Séance du 16 décembre 1998
M. le président. « Art. 21. - L'article L. 4311-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
« 1° Le quatrième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L'adoption de l'ensemble des chapitres ou des articles vaut adoption du budget, sauf si le président du conseil régional met en oeuvre la procédure prévue à l'alinéa suivant. » ;
« 2° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« A l'issue de l'examen du budget primitif, le président du conseil régional peut soumettre à un vote d'ensemble du conseil régional le projet de budget initial, qu'il peut modifier après accord du bureau par un ou plusieurs des amendements soutenus ou adoptés au cours de la discussion. Cette procédure peut également s'appliquer à deux autres délibérations budgétaires relatives au même exercice hormis le compte administratif. » ;
« 3° Au dernier alinéa, le mot : "Toutefois," est supprimé. »
Je suis saisi par M. Paul Girod, au nom de la commission, d'une motion n° 3, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité à l'article 21.
Cette motion est ainsi rédigée :
« Considérant que les dispositions de l'article 21 du projet de loi violent les principes constitutionnels au rang desquels figure notamment la libre administration des collectivités locales par des conseils élus, le Sénat, en application de l'article 44, alinéa 2 du règlement, déclare irrecevable l'article 21 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux. »
Je rappelle qu'en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement du Sénat ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, un orateur d'opinion contraire, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote pour une durée n'excédant pas cinq minutes à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. le rapporteur, auteur de la motion.
M. Paul Girod, rapporteur. Je m'exprime depuis cette tribune, comme tout à l'heure s'agissant de la parité dans les conseils régionaux, pour marquer la solennité avec laquelle la commission des lois entend faire adopter par le Sénat, s'il veut bien la suivre, cette motion tendant à offrir l'exception d'irrecevabilité constitutionnelle à l'article 21.
Cet article prévoit que l'adoption des budgets dans les conseils régionaux interviendra dans des conditions tout à fait particulières. En effet, cet article 21 dispose que l'adoption par chapitre ou par article du budget vaut vote sur l'ensemble. Par ailleurs, il précise, que nonobstant les conclusions positives du conseil régional, le président dudit conseil, peut soumettre, par un vote bloqué, un budget soit identique au budget qu'il avait déposé, soit modifié par quelques amendements adoptés ou proposés pendant la discussion, y compris des amendements qui ont été expressément refusés par le conseil régional au cours de ses délibérations. J'insiste sur cet aspect précis : le président, seul exécutif jusqu'à cet instant, prépare un budget et le présente ; le conseil régional le vote, article par article ou chapitre par chapitre, avec des modifications provenant d'amendements adoptés, ou des modifications refusées provenant d'amendements proposés mais non adoptés par le conseil régional, et, par conséquent, dans des conditions de débat parfaitement claires.
A partir du moment où le vote sur le dernier chapitre est intervenu, le budget est considéré comme adopté dans sa globalité. Cependant, le président du conseil régional peut, de sa seule initiative, après avoir fait approuver sa démarche par le bureau, proposer de nouveau un budget qui n'est pas celui qui vient d'être adopté par l'assemblée : c'est soit celui qu'il avait proposé, soit celui qu'il avait proposé assorti d'amendements, que ces amendements aient été ou non acceptés par le conseil régional.
La commission considère qu'il s'agit d'une rupture avec le principe énoncé à l'article 72 de la Constitution et selon lequel les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus et dans les conditions prévues par la loi.
Nous sommes dans un Etat de droit. La Constitution ne donne pas la possibilité au législateur de dissocier les mots « librement par des conseils élus ».
