Séance du 20 octobre 1998
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Modification de l'ordre du jour
(p.
1
).
3.
Questions orales sans débat
(p.
2
).
CONDITIONS
D'AMÉNAGEMENT DE L'AUTOROUTE A 64 (p.
3
)
Question de M. Gérard Roujas. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Gérard Roujas.
TRANSFERT D'ORLY À ROISSY DES VOLS LONG-COURRIERS
ET DES ACTIVITÉS DE FRET D'AIR FRANCE (p.
4
)
Question de M. Jean-Jacques Robert. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Jean-Jacques Robert.
AVENIR DU CABOTAGE MARITIME (p. 5 )
Question de M. Christian Bonnet. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Christian Bonnet.
TRANSFERTS D'ACTIVITÉS DE L'AÉROPORT D'ORLY (p. 6 )
Question de Mme Hélène Luc. - M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Mme Hélène Luc.
TRAVAUX D'AMÉNAGEMENT
DE LA ROUTE NATIONALE 4 (p.
7
)
Question de M. Jean Bernard. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Jean Bernard.
REVALORISATION INDICIAIRE DES TECHNICIENS
DES TROIS FONCTIONS PUBLIQUES (p.
8
)
Question de Mme Marie-Claude Beaudeau. - M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation ; Mme Marie-Claude Beaudeau.
SITUATION DE L'USINE GEC-ALSTHOM DE VILLEURBANNE (p. 9 )
Question de M. Gilbert Chabroux. - MM. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie ; Gilbert Chabroux.
SITUATION DE L'USINE GEC-ALSTHOM
DE LYS-LEZ-LANNOY (p.
10
)
Question de Mme Dinah Derycke. - M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie ; Mme Dinah Derycke.
INSTALLATION D'UNE IRM À L'HÔPITAL D'ARRAS (p. 11 )
Question de M. Léon Fatous. - Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle ; M. Léon Fatous.
PRIME À L'EMBAUCHE D'APPRENTIS
DANS LE SECTEUR PUBLIC (p.
12
)
Question de M. Philippe Richert. - Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle ;M. Philippe Richert.
FICHIERS MÉDICAUX (p. 13 )
Question de Mme Nicole Borvo. - Mmes Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle ; Nicole Borvo.
OUVERTURE DOMINICALE DE MAGASINS
ET CONCURRENCE COMMERCIALE (p.
14
)
Question de M. Jean-Paul Delevoye. - Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle ; M. Jean-Paul Delevoye.
TRANSPOSITION
DES DIRECTIVES EUROPÉENNES « ASSURANCES »
DANS LE CODE DE LA MUTUALITÉ (p.
15
)
Question de M. François Autain. - Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle ;M. François Autain.
TAUX DE DIOXINE ET SANTÉ PUBLIQUE (p. 16 )
Question de M. Jean Bizet. - Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ; M. Jean Bizet.
AIDES AUX AGRICULTEURS SINISTRÉS DU MIDI (p. 17 )
Question de M. Roland Courteau. - Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ; M. Roland Courteau.
SUPPRESSION DES COMMISSARIATS
DE BAILLEUL ET HAZEBROUCK (p.
18
)
Question de M. Alfred Foy. - MM. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim ; Alfred Foy.
DÉVELOPPEMENT ET PÉRENNITÉ
DU PROGRAMME RAFALE (p.
19
)
Question de M. Jacques Valade. - MM. Alain Richard, ministre de la défense ; Jacques Valade.
Suspension et reprise de la séance (p. 20 )
PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET
4.
Conférence des présidents
(p.
21
).
5.
Scrutins pour l'élection de membres représentant la France au Conseil de
l'Europe et à l'Union de l'Europe occidentale
(p.
22
).
6.
Démission d'un membre d'une commission et candidature
(p.
23
).
Suspension et reprise de la séance (p. 24 )
7.
Conseils régionaux. -
Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p.
25
).
Discussion générale : MM. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer,
ministre de l'intérieur par intérim ; Paul Girod, rapporteur de la commission
des lois.
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
MM. Michel Mercier, Jean-Pierre Raffarin, Guy Cabanel, Michel Duffour, Guy
Allouche, Daniel Hoeffel, Pierre Fauchon, Josselin de Rohan.
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de
l'intérieur par intérim.
Clôture de la discussion générale.
MM. le président, le rapporteur, Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à
l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
8.
Election de membres représentant la France au Conseil de l'Europe et à l'Union
de l'Europe occidentale
(p.
26
).
9.
Nomination d'un membre d'une commission
(p.
27
).
10.
Dépôt d'un rapport du Gouvernement
(p.
28
).
11.
Dépôt de propositions de loi
(p.
29
).
12.
Dépôt de propositions d'acte communautaire
(p.
30
).
13.
Ordre du jour
(p.
31
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le procès-verbal de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.
2
MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR
M. le président. J'informe le Sénat que la question orale sans débat n° 318 de M. Christian Demuynck est retirée, à la demande de son auteur, de l'ordre du jour de la séance d'aujourd'hui.
3
QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT
M. le président.
L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales sans débat.
CONDITIONS D'AMÉNAGEMENT DE L'AUTOROUTE A 64
M. le président.
La parole est à M. Roujas, auteur de la question n° 302, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Gérard Roujas.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne peux
aborder la question des aires de services sans rappeler au préalable que l'A
64, dans son tronçon situé entre Muret et Martres-Tolosane, a été réalisée sur
le tracé même de l'ancienne RN 117.
Cette option a entraîné la suppression de nombreux services aux usagers qui
sont installés depuis de nombreuses années le long de cette route nationale.
Le dossier soumis à l'enquête publique en 1989 ne comportait que la
réalisation d'un seul couple d'aires de services sans en préciser
l'emplacement.
Afin de conserver aux usagers de ce tronçon un minimum de services et de
compenser la fermeture d'établissements dont l'activité était essentiellement
liée au trafic automobile - stations-service, restaurants, etc. - les élus
locaux, dont je fais partie, ont souhaité que deux aires soient réalisées sur
ce tronçon.
Notre proposition a été retenue et figure dans la décision ministérielle du 7
octobre 1994 approuvant les travaux d'aménagement de l'autoroute et leur
financement.
L'appel d'offres lancé au début de l'année 1997 prévoyait la réalisation de
deux couples d'aires, l'un à Capens, l'autre à Martres-Tolosane.
Or, bien que onze dossiers aient été retirés, un seul candidat a remis une
offre, et seulement pour un couple d'aires, à Capens.
Cet état de fait ne me convient pas et soulève de nombreuses
interrogations.
Cette situation ne me satisfait pas car elle va à l'encontre du souhait
exprimé par les élus locaux et retenu par le ministère.
Elle ne me satisfait pas non plus car, en l'état actuel des choses, entre
l'aire de service de Ponlat-Taillebourg, sur la portion à péage en site propre,
et l'aire de Capens, la distance est de 70 kilomètres. Cet intervalle est
largement supérieur à la distance moyenne entre deux aires, qui est de 45
kilomètres environ.
Cet état de fait soulève également quelques interrogations.
Comment expliquer qu'un seul groupe pétrolier ait répondu à l'appel d'offres
?
Je ne vous cacherai pas que mon interrogation est forte quant à une entente
tacite entre les différents groupes, et tous les arguments qui pourront être
employés ne parviendront qu'avec difficulté à dissiper un certain malaise.
Comment expliquer qu'un groupe comme Elf-Aquitaine, qui, après les
restructurations que l'on sait, a quasiment déserté le bassin d'emploi de
Boussens, provoquant un marasme sans précédent dans ce secteur, n'ait pas eu la
décence de répondre à l'appel d'offres pour le couple d'aires précisément situé
dans cette zone ?
Enfin, pourquoi l'administration n'a-t-elle pas procédé, alors qu'elle ne
devait certainement pas ignorer les conclusions de l'étude de faisabilité, à un
appel d'offres pour des aires croisées au lieu d'un appel d'offres pour des
couples d'aires indissociables ?
Cela aurait, sans aucun doute, favorisé la concurrence entre les différents
groupes pétroliers.
Je souhaite, monsieur le ministre, que vous puissiez répondre à l'ensemble de
ces questions. Sachez que les élus locaux et les populations concernés que j'ai
l'honneur de représenter seront attentifs à vos réponses.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
président, je suis heureux d'être le premier des membres du Gouvernement à
assister à une séance placée sous votre présidence.
Monsieur le sénateur, la réalisation du tronçon Muret - Martres-Tolosane de
l'autoroute A 64, long de 38 kilomètres environ et hors péage, a été déclarée
d'utilité publique le 14 décembre 1989. Le dossier soumis à l'enquête publique
préalable et à l'avis du Conseil d'Etat comportait la mention d'un seul couple
d'aires de services, dont la localisation serait arrêtée ultérieurement.
La transformation en autoroute de la route nationale 117 impliquait, en raison
même du statut autoroutier, la fermeture des accès de toutes les propriétés
riveraines de la voie, notamment des nombreux restaurants, stations-service et
garages qui tirent l'essentiel de leur activité du trafic automobile.
Ainsi que vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, les responsables locaux
- dont vous êtes - ont donc vivement souhaité que deux couples d'aires soient
créés sur cette section, respectivement à Capens et Martres-Tolosane, ce qui a
été accepté et inscrit dans la décision du 7 octobre 1994 approuvant la
réalisation de l'autoroute.
Cette décision définit le principe d'organisation du service à l'usager sur la
partie hors péage de l'autoroute A 64, mais elle n'a pas de caractère
exécutoire. En effet, si l'Etat définit le cadre du service à l'usager, il
confie la charge de la construction, de l'exploitation et de l'entretien des
aires de services le plus souvent à des sociétés privées, au moyen d'une
concession. La concession est attribuée après un appel d'offres ouvert, où
chacun est libre de se présenter.
Compte tenu des équipement exigés - vous les connaissez - et des contraintes
de fonctionnement - ouverture 24 heures sur 24 et sept jours sur sept - la
construction et l'exploitation d'une aire de services représentent une
opération coûteuse, qui nécessite des investissements importants.
L'implantation des aires de services doit donc concilier les impératifs du
meilleur service possible aux usagers et de rentabilité potentielle des
équipements.
Une distance suffisante entre les aires de services est un élément qui
concourt à cette rentabilité.
Sur l'ensemble du réseau autoroutier français, l'écartement moyen entre les
aires de services est voisin de 45 kilomètres et même sensiblement plus élevé -
de 50 à 60 kilomètres - sur les autoroutes hors péage où les nombreux
échangeurs permettent aux usagers, surtout s'ils sont locaux, de quitter
facilement l'autoroute pour se ravitailler.
L'organisation envisagée sur l'itinéraire de 110 kilomètres entre
Toulouse-Montréjeau, incluant la rocade ouest de Toulouse, se traduisait par la
création de quatre couples d'aires de services, éloignés de moins de 30
kilomètres en moyenne, les aires de Capens et de Martres-Tolosane n'étant
distantes, de surcroît, que de 21 kilomètres.
Une étude de faisabilité de ces deux couples d'aires menée en 1995 par la
société SCETAUROUTE a conclu à une rentabilité faible, voire aléatoire pour
l'un des deux couples, ce qui explique sans doute le résultat de l'appel
d'offres.
Cet appel d'offres a été lancé au début de l'année 1997, sur une base
particulièrement large, puisque les huit grandes compagnies pétrolières, mais
aussi un pétrolier indépendant et deux sociétés d'aménagement, ont retiré des
dossiers de candidature. Le délai de réponse a dû être prolongé devant
l'absence de propositions des candidats. Cinq d'entre eux, dont l'un
a
priori
peu suspect de concertation avec les grands groupes pétroliers, ont
fait savoir qu'ils ne répondraient pas en raison de l'insuffisance prévisible
de rentabilité.
Un seul candidat a remis une offre, en acceptant de ne construire qu'un unique
couple d'aires, ce qui correspond, en termes de distance entre les aires de
services, à la situation constatée sur l'ensemble du réseau autoroutier.
Lancer des appels d'offres « croisés » au lieu d'un appel d'offres unique pour
chaque couple d'aires indissociable aurait peut-être accru le nombre de
propositions mais, vous l'avez souligné, n'aurait certainement pas changé les
conditions économiques et de concurrence le long de l'itinéraire. Il est très
vraisemblable que les réponses se seraient limitées aussi à deux aires au
total, une dans chaque sens, à l'emplacement apparaissant le plus
intéressant.
Monsieur le sénateur, je comprends la déception éprouvée par les élus et les
acteurs économiques locaux, mais, dans le système d'attribution des
concessions, qui est fondé, vous le savez, sur la liberté de la concurrence,
rien ne peut obliger aujourd'hui un candidat à répondre à une consultation et à
accepter des conditions ne lui permettant pas d'amortir ses investissements.
Mes services étudient actuellement une solution consistant à réaliser, en
complément des aires de services de Capens, un couple d'aires de repos à
Martres-Tolosane sur financement de l'Etat, dont les collectivités locales
pourraient assurer l'entretien et, en contrepartie, y installer des animations
et des équipements tels que des maisons de pays pour la promotion de la région
et de ses ressources touristiques. Cette solution permettrait d'assurer un
service à l'usager satisfaisant sur l'itinéraire, dans un premier temps, tout
en réservant la possibilité d'une transformation future des aires de repos en
aires de services.
M. Gérard Roujas.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Roujas.
M. Gérard Roujas.
Monsieur le ministre, je vous remercie de vos explications, mais aussi de vos
réponses écrites que j'ai déjà diffusées auprès des maires du secteur.
Je ne suis pas totalement convaincu en ce qui concerne l'éventualité d'une
aire de repos à Martres-Tolosane.
Toutefois, je vous sais gré de votre volonté de prendre en considération ce
dossier et de l'effort financier que vous êtes prêt à consentir.
Ce type d'aire, sans aucun service, ne peut en aucun cas satisfaire les élus
locaux.
Je ne suis pas un libéral, et ce dossier ne fait que conforter ma position.
Lorsque l'Etat n'intervient pas, les puissants groupes pétroliers ou autres
s'entendent sur le dos des usagers.
L'administration joue-t-elle pleinement son rôle pour éviter de telles
ententes ? Dans cette affaire, je n'en suis toujours pas convaincu.
Je constate que l'option d'un appel d'offres avec des aires croisées n'a pas
été retenue par l'administration alors que cette solution était meilleure à
tout point de vue et aurait permis de faire jouer la concurrence.
Je veux bien admettre à la rigueur que deux couples d'aires ne soient pas
rentables ; en revanche, un seul couple l'est. Il suffit pour s'en convaincre
de constater le succès du couple d'aires de Capens depuis son ouverture.
Alors pourquoi n'y-a-t-il eu qu'un seul candidat ?
Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, mes doutes ne sont pas dissipés.
TRANSFERT D'ORLY À ROISSY DES VOLS LONG-COURRIERS
ET DES ACTIVITÉS DE FRET D'AIR FRANCE
M. le président.
La parole est à M. Jean-Jacques Robert, auteur de la question n° 314, adressée
à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Jean-Jacques Robert.
Monsieur le ministre, je me réjouis que vous soyez présent pour répondre à
cette question, car vous connaissez bien ce dossier, dont je ne traiterai que
les points essentiels.
Vous conviendrez que l'Ile-de-France se divise en deux régions différentes :
le nord, avec la plate-forme de Roissy, pour 35 millions de passagers, et le
sud, qui m'intéresse aujourd'hui, avec l'aéroport d'Orly pour 25 millions de
passagers.
L'aéroport d'Orly est alimenté par Massy, le plateau de Saclay et Les Ulis,
ainsi que par les villes nouvelles d'Evry et de Melun-Sénart. Tous ces sites
sont inscrits au schéma directeur de l'Ile-de-France au titre du développement
économique.
Pourquoi vouloir toujours centraliser et ne pas accepter d'envisager une
meilleure répartition des sites, notamment pour les relations
intercontinentales ?
Ces deux sites permettent à des compagnies aériennes différentes de répondre
aux besoins. Comme il est plus facile de détruire ce qui fonctionne que de
construire, je pense qu'il serait déraisonnable de réduire encore l'activité
d'Orly. J'ai l'impression que l'on tient à compliquer ce qui est simple.
Les réductions actuelles et prévisibles des activités de fret d'Orly ont
entraîné depuis ces cinq dernières années la suppression de 5 000 emplois,
alors que Roissy a progressé de 5 000 emplois.
Par ailleurs, cela a dissuadé les entreprises françaises et étrangères de
venir s'installer, de développer leurs activités sur le sud et l'ouest
d'Orly.
Orienter sur Roissy une partie des activités, comme cela a déjà été fait et
comme cela risque de se faire encore, va accroître le trafic routier. Très
concrètement, si le trafic long-courrier est transféré à Roissy, 600 000
voyageurs supplémentaires surchargeront une francilienne déjà saturée.
En outre, les salariés ont fait leur profil de carrière et sont installés dans
la région. Nous avons les activités de recherche industrielle et scientifique,
les activités exportatrices et toutes les filières de haute technologie propres
à notre département, sans parler de la réussite du Génopôle. Une situation
d'inégalité serait donc créée en matière d'accès aux dessertes
intercontinentales, car on ne pourrait pas à tout moment, dans le sud de la
région, accéder aux mêmes lignes. Le président de la chambre de commerce et
d'industrie du département dit, avec humour, qu'il est plus facile de se rendre
à Londres pour prendre un vol transatlantique que d'aller à Roissy !
Orly rivalise actuellement avec les aéroports d'Amsterdam, de Londres et de
Rome qui offrent, pour leur part, un très bon accès au réseau mondial.
Voulez-vous, monsieur le ministre, me donner votre sentiment sur ce sujet, et
accepterez-vous, comme je l'espère vivement, ainsi que tous les élus du sud de
l'Ile-de-France qui s'intéressent à l'aéroport d'Orly, l'ouverture d'une large
concertation ? Pourra-t-on étudier toutes les hypothèses propres à conforter
l'avenir de cette plate-forme d'Orly, qui a été la première dans la région
parisienne, pour confirmer son actuel succès, car c'est bien le succès qui fait
que l'on veut la « déshabiller » aujourd'hui pour la transférer dans le nord de
la région ?
M. le président.
Permettez-moi de vous signaler, monsieur Robert, que vous avez parlé quatre
minutes et dix secondes, alors que vous ne disposiez que de trois minutes.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
J'ai bien
entendu votre question, monsieur le sénateur.
Sans vouloir polémiquer, je n'ai pas trouvé trace de protestations
similaires...
Mme Hélène Luc.
Ça c'est vrai !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
... à l'époque
où le gouvernement précédent travaillait à la mise en oeuvre de l'hypothèse que
vous qualifiez à juste titre d'insensée, à savoir la limitation du trafic
d'Orly aux vols en provenance ou à destination de l'Europe de Schengen. C'était
cela, la démarche.
M. Jean-Jacques Robert.
J'étais sur le terrain !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Encore une fois,
je n'ai pas trouvé trace des mêmes protestations de votre part à l'époque. En
fait, le changement de gouvernement a permis d'éviter cette nouvelle étape dans
le déclin d'Orly. Or, je vous l'assure, le déclin avait bel et bien
commencé.
Qui a organisé la fusion entre Air France et Air Inter entraînant la
suppression du siège d'Air Inter et faisant perdre quelque 130 millions de
francs de taxes professionnelles aux communes de l'Essonne, si ce n'est le
gouvernement précédent ?
Je dois vous dire que je cherche encore les éléments réunis par mes
prédécesseurs pour essayer de compenser une telle perte, et je n'ai pas plus, à
ce sujet, le souvenir de protestations dans les rangs de l'ancienne
majorité.
Alors oui, monsieur le sénateur, et je pense ici vous rassurer, le
Gouvernement a décidé de tourner la page de cette politique, à mes yeux
insensée, du déclin d'Orly. Ma démarche est, au contraire, une démarche de
régulation du transport aérien afin de développer la synergie, la
complémentarité des deux plates-formes aéroportuaires franciliennes.
Mon souci est de faire prévaloir l'intérêt général, aussi bien dans une
perspective d'aménagement de l'ensemble du territoire que pour répondre aux
besoins des entreprises de la région, y compris, bien sûr, de celles qui sont
implantées dans les départements de l'Essonne et du Val-de-Marne.
La situation que vous connaissez est la suivante : le nombre des créneaux
horaires qui peuvent être attribués à Orly est plafonné depuis 1994 à 250 000
et un « couvre-feu » ne permet l'utilisation de l'aéroport qu'entre six heures
quinze et vingt-trois heures trente.
Je n'ai pas l'intention de modifier ces règles, car je suis respectueux des
riverains et de leur environnement. Cela me différencie aussi de certains qui
souhaiteraient que l'on passe outre en ne tenant plus compte du couvre-feu et
que l'on multiplie le nombre de créneaux.
En revanche, il est vrai qu'on enregistre aujourd'hui 50 000 demandes de
créneaux supplémentaires sur Orly, demandes qui, vous le savez, ne sont pas
transférables à Roissy.
Que faire dans ces conditions, et alors que ces demandes concernent le
territoire national, mais aussi l'international ?
A mon sens, il convient de rechercher les solutions les plus pertinentes pour
mieux répartir le trafic, sans perdre de vue le développement parallèle et
complémentaire des deux aéroports franciliens, et de répondre de la meilleure
manière possible aux souhaits de leurs clientèles respectives.
Au lieu de décider unilatéralement de ce qu'il convient de faire, comme cela a
souvent été le cas, j'ai décidé d'engager un large processus de concertation
avec les maires des communes environnantes, les représentants de la région, des
départements concernés, d'Aéroports de Paris, des compagnies aériennes, des
syndicats de salariés, etc.
Dans le cadre de cette concertation, qui a été engagée au mois de mars 1998,
j'ai été amené à retenir une proposition qui permettrait l'exploitation à Orly
de vols internationaux et intercontinentaux de moins de 5 000 kilomètres, de
vols domestiques - entendez des vols desservant la France et l'Europe - et des
vols à destination des départements d'outre-mer, ce qui permettrait de dégager
un peu plus de 6 000 créneaux, et donc de répondre aux demandes, notamment à
celles qui émanent des chambres de commerce et d'industrie.
J'ai donc l'intention de poursuivre jusqu'à son terme cette concertation et de
prendre l'avis du Conseil supérieur de l'aviation marchande ainsi que du
conseil d'administration d'Aéroports de Paris.
Dans cette affaire, l'objectif du Gouvernement, vous pouvez en être assuré,
monsieur le sénateur, est donc de conforter à terme l'activité économique et
l'emploi à Orly, comme il l'a fait à Roissy.
M. Jean-Jacques Robert.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Jacques Robert.
M. Jean-Jacques Robert.
Monsieur le ministre, ne me faites pas un mauvais procès sur le plan politique
; ce n'est pas dans mon style, lorsque je m'adresse à un représentant du
Gouvernement dans cette enceinte, de polémiquer ainsi. Je suis venu avec le
coeur pur pour essayer de bien faire et sans arrière-pensée aucune.
S'agissant de ce dossier que vous avez à régler, vous venez d'évoquer les vols
de moins de 5 000 kilomètres. Ce sont précisément ces 5 000 kilomètres qui sont
en cause, parce que la multiplication de vols avec des appareils plus réduits
risque effectivement, dans les glissières qui ont été mises à Orly, de
provoquer des nuisances et de réduire en fait le trafic que nous souhaiterions
avoir.
Je pense, par exemple, à l'usine Motorola, qui est venue s'installer et qui a
son siège là parce qu'elle avait la certitude d'avoir une liaison avec Chicago.
Nous avons toute une série d'activités économiques qui vous pressent. C'est
vrai que répondre à d'importantes sollicitations est gênant, mais c'est aussi
un signe de succès à une époque où, malheureusement, nous avons plus souvent à
chercher des emplois qu'à limiter les créations. Or vous êtes dans un secteur
porteur.
Vous m'avez dit que vous aviez prévu un groupe ou une commission. Je souhaite
que ceux qui représentent très périphériquement une activité économique
viennent chez vous, et pas seulement tous les partenaires habituels qui
s'intéressent à l'aéroport d'Orly quand on commence à parler de la région
parisienne !
Cela concerne typiquement l'Essonne, typiquement le Val-de-Marne, vous en
conviendrez. Si mon intervention pouvait permettre que nous soyons entendus,
cela me ferait très plaisir.
AVENIR DU CABOTAGE MARITIME
M. le président.
La parole est à M. Bonnet, auteur de la question n° 320, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Christian Bonnet.
Monsieur le ministre, à la différence des principes précis qui régissent les
liaisons aériennes intercommunautaires, bien des incertitudes demeurent en ce
qui concerne le cabotage maritime, et ce à la veille de l'échéance du 1er
janvier 1999.
Un règlement du conseil, en date du 7 décembre 1992, énonçait, en son article
3, alinéa 2 : « Pour les navires pratiquant le cabotage avec les îles » - et
vous avez devant vous le conseiller général de Belle-Ile-en-Mer depuis plus de
quarante ans - « toutes les questions relatives à l'équipage relèvent de la
responsabilité de l'Etat dans lequel le navire effectue un service de transport
maritime, Etat d'accueil ».
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je suis d'accord
avec vous.
M. Christian Bonnet.
Or une très grande incertitude se fait jour - et on la comprend - chez les
inscrits maritimes qui, et ils sont plus nombreux qu'on ne le pense, naviguent
sur les caboteurs assurant la liaison entre le continent et les îles en
France.
En effet, ils ont pris connaissance de la proposition de règlement du Conseil
apportant une modification au bénéfice - c'est là une antiphrase - du régime
social de l'Etat du pavillon et non pas de l'Etat du pays d'accueil. Or vous
imaginez volontiers ce que pourrait être la situation des marins inscrits
maritimes français si d'aventure des navires battant pavillon panaméen,
libérien, voire celui de certains Etats de l'Union ne possédant pas notre
régime social, venaient interférer sur nos lignes intérieures entre le
continent et les îles.
Telle est la question que je voulais vous poser, monsieur le ministre. Quelle
est la position du Gouvernement ? A-t-il bien saisi la gravité du problème ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, la révision de l'article 3 du règlement n° 3577/92 sur le cabotage
maritime proposée par le Commission européenne vise à mettre fin au régime de
l'Etat d'accueil pour le trafic avec les îles au profit du régime de l'Etat du
pavillon, à l'exception de la question de la nationalité de l'équipage qui
reste de la compétence de l'Etat d'accueil.
Comme vous, monsieur le sénateur, le Gouvernement est opposé à cette réforme ;
il a entrepris des actions au niveau communautaire et au niveau national.
Les cinq Etats membres du sud - Espagne, Portugal, Italie, Grèce et France -
qui constituent une minorité de blocage, refusent de débattre de cette
révision. Les conditions de l'Etat d'accueil doivent être appliquées à tous les
équipages armant les navires pratiquant le cabotage avec les îles. Nous
travaillons en ce sens avec détermination.
Actuellement, la délégation allemande souhaite un compromis ; elle comprend
les préoccupations des cinq pays du Sud.
Le Danemark a émis une réserve d'examen parlementaire.
Les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède et la Finlande se montrent favorables,
sous réserve d'études plus approfondies.
Sur cette base, les négociations vont reprendre à Bruxelles lors des travaux
du groupe Transports.
Sur le plan national, le Gouvernement définit les conditions de la mise en
oeuvre de la directive au 1er janvier prochain. Sous l'égide du Conseil
supérieur de la marine marchande, un document a été élaboré. Celui-ci recense
les critères reconnus par les syndicats de marins et le Comité central des
armateurs de France comme définissant concrètement les conditions de l'Etat.
Sur cette base, l'administration a formé un groupe de travail.
Celui-ci élabore un document, outil juridique sous la forme d'une circulaire,
destiné aux services des administrations françaises chargées du contrôle de
l'application des conditions de l'Etat d'accueil. Cet instrument juridique
définit les conditions d'exploitation auxquelles tout armateur communautaire
souhaitant effectuer un service de cabotage devra se soumettre.
Je pense ainsi avoir répondu à votre préoccupation.
M. Christian Bonnet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Bonnet.
M. Christian Bonnet.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour cette réponse, qui apaisera
certainement tous ceux qui étaient inquiets dans la mesure où ils relèvent du
régime de l'Etablissement national des invalides de la marine.
Peut-être pourrons-nous poursuivre cette conversation, notamment en ce qui
concerne l'article 4, relatif à l'aspect économique, au sujet duquel subsistent
encore certaines incertitudes, si vous nous faites l'amitié de venir le 2
novembre à Etel, au lycée maritime, et au Crossac, comme il en est question.
TRANSFERTS D'ACTIVITÉS DE L'AÉROPORT D'ORLY
M. le président.
La parole est à Mme Luc, auteur de la question n° 326, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le président, je vous souhaite la bienvenue pour votre première
séance en tant que vice-président.
Avec plus de 240 000 mouvements d'avions transportant 25 millions de
passagers, avec 30 000 emplois directs, sans doute le double en emplois
induits, l'aéroport international d'Orly, deuxième aéroport français, constitue
d'évidence le poumon économique du Val-de-Marne.
Mais il s'agit de bien plus. Sa localisation au sud de Paris, complémentaire
de Roissy au nord, constitue, ou plutôt devrait constituer, dans un contexte de
forte progression du trafic, un atout de premier plan pour les compagnies et
tout le secteur du transport aérien.
Car, paradoxalement, ce qui est en cause aujourd'hui, c'est le devenir même
d'Orly, c'est l'enclenchement d'une nouvelle dynamique, d'un nouveau départ,
tant les évolutions et les décisions des dernières années, sur fond de
déréglementation que nous avons combattue ensemble, ont mis à mal cette
plate-forme aéroportuaire.
J'en veux pour preuve que, depuis 1990, le nombre de mouvement d'avions a
augmenté de 24 %, tandis que le nombre de passagers stagnait à 3 %.
En 1994, un avion emportait à Orly, en moyenne, 138 passagers. En 1997, ce
chiffre est tombé à 108 passagers, provoquant, outre la perte de 9 % d'emplois
- soit 7 000 à 8 000 au total - une véritable saignée ainsi qu'une dégradation
de l'environnement et de la tranquillité de quelque 200 000 riverains victimes
des nuisances provoquées par cette multiplication de mouvements non assortie de
passagers supplémentaires.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, nous sommes aujourd'hui à la croisée des
chemins : ou bien Orly devient un aéroport de seconde zone - si devait perdurer
cette logique destructrice - ou bien la vapeur est renversée, ce qui signifie
que cessent le déclin et l'hémorragie d'emplois. Nous y parviendrons en
valorisant les atouts, en nous appuyant sur des coopérations nouvelles, en
misant sur une stratégie de développement et de complémentarité. Vous venez de
répondre en ce sens à M. Jean-Jacques Robert.
En l'occurrence, notre compagnie nationale Air France a un rôle important à
jouer en maintenant et en développant de manière concomitante une exploitation
équilibrée sur les deux aéroports.
Le départ récent pour Roissy d'activités comme le fret cargo d'Air France,
d'ailleurs déjà programmé, ou comme La Poste, a encore affaibli le potentiel
d'Orly. Je ne vous cache pas l'inquiétude existante dans le Val-de-Marne quant
aux conséquences possibles de la limitation des vols longs courriers à 5 000
kilomètres au maximum ou de la délocalisation éventuelle d'Air France
Industries, qui exerce une activité de maintenance au demeurant des moins
nuisantes et des plus utiles à l'économie locale. De telles décisions ne
risquent-elles pas d'aller à l'encontre de cette nouvelle dynamique à laquelle
je vous sais pourtant très attaché, monsieur le ministre ? Vous avez d'ailleurs
été le premier à engager à ce sujet une concertation sérieuse avec les élus et
les acteurs concernés.
M. le président.
Posez votre question, madame.
Mme Hélène Luc.
Je termine monsieur le président. Ma question sera d'ailleurs très brève.
La semaine dernière, je participais à nouveau à cette concertation notamment
avec le président du conseil général et de nombreux maires de communes
riveraines. Vous avez annoncé un certain nombre d'orientations positives et
formulé des propositions de développement pour la plate-forme d'Orly.
Aujourd'hui, compte tenu de la forte et compréhensible inquiétude qu'éprouvent
les salariés, les habitants et les élus au terme de cette longue période de
mauvais coups répétés, de promesses non tenues et de la dégradation de
l'environnement, je vous demande de confirmer et de concrétiser par des
engagements précis, comme vous devez le faire pour Air France Industries, la
volonté du Gouvernement de permettre à Orly de devenir un pôle de renouveau et
de reconquête pour l'emploi et pour les usagers du transport aérien.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Madame la
sénatrice, comment l'inquiétude serait-elle absente, alors que les choix
précédents condamnaient au déclin que vous avez évoqué ?
Ma démarche, celle du Gouvernement, se situe exactement à l'opposé. Elle
s'inscrit dans une dynamique de développement de l'activité et des créations
d'emplois, sans négliger les contraintes d'environnement de toutes natures.
J'insiste sur le fait que la question de l'emploi se trouve au coeur de notre
démarche. Roissy et Orly ont chacun leurs atouts et l'amélioration de leur
synergie représente une chance pour l'Ile-de-France, en particulier pour
Orly.
La concertation que j'ai engagée, notamment avec les élus, a pour objet de
faire prévaloir une autre logique que celle qui a été suivie jusqu'à
présent.
Les dispositions envisagées réserveraient Orly aux vols internationaux d'une
distance inférieure à 5 000 kilomètres et à tous les vols domestiques sans
limitation de distance.
Je vous fais observer que les vols ainsi déplacés ne représenteraient que 5 %
des passagers pour 6 000 créneaux horaires, soit 3 % environ sur un total qui
est, comme vous le savez, plafonné à 250 000.
J'ai dit, dès mars 1998, que je ne prendrai aucune décision susceptible de
conduire à une diminution globale du nombre d'emplois sur la plate-forme
d'Orly. Je l'ai répété la semaine dernière à l'occasion de la table ronde que
j'ai tenue avec les maires des communes intéressées et avec les représentants
des conseils généraux de l'Essonne et du Val-de-Marne, ainsi que du conseil
régional. Je le réaffirme encore aujourd'hui ici.
L'emploi est lié au trafic. On considère d'ailleurs qu'un million de passagers
génère un millier d'emplois directs et autant d'emplois indirects.
Le déplacement des vols longs courriers à Roissy concernerait environ un
million de passagers en deux ans.
Encore faut-il préciser que ces vols seront remplacés par des vols courts et
moyens courriers, sur des destinations nationales et européennes, par exemple
Barcelone et Zurich, pour lesquelles les compagnies préfèrent faire atterrir
leurs avions à Orly. Le nombre de passagers ainsi concernés sera de l'ordre de
400 000. A cela, il convient d'ajouter le possible rapatriement de Roissy sur
Orly des vols longs courriers à destination des départements d'outre-mer
actuellement envisagé par Air France et Aéroports de Paris ; rapatriement qui
représente 600 000 passagers environ.
Enfin, la croissance naturelle du trafic des liaisons pérennes d'Orly,
notamment celles du marché intérieur français, peut être chiffrée à 500 000
passagers par an au minimum.
C'est donc dans une perspective de croissance que se situe cette
réorganisation du trafic.
En outre, Air France, qui a identifié des capacités de développement dans le
domaine industriel, plus particulièrement pour l'entretien des équipements
d'avions, est prête à étudier la localisation d'Air France Industries avec les
collectivités locales concernées qui se sont d'ailleurs proposées, sur ce
sujet, à apporter leur concours - je pense essentiellement aux départements de
l'Essonne et du Val-de-Marne et à la région d'Ile-de-France. En effet, Air
France Industries est actuellement installée dans des locaux anciens et trop
petits.
Après avoir envisagé, comme vous le savez, madame la sénatrice, le déplacement
de cette entité, Air France est prête à maintenir cette dernière sur Orly.
Cette démarche prendra en compte les différents facteurs économiques,
notamment l'enjeu que représente l'emploi.
Il s'agit là d'une manifestation nette de la volonté d'Air France de ne pas se
désengager d'Orly.
Je saisis d'ailleurs cette occasion pour préciser qu'Air France demande elle
aussi des créneaux sur Orly : elle en a réclamé près de 10 000.
Pour confirmer cette orientation, et conformément à mon souhait, le président
de la compagnie nationale prend l'engagement qu'à l'avenir le nombre d'emplois
de l'entreprise sur cette zone sera maintenu au moins au niveau qui sera
atteint le 1er janvier 1999. Le maintien de l'essentiel du potentiel d'Air
France Industries sur le site de la plate-forme permettra d'y parvenir.
Si des évolutions ou des transferts limités devaient intervenir, ils seraient
compensés en termes d'emplois par des développements possibles dans des
domaines tels que l'informatique, le secteur commercial, etc...
J'ajoute que les effectifs de contrôleurs de la navigation aérienne situés à
Athis-Mons, qui ont augmenté de 12 % au cours des trois dernières années,
poursuivront leur croissance en 1999 et en l'an 2000.
Sachez, madame la sénatrice, que j'entends non seulement donner un coup
d'arrêt définitif à la diminution des activités d'Orly, mais encore engager la
plate-forme et sa zone d'influence dans une dynamique de croissance.
Mme Hélène Luc.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le ministre, je vous remercie de la réponse que vous venez de
m'apporter. Si elle ne saurait dissiper immédiatement toutes les inquiétudes
qui se sont accumulées pendant des années, j'y trouve néanmoins l'affirmation
nette d'orientations nouvelles, d'une volonté de mettre un terme à la spirale
du déclin et de la perte d'activité et d'emploi. Elle affirme la volonté de
redonner à l'aéroport d'Orly tout son rôle dans un environnement de croissance
forte du transport aérien au sein duquel la France veut prendre toute sa place.
Le gel et le maintien des emplois d'Air France Industries, la nécessité que
vous évoquez d'investissements nouveaux dans ce secteur de la maintenance
constituent un acte concret auquel tous les acteurs du Val-de-Marne auront à
coeur d'être associés. D'ailleurs, le conseil général du Val-de-Marne et le
conseil régional d'Ile-de-France sont en train de réfléchir à la contribution
qu'ils pourraient apporter pour maintenir ce site sur place.
Cela permettra de mettre en oeuvre les coopérations et les synergies
fructueuses, et ce, dans une transparence et une concertation maximales avec
tous les partenaires.
Monsieur le ministre, ce dossier doit être suivi avec toute l'attention, la
volonté et la ténacité requises. Je ne doute pas que vous en fassiez preuve,
avec toutes celles et tous ceux qui aspirent, dans le respect de
l'environnement, à la réussite économique et humaine d'un pôle à vocation
locale, départementale et nationale abritant une activité essentielle pour
notre pays.
TRAVAUX D'AMÉNAGEMENT DE LA ROUTE NATIONALE 4
M. le président.
La parole est à M. Bernard, auteur de la question n° 329, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Jean Bernard.
Monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi d'attirer votre attention sur les
demandes réitérées depuis plus de trente ans - mon collègue M. Machet, élu du
département de la Marne, peut en témoigner - des maires, des conseillers
généraux de tous les responsables représentant les territoires et localités
traversés par la route nationale 4 entre Vitry-le-François et les limites du
département de Seine-et-Marne.
Cette route, qui accueille un trafic extrêmement important, inéluctablement
voué à la croissance avec la mise en service dès l'an 2000 de la plate-forme
multimodale de Vatry, se révèle particulièrement « accidentogène », comme le
démontrent notamment les statistiques de la gendarmerie nationale.
Définie depuis plus de deux ans, une programmation d'aménagements ponctuels,
notamment à la hauteur de la déviation de Sézanne et d'un carrefour situé à
Haussimont, n'a pas à ce jour été concrétisée. Cette situation est révélatrice
de l'inadaptation sur le terrain des contrats de plan tels qu'ils sont négociés
actuellement.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je vous demande de bien vouloir me
préciser dans quels délais l'aménagement à deux fois deux voies de cet
itinéraire sera enfin réalisé. En outre, savez-vous si l'intention de la
direction des routes de simplifier ces aménagements dans l'objectif de modérer
leur coût en fonction des capacités financières de l'Etat et des collectivités
participant à leur financement se traduira dans les faits ? Cet engagement
avait été pris par la direction des routes voilà déjà quelque temps.
Monsieur le ministre, pouvez-vous m'indiquer si les moyens financiers
nécessaires à cette réalisation figureront un jour de façon significative au
budget de l'Etat dans l'hypothèse où, conscientes de l'importance et de
l'urgence de ces travaux, les collectivités locales - départements, régions -
seraient disposées à apporter leur contribution, suivant des modalités de
répartition de la charge financière et de définition de la maîtrise d'ouvrages
qui sont encore à l'étude ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, le trafic sur cette route nationale 4 est dense. Il comporte une
forte proportion de poids lourds puisqu'elle dépasse, localement, 30 %.
Le parti d'aménagement envisagé jusqu'à présent sur la route nationale 4 est
celui d'une route express à deux fois deux voies.
