Séance du 5 décembre 1998
M. le président. La séance est reprise.
Nous pousuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant la culture.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureuse de vous présenter pour la seconde année consécutive un budget de la culture qui traduit toute l'importance qu'attache ce gouvernement à ce domaine de l'action de l'Etat.
Je tiens d'emblée à remercier MM. Gaillard, Nachbar et Vidal de l'examen très vigilant auxquels ils se sont livrés sur ce projet de budget de la culture pour 1999.
Celui-ci bénéficie d'une claire priorité de la part du Gouvernement : il enregistre une progression de 524 millions de francs, soit 3,5 %.
Il s'approche ainsi de l'objectif du 1 % du budget de l'Etat consacré à la culture, objectif affirmé par M. le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale et encore tout récemment à l'UNESCO, lors d'un colloque de la fondation Jean-Jaurès.
A l'occasion des arbitrages relatifs au projet de loi de finances pour 1999, M. le Premier ministre a confirmé que le budget de la culture viendrait à représenter 1 % du budget de l'Etat d'ici à la fin de la législature.
Permettez-moi d'insister sur la signification de cet objectif.
Je veux d'abord rappeler que la progression qu'enregistre le budget de la culture est une pratique vertueuse qu'a souhaité mettre en oeuvre M. le Premier ministre et qui est bien évidemment préférable à la pratique dissimulatrice qui a eu cours précédemment, quand le pourcentage affiché ne rendait pas compte de l'évolution véritable de ce budget.
Si le budget de la culture en était alors venu jusqu'à représenter 1 % du budget de l'Etat, c'était, vous vous en souvenez, au prix de l'ajout continu de dépenses précédemment financées par d'autres budgets ministériels. Le budget de la culture augmentait en apparence, mais cette augmentation s'accompagnait en fait d'une réduction des moyens véritables du ministère !
Cette situation un peu schizophrénique a aujourd'hui pris fin. Les budgets de la culture pour 1998 et 1999 que j'ai préparés sont des budgets sincères.
Si le Premier ministre a confirmé, sur ma proposition, certains transferts de dépenses intervenus sous le précédent gouvernement, la progression du budget de la culture en 1998, comme celle que nous proposons pour 1999, a emprunté non la voie d'un rattachement de nouvelles dépenses mais celle d'un renforcement effectif des moyens pouvant être consacrés à un champ d'action désormais stabilisé.
A cet égard, je suis en mesure de vous indiquer que le budget de la culture pour 1999 n'incorpore pas de crédits au titre des manifestations relatives à l'an 2000. Les dépenses prévues au titre de 1999 pour ces manifestations seront financées dans le cadre du collectif de fin d'année par l'ouverture de crédits supplémentaires au budget de la culture.
Par ailleurs, si le ministère de la culture est et restera un « petit » ministère de par la taille de son budget, il s'agit en revanche, d'un « grand » ministère pour la société française, dans la pluralité de ses composantes, et au regard de l'idéal républicain qui l'anime.
A travers sa triple fonction de soutien à la création contemporaine, de préservation des oeuvres artistiques et traces du passé et d'encouragement à la diffusion des oeuvres, pratiques et connaissances, ce ministère concourt à la formation de notre personnalité collective, voire à celle de l'identité individuelle de millions d'entre nous.
Je crois que c'est cette dimension-là, qui puise au plus profond de nous-mêmes et nous enrichit, qui donne sa pleine légitimité à l'existence et à l'action d'un ministère de la culture.
Cette conception d'un ministère de la culture intégré et actif, loin de constituer une quelconque « exception » française, comme elle est parfois présentée, désuète et vouée à disparaître, commence à être partagée au niveau européen, si j'en juge par le volontarisme dont font preuve en ce domaine des pays aussi proches de nous que l'Allemagne et l'Italie.
Les récentes décisions arrêtées à l'échelon européen, qu'il s'agisse de l'accord-cadre budgétaire 2000-2004, de la validation de la conception française du prix unique du livre ou de la reconnaissance d'une autonomie des Etats pour l'organisation et le financement de leur audiovisuel public, sont autant de signes de l'émergence d'une politique culturelle européenne qui, sans dire encore son nom, s'affirme peu à peu comme une dimension essentielle du mouvement d'unification européenne.
S'agissant du programme-cadre Culture 2000, je suis personnellement intervenue auprès du Premier ministre afin que la dotation globale de ce programme puisse atteindre un niveau satisfaisant.
La position qu'a défendue la France au Conseil des ministres européens, le 17 novembre dernier, a traduit la priorité donnée au maintien d'une enveloppe de crédits suffisante sur les cinq années à venir. Le chiffre de 167 millions d'écus qui a été retenu constitue pour moi un montant incompressible, d'autant que le Parlement européen avait souhaité un montant de 250 millions d'écus.
Il a cependant fallu tenir compte du fait que l'un de nos partenaires partait de zéro et que, dès lors, des efforts de conciliation étaient nécessaires. Nous attendons les décisions finales pour être bien assurés que cet accord se fera à l'unanimité. Je suis confiante, car cette réunion a permis à tout le monde d'avancer d'un même pas.
M. Jean-Pierre Raffarin. Vous parlez bien du Parlement de Strasbourg ?...
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Oui, il s'agit bien du Parlement européen qui siège à Strasbourg, cher ancien collègue.
Bien entendu, lors de l'élaboration de ce programme-cadre, nous avons eu un débat sur ses finalités. Nous partons de ce qui existe, comme le programme Kaléidoscope. Mais nous envisageons, à partir des priorités qui ont été dessinées, de donner plus de corps et plus de sens aux actions qui seront menées, qu'il s'agisse d'actions en direction des jeunes ou d'actions plus ciblées, concernant des manifestations ou des programmes nouveaux. Nous aurons, hélas ! trop peu de marge de manoeuvre pour prévoir de très nombreuses actions. Il nous faudra donc faire preuve de détermination quant aux choix qui seront opérés.