M. Guy Allouche. Et dans les conditions prévues par la loi !
M. Paul Girod, rapporteur. Par le passé, dans un nombre de cas limités, les conseils régionaux ont refusé les budgets ou ne les ont pas votés en temps et heure. A ce moment-là intervenait la procédure de règlement d'office par le préfet, que nous avons longuement examinées à l'automne dernier et qui a abouti à une loi qui est entrée en vigueur le 7 mars 1998, c'est-à-dire récemment. Celle-ci permettait au conseil régional, sur l'initiative de son président ou si celui-ci était contré par une majorité absolue des membres du conseil régional déposant une motion de renvoi et la votant ensuite dans les mêmes conditions, sans d'ailleurs mettre en cause le président, de voter un autre budget que celui qui avait été présenté par le président. Il s'agissait alors d'un autre budget, qui faisait l'objet d'un vote du conseil régional. Par conséquent, nous étions bien dans le cadre de la libre administration par un conseil élu.
Alors que le texte comportait un certain nombre d'aspects un peu discutables, le Conseil constitutionnel, saisi par nos soins, a considéré que cette disposition n'était pas contraire à la Constitution, au motif qu'elle rendait au conseil régional, par rapport à la procédure de règlement par le préfet, une prérogative que le système antérieur lui avait retirée. Le Conseil a donc considéré que l'on allait bien dans le sens de l'article 72 conférant aux conseils régionaux librement élus, et à eux seuls, la possibilité de gérer les affaires de la région. Cela constituait un progrès.
En l'occurrence, il s'agit non plus du préfet, mais du président du conseil régional, hors le bureau. On peut d'ailleurs discuter à perte de vue sur le bureau dont les membres n'ont de véritable existence que dans la mesure où le président leur a consenti une délégation, ce qui signifie qu'il les tient. Qu'en est-il de l'aspect collégial ? En effet, les délégations sont unipersonnelles et intuitu personae ; elles sont accordées, sur signature, par le président du conseil régional et sont révocables à tout moment. On peut donc s'interroger sur le degré d'indépendance des membres du bureau par rapport au président du conseil régional.
Il s'agit là d'une petite astuce, qui permet de couvrir d'un peu de collégialité une démarche par laquelle on dessaisit en réalité le conseil régional de la responsabilité majeure que lui reconnaît l'article 72 de la Constitution.
Nous verrons d'ailleurs dans quelques instants que ce texte entraîne une série de conséquences, y compris sur le vote des impôts. Là encore, on méconnaît le principe fondamental de la loi républicaine fondée sur la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et selon lequel tout citoyen peut faire contrôler par ses représentants le bien-fondé des impôts qu'on lui impose et des dépenses que l'on décide avec les ressources ainsi soustraites à son libre arbitre.
Pour toutes ces raisons, que j'ai simplement résumées, la commission vous demande, mes chers collègues, d'adopter cette motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité constitutionnelle. Je souligne la solennité du vote que vous allez émettre. En effet, la mesure concernée vise, pour la première fois, à transposer, dans les règles de fonctionnement des collectivités territoriales librement administrées par des conseils élus - article 72 de la Constitution - les dispositions de l'article 44-3 de ladite Constitution, et qui ont été prévues au seul bénéfice du Gouvernement.
Si le constituant a pris la précaution de rédiger un tel article, c'est précisément pour rompre, s'agissant uniquement des rapports entre le Gouvernement et le Parlement, la prééminence de l'assemblée élue par rapport au Gouvernement, pour des raisons qui découlent d'ailleurs en grande partie des pratiques de la IVe République, elles-mêmes issues d'autres pratiques dont on a longuement discuté tout à l'heure à propos de la proportionnelle. C'est uniquement au bénéfice du Gouvernement que cette rupture a été acceptée.
Le fait que cette disposition ait été prévue au seul bénéfice du Gouvernement condamne, selon nous, son extension aux conseils régionaux, au détriment de la libre administration des collectivités territoriales par des conseils élus, et du libre contrôle des citoyens sur les impôts qu'ils doivent acquitter.
C'est pourquoi la commission espère que cette motion soit votée et que les dispositions visées seront sanctionnées plus tard. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Allouche contre la motion.
