Séance du 10 février 1999






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Nomination des membres d'une commission spéciale (p. 1 ).

3. Candidatures à une commission mixte paritaire (p. 2 ).

4. Sécurité routière. - Discussion d'un projet de loi en deuxième lecture (p. 3 ).
Discussion générale : MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Lucien Lanier, rapporteur de la commission des lois ; Mme Janine Bardou, MM. Jacques Mahéas, Pierre Hérisson.

5. Souhaits de bienvenue à une délégation de parlementaires marocains (p. 4 ).

6. Sécurité routière. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi en deuxième lecture (p. 5 ).
Discussion générale (suite) : MM. Jean-Pierre Cantegrit, Pierre Lefebvre, le ministre.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er (p. 6 )

Amendement n° 15 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur, Jacques Mahéas. - Rejet.
Adoption de l'article.

Article additionnel avant l'article 2 (p. 7 )

Amendement n° 10 de Mme Derycke. - Mme Dinah Derycke, MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas. - Rejet.
MM. Jacques Mahéas, le président, le ministre.

Article 2 (p. 8 )

Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Robert Bret. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 2 bis. - Adoption (p. 9 )

Article 2 ter (p. 10 )

Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 4 (p. 11 )

Amendement n° 16 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Division et article additionnels après l'article 7 (p. 12 )

Amendement n° 13 de M. Poniatowski. - Réserve.
Amendements n°s 9 rectifié bis de M. Cantegrit et 14 de M. Poniatowski. - MM. Jean-Pierre Cantegrit, Ladislas Poniatowski, le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas, Robert Bret, Dominique Braye, Emmanuel Hamel, Jacques Larché, président de la commission des lois ; Michel Moreigne. - Adoption de l'amendement n° 9 rectifié bis insérant un article additionnel, les amendements n°s 13 et 14 devenant sans objet.

Article 8 bis (p. 13 )

Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article additionnel après l'article 8 bis (p. 14 )

Amendement n° 11 de M. Mahéas. - MM. Jacques Mahéas, le rapporteur, le ministre, Michel Charasse, Jean-Pierre Cantegrit, Dominique Braye. - Retrait.

Article 9. - Adoption (p. 15 )

Article additionnel après l'article 9 (p. 16 )

Amendement n° 12 de M. Miquel. - MM. Gérard Miquel, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Article 12 (p. 17 )

M. Pierre Lefebvre.
Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 12 (p. 18 )

Amendement n° 17 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur. - Rejet.
Amendement n° 18 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 13 (p. 19 )

Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 14 (p. 20 )

Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 15 (p. 21 )

Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Mahéas. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Intitulé du projet de loi (p. 22 )

Amendement n° 8 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.

Vote sur l'ensemble (p. 23 )

MM. Pierre Lefebvre, Bernard Joly, Jacques Mahéas, Ladislas Poniatowski, Dominique Braye.
Adoption du projet de loi.
M. le ministre.

7. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire (p. 24 ).

8. Dépôt de projets de loi (p. 25 ).

9. Dépôt de rapports (p. 26 ).

10. Dépôt d'un rapport d'information (p. 27 ).

11. Dépôt d'un avis (p. 28 ).

12. Ordre du jour (p. 29 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

NOMINATION DES MEMBRES
D'UNE COMMISSION SPÉCIALE

M. le président. L'ordre du jour appelle la nomination des membres de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence (n° 203, 1998-1999).
La liste des candidats à cette commission spéciale établie par les présidents des groupes a été affichée et n'a fait l'objet d'aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame membres de la commission spéciale :
Mme Janine Bardou, M. Jacques Baudot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Jacques Bellanger, Claude Belot, Georges Berchet, Roger Besse, Didier Borotra, André Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Bernard Cazeau, Jean-Paul Delevoye, Léon Fatous, Bernard Fournier, Alfred Foy, Jean François-Poncet, François Gerbaud, Georges Gruillot, Pierre Hérisson, Daniel Hoeffel, Jean Huchon, Jean-Paul Hugot, Serge Lagauche, Gérard Larcher, Gérard Le Cam, Paul Masson, Gérard Miquel, Jacques Oudin, Jean-Marc Pastor, Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Bernard Piras, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Charles Revet, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Alain Vasselle.

3

CANDIDATURES A` UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que la commission des affaires économiques et du Plan m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation agricole.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.

4

SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Adoption d'un projet de loi en deuxième lecture