A travers la mise en oeuvre d'une politique culturelle active sur un plan national comme sur un plan européen, nous affirmons fondamentalement que, si nous vivons dans le cadre d'une économie de marché, notre société n'est pas une société de marché qui serait structurée essentiellement autour des fonctions économiques.
Si nous voulons donner une priorité à la culture, c'est parce que la culture constitue une condition essentielle à la compréhension du monde, un monde en changement. L'Etat a un double rôle à cet égard : accompagner ces changements et préserver ce qui, dans l'art et la culture, pourrait être anéanti par ces mutations.
Je me félicite, à cet égard, de la décision prise par le Premier ministre de retirer la France de la négociation de l'accord multilatéral sur l'investissement, qui constituait une menace pour nos industries culturelles. M. Ralite a rappelé les différentes étapes de la forte mobilisation qu'a suscitée cet accord au sein du ministère de la culture pour expliquer et défendre notre position, et finalement la faire partager par l'ensemble du Gouvernement.
S'agissant du fameux TEP, le Gouvernement français a soutenu une position extrêmement claire, par la voix du Premier ministre, en refusant qu'il y ait des négociations sans mandat politique explicitement donné au commissaire européen sur des orientations avalisées par les Etats. A défaut du respect de ces conditions, la France ne pourrait évidemment approuver l'accord qui interviendrait éventuellement.
Nous maintenons le cap sur ce sujet, notamment en ce qui concerne l'exclusion de l'audiovisuel du champ de la négociation. C'est vrai, en particulier, pour la négociation qui s'ouvrira dans le cadre de l'OMC. Nous prônons le respect des règles nationales et de l'acquis communautaire en matière de propriété littéraire et artistique.
S'agissant des négociations commerciales, nous maintenons nos exigences en ce qui concerne la protection des biens culturels. C'est aussi parce que la culture constitue non un luxe ou un supplément d'âme mais une condition essentielle de la reconnaissance de chaque individu dans sa dignité et de l'expression de la citoyenneté que la position du Gouvernement français est exigeante sur le plan tant national qu'international.
Mon action est guidée par trois objectifs essentiels.
J'entends tout d'abord refonder un grand service public de la culture. La politique culturelle doit s'appuyer sur un service public fort, efficace et républicain quant aux conceptions qui l'animent et aux modalités d'intervention qui sont les siennes. La reconstruction budgétaire et administrative du ministère est aujourd'hui bien engagée. Elle se poursuit dans trois directions et, en premier lieu, celle de la réorganisation des administrations centrales.
La réunion de toutes les disciplines du spectacle vivant dans une même direction a été guidée par le souci de bâtir un ensemble performant au service de nos partenaires et professionnels, en supprimant les cloisonnements artificiels qui servaient peut-être des cercles particuliers mais qui étaient de plus en plus décalés par rapport aux enjeux de la création et de la diffusion.
De même, j'ai souhaité mettre en place une nouvelle délégation au développement et à l'action territoriale afin de renforcer la capacité d'action du ministère en matière de démocratisation des pratiques culturelles et d'aménagement du territoire.
C'est au sein de cette délégation qu'est traité l'ensemble des contractualisations, qu'il s'agisse des contrats de plan, des contrats d'agglomération ou des différents contrats qui peuvent ponctuellement lier une collectivité territoriale et le ministère de la culture ; je pense aussi aux contrats ville-lecture.
J'ai, par ailleurs, voulu rendre l'Etat plus présent sur le territoire et plus proche de ses partenaires locaux, institutionnels et artistiques, en poursuivant le mouvement de déconcentration des crédits vers les directions régionales des affaires culturelles.
Je remercie les différents orateurs qui ont soulignél'intérêt que présente cette déconcentration.
Bien entendu, je n'ignore pas que cette déconcentration des responsabilités au niveau local est parfois discutée. Certains y voient un risque pour la création artistique, dont la qualité cesserait d'être appréciée au niveau national ou international. En outre, la déconcentration se traduirait par un allongement insupportable des procédures, voire des difficultés financières pour les structures aidées.
Je crois que ces craintes sont largement infondées.
Nous n'en sommes encore qu'à la deuxième année de déconcentration des crédits. Nous y consacrons des efforts très importants mais il y a nécessairement des difficultés liées à sa mise en oeuvre ; celle-ci prend évidemment un certain temps.
La déconcentration ne conduit nullement à un enclavement régional des créateurs. J'ai par ailleurs veillé à ce que les procédures d'examen et de versement des subventions par les directions régionales des affaires culturelles n'engendrent pas de délais excessifs pour les structures subventionnées.
Peut-être faut-il voir dans la nostalgie qui s'exprime parfois ici ou là, dans les critiques de la déconcentration une sorte de quête du regard du Prince qui valorisait jadis l'artiste. Pour ma part, je pense que cette conception-là du rôle de l'Etat s'éloigne de la nécessaire neutralité qu'il doit montrer par rapport au contenu de la création. Elle entretient aussi la dangereuse illusion d'une création qui se suffirait à elle-même dès lors qu'elle bénéficie de l'attention des pouvoirs publics.
Pour autant, il n'est pas question, non plus, de laisser les artistes, les créateurs simplement soumis à l'aléa de décisions qui pourraient être motivées par d'autres soucis que celui de voir se développer la création dans sa diversité.
