Séance du 4 mars 1999
M. le président. « Article unique. - L'article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La loi détermine les conditions dans lesquelles est organisé l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 3, M. Paul Girod propose de rédiger comme suit cet article :
« Le dernier alinéa de l'article 3 de la Constitution est complété par une phrase ainsi rédigée : « La loi favorise leur égal accès aux mandats électoraux et fonctions électives dans le respect du droit de candidature et de liberté de choix des électeurs. »
Par amendement n° 1, M. Cabanel, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi le second alinéa de l'article unique :
« La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. »
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. Je demande l'examen en priorité de l'amendement n° 1 de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. La priorité est ordonnée.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1.
M. Guy Cabanel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Cet amendement n° 1 est d'une grande simplicité, puisqu'il reprend presque mot pour mot la rédaction initiale du projet de loi constitutionnelle approuvé en conseil des ministres le 17 juin 1998 : « La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. » Seuls, les termes « électoraux » et « électives » ont été tirés du texte transmis par l'Assemblée nationale.
La raison du dépôt de cet amendement n° 1 est simple, elle aussi. Il nous a été dit que seule la modification de l'article 3 de la Constitution permettait de lever le verrou d'inconstitutionnalité opposé jusque-là par le Conseil constitutionnel à toutes les mesures qui avaient été envisagées, tant en 1982 que plus récemment.
J'ajoute que, ce texte, je l'avais déjà proposé en commission lors des débats préalables à la première lecture et que, hier matin, la commission des lois l'a adopté.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 3.
M. Paul Girod. J'ai bien entendu M. le rapporteur, mais je dois dire qu'il a commis un oubli.
Chacun connaît l'aimable discussion que nous avons, lui et moi, sur cette affaire. En effet, nous cherchons à atteindre tous les deux le même but, mais pas forcément avec les mêmes moyens. M. le rapporteur a donc oublié de nous dire qu'il s'agissait, avec l'amendement n° 1, d'un alinéa nouveau s'ajoutant aux quatre alinéas actuels de l'article 3 de la Constitution.
Cet article 3 dispose, en premier lieu, que la souveraineté nationale appartient au peuple ; ensuite, il explique comment le peuple exerce sa souveraineté : par ses représentants, par le référendum ; il précise encore que personne ne peut en confisquer une partie ; puis il évoque le corps électoral, or, depuis 1945, celui-ci réunit les électeurs des deux sexes.
Ajouter un cinquième alinéa reviendrait à redécouper ce que l'on vient d'unifier. C'est la raison pour laquelle je préférerais que l'égalité d'accès aux mandats électoraux et aux fonctions électives figurent dans le même alinéa qui rassemble tous les électeurs dans un même corps électoral de façon que l'on n'ait pas, ensuite, qu'on le veuille ou non, l'amorce d'une sectorisation du corps électoral et, par conséquent, d'une communautarisation, à terme, de celui-ci.
Avec cet amendement, je défends l'unicité du corps électoral, qui est composé « des nationaux français majeurs des deux sexes jouissant de leurs droits civils et politiques... » - les deux sexes étant nommés, les femmes et les hommes sont bien présents. En précisant qu'ils ont un égal droit à l'accès aux fonctions électives et aux mandats électoraux. Nous restons dans la même logique.
J'ai ajouté une précaution complémentaire, qui est plutôt une forme d'interrogation à l'intention du Gouvernement, dont j'aimerais bien obtenir une réponse claire. J'ai ajouté à l'égal accès « dans le respect du droit de candidature et de la liberté de choix des électeurs ».
Jusqu'à nouvel ordre, les candidats sont des électeurs. A partir de l'instant où l'on va organiser leur représentation, certains seront-ils privés du droit d'être représenté ?
M. Emmanuel Hamel. Excellente question !
M. Paul Girod. Par ailleurs, les citoyens ne seront-ils habilités à voter que pour ceux qui se seront présentés dans des conditions comportant une habilitation préalable ? Si la réponse est oui, c'est l'affiche blanche !
Je suis prêt à retirer la fin de mon amendement et à m'arrêter à la partie dans laquelle je cherche à maintenir l'unicité du dernier alinéa de l'article 3. Encore faudrait-il que j'obtienne du Gouvernement des réponses légèrement différentes de celles que j'ai obtenues tout à l'heure en commission des lois de la part d'un de nos collègues.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 3 ?