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi (n° 118, 1998-1999), modifié par l'Assemblée nationale, portant diverses mesures relatives à la sécurité routière. [Rapport n° 192 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le débat qui s'ouvre pour examiner, en deuxième lecture, le projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière est, on le sait, au coeur de l'actualité.
Ce qui s'est passé à la Saint-Sylvestre a suscité, à juste titre, une vive émotion chez nos concitoyens. Chacun a pu entendre l'appel de l'opinion en faveur d'une politique rigoureuse et persévérante de lutte contre l'insécurité routière.
L'année 1998 est malheureusement à marquer d'une pierre noire. Si j'en crois les bilans provisoires qui me sont fournis, le nombre des accidents corporels serait certes en baisse mais celui des tués et des accidentés graves sur les routes enregistrerait une augmentation de 4 % par rapport à 1997. Ainsi, pour la première fois depuis dix ans, nous aurons à déplorer une aggravation de la situation par rapport à l'année précédente. Nous ne pouvons nous résigner à une telle situation.
Il est, en effet, intolérable que l'on recense chaque jour, en moyenne, vingt-trois tués sur l'ensemble des routes et des rues du territoire national.
Il est intolérable que l'insécurité routière reste la première cause de mortalité de nos jeunes. Il faut une nouvelle fois rappeler que 20 % des tués dans des accidents de la route ont entre dix-huit et vingt-quatre ans, alors que cette classe d'âge représente 10 % de la population française.
Il est intolérable, enfin, qu'un pays comme la France se situe parmi les derniers du peloton des Etats membres de l'Union europénne et que le risque d'y être tué sur les routes soit deux foix plus élevé qu'au Royaume-Uni ou dans les pays scandinaves.
La comparaison entre les objectifs que nous voulons atteindre et la situation actuelle nous montre à la fois l'ampleur de l'effort à accomplir et la voie à suivre. Ce ne peut être que celle de l'initiative, du courage et du rassemblement de toutes les énergies.
Je sais, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous partagez ce sentiment, et le vote que vous avez émis en première lecture, à l'unanimité des groupes, en témoigne.
Je tiens d'ailleurs à saluer la volonté de la Haute Assemblée qui, depuis la première lecture, me semble aller tout à fait dans le sens du sursaut que j'appelle de mes voeux.
Voilà trois semaines, en effet, le président du Sénat, M. Christian Poncelet, et votre collègue M. Gérard Miquel m'ont invité à participer à un colloque sur la sécurité. Je les remercie de cette initiative, qui va tout à fait dans le sens d'une prise de conscience collective. Je sais tout particulièrement gré à M. le président du Sénat d'avoir, à cette occasion, formulé le voeu de voir l'ensemble de la Haute Assemblée manifester encore, lors de cette deuxième lecture, sa volonté de soutenir la cause de la sécurité routière.
Je suis heureux d'indiquer au passage que j'ai également reçu l'appui de mes prédécesseurs, M. Bosson et Mme Idrac, qui ont tenu à souligner combien ils partageaient les objectifs que ce projet de loi doit nous permettre d'atteindre.
Ainsi que je l'ai dit à de nombreuses reprises, l'axe porteur de notre action, c'est d'abord la formation, l'éducation, sous toutes ses formes, en vue de changer les comportements. Cela doit commencer dès la plus tendre enfance et se poursuivre tout au long de la vie du conducteur et, plus généralement, de l'usager de la route que nous sommes tous.
Sans doute peu spectaculaire, car elle est faite d'initiatives multiples et diversifiées sur tout le territoire, peut-être aussi moins médiatique, car c'est sur le long terme qu'elle peut porter ses fruits, cette orientation est, à mes yeux, la seule susceptible de nous permettre d'inscrire des résultats dans la durée.
Elle touche en effet au comportement dans ses déterminations parfois les plus profondes, et nous considérons que c'est d'abord en faisant appel à la responsabilité individuelle et en inculquant les valeurs de civisme que nous obtiendrons durablement un comportement plus apaisé sur nos routes, manifestation de ce respect de l'autre qui est indispensable à un partage harmonieux de l'espace de circulation.
A cet égard, j'indique que la mobilisation prend corps, sur le terrain, pour proposer des formations complémentairs adaptées aux conducteurs novices dans l'année qui suit l'obtention du permis de conduire. C'était, vous le savez, une des propositions du Gouvernement.
Depuis la discussion du projet de loi en première lecture, plus de trente préfectures se sont portées volontaires pour organiser à grande échelle cette offre de formation, et des sociétés d'assurance, dans le cadre d'accords conclus avec des opérateurs compétents, réalisent elles aussi des expérimentations qui seront progressivement étendues à l'échelon national pour l'ensemble de leurs jeunes adhérents.
J'évoquerai également la table ronde que j'ai animée le 18 janvier avec Mme Isabelle Massin, déléguée interministérielle à la sécurité routière, table ronde à laquelle participaient Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports, et Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargée de l'enseignement scolaire, sur le thème de la mobilisation pour la sécurité routière. Les débats ont été riches, directs : c'est ce que nous souhaitions.
Il a été décidé de constituer deux groupes de travail, chargés respectivement de réfléchir sur ce qu'on appelle les « retours de troisième mi-temps » et les sorties de discothèques.
Les réflexions de ces groupes de travail font l'objet de propositions qui seront examinées lors du prochain comité interministériel sur la sécurité routière, qui se tiendra avant la fin de ce trimestre.
L'opération « label vie » a également été lancée le 18 janvier. Il s'agit d'un appel à projets auprès des jeunes de quatorze à vingt-huit ans ; il devrait permettre la concrétisation d'initiatives prises par les jeunes en faveur de la sécurité routière. Nous espérons ainsi recueillir 1 500 projets élaborés par des jeunes pour les jeunes. Nous avons prévu une aide spécifique, qui pourra atteindre 5 000 francs, pour chacun des projets qui auront été distingués par le jury.
Mais il ne faut jamais perdre de vue qu'une politique de sécurité routière n'est efficace que si elle porte simultanément et de manière cohérente sur l'ensemble des aspects du problème.
A côté de l'éducation et de la formation, il faut également agir sur les infrastructures routières et sur les véhicules ; et, dans le même temps, il faut savoir être ferme en matière de contrôle et de sanction. Les exemples concrets le prouvent mieux que n'importe quelle démonstration théorique : les pays qui réussissent le mieux pour faire reculer l'insécurité routière sont ceux qui ont compris que le respect des règles du code de la route est une exigence première du respect de l'autre.
Je n'ignore pas que cette question du contrôle et des sanctions fait l'objet d'un débat permanent et de controverses parfois vives. Je n'ignore pas non plus que nombre de commentateurs se plaisent à opposer la formation à la répression, feignant de considérer qu'il s'agirait de choisir l'une au détriment de l'autre. En réalité, il n'en est rien et, en matière de sécurité routière, comme dans les autres domaines de la sécurité publique, il doit y avoir non seulement complémentarité mais aussi unité de conception et d'action entre ces deux éléments indissociables d'une politique efficace.
Je souhaite que le Sénat examine dans cet esprit les mesures qui lui sont soumises pour la deuxième fois.
Comme vous le savez, le projet regroupe six mesures qui font partie des vingt-cinq mesures retenues par le comité interministériel de la sécurité routière du 26 novembre 1997, lesquelles se mettent progressivement en place dans le cadre de partenariats entre les différents acteurs concernés.
Deux d'entre elles, qui figurent en quatrième et cinquième parties du projet, ont été votées dans les mêmes termes en première lecture par le Sénat, le 7 avril 1998, et par l'Assemblée nationale, le 10 décembre 1998. Elles concernent respectivement la création d'un délit en cas de récidive dans l'année pour un excès de vitesse de plus de cinquante kilomètres à l'heure par rapport à la limite réglementaire et le dépistage systématique des stupéfiants pour les conducteurs impliqués dans des accidents mortels.
Il est inutile d'épiloguer sur l'importance de ces textes dans le dispositif général ; ils constituent un signal fort à l'adresse des usagers de la route et traduisent notre volonté collective de réprimer des comportements de toute évidence inadmissibles sur la route.
Les quatre autres parties du projet de loi ont fait l'objet d'amendements de la part de l'Assemblée nationale. Qu'ils soient de pure forme ou apportent d'utiles précisions ou compléments, qu'ils aient reçu ou non l'approbation du Gouvernement, ils portent la marque de la qualité du travail parlementaire et de l'intérêt que la représentation nationale manifeste sur ce sujet.
Je me limiterai à mettre l'accent sur quelques points, sans répéter ce qui a été dit lors du débat en première lecture.
La première partie du projet de loi vise à rendre obligatoire le suivi du stage de sensibilisation aux causes et conséquences des accidents de la route pour les conducteurs novices auteurs d'infractions graves.
Le Gouvernement considère que cette formation doit s'ajouter aux sanctions déjà prévues dès lors qu'elle permet à l'auteur d'infractions de reconstituer une partie de son capital de points, dans les mêmes conditions que les stages effectués dans le cadre de la loi de 1989 sur la base du volontariat par l'ensemble des conducteurs. Préoccupée par le coût de ce stage pour les jeunes conducteurs, l'Assemblée nationale a considéré qu'il devait se substituer à la peine d'amende normalement prévue. Ce point, qui pose manifestement un problème d'équité vis-à-vis de ceux qui ont commis des infractions moins graves, me paraît devoir être débattu.
La deuxième partie du projet de loi vise à assainir le fonctionnement des établissements d'enseignement de la conduite et à améliorer la qualité de leurs prestations. A cet égard, des précisions utiles ont été apportées par l'Assemblé nationale.
La troisième partie du projet de loi a pour objet d'établir la responsabilité pécuniaire des propriétaires de véhicules en cas de contrôle sans interception dès lors que le conducteur n'a pu être identifié. A l'issue des travaux du Sénat, l'Assemblée nationale a d'ailleurs introduit des amendements qui visent à mieux expliciter la portée et les modalités d'application de cette mesure.
Je partage ce souci de clarification, tant il est vrai que nos intentions et la réalité du projet de loi lui-même ont été - vous vous en doutez - trop souvent caricaturées, voire déformées ou déviées.
Cette mesure est nécessaire pour que puissent se développer des stratégies de contrôle mieux adaptées à l'accidentologie car seuls des moyens automatiques permettent de contrôler les vitesses aux points les plus dangereux où il n'est pas toujours possible d'intercepter les véhicules. Elle est aussi nécessaire pour garantir l'égalité de tous les citoyens, de tous les usagers devant la loi. Rien dans ce texte ne permet d'évoquer, comme on l'a fait, le spectre de la délation.
Les amendements adoptés par les deux assemblées ont levé les ambiguïtés qui pouvaient éventuellement subsister. Il s'agit, vous le savez, d'étendre les règles qui régissent depuis vingt-cinq ans le stationnement à des catégories d'infractions clairement spécifiées et limitativement énumérées : excès de vitesse, franchissement d'un feu rouge ou d'un arrêt stop.
La sixième et dernière partie du projet de la loi autorise la suspension judiciaire du permis de conduire en cas de condamnation pour absence ou modification du dispositif obligatoire de limitation de vitesse sur les véhicules lourds. A cet égard, l'Assemblé nationale a adopté des amendement techniques.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales questions dont vous êtes conviés à débattre. Je voudrais saluer une nouvelle fois l'excellent travail de la commission des lois du Sénat et de son rapporteur, M. Lanier.
Le Gouvernement sera ouvert aux propositions émanant de toutes les travées de cet hémicycle. J'ai la conviction que vos travaux nous permettront de franchir une nouvelle étape vers l'adoption d'un texte dont l'unique objet est de faire reculer l'insécurité routière dans notre pays. Cet objectif requiert la mobilisation permanente de chacun de nous. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons, enfin, en deuxième lecture le projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière.
Avant même d'aborder l'étude du texte tel qu'il nous revient de l'Assemblée nationale, qu'il me soit permis de vous livrer certaines réflexions.
Dressons d'emblée un constat navrant : lors de la première lecture du projet de loi, le 7 avril dernier, le Gouvernement affichait une ambition louable et hardie à laquelle nous souscrivons de tout coeur : « Réduire de moitié en cinq ans le nombre de tués sur les routes ».
Cinglante comme un défi, la réponse nous est parvenue en début d'année : 8 312 tués en 1998 sur la route, ou plutôt par la route. Cela signifie 323 morts de plus que l'année précédente. Pour comble de détresse, la route a tué 91 personnes dans les seuls trois premiers jours de 1999. Quelles que soient les circonstances qui ont provoqué ces décès, ils sont tous égaux compte tenu de leur caractère prématuré. Tous requièrent notre tristesse face aux faits tels qu'ils sont.
En effet, le fléau s'accroît. Il prend allure de catastrophe naturelle. A cette différence près, qu'au-delà de notre bonne volonté, il doit motiver notre conscience et intégrer notre responsabilité, une responsabilité commune, dont nous devons tenir compte, car elle met en cause à la fois le législateur, l'exécutif, les usagers ou les citoyens en général.
Toutefois, et sans vouloir faire du Gouvernement le coupable dans une situation qui s'apparente à un désastre, nous ne pouvons que constater et regretter que, alors que le Gouvernement déclare si souvent l'urgence pour de nombreux projets de loi, il ait fallu attendre dix mois pour que ce texte revienne devant le Sénat après sa première lecture !
En effet, son impact n'est déjà plus le même, ses effets s'émoussent, tandis que se renforcent tant d'égoïsmes individuels et d'intérêts contradictoires, intéressés au laisser-faire, laisser-passer.
M. Louis Althapé. Absolument !
M. Lucien Lanier, rapporteur. Il reste cependant évident que l'aggravation de la situation telle que nous la constatons rend le texte qui nous est soumis tardivement en deuxième lecture déjà dépassé par l'ampleur croissante du problème. La réalité est là : le réseau routier, destiné à être vecteur d'échanges et de circulation des personnes et des biens, destiné à être source de vie, devient de plus en plus source de mort et, au-delà, d'épouvantables drames sociaux, avec les dramatiques conséquences que suscite ce qu'il faut bien appeler un fléau.
En effet, le nombre trop élevé des tués cache celui des blessés, certains étant condamnés à terme, d'autres étant devenus infirmes à vie ; j'ai mesuré leur désespoir dans les centres de rééducation. Tout cela hypothèque une part importante de la vie sociale de la nation et influe sur l'existence morale autant que matérielle de certaines familles que le désarroi de leurs proches déstabilise profondément et souvent durablement.
C'est ainsi la société française tout entière qui paie le tribut. Ce gouffre financier pour la santé, la sécurité sociale, les assurances, nous coûte beaucoup plus cher qu'une politique résolue et efficace de sécurité.
Ce tribut est, de surcroît, plus lourd chez nous que chez tous nos voisins de l'Union européenne !
Alors, pourquoi ? Oui, pourquoi ?
Cela tient, en grande partie, au fait que nous nous sommes laissé dépasser par les événements et que nous avons privilégié la répression, qui atteint aujourd'hui ses limites, jusqu'à devenir trop souvent inapplicable. Cela tient aussi au fait que la répression n'est pas toujours employée avec l'équité souhaitable et que la peur du gendarme n'est pas la panacée capable de tenir compte des profondes transformations qui déterminent la conduite d'un véhicule et l'usage de la route.
Les faits commandent : l'intensification du trafic routier, la multiplication des conducteurs - des plus jeunes aux plus âgés - la puissance et la disparité des véhicules, la diversité croissante des moyens de transport routier, la pluralité des réseaux et, surtout, la configuration des infrastructures, techniquement bonnes, mais sécuritairement insuffisantes, et parfois dépassées.
Tous ces faits sont connus, inventoriés par de nombreuses initiatives émanant du législatif, de l'exécutif, comme des spécialistes du sujet. Je vous citerai quelques exemples : le Livre blanc remis au Premier ministre en 1995, le rapport Pons en 1996, la proposition de loi de notre excellent et ancien collègue Edouard Le Jeune, les nombreuses et pertinentes propositions de tous les délégués à la sécurité routière.
Tous ont préconisé une politique préventive, généralisant l'information éducative du public autant que la formation du conducteur, pour qu'il comprenne enfin que la circulation routière est affaire de vie en société et qu'il convient d'éclairer le comportement mental du conducteur avant de le condamner. On ne prend plus la route, on la partage avec les autres.
Le problème, c'est qu'une politique de sensibilisation du public coûte cher. Elle va de pair avec une politique de sécurisation du réseau routier, un réseau partagé entre l'Etat et les collectivités territoriales. Le budget de la sécurité routière pour la communication, doté de 30 millions de francs pour la présente année, apparaît largement insuffisant, tant pour répondre à l'ampleur du problème que pour entreprendre les actions indispensables.
Nous sommes donc, monsieur le ministre, à l'heure du choix : ou bien considérer que la sécurité routière est une vraie priorité et décider de lui en offrir les moyens ; ou bien tenter, de livres blancs en projets de loi, de limiter seulement les dégâts, en sachant qu'ils ne pourront que s'accentuer face à des pis-aller et en acceptant la part du fléau. Je sais bien, monsieur le ministre, que vous n'êtes pas seul à décider, que les besoins d'une société moderne sont nombreux, exigeants, urgents. Mais choisir, c'est le propre de régir !
C'est pourquoi, voilà dix mois, dès la première lecture du projet de loi qui nous est soumis, je prédisais une reprise du nombre des accidents mortels, en indiquant que le dispositif préventif manquait de cohésion autant que d'ambition, et que le dispositif répressif était, dans plus d'un tiers des cas, inapplicable.
Ces inconvénients n'ont fait que s'accentuer depuis dix mois. Nous courons après le fléau au lieu de le précéder. Or, puis-je sans aucune acrimomie, soyez-en certains, rappeler que gouverner c'est aussi prévoir ?
Les termes du texte qui nous est soumis ne permettront pas de dominer l'ampleur du problème qu'ils cherchent à résoudre.
Ce projet de loi a toutefois le mérite d'être un complément nécessaire, mais non suffisant, du droit existant. Il met enfin l'accent sur le sens de la responsabilité personnelle, cette notion dont il est temps de rétablir la valeur, dans les esprits et surtout dans les consciences, car, sans elle, la liberté glisse subrepticement vers la licence et l'égoïsme.
Certes, ce texte ne saurait être définitif. Le problème de la sécurité routière est évolutif. Il devra être considéré dans son ensemble. Mais ce projet a au moins le mérite d'exister. N'en retardons pas davantage l'application !
Je vous proposerai donc d'examiner le texte tel qu'il nous revient de l'Assemblée nationale.
A l'article 1er, le projet de loi initial prévoyait un stage de sensibilisation pour les titulaires du permis de conduire depuis moins de deux ans, auteurs d'une infraction entraînant le retrait de quatre points, donc une infraction grave.
Le Sénat, en première lecture, avait étendu cette mesure aux conducteurs novices auteurs de plusieurs infractions successives totalisant quatre points, soit deux fois deux points, ou trois points et un point.
L'Assemblée nationale, qui a réfléchi au problème, ne nous a pas suivis. La commission des lois du Sénat vous propose d'accepter sa rédaction...
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. Lucien Lanier, rapporteur. ... ainsi que la substitution de ce stage de sensibilisation à l'amende.
Nous partageons également le souhait de l'Assemblée nationale d'un rapport d'évaluation après un an, bien que nous soyons pour la plupart sceptiques quant à l'efficacité des 350, voire 360 rapports, qui sont déjà demandés à tous les ministres. Même si elle juge préférable de laisser les ministres travailler sans leur demander sans cesse de faire un rapport dont on ignore s'il sera lu, la commission des lois se rallie finalement à la proposition de l'Assemblé nationale.
A l'article 2, relatif aux conditions de l'enseignement, la commission des lois du Sénat a accepté plusieurs amendements rédactionnels proposés par l'Assemblée nationale. Elle a notamment accepté l'insertion, dans un article additionnel, de mesures relatives aux associations, plus précises que celles que le Sénat avait présentées.
La commission a également accepté la rédaction plus précise des conditions d'aptitude professionnelle à l'enseignement que le Sénat avait introduites en première lecture.
Par ailleurs et pour rester dans une vue plus générale, j'évoquerai plusieurs articles additionnels insérés par l'Assemblée nationale.
La commission vous proposera d'accepter l'article 12, qui aggrave les sanctions en cas d'infractions commises à l'encontre d'un agent des transports publics.
Cet article a certes tous les aspects d'un cavalier et il eût mieux valu l'insérer dans la proposition de loi de notre excellent collègue M. Christian Bonnet adoptée par le Sénat en décembre dernier et actuellement « en perce » devant l'Assemblée nationale, encore que si l'article 12 est adopté par le Sénat, cette proposition de loi ne sera même pas examinée par l'Assemblée nationale, plutôt que d'introduire dans le présent projet de loi une disposition sans lien réel avec le texte.
En revanche, la commission propose de supprimer trois articles additionnels concernant les motoneiges, le marquage des bicyclettes et l'obligation de suivre une formation au code de la route pour la conduite de quadricycles à moteur. Ces articles relèvent à l'évidence du pouvoir réglementaire, et non de la loi. Ne surchargeons donc pas celle-ci, en la rendant obscure par des dispositions d'ordre réglementaire.
Par ailleurs, la commission s'est longuement interrogée sur l'article 15 tendant à prévoir un contrôle des infrastructures routières dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Voilà qui suscite tout de même quelques interrogations sur les conséquences d'une telle disposition.
En effet, en 1997, le Gouvernement avait décidé de mettre en place un audit de sécurité des nouvelles infrastructures routières. Son travail semblerait prêt. Mais la disposition telle qu'elle a été adoptée par l'Assemblée nationale est beaucoup plus ambitieuse. En effet, il n'existe, à ce jour, aucun texte définissant les normes mêmes minimales de sécurité concernant les infrastructures routières, ni les conséquences qu'il conviendrait d'en tirer.
Aucune concertation n'a eu lieu sur ce sujet, entre l'Etat et les collectivités territoriales, qui s'inquiètent, à juste titre, des conséquences non seulement financières mais également et peut-être surtout juridiques qu'ouvrirait l'article additionnel introduit par l'Assemblée nationale.
Les présidents de conseil général et l'Association des maires de France appellent à la plus grande prudence avant qu'une étude approfondie n'ait montré quel serait, pour les collectivités territoriales, le poids juridique des accidents et le poids financier de la mise du réseau, qui leur incombe, à des normes que les seuls techniciens auraient définies de manière peut-être maximaliste.
Le Sénat ne peut que comprendre les réserves des collectivités territoriales. Il doit, semble-t-il, refuser l'improvisation en la matière d'autant que la plupart des départements et des communes consacrent déjà une très forte part de leurs moyens à l'entretien de leur réseau routier.
Certes, le Sénat ne peut méconnaître la nécessité de renforcer la technique sécuritaire du réseau routier dont le bon état autant que la densité inciteraient, par un vrai paradoxe, les conducteurs à de trop grandes vitesses, cause d'accidents graves, qu'un minimum d'équipements ayant fait leur preuve pourrait et devrait sinon conjurer du moins limiter. C'est bien ce que souhaitent tous ceux qui ont en charge la délégation à la sécurité routière.
Dans cet esprit, la commission des lois vous demande, monsieur le ministre, de prévoir, dès que possible, une concertation avec les représentants désignés par les collectivités locales, afin de définir les meilleurs moyens d'assurer une sécurisation accrue du réseau local. Je vous demanderai de bien vouloir répondre à la commission sur ce point.
Tel qu'il nous est proposé, un contrôle des infrastructures routières ne peut que paraître vain et dangereux : vain, en suscitant en l'état actuel des litiges sans fin ; dangereux, parce qu'il méconnaît l'importance des conséquences juridiques et financières qui sortiraient de ce que l'on pourrait appeler, sans mauvais jeu de mots, cette boîte de pandore.
Parce que son intérêt est évident, l'ampleur du sujet mérite mieux qu'une improvisation.
Puis-je ajouter, enfin, que la commission des lois a déploré, une fois encore, la multiplicité des textes en vigueur et, surtout, leur éparpillement dans le code de la route, le code pénal, le code de la santé, le code civil, etc. ? Nous savons qu'une commission de réforme oeuvre auprès du ministère de la justice. Puisse-t-elle parvenir à établir plus de clarté pour la compréhension des textes et, surtout, pour leur cohésion.