Je vois, au contraire, dans la déconcentration un facteur positif d'ouverture des institutions culturelles sur leur environnement, vers de nouveaux publics, dans le sens des objectifs que j'ai fixés en matière de démocratisation des pratiques culturelles.
Le redéploiement d'une partie des effectifs de l'administration centrale vers les directions régionales des affaires culturelles, les DRAC, qui sera prochainement engagé, permettra d'atténuer les phénomènes de « surcharge » administrative qui sont apparus dans certaines directions régionales en rapport avec la déconcentration de l'attribution des subventions. J'apporte là une réponse aux différentes questions qui ont été posées à cet égard.
En même temps, je souhaite rassurer Mme Pourtaud à propos de la situation de la DRAC d'Ile-de-France, que nous avons voulu à la fois réinstaller et doter prioritairement en postes, puisque c'était celle qui en était le plus dépourvue. J'ai souhaité répondre d'abord aux besoins non seulement de l'Ile-de-France, mais aussi des quelques régions françaises qui étaient particulièrement sous-dotées. Le plan que j'ai demandé d'élaborer au directeur de l'administration générale prévoit cette montée en puissance sur l'ensemble du territoire.
La déconcentration se poursuivra donc en 1999, avec le souci d'une bonne administration, en renforçant les moyens en personnels des DRAC. En effet, un Etat crédible vis-à-vis de ses partenaires, c'est aussi un Etat fiable, qui honore ses engagements.
Je me suis ainsi attachée à mettre fin à cet héritage calamiteux qui voyait l'Etat promettre des subventions d'investissement à des collectivités locales, après s'être mis dans l'incapacité de les leur verser dans des délais raisonnables. Les redéploiements auxquels j'ai fait procéder dès cette année ont permis de résorber les factures les plus anciennes. Je rappelle que le montant global de ces factures avoisinait 300 millions de francs, et que, pour que la parole de l'Etat soit crédible, il fallait régler cette dette à l'égard des collectivités avant même d'engager la discussion sur les contrats de plan.
Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit donc une ouverture exceptionnelle de crédits de paiement, qui permettra de faire définitivement disparaître la « dette » de l'Etat à l'égard des collectivités locales.
Ainsi, la progression, en 1999, de 105 millions de francs, soit de 41 %, du montant des autorisations de programme destinées à soutenir les équipements culturels locaux sera non pas une vaine promesse, mais un engagement clairement financé de l'Etat.
La volonté qui est la mienne d'honorer la parole de l'Etat m'a aussi conduite, dans le cadre du projet de loi de finances que je vous présente aujourd'hui, à confirmer la restauration des crédits du patrimoine au niveau qui était le leur avant la décision d'étalement en fait ; d'abandon de la loi sur le patrimoine monumental de 1993. Vous vous souvenez sans doute, mesdames, messieurs les sénateurs - il en a été beaucoup question aujourd'hui - de cette décision de réduire de façon considérable le montant des financements, qui fit l'objet du débat sur ce projet de loi de finances pour 1998, qui nous a réunis l'an dernier.
A propos de ces crédits du patrimoine, je souhaite simplement répondre à une intervention précédente concernant le chapitre 66-20. A structures constantes, ce chapitre correspond à des subventions accordées à des collectivités locales et à des propriétaires privés. Sa dotation a été portée de 367 millions de francs à 386,4 millions de francs entre 1998 et 1999, soit une progression de 4,7 %, et non une stagnation, comme je l'ai entendu dire précédemment.
S'agissant du patrimoine, puisque la question a également été évoquée, je tiens à rappeler qu'un nombre important de lieux culturels risquaient d'être vides et dépourvus d'affectation. Cela est déjà le cas pour des lieux assez prestigieux ; je pense notamment au Grand Palais.
Afin de ne pas pénaliser la mobilisation des crédits pour l'ensemble du territoire national par de très grandes opérations comme la restauration et la remise en état du Grand Palais ou de Versailles, j'ai souhaité établir, sur ces grands équipements en passe de devenir vides ou qui le sont déjà, qui nécessitent une réhabilitation lourde, un plan décennal pour le printemps 1999. Celui-ci permettra d'étaler les crédits nécessaires et d'établir des priorités, sans que ces crédits pèsent au détriment des opérations qui concernent les monuments et le patrimoine classés ou les équipements culturels en région.
Ce plan décennal sera très important. Il comportera les travaux de rénovation et de confortation des lieux prestigieux qui sont en mauvais état ; les travaux à engager sur des équipements nouveaux - je pense au musée du Quai Branly, qui est la nouvelle appellation du Musée des arts et des civilisations - ; les travaux destinés à réaffecter des lieux, tels le Palais de Tokyo ou, à moyen terme seulement, le Musée des arts africains et océaniens, le MAAO, dont les collections seront transférées dans le musée du Quai Branly.
Il s'agit donc d'un programme indispensable qui nous donnera une vision globale et qui nous permettra de mieux programmer l'évolution de la restauration du patrimoine en région.
Chacun connaîtra ainsi les choix qui seront opérés ; ils seront débattus avec les élus, que ce soit à l'échelon régional, départemental ou local, afin que les décisions soient pleinement partagées.
Un Etat dont la parole est restaurée peut poser, à l'égard de ses partenaires, tant artistiques qu'institutionnels, des exigences en matière de création artistique et de diffusion des pratiques culturelles.
J'entends poser ces exigences pour mettre en oeuvre une politique ambitieuse de soutien à la création et de démocratisation des pratiques culturelles.
Il s'agit là de deux volets indissociables de mon action. La politique culturelle ne peut être uniquement une politique de l'usager, pas plus qu'elle ne peut se résumer à une politique du soutien au créateur, indépendamment de la fonction sociale que celui-ci remplit.
