Séance du 18 mars 1999






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Pacte civil de solidarité. - Suite de la discussion d'une proposition de loi (p. 1 ).
Discussion générale (suite) : MM. Aymeri de Montesquiou, Jean Chérioux, Jean-Pierre Bel, Pierre Fauchon, Jean Boyer, Louis de Broissia, Jean-Luc Mélenchon, Alain Vasselle, Dominique Braye.
MM. le président, Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Louis de Broissia.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice ; MM. Jacques Larché, président de la commission des lois ; Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois.
Clôture de la discussion générale.

Articles additionnels avant l'article 1er (p. 2 )

Amendement n° 1 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, MM. Robert Badinter, Philippe Marini. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 2 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, MM. Jean-Jacques Hyest, Robert Bret, Jean-Louis Lorrain, Robert Badinter, Alain Lambert, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Luc Mélenchon, Bernard Seillier, Nicolas About, Michel Caldaguès, Yann Gaillard, Jean Chérioux, Philippe Marini, Pierre Fauchon, Mme Dinah Derycke, MM. Lucien Lanier, Dominique Braye. - Adoption, par scrutin public, de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 3 rectifié de la commission et sous-amendement n° 55 rectifié de M. About ; amendements n°s 56 de Mme Derycke et 31 de M. Lorrain. - MM. le rapporteur, Nicolas About, Robert Badinter, Alain Lambert, le président de la commission des lois. - Retrait du sous-amendement n° 55 rectifié.

Suspension et reprise de la séance (p. 3 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

3. Questions d'actualité au Gouvernement (p. 4 ).

CARTE SCOLAIRE (p. 5 )

Mmes Hélène Luc, Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire.

RÉFORME DU DROIT DE BAIL (p. 6 )

MM. Jacques Machet, Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

PROBLÈMES DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE (p. 7 )

MM. François Trucy, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

COUR DE JUSTICE DE LA RÉPUBLIQUE (p. 8 )

M. Guy Allouche, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

ÉTAT DES NÉGOCIATIONS
SUR LA RÉFORME DE LA PAC (p. 9 )

MM. Jean Bizet, Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement.

LOGICIELS UTILISÉS PAR L'ADMINISTRATION (p. 10 )

MM. Pierre Laffitte, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

SITUATION DES JEUNES DIPLÔMÉS SURSITAIRES
À L'ÉGARD DU SERVICE NATIONAL (p. 11 )

M. Jean Huchon, Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire.

COÛTS D'ACCÈS À INTERNET (p. 12 )

Mme Danièle Pourtaud, M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

CATASTROPHES NATURELLES EN SAVOIE (p. 13 )

M. Michel Barnier, Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

FERMETURES DE CLASSES EN MILIEU RURAL (p. 14 )

M. Bernard Fournier, Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire.

AMORTISSEMENT PÉRISSOL (p. 15 )

MM. Charles Revet, Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

Suspension et reprise de la séance (p. 16 )

PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE

4. Pacte civil de solidarité. - Suite de la discussion d'une proposition de loi (p. 17 ).

Articles additionnels avant l'article 1er (suite) (p. 18 )

Amendements n°s 3 rectifié de la commission, 56 de Mme Derycke et 31 de M. Lorrain (suite). - M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois ; Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice ; MM. Robert Badinter, Dominique Braye, Jean Chérioux, Jean-Jacques Hyest, Mme Dinah Derycke, MM. Denis Badré, Jean-Pierre Fourcade, Nicolas About, Jean-Luc Mélenchon, Mme Nicole Borvo, M. Alain Lambert. - Adoption, par scrutin public, de l'amendement n° 3 rectifié insérant un article additionnel, les amendements n°s 56 et 31 devenant sans objet.

Article 1er (p. 19 )

Amendements identiques n°s 4 de la commission et 32 de M. Lorrain ; amendements n°s 57 à 65 rectifiés de Mme Derycke, 34 à 38, 45 rectifié et 39 à 44 de M. Bret. - MM. le rapporteur, Jacques Machet, Mme Dinah Derycke, M. Robert Bret, Mme le garde des sceaux, MM. Jean-Luc Mélenchon, Alain Lambert, Jean-Pierre Fourcade, Jacques Pelletier, Philippe Marini, Emmanuel Hamel. - Adoption, par scrutin public, des amendements n°s 4 et 32 supprimant l'article, les autres amendements devenant sans objet.

Article additionnel après l'article 1er (p. 20 )

Amendement n° 66 rectifié de Mme Derycke. - MM. Jean-Pierre Bel, le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Retrait.

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN

Article 2 (p. 21 )

Amendements n°s 5 de la commission, 24 de M. Marini, rapporteur pour avis, 46 à 48 de M. Bret, 67 rectifié bis , 68 rectifié et 69 rectifié de Mme Derycke. - MM. le rapporteur, Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Mmes Nicole Borvo, Dinah Derycke, le garde des sceaux, M. Emmanuel Hamel. - Retrait des amendements n°s 5, 67 rectifié bis , 68 rectifié, 69 rectifié et 46 à 48 ; adoption de l'amendement n° 24 rédigeant l'article.

Article additionnel après l'article 2 (p. 22 )

Amendements n°s 6 de la commission et 25 de M. Marini, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Mme le garde des sceaux, MM. Jean-Jacques Hyest, Jean-Pierre Bel. - Retrait de l'amendement n° 6 ; adoption de l'amendement n° 25 insérant un article additionnel.

Article additionnel avant l'article 3 (p. 23 )

Amendement n° 26 de M. Marini, rapporteur pour avis. - M. le rapporteur pour avis, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 3 (p. 24 )

Amendements n°s 7 de la commission, 27 de M. Marini, rapporteur pour avis, 70 rectifié, 71 rectifié, 74 rectifié de Mme Derycke, 49 et 50 de M. Bret. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Mme Dinah Derycke, M. Robert Bret, Mme le garde des sceaux. - Retrait de l'amendement n° 7 ; adoption de l'amendement n° 27 rédigeant l'article, les autres amendements devenant sans objet.

Articles additionnels après l'article 3 (p. 25 )

Amendements n°s 8 de la commission et 28 de M. Marini, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Mme le garde des sceaux. - Retrait de l'amendement n° 8 ; adoption de l'amendement n° 28 insérant un article additionnel.

Article 4 (p. 26 )

Amendement n° 9 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Articles additionnels après l'article 4 (p. 27 )

Amendements n°s 10 de la commission et 29 de M. Marini, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, Mme le garde des sceaux. - Retrait de l'amendement n° 10 ; adoption de l'amendement n° 29 insérant un article additionnel.
Amendement n° 30 de M. Marini, rapporteur pour avis. - M. le rapporteur pour avis, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
MM. Jacques Larché, président de la commission des lois ; Claude Estier, Robert Bret, Mme le garde des sceaux, M. le président.

Article 4 bis (p. 28 )

Amendements n°s 11 de la commission et 75 rectifié de Mme Derycke. - M. le rapporteur, Mmes Dinah Derycke, le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement n° 11 supprimant l'article, l'amendement n° 75 rectifié devenant sans objet.

Articles additionnels après l'article 4 bis (p. 29 )

Amendement n° 76 rectifié de Mme Derycke. - Mme Dinah Derycke, M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Retrait.
Amendements n°s 77 rectifié de Mme Derycke et 80 de la commission. - Mme Dinah Derycke, M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Retrait des deux amendements.
Amendements n°s 78 rectifié de Mme Derycke et 81 de la commission. - Mme Dinah Derycke, M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Retrait de l'amendement n° 78 rectifié.
Reprise de l'amendement n° 78 rectifié bis par M. Marini. - M. Philippe Marini. - Retrait de l'amendement.
Retrait de l'amendement n° 81.

Article 5 (p. 30 )

Amendement n° 12 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 5 bis (p. 31 )

Amendement n° 13 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 5 ter (p. 32 )

Amendement n° 14 de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 6 (p. 33 )

Amendements n°s 15 de la commission et 51 de M. Bret. - M. le rapporteur, Mmes Nicole Borvo, le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement n° 15 supprimant l'article, l'amendement n° 51 devenant sans objet.

Article 7 (supprimé) (p. 34 )

Amendements n°s 52 et 53 de M. Bret. - MM. Robert Bret, le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Retrait des deux amendements.
L'article demeure supprimé.

Article 8 (p. 35 )

Amendement n° 16 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 9 (p. 36 )

Amendement n° 17 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 10 (p. 37 )

Amendements identiques n°s 18 de la commission, 54 de M. Bret et 79 de Mme Derycke. - MM. le rapporteur, Robert Bret, Mmes Dinah Derycke, le garde des sceaux. - Adoption des trois amendements supprimant l'article.

Article 11 (p. 38 )

Amendement n° 19 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 11 bis (p. 39 )

Amendement n° 20 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 12 (supprimé) (p. 40 )

Intitulé de la proposition de loi (p. 41 )

Amendement n° 21 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé.

Mise au point au sujet d'un vote (p. 42 )

MM. Jacques Pelletier, le président.

Rappel au règlement (p. 43 )

M. Jean-Luc Mélenchon, le président.

Renvoi de la suite de la discussion (p. 44 )

M. Henri de Raincourt, Mme le garde des sceaux, MM. le président, Claude Estier.

5. Transmission d'un projet de loi (p. 45 ).

6. Transmission d'une proposition de loi (p. 46 ).

7. Dépôt d'un rapport (p. 47 ).

8. Ordre du jour (p. 48 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance d'hier a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ

Suite de la discussion d'une proposition de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi (n° 108, 1998-1999), adoptée par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relative au pacte civil de solidarité. [Rapport n° 258 (1998-1999) et avis n° 261 (1998-1999).]
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat sur le pacte civil de solidarité, le PACS, est l'un des plus médiatisés. L'éventuelle reconnaissance légale d'une union entre deux personnes du même sexe est peut-être un grand sujet de société, mais on peut s'interroger : le Gouvernement ne profite-t-il pas de ce débat polémique pour « détourner » l'attention des Français des questions fondamentales, et autrement urgentes, de l'emploi, de la sécurité et de la réforme de l'Etat ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous avez fait mieux !
M. Aymeri de Montesquiou. Ce débat sur le PACS ne laisse pas indifférent. Au contraire, il attise les passions, il échauffe les esprits. Qui n'a pas son avis sur le sujet ? Il est aussi, et c'est bien regrettable, pollué par sa politisation.
En effet, de manière systématique, la souscription au PACS est assimilée à la gauche et, inversement, l'opposition au PACS serait l'apanage de la droite.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ça, c'est vrai !
M. Aymeri de Montesquiou. L'atmosphère des débats est souvent tendue, alors que des arguments pertinents et paisibles y ont leur place.
Il faudrait faire abstraction des querelles partisanes afin d'examiner le texte qui nous est proposé avec plus de sérénité et d'engager un vrai débat de fond.
A ce titre, l'analyse faite par le rapporteur, M. Gélard, est tout à fait fouillée, rigoureuse, étayée. Elle présente de manière parfaitement objective et impartiale les enjeux du débat et elle aboutit à des solutions concrètes et raisonnables.
La société change, c'est un fait, et il est nécessaire de s'adapter aux modes de vie d'aujourd'hui, mais pas par n'importe quel moyen ni à n'importe quel prix. Il faut mesurer toutes les conséquences de cette adaptation.
Les relations entre adultes au sein d'un couple, la vie affective relèvent du libre choix de chacun. L'amour, l'affection, la tendresse ont la même qualité et la même charge émotionnelle dans tous les couples, qu'ils soient homosexuels ou hétérosexuels. Ces relations appartenant au domaine privé, il est juste de les respecter.
Le désir de vivre en couple étant le même chez les homosexuels et les hétérosexuels, pourquoi refuser à un couple stable une reconnaissance légale de sa situation de fait ? Il est possible et même souhaitable de reconnaître des droits aux couples homosexuels menant une vie commune, sans pour autant être obligé de créer un montage aussi complexe et si mal préparé. Des dispositions d'ordre matériel peuvent améliorer la situation du couple homosexuel telle qu'elle est aujourd'hui, notamment en ce qui concerne le droit au bail, la succession, la protection sociale.
La loi a vocation à s'appliquer à tous les citoyens. Elle n'est pas catégorielle. Etendre le concubinage aux couples homosexuels est donc une solution plus judicieuse que ce contrat discutable, aux appellations multiples et polémiques : « sous-mariage », « mariage du troisième type », etc.
Néanmoins, lorsqu'il est question de la vie familiale et, par voie de conséquence, des enfants, le sujet est plus problématique. Hypocrisie ou inconscience, le PACS est muet sur l'enfant alors que la question se pose déjà, et les tenants du PACS ne le nient pas.
L'article V de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose : « Tout ce qui n'est pas défendu par la Loi ne peut être empêché. »
N'interdisant pas la mise au monde ou l'adoption d'enfants par des couples homosexuels, ce texte laisse donc la porte ouverte à ces deux possibilités.
M. Jean-Luc Mélenchon. Jamais de la vie !
M. Aymeri de Montesquiou. Le texte ne les interdit pas !
La famille conçue avec deux parents de même sexe est alors sujet d'inquiétude.
« La famille est l'élément naturel et fondamental de la société...
M. Jean-Luc Mélenchon. Non !
M. Aymeri de Montesquiou. ... et a droit à la protection de la société et de l'Etat », comme l'indique l'article 16, de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
En effet, il est de l'intérêt de la société de préserver la cohérence d'un ensemble de règles du droit de la famille plaçant au premier plan le bien de l'enfant. Les réformes que l'Etat est susceptible d'entreprendre doivent tenir compte de l'intérêt supérieur de l'enfant. De telles réformes sont à mûrir longuement avant d'introduire dans le droit positif des mesures qui pourraient avoir des conséquences non prévues à l'origine.
Or tel paraît bien être le cas du PACS. On veut reconnaître l'union entre les partenaires d'un couple homosexuel. Soit ! Mais avec quelle protection pour les enfants ? La filiation, l'adoption, l'insémination artificielle sont latentes et ne tarderont pas à se faire jour si la proposition de loi est adoptée. C'est là que réside le danger ! Il est de notre devoir de parlementaires et de notre responsabilité de parents de barrer la route à de tels risques.
Les questions juridiques soulevées par ces nouvelles formes de filiation, de paternité et de maternité seront très problématiques, car elles touchent le coeur de la société, de la structure familiale telle que nous la concevons : un homme, une femme et des enfants. Le facteur biologique est l'élément naturel et donc essentiel de la filiation. La société ne peut reconnaître qu'un enfant ait deux pères ou deux mères.
Je justifierai ma préoccupation en rappelant les propos tenus en séance publique le 9 octobre 1998 par le député Jean-Pierre Michel : « Pour ma part, je n'ai jamais entendu un seul argument convaincant selon lequel l'intérêt de l'enfant, c'est d'avoir absolument comme modèle un homme et une femme ». Or M. Michel, chacun le sait, est le « géniteur » de cette proposition de loi.
Alors, je m'interroge de nouveau : y a-t-il hypocrisie ou insconscience lorsque certains affirment que la question de la filiation n'est pas la prochaine étape ? En tout cas, à partir de cette seule interrogation, on ne peut être que défavorable à ce texte.
L'Etat se doit de préparer l'avenir. L'avenir, ce sont les enfants, et donc la famille. L'intérêt des enfants est absolument primordial, et c'est pour cela que l'Etat est habilité à intervenir afin de les protéger.
Je reviens sur les propos de M. Michel, inspirateur du texte, selon lesquels il n'est pas convaincu que l'intérêt de l'enfant soit d'avoir comme modèle un homme et une femme. Les enfants veulent avoir un père et une mère, car ils en ressentent le besoin. Ce serait aller contre cette pulsion que de reconnaître que des parents de même sexe peuvent élever un enfant. Le désir de maternité ou de paternité est compréhensible chez tout individu. Mais c'est à l'enfant qu'il faut penser, non à un désir égoïste.
M. Jean Chérioux. Tout à fait !
M. Aymeri de Montesquiou. Le droit « à » l'enfant, souvent revendiqué, ne doit pas supplanter le droit « de » l'enfant.
M. Louis de Broissia. Très bien !
M. Aymeri de Montesquiou. En effet, quel serait l'équilibre de celui-ci ? De nombreux enfants vivant au sein de familles monoparentales sont déjà perturbés, car il leur manque la présence d'un parent. Comment réagiraient des enfants avec deux papas ou deux mamans ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Franchement, ce n'est pas le problème !
M. Aymeri de Montesquiou. Si, c'est le problème, mon cher collègue !
Ce n'est que suivre la nature que reconnaître qu'un enfant a été conçu par un homme et une femme. Faut-il tenter de transformer un couple homosexuel en un couple dont la vocation serait la procréation ? Cela n'est pas « naturellement » possible. Cela n'est donc pas dans le droit fil de la nature.
M. Nicolas About. A moins d'être une amibe ! Par scissiparité !
M. Aymeri de Montesquiou. Madame la ministre, si un célibataire adopte un enfant, comme la loi l'y autorise, à partir de l'âge de vingt-huit ans, puis décide de « pacser » avec quelqu'un du même sexe, que ferez-vous ? Quel avenir offrez-vous à cet enfant ?
Mes chers collègues, les implications morales, éthiques et religieuses de ces questions sont considérables.
Institution républicaine, le mariage est un contrat conclu par deux personnes qui veulent vivre ensemble et fonder une famille. Je me réjouis ainsi que la commission des lois propose de renforcer le mariage, en précisant le caractère hétérosexuel de la notion de famille, et que vous souscriviez, madame la ministre, à cette conception.
Le PACS, ce n'est pas la famille, c'est le couple, c'est-à-dire l'association de deux personnes. Ne créons pas un pseudo-mariage qui laisserait croire, dans un premier temps, que des enfants auraient leur place dans de tels couples et, dans un second temps, autoriserait une telle évolution. Ne cherchons pas, au travers du PACS, à singer la famille. Cela ne se ferait qu'au détriment de cette dernière.
Comme une grand partie de mon groupe, je ne voterai pas la proposition de loi en l'état et suivrai les suggestions de la commission des lois. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Si l'on en juge par les différentes étapes qui ont conduit du CUCS, le contrat d'union civile et sociale, au PACS tel qu'il a été adopté le 9 décembre dernier par l'Assemblée nationale, l'objectif des auteurs de ces différents textes a toujours été le même : légitimer et solenniser l'union des homosexuels, même si, hier, Mme le garde des sceaux, effectuant un habile repli tactique, nous a affirmé qu'il s'agissait d'un simple statut intermédiaire.
M. Robert Bret. C'est ce qu'elle dit depuis le début !
M. Jean Chérioux. Prenons, par exemple, la proposition de loi n° 88 visant à créer un contrat d'union civile et sociale. Que lit-on à l'article 2 ? « Les contractants de l'union civile et sociale se doivent soutien matériel et moral. »
Et la proposition de loi que nous sommes en train d'examiner n'est pas en reste puisqu'elle prévoit l'introduction dans le livre Ier du code civil, relatif aux personnes, d'un titre XII, intitulé « Du pacte civil de solidarité », dont l'article 515-4 est ainsi rédigé : « Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'apportent une aide mutuelle et matérielle. »
On croirait entendre l'officer de l'état civil célébrant un mariage et procédant devant les époux à la lecture de l'article 212 du code civil : « Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance. »
M. Jean-Luc Mélenchon. Où est le problème ?
M. Robert Bret. C'est un couple, c'est normal !
M. Jean Chérioux. Cela n'a rien d'étonnant puisqu'à l'origine l'article 5 de la proposition de loi n° 88 prévoyait : « Le contrat d'union civile et sociale fait l'objet d'une déclaration conjointe devant un officier de l'état civil du domicile ou de la résidence d'un des deux contractants ». Cela a d'ailleurs provoqué une levée de boucliers et la constitution d'un collectif de maires refusant de prononcer de telles unions.
De plus, l'emprunt au code civil des règles relatives au mariage s'étendait même, dans le premier texte, à l'organisation du régime juridique des biens des cocontractants, puisque le texte faisait expressément référence au régime matrimonial de la communauté réduite aux acquêts des articles 1400 et suivants du code civil.
Je pourrais multiplier les exemples et passer en revue tous les projets de texte qui ont été élaborés, où l'on retrouve partout, de manière plus ou moins insidieuse ou voilée, le souci de légitimer et de solenniser l'union des homosexuels : il ne s'agissait peut-être pas de mariage, mais cela en avait toutes les apparences, sinon le goût !
Il faut reconnaître que le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale est en retrait par rapport à ces formules extrêmes, puisqu'il prévoit non pas une déclaration conjointe devant un officier de l'état civil, mais une simple déclaration devant les tribunaux d'instance.
Cependant, il est bien évident que ce texte a pour objet principal, non pas, comme on voudrait nous le faire croire - et c'est en cela que l'on peut parler, à juste titre, d'hypocrisie - de régler des problèmes patrimoniaux et fiscaux, auxquels tout le monde reconnaît la nécessité d'apporter une solution,...
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah ?
M. Jean Chérioux. ... mais d'introduire des modifications importantes dans le livre premier du code civil relatif aux personnes et à la famille.
Cette assimilation plus ou moins apparente au mariage a provoqué une vive réaction des familles.
M. Robert Bret. De certaines familles !
M. Jean Chérioux. Précisément, et je vais vous apporter une réponse à cet égard !
Celles-ci sont, en effet, opposées à toute parodie d'union solennelle reconnue par la société. Cette opposition s'est concrétisée notamment par la prise de position de l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF, dont il convient de souligner le caractère officiel et représentatif...
M. Robert Bret. ... d'une partie des familles !
M. Jean Chérioux. ... puisqu'elle est chargée par la loi - il s'agit de l'ordonnance du 3 mars 1945, confirmée par la loi du 11 juillet 1975 - de représenter l'ensemble des familles de notre pays et de défendre leurs intérêts matériels et moraux.
Cela est particulièrement important. C'est pourquoi il me paraît nécessaire - cela vous convaincra peut-être, mon cher collègue - de citer assez longuement, et je vous demande de m'en excuser, les passages importants du texte adopté par l'UNAF lors de son assemblée générale des 20 et 21 juin dernier.
« La famille est constituée par le mariage, la filiation ou l'exercice de l'autorité parentale ;...
M. Jean-Luc Mélenchon. Hors sujet !
M. Jean Chérioux. ... en conséquence, l'UNAF considère que ne peuvent être introduites dans "le droit de la famille" les dispositions juridiques qui apparaissent nécessaires au législateur pour assurer des garanties de droit et de protection des personnes partageant d'autres modes de vie commune. Ceci implique, en particulier, et pour éviter toute confusion, qu'elle refuse pour ces situations non familiales, toute assimilation avec le mariage, notamment par l'intervention d'un officier de l'état civil... » (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Claude Estier. Il n'est pas question de cela !
M. Jean Chérioux. Je poursuis la citation du texte adopté par l'UNAF, qui semble vous gêner.
M. Claude Estier. Pas du tout !
M. Jean Chérioux. « L'UNAF refuse toute ouverture de droit à l'adoption et aux procréations médicalement assistées en ce qui concerne les couples homosexuels, parce qu'un enfant a droit à un père et à une mère. »
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais qui dit le contraire ?
M. Jean Chérioux. « Elle refuse également toute assimilation aux règles spécifiquement familiales dans le droit social, fiscal ou successoral.
« L'UNAF, institution pluraliste, reconnaît la nécessité de mieux garantir la protection de chacun lors de ruptures de la vie commune hors mariage. Elle demeure soucieuse du respect et de la dignité du droit des personnes. Elle rejette toute proposition qui remettrait en cause les fondements de la famille. »
M. Claude Estier. Il n'est pas question de cela !
M. René-Pierre Signé. Hors sujet ! Cela ne remet pas en cause la famille !
M. Jean Chérioux. Ce texte est clair et net, et il convient d'ajouter qu'il a été adopté par 2 242 129 suffrages sur 2 548 000 suffrages exprimés. Il a donc été adopté à une majorité écrasante, et il faut le souligner ! (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. René-Pierre Signé. Ils n'ont pas lu le texte !
M. Claude Estier. Et alors ? Cela n'a rien à voir avec le PACS !
M. Jean Chérioux. Si, cela a à voir avec le PACS !
Il est bien évident que, dans ces conditions, la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale est inacceptable et que je ne me résignerai jamais à la voter.
Fort heureusement, la commission des lois a procédé à une refonte totale du texte. Il convient d'ailleurs de rendre hommage à l'importance et à la qualité de ses travaux - plus de quatre-vingts auditions - et au pragmatisme qui a inspiré notre excellent rapporteur, Patrice Gélard.
Je retiendrai notamment que celui-ci a entendu supprimer définitivement toute ambiguïté en définissant le mariage comme « l'union d'un homme et d'une femme célébrée par un officier de l'état civil. »
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous parlez d'une découverte !
M. Jean Chérioux. Il a voulu également que la liberté personnelle de chacun soit reconnue, et il a introduit la notion de concubinage dans le code civil.
Mais, surtout, il a fait adopter, par la commission, un certain nombre de dispositions...
M. Robert Bret. Il est hors sujet !
M. Jean Chérioux. ... permettant de régler les problèmes fiscaux, patrimoniaux et sociaux qui se posent effectivement pour certaines catégories de personnes.
A ce titre, il nous est proposé des mesures destinées à favoriser les solidarités privées, dont l'exemple le plus marquant est l'institution d'un legs électif en franchise du droit des successions. Ces mesures ont été retenues en collaboration avec la commission des finances et grâce au travail de son excellent rapporteur pour avis, Philippe Marini.
L'intitulé même du texte - « Proposition de loi relative au mariage, au concubinage et aux liens de solidarité » -, proposé par la commission des lois, témoigne de l'ouverture d'esprit avec lequel nos deux commissions ont entendu résoudre les vrais problèmes qui se posent aujourd'hui, sans exclusive ni a priori .
Nos collègues Patrice Gélard et Philippe Marini ont fait là oeuvre de législateur au sens le plus noble du terme et, pour ma part, je voterai ce texte tel qu'il a été modifié. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, permettez-moi, en préalable, de me féliciter des propos tenus par notre rapporteur, Patrice Gélard lorsqu'il affirme que le Sénat n'est pas hostile à l'égalité des hommes et des femmes en politique, qu'il n'est pas non plus opposé à la réforme du mode de scrutin, à commencer par celui qui le concerne, qu'il s'inscrit dans le sens de la modernité plutôt que dans celui de la « ringardise ».
Mais si l'on souhaite vraiment ne pas faire de notre assemblée le bouc émissaire des pesanteurs sociétales, encore faudrait-il donner des preuves de sa modernités.
Après les turbulences et le tintamarre larmoyant disproportionnés qui ont accompagné cette proposition de loi à l'Assemblée nationale, j'aimerais, comme vous tous, je présume, que nos débats contribuent à réhabiliter une certaine idée du travail législatif et de la représentation nationale, et qu'ils se déroulent, si possible, dans un climat apaisé et serein.
La proposition de loi qui nous conduit à examiner - parce que c'est bien de cela qu'il s'agit - le statut du couple dans notre société, nous interdit de céder à un quelconque effet de mode ou à la tentation de caricaturer les positions des uns et des autres, comme cela est souvent le cas.
Le PACS pose clairement deux questions fondamentales auxquelles la législation actuelle ne répond pas.
Tout d'abord, peut-on reconnaître à la relation amoureuse entre adultes consentants un statut différent du mariage ? Autrement dit, peut-on admettre une loi spécifique pour le couple ?
Ensuite, veut-on accorder à cette même relation amoureuse une valeur sociale, dès l'instant où les deux partenaires, quel que soit leur sexe, acceptent de responsabiliser leur liaison au travers d'un engagement civil, de la conclure par un pacte de soutien moral et matériel ?
Je suis intimement convaincu de la nécessité d'une telle loi.
Ma conviction se fonde, en premier lieu, sur une certaine idée des droits humains. Cette idée est indissociable de la conception républicaine et laïque. Je ne doute pas qu'elle soit partagée ici par un grand nombre d'entre vous, au-delà des clivages politiques.
Par ailleurs, je n'imagine pas que quiconque dans cet hémicycle souhaite maintenir dans une zone de « moindre-droit », voire de non-droit, près de cinq millions de nos concitoyens.
Enfin, c'est tout simplement une question de bon sens : entre le mariage, qui induit la responsabilité parentale, qui porte toute la symbolique familiale, et le concubinage, qui ne peut être envisagé que comme une transition entre célibat et mariage, nous devons résoudre le problème posé par celles et ceux qui ne pourront jamais se marier, et ce malgré l'évidence de leur relation amoureuse.
Si je me réfère à notre philosophie en matière de droits humains et de laïcité républicaine, il me semble que le pacte civil de solidarité nous donne l'occasion d'affirmer deux choses fondamentales.
Premièrement, les homosexuels, dont je rappelle au passage qu'ils ont payé un lourd tribut à l'intolérance et au fanatisme - il n'est pas ici nécessaire de faire de rappel historique ! - sont, peut-être pour la première fois dans l'histoire, enfin établis dans leur droit. Ce qui nous est proposé aujourd'hui, c'est d'inscrire un nouveau droit en toutes lettres et, par là-même, de faire un pas de plus vers l'universalité des droits humains.
Deuxièmement, il faut bien admettre que, dans l'opinion, il y a parfois confusion entre le sentiment religieux et le sens civique. Pour autant, nous savons tous que le renvoi dans la sphère privée du sentiment religieux est le passage obligé vers une société de liberté et d'égalité. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
Avec le PACS, il ne s'agit ni de heurter le sentiment religieux ni de réduire la symbolique familiale, il s'agit simplement de rappeler que l'amour, indépendamment de la procréation, est un facteur d'épanouissement personnel et que, à ce titre, dès l'instant où deux êtres veulent l'inscrire dans la durée, il est un bien commun qui doit être protégé. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
L'utilité de cette proposition de loi donnant un statut aux couples non mariés et non susceptibles de procréer semble posée par le rapport de la commission des lois : ne suffirait-il pas, selon elle, d'améliorer le statut du concubinage et de revoir la question des fratries pour résoudre les problèmes ?
J'observe au passage que cette proposition de loi, au travers des turbulences qu'elle a provoquées, a déjà le mérite d'avoir mis en lumière de criantes injustices.
Par ailleurs, en ce qui concerne les fratries, nous sommes bien d'accord pour reconsidérer la question dans un autre cadre.
Pour autant, je pense que le renvoi à une amélioration du statut du concubinage ne peut être la bonne solution, parce que, pour l'essentiel, cela revient encore à jeter un voile pudique sur la situation des couples homosexuels, à considérer leur relation comme un intermède de l'existence, un état de fait toléré, mais non reconnu.
Pour nous, il s'agit au contraire d'affirmer que la relation de couple donne des droits dès l'instant où les partenaires en acceptent les devoirs.
Enfin, si l'humanisme et le sens républicain sont les principales motivations de cette proposition de loi, il me semble que le bon sens le plus élémentaire plaide également en sa faveur.
Les droits ouverts pour ces personnes ne portent aucunement atteinte aux droits des autres. Le mariage n'est nullement remis en cause, pas plus que la fonction sociale de la famille.
Alors, chers collègues, il faut dire les choses clairement : le PACS concerne, bien sûr, même si ce n'est pas exclusif, les couples homosexuels.
Il ne suffit pas de se sentir outragé par l'accusation de « ringardisme ». Il ne suffit pas d'afficher un louable respect de la vie privée. Encore faut-il envisager les dispositions pratiques et concrètes qui en permettent l'exercice et la réalisation.
Avec beaucoup d'humour, monsieur le rapporteur, vous avez dit récemment que la différence entre un député et un sénateur était que le premier était myope et le second presbyte. Alors, permettez-moi de vous suivre sur ce terrain et de vous parler d'un oiseau de mes Pyrénées ariégeoises ; vous voyez, je viens, moi aussi, de la France profonde. Cet oiseau, c'est le grand tétras, aussi nommé coq de bruyère, qui, à la saison du chant, lorsqu'il se met à caqueter, devient aussitôt sourd et aveugle ; cela permet de l'approcher et le rend vulnérable.
Ainsi, chers collègues, au moment de vous exprimer sur un sujet aussi important, soyez cohérents, ne sombrez pas dans le syndrome du coq de bruyère. (Rires et applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.) Gardez les yeux ouverts et sachez rester à l'écoute des aspirations de notre société. L'occasion vous est donnée de mettre vos actes en accord avec vos proclamations, ne la manquez pas ! (Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Jean Chérioux. Le coq de bruyère est un animal assez peu répandu !
M. René-Pierre Signé. Ce ne sont plus des coqs !
M. le président. La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, le problème des couples singuliers n'est pas nouveau mais, je le dirai simplement, il n'est plus possible de l'ignorer.
Il faut donc se réjouir, et, pour ma part, c'est ce que je fais, que des parlementaires aient résolument provoqué ce débat.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah !
M. Pierre Fauchon. Attendez la suite, monsieur Mélenchon !
Mais il est permis de déplorer que le Gouvernement n'ait pas cru devoir, en la circonstance, assumer pleinement ses responsabilités.
M. Jean-Luc Mélenchon. Oh !
M. Pierre Fauchon. La demande eût été techniquement mieux assurée.
Puis-je rappeler, pour avoir connu cette période, que, leur temps, le président Giscard d'Estaing, les ministres Simone Veil et Jean Lecanuet avaient donné de meilleurs exemples de responsabilité sur des thèmes non moins difficiles et non moins périlleux comme le divorce ou l'interruption volontaire de grossesse.
M. René-Pierre Signé. Avec la gauche !
M. Pierre Fauchon. L'un des inconvénients, et non des moindres, de cette approche en quelque sorte biaisée explique et justifie largement l'ample manifestation d'incompréhension et de rejet qui accompagne ce texte, mouvement auquel M. le rapporteur a su résister et je l'en remercie.
Dès lors que l'on se soucie des questions qui touchent à la sexualité, n'ayons pas peur des mots, à l'amour, au couple, à la procréation, on ne saurait le faire en ignorant ou en contournant ce qui, dans le mariage ou hors mariage - je me réfère à ce qui a été très bien dit hier par M. Alain Lambert - est la réalité la plus vivante peut-être, la plus menacée aussi, mais sans doute la plus utile et la plus créatrice des organisations humaines de ce temps, je veux parler de la famille.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est reparti !
M. Pierre Fauchon. Organisation la plus vivante d'abord, et je dirai même vitale, parce que le premier problème d'un groupe humain c'est de veiller à sa survie, question qui est loin d'être théorique pour la France de cette fin du xxe siècle,...
M. Jacques Machet. Tout à fait !
M. Pierre Fauchon. ... mais question angoissante.
M. Jean-Luc Mélenchon. Cela n'a rien à voir avec le sujet !
M. Pierre Fauchon. Monsieur Mélenchon, vous êtes l'arbitre de beaucoup de choses, mais, s'agissant de savoir ce qui est dans le sujet et ce qui ne l'est pas, je vous en prie, laissez à chacun sa part de liberté, respectez la liberté des intervenants ! (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas la liberté, mais la licence !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Fauchon.
M. Pierre Fauchon. La question de la survie de la société est angoissante pour ceux qui prennent la peine d'élever leur regard « au-dessus du guidon » et de scruter l'avenir, le proche avenir, à la lumière de données démographiques implacables. N'est-ce pas le premier devoir du Gouvernement ?
Organisation la plus menacée, dès lors que la famille a perdu les armatures juridiques, sociales, culturelles, religieuses, économiques qui en ont fait si longtemps la structure de base la plus permanente, la plus forte et la plus populaire de la société.
Mais aussi organisation la plus précieuse et la plus utile, dans la mesure où la famille reste, plus que jamais, le lieu de la plus grande solidarité,...
M. Jacques Machet. Très bien !
M. René-Pierre Signé. La famille n'est pas menacée !
M. Pierre Fauchon. ... le lieu de la plus grande convivialité,...
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Pierre Fauchon. ... le lieu de la plus grande générosité, de la plus grande responsabilité,...
M. Jacques Machet. Oui !
M. Pierre Fauchon. ... en même temps que celui d'une remarquable faculté d'adaptation. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste. - Mme Olin applaudit également.)
M. Jacques Machet. Bravo !
M. Robert Bret. Il faut faire avancer la société !
M. Pierre Fauchon. On ne saurait se passer de toutes ces valeurs si l'on veut surmonter les défis les plus grands auxquels nous sommes confrontés : le défi de l'enfance et de l'éducation, le défi du troisième âge et de la dépendance, le défi de l'exclusion et de la pauvreté, de la fracture sociale.
Ne nous y trompons pas : si nos sociétés, si notre civilisation parviennent à traverser sans trop de dommages, je veux dire en préservant leurs valeurs, la tourmente de la modernité, ce sera pour une très large part aux familles qu'elles le devront, beaucoup plus qu'à des structures administratives ou sociales empêtrées dans leurs routines.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Pierre Fauchon. Cependant - et vous allez voir pourquoi je crois que c'est dans le sujet - le statut de la famille sous ses divers aspects appelle une réflexion actualisée et bien des redéfinitions. Sans doute, c'est par lui qu'il fallait commencer. L'ordre logique et naturel, c'est d'abord la famille, ensuite le mariage et enfin le non-mariage. En effet, une révision qui aurait commencé par la famille et le mariage aurait peut-être permis d'éclairer d'un jour nouveau le problème des couples hors mariage.
M. Louis de Broissia. Absolument !
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Pierre Fauchon. Elle n'aurait pas réglé la question de l'homosexualité, mais elle aurait apporté un éclairage nouveau et, peut-être, une solution à bien des situations de couples formés hors mariage, qui, comme l'a rappelé notre ami M. Lambert, jouent un rôle ô combien important du point de vue de la famille.
Or, on en est loin, madame le garde des sceaux, puisque l'on en est aux réflexions préparatoires des experts, et que les seuls signes adressés par le Gouvernement aux familles n'ont guère été que négatifs. Cela témoigne d'une bien fâcheuse méconnaissance de nos... de vos responsabilités.
L'expression de tels regrets ne saurait, selon moi, nous dispenser d'aborder sereinement le présent débat.
Nous le ferons, selon notre habitude, en recherchant, avec M. Gélard, les vraies solutions plus que les effets d'annonce.
Nous le ferons aussi dans un esprit humaniste. Je veux dire dans un esprit auquel rien de ce qui est humain n'est étranger, et je pense en particulier à la question de l'homosexualité, il est vrai, trop longtemps ignorée ou traitée dans un esprit d'intolérance et d'hyprocrisie, auquel il faut mettre fin.
Il faut y mettre fin non seulement pour des raisons de réalisme et de bon sens, mais davantage encore parce que, pour être juste, la loi doit être au service de tous et que, loin d'ignorer les minorités, la loi doit, dès lors que l'ordre public n'est pas menacé, faire preuve à leur égard non de complaisance, mais de ce qu'il faut de compréhension, et j'ose dire de générosité, sans pour autant en faire une priorité comme vous le faites sans vouloir l'avouer.
C'est dans cet esprit que nous aborderons ce débat, en remerciant notre ami M. Gélard de l'avoir si bien préparé. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. René-Pierre Signé. Beau plaidoyer pour la famille ! Comme si elle était menacée !
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens, avant toute chose, à préciser que le point de vue que je vais formuler n'engage que moi. Le PACS est un sujet trop grave pour que je ne m'exprime pas en conscience.
Toute personne a droit au respect de ses choix de vie. A ce titre, toute discrimination doit être combattue. Toutefois, je suis fermement opposé au dispositif du PACS.
Ce texte est, en fait, élaboré de toutes pièces pour les couples homosexuels, dont le nombre est estimé à 60 000. Pourquoi ne pas l'admettre clairement et simplement ?
Il me paraît contradictoire de revendiquer, à travers diverses manifestations, une différence et, dans le même temps, de demander à « être comme tout le monde ».
Contrairement à ce que certains clament, les différences de situation peuvent justifier des différences de traitement.
Dans une société où le manque de repères est de plus en plus manifeste, où les actes de violence juvénile deviennent l'actualité ordinaire, quels modèles veut-on donner aux jeunes ?
M. Jean-Luc Mélenchon. La tolérance !
M. Jean Boyer. Le PACS tend à gommer toute distinction de sexe dans les rapports de couple et à légaliser cet état de fait.
Ceux qui le défendent ne cessent de rappeler que cette réforme concerne potentiellement les cinq millions de Français vivant en couple sans être mariés. En fait, qu'en est-il ?
Si un couple hétérosexuel ne souhaite pas se marier, il vit en union libre et en assume les conséquences. C'est un choix. On ne voit pas en quoi le PACS serait à proprement parler un « plus » pour eux du point de vue social. En l'occurrence, ils servent de faire-valoir et de prétexte.
En revanche, pour les couples homosexuels, il s'agit d'une véritable reconnaissance institutionnelle. Je regrette l'hypocrisie et le manque de courage qui entourent le débat sur cette proposition de loi.
On ne peut mesurer aujourd'hui les conséquences symboliques et sociologiques de cette réforme. De nombreuses mises en garde ont été exprimées en ce sens tant par des sociologues et des psychanalystes que par 20 000 maires, et, de façon plus générale, par des hommes et des femmes de tous horizons.
Au-delà de ces mesures qui visent le couple, nous savons tous qu'en filigrane se pose la question des enfants.
A l'Assemblée nationale, madame la ministre, vous avez déclaré, au début du mois de décembre dernier, me semble-t-il, que l'adoption serait impossible pour les couples homosexuels. Or deux députés socialistes vous ont contredit.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est leur droit !
M. Jean Boyer. Selon M. Jean-Pierre Michel, « le Pacs évoluera forcément un jour ou l'autre pour intégrer les aspects de l'adoption ». Quant à Jack Lang, il a jugé que la question de l'adoption se poserait fatalement.
M. Jacques Machet. Eh oui !
M. Jean Boyer. Faire le premier pas aujourd'hui dans la reconnaissance du couple homosexuel, c'est enclencher cet engrenage infernal. Chacun doit bien en prendre conscience. En la matière, nous serions coupables de nous cacher derrière notre petit doigt.
M. Jacques Machet. En effet !
M. Jean Boyer. La position retenue par notre commission des lois est pertinente. Elle consacre le mariage comme fondement essentiel de notre société. Par ailleurs, elle apporte des réponses constructives aux véritables problèmes et inégalités qui existent à l'égard des couples non mariés.
Toutefois, en ce qui concerne la définition du concubinage, je ne suis pas favorable à la non-distinction entre hétérosexuels et homosexuels.
Compte tenu des remarques que je viens d'exprimer, vous l'aurez compris, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne voterai pas cette proposition de loi. (Applaudissemnts sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, en tant que législateur, avec humilité, depuis que le Président Václav Havel a employé ce mot à cettre tribune, nous avons tous ensemble, quelle que soit nos origines géographiques, sociologiques et politiques, une tâche commune à accomplir.
Nous devons raisonner de manière simple, c'est-à-dire compréhensible par tous, car les Français sont affolés par notre société de plus en plus complexe. Chaque jour, en Côte-d'Or, mes électeurs me disent qu'ils ne comprennent plus rien à ce que nous faisons à Paris.
Nous devons raisonner de manière constructive, en constatant que la société évolue. En tant que législateur, nous devons tirer parti, pour l'intérêt général et le bien public, de cette évolution, en préparant une société de libertés individuelles qui respecte l'autre, et d'abord le plus fragile, en particulier l'enfant.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah !
M. Louis de Broissia. Nous devons raisonner de manière non idéologique. Une loi idéologique, c'est un texte qui ne recherche qu'un profit électoral, électoraliste, politicien, un texte qui chercherait plus à opposer nos compatriotes entre eux qu'à les rassembler ou à les unir. A ce titre, mes chers collègues, évitons ce qui a pu se passer à l'Assemblée nationale, à savoir une dichotomie parfois un peu pitoyable, où l'un des camps se prétend défenseur des hétérosexuels, l'autre, des homosexuels ; un camp défenseur de la famille, l'autre, de l'enfant. Nous aurons un jour des défenseurs des célibataires à un ou à deux ! A ce titre, le Sénat est là pour faire des lois.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas ce qui s'est passé !
M. Louis de Broissia. Constitutionnellement, le Sénat n'est pas là pour servir le Gouvernement, mais pour légiférer et contrôler le Gouvernement. Il a donc le devoir de réflexion, de la longue durée, de la prospective. Ainsi en est-il - M. Mélenchon m'autorisera à les citer, je suis dans le sujet - de la société, de la démographie et des équilibres sociaux. Le Sénat propose intelligemment - grâce en soit rendue à la commission des lois et à son rapporteur, notre collègue Patrice Gélard - une démarche différente de celle qui a été adoptée dans le texte déposé sur l'initiative de certains députés et auquel on peut faire les trois reproches que j'évoquais au début de mon propos.
Le PACS procède en effet - nous en sommes tous convaincus - d'une démarche complexe, peut-être due à la majorité plurielle, démarche qui divise la société et qui ne répond que très imparfaitement à l'attente de nos compatriotes.
Passons sur les conditions assez discutables de l'examen du PACS à l'Assemblée nationale ; passons sur ses avatars aux noms tous aussi stupides les uns que les autres - PIC, CUC, CUCS - passons sur son premier rejet, sur son retour et donc, madame le ministre, sur la suspicion qui entoure un texte sur lequel se sont penchés plus de furies et d'idéologues que de bonnes fées.
Tout s'est passé, dans cette première partie, chez nos collègues députés comme s'il fallait brouiller les pistes offertes à la société française, en particulier à l'heure même ou, comme tous les sondages le soulignent et comme l'a dit tout à l'heure notre collègue Jean Chérioux, tant de jeunes mettent dans leurs aspirations fondamentales la possibilité de fonder un couple, un foyer, une famille.
Par ailleurs, tout s'est passé chez nos collègues députés comme s'il fallait bousculer le bon sens issu de la nuit des temps selon lequel la famille fondée - les couples mariés - ou la famille à fonder - les couples non encore mariés - engendrait la France de demain.
Grave également est l'occasion ratée par le PACS, dans sa deuxième ou sa troisième mouture, de ne plus mettre vraiment - et c'est finalement le coeur du sujet aussi - l'homosexualité à l'écart de la société française. Mesurez-vous, madame le ministre, le désarroi de ceux que, sous prétexte de les libérer de cette vieille et antique suspicion qui les frappe, vous avez enfermés dans la logique des pacsés ? Vous imaginez, mes chers collègues, le chic qui consistera à dire que l'on s'est pacsé avec un tel ou une telle !
M. Jean-Luc Mélenchon. Alors s'il y a le chic en plus...
M. Jean Chérioux. Ça, c'est pour la gauche caviar !
M. Louis de Broissia. Vous avez donné le sentiment, dans cette affaire, de n'écouter que les voix des intégristes. Sous prétexte de banaliser, vous avez singularisé ; sous prétexte de ne plus discriminer, vous avez marginalisé.
Pour éviter les déchirement annoncés, pour que le texte du PACS ne tombe pas sous le coup d'observations dirimantes du Conseil constitutionnel - seuls l'individu et la famille sont reconnus dans le préambule de la Constitution - mieux vaudrait prévenir un recours auprès de la haute juridiction constitutionnelle qui serait fâcheux pour toute la société française. Vous avez évité habilement le Conseil d'Etat par le dépôt d'une proposition de loi, mais vous ne pourrez contourner le Conseil constitutionnel !
Pour que les Français se réconcilient enfin avec leur vie familiale - familles fondées par un mariage, familles à composer, familles fractionnées ou recomposées, familles porteuses d'un enfant ou familles non porteuses - il fallait une vision totalement différente ; c'est le texte du Sénat, véritable appel à la réconciliation de la société française. Permettez-moi de l'examiner en abordant quatre points.
Premièrement, aujourd'hui, plusieurs millions de Français ont choisi de ne pas choisir tout de suite, d'essayer la vie à deux, de tenter ultérieurement d'élargir leur foyer. Le mérite du Sénat est de laisser la porte ouverte et de reconnaître que le code civil doit faire montre de générosité et de réalisme.
Si Bonaparte pouvait dire que la loi se désintéressait de ceux qui vivent ensemble sans avoir sollicité de brevet ou de manifestation publique, 195 ans passés, la France s'honorera à reconnaître 2,4 millions de couple, qui contribuent - nous l'avons dit les uns et les autres - à la natalité française, puis à la nuptialité française, et qui sont donc une partie de la société française.
Le concubinage est vécu aujourd'hui dans les faits - ne nous le cachons pas - comme le prélude du mariage républicain. C'est le sens de l'appel des 20 000 maires à voter contre le PACS...
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Ils ont eu raison ! (Mme Monique Cerisier-ben Guiga proteste.) M. Louis de Broissia. Le concubinage est donc vécu comme le prélude au mariage républicain, au contraire du PACS, conçu demain comme un succédané de mariage ou un mariage virtuel, comme un Canada dry du mariage : ça ressemble à un mariage, ça a les avantages du mariage, ça n'a pas les contraintes du mariage, donc c'est un mariage !
Pourquoi construire en dénaturant, madame le ministre, mes chers collègues ?
La proposition du Sénat est de construire du nouveau en confortant ce qui a donné satisfaction, c'est-à-dire ce qui convient à plus de 12 millions de couples mariés devant la République. N'est-ce pas là une valeur républicaine ?
Deuxièmement, le fait de civiliser, de légaliser le statut de concubin permet de ne pas tomber dans les travers sexualisés du PACS.
Les « concubins du même sexe » - cette expression, que j'ai entendue voilà un an à l'Assemblée nationale, lorsque l'on parlait du PACS pour la première fois, avait quelque peu surpris les personnes âgées de ma circonscription qui se trouvaient alors dans les tribunes ! Je l'emploie maintenant, puisqu'elle est passée dans la terminologie - les concubins du même sexe, disais-je donc, pourront bénéficier de la même reconnaissance. Sortir du ghetto est leur seule préoccupation ; pour ceux qui veulent un affichage, la formule est souple et non discriminante.
Troisièmement - j'aurais dû commencer par là, mais, dans notre société égoïste, c'est, hélas ! le troisième point - le droit pour l'enfant à disposer originellement d'un père et d'une mère est reconnu.
J'ai entendu tout à l'heure un orateur socialiste dire qu'aucun texte ne reconnaissait que l'enfant avait besoin d'un père et d'une mère. (Vives protestations sur les travées socialistes.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Il n'y a pas besoin de texte pour cela !
Plusieurs orateurs socialistes. Nous n'avons rien dit de tel ! Qui a dit cela ?
M. Louis de Broissia. En tant que président d'un conseil général, je suis en relation avec les travailleurs sociaux. Tous les problèmes des enfants naissent du fait qu'ils n'ont pas de mère ou de père véritablement reconnu. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
Plusieurs orateurs socialistes. Mais qui a dit cela ?
M. Louis de Broissia. Cela vous dérange que je le rappelle ? Cela a été dit ! (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Louis de Broissia. Trop d'experts, trop de parents sont sensibilisés aux manquements graves de la parentalité,...
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. Louis de Broissia. ... c'est-à-dire de la fonction de père et du rôle de mère. Trop de travailleurs sociaux dénoncent les carences affectives dont peuvent souffrir les enfants élevés sans la double référence père et mère. Tous nous disent les risques encourus par l'enfant éduqué incomplètement.
Alors, en tant que législateur, protégeons d'abord le plus faible, c'est-à-dire l'enfant, et non le couple homosexuel. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et l'Union centriste.)
M. Jean Chérioux. Et voilà !
M. Louis de Broissia. Quel regret, madame le ministre, que vous ayez proposé l'urgence sur le PACS et non sur le droit de l'enfant. Je pourrais formuler, comme je l'ai fait dans des questions écrites, de nombreuses propositions. Le texte présenté par la commission des lois dit tout cela avec intelligence et de façon ferme.
M. Jean-Luc Mélenchon. Il n'y a pas d'urgence !
M. Louis de Broissia. Il n'y a pas urgence, dites-vous ? Venez dans mon département, je vous montrerai l'urgence d'avoir des familles équilibrées, tant dans les quartiers difficiles que dans les zones rurales. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Je parlais du texte ! Le Gouvernement n'a pas déclaré l'urgence sur le texte !
M. Louis de Broissia. Enfin, quatrièmement - c'est un point d'équilibre là aussi intelligent de la proposition sénatoriale - il est proposé un dispositif fiscal et successoral qui englobe la situation de tous : les frères et soeurs, les concubins ainsi que le legs électif ou affectif, qui pourrait être appelé différemment.
Le Sénat confirme, bien entendu, qu'il ne touche pas fiscalement à l'établissement du mariage, acte fondateur de la société - vous l'avez rappelé, madame le garde des sceaux, et je vous en donne acte - qu'il ne lui porte pas atteinte, voire, comme le texte initial du PACS le prévoyait, qu'un texte de loi pouvait pénaliser ceux qui font des efforts, ceux qui s'engagent, au profit de ceux qui ont une vision plus égoïste, plus hédoniste de la vie. (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux. Exactement !
M. Louis de Broissia. Sur un texte fondamental en ce sens qu'il fondera, qu'il affirmera notre société, celle que géreront nos enfants, sur un texte sociétal - le mot est à la mode, madame le ministre - quel intérêt aurait le Gouvernement à continuer dans l'erreur ? Errare humanum est, persevare diabolicum.
Le texte du Sénat permet une avancée forte du code civil, il évite des dispositions à nouveau discriminatoires. Après beaucop de tâtonnements, madame le ministre, il nous offre l'opportunité de nous réconcilier tous ensemble avec l'esprit de cette fin de siècle, de la mixité voulue et recherchée. C'est toute la noblesse du travail parlementaire que de nous permettre de vous amender.
Par rapport au cinéaste Claude Lelouch et à son célèbre Hommes, femmes, mode d'emploi, il ajoute utilement une vision hommes, femmes, société, mode d'emploi.
Le Gouvernement a eu jusqu'à présent une approche militante de ces rapports hommes-femmes.
M. Jean-Luc Mélenchon. Très bien !
M. Louis de Broissia. En témoignent la provocation un peu puérile sur les titres et fonctions féminines - on s'y perd ! -...
Mme Dinah Derycke. C'est une provocation !
M. Louis de Broissia. ... la provocation totalement calculatrice, c'est-à-dire politicienne, sur la parité : le Sénat a montré sa sagesse sur ce sujet. (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Claude Estier. Ah oui ! Parlons-en ! Quelle sagesse !
M. Louis de Broissia. Une occasion est donnée au Gouvernement d'entreprendre une vraie réforme sociale et réconciliatrice. Saisissez-la ! Nous la saisirons ensemble. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Mélenchon. (Ah ! sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé. Pour longtemps, j'espère !
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, madame la ministre - il n'y a aucun inconvénient à nommer dans le genre qui convient la personne que nous interpellons, monsieur de Broissia, - ...
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. C'est votre liberté !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... mes chers collègues, il y a eu, vous le savez, avant ce projet de PACS, d'autres propositions de loi d'origine parlementaire. Le rapporteur de la commission des lois a bien voulu rappeler - je lui en suis reconnaissant - que c'est ici même, au Sénat, qu'a été déposée la première d'entre elles par six membres du groupe socialiste, sur mon initiative, en 1991. Je le dis pour témoigner et pour rendre hommage à tous ceux qui se sont impliqués dans le patient cheminement qui nous a conduits jusqu'à la délibération de ce jour.
Une première pensée se tourne vers le mouvement associatif qui a porté ce combat, et tout autant, sinon davantage, vers ces anonymes, femmes et hommes, directement concernés, que la pandémie du sida nous a ôtés et qui avaient mis toute leur énergie - parfois la dernière dont ils disposaient - à agir pour qu'à la douleur de la séparation ne s'ajoute plus l'abîme des cruautés ordinaires auxquelles ont été voués si longtemps les couples homosexuels dans de telles circonstances.
Je vous ai entendu, hier, vous rengorger et manifester une bruyante compassion lorsque notre excellent rapporteur, M. Patrice Gélard, nous reprochait de proposer des dispositifs inapplicables : vous avez feint de le déplorer. Mais c'est le moment, alors que vous avez si fort réclamé du temps pour réfléchir, de vous poser la question suivante : depuis 1991, où sont vos textes de lois, où sont vos propositions, à quel moment vous êtes-vous souciés des misères faites aux uns et aux autres, du statut des homosexuels, du statut des concubins ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes. - M. le rapporteur manifeste son souhait d'interrompre l'orateur.)
C'est au contraire devant cette assemblée, en 1988, que l'on a vu pour la première fois être défendue l'abrogation...
M. le président. Monsieur Mélenchon, M. le rapporteur, à qui vous avez rendu hommage tout à l'heure, souhaiterait vous interrompre. L'y autorisez-vous ? (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Peut-être pourrait-il attendre que j'ai fini ma phrase ? Ensuite, je laisserai très volontiers m'interrompre qui voudra et tiens ma riposte à sa disposition !
M. Louis de Broissia. Ne coupez pas son souffle !
M. Pierre Fauchon. Laissez-le achever sa période !
M. le président. Poursuivez donc et, ensuite, M. le rapporteur interviendra.
M. Jean-Luc Mélenchon. J'achève donc ma phrase si vous le permettez, monsieur le président. (Sourires.)
J'ai dit que, contrairement à vos allégations, c'est tout au contraire devant cette assemblée que nous avons vu, en 1988, être défendue, pour le première fois, l'abrogation de ce que vous appelez « le privilège fiscal des concubins ». C'est en effet dans cet hémicycle que cela s'est passé !
Mme Dinah Derycke. Tout à fait !
M. Jean-Luc Mélenchon. Et alors était évoquée d'une manière tout à fait plaisante l'exigence morale qu'il y avait à donner au mariage la valeur de consécration suprême dont vous pensiez qu'elle était contestée par les dispositions fiscales. Il est donc clair que votre compassion en ce domaine est une pure hypocrisie !
Monsieur le rapporteur, vous souhaitiez m'interrompre ?
M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles de la législation du suffrage universelle, du règlement et d'administration générale. J'y renonce !
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous renoncez ? Quel dommage !
M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est dommage, en effet !
M. Jean-Luc Mélenchon. Bref, vous n'avez bougé encore une fois que parce que nous ne vous avons pas laissé le choix ! Vous ne bougez que parce que nous vous y avons obligé, parce que vous avez peur de vous retrouver sous l'opprobre que vous ont valu vos choix à propos de la parité, et vous ne changez de posture que dans le seul but que rien ne change ! (Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Jean Chérioux. Vous mélangez tout !
M. Dominique Braye. « Mélenchon » mélange tout !
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais sans l'agilité intellectuelle de M. le rapporteur, Patrice Gélard, nous en serions restés à la récitation laborieuse et pétrifiée de votre catéchisme sur la famille immuable, le mariage inchangé... (Vives exclamations sur les travées du RPR.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Ne méprisez pas vos adversaires !
M. Jean-Luc Mélenchon. ...comme nous l'avons entendu d'orateur en orateur,...
Un sénateur du RPR. Il n'a rien écouté !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... oubliant que le mariage et la famille ont une historicité, qu'ils n'ont pas toujours été ce que vous défendez. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. Jean Chérioux. Le mariage a été un progrès par rapport à ce qui existait avant ! Il a été libérateur ! La femme n'était plus esclave !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie ! Seul M. Mélenchon a la parole.
M. Alain Vasselle. C'est un provocateur !
M. Dominique Braye. Oui, la provocation, il aime ça !
M. Jean Chérioux. M. Mélenchon est pour le retour à la répudiation biblique !
M. le président. Monsieur Mélenchon, poursuivez !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas moi qui fais entrer la Bible à coup de poing dans le code civil, ce sont plutôt les vôtres !
Je dis que le mariage, la famille ont une historicité...
M. Jean Chérioux. Ah !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... et que, si vous cherchez un fil conducteur aux progrès que l'on a pu constater dans l'histoire, il peut tenir à quelques mots : toujours plus de liberté dans le consentement, et donc toujours plus de responsabilité, d'autonomie de la personne et, au bout du compte, toujours moins de discrimination.
M. Dominique Braye. A voir !
M. Jean-Luc Mélenchon. Et ce que nous faisons aujourd'hui, c'est seulement la poursuite de ce processus. Et nous en sommes fiers ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Nous n'avons pas la même idée du progrès que vous !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est clair, monsieur Marini, nous n'avons pas la même idée du progrès !
M. Robert Bret. C'est une évidence !
M. Jean Chérioux. L'un agit, l'autre détruit !
M. Jean-Luc Mélenchon. Nous jugeons, pour notre part, que quelques-uns des propos qui ont été tenus ici sont insultants pour nous. (Protestations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