Telles sont, monsieur le ministre, mes chers collègues, les appréciations que je me suis permis de vous communiquer. Vous ne trouverez sans doute pas que nous sonnons trop fort le tocsin car, comme nous-mêmes, vous pensez, monsieur le ministre, que le tocsin est préférable au glas, ce glas dont Ernest Hemingway disait : « Ne demande pas pour qui il sonne, il sonne pour nous. »
Sous réserve des quelques amendements qu'elle vous soumet, la commission des lois vous propose, mes chers collègues, d'adopter le présent projet de loi. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - M. Pastor applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Bardou Mme Janine Bardou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en avril 1998, lorsque nous avons examiné en première lecture le projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière, nous avions longuement évoqué l'absolue nécessité de diminuer de moitié en cinq ans le nombre des tués sur la route. Nous avions alors placé beaucoup d'espoir dans le texte que nous venions de voter.
C'est dire notre profonde déception devant la recrudescence des accidents mortels durant l'année écoulée, déception que vous partagez, j'en suis certaine, monsieur le ministre.
Ainsi, l'été particulièrement meurtrier a cassé une courbe que tous les acteurs de la sécurité espéraient avoir définitivement placée dans une perspective de baisse régulière des accidents, notamment des accidents graves.
Le nombre de morts dans les accidents de la circulation qui se sont produits le week-end du nouvel an est là pour nous rappeler cette urgence. En effet, comme l'ont rappelé M. le ministre et M. le rapporteur, on a dénombré quatre-vingt-onze morts, contre cinquante-huit l'année précédente, parmi lesquels beaucoup de jeunes.
Nous ne pouvons oublier que la tranche d'âge des 18-24 ans, qui représente 10 % de la population, représente aussi 20 % des tués sur la route, l'insécurité routière étant la première cause de mortalité chez les jeunes.
A la fin du mois d'octobre, le nombre de tués calculé sur les douze derniers mois est passé à 8 312, contre 7 989 en 1997. Ces chiffres parlent d'eux-mêmes.
L'augmentation du nombre des victimes de la route est consternante, d'autant qu'il est tout à fait regrettable et dramatique que les dispositions qui figuraient déjà dans le texte de 1997 - et qui sont reprises dans le présent projet de loi - n'aient pu, faute d'une volonté forte, être prises à l'époque par décret ou par arrêté, ce qui, depuis bientôt deux ans, aurait permis d'accroître la sécurité sur les routes.
Par ailleurs, monsieur le ministre, vous estimiez que les mesures contenues dans ce projet de loi devaient être prises d'urgence. Pourquoi ne pas avoir fait en sorte qu'elles soient votées plus tôt ?
Monsieur le ministre, je regrette de devoir le dire, il est grave d'avoir attendu autant de temps, près de dix mois, pour faire adopter ce texte relatif à la sécurité routière et qui concerne un sujet aussi lourd de conséquences, qui génère, hélas ! chaque jour des drames.
M. Dominique Braye. Il fallait déclarer l'urgence !
Mme Janine Bardou. Nous avons pourtant voté des textes déclarés d'urgence qui ne mettaient pas en jeu des vies humaines, qui avaient moins d'incidence sur la vie des familles et qui auraient pu attendre.
M. Dominique Braye. Absolument !
Mme Janine Bardou. La sécurité routière ne serait-elle pas une cause prioritaire ?
Nous devons toujours avoir à l'esprit la douleur de ceux qui ont perdu un être cher dans un accident de la route, situation que vivent chaque jour un trop grand nombre de familles françaises.
Un effort particulier devait être développé en 1999 pour mobiliser l'ensemble des citoyens à la lutte contre l'insécurité routière.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Quels moyens y sont consacrés ?
Lors de la première lecture, j'avais beaucoup insisté, monsieur le ministre, sur le rôle primordial de la prévention. En effet, si la répression est sans doute indispensable, nous en connaissons tous les limites. Elle ne peut résoudre les problèmes d'insécurité si elle n'est pas accompagnée d'actions de prévention et de sensibilisation.
En effet, chacun doit prendre conscience dès le plus jeune âge, période de la vie où l'on peut encore agir sur le comportement, que conduire est un acte important, dangereux pour soi et pour les autres. L'école doit être le lieu privilégié de la formation aux bons usages de la route.
Je constate que ce n'est pas le cas aujourd'hui. Une action interministérielle en milieu scolaire est nécessaire et doit entrer en pratique rapidement, car il faut impérativement que les jeunes adoptent de nouveaux comportements.
Dans le même ordre d'idée, sachant que le risque d'être tué par la route est multiplié par trois pour les automobilistes pendant les trois premières années qui suivent l'obtention du permis, nous devons réfléchir à la généralisation de l'apprentissage progressif de la conduite automobile sur une période de deux ans, soit par le suivi du programme de conduite accompagnée, pour lequel les statistiques prouvent les excellents résultats mais qui restent malheureusement limités, soit par l'obtention d'un permis probatoire validé après deux ans de pratique non délictueuse.
Au sujet de l'examen du permis de conduire, j'attire aussi votre attention sur le problème que pose quelquefois l'attribution de places aux candidats pour l'examen. Le système de répartition actuel fait l'objet de certaines critiques. Ne serait-il pas possible d'y apporter une solution ?
La lecture très éprouvante des journaux chaque début de semaine nous impose d'accentuer les actions de sensibilisation en faveur des jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans.
En effet, les accidents mortels, véritable hécatombe dont est victime notre jeunesse, sont malheureusement bien concentrés dans le temps : ils ont lieu à la sortie des discothèques, le soir en fin de semaine. C'est vraiment la folie du samedi soir.
Notre devoir est de protéger ces jeunes contre eux-mêmes, car ils n'ont pas toujours conscience des risques qu'ils courent.
Pourquoi ne pas insister sur les contrôles inopinés qui, en cas de résultats positifs, entraîneraient la confiscation des clefs des véhicules, l'appel d'un taxi afin de permettre aux conducteurs de regagner leur domicile en toute sécurité ? Ces mesures sont déjà pratiquées dans d'autres pays.
Mais ces actions d'éducation doivent aussi être soutenues par des campagnes de sensibilisation.
Le respect de l'autre et la liberté d'aller et venir en sécurité impliquent des règles qui doivent être appliquées, partagées, mais aussi largement expliquées.
Développer régulièrement des campagnes de sensibilisation et d'information télévisées, diffuser des messages forts faisant prendre conscience des dangers de la route peuvent modifier en profondeur certains comportements, éviter des accidents et, par là même, sauver des vies. Cette communication ne doit pas être épisodique, elle doit être présente au quotidien si nous voulons obtenir des résultats tangibles.
Encore faut-il, monsieur le ministre, que les crédits consacrés aux campagnes de communication en faveur de la sécurité routière progressent car - vous ne pouvez l'ignorer - la crédibilité de votre action est largement liée aux moyens financiers que vous accepterez de mettre en oeuvre.
Les crédits dans ce domaine sont insuffisants : la participation d'autres partenaires que l'Etat au financement de ces campagnes permettrait peut-être d'en accroître l'ampleur.
Comme vous l'avez dit à l'Assemblée nationale, monsieur le ministre, la présence des forces de l'ordre sur les routes est une nécessité pour maintenir un niveau de contrôle suffisant.
Mais l'insécurité est caractérisée aussi par les agressions dont sont victimes les agents de transport public de voyageurs - vous l'avez rappelé, monsieur le ministre - et je me réjouis de l'adoption par l'Assemblée nationale de l'article 12, visant à sanctionner de peines aggravées certaines infractions sur ces agents. Je rappellerai toutefois que c'est notre collègue M. Christian Bonnet qui, dans une proposition de loi adoptée le 10 décembre 1998 par le Sénat, avait été à l'origine de cette mesure, reprise par le Gouvernement. (Très bien ! sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
Vous conviendrez donc de la nécessité de maintenir les effectifs de police et de gendarmerie sur tout le territoire.
Par ailleurs, les investissements routiers constituent un volet indispensable à toute politique cohérente de sécurité, car celle-ci dépend aussi du niveau de qualité des réseaux routiers.
Les crédits routiers ne répondent cependant pas à cette attente. Ils sont souvent les premiers touchés par les régulations budgétaires. J'ai déjà évoqué ce problème lors de la première lecture de ce texte, et je n'y reviendrai donc pas.
Je dirai cependant un mot sur la suppression des « points noirs » du réseau routier. Dans ma précédente intervention, j'avais déjà insisté sur la résorption de ces points noirs, et je ne suis pas certaine que, depuis les dix mois écoulés, de nombreux travaux aient été réalisés ni même programmés dans ce domaine.
Il ne suffit pas de dénoncer le nombre de personnes tuées sur la route. Encore faut-il consacrer les moyens financiers pour combattre ce fléau.
Pourtant, je ne suis pas sûre que nous mettions autant de passion et de moyens pour lutter contre ce fléau que pour défendre d'autres causes, telles, par exemple, la protection de la nature et la lutte contre la pollution ; si ces dernières sont sans doute des causes nobles, elles ont cependant des conséquences bien moins dramatiques que la sécurité routière.
Après le sentiment d'horreur que nous inspire ce désastreux constat sur la route, le pire danger serait de considérer l'augmentation des accidents mortels comme étant due à la seule fatalité. Vis-à-vis des familles qui souffrent, nous sommes tous dans l'obligation de réagir.
Ce projet de loi n'est qu'un élément de la politique de la sécurité routière. Beaucoup reste à faire. Si cela dépend sans aucun doute de la responsabilité de chaque citoyen, il n'en demeure pas moins que, dans ce combat qui doit être permanent, seuls la volonté et l'engagement des pouvoirs publics pourront permettre de faire régresser durablement le nombre de victimes sur la route. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'évolution inquiétante des dernières statistiques montre combien la lutte contre l'insécurité routière est prioritaire. En effet, une nouvelle impulsion doit être donnée en matière de sécurité routière. Elle est plus que nécessaire. Au regard de la réalité des chiffres, elle est des plus urgentes. Le dernier bilan de la sécurité routière pour 1998 se révèle en effet catastrophique : 8 312 morts, soit 3,6 % de plus que la période précédente, auxquels s'ajoutent 30 000 blessés graves. Hélas ! la barre des 8 000 morts a été nettement franchie.
Comme vous-même et certains de nos collègues l'ont rappelé, monsieur le ministre, 91 morts ont été enregistrés lors du week-end du nouvel an 1999 contre 58 l'année précédente. Les principales victimes en sont les moins de vingt-cinq ans. Alors que le nombre d'accidents a été moindre, l'hécatombe humaine a été amplifiée en raison de l'aggravation des chocs subis.
Oui, il est urgent d'inverser cette tendance ! Oui, il est primordial de modifier les comportements ! Oui, il est nécessaire d'éduquer ! Oui, il est indispensable de faire respecter des règles visant à la sécurité routière !
Nul ne peut y déroger. Automobilistes, motards, cyclomotoristes, camionneurs et même parlementaires, tout conducteur de véhicule roulant...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Absolument !
M. Jacques Mahéas. ... a le devoir, en tant que citoyen responsable, de préserver la vie d'autrui et sa propre vie en se conformant au droit routier que nous nous efforçons aujourd'hui d'améliorer. Je me félicite tout particulièrement de la sagesse du Parlement qui a adopté conformes les articles relatifs au principe du « propriétaire-payeur » et au « délit de récidive de grande vitesse » , dont l'objet a suscité des excès de paroles allant au-delà de ce qui était raisonnable au regard des victimes.
La Haute Assemblée avait adopté à l'unanimité, en première lecture, le projet de loi que nous examinons de nouveau. Comme l'a indiqué M. le rapporteur, ce texte ressort incontestablement enrichi des travaux de l'Assemblée nationale. Nous y adhérons d'autant plus que nos collègues députés y ont apporté d'utiles améliorations et n'ont pas hésité à le compléter par des dispositions nouvelles.
S'agissant par exemple, à l'article 1er, de la disposition qui oblige les jeunes conducteurs auteurs d'infractions graves - il s'agit des infractions entraînant une perte de quatre points du permis de conduire - à suivre une formation de sensibilisation aux causes et conséquences des accidents de la route, il était préférable de prévoir que cette formation se substituerait à l'amende, afin de ne pas pénaliser financièrement des jeunes aux ressources modestes. Cette substitution de l'obligation de stage à l'amende est une bonne chose, monsieur le ministre. Il était en effet souhaitable de privilégier une sanction permettant d'améliorer la prévention.
Par ailleurs, en ce qui concerne l'enseignement de la conduite, des dispositions nouvelles contribuent à moraliser le secteur tout en prenant en compte l'existence des auto-écoles associatives. Accorder aux associations d'insertion la possibilité d'enseigner la conduite est une excellente chose. Je m'en réjouis d'autant plus que j'ai eu l'occasion d'insister, dans cet hémicycle, sur leur utilité sociale.
Ces deux exemples, qui ne sont bien sûr pas les seuls, suffisent à justifier le soutien que nous apportons au texte que vous nous soumettez, monsieur le ministre.
Toutefois, je me permettrai de souligner quelques carences - le mot est peut-être un peu fort - auxquelles nous pouvons aujourd'hui remédier.
Premièrement, si l'obligation faite aux auto-écoles de conclure un contrat écrit avec leurs candidats constitue une avancée indéniable, il me paraît cependant souhaitable de compléter ce dispositif en garantissant la bonne exécution du contrat. En effet, en cas de cessation d'activité de l'entreprise, le contrat ne garantit absolument pas que le candidat pourra être remboursé ou continuer sa formation jusqu'au bout. Une garantie d'exécution de ce contrat jusqu'à son terme mérite d'être introduite, afin de préserver les intérêts de ceux qui veulent apprendre à conduire. A cet égard, je compte sur vous, monsieur le ministre, puisque vous vous êtes engagé, devant nos collègues de l'Assemblée nationale, à proposer une disposition à cette fin.
Deuxièmement, concernant le contenu de la formation au permis de conduire, il serait utile d'y introduire la connaissance des notions élémentaires de premiers secours, à savoir l'apprentissage des cinq gestes qui sauvent. Mme Dinah Derycke défendra d'ailleurs un amendement sur ce point.
Cet apprentissage réclame très peu de temps. Lorsque survient un accident de la route, il s'écoule jusqu'à l'arrivée des secours un laps de temps durant lequel tout peut parfois se jouer : la vie ou la mort. Dans beaucoup de circonstances, la rapidité est primordiale. Elle peut sauver des vies. C'est pourquoi chaque conducteur devrait être en mesure de pratiquer les « cinq gestes qui sauvent ». Ce serait une façon concrète de compléter le savoir acquis dès l'école, dans le cadre de l'éducation civique, sur la sécurité routière et les règles du code de la route, et il conviendrait d'introduire cet apprentissage dès l'enseignement primaire.
Troisièmement, force est de constater que l'amélioration des équipements des véhicules incite les conducteurs à rouler de plus en plus vite. Plus la voiture est confortable, plus le conducteur se sent en sécurité et plus il a tendance à appuyer sur l'accélérateur. Paradoxalement, ce sentiment de sécurité peut le pousser à l'imprudence. En vue d'éviter ces effets pervers, il conviendrait - M. Gérard Miquel évoquera d'ailleurs ce point - de faire installer dans chaque véhicule une alarme sonore et visuelle, inviolable, déclenchée lors du dépassement de la vitesse maximale autorisée.
A propos de la vitesse, il serait bon de tenter de dissuader les automobilistes, les camionneurs et les motards de commettre des infractions, en état d'ébriété ou non, par des campagnes de communication télévisuelle. Parallèlement à la mise en oeuvre des mesures de prévention et de répression, qui invitent les conducteurs à modifier leur comportement, l'organisation de campagnes d'information et de sensibilisation mérite d'être largement confortée. Attention cependant à ne pas se lancer dans des campagnes publicitaires s'adressant, comme c'est trop souvent le cas, à des initiés : pour les comprendre, il faut les décrypter ! Prenons donc exemple sur les Britanniques, et passons des spots simples, clairs, à la portée de tous. Même si, parfois, leur réalisme peut choquer, ils ont au moins l'avantage d'être captés et compris par tout le monde. Dès lors, l'objectif de dissuasion peut être atteint.
Quatrièmement, ce projet de loi peut être l'occasion de soulever le problème de l'usage des rollers et des patins à roulettes sur les trottoirs et sur la voie publique. Faute de respecter, le plupart du temps, les normes de la circulation, leurs utilisateurs sont responsables de chocs parfois dangereux pour eux-mêmes et pour les passants qui en sont victimes. Permettez-moi d'insister à nouveau, monsieur le ministre, sur la nécessité d'adopter une réglementation adaptée au développement de ces pratiques.
Enfin, en accord avec la commission des lois, je considère que l'article 15, introduit par l'Assemblée nationale, comporte des dispositions prématurées. Que le contrôle de la sécurité des infrastructures routières soit important ne fait aucun doute. Les études en cours et les visites de sécurité avant toute mise en service des projets routiers contribuent à l'améliorer. Il semble en revanche prématuré d'imposer, par cette loi, cette méthode aux infrastructures neuves et de surcroît existantes sans préalablement organiser une concertation avec les élus locaux et les représentants de l'Etat en matière d'équipement, tant la responsabilité de ces derniers est engagée et tant les problèmes juridiques soulevés sont nombreux. En conséquence, la suppression de cet article paraît plus sage.
En conclusion, j'insisterai sur l'importance de ce texte. L'insécurité routière n'est pas une fatalité. Bon nombre d'accidents de la route peuvent être évités. Ce projet de loi y contribue. Son adoption est d'autant plus décisive qu'elle représente une étape obligée dans le processus de lutte contre l'insécurité routière dans lequel s'est engagé le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, indéniablement, ce projet de loi suscite de nombreuses réactions. Chacun d'entre nous a, sur ce sujet, des positions affirmées. Pour ma part, j'estime que l'amélioration de la sécurité sur nos routes ne passe pas uniquement par des mesures législatives et réglementataires, mesures d'ailleurs marquées par un excès de répression. (M. le ministre proteste.)
Lors de la première lecture, mon collègue Jean-Pierre Cantegrit et moi-même avions soulevé un certain nombre de problèmes de nature juridique. Je constate que ces problèmes demeurent à l'issue de l'examen du projet de loi par nos collègues députés.
Ainsi, le principe du propriétaire-payeur, heureusement amputé de l'incitation à la délation, est une atteinte au droit du citoyen. (M. le ministre s'exclame.)
Il ignore la présomption d'innocence du propriétaire du véhicule, pourtant garantie de façon générale par la Constitution, présomption d'innocence que le garde des sceaux souhaite renforcer dans le cadre de la réforme de la justice. Vous en conviendrez, monsieur le ministre, la cohérence de l'action gouvernementale est loin d'être évidente sur ce sujet.
Par ailleurs, cette mesure cherche à sanctionner non pas l'auteur de l'infraction mais le détenteur de la carte grise du véhicule. Dès lors, on peut douter des résultats quant à une modification du comportement du conducteur, surtout lorsque l'on sait que 45 % des véhicules ont au moins deux conducteurs.
Je persiste à croire que le délit de très grand excès de vitesse ne produira pas les effets que vous escomptez. Le respect des limitations est-il à lui seul garant de la sécurité ? Cette mesure, qui ne concernera qu'un très faible nombre d'automobilistes, n'a qu'un effet d'annonce qui masque les véritables mesures capables d'améliorer de façon pérenne la sécurité routière.
Toutefois, monsieur le ministre, bien conscient des priorités, j'avais voté ce texte en première lecture et je ferai de même aujourd'hui, sous réserve que vous preniez en compte les propositions de la commission des lois.
Un certain nombre de mes collègues s'étant déjà exprimés sur le projet de loi, j'aborderai de façon plus globale les problèmes d'amélioration de la sécurité des usagers de la route, et plus particulièrement les infrastructures.
Nous pouvons dire aujourd'hui : « Stop à l'hypocrisie ! » En effet, comment accepter, alors que la vitesse maximale autorisée sur les autoroutes est limitée à 130 kilomètres à l'heure, que les constructeurs automobiles continuent de construire des véhicules dont la vitesse maximale se situe entre 200 et 240 kilomètres à l'heure, soit quasiment le double de la vitesse autorisée ? Ne pourrait-on pas, comme cela a été fait pour les poids lourds, limiter la vitesse par des moyens techniques appropriés ?
Par ailleurs, comment inciter au renforcement du transfert du fret de la route en direction du fer et à l'amélioration des délais d'acheminement des marchandises par le fer, quand on sait qu'un conteneur chargé sur un wagon met parfois jusqu'à dix-sept jours pour aller d'un pays de la Communauté à un autre, alors qu'il suffit de deux à trois jours par la route ? Il est vrai que la réglementation n'est pas, dans ce cas, toujours respectée !
Ma remarque se veut tout à fait positive : il faut aujourd'hui améliorer la rapidité de déplacement du fret marchandises par le fer. Nous n'incitons pas suffisamment les entreprises de l'Union européenne à utiliser la voie ferroviaire pour le transport des marchandises...
M. Emmanuel Hamel. Et la voie d'eau ?
M. Pierre Hérisson. ... dans de bonnes conditions de délais et d'acheminement. Cette question mérite d'être examinée attentivement, car une telle solution permettrait d'alléger le trafic des poids lourds sur le réseau routier et autoroutier.
Je crois, monsieur le ministre, que, au-delà d'une réglementation dont nous voyons apparaître les limites en termes d'efficacité, il convient aujourd'hui de prendre des décisions qui touchent à la réalité du problème et à l'objectif de la diminution du nombre de morts sur nos routes. Il faut, par conséquent, mettre l'accent sur l'urgence de l'amélioration des équipements routiers et ferroviaires.
J'ai rencontré très récemment les usagers de la route dans mon département. Ils sont prêts à s'investir dans un partenariat fondé sur la sensibilisation de tous au partage de l'espace routier, dont nous ne tenons pas assez compte aujourd'hui. Il s'agit d'un problème d'éducation et de formation : nos concitoyens doivent respecter cette notion de partage, qui ne figure aujourd'hui ni dans le code de la route ni dans les différents textes que nous avons été amenés à adopter.
Par ailleurs, s'agissant d'efficacité, monsieur le ministre, il faut arrêter de nous dissimuler derrière les contrats de plan Etat-régions : l'amélioration de notre réseau routier ne doit pas dépendre du calendrier de ces contrats.
La contribution de l'Etat à l'amélioration du réseau routier ne représente que 1 % du budget de la nation par an, et, là encore, je fais preuve d'optimisme ! Trouvons donc ensemble les moyens financiers, faisons preuve d'imagination, avec les péages urbains notamment, dégageons de nouvelles possibilités pour financer les infrastructures. Laissons les régions et les départements réaliser des infrastructures de sécurité, libérons-les des inerties de l'Etat dans ce domaine.
Une politique de sécurité routière efficace doit être élaborée en concertation avec les usagers de la route et non pas contre eux. C'est la seule manière de produire des résultats stables et durables pour l'avenir de tous.
Votre texte, monsieur le ministre, ne remplit pas toutes les conditions indispensables. Il reste très sélectif, même s'il vise, j'en conviens, la priorité qui consiste à diminuer le nombre d'accidents.
Ne serait-il pas possible d'examiner rapidement et plus globalement le problème de la sécurité routière ? Nous ne pouvons pas nous contenter d'une situation où Bercy se satisfait de l'amélioration des recettes fiscales, qui reposent sur l'une des principales assiettes que constitue aujourd'hui l'automobile, sans consacrer par ailleurs des crédits suffisants à l'amélioration du réseau routier, de plus en plus chargé en raison de l'augmentation non seulement de la population mais, aussi du nombre de véhicules, qui a crû dans des proportions considérables dans notre pays.
Il nous appartient de trouver ensemble des solutions, qui ne soient pas seulement législatives. Je le dis au nom de l'ensemble des maires de notre pays et des responsables de collectivités territoriales, nous manquons terriblement d'imagination dans ce domaine.
Enfin, je voudrais terminer en évoquant un sujet qui touche particulièrement ma région. J'ai bien compris que la commission des lois sollicitait le règlement pour traiter un certain nombre de sujets. Or, en ce qui concerne les motoneiges, je voudrais vous entendre, monsieur le ministre, promettre devant le Sénat que le sujet sera bien réglé, en termes d'identification, par la voie réglementaire, et dans des délais relativement brefs. Mon collègue M. Jean-Paul Amoudry, qui s'est rendu aujourd'hui en Haute-Savoie pour des raisons que vous connaissez, souhaitait vous poser cette question. Je termine donc mon propos en vous demandant une réponse précise sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