Le moment de la création et le moment de la diffusion sont, certes, deux moments différents. Le ministère dont j'ai reçu la charge doit les prendre en compte l'un comme l'autre, en assumant deux missions parallèles : garantir et encourager la liberté de création partout dans notre pays et partout où elle est mise en danger ; favoriser la diffusion la plus large possible du patrimoine constitué.
Je ne crois pas que la création puisse pleinement s'affirmer sans un soutien public important. En effet, elle ne répond pas mécaniquement à une demande économique ou sociale. Elle n'est pas nécessairement reconnue au moment où elle naît, se cherche et s'affirme.
Je ne crois pas non plus que la démocratisation des pratiques culturelles puisse uniquement - ni peut-être principalement - résulter du développement économique de notre pays et de l'élévation, au demeurant inégale, du niveau de vie de nos concitoyens. Elle dépend fondamentalement, outre le milieu et la formation initiale ou continue, de la présence ou non de médiations. Mes choix budgétaires pour 1999 sont guidés par la volonté de soutenir la création et de favoriser l'accès à la culture par le développement de ces médiations.
J'ai déjà évoqué, dans d'autres enceintes, l'importance des mesures nouvelles prévues pour le secteur du spectacle vivant, qui s'élèvent à 110 millions de francs. Je veux toutefois souligner que ces crédits supplémentaires ne seront pas répartis de manière indifférenciée entre les structures subventionnées. Je souhaite tout d'abord privilégier les disciplines ou les activités qui ont été fortement affectées par plusieurs années de régression budgétaire : les compagnies de danse et de théâtre.
A cet égard, je répondrai, en particulier, à la question qui a été posée par Mme Pourtaud sur la danse. Notre ambition est d'augmenter, de façon significative, les crédits affectés à la danse, qui touche un public de plus en plus large en renouvelant constamment, avec un grand dynamisme et une forte générosité, ses modes d'expression artistique.
Je citerai quelques exemples de cette volonté. Le Centre national de la danse de Pantin, établissement public national dédié au développement de la danse, qui a été créé en 1998, sera doté d'une mesure nouvelle de 3 millions de francs et d'une subvention de fonctionnement qui atteindra plus de 26 millions de francs. Les travaux d'aménagement des locaux de Pantin débuteront en 1999. Les centres chorégraphiques nationaux seront dotés d'une mesure nouvelle de 3 millions de francs. Les deux nouveaux centres chorégraphiques créés en 1998 à Biarritz et à Rillieux-la-Pape verront leurs moyens consolidés. L'aide aux compagnies chorégraphiques - 134 compagnies ont été aidées en 1998 - sera augmentée de 5 millions de francs. Enfin, nous nous efforcerons de créer de nouveaux départements d'enseignement de la danse dans les conservatoires nationaux de région.
L'ensemble de ces mesures nouvelles affectées à l'enseignement spécialisé de la musique et de la danse s'élève à environ 8 millions de francs. La danse est donc prise en compte, de façon significative, dans ce projet de budget pour 1999.
L'écriture musicale ou dramatique, sans laquelle il est vain de parler d'effort public en faveur de la création contemporaine, est un secteur qui a également souffert.
J'entends aussi soutenir les formes culturelles émergentes qui concourent à renouveler la notion même de culture. Les musiques actuelles font régulièrement l'objet de discours généreux, mais aucune démarche d'ensemble n'a été engagée jusqu'à récemment.
J'avais souhaité qu'une commission précise les orientations qui pouvaient être retenues pour la prise en compte de ces différentes sortes de musique. Il s'agit non seulement de rap, de hip-hop ou de jazz, mais également des musiques populaires qui trouveront, au travers de la mise en oeuvre de ces priorités, la possibilité de se développer davantage. Je reprendrai là l'expression de M. Jack Ralite qui parlait de « réveiller l'oreille ». En effet, si ces musiques doivent être prises en compte, c'est aussi parce qu'elles sont souvent le premier contact d'un jeune avec des formes musicales. Il convient qu'elles soient reconnues tout simplement comme faisant partie de cet environnement. Cependant, elles doivent non pas devenir exclusives dans notre esprit, mais exister au même titre que les autres.
Avec ces musiques, nous sommes en même temps au carrefour de l'innovation, parfois la plus avant-gardiste, et d'une très large adhésion populaire. Offrant un gigantesque espace de création, de renouvellement des pratiques et d'interpénétration des disciplines, ces musiques suscitent aussi de nombreuses attentes, tant de la part du public que des élus. Je suis saisie de très nombreux projets de sites, de studios de répétitions ou de salles.
Je consacrerai, en 1999, 35 millions de francs de mesures nouvelles, afin de soutenir la création et la diffusion dans ce secteur.
J'envisage de créer une nouvelle forme d'enseignement itinérant pour permettre le lien entre les conservatoires et ces lieux nouveaux qui seront en réseau pour l'enseignement de ces musiques.
S'agissant des arts de la rue, qui associent également une large reconnaissance publique et une forte créativité artistique, mon ministère s'emploiera à accompagner la professionnalisation des troupes, à soutenir la diffusion des spectacles et à conventionner les compagnies les plus structurées. C'est la première étape, en 1999, d'une mise en vitesse de la reconnaissance des arts de la rue.
Toutefois, j'entends clairement affirmer que l'entrée en application de la charte des missions de service public pour le spectacle conduira à privilégier les structures subventionnées qui assurent le mieux leurs missions de service public : densité de la création artistique, recherche de nouveaux publics et ouverture aux praticiens amateurs.
