon, M. Daniel
Marcovitch, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Gilbert Meyer, Pierre Cardo,
François Goulard.
Sénateurs
Titulaires. -
MM. Jean-Pierre Fourcade, Bernard Seillier, Gérard Braun,
Claude Huriet, Paul Girod, Mme Dinah Derycke, M. Guy Fischer.
Suppléants. -
MM. Alain Gournac, Paul Loridant, Jean-Louis Lorrain,
Jacques Oudin, Philippe Richert, Alain Vasselle, André Vezinhet.
Nomination du bureau
Dans sa séance du mercredi 17 juin 1998, la commission mixte paritaire a nommé
:
Président :
M. Georges Hage.
Vice-président :
M. Jean-Pierre Fourcade.
Rapporteurs :
-
à l'Assemblée nationale :
M. Jean Le Garrec ;
-
au Sénat :
M. Bernard Seillier.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mardi 30 juin 1998
SCRUTIN (n° 113)
sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle, adopté par l'Assemblée
nationale, relatif à la Nouvelle-Calédonie.
Nombre de votants : | 308 |
Nombre de suffrages exprimés : | 297 |
Pour : | 287 |
Contre : | 10 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Pour :
16.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
22.
Abstention :
1. _ M. Lylian Payet.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :
Pour :
77.
Contre :
10. _ MM. Charles Ceccaldi-Raynaud, Jean Chérioux, Jacques
Delong, Christian Demuynck, Xavier Dugoin, Emmanuel Hamel, Christian de La
Malène, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Jean-Pierre Schosteck.
Abstentions :
5. _ MM. Honoré Bailet, Michel Caldaguès, Philippe de
Gaulle, Maurice Lombard et Paul Masson
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Alain Vasselle.
GROUPE SOCIALISTE (75) :
Pour :
69.
N'ont pas pris part au vote :
6. _ MM. Pierre Biarnès, Gérard Delfau,
Jacques Mahéas, Michel Manet, Mme Danièle Pourtaud, M. René Régnault.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :
Pour :
55.
Abstention :
1. _ M. Bernard Barraux.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ M. René Monory, président du Sénat
et Albert Vecten.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :
Pour :
41.
Abstentions :
2. _ MM. Jean-Paul Bataille et Jean Clouet.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. Joël Bourdin, Louis-Ferdinand de
Rocca Serra.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE ( 9) :
Pour :
7.
Abstentions :
2. _ MM. Philippe Darniche et Jacques Habert.
Ont voté pour
François Abadie
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Guy Allouche
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Denis Badré
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Michel Bécot
Henri Belcour
Jacques Bellanger
Claude Belot
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
Marcel Bony
James Bordas
Didier Borotra
Nicole Borvo
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Auguste Cazalet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Jacques Chaumont
William Chervy
Marcel-Pierre Cleach
Jean Cluzel
Henri Collard
Yvon Collin
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Marcel Daunay
Marcel Debarge
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Bertrand Delanoë
Jean-Paul Delevoye
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Marcel Deneux
Jean Derian
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Michel Dreyfus-Schmidt
Alain Dufaut
Michel Duffour
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Guy Fischer
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe Francois
Jean Francois-Poncet
Yann Gaillard
Aubert Garcia
André Gaspard
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Claude Haut
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Roland Huguet
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Serge Lagauche
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Dominique Larifla
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Pierre Lefebvre
Jacques Legendre
Guy Lèguevaques
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Claude Lise
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Hélène Luc
Jacques Machet
Jean Madelain
Philippe Madrelle
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Marc Massion
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Minetti
Gérard Miquel
Louis Moinard
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Michel Pelchat
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Alain Peyrefitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Bernard Plasait
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Gisèle Printz
Jean Puech
Roger Quilliot
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
Ivan Renar
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Roger Rinchet
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Josselin de Rohan
Gérard Roujas
André Rouvière
Michel Rufin
Claude Saunier
Bernard Seillier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Fernand Tardy
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Basile Tui
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Henri Weber
Ont voté contre
MM. Charles Ceccaldi-Raynaud, Jean Chérioux, Jacques Delong, Christian
Demuynck, Xavier Dugoin, Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, Paul d'Ornano,
Charles Pasqua, Jean-Pierre Schosteck,
Abstentions
MM. Honoré Bailet, Bernard Barraux, Jean-Paul Bataille, Michel Caldaguès, Jean
Clouet, Philippe Darniche, Philippe de Gaulle, Jacques Habert, Maurice Lombard,
Paul Masson, Lylian Payet,
N'ont pas pris part au vote
MM. Pierre Biarnès, Joël Bourdin, Gérard Delfau, Jacques Mahéas, Michel Manet,
Danièle Pourtaud, René Régnault, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Alain
Vasselle, Albert Vecten,
N'a pas pris part au vote
M. René Monory, président du Sénat.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes
à la liste de scrutin ci-dessus.