Séance du 28 octobre 1998
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Candidatures à des organismes extraparlementaires
(p.
1
).
3.
Cumul des mandats. -
Suite de la discussion d'un projet de loi organique et d'un projet de loi (p.
2
).
Discussion générale commune
(suite) :
MM. Alain Joyandet, Philippe
Richert, Gaston Flosse, Pierre Fauchon, Joseph Ostermann, Dominique Braye.
Clôture de la discussion générale commune.
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de
l'intérieur par intérim.
4.
Nomination de membres d'organismes extraparlementaires
(p.
3
).
5.
Cumul des mandats. -
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi organique (p.
4
).
Article additionnel avant l'article 1er (p. 5 )
Amendement n° 36 rectifié de M. Pelletier. - MM. Paul Girod, Jacques Larché, président et rapporteur de la commission des lois. - Retrait.
Article 1er (p. 6 )
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 1er (p. 7 )
Amendement n° 31 rectifié de M. Charasse. - M. Michel Charasse. - Retrait.
Article 1er bis (p. 8 )
Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 1er ter (p. 9 )
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Guy
Allouche, Michel Duffour. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
Article 2 (p.
10
)
M. Serge Franchis.
Amendement n° 4 de la commission et sous-amendement n° 40 de M. Jolibois ;
amendement n° 30 de M. Vasselle. - MM. le rapporteur, Charles Jolibois, Alain
Vasselle, le ministre.
Suspension et reprise de la séance (p. 11 )
MM. le rapporteur, Christian Bonnet, Guy Allouche, Dominique Braye, Charles Jolibois, Robert Bret, Alain Vasselle, Pierre Fauchon, Patrice Gélard, Jean Chérioux, Gaston Flosse. - Rejet du sous-amendement n° 40 ; adoption de l'amendement n° 4 rédigeant l'article, l'amendement n° 30 devenant sans objet.
Article 2 bis (p. 12 )
Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Guy Allouche, Gaston Flosse, Patrice Gélard. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 2 ter (p. 13 )
Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 2 quater (p. 14 )
Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Guy Allouche. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 2 quinquies (p. 15 )
Amendement n° 8 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Patrice Gélard. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 2 sexies (p. 16 )
Amendement n° 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Patrice Gélard. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 2 septies (p. 17 )
Amendement n° 10 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Patrice Gélard. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article additionnel après l'article 2 septies (p. 18 )
Amendement n° 33 de M. Duffour. - MM. Michel Duffour, le rapporteur, le ministre, Patrice Gélard. - Rejet.
Article 2 octies (p. 19 )
Amendements n°s 11 de la commission et 34 de M. Duffour. - MM. le rapporteur, Michel Duffour, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 11 supprimant l'article, l'amendement n° 34 devenant sans objet.
Article additionnel après l'article 2 octies (p. 20 )
Amendement n° 35 de M. Duffour. - MM. Michel Duffour, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Article 2 nonies (p. 21 )
Amendement n° 12 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 2 decies (p. 22 )
Amendement n° 13 de la commission. - MM. le rapporteur, Jean-Jacques Hyest, le ministre, Patrice Gélard, Pierre Fauchon, Charles Jolibois. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 3 (p. 23 )
Amendements n°s 14 et 15 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 24 )
Amendement n° 16 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Guy Allouche. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 4 bis (p. 25 )
Amendement n° 17 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jean Chérioux, Michel Duffour, Patrice Gélard, Guy Allouche, Dominique Braye, Louis Moinard. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 4 ter (p. 26 )
Amendement n° 18 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; Guy Allouche, Alain Vasselle, Michel Duffour. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 4 quater (p. 27 )
Amendement n° 19 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Guy Allouche, Philippe Arnaud. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 4 quinquies (p. 28 )
Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 5 (p. 29 )
Amendement n° 21 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 6 (p. 30 )
Amendement n° 22 de la commission. - M. le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 7 (p. 31 )
Amendement n° 23 de la commission. - M. le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 8 (p. 32 )
Amendement n° 24 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Articles additionnels après l'article 8 (p. 33 )
Amendements n°s 25 à 27 de la commission. - Adoption des amendements insérant trois articles additionnels.
Article 9. - Adoption (p.
34
)
Article 10 (p.
35
)
Amendement n° 28 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Intitulé du projet de loi organique (p. 36 )
Amendement n° 29 rectifié du projet de loi organique de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.
Vote sur l'ensemble (p. 37 )
MM. Jean-Jacques Hyest, Patrice Gélard, Michel Duffour, Alain Peyrefitte, Mme
Dinah Derycke, MM. Philippe Arnaud, Dominique Braye, Paul Girod, Guy Allouche,
Emmanuel Hamel, Louis Boyer, le rapporteur, le secrétaire d'Etat.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi organique.
6.
Renvoi pour avis
(p.
38
).
7.
Dépôt de rapports
(p.
39
).
8.
Ordre du jour
(p.
40
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
CANDIDATURES À DES ORGANISMES
EXTRAPARLEMENTAIRES
M. le président.
Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien
vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein
d'organismes extraparlementaires.
La commission des affaires culturelles a fait connaître qu'elle propose la
candidature de M. Ambroise Dupont pour siéger, en qualité de titulaire, et de
M. Marcel Vidal pour siéger, en qualité de suppléant, au sein du conseil
d'administration du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages
lacustres.
La commission des affaires économiques et du Plan a fait connaître qu'elle
propose la candidature de Mme Janine Bardou pour siéger au sein du Conseil
national de la montagne.
La commission des affaires sociales a fait connaître qu'elle propose la
candidature de M. Alain Gournac pour siéger au sein du Haut Conseil du secteur
public.
La commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques
de la nation a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. Maurice Blin
pour siéger au sein du Haut Conseil du secteur public.
La commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale a fait connaître qu'elle
propose les candidatures de :
- M. Raymond Courrière pour siéger, en qualité de titulaire, et M. Jean-Paul
Amoudry pour siéger, en qualité de suppléant, au sein du conseil
d'administration du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres
;
- MM. Jean-François Humbert et Jean-ClaudePeyronnet pour siéger au sein du
Conseil national des services publics départementaux et communaux ;
- M. René Garrec pour siéger au sein du Conseil national de l'aménagement et
du développement du territoire ;
- M. Yves Fréville pour siéger au sein du Haut Conseil du secteur public ;
- et M. Jean-Pierre Bel pour siéger au sein du Conseil national de la
montagne.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à
l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition, à l'expiration du délai
d'une heure.
3
CUMUL DES MANDATS
Suite de la discussion d'un projet de loi organique
et d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi organique
(n° 463, 1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la limitation
du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs conditions
d'exercice, et du projet de loi (n° 464, 1997-1998), adopté par l'Assemblée
nationale, relatif à la limitation du cumul des mandats électoraux et des
fonctions et à leurs conditions d'exercice. [Rapport n° 29 (1998-1999).]
Dans la suite de la discussion générale commune, la parole est à M.
Joyandet.
M. Alain Joyandet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai été,
comme nombre d'entre nous, très attentif à la discussion qui a eu lieu dans cet
hémicycle hier après-midi. L'intervention que j'avais prévue de faire
reprenait, sur de nombreux points, tout ce qui a été dit. Or, il convient
d'éviter les redites. Aussi, je me contenterai de vous faire part, monsieur le
ministre, de mon étonnement quant à la situation que crée, entre la gauche et
la droite, le dossier du cumul des mandats ainsi que des résultats d'une
expérience personnelle, recueillis lors d'une enquête que j'ai menée dans mon
département.
Il me semble que nous ne sommes pas assez clairs avec nos concitoyens, dans
l'esprit desquels nous cultivons depuis quelque temps une espèce de caricature
tendant à faire croire qu'il y a, d'un côté une gauche qui propose une réforme
du cumul des mandats moderne et même avant-gardiste et, de l'autre, une
droite...
M. Robert Bret.
Ringarde !
M. Alain Joyandet.
... ringarde, campée sur ses positions, qui n'accepte aucune évolution.
Eh bien, disons les choses très simplement !
La loi en vigueur permet à la fois d'être, par exemple, parlementaire
européen, sénateur, président d'un conseil général, maire d'une commune de
moins de 20 000 habitants et encore, éventuellement, président d'un
établissement public de coopération intercommunale.
Aujourd'hui, on nous soumet un nouveau texte et on nous fait un certain nombre
de propositions.
Or, que dit la gauche ? Elle dit : tout ça c'est fini, et reste, pour le sujet
essentiel, la possibilité d'avoir un mandat parlementaire et un mandat local.
Et que dit la droite ? Eh bien, elle dit la même chose. Elle ajoute simplement
que ce mandat local doit être exécutif, vraiment exécutif.
Quelle est la seule différence entre nous, monsieur le ministre ? En fait,
vous nous proposez de maintenir les vrais-faux parlementaires et présidents de
conseil général ou les vrais-faux sénateurs-maires, alors que nous, nous vous
suggérons tout simplement de laisser les parlementaires présidents de conseil
général ou les sénateurs-maires, ou les députés-maires, puisque, dans le
système actuel, on peut tout à fait être premier adjoint avec délégation
générale, c'est-à-dire les pouvoirs, le bureau, la voiture, etc.
En fait, il y a à peine une feuille de papier à cigarette entre la droite et
la gauche sur ce dossier.
M. Michel Duffour.
Alors, vous allez voter le texte !
M. Alain Joyandet.
Je relève que la gauche ne propose pas la solution : un homme un mandat. Il
n'y a donc pas un fossé entre ce qui est proposé par la gauche et ce qui l'est
par la droite.
M. Claude Domeizel.
Donc, vous allez voter le texte !
M. Alain Joyandet.
Mes chers collègues, nous ne somme donc pas si éloignés les uns des autres.
Lorsque j'entends les déclarations du président de notre assemblée, M.
Christian Poncelet, et si je me réfère à la voie tracée par M. le Président de
la République, il n'y a pas, me semble-t-il, motif à ériger une barrière
insurmontable entre nos positions respectives.
J'espère que nous parviendrons à un accord au cours de la navette qui va
s'instaurer, puisque depuis hier soir - et c'est une bonne nouvelle - la menace
du référendum semble écartée. Il aurait d'ailleurs été difficile de trouver un
motif pour organiser un référendum sur ce point. En effet, en toute
objectivité, on voit mal en quoi nos différences d'approche justifieraient un
référendum. Celui-ci aurait simplement permis de dissimuler, éventuellement, un
certain nombre de divergences au sein de la majorité plurielle.
Ce qui me conforte dans cette opinion, c'est le sondage que j'ai réalisé dans
mon département. J'ai interrogé les grands électeurs pour savoir ce qu'ils
pensaient. On parle beaucoup de l'opinion publique. Vous en jouez un peu trop,
monsieur le ministre. En effet, quand on explique à nos concitoyens qu'il
s'agit plus d'un problème de cumul d'indemnités que d'un problème de cumul de
mandats, ...
M. Jean-Patrick Courtois.
Eh oui !
M. Alain Joyandet.
... on s'aperçoit que leur réaction est différente. Ils ne nous reprocheront
jamais de travailler trop pour la République ; ils nous reprochent parfois -
par ignorance - de trop encaisser sur le compte de la République.
Quand on leur explique que si l'on détient quatre mandats, notre indemnité est
plafonnée à une fois et demie le montant de l'indemnité parlementaire, ils
commencent à trouver normal que nous travaillions beaucoup et que,
éventuellement, nous cumulions un peu.
M. Jean-Patrick Courtois.
Très bien !
M. Alain Joyandet.
Cela me fait dire que nous avons intérêt, chers collègues de la majorité, à
expliquer à la fois notre position, ce qu'est la législation actuelle, ainsi
que le contenu de ce qui est proposé tant par la gauche que par la droite.
J'ai mené, dans mon département, une enquête très sérieuse, en particulier sur
le plan technique. Il ressort de cette enquête que sur les 260 grands électeurs
qui m'ont répondu, 80 % pensent qu'il faut aller dans le sens d'une limitation
du cumul des mandats - et nous sommes d'accord avec eux - et 74 % rejettent la
thèse « un homme un mandat » ; aujourd'hui, il n'y a quasiment plus que le
parti communiste pour être sur cette ligne.
En revanche - et c'est intéressant - nos grands électeurs font une nette
différence en matière de cumul selon qu'il s'agit de ministres ou de
parlementaires. Ils sont beaucoup plus attachés à ce que les ministres ne
cumulent pas leur fonction ministérielle avec un mandat local.
M. Alain Gournac.
Ça oui !
M. Alain Joyandet.
En effet, 88 % d'entre eux considère qu'un ministre ne doit pas cumuler sa
fonction avec un mandat local, contre 52 % seulement lorsqu'il s'agit d'un
parlementaire. J'y vois, de la part de nos concitoyens, la volonté d'éviter un
mélange des genres, qui est désormais assez décrié.
Par ailleurs, les grands électeurs déplorent que la limitation du cumul entre
une fonction ministérielle et une fonction locale ne soit pas traitée à
l'occasion de l'examen de ces textes. A cet égard, je note que, sous impulsion
de M. le président du Sénat, les présidents des groupes de la majorité
sénatoriale ont déposé une proposition de loi qui va dans ce sens.
Enfin, j'aborderai brièvement un dernier point important : le statut de l'élu.
A l'occasion de l'examen de ces projets de loi, nous devrions aussi nous
préoccuper des élus qui rencontrent de plus en plus de difficultés au sein de
leur collectivité.
Monsieur le ministre, nous ne devrions donc pas nous affronter sur ce sujet.
Pour l'instant, vous jouez un peu de la situation, car M. Jospin a pris
l'initiative de ce dossier et parce que cette question est populaire dans
l'opinion, en tout cas quand on entretient le mélange des genres ! C'est un peu
comme au poker, vous avez la main.
(M. Gournac s'exclame.)
Ni la droite
ni la gauche n'ont intérêt à jouer ce jeu-là, car, à terme, c'est la classe
politique dans son ensemble qui sera déconsidérée. Il ne faut pas prendre nos
concitoyens pour des benêts ; ils finissent toujours par se rendre compte de la
situation.
Je persiste donc à dire qu'il y a très peu de différence entre ce que vous
nous proposez et ce que la plupart des parlementaires de l'Assemblée nationale
et du Sénat peuvent accepter.
Selon moi, le chemin est irréversible. Nous devrons bien aller de l'avant, et
nous sommes d'ailleurs prêts à le faire. Pour autant, il nous faut agir sans
démagogie, de manière responsable, d'une façon qui ne nous fasse pas changer de
république. Dans ces conditions, une très large majorité sur toutes les travées
de cet hémicycle pourrait, j'en suis persuadé, se former sur un texte de
compromis.
J'espère donc que les navettes - puisqu'il y aura navettes et non référendum -
nous permettront d'aboutir à un résultat responsable dans l'intérêt de la
France.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons
eu par le passé des exemples de cumul excessif de mandats et de fonctions
électifs dont chacun se souvient. Ces pratiques ont heurté nos concitoyens et
je peux comprendre leurs réactions.
Hier, certains d'entre nous ont d'ailleurs rappelé des exemples qui sont
encore présents dans nos mémoires. Vous ne serez donc pas étonnés que je
confirme mon soutien à une démarche qui doit nous permettre d'éviter ces
dérives.
Parallèlement, d'autres, dont on devine les arrière-pensées, jugeant le moment
propice, en ont profité pour lancer un débat autour de l'idée qu'un bon élu est
celui qui n'exerce qu'un seul mandat, n'hésitant pas à affirmer que ceux qui
assument plusieurs responsabilités électives et qui sont désignées par le
vocable à connotation péjorative de « cumulards » sont des freins à
l'expression de la démocratie. Rien de moins !
Pour ma part, j'estime qu'il est indispensable de limiter de façon plus
stricte le cumul. Je souhaite également que ce débat ne soit pas l'occasion
d'un affrontement politicien démagogique ou qu'il soit pollué par un chantage
exercé sur le Sénat par le biais d'un projet de loi - voire d'une menace de
référendum - proposant de modifier le scrutin sénatorial.
Oui à la modernisation de la vie politique ! Qui, d'ailleurs, voudrait s'y
opposer ? Mais ne tombons pas dans la démagogie et le populisme, qui consistent
à engager les réformes non en fonction de leur intérêt propre, mais de l'écho
médiatique ou des retombées électorales éventuelles.
Dans cet ordre d'idée, permettez-moi trois remarques sur le rôle spécifique du
Sénat, le statut et la décentralisation.
Premièrement, dans l'équilibre institutionnel parlementaire, le Sénat tient
une place à part, une place spécifique conférée par la Constitution. Au travers
de ses membres, il représente les collectivités locales et territoriales. Et
pour ceux qui puisent dans les comparaisons avec l'étranger leur radicalisme
anticumul, je voudrais citer le cas de l'Allemagne.
Le Bundesrat, qui n'est pas tout à fait l'équivalent du Sénat mais qui s'en
rapproche beaucoup, n'est composé que d'élus des Lander, ministres-présidents
et ministres. Pour siéger au Sénat allemand, il faut être membre de l'exécutif
d'un Land. Il est donc inconcevable pour nous, si nous voulons transposer la
situation, d'envisager sérieusement d'interdire à un sénateur d'exercer une
fonction élective locale.
Deuxièmement, pour que la modernisation de la vie politique soit réelle, pour
que ses effets soient pleinement ressentis par nos concitoyens, elle doit non
seulement concerner, bien sûr, les élus nationaux et les exécutifs importants,
mais aussi faciliter l'implication active des conseillers généraux, des
conseillers régionaux, des maires et des présidents des structures
intercommunales dans la vie démocratique des départements et des régions.
Or il suffit de discuter avec un conseiller général ou un maire de petite
ville pour se rendre compte de l'acuité de leurs difficultés, en particulier
pour concilier l'exercice de leur mandat avec leur profession.
Se pose dès lors la question de savoir si nous sommes prêts à repenser les
moyens qui sont accordés aux élus. Et il ne s'agit pas d'abord d'une
réévaluation des indemnités. Ce dont les élus ont besoin, je le répète, c'est
de pouvoir rendre compatible une activité professionnelle et l'exercice d'un
mandat électif. Si nous voulons intéresser les jeunes, rendre la démocratie
locale plus vivante, la réforme du statut de l'élu est une urgente
nécessité.
Troisièmement, cette refonte du statut de l'élu local doit se prolonger par la
redéfinition du mode de fonctionnement des échelons administratifs et de leur
organisation territoriale. La réflexion sur la décentralisation doit être
activée et doit déboucher sur des propositions concrètes. Depuis des années,
les déclarations se succèdent, mais je constate que, dans la pratique, la
recentralisation est en marche !
Un sénateur du RPR.
Eh oui !
M. Philippe Richert.
Et lorsque j'entends certains orateurs justifier le « jusqu'auboutisme » du
non-cumul des mandats par le fait que la décentralisation aurait donné à l'élu
plus de pouvoirs et plus de poids, je les invite à observer et à analyser des
projets comme ceux qui concernent la taxe professionnelle ou encore les agences
de l'eau. Leurs conséquences sur les collectivités ne sont pas neutres, au
contraire ! On tourne le dos à la décentralisation par le biais d'une tutelle
nouvelle et d'une recentralisation qui ne se cache même plus.
Pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, il me paraît nécessaire
d'accepter dès à présent une évolution sensible de la limitation plus stricte
du cumul des mandats. La prise en compte et l'intégration dans le dispositif
des cas particuliers des membres du Gouvernement et des présidents des
structures intercommunales importantes me semblent fortement souhaitables.
Le principe retenu par la commission des lois - deux mandats dont un exécutif
local - me paraît être la position d'équilibre que nous pouvons soutenir
aujourd'hui, en souhaitant que le Gouvernement n'oublie pas de relancer les
chantiers du statut de l'élu local et de la décentralisation.
Ces deux étapes seront nécessaires pour traiter ensuite le problème du cumul
des mandats. Nous verrons avec attention si le Gouvernement sera aussi prompt
pour mettre ces deux chantiers en pratique.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Flosse.
M. Gaston Flosse.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les deux
projets de loi qui nous sont soumis s'appliquent à ce qu'il est encore convenu
d'appeler les « territoires d'outre-mer » et à la collectivité territoriale de
Mayotte.
Je ne m'opposerai pas au principe même de cette application, mais je
formulerai des propositions fidèles à l'esprit de la majorité sénatoriale et
allant dans le sens d'une restriction réaliste et conforme à l'évolution des
moeurs.
Si la motivation de l'interdiction faite à un élu chef d'un exécutif local
d'être en même temps parlementaire national est difficile à comprendre en
métropole, elle l'est encore plus en outre-mer.
Or aucune disposition n'a été envisagée pour prendre en compte nos
spécificités.
Pourtant, vous conviendrez, monsieur le ministre, que, à l'heure des
évolutions statutaires que connaissent la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie
française, il est indispensable de maintenir des liens étroits entre ces
territoires, le gouvernement central et le Parlement afin que ces mutations se
fassent dans le dialogue et la concertation.
Or qui, mieux qu'un exécutif local, pourrait prétendre pouvoir entretenir de
tels rapports privilégiés, surtout quand des milliers de kilomètres séparent
les interlocuteurs ? Comment peut-on imaginer que les parlementaires issus de
territoires si lointains et si spécifiques puissent être des relais efficaces
s'ils n'ont pas d'ancrage local ?
Cela est impossible. Une implantation locale est indispensable à l'élu
national d'un territoire d'outre-mer.
Ma position est donc claire : incompatibilité de mandats législatifs, d'accord
; incompatibilité d'exécutifs, d'accord ; ministre à plein temps, d'accord.
Mais interdiction du cumul de deux mandats, exécutif et législatif, pas
d'accord !
Il serait dommage de vider les assemblées parlementaires de personnalités
détenant des mandats exécutifs qu'elles ne voudront pas abandonner. Mieux
identifiées, donc plus responsables, ces personnalités entretiennent un
dialogue plus riche avec les populations qu'elles représentent, populations qui
attendent d'elles un engagement total et un lien entre le Parlement et le «
pays ».
Il serait réducteur de considérer, monsieur le ministre, que les arguments des
partisans de certaines complémentarités de mandats sont uniquement motivés par
la défense d'intérêts personnels. C'est du point de vue de l'efficacité du
fonctionnement de nos institutions et de notre démocratie qu'ils abordent la
question.
Le rapport privilégié entre un parlementaire et son territoire, favorisé par
l'exercice d'un mandat local, est une bouffée de démocratie. Il est, de plus,
dans la tradition française. La ténacité de cette tradition n'est-elle pas un
indice de fonctionnalité du système ? Ne renforce-t-elle pas l'argumentaire en
faveur de l'ancrage local ?
Les électeurs ont toujours été libres, soit de renouveler leur confiance à des
femmes et à des hommes dont ils avaient mesuré les qualités sur le fondement de
leur seul jugement, soit de solliciter un nouveau venu pour les représenter. Et
si la volonté populaire avait été si farouchement opposée au cumul, elle
l'aurait manifesté au moment du vote, car c'est uniquement d'elle que nous
tenons nos mandats.
Cette loi de circonstance, destinée à s'attirer les bonnes grâce des
électeurs, est-elle finalement si conforme à leur désir profond ou est-elle
simplement encouragée par la pression des médias ?
Il faut se rendre à l'évidence : nos compatriotes souhaitent qu'une expérience
de terrain puisse faire face à l'administration et aux ministères. Ils veulent
que leurs représentants luttent contre la technocratie. Ils souhaitent que les
élus soient des praticiens de la vie quotidienne.
Qui peut prétendre qu'un parlementaire légiférerait mieux s'il n'était pas en
mesure d'apprécier les textes qu'il vote dans les collectivités qu'il
administre ?
Qui peut prétendre qu'un chef d'exécutif local pourrait appréhender plus
concrètement les effets d'une loi sur son territoire s'il lui est dorénavant
interdit de participer à son élaboration ?
Ne nous privons pas, dans cette enceinte, du témoignage, de l'expérience, du
sens des réalités des sénateurs qui ont construit leur parcours en partant de
la base et non du sommet.
N'oublions pas ce que les élus d'outre-mer que nous sommes apportent au
Parlement, notamment grâce à leurs mandats locaux, la présence du Pacifique,
des Caraïbes, de l'océan Indien, ... Ne transformons pas le parlementaire en
simple technicien de l'élaboration de la loi. Sachons pérenniser ce lien fort
entre l'élu, le terrain et l'électorat.
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Gaston Flosse.
Nous ne pourrions être que contre-productifs par rapport à l'objectif que nous
visons : moderniser la vie politique et revivifier la démocratie.
C'est pourquoi j'estime, à l'instar de mes collègues du groupe du
Rassemblement pour la République et du président du Sénat, Christian Poncelet,
qu'il est nécessaire « de prendre position pour une limitation raisonnable du
cumul des mandats » et de ne pas aller jusqu'au dogme : un homme, un mandat.
Il faut conserver la possibilité pour les électeurs de choisir pour
législateurs les titulaires d'un mandat local, désormais unique.
Il s'agit non pas de privilège, mais d'efficacité. L'enjeu est important pour
le développement de mon territoire, et je voterai donc le texte de la
commission des lois.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, m'exprimant
ici, bien entendu, à titre personnel, je constate tout d'abord que le problème
du cumul des mandats nous ramène au débat de la semaine dernière sur le mode de
scrutin des élections régionales. En effet, pour l'essentiel, il s'agit de
savoir si l'on peut assumer les responsabilités de membre du Parlement en y
ajoutant celles de responsable d'un exécutif communal, départemental ou
régional.
Dès lors, à nouveau - et nombre de sénateurs, notamment des membres de mon
groupe, l'ont dit avant moi - se présente le préalable que je signalais la
semaine dernière, monsieur le ministre, en demandant que l'on définisse d'abord
ce que l'on attend des instances locales. Je souhaitais que l'on mette fin à
l'enchevêtrement, j'allais dire « la pagaille actuelle » - M. Allouche a parlé
hier de « millefeuille » - en demandant aux Français, par voie de référendum ce
serait là le bon emploi d'un référendum - de faire un choix durable et clair
entre les deux conceptions possibles : celle des régionalistes et celle des
départementalistes. En effet, même si personne n'en parle, presque tout le
monde sait, je pense, que nous n'avancerons pas dans cette direction du
développement de la décentralisation sans surmonter au préalable cette
difficulté qui entretient beaucoup d'équivoques, de malentendus et
d'arrière-pensées contradictoires.
Je me permets de rappeler cette interrogation, monsieur le ministre, non
seulement, parce que je nourris l'espoir peut-être quelque peu excessif de
connaître votre avis et celui du Gouvernement sur cette question et sur cette
suggestion de référendum, mais aussi parce que la question a une incidence
directe sur celle qui nous est posée aujourd'hui, à savoir ce que nous
attendons des exécutifs locaux. Est-ce une pleine responsabilité dans un
domaine clairement défini et la disposition des instruments juridiques et
financiers adaptés ou est-ce, dans la situation présente, une responsabilité
diluée, un patchwork de pouvoirs juxtaposés, enchevêtrés, patchwork entretenu
savamment par l'administration centrale, au demeurant, dont il masque le
pouvoir de plus en plus omniprésent ?
Dans le premier cas, il me paraît clair - je l'avoue, même si je suis ici en
contradiction avec bon nombre de mes meilleurs amis - que la maîtrise et la
gestion d'un exécutif local majeur sont à coup sûr un emploi à plein temps,
puisqu'il ne suffit pas de donner des impulsions et des signatures - nous
connaissons tous les piles de parapheurs - mais qu'il faut encore, selon moi,
assumer sur le terrain le suivi des affaires, car c'est ce qui fait la
différence entre une gestion politique et une gestion administrative.
Toutefois, je reconnais que ce dernier cas est un peu idéal.