Croyez-vous que nous n'ayons pas de famille ?
M. René-Pierre Signé. Bravo !
M. Jean-Luc Mélenchon. Croyez-vous que nous ne l'aimions pas ? Croyez-vous que les homosexuels n'en aient pas ?
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Ah ! elle est belle !
M. Dominique Braye. Vous n'aimez que la vôtre, pas celle des autres !
M. Jean Chérioux. Ce n'est que la vôtre !
M. Jean-Luc Mélenchon. Qu'est-ce qui nous vaut de mériter vos leçons ? Nous ne les supportons pas !
Aujourd'hui, de notre côté, nous touchons au but et, d'une façon ou d'une autre, j'estime que ceux qui ont voulu ce combat ont déjà gagné l'essentiel de la partie sur le plan moral. En effet, plus personne, hormis quelques énergumènes (Rires sur les travées des Républicains et Indépendants), n'ose dire ouvertement que le couple homosexuel est en soi condamnable, ni qu'il attente aux bonnes moeurs, à la morale ou même à l'essence de la société.
Plus personne - sauf M. Seillier, qui n'a pas manqué hier de renvoyer cette proposition de loi à l'augmentation des pathologies de la société : c'est une chose qu'il faut pouvoir oser devant une assemblée comme la nôtre ! - plus personne, dis-je, n'ose contester que de tels couples puissent avoir des droits et que les violences qui leur ont été faites sont dorénavant inadmissibles. Cela figure dans le texte !
M. Jean Chérioux. Ce ne sont pas les couples homosexuels qui ont des droits !
M. Jean-Luc Mélenchon. Dans la foulée, le code civil pourrait bientôt s'ouvrir, en partie grâce à vous, aux concubins. Il est vrai qu'ils sont les parents de 40 % des jeunes Français qui naissent ! Il y a des réalités qui finissent pas s'imposer.
C'en est donc fini, là encore, des discours moralisateurs méprisants qui condamnaient ou reléguaient il y a si peu de temps encore cette manière de vivre en dehors du mariage.
C'est, au total, autant de bonnes nouvelles pour notre société si, de cette façon, nous la débarrassons aujourd'hui de cette part de violences et de mépris que nos archaïsmes législatifs faisaient durer. (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Dominique Braye. Il faut oser le dire ! Vous prétendez débarrasser la société de ses violences ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Bien sûr, nous ne sommes toujours pas d'accord sur les moyens à mettre en oeuvre pour franchir cette nouvelle étape d'émancipation et de liberté de la personne.
M. Jean Chérioux. Assez de permissivité !
M. Dominique Braye. Venez voir s'il y a moins de violence qu'avant !
M. le président. Monsieur Braye, laissez poursuivre l'orateur !
M. Jean-Luc Mélenchon. Pas plus qu'aucun ici sur les travées de gauche, je ne serai dupe de certains contorsionnistes de la majorité sénatoriale. Ceux-là voudraient nous faire croire qu'ils veulent bien de la chose, mais surtout pas du mot qui la désigne.
Mme Dinah Derycke. Tout à fait !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ceux-là, en vérité, ne sont prêts à céder que ce qu'il leur est impossible de défendre ouvertement, et à la stricte condition qu'aucun mot qui les fâche ne soit prononcé.
Chemin faisant, ils tentent encore de régler quelques comptes.
Mme Dinah Derycke. Exactement !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ainsi, par exemple, vous voilà rendu au point de vouloir définir le mariage. Et pour quoi faire ? Pour le décrire comme le lien exclusivement réservé à un homme et à une femme !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Cela vous choque ?
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. C'est la parité !
M. Dominique Braye. Eh oui !
M. Jean Chérioux. C'est cela qui vous gêne !
M. Jean-Luc Mélenchon. Quelle découverte ! Il vous reste, pour finir la journée, à nous apprendre l'eau chaude... le fil à couper le beurre... et bien d'autres évidences !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Si c'est évident, admettez-le !
M. Dominique Braye. Il faut sortir ! Cela se fait ailleurs, allez voir !
M. Nicolas About. M. Mélenchon joue les faux naïfs !
M. Jean-Luc Mélenchon. Pourtant, personne ici n'a jamais défendu ou prétendu autre chose à propos du mariage.
M. Dominique Braye. Cela se fait ailleurs ! Il faut sortir !
M. Jean-Luc Mélenchon. J'en déduis que, en réalité, vous voulez rétablir en catimini des hiérarchies de dignité parmi les couples, et je nomme ce procédé pour ce qu'il est : une mesquine revanche sur ce qu'il va bien vous falloir concéder à propos des homosexuels.
Pour un peu, on vous verrait vouloir défendre, en la définissant, l'hétérosexualité. A tout prendre, ce serait plus divertissant !
M. Jean Chérioux. Provocateur, comme toujours !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je vous rassure si c'est nécessaire, le mariage et l'hétérosexualité, qui est à sa base, ont encore de beaux jours devant eux sans votre secours !
Au demeurant, et d'une façon générale, ce ne sont ni le code civil ni le Journal officiel des débats du Sénat qui motivent le désir de s'aimer : le phénomène est d'origine plus spontanée. (Rires.)
M. Dominique Braye. C'est scabreux !
M. Jean-Luc Mélenchon. Vouloir rétablir une hiérarchie des sentiments amoureux à travers les choix de vie commune qui s'en suivent est une lamentable arquebusade d'arrière-garde.
M. Dominique Braye. Ne mélangeons pas tout !
M. Jean-Luc Mélenchon. Mesdames, messieurs, depuis la Révolution de 1789, le mariage n'est plus un sacrement, sinon pour ceux qui veulent le considérer comme tel, et c'est bien leur droit.
M. Jean Chérioux. Merci pour eux !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. C'est bien de le reconnaître !
M. Jean-Luc Mélenchon. La République, elle, se contente du consentement des époux aux droits et devoirs qui contractualisent ce mode de vie commune, qu'elle reconnaît par là même et légitime. Rien de moins, mais rien de plus.
M. Jean Chérioux. Mais c'est toute la législation canonique !
M. Jean-Luc Mélenchon. Face à d'autres modes de vie commune, face à d'autres liens amoureux, le PACS n'est, lui aussi, rien d'autre que cela, adapté aux situations auxquelles il s'applique.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Il ne sert à rien !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est un consentement mutuel, un contrat, une légitimation sociale. Les trois marchent ensemble, parce qu'il s'agit ainsi de reconnaître un lien social construit sur un sentiment humain profondément légitime et souhaitable pour tout un chacun comme pour la société tout entière.
C'est pourquoi, mes chers collègues, on ne peut vouloir la chose sans vouloir le mot. Il ne s'agit pas de concéder que l'on « admet » l'existence de couples homosexuels à condition qu'on ne les voie pas trop, et des couples concubins qui ont le bon esprit de faire des enfants : il s'agit de les reconnaître, quand ils souhaitent que cela soit fait, parce que ces couples ne sont ni illégitimes ni indignes. Et, dans la mesure ou ils contribuent au bonheur et à l'épanouissemernt de ceux qui vivent sous cette forme, ils sont même souhaitables.
M. Louis de Broissia. Le bonheur est-il légalisable ?
M. Jean-Luc Mélenchon. De ce point de vue, pour nous, le mot, le PACS, parce qu'il est une légitimation symbolique, c'est ici autant que la chose. Nous ne vous le céderons donc pas, fût-ce au prix de quelques petites améliorations du statut des concubins.
Après cela, madame la ministre, mes chers collègues, il me reste à vous dire que le PACS lui-même me laisse une part d'insatisfaction... (Exclamations sur les travées du RPR) ... et que cette insatisfaction me fournira la matière première d'idées qui finiront bien par faire, elles aussi, leur chemin.
Je veux vous dire que, pour moi, le PACS n'est pas un horizon indépassable de la volonté de mener une vie commune et solidaire, pas plus que le mariage ou le concubinage. Et pas plus, pour être tout à fait franc, que je ne crois que le couple et la famille naturelle soient un horizon indépassable du lien affectif et des solidarités que l'on peut choisir d'assumer.
M. Louis Moinard. La famille à la poubelle !
M. Jean-Luc Mélenchon. Dans ma proposition de loi de 1991, j'avais placé les fratries parmi les bénéficiaires potentiels du contrat de « partenariat civil » que je proposais. Je connais bien les difficultés que cette idée soulève. A la vérité, ces fratries étaient pour moi emblématiques de la dissociation que je souhaitais pouvoir permettre entre le sentiment amoureux, la sexualité et le droit de vouloir mener vie commune et solidaire.
Je reste partisan de cette idée. Elle s'inspire d'une préoccupation d'universalité des droits. Je milite pour que toute personne puisse s'associer à toute autre dans un rapport de solidarité voulue et pour que la loi facilite cette solidarité, et même qu'elle l'encourage.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je conclus, monsieur le président.
Il faut que la loi encourage cette solidarité parce qu'il n'y a pas trop de solidarité dans nos sociétés.
Tout ce qui contribue à élargir le cercle du libre choix de la solidarité et de la responsabilité à l'égard d'autrui me paraît devoir être facilité et légitimé. Nous n'en sommes pas là aujourd'hui ; mais à chaque jour suffit sa peine !
Bien sûr, je ne reprocherai pas au PACS de n'être rien parce qu'il n'est pas tout. On voit déjà à quels conservatismes il se heurte ! On voit bien aussi à quelles injustices il peut remédier. Je serai donc, dans cette bataille d'idées, aux côtés de mes amis.
Ce que nous sommes en train de faire - PACS, parité, limitation du cumul des mandats - est une révolution culturelle tranquille qui fait que la gauche est bien à sa place et bien dans son rôle dans le travail qu'elle accomplit. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Dominique Braye. Qu'elle y reste !
M. René-Pierre Signé. Oui, elle est à sa place et elle y reste !
M. Jean Chérioux. Quel mélange !
Mme Nelly Olin. Ce n'est pourtant pas vous qui montrez l'exemple !
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, une discussion prématurée, sur un texte juridiquement inepte, au moment même où un groupe de travail est chargé, à la chancellerie, de proposer une réforme générale du droit de la famille. Tel est le paradoxe auquel nous nous heurtons aujourd'hui, mais le Gouvernement ne m'apparaît pas à un paradoxe près !
Les initiateurs du texte font valoir que celui-ci est « attendu avec impatience » par cinq millions de personnes. Il apparaît en fait, et je cite ici le remarquable rapport de notre collègue M. Gélard, que « cette impatience est surtout perceptible au sein d'une partie de la communauté homosexuelle dont la revendication de reconnaissance a été relayée depuis 1990 par des initiatives parlementaires ». M. Mélenchon vient d'y faire référence.
Cette précipitation a donné naissance à un monstre juridique qui met en péril le mariage, institution de référence, ainsi que l'union libre et qui ne protégera pas davantage les homosexuels qu'il entend aider.
Cette proposition de loi met en place un statut non protecteur du plus faible...
M. Jean Chérioux. Eh oui !
M. Alain Vasselle. ... puisque le PACS engage peu et ne donne aucune garantie. En effet, les devoirs qu'il implique se limitent à un aspect purement matériel, comme l'indique le rapport Gélard que je me permets de citer à nouveau : « En cas de rupture, aucune protection n'est accordée au plus faible. La rupture est possible unilatéralement à tout moment sans intervention du juge »...
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas un mariage !
M. Alain Vasselle. ... sauf vraisemblablement pour le partenaire délaissé la possibilité d'obtenir des dommages et intérêts pour rupture abusive de contrat. »
Ce texte laisse, en outre, sur le bord ceux qui ne veulent pas de PACS, de contrat.
Il n'est, bien sûr, pas question de négliger des situations de fait qui marquent aujourd'hui l'évolution de notre société ; il ne s'agit pas pour autant de tomber dans un débat opposant dogmatisme et empirisme. La multiplication des unions de fait est une donnée indiscutable : la dernière enquête de l'INSEE fait état de 2,4 millions de couples non mariés. Mais le mariage demeure encore la référence, puisque l'on dénombre 12,3 millions de couples mariés ; il est absolument nécessaire de préserver cette institution.
Le législateur n'a plus, à l'égard du concubinage, cette réticence qui le caractérisait jadis : « Les concubins ignorent la loi, proclamait Napoléon, la loi les ignore ! » Si le concubinage n'était, dans le passé, qu'une situation de fait non génératrice de droits, les choses ont changé depuis.
Certes, il était nécessaire d'améliorer le système, car notre droit civil comporte encore certains archaïsmes ; mais la solution ne peut être trouvée par la mise en place d'un statut hybride entre le mariage et l'union libre.
Certains ajustements fiscaux, financiers, contractuels, patrimoniaux ou successoraux semblent nécessaires. Cependant, ces ajustements ne seront pas réalisés par le système juridiquement inapplicable que représente le PACS. Sur ce point, les dispositions que propose la commission des lois constituent une alternative que nous pourrions considérer comme acceptable.
La commission propose une définition du concubinage qui devrait permettre de surmonter la jurisprudence de la Cour de cassation du 11 juillet 1989, récemment confirmée le 17 décembre 1997.
Je me félicite tout particulièrement de la définition claire que la commission propose du mariage, mettant ainsi un terme à une curiosité juridique du code civil.
Cette définition du mariage comme « l'union d'un homme et d'une femme célébrée par un officier de l'état civil »...
M. Claude Estier. Quelle découverte !
M. Alain Vasselle. ... permet de le distinguer de l'union libre et de marquer son caractère d'institution car, comme le souligne Irène Théry, « le mariage n'est pas un simple outil de gestion du couple, mais une institution de l'ordre symbolique dans lequel se différencient les sexes et les générations. »
Le PACS est dangereux, car il ne remplit pas les conditions du Préambule de la Constitution de 1946, dont le dixième alinéa impose à la nation d'assurer « à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». C'est à ce principe qu'il est porté atteinte aujourd'hui.
M. Jean Chérioux. Tout à fait !
M. Alain Vasselle. Le souci légitime de trouver des solutions aux difficultés rencontrées par des individus non mariés et le respect de la liberté des personnes constituent certes une préoccupation à ne pas négliger, mais ils ne justifient pas une mise en cause de l'institution du mariage, fondement juridique de la famille.
Si l'Etat est amené à valoriser et à institutionnaliser les couples mariés, c'est uniquement parce que le couple marié est potentiellement créateur d'enfants.
A ce propos, comme le soulignait Ernest Renan : « aucune civilisation n'a été bâtie par des personnes seules nées de parents inconnus et morts célibataires ».
La famille est le socle de la société. Elle reste le niveau le plus épanouissant et structurant pour le développement de l'enfant. Parce que la famille est la promesse de survie d'une société, il semble indispensable de le revaloriser en prenant le soin de na pas y porter atteinte et, surtout, de la privilégier.
Pensons à l'enfant, comme l'a très justement dit notre collègue Louis de Broissia, à son équilibre et à son avenir. C'est lui qui devrait être au coeur de nos préoccupations et non pas la recherche d'un statut donnant du confort à des individus plus animés par leur égocentrisme que par l'abnégation de soi-même au profit du bonheur et de l'épanouissement de la famille. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
La responsabilité d'une société est d'assurer la transmission de la vie de génération en génération. Cette transmission ne peut se faire que par les couples hétérosexuels.
A ce niveau, on ne peut que déplorer la non-politique familiale du Gouvernement.
Les effets induits de cette proposition de loi sur la politique familiale n'ont pas été mesurés, je m'en étais inquiété au moment de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale au sein de la commission des affaires sociales.
Quel sera le coût financier de ce dispositif pour l'ensemble des contribuables ?
Il aurait mieux valu poursuivre les réformes engagées par le gouvernement Juppé,...
M. Louis de Broissia. Ça, c'est vrai !
M. Robert Bret. On a vu le résultat !
M. Alain Vasselle. ... que vous avez interrompues,...
Un sénateur socialiste. Non ! Ce sont les élections !
M. Alain Vasselle. ... en mettant en oeuvre la suppression de la décote et l'allégement du barème de l'impôt sur le revenu, en vue de rendre le mariage fiscalement plus attractif pour les bas revenus.
Je remercie notre collègue Philippe Marini d'y avoir veillé.
M. René-Pierre Signé. Il y a eu des élections, non ?
M. Alain Vasselle. Les mesures fiscales prises en faveur du concubinage ne doivent en aucun cas être plus attractives que celles qui sont réservées à la famille.
C'est l'institution familiale que nous devons privilégier, et je regrette, une nouvelle fois, les mesures prises lors de la dernière loi de finances et abaissant le plafond du quotient familial dans un but purement comptable.
Ainsi, avec cette proposition de loi, le Gouvernement confirme une politique familiale en trompe-l'oeil, qui consiste essentiellement à reprendre d'une main ce qu'il donne de l'autre. Cette proposition, en fragilisant l'institution familiale, fragilise notre pays.
Mais en définitive, mes chers collègues, pourquoi s'en étonner ? En effet, l'oeuvre destructrice de ce gouvernement est en route depuis 1997, sous des apparences trompeuses, dont l'effet séducteur en première approche tombera dans quelque temps, quand les Françaises et les Français en prendront conscience.
Espérons qu'il ne sera pas trop tard pour notre pays, car les mesures nécessaires qu'imposera la situation seront encore plus douloureuses que celles qu'il a fallu mettre en oeuvre en 1986 et 1993. (Applaudissements sur les bancs du RPR.)
M. Claude Estier. Ce gouvernement a été voulu par les Français !
M. Alain Vasselle. Oui, mais nous en reparlerons, monsieur Estier !
M. Jean Chérioux. Le suivant aussi sera voulu par les Français !
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues.
Veuillez poursuivre, monsieur Vasselle.
M. Claude Estier. Il y a tout de même des choses qu'on ne peut pas laisser dire !
M. Alain Vasselle. Mes chers collègues, le Gouvernement n'avait-il pas mieux à faire que de légiférer sur des questions de société, alors que le chômage n'est pas enrayé structurellement, que l'insécurité règne encore dans nos banlieues,...
Mme Nelly Olin. Bravo !
M. Alain Vasselle. ... et que nos jeunes manquent de repères pour leur avenir ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Je conclurai en affirmant : le mariage, oui, le PACS, non ! Rejetons-le, car les Français et les Françaises, à une large majorité, n'en veulent pas. (Applaudissements sur les mêmes travées du RPR.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Travail, famille, patrie !
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il a assez parlé de son banc !
M. Dominique Braye. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, trois mois après l'adoption de cette proposition de loi sur le pacte civil de solidarité dans les conditions que nous connaissons, il revient donc maintenant au Sénat d'en débattre.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est original !
M. Dominique Braye. Ainsi, l'occasion nous est donnée de démontrer, une nouvelle fois, l'importance et l'intérêt de notre assemblée dans la vie nationale, car, sur le PACS peut-être plus que sur tout autre texte, la réflexion du Sénat est bienvenue.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Sauf quand il y a une question préalable !
M. Dominique Braye. En effet, c'est dans la précipitation la plus totale que l'Assemblée nationale a voté un texte dangereux dans ses principes - j'y reviendrai -... (Protestations sur les travées socialistes.)
Mme Danièle Pourtaud. Quelle précipitation ?
M. Dominique Braye... mais aussi mal ficelé et source d'importantes difficultés pratiques et juridiques.
M. Claude Estier. C'est n'importe quoi !
M. Dominique Braye. Je sais que cela vous a beaucoup dérangé, et tout le monde, toute la nation,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Demandez à Mme Boutin, qui assiste à nos débats dans les tribunes, ce qu'elle en pense !
M. Dominique Braye. Et tout cela parce que, comme trop souvent, la majorité actuelle de l'Assemblée nationale n'a cherché à atteindre qu'un seul but : l'affichage politique, l'effet d'annonce, sans jamais se soucier des conséquences juridiques des textes adoptés.
M. Jean-Chérioux. Très bien !
M. Dominique Braye. Pour le PACS, l'objectif était clair, comme l'ont d'ailleurs reconnu les sénateurs socialistes membres de la commission des lois la semaine dernière il s'agissait : d'abord et avant tout d'un texte politique...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Que faites-vous toute la journée ? Ne faites-vous pas de politique ?
M. Robert Bret. Qu'êtes-vous en train de faire ?
M. Dominique Braye. ... visant à légitimer socialement l'homosexualité au nom du progrès et de l'évolution des moeurs. (M. Dreyfus-Schmidt clame son approbation.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Oui !
M. Dominique Braye. Monsieur le juge, permettez-moi de continuer.
M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, s'il vous plaît, laissez parler l'orateur.
M. Louis de Broissia. Cela les vexe beaucoup !
M. Jean Chérioux. Ils sont gênés !
M. le président. Poursuivez, monsieur Braye, et vous seul !
M. Dominique Braye. Je répète : pour les sénateurs socialistes, il s'agissait d'abord et avant tout... (M. Dreyfus-Schmit s'exclame de nouveau)... d'un texte politique visant à légitimer socialement l'homosexualité au nom du progrès et de l'évolution des moeurs.
M. Jean-Luc Mélenchon. Oui !
M. Dominique Braye. Ceux qui s'y opposeraient seraient inévitablement taxés de ringards, voire d'intégristes.
M. Jean-Luc Mélenchon. Absolument !
M. Louis de Broissia. C'est d'ailleurs ce qu'a dit M. Mélenchon !
M. Jean Chérioux. Ils sont contre le mariage républicain !
M. Dominique Braye. Je veux donc saluer ici le travail remarquable du Sénat, qui a refusé de céder à cette vision manichéenne, qui a pris le temps de la réflexion, ce qui, vous en conviendrez, était la moindre des choses pour un sujet de société d'une telle importance.
Ici donc, point de débat tronqué, étouffé, mais, au contraire, le temps laissé à la réflexion,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est vous qui l'étouffez sans arrêt en hurlant ! (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Louis de Broissia. Apportez un verre d'eau à M. Dreyfus-Schmidt !
M. Dominique Braye. ... le temps laissé au débat, avec une très large série d'auditions de personnalités de tous bords et de tous horizons voulues par notre commission des lois, ce qui, vous le savez, n'a pas été le fait de son homologue de l'Assemblée nationale.
M. Jean Chérioux. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Claude Estier. Mme Boutin a parlé pendant cinq heures !
M. Dominique Braye. Je parle de la commission des lois !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et vous, vous braillez sans arrêt !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. N'interrompez pas l'orateur !
M. Dominique Braye. C'est l'hôpital qui se fiche de la charité, mon cher collègue !
M. le président. Sur ces considérations hospitalières et caritatives, poursuivez, mon cher collègue !
M. Dominique Braye. Ici, à la différence de ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale, il y a eu la volonté de dépasser les vaines querelles, les attaques excessives,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela vous va bien !
M. Claude Estier. Vous pouvez parler !
M. Dominique Braye. ... les polémiques, pour arriver enfin à un débat apaisé, qui ne serait plus réduit...
M. René-Pierre Signé. C'est nul !
M. Dominique Braye. ... à une alternative réductrice : pour ou contre le PACS, c'est-à-dire favorable ou hostile aux couples homosexuels.
C'est tout à l'honneur de notre assemblée d'être sortie de ce piège, en allant plus loin que le simple rejet de ce texte.
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous n'en êtes pas encore sorti !
M. Dominique Braye. C'est tout à l'honneur de la commission des lois, en particulier de son rapporteur, M. Gélard,...
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Dominique Braye. ... d'avoir proposé des solutions permettant de régler les situations concrètes dans un cadre de solidarité, sans menacer l'institution familiale ni le mariage républicain.
M. Jean Chérioux. C'est bien ça qui les gêne !
M. Dominique Braye. Car tel est bien le premier danger du PACS... (Brouhaha sur les travées socialistes.)
M. le président. Poursuivez, monsieur Braye.
M. Dominique Braye. Car tel est bien le premier danger du PACS : porter atteinte à l'institution du mariage (Très bien ! et vives marques d'approbation sur les travées du RPR),...
M. Michel Dreyfus-Schmitt. Laissez parler M. Braye !
M. Claude Estier. Oui, laissez-le parler ! (Sourires sur les travées socialistes.)
M. Louis de Broissia. Pourquoi braillent-ils ainsi ?
M. Dominique Braye. ... en proposant un contrat qui offrirait des droits quasiment identiques en contrepartie d'obligations minimales.
Le PACS implique en effet des devoirs bien moins importants que ceux qui sont nés du mariage.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela n'a rien à voir !
M. Dominique Braye. Il se limite à un aspect purement matériel, l'aide mutuelle et matérielle, les modalités de cette aide pouvant d'ailleurs être très différentes d'un PACS à l'autre.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous n'avez rien compris !
M. Dominique Braye. J'ai été rapporteur du texte sur les pitbulls, j'avoue que je ne pensais pas en trouver au sein de notre assemblée ! (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste. - Protestations sur les travées socialistes.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Oh !
M. Claude Estier. Ça vous va bien, monsieur Braye, de parler de pitbulls !
M. Alain Vasselle. Un peu de sérénité !
M. le président. Oui, un peu de sérénité.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Là, c'est l'hôpital qui se moque de la charité !
M. Dominique Braye. Le PACS, disais-je, implique des devoirs bien moins importants que ceux qui sont nés du mariage. Il se limite à un aspect purement matériel, l'aide mutuelle et matérielle, les modalités de cette aide pouvant d'ailleurs être différentes...
M. Guy Allouche. Mon cher collègue, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Dominique Braye. Je vous en prie, monsieur Allouche. Peut-être ferez-vous revenir la sérénité au sein de votre groupe !
M. le président. La parole est à M. Allouche, avec l'autorisation de l'orateur.
M. Guy Allouche. Monsieur Braye, je suis de ceux qui revendiquent la liberté, pour un opposant, de dire ce qu'il a envie de dire, et je comprends mes amis et collègues qui protestent quand vous interrompez sans cesse de votre place.
Mais, en la circonstance, je ne peux pas vous laisser dire que, parce que nous protestons, nous sommes des pitbulls. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
Je vous demande donc de retirer votre propos ou, au moins, de présenter des excuses à ceux de nos collègues qui ont pu se sentir visés par cette remarque. (Applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Braye.
M. Dominique Braye. J'ai dit que j'avais été le rapporteur de la loi relative aux pitbulls et que je ne pensais pas trouver des faciès équivalents à ceux de ces chiens de banlieue. (Vives protestations sur les travées socialistes.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Regardez-vous !
M. Jean-Luc Mélenchon. Il persiste et signe !
M. Dominique Braye. Que ceux qui manifestement se sentent visés veuillent bien se désigner, auquel cas je pourrai prononcer des excuses.
M. le président. Nous pouvons considérer que l'incident est clos.
M. Guy Allouche. Non ! Il a même été aggravé, et, en guise de protestation, nous sortons. (Mmes et MM. les sénateurs socialistes quittent l'hémicycle.)
M. Dominique Braye. Nous allons pouvoir poursuivre dans la sérénité !
Les devoirs du PACS - j'y reviens - se limitent à un aspect purement matériel : l'aide mutuelle et matérielle, les modalités de cette aide pouvant d'ailleurs être très différentes d'un PACS à l'autre puisque fixées par le pacte lui-même. La vie commune, par exemple, ne semble pas exiger, comme pour les époux, une communauté de vie impliquant le choix d'une résidence commune.
Rien n'est prévu non plus concernant les devoirs des partenaires à l'égard de leurs enfants, alors que ce contrat est ouvert à des couples susceptibles de procréer.
En cas de rupture, enfin, aucune protection n'est accordée au plus faible puisque la rupture est possible unilatéralement, à tout moment, et sans intervention du juge.
Rien que pour cela, mes chers collègues, le PACS méritait d'être combattu, parce que le mariage demeure et doit demeurer, surtout en période de crise, la structure la plus protectrice pour les deux conjoints et pour les enfants qui en sont issus.
Mme Nelly Olin. Très bien !
M. Dominique Braye. C'est un facteur de stabilité pour la société, et le législateur se doit de la protéger.
Il est donc impensable d'institutionnaliser et de mettre sur un pied d'égalité toutes les formes de vie affective.
Si l'Etat s'intéresse aux couples mariés, c'est non pas parce qu'ils entretiennent des relations affectives et sentimentales, mais parce qu'ils ont vocation à devenir parents.
Au travers du mariage, ce sont donc les enfants qu'il veut aider, et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle l'Etat intervient également lors de la naissance d'enfants dans des couples de concubins. Les droits accordés à tous les couples avec enfants sont la compensation de charges de famille.
L'Etat ne réglemente donc pas arbitrairement et inégalement les rapports relevant de la sphère privée. Il se préoccupe simplement de la pérennité de la société, notamment par le biais de la politique familiale.
Le rapport de M. Patrice Gélard rappelle heureusement le dixième alinéa du préambule de la Constitution actuelle : « La nation doit assurer à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. »
Quelle pourrait être la justification d'un tel contrat dans le cas de couples homosexuels ? Quelle serait la contrepartie attendue par la société ? Aucune, dès lors qu'il n'y a pas d'enfant.
Je le redis, si la société s'intéresse aux couples hétérosexuels, c'est toujours en raison de l'enfant qu'ils peuvent porter, car il y va de son intérêt vital.
Dans le cas de l'homosexualité, ce contrat social devient impossible, sauf à céder à la revendication ultime des mouvements qui sont à l'origine du contrat d'union sociale puis du PACS, c'est-à-dire l'accès égalitaire des homosexuels au droit à l'adoption et aux techniques d'assistance médicale à la procréation.
Alors là, le débat change de nature. Il ne s'agit plus uniquement de légitimer socialement l'homosexualité. Nous changeons radicalement de société.
M. Alain Vasselle. C'est exact !
M. Dominique Braye. C'est le droit à l'enfant qui prendrait alors le pas sur les droits de l'enfant. (MM. de Broissia et Vasselle applaudissent.)
Or, pour l'instant, notre société a le devoir de protéger l'enfant. Et les travaux des pédiatres et des psychologues montrent tous que celui-ci a besoin, pour son épanouissement, de la double référence que représentent les deux parents de sexe opposé.
Il n'y a qu'à voir, aujourd'hui, les ravages des relations monoparentales, de l'absence du père ou des divorces sur la psychologie des adolescents pour ne pas vouloir créer de nouveaux problèmes en validant comme modèle social des situations qui s'écartent de tous les modèles naturels de l'anthropologie.
Voilà donc la double justification du refus de ce pacte civil de solidarité.
Ce que nous disons, c'est « non » à un sous-mariage, qui, en plus, serait la première étape vers le droit pour des couples non hétérosexuels, qui trouveraient là le seul moyen de satisfaire leur envie, d'être, à terme, parents et d'élever des enfants.
Mais ce que nous disons aussi, c'est « oui » à l'application aux couples homosexuels qui le désirent des règles existantes pour les couples hétérosexuels non mariés.
Car nous ne nions pas qu'il existe aujourd'hui des situations juridiques insatisfaisantes pour de nombreux couples vivant hors mariage, qu'ils soient d'ailleurs homosexuels ou hétérosexuels.
Voilà pourquoi je suis tout à fait favorable à la proposition de la commission des lois de transférer le droit au bail au partenaire survivant en cas de décès du titulaire du bail, comme je suis favorable à l'adoption de mesures fiscales et successorales spécifiques, ou encore à l'assimilation des partenaires à des personnes mariées pour ce qui concerne le droit à un congé en cas de décès du partenaire, ou même pour le choix des dates de congés payés.
En revanche, mes chers collègues, je trouve qu'il est extrêmement choquant d'envisager, par l'intermédiaire de l'imposition commune, de permettre à des partenaires de bénéficier du quotient conjugal, dont l'avantage fiscal n'est pas plafonné, alors que le Gouvernement n'a pas hésité, dans la loi de finances pour 1999, à diminuer, à hauteur de 4,5 milliards de francs, les avantages en faveur des familles, notamment en baissant le plafond de l'avantage procuré par un enfant à charge.
Mais toutes ces revendications, pour certaines parfaitement légitimes, auraient très bien pu être satisfaites dans une loi de finances, ou dans une loi portant diverses mesures d'ordre social, comme ce fut le cas en 1993, lorsque le législateur accorda au concubin homosexuel de l'assuré social la qualité d'ayant droit pour l'assurance maladie en tant que personne à charge.
La reconnaissance de ces nouveaux droits était d'ailleurs préconisée dans deux rapports qui vous ont été transmis, madame le ministre, l'un de Irène Théry sur l'extension des droits sociaux à tous les concubins, même homosexuels, l'autre du professeur Jean Hauser, qui s'attachait plutôt aux problèmes patrimoniaux.
Cette approche présentait tous les avantages. Elle réglait les problèmes pratiques et les discriminations dans l'accès aux droits sociaux, sans pour autant apporter une réponse idéologique, symbolique.
En effet, une chose est de permettre à des personnes qui ne peuvent pas se marier de vivre ensemble et en sécurité juridique - nous reconnaissons tous aujourd'hui que ces personnes ont droit à la dignité et à la considération - mais une autre est de jouer de la force symbolique de la loi pour institutionnaliser une assimilation des couples homosexuels aux couples hétérosexuels.
Madame le ministre, les couples hétérosexuels ont fait le monde et continuent à le forger par l'acte de nature, le plus beau qui soit : la procéation. De cela, il convient de se souvenir, mes chers collègues, les pieds campés sur terre et la tête suivant le fil législatif qui en découle.
C'est en tout cas ce que la majorité sénatoriale entend faire aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Mes chers collègues, nos débats ont été vifs. Mais je pense que, selon la tradition du Sénat, aucun des orateurs n'a souhaité porter atteinte ni à la dignité de la Haute Assemblée ni à celle de l'un d'entre nous.
Je vous invite, toutefois, mes chers collègues, à faire preuve de tolérance mutuelle dans la suite de nos débats. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je souhaitais intervenir dans le sens des propos que vous venez de tenir à l'instant même, monsieur le président.
Je m'étonne d'avoir été interrompu hier par la présidence alors que je n'avais pas épuisé mon temps de parole. Je déplore cette attitude, qui ne me paraît conforme ni aux pratiques de notre assemblée, ni à la lettre de notre règlement.
Ayant entendu M. Allouche protester tout à l'heure contre un propos qui était tenu par M. Braye, je voudrais très cordialement lui faire remarquer que, si l'on veut que la sérénité règne dans les débats, il vaut mieux respecter les règles formelles auxquelles nous sommes tous astreints.
M. Louis de Broissia. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia. Madame le ministre, moi qui ai appartenu à une autre assemblée, j'ai été quelque peu choqué de constater que, chaque fois qu'un membre de la majorité sénatoriale intervenait, on montrait de façon un peu ostentatoire au banc du Gouvernement que ses propos n'intéressaient pas, alors que chaque fois qu'un membre de l'opposition sénatoriale prenait la parole, on l'écoutait avec intérêt !
J'aimerais que, dans la suite des débats, l'indifférence marquée à l'égard de nos propos ne soit plus aussi ostensible. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'attention, cela se mérite ! (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Louis de Broissia. Ce n'est pas bien ce que vous dites là, monsieur Dreyfus-Schmidt.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d'abord dire à M. de Broissia que j'ai écouté avec beaucoup d'attention M. de Montesquiou,...
M. Aymeri de Montesquiou. Je suis votre serviteur !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... qui m'a paru présenter ses arguments de façon modérée.
Cela dit, il est vrai que je préfère quelquefois, vis-à-vis d'autres orateurs, ne pas nécessairement accorder une attention assidue à telle ou telle remarque.
Croyez bien cependant que j'entends tout.
Je vais d'ailleurs, sans revenir sur l'ensemble des arguments qui ont été longuement développés par les uns et par les autres, vous faire maintenant part de quelques remarques que m'ont inspirées les orateurs qui se sont exprimés depuis hier.
M. René-Pierre Sigué. Ce n'était pas brillant !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. D'abord, je suis frappée par le réel refus de certains de regarder en face la réalité du PACS.
Il est vrai, mesdames, messieurs les sénateurs, que nombre d'entre vous jouent les coqs de bruyère et veulent être sourds et aveugles face à la réalité du PACS. (Approbations sur les travées socialistes.)
La réalité du PACS, c'est la reconnaissance des liens matériels et affectifs pour l'ensemble des couples qui ne sont pas mariés, qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels, Bertrand Delanoë nous l'a rappelé à juste titre hier, avec beaucoup de pudeur et d'émotion.
Le PACS intéresse ceux qui veulent être reconnus par un statut.
Cela dit, les concubins qui ne veulent être encadrés par aucun statut juridique restent évidemment libres de ne pas l'être.
Le PACS offre la possibilité à ceux des concubins, hétérosexuels ou homosexuels - je le dis une fois encore - qui veulent cette reconnaissance de leurs liens affectifs, de leur amour, de leur tendresse, de leur engagement matériel et moral, de l'obtenir.
Tel est le premier point.
Autre réalité du PACS : ce statut apporte plus de droits - mais il impose aussi des obligations - que ceux qui sont actuellement reconnus aux couples de concubins hétérosexuels.
Je vais brièvement dresser la liste des apports du PACS, parce que ces apports ont été contestés par plusieurs orateurs.
Tout d'abord, on pourra faire la preuve de ce pacte, puisque celui-ci est enregistré. Un nouveau statut existe et il peut être prouvé à l'égard des tiers.
Ensuite, ce pacte engage ses membres à la solidarité pour les dettes.
Par ailleurs, les partenaires ont obligation de contribuer aux charges de la vie commune.
Le PACS ouvre aussi la possibilité aux partenaires de bénéficier de l'attribution préférentielle pour certains biens, dont le logement. Voilà un « plus » extrêmement important par rapport à ce que la jurisprudence et le droit reconnaissent aujourd'hui aux concubins uniquement hétérosexuels.
Le PACS accorde également les droits suivants : l'impossibilité de rompre sans informer l'autre, l'imposition commune après délai, des abattements fiscaux et des droits d'enregistrement inférieurs, le rapprochement professionnel dans la fonction publique, des périodes de congés payés et de congés pour événements affectifs ou familiaux.
Le PACS apporte donc un « plus » et certaines de ses dispositions, croyez-moi, intéresseront des concubins hétérosexuels qui souhaiteront voir leur statut reconnu.
Il me semble, par ailleurs - ce sera ma deuxième observation - que les critiques que j'ai entendues ici ne portent pas sur la réalité du PACS et qu'il s'agissait en fait de critiques virtuelles.
En effet, le PACS ne porte pas atteinte au mariage. Il est absolument neutre par rapport au mariage et à la famille. Or, tout d'un coup, 200 ans après que Portalis, qui nous regarde, je crois, avec une certaine ironie, a rédigé le code civil et défini ce qu'était le mariage, on s'avise qu'il faut définir le mariage dans le code civil, alors que ledit code n'est fondé que sur le mariage !
M. Jean Chérioux. C'est vous que Portalis regarde avec ironie !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. J'ai beaucoup de respect pour Portalis et je constate - voyez sa statue ! - qu'il vous regarde, vous, en particulier, messieurs de la majorité sénatoriale, parce qu'il a les yeux fixés de ce côté-ci de l'hémicycle. (Sourires et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Alain Vasselle. Il ne regarde pas seulement de ce côté-ci !
M. Jean Chérioux. En fait, il se voile la face ! (Nouveaux sourires.)
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le PACS ne porte en aucune façon atteinte au mariage et à la famille, disais-je, et il n'a aucune conséquence sur les législations concernant la procréation médicalement assistée ou l'adoption.
Par ailleurs, puisque je me suis exprimée très en détail sur la famille devant l'Assemblée nationale et que cela ne me gêne en aucun cas de me répéter, je redis que, oui, un enfant a le droit d'avoir un père et une mère.
M. Alain Vasselle. Il ne manquerait plus qu'il en soit autrement !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement n'acceptera jamais qu'un couple homosexuel puisse avoir le droit d'adopter, en tant que tel, des enfants.
Un enfant a droit à son père et à sa mère, disais-je. L'autorité parentale, comme la responsabilité parentale, doit s'exercer à l'égard des enfants de la part des deux parents.
A ce point du débat, je vous poserai donc deux questions, messieurs de la majorité du Sénat.
S'il était si urgent de légiférer sur la famille, pourquoi ne l'avez-vous pas fait lorsque vous en aviez le pouvoir ? (M. Chérioux proteste vivement.)
M. Louis de Broissia. Parce que nous avons été interrompus !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Ensuite, messieurs de la majorité sénatoriale, comment se fait-il que, lorsque la loi de 1993 a prévu que l'autorité parentale devait être exercée par les deux parents, vous ayez posé une condition restrictive, celle qui consistait à préciser qu'il fallait, pour que ce soit le cas, que les deux parents aient vécu ensemble pendant au moins un an ? (Applaudissements sur les travées socialistes. - Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Faux !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Ne croyez-vous pas que, c'est justement là une négation du droit des enfants à avoir leur deux parents, quelle que soit la situation juridique du couple que forment ces parents ? (Applaudissements sur les mêmes travées. - M. Chérioux proteste énergiquement.)
M. le président. S'il vous plaît, monsieur Chérioux ! La parole est à Mme le ministre.
M. Louis de Broissia. Ce ne sont pas des parents de passage que nous voulons !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Les parents sont des parents ! (Applaudissements sur les través socialistes.)
Je relève enfin qu'en réalité la majorité sénatoriale ne veut pas du PACS. Selon elle - nous l'avons entendu ! - le PACS est inutile. Or j'ai démontré ce qu'il apportait, et je n'y reviendrai pas, par rapport à la situation des concubins.
M. Gélard, pour contourner avec habilité cette difficulté, propose une définition du concubinage. Mais, en même temps, il refuse de manifester clairement que nous rejetons désormais toute discrimination à l'encontre des concubins homosexuels.
Si l'idée est d'inscrire dans la loi, parce que l'on n'a pas suffisamment confiance dans l'évolution possible de la jurisprudence de la Cour de cassation après l'instauration du PACS, qu'il ne doit plus y avoir de discrimination, alors, écrivons-le clairement et nettement ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
Le PACS serait, selon vous, dangereux. Mais je viens de dire en quoi il n'a aucune conséquence sur le mariage et sur la famille, et en quoi il apporte au contraire un « plus », à savoir de la solidarité.
A cet égard, je voudrais répondre à M. de Montesquiou, dont j'ai écouté l'exposé très attentivement et avec beaucoup d'intérêt, comme toujours.
Comme je lui faisais remarquer qu'il avait axé son intervention sur le mariage et la famille alors que ce n'est pas le sujet, il m'a répondu : « Si, parce que tout ce qui n'est pas interdit est permis. » Permettez-moi, monsieur de Montesquiou, de vous rappeler que, s'agissant de l'adoption et de la procréation médicalement assistée, le code civil ne procède pas ainsi. Il procède par affirmations positives. Il dit qui et dans quelles conditions a le droit d'adopter des enfants ; mais il n'interdit rien. Je vous conseille, à ce propos, de revoir l'article 343 du code civil.
Bref, le Sénat refuse de voir la réalité du PACS, qui apporte plus que le concubinage et qui ne menace ni la famille ni le mariage.
La majorité sénatoriale refuse le principe même du PACS et, ce faisant, fait obstruction au PACS.
Certes, une obstruction plus habile que celle de l'Assemblée nationale, plus en finesse, dirai-je. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. C'est gentil !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Mais, finalement, cette obstruction ressemble tout de même à une finasserie... (Oh ! sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Très réfléchie !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... et à une ruse, pour éviter d'avoir à affronter les vrais problèmes ! (Applaudissements sur les travées socialistes. - Exclamations sur les travées du RPR.)
Je terminerai en remerciant les orateurs des groupes de gauche, qui ont apporté leur soutien à cette démarche progressiste. Je les remercie aussi d'avoir poursuivi la réflexion en proposant des amendements au texte adopté par l'Assemblée nationale, preuve que c'était possible. Je veillerai à ce que ces propositions soient examinées lors de la nouvelle lecture de cette proposition de loi à l'Assemblée nationale.
Le Gouvernement accueillera avec bienveillance tout ce qui permettra de mettre fin aux discriminations entre couples homosexuels et couples hétérosexuels, et il fera sienne toute proposition visant à améliorer ce texte, car loin de lui l'idée qu'après une première lecture à l'Assemblée nationale cette proposition de loi ne mérite pas d'être améliorée. Je regrette que la majorité sénatoriale n'ait pas voulu s'engager dans cette voie ! (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean Chérioux. Vous n'avez pas écouté ! Vous avez passé votre temps à écrire !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Madame la ministre, madame le garde des sceaux, je dois dire que, une fois de plus - et c'est l'habitude - votre propos m'a vivement intéressé, car tout au long de votre intervention nous avons senti une contradiction.
Vous êtes très gênée d'être obligée de reconnaître l'habileté du Sénat et, forçant un peu vos propos, de reconnaître que, sans le moindre esprit de discrimination, nous avons voulu résoudre les problèmes sans pour autant porter atteinte aux principes. Vous ne l'avez pas dit clairement, mais vous êtes bien obligée de le reconnaitre. Vous vous attendiez, ainsi que mon ami Patrice Gélard l'a excellement expliqué, à une manifestation supplémentaire de ringardise ! Je m'interroge sur le point de savoir de quel côté, pour l'instant, la ringardise se situe... (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.
Ayant entendu nos suggestions, excellemment exposées par nos rapporteurs, vous êtes bien obligée, en outre, de reconnaître au fond de vous-même - car nous connaissons votre honnêteté intellectuelle - que nous avons résolu des problèmes.
Mais il y a derrière vous ce fameux vote de l'Assemblée nationale quelque peu... aux forceps - j'hésitais à employer l'expression. En effet, dans un premier temps, la moitié du groupe socialiste n'était pas présente - on se demande pourquoi - et, dans un second temps, le groupe s'est finalement rassemblé dans les conditions que nous connaissons, et la pression de ce lobby auquel vous croyez devoir obéir a pu se manifester pleinement.
Madame la ministre, pour l'instant, vous avez la majorité, c'est un fait. Pour combien de temps ? Nous n'en savons rien. Vous pouvez donc faire ce que vous voulez. Contrairement à ce que vous avez dit, nous savons très bien que, quelle que soit la qualité des observations que nous vous avons présentées, vous n'en tiendrez aucun compte.
Alors, je vous mets en garde.
Une majorité peut juridiquement tout faire. Mais, dans un certain nombre de cas, lorsqu'elle impose à un pays des dispositions qui vont à l'encontre de principes fondamentaux de la société auxquels nous tenons, attention au choc en retour !
M. René-Pierre Signé. Des menaces ?
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. C'est ainsi que vous avez cru pouvoir imposer, dans les matières qui sont traitées au sein de ce gouvernement - mais tant d'autres sont laissées de côté que l'on ne sait plus très bien à quoi vous vous attachez - un certain nombre de choses, et vous avez réussi ! Mais s'agissant de ce texte, vous avez dépassé les bornes ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, et sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. Louis de Broissia. Cela fait longtemps qu'elles sont franchies !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Vous parviendrez à faire adopter cette proposition de loi, nous le savons, par une majorité qui vous obéit parce qu'elle n'ose pas vous désobéir ! (M. Claude Estier s'insurge.)
Monsieur Estier, interrogez la moitié de députés socialistes qui n'est pas venue voter !
M. Claude Estier. C'est blessant pour les députés, ce que vous dites là !
M. Jean Chérioux. C'est pourtant la vérité !
M. Dominique Braye. La vérité vous dérange !
M. Michel Caldaguès. Oui, ça les dérange !
Mme Nelly Olin. Les familles s'en souviendront !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Demandez à ces députés pourquoi ils ne sont pas venus voter ! (Vives protestations sur les travées socialistes.)
M. Claude Estier. Vous assistez toujours à tous les débats, vous ?
M. le président. Poursuivez, monsieur le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Sur ce point, vous êtes gênés, je le sais bien, tout comme Mme le garde des sceaux est gênée par la qualité du travail que nous avons présenté !
M. Claude Estier. Pas du tout !
M. René-Pierre Signé. C'est honteux ce que vous dites !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. De plus, elle sait très bien que nos propositions correspondent aux voeux de la société et que nous sommes parvenus à résoudre des problèmes concrets sans porter atteinte aux principes.
Vous voulez aller plus loin ? Eh bien, faites-le, et nous verrons quel sera le résultat final ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou. garde des sceaux. Monsieur le président de la commission des lois, bien entendu, c'est votre droit de ne pas approuver le PACS et de vouloir le refuser. C'est votre conviction, je la respecte. Mais alors, respectez la mienne ! Je ne peux pas vous laisser dire que je suis gênée ! Je défends un texte auquel je crois. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Vous êtes obligée de le rappeler.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je ne peux pas non plus vous laisser dire que nous subissons des intimidations ! Mais qu'est-ce que cela signifie ?
M. René-Pierre Signé. Ce sont des menaces !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Chacun est libre et responsable !
J'ai dit ce que je pensais de ce texte. Selon moi, il apporte un « plus », et je ne puis admettre qu'on dise que j'ai agi contrainte et forcée. Je suis une femme libre, monsieur le président de la commission des lois ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
Comme vous - je l'ai dit hier et je le répète volontiers aujourd'hui - et bien que la majorité sénatoriale refuse de façon claire et nette le PACS - et vous en avez le droit puisque, ici, vous avez justement la majorité ! - je pense que ce débat aura au moins eu un mérite : celui de faire admettre par certains membres de cette majorité qu'il existe en effet des discriminations à l'égard des couples homosexuels et qu'elles doivent être corrigées, ce que je suis prête à faire.
Si l'on estime que le PACS ne sera pas suffisant pour faire évoluer la jurisprudence de la Cour de cassation, alors écrivons-le dans la loi, mais à condition, je le répète, de trouver une formule très claire et ne prêtant à aucune ambiguïté. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. « Et pourtant elle tourne », disait Copernic.
M. Robert Bret. Il y avait déjà des ringards à l'époque !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est Galilée qui a dit cela, et non Copernic ! Ne vous trompez pas d'auteur !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Effectivement ! C'est de Galilée qu'il s'agit.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est toujours gênant de se tromper sur l'auteur d'une citation !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Madame le ministre, avec beaucoup d'habileté, vous avez repris une définition que l'un de vos prédécesseurs avait utilisée à l'Assemblée nationale et qui lui avait valu à l'époque de nombreuses critiques. « Vous avez, disait-il, juridiquement tort parce que vous êtes politiquement minoritaire. » Vous recommencez aujourd'hui. Mais nous avons juridiquement raison, et vous le savez !
M. Guy Allouche. Non !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Le PACS n'est pas défendable ! Si vous voulez le défendre - et tous les amendements qui ont été déposés vont dans ce sens - vous vous rapprochez du mariage.
En fait, on a assisté à un dialogue de sourds. Vous n'avez pas voulu nous écouter et, pourtant, comme le disait Galilée, la terre tourne ! (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Robert Bret. Quelle découverte !
M. René-Pierre Signé. C'est faible !
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Articles additionnels avant l'article 1er



