Séance du 3 décembre 1998
M. le président. Article 83. - I. - Il est inséré, après le deuxième alinéa de l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale, un alinéa ainsi rédigé :
« Pour la liquidation des avantages de vieillesse, les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés sont réputés inaptes au travail à l'âge minimum auquel s'ouvre le droit à pension de vieillesse. »
« II. - L'article L. 821-2 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le versement de l'allocation aux adultes handicapés au titre du présent article prend fin à l'âge auquel le bénéficiaire est réputé inapte au travail dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 821-1. »
« III. - Les dispositions du présent article sont applicables aux personnes atteignant l'âge de soixante ans à compter du 1er janvier 1999. Pour les personnes ayant atteint l'âge de soixante ans antérieurement au 1er janvier 1999, elles sont applicables lors du premier renouvellement de l'allocation. »
Par amendement n° II-43, M. Chérioux, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. Chérioux, rapporteur pour avis.
M. Jean Chérioux, rapporteur pour avis. Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 83, qui prévoit que les adultes handicapés se verront retirer leur allocation et devront nécessairement prendre leur retraite à partir de soixante ans.
La commission estime que c'est tout d'abord ignorer la valeur thérapeutique du travail pour les handicapés. En effet, lorsqu'elles entrent dans un centre d'aide par le travail, les personnes handicapées qui rencontrent des difficultés dans la vie trouvent un environnement social qui les respecte, un milieu professionnel au sein duquel elles ont une valeur et un travail qui leur donne une identité. Par conséquent, leur retirer l'AAH est forcément une mauvaise chose.
En outre, cette disposition a un caractère discriminatoire. Pourquoi obliger un handicapé à prendre sa retraite en raison non pas de la pénibilité de son activité, mais tout simplement parce qu'il est infligé d'un handicap ?
Pour ces raisons, la commission des affaires sociales vous propose la suppression de l'article 83.
M. Michel Mercier. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Oudin, rapporteur spécial. Cet amendement de suppression est, par définition, contraire à la position que la commission des finances vous a demandé d'adopter, mes chers collègues, pour l'article 83.
L'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, qui est souvent déviée de sa finalité, n'a pas vocation à continuer à être versée à ses bénéficiaires au-delà de l'âge légal de la retraite. Elle est déjà largement définie comme une prestation subsidiaire par rapport aux avantages vieillesse. Sur ce point, l'article 83 n'ajoute rien aux droits existants : il prévoit simplement le basculement automatique des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés sur le minimum vieillesse, alors que, dans le droit actuel, ce basculement suppose une décision préalable de la COTOREP.
Par ailleurs, les cas de personnes handicapées encore en activité au sein de CAT au-delà de l'âge de soixante ans ne sont probablement pas les plus fréquents.
Faut-il refuser cette mesure globale de rationalisation à cause de quelques cas particuliers ? Du reste, il peut sembler peu opportun d'encourager le maintien en CAT de personnes handicapées au-delà de l'âge de soixante ans, alors que l'on manque encore de places dans ces établissements pour les plus jeunes.
Il nous semble qu'il aurait été judicieux, plutôt que de s'opposer au principe même de la mesure, de prévoir un droit d'option en faveur des personnes qui souhaitent continuer à travailler au-delà de l'âge de soixante ans.
Néanmoins, compte tenu de la dimension humaine des cas évoqués par M. Chérioux, je suis tenté de m'en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Le présent article vise à assurer une meilleure cohérence entre l'AAH et les avantages vieillesse.
Les dispositions applicables à l'AAH seront ainsi alignées sur le régime des pensions d'invalidité, qui prévoit un basculement automatique sur les avantages vieillesse dès l'âge de soixante ans.
La modification envisagée ne change rien aux droits des titulaires de l'AAH présentant une incapacité permanente d'au moins 80 %. Elle a pour seul objet d'affirmer au niveau législatif la reconnaissance de l'inaptitude au travail dont ils bénéficient actuellement sur la base d'une simple circulaire.
Cette modification aura, en revanche, des conséquences pour les bénéficiaires de l'AAH qui justifient d'une incapacité permanente d'au moins 50 % et d'une impossibilité reconnue, compte tenu de leur handicap, de se procurer un emploi. Pour eux, la réforme mettra fin, à l'âge de soixante ans, au bénéfice de l'AAH.
Cette mesure est cohérente avec la nature de l'AAH servie à cette catégorie de personnes.
L'AAH étant une prestation accordée à des personnes dans l'impossibilité de se procurer un emploi, il est logique de mettre fin à sa perception lorsque les intéressés bénéficient d'un avantage vieillesse, c'est-à-dire quand ils n'entrent plus dans le champ des personnes susceptibles de reprendre une activité professionnelle.
A cet égard, la situation de ces bénéficiaires de l'AAH serait alignée sur celle des invalides dont la pension d'invalidité est systématiquement transformée, à l'âge de soixante ans, en pension de retraite pour inaptitude au travail.
Il s'agit donc à la fois d'une mesure de mise en conformité juridique et d'une mesure de cohérence par une égalité de traitement.
J'ajoute que les travailleurs de CAT que vous évoquez sont presque toujours allocataires de l'AAH.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-43.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je comprends le souci du Gouvernement de rechercher une cohérence entre l'AAH et les avantages vieillesse.
Toutefois, madame le secrétaire d'Etat, cette mesure n'est certainement pas de nature à améliorer la situation de la branche vieillesse, car vous faites basculer un mode de financement sur un autre. La branche vieillesse est la seule des trois branches de la sécurité sociale à être déficitaire et, jusqu'à présent, le Gouvernement n'a pas pris de mesure structurelle pour essayer d'enrayer cette situation.
En l'espèce, vous prenez une mesure ponctuelle qui ne fera qu'aggraver la situation de la branche vieillesse.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-43, sur lequel la commission des finances s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 83 est supprimé.
Article additionnel après l'article 83