Dans le second cas, c'est-à-dire dans la situation actuelle, force est de
reconnaître - presque tout le monde l'a rappelé - que la détention par un
responsable d'exécutif local d'un mandat de parlementaire confère une capacité
d'action trop souvent nécessaire pour surmonter les innombrables handicaps de
la centralisation et tirer, en quelque sorte, son épingle du jeu, comme M.
Flosse le disait à l'instant.
Mais que dire des autres ? Que dire des collectivités qui n'ont pas à leur
tête un parlementaire ? Elles sont bien à plaindre, semble-t-il !
Et que dire, surtout, du travail parlementaire en un temps où la masse du
travail législatif, encore compliquée par le processus européen, ne cesse de
croître et où d'aucuns, dont nous sommes, souhaitent non sans raison voir le
Parlement jouer un rôle plus actif dans notre vie publique par le biais des
commissions d'enquête ou de contrôle, des groupes de travail spécialisés, des
missions en province, etc., toutes choses qui, avouons-le, demandent du temps
et de la disponibilité ?
M. Guy Allouche.
Très bien !
M. Pierre Fauchon.
Qu'en dire, sinon que le métier de parlementaire est aussi, ou devrait être -
avec ce qu'il nécessite, bien entendu, de présence sur le terrain - un métier à
temps complet ?
Je me trouve donc, pour ma part, en vertu de conceptions qui me sont
personnelles et qui n'impliquent aucune critique des conceptions différentes -
autant d'hommes, autant de situations, et c'est aux électeurs, on l'a rappelé,
d'en juger ! - je me trouve, dis-je, en présence d'un dilemme.
Faut-il attendre, comme certains de mes amis l'ont dit - notamment le
président du groupe auquel j'appartiens - que la décentralisation ait atteint
son plein développement pour identifier clairement comme profondément
distinctes et incompatibles les fonctions exécutives locales importantes et la
fonction parlementaire, ou faut-il anticiper sur cette évolution et, peut-être,
la favoriser en opérant une coupure, comme le propose le Gouvernement ?
Telle est, pour moi, la question, et j'espère que le présent débat - et plus
spécialement la réponse du Gouvernement à nos interrogations - permettra de
l'éclairer. Je doute cependant que les garanties qui nous seront apportées
soient telles que nous puissions envisager de « brûler nos vaisseaux ».
J'ai ainsi été conduit à chercher une solution qui, tenant compte de l'état
actuel de la situation, autorise le cumul d'une fonction exécutive et d'un
mandat parlementaire, mais seulement pour une durée limitée - je propose six
ans, mais on peut en discuter - afin que ce cumul puisse porter ses meilleurs
fruits sans pérenniser les situations acquises et, donc, sans faire obstacle au
nécessaire renouvellement des responsables et au nécessaire partage des
responsabilités.
Il me semble que, dans ces questions d'aménagement des pouvoirs publics, les
solutions de souplesse sont préférables aux mécanismes sommaires, et en tout
cas prématurés, du « tout ou rien ».
C'est dans cet esprit que j'ai déposé un amendement. Sans doute ne fera-t-il
plaisir à personne, mais je ne parle pas pour faire plaisir : je parle avec
l'espoir, que je vous demande de me laisser, de préparer une solution qui soit
acceptable et comprise sinon par le plus grand nombre, du moins par un bon
nombre, dont j'ai la faiblesse de croire que ce ne sont peut-être pas les moins
raisonnables.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Ostermann.
M. Alain Gournac.
Ah ! Nous allons entendre des choses intéressantes !
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, hier soir et
cet après-midi, pendant près de trois heures de débat, de nombreux arguments en
faveur du cumul des mandats ou contre celui-ci ont été échangés. Mon propos se
limitera donc à quelques observations tirées de mon expérience d'élu local
rural.
La question des mandats multiples ou du cumul des mandats est trop souvent
présentée comme la source de tous les maux, qu'il s'agisse de l'absentéisme
parlementaire, de la tendance à la patrimonialité des fonctions électives, du
recours à des technocraties en lieu et place de la gestion directe par l'élu
ou, pour couronner le tout, de la corrupion. Or c'est, à mon sens, un sujet
bien trop complexe, subtil et délicat pour qu'il puisse faire l'objet d'un tel
jugement, à la fois moraliste et sans nuance.
Il ne s'agit ni de faire obstruction ni d'être « ringard », comme le
prétendent certains, mais de mener le débat avec la sérénité et le réalisme qui
s'imposent. En effet, n'oublions pas qu'il s'agit avant tout de nos
collectivités locales et non de simples querelles idéologiques.
Treize ans après la première réforme, le franchissement d'une étape
supplémentaire est justifié. Tout le monde en convient, il est temps de limiter
le cumul de certains mandats superflus - je ne tiens pas à les citer - et
impossibles à assumer simultanément.
Faut-il pour autant priver le parlementaire d'un mandat exécutif local ? Je ne
le pense pas. C'est pour cela, monsieur le ministre, que votre texte est,
disons-le, inacceptable, surtout pour les sénateurs qui sont, de par la
Constitution, les représentants des collectivités locales.
Permettez-moi d'avancer quelques arguments pour étayer cette affirmation.
Tout d'abord, l'ancrage local permet une meilleure expérience de la vie
quotidienne, condition
sine qua non
pour être un bon parlementaire. En
effet, pour légiférer correctement et conseiller efficacement nos collègues
élus locaux, il est indispensable de savoir comment la législation en vigueur
est appliquéee sur le terrain et quelles sont les attentes de nos
concitoyens.
Par ailleurs, comment pourrait fonctionner un conseil municipal dont ferait
partie le président de la commission des finances d'une assemblée
parlementaire, par exemple, qui risquerait ainsi de saper l'autorité du maire ?
Il faut donc faire un choix clair.
Comment, en outre, expliquer qu'un parlementaire soit incapable, faute de
temps, de gérer correctement une commune, alors qu'un industriel, un artisan,
un salarié ou un travailleur indépendant le pourrait ?
Ne désirez-vous pas tout simplement, monsieur le ministre, que le paysage
politique local soit monopolisé par la fonction publique en général, et par
l'éducation nationale en particulier ?
M. Robert Calmejane.
Ah !
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Joseph Ostermann.
Quelle chance ce serait pour le pouvoir central !
M. Alain Gournac.
On y arrive !
M. Joseph Ostermann.
Un autre argument que je souhaite mettre en avant a trait à l'absentéisme
parlementaire.
Le cumul des mandats n'est pas, à lui seul, responsable des hémicycles
déserts. L'organisation du travail parlementaire l'est tout autant.
M. Philippe François.
Oui !
M. Joseph Ostermann.
Le cas présent en offre un exemple flagrant. L'examen des projets de loi sur
le cumul des mandats a lieu en même temps que la préparation du débat
budgétaire. Par conséquent, les sénateurs doivent faire un choix cornélien :
assister aux réunions de commissions ou participer à la séance publique. Avouez
que des progrès restent à accomplir dans ce domaine !
En outre, monsieur le ministre, si le rajeunissement et la féminisation du
Parlement s'imposent, est-il réaliste de penser que l'on puisse entrer au Sénat
dès l'âge de dix-huit ans, sans aucune expérience ?
(M. Gournac rit.)
Enfin, comment pouvez-vous refuser qu'un parlementaire conserve un
exécutif local en imposant, par ailleurs, à ce même parlementaire de siéger
dans quelque 100 ou 150 organismes locaux ? Que d'incohérences de la part de
nos collègues de l'Assemblée nationale !
Le dernier argument que je souhaite défendre a trait au travail de l'élu
local.
Depuis la décentralisation, le rôle de l'élu s'est considérablement accru et
complexifié avec, en parallèle, une pression croissante des administrés en
matière d'emploi, de sécurité ou de cadre de vie. Ces secteurs relèvent
normalement de la responsabilité de l'Etat mais, face à l'échec du
Gouvernement, les élus locaux sont obligés de prendre le relais.
On attend ainsi des élus locaux qu'ils soient de véritables professionnels de
la gestion. Or de nombreux dysfonctionnements et lacunes viennent compliquer
leur travail.
On peut citer, entre autres éléments, une administration d'Etat insuffisamment
performante et beaucoup trop éloignée des réalités du terrain, une
décentralisation encore insuffisamment approfondie, une gestion archaïque des
moyens humains à laquelle restent confrontés les élus locaux à l'orée du
troisième millénaire, un code des marchés publics d'une complexité de plus en
plus ingérable et qu'il faut réformer, l'absence d'un véritable statut d'élu
local.
Voilà des chantiers, monsieur le ministre, sur lesquels vous trouverez les
élus locaux à vos côtés !
Assumer des responsabilités politiques locales est donc devenu un véritable
sacerdoce qu'il convient de respecter et de compenser par des garanties en
matière de formation, de sécurité sociale et de retraite. Ce sont là quelques
problèmes qu'il me semble tout aussi urgent de régler que celui du cumul des
mandats.
Cela étant, comme je l'ai affirmé il y a quelques instants, des ajustements
anticumul sont nécessaires.
Mais un battage médiatique aussi retentissant était-il vraiment nécessaire ?
Etait-il indispensable que le Premier secrétaire d'un parti politique diabolise
à ce point notre institution en agitant le chiffon rouge du référendum ?
Etait-il digne d'un vice-président du Sénat de relayer à la tribune ces menaces
?
Plûtot que de les vilipender, aidez les parlementaires élus locaux à animer et
gérer les collectivités en exploitant leur dévouement, leur expérience ainsi
que leur ouverture d'esprit.
Laissez, enfin, les électrices et les électeurs, qui sont les premiers
concernés et certainement les plus compétents, choisir ceux qu'ils jugeront à
même de gérer leurs collectivités.
M. Alain Gournac.
Tout à fait !
M. Joseph Ostermann.
En conclusion, les nombreuses lacunes de vos textes ainsi que le manque de
réalisme qui les inspirent les rendent, à mes yeux, inacceptables.
C'est pourquoi, ne pouvant les voter en l'état, je me rallierai à la position
de la commission des lois, qui a réalisé un excellent travail en rééquilibrant
ces textes. Espérons que les navettes nous permettront de trouver une solution
souhaitée par l'ensemble de nos concitoyens !
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers
collègues, je me limiterai, pour ma part, à évoquer le principal cas
d'incompatibilité de mandats prévu par le projet de loi organique, qui est
d'ailleurs le sujet le plus médiatisé et le plus controversé de cette réforme :
je veux parler de l'interdiction qui serait faite à un parlementaire national
d'exercer simultanément un mandat exécutif local.
Je n'évoquerai pas ici toutes les nombreuses autres raisons qui prouvent que
cette réforme est mauvaise pour notre pays. D'autres parmi vous, mes chers
collègues, l'ont déjà fait bien mieux que moi, en particulier le président de
la commission des lois, notre éminent collègue Jacques Larché.
Mon sentiment, partagé par la plupart d'entre vous, mes chers collègues - et
par la plupart des députés de tous bords politiques - est que, si nous
adoptions ces dispositions, nous ne rendrions service ni à notre pays ni à nos
concitoyens.
M. Alain Gournac.
C'est vrai !
M. Dominique Braye.
Nous desservirions, au contraire, la modernisation de la vie politique et la
revalorisation de l'image de la classe politique, que l'opinion appelle de ses
voeux tout autant que nous-mêmes.
M. Jean-Marc Pastor.
C'est faux !
M. Dominique Braye.
En effet, contrairement aux raisons avancées par les zélateurs de cette
réforme, il ne s'agirait, en fait, que d'apporter une réponse médiatique,
démagogique et simpliste aux vrais problèmes que sont la modernisation et la
transparence de la vie politique, la complexité excessive des trop nombreux
échelons territoriaux, la décentralisation inachevée et le statut de l'élu,
sujets qui méritent, comme cela a été unanimement reconnu à cette tribune, une
réflexion de fond et non des lois de circonstance.
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Dominique Braye.
Car ce sont bien des lois de circonstance qui sont aujourd'hui jetées en
pâture à une opinion publique abusée par une présentation tendancieuse de la
question des incompatibilités de mandats.
M. Alain Gournac.
Oui !
M. Dominique Braye.
Il est clair que, comme l'ont rappelé plusieurs orateurs à cette même tribune,
la seule terminologie de cumul et, pis, de cumulards, induit dans l'esprit de
nos concitoyens cumul d'avantages, cumul d'indemnités et cumul de privilèges.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Guy Allouche.
C'est la vérité !
M. Dominique Braye.
La vérité, tous nos concitoyens doivent la connaître, monsieur Allouche !
M. Guy Allouche.
Ne mentez pas !
M. le président.
Veuillez laisser parler l'orateur, monsieur Allouche !
M. Dominique Braye.
Restez calme, monsieur le vice-président !
Tous nos concitoyens, dis-je, doivent connaître la vérité : aucun homme
politique ne peut percevoir plus d'une fois et demie le montant de l'indemnité
parlementaire !
M. Alain Gournac.
C'est vrai !
M. Dominique Braye.
Il doivent donc savoir que très nombreux sont les élus qui assument les
charges et les soucis de plusieurs mandats sans en tirer le moindre avantage
supplémentaire.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains
et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. Guy Allouche.
Démago !
M. Dominique Braye.
C'est la vérité, je n'y peux rien ! Si vous touchez plus d'une fois et demie
l'indemnité de parlementaire, monsieur Allouche, il faut nous le faire savoir
!
M. Guy Allouche.
Dites de quels mandats il s'agit !
M. Dominique Braye.
Les textes soumis à notre examen ne sont certes pas la pleine concrétisation
de la thèse jusqu'au-boutiste : un homme, un mandat. Mais, s'ils étaient
adoptés en l'état, ils conduiraient néanmoins à couper totalement le
parlementaire national de la réalité du pouvoir local, si mince soit-il,
puisqu'on ne pourrait désormais même plus être à la fois parlementaire et maire
de la plus modeste commune rurale.
Ce que je reproche, ce que nous reprochons à cette réforme, mes chers
collègues, c'est qu'elle nous ferait basculer d'un excès dans l'autre. L'excès
précédent, c'était la situation d'avant la loi de 1985, époque où tous les
cumuls étaient possibles. Mais, depuis 1985, nous nous sommes dotés d'une
législation équilibrée qui a largement remédié aux dérives du passé.
Qu'il soit nécessaire d'aller plus loin et de prévoir certains aménagements de
cette législation, j'en suis persuadé. Mais qu'il faille pour autant couper
complètement les parlementaires des réalités du terrain et des responsabilités
locales effectives, je ne le crois pas, et je suis en bonne compagnie dans
cette opinion, car monsieur le ministre, ce sentiment est partagé par la
plupart des parlementaires de tous les groupes politiques.
M. Alain Gournac.
Oui, ils nous l'ont dit !
M. Dominique Braye.
J'en veux pour preuve les contradictions et les incohérences du Gouvernement
et de la gauche plurielle, et vous me permettrez, à cet égard, de passer en
revue les positions de ceux qui nous disent approuver cette réforme.
Commençons par le Gouvernement, et tout d'abord par le ministre de
l'intérieur, qui, s'exprimant en 1997 en tant que président du Mouvement des
citoyens, souhaitait l'introduction d'un seuil de population de 30 000
habitants pour l'incompatibilité entre le mandat de maire et celui de
parlementaire. Dire qu'il a été suivi serait pour le moins osé.
Ajoutons ses déclarations faites à un hebdomadaire, où il affirmait qu'un
projet de loi sur le cumul ne lui paraissait pas indispensable. Cela ne l'a pas
empêché d'aller défendre, sans grande conviction il est vrai, cette même
réforme devant l'Assemblée nationale !
La palme d'or de l'incohérence gourvernementale revient incontestablement à
l'oubli tout de même stupéfiant, dans les projets de loi qui nous sont soumis,
du cas qu'on supposait naïvement prioritaire : je veux parler - vous l'avez
bien compris - de l'incompatibilité des fonctions ministérielles et d'un mandat
exécutif local. Le Gouvernement souhaiterait-il donc ne pas s'appliquer à
lui-même une réforme qu'il estime si bonne ?
(« Très bien ! » et
applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de
l'Union centriste.)
Vous me répondrez que le Premier ministre a déjà demandé à ses ministres
maires d'abondonner leur mandat de maire.
Mais alors, pourquoi ne pas inscrire cette louable pratique dans la loi ? On
se perd en conjectures.
Cela étant, l'examen de la réalité de cette pratique nous donne la réponse :
on peut en effet observer que ces ministres ont effectivement abandonné, sur le
papier, leur mandat d'élu local, mais qu'ils ont conservé, souvent en plus de
leur bureau et de leur voiture, un mandat d'adjoint avec délégation de
compétence générale, adoptant ainsi sans complexe la technique éprouvée de
l'homme de paille.
(Protestations sur les travées socialistes.)
M. Alain Gournac.
Exactement !
M. Dominique Braye.
Qui peut assurer à nos concitoyens en toute honnêteté, monsieur le ministre,
que les anciens maires de Sarcelles, de Bastia, de Chambéry, de Belfort, de
Strasbourg, de Saint-Dié, de Morlaix, pour n'en citer que quelques-uns, ont
cessé d'exercer le pouvoir dans leurs communes ?
(Applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
Une exception emblématique est d'ailleurs pudiquement passée sous silence,
celle du ministre des relations avec le Parlement, qui devrait nous donner
l'exemple, et qui est toujours maire du XVIIIe arrondissement de Paris.
(Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées - Protestations sur les
travées socialistes.)
M. Guy Allouche.
Maire d'arrondissement, ce n'est pas une fonction exécutive !
M. Dominique Braye.
Et je n'ai pas parlé de M. Dondoux qui, voilà quelques semaines, a dit un
certain nombre de choses !
M. Guy Allouche.
Ne dites pas des inepties !
M. le président.
Monsieur Allouche, rappelez-vous qu'il vous arrive aussi de présider la
séance, et qu'alors il vous incombe de faire cesser les interruptions. Je vous
demande donc d'avoir une attitude logique vis-à-vis de l'orateur.
M. Dominique Braye.
J'en viens maintenant au parti socialiste, principal soutien au Gouvernement -
du moins le croyais-je ! Nous savons bien qu'en fait la majorité des députés
socialistes ont l'espoir que le Sénat fera barrage à cette réforme
démagogique.
M. Alain Gournac.
C'est vrai !
M. Dominique Braye.
Beaucoup, nous pouvons tous le dire, nous l'ont avoué.
(Applaudissements
sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
Le projet de loi organique devant être adopté dans les mêmes
termes par les deux assemblées, cela leur permet de voter cette réforme, dont
ils ne veulent pas, en réalité, se pliant ainsi à la discipline de parti, tout
en se défaussant de la responsabilité du rejet de celle-ci sur les sénateurs.
(Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
Quel magnifique exemple de courage politique !
Force est de constater, d'ailleurs, que les plus ardents défenseurs de cette
réforme ne l'ont jamais appliquée à eux-mêmes, préférant la maxime : « Faites
ce que je dis, mais, surtout, ne faites pas ce que je fais ! ».
Dans ce registre, une mention spéciale doit être décernée au sénateur-maire de
Lille, président de la communauté urbaine de la même ville, et au député-maire
de Montpellier, président du district urbain de sa ville, lesquels sont
farouchement opposés au cumul... pour leurs successeurs, après l'avoir
largement pratiqué pendant toute la durée de leur vie politique, jusqu'à
aujourd'hui !
M. Alain Gournac.
Eh oui !
M. Dominique Braye.
Deux anciens Premiers ministres socialistes défendent, en revanche, avec nous
une position raisonnable : l'exercice simultané d'un mandat exécutif local et
d'un mandat parlementaire. Il faudra néanmoins que l'un abandonne bon nombre de
ses mandats puisqu'il est aujourd'hui président de l'Assemblée nationale,
député, maire et président de district, comme l'a fait l'autre, qui n'est plus
que député européen, après avoir été l'un des très rares à cumuler un mandat de
parlementaire national et un mandat de parlementaire européen, et ce - nous
nous en souvenons tous - en dépit des remontrances réitérées et tonitruantes du
Premier ministre.
Les radicaux de gauche, quant à eux, sont divisés sur ce débat, comme le
rappelait, hier, notre collègue Jacques Peyrat.
Le député-maire de La Rochelle est franchement hostile à cette réforme, alors
que le président du parti radical socialiste en est un chaud partisan.
Les Verts sont l'aiguillon anti-cumul du Gouvernement. Il est vrai qu'il est
toujours plus facile d'accepter de perdre ce qu'on ne possède pas !
(Sourires sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants).
M. Alain Gournac.
Ou ce que l'on n'a pas réussi à avoir !
M. Dominique Braye.
Cette réforme serait, en outre, pour eux l'occasion inespérée de récupérer
certains mandats abandonnés par leurs camarades de la gauche plurielle, mandats
qu'ils ne pourraient jamais conquérir sans l'adoption de ces dispositions.
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Dominique Braye.
Reste le parti communiste, dont j'ai pu admirer les contorsions et les
manoeuvres, que l'on ne peut pas vraiment qualifier de ruses de Sioux : le
secrétaire général du PC, M. Robert Hue, lui-même député-maire, milite pour
l'introduction d'un seuil de population de 100 000 habitants au-delà duquel il
faut interdire le cumul parlementaire-maire.
M. Michel Duffour.
Il faut relire vos classiques, reportez-vous à ce qu'il a dit dernièrement
!
M. Dominique Braye.
Quand on sait que, sur les vingt-huit députés-maires communistes, vingt-sept
sont maires de communes de moins de 100 000 habitants, à l'exception de Nîmes -
mais on sait que la municipalité est quasiment perdue ! - on se dit que la
ficelle est tout de même un peu grosse !
M. Alain Gournac.
Enorme !
M. Dominique Braye.
La leçon à tirer de toute cette cacophonie est évidente : la gauche n'aborde
pas de façon cohérente, unie et enthousiaste la réforme qui nous est soumise
aujourd'hui.
Outre ses divergences, une large partie de la gauche manque singulièrement de
courage politique, je le redis, pour exprimer ses vraies positions, alors
qu'elle sait bien que cette réforme est contraire à l'intérêt national et
qu'elle est, de plus, antidémocratique.
Car, enfin, pourquoi légiférer sur le cumul ? En démocratie, n'est-ce pas à
l'électeur de choisir ?
M. Jean Chérioux.
Tout à fait !
Un sénateur du RPR.
En principe, oui !
M. Dominique Braye.
S'il ne veut pas d'un élu qui exerce plusieurs mandats, il le sanctionnera par
son vote.
M. Jean Chérioux.
Et il le fait !
M. Dominique Braye.
Mais tous ici nous le savons bien, en dépit des sondages et des pressions
médiatiques qu'ils subissent, nos concitoyens restent pleins de bon sens. Ils
sont ravis que leur maire ou leur conseiller général soit aussi parlementaire,
car c'est pour eux l'assurance que les lois qui régissent leur vie quotidienne
seront élaborées par celles et ceux dont ils ont pu juger l'efficacité sur le
terrain.
M. Philippe François.
Exactement !
M. Dominique Braye.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je m'opposerai naturellement - ce n'est
pas une surprise - à ces deux projets de loi et je soutiendrai les amendements
de la commission des lois, qui vont dans le sens de l'équilibre et de la
préservation de nos institutions.
Monsieur le président, mes chers collègues, restons donc dans la voie de
l'équilibre et du raisonnable, souhaitée, vous l'avez compris, par la majorité
des parlementaires de tous bords politiques : maintenons la possibilité
d'exercer à la fois un mandat parlementaire national et un mandat exécutif
local. Nos concitoyens, notre vie démocratique et notre pays ont manifestement
tout à y gagner.
(Vifs applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Je
demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la preuve a été
donnée, hier et cet après-midi, que la discussion était nécessaire et que,
treize ans après la loi de 1985, après que la décentralisation se fut ancrée
dans notre vie publique, il était légitime d'en tirer les conséquences.
Dans ce débat, plusieurs orateurs ont craint que l'on ne dresse le citoyen
contre l'élu. Votre rapporteur, M. Jacques Larché, mais aussi MM. Paul Girod et
Bernard Plasait, hier, ont mis en garde contre cette tentation.
Mais si le régime des incompatibilités doit, à mes yeux, évoluer aujourd'hui,
c'est précisément pour que le rapport étroit entre les citoyens et leurs élus
ne soit pas altéré.
Améliorer un statut, améliorer une situation, limiter davantage le cumul entre
certains mandats, ce n'est pas donner des armes au populisme ou à la démagogie
; c'est la meilleure façon de les combattre.
La capacité propre du Parlement à réformer un état de choses ancien et peu
satisfaisant est le plus fort démenti à l'anti-parlementarisme, qui dessert
toujours la démocratie. Quand la République n'entend plus la voix de la
réforme, elle est à la merci des démagogues.
M. Guy Allouche.
Très bien !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Restaurer le politique, comme le souhaitait M. Delevoye, hier, c'est être
capable de surmonter les difficultés et non pas fléchir devant le poids des
habitudes.
Plusieurs intervenants ont considéré que la limitation du cumul des mandats
privait les électeurs de leur libre choix - M. Braye vient de le répéter encore
en cette fin de discussion générale.
Mais ce débat est tranché ! Il y a depuis fort longtemps un régime légal
d'incompatibilités. Certains emplois, certaines fonctions empêchent d'en
occuper d'autres.
A cet égard, je ferai observer que le mot « cumul » figure en toutes lettres
dans le code électoral, s'agissant du régime électoral des députés. Au chapitre
IV, intitulé « Incompatibilités », l'article LO 137 commence en effet par cette
phrase : « Le cumul des mandats de député et de sénateur est interdit ». Et cet
article date de l'ordonnance de 1958.
Le mot « cumul » n'a donc pas été inventé pour stigmatiser une situation, au
contraire, il correspond à une réalité que, précisément, le code a voulu
interdire au titre des incompabilités.
M. Jean Chérioux.
Il faut voir aussi l'usage qu'on en fait !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
La
loi de 1985 a été critiquée sur ce point, mais elle a été jugée par le Conseil
constitutionnel en tous points conforme à notre loi fondamentale.
Il s'agit donc non pas de changer le régime des incompabilités, mais de
déplacer ce que M. Hoeffel appelait le curseur et de le déplacer peut-être plus
vivement.
J'ai entendu les conseils amicaux de ceux qui souhaitaient voir d'abord voter
une réforme de la Constitution visant à interdire tout cumul aux membres du
Gouvernement.
M. Alain Gournac.
Cela, c'est important !
M. Jean-Jack Queyranne.
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Mais, chacun peut l'observer, il y a ceux qui s'appliquent à eux-mêmes la
réforme et ceux qui voudraient l'appliquer d'abord aux autres !
(Vives protestations sur les travées du RPR.)
M. Dominique Braye.
Pas du tout !
M. Jean Chérioux.
Vous voulez dire : ceux qui font semblant de l'appliquer ; M. Strauss-Kahn,
par exemple !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
De
ce point de vue, monsieur Chérioux, pour la première fois, les membres du
Gouvernement se sont appliqué à eux-mêmes, et ce depuis 1997, le principe qui
est aujourd'hui proposé.
(Vives protestations sur les travées du RPR.)
Et s'ils restent présents dans les équipes municipales, sachez que,
contrairement à ce qui a été affirmé ici, ils ne peuvent, en vertu du code des
collectivités territoriales, avoir de délégation générale. Cela n'est pas
possible.
(Protestations sur les mêmes travées.)
M. Jean Chérioux.
Ne jouez pas sur les mots !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Ensuite, vous pensez bien que les nouveaux maires, parce qu'ils sont affrontés
aux problèmes du quotidien, deviennent des maires effectifs ; on peut le
constater sur le terrain.
M. Alain Gournac.
Il ne faut pas mentir !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
J'en reviens à l'objet même de la réforme.
D'abord cette réforme n'a rien à voir avec le slogan : « Un homme, un mandat
», que MM. Flosse et Braye ont repris cet après-midi. En fait, il s'agit d'une
réforme plus pragmatique. Un parlementaire, je le dis bien, pourra continuer à
exercer un mandat qui n'est pas une fonction exécutive : il pourra être adjoint
au maire, vice-président d'un conseil général ou vice-président d'un conseil
régional ; il pourra donc continuer à avoir les pieds dans la réalité
locale.