M. Guy Cabanel, rapporteur. Tout d'abord, j'indique à mon collègue et ami M. Paul Girod que la phrase suivante : « L'article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 est complété par un alinéa ainsi rédigé » demeurait. C'est pourquoi je ne ne l'ai pas rappelée.
Par ailleurs, je ne suis pas sûr que le fait d'accoler la phrase proposée par M. Paul Girod, immédiatement à la suite du dernier alinéa de l'article 3 provoque des effets très différents de ceux qu'aurait l'ajout d'un alinéa supplémentaire.
Enfin, l'amendement de M. Paul Girod, s'il était adopté, entraînerait tout de même une modification par rapport au texte initial.
Dans ces conditions, la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 3.
M. Emmanuel Hamel. C'est regrettable !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 1 et 3 ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. L'Assemblée nationale a modifié la rédaction initiale proposée par le Gouvernement estimant ainsi mieux garantir la liberté d'appréciation du législateur. Le Gouvernement avait souscrit à cette approche. Mais, dans la mesure où l'amendement n° 1 tend à revenir à la rédaction initiale qui permet - et c'est l'essentiel pour le Gouvernement - de prendre des mesures positives en faveur de l'égalité des hommes et des femmes, le Gouvernement ne peut qu'y être favorable.
S'agissant de l'amendement n° 3, je vais m'efforcer de répondre aux questions posées par M. Paul Girod.
Je m'interroge, je l'avoue, sur la portée de l'ajout qu'il propose. Si cet amendement vise à faire respecter le pluralisme des courants d'opinions et d'idées et le libre choix des électeurs, cet ajout me paraît inutile dans la mesure où l'objectif de parité devra bien évidemment être compatible avec l'ensemble des principes de valeur constitutionnelle.
Je vous rappelle à ce propos, monsieur Girod, que, dans sa décision du 11 janvier 1990, le Conseil constitutionnel a subordonné la constitutionnalité du mécanisme d'aide publique aux partis au respect de l'exigence du pluralisme des courants d'idées et d'opinions qui, a-t-il souligné, « constitue le fondement de notre démocratie ».
Il est donc évident que les mesures que le législateur sera amené à prendre pour mettre en oeuvre l'objectif de parité seront compatibles avec ce principe de valeur constitutionnelle.
Si l'amendement avait pour objet, en réalité - mais je ne crois pas que telle en soit l'intention de son auteur - d'interdire au législateur d'adopter les mesures permettant de favoriser les candidatures de femmes, le Gouvernement ne pourrait qu'être contre.
En somme, le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, parce qu'il lui semble qu'il ajoute une précision qui n'est pas nécessaire et qui pourrait prêter à confusion s'agissant de la possibilité pour le législateur de recourir à la loi pour favoriser l'égalité entre les hommes et les femmes.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
Mme Hélène Luc. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. La modification apportée par le projet de loi à l'article 3 de la Constitution est essentielle, car cet article affirme que le peuple est souverain. C'est cette proposition qui est au coeur de l'idée même de parité.
Toute tentative de supprimer ce texte, de l'encadrer, de le corseter avait pour conséquence évidente, de réduire à néant l'instauration de l'égalité entre les sexes dans le domaine politique.
Je re reviendrai pas sur le constat fait à de multiples reprises : les femmes dans notre pays sont fortement sous-représentées sur le plan des fonctions électives et des mandats électoraux, mon amie Mme Odette Terrade l'a fort bien démontré et il suffit de regarder notre hémicycle pour s'en convaincre.
L'Assemblée nationale, en première et en deuxième lecture, a précisé le texte gouvernemental afin d'en améliorer l'efficacité.
Je cite l'article tel qu'il a été transmis au Sénat : « La loi détermine les conditions dans lesquelles est organisé l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. »
Le texte initial du Gouvernement était quant à lui : « La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats et aux fonctions. »
La majorité sénatoriale, lors de la première lecture, a rejeté en bloc le principe même de la modification de l'article 3.
La réaction du pays a été forte,...
M. Claude Estier. Le pays a été trompé !
Mme Hélène Luc. ... l'émotion réelle et profonde !
L'avancée réelle que nous propose aujourd'hui la commission des lois a été gagnée autant par la pression des femmes et leurs associations (Exclamations sur les travées du RPR) que par celle du Premier ministre, en accord avec le Président de la République.
Comment, en effet, accepter le maintien de cette inégalité entre hommes et femmes dans le cadre de la vie politique ?