5

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION
DE PARLEMENTAIRES MAROCAINS

M. le président. Mes chers collègues, je suis heureux de saluer la présence dans notre tribune officielle d'une délégation de la Chambre des conseillers du Royaume du Maroc, conduite par son président, M. Mohammed Jalal Essaid.
A l'invitation du président du Sénat français, les membres de la délégation de cette assemblée nouvellement créée séjournent en France pendant quelques jours.
Un accord de coopération interparlementaire entre nos deux assemblées couronne cette importante visite.
Au nom du Sénat tout entier, je leur souhaite une très chaleureuse bienvenue et je leur transmets des voeux très sincères pour le développement harmonieux et pacifique de leur pays ainsi que pour l'avenir de l'institution qu'ils représentent. (M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

6

SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Suite de la discussion et adoption
d'un projet de loi en deuxième lecture

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant diverses mesures relatives à la sécurité routière.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous allons donc aujourd'hui examiner en deuxième lecture le projet de loi qui avait été soumis au Sénat le mardi 7 avril 1998 et qui nous revient de l'Assemblée nationale, où il a été amendé.
Permettez-moi une observation liminaire : pourquoi un délai si long pour examiner à nouveau un texte qui clame haut et fort la dégradation de la sécurité routière et justifie ainsi une lourde répression ? Le calendrier parlementaire ne peut expliquer un tel délai lorsqu'il s'agit de la sécurité de millions d'automobilistes.
Mais venons-en à l'essentiel. Même si le texte que vous nous soumettez, monsieur le ministre, ne me satisfait pas en de nombreux points - et je vais développer ces derniers dans un instant - je constate que le passage de votre projet devant les deux assemblées parlementaires n'a pas été inutile...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Absolument !
M. Jean-Pierre Cantegrit. ... et a ébranlé certaines des certitudes que vous aviez initialement.
Pourquoi votre texte ne me satisfait-il pas alors qu'il comporte de bonnes choses, notamment sur la formation spécifique des conducteurs novices auteurs d'infractions, sur des dispositions relatives à l'enseignement de la conduite et de la sécurité, ou encore sur certaines dispositions diverses sur le transport routier des personnes et des biens ?
Votre texte, monsieur le ministre, me paraît incomplet sur certains points et répressif sur d'autres.
Il est incomplet sur les mesures d'éducation, que vous n'abordez pas, sur l'éducation à l'école de la sécurité routière. Pourquoi, en liaison avec votre collègue chargé de l'éducation nationale, ne pas nous présenter un plan, un calendrier détaillé, nous indiquant quelle éducation va être prodiguée à nos enfants en matière de sécurité routière, combien d'heures seront réservées à un tel enseignement et quel sera son contenu ? Voilà ce que nous attendons de vous et que nous ne trouvons pas dans votre projet de loi.
M. Emmanuel Hamel. Là, il deviendrait populaire !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Votre texte est ainsi incomplet sur la définition des infractions que vous avez décidé de sanctionner, puisqu'il laisse une large part à la répression.
Vous déplorez à juste titre que le nombre de tués et d'accidentés soit très excessif et que notre pays ait un piètre classement dans ce domaine par rapport à d'autres pays européens, principalement au nord de l'Europe. Si vous avez, monsieur le ministre, comme moi-même, conduit récemment une automobile en Grande-Bretagne, en Suède, en Allemagne, qu'avez-vous constaté ? Que le comportement des automobilistes français est différent de celui des conducteurs des pays que je viens de citer.
En Grande-Bretagne, en Suède, en Allemagne, sur l'autoroute, on ne slalome pas : lorsque l'on double, on prévient, et on se rabat ensuite.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Absolument !
M. Jean-Pierre Cantegrit. En Grande-Bretagne, en Suède, en Allemagne, on ne suit pas le véhicule qui vous précède de quelques mètres : on laisse une marge de sécurité qui évite des collisions en cas de ralentissement rapide.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Absolument !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Dans les pays que je viens de citer, les motocyclistes ont un comportement beaucoup plus responsable qu'en France.
M. Jean Chérioux. C'est important !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Ils vont moins vite, ils ne slaloment pas entre les voitures, ils sont plus responsables dans leur conduite routière.
Dans les pays que je viens de citer, les véhicules roulent plus lentement et plus prudemment en ville.
Dans les pays que je viens de citer, les véhicules me paraissent en meilleur état.
Je pourrais encore longtemps insister sur ce qui différencie les automobilistes de notre pays de ceux du nord de l'Europe et sur ce qui explique les mauvais résultats, en matière de sécurité routière, qu'indiquent les statistiques.
M. Emmanuel Hamel. C'est la carence de l'éducation civique !
M. Jean Chérioux. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Pour la France, que nous proposez-vous, monsieur le ministre ? Je ne trouve rien !
Mais votre texte est aussi répressif en de nombreux points, notamment en ce qui concerne la responsabilité pécuniaire des propriétaires de véhicules.
Certes, la discussion et les amendements ont amélioré vos propositions initiales, mais cette dénonciation que doit faire le propriétaire du véhicule...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Non !
M. Jean-Pierre Cantegrit. ... sous peine d'être injustement condamné me choque profondément.
Votre texte est répressif, monsieur le ministre, en ce qui concerne la vitesse, source, d'après vous, de tous les maux ou presque.
Si j'en juge par mon expérience personnelle, je dirai qu'il est vrai qu'un automobiliste français roule un peu plus vite qu'un Anglais, plus vite qu'un Suédois, mais qu'il ne roule pas plus vite, et peut-être moins, que l'automobiliste allemand ; pourtant, les dernières statistiques du nombre de tués à trente jours par million d'habitants pour l'année 1996 indiquent 106 tués en Allemagne, contre 146 tués en France.
Alors, oui à une répression accrue pour les délits de dépassement de vitesse autorisée en ville ; oui à une répression accrue pour le dépassement de vitesse autorisée sur route limitée à 90 kilomètres à l'heure ; mais non pour votre répression excessive en cas de dépassement de vitesse sur autoroute et sur voie expresse. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
Je voudrais maintenant vous entretenir des dispositions relatives à l'instauration d'un dépistage systématique de l'alcool et des stupéfiants pour les conducteurs.
M. Ladislas Poniatowski. Très bien !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Certes, en matière de dépistage de l'alcool au volant, des mesures - pour certaines déjà anciennes - permettent, si elles sont appliquées, de déterminer le taux d'alcoolémie et de frapper les responsables qui ont dépassé le taux autorisé. Mais, monsieur le ministre, le comportement des automobilistes français n'est pas, dans ce domaine, comparable à celui des automobilistes du nord de l'Europe.
En Suède, en Norvège, où je viens de me rendre dans le cadre de mon mandat parlementaire, quand vous recevez à déjeuner ou à dîner des amis ou de la famille, un des membres invités ne boira pas d'alcool et conduira le véhicule au retour. En France, nous n'en sommes pas encore là, et cela pèse certainement sur les mauvais chiffres de la sécurité routière.
Alors, pour améliorer le comportement des Français, que nous proposez-vous dans votre texte, quel projet d'éducation pour nos enfants formulez-vous ? Je ne trouve rien dans votre projet de loi.
Le dépistage systématique des stupéfiants que vous nous proposez ne me stupéfie pas.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Tant mieux !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Vous vous limitez à un dépistage en cas d'accident mortel et les explications exhaustives que vous nous donnez pour justifier cette limitation ne me convainquent pas.
Comment pouvons-nous accepter que nos concitoyens soient victimes d'accidents graves, les laissant invalides - quelquefois pour le reste de leur vie -, victimes d'un conducteur sous l'influence de stupéfiants, sans qu'aucun dépistage ne soit entrepris ? C'est inadmissible, choquant ! Ce qui est possible en Espagne, en Belgique et au Danemark doit être également possible en France.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Ladislas Poniatowski. Bravo !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Mettez les moyens en place et ne nous parlez pas d'absence de budget : les contraventions à 25 000 francs que vous nous proposez permettront d'effectuer de tels contrôles !
Nous avons tous été choqués, monsieur le ministre, par le nombre de décès dus à des accidents de la route et qui intéressaient principalement des jeunes qui fêtaient le nouvel an 1999 ; M. le rapporteur y a fait allusion tout à l'heure. Certes, l'alcool est pour beaucoup dans ces accidents, mais la prise de stupéfiants est aussi une des causes de cette hécatombe, stupéfiants d'ailleurs souvent mélangés à de l'alcool, ce qui accroît le risque.
Je ne pourrai donc me contenter de votre proposition de dépistage en cas de décès. Les mesures prises en ce qui concerne le dépistage et la répression de ceux qui font usage de stupéfiants doivent être comparables à celles qui ont été prises pour le dépistage et la conduite sous l'empire de l'alcool.
Votre proposition est donc, en tout cas sur ce point, incomplète. Elle ne tient pas compte de l'augmentation dramatique des prises de stupéfiants, en particulier chez les jeunes.
Je sais que vous envisagez des actions préventives et des contrôles dans les discothèques et les boîtes de nuit. Je ne peux que me féliciter de cette initiative si vous la mettez en oeuvre rapidement et efficacement.
Cela étant, le Sénat s'honorerait en votant un amendement additionnel après l'article 7, inspiré de celui que la commission des lois avait présenté à notre Haute Assemblée en première lecture, et qui permettra de sanctionner les personnes qui mettent en danger la vie d'autrui en conduisant sous l'empire de stupéfiants.
En conclusion, monsieur le ministre, si certaines dispositions de votre texte sont souhaitables, je regrette qu'elles soient incomplètes. Je regrette le côté répressif de votre projet de loi et l'absence de propositions novatrices efficaces que nous sommes en droit d'attendre sur un sujet qui touche des millions d'automobilistes et dont les conséquences sont considérables quant à la vie de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 7 avril dernier, le Sénat adoptait à l'unanimité ce projet de loi que nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture, témoignant ainsi de l'engagement solidaire et volontaire du législateur dans la lutte contre l'insécurité routière.
Depuis dix mois - c'est long ! - ce texte a suscité de nombreux débats, des manifestations, parfois même de vives confrontations, que ce soit dans les médias ou lors des différentes rencontres que chacun d'entre nous a pu mener ou organiser.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est vrai !
M. Pierre Lefebvre. Certaines critiques ont eu, il faut le reconnaître, un caractère excessif ; d'autres, en revanche, méritent d'être entendues, dès lors qu'elles s'inscrivent dans l'objectif que nous nous sommes fixé de réduire de moitié d'ici à cinq ans le nombre de tués sur les routes.
Si ce projet de loi a été bien accueilli par tous les acteurs de la sécurité routière, deux dispositions semblent poser problème : la responsabilité pécuniaire du propriétaire d'un véhicule en infraction avec le code de la route, d'une part ; le délit de grand excès de vitesse en cas de récidive, d'autre part.
J'observe, tout d'abord, que ces mesures, si elles ont un caractère répressif réel, ne sont pas dénuées pour autant de vertus pédagogiques.
S'agissant, tout d'abord, de la responsabilité pécuniaire du titulaire de la carte grise, le texte précise qu'elle n'implique pour ce dernier aucune conséquence d'ordre pénal, l'objectif étant, je le rappelle, de favoriser l'égalité des citoyens devant la sanction.
Cette mesure peut cependant faire l'objet de deux critiques.
La première, c'est qu'elle frappe sans discernement le propriétaire du véhicule, ignorant par là même la responsabilité du conducteur fautif.
Pour autant, de ce point de vue, il ne me paraît pas scandaleux de responsabiliser le propriétaire lorsque celui-ci confie son véhicule à un tiers, le plus souvent un membre de sa famille.
En outre, le conducteur à l'origine de l'infraction est lui-même responsabilisé dans la mesure où il fait porter la sanction sur une autre personne du fait de sa mauvaise conduite.
La seconde critique - elle n'est pas mince ! - réside dans la difficulté que peut rencontrer, le cas échéant, le propriétaire de bonne foi pour utiliser son droit de défense. Il nous paraît essentiel, à cet égard, que le propriétaire qui n'est pas l'auteur de l'infraction relevée puisse bénéficier de tous les moyens pour faire valoir ses droits s'agissant de l'application d'une mesure, rappelons-le, administrative.
En ce qui concerne le délit de grand excès de vitesse, en cas de dépassement de la vitesse autorisée de plus de cinquante kilomètres à l'heure, il n'est pas inutile de répéter qu'il n'est constitué que lorsqu'il y a récidive dans l'année qui suit le premier contrôle.
Rappelons-nous que la mesure préconisée, en son temps, par M. Bernard Bosson était exclusivement répressive. Celle-ci nous semble plus souple et plus préventive dans son application.
En effet, si l'on peut objectivement concevoir qu'un conducteur puisse commettre un excès de vitesse de cette ampleur par inattention ou par inadvertance, force est de reconnaître que commettre la même erreur dans les mêmes conditions moins d'un an après le premier avertissement ne peut relever du hasard.
En tout état de cause, il reviendra au juge d'apprécier, le moment venu, la menace que fait peser sur autrui tel ou tel conducteur contrôlé par deux fois pour grand excès de vitesse. Il est bien évident qu'un conducteur ayant dépassé à deux reprises les 180 kilomètres à l'heure sur une autoroute parfaitement dégagée ne peut être traité de la même façon que celui qui est contrôlé à plus de 100 kilomètres à l'heure en pleine agglomération.
A défaut de mettre en place une modulation de la mesure selon le réseau emprunté, il est nécessaire, à mon avis, de prévoir une modulation de la peine en fonction du danger présenté par la conduite de l'intéressé.
Sous réserve de ces observations, le groupe communiste républicain et citoyen souscrit pleinement aux dispositions de ce texte.
Le triste bilan statistique de l'année écoulée, de même que l'hécatombe meurtrière du nouvel an, ne peuvent que nous renforcer, les uns et les autres, dans notre conviction qu'il est nécessaire d'user des grands moyens pour combattre l'insécurité routière.
Cela ne signifie, en aucun cas, alourdir toujours et encore l'arsenal répressif, mais appréhender la politique de sécurité routière de façon globale et transversale en agissant simultanément sur la responsabilité du conducteur par la formation, l'éducation, la prévention - mais aussi, lorsque c'est nécessaire, par la répression - et sur la responsabilité des constructeurs automobiles et des publicitaires, qui tendent à vouloir donner une image de la voiture rassurante, surprotégée, lieu de confort à l'excès, déconnectée de son environnement immédiat et en dehors de la vie sociale.
M. Emmanuel Hamel. Très juste remarque !
M. Pierre Lefebvre. Je fais notamment allusion à cette publicité où l'on voit la belle Claudia Schiffer sortir pimpante de son véhicule, sans même être ébouriffée, après avoir percuté violemment un obstacle.
Il convient d'agir, enfin, sur la responsabilité des pouvoirs publics en favorisant la sensibilisation et la formation des enfants dès le plus jeune âge, en se donnant les moyens d'aménager le réseau routier, en coopération, d'ailleurs, avec les collectivités locales, afin de limiter autant que faire se peut la gravité des accidents de la circulation, de prévenir le conducteur des dangers potentiels et, enfin, de sécuriser les infrastructures par des investissements adaptés.
La politique du Gouvernement en matière de sécurité routière ne se résume pas et ne se réduit pas à ce projet de loi, et encore moins aux deux mesures que j'évoquais il y a un instant. Diverses décisions ont d'ores et déjà été prises ; d'autres font l'objet d'une concertation plus approfondie.
Un second comité interministériel de la sécurité routière est annoncé pour les prochains jours. Il sera l'occasion, je le souhaite, de conforter et de renforcer l'action gouvernementale, en y associant étroitement l'ensemble des acteurs de la sécurité routière et des élus locaux.
Dans ce cadre, je me permets d'inviter le Gouvernement à privilégier l'action de formation en direction des jeunes dès l'école primaire et à améliorer la préparation au brevet de sécurité routière, le BSR, qui, convenons-en, reste d'application diffuse et peu efficace.
Par ailleurs, ne conviendrait-il pas de renforcer les contrôles pédagogiques auprès des établissements d'enseignement de la conduite, en donnant les moyens aux inspecteurs de la sécurité routière d'accomplir leur travail, si besoin est en y associant plus étroitement les professionnels ?
Chacun veut bien reconnaître, aujourd'hui, le faible impact des contrôles appliqués aux programmes de formation et leur caractère aléatoire. Il serait nécessaire d'approfondir ce sujet afin de créer les meilleures conditions d'accueil des candidats au permis de conduire.
Enfin, je milite, en ce qui me concerne, en faveur d'une grande campagne nationale d'information continue utilisant tous les supports médiatiques pour, enfin, frapper les esprits et faire prendre conscience des dangers quotidiens de la route.
M. Lucien Lanier, rapporteur. C'est parfait !
M. Pierre Lefebvre. En attendant, monsieur le ministre, sous réserve de la discussion des amendements retenus par la commission, nous renouvellerons notre vote positif de la première lecture, avec toutefois un avis beaucoup plus réservé sur l'article 12 nouveau, sur lequel j'aurai l'occasion de revenir plus amplement dans la suite de la discussion. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes. - M. le rapporteur applaudit également.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux, en l'instant, répondre de façon globale aux interventions qui viennent d'être faites, me réservant la faculté de revenir plus précisément sur tel ou tel point lors de l'examen des amendements.
Je tiens, tout d'abord, à souligner combien je me félicite que nous partagions le même objectif qui est de tout mettre en oeuvre pour parvenir à réduire de moitié en cinq ans le nombre de tués sur les routes de France.
Les routes de France, c'est tout à la fois 8 000 kilomètres d'autoroutes, 24 000 kilomètres de routes nationales, 360 000 kilomètres de routes départementales et 480 000 kilomètres de voirie communale. Voilà le domaine sur lequel nous devons travailler !
Plusieurs intervenants se sont émus - je les comprends - que, face à l'urgence du problème, on mette tant de temps à voter la loi.
Cela s'explique, pour une part, bien sûr, par l'encombrement de l'ordre du jour parlementaire. Cela étant, nous n'avons pas attendu que la loi soit votée pour commencer à mettre en oeuvre des mesures concrètes. Des décisions ont été prises, des décrets ont été élaborés, ou sont en cours de publication - j'y reviendrai. Depuis le comité interministériel sur la sécurité routière, le Gouvernement s'est donc efforcé d'agir.
Il n'empêche, moi aussi, pour parler franchement, j'ai parfois le sentiment qu'entre le moment où l'on annonce les décisions et le moment où elles trouvent leur traduction sur le terrain le temps est trop long.
Une autre critique qui est revenue souvent est que cette loi ne comporterait pas toutes les dispositions nécessaires en matière d'éducation, de prévention, de changement des comportements, etc.
Bien évidemment, ce n'est pas seulement avec ce texte de loi que nous réglerons les problèmes de la sécurité routière, même s'il comporte des mesures préventives, d'éducation, de formation, de responsabilisation - M. Lefebvre en a parlé - et des mesures répressives ou ressenties comme telles. Bien d'autres mesures, qui ne relèvent pas de la loi - heureusement, d'ailleurs - participent au dispositif d'ensemble de la lutte contre l'insécurité routière. Aujourd'hui, nous débattons de mesures qui relèvent plus particulièrement de la loi. Je tenais à vous apporter ces précisions en préambule.
Le nombre de tués, notamment de jeunes, lors des fêtes de la Saint-Sylvestre, en forte augmentation par rapport aux années précédentes, a suscité une grande émotion, fort légitime d'ailleurs. J'ai donc immédiatement demandé au Premier ministre, alors que ce n'était pas prévu, de faire à ce sujet une communication en conseil des ministres, ce qu'il a accepté tout comme le Président de la République. J'ai donc fait cette communication lors du premier conseil des ministres de l'année 1999. J'ai ainsi bien évidemment posé le problème de tout l'arsenal nécessaire pour lutter contre l'insécurité routière, mais j'ai aussi demandé aux préfets de faire procéder à des contrôles préventifs et non pas inopinés - je tiens à le préciser à Mme Bardou - particulièrement en fin de semaine et la nuit, notamment à la sortie des discothèques, et d'exercer le droit de rétention du permis de conduire des conducteurs qui, en prenant le volant, mettraient en danger non seulement la vie d'autrui mais également leur propre vie.
Pour le Gouvernement, comme pour moi-même, il s'agit là d'un fait de société majeur, d'un problème prioritaire, d'une situation que nous ne pouvons pas laisser perdurer sans réagir très vite.
Par ailleurs, j'ai demandé à pouvoir disposer très rapidement, et non pas trois mois ou quatre mois plus tard comme par le passé, des éléments de nature à expliquer ce nombre accru d'accidents mortels. Je dispose des chiffres pour le mois de janvier 1999 : la gendarmerie note une stabilisation par rapport au même mois de l'année précédente. Mais nous n'entendons pas nous en tenir là, notre objectif est de réduire de moitié le nombre des tués sur la route.
Je peux vous assurer que Mme Isabelle Massin, déléguée interministérielle à la sécurité routière, se mobilise avec tous les partenaires concernés, des pouvoirs publics aux actions de terrain, pour atteindre cet objectif ambitieux.
Je ferai maintenant quelques commentaires sur les interventions des différents intervenants.
Monsieur le rapporteur, vous avez excellemment rappelé les enjeux du texte et l'intérêt qui s'attache à ce que les mesures qu'il contient puissent être mises en oeuvre dans les meilleurs délais.
Bien entendu, comme vous l'avez dit, ainsi que MM. Mahéas et Lefebvre, ce texte doit se lire au regard d'une politique globale de sécurité routière en intégrant la dimension de la formation, de l'éducation, du changement de comportement. Il ne s'agit donc pas de légiférer de façon répressive.
MM. Lanier, Mahéas, Mme Bardou ont insisté sur la question de la communication. Je souscris à leurs propos. Il est vrai que les moyens de la sécurité routière pour mener une politique active de communication ont été depuis quinze ans considérablement réduits. Même si, cette année, le budget de la sécurité routière a bénéficié d'une augmentation de l'ordre de 4 %, j'ai conscience qu'il faut considérablement augmenter nos moyens.
Il faut relancer notre action dans le domaine de la communication et peut-être s'inspirer des expériences menées dans d'autres pays.
En novembre 1998, nous avons lancé une campagne radio ciblée sur les automobilistes ; la radio est un média efficace, puisque les automobilistes écoutent beaucoup la radio. Est-ce suffisant ? Certainement pas, le nombre des tués à la fin de l'année dernière est là pour le prouver. Comme nombre d'intervenants l'ont dit, il convient non seulement de mener des campagnes à la radio, mais également d'utiliser d'autres médias, notamment la télévision.
Monsieur Lefebvre, ce projet de loi est un texte d'équilibre, vous l'avez souligné. Il comporte effectivement des mesures répressives mais il se veut aussi et surtout pédagogique. C'est ainsi qu'il vise à responsabiliser les propriétaires ou à introduire un débat sur la récidive pour les grands excès de vitesse.
Monsieur Hérisson, s'agissant de la responsabilisation des propriétaires, je souhaite vraiment réagir. Le principe du « propriétaire-payeur » qu'affirme ce projet de loi ne porte pas atteinte aux droits du citoyen, car il n'est pas question de bafouer les droits de la défense et donc les droits de l'homme, en ôtant au conducteur la possibilité de se défendre. Avec le principe du « propriétaire-payeur », je souhaite au contraire assurer l'égalité de tous devant la loi, alors qu'aujourd'hui une minorité parvient à lui échapper, chacun le sait. Mettre en danger la vie d'autrui est grave : on ne peut pas le laisser faire en toute impunité. C'est cela que nous voulons changer, mais sans introduire d'arbitraire ni porter atteinte aux droits de la défense.
Mme Bardou a insisté sur la nécessité des contrôles de police et de gendarmerie. Je vous ai rappelé mon action dans ce domaine en début d'année. La présence des forces de police et de gendarmerie est bien évidemment un facteur important de prudence, donc de sécurité. Je répète ce que j'avais dit lors du dernier débat : cette présence, dans mon esprit, vise non pas à piéger, mais au contraire à assurer le respect des règles du jeu.
J'en viens à la position du Gouvernement sur la question de la drogue, que M. Cantegrit a abordée. Elle a fait l'objet en première lecture d'une longue discussion devant les deux chambres.
Vous savez que ce débat est complexe. Les spécialistes ne sont pas d'accord entre eux. Avant de prendre des mesures allant plus loin que celles qui existent déjà, nous avons besoin de mieux connaître les différents types de drogue et leurs conséquences sur la conduite.
C'est pourquoi l'article 7, adopté en termes conformes par le Sénat et l'Assemblée nationale, met en place une première étape, qui permet une étude épidémiologique à parir de l'échantillon, hélas malheureusement, suffisant, des accidents mortels.
M. Ladislas Poniatowski. Mais c'est insuffisant, monsieur le ministre !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Nous verrons ensuite, sur des bases scientifiques mieux établies, comment on peut aller plus loin. Je crois que c'est raisonnable.
M. Charles Descours. Non !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur Mahéas, vous avez soulevé la question des garanties de bonne fin aux contrats liant une auto-école à son client, question qui a fait l'objet d'un examen en première lecture à l'Assemblée nationale.
Il paraît difficile d'imposer une garantie généralisée mais je comprends votre souci. C'est pourquoi, dans le fond, une voie médiane consiterait à rendre obligatoire la mention dans le contrat de l'existence ou non d'une garantie de bonne fin. Ainsi, cette existence ou non d'une garantie de bonne fin constituera un élément de choix des candidats à la formation et peut participer aussi à une certaine émulation pour la qualité de cette formation. De toute manière, cette mesure est de nature réglementaire. Nous l'introduirons dans le décret d'application de l'article 2 de la loi.
Mme Bardou a évoqué la question de la répartition des places à l'examen du permis de conduire. Il faut effectivement apporter des améliorations au système actuel. Nous y travaillons.
M. Lefebvre, comme en première lecture, a fait part de ses réserves sur l'article 12 relatif aux infractions commises envers les agents des transports publics. Je veux vous dire que cet article, qui a été introduit lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale par un amendement du Gouvernement, répond à une attente des conducteurs et des contrôleurs. Cette mesure était réclamée par les personnels et par leurs syndicats.
Mme Bardou nous a suggéré de faire référence au fait qu'il s'agit d'une reprise de la proposition de loi de M. Bonnet. Dont acte ! Toutefois, cette proposition de loi, elle-même, reprenait ce que j'avais suggéré voilà un an et demi lorsque les questions de violence dans les transports publics étaient posées.
Toute politique de sécurité routière passe par des améliorations, y compris en matière d'infrastructures, j'en suis conscient. Précisément, l'idée qui a été avancée qu'il soit procédé à un audit sur les infrastructures nationales neuves participe de cette volonté d'apporter des améliorations. Je suis également d'accord avec le fait que des concertations doivent être engagées avant toute prise de décision.
Toutefois, je veux attirer votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur le constat suivant : il ne suffit pas d'améliorer le réseau routier pour réduire l'insécurité routière. D'ailleurs, vous l'avez dit, monsieur le rapporteur ; vous avez parlé de paradoxe.
Il ne faut pas que cela nous empêche d'améliorer ce qui doit l'être, bien entendu. Mais la lutte contre l'insécurité routière ne doit pas être réduite à cela, car les réveils seraient douloureux.
J'ajoute, pour que nous ne le perdions pas de vue, que la plupart des accidents se produisent à une distance très courte du domicile de l'accidenté ; on l'a vu pendant les fêtes de la Saint-Sylvestre. Il est vrai que, très souvent, c'est de l'ordre - Mme Massin le disait - de quinze à vingt kilomètres. Il faut également prendre en compte ce phénomène, y compris pour que soient efficaces les actions de ceux qui oeuvrent au niveau local, afin que se modifient les comportements et les mentalités.
Cela étant, des progrès restent à faire en matière d'infrastructures routières et j'en suis conscient.
On peut également engager un débat à propos des caractéristiques des véhicules.
Je suis de votre avis : il est paradoxal que, d'une part, la vitesse soit réglementée et, d'autre part, que les constructeurs cherchent à fabriquer des voitures toujours plus rapides.
Ce problème est posé non seulement aux constructeurs, mais aussi à la société dans son ensemble.
On me dit : pourquoi ne pas limiter à la construction la vitesse des véhicules ?
Mais qu'entend-on précisément par là ? S'agit-il d'une limitation de la vitesse maximale ? Mais que prévoit-on dès lors pour les villages, où la vitesse peut être d'ores et déjà limitée à 30 kilomètres à l'heure ?
Que dois-je faire ? Le problème est plus compliqué qu'il n'y paraît !
Mais peut-être n'envisagez-vous que la question de la vitesse sur les autoroutes ! Pour ma part, je pose le problème de manière plus globale.
En revanche, on pourrait concevoir une alerte, visuelle ou sonore, au-delà de certaines vitesses déjà prévues dans les réglementations actuelles.
On peut discuter de tout cela, mais je voulais vous faire prendre conscience de la difficulté des questions qui se posent.
En tout cas, une chose est sûre, la responsabilisation des constructeurs est engagée, notamment du fait des publicités, monsieur Lefebvre. Il est en effet impossible, même si la voiture est bien équipée, de subir un choc violent sans courir aucun risque.
Par ailleurs, il est inadmissible que des publicités présentent des gangsters qui s'enfuient très vite ou qui sèment les policiers. C'est aller à l'encontre des valeurs que nous voulons promouvoir.
L'amélioration de la sécurité n'est pas seulement une question de moyens, d'investissements, elle demande aussi des initiatives et des dévouements.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments que je pouvais apporter à ce stade du débat. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - M. le rapporteur applaudit également.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ? ...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle qu'aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 11-6 du code de la route est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsqu'il est titulaire du permis de conduire depuis moins de deux ans, l'auteur d'une infraction ayant donné lieu à une perte de points égale ou supérieure au tiers du nombre de points initial doit se soumettre à cette formation spécifique qui se substitue à l'amende sanctionnant l'infraction. »
« II. - Un rapport d'évaluation sur les stages de formation et de sensibilisation institués par l'article L. 11-6 du code de la route sera présenté devant le Parlement dans un délai d'un an après la promulgation de la présente loi. »

Par amendement n° 15, le Gouvernement propose, à la fin du deuxième alinéa du paragraphe I de cet article, de remplacer les mots : « qui se substitue à l'amende sanctionnant l'infraction » par les mots : « , sauf s'il l'a déjà suivie précédemment ».
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le Gouvernement propose d'en revenir à la rédaction initiale. Il ne semble pas opportun que celui qui a commis une infraction entraînant un retrait de quatre points à son permis puisse les récupérer sans payer l'amende correspondante, alors que celui qui a commis deux fois une infraction entraînant un retrait de deux points doit payer à la fois les amendes et le stage. Il s'agit d'une question d'équité.
Cependant, je ne peux pas ne pas être sensible aux arguments qui ont été présentés, notamment par plusieurs d'entre vous dans la discussion générale. Les deux approches ont leur légitimité, celle qui retient l'équité devant les sanctions et celle qui défend l'idée selon laquelle le coût des stages est trop élevé pour les jeunes conducteurs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission des lois est défavorable à cet amendement, d'autant que le sujet a déjà été débattu très largement en première lecture.
A ce moment-là, nous avions proposé et finalement obtenu que celui qui était passible de retraits successifs de deux points ou d'un point devait être sanctionné de la même façon que celui qui était passible d'un retrait de quatre points pour une seule infraction.
L'Assemblée nationale, non sans sagesse, a relevé tout de même quelques différences entre une infraction à quatre points et quatre infractions à un point, voire deux infractions à deux points.
Elle n'a pas eu tort, et c'est la raison pour laquelle la commission des lois du Sénat s'est finalement ralliée à la rédaction qu'elle a proposée.
Or l'amendement n° 15 remet en cause cette disposition, et j'ai presque envie de demander au Gouvernement de le retirer. En effet, le stage obligatoire coûte très cher. Ne l'oublions pas, mes chers collègues. Si l'on fait en sus payer une amende, il me semble que la mesure sera pratiquement inapplicable pour un certain nombre de personnes parce qu'elles n'auront pas les moyens d'acquitter les frais correspondants. Elles chercheront donc à échapper au stage, qui pourrait pourtant leur être profitable.
Dans ces conditions, je demande au Sénat de suivre l'avis de la commission des lois qui trouve que le mieux, pour en finir avec cette affaire, est d'adopter la rédaction de l'Assemblée nationale.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je ne conteste pas, mesdames, messieurs les sénateurs, la légitimité des inquiétudes de M. le rapporteur. Il ne faut cependant pas perdre de vue qu'un retrait successif de deux points donnerait lieu au paiement du stage alors que le retrait que quatre points en une seule fois pour une infraction grave ne donnerait pas lieu au paiement du stage.
Je comprends bien le problème posé par le coût du stage. Il n'en demeure pas moins qu'il y a un problème quant au respect de l'équité. Quoi qu'il en soit, monsieur le rapporteur, je m'en remets volontiers à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 15.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. En commission mixte paritaire, peut-être pourrait-on rendre le stage obligatoire pour les infractions graves donnant lieu au retrait de quatre points et facultatif pour les infractions moins graves donnant lieu au retrait successif de deux points, par exemple.
Cela dit, comme je l'ai annoncé ce matin en commission, je me range à l'avis de M. le rapporteur.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article additionnel avant l'article 2