M. Paul Girod.
Les pieds peut-être, mais pas la tête !
(Sourires.)
M. Alain Vasselle.
Il placera un homme de paille à la tête de la collectivité territoriale !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Il
restera au contact étroit des collectivités locales ; il n'y aura pas de
césure, ou de coupure, comme certains en expriment la crainte.
Le changement qui nous est proposé et sur lequel s'est cristallisé le débat
est donc qu'un parlementaire ne dirige plus un exécutif local.
M. Hoeffel, hier, a souligné que, du fait de la décentralisation, l'exécutif
local avait évolué de même que les responsabilités. Je crois que c'est un
constat lucide qui doit nous conduire à une réforme.
M. Jacques Larché propose de garder la loi de 1985, en faisant glisser quelque
peu le curseur dont nous parlions précédemment de 20 000 à 3 500 habitants.
C'est un petit pas, mais, à mon avis, il n'est pas à la hauteur des changements
qui sont intervenus. Il faut aller plus loin et distinguer clairement le mandat
de parlementaire élu de la nation avec la direction d'un exécutif local, quoi
qu'en pensent les intervenants, et encore cet après-midi M. Joyandet.
Ce point de vue est partagé aussi par des hommes politiques de droite :
souvenez-vous des positions de M. Mazeaud. J'ai cru entendre hier, à la lecture
d'un article, que M. Haenel n'était pas très loin de cette position.
M. Alain Gournac.
Point de vue partagé par les socialistes !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
M.
Allouche a eu raison de souligner que la fonction parlementaire ne sera plus
une sorte d'appoint à la fonction exécutive locale et s'en trouvera ainsi
valorisée et recentrée sur l'essentiel.
Je remercie M. Bret du soutien qu'il a apporté au texte en montrant qu'il
favoriserait le renouvellement des équipes, l'arrivée de nouvelles générations
et la féminisation de la vie politique.
Un sénateur du RPR.
Bidon !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
M.
André Boyer a aussi exprimé clairement combien il convenait de renouveler nos
règles en ce domaine.
Voilà pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, le dispositif que le
Gouvernement vous présente est équilibré.
M. Alain Gournac.
Pas du tout !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Il
doit être mis en perspective, comme nous y ont invités MM. Hoeffel et Hyest,
car il s'inscrit dans la mise en oeuvre de la décentralisation.
Hier, j'ai eu l'occasion de le dire, un certain cumul correspondait à une
excessive centralisation des pouvoirs : il fallait être à Paris pour obtenir
des décisions des administrations centrales. Des évolutions sont en cours, me
semble-t-il, dans notre vie politique, et il est bon à la fois de les constater
et de les accélérer, parce qu'elles correspondent à une vie politique moderne.
Mais je fais confiance au sérieux du débat parlementaire pour que nous
avancions.
Je me suis livré à une petite étude de la situation des cumuls des sénateurs
avant le renouvellement du mois de septembre ; elle me paraît très intéressante
: 85 sénateurs n'exerçaient que leur mandat de sénateur...
M. Alain Gournac.
Bravo !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
...
et 47 d'entre eux exerçaient à la fois leur mandat de sénateur et un mandat
local sans fonctions exécutives. Ainsi, 132 sénateurs, soit près de la moitié,
étaient déjà en conformité avec la loi que nous proposons.
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Alors, je dirai aux autres : encore un petit effort, pour vous inscrire dans la
démarche des projets de loi que nous proposons aujourd'hui !
M. Jean Chérioux.
Votre étude prouve que les sénateurs ne travaillent pas pour leurs intérêts
personnels !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
J'ai bien noté aussi que nombre des orateurs qui se sont exprimés ont manifesté
un certain intérêt pour une évolution du régime d'incompatibilités. Il y a eu
des ouvertures. J'ai relu les débats de la loi de 1985, les mêmes arguments
étaient développés. La loi a été votée et je crois que la démocratie s'en est
mieux portée. Il aura fallu trois lectures durant lesquelles la position de la
majorité sénatoriale a évolué ; je ne renonce donc pas à la voir évoluer à
nouveau sur ce point.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
La majorité de l'Assemblée nationale peut aussi évoluer !
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Oui, mais la navette parlementaire est faite pour rapprocher les points de vue
et pour progresser.
Voilà pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite que ce débat
soit utile pour éclairer l'opinion, mais aussi fécond. Je ne doute pas que nous
aurons l'occasion, après la première lecture, de nous retrouver sur cette base
pour faire avancer ce qui me paraît constituer un progrès dans le
fonctionnement de la démocratie et de la décentralisation dans notre pays.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
4
NOMINATION DE MEMBRES
D'ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
M. le président.
Je rappelle que la commission des affaires culturelles, la commission des
affaires économiques et du Plan, la commission des affaires sociales, la
commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de
la nation, et la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale ont proposé des
candidatures pour des organismes extraparlementaires.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Raymond
Courrière et Ambroise Dupont, membres titulaires, et MM. Jean-Paul Amoudry et
Marcel Vidal, membres suppléants, du conseil d'administration du Conservatoire
de l'espace littoral et des rivages lacustres ; Mme Janine Bardou et M.
Jean-Pierre Bel, membres du Conseil national de la montagne ; MM. Maurice Blin,
Yves Fréville et Alain Gournac, membres du Haut Conseil du secteur public ; MM.
Jean-François Humbert et Jean-Claude Peyronnet, membres du Conseil national des
services publics départementaux et communaux ; et M. René Garrec, membre du
Conseil national de l'aménagement et du développement du territoire.
5
CUMUL DES MANDATS
Suite de la discussion
et adoption d'un projet de loi organique
M. le président.
Nous passons à la discussion des articles du projet de loi organique relatif à
la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs
conditions d'exercice.
Article additionnel avant l'article 1er
M. le président.
Par amendement n° 36 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly et André Boyer
proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé
:
« Le dernier alinéa (2°) de l'article LO 130 du code électoral est complété,
in fine,
par les mots : "ou de tutelle". »
La parole est à M. Girod.
M. Paul Girod.
Il s'agit de garantir que, dans l'hypothèse où un majeur sous tutelle serait
autorisé par le juge des tutelles à être inscrit sur la liste électorale pour
participer aux élections, il ne puisse en aucun cas être éligible. Cela semble
assez logique. En effet, la décision du juge ne peut pas aboutir, alors que le
majeur est sous tutelle, à ce que celui-ci accède à des responsabilités
électives et, par conséquent, devienne l'interprète de ceux qui l'ont élu.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Larché,
président, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de
législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration
générale.
La commission a examiné avec beaucoup d'intérêt cet amendement,
car elle a considéré qu'il visait à apporter une réponse à un véritable
problème. Cependant, elle a adopté une attitude globale et générale, et elle a
entendu se consacrer uniquement aux dispositions ayant trait à la question
principale. En conséquence, la commission souhaite écarter l'amendement n° 36
rectifié - mais pas pour des raisons de fond - en indiquant d'ailleurs qu'il
est tout à fait possible d'élaborer une proposition de loi sur le thème évoqué.
La commission s'engage à la rapporter dans les meilleurs délais et à demander,
le cas échéant, son inscription à l'ordre du jour de nos travaux, au titre des
séances, laissées à l'initiative des parlementaires.
M. Paul Girod.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Girod.
M. Paul Girod.
Le souci des auteurs de l'amendement était de poser un vrai problème et non
pas, évidemment, de perturber un débat fondamental.
C'est pourquoi, sensible aux propos de M. le rapporteur, je retire
l'amendement n° 36 rectifié, et je retiens son engagement de proposer
l'inscription à notre ordre du jour, d'une proposition de loi à ce sujet.
M. le président.
L'amendement n° 36 rectifié est retiré.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. _ Il est inséré, dans le chapitre IV du titre II du livre Ier du
code électoral, un article LO 137-1 ainsi rédigé :
«
Art. LO 137-1
. _ Le mandat de député est incompatible avec celui de
représentant au Parlement européen.
« Tout député élu membre du Parlement européen cesse de ce fait même d'exercer
son mandat de parlementaire national. Toutefois, en cas de contestation, la
vacance du siège n'est proclamée qu'après la décision juridictionnelle
confirmant l'élection. »
Par amendement n° 1, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
compléter
in fine
le second alinéa du texte présenté par l'article 1er
pour l'article LO 137-1 du code électoral par une phrase ainsi rédigée : « En
attendant cette décision, l'intéressé ne peut participer aux travaux de
l'Assemblée nationale. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Cet amendement a une portée limitée. Nous sommes d'accord sur
la disposition de fond, qui est l'incompatibilité entre le mandat de
représentant au Parlement européen et le mandat de parlementaire national.
D'ailleurs, si la loi progresse - je rejoins ici l'optimisme de M. le
secrétaire d'Etat, ou tout au moins je m'y efforce - nous souhaitons que cette
incompatibilité joue dès le prochain renouvellement de l'assemblée européenne,
afin qu'au moins de juin prochain ceux qui, parlementaires nationaux,
souhaiteraient solliciter un mandat européen, sachent à l'avance que, s'ils
sont élus représentants au Parlement européen, ils devront renoncer à leur
mandat national.
En revanche, l'amendement précise, mais la règle est d'ores et déjà applicable
aux parlementaires français, que, en attendant la décision en cas de
contentieux, l'intéressé ne peut participer aux travaux de l'assemblée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Cet
amendement tend à rétablir la rédaction initiale de l'article 1er du projet de
loi avant son examen par l'Assemblée nationale. Comme l'a dit M. Larché, il
s'agit de la règle homologue de celle qui s'applique déjà au député élu
sénateur qui ne peut participer aux travaux des deux assemblées.
Il me paraît logique d'introduire cet amendement dans le projet de loi, raison
pour laquelle l'avis du Gouvernement est favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne de demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, ainsi modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article additionnel après l'article 1er
M. le président.
Par amendement n° 31 rectifié, M. Charasse propose d'insérer, après l'article
1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article LO 130 du code électoral, il est inséré un article ainsi
rédigé :
«
Art. LO ... -
Les présidents de conseils régionaux, les présidents de
conseils généraux, les maires de communes chefs-lieux de département, les
présidents d'établissements publics à fiscalité propre ne peuvent être
candidats dans toute circonscription comprise dans le ressort dans lequel ils
ont été élus moins de trois ans après avoir cessé leurs fonctions locales. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Cet amendement aurait eu tout à fait sa logique, à mon avis, si le Sénat avait
repris le texte qui lui a été transmis par l'Assemblée nationale. Mais, compte
tenu du dispositif dans lequel notre assemblée s'engage et qui est tout de même
assez différent, il n'a plus vraiment lieu d'être.
Il s'agissait de prévoir, dans l'hypothèse où on aurait retenu le texte de
l'Assemblée nationale, quitte à l'amender, que la règle qui est applicable aux
préfets, et qui interdit à un préfet de se présenter dans le département où il
a été préfet pendant trois ans après son départ, s'appliquerait également aux
présidents de conseils généraux ou régionaux, aux maires des villes les plus
importantes dans un délai de trois ans après qu'ils ont quitté leurs fonctions
locales.
Mais comme ce texte ne s'applique plus vraiment aux dispositions dont nous
discutons, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 31 rectifié est retiré.
Article 1er
bis
M. le président.
« Art. 1er
bis
. _ Le premier alinéa de l'article LO 139 du code
électoral est complété par les mots : "et de membre du Conseil de la politique
monétaire de la Banque de France". »
Par amendement n° 2, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Cet amendement de suppression illustre assez bien ce que sera
l'attitude de la commission tout au long de ce débat sur des dispositions
secondaires.
L'Assemblée nationale a souhaité préciser qu'un parlementaire ne peut être
membre du Conseil de la politique monétaire de la Banque de France. Or, cette
disposition, dont on pourrait d'ailleurs discuter le principe, est inutile
puisque la loi du 4 août 1993 relative au statut de la Banque de France prévoit
que les membres du Conseil de la politique monétaire de la Banque de France ne
peuvent exercer des mandats électifs. La règle est donc déjà posée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement s'est montré réservé sur la série d'amendements que l'Assemblée
nationale a introduits, créant des incompatibilités nouvelles entre l'exercice
d'un mandat parlementaire et des activités non électives.
En effet, l'objet essentiel du texte porte sur les incompatibilités entre un
mandat parlementaire et des fonctions exécutives locales.
Il s'agit de fonctions non électives et nous sommes de ce fait quelque peu en
dehors du projet de loi organique présenté par le Gouvernement. Il ne s'agit
peut être pas de cavaliers législatifs, mais nous n'en sommes pas très
éloignés. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée, en ce
qui concerne ces nouvelles incompatibilités.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 1er
bis
est supprimé.
Article 1er
ter
M. le président.
« Art. 1er
ter
. _ L'article LO 140 du code électoral est complété par
une phrase ainsi rédigée :
« Cette incompatibilité s'applique également aux fonctions de juge des
tribunaux de commerce. »
Par amendement n° 3, M. Jacques Larché, au nom de la commission des lois,
propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je répéterai ici notre position de principe, tout en
rejoignant les propos de M. le ministre, qui a indiqué tout à l'heure que le
Gouvernement, au cours du débat à l'Assemblée nationale, ne s'était pas opposé
- ou s'il l'avait fait, ce n'était que mollement - à une série
d'incompatibilités dépassant l'objet initial du projet de loi.
Tout s'est donc passé comme si l'on acceptait
a priori
une certaine
surcharge du texte, sachant que le bon sens, sur ce point tout au moins,
finirait par prévaloir au Sénat.
L'article 1er
ter
a trait aux fonctions de juge des tribunaux de
commerce qui ne sont pas soumis au statut de la magistrature.
Par conséquent, je ne vois pas pourquoi on établirait tout à coup une telle
incompatibilité car, si on le faisait, il faudrait songer, par exemple, aux
conseillers prud'hommes ou aux membres des tribunaux paritaires des baux
ruraux.
Dans le même ordre d'idée, pourquoi un parlementaire pourrait-il être arbitre
ou réaliser des médiations ? Nous empruntons ici le chemin de ce que
j'appellerai, et que j'ai déjà appelé, la réglementation excessive.
Laissez-nous vivre, monsieur le ministre ! Remettez-vous-en à la sagesse des
parlementaires, qui savent parfaitement s'ils doivent ou non, dans certaines
circonstances, être juges dans les tribunaux de commerce, siéger aux
prud'hommes - cela peut être utile qu'il y ait un parlementaire aux
prud'hommes, pourquoi pas ? - ou être membres des tribunaux des baux ruraux.
Ne réglementons pas tout !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
J'ai bien entendu l'appel de M. Larché et j'ai le même avis que sur
l'amendement n° 2 : je m'en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
En commission, nous avons eu une brève discussion sur cette question et notre
ami et collègue M. Robert Badinter a fait remarquer à M. Larché qu'en la
circonstance il convenait de respecter la séparation entre le législatif et le
juridictionnel. Or, les tribunaux de commerce sont des instances
juridictionnelles, et la séparation des pouvoirs est un des fondements de la
République.
Nous sommes donc favorables à l'article 1er
ter,
car il y a lieu
d'établir des frontières entre ce qui relève du pouvoir législatif et ce qui
relève du pouvoir judiciaire.
M. Michel Duffour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
J'ai bien entendu l'appel lancé par M. le rapporteur et l'avis de M. le
ministre, il me semble cependant que l'ajout apporté par l'Assemblée nationale
est tout à fait approprié.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 1er
ter
est supprimé.
(M. Jean Faure remplace M. Jacques Valade au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
Nous allons aborder l'article 2.
Article 2
M. le président.
« Art. 2. _ L'article LO 141 du code électoral est remplacé par deux articles
LO 141 et LO 141-1 ainsi rédigés :
«
Art. LO 141
. _ Le mandat de député est incompatible avec l'exercice
d'une des fonctions électives suivantes : président d'un conseil régional,
président du conseil exécutif de Corse, président d'un conseil général, maire,
président d'un établissement public de coopération intercommunale doté d'une
fiscalité propre.
« Pour l'application du présent article, la loi détermine le montant maximal
des indemnités versées aux titulaires des fonctions électives visées à l'alinéa
précédent.
«
Art. LO 141-1
. _ Le mandat de député est incompatible avec l'exercice
de plus d'un des mandats électoraux énumérés ci-après : conseiller régional,
conseiller à l'Assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris,
conseiller municipal. »
Sur l'article, la parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en modifiant
l'article LO 141-1 du code électoral, l'article 2 du projet de loi organique
dispose que le mandat de député est incompatible avec l'exercice de plus d'un
des mandats électoraux de conseiller régional, conseiller à l'assemblée de
Corse, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller municipal.
Une restriction est ainsi apportée à l'exercice, par les parlementaires, des
mandats locaux, fussent-ils de base.
J'observe qu'aux termes de l'article 1er du projet de loi ordinaire, tout
citoyen aura accès à deux mandats électoraux parmi ceux que je viens
d'énumérer. Ces mandats locaux se comptent par centaines de milliers. Les 898
parlementaires, eux, ne pourront prétendre, chacun, qu'à un seul de ces
mandats, si bien que, contrairement à l'usage, un parlementaire conseiller
général n'appartiendra désormais plus à aucun des conseils municipaux des
communes du canton dont il sera le représentant à l'assemblée départementale !
Au contraire, un conseiller municipal parlementaire ne pourra plus accéder aux
fonctions de conseiller général.
Ne faudrait-il pas, pendant que nous y sommes, légiférer aussi pour priver le
parlementaire d'activités associatives ? Chacun sait la place importante que
tiennent les associations dans la vie locale ; or les élus sont souvent placés
à leur tête.
Je n'ose penser que quiconque veuille mettre en cause l'aptitude d'un
parlementaire à intervenir utilement au sein des organes délibérants des
collectivités locales.
Qu'il s'agisse de fonctions exécutives importantes ou des mandats électifs
ordinaires dont je parlais à l'instant, les effets sur les institutions seront
réducteurs, au travers d'une loi indirectement recentralisatrice, donc quelque
peu conservatrice.
Au moment même où un effort en matière de décentralisation reste à accomplir
et où l'intercommunalité dessine une nouvelle carte politique, à la suite d'un
rapprochement des communes entre elles, le parlementaire sera contraint de
n'être plus qu'un observateur de la vie locale.
On assistera à un relatif affaiblissement de la représentativité des
collectivités territoriales et, par voie de conséquence, à un renforcement du
pouvoir de l'Etat, du préfet dans le département et des services administratifs
déconcentrés.
C'est d'ailleurs faire un mauvais calcul ! Le parlementaire est en effet l'élu
le mieux placé pour développer une politique active de décentralisation, et ce
sans risque d'une renaissance des féodalités.
Enfin, le parlementaire y perdra en compétence, il perdra sa compétence qui
est nourrie de ses responsabilités sur le terrain, dans un monde qui se
transforme vite et dont il faut savoir aussitôt comprendre les aspirations.
Il sera celui dont le pouvoir est « ailleurs » et les prérogatives limitées.
Entre le parisianisme et la recherche d'une nouvelle reconnaissance, il fera un
choix.
En l'occurrence, il s'agit de mettre à mal un équilibre que personne ne
contesterait si ces campagnes médiatiques, qui forment l'opinion, n'avaient pas
eu lieu. Je relève par ailleurs qu'elles n'informent pas le public du fait que
cette redistribution des mandats et des fonctions pèsera sur les budgets
locaux.
Un débat sur le cumul des mandats a un retentissement, c'est vrai, notamment
dans la presse. Il occulte momentanément et opportunément les problèmes de
l'emploi, du chômage, de la pauvreté et de l'exclusion.
Rendre incompatibles les mandats de base que je viens de citer, en particulier
celui de conseiller municipal, est une mesure quelque peu dérisoire qui peut
cependant nuire au bon fonctionnement des institutions républicaines.
L'extension de la limitation à deux mandats aux conseillers municipaux des
communes de moins de 3 500 habitants est une proposition timide par rapport à
l'enjeu.
Je souhaite donc qu'au bénéfice des navettes une réflexion objective soit
conduite pour aboutir à une approche plus réaliste de ces dispositions.
M. le président.
Sur l'article 2, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Par amendement n° 4, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Le premier alinéa de l'article LO 141 du code électoral est ainsi rédigé
:
«
Art. LO 141. -
Le mandat de député est incompatible avec l'exercice
de plus d'un des mandats énumérés ci-après : conseiller régional, conseiller à
l'assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller
municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 40, déposé par M. Jolibois,
et tendant, dans le texte proposé par l'amendement n° 4 pour le premier alinéa
de l'article LO 141 du code électoral, après les mots : « conseiller de Paris »
à insérer les mots : « , maire, président d'un établissement public de
coopération doté d'une fiscalité propre ».
Par amendement n° 30, M. Vasselle propose, à la fin du premier alinéa du texte
présenté par cet article pour l'article LO 141 du code électoral, après le mot
: « maire » d'insérer les mots : « d'une commune de 3 500 habitants et plus
».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Monsieur le président, chacun aura compris qu'avec cet
article nous sommes au coeur de notre débat.
Par l'amendement n° 4, la commission s'est efforcée de traduire la position de
ses membres, tout au moins de la majorité d'entre eux. Et le principe même de
cet amendement a été combattu par certains de nos collègues qui croient devoir
adhérer au projet du Gouvernement.
Le principe est l'incompatibilité du mandat de parlementaire avec l'exercice
de plus d'un mandat parmi les suivants : conseiller régional, conseiller à
l'assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris ou conseiller
municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants.
Il résulte donc de cet amendement que l'exercice d'une fonction exécutive
n'est pas exclu.
Mes chers collègues, nous avons déjà largement évoqué cette affaire et je ne
pense pas que nos opinions puissent changer. M. le secrétaire d'Etat m'a certes
semblé s'engager sur la voie de la sagesse, mais je crains que, sur cette
disposition, tout au moins et en l'état actuel des choses, ce ne soit une
impasse.
Je tiens à ajouter que les propos de notre collègue M. Gaston Flosse m'ont
renforcé dans mon sentiment. J'ai bien réfléchi à la situation de ce
territoire, auquel nous sommes tous profondément attachés, la Polynésie
française. Nous savons bien que le statut de celle-ci évoluera vers une
autonomie sans cesse plus grande, et je crois qu'il serait contraire à
l'intérêt national que celui qui présidera à ses destinées, dont les
compétences seront sans doute extrêmement élargies, ne puisse plus siéger au
Parlement.
Je songe, par ailleurs, mes chers collègues, à l'effort commun que nous avons
fait pour la Nouvelle-Calédonie. Nous ne savons pas quel sera le sort de la
Calédonie, et peut-être, sur ce destin futur, avons-nous, les uns et les
autres, des perspectives et des espoirs différents.
Mais nous savons tous, du fait d'un ensemble d'événements, dont certains ont
été tragiques, grâce à l'expression de volontés qui ont recueilli l'adhésion de
beaucoup d'entre nous, grâce à des options qui ont été prises, notamment, par
M. Rocard, que le destin de la Nouvelle-Calédonie est ouvert.
Mon espoir profond, c'est l'espoir dont notre ami Simon Loueckhote nous a fait
part : « Un jour, peut-être, je le souhaite, ma Calédonie restera française.
»
Il y aura un exécutif calédonien et, si la Nouvelle-Calédonie reste dans
l'ensemble français, ne croyez-vous pas qu'il serait contraire à l'intérêt
national que le président de cet exécutif n'ait pas le droit de siéger au
Parlement français ?
M. Charles Pasqua.
Si elle ne reste pas dans l'ensemble français, le problème est résolu !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Certes, mais tel n'est pas notre espoir !
M. Gaston Flosse.
La Polynésie restera française !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Et, monsieur Pasqua, si la Nouvelle-Calédonie reste dans
l'ensemble français, ne croyez-vous pas...
M. Charles Pasqua.
... qu'il est souhaitable que le président puisse rester dans l'une de nos
assemblées ? Ma réponse est oui.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
C'est bien ce que je pense.
Comme nous savons que la Polynésie française a le maximum de chances de rester
dans l'ensemble français, nous disons, d'ores et déjà, que nous souhaitons que
le président de l'exécutif polynésien puisse siéger dans une de nos
assemblées.
Ce qui se profile dans cette affaire, c'est la structure même du Parlement.
J'ai à ce propos été étonné par les propos de mon ami Guy Allouche en séance
publique, qui diffèrent quelque peu de ceux qu'il tient au sein de la
commission.
Le Parlement qu'il a esquissé m'inquiète, car il serait composé de
législateurs coupés du terrain et incapables de faire le lien entre ce qui
existe à l'échelon local et ce qui se passe à l'échelon national. Enfin,
comment ces législateurs seront-ils recrutés, et par la volonté de qui ?
Nous avons un système, qui est ce qu'il est, mais qui a au moins un mérite :
c'est l'existence d'une sorte de couronnement, progressif peut-être, qui se
manifeste à l'égard de ceux qui, finalement, viennent siéger à l'Assemblée
nationale ou au Sénat. Ce n'est pas une règle absolue, vous l'avez parfaitement
souligné, monsieur le ministre, mais cela fonctionne très bien ainsi.
Vous avez cité le nombre de ceux qui sont sénateurs et qui ne sont pas
investis pour autant d'un mandat local.
Nous pouvons tirer de cette simple constatation l'idée que, là encore, c'est
la diversité qui est source de sagesse et non pas la volonté d'une
réglementation systématique, contraignante, voulue au nom de quelques
considérations de professeurs de droit, si éminents soient-ils, assorties d'une
sorte de matraquage savamment entretenu par un certain nombre de moyens que
nous connaissons bien, pour aboutir à des résultats qui sont, je le pense,
contraires à l'intérêt général.
C'est un équilibre français que nous entendons respecter, maintenir, et auquel
nous pensons souhaitable d'appliquer un certain nombre de règles simples.
M. le président.
La parole est à M. Jolibois, pour présenter le sous-amendement n° 40.
M. Charles Jolibois.
J'ai été, au sein de la commission des lois, l'un de ceux qui ont promu
l'exception pour les communes de moins de 3 500 habitants. Ce seuil n'est pas
nouveau ; il existe, comme vous le savez tous, dans le code électoral : c'est
le seuil au-delà duquel l'élection municipale a lieu par scrutin de liste.
C'est important, car le parlementaire élu peut - s'il n'y a pas
incompatibilité, bien sûr ! - très bien renoncer à ses fonctions de maire et
redevenir conseiller municipal sans qu'il soit nécessaire de procéder à une
élection complémentaire pour désigner son successeur.
J'ai demandé que l'on ne tienne pas compte de ce mandat de conseiller
municipal de commune de moins de 3 500 habitants. J'ai eu le bonheur d'être
suivi, la commission considérant que c'était là une manière assez élégante de
traiter le problème des communes rurales, au sein desquelles nous savons
combien il est souvent difficile de trouver des personnes susceptibles de se
présenter. Vous savez combien il y a eu de départs aux dernières élections de
1995.
Réflexion faite, j'ai donc pensé qu'il ne fallait pas aller contre l'idée que
je suivais, mise au point par le rapporteur de la commission des lois et par la
commission des lois qui a suivi, à savoir qu'un parlementaire ne peut pas
exercer plus d'un exécutif. Toutefois, en l'occurrence, il est nécessaire de
préciser que, si le parlementaire peut rester, en plus, conseiller municipal
d'une commune de moins de 3 500 habitants, il ne lui est pas possible,
naturellement, d'être maire de cette commune.
Ainsi allons-nous respecter complètement, si vous suivez mon sous-amendement,
la règle proposée par la commission des lois, sans compter que la règle d'un
seul exécutif pour un parlementaire s'appliquera à tout. Voilà pourquoi j'ai
proposé d'ajouter les mots : « , maire, président d'un établissement public de
coopération doté d'une fiscalité propre ».