M. Guy Allouche. Dans la démonstration qu'il avait faite lors de la discussion de la loi du 7 mars 1998, M. le rapporteur avait mis en avant le fait que certaines dispositions étaient contraires à la Constitution. Le Conseil constitutionnel s'est prononcé : il n'a pas « cassé » lesdites dispositions, pour reprendre la terminologie employée.
Aujourd'hui, M. le rapporteur développe une argumentation un peu similaire. Cependant, il a tronqué, en quelque sorte, l'article 72 de la Constitution. Certes, comme le prévoit cet article, les collectivités s'administrent librement par des conseils élus, mais - et, pour moi, c'est l'élément essentiel du deuxième alinéa de l'article 72 - elles le font « dans les conditions prévues par la loi ». En effet, si ce membre de phrase ne figurait pas, chaque collectivité ferait ce que bon lui semble. En l'occurrence, une loi doit déterminer les conditions et c'est bien l'objet du projet de loi.
Aussi, l'argumentation que M. le rapporteur a présentée ne résiste pas, selon moi, à l'analyse juridique, car c'est la loi qui définit les conditions dans lesquelles les collectivités s'administrent librement.
Monsieur le rapporteur, je vous renvoie aux explications fournies par le Conseil constitutionnel lorsqu'il avait été saisi du texte qui est devenu la loi du 7 mars 1998. S'agissant du présent projet de loi, j'attends, pour ma part, très sereinement, la décision du Conseil constitutionnel, puisque nous savons d'ores et déjà qu'il sera saisi. Nul doute qu'il ne déclarera pas contraire à la Constitution cette disposition, car il appartient au législateur de déterminer les conditions dans lesquelles les collectivités s'administrent.
M. Paul Girod, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Girod, rapporteur. La loi, certes, mais dans le respect de la Constitution. Je le répète, il est des mots que l'on ne peut dissocier.
Je souhaite apporter une précision. A plusieurs reprises et de manière lancinante a été énoncé, par des orateurs de l'opposition sénatoriale et par le Gouvernement, l'argument selon lequel il s'agit d'éviter que le préfet ne règle... Depuis la loi de mars 1998, le préfet ne règle plus. En effet, les présidents de conseil régional ont entre les mains les moyens de faire en sorte que le préfet ne règle pas. On m'objectera que tel a pourtant été le cas dans deux conseils régionaux. Certes, mais c'est uniquement parce que les présidents concernés n'avaient pas lu le texte de la loi de mars 1998.
Par conséquent, il ne faut pas nous dire - j'y insiste parce que cet élément pèsera lourd dans les délibérations du Conseil constitutionnel - que l'article 21 vise à éviter l'intrusion du préfet. En effet, le dispositif permettant de prévenir celle-ci est déjà en place. Il s'agit donc non pas de cela, mais bel et bien de transformer la réalité du pouvoir du président du conseil régional, qui maintenant s'impose à son propre conseil nonobstant la volonté clairement exprimée de celui-ci, c'est cela qui est inconstitutionnel !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Je voudrais tout d'abord inviter M. le rapporteur à relire la décision du Conseil constitutionnel de 1998.
M. Paul Girod, rapporteur. Je l'ai fait !
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim. Il nous a lu tout à l'heure la décision du Conseil constitutionnel de 1982 concernant les questions d'égalité d'accès des hommes et des femmes en matière de fonctions politiques, et je voudrais donc lui rappeler la décision par laquelle le Conseil constitutionnel, saisi de la loi du 7 mars 1998, a validé la procédure dérogatoire d'adoption sans vote des budgets, en s'appuyant sur deux motifs : cette loi vise à « assurer le respect du principe de continuité des services publics » en permettant aux collectivités régionales de disposer d'un budget lorsque la composition de leur conseil serait de nature à y faire obstacle et, concomitamment, elle tend à mieux assurer le principe de libre administration des collectivités territoriales en évitant que les conseils régionaux ne soient dessaisis au profit du représentant de l'Etat. Telle est l'analyse du Conseil constitutionnel.
L'article 21 va-t-il au-delà de cette jurisprudence récente ? Je ne le crois pas !