J'étendrai à l'ensemble des domaines d'intervention de mon ministère cette démarche qui consiste à fixer aux structures subventionnées des objectifs lisibles et conformes au souci de démocratisation des pratiques culturelles.
Je tiens à insister sur ce point, car, tout à l'heure, l'un des orateurs a critiqué le fait que trop peu de mesures financières concernaient l'éducation artistique. Une lecture sectorisée de ce projet de budget tend à occulter le fait que ce que je demande aux musées, aux théâtres, aux opéras, etc., c'est aussi de travailler avec les scolaires. Cela ne figure pas sur une ligne spécifique, mais sera visible dans le travail effectué, dans les conventions passées par les régions avec les académies et les DRAC, pour parvenir à irriguer l'ensemble des structures qui concernent non seulement les jeunes, mais aussi, bien évidemment, les moins jeunes.
La circulaire fiscale du 15 septembre 1998, évoquée par M. Vidal, se traduirait, selon lui, par un accroissement de la charge fiscale des associations culturelles, en particulier dans le domaine du spectacle vivant. Je tiens à apporter des précisions à cet égard.
Cette circulaire soumet, effectivement, une grande partie des associations du spectacle vivant aux impôts commerciaux. Cette perspective a pu paraître inquiétante, mais les craintes sont aujourd'hui largement dissipées.
Le Gouvernement a inscrit dans le projet de loi de finances pour 1999 la possibilité pour les collectivités locales d'exonérer intégralement les organismes de spectacles vivants de la taxe professionnelle. Je rappelle que cette exonération était jusque-là limitée à 50 %. La réforme de la taxe professionnelle permettra donc d'alléger les coûts de ces organismes. Elle fera sortir les salaires de l'assiette de la taxe et réduira par conséquent fortement les conséquences potentielles pour les organismes de spectacles vivants d'un assujettissement à la taxe professionnelle.
Après comparaison, il nous est apparu que le basculement vers une imposition sur les salaires coûterait extrêmement cher aux structures culturelles, en particulier à ces organismes. Je suis par ailleurs à votre disposition pour vous expliquer plus précisément les modalités d'application de ces mesures.
L'année 1999 sera une année importante pour les enseignements artistiques. Les crédits qui leur sont consacrés par mon ministère augmenteront de 2,4 %. Les bourses des écoles d'architecture et des écoles artistiques seront alignées sur les barèmes pratiqués par l'éducation nationale. J'y tenais énormément car j'estime que tous les professeurs et tous les étudiants qui sont formés dans les institutions de formation dépendant du ministère doivent être considérés comme les autres. C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité, en 1999, la suppression de l'inégalité entre les étudiants d'université et les étudiants de nos écoles d'art et d'architecture.
La délégation aux arts plastiques verra ses crédits progresser de 13 % afin, notamment, de soutenir le fonctionnement courant des écoles artistiques et les investissements réalisés pour augmenter leurs capacités d'accueil et la qualité des conditions d'enseignement.
Il a été fait référence au rapport Imbert. Nous sommes, là encore, dans une première étape de traduction de ce rapport. Aucun des rapports que j'ai demandés ne sont restés dans les tiroirs. Tous ont été traduits dans les faits ou inspirent les décisions que j'ai prises.
M. Raffarin s'est interrogé sur les crédits consacrés par l'Etat à l'école du Fresnoy. Cette école est, pour nous, d'un type particulier. Elle est, en quelque sorte, une école laboratoire qui accueille des étudiants venus de toute la France, mais également d'autres pays.
M. Ivan Renar. Du monde entier !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Elle est à la fois nationale et internationale, mais, bien évidemment, nous souhaitons que le lien que vous évoquiez existe et qu'il puisse se traduire par des conventions entre nos écoles d'art spécialisées dans les métiers de l'image et l'école du Fresnoy.
En effet, nous ne pourrons bien évidemment pas réaliser plusieurs écoles de ce type en France. Mais lorsque l'Etat investit dans les régions et non à Paris, il ne faut tout de même pas s'en plaindre. J'ai entendu de nombreux élus dire que les grandes écoles nationales avaient plutôt tendance à s'implanter en région parisienne.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est le cas pour l'architecture.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Certes, il y en a plus à Paris que dans les régions, mais nous souhaitons qu'elles s'implantent dans les régions dynamiques, là où les projets peuvent se développer, mais là aussi où il y a des besoins en termes d'emplois.
M. Jean-Pierre Raffarin. Sur ce critère, nous serons d'accord.
M. Ivan Renar. Le Nord - Pas-de-Calais a quelques droits, vous en conviendrez.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je crois effectivement que le Nord - Pas-de-Calais en est un bon exemple.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour l'architecture, vous avez choisi Paris.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je ne veux pas raviver la guerre entre le Poitou-Charentes et le Nord - Pas-de-Calais, mais j'aurai bien évidemment le souci de préserver l'équilibre entre l'ensemble des régions, sans en privilégier aucune.
M. Jean-Pierre Raffarin. Très bien !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Mais, de grâce, ne vous plaignez pas qu'une de nos écoles qui est aujourd'hui considérée dans toute l'Europe comme une école pilote soit implantée dans le Nord - Pas-de-Calais.
J'ai évoqué les formes culturelles émergentes parmi les domaines d'intervention situés à l'intersection des deux objectifs de soutien à la création artistique et de démocratisation de la culture. Les nouvelles technologies, notamment le multimédia, sont également placées au centre de cette double préoccupation.
Sans maîtrise de notre nouvel environnement technologique, notamment en matière d'information, le risque est grand que ne s'instaure une coupure entre ceux qui disposeraient des outils conceptuels et ceux qui se borneraient à consommer les produits.