Par conséquent, celui qui sera élu parlementaire, député ou sénateur, pourra
choisir entre plusieurs possibilités et pourra rester conseiller municipal s'il
s'agit d'une ville de moins de 3 500 habitants.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 30.
M. Alain Vasselle.
Cet amendement n° 30 va dans le même sens que l'amendement n° 4, tel qu'il a
été rédigé par la commission des lois et présenté par le président Jacques
Larché.
N'ayant pas pris part à la discussion générale, je souhaite, au travers de cet
amendement, faire part du sentiment qui est le mien sur ce texte de loi.
Monsieur le ministre, comme notre collègue Dominique Braye, qui a excellemment
dit ce qu'il fallait dire sur le sujet, et comme d'autres collègues qui m'ont
précédé - je les prie de m'excuser si je n'étais pas là pour les entendre tous
- je considère que ce texte est une véritable atteinte à la démocratie, et que
c'est vraiment faire preuve de peu de considération à l'égard des électrices et
des électeurs, des Françaises et des Français de ce pays !
Cela signifie en effet que le législateur, le Gouvernement - puisque c'est lui
qui en a pris l'initiative - et les parlementaires qui sont prêts à le suivre
considèrent que l'électeur français n'est pas suffisamment apte à apprécier si
un élu exerce bien ou mal ses différentes fonctions, et qu'il faut par
conséquent le guider, le limiter dans son choix ! Cela revient à dire que
l'électeur vote mal lorsqu'il vote pour un élu qui cumule un certain nombre de
fonctions !
J'ai peu d'expérience politique. Vous en avez sans doute plus que moi. J'ai
malgré tout quelque vingt années de mandat politique derrière moi au cours
desquelles j'ai constaté paradoxalement que nos électeurs dénoncent les
appareils politiques et ceux qui font de la politique politicienne, mais, qu'à
l'occasion d'un scrutin national ou régional - encore que ce soit moins vrai
aujourd'hui qu'autrefois - ils émettent toujours un vote politique !
Les Françaises et les Français votent pour un candidat du RPR, de l'UDF, pour
un candidat socialiste ou communiste. Ils ne votent pas pour M. Tartempion,
pour M. Untel, pour un simple gestionnaire encore que la personnalité de
certains peut influer sur le vote des électeurs.
C'est la même chose en ce qui concerne le cumul des mandats et des fonctions.
Les Français affirment qu'il est scandaleux que M. Untel cumule des fonctions
de parlementaire, de conseiller général ou régional, de maire ou de président
d'une structure intercommunale. Mais lorsqu'ils votent, ils n'hésitent pas à
voter pour un parlementaire qui cumule de nombreuses fonctions ! Ils
considèrent donc que ledit parlementaire a les compétences requises, peut
cumuler ses mandats sans difficulté puisqu'il les assume correctement et que
cela ne présente aucune difficulté. Si tel était le cas, les Français ne
voteraient pas pour lui !
La démocratie veut qu'on laisse à chaque électeur le soin de décider s'il y a
lieu de permettre à un élu de cumuler ou non des mandats. C'est la raison pour
laquelle j'affirme que ce texte est une atteinte à la démocratie.
Sans compter que, derrière tout cela, il est une hypocrisie sans nom, dénoncée
par M. Braye. En effet, un certain nombre de membres du Gouvernement, pour
faire bonne figure devant l'ensemble de l'opinion publique, ont renoncé à des
fonctions de président d'une collectivité territoriale telle que le département
ou la région, mais se sont empressés de prendre une première, voire une seconde
vice-présidence, avec des délégations générales, comme cela a été dit !
Monsieur le ministre, je suis désolé de vous dire que la réponse que vous avez
faite à M. Braye ne tient pas la route, mais pas du tout !
Enfin - et j'en terminerai par là car je ne veux pas m'exprimer trop
longuement sur cet amendement - je pense que la proposition de la commission
des lois, qui permet d'introduire un seuil, est la meilleure. Comment
allez-vous expliquer à nos concitoyens que l'on traitera sur le même pied le
maire d'une petite commune de 150 ou de 200 habitants et celui de Bordeaux, de
Lille, de Nantes, de Nancy, de Lyon ou de Montpellier ?
M. Jean-Jacques Hyest.
Ou même de Paris !
M. Alain Vasselle.
De Paris aussi, mon cher collègue, bien entendu.
Il y a quand même une certaine incohérence dans tout cela ! C'est la raison
pour laquelle - et je rejoins les observations de mon collègue Jolibois, qui a
fait référence aux structures intercommunales ou aux présidents des communautés
urbaines de Lille ou de Lyon - les dispositions proposées par la commission des
lois me paraissent bonnes, qu'il s'agisse du projet de loi organique ou du
projet de loi ordinaire. Je souhaite donc ardemment que le Sénat s'y tienne,
aussi bien en première lecture qu'en deuxième lecture, et que nous n'entrions
pas dans des négociations de marchands de tapis, sur ce sujet, avec le
Gouvernement. Le Sénat est le Sénat, il a une réputation de sagesse. En
conséquence, tenons-nous en aux dispositions que nous proposons !
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Larché,
rapporteur.
L'amendement de M. Vasselle ne pose aucun problème, puisqu'il
est satisfait par celui de la commission des lois, et il n'en a posé aucun car,
pas plus que lui - il le sait bien, d'ailleurs - nous n'entendions entrer dans
une quelconque discussion de marchands de tapis ! Du moins, ce n'est pas du
tout ainsi que nous avons travaillé au sein de la commission des lois.
Reste maintenant le problème du sous-amendement n° 40.
Mon ami Charles Jolibois parlait tout à l'heure du bonheur qu'il avait éprouvé
en commission des lois, puisqu'il avait été suivi. A ce bonheur correspondait
mon malheur, puisque j'avais été battu !
(Sourires.)
Mais, vous le
savez, bonheur et malheur s'équilibrent et tout cela n'est pas grave.
M. Charles Pasqua.
C'est relatif !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Tout est relatif, effectivement !
J'ai donc proposé, mais je n'ai pas été suivi en commission, que la règle de
non-cumul ait comme conséquence de ne permettre l'exercice que d'un seul
exécutif, quel que soit l'échelon.
Alors, bien sûr, s'est ouverte une discussion sur les difficultés de gestion.
C'est en effet marqué au coin du bon sens. On va interdire à un parlementaire
d'être maire d'une ville de moins de 3 500 habitants et on compare sa situation
à celle du maire de Montpellier, de Lyon ou de Bordeaux !
Mes chers collègues, nous avons tous l'expérience de certains seuils. Nous
savons que le mandat le plus « lourd », pour s'en tenir à ce mot, est
certainement l'exécutif d'une commune comprenant entre 5 000 et 10 000
habitants
(Marques d'approbation sur les travées du RPR) ;
on pourrait
d'ailleurs retenir un seuil inférieur, 4 000, voire 1 000 habitants, car à ce
niveau il y a, nous le savons tous, l'exigence d'une relation personnelle avec
l'élu, alors que, dans le même temps, le maire d'une collectivité de cette
dimension ne dispose pas d'un appareil technique et administratif lui
permettant de faire face à l'ensemble de ses obligations.
Alors, je m'interroge, mais la position de la commission est celle dont je me
suis fait le rapporteur fidèle et malheureux, mais cela, c'est un autre
problème !
(Sourires.)
J'ai dit que ma proposition initiale avait été améliorée par mon ami Charles
Jolibois, qui prévoit une modalité plus souple que celle que j'avais envisagée.
Il admet en effet, et c'est très sage, me semble-t-il, que l'on pose le
principe de l'exercice d'un seul mandat exécutif par le parlementaire, mais,
dans le même temps, il admet que le mandat de conseiller municipal d'une
commune de moins de 3 500 habitants n'entre pas dans les incompatibilités, si
j'ai bien compris, car ces subtilités successives me dépassent quelquefois !
(Sourires.)
M. Charles Pasqua.
Cela ne saurait vous dépasser, monsieur le président !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
A titre personnel, je dirai qu'en déposant son
sous-amendement M. Charles Jolibois a découvert une solution élégante.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, je déduis de votre intervention que la commission est
favorable au sous-amendement n° 40.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Non ! Le problème n'a pas été posé à la commission en ces
termes.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Nous débattons en ce moment de l'article le plus important du texte, celui qui
fixe le dispositif de limitation des mandats. Dans la discussion générale, M.
Franchis a dit que la proposition formulée par la commission était timide. Je
partage tout à fait cette appréciation puisque le curseur a été déplacé de 20
000 à 3 500 habitants.
Avouez, messieurs, que le progrès apporté par le texte de la commission est
tout de même limité. On serait en droit d'attendre un effort plus important de
la part du Sénat ! Nous en restons à un aménagement très restreint de la loi de
1985. C'est pourquoi le Gouvernement est hostile à cette proposition, ainsi
que, par voie de conséquence, au sous-amendement n° 40.
M. Charles Pasqua.
Voilà qui est clair !
M. le président.
Monsieur le rapporteur, pouvez-vous donner plus explicitement l'avis de la
commission sur le sous-amendement n° 40 ?
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Dans ces conditions, il m'est nécessaire de réunir la
commission. C'est pourquoi je sollicite une brève suspension de séance,
monsieur le président.
M. le président.
Le Sénat va volontiers accéder à votre demande, monsieur le rapporteur.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept
heures cinq.)
M. le président.
La séance est reprise.
Monsieur le rapporteur, quel est l'avis de la commission sur le
sous-amendement n° 40 ?
M. Jacques Larché,
rapporteur.
La commission a donné un avis défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 40.
M. Christian Bonnet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Bonnet.
M. Christian Bonnet.
A titre personnel, je suis tout à fait favorable à ce sous-amendement.
Je pense que le Sénat doit avoir, en l'espèce, une position lisible. Or la
seule position lisible est celle qui consiste à dire qu'un parlementaire
exerçant son mandat à titre collégial à Paris peut être détenteur, par
ailleurs, d'un exécutif et d'un seul, que ce soit en province, dans la région
d'Ile-de-France ou à Paris !
M. Alain Gournac.
Parfaitement !
M. Christian Bonnet.
C'est la seule position qui soit compréhensible et admissible par l'opinion
publique. Tout le reste est littérature.
(Très bien ! et applaudissements
sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Je tiens à redire devant l'ensemble du Sénat ce que j'ai dit tout à l'heure à
M. Jolibois, à savoir qu'il n'y a aucune différence entre le conseiller
municipal d'une commune de 1 000 habitants et celui d'une commune de 50 000
habitants : il n'a ni plus ni moins de pouvoirs ; en fait, il n'a aucun
pouvoir. Pourquoi, dès lors, réserver un sort particulier aux petites communes,
c'est-à-dire quelque 34 000 des 36 558 communes que compte notre pays ? A
partir du moment où les conseillers municipaux n'ont aucun pouvoir, soit c'est
pour tout le monde, soit c'est pour personne. Moi, je dis : personne !
M. Dominique Braye.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Je ne suis pas certain que la disposition prévue par le sous-amendement n° 40
soit constitutionnelle dans la mesure où le maire est choisi parmi les
conseillers municipaux, et cela sans discrimination. Mais tel n'est pas l'objet
de mon intervention.
Mon propos vise la question de l'intercommunalité, et je dois dire à mon ami
Charles Jolibois que je ne partage pas du tout son analyse. A l'heure où 32
millions de Français vivent déjà sous le régime de l'intercommunalité et où
l'on s'efforce de la promouvoir encore par tous les moyens, je crains qu'une
telle disposition ne vienne lui porter un coup fatal.
Actuellement, pour devenir un élu intercommunal, il faut d'abord être un élu
communal.
M. Christian Bonnet.
Pas en l'état actuel des choses !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Pas en droit, mais en fait c'est ce qui se passe !
M. Dominique Braye.
Je parle des structures intercommunales à fiscalité propre, qui incarnent
seules, à mes yeux, l'intercommunalité de projet.
A partir du moment où un élu sera un élu communal et intercommunal, il aura
rempli l'une des conditions prévues dans la loi et ne pourra plus être membre
du Parlement.
En conséquence, si nous adoptons ce sous-amendement, nous excluons
ipso
facto
du Parlement les élus intercommunaux. Ce serait une grave erreur dans
la mesure où nous sommes nombreux à penser que, dans un souci d'aménagement
cohérent de notre territoire, il faut au contraire encourager le développement
de l'intercommunalité.
C'est la raison pour laquelle je ne pourrai pas voter le sous-amendement n°
40.
M. Charles Jolibois.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Jolibois.
M. Charles Jolibois.
Je veux simplement indiquer à M. Braye que mon sous-amendement n'exclut pas
qu'un député puisse être un élu intercommunal puisque l'amendement n° 4 ne
prévoit d'incompatibilité qu'avec « l'exercice de plus d'un des mandats
énumérés ».
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 40, repoussé par la commission et par
le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Avec cet amendement, on touche à la colonne vertébrale de ce projet de loi.
Monsieur le rapporteur, je vais me placer exactement dans la logique que vous
avez suivie dans votre rapport. Vous vous opposez à la démarche du
Gouvertement, dites-vous, pour respecter le libre choix de l'électeur. Hier,
dans la discussion générale, j'ai réfuté cet argument, mais il a été repris par
d'autres.
Mes chers collègues, il est inutile de s'abriter derrière l'électeur.
L'électeur n'a pas le choix.
M. Alain Vasselle.
Et pourquoi ?
M. Guy Allouche.
L'électeur aurait le choix, monsieur Vasselle, si la formation à laquelle vous
appartenez avait la possibilité, ce qui n'est pas prévu par les textes
fondamentaux, de présenter à la fois un élu qui cumule et un élu qui ne cumule
pas. Je suis socialiste, je ne vais pas voter pour un homme de droite au motif
que mon candidat est un cumulard. Le choix est donc contraint.
Le jour où la nouvelle loi s'appliquera, tous les candidats seront sur un pied
d'égalité et l'électeur pourra alors choisir. Mais, actuellement, il ne le peut
pas.
MM. Dominique Braye et Gérard Cornu.
C'est faux !
M. Charles Pasqua.
Mais si, il peut !
M. Jean Chérioux.
Il y a des dissidents chez vous aussi !
M. Guy Allouche.
Et puis il y a la question de la proximité entre le parlementaire et ses
électeurs.
M. le rapporteur disait que la conception que j'ai du Parlement l'inquiétait.
Je suis pour que le Parlement retrouve le rôle et la place qu'il n'aurait
jamais dû perdre.
M. Michel Mercier.
Il faut modifier la Constitution !
M. Guy Allouche.
Je suis pour que le parlementaire soit d'abord un législateur. Je suis pour
que le Sénat ne soit pas l'addition de 321 préférences locales, mais pour que
nous représentions ici, ensemble, l'intérêt national.
En outre, je vous rappelle qu'il n'est pas question de toucher au scrutin
majoritaire.
Un sénateur du RPR.
Pour l'instant !
M. Guy Allouche.
Qui peut penser qu'un député va se couper de l'électeur alors qu'il a besoin
d'aller à son contact pour se faire élire ?
Au demeurant, on ne me convaincra pas que le titulaire d'un mandat exécutif
local qui passe son temps à traiter des dossiers avec la technostructure locale
- et, dans mon esprit, ce terme n'est pas péjoratif - a le temps d'aller
constamment au-devant des électeurs. Ayons le courage de le dire : il est
évident qu'il ne le fait pas ! Quelqu'un qui gère un département important ou
une région n'a pas le temps d'être en contact permanent avec ses électeurs ! Ce
n'est pas possible !
M. Jean Chérioux.
Assez d'imprécations !
M. Guy Allouche.
Etant un laïc convaincu, mon cher collègue, les imprécations ne sont pas dans
ma nature.
En fait, la proximité sera d'autant plus étroite que le parlementaire n'aura
pas en charge la gestion d'une collectivité territoriale.
Avec la décentralisation, il a été décidé que l'exécutif c'était le maire ou
c'était le président. Ce n'est donc pas le collège des vice-présidents ou des
adjoints. C'est pour cette raison qu'on vise le maire et le président, et non
pas les adjoints ou les vice-présidents. Le jour où l'on étendra l'exécutif au
bureau, on pourra étendre l'incompatibilité. Mais, pour l'instant, l'exécutif,
c'est le maire ou le président.
Que le seuil s'applique aux communes de moins de 3 500 habitants, soit 34 000
sur 36 500, c'est effectivement séduisant. Je vous mets toutefois en garde, mes
chers collègues, contre le risque de créer des parlementaires de catégories
différentes : les parlementaires maires de petites communes rurales et les
autres.
Ainsi, 19 millions d'habitants seront représentés au Parlement par un
parlementaire maire, alors que les deux tiers de la population seront exclus de
cette représentation.
Par ailleurs, et cela me paraît encore plus important, je n'ignore pas les
problèmes de la ruralité ; nous les connaissons tous. Il n'en demeure pas moins
que les problèmes de société actuels sont des problèmes urbains. Alors,
pourquoi ces seuils ?
M. Christian Demuynck.
Voilà bien un discours socialiste !
M. Dominique Braye.
Encore le tout urbain !
M. Jean Chérioux.
Propos parachutés des partis politiques !
M. Guy Allouche.
Si je ne partage pas la philosophie de M. le rapporteur sur l'ensemble de ce
texte, je trouve toutefois qu'il a raison de considérer qu'il n'y a pas de
seuil possible. Là, je suis d'accord.
(Très bien ! sur les travées du RPR. - M. le rapporteur fait un signe
d'approbation.)
En effet, une fonction exécutive est une fonction exécutive et ne
commençons pas à biaiser avec les seuils.
S'agissant de la lisibilité, mes chers collègues, là encore, pardonnez-moi de
me répéter : il y a conflit d'intérêts. Nous sommes porteurs de l'intérêt
national. Nous sommes représentants de l'intérêt national.
M. Alain Gournac.
Ah, cela, c'est bien !
M. Guy Allouche.
Nous ne sommes pas uniquement des représentants de telle ou telle
collectivité, nous ne sommes pas là pour défendre telle ou telle parcelle du
territoire ! Cessons de tout mélanger ! A trop vouloir de lisibilité, on finit
par ne plus savoir qui fait quoi et à être juge et partie.
M. Bernard Murat.
Ce n'est pas vrai !
M. Guy Allouche.
Et je répète qu'il est temps de séparer celui qui dicte la loi et celui qui
applique la loi.
M. Bernard Murat.
Non !
M. Guy Allouche.
Enfin, puisque le temps qui m'est imparti est un peu court, je dirai à M. le
rapporteur que l'exemple qu'il a choisi sur l'incompatibilité entre
parlementaire d'outre-mer et exécutif d'outre-mer constitue, à mes yeux, le
pire argument qu'on puisse invoquer.
M. Gérard Cornu.
On reconnaît bien l'idéologie socialiste !
M. Guy Allouche.
Mais je développerai ce point lorsque j'expliquerai mon vote.
M. le président.
Vous avez dépassé votre temps de parole d'une bonne minute, mon cher
collègue.
M. Robert Bret.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Lors de la discussion générale, j'ai eu l'occasion d'exposer hier, au nom du
groupe communiste républicain et citoyen, nos arguments en faveur d'une
limitation significative du cumul des mandats.
J'ai fait part de notre approbation des deux projets de loi soumis aujourd'hui
à discussion - M. le ministre l'a souligné, voilà un instant - en émettant
toutefois quelques réserves quant au risque d'inefficacité si d'autres
dispositions importantes, comme l'extension de la proportionnelle ou le
renforcement du rôle du Parlement, n'étaient pas rapidement adoptées.
Le texte proposé par M. Jacques Larché au nom de la majorité de droite de la
commission des lois est simple. Comme cela a été répété à plusieurs occasions,
il permet le cumul de fait entre le mandat de député ou de sénateur et une
fonction exécutive locale. Le cumul des mandats peut aller jusqu'à trois si le
troisième est celui de maire d'une commune de moins de 3 500 habitants.
L'esprit et la lettre des projets de loi se trouvent ainsi réduits à néant. On
est loin des appels au compromis et au dialogue lancés depuis quelques jours
!
La droite sénatoriale refuse, sur l'essentiel, de limiter le cumul des mandats
et, par là même, de faire respirer la démocratie.
Ainsi, selon le texte de la commission des lois, le parlementaire pourra
toujours être simultanément président d'un conseil régional et général et même,
en sus, maire d'une commune de moins de 3 500 habitants, ce qui, dans les zones
rurales, n'est pas rien.
S'il y a concessions de la majorité sénatoriale, elles sont donc minimes.
Dans son rapport, M. Larché met en avant le libre choix de l'électeur. Mais où
est ce libre choix, lorsque vous proposez le maintien d'un système politique en
voie de sclérose qui bloque tout renouvellement, tout rajeunissement et toute
féminisation par le prolongement du règne du notable ?
L'argument sur la proximité du parlementaire ne tient pas, puisque les projets
n'ont jamais prévu de supprimer la possibilité pour un parlementaire d'exercer
un mandat local. Ce sont les fonctions exécutives, celles qui sont sources de
conflits d'intérêts, qui sont visées.
Pour justifier d'une disponibilité intacte, M. le rapporteur en appelle aux
nouvelles technologies : le fax et le TGV pallieraient la multiplicité des
responsabilités. Cet argument, d'ailleurs bien léger, ne saurait séduire une
population qui veut voir le système politique évoluer franchement et sans
contorsions.
Les sénateurs de notre groupe voteront donc contre la proposition,
conservatrice sur le fond et sur la forme, de la droite sénatoriale.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme la
plupart de mes collègues qui se trouvent à droite de l'hémicycle, j'approuve et
je voterai l'amendement de la commission tel qu'il nous a été présenté par le
rapporteur et qui introduit notamment la notion de seuil de moins de 3 500
habitants.
En écho à l'intervention de M. Allouche, je répondrai à l'argumentation qu'il
vient de développer quant à l'absence de choix pour l'électeur.
Monsieur Allouche, vous avez raison : lorsqu'il s'agit du scrutin à la
proportionnelle - c'est notamment le cas pour l'élection des conseillers
municipaux dans les villes qui dépassent 3 500 habitants et pour l'élection des
conseillers régionaux - ce sont les appareils politiques qui déterminent la
liste, ne laissant ainsi aux électeurs qu'un choix limité.
En revanche, dans un scrutin uninominal à deux tours, face à un candidat
socialiste qui a l'investiture de votre parti et qui est considéré comme
cumulard, rien n'empêche que se présente un autre candidat socialiste, non
cumulard, qui brigue les voix des électeurs. Cela se produit à chaque élection
!
Il arrive ainsi que les électeurs aient un libre choix grâce à l'arrivée de
candidats qui ne cumulent pas forcément les mandats. Que se passe-t-il alors ?
En présence d'un candidat qui cumule un certain nombre de fonctions et d'un
autre candidat qui n'est pas cumulard mais qui n'a pas l'investiture, il
apparaît que l'électeur vote malgré tout pour celui qui cumule. C'est donc
qu'il l'estime capable de le faire.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Je limiterai volontairement mon intervention puisque, tout à l'heure, j'ai
dépassé mon temps de parole.
Je souhaite tout d'abord demander à notre collègue, M. Braye, de bien vouloir
accepter mes excuses. Tout à l'heure, je l'ai interpellé, mais, ce faisant,
j'ai imité délibérément son attitude pour lui prouver qu'il n'est pas toujours
agréable d'être interpellé.
M. Dominique Braye.
Je ne suis pas vice-président ! Enfin, pas encore !
(Sourires.)
M. Guy Allouche.
Mon cher collègue, sachez que, lorsque je suis à la tribune, je ne suis plus
vice-président. Pour aller jusqu'au bout de votre logique, il faudrait aussi
respecter les vice-présidents et, donc, ne pas vous comporter comme vous l'avez
fait hier ! Mais, encore une fois, je vous prie d'accepter mes excuses.
Je tiens à vous faire connaître, monsieur Braye, les raisons pour lesquelles
j'ai protesté tout à l'heure. Je vous invite à relire la loi PLM,
Paris-Lyon-Marseille : le poste de maire d'arrondissement de Paris n'est
absolument pas une fonction exécutive.
(Exclamations sur les travées du
RPR.)
Pas de budget, pas de secrétaire, pas de directeur ! Par conséquent,
relisez cette loi !
Monsieur Franchis, il existe des conseillers généraux qui ne sont pas
conseillers municipaux de leur canton.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Bien sûr !
M. Guy Allouche.
Et il y en a parmi nous ! Il y en a même un tout près de moi. On peut être
conseiller général sans pour autant être conseiller municipal !
Monsieur Vasselle, c'est un appel à la dissidence que vous lancez ! Que vous
le fassiez à l'intérieur de votre formation, c'est votre problème, cela ne nous
regarde pas !
Pour notre part, nous avons le sens de la discipline et, une fois de plus, je
ne souhaite pas que l'on critique les partis politiques. En effet, si nous, qui
sommes les élus de partis politiques, nous nous mettons à les critiquer, que
diront les 58 millions de Français qui ne cessent de vitupérer contre eux ?
Enfin, monsieur le rapporteur, vous avez approuvé M. Flosse. Très bien ! Je
respecte votre opinion. Toutefois, l'exemple de la Polynésie me paraît
constituer une excellente illustration du conflit d'intérêts.
Permettez-moi qu'eu égard aux fonctions qui sont les siennes en Polynésie,
territoire ô combien ! magnifique que j'ai eu le plaisir et l'honneur de
visiter, notre collègue, Gaston Flosse, a suffisamment de travail pour régler
les problèmes de la Polynésie française sans être de surcroît parlementaire.
Je me plais à croire qu'il existe d'autres personnes, tout aussi compétentes
que M. Flosse, qui sont en mesure de venir défendre ici le territoire sans pour
autant être présidents, gouverneurs, ministres, et je passe sur tous les
titres.
C'est le type même d'un conflit d'intérêts ! Vous dites que M. Flosse - et, en
l'occurrence, je personnalise, ce dont je vous prie de bien vouloir m'excuser -
vient ici pour défendre son territoire. Et moi qui pensais qu'il était
parlementaire pour défendre les intérêts de la France ! Or il vient pour
défendre le territoire qu'il représente. Autrement dit, M. Flosse défend son
territoire, comme M. X défend sa commune ou M. Y son département. Eh bien, non
! Le Parlement, ce n'est pas l'addition des préférences partisanes et locales.
C'est la défense de l'intérêt général et national.
M. Gaston Flosse.
Le territoire de la Polynésie, c'est la France ! Il n'y a pas de séparation
!
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je respecte trop l'intelligence de M. Allouche...
M. Guy Allouche.
Merci !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
... pour croire un seul instant qu'il n'avait pas compris mon
propos.
Il ne s'agissait pas de savoir si des conflits d'intérêts opposaient la
Polynésie et la France.
Vous savez très bien que des évolutions, peut-être souhaitables, se produiront
dans un avenir plus ou moins rapproché. Certaines sont d'ailleurs réclamées
dans ce qu'il est convenu d'appeler l'outre-mer français.
M. Guy Allouche.
Je le souhaite !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
C'est tout à fait possible. J'en souhaite bon nombre car j'ai
trop vécu les conséquences d'évolutions que l'on se refusait à consentir en
temps utile.
M. Guy Allouche.
A qui le dites-vous !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Ce que j'ai voulu dire tout à l'heure, c'est qu'il est de
l'intérêt national que peut-être la Nouvelle-Calédonie, sûrement la Polynésie
envoient siéger au Parlement - car c'est un ancrage d'une importance
considérable et qui demeurera - la première personnalité de chacun de ces deux
territoires.
Ne vous y trompez pas, le problème se posera peut-être pour la Guadeloupe, la
Guyane et la Martinique. Je souhaiterais donc que, de toute manière, les
députés ou les sénateurs exerçant des fonctions exécutives locales restent
présents parmi nous.
M. Gaston Flosse.
Très bien !