M. le président.
Par amendement n° 10, Mme Derycke, M. Mahéas et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 11-6, il est inséré dans le code de la route un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les candidats au permis de conduire acquièrent, dans le cadre de leur formation, la connaissance pratique des notions élémentaires de premiers secours dites des cinq gestes qui sauvent. Cet apprentissage est assuré par les associations de secourisme agréées.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions. »
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Cet amendement vise à rendre obligatoire l'apprentissage par tout candidat au permis de conduire des « cinq gestes qui sauvent », selon la formule habituellement utilisée.
Je les rappelle très brièvement : il s'agit d'alerter, de baliser, de ranimer, de compresser et de sauvegarder.
A l'apprentissage des cinq gestes qui sauvent, il faut aussi, bien sûr, ajouter celui des gestes qu'il ne faut surtout pas faire en cas d'accident.
Cet apprentissage doit être pratique et non pas seulement théorique. Les revues sur le sujet, dont certaines sont d'ailleurs éditées par la sécurité routière, ne manquent pas ; mais les conseils non accompagnés d'un enseignement pratique peuvent s'avérer dangereux !
La question se pose, je dois le dire, depuis bien longtemps. Depuis trente ans, en effet, sur tous les bancs de nos deux assemblées, de nombreux parlementaires l'ont posée et se sont passionnés sur ce sujet. Je citerai entre autres, au Sénat, MM. Poher, Poncelet, Barnier, Peyrefitte, Bonnet et Diligent, et, à l'Assemblée nationale, MM. Delnatte ou Bocquet, mais cette liste est loin d'être exhaustive.
En 1974 d'ailleurs, alors que M. Jacques Chirac était Premier ministre, un conseil interministériel de la sécurité routière, avait décidé de prendre en 1975 les dispositions nécessaires. Mais rien n'a été fait.
Pour expliquer pourquoi rien n'a été fait, on entend toujours les mêmes arguments : ces gestes pourraient être dangereux s'ils étaient mal faits ou faits à un mauvais moment.
J'ai cependant pu constater que, dès 1994, des médecins éminents, notamment le professeur Larcan, qui était alors président de l'Académie nationale de médecine, ont demandé la mise en oeuvre de cet apprentissage pour les candidats au permis de conduire.
J'ai également pu observer que certains services de secours, les SAMU, les SMUR et les sapeurs-pompiers, sont eux aussi favorables à la mise en oeuvre de cet apprentissage.
Je comprends que l'on puisse soulever des objections en raison de la responsabilité d'un sauveteur qui aurait fait un geste malencontreux. Mais, s'il y a véritablement danger, pourquoi autoriser dans les collèges, l'apprentissage de ces cinq gestes qui sauvent non seulement cet apprentissage est pratiqué dans les collèges, mais il y est préconisé et encouragé par des circulaires de l'éducation nationale.
Je ne comprends pas que l'apprentissage de certains gestes de secourisme ne soit pas dangereux s'il s'agit d'enfants de quinze ans à seize ans et soit dangereux pour les futurs titulaires du permis de conduire.
Il me semble au contraire que l'apprentissage de ces gestes au moment où l'on passe son permis de conduire peut avoir une valeur pédagogique. Il renforce en effet l'idée que prendre le volant, c'est aussi prendre une grande responsabilité vis-à-vis de soi et des autres.
Je souhaite que, après trente ans de tergiversations, d'avancées et de reculs, on apporte des réponses à ces questions dans la sérénité. (Très bien ! sur les travées socialistes.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission des lois a très bien compris les nobles sentiments de Mme Derycke, de même que celle-ci a compris notre avis sur son amendement.
Vous avez raison de relever, madame, que, depuis trente ans, on tergiverse sur cette question. Mais, vous, vous ne vous impatientez certainement pas depuis trente ans, étant donné votre jeune âge ! (Sourires.)
Permettez-moi de dire que, si l'on tergiverse, c'est bien parce que les avis sont partagés.
Tout le monde s'accorde bien entendu sur le fait que sauver une personne en danger est non seulement un devoir, mais une obligation de conscience. Le code pénal réprime d'ailleurs la non-assistance à personne en danger.
Le problème que soulèvent certains, notamment au sein du ministère de la santé, c'est que les gestes qui sauvent, mal compris, mal effectués par des gens trop jeunes, risquent de se transformer en gestes dangereux. C'est arrivé, il faut le reconnaître. Un blessé grave qui est atteint à la colonne vertébrale peut être sauvé à condition d'être manipulé avec énormément de précautions. Ainsi, l'un des cinq gestes qui sauvent, qui consiste à mettre sur le côté le blessé pour éviter qu'il ne s'étouffe en restant sur le dos, effectué brusquement, peut provoquer une fracture définitive de la colonne vertébrale, une atteinte de la moelle épinière et une hémiplégie.
Tel est le coeur du débat.
C'est la raison pour laquelle, madame Derycke, je vous demande, au nom de la commission des lois, de bien vouloir retirer cet amendement, sous réserve que M. le ministre s'engage à se concerter avec ses collègues, non seulement de la santé, mais aussi de l'éducation nationale, pour définir les modalités d'enseignement des gestes qui sauvent.
Afin de répondre au voeu justifié de Mme Derycke et de M. Mahéas, je vous demande donc, monsieur le ministre, de prendre très rapidement ces contacts. Nous pourrons ainsi mettre un terme au débat qui dure depuis trente ans.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le rapporteur, je partage votre sentiment sur cette question très complexe sur laquelle, j'en ai conscience, il faut progresser.
Certains éléments ont été introduits dans le programme national de formation des conducteurs, notamment les gestes qu'il faut faire pour signaler un accident et donner l'alerte. Un débat, voire une controverse, s'est engagé sur la nécessité de prendre des mesures supplémentaires. Il ne s'agit pas de le nier, et d'ailleurs personne ne le fait.
Cependant, pour l'instant, prenant l'engagement d'organiser le débat de telle sorte que ces connaissances supplémentaires puissent être introduites, avec toutes les garanties nécessaires, dans le programme national de formation, je demande, moi aussi, le retrait de l'amendement n° 10.
M. le président. L'amendement n° 10 est-il maintenu ?
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, je pense qu'il faut aller plus avant.
En effet, on veut toujours une solution parfaite. Il est vrai que, lors d'un accident, on peut faire le geste qui sauve mais aussi le geste malencontreux.
Sur les cinq gestes qui sauvent, un seul soulève difficulté...
M. Emmanuel Hamel. Quels sont ces cinq gestes ?
M. Jacques Mahéas. Comme Mme Derycke l'a indiqué, il faut tout d'abord baliser, puis alerter, ce qui me paraît facile.
Evidemment, le geste suivant pose problème : lorsqu'un blessé se trouve allongé sur le dos, faut-il le basculer sur le côté pour éviter qu'il ne s'étouffe ? En effet, il y a un risque pour la colonne vertébrale.
Ensuite, il convient de procéder à la réanimation, c'est-à-dire au bouche-à-bouche. Ce geste est appris dans les cours de secourisme et le sera bientôt à l'école.
Le dernier geste concerne plutôt ce qu'il ne faut pas faire, c'est-à-dire garotter ; à la place, il faut faire des points de compression.
Nous savons que tout ne sera pas parfait bien évidemment, mais ce sera beaucoup mieux. Lorsque l'on suit des cours de secourisme - et nombre d'entre nous les avons suivis - la première chose qu'on apprend, c'est de ne pas intervenir si on ne se sent pas apte ; si l'on n'a pas pratiqué plusieurs fois la réanimation, il faut s'abstenir. Cela me paraît être une éducation tout à fait bonne, monsieur le ministre.
Nous sommes prêts à réfléchir avec vous. Si la solution que nous proposons n'est pas parfaite, il faut cependant prendre le problème à bras-le-corps. Les partisans de ces cinq gestes qui sauvent sont extrêmement nombreux et leur attente est grande dans ce domaine.
Alors que de nombreux efforts sont fait pour enseigner aux élèves, notamment dans les collèges, des rudiments du code de la route et des rudiments de secourisme, je ne vois pas pourquoi on ne généraliserait pas cette formation.
Nous sommes bien évidemment dans l'attente d'une proposition de votre part, monsieur le ministre.
M. le président. Autrement dit, l'amendement est maintenu.
M. Jacques Mahéas. Oui, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10...
M. Jacques Mahéas. Mais M. le ministre ne m'a pas répondu.
M. le président. Mon cher collègue, M. le ministre n'est pas forcé de répondre à votre injonction. Il n'a pas demandé la parole et le vote est commencé.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. Je suis désolé, monsieur le ministre, je ne peux vous la donner : le vote est commencé, il doit aller jusqu'à son terme.
Je mets donc aux voix l'amendement n° 10, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. Jacques Mahéas. Monsieur le président, je proteste : M. le ministre a levé la main en temps et en heure. Vous ne l'avez pas vu.
M. le président. Monsieur Mahéas, je vous ferai remarquer que j'ai appliqué le règlement : une fois qu'un vote est commencé, personne ne peut plus intervenir.
Je suis navré, monsieur le ministre. Cela étant, si vous demandez la parole maintenant, je vous la donne très volontiers.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande effectivement la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, si je n'ai pas levé la main plus tôt tout à l'heure, c'est que je croyais que Mme Derycke allait intervenir après M. Mahéas. Je ne peux voir ce qui se passe dans les travées derrière moi !
Aussi, dès que j'ai vu que vous alliez mettre l'amendement aux voix, j'ai demandé la parole.
L'amendement n'a pas été retenu, mais je veux confirmer ce que j'ai dit à M. le rapporteur, à savoir, monsieur Mahéas, que je prends l'engagement de travailler en concertation, avec le souci de la plus grande efficacité, pour qu'une avancée notable ait lieu dans la formation des conducteurs.
M. le président. Monsieur le ministre, je voudrais que les choses soient bien claires. J'ai demandé si l'amendement était maintenu, on m'a répondu que oui. J'ai demandé s'il y avait des explications de vote, personne n'a bougé. C'est la raison pour laquelle je suis passé au vote.
Cela étant, M. le ministre a pris un engagement ; je pense que nous pouvons poursuivre la discussion.


Article 2



M le président.
« Art. 2. - Le titre VII du code de la route (partie Législative) est ainsi rédigé :

« TITRE VII

« ENSEIGNEMENT DE LA CONDUITE
DES VÉHICULES TERRESTRES À MOTEUR
ET DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

« Chapitre Ier

« Enseignement à titre onéreux

« Art. L. 29 et L. 29-1 . - Non modifiés .
« Art. L. 29-2 . - Dans l'hypothèse où les conditions prévues à l'article L. 29-1 cessent d'être remplies, il est mis fin à l'autorisation prévue à l'article L. 29. En cas d'urgence justifiée par des faits passibles d'une des condamnations visées à l'article L. 29-1, l'autorité administrative peut, après avoir mis l'intéressé en mesure de présenter ses observations, suspendre, pour une durée maximale de six mois, une autorisation délivrée en application de l'article L. 29.
« Lorsque sont établis des procès-verbaux d'infractions correspondant à des faits mentionnés à l'alinéa précédent commises par des bénéficiaires d'autorisations délivrées en application de l'article L. 29, copie en est transmise par le procureur de la République à l'autorité administrative.
« La mesure de suspension provisoire cesse de plein droit dès que l'autorité judiciaire s'est prononcée.
« Art. L. 29-3 et L. 29-4 . - Non modifiés .

« Chapitre II

« Etablissements d'enseignement à titre onéreux

« Art. L. 29-5 . - L'enseignement à titre onéreux de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ne peut être dispensé que dans le cadre d'un établissement d'enseignement dont l'exploitation est subordonnée à un agrément délivré par l'autorité administrative, après avis d'une commission.
« La formation, à titre onéreux, des candidats à l'un des titres ou diplômes exigés pour l'exercice de la profession d'enseignant de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ne peut être dispensée que dans le cadre d'un établissement dont l'exploitation est subordonnée à un agrément délivré par l'autorité administrative, après avis d'une commission.
« Art. L. 29-6 . - Non modifié .
« Art. L. 29-7 . - Nul ne peut exploiter, à titre individuel, ou être dirigeant ou gérant de droit ou de fait d'un des établissements mentionnés à l'article L. 29-5, s'il ne satisfait pas aux conditions suivantes :
« 1° Ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation :
« - soit à une peine criminelle,
« - soit à une peine correctionnelle prononcée pour une infraction figurant sur une liste fixée par décret en Conseil d'Etat,
« - soit à une peine prévue par les articles 186 et 192 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, pendant la durée de cette peine ;
« 2° Justifier de la capacité à la gestion d'un établissement d'enseignement de conduite ;
« 3° Remplir les conditions d'âge, d'ancienneté du permis de conduire, d'expérience professionnelle et de réactualisation des connaissances fixées par décret en Conseil d'Etat.
« Art. L. 29-8 . - L'enseignement dispensé dans les établissements mentionnés à l'article L. 29-5 doit être conforme au programme de formation défini par l'autorité administrative qui en contrôle l'application.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions de ce contrôle et fixe les catégories d'agents publics habilités à exercer ce contrôle.
« Art. L. 29-9 . - Dans l'hypothèse où les conditions prévues aux articles L. 29-7 et L. 29-8 cessent d'être remplies ou en cas de cessation définitive d'activité de l'établissement, il est mis fin aux agréments prévus à l'article L. 29-5.
« En cas d'urgence justifiée par des faits passibles d'une des condamnations visées à l'article L. 29-7, l'autorité administrative, après avoir mis l'intéressé en mesure de présenter ses observations et recueilli l'avis de la commission mentionnée à l'article L. 29-5, peut suspendre, pour une durée maximale de six mois, l'agrément délivré en application de l'article L. 29-5.
« Lorsque sont établis des procès-verbaux d'infractions correspondant à des faits mentionnés à l'alinéa précédent commises par des bénéficiaires d'autorisations délivrées en application de l'article L. 29-5, copie en est transmise par le procureur de la République à l'autorité administrative.
« La mesure de suspension provisoire cesse de plein droit dès que l'autorité judiciaire s'est prononcée.
« Après que l'intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations, une mesure de suspension provisoire pour une durée n'excédant pas six mois peut également être prononcée par l'autorité administrative, en cas de refus de se soumettre au contrôle prévu à l'article L. 29-8, de non-respect du programme de formation défini par l'autorité administrative ou pour méconnaissance des dispositions de l'article L. 29-6.
« Art. L. 29-10 . - I. - Le fait d'exploiter un établissement d'enseignement de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ou de formation des candidats pour l'exercice de la profession d'enseignant sans avoir obtenu l'agrément prévu à l'article L. 29-5 ou en violation d'une mesure de suspension provisoire de celui-ci est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 F d'amende.
« Est puni des mêmes peines le fait d'employer un enseignant qui n'est pas titulaire de l'autorisation prévue à l'article L. 29.
« II. - Les personnes physiques coupables de l'une des infractions prévues au I du présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus de l'un, de plusieurs ou de l'ensemble des établissements de l'entreprise appartenant à la personne condamnée ;
« 2° L'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, suivant les modalités prévues par l'article 131-27 du code pénal ;
« 3° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ;
« 4° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit.
« III. - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal, des infractions prévues au I du présent article.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, selon les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus de l'un, de plusieurs ou de l'ensemble des établissements de l'entreprise appartenant à la personne morale condamnée ;
« 3° L'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, suivant les modalités prévues par l'article 131-39 du code pénal ;
« 4° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ;
« 5° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit.
« Art. L. 29-11 . - Non modifié . »

Par amendement n° 1, M. Lanier, au nom de la commission, propose de supprimer le second alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L. 29-8 du code de la route.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. L'alinéa que cet amendement vise à supprimer dispose qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions du contrôle de l'application du programme de formation par l'autorité administrative. Or, le texte proposé pour l'article L. 29-11 prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application de l'ensemble du chapitre relatif à l'enseignement à titre onéreux de la conduite.
Il paraît inutile de prévoir un décret spécifique pour l'application du futur article L. 29-8.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. L'Assemblée nationale avait souhaité apporter cette précision. On peut penser qu'elle la jugeait utile.
Par ailleurs, comme l'a dit M. le rapporteur, il est vrai que le décret actuellement prévu permet d'assurer le contrôle.
Je m'en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Robert Bret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Si la nouvelle rédaction de l'article L. 29-8 adopté par l'Assemblée nationale peut paraître effectivement discutable sur le plan rédactionnel, il n'en demeure pas moins un véritable problème, sur lequel je souhaiterais insister.
Aujourd'hui, on admet couramment que les contrôles pédagogiques effectués auprès des établissements d'enseignement de la conduite sont peu efficaces - nous en avons discuté longuement en commission - et, reconnaissons-le, quelque peu délaissés au profit des contrôles administratifs liés à l'exploitation et au fonctionnement de ces auto-écoles.
Or, il me paraît indispensable d'assurer l'égalité de concurrence entre tous les établissements sur la base d'un programme de formation identique et conforme aux prérogatives définies par l'autorité administrative.
C'est pourquoi l'idée de créer une distinction entre le contrôle administratif, d'une part, et le contrôle pédagogique proprement dit, d'autre part, serait de nature à en renforcer l'efficacité et l'application.
Il pourrait être envisagé, à cet égard, d'associer les professionnels de la sécurité routière à la détermination des modalités précises du contrôle des programmes d'enseignement, en tirant parti de leur expérience et de leur métier.
En tout état de cause, le corps d'agents publics que les députés avaient envisagé d'affecter à cette tâche devront disposer de moyens financiers et humains suffisants pour assurer ce contrôle.
Si, effectivement, les auto-écoles ont tout intérêt à fournir un niveau de formation de meilleure qualité pour attirer les candidats, encore faut-il donner les moyens d'en vérifier la réalité concrète dans l'intérêt des formateurs et des élèves.
Dès lors que cet aspect n'est pas évacué par la suppression du deuxième alinéa de cet article, nous sommes tout disposés à voter l'amendement de la commission.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?..
Je mets aux voix l'amendement n° 1, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?..
Je mets aux voix l'article 2, ainsi modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2 bis



M. le président.
« Art. 2 bis . - L'enseignement de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière par les associations régies par la loi de 1901 qui exercent leur activité dans le champ de l'insertion ou de la réinsertion sociale et professionnelle est subordonné à la délivrance d'un agrément par l'autorité administrative qui vérifie que les conditions prévues à l'article L. 29-1, au 1° de l'article L. 29-7 et à l'article L. 29-8 du code de la route sont remplies.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. » - ( Adopté. )

Article 2 ter



M. le président.
« Art. 2 ter . - Les articles L. 29 à L. 29-11 du code de la route seront applicables aux enseignants et aux établissements d'enseignement à titre onéreux de la conduite des véhicules terrestres à moteur d'une catégorie donnée ainsi qu'aux établissements de formation des candidats pour l'exercice de la profession d'enseignant déjà existants, à l'issue d'un délai et selon des modalités fixés par le décret en Conseil d'Etat prévu par l'article L. 29-11 du code de la route. »
Par amendement n° 2, M. Lanier, au nom de la commission, propose de compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le délai prévu à l'alinéa précédent ne peut excéder deux ans après la promulgation de la présente loi. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. L'article 2 ter , introduit par l'Assemblée nationale, tend à prévoir que les dispositions des articles L. 29 à L. 29-11 du code de la route sont applicables aux enseignants et aux établissements d'enseignement ainsi qu'aux établissements de formation à l'enseignement déjà existants, à l'issue d'un délai et selon des modalités fixées par le décret en Conseil d'Etat.
Le présent amendement tend à prévoir que le délai, fixé par décret, au terme duquel la loi s'appliquera aux établissements existants ne puisse excéder deux années après sa promulgation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2 ter, ainsi modifié.

(L'article 2 ter est adopté.)

Article 4



M. le président.
« Art. 4. - I. - Au premier alinéa de l'article L. 21-1 du code de la route, les mots : "est responsable pécuniairement des infractions à la réglementation sur le stationnement des véhicules pour lesquelles seule une peine d'amende est encourue," sont remplacés par les mots : "est redevable pécuniairement de l'amende prononcée pour des contraventions à la réglementation sur le stationnement des véhicules, sur les vitesses maximales autorisées et sur les signalisations imposant l'arrêt des véhicules," et les mots : "qu'il ne fournisse des renseignements permettant d'identifier l'auteur véritable de l'infraction" sont remplacés par les mots : "que l'auteur véritable de l'infraction ne puisse être identifié".
« Dans le même alinéa, après les mots : "événements de force majeure", sont insérés les mots : "ou d'un vol".
« II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La personne déclarée redevable en application des dispositions du présent article n'est pas responsable pénalement de l'infraction. Lorsque le tribunal de police, y compris par ordonnance pénale, fait application des dispositions du présent article, sa décision ne donne pas lieu à inscription au casier judiciaire, ne peut être prise en compte pour la récidive et n'entraîne pas retrait des points affectés au permis de conduire. Les règles sur la contrainte par corps ne sont pas applicables au paiement de l'amende. »
Par amendement n° 16, le Gouvernement propose, dans le paragraphe I de cet article, après les mots : « est redevable pécuniairement de l'amende », de remplacer le mot : « prononcée » par le mot : « encourue ».
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il s'agit d'un amendement rédactionnel, qui tend à rétablir la rédaction initiale issue de la loi du 3 janvier 1972, confirmant ainsi sans ambiguïté que la procédure relative au stationnement est élargie aux infractions en matière de vitesse et de franchissement de feux ou de stops.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 3, M. Lanier, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le second alinéa du I de l'article 4 :
« Dans le même alinéa, les mots : "événement de force majeure" sont remplacés par les mots : "vol ou de tout autre événement de force majeure,". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. Il s'agit d'un amendement purement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Division et article additionnels après l'article 7