A ce jour, ce parti est pratiquement tenu entre la Francilienne et
Vaudoy-en-Brie, et entre l'est de Saint-Dizier et Toul, où il ne s'agira plus
que de réaliser des mises aux normes relativement légères pour assurer
l'homogénéité de l'itinéraire. En revanche, entre Vaudoy-en-Brie et
Saint-Dizier, il reste encore beaucoup à faire, surtout dans le département de
la Marne où le montant des travaux à prévoir s'élève à environ 2,5 milliards de
francs.
Compte tenu du coût de l'aménagement de cet axe, des réflexions
complémentaires ont été lancées afin de rechercher des solutions moins
onéreuses pour les finances publiques. Ces solutions seront examinées dans le
cadre de la préparation des schémas de services de transport dont le principe
sera établi par le projet de loi d'orientation relatif à l'aménagement durable
du territoire, qui vient d'être déposé au Parlement.
En tout état de cause, je suis conscient, monsieur le sénateur, des
difficultés croissantes qui sont rencontrées sur cet axe, particulièrement en
matière de sécurité, laquelle constitue l'une de mes priorités. Je proposerai
donc qu'un effort significatif soit accompli en faveur de la route nationale 4
dans le cadre du prochain contrat Etat-région Champagne-Ardennes.
S'agissant de l'aménagement du créneau d'Haussimont, déclaré d'utilité
publique le 15 janvier 1998, l'enquête parcellaire devrait pouvoir débuter à la
fin de l'année, ce qui permettrait d'entreprendre les travaux vers le mois de
juin 1999.
En ce qui concerne la déviation de Sézanne, il convient de souligner que le
retard pris est principalement dû aux difficultés rencontrées pour
l'acquisition de terrains issus du secteur agricole et viticole. Les travaux
devraient pouvoir débuter vers le mois de mars 1999.
Je tiens cependant à vous préciser qu'en vertu de l'article 2 de la loi du 12
juillet 1985, relative à la maîtrise d'ouvrage publique, la délégation de la
maîtrise d'ouvrage d'une route nationale à une région n'est pas possible, car
l'Etat ne peut se démettre de sa responsabilité sur le réseau routier
national.
L'article 5 de cette loi prévoit néanmoins que le maître de l'ouvrage peut
confier à l'une des personnes morales mentionnées à l'article 4, dont la
région, certaines des missions de maîtrise d'ouvrage sous forme de mandat.
Cependant, un tel mandat ne permet pas d'accélérer les nécessaires procédures
administratives qui restent du ressort de l'Etat, telles que l'approbation des
projets, les enquêtes publiques, autorisations et déclarations au titre de la
loi sur l'eau, la désignation des entreprises, etc.
De plus, le mandataire n'a pas accès au paiement direct des entreprises et il
ne peut récupérer la TVA. La signature d'une convention de mandat entre l'Etat
et une région ne présente donc pas vraiment d'intérêt sur le plan financier
pour celle-ci.
Le Gouvernement entend accomplir plus d'efforts sur cette partie de la RN 4,
pour des raisons de sécurité, que vous avez évoquées, et afin de respecter le
choix qui a été fait dès le départ, à savoir achever la mise à deux fois deux
voies de cette route nationale.
M. Jean Bernard.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Bernard.
M. Jean Bernard.
Monsieur le ministre, nous prenons acte de vos déclarations.
Il est vrai que les collectivités locales, notamment le département, sont très
sensibilisées par ce problème.
Après bien des discussions, le département de la Marne a décidé d'aménager les
accès des routes départementales à la route nationale 4 pour supprimer les
carrefours dangereux, notamment à la hauteur de Fère-Champenoise. Au total,
cela représente 11 à 12 millions de francs de travaux. C'est dire la volonté du
département !
A une époque, le département avait envisagé de créer une route départementale
parallèle à la route nationale. C'était une solution, mais sa concrétisation
n'était pas aisée, notamment sur le plan réglementaire.
J'ai bien noté notre volonté commune d'aménager cet axe, parce qu'il constitue
l'artère principale de notre département et des régions voisines, soit à l'est,
soit vers la région parisienne.
M. le président.
Compte tenu du nombre important de questions et des contraintes horaires,
j'invite les auteurs à bien vouloir respecter le temps de parole qui leur est
imparti.
REVALORISATION INDICIAIRE
DES TECHNICIENS DES TROIS FONCTIONS PUBLIQUES
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, auteur de la question n° 311, adressée à M. le
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ils sont
techniciens territoriaux, adjoints techniques hospitaliers, techniciens de
l'équipement, techniciens de l'industrie et des mines, techniciens forestiers,
techniciens des services de l'agriculture, techniciens de la ville de Paris.
Ils sont plus de 30 000 en France et ont des responsabilités plus grandes en
raison des évolutions technologiques et des besoins des administrations
concernées.
En 1990, de longues discussions ont eu lieu pour que ces fonctionnaires de la
catégorie B technique soient reconnus. Malheureusement, ils ont été oubliés.
Depuis, ils revendiquent et font valoir leurs droits. Le protocole Durafour n'a
prévu qu'un gain indiciaire de vingt-cinq points en fin de carrière. Cent
quatre-vingt-treize points ont été accordés aux ingénieurs des travaux et aux
cadres supérieurs. Pourtant, les techniciens ont des responsabilités plus
affirmées dans les services techniques des administrations. Elles se
rapprochent de celles qu'excercent les ingénieurs et parfois même les
techniciens remplissent les fonctions de ces derniers.
Le 29 février 1996, votre prédécesseur m'avait répondu que la bonification
indiciaire avait pris en compte l'exercice des responsabilités nouvelles. Cette
remarque n'était pas fondée. La plupart des techniciens n'ont pas bénéficié de
cette nouvelle bonification indiciaire, ceux du premier grade n'ont bénéficié
que de quelques points, le plus souvent un ou deux, soit une majoration de
vingt-cinq francs à cinquante francs par mois. On ne peut parler de prise en
considération de la spécificité des fonctions exercées par les techniciens.
De plus, les différentes administrations en ont profité pour remettre en cause
certains acquis par une politique malthusienne de rétrogradation du deuxième au
premier grade, de réduction d'effectifs des deuxième et troisième grades,
d'allongement de la période de stage portée à deux ans, de blocage des
avancements, d'insuffisance, voire d'absence, de débouchés en catégorie A, de
non-reconnaissance des spécificités des métiers exercés.
Monsieur le ministre, il faut maintenant reconnaître l'importance de la
fonction des techniciens.
Plus grave, ces derniers ont l'impression d'être sous-estimés et rejetés.
Comparez leur situation avec celle des techniciens supérieurs de la défense,
auxquels a été reconnu le titre de technicien supérieur et un recrutement à bac
+ 2. Pourquoi ne pas étendre cette reconnaissance aux techniciens des trois
fonctions publiques ? L'équipement, les mines, l'agriculture et les
collectivités territoriales sont pourtant des administrations aussi nobles et
importantes que celle de la défense, et le niveau des techniciens y est aussi
élevé. Pourquoi ceux-ci n'ont-ils pas été pris en compte ?
Mais ce qui paraît encore plus contestable, c'est que l'avenir des fonctions
n'est pas pleinement assuré. En effet, vous refusez le recrutement au niveau
bac + 2. Or refuser de valoriser à son niveau réel de formation initiale et
continue la fonction de technicien territorial, ce n'est pas servir la fonction
publique, monsieur le ministre.
C'est cette raison de fond qui me conduit à vous interpeller ce matin. Je ne
suis pas le délégué syndical des techniciens de la fonction publique, mais je
suis très préoccupée de constater que ces techniciens n'obtiennent pas la
reconnaissance de leur savoir et des garanties quant à leur avenir et en
matière de qualité et de modernité des services techniques publics.
Dans les faits, la qualification des techniciens atteint au minimum le niveau
bac + 2. Il faut reconnaître que, dans la fonction publique territoriale, ils
sont souvent chefs des services techniques ; à l'hôpital, ils sont notamment
responsables de la logistique des marchés ; à la Ville de Paris, au ministère
de l'industrie, au ministère de l'agriculture, à l'Office national des forêts,
aux mines, ils sont souvent responsables de services de missions d'études
techniques et encadrent des effectifs importants.
M. le président.
Veuillez poser votre question, madame le sénateur.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
J'en termine, monsieur le président.
Vous vous rendez donc bien compte, monsieur le ministre, que les tâches
assumées par les techniciens et les ingénieurs ont tendance à se rapprocher, à
se chevaucher et à s'interpénétrer. ll y a, vous ne pouvez le contester,
rapprochement des fonctions.
Ma question est la suivante : le « tuilage » des indices ne serait-il pas un
correctif logique à cette évolution vers ces nouvelles responsabilités ? Que
comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour aller dans cette voie et rompre
avec la politique de votre prédécesseur ? Je vous propose l'ouverture de
nouvelles négociations avec l'union des techniciens des trois fonctions
publiques et l'ensemble des organisations syndicales, pour aborder ces
questions avec un esprit nouveau.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Madame la sénatrice, la carrière des techniciens des
trois fonctions publiques a sensiblement été revalorisée dans le cadre du
protocole Durafour. S'agissant, par exemple, des techniciens des travaux
publics de l'Etat, cette réforme s'est traduite pour ces agents par un gain
moyen annuel de 8 425 francs. Ce n'est pas négligeable et on ne peut donc pas
dire qu'ils ont été oubliés.
Ces revalorisations étaient, il faut le rappeler, destinées à reconnaître les
nouvelles qualifications et le niveau de responsabilité de ces agents.
D'autres instruments ont été mis en place, qui ont également permis de prendre
en compte, au cas par cas, l'exercice de responsabilités particulières. Il
s'agit, par exemple, de la nouvelle bonification indiciaire, de la création de
débouchés de carrière sous forme de statut d'emplois et de l'octroi de primes
de technicité.
Des mesures conduisant à privilégier la promotion interne et à faciliter le
passage de ces agents dans un corps d'ingénieurs des travaux ont également été
adoptées. Pour les corps d'ingénieurs des travaux publics de l'Etat, cette
proportion est ainsi passée de un sixième à un cinquième des recrutements,
soit, tout de même, 20 % d'augmentation !
Les réformes qui ont été mises en oeuvre ont représenté des avancées
significatives, qui ne sauraient être ignorées ou sous-estimées.
L'architecture des statuts particuliers des corps et cadres d'emplois qui a
résulté de l'application de l'accord Durafour et les principes qui ont régi ce
dispositif ne doivent pas être remis en cause.
Il n'est, ainsi, pas souhaitable d'élever, comme vous le suggérez, les
conditions de diplôme requises pour être candidat aux concours d'accès aux
corps de techniciens. Une telle mesure conduirait en effet à interdire l'entrée
dans la fonction publique à des personnes qui, bien qu'ayant les capacités pour
exercer ce métier, ne détiennent pas un diplôme sanctionnant un premier cycle
de l'enseignement supérieur. Une partie importante de la population, je pense
aux bacheliers, serait ainsi exclue, alors même que des baccalauréats
professionnels, précisément destinés à former à de tels métiers ont été
créés.
Des réformes pourront toutefois être mises en oeuvre, au-delà des mesures
strictement prévues dans le cadre du protocole Durafour, dès lors qu'elles
seront justifiées par l'apparition d'éléments objectifs nouveaux et qu'elles ne
constitueront pas une atteinte à ce que l'on pourrait appeler « l'esprit » du
protocole d'accord. Le fait qu'en 1990 on ait considéré qu'une formation
organisée après un recrutement au niveau du baccalauréat et homologuée au
niveau III, c'est-à-dire à bac + 2, devait permettre à des techniciens de
bénéficier du classement indiciaire intermédiaire constitue ainsi un précédent
qui pourra être pris en considération.
Telle a été la démarche du Gouvernement à l'occasion de l'examen de la
situation des techniciens des travaux publics de l'Etat, dont le stage vient de
faire l'objet d'une homologation et qui devraient prochainement bénéficier
d'une revalorisation de leur carrière.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole.
M. le président.
Madame Beaudeau, je ne peux vous accorder que trente secondes, car, tout à
l'heure, vous avez épuisé les cinq minutes dont vous disposiez.
Vous avez la parole.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le ministre, les éléments que vous venez de me fournir ne peuvent me
satisfaire puisque vous ne répondez même pas à la demande d'ouverture de
négociations avec les techniciens et leurs représentants syndicaux.
Vous appréciez mal le malaise qui s'installe, avec les manifestations de
personnels à l'équipement, à l'Office national des forêts, la grève du zèle des
techniciens. Vous appréciez mal le fait que la CGT et FO aient rejoint l'union
des techniciens des trois fonctions publiques avec la même revendication
fondamentale en faveur d'un véritable statut de technicien supérieur.
L'intérêt du service public est bien de reconnaître ce statut et de l'intégrer
dans l'ensemble des filières techniques pour tenir compte de la spécificité des
besoins.
Le risque est grand, vous le savez bien, monsieur le ministre, de voir glisser
des actions des fonctions publiques vers des secteurs semi-publics ou privés.
L'exemple de la Grande-Bretagne, qui n'a pu faire face, par exemple, au
problème résultant de la maladie de la vache folle, parce qu'elle n'a pas
aujourd'hui de service technique public, est patent.
Nous parlons de l'équipement, de l'hôpital, de l'Office national des forêts,
des mines et de la fonction territoriale. Ne s'agit-il pas de secteurs où des
dangers se manifestent au regard de la garantie de l'intérêt public, et même de
la santé des Français ?
Monsieur le ministre, je réitère ma demande : il importe que vous receviez les
organisations syndicales pour en débattre et qu'à la suite de ce dialogue vous
envisagiez avec les hauts fonctionnaires de l'Etat d'engager un rattrapage.
N'attendez pas que les techniciens soient dans la rue !
SITUATION DE L'USINE GEC-ALSTHOM DE VILLEURBANNE
M. le président.
La parole est à M. Chabroux, auteur de la question n° 301, adressée à M. le
secrétaire d'Etat à l'industrie.
M. Gilbert Chabroux.
Je voudrais attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur la
situation que connaît actuellement le site villeurbannais de GEC-Alsthom
Transport.
Voilà cinq ans, 600 salariés travaillaient sur ce site ; actuellement, ils ne
sont plus que 393. En 1997, le secteur du module de puissance a été transféré à
Tarbes et à Preston en Grande-Bretagne. A cette époque, l'assurance du maintien
de l'activité avait été donnée par la direction, et ce pour les années 1998 et
1999.
Malheureusement, la réalité est tout autre. Le 15 mai dernier, annonce était
faite du transfert de l'activité « système de traction » à Tarbes. Cette
dernière assure la conception, le développement et la réalisation des chaînes
de tractions ferroviaires, urbaines et suburbaines. En clair, 62 postes
villeurbannais devaient être transférés dans les Hautes-Pyrénées avant la fin
de cette année.
Je ferai observer, monsieur le secrétaire d'Etat, que cette décision est
intervenue quarante-huit heures après que le SYTRAL, le syndicat mixte des
transports pour le Rhône et l'agglomération lyonnaise, qui est l'émanation du
conseil général du Rhône et de la communauté urbaine de Lyon, eut retenu la
proposition du groupe GEC-Alsthom pour réaliser des lignes de tramways dans
l'agglomération lyonnaise.
Je tiens à souligner, monsieur le secrétaire d'Etat, que cette perspective de
fermeture risque d'avoir des conséquences véritablement graves à Villeurbanne.
Ce seront tout à la fois les entreprises sous-traitantes de ce groupe, les
ingénieurs et techniciens diplômés de l'INSA, l'Institut national des sciences
appliquées, ou de l'IUT-B, l'Institut universitaire de technologie, de
Villeurbanne qui seront ainsi privés de débouchés. Bien sûr, les recettes
fiscales de la ville se trouveront amputées.
En conséquence, monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous dire quelles
mesures compte prendre le Gouvernement afin que la direction de cette
entreprise puisse être mise en face de ses responsabilités - j'insiste sur ce
point - et revienne sur cette restructuration dommageable à maints égards pour
la ville de Villeurbanne ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Monsieur le sénateur, et cher ami, ainsi
que vous l'avez indiqué, la direction de la société Alsthom Transport a annoncé
au printemps dernier son souhait de procéder au transfert de son unité de
fabrication de chaînes de traction de faible puissance pour matériels urbains
et suburbains de Villeurbanne à Tarbes, où l'on conçoit déjà et réalise
l'ensemble des chaînes de traction de forte puissance pour les matériels grande
ligne.
Selon la direction, l'unité « systèmes de traction VTR » - pour Villeurbanne
Traction - de Villeurbanne est confrontée à une diminution très sensible de son
plan de charge de telle sorte qu'elle ne peut plus, désormais, assurer le plein
emploi de son effectif.
Vous avez évoqué la commande récente de la région lyonnaise à Alsthom en vue
d'essayer de combler le manque de commandes tout à fait patent depuis plusieurs
années.
Aussi l'entreprise Alsthom Transport a-t-elle été conduite à envisager le
regroupement à Tarbes de toutes les activités « systèmes de traction »,
qu'elles soient de faible puissance, comme dans votre département, ou de forte
puissance, au sein d'un établissement dont les activités, similaires en termes
de métier, et les perspectives de développement connaissent une évolution plus
favorable.
Le comité central d'entreprise a eu connaissance le 15 avril dernier de ce
projet de transfert, qui aurait dû entraîner la mutation sur le site de Tarbes
de la quasi-totalité des personnels. Chaque mutation aurait dû être assortie de
la garantie d'ouverture, nombre pour nombre, de postes au sein de
l'établissement d'accueil, l'entreprise s'engageant, en cas de refus de
mutation, à proposer un emploi de reclassement soit au sein du groupe, soit à
l'extérieur de celui-ci.
Cependant, comme vous le savez, ce projet de transfert a été suspendu à la
suite de la procédure judiciaire ouverte à la demande du comité central
d'entreprise d'Alsthom et du comité d'entreprise de Villeurbanne, et de
l'ordonnance en référé rendue par le tribunal de grande instance de Paris, en
date du 28 septembre dernier, interdisant au groupe de poursuivre sa procédure
de plan social et de procéder à toute rupture de contrat de travail dans son
établissement de Villeurbanne. Cette affaire sera de nouveau évoquée lors d'une
nouvelle audience fixée au 24 novembre prochain.
Monsieur le sénateur, indépendamment de cette procédure judiciaire ouverte par
le comité central d'entreprise, je veux ici, avec vous - je pense ainsi être
positif - mettre les points sur les i : la pérennité de l'établissement de
Villeurbanne ne me semble pas menacée. Au contraire - et nous allons nous
employer à renforcer cette orientation - Villeurbanne devient « le » centre
d'excellence d'Alsthom Transport en Electronique Equipement Systèmes, EES. Le
plan de charge de cette unité est bien assuré et ses perspectives sont
encourageantes. La croissance de cette unité permet d'être confiant dans son
avenir, sachant que le savoir-faire en électronique et en informatique est un
atout concurrentiel de plus en plus important dans l'obtention des marchés.
D'ailleurs, vous le savez comme moi, Alsthom entend très largement développer
cette activité en France et à l'étranger.
Soyez assuré, monsieur le sénateur, que je suis conscient de l'importance de
l'avenir de ce site pour la ville de Villeurbanne, pour sa situation fiscale et
pour le sort des personnes d'Alsthom Transport. Je suis avec attention - je
pèse mes mots - cette situation et je me propose de m'en entretenir très
régulièrement avec vous pour que nous puissions, vous et moi, faire tout ce qui
est en notre pouvoir pour renforcer ce pôle moderne et obvier ainsi aux
inconvénients graves pour les personnels et leur famille, inconvénients que
vous avez à juste titre signalés tout à l'heure.
M. Gilbert Chabroux.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, des engagements que vous avez
pris. Je souhaite effectivement que nous puissions suivre très attentivement
l'évolution de ce site, en particulier l'évolution de l'activité EES que vous
avez évoquée. On nous dit qu'elle se développera mais qu'elle ne créera pas
forcément d'emplois. Or nous serions très sensibles à une création d'emplois
compensant les postes qui pourraient être transférés.
Cela étant, vos propos me semblent aller dans le bon sens et je vous en
remercie très vivement.
Par ailleurs, je sais qu'il faut attendre le jugement qui sera rendu le 24
novembre prochain pour savoir ce qu'il adviendra du plan social mis en place
par Alsthom Transport.
SITUATION DE L'USINE GEC-ALSTHOM
DE LYS-LEZ-LANNOY
M. le président.
La parole est à Mme Derycke, auteur de la question n° 305, adressée à M. le
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Mme Dinah Derycke.
Permettez-moi tout d'abord, monsieur le président, de vous faire part du
plaisir que j'ai, ce matin, à poser une question sous votre première présidence
de séance. Tous deux élus du département du Nord et appartenant au même groupe
politique, nous sommes amis depuis de longues années, et je tenais donc à vous
féliciter.
M. le président.
Je vous remercie, madame.
Mme Dinah Derycke.
Monsieur le secrétaire d'Etat, à mon tour, je souhaite vous interpeller sur la
situation sociale de l'usine Alsthom Energy System SA installée à
Lys-lez-Lannoy, ma commune, dans le département du Nord, usine plus connue sous
le nom de Stein Industrie, tant ce nom fait partie intégrante du patrimoine
industriel du versant nord-est de l'agglomération lilloise.
A plusieurs reprises, un collectif regroupant cinq parlementaires du Nord - il
s'agissait de M. Hascoët, dont c'est la circonscription, de MM. Baert et
Balduyck, élus de circonscriptions voisines, de notre collègue M. Renar et de
moi-même - a attiré l'attention de la direction de cette entreprise sur les
inquiétudes procédant de l'annonce d'une réduction de moitié du nombre d'heures
de travail annuel.
Face au développement annoncé de l'activité de valorisation des déchets, aux
résultats positifs de l'entreprise et à la volonté affichée de la direction de
développer l'emploi, un plan social me paraît inacceptable.
Alors qu'un mouvement de certification sociale des entreprises tend à se
développer au niveau mondial, que ces entreprises ont intérêt à intégrer, en
amont, ces thèmes dans leur stratégie globale, nous avons besoin de l'aide du
Gouvernement pour imposer une éthique sociale à la société Alsthom Energy
System dont l'activité est pour partie fondée sur des fonds publics.
Depuis 1993, les résultats d'exploitation de l'usine ont connu une hausse
extrêmement importante et, parallèlement, les effectifs ont été réduits de
façon drastique. L'affirmation par la direction, en juin dernier, de la mise en
place d'un pôle de valorisation des déchets autour du site, pôle d'excellence,
preuve s'il en fallait du développement de l'activité du groupe, ne justifie
aucunement la réduction d'effectifs prévue.
De nombreuses études récentes montrent en outre que la question du personnel,
et ce notamment en période de capitalisation en bourse, est le moyen le plus
pratiqué pour améliorer les résultats d'une entreprise, méthode encouragée par
les milieux financiers, en dépit des conséquences néfastes que cela induit
souvent pour les entreprises elles-mêmes.
Par ailleurs, la direction du groupe, qui insiste, dans le cadre de sa
politique de communication, sur le concept d'entreprise citoyenne, a communiqué
en août 1997 à chaque parlementaire une plaquette publicitaire mettant l'accent
sur sa responsabilité sociale.
Nos choix économiques constituent véritablement des choix de société. Lionel
Jospin, à l'occasion du colloque du parti des socialistes européens du 3
octobre, soulignait que « l'Europe doit désormais s'affirmer comme une base de
reconquête d'une véritable régulation ».
Cette régulation doit commencer dans notre pays. Nous devons nous demander si
une entreprise qui fait du bénéfice est en droit de licencier, si elle peut
légitimement, par un moyen ou par un autre, précariser, notamment par des
mesures d'externalisation, la situation de ses employés.
En effet, au-delà des licenciements et des mesures de restructurations, les
transferts d'activités ont de très lourdes répercussions sociales en termes
d'emplois, de rémunérations, de conventions collectives, de représentation
syndicale. Ce phénomène d'externalisation qui gagne aujourd'hui toute la France
à l'instar de la société Alsthom Energy System, redessine les contours de
l'entreprise. L'Etat se doit d'être extrêmement vigilant sur ce dossier, sauf à
ce que soient détournés rapidement les régulations et garde-fous qu'il a déjà
fixés.
De surcroît, dans le cadre de ce transfert d'activités, l'entreprise Alsthom
Energy System impose de telles réductions des coûts aux entreprises
sous-traitantes que cela constitue une menace réelle à moyen terme sur sa
volonté de maintenir l'emploi.
M. le président.
Veuillez poser votre question, madame.
Mme Dinah Derycke.
Par ailleurs, alors que la direction réaffirme sa priorité pour l'emploi, elle
repousse régulièrement les propositions syndicales de négociation relatives à
la réduction du temps de travail.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande donc de tout mettre en oeuvre
pour éviter, dans cette région déjà sinistrée, un nouveau plan social, une
nouvelle précarisation du travail.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Monsieur le président, permettez-moi
d'exprimer à mon tour la satisfaction que j'éprouve à répondre aux questions de
Mmes et MM. les sénateurs sous votre présidence de séance.
Madame le sénateur, comme vous l'avez indiqué, Stein Industrie est filiale à
100 % de GEC Alsthom. Cette société est spécialisée dans la fabrication de
chaudières à combustibles fossiles de forte puissance, d'une part, et
d'incinérateurs, d'autre part.
La société possède deux sites dédiés à cette activité : celui de Vélizy, en
région parisienne, qui est un centre de conception et d'ingénierie, et celui de
Lys-lez-Lannoy, dans le Nord, qui est chargé de la fabrication de ces
unités.
Le marché des usines de production d'énergie électrique composées de
chaudières de grande puissance à combustibles fossiles est presque entièrement
concentré, aujourd'hui, en Asie du Sud-Est et aux Etats-Unis. La concurrence
acharnée sur ces marchés, notamment en Asie, et l'émergence de nouveaux
opérateurs privés de production d'énergie ont conduit à une baisse assez
étonnante des prix de vente, de l'ordre de 50 % en quelques années. Et ce
marché lui-même pâtit depuis quelques mois de la crise économique que connaît
l'Asie du Sud-Est.
Le centre d'activité de Lys-lez-Lannoy est consacré aux unités des usines
d'incinération. Le « tout incinération » que certains avaient pu envisager
n'est pas le scénario retenu. La volonté des pouvoirs publics est d'assurer la
gestion la plus équilibrée possible des déchets en faisant appel à l'ensemble
des filières de traitement, ainsi que le montrent les récentes instructions
adressées aux préfets par ma collègue Mme Voynet, ministre de l'aménagement du
territoire et de l'environnement. Le recours aux usines d'incinération reste
naturellement utile et nécessaire, mais il se fera à un rythme inférieur à
celui du passé.
Par ailleurs, vous le savez aussi, les marchés étrangers que la France - et
Alsthom, en particulier - peuvent conquérir sont maintenant presque toujours
assortis de clauses de fabrication locale et de transferts de technologie, en
tout cas d'une contrepartie dans les pays d'insertion. De ce fait, pour un même
montant global d'affaires, la part industrialisée en France se réduit.
Il existe donc - il faut être vrai dans le propos - un problème important de
charge de travail pour l'usine de Lys-lez-Lannoy, qui a conduit la direction de
l'entreprise à envisager de redimensionner la capacité de production du
site.
Cependant, madame le sénateur, l'entreprise réfléchit en même temps à la
création sur le site d'un pôle de compétence sur les métiers de
l'environnement, axé plus particulièrement sur le secteur du traitement des
déchets et destiné, par la mise en oeuvre de synergies industrielles entre
Alsthom et les équipementiers qui lui seront associés, à accroître l'efficacité
de cette filière industrielle et à permettre la conquête de nouveaux
marchés.
Je suis, comme vous, conscient des conséquences de cette évolution sur le
devenir de la filière française de l'incinération, mais aussi sur la situation
de l'emploi de la commune de Lys-lez-Lannoy.
Je suivrai avec une particulière attention la mise en place de ce pôle de
compétence sur les métiers de l'environnement, en veillant à ce que les
potentialités que son développement implique en termes d'emploi et d'activité
industrielle puissent se concrétiser rapidement et dans les meilleures
conditions - sociales, notamment - avec la perspective, que vous avez évoquée
dans votre question, de l'aménagement et de la réduction du temps du
travail.
Mon cabinet recevra dans quelques jours - le 28 octobre prochain - les
organisations syndicales représentatives. Je maintiendrais le contact avec
elles, mais aussi avec les élus et avec vous, si vous le souhaitez, afin
d'évoquer avec l'ensemble des partenaires les perspectives de développement de
cette nouvelle filière des métiers de l'environnement.
Nous aurons donc l'occasion, si vous le souhaitez, de reparler très vite de ce
dossier.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.
Si je ne doute ni de votre volonté ni de votre détermination, permettez-moi
cependant de douter quelque peu de celles de l'entreprise concernée. Ainsi,
s'agissant de l'établissement de Villeurbanne, dont nous venons d'évoquer le
cas, ou des activités situées à Belfort, au sujet desquelles M. Dreyfus-Schmidt
vous a également posé une question, on se rend compte que le dialogue social
n'est pas excellent. Une procédure judiciaire n'est-elle pas en cours à
l'entreprise de Villeubanne, comme à Lys-lez-Lannoy ?
Entre la détermination que vous affichez et les intentions exprimées par la
direction de l'entreprise, la nécessité se fait sentir de clarifier la
situation.
Toutefois, je retiens les propositions que vous nous avez faites et je suis
certaine de votre volonté, monsieur le ministre.
INSTALLATION D'UNE IRM À L'HOPITAL D'ARRAS
M. le président.
La parole est à M. Fatous, auteur de la question n° 295, adressée à Mme le
ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. Léon Fatous.
Madame le secrétaire d'Etat, le 14 octobre 1997, en réponse à une question
identique concernant notre demande d'une IRM fixe pour l'Arrageois, Mme Martine
Aubry m'invitait à contacter les directeurs des établissements hospitaliers,
afin qu'ils déposent une nouvelle demande d'autorisation.
Le centre hospitalier d'Arras a donc, sur mon conseil, envoyé, en janvier
1998, un nouveau dossier concernant cet équipement.
En effet, si nous y attachons de l'importance, c'est parce qu'il s'agit là
d'un outil devenu indispensable pour les besoins sanitaires d'un bassin de
population de 400 000 habitants : d'après un recensement effectué à partir de
diagnostics pour les hospitalisations de 1996, cela représente quelque 1 500
examens - qui se déroulent donc automatiquement à Lens ou à Bois-Bernard -
auxquels il convient d'ajouter les examens extérieurs, soit, en tout, une
activité de 4 000 examens par an.
Lors de la réalisation de son plateau technique, voilà quelques années, le
centre hospitalier a prévu l'espace nécessaire pour l'installation d'une IRM.
De même, sur l'équipe des cinq radiologues prévus, quatre sont d'ores et déjà
formés à la neuro-imagerie. Vous comprendrez pourquoi nous sommes demandeurs
!
Enfin - et je sais que c'est là une question sur laquelle vous êtes
particulièrement attentive, madame le secrétaire d'Etat - un tel équipement
répondrait au rééquilibrage géographique nécessaire dans le domaine sanitaire
de notre région Nord - Pas-de-Calais ? Et Arras n'est-il pas le chef-lieu du
Pas-de-Calais ?
Aussi, madame le secrétaire d'Etat, j'aimerais savoir si nous pouvons garder
l'espoir d'obtenir, d'ici à la fin de ce siècle - c'est bientôt ! - cet
équipement.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.
Monsieur le président,
permettez-moi, tout d'abord, de vous féliciter à mon tour.
Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention de Mme la ministre de
l'emploi et de la solidarité sur la demande déposée par le centre hospitalier
d'Arras en vue de l'installation d'un appareil IRM, dans les locaux dudit
établissement.
Cette demande a déjà été examinée en juin 1998 par le comité national
d'organisation sanitaire. Ce comité, compétent pour émettre des avis auprès du
ministère sur les demandes d'installation d'imageurs par résonance magnétique,
a exprimé, à cette occasion, un avis défavorable, que Mme Martine Aubry et M.
Bernard Kouchner ont suivi.
Permettez-moi de vous en donner les raisons. Certes, en application du régime
d'autorisation relatif aux IRM, la région Nord - Pas-de Calais peut bénéficier
d'un appareil supplémentaire, mais trois équipements de ce type sont déjà
autorisés dans le bassin de vie de l'Artois : deux IRM au centre hospitalier de
Lens, et un dans le secteur privé.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, nous avons recueilli des avis convergents
visant à augmenter le nombre d'IRM dans le bassin de vie du Hainaut, qui ne
dispose que d'un unique appareil installé au centre hospitalier de
Valenciennes.
Dans ces conditions, nous n'avons pu que rejeter la demande, qui a d'ailleurs
été renouvelée lors de la période de dépôt de dossiers qui s'est ouverte le 1er
juillet pour s'achever le 31 août 1998. Il sera donc procédé à un nouvel examen
du dossier à la fin de l'année 1998 ou au début de l'année 1999.
Dans l'attente de cet examen, je souhaite également appeler votre attention
sur le fait que le centre hospitalier d'Arras doit utiliser au mieux l'accès
dont il peut disposer à la seconde IRM du centre hospitalier de Lens. En effet,
cet équipement, autorisé dans le cadre du régime expérimental prévu par
l'article L. 716-1 du code de la santé publique, doit faire l'objet d'une
exploitation partagée avec des partenaires publics de Béthune, de Douai et
d'Arras. Cette perspective permettra de répondre aux besoins des patients du
centre hospitalier d'Arras.
A plus long terme, je rappelle que le ministère de l'emploi et de la
solidarité a engagé une action volontariste d'augmentation du parc des IRM
installées en France, en autorisant une vingtaine d'équipements supplémentaires
en 1997, puis à nouveau en 1998.
Lorsque l'ensemble des autorisations découlant de ces mesures aura été
attribué, il n'est pas exclu qu'une nouvelle augmentation du parc national soit
décidée.
Dans cette hypothèse, le centre hospitalier d'Arras pourrait disposer
d'opportunités nouvelles s'agissant de l'installation d'IRM sur son site.
M. Léon Fatous.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Fatous.
M. Léon Fatous.
Bien entendu, madame le secrétaire d'Etat, votre réponse ne me satisfait
pas.
J'ignorais que notre demande avait été refusée par le comité national
d'organisation sanitaire au mois de juillet, mais il faut reconnaître qu'il est
étonnant que Lens dispose de deux appareils d'IRM alors qu'Arras, chef-lieu du
Pas-de-Calais et centre d'une région de 400 000 habitants, est dépourvu de ce
type d'équipement. Cela signifie que toutes les personnes résidant dans
l'arrondissement d'Arras-Saint-Pol-sur-Ternoise doivent se rendre à Lens pour
subir les examens nécessaires.
Je persiste donc, bien sûr, dans ma demande, et je souhaite que, en 1998 ou en
1999, le site d'Arras soit enfin retenu pour l'implantation d'un appareil
d'IRM, tout en me réjouissant que Lens bénéficie déjà d'équipements de ce type.
PRIME À L'EMBAUCHE D'APPRENTIS
DANS LE SECTEUR PUBLIC
M. le président.
La parole est à M. Richert, auteur de la question n° 296, adressée à Mme le
ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. Philippe Richert.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, par
cette question déposée en mai 1998 - je précise la date car, malheureusement,
un délai important s'est écoulé depuis - je souhaite réitérer une interrogation
que j'avais déjà adressée au Gouvernement lors de la discussion du dernier
projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, ou
DDOEF.
Cette question concerne le dispositif de prime à l'embauche d'apprentis dans
le secteur public, prévu par la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au
développement d'activités pour l'emploi des jeunes : l'article 13 de cette loi
prévoit l'octroi d'une prime de 6 000 francs pour toute signature de contrat
entre une collectivité et un apprenti à compter du 1er octobre 1997. Or, nous
le savons, la scolarité, dans la plupart des établissements scolaires
d'apprentissage, démarre dans le courant du mois de septembre, et il est donc
nécessaire que les contrats d'apprentissage soient signés durant ce même
mois.
Nombreuses sont donc les collectivités qui n'ont pas pu ou qui ne peuvent pas
bénéficier de cette prime à l'embauche d'apprentis du fait de cette question
juridique de date. Les dispositions de ce texte censé favoriser l'embauche
d'apprentis produisent donc des effets contraires à ceux que prévoyait la loi.
En tout cas, certaines communes qui auraient pu bénéficier de cette aide en ont
été privées.
Interrogé au cours de la discussion du DDOEF, M. le ministre de l'économie et
des finances a reconnu, à l'époque, l'intérêt de la question, mais il n'a pas
voulu prendre d'engagement en séance.
Aussi, je voudrais savoir si Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
envisage de rectifier cette anomalie juridique.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.
Monsieur le sénateur,
vous m'interrogez sur la possibilité d'étendre aux contrats d'apprentissage
conclus en septembre 1997 dans le secteur public non industriel et commercial
l'aide forfaitaire à l'embauche introduite, vous l'avez rappelé, par l'article
13 de la loi du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour
l'emploi des jeunes. Cette prime, d'un montant de 6 000 francs, est versée pour
les seuls contrats conclus à compter du 1er octobre 1997.
Il est vrai que les cycles de formation en matière d'apprentissage débutent,
en règle générale, en septembre. Dès lors, la date du 1er octobre 1997 paraît
peu pertinente, puisqu'elle écarte du bénéfice de l'aide les collectivités
territoriales et les établissements publics ayant accueilli des apprentis avant
cette date.
D'après les informations qui m'ont été communiquées, ces dispositions
résultent d'un amendement déposé, au nom de la commission des affaires sociales
du Sénat, par M. Souvet lors de la discussion du projet de loi relatif au
développement d'activités pour l'emploi des jeunes. Le Gouvernement a accepté
le dispositif sans y apporter de modification et il comportait bien la date du
1er octobre pour l'octroi de ces aides, qui sont le pendant des aides
forfaitaires à l'embauche d'apprentis qui prévalent dans le secteur privé.
Dans un second temps, m'a-t-on indiqué - je reste prudente - vous vous étiez
rangé à l'avis du rapporteur lors du débat sur le projet de loi portant
diverses dispositions d'ordre économique et financier en retirant votre propre
amendement, dont l'objet était de fixer au 1er octobre 1997 la prise d'effet de
la prime à l'embauche des apprentis dans le secteur public.
A cette occasion, M. Lambert, rapporteur général, avait fait valoir qu'une
modification législative n'aurait que peu de conséquences pratiques sur les
contrats déjà signés, point qui avait été réaffirmé par le secrétaire d'Etat au
budget.
J'ajoute que, à la fin septembre 1998, soit douze mois après l'entrée en
vigueur de cette mesure, 3,4 millions de francs, correspondant à 567 contrats
d'apprentissage, ont été versés sous forme de primes à l'embauche.
Il convient donc de relativiser la portée de cette disposition dont sont
exclus les contrats d'apprentissage conclus par l'Etat, administrations
centrales et services déconcentrés, en application du principe selon lequel
l'Etat ne peut se verser à lui-même des subventions.
Au-delà de la question précise que vous posez, je souhaite vous donner
quelques brèves informations sur la politique gouvernementale en matière
d'apprentissage.
Le développement des formations en alternance dans le secteur privé constitue
l'une des priorités du Gouvernement. A cet effet, le projet de budget de la
formation professionnelle pour 1999 est bâti sur la base de 130 000 contrats de
qualification et de 230 000 contrats d'apprentissage, pour des montants
d'intervention respectifs de 2,95 milliards de francs, d'une part, et de 9,5
milliards de francs, d'autre part.
Cet effort témoigne de l'importance que j'accorde aux formations en
alternance, qui constituent un dispositif efficace d'insertion des jeunes dans
l'emploi.
Il n'est, pour s'en convaincre, que de mentionner les résultats d'une étude
récente de la Direction de l'animation, de la recherche, des études et des
statistiques, la DARES, qui indique qu'au terme de leur contrat 61 % des jeunes
obtiennent un diplôme ou une certification de leur formation et 66 % occupent
un emploi.
Je reviens, en terminant, sur la question bien précise que vous m'avez posée
pour vous dire que je me suis reportée, hier soir, au compte rendu de
l'ensemble des deux débats que j'ai évoqués.
En relisant les interventions des uns et des autres dans le
Journal
officiel,
j'avoue très franchement n'avoir pas trouvé d'explication au
retrait de l'amendement qui tendait à maintenir la date du 1er octobre 1997.
Si donc vous pouviez me donner un élément qui m'a échappé, qui n'apparaît ni
dans le
Journal officiel
ni dans la mémoire de l'administration, que
j'ai également interrogée, sans doute serai-je en mesure ultérieurement de vous
apporter une réponse plus précise.
M. Philippe Richert.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert.
Madame le secrétaire d'Etat, ce n'est, bien évidemment, pas moi qui vais vous
contredire lorsque vous affirmez l'importance de la formation par alternance.
Vous le savez, je viens d'Alsace, où un système de formation par alternance
fonctionne relativement bien depuis longtemps.
Ce système a d'ailleurs parfois été combattu par l'éducation nationale, qui
prétendait que c'était une formation secondaire qu'il fallait essayer de
limiter, voire de diminuer. Aujourd'hui - je m'en félicite - il démontre son
efficacité, et je suis très heureux que le Gouvernement consente des efforts
importants pour le faire progresser.