La marche vers la parité est inéluctable. Elle constitue un élément essentiel du progrès démocratique tant l'apport des femmes - leur participation déterminante - représente un ferment de changement et d'innovation pour la société, qui en a un besoin vital. On ne dira jamais assez que les hommes et les femmes représentent respectivement la moitié des talents, des qualifications potentielles de l'humanité.
Leur participation complémentaire et équilibrée aux responsabilités fera naître des idées, des valeurs, des comportements qui, en s'entremêlant, donneront de meilleurs résultats pour l'ensemble de la société et, n'en doutons pas, une nouvelle approche de la vie politique si décriée.
Comment évoquer l'universalité dans la vie politique comme dans la vie sociale et économique ? Car il ne faut pas cloisonner les différents secteurs de la vie d'un pays en acceptant l'exclusion de la moitié de la population ! L'universalité est un principe supérieur que nous faisons nôtre, mais un principe est un processus, un système politique. Nous poursuivons, avec l'effort vers la parité, l'égalité, la réalisation de cet objectif d'universalité.
Au terme de discussions multiples, la majorité sénatoriale a accepté de revenir au texte initial du Gouvernement.
Après de larges hésitations, l'idée d'encadrer cette proposition par un dispositif « anti-parité » a été abandonnée, et c'est une bonne chose. Seul M. Paul Girod maintient cette attitude particulièrement conservatrice, mais il peut encore changer d'avis. (M. Paul Girod secoue la tête négativement.)
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront donc pour l'amendement n° 1 de la commission. Nous sommes favorables au texte voté par l'Assemblée nationale, plus précis, plus efficace.
Mais, soucieux d'aboutir à un vote rapide de cette réforme constitutionnelle, qui constitue un événement historique, le groupe communiste républicain et citoyen veut donner un signe fort aux femmes, au pays tout entier. Nous voulons que le Sénat prenne enfin le chemin d'une assemblée moderne. La jeune gauche plurielle féminine de notre assemblée, avec le groupe communiste républicain et citoyen et le groupe socialiste, y joue un rôle important à l'aube du xxie siècle.
Et si le poète a toujours raison, le vers d'Aragon : « la femme est l'avenir de l'homme » deviendra alors réalité. Et c'est la France tout entière qui y gagnera !
C'est pourquoi, monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous voterons l'amendement n° 1 de la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Il n'est pas dans mon intention de donner une explication de vote aussi longue que celle de Mme Luc.
Permettez-moi de formuler quelques remarques et un regret.
Je constate que Mme Luc entretient, s'agissant de l'attitude de la majorité sénatoriale, un débat qui tend à encourager cette pression médiatique outrancière qui caricature nos positions et qu'elle affirme un certain nombre de contrevérités.
Il faudrait, une bonne fois pour toutes, arrêter ce débat d'un autre âge, madame Luc ! Nous sommes une assemblée où le bon sens prévaut.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est vous qui le dites !
M. Alain Vasselle. Faites parler votre bon sens et n'entretenez pas de polémiques inutiles, surtout lorsqu'il s'agit de l'avenir des femmes ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Patriarcal !
M. Alain Vasselle. Voilà pour ma première remarque.
Mon regret porte sur la procédure demandée par M. le rapporteur de la commission des lois et acceptée par le Gouvernement qui nous amène à examiner en priorité l'amendement n° 1 de la commission et non pas, comme je l'aurais bien sûr préféré, l'amendement n° 3 de notre collègue Paul Girod.
Quelles sont les raisons de ce regret ? Cela m'amènera à faire une autre remarque et à donner mon sentiment sur l'amendement de la commission.
Après l'argumentation et les prises de position développées lors de la première lecture de ce texte, dont celles de collègues éminents - comme M. Badinter, qui avait donné son point de vue et qui brille maintenant par son silence (Protestations sur les travées socialistes) - je me pose la question de savoir, madame le garde des sceaux, comment vous allez, par une loi future, rendre compatible la modification proposée avec le respect de la souveraineté. Vous avez affirmé qu'il n'était pas dans l'intention du Gouvernement d'y porter atteinte et que vous en respecteriez le principe fondamental. Je vous en donne acte, mais j'attends avec impatience les initiatives que vous avez l'intention de prendre pour y parvenir.