M. le président.
Par amendement n° 1, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article 9 du code civil est ainsi rédigé :
« Chacun est libre de sa vie personnelle et a droit au respect de sa vie privée et familiale. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. J'ai pensé, tout comme la commission des lois, qu'il était nécessaire de préciser l'article 9 du code civil.
Nous avons d'abord souhaité tenir compte des dispositions de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui sont relatives au respect de la vie privée et familiale.
Nous avons ensuite souhaité aller plus loin - nous l'avons dit tout au long de ce débat - en ne prononçant aucune condamnation. Nous voulons en effet reconnaître à chacun le droit de mener sa vie personnelle comme il l'entend.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Cet article tend à modifier l'article 9 du code civil, qui dispose notamment que « chacun a droit au respect de sa vie privée ».
Cette modification m'apparaît inutile.
La liberté pour chacun de mener sa vie personnelle est une composante de la liberté individuelle proclamée par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. La solennité et la portée générale de ce texte n'imposent pas un rappel dans le code civil.
S'agissant de l'ajout relatif à la vie familiale, je rappelle que la vie privée englobe la vie sentimentale et familiale des personnes. A ce titre, elle est donc déjà protégée par l'article 9 contre les atteintes qu'elle pourrait subir. La jurisprudence a eu l'occasion, à de très nombreuses reprises, de faire application de ce principe.
Même au regard de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, dont l'article 8 assure le respect de la vie privée et familiale de toute personne, la vie familiale ne constitue pas un concept autonome ainsi qu'il résulte clairement de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg.
Je suis donc défavorable à cet amendement n° 1.
M. Robert Badinter. Je demande la parole contre l'amendement n° 1.
M. le président. La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Si j'interviens à ce stade du débat, c'est parce que, ainsi d'ailleurs que je l'ai annoncé à M. le rapporteur, cet amendement n° 1 ne fera que compliquer l'état de notre droit sans rien y ajouter. En effet, M. le rapporteur ne définit pas le concept de vie personnelle... tout simplement parce qu'il est quasi impossible de le définir.
Nous savons tous ce qu'est la vie privée. Je rappelle que le texte actuel de l'article 9 du code civil consacre déjà le principe du droit au respect de la vie privée. Sur ce point, il n'y a donc aucun problème.
Vous voulez ajouter le concept de « vie familiale ». Nous ne nous y opposerions pas si l'amendement n° 1 se résumait à cela, bien que cette notion figure déjà dans la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, convention qui a une valeur supérieure à notre droit interne. Sur ce point, votre amendement n'apporte donc rien de plus, monsieur le rapporteur.
En revanche, le fait d'ajouter : « Chacun est libre de sa vie personnelle » ne fera que créer de la confusion. En effet, si vous entendez par là que chacun d'entre nous peut vivre comme il l'entend, je constate que cela figure dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et que nous ne sommes pas en train d'en rédiger une nouvelle ! Quant à affirmer une distinction entre vie personnelle et vie professionnelle, cela ouvrirait la voie à toutes les difficultés.
S'il s'agit pour M. le rapporteur, comme je le pense, de dire par là que l'on respecte le droit de chacun à conduire comme il le veut sa vie sexuelle, dans ce cas, cher ami, permettez-moi de vous dire que dans la jurisprudence, qu'elle soit nationale ou européenne, la vie sexuelle entre au premier chef dans le cadre de la vie privée, et même de l'intimité de la vie privée. Par conséquent, elle est déjà parfaitement protégée par les textes existants.
N'ajoutons surtout pas dans le code civil des dispositions qui ne pourront ensuite que nourrir des difficultés d'interprétation et des jurisprudences incertaines ! Ce n'est pas faire bonne oeuvre de législateur, et c'est la raison pour laquelle nous ne vous suivrons pas dans cette voie, après avoir vainement tenté, je dois le dire, de rédiger une formule qui correspondrait à votre pensée. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Philippe Marini. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Je tiens à expliquer mon vote à titre personnel.
Tout à l'heure, Mme le ministre nous disait que notre démarche n'était pas suffisamment claire en ce qui concerne les discriminations possibles et les signaux susceptibles d'être donnés à la jurisprudence. Je crois, au contraire, que la démarche de la commission des lois, à laquelle je m'associe, vise à délivrer clairement ce signal, de telle sorte que, le moment venu, la jurisprudence puisse évoluer.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l'article 1er.
Par amendement n° 2, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Au début de l'article 144 du code civil, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le mariage est l'union d'un homme et d'une femme célébrée par un officer de l'état civil. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il y a un vide dans notre code civil, pour la bonne raison que, lorsqu'il a été rédigé, la question ne se posait pas : le code civil ne contient pas de définition du mariage.
Nous avons voulu combler cette lacune, compte tenu d'ailleurs de ce que - comme l'a rappelé Mme le garde des sceaux - le mariage était une institution de la République. Nous voulons donc le conforter.
A l'heure actuelle, en effet, le caractère hétérosexuel du mariage n'est pas explicité.
Bien sûr, cette conception ne fait aucun doute. La doctrine voit dans l'identité des sexes une cause de nullité absolue des mariages, même si le code civil ne la mentionne pas expressément dans les cas de nullité. La jurisprudence a régulièrement affirmé que l'absence de sexe ou l'impossibilité de reconnaître le sexe d'un époux sont susceptibles d'entraîner la nullité du mariage.
Mais, à l'heure où la notion de différence des sexes s'affaiblit et où, dans certains pays étrangers, il est question d'ouvrir l'institution du mariage aux homosexuels, il n'est pas inutile d'affirmer clairement ce principe.
En outre, parce que le mariage est une institution, il faut faire ressortir sa célébration, qui le distingue du concubinage, simple union de fait.
Certes, l'hétérosexualité du mariage peut néanmoins être déduite à travers trois articles.
Ainsi, l'article 75 l'énonce que l'officier d'état civil doit recevoir des parties la déclaration qu'elles veulent se prendre pour mari et femme.
Mais chacun connaît le théâtre asiatique, où les rôles de femmes sont toujours tenus par des hommes !
M. René-Pierre Signé. C'est ridicule !
M. Claude Estier. On sombre dans le ridicule !
M. Jean-Luc Mélenchon. On n'est pas au théâtre !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Laissez-moi parler !
L'article 144 donne l'âge minimal que l'homme et la femme doivent avoir pour contracter un mariage, mais sans toutefois préciser que l'homme et la femme se marient entre eux.
Enfin, l'article 162 établit des prohibitions entre oncles et nièces et entre tantes et neveux mais, là encore, sans préciser qu'il faut être de sexe différent.
Aussi, compte tenu de l'évolution dans laquelle nous sommes engagés, la commission souhaite que l'article 144 soit modifié pour que le caractère hétérosexuel du mariage soit affirmé.
M. Claude Estier. C'est un grand apport du Sénat !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement ne peut pas accepter cet amendement.
J'ai déjà dit tout à l'heure pourquoi il me semblait inutile, je vais maintenant préciser mon propos.
D'abord, il est tellement évident, depuis deux cents ans, que le mariage unit un homme et une femme,...
M. Jean Chérioux. Bien avant !
M. Dominique Braye. Il y a bien d'autres choses qui sont évidentes, et pourtant...
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... que, bien entendu, il me paraît inutile d'introduire cette précision dans le code civil. Cela n'a jamais, jusqu'à aujourd'hui, posé de problème à personne.
Ensuite, je ne souscris pas à la démarche de la commission, parce que je ne souhaite pas que l'on traite dans un même texte du mariage et des relations entre les membres du couple non marié.
Je me suis déjà longuement expliquée lors de cette discussion ainsi qu'à l'Assemblée nationale sur le fait que l'adhésion du Gouvernement à la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale reposait sur une distinction fondamentale entre le régime créé pour les personnes qui ne veulent pas ou qui ne peuvent pas se marier - c'est l'objet du PACS - et le droit de la famille, qui inclut au premier chef l'institution du mariage.
Si des modifications législatives devaient être apportées à ce dernier régime, je souhaite que ce soit dans un cadre résolument différent et que cela fasse l'objet d'un examen spécifique.
Il est une troisième raison pour laquelle je ne peux accepter cet amendement, c'est qu'il vise à insèrer, dans l'article 144 du code civil, la célébration du mariage par l'officier d'état civil. Je vous rappelle que ces formalités font partie non pas du chapitre Ier du titre consacré au mariage, mais du chapitre II traitant des formalités relatives à la célébration du mariage, notamment de l'article 165, et qu'il n'est pas judicieux, en bon droit, de mélanger qualités et conditions requises pour se marier, d'une part, formalités, d'autre part.
Cette imperfection juridique est une raison supplémentaire pour le Gouvernement de rejeter cet amendement.
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Je ferai remarquer, d'abord, que, dans le code civil, le divorce n'est pas plus défini que le mariage.
Monsieur le rapporteur, je vous avais posé une question sur l'opportunité de préciser dans l'article 144, que le mariage est célébré par un officier d'état civil. A cet égard, je vous rappelle que, dans l'article 170, il est prévu qu'un officier d'état civil n'est pas présent forcément. En effet, le mariage contracté par des Français à l'étranger est valable s'il est célébré dans les formes prévues et usitées dans le pays, or, dans certains pays, il n'y a pas d'officier d'état civil. Il y a donc un problème de définition, sauf à préciser « sous réserve des dispositions de l'article 170 ». J'avais déjà signalé cette difficulté l'autre jour.
J'ajouterai que le code civil définit rarement les termes utilisés en ce qui concerne notamment le droit des personnes. Il s'agit d'une nouveauté et, si nous nous engageons dans cette voie, nous aurons un gros travail à faire pour poursuivre l'oeuvre de Portalis !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Robert Bret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Les arguments que vient de développer M. Hyest apportent la démonstration que nous sommes hors sujet.
La présente proposition de loi traite du PACS et uniquement du PACS. En réalité, M. Gélard et certains de ses collègues de droite souhaitent fermer la porte au mariage entre homosexuels et transexuels, comme le précise le rapport. Ils craignent que, comme dans certains pays voisins, les Pays-Bas par exemple, on accepte demain dans notre pays le mariage entre homosexuels.
C'est cette perspective qui les effraie. Ils prennent donc les devants en présentant cet amendement alors que, justement, le PACS est une réponse à la peur de M. Gélard et de ses collègues.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je n'ai pas peur !
M. Jean-Louis Lorrain. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Au-delà même des explications que nous donnent nos collègues juristes, je crois qu'il est impossible de parvenir à une bonne définition.
Le mariage est un acte unificateur et la proposition qui nous est faite me paraît réductrice. Il faut tenir compte des acquis de l'histoire et on ne peut les résumer en une phrase. Ainsi, une définition devant servir de référence qui ne comprendrait ni une allusion au respect de la personne ni la mention de certains concepts symboliques auxquels nous sommes très attachés ne serait pas, à mon avis, satisfaisante.
M. Robert Badinter. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Je suis particulièrement heureux de cette occasion qui m'est donnée de défendre le code civil devant la Haute Assemblée. C'est en effet un privilège dans la mesure où l'article que le Sénat veut modifier est un article d'origine. Il n'y en a pas tellement qui subsistent deux siècles après !
En fait, quand on connaît l'excellence du style du rédacteur du code civil - et je vous renvoie à Stendhal, qui en a fait sa lecture quotidienne - il faut quelque audace pour éprouver le besoin de définir, aujourd'hui, ce qu'est le mariage.
Personne à ce jour, monsieur le professeur Gélard, n'a jamais conçu l'idée que le mariage, tel que le code civil le définit, pourrait être autre qu'entre une femme et un homme !
Si vous vous référez d'ailleurs au « discours préliminaire », chef-d'oeuvre de la littérature juridique, vous y verrez que Portalis, dans le style exceptionnel qui est le sien, rassure la Haute Assemblée deux siècles après. Je le cite : « L'amour » - que c'est beau sous la plume d'un grand législateur ! - « nous donne la solution de tous les problèmes posés dans le mariage », car, ajoute Portalis, « tel est l'empire de l'amour qu'à l'exception de l'objet aimé, un sexe n'est plus rien pour l'autre. » Vous comprenez maintenant pourquoi Stendhal aimait tant relire et le code civil et Portalis !
« Un sexe n'est plus rien pour l'autre », la différence des sexes est inscrite ici. (Sourires.)
Ai-je besoin d'ajouter, afin qu'il n'y ait aucune équivoque possible au regard de ce qui est le fondement de la proposition faite, à savoir la crainte, tout simplement, de voir un jour accepté le mariage homosexuel, que, dans notre droit, le mariage, qui est, ne l'oublions pas, laïc depuis la Révolution - c'est même l'un des apports essentiels de la Révolution dans l'histoire de notre droit - que le mariage, dis-je, est le fondement de l'organisation de la famille, de la famille légitime, puisqu'il existe, nous le savons, des rapports de parenté naturelle ? La famille légitime repose donc, dans notre droit, sur le mariage, et le doyen Carbonnier a raison de rappeler sans cesse que ce qui a aussi, sinon essentiellement, inspiré les grands législateurs de 1804 dans l'organisation de la famille, c'est la présomption de paternité, sur laquelle reposait l'oranisation même non seulement de la famille en soi, mais de l'ensemble du patrimoine familial. Je n'ai pas besoin, après cela, de dire que, par définition, le mariage laïc est hétérosexuel.
Ce que vous proposez, monsieur le rapporteur, c'est de porter la main sur un texte d'origine, que deux siècles ont consacré, c'est d'attenter, permettez-moi de le dire, à la pensée et au texte des auteurs du code civil ! Je considère qu'il n'y a pas lieu de le faire. Aucune crainte, hormis pour des âmes timorées qui aiment se faire peur à elles-mêmes à l'usage de l'opinion publique, ne peut véritablement se lever dans quelque esprit que ce soit. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Lambert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lambert.
M. Alain Lambert. Je ne souhaitais pas m'exprimer après M. Badinter, parce que je ne voulais pas que l'on puisse me soupçonner de manquer à la loyauté que nous devons tous à la majorité, ou à l'opposition, à laquelle nous appartenons. Mais j'ai cité tant de fois Portalis dans cet hémicycle qu'on ne me suspectera pas de le faire aujourd'hui par opportunité.
Mes chers collègues, introduire une définition du mariage dans le code civil est-il utile ? Vraiment, même en rassemblant toutes mes forces de solidarité envers la majorité à laquelle j'appartiens, je ne parviens pas à répondre par l'affirmative à cette question.
Je n'y parviens pas parce que, nos collègues Jean-Jacques Hyest et Robert Badinter l'ont dit tout à l'heure, la langue du code civil est la plus belle langue juridique qui soit : nous ne saurons plus jamais, mes chers collègues, écrire la loi comme l'a écrite le code civil. Dès lors, ne modifions celui-ci que lorsque c'est tout à fait indispensable.
Permettez-moi de vous relire les deux premières lignes de l'exposé des motifs de Portalis : « Les familles sont la pépinière de l'Etat et c'est le mariage qui forme les familles. » Tout est dit ! Ce qu'on pourrait ajouter serait nécessairement incomplet.
Ce n'est pas un hasard si, dans le livre des personnes, nous ne trouvons pratiquement aucune définition. J'y ai cherché la définition du mariage ; je ne l'ai pas trouvée, pas plus que je n'ai trouvé celle du divorce, celle de la filiation, celle de l'adoption, celle de l'autorité parentale, celle de la tutelle. Dans leur sagesse, ceux qui ont écrit le code civil ont en effet considéré que, s'agissant des personnes, il ne fallait pas définir de tels concepts.
Bien sûr, on trouve des définitions dans le droit des contrats ; je ne dirai pas que c'est parce que ce droit est plus vulgaire, mais il est sans doute, moins dangereux de fixer des définitions dans ce domaine.
Lors de la discussion générale, j'ai, pour ma part, affirmé ma conviction de la primauté juridique et sociale du mariage et j'ai invité tous nos collègues qui partagent cette conviction profonde à le dire. Pardonnez-moi, monsieur Badinter, mais j'ai le sentiment que vous avez vous-même fait part de cette conviction.
Et si je ne vois aucun avantage à introduire cette définition du mariage, je crains, en revanche, qu'elle ne soit source de danger. En effet, n'est-ce pas laisser entendre qu'un doute existe, aujourd'hui, sur ce qu'est le mariage ? Si l'on estime nécessaire de définir le mariage, c'est précisément parce qu'on a le tort de décalquer le mariage sur le concubinage ou d'élaborer la définition du concubinage à partir du mariage.
Mes chers collègues, pour ce qui me concerne, vous me trouverez toujours à vos côtés pour défendre la cause de la liberté, pour défendre les idées qui sont les nôtres, et je ne crois pas avoir jamais fait défection, mais ne me demandez pas de porter une atteinte, qui n'est sans doute pas définitive, mais qui est sûrement inutile, à ce qu'il y a d'un peu sacré dans les textes fondateurs de notre société. (Applaudissements sur certaines travées de l'Union centriste, ainsi que sur les travées socialistes et sur celles du RDSE.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je veux tout de même souligner que la plupart des codes civils modernes - le nôtre ne l'est pas : il a 197 ans ! - précisent bien que le mariage est l'union d'un homme et d'une femme.
On a cité Portalis. Mais le malheureux Portalis a dû se retourner dans sa tombe s'il a entendu tout ce qui a été dit tout à l'heure en faveur du PACS !
On a bien vu dans quel raisonnement on voulait nous entraîner. On a bien vu la façon dont des associations ou des groupes divers voulaient la reconnaissance d'un certain mariage. Il est donc temps de dire que le mariage est hétérosexuel.
Dans l'état actuel du code civil, un maire peut très bien détourner les textes, et je ne vois pas très bien comment on pourrait annuler un mariage entre deux personnes d'un même sexe.
M. Raymond Courrière. Quelle insulte à l'égard des maires !
M. Patrice Gélard, rapporteur. La déférence à l'égard de Portalis, je la partage, comme je partage l'admiration que suscite la langue de Portalis. Mais nous avons fait justement le minimum minimorum, de manière à ne pas mettre en cause autre chose. Nous proposons simplement d'introduire dans la loi ce qui est la réalité reconnue par tous. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Raymond Courrière. On va tripoter le code civil !
M. Jean Chérioux. Et, avec le PACS, vous ne le tripotez pas ?
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je voudrais seulement renchérir sur le propos de Jean-Jacques Hyest.
Représentant les Français établis hors de France, je souhaite mettre en garde le Sénat contre une définition restrictive, telle que certains de nos compatriotes qui se marient dans des pays où il existe une religion d'Etat - je pense à des pays chrétiens orthodoxes et à des pays musulmans, où il n'y a pas d'officier de l'état civil - ne pourraient pas voir leur mariage reconnu en France. Je rappelle que 1 700 000 Français vivent à l'étranger et que beaucoup d'entre eux s'y marient.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est un faux problème, madame ben Guiga : l'article 170 du code civil a parfaitement réglé la question. Le mariage à l'étranger est reconnu en France dans la mesure où il a été célébré selon les règles de l'Etat considéré.
De toute façon, nous ne légiférons pas pour l'étranger, nous légiférons pour la France.
M. Jean-Jacques Hyest. Mais l'article 170...
M. Patrice Gélard, rapporteur. Mais il n'y a aucun problème avec l'article 170 !
M. Robert Badinter. On ne célèbre pas que des mariages entre Français, en France !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Bien sûr, mais c'est la loi française qui s'applique !
Que dit l'article 170 ? « Le mariage contracté en pays étranger entre Français et entre Français et étranger sera valable s'il a été célébré dans les formes usitées dans le pays, pourvu qu'il ait été précédé de la publication prescrite par l'article 63. »
M. Jean-Jacques Hyest. Et s'il n'y a pas d'officier de l'état civil ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cela ne vaut que pour le mariage en France. L'article 170 demeure ! Nous ne le supprimons pas !
M. Jean-Jacques Hyest. Mais c'est contradictoire !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Pas du tout !
M. Claude Estier. Bien sûr que si !
M. Jacques Oudin. Très bien, monsieur le rapporteur !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. On voit à quelle confusion nous conduit cet amendement ! En effet, il vise à lever une ambiguïté qui n'existe pas.
Pour apaiser la fureur de ceux qui le proposent, il faut évoquer les mânes de Portalis. Il faut que, sur plusieurs bancs, se lèvent les autorités juridiques les plus respectées de notre assemblée pour faire comprendre que tout ce dispositif apportera plus de confusion qu'il ne réglera de problèmes.
En réalité, cet amendement témoigne d'un souci non pas juridique mais politique ; c'est un amendement « cache-sexe », et l'expression convient parfaitement à la situation. Il s'agit de faire croire à l'existence d'une menace qui, précisément, n'existe pas, que nul ne fait peser sur le statut et la définition du mariage.
M. Raymond Courrière. Exactement !
M. Jean-Luc Mélenchon. Personne, dans aucune des deux assemblées ni au sein du Gouvernement, ne prétend modifier la nature du mariage. Mais il s'agit de faire semblant de croire que telle est bien la menace, afin de déplacer le débat sur le PACS.
M. Jean Chérioux. Quelle hypocrisie !
M. Raymond Courrière. C'est vous les hypocrites !
M. Robert Bret. M. Chérioux parle en orfèvre !
M. Jean-Luc Mélenchon. Nous risquons de le payer fort cher, car cela va faire naître des confusions là où il n'y en avait pas.
Bien entendu, après avoir fait croire à la réalité d'une menace, on veut faire croire qu'on s'efforce de la dissiper.
En effet, si vous suivez tout à l'heure, comme vous l'avez, les uns et les autres, déclaré si bravement à la tribune, la commission dans son amendement très approximatif relatif au concubinage, il s'agira, au moins pour certains d'entre vous, d' « avaler » celui-ci.
Ainsi, la dissipation d'une pseudo-menace vous sera offerte en compensation de la souffrance que vous allez ressentir dans votre esprit conservateur.
Voilà pourquoi cet amendement ne tend pas à apporter une précision juridique mais constitue un « cache-sexe » et une argutie politique. (Sourires et applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Bernard Seillier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. Pour des raisons philosophiques profondes, je crois que le mariage, cette union entre un homme et une femme, fait partie de ces réalités sur lesquelles nous n'avons pas prise, que nous ne pouvons que constater, sans pouvoir les définir, au même titre que les notions d'existence et d'être.
Le code civil, jusqu'à ce jour, se garde de prétendre circonscrire, sous quelque forme que ce soit, ce grand mystère qu'est celui l'union de l'homme et de la femme.
De même, ce n'est qu'en inscrivant dans un article du code civil une définition nécessairement approximative, parce que partielle, du concubinage que cette notion pourra être introduite dans notre législation, et c'est là une démarche à laquelle je m'oppose également.
Voilà pourquoi je suis hostile à la disposition qui nous est proposée.
M. Nicolas About. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Je suis fasciné par le tir de barrage auquel donne lieu la définition du mariage.
Il s'appuie, premièrement, sur l'argument selon lequel cette définition ne serait pas utile et, deuxièmement, sur le fait que l'institution du mariage ne courrait aucun risque, qu'aucun danger ne la menacerait. M. Mélenchon vient même de soutenir qu'on avait inventé le risque à dessein.
Que de temps passé à s'opposer à une définition que tout le monde accepte ! En effet, tous les intervenants ont pris la parole pour dire, les uns citant Portalis, les autres se référant au code civil, que le mariage, c'était de toute façon l'union d'un homme et d'une femme. Mais alors, qu'y a-t-il de choquant à l'inscrire dans la loi en votant cet amendement ?
M. Jacques Oudin. Rien !
M. Nicolas About. Curieusement, ceux qui trouvent cela particulièrement choquant sont précisément ceux qui vont nous demander de préciser tout à l'heure la définition du concubinage telle qu'elle est proposée par M. Gélard et qui est déjà, selon moi, tout à fait claire.
Autrement dit, ce qui sera demandé par certains à propos du concubinage nous est maintenant refusé par les mêmes à propos du mariage.
M. Claude Estier. Par les mêmes et par d'autres !
M. Raymond Courrière. Pour le concubinage, c'est la Cour de cassation qui rend la précision nécessaire !
M. Nicolas About. Par souci de cohérence, je voterai l'amendement défendu par M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Raymond Courrière. Toutes les sacristies sont mobilisées ! (Sourires sur les travées socialistes.)
M. Michel Caldaguès. Nous avons écouté avec attention les interventions de quelques-uns des juristes les plus chevronnés, les plus pointus, les plus éminents de notre Assemblée. Nous ne pouvons, car c'est notre devoir de législateur, qu'être sensibles aux nuances qu'ils ont fait valoir devant nous. Mais j'ai le regret de dire que ces nuances ne sont pas perceptibles par ceux qui nous observent et qui nous écoutent. Ce qui demeure pour eux, c'est l'essentiel.
Le souvenir le plus agréable que je garde de mes modestes études juridiques, c'est la satisfaction d'avoir presque toujours constaté que le droit ne pouvait pas tourner le dos au bon sens. Lorsque les juristes ne sont pas d'accord entre eux, c'est, me semble-t-il, ce critère qui doit permettre de dégager une solution.
En l'occurrence, la solution est simple : dès lors que cet amendement existe, le Sénat ne peut pas repousser l'affirmation selon laquelle le mariage est l'union d'un homme et d'une femme !
C'est pourquoi je voterai cet amendement. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Yann Gaillard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Je suis très embarrassé par cet amendement.
Bien entendu, tout le monde est d'accord sur le fait que le mariage est l'union d'un homme et d'une femme.
M. Raymond Courrière. Il y a deux cents ans que c'est comme cela !
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas évident pour tout le monde !
M. Yann Gaillard. Il me semble d'ailleurs que nous assistons ici à une discussion à front renversé : ceux qui nous disent qu'il est inutile de préciser ceci veulent en revanche préciser cela, que d'autres ne veulent pas préciser.
J'aurais préféré qu'on ne soulève pas cette question de la définition du mariage car, selon moi, ce texte n'est pas digne de servir de cadre à une réflexion sur une institution aussi profonde. A cet égard, je ne suis pas loin de faire miennes les explications données par MM. Badinter et Lambert.
Mettre sur le métier la définition du mariage, une définition sur laquelle nous sommes tous fondamentalement d'accord, justifie des études très approfondies et une discussion spécifique.
M. le rapporteur nous a indiqué qu'il n'y avait pas de difficultés en ce qui concerne les Français de l'étranger, mais il doit y en avoir d'autres.
En tout cas, je ne pense pas que ce texte soit le cadre approprié pour procéder à une définition du mariage. C'est pourquoi, pour ma part, bien qu'adhérant évidemment à la définition que nous avons tous à l'esprit - et nous verrons si, à l'avenir, nos collègues socialistes s'en tiennent toujours à cette définition - je m'abstiendrai sur cet amendement.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. J'ai bien entendu tout ce qui a été dit.
Cet amendement comporte une logique eu égard à l'ensemble du texte. Cette logique, vous allez la découvrir au fur et à mesure que seront développés les arguments de la commission des lois. C'est également pour tenir compte de cette logique que nous avons déposé un amendement tendant à modifier l'intitulé de la proposition de loi.
Mes chers collègues, vous allez tomber dans le piège que les socialistes sont en train de vous tendre ! (Rires sur les travées socialistes.) En effet, en refusant une définition extrêmement mesurée, qui ne remettra pas du tout en cause les dispositions que la commission Dekeuwer-Defossez pourra prendre pour l'avenir et qui représente une solution d'attente, vous abandonnez cette logique que la commission des lois défend. Dès lors, c'est tout un équilibre qui est rompu et vous allez là où nos amis socialistes veulent vous entraîner.
M. Raymond Courrière. Pas du tout !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est vous qui avez déposé un amendement !
M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est la raison pour laquelle je vous demande instamment de voter l'amendement n° 2 présenté par la commission des lois.
Monsieur le président, nous souhaitons que le Sénat se prononce par scrutin public sur cette question. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Raymond Courrière. Retirez l'amendement, vous êtes battus !
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Pour ma part, je voterai cet amendement.
J'avoue que je suis étonné d'entendre toujours parler du conservatisme de la majorité sénatoriale.
MM. Raymond Courrière et Jean-Luc Mélenchon. Ah oui !
M. Jean Chérioux. Après tous les propos que je viens d'entendre sur ce code civil vieux de deux cents ans, je me demande de quel côté se trouve le conservatisme ! (Exclamations sur les travées socialistes.) On ne veut pas adapter le code civil.
Je reconnais qu'il a été mieux écrit à cette époque qu'on ne l'écrirait aujourd'hui. Mais le conservatisme, il est bien de ce côté-là. (M. Chérioux désigne la gauche de l'hémicycle. - Exclamations sur les travées socialistes.)
On nous dit aussi qu'il ne faut pas introduire de définition dans le Livre premier du code civil : « Des personnes ». Or que fait-on ? On insère dans ce Livre premier la définition du PACS ! Il y a donc là une contradiction.
M. Raymond Courrière. Mais non !
M. Jean Chérioux. Et il y en existe d'autres !
D'aucuns qui, en principe, soutiennent la position de la commission, nous reprochent de vouloir définir le mariage comme si nous étions réunis en concile.
M. Raymond Courrière. Le mariage n'est pas un sacrement !
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas ce que l'on nous demande ! On nous demande simplement de définir le mariage républicain, tel qu'il figure dans le code civil et tel qu'il existe depuis la Révolution française ! On ne nous en demande pas davantage !
Quand on voit justement ce qui se passe dans d'autres pays, qui reconnaissent les mariages entre homosexuels, quand on voit que nous sommes maintenant engagés dans une aventure européenne, peut-être n'est-il pas mauvais que nous disions que nous, République française, nous ne reconnaissons qu'un seul mariage : le mariage d'un homme et d'une femme. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Raymond Courrière. Il y a longtemps que cela se passe ainsi !
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. René-Pierre Signé. La droite réactionnaire !
M. Philippe Marini. Cette affaire comporte des aspects juridiques et des aspects politiques. (Exclamations sur les travées socialistes.) En l'occurrence, ils se rejoignent.
M. Raymond Courrière. Pas de discussions politiciennes !
M. Philippe Marini. Le droit, nous ne cessons de le dire dans cette discussion, n'est pas indépendant de l'évolution des moeurs. On ne peut pas prétendre que le mariage se trouve dans le même contexte socio-économique qu'à l'époque de Portalis. Il est aujourd'hui des menaces... (Rires sur les travées socialistes.)
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Philippe Marini. ... morales, sociales et internationales, qui n'auraient même pas, mes chers collègues, été imaginées à l'époque de la rédaction du code civil !
M. Jacques Oudin. Très bien !
M. Philippe Marini. Véritablement, nous nous trouvons devant une sorte de conjonction très étrange entre celles et ceux qui voudraient créer un sous-mariage,...
M. René-Pierre Signé. Ils se font peur !
M. Raymond Courrière. Arrêtez !
M. Philippe Marini. ... et qui s'apprêtent, par le PACS, à le faire, compte tenu de la majorité qu'ils ont à l'Assemblée nationale... (Exclamations sur les travées socialistes) ... et celles et ceux qui, par un scrupule juridique tout à fait estimable et compréhensible, se placent dans un cas de figure et dans un contexte qui, hélas ! - nous pouvons le déplorer - ne sont plus ni le cas de figure ni le contexte d'aujourd'hui.
M. Raymond Courrière. Mais non !
M. Philippe Marini. Les propositions de la commission expriment une approche cohérente,...
M. Raymond Courrière. Incohérente !
M. Philippe Marini. ... à savoir la recherche d'une voie raisonnable tenant compte de la réalité des choses. S'il est souhaitable de procéder à la définition du mariage, c'est bien parce que la réalité des choses le requiert !
M. Raymond Courrière. Mais non !
M. Philippe Marini. On ne peut pas contester cette réalité !
M. Raymond Courrière. Vous essayez de nous faire peur depuis un moment !
M. Philippe Marini. Alors, mes chers collègues, sans doute la définition qui vous est proposée par la commission des lois est-elle perfectible mais j'ai cru comprendre que ce texte ferait l'objet de navettes.
M. Raymond Courrière. C'est de la politique politicienne ! Ce n'est pas du droit !
M. Philippe Marini. Allons-nous aujourd'hui graver dans le marbre chaque virgule ? Allons-nous régler chaque problème de détail ? Probablement pas !
M. Raymond Courrière. Alors, il faut retirer l'amendement !
M. Philippe Marini. Cette proposition de loi sera de nouveau examinée par l'Assemblée nationale, puis par le Sénat. Celles et ceux qui auront des remarques fondées à formuler sur les aspects techniques et juridiques,...
M. Raymond Courrière. Il faut retirer l'amendement !
M. Philippe Marini. ... sur l'endroit du code civil où devrait s'insérer cette disposition, ou sur je ne sais quoi car je ne suis pas moi-même civiliste de formation...
M. Raymond Courrière. Alors, n'en parlez pas !
M. Philippe Marini. ... seront naturellement entendus en temps utile, lors de la navette.
M. Raymond Courrière. C'est de la politique politicienne !
M. Philippe Marini. Mais, aujourd'hui, il importe, je le répète - et ce sera ma conclusion - de faire preuve d'une vision cohérente. Le mariage a sa place comme pierre angulaire de la société. Les situations de fait de concubinage, quelles qu'elles soient, reconnues par ailleurs, sont porteuses de droit pour autant que la société les estime légitimes.
M. Raymond Courrière. C'est de la politique politicienne, de la basse politique !
M. Philippe Marini. Telle est la volonté de la commission des lois. Il s'agit d'une démarche cohérente et complète, qu'il faut approuver en tant que telle. (Très bien ! et vifs applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. René-Pierre Signé. Réactionnaires ! Ils n'ont rien compris !
M. Raymond Courrière. Cela n'a rien à voir avec le code civil !
M. Pierre Fauchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Certains membres du groupe de l'Union centriste se sont exprimés à titre personnel, de manière pertinente et respectable,...
M. Henri de Raincourt. Absolument !
M. Pierre Fauchon. ... contre l'amendement présenté par la commission. Mais, d'une manière générale, nous ne reculons pas devant la démarche qui consiste à insérer la définition du mariage dans le code civil.
Nous nous interrogeons sur les raisons pour lesquelles on a tendance à sacraliser le silence de Portalis.
M. Dominique Braye. Tout à fait !
M. Pierre Fauchon. Je respecte beaucoup Portalis... d'autant qu'il était méridional. Mais indiquer, dans le premier des articles relatifs au mariage, uniquement l'âge des futurs mariés est une façon un peu sommaire de procéder. Il ne s'agit pas d'une rédaction qui mérite d'être sacralisée.
La démarche qui consiste à définir le mariage peut être contestée, mais, globalement, elle se justifie. Cela dit, la définition qui nous est proposée nous paraît réductrice ; elle ne répond pas vraiment à notre attente.
M. Raymond Courrière. C'est du sous-Portalis !
M. Pierre Fauchon. Nous pouvons peut-être parler sereinement de cette question, mon cher collègue !
M. Raymond Courrière. Nous en parlons sereinement ! Vous savez de quoi vous parlez, moi aussi !
M. Jacques Oudin. Arrêtez ! Ça suffit !
M. Pierre Fauchon. La définition qui nous est proposée, qui n'intègre pas comme une finalité la vocation à la famille, nous paraît insuffisante. (M. Courrière s'exclame.)
M. Pierre Fauchon. Cela étant, comme l'a indiqué tout à l'heure M. Marini, nous sommes dans une démarche progressiste et nous ne sommes pas hostiles à l'amorce de cette recherche. (M. Courrière s'exclame de nouveau.)
M. Pierre Fauchon. Demandez la parole, monsieur Courrière ! Je n'ai pas besoin d'un accompagnement perpétuel de contrebasse ! (Sourires et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Certains d'entre nous, opposés sur le principe, voteront contre cet amendement n° 2, et c'est tout à fait leur droit. D'autres s'abstiendront. Mais, dans l'ensemble, le groupe de l'Union centriste le votera - il espère cependant que les dispositions proposées seront modifiées au cours de la navette - afin de montrer sa solidarité et parce qu'il considère qu'il s'agit d'une amélioration. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Lors de la discussion générale, j'ai exprimé notre attachement à l'institution qu'est le mariage. J'ai également indiqué qu'il ne me semblait pas convenable, à l'occasion de la discussion d'un texte qui ne concerne nullement le mariage, de vouloir modifier le code civil à la sauvette, dans la précipitation, par le biais d'un amendement. J'ai même dit qu'il ne me paraissait pas normal de traiter le mariage de façon aussi cavalière.
M. Raymond Courrière. Très bien !
Mme Dinah Derycke. Je n'étais pas encore à l'école maternelle que je savais déjà que le mariage était l'union entre un homme et une femme ! (Exclamations ironiques sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Joyandet. Eh bien ! écrivons-le !
Mme Dinah Derycke. Curieusement, ce n'est qu'à l'occasion de ce débat sur le PACS que j'ai appris que le code civil ne l'avait pas explicitement mentionné.
Comme vient de nous l'expliquer Robert Badinter, relayé en cela par M. Lambert, président de la commission des finances, je ne vois ni urgence ni raison de modifier un texte qui n'a pas posé de problème depuis deux siècles.
Tout à l'heure, M. le rapporteur a fait un aveu ; il nous a dit qu'à la lecture des amendements présentés par la commission des lois sur les autres dispositions du texte nous comprendrions ses intentions : il s'agit de ne pas tomber dans le piège du PACS tendu par les socialistes, par la gauche plurielle.
Monsieur le rapporteur, le PACS n'est pas un piège ! Je conçois parfaitement que l'on puisse être opposé au PACS, et je respecte une telle position. Toutefois, le nouveau cadre juridique proposé afin de régler certains problèmes, d'officialiser certains couples, je le répète, n'est nullement un piège ! Nous avons la conviction profonde que cela fera progresser la société.
De grâce, ne mélangeons pas les problèmes ! Le mariage se porte fort bien depuis deux siècles. Je crois qu'il a encore un très bel avenir devant lui, et nous sommes tous satisfaits qu'il en soit ainsi. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. J'ai soulevé tout à l'heure une objection, car on mélange la définition du mariage et les formalités de celui-ci. Qu'on le veuille ou non, je crois que cette disposition n'a pas sa place dans ce débat.
Cela étant, j'ai entendu, depuis hier, un certain nombre de nos collègues défendre l'institution du mariage, fondateur de la famille. Or, à mes yeux, le mariage va au-delà de l'union d'un homme et d'une femme ; il a aussi vocation à fonder une famille,...
M. Patrice Gélard, rapporteur. Très bien !
M. Jean-Jacques Hyest. ... et à avoir des enfants. Ce point est contenu dans la définition du mariage.
Veuillez m'excuser, mes chers collègues, mais, si l'on raisonne en bonne philosophie, on ne peut pas se contenter de dire que le mariage est l'union d'un homme et d'une femme. Certes, il faut peut-être l'affirmer dans les temps présents, pour que l'on ne le confonde pas avec d'autres institutions ou d'autres formes de vie, mais il me paraît fondamental, monsieur le rapporteur, de compléter la définition du mariage : c'est l'union d'un homme et d'une femme en vue de fonder une famille.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je suis d'accord !
M. Jean-Jacques Hyest. Cela n'a pas été dit ! On aurait peut-être pu déposer un sous-amendement à cette fin.
Il n'est pas du tout dans mon intention d'être désagréable avec qui que ce soit, mais la définition d'une institution fondatrice de la société se doit d'être complète et de correspondre à ce qu'est vraiment le mariage. Je regrette donc un peu que toutes les objections qui ont pu être soulevées aient été écartées d'un revers de la main. Lorsque je vote un dispositif, j'ai pour habitude de me soucier non pas de faire plaisir, mais de faire la loi ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste. - MM. Badinter et Pelletier applaudissent également.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Monsieur Hyest, nous avions pensé à votre rédaction, mais nous n'avons pas pu la retenir parce qu'il y a des couples mariés qui ne peuvent pas avoir d'enfants.
Mme Dinah Derycke. Ou qui n'en veulent pas !
M. Jean Chérioux. Eh oui !
M. Philippe Marini. Voilà !
M. Patrice Gélard, rapporteur. En outre, le code civil prévoit d'ores et déjà que les époux participent à l'éducation des enfants.
On ne peut pas insérer une telle disposition. C'est la raison pour laquelle nous avons été obligés de choisir la définition la plus simple possible.
M. Lucien Lanier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lanier.
M. Lucien Lanier. Je ne dénonce ni piège ni chausse-trappe, je constate simplement que le dispositif proposé par M. le rapporteur, au nom de la commission des lois,...
M. Raymond Courrière. ... est mauvais !
M. Lucien Lanier. ... est une construction globale, composée de divers éléments, et que la disposition que nous examinons en cet instant est l'un de ces éléments.
A partir du moment où nous renonçons à cet élément-là, c'est l'ensemble de la construction qui s'effondre, et donc tout le dispositif.
M. Raymond Courrière. C'est une opération politique, alors !
M. Lucien Lanier. Or, il s'agit d'une proposition alternative à celle du Gouvernement. Bien sûr, elle peut plaire ou ne pas plaire, mais, s'agissant du fond, tout le monde est d'accord avec la définition prévue dans le présent amendement. Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas le dire.
C'est la raison pour laquelle, conséquent avec moi-même, après avoir bien réfléchi en commission aux conséquences d'une telle disposition, je voterai cet amendement. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Je dirai à notre collègue M. Hyest que, malgré la précision apportée à cet article par la commission des lois, les autres dispositions du code civil, à savoir les articles 212, 213 et suivants, demeurent. Ainsi en est-il de la mention aux termes de laquelle les époux pourvoient à l'éducation des enfants et préparent leur avenir.
Je suis d'ailleurs très surpris de constater que ceux qui affirment que le code civil est un document sacré auquel on ne doit pas toucher disent par ailleurs que la définition proposée par la commission des lois n'est pas suffisamment précise et qu'il faut donc aller plus loin.
M. Jean-Jacques Hyest. C'est pour ça qu'il ne faut pas le faire !
M. Dominique Braye. J'avoue ne pas comprendre.
Compte tenu de tout ce qui a été dit, et notamment du fait, rappelé par M. Bret, qu'il est des pays, situés à seulement 350 kilomètres de chez nous, où le mariage des homosexuels est authentifié, je voterai cet amendement. En effet, lourde serait ma responsabilité si je refusais, pour une simple question de forme, de sémantique ou de sacralisation du code civil, de voter cette disposition et si demain il devenait possible d'authentifier les mariages homosexuels dans notre pays. (Sourires sur les travées socialistes.)
M. Jean-Pierre Bel. Voilà la véritable raison !
M. Dominique Braye. Je ne vois d'ailleurs pas comment je pourrais expliquer à mes concitoyens que le Sénat a refusé une définition aussi évidente et aussi simple. Et vous, mes chers collègues, comment pourrez-vous l'expliquer dans votre département ? (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. René-Pierre Signé. C'est une modification inutile. Cela est déjà écrit. Ils ne savent pas lire le texte !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 84:

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 312
Majorité absolue des suffrages 157
Pour l'adoption 206
Contre 106

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l'article 1er.
Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 3 rectifié, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le livre premier du code civil, il est inséré, après l'article 310, un titre VI bis ainsi rédigé :

« Titre VI bis
« Du concubinage

« Art. 310-1 . - Le concubinage est le fait pour deux personnes de vivre en couple sans être unies par le mariage.
« Art. 310-2 . - Le concubinage se prouve par tous moyens.
« Un acte de notoriété peut être délivré aux concubins majeurs et célibataires par un officier de l'état civil, un juge ou un notaire. Il fait foi jusqu'à preuve du contraire. »
« Art. 310-3. - Les concubins peuvent conclure un contrat par acte authentique ou sous seing privé pour régler tout ou partie de leurs relations pécuniaires et patrimoniales et organiser leur vie commune. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 55 rectifié, présenté par M. About, et tendant, dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 3 pour l'article 310-2 du code civil, après les mots : « peut être délivré », à insérer les mots : « aux concubins majeurs et célibataires ».
Par amendement n° 56, Mme Derycke, MM. Badinter, Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le livre premier du code civil, il est inséré, après l'article 310, un titre VI bis ainsi rédigé :

« Titre VI bis
« Du concubinage

« Art. 310-1. - Le concubinage est le fait pour deux personnes, quel que soit leur sexe, de vivre en couple sans être unies par le mariage. »
Enfin, par amendement n° 31, MM. Lorrain, Badré et Lambert proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le livre troisième du code civil, il est inséré, après l'article 1581, un titre V bis ainsi rédigé :

« Titre V bis
« De l'union libre

« Art. 1581-1. - La loi ne régit pas l'union libre qui est le fait pour deux personnes, quel que soit leur sexe, de partager une communauté de vie sans être unies par les liens du mariage. »
« Art. 1581-2. - L'union libre se prouve par tous moyens.
« Un acte de notoriété peut être délivré par un officier de l'état civil, un juge ou un notaire. Il fait foi jusqu'à preuve du contraire. »
« Art. 1581-3. - Les personnes vivant en union libre peuvent passer un contrat par acte authentique ou sous seing privé ayant date certaine pour régler tout ou partie de leurs relations pécuniaires et patrimoniales et organiser leur vie commune. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3 rectifié.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Nous abordons la partie centrale du dispositif, qui tend à reconnaître le concubinage dans le code civil.
Nous l'avons tous dit, le concubinage est un fait juridique. La jurisprudence de la Cour de cassation l'a reconnu, mais elle l'a limité aux seuls concubins hétérosexuels.
Dans un dispositif simple, nous avons donné une définition simple du concubinage, puis nous avons repris ce que la jurisprudence de la Cour de cassation a affirmé de multiples fois, à savoir la façon dont se prouve le concubinage, et, enfin, par une troisième modification du code civil, nous avons incité les concubins à conclure un contrat pour organiser leur vie commune et pour régler tout ou partie de leurs relations pécuniaires et patrimoniales.
Le concubinage étant reconnu dans le code civil, il est ainsi mis fin à une discrimination dont souffrent, à l'heure actuelle, les homosexuels. Je tiens à noter que ni le Gouvernement ni la majorité parlementaire à l'Assemblée nationale n'ont songé à ce problème. Pour eux, la solution, c'était le PACS. Or, chacun sait que tout le monde ne se « pacsera » pas, loin de là, surtout lorsqu'on aura démontré à quel point ce contrat ne tient pas la route. Il fallait résoudre ce problème. Nous l'avons fait.
Vous comprenez maintenant pourquoi l'amendement relatif au mariage devait être adopté. Le mariage est une union hétérosexuelle. En revanche, le concubinage peut concerner aussi bien des hétérosexuels que des homosexuels.
En fait, l'amendement n° 3 rectifié s'adresse évidemment aux homosexuels, à moins que les auteurs des sous-amendements ne prétendent que le fait d'employer la formulation « deux personnes » exclut une telle interprétation. Telle est donc la raison d'être de ce dispositif central.
M. le président. La parole est à M. About, pour présenter le sous-amendement n° 55 rectifié.
M. Nicolas About. Monsieur le président, ce sous-amendement est pleinement satisfait par l'amendement n° 3 rectifié. En effet, M. le rapporteur a modifié l'amendement initial pour préciser que l'acte de notoriété peut être délivré aux concubins « majeurs et célibataires », afin que des personnes mariées ne puissent sa faire délivrer un tel acte. Aussi, je retire mon sous-amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 55 rectifié est retiré.
La parole est à M. Badinter, pour présenter l'amendement n° 56.
M. Robert Badinter. Il s'agit d'un amendement très important pour le groupe socialiste du Sénat, et je suis heureux de le soutenir devant notre Haute Assemblée.
Cette disposition revêt la forme d'un amendement qu'en tout état de cause, même s'il n'y avait pas eu l'amendement présenté par la commission des lois, nous aurions proposé.
Le combat contre la discrimination dont souffrent depuis fort longtemps les homosexuels dans la société française et dans toutes les sociétés occidentales, pourrait-on dire, inspirées par la culture judéo-chrétienne, est, en cet instant, à un tournant important.
Le pacte civil de solidarité, a-t-on dit volontiers, est un « sous-mariage », un « mariage bis ». Permettez-moi de dire que c'est ridicule au regard de ce que j'évoquais tout à l'heure, indépendamment de toutes les considérations si brillamment développées par Mme le garde des sceaux, à savoir, et j'ai évoqué ce point à propos du mariage républicain, son lien avec l'organisation de la famille légitime et la présomption de paternité.
En revanche, qu'est véritablement, pour l'essentiel, le PACS ? C'est une organisation, une institutionnalisation du concubinage, aussi bien, on l'a rappelé, homosexuel qu'hétérosexuel. Le texte ne fait pas la différence.
Nous savons que le concubinage est une réalité très importante de notre société, puisqu'il concerne entre quatre et cinq millions de personnes.
Dès l'instant où la question de non-discrimination est réglée pour ceux qui « pacseront », elle se pose nécessairement pour ceux qui ne « pacseront » pas.
Comme M. le rapporteur l'a rappelé, il existe encore dans notre droit positif tel qu'interprété par la Cour de cassation une discrimination à l'encontre des couples homosexuels, des concubins homosexuels. La Cour de cassation a en effet considéré à deux reprises, d'ailleurs contre le voeu de son avocat général, que ne devaient pas être reconnus au concubinage homosexuel, aux couples homosexuels, les mêmes droits que ceux qui sont accordés par la loi au concubinage hétérosexuel.
Cette position a été beaucoup critiquée, et les choses ne peuvent demeurer en l'état. En effet, il est évident que, au regard de ceux qui ne « pacseront » pas, soit parce qu'ils ne le peuvent pas, en raison d'un mariage, soit parce qu'ils ne le veulent pas, pour des raisons touchant à leurs convenances personnelles, on ne peut laisser les concubins homosexuels, dans cet état de discrimination. C'est absolument contraire à tous les principes qui sont aujourd'hui ceux de notre code civil. Le nouveau code pénal prévoit d'ailleurs - je le rappelle au passage - que la discrimination du fait des moeurs est susceptible de poursuites. Il faut donc remédier à cette situation.
Pourquoi, compte tenu de l'amendement de la commission des lois, avons-nous maintenu notre texte que, je le répète, nous aurions déposé de toute façon ? C'est parce que, en l'occurrence, il y a quelques mots - cinq si l'on prend la formule : « quel que soit leur sexe », quatre si l'on considère les termes : « sans distrinction de sexe » - qui doivent figurer dans la loi.
M. le rapporteur, je le sais, affirme que cela va de soi. Non ! On ne peut pas, à cet égard, s'en rapporter à une interprétation des travaux préparatoires. Il faut le dire clairement, et il n'y a aucune raison, si telle est la conviction de chacun des membres de la Haute Assemblée, de ne pas agir de la sorte.
M. Alain Vasselle. Ce n'est pas la peine d'aller jusque-là !
M. Robert Badinter. Ici, s'agissant du concubinage, il est homosexuel ou hétérosexuel. Par conséquent, quand on définit le concubinage, il convient de préciser « quel que soit leur sexe », après le mot « personnes ».
« Cela ne sert à rien », m'objecterez-vous. Si, cela sert beaucoup, et ce pour une raison simple : le texte que nous allons voter aujourd'hui n'est pas un texte indifférent. Comme je l'ai expliqué, il est le fruit d'une longue histoire d'exclusions, de rejets, de mépris et quelquefois de violences à l'encontre des homosexuels.
Aujourd'hui, notre société tourne cette page. Ce faisant, nous devons affirmer clairement et fortement, au moment où le code civil reconnaît l'existence du concubinage qui, s'agissant des hétérosexuels, était déjà reconnu dans différents textes, non seulement que la discrimination injuste et si douloureuse frappant les homosexuels - nombre de confidences, de livres, de correspondances et de journaux intimes en témoignent - a disparu de notre droit, mais aussi que nous voulons voir la société s'organiser sur des principes de non-discrimination.
C'est la raison pour laquelle la rédaction de l'amendement n° 56 revêt pour nous une importance extrême. Croyez-moi, ces cinq mots font une très grande différence ! (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Lambert, pour défendre l'amendement n° 31.
M. Alain Lambert. Tout à l'heure, j'ai écouté avec grande attention les explications de vote de mes collègues, qui ont parfois été sévères à l'endroit de ceux qui n'ont pas cru indispensable d'introduire dans le code civil la définition du mariage. Ils ont craint que, finalement, nous n'ayons pas, comme eux, des convictions profondes sur la nécessité de protéger l'institution, que je qualifie de sacrée, qu'est le mariage.
Mes chers collègues, l'amendement n° 31 que je vous propose répond à votre préoccupation. Si, vraiment, vous ne voulez pas que l'institution du mariage soit affectée de quelque façon que ce soit, alors, je vous en supplie, introduisez le dispositif relatif à l'union libre ou au concubinage non dans le droit des personnes, mais dans le droit des contrats, qui est fait pour cela. Vous le savez, le lieu d'insertion de votre dispositif dans le code civil prêtera à interprétation.
Notre excellent collègue M. Braye s'inquiétait tout à l'heure de devoir expliquer à ses concitoyens le vote du Sénat, si celui-ci venait à repousser l'amendement de la commission. Mais, chers collègues, quand vous devrez expliquer à vos concitoyens que vous avez non pas bâti une institution, mais simplement permis à ceux qui le souhaitent d'élaborer un contrat entre eux, ils vous demanderont pourquoi vous avez cru devoir l'introduire absolument dans le livre des personnes.
Par conséquent, si vous croyez vraiment et sincèrement aux propos que vous avez exprimés tout à l'heure, je suis sûr que vous ferez ce qui est sage, c'est-à-dire que vous choisirez d'introduire le dispositif proposé par cet amendement dans le droit des contrats.
Monsieur le rapporteur, mes collègues Jean-Louis Lorrain, Denis Badré et moi-même respectons tellement le travail de la commission des lois, et le vôtre en particulier, que nous ne proposons que quelques modifications par rapport à votre amendement : nous préférons en effet la terminologie « concubinage » à celle d'« union libre », qui nous paraît plus grâcieuse.
M. Pierre Fauchon. C'est sûr ! C'est meilleur du point de vue de la langue française !
M. Alain Lambert. Nous nous sommes inspirés, s'agissant de la forme du dispositif proposé, de l'article 1387 du code civil.
Mes chers collègues, en la circonstance, je ne souhaite en aucune façon gêner le Sénat, et plus particulièrement la majorité sénatoriale. Tout à l'heure, j'ai été le premier - je crois que M. de Raincourt peut m'en donner acte - à considérer que notre groupe devait assurer sans ambiguïté son soutien aux propositions de la commission.
M. Henri de Raincourt. Et je vous en remercie !
M. Alain Lambert. Mais, mes chers amis, la confiance qui existe entre nous nous permet aussi de nous exprimer librement et de croire que, peut-être, nous pouvons améliorer les textes proposés par une commission. (Applaudissement sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance.
M. le président. Monsieur le président de la commission des lois, compte tenu de l'heure, nous allons interrompre maintenant nos travaux sur ce texte ; nous les reprendrons après les questions d'actualité au Gouvernement.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean Faure.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

3

QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Conformément à la règle posée par la conférence des présidents, je rappelle que l'auteur de la question et le ministre qui lui répond disposent chacun de deux minutes trente.
Chaque intervenant aura à coeur, j'en suis certain, de respecter le temps qui lui est imparti afin que toutes les questions et toutes les réponses puissent bénéficier de la retransmission télévisée.
Pardonnez-moi donc par avance si je suis intransigeant !