La question que j'ai posée, et sur laquelle j'avais déjà eu l'occasion
d'attirer l'attention du Gouvernement, est très simple.
Le texte présenté par notre collègue était, en fait, la reprise d'une
disposition de la loi du 17 juillet 1992 qui avait offert, à titre
expérimental, la possibilité pour le secteur public d'embaucher des apprentis.
Cette mesure a été reprise ensuite, le 27 juillet 1993, dans le cadre du
développement de l'apprentissage, où elle a été limitée dans le temps jusqu'au
31 décembre 1995, avant d'être prorogée ultérieurement à deux reprises pour six
mois. Elle prenait donc fin le 31 décembre 1996.
Enfin, lors de la discussion de la loi du 16 octobre 1997 sur les
emplois-jeunes, nous avons réintroduit cette disposition afin que les communes,
notamment, puissent continuer à en bénéficier.
Vous l'avez dit, madame le secrétaire d'Etat, les sommes en jeu restent, pour
l'ensemble du pays, relativement modestes puisqu'une commune qui embauche un
jeune avec un contrat d'apprentissage touche 6 000 francs.
Le choix de la date du 1er octobre était toutefois surprenant puisque, à cette
date, les élèves sont déjà en contrat d'apprentissage, soit dans les écoles
pour suivre la formation théorique, soit dans les communes pour acquérir la
formation pratique.
Sans doute n'avons-nous donc pas été assez vigilants, les uns et les autres,
lors du vote du texte initial. Les communes concernées se sont en tout cas
demandé si le Gouvernement et le Parlement ne se moquaient pas d'elles puisque
choisir le 1er octobre revenait à rendre la mesure inapplicable.
Saisi de façon très concrète par des maires, je suis donc revenu à la charge,
et j'ai déposé un amendement visant à modifier cette date. M. le rapporteur,
vous l'avez rappelé, a fait valoir que se posait un problème de rétroactivité
de la loi. J'ai donc demandé au ministre, lui-même convaincu de la réalité du
problème, s'il était possible de remédier à cette situation.
Sans nouvelles depuis, j'ai décidé de déposer, en mai dernier, cette question,
qui, malheureusement, compte tenu des délais, ne vient en discussion
qu'aujourd'hui. Je le regrette vivement.
M. le président.
Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Philippe Richert.
Il en ressort que, les uns et les autres, nous ne pensons pas toujours
suffisamment, lorsque nous votons les lois, aux cas concrets qui se poseront
lorsque nous devrons les appliquer.
FICHIERS MÉDICAUX
M. le président.
La parole est à Mme Borvo, auteur de la question n° 317, adressée à Mme le
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Nicole Borvo.
Madame la secrétaire d'Etat, l'informatisation du système de sécurité sociale,
dont la mise en oeuvre est d'une grande complexité, pose problème tant du point
de vue médical que de celui des libertés, en l'état actuel des choses.
Un des objectifs du nouveau système est de fournir un outil d'évaluation et
d'analyse de l'état de santé des populations en vue d'une exploitation sur le
plan de la santé publique. Or, si le codage des pathologies, qu'il est prévu de
systématiser et de rendre obligatoire en vue du remboursement, peut être
efficace pour un certain nombre de situations, nombre de ces dernières ne
relèvent pas d'un diagnostic précis en termes de pathologie ou d'état morbide
bien défini et font entrer en ligne de compte le contexte, la raison du
recours, le symptôme, les motifs psychologiques, les réalités sociales, etc.
Dès lors, on comprend facilement que ce codage imposé aux praticiens conduira
très probablement à des effets pervers du point de vue tant des données
transmises que du dialogue avec le patient.
En tout état de cause, les études statistiques et épidémiologiques avec une
méthodologie d'enquête stricte et une réalisation par les profesionnels formés
à cet effet nous semblent être plus effficaces pour atteindre l'objectif visé.
Elles doivent être développées en France, car elles sont insuffisantes.
Par ailleurs, la constitution d'un véritable casier sanitaire de l'individu,
combinée aux modalités prévues pour la carte Vitale, risque de produire des
dérives portant atteinte à la sphère la plus intime de la vie privée.
La constitution d'un fichier centralisé de toute la population, dénoncé
régulièrement dans les années soixante-dix et quatre-vingt, ne poserait-elle
aujourd'hui plus aucun problème ?
De plus, rendre libre d'accès le volet « urgences » laisse craindre - une
enquête à ce sujet a été publiée la semaine dernière dans un hebdomadaire - que
les employeurs ou les assureurs ne fassent pression pour prendre connaissance
de ces informations figurant dorénavant sur une carte santé rendue obligatoire.
L'usager, en position de demandeur, sera-t-il alors pleinement en situation de
défendre ses droits en refusant la communication d'informations contenues dans
la carte ?
Par ailleurs, le fait que les professionnels de santé demeureront libres de
s'abonner ou non au réseau intranet santé social, le RSS, qui ne dispose
d'aucune exclusivité, pose problème. Outre la réalité aujourd'hui
incontournable que l'utilisation de la technique Internet comporte des risques
de divulgation, de déformation et d'intrusion dans les systèmes informatiques,
n'est-il pas à craindre que d'autres opérateurs de réseau ne se mettent sur le
marché et ne proposent des services qui ne seraient pas soumis aux mêmes
contraintes que celles qui sont imposées au RSS par le contrat de concession,
s'agissant, en particulier, de la sécurisation du réseau ?
C'est pourquoi je vous demande, madame la secrétaire d'Etat, ce que le
Gouvernement envisage de faire afin d'empêcher toutes ces dérives.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.
Madame la sénatrice, la
question du respect de la vie privée face au développement des systèmes
d'information dans le domaine de la santé est, en effet, essentielle. Même si
la question posée est complexe, le sujet mérite donc que l'on s'y attarde.
Croyez bien que le Gouvernement s'attache à apporter toutes les garanties
nécessaires en ce qui concerne tant le répertoire national inter-régimes des
bénéficiaires de l'assurance maladie, le RNIAM, le volet médical de la carte
Vitale d'assuré social que le réseau santé social, le RSS.
Le RNIAM est un répertoire dont la seule fonction est d'aider les caisses à
maintenir des fichiers à jour de façon que les changements de caisse, par
exemple, soient enregistrés de manière la plus diligente possible, et ce dans
l'intérêt même de l'assuré qui attend des remboursements rapides de sa nouvelle
caisse.
Ne sont inscrites dans ce répertoire que les informations strictement
indispensables à l'identification des personnes : nom, prénom, date et lieu de
naissance, numéro d'inscription du répertoire et caisse de rattachement.
En aucun cas n'y figurent des données médicales relatives aux assurés sociaux.
Ce répertoire a d'ailleurs été créé par décret, en application de la loi, sous
le contrôle de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
De son côté, le codage des actes et des pathologies monte en charge : 40 % des
actes totaux sont couverts à ce jour par le codage ; le codage de la biologie
est terminé et celui de la pharmacie est en cours. Ce codage est opéré sous le
contrôle de la CNIL. Les agents ayant accès aux données du codage sont tenus
aux secrets professionnel et médical.
Ces garanties ont été définies par la loi Teulade, que le Parlement a adoptée
il y a maintenant cinq ans. Elles permettront à l'assurance maladie, dans le
respect de la vie privée, de disposer des informations nécessaires à une
orientation plus stratégique de la prise en charge des soins en France.
En ce qui concerne maintenant le volet médical de la carte d'assuré social, il
est en cours de définition. Le Parlement sera amené très prochainement à se
prononcer sur ce sujet. Le Conseil d'Etat, lors de l'examen de la convention
des médecins généralistes, a en effet annulé l'article de l'ordonnance
correspondant,
Je ne souhaite pas anticiper sur les débats que nous aurons ensemble à cette
occasion, mais je suis en mesure de vous préciser que le volet médical devrait
comprendre, en effet, un volet d'urgence. Il s'agit de doter chaque patient
d'informations facilement accessibles à un professionnel de santé en cas
d'urgence, notamment lorsque le patient est inconscient ou trop choqué pour
répondre à un médecin, surtout lorsque l'accident a lieu dans un pays
étranger.
Le volet d'urgence serait donc lisible dans toutes les langues de l'Union
européenne. Il satisferait ainsi à des standards européens et offrirait donc à
nos concitoyens l'assurance qu'en cas de besoin les premiers soins pourront
leur être prodigués par un professionnel informé.
Je souhaite, madame la sénatrice, que ce volet puisse être lu facilement par
un médecin. En revanche, il est bien clair que l'inscription d'une donnée sur
le volet médical, ou son effacement, relèvera du libre choix de l'assuré.
Enfin, vous m'avez interrogé sur le « réseau santé social », qui jouit d'une
exclusivité de raccordement des caisses d'assurance maladie. Les professionnels
et les établissements de santé, quant à eux, sont libres, comme vous
l'indiquez, de choisir un « fournisseur d'accès réseau » de leur choix.
Cette faculté est sans incidence sur la confidentialité des feuilles de soins
électroniques, qui est assurée par le chiffrement des données médicales. Ce
chiffrement est effectué à la source, directement sur le poste du professionnel
; il est donc indépendant du réseau qui transporte lesdites données
chiffrées.
Le RSS, au-delà, offre une protection aux systèmes d'information des caisses
et des professionnels qui s'y connectent grâce aux procédures qui lui sont
propres : authentification par carte à puce, traçabilité des flux.
La qualité de service et de sécurité qui est la caractéristique même du RSS
devrait conduire, n'en doutons pas, une majorité de professionnels à s'y
raccorder.
Mme Nicole Borvo.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie des renseignements que vous
m'avez donnés, mais je voudrais insister sur quelques points.
Dans la mise en place du nouveau système, le citoyen doit obtenir la maîtrise
réelle, totale sur les circuits d'information de santé le concernant. Il serait
préjudiciable pour la santé et les libertés des citoyens d'appliquer en la
matière une logique de maîtrise budgétaire et de gestion ou de contrôle de
populations dites « à risque ». Cette logique comptable a de plus un coût
important, comme le relève le dernier rapport de la Cour des comptes.
Il serait en revanche nécessaire de rendre anonymes - vous nous avez dit que
ce point ferait l'objet d'un débat - les données utilisées à des fins
statistiques et transmises aux organismes de protection sociale, avec
déconnexion entre les données liées aux remboursements, nécessairement
nominatives, et celles qui sont destinées à des études.
En ce qui concerne la carte Sésame Vitale, les informations non
administratives enregistrées devraient se limiter au maximum - vous nous avez
également donné certaines assurances sur ce point - aux coordonnées du ou des
médecins traitants et éventuellement à quelques informations utiles dans le
domaine de l'urgence, à condition que l'accès en soit sécurisé. J'insiste
beaucoup sur ce point.
Quant au réseau Intranet, qui contient les données de santé, il serait
nécessaire, en cas de multiplication de ces réseaux qui viendront se connecter
aux points d'accès RSS, de prévoir des contraintes égales à celles qui sont
imposées à celui-ci en matière de sécurisation.
Outre le débat parlementaire que vous annoncez, madame la secrétaire d'Etat,
il faut d'urgence initier un débat plus large, compréhensible par les citoyens,
portant sur le processus global d'informatisation des données personnelles de
santé, avant que les dispositifs définis ne soient entérinés par les pouvoirs
publics, d'autant que les parlementaires n'ont pu s'exprimer ni en 1993, au
moment de la loi Teulade, ni
a fortiori
lors des ordonnances de 1996.
En réalité, ce débat, jusqu'à présent, n'a jamais eu lieu. J'apprécie qu'il
soit annoncé, mais force est de constater que tout a été fait jusqu'à présent
sans véritable débat devant la représentation nationale, s'agissant notamment
de tout ce qui touche aux libertés, encore moins avec nos concitoyens.
OUVERTURE DOMINICALE DE MAGASINS
ET CONCURRENCE COMMERCIALE
M. le président.
La parole est à M. Delevoye, auteur de la question n° 319, adressée à Mme le
ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. Jean-Paul Delevoye.
Madame le secrétaire d'Etat, ma question porte sur le commerce
infraeuropéen.
Certes, nous sommes tous convaincus que le marché européen est aujourd'hui un
facteur très important de la croissance par la consommation interne. Mais il
n'empêche que nous devons réfléchir à l'harmonisation des réglementations afin
d'éviter les distorsions de concurrence.
Permettez-moi de vous en soumettre un exemple. Il s'agit du secteur du meuble
dans la région Nord - Pas-de-Calais face à la concurrence belge.
Le 30 mai 1997, un arrêté royal a légalisé en Belgique l'ouverture des
commerces de négociant en meubles quarante dimanches par an, soit trois
dimanches sur quatre.
Ses conséquences ont été analysées : on évalue le chiffre d'affaires réalisé à
plus de 600 millions de francs, dont 60 % au minimum correspondraient à des
achats effectués par des étrangers.
On voit donc bien toute l'attractivité de ce dispositif et le déplacement de
consommateurs qu'il a entraîné. L'analyse de l'évolution du commerce dans la
région Nord - Pas-de-Calais montre que, sur 190 commerces recensés en 1997, il
n'en reste plus que 135. Bien évidemment, ceci est la conséquence de cela.
Au-delà même du problème de l'ouverture dominicale, nous devons nous
interroger sur celui de l'harmonisation et de l'équilibre des règles du jeu
entre pays européens. Nous assistons aujourd'hui, notamment pour un certain
nombre d'activités autres que le meuble, à des distorsions de concurrence. Je
pense notamment à la construction, au bâtiment, au transport routier.
L'absence de règles ou, quelquefois, la capacité qu'ont certaines entreprises
localisées dans les pays européens de ne pas tout à fait respecter celles qui
existent, leur donne un avantage tout à fait important.
Il serait paradoxalement cruel que les couches sociales les plus défavorisées
de notre pays, qui se veut un exemple en matière de législation sociale très
avancée, soient pénalisées par celles et ceux qui ne respecteraient pas ces
exigences sociales.
Madame le secrétaire d'Etat, il serait judicieux de prendre un certain nombre
d'initiatives afin que les règlementations soient respectées. Cela est d'autant
plus important que, lorsque nos commerçants obtiennent des condamnations, les
peines pénales prononcées par les juridictions françaises ne peuvent pas être
exécutées en Belgique, faute de ratification par la France de la convention sur
l'exécution des condamnations pénales étrangères, ouverte à la signature, le 13
novembre 1991, à Bruxelles.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.
Monsieur le sénateur,
vous avez appelé l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité
sur les problèmes que peut créer, pour des régions frontalières, l'existence de
réglementations différentes en matière de repos dominical dans des pays de la
Communauté.
Comme vous l'avez indiqué, monsieur le sénateur, la législation en Belgique,
par un arrêté royal, autorise l'ouverture, quarante dimanches par an, des
commerces de meubles dont un grand nombre est situé en zone frontalilère. Une
telle disposition ne serait pas sans effet sur la situation économique de ce
secteur.
De son côté, la législation française pose en principe que le repos
hebdomadaire doit être donné le dimanche. Il s'agit d'une disposition d'ordre
public, applicable à tous les salariés. Les spécificités de certaines activités
ont néanmoins amené le législateur à prévoir un certain nombre de dérogations
collectives ou individuelles à ce principe, soit de droit, soit sur
autorisation administrative.
L'équilibre entre ce principe général et les dérogations ouvertes, pour
permettre son adaptibilité aux situations particulières, ne saurait être remis
en cause sans conséquences très sensibles sur les conditions de vie et de
travail des salariés. Ce n'est d'ailleurs pas le sens de la demande que vous
formulez, monsieur le sénateur.
Dans le département du Nord, afin de permettre une concurrence loyale entre
les différentes entreprises de la profession et de parer à la concurrence des
magasins situés en Belgique, les services de l'Etat, les représentants de la
profession et les syndicats de salariés ont défini ensemble un cadre pour la
mise en oeuvre de ces dérogations. Ce dispositif fonctionne, semble-t-il, de
manière satisfaisante.
Sur le plan européen, il existe une directive européenne du 23 novembre 1993
qui assure le rapprochement de certaines dispositions en matière de durée et
d'aménagement du temps de travail. Elle comprend notamment le droit à un repos
hebdomadaire. Toutefois, comme vous le savez, il appartient à chaque Etat,
conformément au principe de subsidiarité, d'en apprécier les modalités de mise
en oeuvre.
L'existence de divergences dans les réglementations des différents Etats
membres peut, certes, être source de difficultés économiques pour les secteurs
qui, de par leur activité et leur localisation géographique, ont à faire face à
des concurrents qui ne se verraient pas appliquer les mêmes règles.
Pour cette raison, la France cherche à approfondir la législation
communautaire dans le domaine social. J'insiste, par ailleurs, sur le rôle
désormais attribué aux partenaires sociaux, au niveau communautaire, afin de
dégager des règles communes, ainsi que sur l'importance croissante, en liaison
avec les Etats membres, de la concertation entre les partenaires sociaux pour
régler des questions de nature transnationale ou transfrontalière.
Permettez-moi d'ajouter, monsieur le sénateur, que la concurrence
transfrontalière ne saurait à elle seule expliquer les difficultés rencontrées
par le secteur du commerce de meubles dans la région Nord - Pas-de-Calais. Je
n'insiste pas sur ce point qui n'est pas l'objet de votre question.
Il reste que les difficultés évoquées dans votre question montrent la
nécessité de rechercher une convergence plus active des législations
européennes en matière sociale. Elle doit se traduire par des règles communes,
préservant les principes sociaux fondamentaux auxquels les différents pays de
l'Union européenne sont attachés. Toutes les possibilités offertes par le
nouveau traité d'Amsterdam seront, à cet égard, utilisées.
M. Jean-Paul Delevoye.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Delevoye.
M. Jean-Paul Delevoye.
Je vous remercie, madame le secrétaire d'Etat, de votre réponse.
Il est tout à fait important que soit effectivement mis en place un
observatoire économique pour bien mesurer les distorsions qui pourraient
résulter du non-respect, de la non-application ou de l'utilisation abusive d'un
certain nombre d'objectifs sociaux proposés par nos partenaires sociaux à
l'échelon communautaire. Il serait particulièrement malvenu qu'aujourd'hui le
vice soit récompensé plus que la vertu et l'efficacité économique réduite au
moins-disant social.
Cette question dépasse le secteur du meuble et l'aspect frontalier. Vous savez
mieux que moi que nombre de professions sont aujourd'hui soumises à ce type de
pression concurrentielle. Il est essentiel que les pouvoirs politiques
européens réfléchissent effectivement à la bonne application des règles
économiques et non pas à leur détournement.
TRANSPOSITION DES DIRECTIVES EUROPÉENNES
« ASSURANCES » DANS LE CODE DE LA MUTUALITÉ
M. le président.
La parole est à M. Autain, auteur de la question n° 308, adressée à Mme le
ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. François Autain.
Ma question concerne l'avenir des mutuelles face aux directives européennes «
Assurances ».
En effet, en adoptant ces directives en 1992, l'Union européenne a
implicitement reconnu que les mutuelles régies par le code de la mutualité
devaient être considérées comme de banales compagnies d'assurances, ce qui
témoigne de sa profonde méconnaissance du fait mutualiste. Cette lacune me
semble particulièrement regrettable pour notre pays, car elle risque de
pénaliser un grand nombre de nos concitoyens usagers de ces mutuelles si, comme
on peut le redouter, le Gouvernement ne parvient pas à prendre en compte la
spécificité mutualiste lors de la transposition de ces directives dans notre
droit interne.
Le mouvement mutualiste dans son ensemble redoute cette échéance - même si,
par le passé, il a semblé en sous-estimer le danger - dans la mesure où cette
transposition pourrait remettre en cause ou mettre en difficulté un mode de
couverture sociale original auquel les Français sont particulièrement attachés.
En effet, ceux-ci ne comprendraient pas que la mutualité se voit privée de son
statut et des missions qui lui sont dévolues.
Par ailleurs, nous savons que le Gouvernement vient de demander à M. Michel
Rocard d'étudier ce problème et de présenter des propositions. Nous ne pouvons,
bien entendu, que nous réjouir de cette initiative, mais j'aimerais dès
maintenant obtenir de votre part, madame le secrétaire d'Etat, des informations
sur l'évolution de ce dossier, en particulier sur le calendrier. Quand
comptez-vous présenter au Parlement ce texte portant transposition ?
J'aimerais aussi connaître votre sentiment sur l'approche globale qu'il me
semble nécessaire d'avoir sur la question, autrement dit savoir si vous estimez
que ces directives sont compatibles avec le maintien du secteur mutualiste en
France.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat à la formation professionnelle.
Monsieur le sénateur,
vous avez attiré l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité
sur les organismes assureurs habilités à intervenir dans le domaine de la
protection sociale complémentaire.
Ces organismes ont souhaité, en 1992, que les règles posées par les directives
européennes relatives à l'assurance leur soient étendues lorsqu'ils effectuent
des opérations d'assurance dans le cadre de cette couverture sociale
complémentaire.
Les pouvoirs publics ont donc entrepris, en étroite concertation avec ces
organismes, un long et difficile travail de refonte du droit national. Ce sont
les lois du 4 janvier 1994 et du 8 août 1994 qui permettent de respecter les
délais de mise en oeuvre fixés par les directives pour les entreprises du code
des assurances et les institutions de prévoyance du code de la sécurité
sociale.
En ce qui concerne les mutuelles du code de la mutualité, le Gouvernement a
constaté, à son arrivée, en juin 1997, que la transposition n'avait pas été
faite et qu'il n'existait pas de projet conciliant le respect des règles
prudentielles édictées par les directives européennes et la préservation de la
spécificité du mouvement mutualiste.
Dans ses lettres du 19 novembre 1997 et du 11 mars 1998, le Gouvernement
français a donc fait des propositions, élaborées en concertation avec la
majorité du mouvement mutualiste, à la Commission européenne pour réaliser une
transposition conforme à ces exigences.
Ces propositions des autorités françaises ont été jugées insuffisantes par la
Commission européenne, qui a engagé, le 8 juillet 1998, une action en
manquement à l'encontre de la France.
Ce recours de la Commission devant la Cour de justice n'est pas la seule
procédure en cours : de nombreux tribunaux administratifs sont saisis
aujourd'hui de contestations d'agréments préfectoraux donnés à des oeuvres
sanitaires et sociales.
Monsieur le sénateur, personne ne doit souhaiter que les tribunaux décident de
l'avenir du code de la mutualité.
Il est donc nécessaire d'élaborer rapidement un projet de loi qui, à la fois,
satisfasse aux exigences communautaires de libre prestation de service et de
sécurité financière et intègre les principes qui fondent l'action mutualiste
dans les domaines de la santé, de la prévoyance et de la retraite afin
d'assurer la pérennité des mutuelles et de protéger efficacement les droits de
leurs membres.
Compte tenu de l'importance de ce dossier qui concerne un mouvement social
jouant un rôle majeur dans le système de santé français, le Gouvernement, vous
l'avez vous-même rappelé à l'instant, a décidé de confier à M. Michel Rocard
une mission de concertation et de propositions. Celle-ci devra aboutir à un
projet de loi qui devra recueillir un accord aussi large que possible.
Ce projet de loi devra s'inscrire plus largement dans le cadre d'une
modernisation du code de la mutualité qui donnera aux mutuelles les moyens de
faire face à la concurrence des autres organismes assureurs français et
européens, notamment en affirmant les valeurs fondamentales qui représentent le
coeur de leurs traditions - solidarité des adhérents, non exclusion des
risques, non sélection à l'entrée... - et en renforçant la protection de leurs
adhérents.
Monsieur le sénateur, je voudrais enfin vous dire que le Gouvernement est
extrêmement attentif au rôle important joué par les mutuelles dans la
modernisation de notre système de protection sociale et dans l'affirmation d'un
égal accès aux soins. Sachez que le Gouvernement saura en tenir compte dans le
cadre du projet de loi relatif à la couverture maladie universelle qui sera
déposé au Parlement avant la fin de l'année.
M. le président.
Compte tenu des contraintes horaires de Mme Voynet, j'invite nos collègues MM.
Jean Bizet et Roland Courtaud à respecter les temps de parole qui leur sont
impartis.
TAUX DE DIOXINE ET SANTÉ PUBLIQUE
M. le président.
La parole est à M. Bizet, auteur de la question n° 303, adressée à Mme le
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Jean Bizet.
Madame le ministre d'Etat, je me permets d'attirer votre attention sur les
informations relatives aux taux de dioxine observés dans les produits laitiers
ou la viande et leurs conséquences sur la santé publique.
J'avoue mon étonnement quant à la publication de teneurs en dioxine dans le
lait maternel de deux jeunes femmes du département de la Manche - 18,5
picogrammes par gramme de matière grasse pour l'une et 32,5 picogrammes par
gramme pour l'autre - alors qu'il n'existe, dans ce département, aucune usine
d'incinération !
Au discrédit porté sur les produits agricoles de base que sont le lait et la
viande, s'ajoute, une nouvelle fois, une série d'informations non vérifiées ne
faisant que troubler l'image de ce département qui a pourtant su depuis
longtemps conjuguer modernité et environnement.
Les conséquences de la présence de dioxine dans l'environnement sont loin de
donner lieu à des conclusions scientifiques unanimes.
L'Académie des sciences estimait ainsi, en 1994, qu'aucun élément connu ne
permettait de considérer que la dioxine constituait un risque majeur pour la
santé publique, le seul effet sur la santé humaine étant une chloracnée, une
dermatose gênante mais jamais mortelle.
Le comité de la prévention et de la précaution présidé par le professeur Alain
Grimfeld de l'hôpital Trousseau à Paris souligne quant à lui que l'estimation
de l'impact de l'exposition de la population française ne peut être, en l'état
actuel des connaissances, qu'un exemple d'école.
Enfin, le Conseil supérieur d'hygiène fait remarquer qu'une dose tolérable
d'un picogramme par kilogramme et par jour implique, en France, un risque
supplémentaire de l'ordre de 1 800 à 2 900 décès annuels par cancer.
Je m'interroge sur le manque de cohérence et de rigueur scientifique dont
témoignent ces diverses informations.
Je vous demande donc, madame le ministre, si le rôle du Gouvernement ne serait
pas de lever les inquiétudes des consommateurs en se fondant sur des analyses
probantes, et non probables. Ainsi, les agriculteurs ne seraient pas, une fois
de plus, pénalisés par une pollution dont ils ne sont aucunement
responsables.
M. le président.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Monsieur
le sénateur, nous connaissons encore mal les sources d'émission de dioxines et
la diffusion de ces polluants dans l'environnement. Ce travail est d'ailleurs
immense, puisqu'il existe plusieurs dizaines de dioxines différentes dont les
conséquences sur l'environnement et sur la santé humaine doivent être étudiées
de façon extrêmement fine et diversifiée.
Ainsi, nous avons la certitude qu'une de ces dioxines a un effet cancérigène
sur l'être humain, alors que d'autres ne semblent pas avoir d'effet du tout et
que d'autres encore pourraient avoir des effets sur le système immunitaire,
effets qui sont en cours d'expertise.
En 1997 et 1998, mon ministère a réalisé des mesures quant à l'émission des
incinérateurs d'ordures ménagères d'une capacité supérieure à six tonnes par
heure. Ce premier inventaire national a été rendu public une première fois en
avril 1998 et il est, depuis, actualisé et mis à la disposition du public.
Pour les rejets les plus importants, il a été demandé aux préfets de faire
réaliser par les exploitants des usines concernées, en application de la
réglementation relative aux installations classées pour la protection de
l'environnement, des mesures de dioxines dans les laits produits au voisinage,
le lait étant ici utilisé comme un indicateur puisque - vous le savez - les
dioxines se concentrent dans les graisses et donc plutôt dans le lait et la
viande.
L'approche était claire : il s'agissait d'avoir une idée à la fois des mesures
à l'émission et des conséquences dans les pratiques alimentaires, notamment.
Une analyse des autres sources industrielles est en cours depuis novembre
1997. Elle concerne pour l'essentiel des installations des secteurs de la
métallurgie, de la sidérurgie, de la papeterie et de la chimie.
Nous avons détecté des émissions très importantes de dioxines et je ne
saurais, monsieur le sénateur, partager votre analyse selon laquelle ces
émissions auraient des effets marginaux. Dans le Nord-Pas-de-Calais, par
exemple, une usine, en dix ans, en a émis des quantités comparables à celles
qui ont été constatées lors de l'accident industriel de Seveso. Même si les
émissions ont été étalées sur une très longue période, on ne peut pas dire que
leurs effets soient négligeables.
Quant à la présence de dioxines dans des lieux éloignés d'installations
actives, on peut aujourd'hui, à partir des travaux scientifiques et de
l'observation sur le terrain, émettre trois hypothèses de travail, par ailleurs
complémentaires : la rémanence de dioxines dans l'environnement, car ces
molécules sont facilement accumulables dans l'environnement, même leurs sources
une fois éteintes ; la présence de sources non identifiées et les sources
naturelles de dioxines, mises en évidence par certains travaux.
Enfin, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME,
fait réaliser par le réseau national de la santé publique une étude sur la
quantification des dioxines dans le lait maternel. Cette étude devrait
permettre une meilleure estimation du degré d'exposition de la population ainsi
qu'une meilleure connaissance de la part respective de l'alimentation et de
l'exposition naturelle, d'une part, et de l'exposition aux émissions des
sources fixes, d'autre part, dans les teneurs en dioxines observées.
La réglementation est complexe. Elle concerne à la fois les émissions et la
concentration dans les aliments, le lait, les viandes et, de façon plus
générale, les graisses.
Je partage votre analyse selon laquelle il serait déraisonnable de contribuer
au discrédit des produits agricoles alors que, comme les usagers et les
consommateurs, les agriculteurs sont les victimes des émissions de dioxine mais
non les responsables.
Ce qui est certain, c'est que les résultats des mesures de dioxines émises par
les incinérateurs montrent que la mise en conformité avec la réglementation en
vigueur, qui transpose en droit français deux directives européennes de 1989,
entraîne une réduction d'un facteur dix des rejets de dioxines, même si le
texte concerné, un arrêté de 1991, ne fixe pas de limites spécifiques pour ces
polluants.
Une action vigoureuse a été entreprise pour la mise en conformité des quinze
incinérateurs non conformes encore en fonctionnement.
Elle s'est déjà traduite par de multiples arrêtés de mise en demeure.
Plusieurs préfets, à l'expiration de ces délais, ont déjà enclenché les mesures
de consignation. Vous imaginez les réactions de certains élus qui considèrent
qu'un franc investi dans l'environnement est un franc gaspillé !...
La Commission européenne a engagé des travaux de révision des directives de
1989 relatives à l'incinération des déchets municipaux qui devraient notamment
aboutir à imposer une valeur limite à l'émission de 0,1 nanogramme par mètre
cube pour les dioxines. Dès février 1997, il a été demandé aux préfets de fixer
un tel objectif pour les nouvelles installations d'incinération d'ordures
ménagères.
J'ai rappelé à ces derniers qu'ils devaient saisir l'occasion des travaux de
mise en conformité avec l'arrêté de 1991 pour faire réaliser une mise aux
normes, pour les dioxines, calée sur cette recommandation. Seul le caractère
non encore réglementaire de cette mise aux normes des usines existantes
justifie l'instauration d'aides à ces travaux spécifiques. L'ADEME a ainsi
retenu le principe d'aides financières pouvant atteindre la moitié du coût des
investissements pour les exploitants d'installations existantes en conformité
avec les règles en vigueur qui prendraient l'initiative de travaux visant à
réduire les rejets de dioxines à 0,1 nanogramme par mètre cube.
M. Jean Bizet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet.
Je vous remercie, madame le ministre, de cette précision, notamment en ce qui
concerne la norme officielle de 0,1 nanogramme par mètre cube de vapeur. Je
reste malgré tout troublé par les informations divulguées par votre ministère
ces derniers mois, informations qui ont entraîné une suspicion à l'égard des
centres d'incinération d'ordures ménagères, suspicion qui a jeté le discrédit
sur ce type de traitement, favorisant par là-même, intrinsèquement, la mise en
valeur des centres d'enfouissement techniques.
A mon sens, vous avez porté un certain coup aux collectivités locales qui,
vous le savez, au travers des usines d'incinération d'ordures ménagères,
avaient la possibilité d'éviter le monopole de quelques entreprises nationales
ou multinationales, entreprises qui pouvaient maîtriser foncièrement un certain
nombre de terrains, cela beaucoup plus facilement hier qu'aujourd'hui.
Je souhaite donc rétablir la vérité.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Je demande
la parole.
M. le président.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Monsieur
le sénateur, vous quittez le terrain de la question que vous m'avez posée ! La
norme est en préparation au niveau européen et je n'ai pas souhaité exposer les
collectivités à des salves de modifications de la réglementation sur des
périodes limitées, ce qui induirait des coûts importants et une certaine
déstabilisation des politiques départementales de traitement des ordures
ménagères.
Cela dit, nous avons fait un effort de transparence à l'égard du public,
effort que s'est d'ailleurs traduit par une attitude extrêmement mesurée de
notre part. En effet, nous n'avons fermé aucun incinérateur sur la base des
émissions de dioxine. Toutefois, nous avons été amenés, parce que la
réglementation le prévoit en ce qui concerne les concentrations de dioxine dans
les graisses, à procéder au retrait de quelques laits commercialisés, mais les
exemples se comptent sur les doigts de la main et c'est loin d'être un
phénomène massif.
Nous n'avons donc nullement mis la pression, si ce n'est sur le respect de
l'arrêté de 1991, qui donnait cinq ans aux collectivités pour se mettre aux
normes. Certaines collectivités ne l'ont pas fait. Nous avons souhaité qu'elles
le fassent ; c'était bien normal. Mais aucun discrédit particulier n'a été jeté
sur l'incinération à l'occasion de cet événement.
Simplement, la transparence de l'information donnée au public me paraît être
la règle, pour ce Gouvernement comme pour les gouvernements qui l'ont précédé,
et je m'en réjouis.
AIDES AUX AGRICULTEURS SINISTRÉS DU MIDI
M. le président.
La parole est à M. Courteau, auteur de la question n° 321, adressée à M. le
ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Roland Courteau.
Madame la ministre, ici même, en avril dernier, j'avais attiré l'attention du
Gouvernement sur cette véritable catastrophe économique et sociale qui venait
de s'abattre sur le département de l'Aude en particulier, avec les terribles
gelées des vignobles et arbres fruitiers. J'avais évoqué, avec mon collègue
Raymond Courrière, l'importance du désastre, le traumatisme violent qui s'était
ensuivi, le désarroi et l'incertitude des lendemains pour les populations
concernées, face à un cataclysme hors normes.
Aujourd'hui, la récolte est connue et la catastrophe économique tant redoutée
est, hélas ! confirmée. C'est pourquoi nous en appelons, madame la ministre, à
la solidarité nationale pour, ni plus ni moins, sauvegarder l'outil de
production des viticulteurs et pour soutenir les populations agricoles
concernées durant les prochains mois qui s'annoncent très difficiles pour
elles. D'où notre demande pressante d'aides multiples qui devront aller au-delà
des dispositifs « calamité » traditionnels.
Ainsi, nous demandons des majorations importantes des taux des aides directes
« calamité » dès lors que l'exploitation est sinistrée au-delà d'un certain
seuil.
De même, il faut absolument que les annuités de prêts contractés auprès des
organismes bancaires par les sinistrés puissent être reportées en fin de
prêt.
S'agissant de la Mutualité sociale agricole, il est impératif d'envisager des
prises en charge des cotisations associées à des reports, selon l'importance du
sinistre.
Les efforts de solidarité de tous, et de l'Etat en particulier, doivent être à
la hauteur d'une situation elle-même hors normes et particulièrement difficile
pour les jeunes agriculteurs et les plurisinistrés dont les exploitations sont
menacées.
Dans ces cas, des aides spécifiques sont indispensables pour les cent
cinquante jeunes agriculteurs concernés et les trois cents exploitations
plurisinistrées. De même, l'aide à l'emploi est une absolue nécessité tant pour
les salariés eux-mêmes que pour préserver la pérennité des exploitations.
Gardons-nous également d'oublier l'ensemble des exploitations sinistrées qui
ne figurent pas dans ces dernières catégories, mais qui vont se retrouver dans
une situation financière difficile et qui doivent donc pouvoir bénéficier des
mesures « Agri-Diff ».
Enfin, s'impose la prise en compte des situations de l'appareil de
transformation coopératif et particulier.
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche, au cours des mois précédents,
nous a réaffirmé que le Gouvernement était déterminé non seulement à trouver
des réponses rapides et efficaces, mais aussi, par-delà la conjoncture, à
réfléchir à des dispositions permettant de couvrir le risque gel.
Aujourd'hui, madame la ministre, nous vous redisons l'impérieuse nécessité
qu'il y a à agir sans délai. Il n'est plus possible d'attendre.
M. le président.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Dominique Voynet,
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Monsieur
le sénateur, les vendanges, en voie d'achèvement, ont, hélas ! confirmé
l'importance des pertes de récoltes dans plusieurs zones de production du
département de l'Aude et dans quelques bassins de production limitrophes.
L'importance de ce sinistre, dont attesteront prochainement les déclarations
officielles de récolte, justifie, comme M. Louis Le Pensec s'y est engagé - je
précise que ce dernier participe aujourd'hui au Conseil agriculture à Bruxelles
- une attention toute particulière vis-à-vis des vignerons concernés.
C'est la raison pour laquelle, pour la première fois dans une situation de ce
type, la Commission nationale des calamités a, dès le 1er octobre, reconnu ce
sinistre. Les commissions d'enquêtes départementales vont pouvoir préparer sans
délai les dossiers individuels, que le ministre souhaite voir traités dès la
réunion de décembre par la commission des calamités.
Il sera ainsi possible, comme convenu, de procéder au versement des indemnités
compensatoires à partir de février 1999, c'est-à-dire au moment où, en
l'absence de sinistre, les vignerons auraient commencé à encaisser le produit
de la vente de leurs vendanges.
L'ampleur des pertes justifie pour certains producteurs, notamment pour les
jeunes ou les vignerons qui ont récemment investi, un dispositif
complémentaire.
Ce matin même, une réunion de travail a été organisée avec les représentants
de la profession et les élus du département. Un dispositif exceptionnel a été
envisagé, dont les modalités précises seront très prochainement communiquées
aux organisations professionnelles.
Parmi ces mesures figure notamment un soutien aux coopératives dont le niveau
d'approvisionnement a été significativement amputé.
Ainsi, par ce témoignage de solidarité, le ministre souhaite montrer aux
viticulteurs qu'au-delà de ces difficultés conjoncturelles ils ont un avenir
dans cette filière.
M. Roland Courteau.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau.
Si nous sollicitons en urgence des réponses efficaces, c'est bien parce que
des hommes et des femmes sont plongés dans le désarroi et que, dans bien des
cas, je l'ai dit, c'est la survie des exploitations qui est remise en cause.
Il s'agit également de conforter, avant qu'ils ne baissent les bras de
découragement, ceux-là mêmes qui sont à l'origine du renouveau de la
viticulture méridionale et qui ont beaucoup investi dans les vignobles, dans
les caves, pour faire de ce département de l'Aude le nouveau monde du vin. Il
nous faut les aider à franchir ce cap difficile.
Enfin, il y a le terrible impact économique, particulièrement préjudiciable
pour l'ensemble d'un département qui a perdu 1,5 million d'hectolitres de vin.
Cela se traduit par une perte à la production supérieure à 600 millions de
francs, perte qui peut être chiffrée à hauteur de 1 milliard de francs si l'on
prend en compte l'ensemble de la filière.
On mesurera mieux l'impact économique d'un tel cataclysme lorsqu'on saura que
la production agricole finale, première économie du département de l'Aude,
s'élève à 3 milliards de francs.
Il faut le savoir, 3 500 viticulteurs sont frappés, dont 150 jeunes
agriculteurs ; 300 sont plurisinistrés et 500 viticulteurs sont en situation
très délicate. J'ai là le dossier ; il est cruellement significatif.
Madame la ministre, soyez-en convaincue et veuillez bien passer le message à
vos collègues du Gouvernement : si nécessaire, nous reviendrons sur ce dossier
autant de fois qu'il le faudra, tant ici au Sénat qu'au ministère de
l'agriculture.
SUPPRESSION DES COMMISSARIATS
DE BAILLEUL ET HAZEBROUCK
M. le président.
La parole est à M. Foy, auteur de la question n° 315, adressée à M. le
ministre de l'intérieur.
M. Alfred Foy.
Monsieur le président, le fait que je sois un « Nordiste » et la plus
élémentaire des courtoisies me poussent à vous présenter mes plus vives
félicitations pour votre élection à la vice-présidence du Sénat et à vous dire
que j'ai grand plaisir à vous voir présider aujourd'hui cette séance.
M. le président.
Je vous en remercie.
M. Alain Richard,
ministre de la défense.
Félicitations méritées !
M. Alfred Foy.
Monsieur le ministre, l'annonce, fin septembre, par le Gouvernement du recours
à une consultation plus approfondie avant d'engager toute modification de la
carte sécuritaire n'enlève en rien à l'intérêt de ma question, qui concerne
l'éventualité de la suppression des commissariats dans le Nord, plus
particulièrement à Bailleul et Hazebrouck.