M. le président.
Par amendement n° 13, MM. Poniatowski, Jolibois, Bonnet et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 7, une division additionnelle ainsi rédigée : « Section 5 bis . - Dispositions relatives à l'instauration d'un dépistage facultatif pour tous les conducteurs. »
M. Lucien Lanier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. Monsieur le président, la commission demande la réserve de cet amendement jusqu'après l'examen des amendements n°s 9 rectifié et 14.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Favorable.
M. le président. La réserve est ordonnée.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 9 rectifié, M. Cantegrit propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est ajouté au titre Ier du code de la route (partie Législative), après l'article L. 3-1, un article nouveau ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Toute personne qui aura conduit sous l'empire de substances ou plantes classées comme stupéfiants, dont elle aura fait usage de manière illicite, sera punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 francs d'amende.
« Lorsqu'il y aura lieu à l'application des articles 221-6 et 222-19 du code pénal à l'encontre de l'auteur de l'infraction définie à l'alinéa précédent, les peines prévues par ces articles seront portées au double. »
Par amendement n° 14, MM. Poniatowski, Jolibois, Bonnet et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est ajouté au titre Ier du code de la route (partie Législative), après l'article L. 3-1, un article nouveau ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Toute personne qui aura conduit après avoir fait usage, de manière illicite, de substances ou plantes classées comme stupéfiants sera punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 francs d'amende.
« Lorsqu'il y aura lieu à l'application des articles 221-6 et 222-19 du code pénal à l'encontre de l'auteur de l'infraction présente, les peines prévues seront portées au double.
« Les officiers ou agents de police judiciaire peuvent, même en l'absence d'infraction préalable ou d'accident, soumettre tout conducteur à des épreuves de dépistage et, lorsqu'elles se révèlent positives ou sont impossibles, ou lorsque le conducteur refuse de les subir, à des analyses et examens médicaux, cliniques et biologiques en vue d'établir s'il conduisait sous l'influence de substances ou de plantes classées comme stupéfiants.
« Les résultats de ces analyses sont transmis au procureur de la République du lieu de dépistage.
« Toute personne qui aura refusé de se soumettre aux analyses et aux examens médicaux, cliniques et biologiques prévus par le présent article sera punie des peines prévues au premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 1er.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du présent article. »
La parole est à M. Cantegrit, pour défendre l'amendement n° 9 rectifié.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il paraît choquant de ne pas prévoir de sanction spécifique à l'encontre des personnes mettant en danger la vie d'autrui en conduisant un véhicule sous l'empire de produits psychotropes.
En effet, le projet tel qu'il est actuellement rédigé prévoit l'instauration d'un dépistage systématique des stupéfiants pour les conducteurs impliqués dans un accident mortel, mais il ne prévoit pas clairement de sanction pénale pour ces derniers. Seul le refus de se prêter à des analyses est sanctionné. Cela est parfaitement aberrant.
C'est pourquoi cet amendement prévoit de punir de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 francs d'amende - peines prévues pour la conduite en état d'ivresse - la personne ayant conduit après avoir fait usage de manière illicite de substances ou plantes classées comme stupéfiants.
En effet, il paraît tout à fait légitime que la conduite sous l'empire de stupéfiants fasse encourir les mêmes peines que la conduite sous l'empire de l'alcool. Pourquoi sanctionner ceux qui conduisent en état d'ivresse et fermer les yeux sur les conducteurs consommateurs de stupéfiants ? L'impunité pour ces derniers est totalement invraisemblable. Cet amendement a pour objet d'y mettre fin.
En première lecture, monsieur le ministre, vous nous avez indiqué que les tests étaient encore incertains et qu'ils étaient difficiles à mettre en oeuvre. De même, le rapport présenté à l'Assemblée nationale fait état de déclarations de professeurs en médecine attestant que certains médicaments sont de nature à fausser les contrôles.
Mais, permettez-moi de vous rappeler que les premiers contrôles d'alcoolémie ont donné lieu aux mêmes doutes et aux mêmes critiques. La fiabilité des premiers appareils permettant de mesurer le degré d'alcoolémie a été contestée. C'est pourquoi des prises de sang et des contrôles supplémentaires ont été envisagés. Les tâtonnements du début ne nous ont toutefois pas empêchés de disposer par la suite d'appareils parfaitement fiables.
Je ne peux donc pas me satisfaire de ce que vous nous proposez, monsieur le ministre, et qui consiste à ne procéder à ces contrôles relatifs aux stupéfiants qu'en cas d'accident mortel.
Un très grand procès est actuellement en cours - à propos duquel je ne prendrai évidemment pas partie - mettant en cause trois anciens ministres à qui il est reproché de ne pas être intervenus en temps utile.
Sur la route aussi, des personnes peuvent être gravement blessées, puis éventuellement décéder, à la suite d'un accident provoqué par une personne qui conduisait sous l'empire d'un stupéfiant. Alors, monsieur le ministre, je crois qu'il ne faut surtout pas tarder à prendre, à cet égard, les mesures qui s'imposent.
M. le président. La parole est à M. Poniatowski, pour défendre l'amendement n° 14.
M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le ministre, les propos que vous avez tenus sur l'usage des stupéfiants ne m'ont pas convaincu, et moi, je voudrais essayer de vous convaincre.
Tout à l'heure, en nous présentant ce texte, vous avez fait état du bilan catastrophique de l'année 1998 en termes d'accidents mortels sur les routes de France. Le rapporteur a, quant à lui, à juste titre, rappelé qu'il y avait aussi tous ces blessés graves qui devront vivre tout le reste de leur vie avec les séquelles d'un accident.
Bien entendu, mon amendement ne va pas résoudre du jour au lendemain tous les problèmes, réduire soudainement à néant le nombre des tués sur les routes. Toutefois, il suit une certaine logique. Il est d'ailleurs un peu plus complet que celui de M. Cantegrit puisqu'il compte trois alinéas de plus, après deux alinéas pratiquement identiques à ceux que notre collègue propose d'ajouter dans la loi.
Pour ma part, je propose que l'usage, par un conducteur, de drogues ou de stupéfiants soit sanctionné exactement de la même manière que la consommation d'alcool dans les mêmes circonstances.
Vous savez parfaitement, monsieur le ministre, que l'un et l'autre représentent en effet le même danger sur les routes.
En ce qui concerne la fiabilité du dépistage, monsieur le ministre, vous ne pouvez la considérer comme suffisante à travers le dispositif de l'article 7, qui s'applique en cas d'un accident mortel, et la considérer comme insuffisante dès lors que ce dépistage serait systématique.
Les dépistages systématiques de consommation d'alcool qui sont opérés surtout les vendredis et samedis soirs par nos brigades de gendarmerie sont très utiles, vous le savez bien, et il n'est pas si compliqué de procéder à ce que l'on appelle de simples épreuves de dépistage. Cela se fait à l'étranger, et c'est très facile, contrairement à ce que vous avez pu laisser entendre lors de la première lecture. La preuve en est que vous les prévoyez vous-même, mais seulement dans certains cas.
Ce que nous demandons, en fait, c'est de permettre que cette détection soit systématique. Faute d'une telle possibilité, monsieur le ministre, votre texte restera inachevé.
Vous faites preuve d'un véritable laxisme à l'égard des drogués. (Protestations sur les travées socialistes.)
M. Jacques Mahéas. Ce n'est pas exact !
M. Ladislas Poniatowski. Si ! Que vous le vouliez ou non, c'est ce qui restera si vous refusez cet amendement, ce qui constituerait une grave erreur.
Si vous voulez être logique avec vous-même et avec votre texte, vous devez accepter au moins l'un de ces deux amendements, le mien étant un peu plus complet.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 9 rectifié et 14 ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La question évoquée par les auteurs de ces amendements est importante, et elle a d'ailleurs déjà donné lieu à un long débat en première lecture.
En première lecture, précisément, au nom de la commission des lois, j'avais proposé que les infractions commises par un conducteur se trouvant sous l'empire de substances stupéfiantes soient sanctionnées comme le sont les infractions commises par un conducteur se trouvant sous l'empire de l'alcool. Cependant, le Sénat a repoussé l'amendement que j'avais présenté en ce sens, sous le bénéfice d'explications aux termes desquelles il était beaucoup plus difficile de dépister les stupéfiants que de dépister l'alcool.
L'amendement présenté aujourd'hui par M. Cantegrit reprend cet amendement de la commission des lois défendu en première lecture.
Quant à l'amendement de MM. Poniatowski, Bonnet, Jolibois, il ajoute un élément tout à fait capital en prévoyant que le dépistage pourra se faire à n'importe quel moment : vous êtes dans votre véhicule, vous ne commettez aucune infraction, mais on peut vous arrêter pour faire un dépistage, au hasard !
M. Emmanuel Hamel. A titre préventif !
M. Dominique Braye. Comme pour l'alcool !
M. Lucien Lanier, rapporteur. Certes, tout le monde souhaiterait que l'on puisse dépister l'usage de stupéfiants comme on dépiste la consommation d'alcool.
Cependant, pour déceler la présence d'alcool dans le sang d'un automobiliste, il suffit de le faire souffler dans un ballon ; cinq ou dix minutes après, s'il n'est pas répréhensible, on le laisse poursuivre sa route.
Le dépistage des stupéfiants nécessite, lui, une prise de sang, ce qui implique que l'on détourne l'automobiliste de sa route afin de le conduire à l'établissement médical le plus proche. C'est seulement l'analyse de son sang qui permettra de déceler, le cas échéant, qu'il a usé de produits de nature à le faire tomber sous le coup d'une condamnation pour conduite sous l'empire de substances ou plantes classées comme stupéfiants.
La commission a discuté longuement sur ce point, ce matin même, en présence d'ailleurs d'un des auteurs de l'amendement n° 14, M. Jolibois. Elle a finalement conclu qu'elle était favorable à l'amendement n° 9 rectifié. C'est pourquoi je vous demande, monsieur Poniatowski, de bien vouloir retirer l'amendement n° 14, qui est en partie satisfait par l'amendement n° 9 rectifié.
Nous considérons que les moyens de dépistage existants ne sont pas encore suffisamment souples et performants pour éviter de causer un préjudice, éventuellement grave, à un automobiliste dont la conduite ne serait en rien répréhensible. Car, même s'il n'a commis aucune infraction, même s'il n'a usé d'aucun stupéfiant, à suivre les auteurs de l'amendement n° 14, on pourra interrompre son voyage pendant plusieurs heures.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 9 rectifié et 14 ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je voudrais d'abord rappeler que le Sénat et l'Assemblée nationale, après de longs débats, ont adopté l'article 7 dans les mêmes termes. Il y a donc eu convergence sur cette question.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements pour des raisons que j'ai déjà exposées.
Pour procéder à de tels contrôles, il faut pouvoir s'appuyer sur une connaissance suffisante, de manière à prendre le plus possible de garanties. Le dépistage effectué à la suite d'accidents mortels - ils sont, hélas ! suffisamment nombreux - nous permettra d'acquérir cette connaissance. Ensuite, dans un délai raisonnable - un ou deux ans - nous pourrons envisager d'aller plus loin.
J'ajoute que l'usage des stupéfiants est déjà puni par le code pénal. En cas d'accident mortel, la justice intervient de toute façon. S'il s'avère, après dépistage, que l'une des personnes impliquées dans un accident mortel a fait usage de stupéfiants, le juge pourra en tirer les conséquences dans son jugement.
La position du Gouvernement est donc tout à fait raisonnable.
M. le président. Monsieur Poniatowski, l'amendement n° 14 est-il maintenu ?
M. Ladislas Poniatowski. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9 rectifié.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Je suis contre les deux amendements, mais mon propos vise plus précisément l'amendement n° 14.
En ce qui concerne l'alcool, la question est simple car nous savons résoudre le problème technique du dépistage, même si les débuts ont été difficiles. Lorsque j'étais député, j'avais proposé un amendement visant à l'abaissement des seuils, ce qui devrait me préserver de l'accusation de laxisme en la matière.
Nous savons qu'un problème réel se pose dès lors que des gens conduisent sous l'empire de la drogue. J'ignore si les drogues illicites ou licites ont plus ou moins d'effets sur la conduite. Soyons honnêtes et poursuivons le raisonnement jusqu'au bout : si une drogue est licite, c'est qu'elle est prescrite par un médecin. Exigeons que celui-ci indique sur l'ordonnance que le patient ne pourra pas conduire.
De plus, qu'est-ce qu'un stupéfiant ? A cet égard, des discussions interminables se sont engagées ici. Si les experts sont d'accord pour reconnaître le caractère illicite de la cocaïne, ils sont nettement plus dubitatifs s'agissant du shit. Autrement dit, nous sommes en train d'essayer d'élaborer une réglementation qui ne pourra pas être appliquée.
A en croire M. Poniatowski, il serait très facile de distinguer les drogues licites et les drogues illicites. Je ne partage pas son avis.
N'est-il pas un peu fort de café - passez-moi l'expression, j'ignore si la caféine est ou non une drogue ...
M. Dominique Braye. C'est une drogue ! (Sourires.)
M. Jacques Mahéas. ... un peu fort que le Sénat et l'Assemblée nationale aient déjà fait un premier pas en votant conforme la disposition tendant à introduire le dépistage systématique de l'usage de drogues illicites pour les conducteurs en cas d'accident mortel - il s'agit là d'un pas important qui témoigne d'une prise de conscience réelle du problème - et que maintenant nous allions aggraver les choses, parce que nous ne savons pas bien le traiter ? Dans deux ans ou trois ans, peut-être pourrons-nous mieux l'aborder...
M. Jean-Pierre Cantegrit. Regardez ce qui se passe ailleurs en Europe ! D'autres pays dépistent !
M. Jacques Mahéas. Vous avez fait allusion tout à l'heure, d'une façon à mon sens un peu scandaleuse, au procès qui se déroule actuellement. Faute de disposer des connaissances scientifiques permettant de régler un problème, on adopte une certaine attitude. Et quand quatre ans ou cinq ans après, les progrès scientifiques fournissent la solution, tous les donneurs de leçons soutiennent qu'il aurait fallu la mettre en oeuvre précédemment et tiennent les politiques pour responsables.
Mais ils ont tort ! Alors que les scientifiques ne recommandent pas une solution, alors que les effets des stupéfiants sur les conducteurs ne sont pas définis avec précision, comment les législateurs que nous sommes peuvent-ils fixer les règles d'un dépistage ?
M. Robert Bret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les auteurs des amendements n°s 9 rectifié et 14 proposent d'instaurer un nouveau délit à l'encontre des conducteurs sous l'empire de stupéfiants.
Comme en première lecture sur un amendement similaire défendu par notre rapporteur, les membres du groupe communiste républicain et citoyen s'opposent à ces amendements, considérant qu'ils sont tout à la fois prématurés et inadaptés.
Je rappelle en effet à nos collègues que la rédaction de l'article 7, adoptée dans les mêmes termes par les deux assemblées, prenant acte de nos insuffisances dans l'analyse et la compréhension de l'effet des drogues illicites sur l'aptitude à la conduite, visait à agir sereinement et sans précipitation sur un terrain dont chacun peut mesurer les fragilités et les incidences.
Il était donc préférable, et telle est la démarche du Gouvernement, de se doter des outils permettant de défricher un domaine pour le moins sensible avant d'envisager une répression.
C'est pourquoi cette mesure est malvenue.
En effet, comment un juge pourrait-il demain condamner un conducteur qui aura usé de substances illicites, alors que ce même juge est incapable de prouver que l'usage de telles substances est de nature à altérer la conduite de la personne incriminée ? Il conviendrait de tenir compte par ailleurs de la nature, de la quantité des drogues absorbées et de la période écoulée entre la consommation et la prise du volant.
A l'évidence, le juge ne pourra pas décider en parfaite connaissance des causes, puisqu'il ne dispose pas, en l'état actuel de nos connaissances, des éléments scientifiques permettant de faire le lien entre dépistage de drogue et conduite dangereuse.
A l'inverse, la consommation d'alcool a des effets parfaitement connus de tous et aisément mesurables ! L'alcool est de surcroît facile à détecter. Ce n'est pas le cas de la drogue qui demande des examens médicaux et biologiques beaucoup plus sérieux pour en déceler la présence et la nocivité sur les capacités physiques et mentales des individus.
Le parallèle que vous venez de faire entre alcool et drogues me paraît contraire à l'observation objective de ces deux phénomènes.
Enfin, comme je l'ai rappelé voilà un instant après M. le rapporteur, le Sénat a déjà tranché cette question il y a dix mois.
Le groupe communiste républicain et citoyen votera donc contre ces deux articles additionnels. Nous préférons le choix proposé par le Gouvernement d'avancer pas à pas en appréhendant cette question délicate dans sa globalité et dans toute sa complexité. Je crois que, loin de faire preuve de laxisme, nous prendrons au contraire l'option raisonnable nous permettant de résoudre ce problème, effectivement grave, et dont les conséquences sont impressionnantes en matière d'accidents routiers.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Monsieur le président, ce que je viens d'entendre ne m'a nullement convaincu.
Premièrement, je serais curieux de savoir pourquoi dans d'autres pays européens - auxquels il est fait référence pour défendre d'autres aspects de ce projet de loi - il est possible de procéder à de tels contrôles qui ne sont pas autorisés en France.
Deuxièmement, monsieur le ministre, comment peut-on justifier l'instauration de ces contrôles pour les seuls accidents mortels, sans en prévoir la possibilité pour les autres accidents ?
Ce sont les seuls points que j'évoquerai. Je maintiens cet amendement n° 9 rectifié, qui me paraît tout à fait nécessaire et que la commission des lois a bien voulu approuver.
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Je souhaite simplement ajouter quelques mots aux propos que vient de tenir M. Cantegrit.
J'avoue avoir été stupéfié par certaines explications de vote, notamment celle de notre collègue, M. Bret, quant au danger que font courir certaines drogues en fonction du moment où elles ont été absorbées. Ce raisonnement témoigne d'une ignorance complète de la biologie la plus élémentaire.
Il est clair que, toute substance prise par un organisme étant éliminée dans le temps, l'absorption d'une drogue trois jours avant ne pose effectivement aucun problème. Toute la difficulté consiste à déterminer si, au moment où la personne conduit, elle est sous l'empire d'un stupéfiant et si celui-ci peut avoir un effet sur son comportement ou sur sa vigilance. Le problème se situe uniquement là.
Cet amendement me paraît effectivement important. Je ne comprends pas que l'on puisse estimer qu'une substance est dangereuse si elle a provoqué un accident mortel et qu'elle cesse d'être dangereuse lorsqu'une personne qui l'a absorbée n'a pas eu d'accident. Comment en déduire que la substance cesse d'être dangereuse et de produire, sinon un trouble du comportement, tout au moins une diminution de la vigilance du conducteur ?
Du point de vue médical et biologique, il me paraît tout à fait évident qu'il faut adopter l'amendement tel que nous l'a proposé M. Cantegrit.
M. Emmanuel Hamel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Je voterai l'amendement de notre collègue M. Cantegrit. En effet, les commentaires que feront la presse et les médias en cas de rejet de cet amendement ne manqueront pas de présenter ce vote comme une incitation à la consommation de drogue, (M. le ministre fait un signe de protestation.) en concluant que l'on ne risque pas d'être sanctionné pour conduite sous l'empire de la drogue. Ce serait extrêmement grave !
C'est la raison pour laquelle je voterai cet amendement.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. Nous sommes bien sûr tous d'accord sur le fait que la drogue est un danger particulièrement évident et manifeste lorsque son absorption se conjugue avec la conduite automobile.
La difficulté de l'amendement dont nous débattons - c'est une réflexion personnelle à laquelle je n'attache pas énormément d'importance, mais que je livre tout de même au Sénat - c'est le fait objectif. Lorsque quelqu'un conduit en état d'ivresse, on le voit tout de suite : il suffit de lui faire subir un test. On peut même s'en dispenser dans un certain nombre de cas, tant l'ivresse est manifeste.
Ne pourrait-on introduire une disposition qui subordonnerait le contrôle des stupéfiants, non pas à l'accident mortel mais à chaque accident corporel ? Là, il y a un fait objectif ; on avance !
M. Jacques Mahéas. C'est déjà mieux !
M. Jacques Larché, président de la commission. Monsieur le ministre, je perçois une difficulté essentielle dans votre texte. En cas d'accident mortel, le contrôle intervient. Mais si l'accidenté soigné à Garches devient tétraplégique, aucun contrôle n'intervient, ce qui est quand même étonnant. Une personne perd ses jambes dans un accident, que ce dernier ait été provoqué ou non par un un drogué, cela n'a pas d'importance !
M. Dominique Braye. Et s'il meurt quatre jours plus tard ?
M. Jacques Larché, président de la commission. L'accident n'est pas mortel ! On peut très bien vivre sans jambes ! En principe, l'accident mortel intervient lorsqu'on tue quelqu'un.
J'ai lu qu'un jour il serait possible d'effectuer ce contrôle à partir des sueurs, qui donneraient des indications sur les substances absorbées.
Quoi qu'il en soit, il me semble que le problème de la drogue serait mieux pris en compte si son contrôle n'était pas limité aux seuls accidents mortels. Il faut donc prévoir que tout accident corporel donnera lieu à dépistage. S'il y a un saignement de nez ce n'est pas grave.
M. Michel Charasse. Cela peut l'être !
M. Jacques Larché, président de la commission. Tout à fait !
Mais si l'accidenté a une jambe coupée et qu'après six mois ou trois ans de séjour dans un hôpital, il se retrouve dans un fauteuil roulant, il me semble qu'il serait bon, malgré tout, de procéder à des contrôles. On disposerait ainsi d'un élément objectif qui permettrait de faire avancer les choses.
Cette innovation répondrait à la préoccupation de notre ami, M. Emmanuel Hamel, en montrant que le Sénat prend très sérieusement en considération ce problème de la drogue. Il n'est pas question de l'éliminer, mais il convient de tenir compte des connaissances actuelles en cheminant non pas de manière prudente, mais de façon assez déterminée. En indiquant que tout accident corporel peut entraîner un contrôle de stupéfiant, on ferait, me semble-t-il, un pas significatif.
Par conséquent, je suggère à M. Cantegrit de modifier son amendement de la façon suivante : « Toute personne qui aura conduit sous l'empire » - ne voyez dans ce dernier terme aucune manifestation bonapartiste, mais simplement la reprise du texte classique - « de substances ou plantes classées comme stupéfiants, dont elle aura fait usage de manière illicite et qui aura causé un accident ayant entraîné un dommage corporel, sera punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 francs d'amende. »
M. le président. Monsieur Cantegrit, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans ce sens ?
M. Jean-Pierre Cantegrit. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi, par M. Cantegrit, d'un amendement n° 9 rectifié bis, qui vise à insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est ajouté au titre Ier du code de la route (partie législative), après l'article L. 3-1, un article nouveau ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Toute personne qui aura conduit sous l'empire de substances ou plantes classées comme stupéfiants, dont elle aura fait usage de manière illicite et qui aura causé un accident ayant entraîné un dommage corporel sera punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 francs d'amende.
« Lorsqu'il y aura lieu à l'application des articles 221-6 et 222-19 du code pénal à l'encontre de l'auteur de l'infraction définie à l'alinéa précédent, les peines prévues par ces articles seront portées au double. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Pour les raisons que j'ai exprimées et que je ne développerai pas, il s'agit de permettre les conditions d'une étude épidémiologique pour en tirer ensuite les conséquences. L'usage des stupéfiants est d'ores et déjà pris en compte par le code pénal et il n'y a donc pas lieu d'ajouter une disposition à cet égard.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, tout en comprenant l'argument invoqué par ses défenseurs.
M. Emmanuel Hamel. Puisque vous comprenez, approuvez, monsieur le ministre ! (Sourires.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9 rectifié bis.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Il faut s'engager dans cette voie. On pourra envisager de retenir une telle disposition d'ici à quelques années, lorsque les contrôles seront mieux maîtrisés et qu'ils ne seront plus décidés à pile ou face.
Cette idée me paraît bonne. D'ailleurs, j'avais proposé à la commission de retenir les mots « accident corporel grave ».
Cela étant dit, les peines encourues me paraissent quelque peu disproportionnées lorsqu'il n'y a pas d'accident corporel grave. Aussi, compte tenu de l'impréparation du texte, le groupe socialiste ne votera pas cet amendement.
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Je ne comprends pas que l'on établisse une différence selon qu'il y a ou non un dommage corporel. C'est la consommation de drogue elle-même qui est répréhensible, car elle peut être à l'origine d'un accident grave. Que l'accident survienne ou pas, ce n'est pas du domaine de la rationalité.
Par ailleurs, monsieur le président de la commission, je ne sais pas ce qu'est un dommage corporel. En effet, cette notion couvre la perte des deux jambes, mais aussi une simple égratignure. Je ne suis donc pas persuadé que ce soit la bonne voie. Cela revient à ouvrir la porte à tous les contentieux possibles.
M. Michel Moreigne. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Moreigne.
M. Michel Moreigne. La notion de préjudice ou d'accident corporel se définit par de nombreux critères. S'agit-il d'un dommage partiel ou total ? A quel taux d'incapacité fixons-nous la gravité de l'accident ? S'agit-il d'une incapacité partielle ou temporaire ? Il convient tout de même de légiférer de façon beaucoup plus précise que ce qui est prévu dans cet amendement. Habituellement, notre assemblée ne se prononce pas sur des dispositions aussi imprécises.
M. Jacques Larché, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. La notion de dommages corporels figure dans l'article 1er du code de la route, relatif au délit de conduite sous l'empire de l'alcool. Ce n'est pas une invention. Je ne vois pas en quoi la gravité de l'accident serait différente selon que son auteur a pris des amphétamines, ou un autre produit de ce type, ou a conduit son véhicule sous l'empire de l'alcool. Dans les deux cas, il s'agit de dommages corporels.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié bis, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7 et l'amendement n° 14 ainsi que l'amendement n° 13, qui avait été précédemment réservé, n'ont plus d'objet.

Article 8 bis



M. le président.
« Art. 8 bis . - Les motoneiges sont désormais soumises à une immatriculation. »
Par amendement n° 4, M. Lanier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. Il s'agit de supprimer l'article 8 bis, qui concerne l'immatriculation des motoneiges. En effet, une telle disposition n'a pas à figurer dans la loi, laquelle ne doit pas être alourdie par des mesures qui relèvent manifestement du domaine réglementaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 8 bis est supprimé.