Je crains fort - et c'est pourquoi j'aurais préféré l'amendement n° 3 de M. Paul Girod - les effets pervers à terme d'une future loi ordinaire. De plus, comme l'a très justement fait remarquer notre président de groupe, M. de Rohan, et bien que vous vous en défendiez, ne prenons-nous pas un risque en allant vers des quotas ? Ne prenons-nous pas un risque - si ce n'est de votre fait, du fait d'un gouvernement futur - s'agissant de la généralisation du scrutin proportionnel jusque dans nos élections locales et dans les conseils municipaux de nos petites communes rurales ?
Je vous laisse imaginer, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, l'émoi que provoquera dans les populations de nos communes la politisation de toutes les élections, même les élections locales dans lesquelles se présentent des hommes et des femmes qui n'ont pour seul objectif que l'intérêt général et la gestion, et qui ont mis de côté tout esprit politicien et appartenance à un parti politique.
L'article 4 va confirmer cette inquiétude et ce sentiment. Veut-on effectivement que, demain, les partis politiques régissent toutes les élections à quelque niveau que ce soit ? Vous vous en défendez. Les uns et les autres s'en défendent dans leur prise de position. Mais vous n'avez pas réussi, pour le moment, à emporter ma conviction sur ce point. C'est la raison pour laquelle je ne participerai pas au vote.
M. Paul Girod. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Mme la ministre m'a fait une réponse extraordinairement différente de celle que j'ai eue en commission ! Le membre d'un parti qui la soutient m'avait en effet répondu que, bien entendu, il ne fallait pas laisser de liberté à l'électeur pour pouvoir invalider les listes qui n'auront pas été établies dans les conditions requises, au motif que des personnes se seraient présentées librement. C'est ce que j'ai entendu !
Je considère que la réponse de Mme le garde des sceaux est donc extraordinairement différente de la réponse lapidaire qui m'avait été faite et qui m'avait laissé pantois !
Cela dit, de par la procédure utilisée, nous devons maintenant nous prononcer sur l'amendement n° 1 de la commission des lois.
Je persiste à penser que, rédigé dans un alinéa nouveau et introduisant une dichotomie dans un corps électoral, ce dispositif met le ver dans le fruit, en ouvrant des perspectives de sectorisation du corps électoral que, pour ma part, je réprouve par avance et qui se manifesteront un jour. Cela commencera au niveau des élections locales !
On nous dit que ce sont les femmes qui ont emporté, par leurs manifestations, par leurs associations, la conviction du Parlement, du Président de la République, du Premier ministre, etc. Notre pays compte d'autres associations qui sont tout aussi actives et qui s'efforceront de présenter un certain nombre de mesures destinées à faire évoluer le plus rapidement possible notre système politique, afin que cesse une anomalie flagrante. J'en suis tout à fait d'accord ! Je suis également partisan de faire évoluer la situation le plus vite possible, mais pas en ouvrant une perspective qui m'inquiète !
Je regrette que le Sénat ne puisse plus se prononcer sur mon amendement n° 3, dont je retire d'ailleurs la seconde partie, car la réponse de Mme le garde des sceaux satisfait la préoccupation qui était la mienne. De plus, comme je désapprouve certains aspects de l'amendement n° 1 de la commission des lois - je ne veux pas être taxé, madame Luc, de fieffé réactionnaire, de machiste bloqué,...
M. Ivan Renar. Cela fait mal ! (Sourires.)
M. Paul Girod. Non, cela ne me fait pas mal du tout, parce que je revendique ce que je suis !
M. Ivan Renar. Je voulais dire : cela fait mâle ! (Sourires.)
M. Paul Girod. On a dit tout à l'heure de notre collègue M. Badinter qu'il était un homme libre. Je revendique ici d'être un parlementaire libre et de pouvoir exprimer mes convictions comme je l'entends ! (Très bien ! et applaudissements sur certaines travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Claude Estier. Nous sommes tous des parlementaires libres !
M. Paul Girod. Désapprouvant certains aspects de l'amendement n° 1, disais-je, mais ne voulant pas aller contre l'évolution proposée, je ferai comme mon collègue M. Vasselle : je ne participerai pas au vote !
M. Jean-Pierre Fourcade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, madame le ministre, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, moi, je voterai l'amendement n° 1 de la commission des lois, et ce pour deux raisons.
En premier lieu, dès que l'on sort des murs de cette enceinte, on voit bien que la représentation des femmes à l'Assemblée nationale, au Sénat et dans un certain nombre d'autres institutions est insuffisante.