Le rapport de MM. Hyest et Carraz, sur lequel s'appuie la réforme du transfert
géographique de compétences entre la police et la gendarmerie, préconise une
redistribution équilibrée des forces de sécurité en fonction des besoins du
territoire.
Il convient cependant, avant de mettre en oeuvre une réforme d'une telle
ampleur, de bien tenir compte des spécificités locales. Permettez-moi, à cet
effet, de vous les rappeler.
Située, d'une part, à égale distance de la métropole lilloise et de
l'agglomération dunkerquoise, et, de l'autre, à proximité de la Belgique, la
Flandre intérieure est un lieu de passage privilégié pour les délinquants.
La commune la plus importante de ce secteur, Hazebrouck, constitue un noeud
ferroviaire très important par où plus de 6 000 personnes transitent chaque
jour. Hazebrouck comme Bailleul abritent de nombreux établissements scolaires -
Hazebrouck compte plus de 10 000 élèves scolarisés. Il convient donc d'assurer
de façon optimale la sécurité de toutes ces personnes.
Par ailleurs, le phénomène de la toxicomanie, qui frappe partout, tend à
croître plus rapidement dans notre zone frontalière. Les statistiques
démontrent que l'augmentation des délits enregistrés depuis plusieurs années à
Hazebrouck et à Bailleul est liée aux rackets et aux vols, sources de
financement pour l'achat de stupéfiants.
En 1994, j'avais déjà évoqué les problèmes de maintien de la sécurité dans la
Flandre intérieure auprès du ministre de la défense de l'époque.
Mes interventions successives ont permis d'obtenir, par la suite, qu'un
peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie soit affecté aux
secteurs les plus exposés dépendants de la compagnie de gendarmerie
d'Hazebrouck. Son intense activité est notoirement reconnue. Mais, au regard de
la hausse rapide de la délinquance - 31 % en 1996 par rapport à 1995 à
Hazebrouck, les besoins de sécurité se sont encore accrus.
C'est la raison pour laquelle, en avril 1998, je suis de nouveau intervenu au
Sénat - je m'adressais cette fois au ministre de l'intérieur en personne - pour
dénoncer la surcharge de travail imposée aux policiers d'Hazebrouck, suite à
l'amplification des délits.
Le ratio police-population s'établissait à un fonctionnaire pour 571
habitants. Là encore, nous aboutissions à un quota au-dessous de la moyenne. On
avait bien observé une augmentation des policiers dans le Nord durant les
dernières années, comme me l'a expliqué M. le ministre de l'intérieur, mais, en
réalité, au seul profit des agglomérations de Lille, Roubaix et Tourcoing. Et
encore s'agissait-il, pour la majorité d'entre eux, d'adjoints de sécurité.
Par ailleurs, quarante policiers officient actuellement à Hazebrouck et
trente-trois à Bailleul. Ils devraient être remplacés par trente-quatre
gendarmes, selon mes calculs qui sont fondés sur l'analyse de MM. Hyest et
Carraz. D'où viendront ces hommes ? Il est probable qu'ils viendront, dans un
premier temps, des gendarmeries supprimées. Mais ne faut-il pas craindre, par
la suite, qu'ils ne soient recrutés dans les brigades des cantons proches,
notamment dans celles qui seraient appelées à être fermées, dans la mesure où
le rapport de MM. Hyest et Carraz recommande la présence d'une brigade, et
d'une seule, par canton ?
Par ailleurs, le ratio gendarme-population - un gendarme pour 1000 habitants -
qui s'appliquerait en cas de réforme serait tout à fait insuffisant.
En définitive, ne serait-il pas préférable de maintenir ces deux commissariats
? Les services de police et de gendarmerie accomplissent, avec les moyens qui
sont les leurs, un travail remarquable et apprécié en Flandre intérieure. La
mise en oeuvre d'une telle réforme ne risque-t-elle pas de susciter des
conflits entre les services, police et gendarmerie, qui ont toujours su
coexister et travailler efficacement, dans l'intérêt de la sécurité des
habitants de la Flandre intérieure ? Le service de l'Etat et celui de l'intérêt
général doivent exclure toute polémique.
Enfin, permettez-moi de conclure en disant que, depuis plusieurs années, sous
couvert de principes d'aménagement du territoire, l'Etat tente de supprimer
certains services publics en Flandre intérieure. Hier, il s'agissait de
remettre en cause l'existence des bureaux de La Poste dans certaines communes.
Aujourd'hui, il s'agit de supprimer des commissariats de police. Que nous
réserve l'avenir ? La suppression du centre des impôts d'Hazebrouck ? La
disparition du tribunal de grande instance situé à Hazebrouck, sur lequel des
menaces sérieuses pèsent depuis plusieurs années ?
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur Foy, car vous avez épuisé votre temps de
parole.
M. Alfred Foy.
Je veux aussi faire référence à la non-éligibilité de notre zone géographique
à la prime d'aménagement du territoire et rappeler que les habitants de la
Flandre intérieure attendent depuis plusieurs années la concrétisation de la RN
42. Ils ne méritent pas que les aspects négatifs de la politique d'aménagement
du territoire !
M. le président.
Veuillez conclure, je vous prie.
M. Alfred Foy.
Ils ont droit, eux aussi, aux services publics de proximité et, bien entendu,
à la sécurité !
M. le président.
Monsieur Foy, permettez-moi de vous faire remarquer que vous avez utilisé cinq
minutes et vingt secondes.
M. Alfred Foy.
Je serai très bref, par ailleurs, monsieur le président.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Monsieur Foy, tout citoyen a droit à la sécurité et ce, quel que soit l'endroit
où il se trouve sur le territoire national.
Vous avez évoqué le rapport parlementaire qui a été rendu par MM. Hyest et
Carraz. A la lecture de ce document, il apparaît que nos concitoyens ne sont
pas égaux devant ce droit à la sécurité, notamment en raison de la disparité
dans la répartition des personnels et des moyens dont disposent les forces de
sécurité ; police et gendarmerie.
Parmi les propositions contenues figure une plus juste adéquation des moyens
des deux forces en tenant compte des évolutions de la démographie et de la
délinquance. C'est ainsi que la réorganisation territoriale des zones de police
et de gendarmerie, qui paraît relever d'un devoir de justice pour garantir, sur
le plan social, l'égalité des citoyens, constitue une mesure de solidarité
nationale.
Vous savez que le Gouvernement a décidé un renforcement des personnels de la
police nationale dans les zones les plus urbanisées que la délinquance -
notamment la délinquance de voie publique - affecte particulièrement. Il s'agit
d'une disposition qui figurait déjà dans la loi d'orientation et de
programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995 et dans les décrets
d'application du 19 septembre 1996.
Comment avons-nous procédé ? Dans un premier temps, des hypothèses de
transfert ont été élaborées à l'issue de la réunion du conseil de sécurité
intérieure. Elles ont ensuite été transmises aux préfets qui ont été chargés de
mener la concertation avec les élus et les agents publics concernés. Ces
hypothèses ont provoqué des réactions : la vôtre, certes, mais aussi celles
d'élus d'autres parties du territoire national.
C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité confier à M. Fougier, conseiller
d'Etat et ancien préfet de police de Paris, une mission d'expertise et
d'évaluation qui l'amène à se rendre dans toutes les régions concernées. C'est
dans ce cadre qu'il est venu à Lille le 14 octobre dernier, où vous avez
certainement eu l'occasion de le rencontrer. Il doit donc nous remettre des
propositions.
Il revient à M. Fougier de reprendre le dossier en tenant compte des
situations de terrain, notamment de celles qui existent dans les deux
circonscriptions de police de Hazebrouck et de Bailleul que vous avez évoquées.
Nous aurons connaissance des résultats de ses investigations avant la fin de
l'année.
Effectivement désireux de conserver un niveau de sécurité identique pour tous,
nous ne voulons pas entrer dans une querelle dépourvue de sens sur les moyens
respectifs de la police et de la gendarmerie ; je le dis en présence de mon
collègue, M. Alain Richard. Il apparaît en effet que nos concitoyens, qui se
félicitent de l'action de la gendarmerie dans les zones de gendarmerie, saluent
également le travail des policiers dans les zones de police.
Il s'agit de mieux adapter le dispositif des forces de sécurité intérieure aux
exigences, en particulier de coordination, en tenant compte du besoin de
renforcement des effectifs dans les zones en urbanisation.
Nous attendons donc un ensemble de propositions de M. Fougier, qui intégreront
par ailleurs les données relatives à la situation personnelle des agents
concernés.
Si les élus des petites villes ou des zones rurales peuvent légitimement
s'inquiéter de la fermeture d'un certain nombre de services publics, je tiens à
préciser que, pour ce qui est des moyens de sécurité, il s'agit non pas de
fermetures mais de transferts éventuels - j'insiste sur le terme « éventuels ».
Sachez que, si un commissariat de police, par exemple, devait être transféré,
la gendarmerie nationale saurait alors adapter son dispositif aux réalités
locales.
La réflexion menée par M. le ministre de la défense relève donc du même
type.
Aucune décision définitive n'est prise : pas plus pour Hazebrouck que pour
Bailleul ou pour d'autres communes. Nous nous contentons d'étudier la
situation. Comprenez bien que la volonté du Gouvernement est de faire en sorte
que la sécurité soit garantie partout et pour tous nos concitoyens. Il s'agit
simplement et exclusivement en l'espèce de s'interroger sur l'emploi des forces
et des moyens disponibles.
M. Alfred Foy.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Foy.
M. Alfred Foy.
Pour faire plaisir à M. le président, je serai très bref, d'autant que j'ai
d'ores et déjà dépassé mon temps de parole.
En tant qu'élu de la Flandre intérieure, je suis très sensible aux problèmes
qui se posent dans cette région. Après avoir été alertés par des rumeurs
persistantes relatives notamment à la suppression du tribunal de Hazebrouck ou
à la fermeture de certains bureaux de poste dans de petites communes, nous
sommes particulièrement attentifs à tout ce qui concerne la sécurité. C'est la
raison pour laquelle, lorsque j'avais déposé cette question voilà quelques
semaines, et alors que j'ignorais encore la visite de M. le préfet Fougier à
Lille, j'éprouvais une certaine crainte.
Vos propos me rassurent puisque ce que vous voulez, monsieur le ministre,
c'est que la sécurité soit finalement respectée partout.
Vous avez également dit que, le moment venu, les moyens de sécurité ont été
renforcés dans les grandes villes. Or nous avons assisté dans notre région à
l'envahissement des zones rurales par des délinquants venus des agglomérations
importantes. C'est la raison pour laquelle j'ai cru bon de citer tout à l'heure
certains chiffres révélateurs d'une augmentation de la délinquance.
DÉVELOPPEMENT ET PÉRENNITÉ
DU PROGRAMME RAFALE
M. le président.
La parole est à M. Valade, auteur de la question n° 327, adressée à M. le
ministre de la défense.
M. Jacques Valade.
Monsieur le président, si je n'ai pas les mêmes raisons géographiques que
notre collègue pour saluer votre accession à la vice-présidence du Sénat, c'est
au nom de la confraternité entre vice-présidents que je tiens à vous exprimer
publiquement mes félicitations.
Après avoir connu voilà quelque temps une proximité géographique - celle de
nos bureaux - nous allons maintenant en vivre une autre ; celle de la
vice-présidence.
Monsieur le ministre, sachez tout d'abord que j'apprécie votre présence dans
cet hémicycle.
Je veux attirer ensuite votre attention sur le développement et la pérennité
du programme Rafale, sujet qui a d'ores et déjà suscité de nombreuses
questions.
Un fait est bien connu : conçu à partir des avant-projets d'avions futurs
étudiés chez Dassault depuis 1978, le programme Rafale a été officiellement
lancé il y a dix ans, après l'envol au démonstrateur Rafale A deux ans
auparavant. Techniquement, la réussite de ces avions a été totale. Elle a
démontré de manière éclatante que les technologies nouvelles et les concepts
novateurs de pilotage et de navigation pouvaient être maîtrisés avec une
efficacité et une dynamique que nous envient nos concurrents et sans que soit
sacrifiée la maîtrise des coûts de développement.
Ces efforts et ces résultats n'ont de sens que si un programme de production
est lancé. Ils n'ont de sens pour notre pays qu'éventuellement rapportés à
l'exportation. Or, de révision budgétaire en révision budgétaire, quels que
soient les gouvernements, ce programme a été largement étalé dans le temps.
Alors que le programme initial de 1990 prévoyait la sortie de trente-six
Rafale avant l'an 2000, le programme réactualisé ne prévoit plus aujourd'hui
que deux appareils d'ici à l'an 2000 sur un total de onze avions à produire
d'ici à la fin 2003.
Pour des raisons budgétaires, les phases de développement et
d'industrialisation ont également subi d'importants retards fortement
préjudiciables à notre avance technologique vis-à-vis d'une concurrence qui
n'est pas restée inactive.
Pour les élus du département de la Gironde et de la région Aquitaine où se
trouvent notamment les usines productrices, l'absence de définition et de
financement du standard air-sol, lequel répond aux besoins de l'armée de l'air
et doit servir de base technique de référence pour la version export que
Dassault-Aviation veut développer, est particulièrement préoccupante.
Il est urgent de lancer ce développement si nous voulons être crédibles sur le
marché de l'exportation qui, commençant à douter de la poursuite du programme
Rafale, conforte en fait la position de nos concurrents. Comment vendre des
appareils français à l'étranger, alors que l'armée française ne commande pas
une flotte d'avions satisfaisante ?
Je comprends dans une certaine mesure que vous n'ayez pas voulu répondre aux
questions suscitées par une information publiée dans
Les Echos
. Selon
cette parution, le Gouvernement auquel vous appartenez a décidé de passer
commande de vingt-huit avions de combats Rafale pour 103 millions de francs,
commande assortie d'une option sur vingt autres appareils pour 5,5 millions de
francs.
Toujours selon
Les Echos,
sur les vingt-huit avions qui seraient
commandés, vingt et un le seraient dans la version air et sept dans la version
marine.
Monsieur le ministre, je n'avais pas connaissance de cette information lorsque
j'ai rédigé cette question. Le fait d'en disposer aujourd'hui renforce mes
interrogations : d'une part, quelles sont les intentions du Gouvernement en
dehors des deux avions qui seront livrés en 1999 ? D'autre part, quelles sont
ses intentions par rapport, tant aux commandes françaises qu'au lancement de
ces séries qui nous sont indispensables pour assurer l'exportation de nos
avions dans les pays qui en sont fortement demandeurs ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard,
ministre de la défense.
Monsieur le président, après m'être joint aux
félicitations amicales qui vous ont été adressées pour votre élection au poste
de vice-président, je voudrais remercier M. Valade de sa question qui nous
permet effectivement de faire le point.
Elle repose sur son excellente connaissance des grands dossiers technologiques
et témoigne bien évidemment de sa fonction de représentant vigilant de la
Gironde. Il n'ignore cependant pas qu'il existe de grands établissements
Dassault dans le Val-d'Oise, ce qui contribue à expliquer la présence de mon
ancien collègue et ami M. Bernard Angels, qui m'a remplacé sur ces travées.
Comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, le programme Rafale constitue
un enjeu important pour notre industrie et pour notre défense. Il est au centre
des futures capacités opérationnelles de l'armée de l'air, d'une part, et de
l'aéronavale, d'autre part. Par ailleurs, en matière industrielle, il
représente l'un des points d'appui de notre développement à venir en ce qui
concerne tant les techniques d'aéronautique militaire que l'électronique de
défense.
A la différence des divers reports que vous avez rappelés pour les déplorer,
la revue des programmes engagée par mon ministère à la suite, il est vrai, de
coupes budgétaires que nous avions dû consentir l'été dernier pour le budget de
1998, nous a amenés à mettre en cohérence les objectifs opérationnels de la loi
de programmation et nos capacités budgétaires.
Avec l'assentiment du chef de l'Etat, le Premier ministre a annoncé, au début
du mois d'avril dernier, un certain nombre de décisions destinées à assurer la
reprise de la continuité de la loi de programmation militaire : il s'agit
d'organiser 20 milliards de francs d'économies sur les 340 milliards de francs
environ de dépenses programmées dans cette loi. Cette dernière inclut, de
surcroît, 20 milliards de francs supplémentaires d'économies au-delà du terme
de 2002.
Dans cet objectif de clarification et de stabilisation, les décisions du
Gouvernement reprécisent les perspectives du programme Rafale.
Nous avons tout d'abord choisi de poursuivre le développement du programme
Rafale dans ses versions air-air et air-sol. J'ai donc décidé, le 23 juillet
dernier, de relancer les travaux de développement du standard dit F 2 qui
correspond à la version que nous voulons mettre en service en 2004 auprès de
l'aéronavale comme auprès de l'armée de l'air ; c'est une version air-sol qui
sera alors la plus moderne.
La Délégation générale pour l'armement a reçu au début du mois d'août des
instructions pour mettre au point ce contrat de développement avant la fin de
l'année 1998 et pour le notifier aux principaux industriels participant au
programme Rafale - Dassault n'est que le chef de file - que sont Dassault,
Matra Bae Dynamics et Thomson.
Prise à l'issue de la revue des programmes, l'autre décision, qui concerne la
commande des appareils de série, est maintenant en cours d'application. Cela
vous explique la distance que j'ai prise vis-à-vis de l'annonce faite dans
Les Echos
au début de septembre.
J'ai rappelé à cette occasion qu'un journaliste avait publié la mort de Victor
Hugo en 1877 et ne l'avait jamais démentie, ce qui, quand Victor Hugo est
effectivement mort - cela arrive à tout le monde - lui a permis de titrer : «
Nous avons été les premiers à annoncer le décès du grand poète ».
Les
Echos
ont fait un peu de même ! Il m'était impossible de démentir puisque
nous allons effectivement souscrire ce contrat. Toutefois, la date qui était
annoncée n'était pas la bonne.
Au cours de mon audition par la commission des affaires étrangères et de la
défense de la Haute Assemblée qui a eu lieu au début du mois dernier, j'ai
précisé que nous avions bien l'intention de passer une commande globale et que
le chiffre de 48 appareils correspondait à notre objectif pour cette première
commande globale. Cette dernière sera passée dès que les modalités techniques
et financières auront été acquises et arrêtées à l'issue des discussions entre
l'administration et les industriels. Nous sommes en bonne voie pour y parvenir.
La réunion à laquelle je vais participer tout à l'heure avec mon collègue M.
Dominique Strauss-Kahn nous aidera à progresser encore vers la mise au point de
cette commande.
Ces deux décisions vont donc permettre, dès 2004 - ce n'est pas demain, mais
tel est le rythme lorsque ces grands programmes ne subissent pas de retard -
d'équiper l'aéronavale et l'armée de l'air avec des appareils qui seront les
plus modernes en service : ils pourront effectuer des missions aussi bien de
défense aérienne que d'attaque au sol. L'un des points forts du programme
Rafale est sa très grande polyvalence. Nous pensons ainsi disposer d'un premier
escadron complet de l'armée de l'air en 2005. L'officialisation de cette
commande, que je crois maintenant proche, donnera en effet aux industriels de
meilleures opportunités pour défendre ce programme à l'exportation, en
s'appuyant, par ailleurs, sur ses très grandes qualités techniques et
opérationnelles. Nous nous situons dans la phase de redémarrage effectif du
programme Rafale qui, c'est vrai, a nécessité une véritable « reconstruction »
à la suite des décisions d'étalement survenues en 1996 et qui lui ont porté
tort.
M. Jacques Valade.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Valade.
M. Jacques Valade.
Je remercie M. le ministre des informations rassurantes qu'il nous a données.
Nous souhaitons simplement que ses propos se confirment en ce qui concerne tant
l'équipement de notre armée de l'air et de l'aéronavale française que les
capacités d'exportation que ce marché représente. Il serait vain, je le répète,
d'essayer de vendre des avions alors que notre pays qui conçoit et fabrique ces
avions ne les commande pas. Cette reprise du programme air-sol et des commandes
du Gouvernement français à Dassault nous satisfait pleinement.
M. le président.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons
interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à seize heures
quinze, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)
PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET
M. le président. La séance est reprise.
4
CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
M. le président.
La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des
prochaines séances du Sénat.
A. -
Mercredi 21 octobre 1998,
à quinze heures et, éventuellement, le
soir :
1° Désignation des membres, autres que les membres de droit :
- de la délégation du Sénat à l'Office parlementaire d'évaluation de la
législation ;
- de la délégation du Sénat à l'Office parlementaire d'évaluation des
politiques publiques.
Après les désignations par les commissions de leurs représentants, les
candidatures présentées par les groupes doivent être remises au service des
commissions au plus tard le mardi 20 octobre à dix-sept heures.
Ordre du jour prioritaire
2° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif au mode d'élection des conseillers régionaux et des
conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux
(n° 524, 1997-1998) ;
3° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à la création
d'un office des produits de la mer et de l'aquaculture et étendant à la
collectivité territoriale de Mayotte les offices d'intervention prévus au livre
VI du code rural (n° 12, 1998-1999).
B. -
Jeudi 22 octobre 1998 :
Ordre du jour établi en application
de l'article 48, troisième alinéa, de la Constitution
A dix heures trente :
Conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de
loi de M. Pierre Laffitte permettant à des fonctionnaires de participer à la
création d'entreprises innovantes (n° 505, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au mercredi 21 octobre 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ces conclusions.
C. -
Mardi 27 octobre 1998 :
A dix heures trente :
1° Treize questions orales sans débat :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- N° 270 de M. Franck Sérusclat à Mme le ministre de l'emploi et de la
solidarité (application de l'article 62 du code de la famille et de l'aide
sociale) ;
- N° 298 de M. Jean Pépin à M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement (nuisances sonores causées par le TGV Paris-Lyon) ;
- N° 299 de M. Jean Boyer à Mme le ministre de la culture et de la
communication (conditions d'organisation des spectacles faisant appel à des
artistes étrangers) ;
- N° 304 de M. Marcel Deneux à M. le ministre de l'intérieur (stockage et
destruction des engins résiduels de guerre) ;
- N° 306 de M. Philippe Richert à Mme le ministre de l'aménagement du
territoire et de l'environnement (contrôle des forages individuels) ;
- N° 307 de Mme Marie-Claude Beaudeau à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (équipements routiers en Seine-Saint-Denis et en
Val-d'Oise) ;
- N° 310 de M. Jean-Paul Delevoye transmise à M. le ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation (publication du
décret relatif à l'annualisation du temps de travail dans la fonction publique
territoriale) ;
- N° 313 de M. Josselin de Rohan à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (TGV Bretagne-Pays de Loire) ;
- N° 316 de M. Jean-Pierre Raffarin à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (financement des infrastructures routières et
autoroutières) ;
- N° 322 de M. Marcel Bony à M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement (aménagement de la RN 89) ;
- N° 323 de Mme Nicole Borvo à M. le secrétaire d'Etat à la santé (avenir du
service d'oncologie pédiatrique de l'hôpital Robert-Debré) ;
- N° 324 de M. Guy Cabanel à Mme le ministre de la culture et de la
communication (situation dans les services d'archives départementales) ;
- N° 328 de M. Jacques Valade à Mme le ministre de l'aménagement du territoire
et de l'environnement (nécessité de régularisation de la prolifération
anarchique des relais de téléphonie mobile) ;
A seize heures :
2° Scrutins pour l'élection de douze juges titulaires et de six juges
suppléants de la Haute Cour de justice ;
3° Scrutin pour l'élection de six juges titulaires de la Cour de justice de la
République et de leurs six suppléants ;
Les candidatures à la Haute Cour de justice et à la Cour de justice de la
République devront être remises au service de la séance avant le lundi 26
octobre 1998, à dix-sept heures ; ces scrutins se dérouleront simultanément
dans la salle des conférences ; les juges titulaires et les juges suppléants
élus seront appelés, après le scrutin, à prêter le serment prévu par la loi
organique.
Ordre du jour prioritaire
4° Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la
limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs
conditions d'exercice (n° 463, 1997-1998) ;
5° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la limitation du
cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs conditions d'exercice
(n° 464, 1997-1998) ;
Pour ces deux projets de loi, la conférence des présidents a :
- fixé au lundi 26 octobre, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt
des amendements ;
- décidé qu'il serait procédé à une discussion générale commune ;
- fixé à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale commune, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur
la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant
dix-sept heures, le lundi 26 octobre.
D. -
Mercredi 28 octobre 1998
:
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures :
Suite de l'ordre du jour de la veille.
E. -
Jeudi 29 octobre 1998 :
A neuf heures trente :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite de l'ordre du jour de la veille ;
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs des questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures ;
Ordre du jour prioritaire
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la
ratification du sixième protocole additionnel à l'Accord général sur les
privilèges et immunités du Conseil de l'Europe (n° 9, 1998-1999) ;
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification
de l'accord européen concernant les personnes participant aux procédures devant
la Cour européenne des droits de l'homme (n° 10, 1998-1999) ;
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient
l'objet d'une discussion générale commune.
5° Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin ;
6° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement
définitif du budget de 1995 (n° 527, 1997-1998) ;
La conférence des président a fixé au mercredi 28 octobre, à dix-sept heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
7° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement
définitif du budget de 1996 (n° 528, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au mercredi 28 octobre, à dix-sept heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
Par ailleurs, la conférence des présidents a décidé que ces deux projets de
loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.
F. -
Mardi 3 novembre 1998 :
Ordre du jour établi en application
de l'article 48, troisième alinéa, de la Constitution
A seize heures et, éventuellement, le soir :
Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la décentralisation.
La conférence des présidents a fixé :
- à dix minutes le temps réservé respectivement au président de la commission
des finances et au président de la commission des lois ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant
dix-sept heures, le lundi 2 novembre 1998.
G. -
Mercredi 4 novembre 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures :
1° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant extension de
la qualification d'officier de police judiciaire au corps de maîtrise et
d'application de la police nationale (n° 532, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au mardi 3 novembre 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'accès au droit
et à la résolution amiable des conflits (n° 530, 1997-1998) ;
La conférence des président a fixé :
- au mardi 3 novembre, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe ;
- l'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et
les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant
dix-sept heures, le mardi 3 novembre.
H. -
Jeudi 5 novembre 1998 :
A neuf heures trente :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite de l'ordre du jour de la veille ;
A quinze heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures.
Ordre du jour prioritaire
3° Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin.
I. -
Mardi 10 novembre 1998 :
A neuf heures trente :
Ordre du jour prioritaire
1° Projet de loi relatif à l'organisation de certains services au transport
aérien (n° 7, 1998-1999) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 9 novembre 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
2° Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par
l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux animaux dangereux et
errants et à la protection des animaux (n° 509, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 9 novembre 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
A seize heures quinze :
3° Questions orales sans débat.
J. -
Jeudi 12 novembre 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A neuf heures trente :
1° Sous réserve de son adoption par le conseil des ministres, projet de loi
portant modernisation des emplois des fonds de la participation des employeurs
à l'effort de construction ;
La conférence des présidents a fixé au mardi 10 novembre 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
2° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de la République algérienne
démocratique et populaire sur l'encouragement et la protection réciproques des
investissements (ensemble un échange de lettres interprétatif) (n° 395,
1996-1997) ;
3° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord de partenariat
économique, de coordination politique et de coopération entre la Communauté
européenne et ses Etats membres, d'une part, et les Etats-Unis du Mexique,
d'autre part (n° 3, 1998-1999) ;
4° Projet de loi autorisant la ratification d'une convention internationale
pour la répression des attentats terroristes à l'explosif (n° 4, 1998-1999)
;
5° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de la République d'Azerbaïdjan sur
la liberté de circulation (n° 599, 1997-1998) ;
6° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide
judiciaire en matière civile entre le Gouvernement de la République française
et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil (n° 204, 1997-1998)
;
7° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'extradition entre
le gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République
fédérative du Brésil (n° 553, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient
l'objet d'une discussion générale commune.
A quinze heures et le soir :
8° Sous réserve de sa transmission, projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999 (AN, n° 1106) ;
La conférence des présidents a fixé :
- au vendredi 13 novembre, à seize heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mardi 10
novembre.
K. -
Lundi 16 novembre 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures et le soir :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (AN, n°
1106).
L. -
Mardi 17 novembre 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A neuf heures trente, à seize heures et le soir :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (AN, n°
1106).
M. -
Mercredi 18 novembre 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
1° Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (AN,
n° 1106) ;
2° Deuxième lecture du projet de loi constitutionnelle, adopté avec
modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif au Conseil
supérieur de la magistrature (n° 6, 1998-1999) ;
La conférence des présidents a fixé au mardi 17 novembre, à dix-sept heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
La conférence des présidents a décidé qu'il serait procédé à un scrutin public
à la tribune lors du vote sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle.
Tel est donc, mes chers collègues, l'ordre du jour établi jusqu'au 18 novembre
1998. Nous avons pu obtenir du Gouvernement, ce dont je le remercie, un
programme assez étendu dans l'avenir pour pouvoir organiser nos travaux.
S'agissant de la déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la
décentralisation, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous soyez
accompagné de M. le ministre du budget. C'est en effet un débat important, et
je vous remercie par avance de convaincre votre collègue d'être à vos côtés,
car nous avons des questions à vous poser à tous deux.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les proposition de la conférence
des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence
des présidents relatives à l'ordre du jour établi en application de l'article
48, alinéa 3, de la Constitution ?...
Ces propositions sont adoptées.
5
SCRUTINS POUR L'ÉLECTION DE MEMBRES
REPRÉSENTANT LA FRANCE AU CONSEIL DE L'EUROPE
ET À L'UNION DE L'EUROPE OCCIDENTALE
M. le président.
L'ordre du jour appelle les scrutins pour l'élection de six membres titulaires
et de six membres suppléants représentant la France à l'Assemblée parlementaire
du Conseil de l'Europe et à l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale.
En application des articles 2 et 3 de la loi n° 49-984 du 23 juillet 1949, la
majorité absolue des votants est requise pour l'élection des titulaires et des
suppléants.
Il va être procédé simultanément à ces deux scrutins qui auront lieu dans la
salle des conférences, en application de l'article 61 du règlement.
Je prie M. Jacques Machet, secrétaire du Sénat, de bien vouloir surveiller les
opérations de vote et de dépouillement.
Il va être procédé au tirage au sort de quatre scrutateurs titulaires et de
deux scrutateurs suppléants qui se répartiront entre deux tables pour opérer le
dépouillement des scrutins.
(Le tirage au sort a lieu).
M. le président.
Le sort a désigné :
Scrutateurs titulaires : MM. Patrice Gélard, Bernard Fournier, Lucien Lanier
et Gilbert Chabroux.
Scrutateurs suppléants : Mme Paulette Brisepierre et M. Joseph Ostermann.
Je déclare ouverts les scrutins pour l'élection de six membres titulaires et
de six membres suppléants de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe
et de l'Assemblée de l'Union de l'Europe occidentale.
Je vous indique que, pour être valables, les bulletins de vote ne doivent pas
comporter, pour chacun des scrutins, plus de six noms, sous peine de
nullité.
Les scrutins seront clos dans une heure.
6
DÉMISSION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION ET CANDIDATURE
M. le président.
J'ai reçu avis de la démission de M. Jean-Pierre Fourcade comme membre de la
commission des affaires sociales.
J'informe le Sénat que le groupe du Rassemblement démocratique et social
européen a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu'il propose pour
siéger à la commission des affaires culturelles.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à
l'article 8 du règlement.
Mes chers collègues, à la demande de M. le ministre, nous allons interrompre
nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt-cinq, est reprise à seize heures
trente.)
M. le président. La séance est reprise.
7
CONSEILS RÉGIONAUX
Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 524, 1997-1998),
adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au mode
d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse
et au fonctionnement des conseils régionaux. [Rapport n° 17 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la situation actuelle
de nos régions est à plusieurs titres préoccupante.
L'élection de mars dernier a souligné à nouveau les difficultés que
rencontrait le mode de scrutin purement proportionnel pour constituer des
majorités de gestion. Du même coup, les critiques portées depuis fort longtemps
à l'encontre du mode d'élection des conseils régionaux ont pris une nouvelle
actualité.
Afin d'obtenir des majorités, des alliances très contestées ont été conclues
dans quatre régions ; elles ont du même coup et au-delà du débat de fond,
propremement politique, placé sous le feu des projecteurs la question du mode
de scrutin.
La direction d'une région par une majorité relative n'est pas non plus exempte
de périls. Des difficultés sérieuses ont surgi lors des débats budgétaires, des
contentieux sont nés et, chacun le sait, ces déconvenues peuvent se produire
demain dans tous les conseils régionaux à majorité relative.
De tels mécomptes peuvent atteindre, dans l'esprit public, l'idée même de la
région et paralyser son fonctionnement. Ce serait à tous égards attristant pour
notre pays, qui a besoin de régions dynamiques, entreprenantes, et pour cela
assises sur une stabilité politique.
Chacun d'entre vous mesure qu'il existe sur ce terrain aussi une amicale
compétition avec nos voisins européens. Nous n'avons donc pas le droit de
perdre du temps en matière de régionalisation.
C'est pourquoi le Gouvernement vous propose à la fois de modifier le mode de
scrutin régional et d'adopter une procédure budgétaire particulière capable, en
l'attente d'un nouveau mode d'élection apportant une majorité de gestion, de
surmonter les difficultés.
En premier lieu, j'aborderai le mode de scrutin.
Le projet de loi qui vous est soumis instaure un mode de scrutin voisin de
celui qui est en vigueur dans les communes de plus de 3 500 habitants. Il
s'agit d'un régime mixte que l'on appelle parfois la « proportionnelle
majoritaire » ou la « proportionnelle rationalisée ». Il accorde une prime en
sièges à la liste obtenant une majorité absolue au premier tour ou arrivant en
tête au second tour, permettant ainsi de dégager une majorité nette et, dans le
même temps, par le jeu de la proportionnelle, de représenter tous les courants
politiques, et donc d'accorder une place aux minorités.
Ce mode de scrutin à deux tours est conforme à la tradition française. Il
permet l'expression de la diversité du suffrage au premier tour et favorise les
rassemblements au second tour.
C'est un dispositif qui a fait ses preuves. La loi de 1982 qui l'instaurait
dans les conseils municipaux des communes de plus de 3 500 habitants avait, à
l'époque, fait l'objet de sérieuses critiques. Aujourd'hui, son bilan est, de
l'avis général, tout à fait satisfaisant.
On lui reprochait une certaine complexité et, il faut bien le dire, chaque
citoyen ne connaît peut-être pas les règles de dévolution de la prime en
sièges. Mais chacun constate que le voeu des électeurs est respecté : une
majorité stable gère la commune, l'opposition est représentée - ce n'était pas
le cas avant l'entrée en vigueur de la loi de 1982 - et peut ainsi s'exprimer
et faire valoir son point de vue.
C'est donc un mode de scrutin de ce type qui vous est proposé pour les
régions.
Le Gouvernement vous invite à retenir le cadre d'une circonscription
régionale. C'est d'abord, vous en conviendrez, le choix de la simplicité :
inciter les citoyens à s'intéresser davantage à leur région commence par
organiser l'expression commune de leur vote lorsqu'il s'agit de désigner le
conseil régional et son président.
On connaît l'objection selon laquelle le cadre régional créerait de « grands
féodaux », élus certes sur des listes, mais au suffrage universel direct. Mais
cette objection ne résiste pas à l'examen des réalités : aujourd'hui déjà, la
campagne électorale régionale oppose des candidats à la présidence connus,
nommés, désignés. C'est la démocratie personnalisée, et il n'y aura pas, de ce
point de vue, de grande innovation.
Mais surtout, du fait que le mode de scrutin comporte une prime en sièges à la
liste arrivée en tête, la prime doit être calculée à l'échelon régional, faute
de quoi l'addition de primes départementales contradictoires risquerait fort de
nous conduire à des assemblées régionales aussi ingouvernables qu'aujourd'hui :
une région comptant deux départements pourrait ainsi voir la prime obtenue dans
un cas s'annuler dans l'autre et se trouver, de ce fait, sans majorité. Et le
même phénomène pourrait se produire dans des régions comptant davantage de
départements si les primes en sièges sont contradictoires et s'annulent.
Telles sont les raisons qui ont conduit le Gouvernement à choisir le cadre
régional.
Le projet de loi fixe à 25 % le niveau de la prime en sièges, c'est-à-dire que
la liste obtenant la majorité absolue au premier tour ou arrivée en tête au
second obtient d'abord un quart des sièges - selon le principe majoritaire -
avant de participer à l'attribution proportionnelle des sièges restants.
J'ai bien noté que votre rapporteur, M. Paul Girod, au nom de votre commission
des lois, souhaite porter cette prime au tiers des sièges. Si le Gouvernement a
préféré s'en tenir au niveau de 25 %, c'est pour deux raisons.
D'abord, nous partons d'une situation de proportionnelle intégrale dans une
assemblée régionale relativement nombreuse. En instaurant une prime du quart,
nous faisons évoluer raisonnablement le système, et nous ne l'inversons pas.
Nous garantissons une majorité, sans dénaturer la représentation dans les
conseils. Je le rappelle, en effet, nous partons d'un système lui-même
différent du mode de scrutin municipal initial, alors que le scrutin
majoritaire ne permettait aucune représentation des minorités.
Ensuite, l'élévation du niveau de la prime se traduit nécessairement par la
réduction de la représentation des minorités ou de l'opposition. Or tel n'est
pas le but que nous devons nous fixer.
Notre objectif, je le rappelle, est de dégager des majorités de gestion
stables, mais non de réduire la diversité de la représentation du suffrage. Il
faut donc trouver le point d'équilibre entre ces deux exigences.
Permettez-moi d'ajouter que la prime de 25 % des sièges suffit pour garantir
l'apparition de majorités absolues en sièges à toute liste obtenant 33 % des
voix, et ce, je le rappelle, au second tour. En effet, si un quart des sièges
est attribué à la prime, il reste trois quarts de ceux-ci à répartir ! Disposer
d'au moins un quart supplémentaire des sièges, cela fait donc 25 % + 25 %, soit
la majorité absolue.
A cette constatation arithmétique, on doit ajouter l'expérience : aux
dernières élections municipales, un second tour fut nécessaire dans 569 villes
de plus de 9 000 habitants. Dans 567 d'entre elles, la liste arrivée en tête
dépassait les 33 % des voix. Et il s'agissait de communes, alors que le projet
de loi concerne des circonscriptions régionales beaucoup plus vastes. La prime
de 25 % suffit donc pour réaliser l'objectif proposé.
Les règles de présentation des listes vous sont, dans leur principe, bien
connues.
Pour se présenter au second tour, une liste doit obtenir 10 % des suffrages
exprimés.
Pour être autorisée à fusionner entre les deux tours, une liste doit avoir
obtenu 3 % des suffrages exprimés. Ce chiffre diffère de celui retenu pour le
scrutin municipal. L'Assemblée nationale l'a souhaité ainsi, avec l'accord du
Gouvernement. En effet, en passant de la proportionnelle intégrale à une
proportionnelle avec prime, il ne s'agit pas de brimer l'expression des petites
formations. Le seuil les autorisant à fusionner a donc été abaissé.
Je ne méconnais pas les contraintes que cette disposition fera peser sur les
grandes formations politiques, mais elle est indiscutablement favorable au
pluralisme.
Enfin, la règle ordinaire selon laquelle toute liste doit obtenir 5 % des
suffrages exprimés pour participer à la répartition des sièges est reprise dans
ce projet de loi.
Le projet de loi n'entend pas modifier l'effectif actuel des conseils
régionaux, et le nombre de conseillers restera identique à ce qu'il est
actuellement dans chacune des régions.
En revanche, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à instaurer
la parité entre candidats et candidates sur les listes. Elle a voulu ainsi
tirer sans tarder la conséquence de l'adoption par le conseil des ministres du
projet de loi constitutionnel visant à favoriser l'égal accès des hommes et des
femmes aux mandats et fonctions.
Nous savons que l'instauration de cette parité exige une réforme de la
Constitution. Dès lors que celle-ci aura au moins été adoptée par le Parlement,
rien au plan juridique ne pourrait faire obstacle à la validité d'une clause
instaurant la parité dans le présent projet de loi. Mais le calendrier
parlementaire devra intégrer cette exigence, et les conséquences de la réforme
constitutionnelle sur l'égal accès des hommes et des femmes aux fonctions et
mandats en matière régionale sont ainsi connues sans ambiguïté.
S'agissant de la durée du mandat des conseillers régionaux et des membres de
l'Assemblée de Corse, elle a été ramenée à cinq ans, ce qui correspond au «
rythme » de la démocratie pour le mandat de député ou de représentant au
Parlement européen.
Vous savez que M. le Premier ministre, dans son discours de politique
générale, s'était engagé à « harmoniser les mandats électifs sur une base de
cinq ans ». Il n'y a pas de motif, à mes yeux, à la coexistence de trop de
durées différentes pour les mandats politiques : cette mesure va dans le sens
d'une clarification ; s'engager dans cette voie peut, de fait, permettre de
regrouper plusieurs scrutins, ce qui contribuera à combattre
l'absentionnisme.