A cet égard, je réponds à M. Sérusclat qui évoquait le risque de rupture à la fois sociale mais aussi entre générations. C'est la raison pour laquelle nous avons engagé un programme de soutien à la création d'espaces culture multimédia qui vise à favoriser une appropriation culturelle des nouvelles technologies de l'information et à les utiliser comme vecteurs d'expression artistique.
Ce programme, qui sera amplifié en 1999, se caractérisera par une ouverture plus grande vers chacun, jeunes et moins jeunes. Il concerne d'ores et déjà une centaine de sites qui sont répartis sur tout le territoire. Nous en ouvrirons pratiquement le même nombre en 1999, dans le cadre de l'application du plan sur la société de l'information.
Si elles ne constituent bien évidemment pas le seul levier de la démocratisation de l'accès à la culture, les politiques tarifaires doivent être orientées en ce sens. Je souhaite, par conséquent, que toutes les institutions culturelles soutenues par l'Etat simplifient leur système de tarification et adoptent le principe d'un tarif périodique le plus bas possible, voire d'un accès gratuit.
S'agissant des institutions culturelles de l'Etat, la gratuité un dimanche par mois qui a été mise en oeuvre au musée du Louvre et qui a permis d'élargir le public, sera progressivement étendue à l'ensemble des musées nationaux.
Je tiens à souligner que les crédits consacrés aux acquisitions de nos musées augmenteront de 10 millions de francs.
Je compte également faire évoluer les tarifs des monuments historiques et des théâtres nationaux afin d'élargir leur public, comme c'est le cas pour les musées.
La démocratisation culturelle, c'est aussi le rééquilibrage des moyens entre Paris et les régions. En 1997, Paris représentait 54 % des dotations. En 1999, la capitale absorbera 52 % des crédits de mon ministère.
La priorité que j'ai souhaité donner dans ce budget aux interventions du titre IV et aux concours de l'Etat au financement des équipements culturels locaux explique cette évolution favorable que j'entends poursuivre.
Les contrats de plan qui seront conclus entre l'Etat et les régions pour la période 2000-2006 permettront d'amplifier ce redéploiement progressif. Je remercie M. Raffarin d'avoir souligné le bon climat qui a régné lors de leur préparation et le fait que les projets culturels faisaient l'objet d'une bonne contractualisation.
Je veux toutefois apporter un bémol à son propos car, comparé aux autres administrations de l'Etat, le ministère de la culture n'a pas un très bon taux de réalisation des projets inscrits dans les contrats de plan car les crédits n'ont pas suivi. Je souhaite que les projets qui seront inscrits dans les prochains contrats de plan puissent être réalisés.
Ce rééquilibrage entre Paris et les régions est donc engagé mais la concentration sur Paris des coûts incompressibles de la politique culturelle, en imprimant un rythme ralenti à ce rééquilibrage, souligne la nécessité de poursuivre la croissance du budget de la culture si nous voulons atteindre nos objectifs. Le troisième objectif de la politique que je mène tend à donner à la politique patrimoniale une dimension nouvelle en favorisant l'appropriation citoyenne de notre héritage culturel.
Je m'étais attachée, dans le cadre du projet de loi de finances pour 1998, à reconstituer les crédits d'investissement du patrimoine, qui avaient été « abattus », vous vous en souvenez, sous le précédent gouvernement. Le projet de loi de finances pour 1999 que je vous soumets confirme cet effort en engageant une progression continue, durable et régulière de ces crédits.
En deux ans, les crédits destinés au patrimoine monumental auront progressé de près de 500 millions de francs, soit une augmentation équivalente à celle des mesures nouvelles de l'ensemble du budget de la culture de l'année 1999. Je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, de prendre cette donnée en considération, dans la mesure où l'on n'avait pas hésité à annuler d'un trait de plume des sommes équivalentes.
Certains ont cru voir dans l'absence de nouvelle loi sur le patrimoine monumental la marque d'un renoncement à une grande ambition. Les chiffres démentent sans appel cette critique. Comme j'ai pu le constater à mon arrivée rue de Valois, les engagements pluriannuels de l'Etat ne protègent pas effectivement les dotations affichées comme prioritaires. Je préfère disposer de crédits plutôt que d'avoir une loi de programme si celle-ci n'est pas respectée. Les crédits consacrés au patrimoine monumental ont été frappés par les coupes successives qui ont été infligées à mon ministère.
M. Hugot a évoqué la Fondation du patrimoine. La discussion interministérielle sur les modalités de la labellisation est quasiment terminée. Les arbitrages définitifs seront rendus dans les prochains jours et le texte pourra donc paraître au début de l'année prochaine. Voilà qui favorisera l'activité de cette Fondation.
Je suis profondément attachée à la mise en oeuvre d'une politique renouvelée du patrimoine. En effet, je pense que nos concitoyens ont besoin, dans cette période de changement, de conserver, de retrouver certains repères de leur identité collective et individuelle ou, tout simplement, d'enrichir leur existence au contact de la beauté singulière qui émane de notre patrimoine muséographique ou monumental. La fréquentation du patrimoine, au sens classique du terme, est la deuxième pratique culturelle de nos concitoyens après l'audiovisuel.
La politique patrimoniale ne se circonscrit pas à un passé plus ou moins lointain. J'entends faire du passé proche une composante majeure d'une politique renouvelée du patrimoine.
Un effort particulier est engagé en faveur du patrimoine du xxe siècle. Je me réjouis que certains l'aient souligné. Ce patrimoine a été trop longtemps négligé. Dans cet ensemble, la politique d'inventaire et de protection du patrimoine industriel sera renforcée. Je souhaite, en effet, mettre en valeur la dimension fondamentale de l'histoire sociale de notre pays représentée par les bouleversements qu'ont imprimés les mutations de l'économie aux paysages et à la mémoire de millions de nos concitoyens.