M. Paul Girod. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Fourcade. C'est un fait, et rien ne peut s'opposer aux faits de notre société.
On nous propose par conséquent un dispositif qui permet, non pas de rétablir l'égalité, mais d'entamer une marche vers l'égalité, j'y souscris.
En second lieu, la rédaction proposée par M. Cabanel et approuvée par la commission des lois me paraît meilleure que celle de l'Assemblée nationale. En effet, cette dernière rédaction nous place dans une situation de tutelle par rapport au Conseil constitutionnel.
En revanche, la rédaction proposée par M. le rapporteur, qui était d'ailleurs celle du Gouvernement, madame le garde des sceaux, laisse une latitude un peu plus grande au Parlement.
Trop nombreux étant les textes qui placent le Parlement sous les fourches caudines du Conseil constitutionnel, il me paraît donc normal d'adopter le texte de la commission des lois, texte que, dans leur sagesse, le Gouvernement et le Président de la République avaient adopté en conseil des ministres avant qu'il ne passe dans le filtre de l'Assemblée nationale.
Par la modification de l'article 3, nous posons un principe. Il serait illusoire de penser qu'il se traduira d'une manière concrète sans une modification de l'article 4. C'est la raison pour laquelle le Sénat, dans sa sagesse, avait proposé, en première lecture, de modifier l'article 4.
Certes, je n'étais pas tout à fait d'accord sur le texte même de ces modifications. Mais si l'on se contente de poser un principe dans l'article 3, sans compléter l'article 4, nous produirons un effet, certes intéressant pour les médias, mais nul sur le plan de l'efficacité. N'oublions pas que ce sont les partis et les groupements politiques qui déterminent très largement, ne serait-ce que par le financement des campagnes électorales, la possibilité de se porter candidat !
En conséquence, je voterai sans aucune arrière-pensée le texte proposé par la commission des lois et l'amendement visant à modifier l'article 4. De mon point de vue, les modifications des articles 3 et 4 doivent être conduites de manière parallèle et votées simultanément.
C'est dans ces conditions, me semble-t-il, que l'on peut trouver un consensus avec nos partenaires de l'Assemblée nationale.
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Monsieur le président, j'interviendrai en femme libre, mais aussi au nom de mes amies du groupe socialiste.
Mon propos sera extrêmement bref puisque ce matin, dans la discussion générale, j'ai défini notre position. J'ai dit que nous préférions les termes de l'Assemblée nationale, qui nous semblaient plus précis, mais que, notre objectif étant de véritablement favoriser l'égal accès des femmes aux mandats électoraux et aux fonctions électives, nous acceptions la proposition de M. le rapporteur et voterions l'amendement n° 1. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Emmanuel Hamel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Je mesure les accusations dont je serai la victime pour avoir exprimé les quelques mots que je vous confie, femmes et hommes de cette assemblée.
J'ai le respect de la femme. Comme l'a dit Aragon, dont je pourrais vous réciter des vers pendant des heures, elle est effectivement « l'avenir de l'homme ».
Hommes ou femmes, notre avenir est la liberté, notre avenir est la démocratie.
Mme Hélène Luc. Justement !
M. Emmanuel Hamel. Or une liberté, ce n'est pas le contingentement ; une démocratie, ce ne sont pas les quotas. Nous cédons à la pression d'une opinion publique animée par les médias. Nous sommes désignés comme ne comprenant pas les nécessités du mouvement du monde et nous nous abaissons en acceptant un texte qui est en contradiction avec l'esprit de la République.
Je ne veux pas une République de quotas, ni d'une démocratie de contingents. J'espère la promotion de la femme. Mesdames, doutez-vous de vous-mêmes au point de recourir à des textes tels que celui-ci pour assurer votre promotion dans la démocratie et dans la République ? (Exclamations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste répubicain et citoyen.)
Mme Dinah Derycke On a vu ce qu'il en était sans cela !
M. Emmanuel Hamel. Exprimez la volonté d'être plus présentes ! Renforcez votre rayonnement et vous serez plus nombreuses ! Mais ne recourez pas à des techniques de ce genre !
C'est la raison pour laquelle je m'opposerai à l'adoption de cet amendement, estimant que le dispositif proposé est fondamentalement contraire à l'esprit de la République et à la démocratie. Vive les femmes ! A bas les quotas ! (Exclamations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Applaudissements sur certaines travées du RPR.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 3 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi, ainsi modifié.
(L'article unique est adopté.)
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