J'en viens maintenant à la composition des collèges électoraux sénatoriaux,
dont les conseillers régionaux sont membres de plein droit. Le cadre de la
circonscription régionale impose, en effet, de répartir les élus dans chaque
collège sénatorial départemental. Nous vous proposons de le faire de manière
analogue au processus en vigueur en Corse, où l'Assemblée de Corse doit
répartir ses membres entre les deux collèges de Corse-du-Sud et de
Haute-Corse.
Ainsi, dans le mois suivant l'élection, le conseil régional procédera à cette
répartition. Il élira d'abord ses représentants au collège électoral sénatorial
du département le moins peuplé, à la proportionnelle. Puis il procédera
successivement de la même manière pour chaque département, dans l'ordre
croissant de la démographie. Enfin, le département le plus peuplé se trouvera
naturellement doté des représentants non encore élus aux tours précédents.
Ce dispositif est sans doute complexe, j'en conviens, mais c'est la meilleure
incitation à ce que les groupes politiques des conseils régionaux préparent une
répartition consensuelle.
J'ajoute que le Conseil constitutionnel ne l'avait pas désapprouvé lorsqu'il
fut adopté pour la Corse, et que le Conseil d'Etat l'a accepté lorsqu'il a
examiné le présent projet de loi.
Ainsi se trouve résumé le nouveau mode de scrutin régional que vous soumet le
Gouvernement.
J'aborderai maintenant le second aspect du projet de loi, qui porte sur la
procédure d'adoption des actes budgétaires par les conseils régionaux.
Vous le savez, faute de réforme du mode de scrutin, la procédure d'adoption
des actes budgétaires avait déjà fait l'objet de nombreuses propositions de loi
d'origine diverse. Les unes comme les autres visaient à permettre l'adoption
des budgets, en cas de majorité simple, sans intervention systématique du
représentant de l'Etat, intervention qui va à l'encontre du principe même de
décentralisation.
L'objet même de cette dérogation au principe habituel d'adoption des budgets
par les collectivités locales était de favoriser la libre administration plutôt
que l'intervention de l'autorité de tutelle.
De ces travaux est née la loi du 7 mars 1998, définissant une procédure
dérogatoire d'adoption des budgets au-delà de la date limite fixée par la loi,
à savoir le 31 mars ou le 30 avril les années de renouvellement des assemblées
délibérantes.
Aux termes de ce texte, le projet de budget est soit celui du président, soit
celui d'une majorité de conseillers signataires d'une motion de renvoi.
Votre commission des lois estime que ce dispositif est suffisant et qu'il
convient de l'expérimenter avant de le modifier. Je crains, à cet égard,
qu'elle ne fasse preuve d'un optimisme excessif.
Il est vrai qu'aujourd'hui deux régions seulement n'ont pu adopter leur budget
dans les conditions du droit commun. Mais nous devons prendre en compte le fait
que, dès cette année, une dizaine de régions sont à la merci d'une situation
analogue. Donc, le vote du budget peut devenir hors de portée.
C'est pourquoi nous proposons de préciser les modalités de recours et d'usage
de cette procédure dérogatoire d'adoption des actes budgétaires.
En premier lieu, afin de lever toute ambiguïté, il est bon de préciser que le
vote de l'intégralité des chapitres vaut adoption du budget.
Mais il s'agit de réserver à l'exécutif régional un droit d'appel sur ce
budget pour en assurer la cohérence et la conformité avec les orientations
présentées par le président. Contraindre à l'intégration d'amendements
profondément contradictoires, parfois votés par des majorités de rencontre, ne
serait pas une bonne méthode.
Il est donc proposé d'introduire un dispositif inspiré de la méthode du vote
bloqué et permettant à l'exécutif de soumettre à un vote d'ensemble final un
budget équilibré, comprenant les amendements votés et retenus par
l'exécutif.
En second lieu, il est proposé de lever certaines incertitudes juridiques.
La date limite de vote des taux a été reportée afin de l'aligner sur la date
limite de vote des budgets. C'est une bonne réforme. Mais, dans une assemblée
dépourvue de majorité stable, le vote des taux, objet d'une délibération
distincte mais intimement liée à la procédure budgétaire, est guetté par les
mêmes périls. C'est pourquoi il vous est proposé d'étendre aux décisions
annuelles de vote des taux la nouvelle procédure dérogatoire d'adoption sans
vote.
A défaut, la nouvelle proposition du président, mais aussi la
contre-proposition éventuelle annexée à une motion de renvoi se verraient
condamnées à reconduire les taux de l'année précédente. Ce serait, convenez-en,
une grave entorse au pouvoir budgétaire de la région !
Le présent projet de loi vise à remédier à ce danger en étendant aux décisions
budgétaires le champ de la procédure dérogatoire, à l'exclusion toutefois de
l'arrêté des comptes par le vote du compte administratif.
Une autre précision tend à confirmer le caractère écrit de la nouvelle
procédure, tant pour le nouveau projet de budget de l'exécutif que pour celui
de l'opposition.
De même, le présent texte précise le délai de convocation du conseil régional,
afin d'assurer l'information des élus sur toute contre-proposition budgétaire,
dès la saisine du conseil économique et social régional.
Enfin, il est proposé de lier l'adoption d'une motion de renvoi sur le budget
primitif de la région à la mise en cause de l'exécutif régional.
Il est logique, en effet, que les conséquences d'une mise en minorité du
président sur l'acte politique le plus important du conseil régional soient
tirées. Le budget, vous le savez, traduit les orientations de l'exécutif
régional. C'est l'un des rares actes obligatoirement soumis au vote de
l'assemblée délibérante réunie en formation plénière. Dès lors que le
président, avec l'accord de son bureau, engage sa responsabilité, il doit aller
jusqu'au bout de la procédure. De même, si une majorité alternative se dessine
autour d'une motion de renvoi lors du budget primitif, le vote doit conduire au
remplacement de l'exécutif régional.
Il va de soi que ces procédures pouvant remettre en cause le président et
l'exécutif régional sont strictement limitées au vote sur le budget
primitif.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce dispositif est
nécessaire. Nous ne pouvons pas en faire l'économie, dans l'attente d'un
nouveau mode de scrutin désignant des majorités de gestion. Sinon, nos régions,
qui sont à la merci de majorités relatives, iront de difficulté en difficulté,
discréditant l'institution régionale elle-même.
Rendrait-on justice à l'idée de décentralisation en restant aveugle devant les
dangers ou en s'en remettant au représentant de l'Etat pour arbitrer
systématiquement le débat régional ? Serait-il sage de sous-estimer le péril,
de laisser les régions s'enfoncer dans les crises sans se donner les moyens
d'un fonctionnement normal ? Je ne le crois pas.
Le Gouvernement, en présentant ce projet, veut mettre un terme à la dérive qui
risque de toucher l'institution régionale. La France a besoin d'institutions
locales et régionales solidement établies, capables d'affronter les défis,
d'organiser l'aménagement du territoire, le développement local, capables aussi
de rivaliser avec les régions des autres pays européens.
Beaucoup de temps a été perdu. Nous ne pouvons plus attendre pour garantir aux
régions un mode de fonctionnement correct.
Tel est donc l'esprit de ce projet de loi : un nouveau mode de scrutin pour
désigner des exécutifs stables et, dans l'attente, une procédure budgétaire
permettant de surmonter les obstacles.
Je suis sûr que ces objectifs sont largement partagés et je souhaite que le
débat qui s'engage permette de les servir.
Nous aurons ainsi, à travers cette réforme, consolidé l'institution régionale
dans une période où, il faut bien l'avouer, elle connaît une crise, alors que
les régions se développent partout dans les pays européens proches.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Girod,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, mes chers collèges, à l'audition de M. le ministre, vous avez
compris que ce texte vise deux buts à la fois, ce qui, dans bien des sports,
s'avère parfois être un exercice périlleux, et je ne suis pas sûr que l'art
politique ne soit pas, sur ce point, comparable à ces sports.
Il tend, en effet, à la fois à modifier le régime électoral des régions et à
édicter de nouvelles règles de fonctionnement desdites régions telles qu'elles
sont.
C'est là la conséquence d'une situation née de l'accumulation, me semble-t-il,
de trois faits.
Tout d'abord, un engagement déjà ancien du Gouvernement - dans l'hypothèse,
disait-il, où les élections régionales déboucheraient sur un certain désordre,
parce qu'il était persuadé que ce serait le cas - de modifier le régime
électoral des régions après les élections régionales de mars dernier pour
n'avoir pas voulu le faire avant au motif qu'on était dans l'année précédant le
renouvellement général des régions et que cela n'aurait pas été convenable.
Les élections se sont déroulées - c'est le deuxième fait. Elles ont débouché
sur des situations parfois inattendues, encore qu'il ne faille pas, ici ou là,
exagérer certains types de critiques. Il y a au moins un cas, sur les quatre
qu'a évoqués M. le ministre, où le président de région élu avait clairement
annoncé ce qui se passerait. On ne peut donc pas dire qu'en l'espèce les
électeurs aient été pris par surprise.
Il convient, dès lors, région par région, de nuancer les jugements. Mais il
est vrai que ces élections ont débouché sur des situations que le Gouvernement
n'avait peut-être pas envisagées comme cela.
Troisième fait, enfin : deux régions se sont trouvées sans budget malgré
l'adoption, le 7 mars dernier, d'une loi proposée par le même Gouvernement -
vous l'avez d'ailleurs en partie défendue devant le Parlement, monsieur le
ministre, bien qu'à l'époque vous n'ayez pas été ministre de l'intérieur par
intérim - et qui avait pour ambition de trouver un système permettant aux
régions d'avoir un budget dans des conditions acceptables sans qu'il y ait pour
autant un vote formel, et ce afin d'éviter - c'était l'objet du projet - que le
budget ne soit réglé grâce à l'intervention de l'Etat, par l'intermédiaire des
préfets.
Nous en avions accepté le principe malgré quelques réticences sur le
dispositif tel qu'il a été définitivement voté.
Or, je l'ai dit, deux régions n'ont pas de budget malgré le vote de ce texte,
considéré à l'époque comme excellent, tout au moins par ses promoteurs et par
l'Assemblée nationale, me semble-t-il.
Il faut, bien sûr, en rechercher le pourquoi et le comment, comme auraient dit
les sages du temps passé.
En fait, c'est non pas parce que le texte était mauvais, mais parce qu'il n'a
pas été appliqué du tout, et c'est probablement là, monsieur le ministre, le
point faible du raisonnement que vous nous avez exposé voilà quelques
instants.
En effet, les deux présidents de région qui se sont trouvés dans cette
situation difficile n'ont ni l'un ni l'autre respecté les dispositions de la
loi du 7 mars dernier. On ne peut donc pas dire que cette loi débouche sur un
système inopérant puisqu'on n'a pas pu analyser ses effets.
J'en reviens au sport, monsieur le ministre, pour répéter que l'on vise deux
buts très différents au travers, d'une part, de dispositions budgétaires dont
vous croyez qu'elles sont urgentes - ce n'est pas l'avis de la commission des
lois - et, d'autre part, d'une réforme électorale qui, elle, n'est certainement
pas urgente.
Que le déclenchement de la réforme électorale soit rapide après les élections
sénatoriales de septembre dans le souci de respecter un engagement du
Gouvernement, soit ! En revanche, il n'y a aucune raison pour que l'on délibère
dans l'urgence d'un projet de réforme électorale qui ne s'appliquera, dans le
meilleur des cas, que dans six ans - à moins qu'il n'y ait des arrière-pensées
de dissolution unilatérale d'une région ou d'une autre après un blocage plus ou
moins artificiellement préfabriqué, auquel cas il faudrait nous le dire ! - au
motif qu'il est couplé avec des dispositions techniques d'ordre financier qui,
elles, d'après le Gouvernement, nécessitent une adoption urgente.
C'est là un abus de raisonnement qui a conduit la commission des lois à
s'interroger longuement sur le point de savoir s'il ne convenait pas - j'attire
l'attention du Gouvernement sur ce point - de déposer une question préalable
exclusivement motivée par le fait qu'on ne délibère pas dans l'urgence d'une
réforme électorale qui ne s'appliquera que six ans plus tard, même s'il est
urgent de commencer à en discuter.
Monsieur le ministre, les dispositifs institutionnels vous donnent
suffisamment de moyens pour faire aboutir une réforme électorale dans des
délais acceptables sans que, pour autant, la discussion soit tronquée à ce
point.
La commission des lois a toutefois considéré, d'une part, que le dépôt de
cette motion serait probablement mal interprété et, d'autre part, que la
réaction serait excessive en la matière. Elle a donc accepté d'examiner le
corps du texte, lequel comporte effectivement deux aspects : l'aspect électoral
et l'aspect fonctionnement.
En ce qui concerne l'aspect électoral, M. le ministre vient de confirmer ce
qu'il avait dit devant la commission : on reprend le système municipal, à la
nuance près que la prime sera non plus de la moitié mais de 25 %, par
conséquent modérée.
C'est d'ailleurs, parmi les hypothèses envisagées, la seule que le groupe de
travail de la commission des lois du Sénat qui avait travaillé sur la réforme
des scrutins régionaux il y a déjà quelques mois avait cru pouvoir retenir. Il
avait conclu à l'unanimité - je le précise, car cela peut avoir son intérêt -
qu'il ne fallait surtout toucher à rien, à l'époque, mais que, si l'on devait
toucher à quelque chose, ce serait dans ce sens qu'il faudrait aller : un
scrutin de type municipal avec une prime modérée.
Sur ce plan, le Gouvernement a feint de nous entendre. Il ne nous a pas
complètement entendus parce que, d'abord, il nous propose une circonscription
électorale unique, de type régional, gommant allègrement le fait que, dans la
région parisienne, par exemple, deux cent neuf noms sur la même liste, cela
suppose déjà que l'on change l'urne afin de pouvoir y faire entrer une feuille
aussi grande qu'une page de journal.
Surtout, plus grave, cela présente l'inconvénient de supprimer toute espèce de
rapprochement entre l'élu et le corps électoral, et de rendre le scrutin très
difficilement lisible pour quiconque, surtout, monsieur le ministre, si l'on va
jusqu'à la fusion des listes. Comment voulez-vous que quelqu'un qui va avoir à
voter pour 209 noms au deuxième tour, parmi lesquels certains viendront d'une
liste pour laquelle il n'a pas voté au premier tour, s'y reconnaisse ? Il lui
faudra une heure et demie de lecture et de consultation des tableaux
comparatifs pour s'y retrouver.
Donc, restons sérieux, d'autant que ce n'est pas là la loi municipale, qui
vaut pour les communes de plus de 3 500 habitants à l'exception de Lyon,
Marseille et Paris. Or, les régions sont toutes des collectivités territoriales
dont la dimension humaine correspond, à peu de chose près, à celle de l'une de
ces trois grandes villes.
Par conséquent, monsieur le ministre, il convient, me semble-t-il, de nuancer
l'identification que vous faites allègrement entre le scrutin régional et le
scrutin municipal.
Je rappelle à nos collègues que toutes nos collectivités sont, excepté les
communes les plus importantes, désignées par une circonscription électorale
d'échelon inférieur à celui de la collectivité qu'il s'agit de gérer.
M. Jean-Jacques Hyest.
Tout à fait !
M. Paul Girod,
rapporteur.
Paris, Lyon, Marseille : l'arrondissement ; les départements
: le canton. Le seul scrutin où l'on retrouve la représentation directe n'est
pas celui dans lequel s'identifie le mieux l'identité de l'électeur avec celui
de l'élu ; c'est le scrutin européen.
M. Jean-Jacques Hyest.
Eh oui !
M. Paul Girod,
rapporteur.
Si c'est pour calquer le scrutin européen, avec ses
conséquences sur l'identification des élus par rapport à la population, que
l'on prévoit une circonscription régionale, permettez-moi de vous dire,
monsieur le ministre, que c'est un point de départ insuffisant !
C'est la raison pour laquelle la commission des lois souhaite que l'on en
revienne à un scrutin départemental.
Faut-il un tour ou deux ? C'est le problème et c'est l'objet d'un débat. La
commission, pour l'instant, est plutôt favorable à un scrutin à deux tours qui
présente l'avantage de rassembler les minorités de manière plus claire. En
effet, un scrutin à un tour peut être durement éliminatoire surtout si, comme
le souhaite la commission, on durcit quelque peu les seuils de
représentativité. L'Assemblée nationale a prévu deux dispositions
complémentaires que j'évoquerai à la fin de mon exposé, étant donné leur nature
un peu particulière : il s'agit de la jeunesse et de la parité
hommes-femmes.
Le deuxième aspect du projet porte sur la gestion. L'échec du texte actuel est
imputable non au texte lui-même mais au fait qu'il n'a pas été appliqué. Le
projet de loi comporte une novation majeure qui, elle aussi, mériterait un
débat approfondi s'étendant à d'autres catégories de collectivités
territoriales.
L'article 72 de la Constitution dispose que les collectivités territoriales de
la République s'administrent librement par des conseils élus et dans les
conditions prévues par la loi.
Depuis toujours, la substitution au conseil de l'autorité préfectorale a été
considéré comme un pis-aller. D'ailleurs, dans ses motivations, le Conseil
constitutionnel a accepté la réforme de la loi du 7 mars 1998 au motif qu'il
s'agissait d'éviter l'intrusion de l'Etat dans les délibérations d'un conseil
et que les dispositions de cette loi rétablissaient, au profit du conseil, une
marge de manoeuvre que l'intervention de l'Etat supprimait.
Or, aux termes du texte qui nous est soumis, c'est non plus le conseil qui
délibère, mais son président tout seul, ...
M. Jean-Jacques Hyest
C'est vrai !
M. Paul Girod,
rapporteur.
... assisté éventuellement d'un bureau ainsi reconstitué par
des dispositions annexes, elles-mêmes partiellement pédagogiques et non de
droit positif, lequel ne dépend et ne procède que de lui-même.
Ainsi, c'est le président qui imposera, même après l'adoption d'un budget, un
nouveau budget conforme à ses vues et qui ne peut être contrebattu que par la
majorité du conseil régional dès le dépôt de la motion de renvoi. Qu'elle doive
être votée, si elle doit l'être un jour, à la majorité absolue me semble un
minimum, mais qu'elle ne puisse être présentée que par une majorité absolue me
semble tout aussi abusif maintenant qu'auparavant, et peut-être même plus
encore maintenant qu'auparavant.
M. Michel Mercier.
Très bien !
M. Paul Girod,
rapporteur.
En effet, contrairement à ce qui a été énoncé au moment du
vote de la loi du 7 mars 1998, le parti contre lequel il s'agit, paraît-il, de
lutter - on n'arrive jamais, monsieur le ministre, à lutter contre un phénomène
politique par des mesures juridiques - fera bien entendu partout échec à ce
genre de manoeuvres.
Par conséquent, cela signifie que les présidents de région en place deviennent
pratiquement des dictateurs absolus, ...
M. Jean-Jacques Hyest.
Des despotes !
M. Paul Girod,
rapporteur.
... y compris les quatre dont vous avez parlé tout à
l'heure, pour la durée de leur mandat.
Est-il raisonnable d'accepter cette novation dans notre droit public sans que
l'on en examine les conséquences ?
Cette procédure peut être mise en oeuvre pour deux autres délibérations par
an.
S'agissant des contrats de plan, vous verrez, bientôt, mes chers collègues, un
nouveau texte comportant bien entendu les mêmes dispositions pour leur
adoption. En effet, on avancera que l'on ne peut pas laisser les régions sans
système de fonctionnement ; qu'il faut leur permettre d'adopter des contrats de
plan ; qu'il faut donc que le président puisse imposer son contrat de plan à sa
majorité, à son opposition, à son conseil tout entier même s'il s'avère qu'il
n'est pas tout à fait d'accord.
Je crois très honnêtement que faire entrer une disposition aussi novatrice
dans notre droit public mériterait un débat approfondi, ce qui est incompatible
avec la procédure d'urgence qui a été déclarée.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, la commission des lois a
préféré recommander, au Sénat d'abord et au Parlement ensuite, de s'en tenir au
texte actuel, pour voir dans quelle mesure il aboutira ou n'aboutira pas à des
difficultés insurmontables ; nul ne le sait aujourd'hui. En conséquence, elle
proposera la suppression pure et simple des dispositions relatives à l'adoption
des budgets, même si certaines d'entre elles, d'ordre technique, auraient pu
être éventuellement retenues, telles que l'extension du dispositif aux taux ou
la clarification des dates ; encore que je ne sois pas certain qu'une lecture
attentive du texte en vigueur ne permette pas d'aboutir au même résultat.
Restent quelques dispositions complémentaires, d'ailleurs souvent introduites
par l'Assemblée nationale, qui sont de caractère un peu bizarre, soit parce
qu'elles sont une anticipation hardie, soit parce qu'elles découlent de
phénomènes de mode contestables.
L'anticipation hardie, c'est la réduction à cinq ans du futur mandat des
conseillers régionaux. Ce débat est ouvert devant le peuple : la durée des
mandats doit-elle être réduite ou maintenue, et maintenue dans sa diversité ?
Cette durée doit-elle être unifiée ? Cette réforme ne s'appliquera pas avant
2004 ; réduire la durée du mandat sans avoir ouvert le débat sur la durée des
autres mandats des collectivités territoriales me semble imprudent.
La seconde anticipation, c'est la parité sur les listes de candidats, non pas
des élus. Encore faudrait-il, si l'on veut la parité des élus, préciser la
parité des candidats en cas de parité en « hélice », comme l'ADN bien connu, et
non pas d'une parité « paquet » avec tous les hommes devant et toutes les
femmes derrière, ou l'inverse !
Mme Hélène Luc.
Un homme, une femme !
M. Paul Girod,
rapporteur.
Cette disposition n'est pas constitutionnelle en l'état
actuel des textes. Il convient donc d'attendre une révision constitutionnelle
sur ce point avant de légiférer, sinon, ce serait vraiment introduire dans le
débat parlementaire une novation : la loi ordinaire commanderait à terme la loi
constitutionnelle.
J'en arrive aux dispositions qui découlent de la mode actuelle : le jeunisme.
Plus on est jeune, plus on est compétent ! Si on va jusqu'au bout de ce
raisonnement, bientôt, dans l'armée, le règlement prévoira que, lorsque le
colonel est tué au combat, c'est le moins ancien dans le grade le moins élevé
qui prendra le commandement du régiment !
(Sourires.)
Monsieur le
ministre, je ne suis pas certain que c'est ce que vous souhaitez.
Une autre disposition concerne le bureau. Le bureau, ce sont ceux qui ont
délégation, très bien. Mais, tout le monde avait fait remarquer que l'exécutif,
c'est le président. Or, pour essayer d'obvier à cela, l'Assemblée nationale a
introduit l'idée selon laquelle le président doit déléguer une partie de ses
responsabilités à ses vice-présidents. Quelle partie ? Dans quelles conditions
? Pour combien de temps ? Délégation révocable, non révocable ? Personne n'en
sait rien. Cela fait partie de ce que j'appelle le droit pédagogique qui
s'oppose, dans mon esprit, au droit positif.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, la commission des lois,
pas plus sur ce point que sur la réduction du mandat à cinq ans, la parité ou
le jeunisme, ne vous recommandera de maintenir ces dispositions.
Mes chers collègues, voici, brièvement résumée, la position de la commission
des lois. Elle souhaite que sorte de nos délibérations un texte conforme à la
fois à nos traditions et à l'ambition que nous avons nous aussi pour les
régions.
Monsieur le ministre, ce n'est pas en éloignant l'élu régional de son corps
électoral que vous ferez avancer l'idée régionale ; c'est en faisant en sorte
que tous les départements soient convenablement représentés, qu'ils soient très
peuplés ou peu peuplés.
Un des grands défauts de la circonscription régionale unique est que l'on «
bourrera » les listes de ceux qui habitent les départements les plus peuplés
pour recueillir le maximum de suffrages en négligeant les autres. Or,
rappelons-nous que les régions, ce sont peut-être des hommes, mais ce sont
aussi des territoires et qu'entre dans leurs compétences - quelquefois
exagérément revendiqué par elles seules - l'aménagement du territoire, alors
qu'en réalité il s'agit là d'une tâche partagée entre tout le monde. Par
conséquent, si l'aménagement du territoire commence par négliger l'aspect
territorial des circonscriptions et la représentativité des régions, eh bien,
monsieur le ministre, on part sur une mauvaise piste, ce qui constitue une
raison supplémentaire de suivre la position adoptée par la commission des
lois.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
(M. Jean Faure remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la
présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 31 minutes ;
Groupe socialiste, 26 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 19 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 17 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 11 minutes ;
Groupe communiste, républicain et citoyen, 9 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, M. Hoeffel,
M. Fauchon et moi-même nous sommes partagés la tâche d'exposer la position du
groupe de l'Union centriste sur ce projet de loi qui nous amène à délibérer cet
après-midi de la réforme du mode d'élection des conseillers régionaux et du
fonctionnement des conseils régionaux.
Sur de nombreux points - cela n'a rien d'étonnant - je rejoindrai M. le
rapporteur, ce qui me permettra de respecter le temps de parole qui m'est
imparti.
Monsieur le ministre, les prochaines élections régionales auront lieu en 2004.
Pourquoi donc délibérer selon la procédure de l'urgence qui ne permettra pas au
Sénat, représentant des collectivités territoriales, d'apporter à l'étude de ce
projet de loi le temps, l'attention et l'enrichissement qu'il pourrait apporter
puisque c'est la première et la dernière fois qu'il pourra en discuter ? Rien
ne justifie l'urgence sur un tel texte et nous ne pouvons que regretter la
position du Gouvernement qui nous contraint à tronquer la discussion.
Toute loi électorale est, par définition, une loi politique, et ce texte ne
déroge pas à la règle. Il poursuit un objectif qui apparaît louable :
rechercher et dégager une majorité pour gérer les conseils régionaux. Sur ce
point, chacun d'entre nous peut s'accorder et en reconnaître la nécessité ; les
régions ont besoin, pour bien fonctionner, d'une majorité, cela est vrai.
La méthode proposée par le Gouvernement nous satisfait-elle ? Elle nous
apparaît, au contraire, très contestable. Sans revenir sur ce que M. le
rapporteur vient de dire, je voudrais simplement m'appuyer à la fois sur des
arguments de fait et sur des arguments de droit.
S'agissant des faits, chacun convient que, pour intéresser nos concitoyens à
la vie d'une collectivité, il faut être au plus près d'eux. Ainsi, pour les
grandes régions, serons-nous certains que chacun de nos concitoyens retrouvera
sur les listes des candidats qu'il connaît, qu'il les apprécie ou qu'il les
combatte ? Dans la région qui est la nôtre, monsieur le ministre, je ne suis
pas très sûr que le département de l'Ardèche compte beaucoup de représentants
et je ne suis pas sûr que les habitants du sud de l'Ardèche connaissent
beaucoup ceux du nord du Jura... Ce sont quand même des candidats sur lesquels
ils devront se prononcer.
Plus grave encore, la façon dont est organisé le scrutin lui-même peut être
considérée, soit, au pire, comme une sorte de piège, soit, au mieux, comme une
sorte de démocratie d'idées.
Vous nous avez dit que le mode de scrutin à deux tours était le mode de
scrutin traditionnel de la République, et c'est exact. Sur ce point, nous
n'avons rien à dire. Toutefois, ce qui ne correspond pas au mode de scrutin
traditionnel de la République, c'est, bien sûr, la règle de la fusion entre les
deux tours. C'est là que se trouve le piège, ou la démocratie d'idées, parce
que je vois bien quels candidats pourront s'allier entre eux au second tour et
quels sont ceux qui ne le pourront pas : en effet, soit ils n'auront personne
avec qui s'allier, soit, s'ils parviennent à conclure une alliance, elle se
révèlera mortifère, soit, s'ils ne s'allient pas, ils seront battus.
Devrions-nous, de par la loi, donner d'avance le résultat des élections ?
L'article 4 me paraît donc tout à fait condamnable, en ce qu'il organise la
fusion des listes entre les deux tours. Notre groupe aura beaucoup de mal à
accepter une telle organisation de la démocratie.
Ensuite, nous nous sommes interrogés sur la composition du corps électoral
sénatorial.
Il est vrai que la décision du Conseil constitutionnel du 9 mai 1991 reconnaît
au Gouvernement et au Parlement une grande latitude dans ce domaine dès lors
que le cadre départemental de l'élection des sénateurs est conservé. Mais
faut-il modifier aujourd'hui même la composition du corps électoral sénatorial
alors que le Gouvernement a annoncé pour les prochains mois une réforme de
l'élection des sénateurs ? Nous aurions probablement tout intérêt à examiner
l'ensemble de la réforme ultérieurement, plutôt que seulement un de ses aspects
aujourd'hui.
Je traiterai maintenant brièvement du second pan de la loi, qui vise à assurer
le fonctionnement des conseils régionaux. Ces dispositions sont, quant à elles,
d'application immédiate et justifient, selon vous, le recours à la procédure de
l'urgence. Je serai bref sur ce point, parce que nous approuvons pleinement les
propos tenus par le rapporteur, M. Paul Girod.
Ces dispositions visent à assurer une prééminence absolue des présidents sur
les conseils et si la même décision du Conseil constitutionnel du 9 mai 1991
permet la diversification territoriale et consacre l'abandon de l'exigence
d'identité institutionnelle des collectivités locales autres que les
territoires d'outre-mer, le principe de la libre administration est respecté,
principe qui, toujours suivant le Conseil constitutionnel, exige la présence
d'une assemblée délibérante élue au suffrage universel direct, ce que ne
prévoient pas les propositions qui nous sont soumises aujourd'hui.
En conclusion, le groupe de l'Union centriste, s'inspirant des travaux de la
commission des lois et de l'excellent rapport que vient de présenter M. Paul
Girod, attendra pour se déterminer l'exposé des positions du Gouvernement à
l'égard des points qui lui paraissent particulièrement difficiles à accepter,
notamment la fusion des listes au second tour, avant de prendre sa décision
finale.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais
dire combien j'ai apprécié le travail réalisé par M. le rapporteur et le
féliciter de ce que sa culture départementaliste ne l'ait pas conduit à des
excès !
(Sourires.)
Au fond, je tiens à souligner combien je suis
d'accord sur des points très importants de son rapport.
Monsieur le ministre, le paradoxe fait que l'on discute de ce sujet au moment
où l'actualité met sur le devant de la scène les succès de la décentralisation.
Ce que sont en train de crier aujourd'hui les lycéens dans les rues, c'est que
certaines choses marchent, celles qui sont décentralisées, proches du terrain,
dans lesquelles les responsabilités sont assumées, et que d'autres ne marchent
pas, celles qui sont centralisées. Un ministre, même de bonne volonté, n'arrive
pas à faire bouger le « mammouth » !
Aujourd'hui, on constate qu'un système centralisé n'est pas capable de se
réformer, alors qu'un système décentralisé permet de répondre aux questions.
Et, il est extraordinaire de noter que, lors de ce grand débat sur l'éducation,
personne ne parle des collèges !...
M. Michel Mercier.
Eh oui !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Tout va bien dans ce secteur, les départements assument ! Et si un ministre de
l'éducation ne disait aux lycéens : « Et les régions !... », et si quelques
recteurs ne leur conseillaient d'aller manifester devant le conseil régional,
passant ainsi le mistigri, on aurait peu de débats sur l'action des régions en
tant que telles. Cela dit, il reste encore à faire, même si toutes les régions,
qu'elles soient de droite ou de gauche, font de l'éducation leur priorité, sont
déterminées à agir plus en ce domaine.
J'insiste sur ce point parce que c'est un élément important dans notre
décision : le texte qui nous est aujourd'hui proposé fragilise en effet le fait
régional. Et si j'insiste sur le problème des lycées, c'est parce que je crains
beaucoup qu'en fragilisant la région on ne se prive de réponses modernes à des
difficultés archaïques.
Si l'on en croit la presse, les réponses que M. Allègre souhaite apporter ne
sont pas à la hauteur de l'enjeu. Faisons donc en sorte que l'on n'assiste pas
aujourd'hui, alors que la décentralisation affiche ses succès, à une
centralisation rampante qui tournerait le dos au bon sens et à l'espoir de
résoudre des problèmes.
Selon nous, le projet de loi déstabilise le fait régional. Pour atteindre ce
résultat, monsieur le ministre, vous utilisez plusieurs armes.
D'abord, vous employez l'arme malicieuse du deuxième tour, la semaine de
toutes les magouilles, de tous les accords, de toutes les négociations, de la
distribution des postes, de l'organisation des places,... ce dont ne veulent
pas les Français. Vous organisez une semaine clandestine, où l'on va essayer de
conjuguer les listes et, comme le disait très justement M. le rapporteur tout à
l'heure, où l'on trouve, d'un côté, les alliances fertiles et, de l'autre, les
solitudes morales.
Nous voyons donc bien qu'il n'est pas possible, pour des Républicains qui
veulent protéger le fait régional de tous les dangers, d'accepter ce deuxième
tour.
Vous, monsieur le ministre, qui vous battez pour une conception républicaine,
pourquoi voulez-vous généraliser à tout le pays les méthodes que vous combattez
dans votre propre région ?
M. Jean-Jacques Hyest.
Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Organisons donc un scrutin à un seul tour de manière que la liste arrivée en
tête puisse obtenir une prime et recueillir une majorité absolue au conseil
régional.
A cet égard, je rejoins M. le rapporteur : la Haute Assemblée prendrait une
sage décision si elle équilibrait ces deux éléments. Nous disons donc oui à la
proximité départementale, oui à la section départementale.
Il est, en effet, absurde, quand on est décentralisateur, de vouloir instaurer
la guerre entre les départements et la région. C'est absurde, car cela revient
à paralyser l'action sur le terrain, la dynamique territoriale.
Oui à un scrutin départemental, mais aménageons-le : faisons en sorte, lorsque
l'on est candidat dans un département, de présenter des candidatures dans tous
les départements d'une même région, et sous la même appellation. Nous sommes
favorables à une liste à affichage régional et à section départementale. Cela
nous paraît tout à fait réalisable.
Il est vrai que, dans notre pays, c'est au niveau du département que
s'organise notre vie politique. Il n'y a donc pas de difficultés à présenter
des listes dans chacun des départements, avec un scrutin départemental, mais à
un seul tour, ce qui nous permettra d'accroître la transparence démocratique et
d'éviter cette semaine de toutes les complexités, de toutes les magouilles.
La première déstabilisation réside dans l'organisation de ce second tour. Le
groupe des Républicains et Indépendants ne peut accepter cette hypothèse et le
danger qu'elle fait courir au pays.
La deuxième cause de fragilisation figurant dans ce projet de loi provient de
la motion de renvoi et du changement de président.
Je ne suis pas très favorable à cette motion de renvoi et je suis tout à fait
hostile à l'idée que le président puisse abandonner son poste en cours de
mandat, avec un accord tactique et sans véritable décision parce que ce serait
néfaste pour notre organisation démocratique, parce que, là encore, il y aurait
des combines.
Pourquoi créer une source d'instabilité de l'exécutif régional, alors que,
dans tous les autres domaines, on essaie de montrer l'importance de la durée
?
Certaines régions, aujourd'hui, s'efforcent de faire face au désordre de
l'Etat en matière de contractualisation. Mais savez-vous, monsieur le ministre,
comment, en ce moment, sur le terrain, se comporte l'Etat ? Ainsi le ministère
de l'aménagement du territoire et de l'environnement insiste sur la très grande
urgence qu'il y a à mettre en place des schémas de services et à rendre des
arbitrages. Les uns veulent élaborer ces dispositifs pour la fin du mois de
décembre, les autres pour le mois de mars, chiffrages compris. Pourtant, ces
contrats ne doivent entrer en vigueur qu'au 1er janvier 2000 !
Des ministères font la course pour passer les premiers ! Voyez la lettre de M.
Allègre pour le plan U 3 M ! Il veut même faire passer le contrat en faveur des
universités avant le contrat de plan !
Le désordre de l'Etat en matière de contractualisation est tel que la
stabilité, elle, ne se manifeste que lorsque les services décentralisés de
l'Etat viennent rencontrer les élus des régions ou des départements afin
d'étudier avec eux comment planifier le travail.
Je me demande d'ailleurs comment, sans nous, ils feraient pour y voir clair
sur le terrain !
Si, aujourd'hui, on fait en sorte d'instaurer l'instabilité pour les
présidents de région, c'est l'institution, la région elle-même, qui devient
instable !
L'instauration du mandat de cinq ans pour les conseillers régionaux est aussi
un facteur de fragilisation des régions.
Pour ma part, je n'aurais pas été contre un mandat de cinq ans, car il n'est
pas absurde d'harmoniser la durée de tous les mandats électifs. Mais pourquoi
commencer par les régions justement au moment où l'Etat porte la durée du
contrat Etat-région à six ans par souci d'harmonisation avec celle des fonds
structurels européens ?
Au moment où l'on prévoit que les conseillers régionaux seront élus pour cinq
ans, on donne six ans aux partenaires de la région, à l'Etat notamment, comme
si on voulait, là aussi, recentraliser. Voilà qui me paraît largement
critiquable, car c'est un facteur supplémentaire de cette fragilité pour
l'institution régionale.
Ce débat, comme l'a sagement dit M. le rapporteur, doit faire l'objet d'une
réflexion globale. Nous ne sommes pas fermés à ce type d'évolution, mais elle
doit se faire en cohérence, en harmonie entre l'Etat et la région.
Il est un autre facteur de fragilisation du fait régional : l'excès de
politisation dans les régions.
Progressivement, on cherche à faire en sorte que la région se comporte comme
un petit parlement. Je ne crois pas que ce soit une bonne évolution. Que cette
assemblée régionale veuille jouer à la petite Assemblée nationale, voire au
Sénat, présente des dangers. Il est très préoccupant de voir s'y installer
l'esprit partisan.
Dans une région, les clivages par département, mais aussi entre ville et
campagne, entre le Nord et le Sud, entre l'Est et l'Ouest, sont très
importants. On ne peut pas ramener la vie d'une région au seul clivage
gauche-droite, à un clivage entre appareils politiques extérieurs à la région.
Laissons vivre cette entité territoriale selon ses propres choix !
M. Dominique Braye.
Bravo !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Vouloir en permanence politiser la vie régionale, cela signifie décalquer un
certain nombre de procédures du niveau national sur le niveau local et ne pas
retenir ce qui fonctionne le mieux. Il est en effet important que nos
concitoyens bâtissent ensemble, qu'ils se rassemblent, un jour, sur le tracé
d'une route, l'autre jour, pour la construction d'un lycée. C'est le projet qui
doit être au coeur de la vie régionale et non pas l'étiquette politique et
l'esprit partisan.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
Franchement, si l'on veut procéder à la transformation de nos assemblées
régionales en assemblées politiques, je me pose la question de l'utilité d'un
débat régional. A cet égard, j'ai une proposition à faire à M. le
rapporteur.
Pourquoi, en France, procède-t-on aux élections régionales dans toutes les
régions le même jour ? En Europe, les régions autonomes, espagnoles par
exemple, procèdent aux élections à des dates spécifiques. Je propose donc par
amendement qu'en 2004, date du renouvellement des conseillers régionaux, ces
élections soient échelonnées sur une année, d'abord, voire, plus tard, sur deux
ans. Il faudrait faire en sorte que tous les mois aient lieu une, deux ou trois
élections régionales, afin d'éviter la nationalisation excessive des débats
régionaux.
A trop nationaliser les débats régionaux, on enlève à la région sa véritable
substance : la différence.
Ce qui est intéressant dans le fait régional, ce n'est pas que la région soit
une portion de nation. La région n'est pas une portion de nation ! Il n'y a pas
de portion dans la nation !
Ce qui compte, c'est que la région soit un échelon de décision, avec les
autres collectivités, et que cet échelon soit efficace non pas pour reprendre
tous les débats nationaux, pour chercher à calquer complètement les débats
nationaux, mais pour aborder les sujets locaux.
Ce qui est intéressant dans le fait régional, c'est la différence, c'est le
fait que l'Auvergne, avec sa sagesse et sa grande expérience, ait une vision de
l'avenir et que, par ailleurs, la Provence-Alpes-Côte d'Azur ou le Nord -
Pas-de-Calais aient d'autres visions. Il faut que les régions puissent apporter
des correctifs à la politique nationale de l'Etat, selon leurs sensibilités.
C'est cela qui compte dans le fait régional ! Ce n'est pas de diviser la France
!
Il convient de faire en sorte que le national puisse tenir compte des
spécificités et des préoccupations locales, que la cohérence nationale soit
compatible avec le projet régional, et donc qu'il y ait ce lieu d'équilibre.
C'est cela qui est le plus important !
Or, il y est souvent fait obstacle, me semble-t-il, par cette transformation
du débat régional en débat national. Laissons les débats régionaux se
développer et échelonnons les scrutins ! Ainsi, nous pourrons éviter cette
focalisation des grands médias nationaux, qui ne sont pas toujours au plus
proche de nos réalités locales, faire des scrutins et rapprocher nos
institutions des véritables préoccupations des citoyens.