CARTE SCOLAIRE

M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Madame la ministre, avec son beau film, Ça commence aujourd'hui, Bertrand Tavernier nous rappelle avec émotion et justesse à quel point les souffrances de notre société se manifestent aussi à l'école. En même temps, cette oeuvre reflète le bonheur d'apprendre et de s'éduquer et souligne l'engagement d'enseignants qui consacrent aux enfants beaucoup d'énergie et de compétence.
Cette semaine, des mobilisations importantes rassemblent instituteurs et professeurs. La diversité des préoccupations qui s'expriment traduit les tensions et le malaise évident ressentis par une profession, mais il faut y voir avant tout la volonté unanime d'affirmer une grande ambition pour notre école républicaine.
Il faut entendre ce message, madame la ministre, et s'en saisir comme d'une chance pour la majorité plurielle et pour toute la gauche, qui a toujours levé très haut l'étendard de l'instruction et de la connaissance à côté de celui du progrès social, contrairement à la majorité sénatoriale... (Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste)... qui voulait supprimer 5 milliards de francs au détriment de l'école.
M. Alain Gournac. Nul ! Nul !
M. Jean Chérioux. Vous avez le monopole de la vérité ?
Mme Hélène Luc. Or notre école et ses personnels ont l'immense mérite d'avoir en quelques années accueilli des millions d'élèves et d'étudiants supplémentaires.
Mais l'égalité des chances est en panne. Ainsi, un enfant de famille modeste a huit fois moins de chances qu'un enfant de famille aisée d'obtenir un baccalauréat général.
Madame la ministre, l'inquiétude est grande devant les fermetures de classes et les suppressions d'heures supplémentaires dans les collèges opérées pour la prochaine rentrée prochaine à coup de calculette.
Ne me répondez pas par des chiffres globaux ni par des moyennes : c'est de qualité qu'il est question pour chaque école, pour la réussite de chaque enfant.
Je vous demande de reconsidérer les décisions négatives relatives à la carte scolaire et de nous présenter un collectif budgétaire pour la rentrée.
Comme je vous le demandais en décembre, lors de la discussion du budget, il est urgent...
M. le président. Il vous faut conclure, madame Luc.
Mme Hélène Luc. ... d'organiser à l'université un débat national...
M. Dominique Braye. C'est un peu long !
Mme Hélène Luc. ... pour construire l'école du xxie siècle...
M. Alain Vasselle. La question !
Mme Hélène Luc. ... en associant démocratiquement l'ensemble de la communauté éducative et de la représentation nationale...
M. le président. Madame Luc, je vais être contraint de vous retirer la parole.
Mme Hélène Luc. J'en arrive à ma question, monsieur le président ! (Exclamations amusées sur les travées du RPR.)
Il faut donc organiser un débat sur les réformes à entreprendre et aller plus loin dans la priorité accordée à l'éducation nationale.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire. Madame la sénatrice, vous savez que ce gouvernement a fait de l'éducation nationale l'une de ses priorités.
Cette priorité s'est traduite non seulement dans la déclaration de politique générale du Premier ministre, mais également dans les budgets de 1998 et 1999 : maintien des moyens dans le premier degré malgré la baisse importante du nombre des élèves, création de 3 500 postes dans le second degré, création en deux années de 1 000 postes d'infirmières et d'assistantes sociales.
M. Raymond Courrière. Très bien !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Cette priorité se maintiendra l'an prochain. Vous avez d'ailleurs bien voulu, avec la majorité gouvernementale, voter le budget de l'éducation nationale pour 1999...
Mme Hélène Luc. Non ! nous n'avons pas voté le budget, nous nous sommes abstenus.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. ... alors que la majorité sénatoriale avait alors réduit de 5 milliards de francs le budget de l'éducation nationale. (Vives protestations sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.).
M. Robert Bret. Ils ont oublié ! Ils sont amnésiques !
M. Henri de Raincourt. Voilà autre chose !
Mme Nelly Olin. C'est incroyable !
M. le président. Je vous en prie, seule Mme le ministre a la parole !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Enfin, la relance des zones d'éducation prioritaire constitue la marque que ce gouvernement concentre ses moyens sur les élèves qui en ont le plus besoin.
En ce qui concerne la carte scolaire, non, madame, il n'y aura pas de fermetures nettes de classes. (Rires sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
Mme Nelly Olin. Venez voir à Garges-lès-Gonesse !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. En effet, malgré la baisse de 30 000 élèves dans le premier degré, le Gouvernement maintient intacts les moyens d'enseignement alors que, je le rappelle, le gouvernement précédent avait supprimé en quatre ans 5 000 emplois.
Pour la deuxième année consécutive, nous maintenons intact le nombre d'enseignants. Mais il est vrai qu'en même temps nous veillons à la justice scolaire et que nous répartissons de façon plus juste nos efforts sur l'ensemble du territoire pour ouvrir des classes là où il y a une poussée démographique, pour maintenir les moyens en zone d'éducation prioritaire et pour tenir compte de la réalité rurale afin, en effet, de tenir compte du rôle de l'école en matière d'aménagement du territoire.
Voilà, madame la sénatrice, les éléments de réponse que je peux vous apporter.
Mme Nelly Olin. C'est incroyable !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Sachez en tout cas que l'école consistue l'une des priorités de ce gouvernement. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
Mme Nelly Olin. Cela se voit !
Mme Hélène Luc. Et le collectif budgétaire ?

réforme du droit au bail

M. le président. La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Le lundi 15 mars, les contribuables soumis à l'impôt sur le revenu étaient invités à déposer sans délai leur déclaration auprès des services fiscaux. A cette occasion, une nouveauté n'a pas échappé à de très nombreux compatriotes : la réforme de droit au bail. (Exclamations ironiques sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Henri de Raincourt. C'est une réussite !
M. Jacques Machet. L'objectif officiellement affiché par le Gouvernement était de simplifier le système. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
Les propriétaires bailleurs n'ont désormais qu'une seule déclaration à faire dans le cadre de celle de leurs revenus, et le paiement des taxes interviendra en même temps que l'impôt sur le revenu.
Tout ce qui permet d'alléger les formalités administratives va dans le bons sens, et le Sénat ne peut évidemment que l'approuver. Mais...
M. Alain Vasselle. Car il y a un mais !
M. Jacques Machet. ... ce qui a provoqué, en décembre dernier, l'opposition de notre majorité sénatoriale à cette réforme est le mécanisme d'imposition transitoire.
En effet, normalement, n'aurait dû être exigible en 1999 que la partie des taxes dues pour le seul dernier trimestre 1998, les contribuables ayant déjà acquitté le droit au bail pour la période précédente. Or les loyers perçus entre le 1er janvier et le 30 septembre 1998 serviront bien de référence pour le calcul de la nouvelle contribution de 1999 !
C'est ce que nous avait d'ailleurs indiqué M. le secrétaire d'Etat au budget lors de la séance de notre assemblée du 14 décembre. Il confirmait ainsi que les craintes exprimées alors, notamment par notre collègue et ami Alain Lambert, membre du groupe de l'Union centriste et président de la commission des finances du Sénat.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire concrètement pour rassurer les propriétaires de bonne foi qui ne pourront récupérer le trop-perçu qu'en fin de bail, après neuf mois de vacances du logement ? Et le perdant, dans cette opération, ne risque-t-il pas d'être, finalement, le locataire, à qui le bailleur pourrait demander le reversement du supplément de taxation ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu souligner que cette réforme du droit de bail et de la contribution additionnelle au droit de bail visait à apporter une simplification. En effet, au mois d'octobre prochain, c'est-à-dire en octobre 1999, les propriétaires bailleurs - ils sont 5 millions - n'auront plus ni à remplir un questionnaire compliqué ni à faire un paiement distinct.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. La réforme - vous l'avez très bien décrite - consiste à asseoir le droit de bail sur la même assiette qu'antérieurement, mais à le faire apparaître dans le cadre de la déclaration de l'impôt sur le revenu.
J'ajoute que cette réforme présente un avantage. Alors que, dans l'ancien système, le droit de bail portait sur les loyers courus, seuls les loyers effectivement perçus seront désormais taxés dans le nouveau système, ce qui est plutôt rassurant pour les propriétaires.
Cette réforme - vous n'avez pas présenté d'objection à ce sujet - se fait à rendement constant : le droit de bail et la contribution additionnelle rapportent environ 10 milliards de francs et cette somme ne variera pas en 1999. Tout propriétaire bailleur paiera, grosso modo, la même somme en septembre 1999 qu'en octobre 1998.
Vous avez présenté un recours devant le Conseil constitutionnel. Ce dernier a reconnu qu'il n'y avait pas double imposition, puisque le contribuable ne paiera qu'une fois dans l'année. Cela dit - et vous l'avez souligné - les contribuables ont dû remplir de nouvelles lignes assez complexes dans leur déclaration d'impôt sur le revenu.
Puisque cette année est une année de transition, j'ai demandé à l'administration fiscale - je réponds ainsi concrètement à votre question, qui a d'ailleurs été posée par de nombreux parlementaires - d'examiner avec bienveillance les déclarations qui, de bonne foi, n'auraient pas été parfaitement remplies. Pour la première année d'application de cette mesure, les déclarations souscrites dans les délais légaux qui comporteront des erreurs matérielles seront donc examinées avec une bienveillance particulière. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)

PROBLÈMES DE SÛRETÉ NUCLÉAIRE

M. le président. La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie.
Dans son rapport pour 1998, rendu public hier, la direction de la sûreté des installations nucléaires présente des conclusions préoccupantes. Elle répertorie en effet 376 incidents qualifiés de « significatifs » concernant la sûreté nucléaire sur le parc EDF, sans événement grave toutefois.
Mais nous avons tous en mémoire qu'en 1999 on a déjà noté un incident grave dont a été victime - mais victime un peu responsable compte tenu de ses compétences - un agent spécialisé en sécurité nucléaire.
Les termes du rapport sont troublants : « négligence » dans les transports de combustibles usés, « endormissement » face au vieillissement des centrales, « laisser-faire », « oubli de choses très simples » et, enfin, « règles bafouées » régulièrement depuis dix ans en l'absence de tout contrôle de l'Etat !
Monsieur le secrétaire d'Etat, ces termes inquiétants sont-ils tous, à vos yeux, justifiés ?
Cette mise en cause directe d'EDF, à l'heure de l'ouverture à la concurrence, est sévère.
Le rapport pose deux questions.
Comment, d'une part, assurer un bon fonctionnement des procédures de sécurité internes à EDF, comment faire en sorte que toutes les responsabilités soient prises au bon niveau et les travaux nécessaires réalisés en temps utile ?
Comment, d'autre part, garantir au sein des services compétents de l'Etat un contrôle régulier et le plus sécurisant possible pour nos concitoyens, pour nous, pour le public, pour EDF, pour la direction de la sûreté des installations nucléaires, pour l'Office de protection contre les radiations ionisantes, demain pour l'autorité nouvelle annoncée le 9 décembre dernier par le Gouvernement ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, comment jouera la cohésion indispensable entre ces organes ? Autrement dit, qui contrôle, qui décide et qui assure la sécurité dans ce domaine industriel ?
Il convient que le Gouvernement apporte une réponse rapide et claire. La place majeure qu'il a confirmée - et que nous soutenons - pour notre industrie nucléaire dans la politique énergétique de la France le réclame.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quel est votre jugement, quelles sont vos réflexions face à ce rapport, et quelles sont les mesures que vous envisagez de prendre pour répondre à ces critiques ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, à la suite d'un incident grave à la centrale du Tricastin, un certain nombre de problèmes sont devenus d'actualité. Cet incident, je le rappelle, a mis en cause un agent qui a pénétré dans une « zone rouge », où la radioactivité est particulièrement élevée et où l'accès est strictement réglementé : il n'est possible que moyennant une autorisation écrite de la direction de la centrale, autorisation qui, en l'occurrence, n'avait pas été sollicitée.
Le problème de la sécurité et de la radioprotection est donc posé.
La direction de la sûreté des installations nucléaires, la DSIN, et l'office de protection contre l'irradiation ionisante, l'OPRI, ont immédiatement diligenté une inspection à la centrale du Tricastin, en compagnie de l'inspecteur du travail compétent. Un procès-verbal a été dressé pour dépassement des limites en vigueur d'irradiation des travailleurs.
Au-delà, c'est le sens de votre question - cet incident fait apparaître la nécessité de renforcer le contrôle de l'inspection du travail dans les centrales électronucléaires. C'est pourquoi, avec Mme Martine Aubry et M. Bernard Kouchner, nous avons demandé aux agents des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les DRIRE, agissant en qualité d'inspecteurs du travail, et au président de l'OPRI de mener une campagne vigoureuse et systématique sur tous les sites électronucléaires en vue d'un respect pleinement satisfaisant de la protection des travailleurs contre les rayonnements.
Sur le fondement de ces contrôles, et indépendamment des suites judiciaires éventuelles de l'affaire du Tricastin, que vous avez évoquée, un programme d'action sera demandé à EDF pour éviter la répétition de tels dysfonctionnements.
Le président d'EDF lui-même a par ailleurs fait connaître sa préoccupation devant cet incident et sa volonté d'éviter son renouvellement par des mesures d'organisation adaptées. Il doit rendre public prochainement des propositions faisant suite au rapport qu'il a commandité à M. Curien, à ma demande, dès qu'il a été nommé à la présidence d'EDF.
Nous aurons l'occasion d'en reparler dans la plus grande des transparences et avec une attention toute particulière pour la sécurité, s'agissant des rayonnements ionisants, de tous les personnels et de toutes les personnes qui approchent les centrales nucléaires ou qui y pénètrent. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

COUR DE JUSTICE DE LA RÉPUBLIQUE

M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. Madame la ministre de la justice, la Cour de justice de la République a rendu son arrêt dans l'affaire du sang contaminé, un arrêt qui ressemble à une décision de droit, mais qui n'en est qu'une forme dégénérée.
M. René-Pierre Signé. Politique !
M. Guy Allouche. Comme la souffrance des uns et des autres laisse rarement place à la compréhension, ce procès mal engagé ne pouvait que mal se conclure.
Le verdict de la Cour de justice de la République est à l'image de sa composition, de son instruction et du déroulement du procès : il est politique.
M. René-Pierre Signé. Eh oui !
M. Guy Allouche. On reprochait à la politique d'être à l'abri de la justice. En la circonstance, c'est la justice qui, pour se mettre à l'abri des citoyens, a fait de la politique.
Comment tenir un procès dont l'accusation ne veut pas ? Oui, mes chers collègues, à deux reprises, le procureur général, puis l'avocat général, dans leur réquisitoire, ont considéré qu'il n'y avait matière ni à poursuites, ni à condamnation, car rien, dans le dossier, tel qu'il est apparu, ne permettait d'établir une responsabilité pénale.
La Cour de justice de la République est apparue pour ce qu'elle était dès sa création : une juridiction politique, une juridiction d'exception, une juridiction conjoncturelle.
Lors de nos débats, en 1993, tant ici, au Sénat, qu'au Congrès de Versailles, notre ami Michel Dreyfus-Schmidt n'a eu de cesse de mettre en garde le Gouvernement et la Haute Assemblée contre l'amalgame entre la responsabilité pénale et la responsabilité politique. En juriste éminent et avec prémonition, Michel Dreyfus-Schmidt dénonçait déjà cette monstruosité juridique dont nous avons tous constaté, pour les déplorer, les nombreux dysfonctionnements qui ont émaillé ce procès singulier.
Madame la ministre, est-il besoin de souligner que cette expérience malheureuse de la Cour de justice de la République annonce une profonde évolution ?
Comme il est probable que le Gouvernement se soit livré à une analyse du déroulement de ce procès, nous est-il possible de connaître les premiers enseignements qu'il en a tirés ? (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, nous devons en effet avoir tous à coeur de tirer les leçons du procès qui vient d'avoir lieu devant la Cour de justice de la République. Nous devons toutefois le faire sans précipitation, dans la sérénité, en évitant toute forme de pression sous l'émotion du moment. C'est peut-être aussi ce qui a manqué en 1993 !
Pour tirer correctement les leçons de ce procès, il convient, me semble-t-il, avant de poser les questions relatives à la Cour de justice de la République elle-même, de se poser d'abord la question de savoir comment l'on peut clarifier le champ de la responsabilité politique par rapport à la responsabilité pénale, la responsabilité administrative et la responsabilité civile.
M. Jean Chérioux. Tout à fait d'accord !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le problème que nous affrontons, beaucoup plus large que celui qui vise, en l'occurrence, les ministres, puisqu'il concerne de plus en plus souvent les maires, les médecins, les enseignants, les chefs d'entreprise, c'est celui de la pénalisation croissante de notre vie publique.
Plusieurs sénateurs du RPR. Eh oui !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Face à ce problème plus général, j'ai déjà eu l'occasion d'indiquer à deux reprises devant le Sénat quelles étaient les pistes suivies par le Gouvernement.
Je signale que j'ai présenté, hier, en conseil des ministres, un projet de loi visant à améliorer les procédures d'urgence devant la justice administrative. Cela ne répond qu'à une partie du problème, mais nous voyons bien que tout est lié. En effet, si la justice administrative statuait plus vite, peut-être réussirions-nous à limiter le recours à la responsabilité pénale.
Au-delà, puisque, vous le savez, le Gouvernement ne veut en aucun cas préjuger, nous ne devons pas nous interdire de voir, d'abord, à partir de quels principes la commission Vedel, qui avait abouti à la réforme de 1993, a travaillé. Ces principes étaient au nombre de quatre : ne pas soumettre l'ouverture des poursuites à une décision préalable des assemblées ; interdire qu'à la faveur des plaintes avec constitution de partie civile les ministres soient constamment exposés à devoir se justifier devant les juges ; confier l'instruction à la chambre d'instruction composée de magistrats à la Cour de cassation ; ne pas composer la juridiction de jugement seulement de magistrats ou seulement de parlementaires.
Aujourd'hui, peut-être faut-il, en effet, oser d'autres questions, ouvrir d'autres perspectives. Faut-il, par exemple, maintenir l'existence d'une juridiction d'exception et, dans l'affirmative, dans quelle composition ?
Mais, vous le voyez, pour répondre à cette question, il faut d'abord clarifier le champ de la responsabilité politique et celui de la responsabilité pénale, car, bien évidemment, plus nous arriverons à clarifier ces champs, moins nous aurons besoin d'une juridiction d'exception.
M. le président. Veuillez conclure, madame le ministre.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. J'en termine, monsieur le président.
Toutes sortes de questions se posent que je ne veux pas détailler ici : à qui faut-il confier l'instruction ? Faut-il avoir une procédure criminelle ou une procédure correctionnelle ? Quelle place donner aux victimes ? - Autre question extrêmement importante.
Le temps des conclusions viendra à son heure. Je crois qu'il nous faut laisser le temps au débat. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen. - MM. Jean-Jacques Hyest et Lucien Neuwirth applaudissent également.)

ÉTAT DES NÉGOCIATIONS SUR LA RÉFORME DE LA PAC

M. le président. La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet. M. le ministre de l'agriculture et de la pêche, à qui s'adressait ma question, étant malheureusement retenu en ce moment même au congrès de la fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles à Versailles, je me tourne donc vers M. le ministre des relations avec le Parlement.
Dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune, M. le ministre de l'agriculture et de la pêche s'est laissé imposer un compromis proposé par la présidence allemande du Conseil des ministres. Cet accord, qui confirme les propositions libérales de la Commission européenne émises depuis plus d'un an, n'est pas acceptable pour l'agriculture française.
A un moment où ces négociations conditionnent l'avenir de notre agriculture sur le plan tant national qu'européen et international, à un moment où notre pays doit à la fois réaffirmer la vocation exportatrice de son agriculture, en refusant le déclin auquel la conduirait le repli sur elle-même, et valoriser l'ensemble de son territoire, à un moment où l'ensemble des acteurs du monde rural manifestent leur profond désarroi, ce compromis affaiblit les organisations communes de marché et rompt les principes fondateurs de la politique agricole commune.
Le groupe du RPR s'oppose fermement à cette perspective. Cette opposition passe notamment par le refus d'une politique systématique de diminution des prix pour le secteur des céréales et de la viande bovine, et d'une réforme à la fois inutile et coûteuse en ce qui concerne le lait. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
Ce compromis est, malheureusement, dans la logique de la politique du Gouvernement menée depuis plusieurs mois, que ce soit au travers du projet d'orientation agricole ou du projet de loi d'orientation pour l'aménagement du territoire, qui ne donnent pas, à l'aube du xxie siècle, une nouvelle dimension économique à l'agriculture et à la ruralité.
Cette politique a incontestablement fragilisé la France à la veille des négociations de Bruxelles. On est en effet peu crédible à combattre une démarche sur le plan international quand on organise par avance sa mise en application sur le plan national.
M. Dominique Braye. Exactement !
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Jean Bizet. En conséquence, à la veille de la réunion des 24 et 25 mars prochain,...
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Bizet.
M. Jean Bizet. ... qui devrait permettre la recherche d'un compromis final, que propose désormais le ministre de l'agriculture et de la pêche, qui a laissé la France s'isoler dans une position critique, pour défendre au mieux les intérêts de la France ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir excuser Jean Glavany, qui m'a chargé de vous apporter la réponse qu'il aurait aimé vous faire lui-même.
Comme le Président de la République et le Premier ministre ont eu l'occasion de le dire, l'esquisse de compromis établie sous la responsabilité de la présidence allemande, le 11 mars dernier, au Conseil agriculture, ne constitue en rien un accord définitif sur la réforme de la PAC.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Il n'y a pas eu de vote et la présidence allemande nous situe clairement dans la minorité. Le ministre de l'agriculture et de la pêche a déposé, dès le 11 mars, quatre réserves officielles de la France.
Il reste que des avancées ont été obtenues, le 11 mars, par M. Glavany, surtout par comparaison avec le précédent projet de compromis, établi le 25 février dernier avec l'évidente volonté d'isoler la France et de la contraindre au cofinancement.
L'abandon, pour l'heure, du cofinancement, qui, lui, aurait provoqué la rupture des principes fondateurs de la PAC, est une première avancée. Attendons, cependant, que tout soit signé pour en être assurés.
Deuxième avancée : un bon paquet « viande bovine », avec une baisse des prix limitée à 20 % (Exclamations sur les travées du RPR) au lieu de 30 %, là où les professionnels demandaient 15 %, et une bonne compensation pour le troupeau allaitant extensif, indispensable à l'équilibre de régions fragiles.
M. Jean Chérioux. C'est insuffisant !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Troisième avancée : un très bon paquet « vin », avec des possibilités d'expansion et de reconversion du vignoble. Les professionnels ne s'y trompent pas, qui manifestent afin que ces acquis ne soient pas remis en cause à Berlin.
Il reste cependant des points d'ombre : le lait, pour lequel les quotas ont été sauvegardés jusqu'en 2006 au moins, mais pour lequel une réforme inutile est envisagée ; les céréales, avec une baisse des prix excessive ; enfin, les oléagineux, à propos desquels une faute stratégique se prépare face aux Américains.
La négociation n'est cependant pas achevée d'ici à Berlin, et nous devons donc rechercher des améliorations du paquet agricole. Nos partenaires européens admettent tous que deux questions essentielles restent posées.
Comment traiter le dérapage budgétaire du 11 mars ? Répondre à cette question, c'est s'interroger sur des projets coûteux, comme la réforme du lait ou les baisses qu'il faut compenser.
Comment réorienter la PAC vers le développement rural pour prendre en compte la petite et moyenne exploitation, créer de l'activité et de l'emploi en milieu rural, préserver l'environnement, rééquilibrer les soutiens vers les zones de montagne par exemple et les productions fragiles, le tout en pleine cohérence avec le projet de loi d'orientation agricole ?
Des réponses devront être apportées à Berlin sur ces questions majeures, grâce au travail d'une délégation française qui demeurera unie, comme elle l'est depuis le début de cette difficile négociation européenne, dans la défense des intérêts de l'agriculture française, du pays tout entier et de la construction de l'Europe. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Je constate que tous les intervenants ont, jusqu'à présent, dépassé le temps de parole qui leur était imparti. Je vais donc être contraint de couper le micro des orateurs suivants dès qu'ils auront dépassé les deux minutes trente autorisées.

LOGICIELS UTILISÉS PAR L'ADMINISTRATION

M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Ma question, qui s'adressait à M. le Premier ministre, porte sur l'utilisation d'Internet en matière de correspondance administrative et sur le choix des logiciels utilisés par l'administration.
C'est la fête de l'Internet, et M. le Premier ministre a rappelé hier soir la détermination du Gouvernement à développer l'usage de ce réseau, ce qui devrait réjouir tous ceux qui, au Sénat, sont, comme moi, convaincus que la France doit combler son retard en ce domaine.
Cependant, la préfecture des Alpes-Maritimes, lorsque j'ai voulu convoquer par messagerie électronique une réunion sur le schéma directeur de Nice, m'a précisé que ce n'était pas légal.
Pourtant, il serait urgent de moderniser, de simplifier et de dimininuer les dépenses administratives. Le dépôt d'un projet de loi avait été annoncé le 19 janvier dernier, et je voudrais savoir, monsieur le secrétaire d'Etat à l'industrie, si ce projet de loi prévoira, outre la légalisation de l'usage du réseau Internet sécurisé, l'obligation, pour les préfets et les services décentralisés de l'Etat, de communiquer avec les collectivités locales par messagerie électronique, l'obligation pour l'Etat et les collectivités locales de lancer tous les appels d'offres pour les contrats publics par voie de messagerie électronique et, enfin, la révision à la baisse des délais légaux prévus dans le code des marchés publics et le code des collectivités locales.
Par ailleurs, il faudrait préciser dans la loi que collectivités locales et Etat devront utiliser des logiciels libres. En effet, il faut garantir la pérennité des données numériques de l'administration et assurer le libre accès du citoyen à l'information, ce qui implique que les normes de communication utilisées par l'administration ne fassent pas l'objet de brevets ou de droits d'auteur. Il existe, fort heureusement, d'excellents logiciels libres.
Par conséquent, la loi pourra-t-elle faciliter la mise en place d'un corpus minimal de logiciels libres afin d'éviter aux administrations et aux usagers de recourir à des logiciels d'autant plus onéreux que leur remise à jour est fréquente par suite de la stratégie commerciale de certaines firmes dominantes sur le marché ?
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Pierre Laffitte. Un tel usage par l'administration de logiciels libres, publiés depuis plus d'un an et dont les auteurs concèdent un contrat de licence public libre de droits, sera-t-il prévu dans le projet de loi sus-évoqué ? Cela permettrait en particulier de réaliser des économies.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué les positions avant-gardistes qu'a prises, à l'occasion de la fête de l'Internet, M. le Premier ministre, soucieux qu'il est de placer la France dans le peloton de tête des pays maîtrisant ces technologies, par la mise en oeuvre du programme d'action gouvernemental par la mise en oeuvre du programme d'action gouvernemental.
Un projet de loi sur la signature électronique des documents envoyés via Internet a été annoncé par M. le Premier ministre et est en cours d'élaboration.
L'ensemble des préfectures sera doté de systèmes d'information territoriaux qui permettront aux services déconcentrés de l'Etat d'utiliser une messagerie commune et de partager des banques de données. La correspondance par Internet entre les préfectures et les collectivités territoriales s'en trouvera facilitée.
S'agissant des appels d'offres, pour faciliter la transparence des procédures et l'égalité entre les entreprises, l'Etat s'est d'ores et déjà engagé à ce que tous les marchés qu'il lance soient diffusés gratuitement sur Internet : cette diffusion sera en place sur le site du Journal officiel dès l'été 1999.
Sur toutes les questions techniques que vous avez évoquées, l'Etat a besoin d'une expertise en son sein. C'est pourquoi le Gouvernement a mis en place une mission interministérielle pour le développement des technologies de l'information dans l'administration. Celle-ci a notamment pour objectif d'établir des référentiels techniques pour l'administration et de veiller au respect des standards ouverts. C'est ainsi qu'elle a été conduite à organiser une réunion générale d'information sur les logiciels libres de droits, en janvier dernier, afin de développer, ce qui, à mes yeux, est très important, l'utilisation des logiciels libres dans les administrations, de l'Etat en particulier.
Enfin, un groupe de travail du Commissariat du Plan présidé par M. Bruno Lasserre est chargé de donner des éléments de réponse concrets pour l'utilisation d'Internet dans les administrations, afin d'améliorer leur fonctionnement et d'offrir aux usagers un service plus moderne.
Modernisation, facilité d'accès, en un mot citoyenneté, voilà l'un des éléments fondamentaux du programme d'action gouvernemental en faveur des nouvelles technologies de l'information et de la communication. (Applaudissements sur les travées socialistes. - M. Laffitte applaudit également.)