Article additionnel après l'article 8 bis



M. le président.
Par amendement n° 11, M. Mahéas et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 8 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'usage des patins à roulettes et des rollers est interdit aussi bien sur les trottoirs que sur la voie publique ; toutefois, cet usage peut être autorisé par arrêté du maire dans des conditions de lieux, de temps et de sécurité définies par décret. »
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Loin de moi l'idée, en présentant cet amendement, de vouloir ennuyer les jeunes qui font du patin à roulettes ou du roller. Dans la quasi-totalité des cas, les choses se passent tout à fait convenablement. Il n'y aurait donc pas lieu de légiférer, mais certains jeunes s'exposent à des dangers évidents, notamment en faisant du slalom sur des routes très fréquentées par des véhicules automobiles. Ils risquent alors de provoquer un accident ou d'en être eux-mêmes victimes.
Certains maires sont confrontés à ce problème et ont pris un certain nombre d'arrêtés municipaux de façon à endiguer ce qu'on appelle « la vague des streeters ». Je précise, pour ceux qui ne le sauraient pas, ce que je comprends très bien, qu'il s'agit de jeunes qui font du roller d'une manière agressive, qui arrondissent les marches des escaliers pour éviter les à-coups, qui utilisent le mobilier urbain comme les skieurs des piquets de slalom et qui créent de graves dommages sur la voie publique.
En déposant cet amendement, il s'agit de faire en sorte que, si certains jeunes dépassent les bornes, le Gouvernement appuie la démarche des maires qui prennent des arrêtés pour stopper la casse.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cette disposition. En effet, nous ne pouvons pas interdire les patins à roulettes et les rollers, ni mettre derrière chaque usager une personne pour dresser des contraventions.
Par ailleurs, les faits étant ce qu'ils sont, il faut bien se rendre compte que la pratique du patin à roulettes fait désormais partie des usages admis. Nous n'avons pas intérêt, par cet amendement, à inciter à la création d'une association de rollers râleurs, ce qui ne manquerait pas de se produire si cette disposition était adoptée.
C'est la raison pour laquelle je demande à M. Mahéas de bien vouloir comprendre que l'on ne peut empêcher les jeunes de pratiquer leur sport favori ! Il se trouve que, pour certains, c'est le patin à roulettes ou le roller.
Je comprends que vous soyez exaspéré quand il arrive qu'une vieille dame soit renversée sur un trottoir.
M. Emmanuel Hamel. Pas seulement « exaspéré » !
M. Lucien Lanier, rapporteur. Cela étant dit, je crois qu'il y aurait tout intérêt, d'abord, à ne pas compromettre l'usage du patin à roulettes et, ensuite, à laisser à la sagesse de la réglementation le soin d'en assurer l'usage. Dès lors, accepteriez-vous, si M. le ministre vous dit qu'il le fera, de retirer votre amendement ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le ministre dit qu'il le fera. Cette question relève, en effet, du domaine réglementaire,...
M. Michel Charasse. Absolument !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... du pouvoir de police des maires. Quand ils l'estiment indispensable, ils peuvent prendre les décisions nécessaires pour éviter qu'il y ait des abus ou des excès dans ce domaine. Je souhaite donc, moi aussi, le retrait de cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explicitation de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Avec mes amis, je me réjouis de la position de M. le ministre puisque cet amendement avait aussi pour objet d'entendre des explications. Mais ce que je veux dire à M. le ministre, c'est que, en l'occurrence, il ne faut pas viser seulement les maires car des jeunes circulent aussi sur des voies qui ne sont pas communales et sur lesquelles le maire n'a pas de pouvoir de police. Je pense donc qu'il faut viser les maires et les préfets. Je le dis à M. le ministre : si la disposition doit intervenir par voie réglementaire - et je pense qu'elle est effectivement du domaine réglementaire - il faut viser le maire et, en dehors de la commune, le préfet.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Je considère, moi aussi, que cette disposition relève du domaine réglementaire.
Cela étant dit, je suis quelque peu surpris par cet amendement. En effet, je lis, dans une presse qui est plutôt favorable à M. Mahéas, que le Sénat serait ringard, qu'il serait composé de vieux croulants qui dorment dans leurs fauteuils. Aussi, monsieur Mahéas, cet amendement n'est-il pas une sorte de provocation, pour que les journalistes puissent dire que le Sénat est contre les jeunes qui pratiquent le roller ? Ne s'agit-il pas d'un piège de votre part ?
M. Emmanuel Hamel. Il faut apprendre aux jeunes à discipliner leur énergie !
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Je remercie mon collègue M. Cantegrit, même s'il me coupe l'herbe sous le pied.
Je suis l'élu d'un département un peu difficile et président du district de Mantes-la-Jolie. A l'heure actuelle, nous nous efforçons d'inciter les jeunes à pratiquer notamment le roller afin de les distraire ; on met cela en place dans les quartiers. Je me vois mal, demain, le leur interdire au motif que j'aurai voté un tel amendement. Je préfère, pour ma part, qu'ils fassent du roller et leur apprendre, par ce biais, le respect d'autrui et notamment des personnes âgées. Cet amendement paraît être une provocation, comme l'a dit M. Cantegrit.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Mes chers collègues, vous m'avez sans doute mal entendu. Loin de moi, en effet, l'idée d'interdire l'usage du patin à roulettes et du roller. J'ai fait allusion à ces patineurs agressifs que sont les streeters. En tant que maire, moi aussi, j'ai fait aménager des pistes spécifiques à l'intention des rollers.
Compte tenu des explications de M. le ministre et de l'appui qu'il donne aux maires confrontés à ces difficultés - naissantes, je l'avoue, au point que certains de nos collègues découvrent peut-être ce problème - je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 11 est retiré.

Article 9



M. le président.
« Art. 9. - Les trois premiers alinéas de l'article 36 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs sont ainsi modifiés :
« a) Au premier alinéa, après les mots : "de transport routier public", sont insérés les mots : "de personnes ou" ;
« b) Au deuxième alinéa, après les mots : "dans les conditions prévues par", sont insérés les mots : "le règlement (CEE) n° 684/92 du Conseil du 16 mars 1992 ou" ;
« c) Au troisième alinéa, les mots : "à l'article 8" sont remplacés par les mots : "aux articles 7 et 8" et, après les mots : "de toute entreprise de transport routier public", sont insérés les mots : "de personnes ou". » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 9



M. le président.
Par amendement n° 12, MM. Miquel, Mahéas et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« Tous les véhicules neufs qui seront immatriculés à partir du 1er janvier 2000 devront être équipés d'une alarme sonore, visuelle et réglable, déclenchée automatiquement lors du dépassement de la vitesse maximale autorisée. »
La parole est à M. Miquel.
M. Gérard Miquel. M. Pierre Hérisson a évoqué la pose de limitateurs de vitesse sur les automobiles. C'est une fausse bonne idée.
De nombreux progrès ont été accomplis en ce qui concerne la sécurité des véhicules : amélioration de la résistance, multiplication des équipements - freinage ABS, airbag, insonorisation, souplesse - mais ces progrès peuvent se révéler contre-productifs en donnant un sentiment de sécurité tel qu'il peut amener le conducteur à commettre des imprudences par inadvertance.
Des efforts restent à faire, notamment sur les outils technologiques signalant au conducteur tout comportement dangereux.
La vitesse étant une des premières causes d'accidents mortels, le présent amendement tend à ce que tous les véhicules neufs soient équipés, à partir du 1er janvier 2000, d'un avertisseur de dépassement de vitesse, réglable, bien entendu, puisque nous devons adapter notre vitesse en fonction des routes que nous empruntons.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.
Certes, nous approuvons l'esprit qui le sous-tend et nous partageons les préoccupations de M. Miquel. Mais nous nous interrogeons sur l'efficacité d'un tel dispositif qui risque, au demeurant, de n'être imposé qu'aux seuls constructeurs français. J'ignore, à cet égard, quelles seront les réactions de Renault et de Peugeot !
Par ailleurs, une telle mesure n'incitera-t-elle pas, en définitive, les Français à acheter une Volkswagen ou un véhicule d'une autre marque étrangère, dans la mesure où la pose d'un tel dispositif accroîtra le prix du véhicule ? Il ne s'agirait, en définitive, que d'un instrument - je ne parlerai pas d'un gadget - qui s'ajouterait à tant d'autres.
Permettez-moi de vous faire part d'une expérience personnelle : l'une des voitures que j'ai autrefois possédée comprenait une alarme avertissant du non-bouclage de la ceinture de sécurité, ce qui me semble une bonne précaution. Or, un jour, l'un de mes passagers a eu la réaction exactement inverse, en souhaitant la suppression de ce gadget qui le gênait.
Je crains que de nombreux automobilistes ne soient défavorables au dispositif que vous proposez. Ce n'est pas, me direz-vous, une raison pour ne pas accepter l'amendement proposé. Mais je ne pense pas qu'au moment où vont être adoptés des règlements européens sur toutes ces questions...
M. Emmanuel Hamel. Pourquoi s'en remettre encore une fois à Bruxelles ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. ... nous devions anticiper et élaborer nos propres textes.
De surcroît, ce sujet relève du domaine réglementaire. Il appartiendra donc au ministre chargé des transports de savoir s'il impose aux constructeurs français l'installation d'un tel dispositif.
Voilà pourquoi la commission est défavorable à l'amendement n° 12.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. J'ai déjà eu l'occasion d'aborder cette question à plusieurs reprises. Bien évidemment, l'idée d'alerter, sous une forme ou sous une autre, le conducteur du dépassement de la vitesse autorisée est pertinente et tend à responsabiliser ledit conducteur. Cependant, sa mise en oeuvre se heurte à plusieurs problèmes.
Tout d'abord, s'il s'agit d'une alerte sonore, à partir de quelle vitesse va-t-elle se déclencher ? Est-ce que ce sera à partir de 130, de 90, de 50 kilomètres par heure ?
M. Dominique Braye. Le dispositif sera réglable !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Si l'équipement est réglable, cela signifie qu'il faut changer le paramètre de la vitesse suivant l'endroit où l'on se trouve ! Faut-il s'arrêter pour y procéder ?
M. Gérard Miquel. C'est automatique !.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Par ailleurs, la prévision des équipements lors de la construction des véhicules se décide au niveau communautaire et ne peut faire l'objet de décisions unilatérales d'un Etat. Dans ces conditions, il nous faut agir d'abord au niveau international et surtout communautaire ! Je suis en tout cas décidé à faire avancer les choses en ce sens. En attendant, si nous décidions seuls de telles mesures, nous serions condamnés pour non-respect de la concurrence.
C'est pourquoi, tout en partageant le souci de M. Miquel, je lui demande de bien vouloir retirer cet amendement. S'il ne le faisait pas, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Miquel, l'amendement est-il maintenu ?
M. Gérard Miquel. Je vais retirer l'amendement, mais je tiens à dire à M. le rapporteur que ces équipements existent déjà sur des véhicules français : j'ai eu l'occasion de rouler avec une Renault Laguna qui disposait de ce type d'alarme, ce qui m'apportait un grand confort en m'évitant de dépasser la vitesse autorisée en cas d'inattention de ma part. Le réglage en était d'ailleurs d'une extrême facilité.
Aujourd'hui, la technologie nous permettrait d'équiper toutes les voitures de tels dispositifs sans surcoût insurmontable pour le consommateur.
Cependant, en raison des assurances qui m'ont été données par M. le ministre, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 12 est retiré.

Article 12



M. le président.
« Art. 12. - I. - 1. Dans le cinquième alinéa (4°) de l'article 221-4 du code pénal, après les mots : "de l'administration pénitentiaire", sont insérés les mots : ", un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs".
« 2. Il est procédé à la même insertion dans les articles 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du même code.
« II. - Il est rétabli, dans la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer, un article 26 ainsi rédigé :
« Art. 26 . - L'outrage adressé à un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs est puni de six mois d'emprisonnement et de 50 000 francs d'amende.
« Lorsqu'il est commis en réunion, l'outrage est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende. »
Sur l'article, la parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je l'ai dit tout à l'heure, le présent projet de loi a pour principal mérite de trouver une juste mesure entre certaines dispositions préventives et éducatives et d'autres dispositions à caractère plus répressif.
Le Gouvernement a proposé d'introduire cet article 12 par le biais d'un amendement à l'Assemblée nationale. Or il nous semble que cet article a peu de choses à voir avec le sujet qui nous intéresse et, à notre sens, il vient, en quelque sorte, perturber l'équilibre du texte, en privilégiant uniquement l'aspect sécuritaire.
A nos yeux, l'article 12 ne fait qu'accroître la répression des actes de violence commis contre les agents des entreprises de transports publics de voyageurs en punissant de six mois d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende le délit d'outrage.
En même temps, vous le savez, le Sénat a adopté une proposition de loi dans des termes similaires. A l'époque, nous avions dit que nous prenions en considération la situation difficile des personnels concernés, mais nous avions refusé de prendre part au vote, considérant que cette mesure n'était pas à même d'apporter la solution escomptée par ces agents, qui sont victimes en permanence d'agressions à répétition.
Aujourd'hui, je ne retire pas un seul mot de la position qu'avait alors défendue, au nom de notre groupe, mon ami Robert Bret.
La réponse qui nous est proposée est-elle la plus judicieuse pour sortir de la spirale infernale de la violence urbaine ?
Cette mesure ne tend-elle pas à opposer la force institutionnalisée des pouvoirs publics et judiciaires à la force désorganisée des délinquants en rupture avec la société ?
Nous pensons, quant à nous, que l'arsenal judiciaire existe déjà, même s'il est vrai que la justice est encombrée de ce genre de cas.
Il nous paraît donc nécessaire de réinvestir dans nos banlieues des moyens financiers et humains, en offrant de réelles perspectives d'emploi et d'insertion sociale à des jeunes en perte de repères.
Dans le domaine de compétences qui est le vôtre, monsieur le ministre, vous avez déjà engagé un ambitieux programme de modernisation et de développement des services publics de transport collectif, notamment en Ile-de-France. Il s'agissait d'ailleurs de l'une des trois priorités de votre budget pour 1999, alors que la majorité sénatoriale proposait de réduire les crédits de façon drastique, d'augmenter les tarifs sociaux et, finalement, de priver les personnels des moyens d'accomplir leur mission de service public.
Compte tenu de toutes ces considérations, nous n'avons aucune raison de ne pas maintenir la position que nous avions adoptée lors de la discussion au Sénat en première lecture.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 12.

(L'article 12 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 12



M. le président.
Par amendement n° 17, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 12, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 1er du code de la route, les mots : "les officiers ou agents de la police administrative ou judiciaire" sont remplacés par les mots : "les officiers de police judiciaire, les agents de la police judiciaire mentionnés aux articles 20, 21-1° et 21-1° bis du code de procédure pénale, ou les agents de la police administrative".
« II. - Au début de l'article L. 88 du code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme, les mots : "Les officiers ou agents de la police administrative ou judiciaire" sont remplacés par les mots : "Les officiers de police judiciaire, les agents de la police judiciaire mentionnés aux articles 20, 21-1° et 21-1° bis du code de procédure pénale, ou les agents de la police administrative". »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le projet de loi relatif aux polices municipales prévoit, dans son article 1er, que les agents de police municipale pourront dresser procès-verbal des contraventions aux dispositions du code de la route dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat.
En application de l'article L. 14 du code de la route, le contrôle de l'imprégnation alcoolique est réalisé, notamment, à l'occasion des contraventions à la police de la circulation routière énumérées à l'article R. 266.
C'est dire que la quasi-totalité des infractions que les agents de police municipale constateront par procès-verbal, en particulier celles qui sont relatives au dépassement de la vitesse maximale autorisée, pourront donner lieu à un contrôle d'alcoolémie. Or il convient de réserver aux officiers ou agents de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie le contrôle de l'alcoolémie.
L'amendement proposé a pour objet d'exclure du champ de compétence des agents de police municipale ce contrôle d'alcoolémie - et ce en conformité avec l'examen du texte concernant les polices municipales - sans pour autant limiter en rien leur pouvoir de verbalisation des contraventions aux règles de circulation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission, saisie très tardivement - ce matin seulement - de cet amendement de dernière heure n'y est pas favorable : elle a été saisie de cet amendement au moment même où elle était en train d'examiner les dispositions du texte relatif aux polices municipales.
Soyons logiques ! La commission a considéré, dans sa sagesse, qu'un tel amendement avait plus sa place dans le texte sur les polices municipales.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 18, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 12, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1599 octodecies du code général des impôts est complété par un 4 ainsi rédigé :
« 4. - Aucune taxe n'est due au titre de la délivrance des certificats d'immatriculation des cyclomoteurs à deux roues et des cyclomoteurs à trois roues non carrossés. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Afin d'améliorer la sécurité des jeunes cyclomotoristes, de limiter les vols et de lutter contre les conduites dangereuses ou néfastes pour l'environnement liées au débridage des cyclomoteurs, le Gouvernement a retenu le principe de l'immatriculation obligatoire des cyclomoteurs à deux roues et des cyclomoteurs à trois roues non carrossés.
S'agissant d'engins utilisés principalement par des jeunes sans ressources propres, le présent amendement vise à les exonérer de la taxe sur les certificats d'immatriculation des véhicules.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, qui prévoit qu'aucune taxe n'est due au titre de la délivrance des certificats d'immatriculation pour les cyclomoteurs.
S'agissant de véhicules qui sont en majorité conduits par des jeunes, on ne peut donc qu'être favorable à une telle mesure.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. Emmanuel Hamel. Le Sénat s'intéresse à la jeunesse ! (Sourires.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.

Article 13



M. le président.
« Art. 13. - La conduite d'un quadricycle léger à moteur au sens de l'article R. 188-1 du code de la route est subordonnée à une formation au code de la route. »
Par amendement n° 5, M. Lanier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. La commission propose de supprimer cet article 13, qui tend à imposer une formation au code de la route pour la conduite de ce que l'on appelle les « voiturettes ».
Je tiens à préciser que les voiturettes sont de petits quadricycles. Il ne s'agit pas de véhicules automobiles tels que ceux en faveur desquels on fait de la publicité à l'heure actuelle, comme la Smart. Il ne faut pas faire de confusion ! La voiturette est simplement une petite voiture qui remplace le cyclomoteur : on carrosse différemment un moteur sur un véhicule dont la vitesse est limitée à 45 kilomètres à l'heure.
Certes, Paul Morand indiquait, dans Paris 1900 , que les voitures peuvent atteindre de « très grandes vitesses » : au-delà de 40 kilomètres à l'heure, selon lui, le danger commençait. Mais nous étions alors en 1900 et, effectivement, à ce moment-là, le danger était très grand pour les volatiles qui se trouvaient sur les routes et qui ne se méfiaient pas. (Sourires.)
Qui utilise les voiturettes ? Ceux qui ne peuvent plus utiliser un cyclomoteur, c'est-à-dire très souvent, dans le monde rural, les personnes âgées, qui les considèrent comme étant plus stables, leur danger résidant peut-être dans le fait que leur vitesse maximale est très différente de celle des autres véhicules. Mais passons !
Je ne défends pas du tout le lobby des constructeurs, encore qu'ils m'intéressent puisqu'ils sont français et que leurs voiturettes, actuellement, se vendent assez bien à l'étranger !
En fait, la formation au code de la route prévue à cet article relève du domaine réglementaire, et c'est pourquoi je demande au Gouvernement d'accepter l'amendement n° 5.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 13 est supprimé.

Article 14



M. le président.
« Art. 14. - A partir du 1er janvier 2000, les véhicules à deux roues non motorisés font l'objet d'un marquage dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 6, M. Lanier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. L'article 14 tend à imposer un marquage des véhicules à deux roues non motorisés.
Je suis d'une génération - comme vous peut-être, monsieur le président - où l'on marquait les bicyclettes : on achetait une petite plaque fiscale que l'on fixait sur le guidon.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Moi aussi, j'ai connu cela !
M. Lucien Lanier, rapporteur. Vous me rajeunissez, monsieur le ministre. (Sourires.)
Marquer les véhicules à deux roues non motorisés est une initiative certes intéressante, mais qui relève du règlement. D'où, là encore, un amendement visant à supprimer l'article.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 14 est supprimé.

Article 15



M. le président.
« Art. 15. - La sécurité des infrastructures routières fait l'objet d'un contrôle dont les conditions sont définies par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 7, M. Lanier, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. L'Assemblée nationale a adopté un amendement prévoyant un contrôle de la sécurité des infrastructures routières dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat.
La commission des lois s'est longuement interrogée sur ce point, car il préoccupe fortement les collectivités locales, départements et communes.
N'oublions pas - vous avez donné les chiffres tout à l'heure, monsieur le ministre - qu'une grande partie du réseau est soit départemental, soit vicinal ou, si l'on préfère, communal.
La mesure proposée nous paraît tout à fait prématurée dans la mesure où elle ne laisse entrevoir ni les conséquences financières ni les conséquences juridiques sur la responsabilité des collectivités locales d'un tel contrôle.
De plus, aucune concertation n'a eu lieu entre l'Etat et les collectivités locales à ce sujet. Il conviendrait, pour le moins, que ces dernières soient consultées sur cette affaire !
Il serait très dangereux - je l'ai dit dans mon propos liminaire - d'ouvrir cette véritable boîte de Pandore, car, en l'état, les conditions minimales de sécurité seraient fixées par des techniciens de la route qui auraient tendance à en rajouter plutôt qu'à en retirer.
J'ajoute que les collectivités locales - départements et communes - consacrent déjà beaucoup d'argent à l'entretien de leurs réseaux.
Dans ces conditions, il me paraît préférable, je le répète, qu'un dialogue s'instaure préalablement entre l'Etat et les collectivités locales sur la mise en sécurité du réseau routier de ces dernières.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Le Gouvernement est favorable à la concertation, et donc à l'amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 7.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Le groupe socialiste votera l'amendement. En effet, les maires et présidents de conseils régionaux qui seraient ainsi impliqués pourraient, à la limite, voir leur responsabilité engagée, et cela ne nous semble pas judicieux.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 15 est supprimé.

Intitulé du projet de loi



M. le président.
Par amendement n° 8, M. Lanier, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit l'intitulé du projet de loi :
« Projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents des exploitants de réseau de transport public de voyageurs. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Lanier, rapporteur. Il convient de modifier l'intitulé du projet de loi pour tenir compte des dispositions qui ont été adoptées tant par l'Assemblée nationale que par le Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé du projet de loi est ainsi rédigé.
Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l'objet de la deuxième lecture.