Voilà pourquoi, monsieur le ministre, je crois que ce projet est un texte de
fragilisation. Je voudrais vous dire très franchement que, globalement, il
manque de sincérité. Ce qu'il y a de plus choquant, c'est que vous nous imposez
l'urgence. Or ce débat ne nécessitait pas une telle procédure.
Se profilent, derrière tout cela, des suspicions de manoeuvres, et c'est
dommage, car c'est un texte important. Je suis sûr que le Sénat aurait pu
apporter de nombreux éléments positifs à partir de ses réflexions. Nous aurions
pu ouvrir des chantiers nouveaux sur ces sujets, mais nous n'en avons pas le
temps.
Cette procédure d'urgence n'est pas sincère. Le message sur la parité n'est
pas sincère non plus. Que fait-on ? On met les hommes en tête et les femmes en
fin de liste ? Ainsi, nous aurons cet affichage de parité, mais nous n'aurons
que des assemblées masculines !
Si vous voulez qu'on parvienne à la parité, il faut qu'on ait autant de
vice-présidents hommes que de vice-présidents femmes, qu'on partage les
exécutifs. Mais le partage sur les listes que vous proposez manque de sincérité
; c'est faire croire qu'on va faire avancer la parité, mais ce n'est pas donner
véritablement la responsabilité, comme on le souhaite, à ceux qui doivent avoir
toute leur place dans notre assemblée.
Enfin, cette proposition de deuxième tour, je vous le dis, préoccupe beaucoup
l'association des présidents de conseils régionaux qui souhaite, par exemple,
maintenir une assemblée unique de présidents de région dans ce pays. Nous
sommes prêts à faire en sorte que nos convictions républicaines soient les
convictions dominantes, que nos engagements et notre éthique soient vraiment au
coeur de cette vie régionale, et qu'on apprenne, dans ce pays, à vivre avec des
régions de droite et des régions de gauche. Mais n'organisons pas un deuxième
tour ! Ce faisant, monsieur le ministre, vous étendriez les problèmes que vous
connaissez dans votre région à l'ensemble du pays, ce qui, selon moi, serait
préjudiciable à la France !
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'importance
prise par la région dans l'organisation administrative de notre pays est une
évidence. Collectivité territoriale récente, elle est la seule à pouvoir être
comparée aux autres grandes circonscriptions locales des pays partenaires de
l'Union européenne. Quand on se réfère à une organisation régionale, on pense
tout de suite à la plus connue, celles des Länder allemands.
Or, un constat s'impose aujourd'hui : une Europe des institutions
territoriales prend son essor dans le cadre du principe de subsidiarité. Ces
collectivités sont appelées à avoir une importance toujours plus grande. De
plus, elles sont sensibles aux préoccupations des citoyens et elles sont des
lieux d'initiatives privilégiés.
Cependant, en France, la région rencontre beaucoup d'obstacles pour trouver sa
vraie place. Malgré les lois de décentralisation, elle souffre d'un manque de
clarté dans le découpage administratif du pays. De plus, de récents problèmes
apparus à l'occasion des dernières élections régionales démontrent la nécessité
d'une réforme du mode d'élection des conseils régionaux. L'absence de majorités
solides et capables d'assurer dans la stabilité la direction des conseils
régionaux en souligne l'intérêt. A cet égard, le texte présenté par le
Gouvernement est donc d'actualité.
Toutefois, il comporte un certain nombre d'éléments qui semblent d'un intérêt
discutable ou qui méritent une critique attentive.
En premier lieu, le texte du Gouvernement propose de ramener à cinq ans la
durée du mandat des conseillers régionaux qui est actuellement fixée à six ans.
Si l'on compare la durée des mandats électoraux français à celle des autres
pays de l'Union européenne, il s'avère en effet que la plupart des mandats
étrangers sont plus courts que les nôtres, généralement de quatre ou cinq ans.
Sur le principe, il semble donc qu'une telle mesure soit opportune.
Deux observations viennent cependant tempérer ce jugement.
D'une part, est-il vraiment utile de réduire d'une seule année ce mandat ?
Existe-t-il une réelle différence entre un mandat de cinq ans et un mandat de
six années ?
D'autre part, et plus fondamentalement, il est gênant d'opérer la réduction de
la durée du seul mandat régional. Un réel risque de déséquilibre qui pourrait
être de nouveau celui de l'instabilité est alors envisageable. Il faut rappeler
que la durée du mandat des conseillers municipaux est de six ans, de même que
celle du mandat des conseillers généraux. Seul le mandat de député est fixé à
cinq ans. Mais des différences fondamentales existent à l'évidence entre les
fonctions de députés et celles de conseillers régionaux. De toute façon, si le
quinquennat devient la règle pour les mandats électifs en France, le
raccourcissement de celui de conseiller régional se justifie. Mais il devrait
être décidé par une mesure d'ensemble.
En second lieu, un amendement adopté lors de l'examen du projet de loi par
l'Assemblée nationale introduit à l'article 4 du texte initial une parité
hommes-femmes sur chaque liste constituée en vue des élections régionales.
Sur la forme, il convient ici de rappeler qu'aucun projet ni aucune
proposition de loi à caractère constitutionnel n'a pour le moment été soumis au
Parlement concernant l'obligation de respecter une telle parité.
En imposant d'ores et déjà cette disposition pour les listes de candidats aux
élections régionales, l'Assemblée nationale a donc présumé de l'avenir de cette
éventualité constitutionnelle. Il s'agit donc ici d'imposer une véritable
obligation, comme cela avait été le cas en 1982, avec le quota envisagé pour
les élections municipales. A l'époque, le texte adopté précisait qu'« aucune
liste ne peut comporter plus de 75 % de candidats du même sexe ».
Tout en reconnaissant la nécessité d'élargir la participation des femmes à la
vie publique, je rappelle que la disposition adoptée en 1982 avait été rejetée
par le Conseil constitutionnel le 18 novembre de cette même année, au motif que
la Constitution « s'oppose à toute division de citoyens en catégories ». On le
voit, la discussion sur ce problème ne fait donc que commencer, en l'attente
d'une clarification constitutionnelle que nous souhaitons tous.
Ce même article, par amendement adopté à l'Assemblée nationale, fixe à 3 % le
seuil minimal des suffrages exprimés qui se sont portés sur une liste au
premier tour, seuil qui permet de fusionner avec d'autres listes au second
tour. Ce seuil très bas ne peut que favoriser la multiplication des petites
listes peu représentatives. Il conviendrait donc, ainsi que la commission des
lois le préconise, de revenir au taux plus raisonnable de 5 % jusqu'ici en
vigueur.
Le dispositif essentiel du projet de loi comporte une réforme du mode de
scrutin prévu pour l'élection des conseillers régionaux. Il s'agit de résoudre
le problème de l'émergence de majorités instables, favorisée par l'actuelle
représentation proportionnelle par circonscriptions départementales.
La solution préconisée consiste tout d'abord à instituer un mode de scrutin de
liste à deux tours dans une circonscription régionale unique. En outre, se
référant à ce qui existe actuellement pour les élections municipales dans les
villes de plus de 3 500 habitants, le projet tend à insuffler une dose de
scrutin majoritaire dans le scrutin proportionnel à raison d'une prime
s'élevant au quart du nombre des sièges à pouvoir.
La question se pose de savoir si une telle mesure s'avérera suffisante pour
déterminer une majorité stable. La commission des lois s'est prononcée en
faveur d'un renforcement de la prime, l'étendant au tiers des sièges à pourvoir
au lieu du quart retenu dans le projet de loi, mais elle a choisi le cadre des
circonscriptions départementales, choix en totale opposition avec le projet. Ce
dernier traduit en effet la volonté de modifier radicalement le cadre de
l'élection. La nouvelle circonscription électorale englobe la région tout
entière. De cette disposition, il résulterait un important risque de
sous-représentation ou, plus grave encore, d'une absence, certes
exceptionnelle, de représentation d'un département ou de plusieurs
départements.
Comment pallier ces risques ? Sur ce point, il me semble que le projet de loi
peut être amélioré par deux correctifs.
En premier lieu, il serait possible d'introduire une disposition imposant que
le premier quart des listes comprenne obligatoirement un représentant de chaque
département de la région. Une telle modification éviterait tout risque de
non-représentation. En second lieu, il pourrait être envisagé de constituer une
assemblée de représentants des départements de la région. Ce « mini-Sénat »
serait composé de membres désignés par chaque conseil général, à raison d'un
représentant pour 200 000 ou 300 000 habitants. Cette assemblée, élue au second
degré pour représenter l'espace, donnerait son avis, en particulier sur les
projets de budget de la région. Son existence favoriserait une meilleure
concertation entre les départements et le conseil régional et, par là-même, un
aménagement consensuel et cohérent du territoire régional.
Cependant, la commission des lois, comme l'a rappelé clairement son
rapporteur, notre excellent collègue Paul Girod, a souhaité aller plus loin.
Elle s'est prononcée en faveur du maintien d'une représentation à base
départementale. Elle souligne que « la circonscription départementale garantit
de la manière la plus simple la représentation de chaque département ».
J'ai donc renoncé à déposer les deux amendements au texte gouvernemental que
j'entendais présenter. Le premier concernait l'obligation de représentation de
tous les départements de la région dans le premier quart des listes. Le second
visait à accompagner le conseil régional élu par la population d'une assemblée
désignée par les conseils généraux.
Enfin, la commission des lois propose de supprimer toutes les discussions
relatives au fonctionnement des conseils régionaux, notamment celles qui
introduisent une procédure d'adoption sans vote du budget de la région. Elle le
fait avec le souci de ne pas mélanger une loi électorale avec une loi fixant le
fonctionnement des conseils régionaux.
C'est dire que le débat d'aujourd'hui risque de déboucher, dans le cadre de la
procédure d'urgence, sur une commission mixte paritaire difficile, tant les
points de vue des deux assemblées parlementaires paraissent opposés.
Je regrette l'urgence déclarée qui ne me paraît pas justifiée malgré les
difficultés rencontrées par les conseils régionaux. Elle prive le Parlement de
la possibilité d'une élaboration progressive d'une législation dont les enjeux
sont d'importance.
Au-delà du texte en discussion, ces enjeux ont nom décentralisation et
capacité à utiliser le principe de subsidiarité pour rapprocher des citoyens
les pouvoirs de décision dans une France partie prenante de l'Union européenne.
Je souhaite que l'on puisse aboutir aujourd'hui ou prochainement à un texte
d'équilibre.
En attendant, je suivrai avec la plus grande attention le débat dont on ne
peut nier l'importance pour l'avenir de nos régions et de nos départements que
l'on ne saurait oublier. Je suis, pour l'heure, conduit à choisir la solution
proposée par la commission des lois du Sénat, car c'est la seule à offrir
aujourd'hui des garanties aux départements, dont nous sommes les représentants.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et
des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons
débattu, voilà un peu moins d'un an, du fonctionnement des conseils
régionaux.
La situation politique, au lendemain des élections de mars, a relancé la
discussion sur le mode de scrutin.
Le résultat obtenu par le Front national, malheureusement bien trop haut, ne
fut pas en réalité l'événement marquant de ce scrutin, puisque ce parti a
plafonné en nombre de voix. La triste nouveauté fut que, contrairement aux
promesses d'avant élections, quatre régions ont vu se constituer une coalition
scandaleuse banalisant une formation qui se place hors du champ républicain.
Quoi de plus attristant - et de plus dangereux aussi - pour la démocratie
qu'une tricherie après élections laissant l'amer goût à des millions
d'électeurs qu'ils ne se sont pas prononcés en connaissance de cause !
A qui incombe cette préoccupante dérive ? Au mode de scrutin ? Ne prenons pas
les effets pour les causes.
Je suis d'accord avec M. Jean-Pierre Chevènement, qui déclarait le 23 juin à
l'Assemblée nationale : « On ne combat pas le Front national en changeant le
mode de scrutin. On le combat par les idées et par l'action. »
On combat le Front national en refusant son fonds de commerce idéologique, en
prenant des mesures progressistes qui font reculer le chômage, qui s'attaquent
aux inégalités.
De toute évidence, ce n'est pas le scrutin proportionnel qui est responsable
de l'instabilité politique des régions ; mais c'est bien la complaisance de
certaines franges de la droite parlementaire avec un parti qui conteste les
institutions républicaines. La proportionnelle n'est pas une source de déficit
de la démocratie. Je sais que ce propos dénote quelque peu ici. Mais nous
serons appelés à y revenir d'ici peu, probablement dès la discussion sur le
cumul des mandats.
La proportionnelle, nous dit-on, donne une trop grande place aux partis dans
la désignation des candidats et dans la vie politique de la nation. Mais est-ce
là un grand danger ? Est-ce aujourd'hui ce qui menace le fonctionnement de nos
institutions ?
La proportionnelle, en réalité, garantit la juste représentation des citoyens
et, par là même, la représentation des courants d'idées, même minoritaires.
Ce projet de loi a suscité et suscite toujours des réserves au sein de la
gauche. C'est vrai, en tout cas, pour le groupe communiste républicain et
citoyen.
Nous ne pouvons, certes, qu'approuver la volonté de garantir le fonctionnement
des régions. Mais plusieurs aspects de ce projet de loi nous apparaissent
discutables.
La réduction du mandat régional à cinq ans est certainement hâtive. Cette
mesure s'appuie - dites-vous, monsieur le ministre - sur une volonté de
réduction globale des mandats. Mais où en est-on de la réflexion sur les autres
mandats ? Des décisions sont-elles prises ? Sinon, pourquoi tant de hâte pour
celui-ci ?
Un second aspect du texte ne nous semble pas avoir été l'objet d'une réflexion
suffisamment poussée.
La substitution d'une circonscription régionale à une circonscription
départementale nous apparaît critiquable sur plusieurs points.
Premièrement, dans une même région, des départements moins influents, moins
peuplés risquent d'être éliminés progressivement de la représentation
régionale. Ce serait dommageable pour l'ancrage dans la région, institution
jeune.
Deuxièmement, un pas de plus dans l'éloignement du citoyen de ses
représentants risque d'être franchi. Comment ne pas constater le risque
important d'évoluer vers une présidentialisation du scrutin régional avec les
effets conjoints de l'abandon de la circonscription départementale et
l'instauration d'un scrutin qui privilégie la tête de liste ?
Le dernier scrutin a montré que ce processus était déjà en cours. Je n'en
méconnais pas le caractère positif en matière de transparence, mais cela peut
conduire à des exercices solitaires du pouvoir.
Troisièmement, nous constatons, depuis plusieurs années, une mise en cause
progressive du département. Comment s'en étonner, puisqu'il s'agit d'une
spécificité française qui cadre mal avec certaines orientations européennes à
tentation fédéraliste ?
Le département et la région ont une fonction complémentaire et distincte. Que
le moment soit venu de repenser leurs attributions, de simplifier leurs
relations pour renforcer une décentralisation authentique, nous en sommes
persuadés, mais nous sommes défavorables à un débat qui tente d'opposer l'un à
l'autre en classant le département dans la catégorie de l'archaïsme.
Nous maintenons notre préférence pour une circonscription départementale, car
elle incite à une meilleure harmonisation entre région et département et elle
ne subordonne pas une entité à l'autre.
Le troisième point sur lequel je tiens à m'arrêter est celui du renforcement
du poids de l'exécutif régional.
Lors de la discussion du texte créant le « 49-3 » régional, nous avions émis
des réserves sur la place des minorités, tout en votant le texte.
Le présent texte témoigne, à nos yeux, d'un certain penchant à verrouiller les
débats.
Nous voyons bien, monsieur le ministre, que nous sommes contraints de
légiférer dans un contexte politique que la gauche n'a pas voulu.
Les instances régionales ne peuvent continuer à être dessaisies de leurs
prérogatives. Nous ne présenterons donc aucun amendement concernant le titre
III du projet de loi et nous le soutiendrons, mais en étant soulagés qu'il soit
transitoire. Il appelle les forces de gauche à une grande vigilance, pour ne
supporter aucun abus et écouter avec soin chaque voix.
J'en viens maintenant à la place laissée aux minorités par ce nouveau scrutin.
Nos propos diffèrent beaucoup de ceux qui ont été tenus par M. le rapporteur,
qui propose d'élever les seuils, et bien évidemment de ceux de M. Raffarin, qui
suggère une élection à un tour, la prime allant à la liste arrivée en tête.
Ce problème des seuils nous tient particulièrement à coeur.
Je ne pense pas que le haut niveau des seuils actuellement prévu par le projet
de loi ait pour objet d'assurer d'abord le bon fonctionnement des conseils
régionaux. Il s'agit là d'un argument de commodité. La réalité, c'est que de
tels seuils poussent à la bipolarisation de la vie politique et donnent une
suprématie considérable aux principales formations à droite comme à gauche.
Que ma formation politique ait mené, dans l'immense majorité des cas, la
campagne des élections régionales au sein des listes de la gauche plurielle, ce
dont je me félicite, qu'il en ait été de même lors de la plupart des scrutins
municipaux sur listes, option à laquelle nous tenons fermement, ne m'empêche
pas de souhaiter pour toute liste s'inscrivant dans le champ républicain et ne
souhaitant pas se fondre dans une coalition une juste représentation. Nous
fabriquons des modes de scrutin qui ne le permettent pas.
Le fait, par exemple, de fournir, dès le premier tour, une prime de 25 % à la
liste disposant de la majorité absolue n'est pas une obligation.
Nous proposerons, quant à nous, de garantir au minimum la majorité absolue
plus trois sièges, au premier tour, pour la liste majoritaire, comme au second
tour, pour la liste majoritaire ou arrivée en tête, afin de laisser tout
l'espace nécessaire pour l'expression de la démocratie. Est-ce suffisant pour
diriger ? Certainement, avec les mesures proposées au titre III du projet de
loi.
Nous proposons également de supprimer ou au moins de réduire fortement le
seuil de 10 % exigé pour le maintien au second tour. C'est une question très
importante. Il est bien que l'Assemblée nationale ait réduit de 5 % à 3 % le
seuil à atteindre au premier tour pour pouvoir fusionner avec une autre liste.
Fixons au maximum le seuil à 5 % pour le maintien au second tour de scrutin.
Nous suivrons avec beaucoup d'attention votre réponse, monsieur le ministre.
Ne s'agit-il, avec ce projet, que d'une simple transposition du mode de
scrutin municipal, que nous avons approuvé lors de son institution ? Non !
Nous ne suivons pas l'argument qui méconnaît la profonde différence entre
institution communale et institution régionale, cette dernière revêtant un
caractère politique d'une tout autre nature.
Comment comparer un mode d'élection applicable à des villes de 3 500 habitants
à un mode d'élection applicable à des régions regroupant plusieurs millions de
personnes ?
Comment également ignorer que nous ne partons pas, pour ces deux scrutins, du
même point de départ ? Un peu de proportionnelle était insufflée dans le
scrutin des municipales. Le processus inverse se produit pour les régionales.
Ne laissons pas aller trop loin le curseur.
Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, l'appréciation des sénateurs du
groupe communiste républicain et citoyen sur l'ensemble du projet de loi est
mitigée.
La question des seuils nous préoccupe beaucoup. La commission des lois du
Sénat les ayant encore élevés, nous voterons contre le projet de loi si la
majorité de notre assemblée la suit.
Nous souhaitons cependant, monsieur le ministre, que vous preniez en compte
notre volonté d'améliorer le projet de loi.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis la
première élection des conseils régionaux au suffage universel, en 1986, le mode
de scrutin régional n'a cessé de faire l'objet de critiques et de velléités de
réformes.
Deux arguments principaux sont avancés.
Le premier tient à l'inadéquation d'une désignation des conseillers régionaux
dans le cadre départemental, ce qui contribue à obscurcir les enjeux proprement
régionaux et ne favorise pas l'affirmation d'une véritable identité
régionale.
Le second concerne les effets pervers de la représentation proportionnelle
intégrale, qui contribue à fragiliser les assemblées régionales.
Les premiers symptômes de dysfonctionnement sont apparus dès l'élection de
1992. Si l'idée de réformer le mode de scrutin a très vite fait l'objet d'un
consensus, les divergences souvent profondes quant aux modalités de cette
réforme sont aussi très vite apparues.
Jamais la modification d'un mode de scrutin n'a fait l'objet d'une aussi large
concertation, de laquelle n'est sortie qu'une seule décision : il était urgent
d'attendre, donc de ne rien modifier d'ici à l'échéance de 1998.
Le Premier ministre, Lionel Jospin, soucieux de respecter le principe selon
lequel « on ne modifie pas un mode de scrutin dans l'année qui précède, sauf
s'il y a accord entre formations politiques », a pris ses responsabilités. Il
affirma, bien avant le mois de mars 1998, que le Gouvernement proposerait un
projet de loi réformant le mode de scrutin régional sitôt l'installation des
nouveaux conseils régionaux achevée.
Dans l'attente, le Gouvernement admettait cependant la nécessité de mettre en
place un dispositif réformant la procédure d'adoption du budget. La loi du 7
mars 1998 n'avait d'autre prétention que de remédier à des situations de
blocage. C'est dire si elles étaient prévisibles.
C'est une originalité bien française que notre diversité de modes de scrutin !
Mais nous savons que ceux-ci correspondent à la nature et à la portée de chaque
élection, qu'ils doivent chercher à concilier deux objectifs distincts mais
complémentaires, à savoir : assurer une bonne représentation des différentes
sensibilités et dégager une majorité stable.
Ne nous voilons pas la face, mes chers collègues : tout mode de scrutin est
nécessairement un compromis et comporte une finalité politique. Aussi parfait
soit-il, chaque mode de scrutin trouve cependant ses limites face au contexte
politique qui évolue naturellement.
Soyons clairs : ce n'est pas en réformant le mode de scrutin que l'on
combattra l'extrême droite.
M. Dominique Braye.
Vous l'avez favorisée !
M. Guy Allouche.
Ce combat est un combat quotidien, qui passe par des idées et une action
politique concrète, une action fidèle à nos valeurs républicaines.
Mes chers collègues, rien ne serait plus coupable que d'accorder la moindre
respectabilité à un parti fasciste en se rapprochant de lui de quelque manière
que ce soit.
M. Dominique Braye.
Comme vous l'avez fait en 1986 à l'Assemblée nationale !
M. René-Pierre Signé.
Ce n'est pas à vous à nous donner des leçons !
M. Guy Allouche.
La région n'a pas actuellement un mode de scrutin performant.
Un constat s'impose, mes chers collègues : le mode de scrutin régional actuel
a vécu. Depuis mars 1998, la situation d'un grand nombre de régions est connue
pour n'être pas satisfaisante.
M. René-Pierre Signé.
A cause d'alliances honteuses !
M. Michel Souplet.
Avec l'extrême gauche !
M. Guy Allouche.
Les difficultés déjà rencontrées par plusieurs conseils régionaux se sont
accentuées, et cette situation risque de s'aggraver si rien n'est fait pour y
remédier.
Il serait vain de polémiquer sur le fait de savoir qui porte la responsabilité
de cette situation déplorable.
M. Dominique Braye.
Cela vous arrange !
M. Guy Allouche.
Monsieur Braye, s'il vous plaît !
M. Dominique Braye.
C'est une constatation !
M. le président.
Mes chers collègues, je vous rapelle que seul M. Allouche à la parole.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Guy Allouche.
Tirant, comme il est de son devoir, les enseignements des récentes élections
régionales, le Gouvernement, fidèle aux engagements qui ont été pris, présente
un projet de loi comportant deux volets naturellement complémentaires en la
circonstance, l'un portant réforme du mode de scrutin régional, l'autre,
transitoire, concernant le fonctionnement des conseils régionaux.
La critique sur l'urgence déclarée me paraît infondée. La remarque consistant
à dire : « c'est trop tard avant une élection, c'est trop tôt sitôt l'élection
passée » n'est plus de mise. En fait, il est temps et il est tellement temps
que l'urgence s'impose.
(Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean-Jacques Hyest.
Deux lectures sont quand même nécessaires !
M. le président.
Mes chers collègues, nous ne sommes pas à la piscine ! Seul M. Allouche a la
parole, et je vous prie de l'écouter !
M. Guy Allouche.
Mes chers collègues, lors de la discussion des articles, j'aurai l'occasion de
revenir sur le calendrier qui permet effectivement d'invoquer l'urgence.
En tout cas, il est urgent de donner aux régions qui n'ont pas de majorité
stable les moyens de fonctionner convenablement ; sur ce point précis, l'accord
est unanime : soyons donc conséquents !
Si une ou plusieurs régions se trouvaient en état de dysfonctionnement
permanent ou de blocage systématique, la dissolution pourrait être
prononcée.
M. Dominique Braye.
Et voilà, ils y viennent !
M. René-Pierre Signé.
Evidemment que nous y venons !
M. Guy Allouche.
Dans cette hypothèse, elle devrait être suivie dans les trois mois d'une
nouvelle élection, organisée sur la base du nouveau mode de scrutin.
Indépendamment de l'effet dissuasif évident de l'application de ce nouveau mode
de scrutin, les Français ne comprendraient pas que la nouvelle élection se
déroule dans les mêmes conditions qu'au mois de mars 1998, avec un mode de
scrutin par ailleurs si décrié.
M. René-Pierre Signé.
Ils voteraient à gauche !
M. Guy Allouche.
Le projet de loi vise à assurer une meilleure logique au scrutin régional et
une efficacité aux assemblées élues.
Le mode de scrutin proposé a déjà fait ses preuves puisqu'il s'inspire
fortement du mode de scrutin applicable aux communes de plus de 3 500
habitants, à l'exception de Paris, Lyon et Marseille.
M. Michel Souplet.
Avec un scrutin à un tour !
M. Guy Allouche.
Mais enfin, mon cher collègue, depuis quand le scrutin pour les élections
municipales est-il un scrutin à un tour ? Réfléchissez avant d'interpeller !
(Exclamations sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
Ce mode de scrutin municipal, si critiqué en 1982, lors de son adoption, est
aujourd'hui admis et défendu par tous. Le même mode de scrutin est bien adapté
à la spécificité de la région.
En vérité, le mode de scrutin proportionnel que propose le Gouvernement
établit une bonne synthèse entre démocratie et efficacité.
C'est un scrutin démocratique qui respecte le pluralisme, qui permet la
représentation des diverses sensibilités politiques, y compris celles qui sont
minoritaires. C'est aussi un scrutin efficace, car du pluralisme ainsi exprimé
se dégagera une majorité nette et stable.
En effet, si le suffrage universel permet de choisir ses représentants, il
contribue également à élire des gouvernements. Aussi ai-je été étonné de lire à
la page 27 de votre rapport, monsieur Paul Girod, que « les compétences de la
région ne rendent pas indispensables l'existence d'une majorité politique ».
C'est vraiment mal connaître ces compétences ! Par cette formule ramassée, vous
feignez d'oublier que, pour mettre en oeuvre lesdites compétences, il faut des
moyens budgétaires et que, pour avoir un budget, mieux vaut avoir une majorité
politique stable.
M. Jean-Pierre Raffarin.
Mais ce n'est pas une question de majorité de gauche ou de droite !
M. Dominique Braye.
Ils politisent tout !
M. Guy Allouche.
Monsieur Raffarin, pour avoir été quinze ans conseiller régional du
Nord-Pas-de-Calais, je sais qu'il est facile de décider à la majorité absolue
ou à l'unanimité le principe d'une construction, mais lorsqu'il s'agit de
passer à la décision budgétaire, il en est certains pour considérer que, par
exemple, on lève un emprunt trop important. C'est la raison pour laquelle mieux
vaut avoir une majorité stable pour avoir un bon budget.
M. René-Georges Laurin.
Un conseil régional n'est pas un conseil d'administration !
M. Guy Allouche.
Désormais bien compris, le système à deux tours est entré dans nos moeurs
politiques. Le correctif majoritaire de ce mode de scrutin régional s'impose
naturellement, car il assurera à la région la continuité, la stabilité de ses
actions, véritable garantie de son efficacité. Les élus ne seront plus sur la
ligne de crête entre ce que j'appelle la compromission et le chantage. Pour
redonner force et vigueur à la politique et aux politiques, la transparence, la
clarté, le respect du corps électoral et des choix qu'il a exprimés doivent
constamment nous inspirer et nous guider. Notre pluralisme politique ainsi que
le fait qu'aucune formation politique dans notre pays ne puisse à elle seule
obtenir la majorité absolue conduisent à nouer des alliances.
M. René-Pierre Signé.
Mais pas n'importe lesquelles !
M. Guy Allouche.
Les Français comprennent ces alliances. Ils les admettent et les approuvent au
premier tour ou en vue du second tour. En revanche, ce qu'ils condamnent avec
force - et qui oserait le leur reprocher ? - ce sont les alliances honteuses du
troisième tour, passées dans leur dos,...
M. René-Pierre Signé.
Vraiment honteuses !
M. Guy Allouche.
... à l'occasion de tractations occultes, après qu'ils se sont exprimés. Les
Français savent que, si la politique est l'art du compromis, elle ne peut pas
être celui de la compromission.
M. Jean-Pierre Raffarin.
C'est la semaine de toutes les compromissions !
M. Guy Allouche.
Tout à l'heure, j'ai entendu M. Raffarin déclarer que la semaine du deuxième
tour est celle de tous les dangers.
M. Josselin de Rohan.
De toutes les magouilles !
M. Guy Allouche.
J'ai noté : « de tous les dangers ».
M. Jean-Pierre Raffarin.
J'ai dit « magouilles » !
M. Guy Allouche.
Vous souhaiteriez que cela se passe après ! Nous préférons que tout se passe
avant, dans la clarté.
M. Jacques Valade.
Des magouilles, avant, il y en a, c'est sûr !
M. Dominique Braye.
Ne nous faites pas de faux procès, monsieur Allouche !
M. Guy Allouche.
Chaque formation politique est libre de nouer toutes les alliances qu'elle
veut.
(Ah ! sur les travées du RPR.)
Nous souhaitons seulement que cela
se passe dans la clarté,...
M. Michel Duffour.
Très bien !
M. Guy Allouche.
... afin que les électeurs puissent se prononcer en pleine connaissance de
cause. Cela va dans le sens de l'honnêteté politique qui est exigée chaque jour
un peu plus par nos concitoyens.
S'agissant de la circonscription électorale, des divergences subsistent entre
départementalistes et régionalistes, malgré une évolution sensible en faveur de
la liste régionale.
Là aussi, un constat s'impose : la circonscription départementale a privé la
région de son identité. Elle est souvent apparue comme un « super conseil
général » et beaucoup de conseillers régionaux se sont davantage souciés des
intérêts de leur secteur respectif que de l'intérêt régional. Le saupoudrage
des crédits et les financements croisés ne correspondent pas à la fonction
structurante de la région. Au demeurant, il n'a jamais été dit ni écrit que la
région « nouvelle entité administrative » devait être la simple addition ou la
juxtaposition des départements.
En fait, la crainte, au demeurant légitime, d'une circonscription régionale
est essentiellement exprimée par les départementalistes, qui voient là le signe
de la disparition à terme des départements. Mes chers collègues, le débat sur
cette question est devenu récurrent et je crains fort que la solution ne soit
pas trouvée de sitôt.
L'identité régionale doit être affirmée par le choix d'une circonscription
régionale, ce qui n'est pas antinomique de la juste représentation de tous les
départements. L'assemblée régionale doit être élue sur un territoire qui «
colle » à son champ d'action.
Permettez-moi de reprendre ici la formule forte qu'a utilisée à plusieurs
reprises le président Valéry Giscard d'Estaing : favorisons l'éveil d'une
conscience régionale là où elle n'existe pas encore, par le choix du cadre
régional.
En reconnaissant la région comme circonscription politique à part entière, en
lui permettant d'être mieux identifiée, plus « lisible », plus cohérente et
plus responsable devant les citoyens, la collectivité régionale entrera de
plain-pied dans le XXIe siècle.
A propos de la prime majoritaire, je veux redire ici que, pour les élections
régionales, elle n'a de véritable sens qu'à l'échelle de la circonscription
régionale.
Mme Dinah Derycke.
C'est évident !
M. Guy Allouche.
Toute autre proposition se révélerait politiquement inefficace. En effet,
attribuer des primes d'un tiers des sièges dans le cadre départemental, c'est
courir le risque de les faire s'annuler selon l'orientation politique des
différents départements de la région. De plus, ce serait injuste au regard du
nombre inégal de conseillers régionaux désignés par chaque département. De
surcroît, cela laisserait un nombre de sièges insuffisant pour la répartition à
la plus forte moyenne, sauf à augmenter les effectifs de tous les conseils
régionaux.
Adopter cette proposition, ce serait en outre éliminer des minorités parfois
importantes. Cela ne correspond pas aux objectifs visés à travers ce projet de
loi, dont la nécessité est reconnue par M. Paul Girod dans son rapport.
D'ailleurs, monsieur le rapporteur, à la page 29 de votre texte, vous écrivez
que ce risque vous « paraît loin d'être inéluctable ». Aussi, pour tenter de le
réduire au maximum, vous proposez de porter la prime majoritaire du quart des
sièges au tiers des sièges.
La hauteur de la prime majoritaire n'annule pas l'effet de compensation, et
j'affirme qu'il manquera des sièges lors de la répartition.
C'est, au demeurant, l'un des enseignements qu'avait tirés le groupe de
travail mis en place par la commission des lois en 1996. Nous avions ajouté
qu'il faudrait des projections probantes pour tenter de convaincre du
bien-fondé de cette disposition.
Où sont donc aujourd'hui les projections probantes, monsieur le rapporteur
?
Avec cette prime majoritaire à l'échelon départemental, la commission des lois
s'engage dans une voie sans issue. Qu'on ne s'étonne pas, dès lors, que nous
refusions de la suivre. J'y reviendrai lors de la discussion des articles.
Cela étant, monsieur le ministre, je veux espérer que la prime de 25 %
permettra d'atteindre la majorité absolue dans tous les cas, y compris en cas
de quadrangulaire au deuxième tour.
M. Jean-Jacques Hyest.
Voilà une bonne question !
M. Guy Allouche.
J'attends de vous, monsieur le ministre, une réponse sur ce point.
Le titre III du projet de loi traite du fonctionnement des conseils
régionaux.
Le mode de scrutin actuel, la dispersion des voix, l'absence de majorité
absolue ont accentué les dysfonctionnements. La majorité relative pourrait
fonctionner, mais la conjonction, volontaire ou non, des oppositions l'en
empêche. Les majorités de refus se forment plus facilement que les majorités
d'idées. La loi du 7 mars 1998 s'est révélée imparfaite et des difficultés ont
surgi dans sa mise en oeuvre parce que nous avions omis de prévoir le vote des
taux, décision intimement liée à la procédure d'adoption budgétaire.
M. Jean-Jacques Hyest.
C'était une loi bâclée !
M. Guy Allouche.
Même si le dispositif proposé présente des inconvénients au regard du droit
commun et de la démocratie locale, il permettra de préserver l'avenir, de
responsabiliser tous les élus, notamment ceux des oppositions régionales.
Je rappelle que ce dispositif est dérogatoire et transitoire puisqu'il cessera
de s'appliquer en 2004, avec le renouvellement général des conseils régionaux
et la mise en oeuvre du nouveau mode de scrutin. Il tend à clarifier les
modalités de recours à cette nouvelle procédure d'adoption des budgets, ainsi
que celles de son utilisation.
Est-il nécessaire de rappeler que les conseils régionaux ont besoin de
fonctionner correctement et de disposer de budgets proposés par l'exécutif,
puis débattus et votés par les élus régionaux ?
Particulièrement en l'absence de majorité stable, les électeurs attendent des
élus qu'ils se comportent en femmes et en hommes respectueux des intérêts de la
population, et non de leurs intérêts personnels oupartisans.
Oui, ces dispositions transitoires sont un appel à la raison, au sens des
responsabilités, au dialogue constructif, à la concertation, à la recherche du
compromis. Aussi serait-il vain de vouloir nier ses effets dissuasifs.
L'Assemblée nationale a limité l'usage de cette procédure à deux délibérations
budgétaires d'un même exercice. Afin d'éviter toute dérive vers le pouvoir
personnel...
M. Jean-Jacques Hyest.
Il y a donc un risque !
(Sourires.)
M. Josselin de Rohan.
C'est avec votre loi qu'il y a un tel risque !
M. Guy Allouche.
Il y a toujours un risque de dérive vers un pouvoir personnel !
(Où ? Où ? sur les travées du RPR.)
Afin de réduire ce risque, donc, il est stipulé que, pour avoir recours à
ces « procédures rationalisées », le président doit obtenir l'accord préalable
du bureau désormais institutionnalisé et composé des vice-présidents ayant reçu
délégation d'une partie des attributions du président.
M. Dominique Braye.
Merci pour l'usine à gaz !
M. Jacques Valade.
C'est un soviet !
M. Guy Allouche.
Aussi critiquable soit-il, ce dispositif a sa logique. Comment ne pas admettre
qu'il est difficile pour un président d'appliquer un budget dont il n'est pas
le maître d'oeuvre et, qui plus est, qui ne correspond pas au programme sur la
base duquel il a été élu ?
M. Josselin de Rohan.
A qui la faute ?
M. Guy Allouche.
Chapitre par chapitre, un budget peut, très démocratiquement, être dénaturé,
plaçant ainsi l'exécutif dans une position politique intenable. Le projet de
loi lui offre alors « une seconde chance ». Avec l'accord indispensable de son
bureau, le président soumet un budget amendé ou non à une nouvelle
délibération.
Si une majorité absolue rejette ce nouveau projet de budget, quoi de plus
normal qu'une autre majorité absolue - ou la même - clairement et politiquement
affichée, présente un budget alternatif accompagné du nom de celui ou de celle
qui sera appelé à diriger l'assemblée régionale ? De même, quoi de plus normal
qu'il soit précisé sur quelles composantes politiques il ou elle s'appuiera
?
M. René-Pierre Signé.
Bravo ! Il faudra clairement afficher l'alliance avec le Front national !
M. Michel Mercier.
Et, donc, conforter celui-ci !
M. Guy Allouche.
Pour conclure, je dirai que, si la démocratie permet l'expression de la
volonté populaire, elle doit aussi parvenir au juste équilibre entre le respect
du pluralisme et la possibilité de gouverner les conseils régionaux. Puisque
notre démocratie doit de surcroît aussi évoluer, évitons de figer
l'organisation territoriale de notre pays.
Ce projet de loi n'est pas l'apocalypse.
(Murmures sur les travées du R.P.R.)
M. René-Pierre Signé.
C'est l'apocalypse pour la droite !
M. Guy Allouche.
Que la majorité sénatoriale se garde bien de récidiver !
Même si je n'étais alors pas encore sénateur, je me souviens du comportement
qu'elle a adopté en 1982 au sujet du scrutin municipal. Je comprends que
l'opposition veuille d'abord s'opposer, mais qu'elle ne condamne pas
aujourd'hui ce qu'elle jugeait souhaitable hier !
Les situations de blocage que nous constatons et que nous déplorons dans
quelques conseils régionaux risquent de gagner l'ensemble des dix-neuf régions
d'ici à 2004. Les laisser perdurer serait irresponsable. La majorité
sénatoriale ne peut établir un constat de carence et, dans le même temps,
refuser les solutions proposées, en décidant de les supprimer.
Ce texte fait avancer la reconnaissance du fait régional dans notre pays. Dans
cet ensemble, à mes yeux cohérent, il prend son véritable sens. Il rendra
l'élection régionale plus lisible, les assemblées régionales plus efficaces et
les majorités stables plus responsables.
C'est parce que ce projet de loi marque un progrès, qu'il s'inscrit dans la
modernité de nos institutions en prévoyant également la parité de la réductions
du mandat à cinq ans, que le groupe socialiste du Sénat l'approuvera.
(Bravo ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, derrière la
discussion sur ce projet de loi à l'issue incertaine, se profile la question
suivante : quel avenir pour la région en France ?
Depuis l'échec du référendum de 1969, la région émerge, étape après étape et
lentement. La création des Coder - les commissions de développement économique
régional - dans les années soixante, puis celle des conseils régionaux, et des
conseils économiques et sociaux au début des années soixante-dix constituaient
de premières étapes.
L'élection au suffrage universel des conseillers régionaux en 1986 a
représenté une phase importante, même s'il est regrettable qu'elle ait parfois
produit dans les régions un certain saupoudrage qui ne s'inscrivait pas dans
leur vocation première.
M. Lucien Lanier.
Très bien !
M. Daniel Hoeffel.
Le dernier obstacle à l'émergence de la région est, incontestablement, le mode
de scrutin. En effet, dans sa forme actuelle, il ne permet guère à de
véritables majorités de se dégager au sein des conseils régionaux. Je ne suis
d'ailleurs pas sûr que d'une part, les défenseurs de la centralisation, et
d'autre part les partisans de la départementalisation, - dont j'étais - aient
été particulièrement empressés de voir sauter ce dernier verrou.
M. Guy Allouche.
Très bien !