M. Pierre Fauchon.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon.
Mes chers collègues, ceux d'entre vous qui ont eu la gentillesse de m'écouter
tout à l'heure se rappellent peut-être que j'avais déposé un amendement tendant
à définir ce que l'on appelle une « cote mal taillée ».
Cependant, je trouvais pour ma part que cette cote était assez bien taillée,
puisque l'on partait de l'idée selon laquelle le cumul est possible, mais pour
une durée déterminée et non pas indéfiniment. Cette solution me paraissait
tenir compte de ce qu'il y a de fondé dans les thèses qui s'opposent, mais,
compte tenu du climat apparemment très peu favorable à mon amendement, j'ai
donc cru prudent de le réserver.
Je l'ai retiré, tout en espérant que cette idée continuera de faire son chemin
lorsque cette affaire viendra à nouveau en discussion.
Par conséquent, je ne peux évidemment que m'abstenir sur cet amendement. A cet
égard, je dois préciser que je ne parle pas au nom de mon groupe, qui n'a pas
adopté de position sur le sujet.
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Mes chers collègues, cet amendement, qui a été déposé par la commission et que
M. le rapporteur nous a présenté, n'a pas fait l'unanimité dans les rangs de la
majorité sénatoriale.
Je dois dire que je ne faisais pas partie de ceux qui le soutenaient car je ne
vois pas de raison d'opérer des distinctions entre les communes comptant moins
de 3 500 habitants et les autres.
Comme je l'ai déjà souligné, ce projet de loi arrive au mauvais moment. On ne
passe pas brutalement d'un système à l'autre en matière d'incompatibilité de
mandats et, face aux réalités, on ne peut pas brutalement modifier les règles
du jeu.
D'ailleurs, il est bien apparu qu'il était impossible de régler, voire de
traiter certaines dispositions ; c'est notamment le cas de celles qui sont
relatives aux structures intercommunales à fiscalité propre.
Dans l'état actuel des choses, on ne peut pas régler ce genre de problème.
C'est la raison pour laquelle, bien que je pense qu'une réflexion plus
approfondie pourrait intervenir sur les communes, je me rallierai néanmoins à
la proposition de M. le rapporteur.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
J'ai entendu avec beaucoup d'intérêt M. Allouche parler tout à l'heure de la
loi PLM et des maires d'arrondissements à Paris.
Je le remercie et j'ai trouvé son analyse extrêmement intéressante : ne nous
a-t-il pas indiqué, explications à l'appui, que les maires d'arrondissement
n'ont aucun pouvoir exécutif ?
Merci, monsieur Allouche, et je me ferai un plaisir de faire part de votre
opinion aux maires d'arrondissement, notamment aux six maires de gauche qui
siègent à Paris et qui ont un avis totalement contraire : non contents de
penser avoir des pouvoirs exécutifs, ils ne cessent d'ailleurs d'en réclamer
davantage. Merci encore, monsieur Allouche. Cela apportera beaucoup au débat à
l'intérieur du Conseil de Paris !
M. Charles Pasqua.
Qui veut trop prouver ne prouve rien !
M. Gaston Flosse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Flosse.
M. Gaston Flosse.
Monsieur Allouche, je voterai contre cet article. En effet, pourquoi
voulez-vous imposer aux Polynésiens des candidats dont ils ne veulent pas ?
M. Guy Allouche.
Moi, je n'impose rien !
M. Gaston Flosse.
Si, car en excluant le titulaire d'un mandat exécutif local, vous interdisez
aux Polynésiens le choix de l'homme qu'ils veulent.
Lors des dernières élections sénatoriales, les électeurs savaient bien quelles
fonctions j'assume en Polynésie : je suis président du gouvernement en même
temps que maire d'une commune de 15 000 habitants ! Ils m'ont tout de même
désigné pour les représenter au Parlement de la République. J'ai même été élu à
80 % des voix, ce qui, je crois, fait de moi le sénateur le mieux élu de la
République.
Pourquoi voulez-vous nous exclure ?
Le voeu des Polynésiens, c'est que quelqu'un qui participe très activement à
la vie politique, économique et sociale de notre territoire puisse être leur
avocat, leur interprète ici, puisse s'exprimer devant le Parlement, devant les
ministres.
Pourquoi voulez-vous nous interdire la parole ?
M. Charles Pasqua.
Parce que vous n'êtes pas socialiste !
(Rires.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé et l'amendement n° 30 n'a plus
d'objet.
Article 2
bis
M. le président.
« Art. 2
bis
. _ Après l'article LO 142 du code électoral, il est inséré
un article LO 142-1 ainsi rédigé :
«
Art. LO 142-1
. _ Sont incompatibles avec le mandat de député les
fonctions de membre du cabinet du Président de la République ou d'un cabinet
ministériel. »
Par amendement n° 5, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je n'ai pas très bien compris ce qui peut justifier un tel
article. J'en ai d'ailleurs parlé avec M. Charasse, à titre anecdotique. Il
n'existe pas de cabinet du Président de la République. En effet, selon un avis
du Conseil d'Etat, le Président de la République a une maison. Par ailleurs, je
n'ai jamais vu dans la liste officielle d'un cabinet figurer le nom d'un membre
du Parlement. Aussi, je ne vois pas l'intérêt de cette disposition et je
propose de la supprimer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement rejoint la position de M. le rapporteur. Cette question est, en
effet, déjà réglée par l'article LO 142, aux termes duquel l'exercice des
fonctions publiques non électives est incompatible avec le mandat de député.
Cette disposition concerne donc, à l'évidence, ce type de fonction. Aussi, le
Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Cette disposition résulte d'un amendement qui a été adopté par l'Assemblée
nationale. Il s'agit d'une disposition
ad hominem.
Il faut éviter ce
genre de disposition. Aussi est-il de bon augure de la supprimer.
Cela dit, puisque, aux termes de notre règlement, je n'ai pu reprendre la
parole tout à l'heure, je dirai à M. Flosse qu'il n'a pas été très gentil avec
notre ami et ancien collègue M. Daniel Millaud.
Monsieur Flosse, permettez-moi de vous le dire avec solennité et gravité,
pendant plusieurs années, un homme tel que Daniel Millaud, d'une probité morale
exemplaire, d'une rigueur intellectuelle que chacun a pu apprécier, fut un
parfait défenseur du territoire polynésien. Pourtant, il n'avait pas d'autre
fonction élective ni d'autre mandat local.
M. Dominique Braye.
Arrêtez de personnaliser ! Vos propos ne sont pas solennels !
M. Guy Allouche.
M. Braye recommence !
Monsieur Flosse, ma remarque portait non pas sur le fond de votre explication
de vote, mais sur sa formulation qui, à mes yeux, avait quelque chose de
blessant à l'égard de M. Daniel Millaud.
(MM. Jean-Jacques Hyest, Jacques
Machet et Michel Mercier font un signe d'assentiment.)
M. Jean Chérioux.
C'est encore le professeur Allouche qui s'exprime !
M. le président.
Mes chers collègues, je rappelle que, aux termes du règlement du Sénat, vous
n'avez pas le droit de vous interpeller.
M. Gaston Flosse.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Flosse.
M. Gaston Flosse.
Monsieur Allouche,...
Plusieurs sénateurs du RPR.
Pas d'interpellation !
(Sourires.)
M. Gaston Flosse.
Loin de nous l'idée de faire un cas personnel. En Polynésie - et tous les
Polynésiens lui ont rendu hommage - le sénateur Millaud a accompli un travail
remarquable pendant vingt et un ans. Il a été l'un de nos meilleurs
sénateurs.
J'ai simplement demandé à M. Allouche...
Plusieurs sénateurs du RPR.
Non !
(Nouveaux sourires.)
M. Gaston Flosse.
... les raisons pour lesquelles il voulait, par ce projet de loi, priver les
Polynésiens de leur liberté d'expression. Laissez-nous choisir notre sénateur
et notre député ! Pourquoi nous imposer untel et pas un autre ? Où est la
liberté dans ces conditions ?
(Applaudissements sur plusieurs travées du
RPR.)
M. Henri Weber.
Il n'y a pas de liberté sans règle !
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Je souligne que la disposition adoptée par l'Assemblée nationale n'a aucun
fondement juridique car le cabinet du Président de la République n'a pas
d'existence juridique. Par conséquent, on ne peut interdire quelque chose qui
n'existe pas et, donc, instaurer à cet égard une incompatibilité. C'est la
raison pour laquelle il faut, bien sûr, accepter l'amendement de suppression
proposé par M. le rapporteur.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2
bis
est supprimé.
Article 2
ter
M. le président.
« Art. 2
ter
. _ Après l'article LO 143 du code électoral, il est inséré
un article LO 143-1 ainsi rédigé :
«
Art. LO 143-1
. _ Le mandat de député est incompatible avec celui de
membre du directoire de la Banque centrale européenne et de membre de la
Commission européenne. »
Par amendement n° 6, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
On aurait pu encore allonger la liste des incompatibilités
et, par exemple, viser le Vatican.
(Sourires.)
En l'occurrence, il
s'agit de la fonction de membre du directoire de la Banque centrale. Sur ce
point précis, l'incompatibilité figure déjà à l'article LO 143 du code
électoral, aux termes duquel un parlementaire ne peut exercer les fonctions
conférées par une organisation internationale et rémunérées sur ses fonds.
Peut-être un problème se pose-t-il pour le parlementaire membre de la Banque
centrale qui ne serait pas payé. Mais, de toute manière, il s'agit d'une
hypothèse d'école, tout au moins je le souhaite pour l'intéressé.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Je
partage l'avis de la commission. Aussi, le Gouvernement émet un avis favorable
sur cet amendement.
M. François Trucy.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2
ter
est supprimé.
Article 2
quater
M. le président.
« Art. 2
quater
. _ L'article LO 144 du code électoral est complété par
une phrase ainsi rédigée : « Un même parlementaire ne peut cependant se voir
confier plus de deux missions durant la même législature. »
Par amendement n° 7, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Il s'agit, là encore, d'une disposition excessive.
Chacun sait qu'un parlementaire peut se voir confier des missions de six mois.
Il nous est proposé de lui en confier deux. Pourquoi pas trois ou quatre ? Nous
n'en savons rien. Tout cela me paraît marqué du souci, que la commission et
peut-être tous ceux qui siègent ici ne partagent pas, de tout réglementer, de
tout prévoir.
Il peut être utile qu'un parlementaire, au cours de son mandat, soit appelé à
remplir trois missions. Je ne vois pas en quoi le fonctionnement de la
République en serait perturbé !
Un sénateur du RPR.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement. En effet, nous nous
écartons du sujet, à savoir le régime des incompatibilités.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 7.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
(Protestations sur plusieurs
travées du RPR.)
M. Jean Chérioux.
Quelle chance !
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Je soutiendrai l'amendement de la commission
(Ah ! sur les mêmes travées)
par cohérence avec ce que j'ai dit tout à l'heure.
Quand le Gouvernement confie à un collègue parlementaire une, deux ou trois
missions, c'est toujours en vue de l'élaboration d'un futur projet de loi. Un
parlementaire en mission participe donc au travail législatif. Par conséquent,
il faut laisser la possibilité au Gouvernement de choisir celui ou celle qui
est à même de répondre à telle ou telle question, de mener les investigations
nécessaires.
Certains collègues ont rédigé d'excellents rapports qui ont permis au pouvoir
exécutif soit de proposer un projet de loi, soit de prendre des mesures tenant
compte de ce qui avait été appris sur le terrain.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2
quater
est supprimé.
Article 2
quinquies
M. le président.
« Art. 2
quinquies
. Après le premier alinéa de l'article LO 145 du code
électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Est incompatible avec le mandat de député la fonction de membre du bureau
d'une chambre consulaire ou d'une chambre d'agriculture. »
Par amendement n° 8, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
L'article 2
quinquies
tend à interdire à un
parlementaire d'être membre du bureau d'une chambre consulaire ou d'une chambre
d'agriculture. Il s'agit bien de représentations professionnelles. Or il y en a
d'autres. Je pense, par exemple, aux syndicats. Va-t-on interdire à un
parlementaire d'être membre d'un syndicat ? Nous sommes là dans le domaine de
la réglementation abusive, pour ne pas dire délirante.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement souhaite revenir à l'esprit même du texte. C'est pourquoi, tout en
approuvant la démarche de la commission des lois, il s'en remet à la sagesse de
la Haute Assemblée.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Je veux souligner le caractère très dangereux de ce type de disposition qui va
priver une catégorie de citoyens responsables d'être élue. Demain, on en
privera une autre et après-demain, une troisième. La démocratie n'en sort pas
grandie !
Par ailleurs, pourquoi viser la chambre d'agriculture et la chambre de
commerce et exclure la chambre de métiers qui est de même nature ? Des
discriminations commencent à apparaître, ce qui me semble très dangereux pour
la démocratie.
Une démocratie selon laquelle seuls les travailleurs ont le droit d'être élus
à condition qu'ils ne détiennent pas d'actions ou d'obligations dans
l'entreprise me rappelle fâcheusement certaines dispositions de la constitution
russe de 1918. Je ne souhaiterais pas que l'on aille dans cette direction.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains
et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2
quinquies
est supprimé.
Article 2
sexies
M. le président.
« Art. 2
sexies
. _ Dans le troisième alinéa (2°) de l'article LO 146 du
code électoral, le mot : "exclusivement" est supprimé. »
Par amendement n° 9, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Cet article vise à supprimer le mot « exclusivement » dans
l'article LO 146 du code électoral. Une telle suppression priverait un certain
nombre de chefs d'entreprise de la possibilité d'exercer un mandat
parlementaire. L'interprétation d'une telle disposition serait d'ailleurs
délicate.
Par ailleurs, en faisant entrer ces chefs d'entreprise dans la catégorie très
largement ouverte par l'Assemblée nationale, on priverait le Parlement de la
présence de ces entrepreneurs - puisque c'est ainsi qu'ils se nomment depuis
hier - qui auront sans doute, si le texte de l'Assemblée nationale est adopté,
beaucoup plus de temps à consacrer à un mandat législatif, puisqu'ils ne
pourront pas exercer en même temps une fonction exécutive.
Donc, derrière ce texte, il y a une intention que je devine mais que je
comprends mal et, en tout cas, que je ne partage pas.
M. Jean Chérioux.
Tout cela n'est pas très démocratique !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée pour les raisons
évoquées précédemment.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9.
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Dans un premier temps, seront incompatibles avec l'exercice d'un mandat
parlementaire les fonctions de chef d'entreprise. Pourquoi ne pas rendre
incompatibles aussi les fonctions de membre de conseil de surveillance dans les
sociétés commerciales dotées d'un tel conseil ?
Là encore, cela me rappelle les dispositions de la constitution bolchévique de
1918, dont les articles 66 et 67 privaient du droit de vote les prêteurs, les
obligataires, les actionnaires et toutes les personnes détenant la moindre
parcelle de capital. C'est extrêmement dangereux, et nous ne pouvons donc pas
nous engager dans cette voie-là.
M. Alain Vasselle
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2
sexies
est supprimé.
Article 2
septies
M. le président.
Art. 2
septies
. - « L'article LO 146 du code électoral est complété par
un alinéa ainsi rédigé :
« Le député qui détient tout ou partie du capital d'une société visée au
présent article ne peut exercer les droits qui y sont attachés. »
Par amendement n° 10, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je ne sais si l'article 2
septies
est comparable à la
constitution soviétique, mais son adoption aurait en tout cas comme conséquence
de priver d'un droit de propriété le parlementaire tombant sous le coup de ses
dispositions ; ce dernier ne pourrait en effet ni disposer du droit de vote
dans les sociétés dont il est actionnaire, ni percevoir des dividendes, ni je
pense, céder ses actions. Cela remettrait donc en cause le droit de
propriété.
Le Conseil constitutionnel, qui vérifiera obligatoirement la conformité à la
Constitution du projet de loi organique dont nous débattons, ne manquerait pas,
dans la sagesse dont il fait preuve parfois, de constater la non-conformité
avec la Constitution de ce texte.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement s'en remet, comme précédemment, à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 10.
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Cet article est manifestement contraire à l'article 17 de la Déclaration des
droits de l'homme et du citoyen. On ne peut donc accepter la logique qui le
sous-tend et que l'amendement de la commission combat à juste titre.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2
septies
est supprimé.
Article additionnel après l'article 2
septies
M. le président.
Par amendement n° 33, MM. Duffour, Bret et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 2
septies,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa de l'article LO 145 du code électoral, après les mots
: « établissements publics nationaux », sont insérés les mots : « ou dans les
entreprises dont l'Etat est actionnaire ».
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
L'article LO 145 du code électoral établit l'incompatibilité du mandat
parlementaire avec la fonction de conseil ou de direction dans les entreprises
nationales ou les établissements publics nationaux.
Il nous paraît nécessaire d'étendre cette incompatibilité à toutes les
entreprises dont l'Etat est actionnaire, même minoritaire.
Notre démarche est claire : nous estimons que le cumul n'est pas seulement
celui des mandats ; il est aussi et trop souvent celui des fonctions
économiques et des fonctions électives. L'amendement n° 33 vise donc à réduire
le cumul.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Larché,
rapporteur.
M. Duffour ne sera sans doute pas très étonné que la
commission propose le rejet de son amendement. Ce dernier, qui vise à modifier
les incompatibilités professionnelles, lui paraît en effet contraire au cadre
général du projet de loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement, tout en comprenant parfaitement le sens de cet amendement, estime
qu'il convient de se montrer prudent sur une rédaction qui mériterait une
réflexion approfondie. C'est pourquoi il s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 33.
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Les divers amendements adoptés à l'Assemblée nationale ou ceux qui sont
déposés devant le Sénat visent à introduire progressivement un suffrage
censitaire en France. Des catégories entières de Français seraient ainsi privés
du droit de vote. C'est absolument contraire à notre tradition républicaine, et
nous ne pouvons pas aller dans ce sens.
M. Guy Allouche.
Du droit d'être élu, voulez-vous dire !
M. Patrice Gélard.
Etre élu et avoir le droit de vote sont deux droits indissolublement liés. Les
séparer aboutit au suffrage censitaire !
M. Guy Allouche.
Mais non ! Il y a des incompatibilités !
M. Patrice Gélard.
C'est ce qui existait en 1814 et en 1830 !
M. Guy Allouche.
Non !
M. Patrice Gélard.
On reviendrait au Moyen Age de la démocratie en s'orientant dans cette voie
!
M. Jean-Jacques Hyest.
Il y a des incompatibilités, quand même !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33, repoussé par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2
octies
M. le président.
« Art. 2
octies
. _ L'article LO 147 du code électoral est ainsi rédigé
:
«
Art. LO 147
. _ Il est interdit à tout député d'exercer une fonction
de membre du conseil d'administration ou de surveillance ou toute fonction
exercée de façon permanente en qualité de conseil dans l'un des établissements,
sociétés ou entreprises visés à l'article LO 146. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 11, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
Par amendement n° 34, MM. Dufour, Bret et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent de rédiger ainsi l'article 2
octies
:
« L'article LO 146-1 du code électoral est ainsi rédigé :
«
Art. LO 146-1. -
Il est interdit à tout parlementaire d'exercer une
fonction de conseil. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 11.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
L'amendement n° 11 est encore - excusez mon acharnement ! -
un amendement de suppression. J'aurais d'ailleurs été heureux que le
Gouvernement, à l'Assemblée nationale, adopte des positions semblables à celles
que vous êtes en train de prendre, monsieur le ministre, car cela nous aurait
évité beaucoup de travail !
(Sourires.)
Cela n'ayant pas été le cas, le
texte nous est revenu surchargé de la manière que nous savons.
L'article 2
octies
vise à interdire à un parlementaire d'exercer la
fonction de conseil dans une société visée à l'article LO 146, alors que,
jusqu'à présent, l'exercice de cette activité professionnelle était possible à
la condition que cette dernière ait été pratiquée avant l'élection. En
supprimant ainsi cette possibilité, on aboutirait pratiquement à l'amendement
n° 34 - M. Duffour va le présenter, et je ne vais donc pas le faire à sa place
! - qui tend à préciser qu'« il est interdit à tout parlementaire d'exercer une
fonction de conseil ».
Cette formulation a au moins le mérite de la netteté ! Mais, comme vous le
savez, il y a plusieurs types de netteté, et l'on n'est pas obligé d'avoir le
même !
(Sourires sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
et sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Duffour, pour présenter l'amendement n° 34.
M. Michel Duffour.
Cet amendement a été présenté, comme l'a dit M. le rapporteur, dans un souci
de netteté, et non pour en revenir à des pratiques moyenâgeuses ou au Soviet
suprême, comme pourrait le penser M. Gélard.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Comme je l'ai laissé entendre, la commission est défavorable
à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 11 et 34 ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée, en formulant les
mêmes observations que précédemment. Je tiens d'ailleurs à indiquer à M. Larché
que nous avions adopté la même attitude à l'Assemblée nationale !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Mais vous aviez été battu !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence l'article 2
octies
est supprimé et l'amendement n° 34
n'a plus d'objet.
Article additionnel après l'article 2
octies
M. le président.
Par amendement n° 35, M. Duffour et Bret, les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 2
octies,
un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le dernier alinéa de l'article LO 146 du code électoral est complété par les
mots : "ou possède plus de 5 % de leur capital". »
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Je défends cet amendement devant la Haute Assemblée un peu pour la forme, car
je sais déjà que je vais m'attirer les mêmes réponses. Il s'inscrivait dans
notre réflexion visant à rendre le projet de loi organique plus net sur ce
point.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Larché,
rapporteur.
La commission est également défavorable à cet amendement et,
ce faisant, elle rend ainsi service à M. Duffour. En effet, si jamais cet
amendement était adopté et si, par malheur, notre collègue était chargé de son
application, je me demande bien comment il s'en tirerait !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2
nonies
M. le président.
« Art. 2
nonies
. _ Le dernier alinéa de l'article LO 148 du code
électoral est supprimé. »
Par amendement n° 12, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Il s'agit de la même orientation générale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement est favorable à cet amendement. En effet, on ne voit aucune raison
sérieuse qui puisse empêcher un parlementaire d'exercer des fonctions au sein
du conseil d'administration d'une société d'économie mixte, dès lors qu'il
n'existe aucun intérêt pécuniaire sous la forme d'une rémunération.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2
nonies
est supprimé.
Article 2
decies
M. le président.
« Art. 2
decies
. _ L'article LO 149 du code électoral est ainsi rédigé
:
«
Art. LO 149
. _ Il est interdit à tout avocat inscrit à un barreau,
lorsqu'il est investi d'un mandat de député, d'accomplir directement ou
indirectement par l'intermédiaire d'un associé, d'un collaborateur ou d'un
secrétaire, aucun acte de sa profession dans les affaires à l'occasion
desquelles des poursuites pénales sont engagées devant les juridictions
répressives pour crimes et délits contre la chose publique ou en matière de
presse ou d'atteinte au crédit ou à l'épargne ; il lui est interdit, dans les
mêmes conditions, de plaider ou de consulter pour le compte de l'une des
sociétés, entreprises ou établissements visés aux articles LO 145 et LO 146 ou
contre l'Etat, les sociétés nationales, les collectivités ou établissements
publics. »
Par amendement n° 13, M. Jacques Larché, au nom de la commission des lois,
propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Guy Allouche.
C'est l'article anti-avocat !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
La rédaction qui nous est proposée serait lourde de
conséquences : le parlementaire ne pourrait plus plaider devant la Haute Cour
de justice ou devant la Cour de justice de la République.
Cette disposition me paraît malvenue ! En effet, si l'on peut penser que la
Haute Cour de justice ne se se réunira jamais, la Cour de justice de la
République risque, hélas ! de fonctionner ! Et l'on interdirait à l'un d'entre
nous, parce qu'il serait parlementaire, d'aller défendre l'un de ceux qui vont
comparaître devant la Cour de justice de la République ?
M. Jean-Jacques Hyest.
Monsieur le rapporteur, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je vous en prie.
M. le président.
La parole est à M. Hyest, avec l'autorisation de M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest.
Selon une règle ancienne et générale, un avocat parlementaire ne peut pas
plaider contre l'Etat. Il ne me paraît donc pas judicieux de souhaiter que les
parlementaires avocats puissent plaider devant la Haute Cour de justice ou
devant la Cour de justice de la République. Tel n'est d'ailleurs pas le cas
actuellement !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Ce n'est pas mon interprétation !
M. Patrice Gélard.
L'avocat a le droit de plaider devant la Haute Cour de justice !
M. Jean-Jacques Hyest.
Personnellement, je m'interroge.
M. le président.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
L'article 2
decies
me semble avoir les conséquences
que j'ai indiquées. Je demande donc sa suppression.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Le
Gouvernement s'en remet, comme précédemment, à la sagesse du Sénat, étant
entendu qu'il n'y a pas lieu, à son avis, de restreindre les dispositions de
l'article LO 149.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 13.
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
L'amendement adopté par l'Assemblée nationale nous entraîne dans une direction
très dangereuse : on ne pourrait plus être à la fois parlementaire et avocat.
C'est en effet à peu près le résultat auquel on aboutirait.
Cette voie, dans laquelle se sont engagés un certain nombre de parlementaires
en déposant toute une série d'amendements, est extrêmement périlleuse. En
effet, elle amène à remettre en cause les bases de la démocratie. Où alors,
allons jusqu'au bout du raisonnement : quand on est parlementaire, on ne peut
exercer aucune autre fonction ! La conséquence logique est alors de devenir
parlementaire à vie.
(Sourires sur les travées du RPR.)
Ce sera véritablement le seul moyen
d'exercer correctement sa fonction !
M. Joseph Ostermann.
Très bien !
M. Pierre Fauchon.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon.
Lorsque j'étais avocat stagiaire, j'ai appris qu'un avocat devenant
parlementaire ne devait pas plaider au pénal, où les poursuites sont engagées
par la puissance publique, sous peine de se trouver dans une situation assez
équivoque. Cela n'empêche pas l'avocat d'exercer son métier par ailleurs
puisqu'il existe de nombreuses affaires civiles, commerciales, prud'homales,
etc.
Je reste donc fidèle à cette idée qui me paraît fondée : quelle que soit la
juridiction concernée, qu'il s'agisse ou non de la Haute Cour de justice, nous
sommes toujours dans le domaine pénal, domaine où une poursuite est exercée au
nom de l'Etat et de l'intérêt général contre un particulier. Par conséquent, je
ne crois pas convenable qu'un parlementaire avocat, qui se trouve donc quand
même dans une situation assez ambiguë, intervienne dans de telles
circonstances. C'est pourquoi j'estime, pour ma part, que le texte de
l'Assemblée nationale n'est pas mauvais. Je ne voterai donc pas
l'amendement.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Quelle est la portée exacte de ce texte ? L'article LO 149,
dans sa rédaction actuelle, pose certes le principe de l'interdiction de
l'intervention de l'avocat, mais il prévoit une exception s'agissant de la
Haute Cour de justice ou de la Cour de justice de la République. Or, cette
exception, nous ne la retrouvons pas dans la rédaction proposée par l'Assemblée
nationale.
M. Jean-Jacques Hyest.
Absolument !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Comme je le disais tout à l'heure, je constate donc que l'on
interdit désormais à un avocat parlementaire - et cela me semble fâcheux - de
plaider devant la Cour de justice de la République.
M. Patrice Gélard.
Voilà !
M. Charles Jolibois.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Jolibois.
M. Charles Jolibois.
Aux termes de l'article LO 149, dans sa rédaction en vigueur, l'avocat a le
droit de plaider dans la majorité des affaires pénales. Certes, dans certaines
affaires pénales - mais dans certaines seulement...
M. Jean-Jacques Hyest.
Tout à fait !
M. Charles Jolibois.
... il ne peut pas intervenir : il en est ainsi lorsque, par exemple, « des
poursuites pénales sont engagées devant les juridictions répressives pour
crimes ou délits contre la nation, l'Etat ou la paix publique ou en matière de
presse ou d'atteinte au crédit ou à l'épargne. » Par conséquent, le contentieux
ne lui est pas interdit de manière générale dans le droit actuel !