En effet, cet article comporte deux dispositions.
Il vise tout d'abord à clarifier les points de procédure, c'est-à-dire à préciser que l'adoption de l'ensemble des chapitres et des articles vaut adoption du budget. On peut comprendre cette précision dans la mesure où le budget est l'acte majeur d'une collectivité territoriale, et donc le support que les citoyens sont en droit d'attendre pour la gestion de leurs élus.
Cet article vise ensuite à ouvrir une nouvelle modalité d'adoption du budget, nouvelle modalité tendant à doter la collectivité régionale d'un véritable budget, dans la mesure où le président peut provoquer une seconde délibération du conseil régional par un vote bloqué sur un projet de budget primitif auquel auront été intégrés, le cas échéant, certains des amendements soutenus au cours du débat, après accord du bureau. Il s'agit là d'une possibilité supplémentaire, avant de passer à la procédure dérogatoire d'adoption du budget sans vote, dont je vous signale, monsieur le rapporteur, que le Conseil constitutionnel a admis la constitutionnalité.
Nous respectons donc bien le principe de libre administration des collectivités territoriales, puisqu'il n'y a aucune obligation de mise en oeuvre, mais qu'une faculté supplémentaire est simplement donnée au conseil régional pour l'adoption du budget. Bien entendu, l'assemblée reste libre d'adopter ou de rejeter ce nouveau projet, et elle n'est donc pas dessaisie de ses attributions.
J'ajoute que cet article ne saurait être apprécié isolément, puisqu'il prévoit de mettre en phase une nouvelle procédure qui, en tant qu'elle est enserrée dans un délai, ne nous paraît pas mettre en cause les prérogatives de l'assemblée régionale, en l'occurrence. M. le président. Je vais mettre aux voix la motion n° 3.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. J'approuve la position de M. le rapporteur et je tiens à souligner combien il s'agit là d'un passage en force. Franchement, c'est à nouveau un mauvais coup porté aux régions !
Monsieur le ministre, voilà dix ans que je préside un conseil régional : si vous croyez que l'on tire autorité de la force, vous n'êtes pas du côté de la modernité ! (Très bien ! sur les travées du RPR.) . La modernité, c'est au contraire de pouvoir travailler avec des assemblées ouvertes. Quel est ce paradoxe qui vous conduit à être laxiste avant l'élection (Très bien ! sur les travées du RPR.) , à faire en sorte que tout le monde puisse entrer dans l'assemblée pour, après, fermer tous les verrous et organiser les passages en force ?
M. Josselin de Rohan. C'est complètement incohérent !
M. Jean-Pierre Raffarin. Si vous êtes courageux et sincère, organisez une assemblée véritablement représentative et, ensuite, que l'assemblée domine, y compris son président !
Aujourd'hui, avec des seuils de 3 % ou de 5 % des suffrages exprimés, vous organisez des assemblées dispersées qui sont ingouvernables et, ensuite, vous allez chercher des moyens coercitifs pour donner des pouvoirs extrêmes au président ! Une telle démarche va vraiment à l'encontre de la démocratie représentative !
Faites donc en sorte qu'une assemblée soit composée d'élus ayant atteint un seuil de crédibilité, et le seuil de 10 % des suffrages exprimés que nous avons proposé tout à l'heure me paraît satisfaisant à cet égard. Nous trouverons alors des majorités et nous pourrons faire en sorte qu'aient vraiment lieu, dans l'assemblée, des débats démocratiques, sans passage en force.
J'ai entendu évoquer l'intervention du préfet comme quelque chose d'infamant. Le républicain que je suis ne considère absolument pas que, pour une assemblée en situation de blocage, l'appel au préfet soit infamant.
M. Lucien Lanier. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin. Cela n'a rien d'extraordinaire, et l'on ne va pas inventer des choses pour déposséder celui qui est le partenaire quasiment quotidien de la contractualisation ! Si le fait de savoir que, pendant que les membres de l'assemblée retrouvent leur sérénité, quelqu'un va provisoirement faire le travail peut inciter ceux qui sont attachés à l'autonomie de la collectivité à dégager un accord, cela n'a cependant rien d'une infamie !