SITUATION DES JEUNES DIPLÔMÉS SURSITAIRES
À L'ÉGARD DU SERVICE NATIONAL

M. le président. La parole est à M. Huchon.
M. Jean Huchon. J'attire l'attention de M. le ministre de la défense sur la situation des jeunes diplômés de l'enseignement supérieur sursitaires à l'égard du service national et ayant trouvé un emploi stable à l'issue de leur formation universitaire ou post-baccalauréat professionnel.
Ces jeunes gens, conscients des difficultés actuelles du marché de l'emploi pour un jeune diplômé, saisissent, dès qu'elle se présente, la première opportunité, généralement au cours d'un stage de formation en entreprise, pour intégrer la vie active.
Cette situation est vécue comme une réelle chance, qui a peu de possibilités de se reproduire. Mais, dans bien des cas, les autorités militaires y semblent insensibles et demandent aux jeunes appelés d'effectuer coûte que coûte leur service national.
A la veille de la suppression définitive du service national, où le problème ne se posera plus, et avec la perspective de la mise en place d'une armée de métier, les jeunes hommes vivent très mal cette situation. Ils redoutent, en effet, de ne pas pouvoir retrouver un emploi à l'issue de leur service militaire et de gonfler les rangs des chômeurs. Bref, ils ne comprennent pas l'insensibilité de l'institution militaire face à l'enjeu de leur avenir, qui se joue sur un moment décisif.
Mme Nelly Olin. C'est vrai !
M. Jean Huchon. C'est pourquoi je souhaiterais connaître les mesures que M. le ministre de la défense compte prendre afin d'aider ces jeunes à se maintenir dans leur emploi. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire. Monsieur le sénateur, M. Alain Richard, absent de Paris en raison d'une réunion trilatérale en Allemagne, m'a chargée de vous communiquer les éléments de réponse suivants.
Tout d'abord, il convient de rappeler que sont astreints aux obligations du service national, sous sa forme traditionnelle, c'est-à-dire l'appel sous les drapeaux, tous les jeunes hommes nés avant le 1er janvier 1979.
Toutefois, le code du service national contient des dispositions nouvelles qui permettent désormais aux étudiants, mais également aux jeunes en formation professionnelle, de reporter jusqu'à l'année de leurs vingt-six ans leur incorporation. Il suffit pour cela de justifier annuellement de la poursuite d'études ou d'une formation professionnelle. Cette disposition est particulièrement utile aux jeunes qui poursuivent des cycles d'études longs, qui devaient auparavant être incorporés dans l'année de leurs vingt-quatre ans, sauf cas particuliers.
M. Pierre Hérisson. Ça, on le sait déjà !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Dans ce cas, est-ce que je continue tout de même à vous répondre ?
Un sénateur du RPR. La question portait sur l'emploi !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Je n'ai pas beaucoup d'éléments sur l'emploi, car il a avait été dit à M. Alain Richard qu'il allait être interrogé sur les problèmes posés aux jeunes qui souhaitent poursuivre leurs études !
Je poursuis cependant l'énoncée la réponse de M. Alain Richard.
Une autre disposition nouvelle particulière a également été adoptée. Elle étend le report spécial d'incorporation aux étudiants, aux médecins, pharmaciens, vétérinaires, etc. ; leur incorporation pouvant désormais être reportée jusqu'à l'année civile de leurs vingt-huit ans et non de leurs vingt-sept ans, comme cela était le cas auparavant.
Pour le Gouvernement, l'équilibre recherché, c'est-à-dire la réalisation des besoins des armées en appelés pendant la phase cruciale de professionnalisation qui s'achève en 2002 et l'aspiration naturelle de chacun de nos jeunes concitoyens à concilier ce devoir civique avec son propre parcours personnel, est effectivement atteint.
En ce qui concerne l'élément primordial de votre question, auquel je n'ai pas répondu aujourd'hui, monsieur le sénateur, je le communiquerai à M. Alain Richard, afin qu'il puisse vous répondre par écrit, car je partage vos préoccupations. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.

coûts d'accès à internet

M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Ma question s'adresse à M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.
Du 19 au 21 mars, la France va célébrer la fête de l'Internet. Cette fête doit être l'occasion de mesurer l'importance des progrès réalisés par notre pays grâce au plan gouvernemental pour la société de l'information lancé dès janvier 1998 par Lionel Jospin.
Je citerai quelques exemples : l'augmentation de 163 % du nombre d'internautes français en un an, l'équipement et le raccordement des établissements scolaires, l'ouverture de sites librement accessibles dans tous les ministères, les aides importantes apportées par l'Etat aux entreprises de ce secteur - 3,6 milliards de francs en 1999, comme l'a dit hier M. le Premier ministre.
Néanmoins, nous devons veiller à ce que ces nouvelles technologies ne créent pas ou ne renforcent pas les inégalités sociales. Je sais que c'est une des préoccupations majeures du Gouvernement, et je salue votre initiative, monsieur le secrétaire d'Etat, d'installer des bornes publiques d'accès à Internet, dans les bureaux de poste et les agences de l'ANPE.
Malheureusement, les inégalités d'accès à Internet demeurent une réalité dans notre pays.
L'internaute type est un homme, cadre supérieur ou cadre moyen,...
Plusieurs orateurs du RPR. Demandez la parité !
Mme Danièle Pourtaud. ... un homme jeune, qui habite Paris ou l'Ile-de-France. Si plus de 8 % des Français utilisent régulièrement l'Internet, 70 % d'entre eux ne l'ont jamais essayé.
« Cela revient cher d'utiliser Internet » ont répondu 84 % des Français et 65 % des internautes à un sondage de la SOFRES en novembre 1998.
En fait, si se connecter est aujourd'hui assez simple et peu coûteux, « surfer » coûte cher, voire très cher, car l'utilisateur paie la communication à la durée, au prix d'une communication téléphonique locale.
Qu'on se connecte pour faire ses devoirs, chercher des renseignements administratifs, préparer ses vacances ou dialoguer avec les amateurs de Proust du monde entier, le temps passe vite, très vite. Ainsi, on constate qu'en France la durée mensuelle moyenne de connexion est aujourd'hui d'environ 50 heures, ce qui équivaut à 835 francs par mois, hors abonnement.
En réponse aux protestations des internautes français et conscient de l'enjeu, vous avez, monsieur le secrétaire d'Etat, demandé à l'Autorité de régulation des télécommunications de rechercher avec les opérateurs une solution plus favorable aux internautes.
M. le président. Je vous prie de conclure, madame Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Ma question est double, monsieur le secrétaire d'Etat : pouvez-vous nous dire ce qu'il en est aujourd'hui ? Par ailleurs, ne pensez-vous pas que l'utilisation d'Internet devrait faire partie du service universel du téléphone, auquel tous les Français ont droit ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux. Qui paiera ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Madame le sénateur, le Gouvernement est très sensible aux inquiétudes des internautes, qui estiment que les tarifs des communications locales sont trop élevées et qui souhaiteraient la mise en place d'un forfait d'heures d'accès à Internet, surtout aujourd'hui, à la veille de la fête de l'Internet.
Avec M. Dominique Strauss-Kahn, au mois de décembre, j'ai saisi l'Autorité de régulation des télécommunications en ce sens. Son président mène actuellement une large consultation avec les opérateurs des télécommunications, les fournisseurs d'accès à Internet et les associations d'internautes afin de déterminer les efforts qui peuvent être entrepris en matière de tarifs.
Le Gouvernement souhaite que cette concertation aboutisse rapidement, je l'ai rappelé voilà quelques heures au président de l'Autorité de régulation des télécommunications.
Il faut être plus favorable aux internautes, dans le respect de la concurrence entre les opérateurs.
La mise en place d'un forfait est l'une des voies qu'il paraît utile d'approfondir. France Télécom a fait une proposition en ce sens et je souhaite que l'autorité de régulation puisse l'étudier rapidement.
Cependant, une véritable réponse sera apportée aux internautes lorsque des accès forfaitaires à Internet à haut débit seront disponibles.
Depuis 1998, les opérateurs de réseau câblé développent de telles offres à un coût d'abonnement d'environ 280 francs par mois.
Mais la véritable solution réside dans l'utilisation de la technologie ADSL, qui permet un accès forfaitaire à haut débit sur les lignes téléphoniques classiques.
En Allemagne, Deutsche Telekom vient d'annoncer le lancement d'une telle offre pour le mois d'avril prochain. En France, France Télécom mène depuis un an des expérimentations qui se révèlent concluantes. Il faut maintenant envisager le déploiement de cette technologie en France. France Télécom m'a indiqué qu'elle allait prochainement soumettre une telle offre aux pouvoirs publics qui devrait permettre d'apporter une réponse à la problématique du coût d'accès à Internet, tout en permettant l'exercice d'une libre concurrence entre les opérateurs de télécommunications. Nous allons enfin entrer dans l'ère de l'Internet à haut débit accessible à tous !
M. Emmanuel Hamel. Grâce à Michel Bon !

CATASTROPHES NATURELLES EN SAVOIE

M. le président. La parole est à M. Barnier.
M. Michel Barnier. Madame le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ; la montagne, comme la mer, est souvent imprévisible. Elle n'est pas toujours imprévisible, mais on sait les risques ou les dangers qui s'y attachent, et chacun a en mémoire les récentes catastrophes d'Autriche, du Val-d'Aoste ou de Chamonix.
En Savoie, comme dans toutes les régions de montagne, nous vivons en côtoyant ces risques. Dans de nombreuses vallées de haute montagne, comme la Maurienne ou la Tarentaise, des villages sont souvent et longtemps isolés du fait des avalanches. Ainsi, la vallée de la Tarentaise, qui accueille chaque semaine 300 000 vacanciers, est actuellement menacée par des éboulements, la route nationale en particulier. Cette situation est insupportable : la sécurité des personnes doit être assurée.
Nous avons demandé au Gouvernement, avec M. Hervé Gaymard, député de cette circonscription, de mettre en oeuvre un plan de sécurisation des accès, notamment de la route nationale. Il faut que le Gouvernement auquel vous appartenez, madame le ministre, prenne la mesure exacte de sa responsabilité par rapport à la route nationale. Naturellement, pour ce qui nous concerne, nous continuerons à assumer notre responsabilité pour les autres axes.
Mais c'est d'une petite commune de montagne que je veux vous parler maintenant : celle de La Perrière, dont les soixante-sept habitants ont été évacués, la montagne qui surplombe la commune menaçant de s'écrouler sur leurs maisons. Le prix de cette évacuation, de cette précaution, de cette prévention, ne peut être assumé par cette seule petite commune. Le conseil général que j'ai l'honneur d'animer sera solidaire, mais cela ne suffira pas.
Lorsque j'exerçais les fonctions de ministre de l'environnement à votre place, madame le ministre, j'avais, avec l'appui du Sénat d'ailleurs, fait adopter, à l'occasion de la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, une disposition originale, à savoir la possibilité, dans certains cas exceptionnels, de faire jouer la loi relative à l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles, et cela avant même qu'une catastrophe ne se produise, quand on est sûr qu'elle va se produire.
Mes questions sont simples, madame la ministre.
Sous quelle forme, par l'intermédiaire du Gouvernement, la solidarité nationale va-t-elle jouer immédiatement au profit de cette petite commune ?
La prévention étant toujours préférable à la réparation, êtes-vous d'accord pour élargir les dispositions de la loi de 1995 et financer, grâce au fonds spécial, le prix de la prévention pour le cas de la commune de La Perrière, comme pour les autres cas, suite aux catastrophes qui, malheureusement, se produiront ailleurs en France ? (Applaudissements sur les travées du Rassemblement pour la République, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du Rassemblement démocratique et social européen.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, l'instabilité du piton rocheux de la Becqua est connue depuis longtemps puisque, en 1974 déjà, un millier de mètres cubes de roches s'étaient écroulées.
Une accélération du phénomène a été observée au début de la décennie quatre-vingt-dix. Elle a conduit la commune à mettre en place des mesures de prévention pertinentes : un dispositif automatisé de surveillance du site instable dès 1992 et des ouvrages de protection pareblocs destinés à interrompre la trajectoire des blocs détachés de la falaise en cas de rupture de celle-ci.
Le mercredi 10 mars 1999, le maire de La Perrière a fait procéder à l'évacuation de soixante-sept personnes en raison de la menace d'un éboulement de même ampleur que celui de 1974. Quarante personnes sont actuellement relogées aux frais de la commune pour un coût journalier dont l'évaluation serait de 10 000 à 15 000 francs par jour.
La prise en charge de l'hébergement des personnes évacuées par arrêté municipal est de la libre appréciation des maires concernés, qui peuvent éventuellement obtenir l'aide des conseils généraux. Vous avez d'ailleurs rappelé, monsieur le sénateur, que le conseil général de la Savoie avait rapidement confirmé son assistance.
M. Emmanuel Hamel. Il a un grand président !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Mon ministère ne dispose pas, à l'heure actuelle, de crédits spécifiques permettant de contribuer à cette prise en charge. Le ministère de l'intérieur, quant à lui, dispose de possibilités qui correspondent à des secours d'extrême urgence pour l'aide aux victimes de calamités publiques. Il a d'ailleurs été saisi par le préfet de la Savoie, qui souhaite savoir quelle pourrait être la contribution du ministère de l'intérieur aux frais d'hébergement des personnes évacuées.
Quant au fonds institué par la loi de 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, il concerne, vous le savez bien, des expropriations définitives des biens exposés au risque. Il ne semble donc pas pouvoir être mobilisé dans le cas spécifique de La Perrière.
En revanche, au titre de ses actions de prévention, le ministère de l'environnement a contribué - et contribuera encore - au financement des mesures de surveillance et des études des protections actuelles. Monsieur le sénateur, en 1994, quand ce dispositif a été mis en place, vous étiez au ministère de l'environnement ; vous le savez donc bien. Ce ministère contribue depuis trois ans à la prise en charge de l'intervention du Centre d'études techniques de l'équipement de Lyon pour l'acquisition et l'exploitation des dispositifs de surveillance. Il participe au financement des interventions du même centre à titre d'expert auprès de la cellule de crise mise en place par le maire de La Perrière.
La commune a demandé, mercredi soir, au centre d'élaborer un projet de démontage des blocs les plus instables par minage et reprofilage du rocher. Le démarrage des travaux pourrait avoir lieu avant le 1er avril et durer de deux à trois semaines.
A titre exceptionnel, j'envisage une contribution de mon ministère, sous la forme à la fois d'une subvention et d'une prise en charge de la maîtrise d'oeuvre du centre.
La France n'est pas épargnée par les risques naturels : éboulements, glissements de terrain, avalanches, sismicité, inondations... et j'en passe. Des événements dramatiques le rappellent et trop régulièrement. Une communication en conseil des ministres permettra d'actualiser, avant l'été, la stratégie du Gouvernement sur ce thème. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

FERMETURES DE CLASSES EN MILIEU RURAL

M. le président. La parole est à M. Fournier.
M. Bernard Fournier. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adressait à M. le ministre de l'éducation nationale, mais je crois que c'est Mme le ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire qui va me donner la réplique.
Madame le ministre, un grand quotidien faisait état en ce début de semaine de la fermeture de classes en milieu rural, notamment dans la Loire, et de l'exaspération des enseignants devant l'aveuglement de l'administration.
Dans le même temps, le ministre déclarait qu'il n'y aurait aucun poste supprimé à la rentrée 1999. Je réponds que c'est faux ! Cette annonce publicitaire, destinée à calmer les enseignants qui contestent actuellement haut et fort la politique du Gouvernement, n'est que de l'alchimie statistique. J'en veux pour preuve le fait que, dans un département comme la Loire, nous aurons perdu près de cent postes en trois ans, dont trente-cinq sont annoncés pour la rentrée prochaine.
M. Jacques Mahéas. Bravo !
M. Bernard Fournier. Si, pour M. Tavernier, l'espoir des enseignants « ça commence aujourd'hui », dans mon département, ça finit aujourd'hui ! (Exclamations sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Nelly Olin. Tout à fait !
M. Bernard Fournier. C'est dans les zones rurales, dans les réseaux d'éducation prioritaires et dans les zones d'éducation prioritaires, que vous supprimez des postes d'enseignants et que vous refusez de nommer des travailleurs sociaux.
Mme Nelly Olin. Très bien !
M. Bernard Fournier. Ce sont donc les écoles des zones les plus marquées par la précarité que vous excluez du bénéfice d'une vraie réforme - courageuse et concertée - de l'éducation.
Les mesures médiatiques ne sont que poudre aux yeux : en réalité, c'est la voie de la désertification que vous ouvrez ; c'est la négation du travail des enseignants et des collectivités locales que vous organisez !
Vous saupoudrez, certes, quelques millions ici ou là : ils se traduisent par des primes pour sujétions spéciales pour les enseignants en place. Mais où sont les postes qui permettent de tenir des effectifs raisonnables, seuls propices à créer un cadre adapté pour des populations difficiles et défavorisées ?
M. Claude Estier. Vous avez voté la réduction des crédits du ministère de l'éducation nationale !
M. Bernard Fournier. Dans la Loire, nous avons l'un des plus forts taux de scolarisation des enfants de moins de deux ans.
M. Jacques Mahéas. Il fallait voter le budget du ministre de l'éducation nationale !
M. Bernard Fournier. Cette politique, c'est le choix des parents et celui des enseignants,...
M. Jacques Mahéas. Vous tenez un double langage !
M. Bernard Fournier. ... un choix, faut-il le dire, accompagné par les maires. Ce sont cette politique et ces choix que vous « cassez » aujourd'hui, méprisant ainsi de longues années de travail ! (Exclamations sur les travées socialistes. - Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et indépendants.)
Je vous le demande solennellement, madame le ministre : comptez-vous, enfin, mettre un terme à l'asphyxie de l'éducation en milieu rural que vous organisez ? Comptez-vous, M. Allègre et vous-même, laisser une chance à ces élèves, dont vous dites qu'ils sont au coeur du système éducatif,...
M. le président. Merci de conclure !
M. Bernard Fournier. ... mais que vous ignorez superbement en méconnaissant leurs intérêts ? Quand donc le Gouvernement cessera-t-il d'avoir une vision statistique et dogmatique de l'éducation pour enfin ! laisser parler le terrain et les hommes ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé. Il fallait voter le budget du ministère de l'éducation !
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire. Monsieur le sénateur, l'école rurale a fait l'objet d'une attention particulière cette année, vous le savez.
M. Jean Chérioux. On le voit !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Pour la première fois je crois, une instruction officielle, que je tiens à votre disposition, a été diffusée auprès de l'ensemble des recteurs et inspecteurs d'académie, précisément pour mettre en place une nouvelle dynamique de l'école en milieu rural. L'école constitue en effet un élément important de l'aménagement du territoire. Bien souvent, lorsque l'école disparaît dans une commune rurale, c'est le dernier service public qui disparaît.
M. Alain Vasselle. C'est vrai !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Nous devons assurer aux élèves du milieu rural l'égalité des chances et la qualité pédagogique. C'est la raison pour laquelle j'encourage la mise en place de réseaux d'écoles rurales, qui doivent permettre à celles-ci de reconquérir une certaine densité scolaire et de lutter contre la fatalité de la désertification, en particulier contre l'effet d'attraction des chefs-lieux de canton.
Je considère que nous avons aujourd'hui la capacité de définir des pôles solides d'écoles rurales, de mettre en commun un certain nombre de moyens, y compris avec des enseignants itinérants qui peuvent assurer une scolarisation de qualité aux enfants de l'école maternelle.
C'est dans un contexte de respect de l'école rurale que la carte scolaire a été préparée, puisque les effectifs démographiques n'ont pas constitué le seul critère de répartition des postes.
En effet, en dépit de ce que vous venez de dire, monsieur le sénateur, le Gouvernement a maintenu intact, je le répète, le nombre d'emplois pour le premier degré, et cela malgré la baisse des effectifs.
Dans le département de la Loire - venons-en aux choses précises, monsieur le sénateur - où, malheureusement, vous perdez beaucoup d'élèves - on y compte près de 800 élèves en moins pour la rentrée prochaine et plus de 1 500 élèves en moins sur l'académie - si nous avions tenu uniquement compte de l'évolution démographique, le département aurait dû rendre, au titre de la solidarité scolaire envers les autres départements, quatre-vingt-dix emplois, monsieur le sénateur ! C'est précisément parce qu'il a été tenu compte du rôle de l'école en matière d'aménagement du territoire que seuls trente-cinq emplois ont été prélevés. Autrement dit, vous bénéficiez d'une dotation de cinquante-deux emplois par rapport à d'autres départements ! (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Bernard Fournier. Il faut dire merci !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Monsieur le sénateur, vous voyez que l'école rurale fait l'objet d'une attention toute particulière ! Je vous fais porter l'instruction à laquelle je viens de faire allusion. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

AMORTISSEMENT PÉRISSOL

M. Jean Chérioux. C'est la répartition de la disette.
M. Charles Revet. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat au logement ainsi qu'à M. le secrétaire d'Etat au budget. Le système de l'amortissement dit Périssol, adopté par le Parlement en avril 1996, a constitué une incitation forte à la construction de logements neufs et a permis de donner un coup de fouet à l'activité du bâtiment au cours des deux dernières années.
A l'occasion de la loi de finances pour 1999, le Gouvernement a décidé d'instaurer un nouveau dispositif qui se révèle moins favorable, bien que le Sénat y ait apporté quelques améliorations, notamment en allongeant la durée d'amortissement.
Avant cela, la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier du 2 juillet 1998 avait prévu que les constructeurs qui obtiendraient leur permis de construire avant le 31 décembre 1998 pourraient bénéficier du système Périssol, à la condition toutefois que les logements neufs soient vendus avant le 1er septembre prochain et achevés avant le 1er janvier 2001.
Cette disposition a conduit de nombreux constructeurs à accélérer la réalisation de leurs projets. Dans un premier temps, les entreprises devront supporter une charge de travail en forte augmentation sur une courte période. Ensuite, par un effet mécanique, elles connaîtront un net ralentissement de leur activité.
Par ailleurs, cette situation conjoncturelle ne sera pas sans incidence sur les coûts.
Ce phénomène d'à-coups ne peut qu'être négatif pour tout le monde. Aussi, compte tenu de cette situation, monsieur le ministre, ne serait-il pas sage d'envisager de reculer les dates butoirs ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, l'amortissement Périssol, institué à la fin de l'année 1996, était un dispositif temporaire qui devait s'achever le 31 décembre 1998.
Vous avez omis de mentionner un point : outre l'objectif de relance du bâtiment, ce dispositif d'amortissement Périssol encourageait la réduction des impôts, et ce peut-être au-delà du raisonnable !
M. Jean Chérioux. Il était très efficace !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Mon collègue Louis Besson y a substitué - disposition qui a été votée par la majorité qui soutient le Gouvernement - un statut du bailleur privé, dispositif stable qui produira ses effets dans le temps.
M. Dominique Braye. Dispositif moins efficace !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ce dispositif juste équilibre le soutien de la collectivité, c'est-à-dire de l'ensemble des contribuables, par des obligations dans le domaine social, les loyers étant un peu plus modérés que ceux du marché et les locataires ne devant pas dépasser un certain niveau de revenus.
Ce dispositif va être mis en place et je peux vous annoncer, monsieur Revet, que le décret d'application sera publié très prochainement. (Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Alain Gournac. Très prochainement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Mesdames, messieurs les sénateurs, le dispositif que nous avons proposé est, me semble-t-il, un dispositif permanent et juste.
Vous avez insisté à juste raison sur le fait que nous avons prolongé de huit mois le dispositif Périssol, précisément pour éviter l'inconvénient que vous avez souligné, c'est-à-dire le hiatus entre la fin du dispositif Périssol et le début du dispositif Besson.
Je suis persuadé que l'activité du bâtiment, qui connaît actuellement un rythme exceptionnellement favorable, se poursuivra de façon très dynamique et apportera sa contribution à la croissance de notre pays et au développement de l'emploi. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, je vous rappelle que se déroulera demain en cet hémicycle la fête de l'Internet, à laquelle vous êtes bien sûr tous conviés.
Avant d'aborder la suite de l'ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures dix, sous la présidence de M. Guy Allouche.)

PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

4

PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ

Suite de la discussion
d'une proposition de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi (n° 108, 1998-1999), adoptée par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relative au pacte civil de solidarité.

Articles additionnels avant l'article 1er (suite)



M. le président.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'examen des amendements n°s 3 rectifié, 56 et 31 tendant à insérer un article additionnel avant l'article 1er.
Je rappelle les termes de ces amendements.
Par amendement n° 3 rectifié, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le livre Ier du code civil, il est inséré, après l'article 310, un titre VI bis ainsi rédigé :

« TITRE VI bis

« DU CONCUBINAGE

« Art. 310-1. - Le concubinage est le fait pour deux personnes de vivre en couple sans être unies par le mariage.
« Art. 310-2. - Le concubinage se prouve par tous moyens.
« Un acte de notoriété peut être délivré aux concubins majeurs et célibataires par un officier de l'état civil, un juge ou un notaire. Il fait foi jusqu'à preuve du contraire.
« Art. 310-3. - Les concubins peuvent conclure un contrat par acte authentique ou sous seing privé pour régler tout ou partie de leurs relations pécuniaires et patrimoniales et organiser leur vie commune. »
Par amendement n° 56, Mme Derycke, MM. Badinter, Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le livre Ier du code civil, il est inséré après l'article 310 un article VI bis ainsi rédigé :

« TITRE VI bis

« DU CONCUBINAGE

« Article 310-1. - Le concubinage est le fait pour deux personnes, quel que soit leur sexe, de vivre en couple sans être unies par le mariage. »
Par amendement n° 31, MM. Lorrain, Badré et Lambert proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le livre troisième du code civil, il est inséré après l'article 1581 un titre V bis ainsi rédigé :