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Lefebvre pour explication de vote.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avions indiqué, lors de la discussion générale, que nous voterions ce texte malgré l'adoption de l'amendement sur les produits illicites et de l'article 12, sur lequel notre groupe s'est abstenu.
En effet, nous voulons retenir l'essentiel, et l'essentiel, c'est effectivement que nous nous donnions les moyens nécessaires pour atteindre rapidement l'objectif que nous nous sommes fixé, à savoir réduire de moitié le nombre des accidents mortels sur la route.
Nous voterons donc le projet de loi qui nous est soumis.
M. Emmanuel Hamel. M. Gayssot a le soutien de ses amis !
M. Pierre Lefebvre rapporteur. N'est-ce pas normal ?
M. Emmanuel Hamel. Qu'il en soit heureux !
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le ministre, on ne peut pas voter contre ce projet de loi, car il part de bons sentiments.
Néanmoins, en tant qu'élu d'un département « noir », et donc très sensibilisé à ces problèmes, je ne participerai pas au vote.
Comme vos prédécesseurs, vous faites une fixation sur la vitesse. Depuis des années, on considère que la vitesse est la source de tous les maux et on prend donc sans arrêt des mesures pour la restreindre.
Or, finalement, on s'aperçoit que le nombre des morts ne diminue pas, que, bien au contraire, il augmente. Je crains donc que, vous aussi, comme vos prédécesseurs, vous ne fassiez fausse route, ce qui, pour un projet de loi sur la sécurité routière, est plutôt gênant ! (Sourires.)
En fait, la vitesse est un facteur aggravant, comme on l'a dit pendant des années, mais de là à la rendre responsable de tout !
Pour ce qui est des jeunes qui, trop souvent, perdent le contrôle de leur véhicule, et pas forcément du fait de la vitesse, je suis d'accord : des progrès restent à faire au niveau des autos-écoles et de la formation.
Mais lorsqu'on circule, que constate-t-on, notamment dans le monde rural ? On constate que les conducteurs ignorent les lignes continues, qu'ils ignorent aussi la conduite à droite, qu'ils grillent allègrement les feux rouges, tout comme les stops, qu'ils ne mettent pas leurs feux en cas de brouillard, que certains s'endorment au volant. Et, tout cela, cela fait des morts !
Vous voulez diminuer le nombre des victimes, monsieur le ministre. A cet égard, je ferai quatre remarques.
Premièrement, au lieu de faire de nouvelles lois, faites respecter la loi. Aujourd'hui, elle n'est pas respectée.
M. Emmanuel Hamel. C'est vrai !
M. Bernard Joly. Deuxièmement, mettez peut-être un peu plus d'uniformes sur la route,...
M. Emmanuel Hamel. Beaucoup plus !
M. Bernard Joly. ... et pas seulement derrière les radars !
Troisièmement, essayez de contrôler davantage l'alcoolémie au volant et non pas quand l'accident a eu lieu. Aujourd'hui, il n'y a pas encore suffisamment de contrôles antialcooliques.
Enfin, contrôlez la vitesse, oui, mais dans les agglomérations plutôt qu'en rase campagne, à minuit ; faites des contrôles pour que la vie des enfants ne soit pas en danger !
A ce moment-là, je voterai votre loi !
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Monsieur le ministre, le groupe socialiste votera ce texte, même si un certain nombre de dispositions ne lui conviennent pas, d'autant que l'Assemblée nationale verra peut-être les choses différemment, notamment en ce qui concerne la prise de drogues dites illicites.
Cela étant dit, nous sommes bien conscients qu'il s'agit d'un nouveau pas, que la nouvelle loi va s'additionner à une réglementation ancienne et que, dans ce domaine, nous évoluons vite. Il ne se passe pratiquement pas de mandat sans que l'on parle de sécurité routière.
Sans vouloir anticiper sur le prochain texte dont nous discuterons, je vous demande instamment, monsieur le ministre, de miser, avec votre collègue de l'éducation nationale, sur l'éducation des conducteurs.
La répression est une nécessité, et je ne vois pas pourquoi certains s'offusquent de la lourdeur de la peine applicable en cas de dépassement de cinquante kilomètres à l'heure par deux fois dans la même année de la vitesse autorisée. Nous savons les uns et les autres que la vitesse est l'un des facteurs importants de la mortalité sur la route.
Il conviendra toutefois d'insister, je le répète, à l'occasion d'une prochaine réflexion, sur l'aspect éducatif du problème.
Le groupe socialiste a proposé un certain nombre d'amendements qui, c'est vrai, relevaient très souvent du domaine réglementaire. Il n'en était pas dupe. Pour autant, il suivra très attentivement votre action dans les domaines concernés, monsieur le ministre.
Nous sommes nombreux à être très sensibilisés aux difficultés que rencontrent nos concitoyens sur la route. Nous vous faisons entièrement confiance, monsieur le ministre. Mais qui dit confiance ne dit pas blanc-seing, et nous suivrons donc pas à pas vos démarches et vos propositions.
M. le président. La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Le groupe des Républicains et Indépendants votera ce texte.
Nous nous réjouissons que des améliorations lui aient été apportées soit par l'adoption d'amendements, notamment celui qui fait aujourd'hui de la conduite sous l'empire de stupéfiants un délit - c'est une bonne chose - soit par la suppression, il y a quelques instants, de l'article 15, qui concernait un vrai problème, mais qui n'avait pas sa place dans ce texte.
Monsieur le ministre, votre projet va donc recueillir une approbation très large, très consensuelle. Pour autant, il ne faut pas être euphorique. Il faut, au contraire, être très modeste. En effet, comme l'a rappelé M. le rapporteur en début d'après-midi, ce texte ne résout pas tout. De très nombreux problèmes restent posés.
Vouloir réduire de moitié le nombre des accidents mortels dans notre pays est un très bel objectif, auquel chacun ne peut qu'adhérer. Il faudra toutefois de très nombreuses années pour l'atteindre. Considérez aujourd'hui que ce texte est un modeste instrument supplémentaire mis à la disposition des pouvoirs publics pour s'en approcher.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, devant le constat dramatique du nombre de tués sur les routes, qui s'établissait encore à plus de 8 000 l'année dernière, il est urgent que les mesures que nous venons d'examiner soient mises en oeuvre dans les meilleurs délais.
On ne peut que regretter, d'ailleurs, comme l'ont souligné plusieurs orateurs, notamment notre rapporteur, notre collègue Lucien Lanier, qu'il ait fallu neuf mois pour que ce texte, passé en première lecture à l'Assemblée nationale, revienne aujourd'hui au Sénat, qui l'avait examiné, lui, en premier lieu le 7 avril 1998.
Il est encore plus regrettable de constater que seulement 30 millions de francs sont alloués au budget de la sécurité routière pour l'année 1999. Ce chiffre nous montre, malheureusement, le peu d'intérêt que le Gouvernement porte à ce problème pourtant crucial.
Permettez-moi également de rappeler, monsieur le ministre, que, l'an dernier déjà, le Gouvernement montrait son peu d'intérêt pour la sécurité routière en annulant 61 millions de francs en autorisations de programme et 45 millions de francs en crédits de paiement sur le budget consacré à l'investissement en matière de transports terrestres et aux aménagements de sécurité sur la voirie nationale.
M. Emmanuel Hamel. Les critères de Maastricht !
M. Dominique Braye. Vous comprendrez, monsieur le ministre, que, en matière de sécurité routière, les discours rassurants du Gouvernement, en total décalage avec ses actions, ne peuvent convaincre les membres de la Haute Assemblée de sa volonté de prendre véritablement en main ce problème. D'ailleurs, s'il y avait une réelle volonté, comme le rappelait l'un de nos collègues, il faudrait, en tout premier lieu, appliquer la loi actuelle dont le non-respect est à l'origine de la quasi-totalité des accidents graves. Le projet de loi que nous allons adopter n'améliorera pas la situation s'il n'est pas appliqué.
Enfin, je tiens, au nom du groupe du Rassemblement pour la République, à rendre tout particulièrement hommage au rapporteur de la commission des lois, notre collègue Lucien Lanier pour la qualité de son travail. (M. le ministre acquiesce.)
M. Emmanuel Hamel. M. le ministre acquiesce !
M. Dominique Braye. Par ses nombreuses propositions, il a su combler les lacunes de ce texte et renforcer ainsi les mesures nécessaires à la lutte contre l'insécurité routière.
En conséquence, le groupe du Rassemblement pour la République votera le texte tel qu'il a été amendé par le Sénat.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je veux tout d'abord remercier MM. Lucien Lanier et Jacques Larché, ainsi que tous ceux qui ont contribué à ce débat avec la volonté de l'enrichir, même s'il y a eu quelques divergences sur tel ou tel point.
S'agissant de l'article 12, j'ai bien compris le souci de M. Lefebvre ; d'ailleurs, l'intitulé du projet de loi a été modifié pour que l'on ne puisse plus parler de « cavalier ». Désormais, les agents d'un exploitant de réseau de transport public seront considérés comme des magistrats ou des agents des forces de police lorsqu'ils seront victimes d'outrages ou de violences.
Monsieur Joly, vous avez soutenu que ce projet de loi ne visait qu'à réprimer la vitesse. D'abord, en cas d'accident, la vitesse est un facteur aggravant, comme vous, tout le monde le reconnaît.
Je vous rappelle que le nombre d'accidents a diminué l'an dernier - j'insiste sur ce point - alors que le nombre de tués a augmenté. A quoi attribuez-vous cela ? A la vitesse, tout le monde en est d'accord !
Certes, la vitesse n'est pas la seule cause des accidents ; la fatigue, l'alcool y contribuent également. La nuit, quand la vitesse se conjugue avec l'alcool et la fatigue, le cocktail devient alors explosif. C'est pour cela que j'insiste sur la nécessité des contrôles préventifs.
Quand vous me demandez de ne pas faire procéder à des contrôles de vitesse en rase campagne à minuit, je vous renvoie à la réalité de la situation : c'est malheureusement souvent en rase campagne et à minuit qu'ont lieu les accidents les plus graves ! Et ce n'est pas là qu'un discours, j'attire l'attention de tous les responsables nationaux sur ce point.
Je remercie également M. Mahéas de sa contribution à ce débat et j'insiste avec lui sur la nécessité de la formation et de l'éducation. Il entend suivre attentivement la suite qui sera donnée à cette loi. Je saisis sa remarque au bond : j'y compte bien !
Une fois la loi votée, rien ne sera fini ; tous les partenaires devront se mobiliser ; il faudra un suivi, une évaluation.
M. Jacques Mahéas. Un rapport ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Et le Parlement, comme les associations et les responsables locaux devront apporter leur contribution.
C'est vrai, monsieur Poniatowski, ce texte ne résout pas tous les problèmes, loin s'en faut, et j'en ai bien conscience ; mais s'il participe, comme je le vois, à l'amélioration de la sécurité routière, il aura, de ce point de vue, rempli son rôle.
Je vous remercie également, monsieur Braye, pour le soutien que vous avez finalement apporté au texte.
M. Hérisson a demandé que soit favorisé le transport par rail des marchandises ; il s'en doute bien, je partage son sentiment.
M. Emmanuel Hamel. Dites à Mme Voynet de reprendre la liaison Rhin-Rhône !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. D'ailleurs, la volonté du Gouvernement est de développer le trafic ferroviaire, et notamment le transport des marchandises par rail.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le vote que vous venez d'émettre contribuera à montrer que, par-delà les différences politiques qui existent, et c'est bien normal, on peut, sur un sujet de société tel que celui-là, se retrouver pour faire avancer la bonne cause, celle de la sécurité routière. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. Emmanuel Hamel. Soyez déterminé !

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NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation agricole.
La liste des candidats établie par la commission des affaires économiques et du Plan a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean François-Poncet, Michel Souplet, Dominique Leclerc, Gérard César, Jean-Paul Emorine, Jean-Marc Pastor et Gérard Le Cam.
Suppléants : Mme Janine Bardou, MM. Gérard Cornu, Bernard Joly, Pierre Lefebvre, Bernard Murat, Bernard Piras et Albert Vecten.

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DÉPÔT DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Guatemala sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 211, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Honduras, sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 212, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces arméées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Nicaragua sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 213, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Namibie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole).
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 214, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Azerbaïdjan sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole).
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 215, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement macédonien sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 216, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.9

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Paul Delevoye un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi de MM. Jacques Oudin, Charles Ceccaldi-Raynaud, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Patrice Gélard, Lucien Lanier, René-Georges Laurin, Paul Masson, Jean-Pierre Schosteck et Alex Turk visant à modifier l'article L. 255 du code électoral (n° 303, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le n° 208 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Paul Delevoye un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, relatif aux polices municipales (n° 183, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 209 est distibué.

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DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Lucien Neuwirth un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires sociales sur les soins palliatifs et l'accompagnement.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 207 et distribué.

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DÉPÔT D'UN AVIS

M. le président. J'ai reçu de M. René Trégouët un avis présenté au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi sur l'innovation et la recherche (n° 152, 1998-1999).
L'avis sera imprimé sous le n° 210 et distribué.

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ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 11 février 1999.
A neuf heures trente :
1. Discussion de la question orale européenne avec débat (n° QE 4) de M. Michel Barnier à M. le ministre des affaires étrangères sur l'avenir de la politique étrangère et de sécurité commune.
M. Michel Barnier attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne et ses perspectives d'avenir à la veille de la ratification par la France du traité d'Amsterdam. Ce texte comporte en effet plusieurs dispositions nouvelles et réalistes susceptibles de renforcer la présence de l'Union sur la scène internationale si les Etats membres en ont la volonté, notamment la création d'un haut représentant pour la PESC qui devrait être prochainement nommé.
Il souhaite notamment connaître le sentiment du Gouvernement sur la nature des liens qui pourraient unir demain l'Union européenne et l'Union de l'Europe occidentale, ainsi que sur les conditions dans lesquelles l'identité européenne de sécurité et de défense pourrait s'affirmer au sein de l'Alliance atlantique.
La discussion de cette question orale s'effectuera selon les modalités prévues à l'article 83 ter du règlement.
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
2. Discussion des conclusions du rapport (n° 194, 1998-1999) de M. Claude Huriet, fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi de MM. Philippe Arnaud, Jean-Paul Amoudry, Jean Arthuis, Alphonse Arzel, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barraux, Jacques Baudot, Michel Bécot, Claude Belot, François Blaizot, Maurice Blin, Mme Annick Bocandé, MM. Didier Borotra, Marcel Deneux, Gérard Deriot, André Diligent, André Egu, Pierre Fauchon, Jean Faure, Serge Franchis, Yves Fréville, Francis Grignon, Marcel Henry, Pierre Hérisson, Rémi Herment, Jean Huchon, Claude Huriet, Jean-Jacques Hyest, Henri Le Breton, Edouard Le Jeune, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain, Jacques Machet, Jean Madelain, Kléber Malécot, André Maman, René Marquès, Louis Mercier, Daniel Millaud, Louis Moinard, René Monory, Philippe Nogrix, Jean Pourchet, Michel Souplet et Xavier de Villepin tendant à assurer un service minimum en cas de grève dans les services et entreprises publics (n° 491, 1997-1998).
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Aucun amendement n'est plus recevable.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi portant création de l'autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire (n° 8, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 15 février 1999, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale, relatif aux enquêtes techniques sur les accidents et les incidents dans l'aviation civile (n° 516, 1997-1998).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 15 février 1999, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux polices municipales (n° 183, 1998-1999).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 16 février 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 16 février 1999, à dix-sept heures.
Projet de loi sur l'innovation et la recherche (n° 152, 1998-1999).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 17 février 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 17 février 1999, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures quarante.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





NOMINATIONS DES MEMBRES
D'UNE COMMISSION SPÉCIALE

Dans sa séance du mercredi 10 février 1999, en application de l'article 10, alinéa 3, du règlement, le Sénat a nommé membres de la commission spéciale sur le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire :
Janine Bardou, Jacques Baudot, Marie-Claude Beaudeau, Jacques Bellanger, Claude Belot, Georges Berchet, Roger Besse, Didier Borotra, André Boyer, Yolande Boyer, Bernard Cazeau, Jean-Paul Delevoye, Léon Fatous, Bernard Fournier, Alfred Foy, Jean François-Poncet, François Gerbaud, Georges Gruillot, Pierre Hérisson, Daniel Hoeffel, Jean Huchon, Jean-Paul Hugot, Serge Lagauche, Gérard Larcher, Gérard Le Cam, Paul Masson, Gérard Miquel, Jacques Oudin, Jean-Marc Pastor, Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Bernard Piras, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Charles Revet, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Alain Vasselle.

NOMINATION DU BUREAU
D'UNE COMMISSION SPÉCIALE

Dans sa séance du mercredi 10 février 1999, la commission spéciale chargée d'examiner le projet d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire a procédé à la nomination de son bureau qui est ainsi constitué :
Président : M. Jean François-Poncet.
Vice-présidents :
M. Jacques Bellanger ;
M. Jean-Paul Delevoye ;
M. Jean Huchon ;
M. Paul Masson ;
M. Jean-Pierre Raffarin.
Secrétaires :
Mme Janine Bardou ;
M. Gérard Le Cam ;
M. Bernard Piras.
Rapporteurs :
M. Gérard Larcher ;
M. Claude Belot ;
M. Charles Revet.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Protection des droits
des Français binationaux en Algérie

452. - 9 février 1999. - M. Michel Pelchat rappelle à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, qu'aucune discrimination ne saurait être tolérée sur notre territoire, de quelque nature qu'elle soit, dans quelque domaine que ce soit, et notamment en matière de statut familial. Il constate que, malheureusement, l'égalité entre les hommes et les femmes n'est pas effective dans tous les pays, et qu'elle n'existe notamment pas en Algérie, ce pays très proche de la France où, depuis 1984, un code de la famille régit le statut familial accordant à la femme des droits et des capacités bien inférieurs à ceux de son époux. En conséquence, il lui demande quelles mesures elle compte prendre, y compris sur le plan des projets législatifs, afin que le juge français refuse catégoriquement l'application de ce code inique. En outre, il souhaite savoir quelles mesures elle entend prendre pour faire respecter les droits matrimoniaux, patrimoniaux et de liberté de circulation des Français, notamment des Français binationaux, par les autorités algériennes (entre autres) qui ne leur reconnaissent ni en fait ni en droit la nationalité française, et quelles mesures elle compte prendre pour que ces autorités n'empêchent pas la France d'exercer en Algérie, comme partout dans le monde, l'obligation d'assistance qu'elle doit à tous ses ressortissants quels qu'ils soient et sans discrimination à l'égard des binationaux.

Politique des déchets et valorisation biologique

453. - 9 février 1999. - Mme Serge Lepeltier appelle l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur les difficultés qui peuvent apparaître entre, d'une part, la promotion d'une politique des déchets visant à freiner les tendances à la mise en décharge et à l'incinération, à accélérer le recyclage et le tri et, d'autre part, les réticences du monde agricole et des industries agroalimentaires à utiliser des composts issus des déchets ménagers et assimilés. Alors que les consommateurs sont légitimement, et d'une façon croissante, sensibles aux impacts environnementaux, à la qualité des produits qui leur sont proposés, on observe, en effet, une défiance dans le traitement biologique des déchets et dans l'utilisation de fertilisants issus de ce traitement. L'exemple, de l'épandage agricole concernant les boues de stations d'épuration ou d'autres déchets industriels et de l'évolution de la réglementation avec le décret n° 97-1133 du 8 décembre 1997 est à cet égard significatif, même si l'on constate maintenant l'émergence d'un relatif consensus sur l'acceptation de l'épandage, dès lors que toutes les mesures sont prises pour minimiser les risques sanitaires. Concernant précisément les composts, il apparaît clairement que des mesures doivent être prises, de nature notamment à favoriser une cohérence réglementaire d'ensemble et à améliorer les normes techniques existantes. C'est pourquoi il lui demande quelles initiatives elle compte prendre en ce domaine afin de concilier la contradiction entre une politique des déchets qui se donne pour objectif la valorisation agricole et les diverses incertitudes qui freinent l'utilisation des composts.

Financement des équipements sportifs communaux

454. - 10 février 1999. - M. André Vallet attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur le statut des équipements sportifs à l'usage des publics scolaires - collèges ou lycées -, notamment sur la prise en charge financière des équipements sportifs appartenant aux communes. L'éducation physique et sportive est une discipline d'enseignement à part entière, nécessitant à ce titre des installations adaptées, mais la prise en charge, la gestion et le financement de ces équipements reste très inégalitaire. Il lui rappelle que cet enseignement est dispensé par des collèges ou des lycées - relevant des régions et des départements - sur des installations communales ; le coût de l'entretien, des réparations et des aménagements des équipements sportifs est aujourd'hui entièrement supporté par les communes, alors que leur utilisation est partagée. Il lui indique également qu'en dépit de la circulaire de mars 1992 qui invite au conventionnement entre les collectivités territoriales, et en dépit d'un arrêté du Conseil d'Etat du 10 janvier 1994 qui précise que départements et régions doivent participer au fonctionnement des équipements sportifs, beaucoup de communes, largement dépendantes des subventions des régions et départements, hésitent à réclamer cette subvention. Il se demande si une intervention du législateur ne serait pas de nature à apporter une salutaire clarification quant à la gestion des équipements sportifs, notamment pour les communes qui en ont la charge, ainsi que pour les institutions qui participent à leur financement. Il lui demande enfin quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre afin de préciser les devoirs de chacune des collectivités concernées par l'utilisation des équipements sportifs appartenant aux communes.

Travaux de consolidation de berges
sur le domaine public communal

455. - 10 février 1999. - M. Xavier Darcos attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les difficultés financières importantes que rencontre la commune de Lamothe-Montravel (Dordogne) pour consolider les berges de la Dordogne situées sur le domaine public communal et qui se sont effondrées à la suite de violentes inondations. En vertu de l'article 33 d'une loi très ancienne puisqu'elle remonte au 16 septembre 1807, les travaux de réparation incombent à la commune : « Lorsqu'il s'agira de construire des digues à la mer, ou contre des fleuves, rivières ou torrents navigables ou non navigables, la nécessité en sera constatée par le Gouvernement et la dépense supportée par les propriétés protégées, dans la proportion de leur intérêt aux travaux, sauf dans les cas où le Gouvernement croirait utile et juste d'accorder des secours sur les fonds publics ». Il souhaite le sensibiliser sur le caractère obsolète de la loi du 16 septembre 1807 et lui demande comment une commune de mille habitants peut financer des travaux de consolidation de berges avec ses ressources locales, sachant que 20 mètres carrés coûtent 800 000 F (HT). Il lui demande également s'il trouve admissible qu'en cas de dommages corporels ou matériels susceptibles d'être causés par l'effondrement des berges, la responsabilité pénale du premier magistrat de la commune se trouve engagée aux termes d'une jurisprudence du Conseil d'Etat en vigueur depuis plus d'un siècle : l'arrêt Blanco datant de 1873. Il souhaite qu'il lui indique s'il peut, pour l'exercice 1999, accorder à la commune de Lamothe-Montravel une dotation globale d'équipement suffisante pour lui permettre de réaliser en urgence des travaux de consolidation des berges situées sur l'emprise du domaine public communal. Les concours financiers sollicités par le maire de cette commune auprès de M. le préfet de la Dordogne sont restés vains, et ce malgré plusieurs rappels ou interventions datant de 1996. Il souhaite, par ailleurs, savoir s'il envisage de réactualiser la loi de 1807 sur les travaux publics communaux et s'il estime opportun d'encadrer la jurisprudence Blanco en prenant les mesures qui s'imposent pour que la responsabilité pénale des maires coïncide davantage avec la réalité des exigences communales qui, avec la multiplicité des lois, règlements, décrets et directives européennes, rendent la tâche des élus quasiment impossible.

Désignation du concessionnaire de l'autoroute A 19

456. - 10 février 1999. - M. Paul Masson demande à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement de bien vouloir lui indiquer où en est la procédure de désignation de l'entreprise concessionnaire pour l'autoroute A 19 six mois après la déclaration d'utilité publique.