Voilà pourquoi, M. le rapporteur, dans son argumentation, voit à mon avis juste et clair. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Patrice Gélard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard. Je vais tenter de convaincre M. le ministre ! (Exlamations sur les travées du RPR.)
Un sénateur du RPR. Vous avez fort à faire !
M. Patrice Gélard. Monsieur le ministre, vous avez pour ambitions légitimes d'améliorer le fonctionnement des conseils régionaux et de rendre la démocratie plus efficace ; malheureusement, vous utilisez des méthodes et des moyens qui vont exactement à l'inverse de l'objectif recherché !
Ce qui m'inquiète le plus, c'est que les propositions que vous avez acceptées remettent en cause les acquis républicains de deux siècles de démocratie !
J'évoquerai un point précis : que voulez-vous faire avec la parité si ce n'est rétablir les états tels qu'ils existaient avant 1789 ? Alors qu'il y avait, auparavant, la noblesse, le clergé et le tiers état, il y aura maintenant les hommes, les femmes, et peut-être autre chose après ! (Protestations sur les travées socialistes.)
Que voulez-vous faire avec l'abaissement des seuils si ce n'est remettre en cause des règles que nous avons lentement dégagées après avoir commis des erreurs dans les modes de scrutin que nous avons choisis ? Nous étions tous d'accord. L'unanimité s'était dégagée sur ces seuils. Personne ne les remettait en cause, sauf, naturellement, les partis marginaux qui espéraient ainsi arriver plus vite à la représentation. Là, c'est une règle républicaine acquise de longue date qui est remise en cause !
En outre, vous montez une usine à gaz tout à fait extraordinaire qui a pour particularité de revenir à la charte de Jean Sans Terre : vous allez rétablir des barons locaux vaguement contrôlés par les membres d'un conseil, et si ces derniers ne donnent pas leur consentement à l'impôt le baron pourra lui-même décider de l'impôt à lever.
J'ai découvert avec beaucoup de satisfaction que la loi précédente a été bizarrement appliquée. Quand on voit un président de conseil régional voter contre son propre budget pour pouvoir faire ensuite ce qu'il veut avec, on rétablit ni plus ni moins les baronies.
En fait, que faites-vous, monsieur le ministre ? Avec les meilleures intentions du monde et en faisant des déclarations mettant en avant la démocratie, vous remettez en cause, en permanence, tous les principes sur lesquels cette démocratie est fondée ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Paul Girod, Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod. M. Paul Girod. Monsieur le président, je m'exprime maintenant au nom du groupe du RDSE.
Il y a des choses qu'un homme politique peut difficilement entendre ! Voilà un instant, M. le ministre nous a fait une lecture particulière d'une décision du Conseil constitutionnel. Je lui rappellerai quand même que cette décision est en grande partie fondée sur l'idée de la continuité des services publics. Encore une fois, s'il n'y avait pas eu la loi de 1998, on aurait pu, à la limite, vaguement entrer - cela aurait cependant été très difficile - dans la voie qu'il nous trace.
Mais ce gouvernement a fait adopter la loi du 7 mars 1998. Le Conseil constitutionnel l'a validée parce qu'elle représentait un progrès par rapport au système antérieur. Elle n'a même pas été appliquée, et on fait valoir maintenant l'inconvénient d'une loi dont on ne parle plus pour nous expliquer un nouveau système qui compromet totalement la libre administration par un conseil d'élus.
Très honnêtement, monsieur le ministre, je ne peux vous suivre, et la grande majorité de mon groupe, au nom duquel je m'exprime en cet instant, votera la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité, présentée par la commission des lois. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 3, repoussée par le Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet de l'article 21 du projet de loi.
(La motion est adoptée.)
M. le président. En conséquence, l'article 21 est rejeté.
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