J'ajoute que M. Jacques Larché a eu raison de nous rappeler que, aux termes de
l'article LO 149, le député avocat a le droit d'intervenir devant la Haute Cour
de justice ou la Cour de justice de la République. Par conséquent, ce qu'a voté
l'Assemblée nationale constitue une extension considérable des incompatibilités
de l'avocat, qui équivaut à rendre pratiquement incompatible le métier d'avocat
avec celui de parlementaire.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2
decies
est supprimé.
Article 3
M. le président.
« Art. 3. _ I. _ Au premier alinéa de l'article LO 151 du code électoral, les
mots : "deux mois" sont remplacés par les mots : "trente jours".
« II. _ Au deuxième alinéa du même article, les mots : "visés à l'article LO
141" sont remplacés par les mots : "visés aux articles LO 141 et LO 141-1".
« III. _ Le troisième alinéa du même article est complété par une phrase ainsi
rédigée :
« Ces déclarations sont publiées au
Journal officiel
. »
« IV. _ Dans la première phrase du cinquième alinéa du même article, le mot :
"quinze" est remplacé par le mot : "trente". »
Je suis saisi de deux amendements présentés par M. Jacques Larché, au nom de
la commission.
L'amendement n° 14 vise à supprimer le paragraphe II de cet article.
L'amendement n° 15 tend à supprimer le paragraphe III de ce même article.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces deux amendements.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
L'amendement n° 14 est un amendement de coordination avec la
décision que nous avons prise sur l'article 2 du projet de loi organique.
Quant à l'amendement n° 15, il vise à la suppression d'une « invention »
contenue dans le paragraphe III de l'article 3. On voudrait que, désormais, les
déclarations d'activités professionnelles soient publiées au
Journal
officiel !
Pourquoi pas dans
France Soir,
dans
Le Monde
ou
dans n'importe quel journal ?
Certes personne ne lit le
Journal officiel,
mais cela me semble quand
même ridicule.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Par
cohérence, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 14, qui est un
amendement de coordination.
Quant à l'amendement n° 15, il vise à la suppression de dispositions qui ont
été introduites dans un souci de transparence et auxquelles le Gouvernement ne
s'est pas opposé à l'Assemblée nationale. J'y suis donc défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. _ Le premier alinéa de l'article LO 151-1 du code électoral est
remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Tout député qui acquiert postérieurement à son élection à l'Assemblée
nationale une fonction élective propre à le placer dans un des cas
d'incompatibilité visés à l'article LO 141 doit faire cesser cette
incompatibilité en démissionnant de son mandat de député ou de sa nouvelle
fonction. Il dispose à cet effet d'un délai de trente jours à compter de la
proclamation de l'élection qui l'a placé en situation d'incompatibilité, ou, en
cas de contestation, de la date à laquelle la décision juridictionnelle
confirmant cette élection est devenue définitive. A défaut d'option dans le
délai imparti, il est réputé avoir renoncé à son mandat de député.
« Tout député qui acquiert postérieurement à son élection à l'Assemblée
nationale un mandat propre à le placer dans un des cas d'incompatibilité visés
à l'article LO 141-1 doit faire cesser cette incompatibilité en démissionnant
d'un des mandats qu'il détenait antérieurement. Il dispose à cet effet d'un
délai de trente jours à compter de la proclamation de l'élection qui l'a placé
en situation d'incompatibilité ou, en cas de contestation, de la date à
laquelle la décision juridictionnelle confirmant cette élection est devenue
définitive. A défaut d'option ou en cas de démission du dernier mandat acquis
dans le délai imparti, le mandat acquis ou renouvelé à la date la plus ancienne
prend fin de plein droit. »
Par amendement n° 16, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
rédiger ainsi cet article :
« Le premier alinéa de l'article LO 151-1 du code électoral est ainsi rédigé
:
« Tout député qui acquiert un mandat électoral propre à le placer dans un des
cas d'incompatibilité visés à l'article LO 141 postérieurement à son élection à
l'Assemblée nationale dispose pour démissionner du mandat de son choix d'un
délai de trente jours à compter de la date de l'élection qui l'a mis en
situation d'incompatibilité ou, en cas de contestation, de la date à laquelle
le jugement confirmant cette élection est devenu définitif. A défaut d'option
dans le délai imparti le mandat acquis ou renouvelé à la date la plus récente
prend fin de plein droit. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Cet amendement concerne les incompatibilités qui surviennent
ou qui peuvent survenir postérieurement à l'élection du parlementaire dans le
cadre des dispositions de principe que nous avons votées.
Un parlementaire qui acquiert un mandat électif incompatible dispose, pour se
mettre en conformité avec la législation, d'une liberté de choix. Or le projet
qui nous est soumis remet cette liberté de choix en cause puisqu'il contraint
le parlementaire à démissionner du mandat qu'il détenait antérieurement. Il
faut que le parlementaire puisse choisir !
Par ailleurs, dans un souci d'harmonisation que je comprends, l'Assemblée
nationale a fixé à trente jours l'ensemble des délais pour que chacun se mette
en conformité avec la loi. A partir du moment où la liberté de choix est
maintenue, ce délai de trente jours me paraît raisonnable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Il
s'agit d'un amendement de coordination avec l'article 2, tel qui a été voté
tout à l'heure par le Sénat.
Le Gouvernement s'étant prononcé contre la nouvelle rédaction de l'article 2,
il ne peut qu'être défavorable à cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Nous nous abstiendrons sur cet amendement, monsieur le président, mais je
voudrais auparavant livrer une réflexion.
Il n'est pas très moral qu'une personne qui se présente à une élection décide
ensuite, pour des raisons de cumul, d'abandonner le mandat pour lequel elle
vient d'être élue. Les électeurs ont droit au respect ! Or, très souvent,
certaines personnes conduisent des listes et, une fois élues, elles
démissionnent.
Je ne sais pas si nous pouvons traiter ce problème aujourd'hui ou s'il faut le
remettre à plus tard, mais je voulais attirer votre attention, mes chers
collègues, sur le fait que bien de nos concitoyens n'apprécient pas ce
comportement.
M. Dominique Braye.
Démago !
M. Jean Chérioux.
Ce sont les bienfaits du scrutin de liste !
M. Jean-Jacques Hyest.
Il faut le supprimer partout où on le peut !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé.
Article 4
bis
M. le président.
« Art. 4
bis
. _ Dans le premier alinéa de l'article LO 296 du code
électoral, les mots : "trente-cinq" sont remplacés par les mots : "dix-huit".
»
Par amendement n° 17, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je constate que le Gouvernement ne s'est pas opposé à la
disposition proposée à l'Assemblée nationale.
Avant de me prononcer sur le fond, j'aimerais savoir ce que M. le ministre
pense de l'âge à partir duquel on est habilité à exercer des fonctions
ministérielles !
(Sourires.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim.
Si
le Gouvernement a laissé l'Assemblée nationale se prononcer sur ce point, je
crois cependant qu'il nous faut revenir à un texte relatif aux incompatibilité
et non aux conditions d'éligibilité.
Dans ces conditions, le Gouvernement est favorable à la suppression du texte
initial, et donc à l'amendement n° 17.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
J'observe que M. le ministre ne m'a pas répondu sur
l'exercice des fonctions ministérielles ! Au demeurant, n'a-t-on pas oublié le
Président de la République s'agissant de l'âge d'éligibilité ?
M. Guy Allouche.
Cela viendra ! Le prochain siècle est devant nous !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
C'est une lacune qu'il faudra peut-être combler !
M. Dominique Braye.
Pourquoi pas à seize ans !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 17.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je me réjouis que la commission nous ait proposé cet amendement, parce que le
texte adopté par l'Assemblée nationale aurait posé des problèmes difficiles
d'application pour l'administration de nos assemblées : n'aurait-il pas fallu
modifier les imprimés à envoyer aux nouveaux élus, de façon, notamment, à leur
demander s'ils habitent encore chez leurs parents ?
(Sourires.)
M. Michel Duffour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Nous trouvons nous aussi la rédaction de cet article introduit par l'Assemblée
nationale un peu curieuse, mais nous tenons à cette occasion à dire que nous
avons entendu, en commission - peut-être moins dans cet hémicycle, il est vrai
- des propos qui sont quand même pour le moins désobligeants par rapport à la
jeunesse...
M. Jean Chérioux.
Démagogie !
M. Dominique Braye.
On récupère !
M. Michel Duffour.
... surtout à un moment où - nous nous en félicitons tous - la jeune
génération cherche à prendre plus de responsabilités, cherche à dire son mot
sur toutes les grandes affaires de ce pays. De grâce ! pesons nos arguments
pour ne pas lui donner l'impression que nous ne sommes pas à l'écoute de ce
qu'elle dit.
M. Jean Chérioux.
Persiste et signe !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
J'indique à M. Duffour - mais il le sait parfaitement, pour
participer très fidèlement aux travaux de notre commission - que nous n'avons
jamais prononcé le moindre mot désagréable à l'égard de la jeunesse : nous
avons seulement visé l'inconséquence de nos collègues de l'Assemblée nationale,
ce qui est totalement différent.
(Applaudissements sur les travées du RPR,
des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Qu'il me soit permis une remarque à l'intention de l'Assemblée nationale :
n'aurait-il pas fallu prévoir qu'auraient seuls le droit de se présenter à
l'âge de dix-huit ans ceux qui ont accompli la journée obligatoire de
préparation à la défense ? En effet, c'est une condition nécessaire pour passer
le permis de conduire ou le permis de chasser. On ne pourrait pas conduire ou
chasser mais on pourrait être député ?
J'espère que vous me pardonnerez cette petite note d'humour, monsieur le
président.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Je le dis d'emblée, nous nous abstiendrons sur l'amendement n° 17.
Voilà quelques années, beaucoup ont critiqué l'abaissement à dix-huit ans de
l'âge de la majorité civile. Or, aujourd'hui, on s'aperçoit qu'il y a une
demande de citoyenneté assez forte de la part des lycéens.
Dix-huit ans, c'est peut-être un peu jeune, à nos yeux, pour être candidat à
une fonction parlementaire, mais n'insultons pas l'avenir ! A l'allure où
évolue la jeunesse, je pense que, dans quelque temps, à dix-huit ans, certains
seront assez mûrs pour assurer certaines responsabilités !
M. Dominique Braye.
Pourquoi pas à seize ans ?
M. Alain Vasselle.
Certains sont mûrs à seize ans tandis que d'autres ne le sont pas à trente ans
!
M. Dominique Braye.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Le débat qui vient de s'instaurer me désole un peu. Effectivement, il y a
l'esprit et la lettre, mais nous avons vu cet après-midi que l'esprit était
d'un côté, et la lettre de l'autre. Ainsi, dans votre réponse à M. Vasselle sur
le problème de la délégation générale, monsieur le ministre, vous avez
formellement raison : un maire n'a pas le droit de donner une délégation
générale à son adjoint. Mais il n'empêche que les textes sont bafoués lorsque
certains maires - ceux que j'ai cités tout à l'heure - ne gardent que la
délégation relative au cimetière pour donner toutes les autres délégations à
leur premier adjoint !
Dans le même ordre d'idée, monsieur Allouche, que la majorité soit fixée à
dix-huit ans, soit ! Il n'empêche que nous constatons tous les jours que, si
notre jeunesse a acquis certains droits supplémentaires de ce fait, les jeunes
n'ont jamais été rendus aussi dépendants qu'en ce moment par l'évolution de la
société.
M. Jean-Marie Poirier.
Exactement !
M. Dominique Braye.
Autrefois, ils n'étaient peut-être majeurs qu'à vingt et un ans, mais ils
commençaient leur vie à cet âge ! Or, aujourd'hui, compte tenu de l'évolution
que vous avez fait subir à la société, ils vivent encore chez leurs parents à
vingt-sept ans. Ils ne peuvent pas fonder de famille, ils sont complètement
dépendants.
M. Jean Chérioux.
Très bien !
M. Dominique Braye.
Pour ma part, je préfère la véritable indépendance à l'indépendance sur le
papier et sur l'acte d'état civil.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Louis Moinard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Moinard.
M. Louis Moinard.
Je veux livrer à la Haute Assemblée une simple réflexion. Lors d'une élection
municipale, un jeune âgé de dix-sept ans ne peut pas être élu. Trois ans plus
tard se déroulent des élections sénatoriales ; il a vingt ans ; il peut être
candidat, il peut être élu, mais il n'est pas électeur.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par le Gouvernement.
M. Michel Duffour.
Le groupe communiste s'abstient.
M. Guy Allouche.
Le groupe socialiste également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4
bis
est supprimé.
Autrement dit, la jeunesse a toute sa place, mais pas tout de suite au
Sénat.
Article 4
ter
M. le président.
« Art. 4
ter
. - Les députés et les sénateurs sont membres de droit des
commissions constituées dans leur département d'élection, placées sous la
présidence du préfet ou coprésidées par le préfet et le président du conseil
général. »
Par amendement n° 18, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Cet article, dont je propose la suppression, me semble aller
à l'encontre de ce qu'a défendu avec beaucoup de brio M. Allouche, à savoir que
le parlementaire doit se consacrer à sa tâche de législateur.
En effet, voilà que l'Assemblée nationale invente un système aberrant. Au sein
des départements, il y a des commissions. Nous les connaissons, nous les
présidons, ou plus exactement nous les faisons présider par délégation. Elles
sont coprésidées en principe par le préfet. Mais celui-ci n'y va jamais. Il
délègue donc à son directeur de cabinet, au secrétaire général ou à un
fonctionnaire de l'administration, ce qui est tout à fait normal.
Dorénavant, le parlementaire serait donc membre de droit de ces commissions.
Bien sûr, pour autant il ne serait pas obligé d'y siéger. Mais, de la part d'un
membre de droit, cela ferait mauvais effet !
J'ai pu relever, dans le département que j'ai l'honneur d'administrer, le
nombre de commissions où le parlementaire siégerait de droit : il y en a 110
!
M. Jean Chérioux.
On ne le verra pas souvent à l'Assemblée nationale ou au Sénat !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
De deux choses l'une, donc : ou bien le parlementaire siège
dans les commissions, et il ne va plus du tout à l'Assemblée nationale...
M. Jean Chérioux.
C'est pire que le cumul !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
... ou bien il n'y siège pas et l'on est alors en droit de se
demander au nom de quel privilège abusif il en est membre de droit. En fait, on
va lui compliquer la vie.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Au moment où je prends le relais de M.
Queyranne, j'ai la chance, pour commencer, d'avoir à exprimer un avis favorable
sur l'amendement de la commission.
En effet, la disposition qu'il est proposé de supprimer n'a pas de rapport
avec le texte élaboré par le Gouvernement. De plus, elle serait très
difficilement applicable et elle irait à l'encontre de l'objectif recherché à
travers la limitation du cumul des mandats et des fonctions électives.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je veux simplement faire observer à M. Besson, qui vient
d'arriver et que je me plais à accueillir pour la suite de ce débat, que, si
nous avions fait preuve de mauvais esprit, nous aurions adopté le texte
introduit par l'Assemblée nationale, tant il compliquerait les choses à
l'extrême.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 18.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Mes chers collègues, je n'ai jamais dit que j'étais favorable à la disposition
introduite par l'Assemblée nationale.
Dans la mesure où je prêche en faveur de la disponibilité pour le travail
parlementaire et pour le contact permanent avec les électeurs, je conçois que
l'on ne puisse pas siéger dans cent commissions ou plus.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
A l'occasion de l'examen de cet amendement, je veux souligner l'incohérence et
le ridicule dont ont fait preuve nos collègues députés. J'en veux pour preuve
le nombre d'amendements que notre rapporteur a été obligé de proposer à la
Haute Assemblée pour supprimer certaines dispositions et redonner un peu de
corps au texte.
Dire que, par médias interposés, on veut faire croire à l'opinion publique que
c'est la Haute Assemblée qui, face à un tel projet, est ringarde et
réactionnaire !
A voir le ridicule dans lequel les membres de l'Assemblée nationale sont
tombés au travers de l'examen de ce texte, c'est plutôt vers eux que les médias
devraient pointer leurs critiques, au lieu de tenter de ridiculiser le
comportement de l'autre assemblée, qui, comme toujours, fait preuve de la
sagesse la plus exemplaire.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Michel Duffour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Nous avons abordé cette discussion avec le souci d'être constructifs. Or, le
dernier intervenant a, parlant de nos collègues de l'Assemblée nationale,
employé des termes qui me semblent manquer quelque peu de sagesse et qui
n'augurent pas d'un bon dialogue entre les représentants des deux
assemblées.
M. Alain Vasselle.
C'est un dialogue de sourds !
M. Michel Duffour.
Certes, si nous entamons un dialogue en nous traitant mutuellement de sourds,
nous aurons du mal à progresser !
(Sourires sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées
socialistes.)
Nous argumentons d'ailleurs quelque peu à fronts renversés puisque, selon
nous, le travail de parlementaire est très prenant. M. le rapporteur craint
d'ailleurs qu'il ne le soit trop, avec une telle disposition.
La mesure présentait tout de même l'avantage pour les parlementaires qui ne
sont pas élus locaux et qui auraient siégé dans ces commissions d'être au
courant de la vie de leur département, et donc de pouvoir y participer.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4
ter
estsupprimé.
Article 4
quater
M. le président.
« Art. 4
quater
. _ Les députés et les sénateurs sont associés par le
préfet de région et les préfets de département à la préparation des contrats de
plan, des contrats d'agglomération, des contrats de ville, des contrats de
pays, négociés dans leur département d'élection. Ils sont régulièrement
informés des conditions d'exécution de ces contrats. »
Par amendement n° 19, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Véritablement, je m'interroge ! Pourquoi l'Assemblée
nationale, qui est composée de gens sages, qui a profité du travail de sa
commission, qui bénéficiait de la présence d'un ministre dont nous espérons
tous le retour rapide parmi nous, a-t-elle voté des textes de ce genre ? C'est
illisible !
« Les députés et les sénateurs » - tout de même ! - « sont associés par le
préfet de région et les préfets de département à la préparation des contrats de
plan,... ». Mais que signifie « être associé à la préparation d'un contrat de
plan » ?
Pour écrire cela, il faut n'avoir jamais vu la manière dont se fait un contrat
de plan ! Cette disposition est parfaitement inutile.
On m'a dit qu'il s'agissait d'un amendement de M. Gaëtan Gorce - je ne le
connais pas - soutenu par M. Pierre Albertini - lui, je le connais bien. Comme
quoi l'on peut se rejoindre sur des terrains et dans des opinions qui
conduisent parfois à une certaine incohérence !
Je ne dirai pas que cet article ne veut rien dire. Disons, malgré tout, qu'il
ne veut pas dire grand-chose !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement accepte l'amendement, sans pour autant
faire siennes les appréciations qui ont pu être formulées à l'adresse des
membres de l'Assemblée nationale.
J'ai le souvenir, pour avoir, dans ma propre carrière, suivi le
cursus
des mandats locaux avant d'arriver à un mandat national, d'avoir souvent
entendu des parlementaires qui n'avaient que ce mandat regretter d'être par
trop coupés d'un certain nombre de travaux qui se faisaient dans leur
département et qui intéressaient leur circonscription.
Il y a donc une demande d'information. C'est dans ce sens que le Gouvernement
conçoit l'intention des parlementaires qui sont à l'origine de ce texte.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 19.
M. Guy Allouche.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Lors de la discussion de l'amendement précédent, j'ai dit ce que je pensais de
la présence des parlementaires dans toutes les commissions départementales. Là,
le cas est tout de même différent. Des contrats de plan Etat-région, il y en a
une fois tous les quatre ou cinq ans.
M. Alain Vasselle.
Sept ans !
M. Guy Allouche.
Leur durée est de sept ans, mais je ne tiens compte que de l'espace de temps
entre la fin de la discussion et l'application.
Il ne me paraît pas inutile que les parlementaires soient associés, sous une
forme qu'il conviendra de définir, à la réflexion sur les contrats de plan
Etat-région, les contrats d'agglomération ou autres.
Si le parlementaire est conseiller général ou conseiller régional, il
participera à leur élaboration au sein de son assemblée ; c'est évident ! Quant
au tiers ou au quart, au maximum, des parlementaires qui n'ont pas d'autre
fonction de ce type, ils doivent être associés à la réflexion, car cela peut
avoir son utilité, au sein du Parlement, au regard de l'aménagement du
territoire.
C'est la raison pour laquelle je m'oppose à la suppression de l'article.
Cela étant, il va sans dire, mes chers collègues, que je n'approuve pas du
tout les jugements de valeur qui sont portés sur les travaux de l'Assemblée
nationale. Il ne me plairait pas que nos collègues députés disent la même chose
sur le Sénat. Par conséquent, évitons...
(Exclamations sur les travées du
RPR.)
M. Jean-Patrick Courtois.
Ils le font !
M. Alain Vasselle.
Ils ne se gênent pas vis-à-vis de nous !
M. Guy Allouche.
Lorsqu'on critique quelqu'un, on ne fait pas comme lui !
M. Philippe Arnaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud.
Pour ma part, je voterai l'amendement.
En effet, contrairement à ce qui vient d'être dit, le parlementaire en tant
que tel n'a aucune légitimité à siéger dans des commissions ou dans des
instances de négociation de contrats de plan, de contrats de territoire, de
contrats de pays, de contrats d'agglomération ou autres.
Le conseiller général qui y siège tire sa légitimité d'une élection. La vie
des collectivités territoriales est régie par une démocratie locale, et seule
l'élection donne la légitimité.
Et si vous estimez qu'il est important que les parlementaires soient associés
à ces négociations, il faut leur permettre d'être des élus locaux et, ainsi,
d'assumer les missions de l'exécutif local !
M. Guy Allouche.
C'est le cas !
M. Philippe Arnaud.
Par l'élection !
M. Guy Allouche.
Ils peuvent être aussi conseiller général !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4
quater
est supprimé.
Article 4
quinquies
M. le président.
« Art. 4
quinquies
. - La dernière phrase de l'article 34 de
l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois
de finances est ainsi rédigée :
« Les ouvertures de crédits opérées par décrets d'avances et les annulations
opérées par arrêtés sont communiquées pour avis avant leur publication à la
commission des finances de chacune des assemblées. »
Par amendement n° 20, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Par cet amendement, la commission des lois propose de
supprimer un nouvel article du projet de loi organique, mais pour des motifs
différents de ceux que j'ai déjà eu l'occasion d'avancer.
D'abord, je note qu'un avis sur l'article 4
quinquies
relève davantage
des compétences de la commission des finances. J'ai donc pris contact avec ses
membres et j'ai constaté qu'ils n'étaient pas très favorables à cette
disposition.
Cet article vise en effet à substituer une sorte d'avis préalable à un pouvoir
de ratification des commissions des finances de chacune des assemblées en
matière d'ouvertures de crédits.
Par ailleurs, de manière générale et une fois de plus, cette disposition est
manifestement dépourvue de tout lien avec le projet de loi organique que nous
examinons.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement se rallie aux conclusions de M.
Larché. En effet, il s'agit ici de dispositions n'ayant pas de lien avec le
projet de loi.
En outre, le principe de séparation des pouvoirs législatif et exécutif impose
que l'on respecte les modalités d'exercice du pouvoir réglementaire par le
Gouvernement, lesquelles, vous le savez, ne peuvent comporter de contrôle
a
priori
par un organe du Parlement. Le contrôle est prévu, mais il ne
s'exerce pas dans ces conditions.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 20.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4
quinquies
est supprimé.
Article 5
M. le président.
« Art. 5. _ La présente loi organique est applicable dans les territoires
d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte. »
Par amendement n° 21, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit cet article :
« La présente loi organique est applicable en Polynésie française, en
Nouvelle-Calédonie, dans les îles Wallis-et-Futuna et à Mayotte. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Il s'agit d'une simple modification rédactionnelle. En effet,
nous ne sommes pas en désaccord fondamental avec la proposition de l'Assemblée
nationale, puisque nous énumérons, dans notre amendement, les territoires
d'outre-mer en tant que tels pour le motif que la Nouvelle-Calédonie, dans la
mesure où le statut sera appliqué - nous préjugeons un peu ce qui sera très
vraisemblablement décidé - n'est déjà plus un véritable territoire d'outre-mer.
Par ailleurs, je ne sais pas si, demain, la Polynésie française sera encore un
territoire d'outre-mer ; elle aura peut-être un statut différent.
La catégorie générique « territoire d'outre-mer » ne correspond plus aux
situations que l'on a voulu prévoir. Nous proposons au contraire, une
énumération : « en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, dans les îles
Wallis-et-Futuna et à Mayotte ». Il s'agit d'une modification d'ordre purement
technique.
D'ailleurs, monsieur le président, si vous en étiez d'accord, nous pourrions
accélérer le débat, car vous noterez avec moi que les amendements n°s 21 à 27
concernent des aménagements techniques pour l'application du dispositif aux
territoires d'outre-mer qui subsistent, à la Nouvelle-Calédonie, à Mayotte et à
Saint-Pierre-et-Miquelon, et ne pose aucun problème de fond.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement n'a pas un avis identique sur
l'ensemble de ces amendements. Mais, sur l'amendement n° 21, l'avis du
Gouvernement, tout particulièrement celui du secrétaire d'Etat à l'outre-mer,
est favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 5 est ainsi rédigé.
Article 6
M. le président.
« Art. 6. _ L'article LO 328-2 du code électoral est complété par deux alinéas
ainsi rédigés :
« Pour l'application des dispositions de l'article LO 141, les fonctions de
président du conseil général de Saint-Pierre-et-Miquelon sont assimilées aux
fonctions de président du conseil général d'un département.
« Pour l'application de l'article LO 141-1, le mandat de conseiller général de
Saint-Pierre-et-Miquelon est assimilé au mandat de conseiller général d'un
département. »
Par amendement n° 22, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit cet article :
« L'article LO 328-2 du code électoral est complété
in fine
par un
alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application de l'article LO 141, le mandat de conseiller général de
Saint-Pierre-et-Miquelon est assimilé au mandat de conseiller général d'un
département. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
La situation est assez simple : l'amendement n° 22 est
la conséquence de l'amendement n° 4 de la commission des lois, auquel le
Gouvernement n'a pas souscrit. Par cohérence, le Gouvernement émet donc un avis
défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 6 est ainsi rédigé.
Article 7
M. le président.
« Art. 7. _ L'article LO 141-1 du code électoral est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« Le mandat de conseiller général de Mayotte est, pour l'application du
présent article, assimilé au mandat de conseiller général d'un département.
»
Par amendement n° 23, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Il est inséré, dans le chapitre II du titre II du livre III du code
électoral, un article LO 334-7-1 ainsi rédigé :
«
Art. LO 334-7-1. -
Pour l'application de l'article LO 141, le mandat
de conseiller général de Mayotte est assimilé au mandat de conseiller général
d'un département. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Sur la forme, le Gouvernement ne présente pas
d'objections à l'insertion d'un tel article consacré à Mayotte dans le code
électoral.
Toutefois, la rédaction retenue par la commission n'est cohérente qu'avec sa
propre version modifiée de l'article LO 141 du code électoral, laquelle ne fait
plus référence à la limitation du cumul du mandat parlementaire et des
fonctions exécutives locales.
Pour cette raison, le Gouvernement ne peut être favorable à l'amendement n°
23.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé.
Article 8
M. le président.
« Art. 8. _ Il est inséré, dans le chapitre IV du titre II du livre Ier du
code électoral, un article LO 141-2 ainsi rédigé :
«
Art. LO 141-2
. _ Pour l'application de l'ensemble des dispositions
instituant des incompatibilités entre certains mandats électoraux ou fonctions
électives, les mandats de membre des assemblées de province du territoire de la
Nouvelle-Calédonie, de membre de l'assemblée de la Polynésie française et de
membre de l'assemblée territoriale des Iles Wallis-et-Futuna sont assimilés au
mandat de conseiller général d'un département.