M. Daniel Hoeffel.
Disons les choses telles qu'elles sont !
M. Guy Allouche.
Très bien !
M. Daniel Hoeffel.
En mars dernier, à l'occasion du débat sur un projet de loi concernant les
conseils régionaux, nous avons tous souhaité une modification très rapide du
mode de scrutin. Le résultat des élections régionales a mis en évidence la
nécessité de ce changment. Toutefois, s'il doit intervenir, il ne saurait
surtout pas s'opérer dans l'improvisation ; j'approuve totalement M. le
rapporteur sur ce point.
Je rends hommage aux efforts de ce dernier. En effet, dans une situation
complexe et difficile, il s'efforce de dégager une solution réaliste, ce qui
nous le savons, n'est pas facile.
Quel mode de scrutin pour les régions demain ? Permettez-moi d'évoquer une
citation faite ici même le 20 avril 1951 : « Le scrutin n'est pas fait pour
l'élu, il n'est pas davantage fait pour l'électeur ; le scrutin est fait pour
le gouvernement de la nation et, j'ajouterai, pour le gouvernement de la
région. » C'est Michel Debré qui, dans cette enceinte, avait fait cette
déclaration qui me paraît plus que jamais d'actualité.
Pour ma part - et je m'exprime à titre personnel - mes propositions sont de
trois ordres.
Premièrement, je suis favorable à la proportionnelle avec une prime pour la
liste arrivée en tête parce que c'est un gage d'efficacité. Faute de cette
prime, la proportionnelle ne dégage pas de majorité.
Deuxièmement, je suis hostile au deuxième tour de scrutin.
M. Serge Vinçon.
Très bien !
M. Daniel Hoeffel.
Je suis favorable à un seul tour de scrutin. Le deuxième tour, c'est le ver
dans le fruit.
MM. Serge Vinçon et Jean-Patrick Gurtois.
Absolument !
M. Daniel Hoeffel.
En revanche, en imposant un effort de clarté et de transparence, un seul tour
permet d'éviter les dissensions.
(Très bien ! sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains
et Indépendants.)
Surtout, un seul tour préserve des obscures négociations qui, en une
semaine, jettent - ô combien ! - le discrédit sur la classe politique.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR
et des Républicains et Indépendants.)
Troisièmement - et c'est sur ce point que j'admets que les opinions
puissent diverger - je suis favorable au déroulement des élections régionales
dans une circonscription régionale.
Si nous voulons que la région ait son identité, que la population soit
sensibilisée au scrutin régional, il me paraît normal et logique de choisir la
circonscription régionale comme lieu d'exercice du mode de scrutin régional. Je
fais confiance aux responsables politiques pour permettre que, loin d'être
antinomiques, circonscription régionale et représentation équitable de tous les
départements soient parfaitement conciliables.
Telle est, brièvement exprimée, mon opinion sur ce sujet dont me paraissent
dépendre en grande partie le caractère gouvernable ou non de la région et la
capacité d'émergence de celle-ci dans le respect des voeux de ceux qui, dans le
passé, déjà, militaient pour son efficacité. Pour avoir été longtemps président
de conseil général, je reste profondément attaché à cette collectivité.
Je n'ignore pas combien il est délicat de trancher un tel problème. Il faut
agir dans la réflexion et non dans la précipitation. Si la difficulté l'emporte
probablement aujourd'hui, je suis sûr que, demain, les fait imposeront ce mode
de scrutin qui triomphera.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants, du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE).
M. le président.
La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la brièveté
du temps qui nous est imparti pour l'unique examen de ce texte ne nous permet
pas de commenter comme elle le mériterait la singularité d'une opération menée
aussi benoîtement que rondement par le Gouvernement.
Passons donc sur les questions de forme pour aborder les problèmes de fond.
Sans entrer dans le détail du double dispositif qui nous est proposé, je m'en
tiendrai à deux questions qui, dans mon esprit, sont préalables.
Premièrement, est-il raisonnable, est-il même possible - et je rejoins ici le
propos tenu par M. Daniel Hoeffel il y a quelques instants - de mieux définir
le mode de scrutin des régionales sans avoir auparavant défini ce que nous
attendons de la région ?
Deuxièmement, est-il nécessaire, est-il légitime d'infliger aux élections
régionales - mais, sur ce point, je sais que je suis un peu isolé - la
manipulation, à mon avis fort peu démocratique, à laquelle sont actuellement
soumises les élections municipales dans les villes de plus de 3 500 habitants
?
Poser la première question, c'est d'abord s'interroger sur le point de savoir
s'il n'est pas grand temps de mettre un peu d'ordre dans l'organisation
territoriale de notre pays.
C'est ensuite prendre conscience que, sous le beau nom de décentralisation,
nous avons empilé nos structures territoriales en les plaçant sur un pied
d'égalité politique tel qu'il en résulte un inextricable enchevêtrement de
pouvoirs et de compétences encore aggravé par le maintien, le retour en force
de l'organisation proprement étatique avec toute la hiérarchie des préfets et
des sous-préfets.
Avouons, chers collègues, que nous avons beaucoup brocardé la situation. A la
veille de la Révolution, la situation en France était en réalité beaucoup plus
simple, beaucoup plus claire et, donc, beaucoup plus propice à l'efficacité que
celle que nous connaissons actuellement.
M. Josselin de Rohan.
Très bien !
M. Pierre Fauchon.
Si cette forêt vierge institutionnelle peut sans doute être perçue comme
créatrice d'emplois - ou non - supposés, il n'en demeure pas moins qu'elle est
aussi à l'origine de frais généraux, de dilution des responsabilités, de
prolifération technocratique et d'une opacité telle que, quel que soit le mode
de scrutin, les électeurs sont incapables d'exprimer dans leur vote leurs
attentes à l'égard de l'institution concernée. Cela réduit leurs choix à des
options politiques sommaires et inappropriées puisque les partis se définissent
par leurs options nationales, d'où suit la désaffection, les trop nombreuses
abstentions que nous connaissons et sur lesquelles les politiques ne versent
guère, avouons-le, que des larmes de crocodile.
Certains penseront que je m'éloigne du sujet. Je ne le crois pas. Quelle doit
être notre première préoccupation lorsque nous avons à décider d'un mode de
scrutin, sinon de faire en sorte que l'électeur ait une vue claire des enjeux ?
Or l'enjeu d'une élection régionale n'est pas de confier un pouvoir et moins
encore un pouvoir absolu à un parti politique plutôt qu'à un autre, elle est de
permettre au citoyen de participer aussi efficacement que possible à la
conduite des affaires qui le concernent. Voilà ce que l'on oublie trop souvent.
C'est pourquoi il faut d'abord lui permettre d'avoir une vue claire de ce que
sont ces affaires.
A fortiori,
les mécanismes proposés tendant à fortifier le pouvoir
exécutif ne se justifient - à supposer qu'ils se justifient, ce dont je doute
aussi - que par le caractère supposé éminent du cadre régional, ce qui n'est
aucunement établi en l'état actuel des choses.
Entre le département et la région, la France doit faire un choix qui soit
digne de ses traditions de rationalité. C'est là véritablement une urgence
autrement plus sérieuse que celle qui nous réunit ce soir, monsieur le ministre
!
Nous pouvons concevoir la France comme constituée géographiquement d'un
ensemble de régions qui sont les pôles forts des pouvoirs décentralisés et, dès
lors, les départements sont des échelons de proximité, certes tout à fait
importants pour la bonne application des politiques, mais dont les
responsabilités sont de l'ordre de la mise en oeuvre et non de l'ordre de la
définition de ces politiques ; il s'ensuit que les départements peuvent être
gérés par des délégations du conseil régional, ce qui permet cohérence, clarté
et allégement bureaucratique.
Mais nous pouvons avoir peut-être - je l'admets -d'aussi bonnes raisons de
considérer que le département reste le meilleur cadre des politiques
décentralisées car il est devenu une seconde nature et que la France est ainsi
faite. Dans ce cas-là, c'est la région qui n'est qu'un échelon de conception
générale, de définition et de mise en oeuvre de quelque politique d'ensemble,
auquel cas c'est elle qui peut être gérée par des délégations de
départements.
Entre les deux thèses, admettons que l'hésitation est permise. Le débat peut
se prolonger indéfiniment au prix de pérenniser les inconvénients que personne
ne devrait pouvoir ignorer et que chacun d'ailleurs déplore en son
particulier.
Mais pour trancher un tel débat, qui est tout à fait fondamental et qui est
rendu encore plus important par la perspective de l'Union européenne, je fais
appel à vous, monsieur le ministre. Ce n'est pas à la volonté des partis,
c'est-à-dire, disons-le, à leurs intérêts, qu'il faut s'en remettre, mais c'est
à tous les Français d'en décider. N'y a-t-il pas, dans notre Constitution, une
disposition prévoyant le référendum pour l'organisation des pouvoirs publics ?
Eh bien, voilà un excellent thème de référendum !
Ma conclusion sur ce point est que, avant de traiter de la durée des mandats
et des moyens d'action des exécutifs, il faut, pour clarifier et pour
moderniser durablement notre organisation territoriale, inviter solennellement
les Français à faire leur choix entre les types d'organisations territoriales,
région ou département, qui sont actuellement juxtaposées et concurrentes. Nous
devrions profiter de cette longue période sans élections pour organiser dans la
sérénité une telle consultation. Le choix qui en résultera nous permettra alors
seulement d'aborder dans la clarté les questions qui nous sont aujourd'hui
soumises.
Suis-je seul à penser cela ? Je ne le crois pas. Ai-je quelque chance d'être
entendu ? Je ne le crois guère. Sans doute dois-je donc aborder la seconde
question.
Je m'en tiendrai ici à une observation générale qui, je le sais, ira à
contre-courant des opinions habituellement exprimées.
Je me demande, pour ma part, après l'expérience des scrutins municipaux que
nous connaissons dans les villes de plus de 3 500 habitants, s'il n'y a pas
quelque complaisance à présenter ce type de scrutin comme un modèle, alors
qu'il constitue en lui-même, en quelque sorte, une manipulation électorale
permettant en fait trop souvent à une minorité de dicter sa loi.
(Exclamations.)
Oui, mes chers collègues, c'est une manipulation ! Il y a certes de
bonnes manipulations dans d'autres domaines ; mais enfin, c'est une
manipulation !
N'oublions pas que plus de quarante villes de plus de 30 000 habitants, telles
Lille, Tours, Metz, Perpignan, Nice, Aix-en-Provence, sont en fait dirigées par
des minorités qui, dès le lendemain de l'élection, oublient qu'elles ne sont
que des minorités et se comportent ensuite pendant six ans comme si elles
étaient des majorités !
Qui ne voit, par ailleurs, ce qu'il y a de déplorable dans la profonde cassure
qui en résulte et qui sépare les uns des autres, écartant la moitié des
habitants d'une cité, voire plus, de la gestion quotidienne de celle-ci,
c'est-à-dire de la gestion des affaires qui les touche au plus près et qui n'a
rien à voir avec les grands enjeux de la politique nationale, pour lesquels de
telles cassures sont probablement nécessaires ?
Est-il justifié de faire subir une telle mutilation aux principes essentiels
de la démocratie pour garantir ce que M. Allouche dénomme pompeusement «
l'efficacité », et qui n'est quelquefois que le règne d'un homme ou de quelques
hommes ?
La réalité est que nos municipalités sont régies par un système de type
monarchique. Il paraît que c'est très bien ! Nous sommes revenus à une
monarchie élective. Je suis très réservé sur ce point.
M. Jean-Jacques Hyest.
Il n'y a pas que les municipalités !
M. Pierre Fauchon.
Certes !
Si un tel système peut avoir des raisons d'être pour les grandes affaires
nationales, sa légitimité reste cependant à démontrer, selon moi, sur le plan
local où la recherche patiente et modeste d'un consensus large me paraît être
une démarche bien préférable.
Ayant exprimé ces réserves sur le scrutin municipal, je ne saurais aisément,
on s'en doute, souscrire à son extension à la région alors surtout qu'elle
serait renforcée par des mécanismes relevant purement et simplement de
l'autoritarisme. C'est l'autoritarisme institutionnalisé, un point c'est tout !
C'est la négation complète de la séparation des pouvoirs.
Il faut voir ce que sont devenus les conseils municipaux dans la plupart de
ces villes ! On expédie deux cents dossiers en une heure et demie puisque les
personnes qui soutenant le maire - la fameuse minorité devenue une prétendue
majorité - ne veulent pas le contester et puisque l'opposition, d'ailleurs
réduite à la portion congrue, sait qu'il n'y a rien à dire ! Où est l'exercice
vivant d'une démocratie dans ces cas-là ?
(Exclamations sur les travées socialistes.)
Et faut-il que ce soit un gouvernement de gauche qui propose une telle
réforme ? Voilà qui donne à réfléchir, monsieur le ministre, sur les véritables
mobiles ! Je n'irai pas plus loin de peur de fâcher mon collègue M. Allouche.
En tout cas, il sait bien, comme vous tous, mes chers collègues, ce que je veux
dire quand j'évoque les mobiles.
M. Dominique Braye.
Absolument !
M. Pierre Fauchon.
Disons que ces mobiles ont quelque chose qui n'est pas digne en réalité des
responsabilités gouvernementales.
Pour ma part, je ne voterai pas ce texte et j'attendrai le moment où une
meilleure sagesse nous fera préférer l'un des modes de scrutin capables de
donner aux régions la vitalité authentiquement démocratique qui leur manque :
la représentation proportionnelle intégrale ou - ce serait sans doute mieux -
le scrutin uninominal, avec des circonscriptions régionales, le seul scrutin
qui fasse vraiment confiance aux citoyens - mais veut-on vraiment leur faire
confiance ? - et qui peut d'ailleurs s'accompagner d'une dose de
proportionnalité.
La démocratie gagnera en vitalité ce que les exécutifs perdront peut-être en
autorité, mais pas nécessairement en efficacité, car l'expérience prouve qu'on
finit toujours par trouver des consensus quand on y est obligé. Je suis contre
la démocratie d'affrontement que vous voulez développer parce que je suis pour
une démocratie de composition et de compréhension, qui est tout le contraire de
ce que vous nous proposez.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR, ainsi que
sur certaines travées des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. de Rohan.
M. Josselin de Rohan.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi dont nous débattons aujourd'hui nous conduit à dresser le bilan du
fonctionnement des institutions régionales sous l'empire de la loi du 10
juillet 1985 et à nous prononcer sur la pertinence et la portée des
modifications proposées par la nouvelle législation.
Comparée à d'autres entités, comme les communes ou les départements, la région
ne peut s'enorgueillir d'un long passé.
Pendant dix années, de 1972 à 1982, la région était non pas même une
collectivité locale, mais un simple établissement public. Elle ne disposait pas
d'un domaine de compétences spécifiques, ses attributions étant concurrentes de
celles d'autres collectivités. Les membres du conseil régional étaient élus au
second degré et non au suffrage universel direct.
Il aura fallu attendre 1986 pour que la région apparaisse vraiment comme une
institution originale. Il s'en faut de beaucoup, à l'heure actuelle, que le
public ne connaisse vraiment l'étendue de ses attributions, la consistance de
ses actions et les modalités de fonctionnement de l'assemblée régionale.
On prête souvent à la région beaucoup plus de pouvoirs qu'elle n'en a
véritablement, ou bien on ignore le rôle qui est le sien dans des domaines
aussi importants que ceux de l'emploi et de la formation, de l'environnement ou
de l'aménagement du territoire.
Les régionalistes les plus convaincus jugent que l'Etat jacobin a laissé peu
d'espace et de moyens aux régions. Les « départementalistes » voient encore
dans cette institution un rival potentiel et, comme l'a très excellemment dit
notre collègue M. Hoeffel, ne s'attristent qu'à moitié des atteintes qu'on lui
porte. Nombre de citoyens estiment, quant à eux, que notre pays compte beaucoup
trop d'étages administratifs, source de surcoûts, de lourdeurs et de conflits
d'attribution.
Malgré le travail remarquable effectué par les conseils régionaux et par leurs
présidents, toutes tendances confondues d'ailleurs, cette collectivité semble
encore avoir du mal à trouver sa place au sein de nos institutions. Il est
clair que le mode de désignation de leurs élus et les règles de fonctionnement
des assemblées régionales n'ajoutent guère à leur renom tant ils paraissent
complexes et opaques aux électeurs.
Pour le malheur des conseils régionaux, leurs membres auront été désignés à la
représentation proportionnelle à la plus forte moyenne.
C'était jeter une ombre sur les régions et les vouer au départ à l'impuissance
au moment même où, pour la première fois, les conseillers régionaux étaient
élus directement par la population.
Le choix n'était pas fortuit et le mode de scrutin retenu était une arme au
service d'un objectif précis. Il s'agissait de veiller à ce que, dans les
régions comme dans le pays, la majorité virtuelle, qui n'était pas celle qui
gouvernait la France au moment où la loi était élaborée, ne puisse obtenir la
majorité absolue ou n'y parvienne que difficilement.
En 1986, l'entreprise a assez largement échoué au plan régional, même si elle
a été couronnée de succès à l'échelon national.
En 1992, le but recherché a été enfin atteint puisque seuls deux présidents de
région ont été élus à la majorité absolue et que quatre régions sur vingt-deux
ont bénéficié d'une majorité homogène.
En 1998, c'est le triomphe. Trois conseils régionaux, en tout et pour tout,
disposent d'une majorité absolue, tous les autres vivant plus ou moins
difficilement leur vie.
Nul mieux que Michel Debré, dans son livre intitulé
Mort de l'Etat
républicain
, ouvrage qui demeure actuel bien qu'il ait été écrit voilà
cinquante ans, n'a dépeint les méfaits de la représentation proportionnelle. Il
suggérait que, pour affaiblir l'Amérique, les Russes couvrent d'argent, d'or et
de pierreries une organisation préconisant l'introduction de la représentation
proportionnelle pour l'élection de la Chambre des représentants et d'un scrutin
à deux tours pour l'élection du Sénat et du Président des Etats-Unis.
Alors, écrivait-il, « en moins de vingt ans, on verrait surgir un parti
ouvrier ou plutôt deux qu'un seul, un parti des fermiers, un parti de l'Ouest
et un parti de l'Est. Avec un peu de chance, les sectes religieuses se
mêleraient à la scène politique. De divisions en querelles, en moins d'un
demi-siècle, les Etats-Unis auraient cessé de jouer un rôle dans le monde. La
bombe atomique est une arme incertaine comparée à un tel procédé qui tue l'Etat
en lui ôtant tout pouvoir, en le privant de sa volonté.
M. René-Georges Laurin.
Très bien !
M. Josselin de Rohan.
On peut transposer dans les régions de 1998 cette description prémonitoire des
conséquences de la représentation proportionnelle.
Ici, la gauche et la droite se fractionnent au moins en trois ou quatre
groupes ou sous-groupes. Là, c'est un chasseur qui tient la majorité au bout de
son fusil
(Sourires.)
; dans telle autre région, des transfuges assurent
un appoint ou bien déséquilibrent l'équipe en place. Les minorités conscientes
de leur poids sont bien décidées à en user et à en abuser, et le fait de
monnayer son vote n'est pas simplement une image, aujourd'hui !
(Applaudissements sur certaines travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
Comme le note pudiquement M. le rapporteur, « depuis six mois les difficultés
rencontrées par plusieurs conseils régionaux se sont accentuées ». On assiste
en effet à d'intéressantes manifestations. Passons sur les désignations
récentes des présidents et des bureaux qui ont donné lieu à des péripéties que
l'Italie même nous envie
(Sourires.)
, mais nous avons déjà observé
l'émergence de majorités de rencontre, issues d'étranges conjonctions, qui font
obstacle aux propositions des exécutifs régionaux, qu'il s'agisse de projets
financiers ou d'orientations nouvelles.
D'ores et déjà, les négociations budgétaires s'annoncent ardues dans nombre de
régions, prélude au recours à la procédure de cette caricature de 49-3 que l'on
veut nous imposer, ou aboutissement final, consécration de la décentralisation,
à l'établissement du budget par le préfet de région. Voilà un grand progrès
pour la démocratie !
M. Hilaire Flandre.
Bravo !
M. Josselin de Rohan.
Pouvons-nous attendre de la réforme proposée une amélioration et des remèdes à
la situation présente ?
M. Hilaire Flandre.
Non !
M. Josselin de Rohan.
Et d'abord, quelle justification y avait-il au recours à la procédure
d'urgence ?
M. Hilaire Flandre.
Aucune !
M. Josselin de Rohan.
Craint-on que la navette n'aboutisse à édulcorer le caractère idéologique de
ce projet de loi ?
M. Hilaire Flandre.
Oui !
M. Josselin de Rohan.
Pourquoi tant de hâte quand la prochaine échéance électorale est seulement en
2004 ? Tout ce que nous pouvons constater, c'est que le recours à cette
procédure marque le peu de considération que le Gouvernement porte à la Haute
Assemblée.
(Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste. - M. le rapporteur applaudit
également.)
Il semble que les auteurs du projet de loi doutent même de l'efficacité
de leur texte, car si ce dernier avait pour objet et pour conséquence d'assurer
aux régions des majorités stables et homogènes, il serait inutile de multiplier
les procédures permettant d'adopter sans vote, par le recours à ce pseudo 49-3,
des projets financiers, ou d'inventer une procédure de vote bloqué qui, M. le
rapporteur l'a justement remarqué, aboutirait à un véritable dessaisissement
des assemblées délibérantes !
Et, comme si le fonctionnement des assemblées régionales n'était pas
suffisamment compliqué, l'Assemblée nationale veut maintenant que les séances
des commissions permanentes deviennent publiques
(Exclamations sur les travées du RPR),
ce qui donnera lieu à
d'interminables joutes oratoires sous les yeux de la presse ou à des séances de
pure forme, ce qui affectera la sérénité des débats.
M. René-Georges Laurin.
C'est de la démagogie !
M. Jean Chérioux.
C'est dérisoire !
M. Josselin de Rohan.
Il y a pis : on institue une délégation obligatoire aux vice-présidents, ce
qui constitue une exception par rapport aux autres collectivités locales et une
grave restriction de la liberté d'action du président. L'impossibilité de
retirer la délégation en cas de conflit entre le président et le délégataire
risquerait, bien entendu, de provoquer la paralysie de l'exécutif.
Venons-en à la réforme du mode de scrutin.
Tout le monde s'accorde, nous dit-on, pour apporter un correctif majoritaire
au scrutin proportionnel en vigueur. Personne ne propose, paraît-il,
d'abandonner le scrutin de liste pour un scrutin purement majoritaire. Soit
!
Il y avait pourtant d'autres systèmes, notamment celui qu'a évoqué
excellemment notre collègue Pierre Fauchon, sur lequel nous aurions pu
réfléchir. Le scrutin de liste est sans doute ce que l'on fait de mieux et de
plus démocratique. Cependant, mes chers collègues, je soumets à votre réflexion
un propos qui avait été tenu par un défunt président de la République à l'un de
nos collègues, qui me l'a rapporté. Ainsi, alors que l'un de ses ministres
proposait que les conseillers généraux soient élus au scrutin de liste et à la
proportionnelle - vous avez bien compris qu'il s'agissait d'un ministre
socialiste - il lui avait répondu : « Je ne vois pas pourquoi on veut
m'entraîner sur cete voie. Quant à moi, je n'ai jamais été l'élu de nulle part.
» C'est cela que vous être en train de promouvoir, messieurs du Gouvernement !
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
Je souscris très volontiers aux analyses de la commission des lois sur le
maintien du cadre départemental : il permet de ne pas éloigner l'élu des
électeurs, évite l'occultation des enjeux locaux et constitue un frein à
l'extrême politisation des assemblées régionales.
Mais je voudrais vous rendre attentifs à un fait, en prenant l'exemple de la
région dont je préside le conseil. Quand il y aura une seule entité pour élire
les conseillers régionaux, à savoir une circonscription régionale, croyez-vous
sincèrement, mes chers collègues, que ceux qui auront à établir les listes
iront choisir les candidats dans les zones les moins peuplées ? La tentation ne
sera-t-elle pas, inéluctablement, d'aller chercher les candidats là où se
trouvent majoritairement les électeurs ? Or il est important que tous les
territoires puissent être représentés, et c'est bien ce que le scrutin
départemental permet. Là est le véritable correctif !
On aboutira inéluctablement à un déséquilibre dans la représentation si l'on
va dans le sens qui est préconisé par le projet actuel.
(Applaudissements
sur les mêmes travées.)
Par ailleurs, il paraît que ramener le mandat électif de six ans à cinq ans
est un grand progrès de la démocratie. Il est vrai que le chiffre cinq est
devenu pour M. Jospin ce que le chiffre sept était pour les Hébreux !
(Sourires.)
Tout doit être toisé à l'aune de cinq années ! Pourquoi cinq
? Pourquoi pas quatre ou deux, comme pour la Chambre des représentants des
Etats-Unis ? Non, c'est le quinquennat !
Peut-être, s'agissant d'une élection présidentielle dont on ne parle jamais
mais à laquelle on pense toujours, le chiffre cinq a-t-il au moins l'avantage
de nous rapprocher de l'échéance ! Ce serait en tout cas une justification car,
jusqu'à présent, je n'en vois pas d'autre.
En tout état de cause, si l'on avait voulu ramener le mandat de six à cinq
ans, au moins aurait-il fallu en discuter pour que cela donne lieu à plus de
concertation, sans introduire cette réduction au travers de cet étrange projet,
presque à la sauvette.
En outre, je ne vois pas en quoi de nouvelles modalités d'élection des
conseillers régionaux constitueraient une amélioration par rapport au
dispositif existant. La représentation proportionnelle favorisera comme
précédemment la parcellisation, l'émiettement et la politisation des listes ;
la prime majoritaire, censée corriger le système, sera beaucoup plus faible que
pour les élections municipales ; le second tour donnera lieu, le cas échéant, à
des fusions de listes. Et ne doutons pas que la raison qui pousse le
Gouvernement à fixer un seuil très bas pour pouvoir participer au second tour
tient au fait qu'il faut sauver de l'élimination des alliés dont on a bien
besoin !
(Applaudissements sur les mêmes travées.)
En effet, telle ou
telle formation qui, aujourd'hui, exerce - disons les choses gentiment - des «
pressions » dans les conseils régionaux disparaîtrait si l'on portait le seuil
à 5 %, comme nous le propose M. le rapporteur, ou à 10 %, comme l'équité et
l'efficacité le voudraient.
Enfin, la complexité de la loi et, surtout, la nécessité d'obtenir au second
tour la prime majoritaire conduiront à des alliances douteuses, à des compromis
boiteux et à des marchandages occultes qui ne feront rien pour moraliser le
scrutin.
M. René-Georges Laurin.
Tout à fait !
M. Josselin de Rohan.
La complexité de la loi et les calculs qu'elle entraîne la rendront
strictement incompréhensible pour les électeurs et il y a fort à craindre que
cette réforme, loin d'entraîner nos concitoyens à voter, ne les incite plutôt à
s'abstenir.
Au total, la réforme, loin de mettre un terme aux difficultés de
fonctionnement des régions, compliquera la tâche de ceux qui ont la
responsabilité de les gérer. Elle ne se préoccupe pas de l'essentiel, qui est
de mieux définir les compétences respectives de l'Etat, des départements, des
régions et des communes, de procéder à un remodelage des responsabilités et à
une meilleure répartition des tâches.
En privant la région d'une majorité cohérente et en affaiblissant l'exécutif,
la réforme laisse la région désarmée face à la recentralisation rampante
amorcée par le projet de loi Voynet sur l'aménagement du territoire ou le
projet de loi Zuccarelli !
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
Aussi devons-nous aujourd'hui prendre date et faire savoir de la manière
la plus nette que, en cas d'alternance, nous rouvrirons le chantier d'une
véritable réforme régionale et que la loi électorale sera, elle aussi, remise
immédiatement en cause.
M. Hilaire Flandre.
Dès demain !
M. Josselin de Rohan.
Il faut espérer dans l'intervalle que, en dépit des coups qui lui sont portés,
l'institution régionale aura pu survivre.
Mais, au-delà de notre débat de ce jour, nous devons nous poser une question
qui appelle une réponse : à quels mobiles véritables obéissent les auteurs du
projet de loi ?
Lorsqu'ils auront réussi à ressusciter dans nos régions la IVe République avec
son cortège de divisions, d'impuissances et de compromissions, la tentation ne
sera-t-elle pas forte pour certains de l'instituer à nouveau sur l'ensemble du
territoire et de prendre, par ce biais, une revanche sur une Constitution
qu'ils ont jadis tant combattue ?
(Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
Si telle est leur ambition, il faut qu'ils sachent que nous ne resterons
pas inertes.
Cela étant, monsieur le ministre, je voudrais maintenant vous poser quelques
questions, et vos réponses conditionneront notre vote.
Avec la procédure d'urgence, il n'y a plus qu'une commission mixte paritaire,
il n'y a plus de débat en seconde lecture devant notre assemblée ; c'est
pourquoi j'attends de vous que vous répondiez précisément, c'est-à-dire par «
oui » ou par « non », aux questions que je vais vous poser.
(Exclamations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste
républicain et citoyen.)
M. Jean Chérioux.
C'est le débat démocratique !
M. Josselin de Rohan.
Monsieur le ministre, très clairement, êtes-vous d'accord pour soutenir la
proposition faite par M. le rapporteur et tendant à instaurer un scrutin
départementalisé, ou maintiendrez-vous le scrutin régional, contre le vote de
la majorité de cette assemblée ?
Prenez-vous l'engagement que, devant l'Assemblée nationale, vous soutiendrez
l'amendement que M. le rapporteur présente pour rétablir un scrutin dans le
cadre départemental ?
Etes-vous d'accord pour soutenir, au nom du Gouvernement, le seuil de 5 % pour
pouvoir participer au second tour ?
Etes-vous d'accord pour ne pas soutenir la disposition inconstitutionnelle de
la parité entre hommes et femmes ?
Etes-vous d'accord pour refuser la publicité des travaux de la commission
permanente ?
Etes-vous d'accord pour refuser la délégation obligatoire aux vice-présidents
?
Si vous ne pouvez répondre favorablement aux questions que nous vous posons,
je puis vous donner l'assurance formelle que le groupe du RPR ne votera pas
votre projet de loi.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Je
demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout
d'abord de vous dire qu'il était temps de légiférer. Aux termes des conclusions
du groupe de travail qui a été mis en place dans votre assemblée, « il pouvait
sembler préférable d'attendre les résultats des élections régionales de 1998
afin de vérifier ses effets réels avec un recul plus significatif ». Eh bien,
nous y sommes : les élections régionales viennent d'avoir lieu...
M. Dominique Braye.
Il n'y a pas urgence !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
...
et nous pouvons en tirer un certain nombre d'enseignements.
Quelle est la situation ? Elle me rappelle le titre d'un film :
Paysage
après la bataille.
Croyez-vous sérieusement, messieurs les sénateurs, que
la région est sortie renforcée des élections de mars 1998 ?
M. Josselin de Rohan.
La faute à qui ?
M. Jean Chérioux.
Grâce à la proportionnelle !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
C'est la réalité inéluctable...
M. Dominique Braye.
Il n'y a pas urgence pour autant !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
...
qui résulte du mode de scrutin.
M. Josselin de Rohan.
Qui avait voté ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Fallait-il le réformer avant ?
M. Hilaire Flandre.
Oui !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
J'ai entendu M. de Rohan déclarer, d'un ton très péremptoire : « Si nous
revenons au pouvoir, nous ferons la réforme régionale, et nous la ferons
immédiatement. »
M. Dominique Braye.
Pas dans l'urgence !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Vous avez eu quatre ans pour faire cette réforme régionale. Vous disposiez
d'une majorité écrasante : 500 députés à l'Assemblée nationale et un Sénat
ultramajoritaire. Or vous ne l'avez pas faite !
M. Josselin de Rohan.
Vous non plus !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Il
est bon de dire, monsieur de Rohan, maintenant que vous êtes dans l'opposition
nationale : « Vous allez voir ce que vous allez voir ! » Vous me faites un peu
penser à un lutteur de foire qui gonfle ses biceps. Je le répète, vous aviez
tous les moyens politiques pour procéder à cette réforme.
Le Gouvernement actuel n'a pas présenté de projet de loi entre juin 1997 et
mars 1998 parce qu'il a estimé que, si un consensus n'était pas réuni, il se
verrait immédiatement accusé d'avoir engagé une réforme qui serait
politique.
M. Josselin de Rohan.
C'est un peu facile !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Au
lendemain des régionales, il est bon de tirer les leçons.
M. Pierre Fauchon.
Cela n'explique pas l'urgence !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
La
loi de mars 1998, relative au fonctionnement des institutions régionales,
résulte, monsieur de Rohan, d'une proposition de loi, ayant pour origine des
textes divers présentés à l'Assemblée nationale, l'un signé par MM. Mazeaud et
Pandraud, un autre par M. Ayrault. Il convient de le rappeler et donc de ne pas
accuser le Gouvernement d'avoir élaboré certaines procédures alors que celui-ci
n'a fait que se rallier à un texte d'origine parlementaire.
A l'époque, M. Girod a rapporté ce texte au nom de votre commission des lois.
Certes, il était peut-être incomplet, mais il présentait au moins le mérite
d'attirer l'attention sur les difficultés qu'allaient connaître les conseils
régionaux après les élections du mois de mars dernier. Tel est le paysage après
la bataille.
M. Raffarin a évoqué le risque de fragilisation de l'institution régionale.
Monsieur le sénateur, regardez l'image des régions françaises !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Surtout la vôtre !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
La
région Rhône-Alpes, certes, mais également d'autres qui éprouvent d'immenses
difficultés à fonctionner. Comment peut-on prétendre que ce texte va fragiliser
encore plus les régions ?
M. Josselin de Rohan.
C'est ça !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Comme si elles n'étaient pas déjà vraiment malades et fragiles !
M. Jean Chérioux.
Cela n'arrangera rien !
M. Josselin de Rohan.
Bien sûr !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Il
s'agit de sortir de cette situation et d'avancer des propositions.
M. Jean-Pierre Raffarin.
Il ne faut pas généraliser la maladie !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
S'agissant de l'urgence qui a été déclarée sur ce texte, j'ai entendu parlé
d'improvisation, d'une discussion tronquée. Mais le Sénat, grand amateur et
spécialiste des modes de scrutin, du fonctionnement des institutions
décentralisées, connaît bien ces questions... Personne n'est pris en traître
ici !
M. Jean Chérioux.
Et le dialogue entre les assemblées, et la navette, qu'en faites-vous ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Ce
texte, après avoir été adopté par l'Assemblée nationale, a été transmis voilà
trois mois à votre commission des lois. Le Sénat a donc eu le temps d'en
prendre connaissance.
Monsieur Josselin de Rohan, il y aura une commission mixte paritaire...
M. Josselin de Rohan.
C'est cela !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
...
et une nouvelle lecture devant le Sénat. Telle est la procédure.
L'urgence a été déclarée compte tenu des dysfonctionnements actuels des
régions dont les exemples sont multiples et constants.
M. Hilaire Flandre.
Ça va servir à quoi ?
M. Dominique Braye.
Il y a urgence à dissoudre votre région !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
J'en viens maintenant au mode de scrutin.
M. de Rohan a dressé l'inventaire des divergences et j'ai entendu des
plaidoyers vibrants de MM. Raffarin, Mercier, Girod et Hoeffel en faveur du
scrutin à un tour.
La tradition française - il faut quand même le rappeler - veut que, si le
scrutin proportionnel est à un tour, le scrutin à dominante majoritaire compte
deux tours. C'est une donnée politique.
M. de Rohan a cité Michel Debré qui avait eu, à un certain moment, l'idée,
pour le scrutin national, de retenir un mode de scrutin à un tour. Tout le
monde l'avait écarté parce qu'il ne correspondait pas à la tradition française,
selon laquelle le premier tour doit permettre de déterminer les tendances
politiques, le deuxième de dégager des majorités. Telle est la logique de
l'introduction d'un mode de scrutin majoritaire dans un système
proportionnel.
M. Josselin de Rohan.
C'est pour cela que la proportionnelle a été instituée en 1986 !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Je
voudrais, à cet égard, répondre à M. Duffour qui préconise de baisser le taux
retenu pour se présenter au deuxième tour ; la liste doit avoir obtenu 10 % des
suffrages pour être présentée au deuxième tour. Elle peut fusionner avec des
listes qui ont recueilli jusqu'à 3 % des suffrages, mais il faut 10 % pour
aller au deuxième tour, nous sommes bien d'accord sur ce point. Si nous
abaissons le seuil, par exemple à 5 %, nous nous trouvons dans un système
proportionnel et, dès lors, nous ne sommes plus dans une logique qui permet de
dégager des majorités. Nous sommes dans une logique qui conduit à
l'émiettement, au fractionnement des forces politiques.
Pour cette raison, le mode de scrutin que nous avons envisagé est un mode de
scrutin à deux tours parce qu'il se rapproche d'une logique majoritaire
permettant, à l'occasion des discussions qui s'engagent entre le premier et le
deuxième tour, de rassembler.
M. Josselin de Rohan.
Pour sauver le Front national !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
J'ai entendu des propos assez étonnants. M. Raffarin a dit : « Ce sera la
semaine clandestine. » Croyez-vous que ce que l'on a vu entre le 15 et le 20
mars, ou même le 22 ou le 23 mars, ne relevait pas de la clandestinité ?
Je me rappelle des articles de presse dont le titre était : « C'est la
semaine noire des régions. » En effet, des réalités sont apparues dans un
certain nombre de régions, où des majorités politiques se sont dessinées, alors
qu'il y avait eu des engagements contraires pris devant les électeurs.
(Protestations sur les travées du RPR.)
M. Dominique Braye.
Avec un indépendantiste savoyard !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
C'est cela la réalité, monsieur Raffarin.
Des engagements avaient été pris de ne pas passer des alliances avec l'extrême
droite.
M. Josselin de Rohan.
Cela ne vous gêne pas quand vos amis votent avec elle !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Là
est le fond du débat ! Dans le scrutin à deux tours, permettez-moi, monsieur de
Rohan, de vous dire que...
M. Josselin de Rohan.
Quelle belle âme !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
...
les négociations ne durent pas une semaine, mais deux jours seulement. Elles
sont fondées sur ce qu'un autre grand parlementaire ou grand publiciste, Pierre
Mendès France, appelait un « contrat de législature », c'est-à-dire un contrat
passé devant le peuple...
M. Josselin de Rohan.
Oh là là !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
...
et non pas, comme disent nos amis britanniques, un contrat passé « derrière la
tribune du président », des accords étant négociés, alors que certaines belles
âmes affirment n'avoir rien négocié.
Pour ma part, je préfère que les électeurs au deuxième tour, à l'instar des
scrutins municipaux, se prononcent en toute clarté sur des listes concurrentes,
où les candidats déclarent : « nous allons gouverner ensemble sur tel programme
; élisez-nous ou sinon nous serons minoritaires ». A ce moment-là, une autre
majorité se dégagera. Cette clarté est due aux électeurs ; c'est le contrat
d'administration de la région.
Sinon, nous passons à un mode de scrutin proportionnel, et tous les
intervenants ont souligné le risque qu'il représentait ; l'exemple de la région
en montre bien la forme.
M. Jean-Pierre Raffarin.
Vous voulez généraliser ! Ce n'est pas sincère !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
J'en viens à la prime.
M. Fauchon juge que la prime est antidémocratique. Je voudrais tout de même
lui répondre sur ce point. Qui a instauré le mode de scrutin municipal après
les élections de 1959 ? C'est tout de même bien la majorité de droite de
l'époque ! M. de Rohan, vous aussi devriez vous souvenir qu'à l'époque c'était
un scrutin majoritaire !
J'ai siégé dans un conseil municipal élu au scrutin majoritaire : aucune voix
d'opposition ne pouvait s'exprimer ; c'était des monologues.
En revanche, j'ai siégé depuis 1983 dans des conseils municipaux où
l'opposition était représentée ; je trouve bon que l'opposition soit présente,
qu'elle puisse être informée, qu'elle fasse connaître son point de vue,...
M. Josselin de Rohan.
Personne n'a dit le contraire !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
...
et qu'en même temps la majorité puisse gouverner. Je crois, monsieur Fauchon,
que nous concilions ces deux éléments.
Sinon, il n'y a pas d'autre solution qu'une proportionnelle, ...
M. Pierre Fauchon.
Proportionnelle, point à la ligne !
M. Jean-Jack Queyranne,
ministre de l'intérieur.
... avec les évolutions de majorité qui peuvent
se produire, quel que soit le système. Celui que vous évoquez a fonctionné sous
la IVe République, et peut-être même, antérieurement, sous la IIIe République.
Il ne me paraît plus, aujourd'hui, adapté à la gestion des villes, avec les
enjeux qu'elle représente. Nous sommes, c'est vrai, passés d'un parlementarisme
municipal à un système dans lequel des majorités municipales existent, qui ont
été contractées devant les électeurs.
La prime doit-elle être de 25 % ou de 33 % ? Nous proposons 25 %, M. le
rapporteur préfère 33 %, et je crois que M. Allouche, tout à l'heure,
s'interrogeait.