La politique patrimoniale n'est pas uniquement tournée vers le passé ; elle est au centre de l'enjeu contemporain représenté par l'évolution de nos espaces urbains.
A travers la fusion de la direction de l'architecture et de la direction du patrimoine, j'ai voulu mettre fin à la différence de traitement entre le monument, splendide et isolé, et son environnement urbain dont les mutations doivent être maîtrisées.
Plusieurs intervenants ont évoqué les CAUE. Ces structures, par les conseils qu'elles apportent en matière d'urbanisme et d'environnement, sont nécessaires. Mises en place par la loi de 1977 sur l'architecture, elles mènent, aux côtés des élus, une action importante de sensibilisation à la qualité architecturale.
Dans l'esprit des conclusions du rapport remis par M. Vigouroux en 1995, la place des CAUE est et sera encore analysée en concertation avec la fédération des CAUE et les élus, afin que la réforme de la loi de 1977 intègre les problèmes qui se posent aujourd'hui.
S'agissant de la clarification des différents avis, de la longueur de la procédure et de la commission d'appel, je veux avant tout faire remarquer que, en ce qui concerne les commissions régionales du patrimoine et des sites, la loi a été mise en place sans que tous les problèmes juridiques aient été totalement évacués. La concertation interministérielle a été complexe et longue, notamment avec le ministère de l'environnement, pour tout ce qui concernait les problèmes liés au paysage et à l'environnement.
Même si je comprends l'impatience des élus, les délais n'ont pas été trop excessifs. Il fallait vraiment du temps pour que ce décret puisse être publié et pour éviter que des problèmes juridiques ne viennent, par la suite, entraver le travail de ces commissions. Ces dernières seront mises en place au printemps prochain. Je précise que, depuis la publication de ce décret, il n'y a plus de discussions sur ce point.
Dans le domaine du patrimoine écrit, la Bibliothèque nationale de France, dont 1999 sera la première année de fonctionnement à plein régime, mettra en réseau ses fonds documentaires avec les bibliothèques municipales à vocation régionale.
J'ai été interrogée sur la situation de la Biblothèque nationale de France. Permettez-moi simplement de dire que l'homologue anglaise de la BNF a été transformée sur une vingtaine d'années. La Bibliothèque nationale de France est critiquée alors que viennent d'être mis en service de nouveaux moyens informatiques qui doivent être mis au point, rodés, comme c'est le cas pour toute très grosse infrastructure informatique.
Pour le reste, d'autres problèmes concernent les conditions de travail, mais l'accueil des lecteurs et des chercheurs n'est nullement touché.
Cette période d'adaptation est aujourd'hui prise en compte à la fois par la direction et par les représentants du personnel. Nous aurons dans quelques mois la possibilité de faire un bilan qui sera, j'espère, positif.
L'année 1999 verra aussi l'engagement d'une politique patrimoniale forte dans le domaine cinématographique. Le projet de Palais du cinéma avait été lancé depuis le milieu de la précédente décennie sans recevoir de concrétisation. Les travaux de réaménagement intérieur de l'immeuble construit par Franck Gerhy à Bercy vont être engagés afin de permettre l'ouverture de la Maison du cinéma en l'an 2000. Celle-ci sera la tête du réseau décentralisé des institutions qui oeuvrent à la transmission de la culture cinématographique dans différentes villes de France.
Je voudrais aussi souligner la proximité avec l'Inathèque qui est installée à la Bibliothèque nationale de France, ce qui va donner à tout cet ensemble - Maison du cinéma et Inathèque - un site, absolument unique dans le monde de proximité entre les archives audiovisuelles et les archives cinématographiques.
Les crédits de compte de soutien à l'industrie cinématographique et à l'industrie audiovisuelle vont progresser de 2,5 % en 1999 pour atteindre 2,49 milliards de francs, dont 1,1 milliard de francs consacré plus particulièrement au soutien à la production audiovisuelle.
L'accroissement des moyens du compte d'affectation spéciale, rendu possible essentiellement par la hausse de la fréquentation des salles de cinéma, constitue un facteur positif pour les oeuvres cinématographiques et les programmes audiovisuels français, dont la densité concourt à la qualité de la programmation des chaînes de télévision et au rayonnement international de la culture française.
Je voudrais rappeler à M. Ralite que l'accord relatif au développement de l'ensemble du site Disney, signé en 1985, incluait la réalisation d'un second parc. Cependant, j'ai fait connaître, lors de la consultation interministérielle, le problème que me posait la réalisation de ce parc centré sur l'image, le dessin d'animation et le cinéma.
J'ai toujours défendu le droit à la pluralité culturelle et artistique et, au nom de cette dernière, j'ai voulu exprimer la nécessité de s'interroger collectivement sur les implications tant économiques que culturelles et sociales de ce nouveau parc. Son caractère monolithique me paraît inquiétant et, bien évidemment, j'ai exprimé, sur différents points de ce programme, les objections et les difficultés que j'y vois.
Par ailleurs, j'ai indiqué que je souhaitais obtenir l'assurance, dans le cas où ce parc se réaliserait, que les industries techniques françaises du secteur du cinéma et de l'audiovisuel soient bénéficiaires des retombées positives de cette implantation et que cette réalisation ne soit pas tournée sur elle-même.
En outre, il convient de vérifier l'effet que pourrait avoir une telle réalisation sur la place du cinéma français, ainsi que sur les activités liées au dessin d'animation.