« Pour l'application des mêmes dispositions, les fonctions de président des
assemblées de province du territoire de la Nouvelle-Calédonie et celles de
président ou de membre du gouvernement de la Polynésie française sont
assimilées aux fonctions de président du conseil général d'un département. »
Par amendement n° 24, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Après l'article 6 de la loi n° 52-1175 du 21 octobre 1952 relative à la
composition et à la formation de l'assemblée territoriale de la Polynésie
française, il est inséré un article 6-1 ainsi rédigé :
«
Art. 6-1. -
Pour l'application de l'ensemble des dispositions
instituant des incompatibilités entre certains mandats électoraux, le mandat de
conseiller territorial de la Polynésie française est assimilé au mandat de
conseiller général d'un département.
« Si le candidat appelé à remplacer un conseiller territorial en application
du deuxième alinéa de l'article 3 se trouve dans l'un des cas
d'incompatibilités mentionnés à l'alinéa précédent, il dispose d'un délai de
trente jours à compter de la vacance pour faire cesser l'incompatibilité, en
démissionnant de l'un des mandats de son choix. A défaut d'option dans le délai
imparti, le remplacement est assuré par le candidat suivant dans l'ordre de la
liste. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement soulève les mêmes divergences entre le
Gouvernement et la commission !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 8 est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l'article 8
M. le président.
Par amendement n° 25, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose
d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa de l'article 13 de la loi organique n° 96-312 du 12 avril
1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française est ainsi rédigé :
« Pour l'application de l'ensemble des dispositions instituant des
incompatibilités entre certaines fonctions électives, les fonctions de
président du gouvernement de la Polynésie française ou de membre du
gouvernement de la Polynésie française sont assimilées aux fonctions de
président du conseil général d'un département. Ces fonctions sont en outre
incompatibles avec la qualité de conseiller général, conseiller régional, de
membre d'une assemblée d'un territoire d'outre-mer ou de membre de l'exécutif
d'un autre territoire d'outre-mer. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi organique, après l'article 8.
Par amendement n° 26, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose
d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 13-1 de la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux
îles Wallis-et-Futuna le statut de territoire d'outre-mer, il est inséré un
article 13-1-1 ainsi rédigé :
«
Art. 13-1-1.
- Pour l'application de l'ensemble des dispositions
instituant des incompatibilités entre certains mandats électoraux, le mandat de
membre de l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna est assimilé au
mandat de conseiller général d'un département. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi organique, après l'article 8.
Par amendement n° 27, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose
d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le troisième alinéa de l'article 78 de la loi n° 88-1028 du 9 novembre
1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à l'autodétermination de
la Nouvelle-Calédonie en 1998 est ainsi rédigé :
« Pour l'application de l'ensemble des dispositions instituant des
incompatibilités entre certains mandats électoraux, le mandat de membre d'une
assemblée de province est assimilé au mandat de conseiller général d'un
département. »
« II. - Dans le quatrième alinéa de l'article 78 de la loi n° 88-1028
précitée, les mots : "quinze jours" sont remplacés par les mots : "trente
jours". »
« III. - Le cinquième alinéa de l'article 78 de la loi n° 88-1028 précitée est
ainsi rédigé :
« Si le candidat appelé à remplacer un membre d'une assemblée de province se
trouve dans l'un des cas d'incompatibilité avec des mandats électoraux
mentionnés au présent article, il dispose d'un délai de trente jours à compter
de la vacance pour faire cesser l'incompatibilité, en démissionnant de l'un des
mandats de son choix. A défaut d'option dans le délai imparti, le remplacement
est assuré par le candidat suivant dans l'ordre de la liste. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi organique, après l'article 8.
Article 9
M. le président.
« Art. 9. _ L'article 4 de la loi organique n° 85-1405 du 30 décembre 1985
tendant à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions
électives par les parlementaires ainsi que le deuxième alinéa de l'article LO
139 du code électoral sont abrogés. »
- (Adopté.)
Article 10
M. le président.
« Art. 10. _ Quiconque se trouve, à la date de la publication de la présente
loi, dans l'un des cas d'incompatibilité qu'elle institue peut continuer
d'exercer les mandats et fonctions qu'il détient jusqu'à la date du prochain
renouvellement général de l'Assemblée nationale ».
Par amendement n° 28, M. Jacques Larché, au nom de la commission des lois,
propose de rédiger ainsi cet article :
« Tout parlementaire qui se trouve, à la date de publication de la présente
loi, dans l'un des cas d'incompatibilité qu'elle institue doit faire cesser
cette incompatibilité au plus tard lors du renouvellement de son mandat
parlementaire.
« Le parlementaire représentant au Parlement européen à la date de publication
de la présente loi doit faire cesser cette incompatibilité au plus tard lors du
renouvellement de son mandat européen ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Nous proposons que tout parlementaire qui se trouve, à la
date de publication de la présente loi, dans l'un des cas d'incompatibilité que
celle-ci institue doit faire cesser cette incompatibilité au plus tard lors du
renouvellement de son mandat parlementaire.
En revanche, l'article 10 adopté par l'Assemblée nationale permet au
parlementaire se trouvant à la date de publication de la loi dans un cas
d'incompatibilité de continuer d'exercer ses mandats et ses fonctions jusqu'à
la date de la prochaine élection législative.
Cette disposition est parfaitement adaptée à la situation des députés, mais
elle n'est pas adaptée à celle des sénateurs. Pour quelle raison, en effet,
l'incompatibilité jouerait-elle au moment où cesserait le mandat des députés
?
Nous proposons donc une formulation beaucoup plus large et beaucoup plus
cohérente, puisqu'elle lie l'intervention de l'incompatibilité, pour les
députés et pour les sénateurs, à la fin de leur mandat de parlementaire.
En outre, nous avons prévu un dispositif applicable aux parlementaires
européens et qui prévoit de faire cesser l'incompatibilité - notamment avec le
mandat national - au plus tard lors du prochain renouvellement de son mandat
européen.
Or cela pose un problème, car si la loi n'est pas votée ou, plus précisément,
si elle n'est pas encore votée lorsque les élections européennes
interviendront, au mois de juin prochain, le régime des incompatibilités ne
s'appliquera pas.
Par conséquent, si d'ici au mois de juin...
M. Jean-Jacques Hyest.
Ils auront gagné un mandat !...
M. Jacques Larché,
rapporteur.
... la loi organique n'est pas votée, il faudrait - et c'est
en cela peut-être que les partis pourraient retrouver une certaine utilité -
que, pour la composition des listes européennes, ils prennent les précautions
utiles pour empêcher qu'y figurent des parlementaires nationaux.
C'est le voeu que je forme si, d'aventure, les dispositions que nous prévoyons
ne sont pas encore applicables.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est attaché au dispositif d'entrée en
vigueur progressive des mesures de non-cumul, il ne s'est donc pas engagé dans
la modification du texte transmis au Sénat.
Toutefois, il émet la même critique à l'égard de la rédaction que propose le
Sénat, car l'entrée en vigueur des règles de limitation du cumul serait, à ses
yeux, trop lente. Ainsi, pour les sénateurs élus en septembre 1998, l'effet du
texte n'interviendrait que dans neuf ans, alors que, pour les représentants au
Parlement européen, l'entrée en vigueur interviendrait au mois de juin
prochain.
Le Gouvernement préfère donc son dispositif initial qui prévoyait une
progressivité raisonnable. C'est la raison pour laquelle il n'est pas favorable
à l'amendement n° 28 présenté par la commission des lois.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ce que vous appelez une «
progressivité raisonnable » va à l'encontre des principes qui découlent de
l'exercice d'un des mandats que l'on possède au moment où interviennent des
incompatibilités.
Un sénateur qui a été élu au mois de septembre dispose d'un mandat de neuf
ans, conformément à la Constitution, et l'on ne voit pas comment il pourrait,
en cours de mandat, être frappé d'une incompatibilité.
M. Jean-Jacques Hyest.
Un autre pourrait le reprendre !
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Il ne le pourrait pas ! L'incompatibilité interviendrait à la
fin de son mandat, en fonction des mandats qu'il aurait progressivement acquis,
cela va de soi.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
La nouvelle rédaction de l'article 10 renvoie le
constat de l'incompatibilité, même pour des mandats acquis pendant le mandat
détenu par le parlementaire, au renouvellement de son mandat parlementaire.
Pour les parlementaires nationaux, l'étalement dans le temps serait trop long,
alors que, inversement, pour les parlementaires européens, l'application serait
beaucoup plus rapide.
Le texte initial du projet de loi organique paraît donc au Gouvernement plus
équilibré. C'est pourquoi il est défavorable à l'amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 10 est ainsi rédigé.
Intitulé du projet de loi organique
M. le président.
Par amendement n° 29, M. Jacques Larché, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit l'intitulé du projet de loi organique :
« Projet de loi organique relatif aux incompatibilités entre mandats
électoraux. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je sais bien - M. Queyranne l'a fait remarquer - que le terme
« cumul » est traditionnellement utilisé dans les textes. Mais, à l'époque, il
n'avait pas une connotation quelque peu péjorative : il n'était alors pas
question de « cumulards ».
Pour certains de nos compatriotes - plusieurs de nos collègues l'ont relevé -
le « cumulard » est celui qui non seulement exerce plusieurs mandats, mais, de
plus, perçoit des rémunérations excessives. Nous savons bien que ce n'est pas
le cas, l'emploi de ce terme en est d'autant plus désagréable.
Je propose donc que ce texte s'intitule : « Projet de loi organique relatif
aux incompatibilités entre mandats électoraux ». Cette rédaction est tout à
fait conforme à la position qui a été la nôtre et qui a consisté à nous en
tenir rigoureusement au problème des incompatibilités et, par voie de
conséquence, à écarter toutes les dispositions plus ou moins bienvenues issues
des travaux de l'Assemblée nationale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement tient à ne pas porter la
responsabilité du mot « cumul », qui a été introduit dans notre législation par
une ordonnance de 1958.
M. Christian Bonnet.
Oui, mais à l'époque, il n'y avait pas de médias !.
M. Guy Allouche.
Il n'y avait qu'un simple ministère de l'information !
(Sourires.)
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Il n'y a donc pas d'innovation. Le problème que pose
l'amendement n° 29 tient à la connotation négative du mot « cumul » dans
l'opinion publique, ...
M. Alain Vasselle.
Absolument !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
... à cause de son dérivé « cumulard ». Ce
raisonnement me rappelle ce que disent les indépendantistes de ma propre
région, qui veulent être désormais appelés « Savoisiens » et non plus «
Savoyards » compte tenu de la connotation négative que revêt la terminaison «
ard ». Je vois que le Sénat a de bonnes références !
Mais le fond du problème est le suivant : il faut faire une distinction entre
les mandats électoraux et les fonctions électives. Le texte que retient la
commission vise non plus les fonctions électives, mais uniquement les
incompatibilités entre mandats électoraux. Or les fonctions exécutives ne sont
pas des mandats électoraux ; elles sont des fonctions électives.
Pour cette raison, le Gouvernement garde sa préférence pour sa rédaction.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé du projet de loi organique est ainsi rédigé.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi organique, la parole est
à M. Hyest pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest.
Monsieur le président, il était utile d'écrémer le texte adopté par
l'Assemblée nationale d'un certain nombre de dispositions qui ne concernaient
pas le fond du débat, et cela a d'ailleurs été reconnu sur toutes les
travées.
De temps en temps ont lieu des périodes de purification. On en a connu sous
d'autres majorités. Je me rappelle que lors de l'examen des lois sur le
financement des partis politiques et des campagnes électorales, on a tellement
fait de purification que l'on n'est plus capable d'appliquer les textes. Tout
le monde est bien gêné et cela devient d'une rare stupidité !
Cela se produit lorsque l'on pense que l'opinion publique est sensible. Mais
rien n'est pire que de faire des lois de circonstance !
L'opinion publique a, paraît-il, décidé que tout ce qui relevait de la
participation des parlementaires à des exécutifs locaux était tout à fait
répréhensible, qu'il valait mieux être des députés ou des sénateurs éthérés
plutôt que sur le terrain.
Néanmoins, le problème se pose de savoir si, à l'avenir, on pourra
effectivement exercer à la fois un mandat parlementaire et des mandats
exécutifs locaux lourds. Si la décentralisation se fait jusqu'au bout, ce que
nous souhaitons - et nous aurons un débat sur ce sujet la semaine prochaine -
si l'on assure aussi aux élus locaux un véritable statut leur permettant
d'exercer à temps plein leur mandat, je crois que la question pourra être
réexaminée.
Le texte qui va sans doute être voté par le Sénat, notamment l'article 4, qui
est le plus important, va permettre de faire réfléchir l'ensemble des
parlementaires qui ne peuvent pas se contenter de nous dire que le Sénat est
conservateur, mais qui doivent prendre leurs responsabilités aussi.
De plus, comme un certain nombre de débats vont s'ouvrir, tant sur la
décentralisation que sur le statut des élus, ce texte constitue, je crois, une
bonne position d'attente permettant de continuer à réfléchir à ce problème
important.
De toute façon, je pense que, dans notre pays, non seulement les médias, mais
l'opinion publique évolueront.
Les parlementaires se consacreront davantage à leur mandat, surtout si l'on
réforme les méthodes, si nous devenons un vrai parlement, c'est-à-dire un
parlement qui ne soit pas soumis forcément, comme on le voit régulièrement, à
une majorité ou à un gouvernement.
Notre Constitution, qui était prévue pour un régime parlementaire - il est
vrai qu'elle a été aménagée au fil des années -, a néanmoins permis au
Gouvernement de s'arroger sans cesse plus de pouvoirs, ne laissant plus au
Parlement que sa mission de contrôle.
Pour tous ces motifs, je pense qu'il est sage, aujourd'hui, de voter le texte
tel qu'il a été amendé par la commission des lois. Bien entendu, un certain
nombre de nos collègues souhaitent que l'on aille plus loin dans la limitation
du cumul des mandats. C'est une réflexion que nous devons avoir, mais il n'est
interdit à personne de donner le bon exemple, ...
M. Alain Vasselle.
Tout à fait !
M. Jean-Jacques Hyest
... en commençant par s'appliquer à soi-même les règles que l'on voudrait
imposer aux autres.
Pour les parlementaires, c'est aussi une question d'éthique personnelle de
savoir s'ils peuvent accomplir effectivement les mandats divers qu'ils
acquièrent ou qu'ils ont initialement reçus.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
La loi du 30 décembre 1985 avait permis de supprimer certains excès en matière
de « compatibilité de mandats », formule qu'avec le rapporteur je préfère de
beaucoup à celle de cumul, entachée d'une connotation péjorative.
Fallait-il aller plus loin ? La question se pose. Bien évidemment, l'opinion
publique, souvent abusée par des manoeuvres démagogiques, s'est enflammée,
dit-on, contre l'accumulation d'un trop grand nombre de mandats par un même
élu.
Il n'est pas sûr que l'opinion publique ait toujours été bien informée et
qu'elle n'ait pas confondu cumul des mandats et cumul de rémunérations.
M. Alain Vasselle.
C'est vrai !
M. Patrice Gélard.
Il n'est pas évident que l'opinion publique ait été informée sur l'inexistence
toujours plus pesante d'un véritable statut de l'élu local.
Il n'est pas évident que l'opinion publique soit suffisamment au courant de
notre véritable système de décentralisation, qui impose en fait un partenariat
entre l'élu et les organisations, administrations locales et nationales,
assurant ainsi une bonne communication entre les deux échelons.
Il est vrai que sur ce texte qui nous est aujourd'hui soumis, la Haute
Assemblée dispose des mêmes pouvoirs que l'Assemblée nationale, puisqu'il
s'agit d'une loi organique concernant les députés comme les sénateurs. C'est
notre Constitution.
Il n'est pas bon de répéter que la Haute Assemblée se livre dans ce domaine à
des blocages. Nous ne bloquons rien ! Nous n'exerçons que nos pouvoirs, et
encore, en la circonstance le Sénat, sur ce projet de loi, se veut mesuré,
attentif au bon fonctionnement des institutions et ouvert à la
modernisation.
La position du groupe du RPR est claire, pour la plus grande majorité de ses
membres. Nous proposons en effet la compatibilité entre un mandat national et
un mandat exécutif local. Nombreux sont ceux, au sein de notre groupe - ce
n'est pas la majorité, bien évidemment - qui regrettent que le Sénat ait
atténué le dispositif pour les communes de moins de 3 500 habitants. Il y a là
une ouverture pour une navette ultérieure.
Le sénateur, le député, le maire, le président d'une assemblée locale sont des
éléments fondamentaux de notre vie politique. Ils servent les régions, les
départements, les communes, comme leur expérience de terrain enrichit leur
travail de législateurs.
Si l'on ne veut pas que nos deux chambres deviennent des chambres de
technocrates coupées des réalités, coupées du terrain, il faut permettre aux
élus nationaux de garder le contact avec ces réalités quotidiennes, alors même
qu'ils traitent de grandes questions d'intérêt général, à moins de changer
complètement notre système constitutionnel et de faire en sorte que la
décentralisation devienne une véritable décentralisation, voire un fédéralisme.
Nous en sommes loin.
Tant que nous restons dans la logique des institutions qui sont les nôtres,
nous devons pouvoir maintenir ce que nous avons proposé. C'est là respecter un
équilibre qui ne peut qu'emporter l'adhésion du groupe du RPR. C'est la raison
pour laquelle nous voterons le texte modifié par les amendements proposés par
notre rapporteur.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des
Républicains Indépendants.)
M. Michel Duffour.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Dans son exposé, tout à l'heure à la tribune, M. Braye, ironisant sur le parti
communiste français, a vu des « contorsions » dans notre attitude. Je tiens à
lui dire qu'il faut prendre grand soin des arguments des uns et des autres, y
compris de ceux de ses adversaires, et suivre les raisonnements qu'ils
tiennent.
Je rappelle à la Haute Assemblée, vous l'avez noté, que nous sommes en plein
accord avec l'esprit du texte gouvernemental sur le non-cumul des mandats.
Mon collègue M. Robert Bret a indiqué hier que ce projet de loi organique,
évidemment détaché d'autres aspects institutionnels, nous semblait limité dans
ses effets, puisque nous souhaitons aussi que le débat ait lieu sur les modes
de scrutin, sur le fonctionnement du Parlement et sur le statut de l'élu.
Mais l'esprit même du texte nous convient pleinement. Nous pensons que la
tâche de parlementaire est une tâche lourde qui demande et demandera de plus en
plus de temps à ceux qui l'effectueront.
Au sein même de la majorité du Sénat, M. Christian Poncelet, dans son discours
d'investiture, a par exemple insisté sur la volonté de la Haute Assemblée de
multiplier les commissions d'enquête.
Nous réfléchissons, les uns et les autres, aux liens nouveaux à instaurer
entre les assemblées parlementaires et les institutions européennes.
Tout cela représente un travail considérable et demande donc, de la part du
législateur, beaucoup de temps disponible.
Est-il possible de mener cette tâche à bien sans un ancrage local ? Nous
pensons que les décideurs, et encore plus les décideurs politiques, doivent
être au contact de la réalité quotidienne, d'où la nécessité d'un ancrage. Dans
le projet de loi, tel qu'il a été présenté par le Gouvernement, cela n'est
évidemment pas exclu, mais le texte insiste fortement sur la possibilité, pour
le parlementaire, de détenir des mandats locaux.
Et tout ne tourne pas seulement autour de l'exécutif. Il est tout à fait
possible d'être un fin connaisseur de la réalité locale, d'être au contact de
ceux qui vous entourent, sans exercer la première fonction au niveau de la
région, du département ou de de la commune.
Bien évidemment, nous souhaitons que la discussion se poursuive. Nous
insistons auprès du Gouvernement pour que l'esprit du texte soit conservé ;
cela nous paraît tout à fait essentiel.
Par conséquent, nous voterons contre la proposition présentée par M. le
rapporteur.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Peyrefitte.
M. Alain Peyrefitte.
J'en demande pardon à mes amis de groupe et à mes amis de la majorité
sénatoriale mais, en conscience, je ne peux pas émettre le vote qu'ils se
disposent à émettre eux-mêmes.
La loi de 1985 représentait un pas dans la bonne direction, un pas important :
elle préparait les esprits à un changement de nos moeurs politiques, qui était
nécessaire.
Treize ans après, les esprits sont mûrs, les esprits ont évolué, et il n'est
plus souhaitable, me semble-t-il, de trouver des accommodements pour retarder
le jour où sera supprimé non pas le cumul des mandats, mais le cumul des
fonctions.
Ce qui est important, ce n'est pas que l'on puisse être simultanément
parlementaire et conseiller municipal, conseiller général ou conseiller
régional ; cela ne présente aucun inconvénient. En revanche, ce qui présente un
inconvénient sérieux, c'est le cumul des fonctions de parlementaire et de
président d'un exécutif local.
M. Jacques Chaumont.
Très bien !
M. Alain Peyrefitte.
Le cumul des fonctions est une fâcheuse exception française. Parlez-en à des
parlementaires anglais, allemands, italiens ou scandinaves : ils n'en
reviennent pas !
M. Guy Allouche.
Très bien !
M. Alain Peyrefitte.
C'est une étrange spécialité de notre pays dont, me semble-t-il, nous n'avons
pas lieu de nous féliciter.
Nos collègues étrangers estiment spontanément que la séparation des pouvoirs
exige, en corollaire, la séparation du niveau national et du niveau local.
Cherchez bien : il n'y a pas de démocratie au sens où on l'entend en Occident,
de démocratie véritablement représentative et décentralisée qui accepte, comme
nous le faisons, cette multiplicité de fonctions.
Tant que le cumul des fonctions n'est pas interdit par la loi, il est
obligatoire dans les faits.
M. Guy Allouche.
Eh oui !
M. Alain Peyrefitte.
En effet, le parlementaire qui n'exercerait pas un mandat local serait en
position d'infériorité par rapport à son concurrent qui, à l'élection suivante,
pourrait bénéficier du rayonnement que lui apporte un tel mandat.
La question est donc simple : nous sommes prisonniers d'un système qui se
soutient par lui-même indéfiniment tant que la loi ne l'interdit pas. C'est
ainsi que nous confondons les niveaux local et national et que nous confondons
les missions.
Bien sûr, il est naturel qu'un mandat local conduise à un mandat national,
qu'un mandat moins important conduise à un mandat plus important. C'est ce que
l'on appelait, dans la Rome antique, au temps de la République, le
cursus
honorum.
Mais à partir du moment où un mandat national est acquis, il n'est
pas logique, il n'est pas naturel de ne pas se contenter d'un mandat électif
local comme celui de conseiller municipal, de conseiller général ou de
conseiller régional et de vouloir, en plus, disposer de ce puissant moyen
d'action qu'est la présidence d'un exécutif.
En 1958, souvenez-vous, lors de l'élaboration de la Constitution, la classe
politique s'était fortement émue de l'article 23, qui disposait que l'on ne
pourrait pas à la fois être membre du gouvernement et parlementaire. On disait
que c'était absolument contraire aux principes mêmes de la République. Or c'est
tout à fait entré dans les moeurs ; depuis lors, personne ne s'en indigne et
tout le monde a trouvé que l'existence des suppléants était fort utile.
Le fait qu'une fonction exécutive locale soit exercée par un parlementaire
signifie que l'administration ou le cabinet de celui-ci fait à sa place ce
qu'il devrait faire, c'est-à-dire prend les décisions à sa place.
M. Guy Allouche.
Très juste !
M. Alain Peyrefitte.
Si ce parlementaire est à Paris pour légiférer et, mes chers collègues, pour
contrôler le Gouvernement, ...
M. Guy Allouche.
Tout à fait !
M. Alain Peyrefitte.
... ce que l'on oublie trop souvent et ce que le Parlement ne fait pas
suffisamment, si donc il est à Paris pour faire son travail de parlementaire,
il ne peut pas être en même temps sur place pour diriger un exécutif local.
Voilà pourquoi je pense que le cumul des mandats est un moyen de perpétuer
chez nous le phénomène bureaucratique, puisque l'on finit par donner à des
fonctionnaires des responsabilités pour lesquelles ils ne sont pas faits et que
devraient seuls assumer les élus.
Ce raisonnement, puis-je le rappeler, que j'ai exposé opiniâtrement depuis
vingt-cinq ans dans nombre de travaux et ouvrages, notamment dans
Le Mal
français,
en 1976, ce raisonnement donc, chers collègues et amis, ne perd
aucunement sa valeur à mes yeux à partir du moment où il est pris en charge par
un gouvernement que, d'ordinaire, je combats.
Voilà pourquoi je vais devoir, à mon grand regret, voter contre le texte
présenté par la commission des lois.
(Très bien ! et applaudissements sur
certaines travées du RPR et du RDSE, ainsi que sur les travées socialistes et
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Bien entendu, nous voterons également contre le texte issu des travaux de
notre assemblée.
Nous sommes effectivement favorables à la limitation du cumul des mandats
électoraux et des fonctions. Cela correspond à une aspiration forte de nos
concitoyens.
Il s'agit de réhabiliter l'image des hommes politiques, suspectés par
l'opinion publique de vouloir concentrer dans les mêmes mains toujours plus de
pouvoirs, mais aussi toujours plus d'indemnités, plus de rémunérations et plus
de moyens.
(Protestations sur les travées du RPR et de l'Union
centriste.)
Je ne dis pas que c'est la réalité, je dis comment nos citoyens la ressentent
!
M. Henri de Richemont.
C'est parce que vous la présentez comme telle !
M. Alain Vasselle.
Le traitement est plafonné !
Mme Dinah Derycke.
Le projet du Gouvernement devait permettre un renouvellement des élus en même
temps que leur féminisation ; le prochain projet de loi organique sur la parité
nous fournira l'occasion d'avancer dans cette dernière voie.
Après tant d'années de pratique du cumul, tant d'années de concentration des
pouvoirs et de centralisation de notre système politique, sans doute avons-nous
tous des difficultés à imaginer un autre mode de fonctionnement de notre
démocratie. Cependant, notre mode de fonctionnement actuel, comme le disait à
l'instant M. Peyrefitte est tout à fait exceptionnel, et, dans les autres pays
d'Europe, on a l'habitude de ne pas confondre les différentes fonctions !
Si nous avons beaucoup de mal à nous projeter dans un avenir dans lequel il
n'y aurait plus de cumul des mandats, c'est peut-être de notre part un manque
d'imagination quant à ce que pourrait être le rôle du parlementaire, rôle qui
consiste bien sûr à voter la loi - c'est le premier rôle du parlementaire comme
le rappelle sans cesse M. Guy Allouche - mais également à contrôler
l'application de la loi ; et aussi, et cela serait sans doute très souhaitable,
à susciter des réformes, notamment dans le domaine des droits sociaux.
Le projet de loi n'interdisait pas l'ancrage local des parlementaires
puisqu'il leur permettait d'être en même temps conseiller municipal, conseiller
général ou conseiller régional. Mais, de toute façon, il nous faudra modifier
notre conception de l'ancrage local et ne pas la limiter aux seuls mandats
électoraux. L'ancrage d'un parlementaire peut également se faire par une
participation à la vie quotidienne de nos concitoyens. En effet, le décalage
entre les citoyens et les hommes politiques vient peut-être aussi du fait que,
occupés par leurs diverses fonctions, ces derniers ne sont pas suffisamment
impliqués dans la vie concrète. L'ancrage d'un parlementaire peut très bien
être assuré par la présidence d'associations, soit locales, soit nationales,
qui travaillent sur le terrain. Nous devrons donc, à terme, faire ce travail
d'imagination, la limitation du cumul des mandats étant inéluctable, qu'on le
veuille ou non, pour définir un nouveau rôle du parlementaire qui soit plus
près des préoccupations de chacun.