Pour une élection régionale, il ne faut pas trop écraser les minorités, et
retenir, comme au niveau municipal, un système électoral où la liste arrivée en
tête obtient d'emblée 50 % des sièges au scrutin majoritaire. Avec une prime de
25 %, on peut, me semble-t-il, dégager des majorités sans écraser les
minorités.
J'en viens maintenant au cadre de l'élection.
Je n'ai entendu, outre M. Allouche, que le plaidoyer de M. Hoeffel en faveur
du cadre régional. Je comprends bien qu'au Sénat, qui en relève, la défense du
cadre départemental ait ses ardents défenseurs.
Enfin, croyez-vous qu'il n'est pas temps de passer au niveau régional, qu'il
n'est pas temps de passer au niveau que connaissent toutes les grandes
institutions dans les régions d'Europe ? Ne croyez-vous pas que l'institution
régionale en sortira fortifiée ? Sinon - après tout, c'était à l'origine l'idée
même des régions - les régions deviendront des unions de départements.
Je crois nécessaire de passer au stade supérieur, c'est-à-dire celui où
l'institution régionale peut fonctionner et peut vivre en elle-même. Cela
signifie-t-il que ceux qui constitueront les listes écarteront les départements
les moins peuplés, concentreront leurs candidats sur les villes ou les
départements les plus peuplés ?
M. Josselin de Rohan.
Evidemment !
M. Dominique Braye.
Vous faites de l'angélisme naïf !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Je
fais confiance, monsieur de Rohan, à la perspicacité des politiques qui ont à
construire ces listes. Tout le monde sait bien que, lors de l'élaboration des
listes municipales, on tient compte des différents quartiers. Enfin, nous
sommes tous suffisamment avisés sur le plan politique pour ne pas ne pas avoir
cette intelligence. Dans le cas contraire, si nous ne l'avons pas, les
électeurs s'en rendront compte. Sur ce plan, ne péchons pas par un excès de
naïveté !
M. Josselin de Rohan.
Vous êtes un faux naïf !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Enfin, en ce qui concerne le vote du budget, la loi de mars 1998 comporte des
imperfections car elle avait été élaborée en quelques mois pour essayer de
parer au plus pressé face aux difficultés que connaissaient les régions. Le
fait, par exemple, que la présidence soit obligée de soumettre au vote un
budget dénaturé par les amendements, le fait que le vote des taux ne soit pas
lié au vote du budget, tout cela n'avait pas été vu, à l'époque, par le
législateur et il est grand temps, me semble-t-il, d'en corriger l'usage sur le
plan du mode de fonctionnement.
Cela explique, en particulier pour le vote des prochains budgets qui va
intervenir dès la fin de cette année, qu'il faut donner aux régions un cadre
budgétaire, en quelque sorte correcteur des dysfonctionnements nés de la
proportionnelle. Je pense que les régions s'en porteront mieux.
Vous voyez, monsieur de Rohan, que, à l'ensemble de vos questions, j'ai plutôt
répondu par la négative. En effet, le Gouvernement est favorable à un scrutin
régional ; il est favorable à un seuil qui permet de fusionner les listes dès
lors que celles-ci ont obtenu 3 % des suffrages exprimés, sachant que ne
peuvent se présenter au second tour que les listes ayant obtenu au premier tour
au moins 10 % des suffrages exprimés ; le Gouvernement est également favorable
au raccourcissement des mandats, à la parité hommes-femmes, avec les réserves
que j'ai émises concernant la constitutionnalité. Même si ces réponses ne vont
pas dans votre sens, monsieur le sénateur, au moins vous aurai-je répondu en
toute courtoisie parlementaire.
Il reste maintenant la question essentielle que M. Hoeffel a abordée lorsqu'il
a fait allusion au mode de scrutin : quel sera l'avenir de nos régions ?
Aujourd'hui, la région m'apparaît, je l'ai dit, comme étant désarmée - vous
avez employé ce mot, monsieur de Rohan - parce qu'elle n'a pas réellement de
majorité politique pour fonctionner. Or j'ai le sentiment, je vous le dis très
sincèrement, car je suis moi aussi conseiller régional, que la majorité des
régions vont prendre six ans de retard par rapport au rythme qui préside à
l'échelon européen. Cela constituera sûrement pour notre pays un handicap en
matière de décentralisation.
Certains départementalistes ou centralisateurs s'en réjouissent peut-être,
monsieur Hoeffel. Moi, je ne m'en réjouis pas, car je pense que les régions
doivent avoir un niveau suffisant de compétences, d'attributions et de
stabilité pour mener de véritables politiques de développement et d'aménagement
du territoire.
Aujourd'hui, les régions n'ont pas les moyens de mener ces politiques. C'est
pourquoi le Gouvernement a soumis ce projet de loi qui a été examiné en
première lecture par l'Assemblée nationale. J'invite le Sénat à s'inscrire dans
cette dynamique régionale, tout en apportant les observations qu'il estime
nécessaires.
La Haute Assemblée ne souhaite sans doute pas voir les régions paralysées ou
voir des demi-régions privées de leur capacité d'agir.
(Applaudissements sur
les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
J'ai reçu de MM. de Rohan, Arthuis et de Raincourt une motion tendant à
opposer la question préalable au projet de loi relatif au mode d'élection des
conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au
fonctionnement des conseils régionaux. Cette motion sera discutée demain
après-midi.
M. Paul Girod,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Girod,
rapporteur.
C'est une motion dont la commission n'a pas eu connaissance.
Il convient donc de convoquer cette dernière demain après-midi, à quatorze
heures trente.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Je
demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Monsieur le président, compte tenu de la discussion des questions d'actualité à
l'Assemblée nationale - vous comprendrez, mesdames, messieurs les sénateurs,
qu'il est difficile au ministre de l'intérieur de ne pas assister à ce débat -
je souhaite que la séance de demain soit reportée à seize heures quinze.
M. le président.
Je vous en donne acte.
8
ÉLECTION DE MEMBRES REPRÉSENTANT
LA FRANCE AU CONSEIL DE L'EUROPE
ET À L'UNION DE L'EUROPE OCCIDENTALE
M. le président.
Voici les résultats du scrutin pour l'élection de six délégués titulaires du
Sénat représentant la France à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe
et à l'assemblée de l'Union de l'Europe occidentale :
Nombre de votants : 272
Majorité absolue des votants : 137
Bulletins blancs ou nuls : 16
Ont obtenu :
M. Daniel Hoeffel : 243 voix.
M. Lucien Neuwirth : 236 voix.
M. Jean-François Le Grand : 236 voix.
M. Nicolas About : 226 voix.
M. Marcel Debarge : 199 voix.
Mme Josette Durrieu : 198 voix.
M. Paul Loridant : 86 voix.
M. Christian de La Malène (non candidat) : 2 voix.
En conséquence, MM. Daniel Hoeffel, Lucien Neuwirth, Jean-François Le Grand,
Nicolas About, Marcel Debarge et Mme Josette Durrieu ayant obtenu la majorité
absolue des suffrages des votants, je les proclame délégués titulaires du Sénat
représentant la France à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à
l'assemblée de l'Union de l'Europe occidentale.
Voici les résultats du scrutin pour l'élection de six délégués suppléants du
Sénat représentant la France à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe
et à l'assemblée de l'Union de l'Europe occidentale :
Nombre de votants : 270
Majorité absolue des votants : 136
Bulletins blancs ou nuls : 2
Ont obtenu :
M. Daniel Goulet : 259 voix.
M. James Bordas : 258 voix.
M. Jean-Guy Branger : 253 voix.
M. Jacques Legendre : 253 voix.
M. Michel Dreyfus-Schmidt : 235 voix.
Mme Danièle Pourtaud : 231 voix.
En conséquence, MM. Daniel Goulet, James Bordas, Jean-Guy Branger, Jacques
Legendre, Michel Dreyfus-Schmidt et Mme Danièle Pourtaud ayant obtenu la
majorité absolue des suffrages des votants, je les proclame délégués suppléants
du Sénat représentant la France à l'assemblée parlementaire du Conseil de
l'Europe et à l'assemblée de l'Union de l'Europe occidentale.
9
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION
M. le président.
Je rappelle au Sénat que le groupe du Rassemblement démocratique et social
européen a présenté une candidature pour la commission des affaires
culturelles.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M.
Jean-Pierre Fourcade membre de la commission des affaires culturelles.10
DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT
M. le président.
M. le président a reçu de M. le Premier ministre un rapport sur l'exécution de
la loi de programmation militaire pour les années 1997-2002, établi en
application de l'article 4 de la loi n° 96-589 du 2 juillet 1996.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
11
DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. Christian Bonnet et des membres du groupe des Républicains et
Indépendants une proposition de loi tendant à sanctionner de peines aggravées
les infractions commises sur les agents des compagnies de transport collectif
de voyageurs en contact avec le public.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 24, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du réglement et d'administration générale sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
J'ai reçu de M. Bernard Joly une proposition de loi visant à réformer le mode
d'attribution de la dotation particulière élu local.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 25, distribuée et renvoyée
à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques
de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission
spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
12
DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement (CE) du Conseil modifiant le règlement (CEE) n°
1408/71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux
travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur
famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté et le règlement (CEE)
n° 574/72 fixant les modalités d'application du règlement (CEE) n° 1408/71.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le n° E - 1161 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Lettre rectificative n° 2 à l'avant-projet de budget rectificatif et
supplémentaire n° 1/98 - Section III - Commission.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le n° E - 1162 et
distribuée.
13
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mercredi 21 octobre 1998, à seize heures quinze et, éventuellement, le
soir :
1. Désignation des membres, autres que les membres de droit :
- de la délégation du Sénat à l'office parlementaire d'évaluation de la
législation ;
- de la délégation du Sénat à l'office parlementaire d'évaluation des
politiques publiques.
2. Suite de la discussion du projet de loi (n° 524, 1997-1998), adopté par
l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au mode d'élection
des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au
fonctionnement des conseils régionaux.
Rapport (n° 17, 1998-1999) de M. Paul Girod, fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
3. Discussion de la proposition de loi (n° 12, 1998-1999), adoptée par
l'Assemblée nationale, visant à la création d'un office des produits de la mer
et de l'aquaculture et étendant à la collectivité territoriale de Mayotte les
offices d'intervention prévus au livre VI du code rural.
Rapport (n° 13, 1998-1999) de M. Josselin de Rohan, fait au nom de la
commission des affaires économiques et du Plan.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
- Conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de
loi permettant à des fonctionnaires de participer à la création d'entreprises
innovantes (n°s 505, 1997-1998).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 21 octobre 1998, à
dix-sept heures.
- Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la
limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs
conditions d'exercice (n° 463, 1997-1998).
- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la limitation du
cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs conditions d'exercice
(n° 464, 1997-1998).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale
commune : lundi 26 octobre 1998, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements à ces deux textes : lundi 26
octobre 1998, à dix-sept heures.
- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif
du budget de 1995 (n° 527, 1997-1998).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 28 octobre 1998, à
dix-sept heures.
- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif
du budget de 1996 (n° 528, 1997-1998).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 28 octobre 1998, à
dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures vingt.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
établi par le Sénat dans sa séance du mardi 20 octobre 1998
à la suite des conclusions de la conférence des présidents
Mercredi 21 octobre 1998,
à
15 heures
et, éventuellement, le
soir :
1° Désignation des membres, autres que les membres de droit :
- de la délégation du Sénat à l'Office parlementaire d'évaluation de la
législation ;
- de la délégation du Sénat à l'Office parlementaire d'évaluation des
politiques publiques.
(Après les désignations par les commissions de leurs représentants, les
candidatures présentées par les groupes devront être remises au service des
commissions au plus tard le mardi 20 octobre 1998, à 17 heures.)
Ordre du jour prioritaire
2° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif au mode d'élection des conseillers régionaux et des
conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux
(n° 524, 1997-1998) ;
3° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à la
création d'un office des produits de la mer et de l'aquaculture et étendant à
la collectivité territoriale de Mayotte les offices d'intervention prévus au
livre VI du code rural (n° 12, 1998-1999).
Jeudi 22 octobre 1998 :
Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution
A
10 h 30 :
Conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition
de loi de M. Pierre Laffitte permettant à des fonctionnaires de participer à la
création d'entreprises innovantes (n° 505, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 21 octobre 1998, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ces
conclusions).
Mardi 27 octobre 1998 :
A
10 h 30 :
1° Treize questions orales sans débat (l'ordre d'appel des questions sera
fixé ultérieurement) :
- n° 270 de M. Franck Sérusclat à Mme le ministre de l'emploi et de la
solidarité (Application de l'article 62 du code de la famille et de l'aide
sociale) ;
- n° 298 de M. Jean Pépin à M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement (Nuisances sonores causées par le TGV Paris-Lyon) ;
- n° 299 de M. Jean Boyer à Mme le ministre de la culture et de la
communication (Conditions d'organisation des spectacles faisant appel à des
artistes étrangers) ;
- n° 304 de M. Marcel Deneux à M. le ministre de l'intérieur (Stockage et
destruction des engins résiduels de guerre) ;
- n° 306 de M. Philippe Richert à Mme le ministre de l'aménagement du
territoire et de l'environnement (Contrôle des forages individuels) ;
- n° 307 de Mme Marie-Claude Beaudeau à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (Equipements routiers en Seine-Saint-Denis et en
Val-d'Oise) ;
- n° 310 de M. Jean-Paul Delevoye, transmise à M. le ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation (Publication du
décret relatif à l'annualisation du temps de travail dans la fonction publique
territoriale) ;
- n° 313 de M. Josselin de Rohan à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (TGV Bretagne-Pays de la Loire) ;
- n° 316 de M. Jean-Pierre Raffarin à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (Financement des infrastructures routières et
autoroutières) ;
- n° 322 de M. Marcel Bony à M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement (Aménagement de la RN 89) ;
- n° 323 de Mme Nicole Borvo à M. le secrétaire d'Etat à la santé (Avenir du
service d'oncologie pédiatrique de l'hôpital Robert-Debré) ;
- n° 324 de M. Guy Cabanel à Mme le ministre de la culture et de la
communication (Situation dans les services d'archives départementales) ;
- n° 328 de M. Jacques Valade à Mme le ministre de l'aménagement du territoire
et de l'environnement (Nécessité de régularisation de la prolifération
anarchique des relais de téléphonie mobile).
A
16 heures :
2° Scrutins pour l'élection de douze juges titulaires et de six juges
suppléants à la Haute Cour de justice.
3° Scrutin pour l'élection de six juges titulaires à la Cour de justice de la
République et de leurs six suppléants.
(Les candidatures à la Haute Cour de justice et à la Cour de justice de la
République devront être remises au service de la séance avant le lundi 26
octobre 1998, à 17 heures ; ces scrutins se dérouleront simultanément dans la
salle de conférences ; les juges titulaires et les juges suppléants élus seront
appelés, après le scrutin, à prêter le serment prévu par la loi organique.)
Ordre du jour prioritaire
4° Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la
limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs
conditions d'exercice (n° 463, 1997-1998).
5° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la limitation du
cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs conditions d'exercice
(n° 464, 1997-1998).
(Pour ces deux projets de loi, la conférence des présidents a :
- fixé au lundi 26 octobre 1998, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt
des amendements ;
- décidé qu'il serait procédé à une discussion générale commune ;
- fixé à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale commune, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur
la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17
heures, le lundi 26 octobre 1998.)
Mercredi 28 octobre 1998,
à
15 heures :
Ordre du jour prioritaire
Suite de l'ordre du jour de la veille.
Jeudi 29 octobre 1998 :
A
9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite de l'ordre du jour de la veille.
A
15 heures
et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs des questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification
du sixième protocole additionnel à l'accord général sur les privilèges et
immunités du Conseil de l'Europe (n° 9, 1998-1999).
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification
de l'accord européen concernant les personnes participant aux procédures devant
la Cour européenne des droits de l'homme (n° 10, 1998-1999).
(La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient
l'objet d'une discussion générale commune.)
5° Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin.
6° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement
définitif du budget de 1995 (n° 527, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 28 octobre 1998, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de
loi.)
7° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement
définitif du budget de 1996 (n° 528, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 28 octobre 1998, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de
loi.)
(Par ailleurs, la conférence des présidents a décidé que ces deux projets de
loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.)
Mardi 3 novembre 1998 :
Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution
A
16 heures
et, éventuellement, le soir :
Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur la décentralisation.
(La conférence des présidents a fixé :
- à dix minutes le temps réservé respectivement au président de la commission
des finances et au président de la commission des lois ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17
heures, le lundi 2 novembre 1998.)
Mercredi 4 novembre 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures :
1° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant extension de
la qualification d'officier de police judiciaire au corps de maîtrise et
d'application de la police nationale (n° 532, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 3 novembre 1998, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.)
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'accès au
droit et à la résolution amiable des conflits (n° 530, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 novembre, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17
heures, le mardi 3 novembre 1998.)
Jeudi 5 novembre 1998 :
A
9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite de l'ordre du jour de la veille.
A
15 heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin.
Mardi 10 novembre 1998 :
A
9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Projet de loi relatif à l'organisation de certains services au transport
aérien (n° 7, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 9 novembre 1998, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
2° Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, adopté avec
modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux
animaux dangereux et errants et à la protection des animaux (n° 509,
1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 9 novembre 1998, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
A
16 h 15 :
3° Questions orales sans débat.
Jeudi 12 novembre 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A
9 h 30 :
1° Sous réserve de son adoption par le conseil des ministres, projet de loi
portant modernisation des emplois des fonds de la participation des employeurs
à l'effort de construction.
(La conférence des présidents a fixé au mardi 10 novembre 1998, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de
loi.)
2° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de la République algérienne
démocratique et populaire sur l'encouragement et la protection réciproques des
investissements (ensemble un échange de lettres interprétatif) (n° 395,
1996-1997).
3° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord de partenariat
économique, de coordination politique et de coopération entre la Communauté
européenne et ses Etats membres, d'une part, et les Etats-Unis du Mexique,
d'autre part (n° 3, 1998-1999).
4° Projet de loi autorisant la ratification d'une Convention internationale
pour la répression des attentats terroristes à l'explosif (n° 4, 1998-1999).
5° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de la République d'Azerbaïdjan sur
la liberté de circulation (n° 599, 1997-1998).
6° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'entraide
judiciaire en matière civile entre le Gouvernement de la République française
et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil (n° 204,
1997-1998).
7° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'extradition entre
le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République
fédérative du Brésil (n° 553, 1997-1998).
(La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient
l'objet d'une discussion générale commune.)
A
15 heures
et le soir :
8° Sous réserve de sa transmission, projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999 (AN, n° 1106).
(La conférence des présidents a fixé :
- au vendredi 13 novembre 1998, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi ;
- à quatre heures, la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 10 novembre
1998.)
Lundi 16 novembre 1998,
à
15 heures
et le soir :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (AN, n°
1106.)
Mardi 17 novembre 1998,
à
9 h 30,
à
16 heures
et le soir
:
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (AN, n°
1106.)
Mercredi 18 novembre 1998,
à
15 heures
et, éventuellement, le
soir :
1° Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (AN,
n° 1106).
2° Deuxième lecture du projet de loi constitutionnelle, adopté avec
modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif au Conseil
supérieur de la magistrature (n° 6, 1998-1999).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 17 novembre 1998, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de
loi.
La conférence des présidents a décidé qu'il serait procédé à un scrutin public
à la tribune lors du vote sur l'ensemble du projet de loi
constitutionnelle.)
A N N E X E
Questions orales sans débat
inscrites à l'ordre du jour du mardi 27 octobre 1998
N° 270. - M. Franck Sérusclat interroge Mme le ministre de l'emploi et de la
solidarité sur l'interprétation qu'il convient de faire de l'article 62 du code
de la famille et de l'aide sociale. Son manque de clarté sert de prétexte à des
refus de réponse de la part de services administratifs aux demandes d'enfants
adoptés. Cet article a été modifié par la loi n° 96-604 du 5 juillet 1996
relative à l'adoption. La demande de secret formulée par une mère au moment de
son accouchement interdit-elle au service de l'aide sociale à l'enfance de la
rechercher et de lui indiquer que son enfant voudrait connaître son identité ?
Par ailleurs, l'article 62 du code de la famille et de l'aide sociale a-t-il
expressément prévu la possibilité de lever ce secret ? Si oui, son application
peut-elle s'étendre aux adoptions prononcées avant l'entrée en vigueur de la
loi du 5 juillet 1996 ? Pour que cette possibilité de levée du secret soit
effective, la tâche n'en revient-elle pas à l'aide sociale à l'enfance ?
Celle-ci n'a-t-elle pas l'obligation d'entreprendre les recherches quand la
demande est formulée par l'enfant ?
N° 298. - M. Jean Pépin appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement,
des transports et du logement sur les importantes nuisances sonores que
subissent les habitants de la commune de Grièges, riverains de la ligne SNCF
Paris-Lyon sur laquelle circulent les trains à grande vitesse. La mise en place
d'aménagements de type écrans antibruits permettrait d'atténuer de manière
considérable ces incommodités. En conséquence, il lui demande s'il entend
proposer une adaptation en ce sens de la ligne à grande vitesse Paris-Lyon, sur
le territoire de la commune de Grièges.
N° 299. - M. Jean Boyer attire l'attention de Mme le ministre de la culture et
de la communication sur les conditions d'organisation de spectacles vivants
faisant appel à des artistes étrangers en tournée en France. Les producteurs
établis hors de l'Union européenne, notamment dans des pays aux structures
artistiques, sociales ou culturelles très différentes, sont souvent dans
l'impossibilité de fournir toutes les pièces exigées en France au titre
d'employeur. L'inspection du travail, l'ASSEDIC et les caisses de retraite se
retournent alors vers l'organisateur du spectacle en France, association ou
commune, qui est présumé employeur de fait, en application de l'article L.
762-1 du code du travail. Dans ces conditions, l'organisateur français se
trouve dans l'obligation, d'une part, d'effectuer les déclarations obligatoires
liées à l'embauche et à l'emploi sous contrat à durée déterminée des artistes
étrangers, sans souvent pouvoir obtenir les documents exigés et, d'autre part,
de verser l'ensemble des cotisations et contributions sociales à la place du
producteur étranger. Cette situation pénalise financièrement les organisateurs
français et entretient la suspicion à leur égard. Il lui demande donc si, dans
le cas des pays avec lesquels la France a signé des conventions particulières
de sécurité sociale, elle ne pourrait pas envisager une simplification
administrative qui éviterait que l'organisateur soit contraint de remplir les
obligations qui relèvent du véritable employeur, c'est-à-dire du producteur
étranger. Il lui demande également quelles seront les conséquences, sur la
présomption de salariat, de l'adoption du projet de loi portant modification de
l'ordonnance n° 45-2339 du 13 octobre 1945 relative aux spectacles, qui précise
notamment que les producteurs de spectacles ont la responsabilité d'employeur à
l'égard du plateau technique.
N° 304. - M. Marcel Deneux interroge M. le ministre de l'intérieur sur le
stockage et la destruction des engins résiduels de guerre. De nombreuses
régions continuent de subir le lourd préjudice de la Première et de la Seconde
Guerre mondiale en découvrant quasi quotidiennement des obus dans leur
sous-sol. Les maires sont les premiers à être sollicités pour déplacer et
stocker en lieu sûr ces obus et contacter les services compétents pour en
assurer la destruction. Ainsi, il nous est permis d'observer de nombreux tas
d'obus sur le bas côté de la route dans les communes. Des maires s'engagent
également à stocker, y compris dans la cour de leur habitation, ces obus afin
d'assurer la sécurité sur la voie publique. Cette situation est la conséquence
de l'absence de centre de stockage et de destruction, notamment, dans le
département de la Somme. Les 11 et 12 juillet 1916, un million cinq cent mille
obus ont été tirés en trente-six heures dans la Somme. 10 % n'ont pas explosé !
Aujourd'hui, la seule solution qui est proposée aux maires est la destruction
de ces obus sur le territoire de leurs communes, tout en convenant que la
commune prenne en charge la dépense afférente. Cette situation appelle des
réponses sur les dispositifs de stockage et de destruction de ces obus ainsi
que sur la responsabilité des maires.
N° 306. - M. Philippe Richert attire l'attention de Mme le ministre de
l'aménagement du territoire et de l'environnement sur les conséquences des
réalisations de plus en plus fréquentes de forages individuels. En effet, bon
nombre de personnes résidant dans des zones où la nappe phréatique est
facilement accessible réalisent, bien souvent par souci d'économie, des puits
privés destinés à prélever directement l'eau nécessaire à la satisfaction de
leurs besoins plutôt que d'utiliser le réseau public de distribution d'eau
potable. Le développement d'une telle démarche inquiète à juste titre les élus
responsables des services de l'eau et de l'assainissement. Outre les risques
sanitaires pris par les usagers de ces forages individuels dont la qualité de
l'eau n'est pas toujours contrôlée, ces derniers représentent également des
risques pour les collectivités : risque notamment de mettre en péril
l'équilibre financier des services des eaux et de l'assainissement, risque que
les installations privées soient réalisées en contravention avec le règlement
départemental. Face à ce problème, il souhaiterait que lui soit précisées les
bases légales sur lesquelles les élus locaux peuvent s'appuyer pour opérer un
recensement complet des puits privés ainsi que les concours qu'ils peuvent
attendre des services de l'Etat en la matière. Il souhaiterait par ailleurs
connaître les modalités pratiques d'application du décret n° 67-945 autorisant
la taxation forfaitaire des particuliers s'approvisionnant totalement ou
partiellement à une autre source que le réseau public et savoir s'il est
envisagé, le cas échéant, de préciser la réglementation actuellement en vigueur
afin d'arrêter le développement des pratiques évoquées ci-dessus.
N° 307. - Le 9 juillet 1998, Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur le devenir du
projet de construction de l'autoroute A 16 en Seine-Saint-Denis et en
Val-d'Oise. Elle lui fait part de la nécessité, pour confirmer l'abandon du
projet au-delà de la Francilienne, de lever toutes les emprises foncières
existantes en Val-d'Oise et en Seine-Saint-Denis et lui demande si telle est
bien sa position. Elle lui demande également si le projet vieux de soixante-dix
ans de déviation de la RD 370 peut être considéré comme désormais réalisable,
tout comme la deuxième tranche de construction du BIP (boulevard interurbain du
Parisis) reliant Gonesse à Sarcelles et de lui préciser les dates de
réalisation et les méthodes de financement envisagées.
N° 310. - M. Jean-Paul Delevoye appelle l'attention de M. le ministre de
l'intérieur sur les dispositions de la loi n° 94-1134 du 27 décembre 1994, afin
de permettre, à titre expérimental, et pour une durée de trois ans à compter de
décembre 1994, l'annualisation de la durée du service, lorsque celui-ci est à
temps non complet, à la demande de l'agent, ou en cas de nécessité certaine du
service. Tel pourrait être le cas, en particulier dans les petites communes, en
ce qui concerne les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles
(ATSEM). Pour que ces dispositions deviennent applicables, il est nécessaire
que soit publié un décret d'application, après consultation des parties
intéressées. Or, ce décret n'a jamais été rédigé, non en raison de la
complexité du problème, même si celle-ci est indéniable, mais bien, et de façon
avouée, parce que l'administration est hostile au principe même de
l'annualisation du temps de travail dans la fonction publique territoriale.
Cette situation inacceptable, emblématique des dérives de l'état de droit trop
souvent observées dans notre pays, pose en premier lieu la question du rôle du
Parlement. Est-il bien utile qu'il légifère si la volonté du peuple, dont il
est l'expression et le garant, peut être tenue en échec par une sorte de droit
de veto administratif ? La seconde question est celle de l'avenir qui doit être
réservé à ces dispositions qui ont été adoptées par la représentation nationale
et qui ne peuvent plus être mises en oeuvre, le délai prévu par la loi étant
forclos. Il souhaite donc connaître très précisément les intentions du ministre
en matière d'annualisation expérimentale du temps de service dans la fonction
publique territoriale.
(Question transmise à M. le ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.)
N° 313. - M. Josselin de Rohan demande à M. le ministre de l'équipement,
des transports et du logement de lui apporter des précisions relatives au
projet du TGV Bretagne-Pays de la Loire, et en particulier sur le choix du
tracé.
N° 316. - M. Jean-Pierre Raffarin interroge M. le ministre de l'équipement,
des transports et du logement sur les innovations que peut proposer l'Etat aux
régions pour faire face aux besoins de financement d'infrastructures routières
et autoroutières. Retard des contrats de plan, délégation de maîtrise
d'ouvrage, mobilisation des fonds européens, maîtrise des flux de fret... ?
N° 322. - M. Marcel Bony appelle l'attention de M. le ministre de
l'équipement, des transports et du logement sur la route nationale 89, entre
l'échangeur de Saint-Julien-Puy-Lavèze et Clermont-Ferrand. Eu égard au décret
du 9 janvier 1998 déclarant d'utilité publique la section autoroutière
Saint-Julien-Puy-Lavèze-Combronde, il lui apparaissait qu'un aménagement lourd
de la RN 89 était écarté à court terme. Or ni le phasage ni la programmation
des travaux sur cette section autoroutière n'ayant apparemment été arrêtés, il
lui semble opportun de rappeler que la RN 89 est et demeurera l'itinéraire
naturel pour rallier l'agglomération clermontoise ou le val d'Allier à partir
de l'échangeur de Saint-Julien-Puy-Lavèze. Il est d'ailleurs si probable que le
flux soit massif à la sortie de ce diffuseur que les projections faites à
l'horizon 2015 aboutissent à un niveau de trafic absolument incompatible avec
la configuration actuelle de la route nationale. Le niveau de trafic serait
d'ailleurs sensiblement équivalent à celui de l'A 89 d'après le CETE de
Bordeaux. Dans ces conditions, ne serait-ce qu'au regard de cet élément,
c'est-à-dire sans même tenir compte des arguments liés au développement
économique, au désenclavement, à la cohésion et à l'équilibre territoriaux, qui
plaident pourtant dans ce sens, l'utilité publique d'une modernisation de la RN
89 est avérée à ses yeux. En tout état de cause, il est impératif, précisément
en raison de l'évolution du trafic à la sortie de l'échangeur précité et pour
renforcer la sécurité, de procéder dans un premier temps à des aménagements
substantiels de la RN 89 entre La Chabanne (commune de Laqueuille) et les
Quatre Routes de Nébouzat, c'est-à-dire sur environ quinze kilomètres. Il
l'interroge donc sur ce qu'il envisage de faire à cet égard : doit-on espérer
des crédits supplémentaires à ceux inscrits au contrat de plan, pour la
programmation de travaux nécessaires ? Qu'en est-il des 200 millions de francs
qui devaient être affectés à l'aménagement de la RN 89 par la société
concessionnaire de l'A 89 ?
N° 323. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la
santé sur le fait que la décision de l'Assistance publique de fermer le service
d'oncologie pédiatrique de l'hôpital Robert-Debré à Paris pose de nombreux
problèmes. Ce service unique de l'AP-HP a un taux d'occupation proche de 100 %.
Il donne satisfaction aux patients et à leurs familles. Il a, sur le plan
national et international, une réputation scientifique qui le place au premier
rang dans la recherche clinique et le traitement des tumeurs solides des os. La
décision de fermeture met en cause son entité et les moyens qui lui sont
alloués et provoque un tollé parmi les milieux médicaux et les familles des
petits malades. Aucun argument ne peut justifier l'éclatement de ce service qui
travaille dans un domaine aussi sensible. Changer d'équipe médicale représente
un danger pour les enfants, tant sur le plan psychologique que sur le plan du
suivi strictement médical, même en cas de transmission intégrale des données.
Pourquoi d'ailleurs couper ce service en deux alors que le cancer des os, s'il
touche principalement les enfants, entraîne un contrôle long, qui peut se
poursuivre pendant dix ans. La séparation des enfants et des parents
n'induirait-elle pas fatalement un changement d'équipe médicale en cours de
traitement et probablement du traitement même, pour les enfants actuellement
suivis à Robert-Debré ? Pour toutes ces raisons, elle lui demande quelles
mesures il compte prendre afin de maintenir l'entité de ce service.
N° 324. - M. Guy Cabanel attire l'attention de Mme le ministre de la culture
et de la communication sur les difficultés que rencontrent les services
d'archives départementales, notamment dans l'Isère, en l'absence de
renouvellement des postes scientifiques et de documentation mis à la
disposition de ces institutions culturelles par l'Etat. Les établissements
concernés remplissent, dans des conditions devenues difficiles, les missions de
collecte, de conservation et de documentation qui leur sont confiées. Les
personnels spécialement formés pour exercer ces activités dont le développement
ne cesse de croître sont aujourd'hui en nombre insuffisant et ne parviennent
plus à gérer efficacement les services dont ils ont la charge. S'il était
difficile de procéder à une affectation de fonctionnaires de l'Etat, il serait
en revanche envisageable d'opérer un transfert des crédits correspondant aux
vacances d'emplois par le biais de la dotation générale de décentralisation. Il
convient de préciser qu'une telle solution avait déjà été adoptée afin de
mettre un terme aux difficultés analogues que rencontraient les bibliothèques
départementales. Aussi, il lui demande de lui indiquer par quels moyens elle
pense remédier à ces situations et de bien vouloir lui faire connaître son
opinion sur l'opportunité de renouveler une solution d'ores et déjà
expérimentée.
N° 328. - M. Jacques Valade expose à Mme le ministre de l'aménagement du
territoire et de l'environnement que la diffusion des téléphones mobiles est
devenue un véritable phénomène de société. La France est en train de rattraper
le retard qui était le sien dans ce domaine. Ces développements nécessitent la
mise en place de réémetteurs afin de couvrir correctement le territoire
national. Le choix qui a été fait de plusieurs opérateurs concurrents entraîne
la multiplication de ces relais. Or France Télécom, SFR et Bouygues - seuls
autorisés à exploiter ces réseaux en France - se livrent à une féroce
compétition en matière d'implantation de relais qui se traduit par une
floraison de pylones et d'antennes de toute nature, de toute forme, de toute
taille qui perturbe singulièrement le paysage tant urbain que rural. Il
souligne que les lois et réglementations actuelles sont insuffisantes pour
maîtriser cette prolifération. Les responsables des collectivités locales et
les administrations de l'Etat sont à la fois sans moyens et sans directives
pour concilier nécessité d'installations nouvelles et protection de
l'environnement. En conséquence, il lui demande quelles mesures sont envisagées
à très court terme pour éviter de tels excès ?
ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE
DU CONSEIL DE L'EUROPE
ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE
DE L'UNION DE L'EUROPE OCCIDENTALE
Lors de sa séance du mardi 20 octobre 1998, le Sénat a élu :
MM. Daniel Hoeffel, Lucien Neuwirth, Jean-François Le Grand, Nicolas About,
Marcel Debarge et Mme Josette Durrieu, délégués titulaires du Sénat
représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à
l'Assemblée parlementaire de l'Union de l'Europe occidentale ;
MM. Daniel Goulet, James Bordas, Jean-Guy Branger, Jacques Legendre, Michel
Dreyfus-Schmidt et Mme Danièle Pourtaud, délégués suppléants du Sénat
représentant la France à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à
l'Assemblée parlementaire de l'Union de l'Europe occidentale.
NOMINATION DE MEMBRE
D'UNE COMMISSION PERMANENTE
Dans sa séance du mardi 20 octobre 1998, le Sénat a nommé M. Jean-Pierre Fourcade membre de la commission des affaires culturelles.
NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL,
DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Luc Dejoie a été nommé rapporteur du projet de loi n° 530 (1997-1998),
adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'accès au droit et à la résolution
amiable des conflits.
M. Jean-Paul Delevoye a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 249
(1997-1998) de M. Alain Vasselle visant à modifier l'article 111 de la loi n°
84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la
fonction publique territoriale.
M. Jean-Paul Delevoye a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 283
(1997-1998) de M. Daniel Eckenspieller relative à la prime de fin d'année
attribuée aux fonctionnaires des collectivités territoriales.
M. Jean-Paul Delevoye a été nommé rapporteur, en remplacement de M. Robert
Pagès, de la proposition de loi n° 399 (1997-1998) de M. Michel Duffour
assurant le maintien des avantages individuellement acquis en matière de régime
indemnitaire pour les agents titulaires des collectivités locales intégrés dans
la fonction publique territoriale.
M. Jean-Jacques Hyest a été nommé rapporteur, en remplacement de M. Pierre
Fauchon, de la proposition de loi n° 485 (1997-1998) de M. Paul Loridant pour
l'extension de la qualification d'officier de police judiciaire au corps de
maîtrise et d'application de la police nationale.
M. Jean-Jacques Hyest a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 532
(1997-1998), adoptée par l'Assemblée nationale, portant extension de la
qualification d'officier de police judiciaire au corps de maîtrise et
d'application de la police nationale.
DÉLÉGATION POUR LA PLANIFICATION
Bureau
Au cours de sa séance du mardi 20 octobre 1998, la délégation pour la
planification a constitué son bureau, qui est ainsi composé :
Président :
M. Joël Bourdin.
Vice-présidents :
MM. Serge Lepeltier, Marcel Lesbros, Georges Mouly,
Jean-Pierre Plancade.
Secrétaires :
Mme Odette Terrade, M. Roger Husson.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Conditions d'utilisation des subventions
du Fonds social européen
334.
- 19 octobre 1998. -
M. André Diligent
appelle l'attention de
M. le ministre délégué chargé des affaires européennes
sur le Fonds social européen. Pour la période 1994-1997, la France s'est vu
attribuer au titre des objectifs 3 et 4 la somme de 21,6 milliards de francs et
ce pour répondre à deux objectifs : à titre curatif, combattre le chômage de
longue durée, faciliter l'insertion dans la vie active des jeunes, des femmes,
des chômeurs de longue durée et des personnes exposées à l'insertion ; à titre
préventif, améliorer la qualification des travailleurs menacés de chômage en
raison des exigences des mutations industrielles. Ces programmes arrivant
bientôt à leur terme, il lui demande si des dispositifs sont à l'étude pour
mieux maîtriser la mise en oeuvre du Fonds social européen. En effet, le
Parlement européen a fait dans un rapport sur le FSE, discuté en séance le 18
juillet 1997, des retards constatés en France dans l'utilisation des crédits
communautaires. Il les attribue à l'excès de centralisation et au manque de
clarté dans la répartition des compétences entre les différents échelons
administratifs qui aboutissent souvent à une marginalisation des collectivités
locales et des acteurs locaux, à l'excessive rigidité du processus de
programmation et des mesures d'éligibilité au plan national, à la lenteur de la
présentation des projets, à la lourdeur et la lenteur des circuits financiers,
à la difficulté de mobiliser les cofinancements, aux carences de l'information.
Il semblerait que si la sous-consommation des fonds structurels est génrérale
en Europe, en France elle serait de l'ordre de 30 % par rapport aux
prévisions.
Retraite des exploitants agricoles
335.
- 19 octobre 1998. -
M. Roland Courteau
attire l'attention de
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche
sur la situation des exploitants agricoles retraités et sur la modicité des
pensions de retraite qu'ils perçoivent, ainsi que leurs conjoints. S'il est
vrai que des efforts ont été consentis pour revaloriser les retraites les plus
faibles, il lui rappelle que le souhait des sections des anciens exploitants
des syndicats professionnels est d'obtenir que le niveau des pensions atteigne
75 % du SMIC. C'est pourquoi, il lui demande s'il entend prendre toutes mesures
en ce sens, pour répondre à l'attente des exploitants agricoles et de leurs
conjoints, dans le cadre des dispositions prévues par le projet de loi de
finances pour 1999.
Harmonisation du reclassement
des maîtres auxiliaires devenus titulaires
336.
- 20 octobre 1998. -
M. Ivan Renar
attire l'attention de
M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie
sur les modalités restrictives de reclassement qui s'appliquent à certains
maîtres auxiliaires qui deviennent titulaires. En effet, selon les textes en
vigueur des maîtres auxiliaires recrutés MA III, puis accédant au cours de leur
service au grade de MA II, MA I, sont pénalisés dans leur reclassement d'accès
à la titularisation, étant moins bien reclassés que s'ils étaient restés MA
III. Cette situation, qui pénalise l'effort et le travail, est vécue par les
intéressés comme une réelle injustice. En conséquence, il lui demande de bien
vouloir lui indiquer les mesures qu'il compte prendre pour y remédier.
Redéploiement des forces de gendarmerie
337. - 20 octobre 1998. - M. Gérard César attire l'attention de M. le ministre de la défense sur le redéploiement des effectifs de gendarmerie au profit des zones urbaines. Il lui rappelle que la gendarmerie assure la sécurité sur 95 % du territoire national et joue un rôle privilégié en milieu rural par sa proximité avec la population et par son action d'information. Concerné en tant que maire par la proposition de fermeture de la brigade de Rauzan, il lui demande de lui faire part de sa position. Il lui fait remarquer que, dans le monde rural, malgré les efforts des gendarmes, la délinquance va croissant.