En ce qui concerne les multiplex, j'ai mis en place toute une série de mesures qui visent à ce que leur développement, au demeurant positif pour l'ensemble du secteur, ne se fasse pas au détriment du film français et du cinéma d'art et d'essai.
Ainsi, dès le mois de juin dernier, j'ai choisi d'abaisser le seuil à partir duquel les projets doivent obtenir l'aval des commissions départementales : abaissement de 1 500 à 1 000 fauteuils pour les créations et de 2 000 à 1 500 fauteuils pour les extensions.
Je viens de signer et d'envoyer aux préfets une nouvelle circulaire d'instruction qui tire un premier bilan des décisions prises par les commissions départementales et par la commission nationale. J'ai indiqué les nouveaux critères d'appréciation que je préconise, dont la mesure de l'effet de ces nouveaux équipements sur les salles déjà existantes de la même zone et la concurrence qu'ils peuvent exercer, les impératifs d'aménagements du territoire - c'est une demande forte des élus - notamment lorsqu'ils sont de nature à revitaliser certaines zones d'activité, et l'effet sur le niveau de concentration des opérateurs. Enfin, j'ai engagé une réforme de l'ensemble du système des aides sélectives à l'exploitation, réforme qui s'imposait du fait des profondes transformations subies par le secteur.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je conclurai en abordant la question de l'archéologie, point qui n'a pas encore été évoqué.
L'archéologie a été au centre de l'actualité pendant la dernière période. Nous connaissons maintenant le résultat de la mission que j'ai confiée à MM. Pécheur, Demoule et Poignant.
Le rapport qu'ils ont présenté aux organisations représentatives de l'archéologie française constituera le coeur de la loi, qui, comme je m'y suis engagée, permettra une redéfinition de la mission de l'Etat et de son autorité, de la mise en place de la carte archéologique française et des obligations de publication des résultats. Elle prendra en compte à la fois les garanties scientifiques et le souci des élus de pouvoir avoir, en matière d'archéologie,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Un peu de concurrence !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. ... un résultat satisfaisant pour tous.
Il n'y aura pas de concurrence commerciale, car, à l'heure actuelle, aucune entreprise ne fait de l'archéologie au sens scientifique du terme. C'est donc à partir de la définition de la mission d'archéologie préventive qu'il peut y avoir compétition, scientifique s'entend, entre équipes et surtout discussions, négociations, conventions, de façon que tout soit traité le plus correctement possible avec la plus grande rapidité et la plus grande transparence ; j'y tiens beaucoup. En matière d'archéologie, un établissement sera créé en vue de succéder à l'Association pour les fouilles archéologiques nationales.
Je terminerai cette intervention en évoquant le droit de prêt et le rapport Borzeix, qui, selon l'un d'entre vous, aurait été rangé au fond d'un tiroir.
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial. Mieux vaut qu'il y retourne !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. « Le même contribuable ne peut à la fois payer pour promouvoir la lecture, puis payer pour emprunter les livres », a déclaré M. le rapporteur spécial !
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial. Ce n'est pas de moi, c'est de Jacques Thuillier !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je pourrais adhérer à ce jugement si le prêt était gratuit dans la totalité des établissements, ce qui n'est pas le cas en France : en effet, l'inscription est payante dans 70 % des bibliothèques et l'usager paie donc au même titre que le contribuable.
En revanche, rien de ce qui est payé par l'usager à ce titre ne revient directement au créateur, contrairement à ce qui se passe pour la vidéo et le disque. Telle est la question qui est posée dans le rapport Borzeix. Et cette question ne peut être éludée et purement et simplement rangée dans un tiroir. Je pense qu'il faut l'aborder de façon sereine. Mais lorsque l'on défend le droit d'auteur, la propriété littéraire et artistique, il faut alors poser la question pour tous les professionnels qui sont dans la création littéraire et artistique et ne pas en exclure certains.
C'est la raison pour laquelle j'avais souhaité que cette réflexion soit engagée ; en effet, si l'on veut garder cette vitalité de la culture française, il faut, à mon avis, reconnaître la pérennité de systèmes qui vont aussi bien de la reconnaisance des droits qu'au système de l'intermittence.
Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi simplement de dire que j'ai été extrêmement touchée par les expressions positives ou objectivement critiques formulées sur ce projet de budget pour 1999. Néanmoins, je suis profondément désolée et même assez choquée par les amendements tendant à supprimer des crédits qui ont été déposés.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Celui du groupe communiste ?
M. Ivan Renar. Non ! C'est un amendement de transfert, mon cher collègue !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela n'existe pas !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. J'ai entendu un certain nombre d'interventions me demandant d'aller plus vite vers le 1 % et d'augmenter le nombre des emplois et les subventions. Je suis saisie en permanence d'une demande d'augmentation des crédits du patrimoine.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut yrésister !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. De tels amendements me paraissent incompréhensibles, après ce qui s'est passé l'année dernière : Maurice Schumann avait plaidé pour que le projet de budget, alors en discussion, puisse, car le budget de la culture était en convalescence, être préservé. On parle d'exception culturelle dans les négociations internationales et j'ai moi-même parlé d'exception culturelle dans votre enceinte et devant la commission des affaires culturelles, que je remercie d'avoir voté à l'unanimité le projet de budget de la culture.
Mais, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne comprendrais pas que vous réduisiez la crédibilité de la parole de l'Etat en annulant des crédits que, par ailleurs, vous exigez pour la réalisation de projets.
MM. Franck Sérusclat et Marcel Vidal. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous allons vous expliquer !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je voulais simplement le souligner. C'est donc un peu sur un cri du coeur, mesdames, messieurs les sénateurs, que je termine mon intervention ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant la culture et figurant aux états B et C.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 180 263 706 francs. »