Ainsi, ce projet de loi qui visait au renouvellement de la classe politique,
au renouvellement de la vie politique, allait même jusqu'à promouvoir le
renouveau de l'homme politique. Voilà pourquoi nous voterons contre ce qu'il
est devenu après son passage dans notre assemblée.
Bien entendu, nous espérons qu'après les différentes discussions, les
différentes navettes, nos collègues de la majorité sénatoriale voteront enfin
le texte tel qu'il avait été déposé.
(Applaudissements sur les travées
socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud.
Je serai bref, monsieur le président, car tout a été dit. A l'occasion de ce
débat, de nombreux arguments ont été développés, y compris d'ailleurs certains
arguments fallacieux, qu'il serait dangereux, me semble-t-il, de trop
répéter.
Il faut en effet cesser de faire croire à nos concitoyens que l'un des moteurs
- voire le moteur essentiel - qui guiderait l'action des élus est leur propre
intérêt. Cela est très dangereux pour la démocratie.
(Murmures sur les
travées socialistes.)
A mon avis, il conviendrait d'éviter de mettre en avant ce type d'arguments,
qui ne sont pas fondés mais dont, vous le savez très bien, la presse se
régale.
Pour ma part, je suis très gêné dans cette affaire, car j'ai des convictions
personnelles, qui n'engagent pas mes collègues, mais que j'ai, alors que je ne
suis pas en fin de carrière, déjà mises en pratique.
Ainsi, je suis pour la limitation des cumuls de fonctions, notamment des
grandes fonctions exécutives régionales et départementales, qui me semblent
effectivement incompatibles avec un mandat parlementaire.
En revanche, je suis foncièrement, de par mon expérience, très attaché à ce
que les parlementaires aient un ancrage dans la vie locale de façon à nouer en
permanence un lien direct avec un échelon d'administration locale.
Un tel lien direct permet au législateur d'expérimenter lui-même un certain
nombre de dispositions qu'il est amené à voter, et cela me paraît, une bonne
manière de garantir la démocratie.
Par voie de conséquence, je ne peux pas approuver le projet gouvernemental
modifié par l'Assemblée nationale dont le contenu est excessif, outrancier,
caricatural. Il donne peut-être satisfaction à l'opinion publique, mais il n'a
pas grand sens.
Je ne peux pas non plus accepter le texte issu de nos débats, parce qu'il
rétablit la possibilité de cumul d'un mandat parlementaire avec la fonction de
président de conseil général ou de président de conseil régional.
Aussi, pour être cohérent avec moi-même, mes chers collègues, je
m'abstiendrai, étant entendu que mon abstention n'est pas une fuite, un manque
de courage. Je m'abstiendrai tout simplement parce que je sais que le débat
continue avec l'Assemblée nationale, que la navette va jouer son rôle, et que
nous reviendront des propositions plus conformes aux réalités, empreintes d'un
plus grand pragmatisme.
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Je voudrais tout d'abord, monsieur le président, mes chers collègues, saluer
le courage de la position défendue par notre collègue Alain Peyrefitte, en lui
faisant toutefois remarquer que cette position n'est pas du tout celle du
Gouvernement. D'ailleurs, si l'on souhaitait le suivre, c'est d'un autre projet
de loi qu'il faudrait débattre.
Si j'ai salué le courage d'Alain Peyrefitte, c'est parce que je sais combien
il est difficile d'adopter une position singulière au sein d'un groupe, je ne
peux en faire autant pour ce qui est du groupe socialiste, tant il est vrai
que, au cours de ce débat, aussi bien lors de la discussion générale que
pendant la discussion des articles, nous n'avons eu droit, du côté du parti du
Premier ministre, qu'à un monologue de M. Guy Allouche.
M. François Autain.
C'est parce qu'il est le meilleur !
M. Dominique Braye.
Je n'en ai été que plus heureux d'entendre l'explication de vote de Mme Dinah
Derycke, voilà quelques instants.
Je m'attendais pourtant à un tir groupé de la part de nos collègues
socialistes contre la position de la majorité sénatoriale. Or M. Guy Allouche
est finalement le seul à avoir pris la défense de ce projet de loi.
Il y a tout de même là quelque chose d'un peu choquant, surtout lorsqu'on
songe au manque de courage politique des députés socialistes, qui sont tous
venus nous dire qu'ils comptaient sur le Sénat pour revenir sur le texte
qu'avait adopté la majorité de l'Assemblée nationale.
Permettez-moi de vous faire part d'une petite anecdote. Un député socialiste
maire d'une ville importante de Seine-Saint-Denis - il ne s'appelle ni M.
Lebrun, ni M. Legris, ni M. Leblond
(Sourires)
- m'a communiqué la
comptabilité des heures de présence des députés dans l'hémicycle du
Palais-Bourbon selon qu'ils sont simplement députés ou également maires. Il en
ressort que les députés-maires sont plus présents que ceux qui ne sont pas
maires !
Je répète que c'est un député-maire socialiste de Seine-Saint-Denis qui a
porté ce fait à ma connaissance. C'est dire combien ce projet de loi organique
est soutenu par les membres de la majorité gouvernementale !
Non, vraiment, lorsque des dispositions aussi importantes pour notre société
sont débattues, on est en droit d'attendre de chacun qu'il fasse preuve d'un
peu plus de courage politique dans l'expression de ses véritables positions
(Protestations sur les travées socialistes),
au lieu d'attendre du Sénat
qu'il assume toutes les responsabilités.
Pour ma part, je voterai le projet de loi organique tel qu'il est issu des
travaux du Sénat, sur proposition de la commission des lois, en espérant que la
navette le fera encore un peu évoluer dans le sens que M. Gélard a indiqué tout
à l'heure.
M. le président.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod.
Comme je l'ai dit hier dans la discussion générale, je ne partage pas
l'opinion de ceux qui pourfendent d'avance le cumul d'un exécutif local et d'un
mandat parlementaire.
De nombreuses comparaisons ont été faites avec des exemples étrangers. Or, en
cette affaire, plus que jamais comparaison n'est pas raison.
A l'étranger, le non-cumul, lorqu'il est observé, n'est qu'une coutume
politique parmi d'autres. Les pays en question ne connaissent pas, en
particulier, le système d'administration hypercentralisée qui est le nôtre. On
n'y trouve pas ce représentant, ô combien puissant, du pouvoir central qu'est
le préfet. On n'y trouve pas un corps préfectoral fort de son unité, de sa
cohésion, dont la capacité à influencer le pouvoir local ne peut être
équilibrée que par l'existence de responsables locaux qui ont en même temps des
responsabilités nationales.
Par ailleurs, il est des pays dans lesquels l'interdiction du cumul de
fonctions professionnelles avec l'exercice du mandat parlementaire est
autrement plus durement observée que chez nous, spécialement pour les
professions qui dépendent de la fonction publique.
Ce n'est certainement pas dans les pays que l'on nous présente comme des
exemples à suivre que l'on aurait une Assemblée nationale composée dans la même
proportion de fonctionnaires en disponibilité ou, pis, en détachement,
susceptibles de retrouver leur poste et de reprendre le fil de leur carrière
aussitôt que, battus ou renonçant, ils auront quitté l'assemblée parlementaire
dans laquelle ils siègent.
Nos assemblées parlementaires ont bel et bien besoin de l'expérience de
personnes qui exercent aussi des responsabilités complètes à l'échelon
local.
En revanche, la commission envisage, semble-t-il, de limiter les cumuls de
fonctions exécutives dans le projet de loi ordinaire, et c'est là le point
essentiel des discussions en cours.
Voilà pourquoi je voterai le projet de loi organique tel qu'il résulte de nos
travaux.
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
En vérité, je n'avais pas prévu d'intervenir à ce stade du débat. J'avais
chargé notre collègue Mme Dinah Derycke d'expliquer notre vote, ce qu'elle a
fait excellemment. Mais je ne veux pas priver l'un des nôtres du plaisir de
m'entendre à nouveau.
(Sourires.)
Bien sûr, nous sommes favorables au projet du Gouvernement. Vous l'aurez
d'ailleurs noté, chers collègues, nous nous sommes abstenus sur l'élimination
de ce que d'aucuns appellent les « scories » ajoutées par l'Assemblée
nationale.
Dès lors, à l'évidence, nous ne pouvons approuver le texte qui a été mis au
point par la commission et que, selon toute vraisemblance, la majorité de la
Haute Assemblée va adopter.
Il n'est pas dans mes habitudes de profiter de l'intervention de l'un des
nôtres pour l'opposer au reste de son groupe ; je trouve cela discourtois.
M. Alain Joyandet.
Alors, il ne faut pas le faire !
M. Guy Allouche.
Hier, j'ai évoqué un rapport de M. Olivier Guichard datant de 1976. Dans ce
rapport, M. Guichard disait déjà que, le jour où la France serait moins
centralisée, il faudrait abandonner le cumul d'un mandat parlementaire et de
fonctions exécutives.
Je relève que notre collègue M. Alain Peyrefitte, à l'instant, n'a pas dit
autre chose. Et pourtant, chacun sait que, sur mille et un points, nous
divergeons ! Il reste que M. Peyrefitte s'est situé dans le droit-fil d'une
tradition qui, au demeurant, n'est pas la mienne.
Les travaux préparatoires de la Constitution de 1958 font apparaître que le
général de Gaulle non seulement ne voulait pas que les ministres soient
parlementaires mais souhaitait même - et je parle ici sous le contrôle de
fidèles du général - qu'ils ne soient pas maires. Certes, pour éviter les
conflits, on n'est pas allé jusque-là, mais, dans l'esprit du fondateur de la
Ve République, la fonction ministérielle excluait l'exercice de toute autre
fonction parce que la vocation d'un membre du Gouvernement est de s'intéresser
au sort du pays tout entier et non à celui de telle commune ou de tel
territoire.
Moi, je ne fais pas le procès de ceux qui ont cumulé plusieurs mandats. Ils se
sont inscrits dans un contexte politique, et il n'y a pas à leur jeter la
pierre. Je le répète, tant que, juridiquement, le cumul n'est pas interdit, il
est politiquement obligatoire.
Mais, à partir du moment où nous prenons la décision d'y mettre un terme,
progressivement, suivant le processus amorcé en 1985, on peut aborder le siècle
qui va s'ouvrir avec une nouvelle pratique.
J'ajoute, à l'intention du porte-parole - si j'en crois ses mots - du groupe
du RPR, que le groupe socialiste a fait un choix en me désignant comme le
principal orateur. En commission des lois, nous avons été plusieurs à
intervenir. Pour des raisons de temps, notamment, et eu égard au fait que j'ai
eu l'occasion de m'intéresser de plus près à certaines questions, j'ai été
désigné comme principal orateur. Ce n'est pas la première fois que notre groupe
procède ainsi et vous aurez encore souvent l'occasion de constater que, sur des
débats bien précis, nous ne désignons qu'un seul orateur.
Monsieur Braye, laissez donc le groupe socialiste gérer ses affaires comme bon
lui semble. Moi, je ne me mêle pas de ce qui se passe dans votre groupe ; je
m'en garde bien ! Sachez seulement que, chez nous, les choses se passent très
démocratiquement. A cet égard, nous pourrions même donner des leçons à d'autres
!
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Ayant siégé, compte tenu de la mauvaise organisation de nos travaux, en
commission de neuf heures trente à douze heures cinquante-cinq, puis au sein de
la délégation pour l'Union européenne de quinze heures à dix-huit heures
cinquante-cinq, je n'ai pas suivi le débat. Je ne pourrai donc pas prendre part
au vote qui va suivre.
M. le président.
La parole est à M. Louis Boyer.
M. Louis Boyer.
Le groupe des Républicains et Indépendants, dans sa grande majorité, votera ce
texte tel qu'il a été amendé par le Sénat, sur proposition du rapporteur.
En effet, nous pensons que, si des réformes étaient éventuellement
nécessaires, le Gouvernement, pour sa part, est allé beaucoup trop loin. Les
positions qu'a défendues notre rapporteur représentent un juste milieu entre le
statu quo
et des mesures définies dans la précipitation, dont on n'a
peut-être pas bien mesuré tous les effets.
Certaines assertions proférées au cours de ce débat m'ont, personnellement,
beaucoup étonné. Ainsi, on nous a dit que, si un parlementaire n'était plus que
titulaire de son mandat de député ou de sénateur, il pourrait l'exercer
pleinement. Mais, à simplement regarder les travées de cette assemblée, j'ai pu
constater que certains de nos collègues qui n'exercent que leur mandat de
sénateur n'étaient pas nécessairement les plus présents dans l'hémicycle, alors
que d'autres, qui exercent un autre mandat, éventuellement important, étaient
au contraire très présents. Il convient donc de ne pas porter des appréciations
hâtives.
En fin de compte, je ne crois pas que ce texte assurera une plus grande
présence sur les travées du Sénat, ni d'ailleurs,
a contrario,
dans les
assemblées locales.
Telle est la réflexion toute personnelle que je souhaitais ajouter à
l'explication de vote de mon groupe.
(Applaudissements sur les travées des
Républicains et Indépendants.)
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Larché,
rapporteur.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, dans mon propos liminaire, je vous annonçais que le débat que nous
abordions revêtirait une certaine importance. Au moment où nous allons le
conclure, nous pouvons constater qu'il en a bien été ainsi. En tout cas, il a
été fort suivi et, à certains moments, extrêmement vivant.
Ce débat a même parfois suscité des manifestations assez vives, sur telle ou
telle travée, les unes répondant aux autres, mais cela est dans l'ordre des
choses. Cela montre que chacun a défendu ses convictions, avec beaucoup de
franchise et d'honnêteté.
Chez certains de nos collègues s'est fait jour l'idée selon laquelle une sorte
de parlement idéal - si tant est qu'il puisse exister un parlement idéal ! -
relativement déconnecté de la réalité locale, remplirait mieux son rôle de
législateur.
Pour d'autres, dont moi, il apparaît au contraire que la pratique française
relevait d'une tradition, voire d'une véritable culture, telle que cette
relation avec la base qui nous désigne, nous donne une vision verticale nous
permettant de saisir l'ensemble de la réalité française, qui nous est chère à
tous, et d'opérer nos choix en fonction de l'appréciation que nous portons sur
cette réalité.
En tout cas, nous venons de vivre un exemple intéressant de la façon dont
l'absence de mandat local permettrait une assiduité particulièrement
remarquable... Il se trouve, de ce fait, qu'un certain nombre d'arguments qui
avaient été parfaitement développés dans le cours du débat ont été repris
in
fine.
Nous avons notamment fait justice, comme M. Paul Girod, de cette prétendue
exception française. Car cette exception française n'existe pas. Nous savons
tous que les pays latins ont très souvent des pratiques fort proches des
nôtres. Pour ma part, je n'ai jamais constaté chez nos collègues européens ou
autres l'étonnement qu'ils manifesteraient en se demandant comment nous
parvenons à accomplir cet exercice cumulé de mandats que nous ne jugeons pas
incompatibles.
Ce débat a été digne et riche. Chacun pense, bien sûr, qu'il détient la
vérité. Certains parient sur l'avenir et, nous, nous parions sur une tradition,
que nous entendons maintenir. Qu'en sera-t-il demain ? Je n'en sais rien.
L'Assemblée nationale va-t-elle s'ancrer dans ses positions ? Va-t-elle, au
contraire, être tentée de s'ouvrir au dialogue ?
En tout cas, le Sénat a démontré qu'il n'abordait pas ce débat dans un esprit
marqué de préjugés. Nous avons « décortiqué » le texte et nous l'avons allégé
de dispositions introduites par l'Assemblée nationale mais dont l'utilité ne
nous paraissait pas évidente.
Le débat a commencé. Nous n'avons pas présenté de motion tendant à opposer la
question préalable. Pour ma part, j'exprime un regret personnel : peut-être
notre décision aurait-elle été plus claire si nous avions accepté dans toutes
ses conséquences le principe de la détention par un parlementaire d'un seul
mandat exécutif ? Le Sénat en a décidé autrement.
Cependant, je suis persuadé que l'opinion publique, dont on préjuge beaucoup
trop la décision, comprendra ce que nous entendons faire et qu'elle
l'appréciera.
(M. Arthuis applaudit.)
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je serai beaucoup plus concis que je ne l'envisageais,
compte tenu de ce qui a été dit lors des explications de vote, non seulement
par les orateurs des groupes qui soutiennent le Gouvernement, mais aussi par
les membres de la majorité sénatoriale, notamment M. Peyrefitte. En me référant
à leurs propos, je ne veux ni diviser, ni opposer, ni annexer qui que ce
soit.
En entendant M. Peyrefitte, nous avons trouvé confirmation des propos tenus,
dans son intervention introductive, par mon collègue M. Jean-Jack Queyranne,
ministre de l'intérieur par intérim. Il indiquait alors que l'approche du
Gouvernement n'était en rien dogmatique, qu'elle recherchait, au contraire,
réalisme et équilibre, avec le souci de revivifier notre démocratie et de
répondre à une aspiration de nos concitoyens.
Si la Haute Assemblée veut bien prendre en compte le plus largement possible
ce préambule, ce cadrage de la réflexion, cela permettra de convenir que le
texte auquel vous êtes parvenus constitue, eu égard aux besoins et à la
nécessité du présent et de l'avenir, un pas trop petit pour satisfaire le
Gouvernement au regard des objectifs qu'il cherche à atteindre.
Je prends acte du travail accompli par la commission et du grand nombre de
sénateurs qui sont intervenus au cours du débat. Cependant, à la veille du
troisième millénaire, il faut, pour être en phase avec les attentes de
l'opinion et les exigences des citoyens les plus informés, accepter l'équilibre
qui vous est proposé, car il répond au besoin d'ancrage local que vous
souhaitez tous préserver.
Cet ancrage local ne doit pas être exclusivement institutionnel. Un
parlementaire aura toujours la possibilité d'être conseiller municipal,
conseiller général ou conseiller régional, voire vice-président de conseil
général ou régional, ou adjoint. Cela signifie que nous ne cherchons pas à
établir une séparation entre la vie politique nationale et l'exercice des
responsabilités locales.
Mais d'autres formes d'ancrage permettent de découvrir la réalité vécue par
nos concitoyens. Bien souvent, cette connaissance nous manque lorsque nos
mandats nous absorbent trop. Je pense, en particulier, à toute la richesse que
constitue la vie associative, pilier très fort de notre démocratie, à laquelle
elle donne son oxygène, sa respiration. Il faut aussi essayer de la
valoriser.
A ce titre, les limitations du cumul des mandats telles qu'elles étaient
proposées par le projet de loi initial autorisait, me semble-t-il, cette
disponibilité qu'il faut savoir se ménager pour ne pas être, avec le temps,
coupé de la réalité.
Le Gouvernement, au terme de ce débat, remercie celles et ceux qui y ont
participé. Il apprécie que des analyses fortes et pertinentes aient été
présentées d'une manière très franche et hors de tout clivage. Il souhaite que,
dans la suite de la discussion, la Haute Assemblée puisse, à partir d'un
approfondissement de ses analyses et sans
a priori
, accepter une avancée
nettement plus marquée que celle qu'elle a retenue en première lecture.
(Applaudissement sur les travées socialistes et sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public est de
droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du
règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
2:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 296 |
Majorité absolue des suffrages | 149 |
Pour l'adoption | 194 |
Contre | 102 |
La discussion de projet de la loi relatif à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs conditions d'exercice est renvoyée à la prochaine séance.
6
RENVOI POUR AVIS
M. le président. J'informe le Sénat que le projet de loi (n° 7, 1998-1999) relatif à l'organisation de certains services au transport aérien, dont la commission des affaires économiques et du Plan est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
7
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Paul Girod, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom
de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur le projet de
loi relatif au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à
l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux.
Le rapport sera imprimé sous le n° 40 et distribué.
J'ai reçu M. Luc Dejoie un rapport fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée
nationale, relatif à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits
(n° 530, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le n° 41 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Jacques Hyest un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale :
- sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant
extension de la qualification d'officier de police judiciaire au corps de
maîtrise et d'application de la police nationale (n° 532, 1997-1998) ;
- et, sur la proposition de loi de MM. Paul Loridant, Jean Derian, Guy
Fischer, Robert Pagès, Ivan Renar et Mme Odette Terrade pour l'extension de la
qualification d'officier de police judiciaire au corps de maîtrise et
d'application de la police nationale (n° 485, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 42 et distribué.
8
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au jeudi 29 octobre 1998 :
A neuf heures trente :
1. Suite de la discussion du projet de loi (n° 464, 1997-1998), adopté par
l'Assemblée nationale, relatif à la limitation du cumul des mandats électoraux
et des fonctions et à leurs conditions d'exercice.
Rapport (n° 29, 1998-1999) de M. Jacques Larché, fait au nom de la commission
des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
règlement et d'administration générale.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
2. Questions d'actualité au Gouvernement.
3. Discussion du projet de loi (n° 9, 1998-1999), adopté par l'Assemblée
nationale, autorisant la ratification du sixième protocole additionnel à
l'accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe.
Rapport (n° 21, 1998-1999) de M. André Boyer, fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
4. Discussion du projet de loi (n° 10, 1998-1999), adopté par l'Assemblée
nationale, autorisant la ratification de l'accord européen concernant les
personnes participant aux procédures devant la Cour européenne des droits de
l'homme.
Rapport (n° 21, 1998-1999) de M. André Boyer, fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion
générale commune de ces deux textes.
5. Suite éventuelle de l'ordre du jour du matin.
6. Discussion du projet de loi (n° 527, 1997-1998), adopté par l'Assemblée
nationale, portant règlement définitif du budget de 1995.
Rapport (n° 36, 1998-1999) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission
des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la
nation.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
Scrutin public ordinaire de droit sur l'ensemble.
7. Discussion du projet de loi (n° 528, 1997-1998), adopté par l'Assemblée
nationale, portant règlement définitif du budget de 1996.
Rapport (n° 37, 1998-1999) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission
des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la
nation.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
Scrutin public ordinaire de droit sur l'ensemble.
La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion
générale commune de ces deux textes.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
- Débat consécutif à une déclaration du Gouvernement sur la décentralisation
:
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 2 novembre
1998, à dix-sept heures.
- Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant extension de
la qualification d'officier de police judiciaire au corps de maîtrise et
d'application de la police nationale (n° 532, 1997-1998) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 3 novembre 1998, à dix-sept
heures.
- Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'accès au droit
et à la résolution amiable des conflits (n° 530, 1997-1998) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mardi 3 novembre 1998, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 3 novembre 1998, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quarante.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
Lors de sa séance du mercredi 28 octobre 1998, le Sénat a désigné :
- MM. Raymond Courrière et Ambroise Dupont pour siéger, en qualité de
titulaires, et MM. Jean-Paul Amoudry et Marcel Vidal pour siéger, en qualité de
suppléants, au sein du conseil d'administration du Conservatoire de l'espace
littoral et des rivages lacustres ;
- Mme Janine Bardou et M. Jean-Pierre Bel pour siéger au sein du Conseil
national de la montagne ;
- MM. Maurice Blin, Yves Fréville et Alain Gournac pour siéger au sein du Haut
Conseil du secteur public ;
- MM. Jean-François Humbert et Jean-Claude Peyronnet pour siéger au sein du
Conseil national des services publics départementaux et communaux ;
- et M. René Garrec pour siéger au sein du Conseil national de l'aménagement
et du développement du territoire.
Par ailleurs, M. le président du Sénat a été informé, en application de
l'article 9 du règlement, que, lors de leurs réunions du 28 octobre 1998 :
- la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation a désigné M. René Trégouët pour siéger, en qualité de
titulaire, au sein du Comité central d'enquête sur le coût et le rendement des
services publics ;
- et la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale a désigné M. Patrice
Gélard pour siéger, en qualité de titulaire, et M. Henri de Richemont pour
siéger, en qualité de suppléant, au sein de la Commission supérieure de
codification.
NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES
M. André Boyer a été nommé rapporteur du projet de loi n° 22 (1998-1999)
autorisant l'approbation du cinquième protocole (Services financiers) annexé à
l'accord général sur le commerce des services.
M. Aymeri de Montesquiou a été nommé rapporteur du projet de loi n° 23
(1998-1999) autorisant la ratification de la convention sur la sécurité du
personnel des Nations unies et du personnel associé.
COMMISSION DES FINANCES
M. Jacques Chaumont a été nommé rapporteur du projet de loi n° 558 (1997-1998)
autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la
République française et le Gouvernement de l'Ukraine en vue d'éviter les
doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière
d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole).
M. Yvon Collin a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 7
(1998-1999) relatif à l'organisation de certains services au transport aérien,
dont la commission des affaires économiques est saisie au fond.
M. Philippe Marini a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 551
(1997-1998), présentée par M. Georges Gruillot et plusieurs de ses collègues,
tendant à la création d'une dotation jeune entrepreneur.
Mme Marie-Claude Beaudeau a été nommée rapporteur de la proposition de loi n°
567 (1997-1998), présentée par Mme Hélène Luc et plusieurs de ses collègues,
portant réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 28 octobre 1998
SCRUTIN (n° 2)
sur l'ensemble du projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale,
relatif à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à
leurs conditions d'exercice.
Nombre de votants : | 315 |
Nombre de suffrages exprimés : | 293 |
Pour : | 192 |
Contre : | 101 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre :
16.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :
Pour :
9.
Contre :
4. _ MM. François Abadie, André Boyer, Pierre Jeambrun et
Jacques Pelletier.
Abstentions :
7. _ MM. Jean-Michel Baylet, Jacques Bimbenet, Yvon
Collin, Jean-Pierre Fourcade, Bernard Joly, Pierre Laffitte et Georges
Mouly.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. Jean Francois-Poncet et Georges
Othily.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :
Pour :
86.
Contre :
1. _ M. Alain Peyrefitte.
Abstentions :
9. _ MM. Michel Barnier, Paul Blanc, Auguste Cazalet,
Jacques Chaumont, Philippe de Gaulle, Hubert Haenel, Alain Joyandet, Jacques
Legendre et Paul d'Ornano.
N'ont pas pris part au vote :
3. _ M. Christian Poncelet, président du
Sénat, et MM. Emmanuel Hamel et Lucien Neuwirth.
GROUPE SOCIALISTE (78) :
Contre :
78.
GROUPE DE L' UNION CENTRISTE (52) :
Pour :
45.
Contre :
1. _ M. Marcel Lesbros.
Abstentions :
5. _ MM. Jean-Paul Amoudry, Philippe Arnaud, Pierre
Fauchon, Yves Fréville et Daniel Hoeffel.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Jean Faure, qui présidait la
séance.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (47) :
Pour :
46.
Abstention :
1. _ Mme Janine Bardou.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :
Pour :
6.
Contre :
1. _ M. Gérard Delfau.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Pierre André
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barraux
Jean-Paul Bataille
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Bizet
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
André Jourdain
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Jean-Jacques Robert
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac
Ont voté contre
François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Pierre Jeambrun
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Marcel Lesbros
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Jacques Pelletier
Guy Penne
Daniel Percheron
Alain Peyrefitte
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Abstentions
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Janine Bardou
Michel Barnier
Jean-Michel Baylet
Jacques Bimbenet
Paul Blanc
Auguste Cazalet
Jacques Chaumont
Yvon Collin
Pierre Fauchon
Jean-Pierre Fourcade
Yves Fréville
Philippe de Gaulle
Hubert Haenel
Daniel Hoeffel
Bernard Joly
Alain Joyandet
Pierre Laffitte
Jacques Legendre
Georges Mouly
Paul d'Ornano
N'ont pas pris part au vote
MM. Jean François-Poncet, Emmanuel Hamel, Lucien Neuwirth et Georges
Othily.
N'ont pas pris part au vote
MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la
séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 318 |
Nombre de suffrages exprimés : | 296 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 149 |
Pour l'adoption : | 194 |
Contre : | 102 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.