« TITRE V bis

« DE L'UNION LIBRE

« Art. 1581-1. - La loi ne régit pas l'union libre qui est le fait pour deux personnes, quel que soit leur sexe, de partager une communauté de vie sans être unies par les liens du mariage.
« Art. 1581-2. - L'union libre se prouve par tous moyens.
« Un acte de notoriété peut être délivré par un officier de l'état civil, un juge ou un notaire. Il fait foi jusqu'à preuve du contraire.
« Art. 1581-3. - Les personnes vivant en union libre peuvent passer un contrat par acte authentique ou sous seing privé ayant date certaine pour régler tout ou partie de leurs relations pécuniaires et patrimoniales et organiser leur vie commune. »
Ces trois amendements ont été présentés par leurs auteurs.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 56 et 31 ?
M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. L'amendement n° 56 est réducteur par rapport à l'amendement n° 3 rectifié, présenté par la commission, en ce sens qu'il ne fait pas mention des articles 310-2 et 310-3 que nous avons proposé d'insérer. La commission y est donc défavorable.
En outre, la commission ne souhaite pas qu'il soit donné au concubinage une définition plus large que celle qu'elle envisage dans le texte qu'elle propose pour l'article 310-1.
M. Claude Estier. Vous ne voulez pas qu'il soit dit : « quel que soit le sexe » ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cela n'apporte rien ! C'est inutile !
M. Jean-Luc Mélenchon. Comment, cela n'apporte rien ?
M. Claude Estier. Nous retenons que vous ne voulez pas qu'il soit dit : « quel que soit le sexe ».
M. Patrice Gélard, rapporteur. Monsieur Estier, j'ai déjà dit, au moment où nous avons présenté l'amendement n° 3 rectifié, que la rédaction que nous proposons permettait de reconnaître l'existence des homosexuels et des hétérosexuels.
M. Claude Estier. Pourquoi alors ne voulez-vous pas de l'expression « quel que soit le sexe » ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Parce que cela n'apporte rien. C'est redondant.
Ce matin, vous avez cité Portalis, restons fidèles à Portalis !
Sur l'amendement n° 31, la commission a émis un avis défavorable bien que, au fond, il ne présente que très peu de différence avec l'amendement n° 3 rectifié.
Cet amendement propose d'insérer le dispositif relatif à l'union libre dans le titre V bis du livre III, consacré aux contrats,...
M. Denis Badré. Ce qui est très important.
M. Patrice Gélard, rapporteur. ... et non pas dans la partie consacrée aux personnes. Or, l'essentiel de nos propositions visent précisément à reconnaître un statut de personne. Nous suggérons aux auteurs de cet amendement de le retirer, dans la mesure où il est très largement satisfait par l'amendement n° 3 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 3 rectifié, 56 et 31 ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, avant de donner l'avis du Gouvernement sur ces amendements, je voudrais faire une observation.
Vous nous avez reproché, monsieur le rapporteur, le manque de préparation de la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité. Vous avez dit de ce texte qu'il n'était ni amendable ni perfectible, que c'était un « objet juridique non identifié », qu'il ne réglait pas les problèmes et qu'il ne faisait qu'en susciter.
En revanche, vous vous êtes attribué la « grande qualité du travail accompli », la « pertinence des solutions » adoptées par la commission des lois la semaine dernière et la « profondeur » de réflexion juridique.
Quelle n'a pas été ma surprise de découvrir hier l'amendement n° 3 rectifié ! J'imagine que la rectification a un lien avec les interrogations que j'avais exprimées publiquement le matin même sur le fait que les concubins pourraient être mariés par ailleurs, ce qui posait problème et fragilisait, indirectement mais certainement, le mariage.
En fait, je ne pense pas que les rectifications que vous avez apportées à l'amendement répondent aux problèmes juridiques posés et, pour étayer mon argumentation, je vais détailler les trois volets de votre proposition sur le concubinage.
J'évoquerai tout d'abord le concubinage.
C'est - nous le savons - une situation de fait à laquelle de nombreuses législations ont, au fil du temps, attaché des droits que le rapport de M. Gélard décrit d'ailleurs de manière très complète : en matière de santé, d'impôts, de prestations sociales, de pensions et autres droits sociaux. Les juges tranchent les litiges relatifs au concubinage en référence au droit commun du code civil, et plus précisément du droit des obligations, en faisant appel à la notion de société de fait, compte tenu de l'absence de toute obligation alimentaire entre concubins, et, en cas de rupture, s'il y a faute, sur le fondement de l'article 1382 du code civil.
Dans tous les cas, la difficulté est celle de la preuve, en l'absence de convention particulière entre les concubins.
Cet ensemble jurisprudentiel et législatif, partiel et parfois contradictoire mais répondant au choix de ceux qui refusent le mariage ou tout autre statut ou contrat juridiquement organisé, n'est pas actuellement ouvert aux homosexuels.
Cette exclusion résulte non pas de la volonté expresse du législateur mais seulement des décisions de la Cour de cassation, reprises encore récemment par l'arrêt du 17 décembre 1997.
Le Gouvernement entend mettre un terme à toutes les discriminations, chaque fois que cela est possible.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Aussi soutiendra-t-il tout amendement qui ouvre les droits attachés au concubinage aux concubins homosexuels.
Faut-il aller plus loin ?
Le concubinage, vous le savez, recouvre de multiples situations et la jurisprudence de la Cour de cassation sur les conséquences de la rupture de concubinage est elle-même diverse.
Je rappellerai ainsi que deux concubins peuvent être célibataires mais aussi mariés, éventuellement tous les deux, tout en ayant renoncé à la vie commune avec leur conjoint.
Pour le Gouvernement, l'essentiel est de lever les discriminations. Dès lors, si le Parlement estime que certaines précisions sont utiles à la définition issue de la jurisprudence, le Gouvernement y sera attentif.
La discussion permettra d'examiner l'apport de ces éléments de définition déjà présents, pour les hétérosexuels, à l'article 340-4 du code civil. L'essentiel des difficultés n'est pas là.
S'agissant de la preuve, je ne suis pas convaincue de l'utilité de prévoir expressément, comme le fait votre commission, que le concubinage se prouve par tous moyens. C'est la règle générale de la liberté de la preuve des faits.
J'ajoute qu'en limitant la délivrance des actes de notoriété aux personnes majeures et célibataires, l'amendement de votre commission procède d'une démarche que je n'hésite pas à qualifier d'illogique.
L'acte de notoriété est le moyen de constater un fait, quel qu'il soit. La qualité des personnes en cause n'a rien à voir.
Le fait qu'un concubin soit mineur ou qu'il soit par ailleurs marié ne peut pas modifier le mode de constatation de sa situation personnelle. Actuellement, une femme mariée qui vit en concubinage peut se voir délivrer un acte de notoriété.
L'acceptation de cette modification la veille du débat, monsieur le rapporteur, prouve que vous avez pleinement conscience de l'imperfection juridique des mesures proposées. En faisant cela, loin de corriger des imperfections que vous avez pu relever dans le texte de l'Assemblée nationale, vous les aggravez. Certains concubins échapperont à la liberté de la preuve de la situation de fait, règle incontestable du code civil.
A partir de ces deux premières observations, on constate à quel point la perfection juridique est difficile à atteindre !
M. Emmanuel Hamel. Oh que oui !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je voudrais aussi et surtout vous avouer mon incompréhension devant la proposition de votre commission de permettre à des concubins d'organiser par contrat leur vie commune.
En leur donnant expressément la possibilité de régler avec une totale liberté leurs relations patrimoniales, l'amendement aura pour conséquence de les autoriser à adopter des dispositifs empruntés aux régimes matrimoniaux, par exemple le régime de la communauté de biens ou celui de la séparation. On aboutirait alors à ce paradoxe : des concubins, tout en s'affranchissant des obligations du mariage comme le devoir de secours mutuel, pourraient bénéficier de certains effets patrimoniaux qui paraîtraient convenir à leur situation.
M. Claude Estier. Ils sont incohérents !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Il y a là une atteinte, certes indirecte mais certaine, au mariage.
Le pacte civil de solidarité, quant à lui, évite cet écueil. Je rappelle que, à côté des droits qu'il confère, il comporte un certain nombre d'obligations, notamment l'aide mutuelle matérielle et la solidarité pour les dettes ménagères. En outre, s'agissant des biens, ceux-ci sont soumis, sauf disposition contraire de l'acte d'acquisition, au régime de l'indivision, qui implique une cogestion. A défaut, ils sont personnels.
Votre commission ne peut pas à la fois rejeter le pacte civil de solidarité, au prétexte que, dit-elle, il menacerait le mariage, et permettre à des concubins d'adopter les dispositions favorables d'un quasi-régime matrimonial.
Vous comprendrez dans ces conditions que je sois défavorable à l'amendement n° 3 rectifié.
En revanche, l'amendement n° 56 ne présente pas ces inconvénients. Il a pour seul objet de définir le concubinage sans aborder son régime probatoire ni autoriser la libre organisation contractuelle de la vie commune des intéressés.
Il a en outre l'immense mérite de supprimer, ce qui est essentiel à mes yeux, la discrimination existant aujourd'hui entre les concubins selon qu'ils sont hétérosexuels ou homosexuels. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
J'accueille d'ores et déjà avec bienveillance cet amendement, dont le mérite, en précisant « quel que soit leur sexe », est d'afficher clairement le refus de toute discrimination.
Je résume la position du Gouvernement : sur la définition du concubinage, il est ouvert à la discussion mais il me semble qu'il faut poursuivre la réflexion pour aboutir à une rédaction aussi adaptée que possible ; il est évidemment tout à fait d'accord pour que l'on mette fin à la discrimination.
S'agissant de l'amendement n° 31, aux critiques de fond déjà formulées s'ajoute celle qui tient à la place à laquelle ses auteurs veulent faire figurer les dispositions en cause dans le code civil.
En plaçant ces dispositions dans le Livre III, relatif aux différentes manières dont on acquiert la propriété, et dans un titre V bis qui serait inséré entre le titre relatif aux régimes matrimoniaux et celui qui est relatif à la vente, on dénaturerait, me semble-t-il, la notion d'union libre, qui est intrinsèquement un fait, non un acte juridique.
En outre, le contrat que les concubins peuvent passer pour organiser leur vie commune ne saurait s'apparenter à un régime matrimonial ni à une vente.
Voilà pourquoi je ne peux pas être favorable à l'amendement n° 31. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Tout d'abord, madame la ministre, je sais bien qu'il existe des personnes mariées qui ne vivent plus sous le toit conjugal et qui vivent en union libre avec une autre personne. Je ne les exclus pas. Rien ne leur interdit de prouver ce concubinage par tous moyens. La seule chose que je leur refuse, c'est l'acte de notoriété, qui ne leur est d'ailleurs pas donné à l'heure actuelle. On ne saurait délivrer un acte de notoriété à quelqu'un qui est déjà marié !
De même, à l'heure actuelle, tous les notaires vous diront qu'ils ont déjà rédigé des contrats par acte authentique pour régler tout ou partie des relations pécuniaires et patrimoniales de concubins ou pour organiser leur vie commune. Cela existe déjà ! Je ne vois pas en quoi on porterait atteinte au mariage avec des dispositions qui existent déjà. La liberté contractuelle est proclamée et elle figure dans le code civil. On ne peut pas la remettre en cause.
Par conséquent, madame le ministre, j'ai le regret de vous le dire, les deux ou trois arguments que vous avez développés contre notre amendement sont sans objet.
M. Alain Gournac. Ils ne sont pas bons !
M. Patrice Gélard, rapporteur. En tout cas, ils ne sont pas pertinents.
En réalité, si nous avons ajouté les qualificatifs de « majeurs et célibataires », c'est pour éviter une rédaction qui aurait pu paraître autoriser une forme de polygamie.
C'est la seule modification que nous avons apportée car, pour le reste, le dispositif est parfaitement cohérent et correspond exactement à la réalité actuelle. « Coller à la réalité », n'est-ce pas ce qu'on nous demande ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3 rectifié.
M. Robert Badinter. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Je veux d'abord marquer que le texte proposé pour l'article 310-1, tel qu'il est rédigé, appelle nécessairement une interprétation : « Le concubinage est le fait pour deux personnes de vivre en couple sans être unies par le mariage. »
Je vous renvoie à la dernière décision de la IIIe chambre civile de la Cour de cassation dans ce domaine. Il faudra que la Cour de cassation se prononce. Cela signifie bien que vous ouvrez la voie à l'interprétation, monsieur le rapporteur.
Je ne doute pas que, dans votre pensée, soient ainsi visés aussi bien les couples homosexuels que les couples hétérosexuels. Mais la formulation appelle la précision. Elle l'appelle d'autant plus - je l'ai déjà dit ce matin - que vous vous situez là dans une zone extrêmement sensible de notre droit.
Permettez-moi d'évoquer quelques souvenirs.
On a fait référence - et je vous remercie, madame la ministre, de l'avoir fait avec délicatesse à mon égard - à la loi de 1982, qui a supprimé ce qui constituait une discrimination pénale à l'encontre des homosexuels puisque ce qui était permis pour les hétérosexuels - les relations sexuelles avec mineur consentant - ne l'était pas pour les homosexuels.
A trois reprises, à propos de ce texte, je suis venu dans cette enceinte, car je ne demandais jamais l'urgence : pour moi, la discussion parlementaire devait aller jusqu'à son terme. A trois reprises, face à cette discrimination pénale inscrite dans notre droit, le Sénat m'a répondu non. Et je préfère ne pas rappeler ce qu'ont été alors les échanges entre ceux qui représentaient la droite sénatoriale et celui qui se trouvait être à la place qui est aujourd'hui la vôtre, madame la ministre.
Mme Nicole Borvo. On l'imagine !
M. Robert Badinter. Dans la suite de mes souvenirs, j'évoquerai maintenant l'année 1985. A cette époque, face à l'épidémie de sida, nous le savons tous, une sorte de peur s'était emparée de beaucoup de gens, qui pensaient que l'on pouvait contracter le sida par simple contact.
A ce moment-là, la crainte était extrême et l'on voyait se développer un profond mouvement de rejet de la communauté homosexuelle, à telle enseigne que les uns ne voulaient plus loger les couples homosexuels et les autres ne voulaient plus employer des travailleurs qui étaient homosexuels.
Nous sommes alors venus devant vous pour vous soumettre un projet de loi visant à ce que, précisément, ce type de discrimination selon les moeurs, s'agissant de prestation de services, de location, de contrat de travail, ne soit pas admise et soit sanctionnée par une peine.
Lors de la première lecture, la majorité sénatoriale a supprimé les mesures relatives à la discrimination du fait des moeurs.
Aujourd'hui, quatorze ans se sont écoulés. Le moment n'est-il pas venu, pour la majorité sénatoriale, de prendre conscience que chacune de ses attitudes ne peut être interprétée que comme un rejet, même inavoué ? De quoi ? Du choix de vie homosexuel, des moeurs des uns et des autres ! Il s'agit d'une affaire privée !
Certains membres - et parmi les plus éminents - de la majorité sénatoriale s'étonneront après de ce que l'on écrit au sujet de cet attachement insurmontable aux traditions les plus conservatrices. Les temps ont changé, la société a changé ! Le climat homophobe que j'évoquais tout à l'heure s'est dissipé. En effet, les années ont passé et, face à l'épreuve du sida, la communauté homosexuelle a fait preuve de beaucoup de courage et de dignité.
Que demandons-nous, à la faveur de ces cinq mots : « quel que soit leur sexe », sinon traduire simplement dans la loi la réalité ? Il existe des concubins hétérosexuels, et c'est la grande majorité. Il existe également un concubinage homosexuel, et il est temps de le reconnaître expressis verbi . Vos hésitations ne servent à rien, sauf à laisser entendre que l'on se résigne à cette reconnaissance du concubinage homosexuel, je dirais presque contre son sentiment profond.
Comme je ne veux pas croire que telle est la volonté de la majorité du Sénat, le moment est venu pour elle de tourner la page. Voilà des siècles que cela dure ! Ceux qui ont étudié la répression de l'homosexualité dans les pays occidentaux le savent : au départ, cela n'a été que supplices, sanctions, peines, exclusions et humiliations.
M. le président. Mon cher collègue, je vous demande de conclure.
M. Robert Badinter. Je conclus, monsieur le président !
Ces cinq mots font toute la différence ! En ne les mentionnant pas, vous maintenez l'attitude que vous avez jadis adoptée, et je le regrette profondément.
Aujourd'hui, j'en suis convaincu, il n'est pas possible, compte tenu de l'évolution de la société, de ne pas reconnaître l'existence du concubinage homosexuel. Pour ce faire, il convient évidemment d'inscrire dans le code civil le concubinage lui-même, car on ne peut proclamer la reconnaissance de l'un sans reconnaître le phénomène dans son entier.
Il est temps ! Contraints par la force des choses, vous le faites, mais avec une réserve qui enlève à cette démarche de sa force symbolique, et je le regrette pour vous. (Vifs applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. J'ai écouté avec une grande attention les propos de M. Badinter.
Aucun député, aucun membre du Gouvernement, je le rappelle, n'a voulu inscrire le concubinage dans le code civil.
M. Alain Gournac. Tiens donc !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Aucun d'entre eux n'a vu le problème que nous avons soulevé.
M. Robert Badinter. Le groupe socialiste du Sénat dans son entier l'a bien vu, je peux vous l'assurer !
M. Patrice Gélard, rapporteur. En l'occurrence, je parle de l'Assemblée nationale !
J'ai dit et répété tout au long de ce débat que la rédaction que nous proposons englobe bien les couples homosexuels et les couples hétérosexuels. (Exclamations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Nicole Borvo. Eh bien, dites-le !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Nous respectons la rédaction du code civil et n'y introduisons pas de redondance. Si la Cour de cassation avait la mauvaise idée de poursuivre dans la mauvaise voie, Mme le ministre aurait toujours la possibilité de former un recours dans l'intérêt de la loi, afin que la Cour de cassation respecte l'interprétation que nous donnons tous aujourd'hui à ce texte.
M. Claude Estier. Il serait plus simple d'accepter notre amendement !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il ne sert à rien !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3 rectifié.
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Mon intervention concerne l'amendement n° 56.
La définition qui nous est proposée par la commission des lois pour le concubinage est tout simplement la reconnaissance juridique de l'état de deux êtres qui vivent en couple hors mariage.
Cette définition est parfaitement claire, tout en étant suffisamment large pour qu'il ne soit pas besoin de l'affaiblir ou de la galvauder par l'adjonction superfétatoire de précisions inutiles.
Aussi suis-je en désaccord avec l'amendement n° 56 de nos collègues, qui souhaitent ajouter à la définition du concubinage, celle de deux êtres vivant en couple hors mariage, l'expression : « quel que soit leur sexe ». La langue française est suffisamment précise et la définition proposée suffisamment nette pour que l'on comprenne sans erreur possible que sont visés tous les individus, quel que soit leur sexe.
Si nous devions nous engager sur cette voie hasardeuse de la précision inutile...
M. Claude Estier. Vous l'avez fait ce matin pour le mariage !
M. Nicolas About. Et vous, vous avez été contre !
M. Emmanuel Hamel. Le mariage, c'est le mariage !
M. Dominique Braye. Vous pratiquez l'amalgame ! Nous souhaitons précisément que, s'agissant du mariage, il soit bien spécifié qu'il s'agit de deux êtres de sexe différent.
M. Claude Estier. Cela allait de soi ! Il était inutile de le préciser !
M. Dominique Braye. Cela n'allait pas de soi et nous vous l'avons dit ! Il est des pays - à trois cent cinquante kilomètres de chez nous ! - où les mariages homosexuels sont authentifiés !
M. Claude Estier. On est en France !
M. Jean Chérioux. Mais nous allons vers l'Europe !
M. Dominique Braye. Si nous devions nous engager sur cette voie hasardeuse de la précision inutile, nous devrions alors être certains de n'oublier personne et, dès lors, il nous faudrait également préciser : deux êtres vivant en couple, « quelle que soit leur race », « quelle que soit leur nationalité », « quelle que soit leur langue »... (Exclamations sur les travées socialistes)... et, pourquoi pas ? « quels que soient leur taille, leur poids et la couleur de leurs yeux » ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
Mes chers collègues, la précision choisie est celle qui est la plus opportune, politiquement et médiatiquement, à un moment donné.
A vouloir trop en faire, on en viendrait à dénaturer la définition claire et simple du concubinage, à savoir deux êtres vivant en couple hors mariage, définition compréhensible par tous. Cette définition ne comporte aucune exclusive ; c'est même sa principale qualité. Alors, pourquoi faire comme si elle en sous-entendait ?
De grâce, n'ajoutons pas de confusion là où il n'y en a pas ! Ne soyons pas redondants ; ce serait au détriment de la clarté. Pourquoi céderions-nous sur ce point, si ce n'est pour complaire à des catégories de population...
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah !
M. Dominique Braye. ... dont le choix de vie ne concerne que leurs membres, lesquels recherchent surtout, pour une minorité d'entre eux, outre la reconnaissance légitime de certains droits que nous leur donnons aujourd'hui, la reconnaissance publique de leur choix de vie privée ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Et alors ?
M. Dominique Braye. Or, et c'est une lapalissade, monsieur Mélenchon, la vie privée doit rester du domaine privé.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Tout à fait !
M. Claude Estier. C'est redondant !
M. Dominique Braye. Il ne me paraît ni sage ni opportun de céder à tout bout de champ à tous les particularismes et communautarismes. C'est ainsi que l'on sape petit à petit nos principes républicains et notre cohésion sociale.
Mme Nicole Borvo. Oh !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Dominique Braye. Le législateur doit seulement, mais c'est fondamental, reconnaître à toute personne le droit de vivre en couple avec la personne de son choix et lui garantir certains droits afférents que commandent le bon sens et l'équité.
Ainsi, deux personnes de sexe différent ont le choix, pour vivre en couple, entre mariage et concubinage. En revanche, deux personnes de même sexe ne peuvent que vivre en concubinage, puisqu'elles n'ont pas accès au mariage et puisque nous rejetons le PACS.
Il n'est donc pas besoin d'aller au-delà de ce qui est évident et clair. Aussi ne voterai-je pas cet amendement, de même que la quasi-totalité de mes collègues du groupe du RPR, car, selon nous, il n'apporte rien, ni au plan de la clarté rédactionnelle ni au plan juridique.
Nous sommes persuadés que l'adoption de cet amendement serait très préjudiciable à la lisibilité de la définition proposée par la commission des lois et, plus encore, qu'il serait nuisible à la cohérence de la position que la majorité sénatoriale entend défendre par rapport à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. Mon cher collègue, vous êtes intervenu sur l'amendement n° 56, alors que nous en sommes aux explications de vote sur l'amendement n° 3 rectifié.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je voterai l'amendement présenté par la commission des lois. Toutefois, je souhaite dire à notre collègue Robert Badinter que je suis étonné des propos qu'il a tenus. Je ne parle pas de ceux qui concernent sa vision des attitudes de la majorité sénatoriale au cours des années passées. Non, ce qui m'a surpris, de la part d'un fin juriste, c'est qu'il nous dise qu'il est absolument nécessaire d'écrire explicitement dans le texte de loi que le concubinage peut être homosexuel ou hétérosexuel, sans quoi la Cour de cassation ne sera pas conduite à modifier sa jurisprudence.
Certes, je n'ai pas les connaissances juridiques du professeur qu'il a été, mais j'ai toujours cru que les travaux préparatoires étaient de première importance pour l'élaboration de la jurisprudence. Or, et M. Badinter a bien voulu le reconnaître, M. le rapporteur a insisté sur le fait que, effectivement, dans son esprit, ce texte s'appliquait tant aux homosexuels qu'aux hétérosexuels. Je ne vois donc pas pourquoi il serait nécessaire de le préciser dans la loi. En effet, si les travaux parlementaires font foi de la volonté des assemblées, la Cour de cassation sera amenée à suivre la décision du législateur. Dans le cas contraire, comme l'a indiqué très justement M. le rapporteur, le garde des sceaux pourrait éventuellement la rappeler à l'ordre.
M. Robert Badinter. Rappeler à l'ordre la Cour de cassation ?
M. René-Pierre Signé. Et la séparation des pouvoirs !
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Le groupe de l'Union centriste est favorable à l'amendement n° 3 rectifié présenté par la commission, à quelques exceptions près.
Nous avons bien dit que le concubinage ou l'union libre - juridiquement, le concubinage est plus précis - est un état de fait qui entraîne des conséquences juridiques.
Ce matin, a été donnée une définition du mariage, sans doute pas parfaite et pouvant être améliorée : il s'agit de l'union d'un homme et d'une femme. Aujourd'hui, le concubinage fait référence à deux personnes. Comme la Cour de cassation se réfère au mariage pour déterminer les conditions du concubinage, les termes n'étant pas les mêmes, il ne semble pas que la confusion soit possible.
A l'évidence, la volonté du législateur est de permettre aux personnes de même sexe de vivre en concubinage. Cette précision aurait pu être apportée. Mais il paraît qu'il ne faut pas alourdir les textes et que le code civil doit être le plus concis possible.
M. Jean Chérioux. Le mieux écrit possible !
M. Claude Estier. Il ne s'agit que de cinq mots !
M. Jean Chérioux. Mais ils sont lourds de sens !
M. Jean-Jacques Hyest. Par conséquent, il convient d'être tout à fait clair : la volonté de ceux qui voteront l'amendement de la commission est d'ouvrir aux couples homosexuels la possibilité de vivre en concubinage et d'être reconnus comme tels, ce qui n'était pas admis par la jurisprudence jusqu'à présent. C'est la condition, bien entendu, pour que la plupart d'entre nous votent cet amendement.
Un certain nombre de nos collègues, vous l'avez entendu, pensent que cette évolution n'est pas souhaitable ; c'est leur droit. Ils estiment que cette ouverture du concubinage remet en cause les institutions. Cette position a une logique, une cohérence. Cependant, la majorité du groupe de l'Union centriste votera l'amendement n° 3 rectifié de la commission des lois.
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas une reconnaissance, c'est un fait !
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. M. Badinter, au nom du groupe socialiste, a bien expliqué notre position ; il l'a fait avec talent mais également, chacun l'a bien compris, avec conviction, avec émotion dirai-je même.
Il est vrai qu'une discrimination, quelle qu'elle soit, atteint chacun d'entre nous, chaque citoyen. Quand on discrimine un citoyen, ce sont les citoyens dans leur ensemble qui sont discriminés, et cela n'est plus tolérable.
Je reviens au texte proposé par M. Gélard.
Vous refusez d'inscrire explicitement ce que vous prétendez admettre. La jurisprudence changera, dites-vous. Au regard de la formulation, nous n'en sommes absolument pas persuadés. Un orateur vient d'affirmer que les travaux parlementaires éclaireront les juges de la Cour de cassation. Cela signifie, jurisprudence ne valant pas loi, que chaque fois qu'il y aura discrimination la personne ou le couple concerné devra, pour faire reconnaître ses droits, saisir les tribunaux et attendre une quelconque jurisprudence de la Cour de cassation, ce qui pourra prendre des années.
M. Jacques Mahéas. Absolument !
Mme Dinah Derycke. Et cela se reproduira pour chaque couple, puisqu'il ne s'agit pas d'une loi. Je tenais à attirer votre attention sur ce point, mes chers collègues.
Pour notre part, nous voulons que soient inscrits dans l'amendement proposé par M. Gélard les cinq mots : « quel que soit leur sexe ». C'est un préalable, qui est incontournable.
Par ailleurs, notre amendement n° 56 n'évoque pas le texte proposé pour les articles 310-2 et 310-3 du code civil. Mme la garde des sceaux a expliqué pourquoi. En effet, à vouloir définir à ce point le concubinage, vous allez, là aussi, avec un acte de notoriété qui n'est possible que pour certains couples concubins, et donc pas pour d'autres, créer encore des catégories différentes de personnes et les discriminer.
Des jeunes gens, essentiellement des filles, vivent en concubinage ; il existe - on le sait bien - des couples dont l'un des partenaires ou les deux sont mariés par ailleurs. Puisque, en l'occurrence, la délivrance d'un acte de notoriété est impossible, vous allez discriminer les personnes concernées.
Dans notre amendement n° 56, nous n'avons pas évoqué ces deux dispositions. Aussi, nous sommes dans l'impossibilité - puisque, semble-t-il, il n'y aura pas de vote par division - de sous-amender le texte proposé pour l'article 310-1 du code civil afin d'ajouter les cinq mots que nous souhaitons introduire. Or, le fait de se prononcer sur cette formulation aurait le mérite de clarifier bien des positions.
Je suis étonnée de constater le subit entichement de la droite sénatoriale pour le concubinage. Le rapport de Mme Codaccioni, alors ministre de la solidarité entre les générations, qui portait en exergue les mots : « Que le fruit de vos entrailles soit béni », précisait que le mariage était en péril dans notre pays, ne séduisait plus suffisamment les jeunes, parce qu'il y avait trop de concubins. La solution, selon ce rapport, consistait à supprimer les avantages dont bénéficent les concubins afin de les inciter à se marier. Des mesures avaient commencé d'être prises - fort heureusement, une décision en 1997 a arrêté ce processus - pour réduire les droits des concubins.
Cet entichement subit pour le concubinage masque donc bien votre refus du PACS,...
M. Dominique Braye. On ne le cache pas !
Mme Dinah Derycke. ... mais vous n'arrivez pas à dire les mots dont on sent bien qu'ils vous brûlent : pas de discrimination pour les homosexuels ; reconnaissons-les enfin.
Nous ne pouvons adopter votre texte en l'état, sauf si vous acceptiez un vote par division et si nous votons sur l'essentiel car tel est le coeur du débat,...
M. Dominique Braye. On n'est pas d'accord !
Mme Dinah Derycke. ... c'est-à-dire sur les cinq mots que vous refusez non pas au groupe socialiste, mais à l'ensemble des couples homosexuels de ce pays. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Pelletier applaudit également.)
M. Dominique Braye. Ces cinq mots n'apportent rien !
M. Denis Badré. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, M. Jean-Jacques Hyest a indiqué voilà un instant que le vote de notre groupe souffrirait quelques exceptions : c'est à ce titre que je m'exprime.
Notre propos n'est pas, bien entendu, de récrire le code civil. Ce matin, nous avons beaucoup et bien dit, à l'occasion de la discussion de l'amendement n° 2 et sur l'opportunité de donner une définition du mariage, que ce code est bien rédigé en l'état et que nous devons le considérer avec respect et circonspection. D'ailleurs, nous le vérifions chaque fois qu'il nous est donné d'en relire les articles 212 à 215. Nous les admirons beaucoup et il est, je crois, très difficile de les modifier.
Nous voulons, je pense, et c'est l'objet de notre débat, surtout trouver de bonnes solutions à de vrais problèmes, en veillant bien sûr, au passage, à ne pas créer de faux problèmes, auxquels nous aurions alors bien du mal à trouver de bonnes solutions.
Ce matin, M. Lambert a très clairement présenté notre amendement n° 31, qui, je le répète, est loin d'être anecdotique.
Dans notre assemblée siègent de nombreux maires. Nous connaissons leurs charges et leurs responsabilités. Elles sont, selon moi, de deux natures.
Tout d'abord, nous gérons au quotidien nombre de difficultés de nos concitoyens, dans le respect de chaque situation, animés par le seul souci de soulager des misères et, le plus souvent, de traiter en équité les vrais problèmes que rencontre tel ou tel d'entre eux.
Au-delà de cette gestion au quotidien, nous exerçons une responsabilité de nature très différente, en participant à la construction de la société, donc en soutenant tout ce qui créé du lien social.
C'est de manière éminente ce que nous faisons lorsque nous nous marions, puisque nous sommes alors dans le domaine où se tissent les liens sociaux les plus forts, en consacrant des engagements publics, libres et durables unissant les membres d'un couple qui proclament leur choix de respecter ensemble un certain nombre de devoirs et de participer à la préparation de l'avenir.
Madame le ministre, si je vous ai bien compris, vous souhaitez plutôt conforter le rôle qu'exercent les maires en préparant ainsi l'avenir de la société, en la construisant au jour le jour.
Monsieur le rapporteur, si je vous ai bien suivi, vous souhaitez conforter les maires dans le rôle ingrat, difficile et sensible qui est le leur lorsqu'ils essaient, jour après jour, de résoudre les problèmes qui se posent quotidiennement.
Dans ce contexte, mes chers collègues, si nous souhaitons faire du bon travail, si nous voulons que les maires aient une attitude claire et efficace, nous devons continuer à distinguer clairement ces deux types de responsabilité.
Le positionnement dans le code civil de l'amendement que nous examinons actuellement n'est donc pas du tout neutre. A mon sens, il s'agit bien, au contraire, d'une question centrale. Il nous faut, mes chers collègues, être très clairs dans un débat qui, jusqu'à présent, ne l'a pas toujours été.
Nous devons veiller, bien sûr, à ne pas introduire de nouveaux biais, de nouveaux défauts, à ne pas provoquer des effets d'aubaine, des opportunités de fraude, etc. Je pense que nous nous accordons tous sur ce point. Mais au-delà, nous devons veiller à avoir une vraie réflexion sur le fond.
C'est pourquoi, monsieur le rapporteur, vous l'aurez compris, les auteurs de l'amendement n° 31, tout en comprenant la démarche de la commission, ne peuvent immédiatement et d'emblée vous rejoindre. (Applaudissements sur certaines travées de l'Union centriste. - M. Pelletier applaudit également.) M. Jean-Pierre Fourcade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je n'ai pu assister ce matin au débat parce que je procédais à un mariage.
Comme la plupart des membres de mon groupe, je soutiendrai l'amendement n° 3 rectifié. Le travail de la commission des lois est tout à fait sérieux et il correspond aux exigences de l'actualité, puisque, tout à l'heure, M. Badinter nous a demandé de tenir compte de la réalité. Souvent, les maires connaissent mieux la réalité que nombre d'éminents professeurs qui ne voient pas ce qui se passe concrètement.
Le fait d'avoir institué le concubinage dans le code civil et de réserver l'acte de notoriété aux concubins majeurs et célibataires, de leur permettre de régler leurs problèmes pécuniaires et patrimoniaux et d'organiser leur vie commune par un acte authentique ou sous seing privé correspond exactement à ce qui nous est demandé, à nous, hommes de terrain.
Alors se pose le problème de l'ajout, ou non dans cet amendement des cinq mots proposés par les membres du groupe socialiste. Selon M. le rapporteur et M. le président de la commission, ces cinq mots ne sont pas nécessaires puisque, par opposition à ce qui a été voté ce matin sur le mariage, qui est l'union d'un homme et d'une femme, la définition du concubinage est beaucoup plus large. Je regrette que M. Badinter ne soit pas présent en cet instant.
M. Jean-Luc Mélenchon. Il est parti chercher des munitions. (Sourires.)
M. Jean-Pierre Fourcade. La vraie question qui nous est posée, dans nos permanences, au cours de nos réunions et au sein de nos assemblées, n'est pas de savoir s'il convient d'inscrire le concubinage dans le code civil ou si nous devons autoriser les couples homosexuels à avoir une vie commune, mais de savoir si nous allons permettre aux couples homosexuels d'adopter des enfants ou, lorsqu'il s'agit de femmes, de recourir à la procréation médicalement assistée. Telle est la véritable question qui est posée ! (MM. Braye et Chérioux applaudissent. - Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Jean-Pierre Fourcade. On nous pose toujours cette question ! Dans ma commune, j'ai organisé un débat avec M. Michel, et c'est bien ce qui a été dit.
M. Alain Gournac. Ils nous l'ont dit !
M. Jean-Pierre Fourcade. Ou bien on s'en tient au texte de la commission tel qu'il est, et c'est, pour ma part, ce que je ferai.
M. Alain Gournac. Moi aussi !
M. Jean-Pierre Fourcade. Ou bien, si l'on ajoute les mots « quel que soit leur sexe », il faut inscrire dans le même texte l'interdiction absolue de l'adoption et de la procréation médicalement assistée pour les couples homosexuels. En effet, l'un ne peut pas aller sans l'autre.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Jean-Pierre Fourcade. Nous serons jugés sur ce point. C'est la raison pour laquelle je voterai l'amendement n° 3 rectifié. (Bravo ! et applaudissements sur plusieurs travées du RPR.)
M. Nicolas About. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Je suis troublé, parce que ces cinq mots correspondent à l'amendement que j'avais déposé en commission, qui a été rejeté et qui est repris aujourd'hui.
J'ai certainement eu tort de vouloir insérer ces mots à cet endroit car, en fin de compte, l'article 310-1 du code civil mentionne simplement un constat de fait : « Le concubinage est le fait pour deux personnes de vivre en couple sans être unies par le mariage. » Or, un fait n'intègre pas obligatoirement une distinction. Il n'en va pas nécessairement de même pour la délivrance de l'acte de notoriété, qui doit certainement poser de temps en temps des problèmes de recours. En effet, s'agissant de l'acte de notoriété, ont été précisé les conditions de délivrance et les bénéficiaires.
Un acte de notoriété peut être délivré aux concubins majeurs et célibataires, et c'est là, selon moi, que pouvaient trouver place les mots « quel que soit leur sexe ». En effet, il s'agissait alors de l'une des conditions d'attribution de l'acte de notoriété. Cet emplacement était meilleur.
J'aurai pu me rallier à un sous-amendement sur ce point, mais puisqu'il n'est pas proposé, je voterai l'amendement de la commission, car M. Gélard, qui a fait un travail exemplaire, a su répondre très largement au problème posé.
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Chers collègues de la majorité sénatoriale, je ne suis nullement surpris de la tournure que prend le débat. Vous voilà pris une nouvelle fois à revers dans l'inconfort de la ligne d'argumentation que vous défendez depuis deux jours.
M. Dominique Braye. Mais non !
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais si !
Vous avez craint avant tout de donner le sentiment que vous vous opposiez à cette ouverture d'esprit et à cet acte de justice que représente le PACS.
M. Jean Chérioux. Dans votre esprit !
M. Jean-Luc Mélenchon. Donc, vous brodez pour tâcher de masquer le fait que, néanmoins, c'est bien ce que vous avez l'intention de faire.
Je l'ai dit ce matin : vous jouez le rôle de ceux qui veulent bien la chose mais ne voudraient pas le mot. Or on ne peut avoir la chose sans le mot.
Une nouvelle fois, vous allez, par un amendement, créer plus de confusion que vous ne réglez de problèmes. Vous allez créer une discrimination là où il n'y en avait pas.
Puisqu'on se flattait tout à l'heure d'exemples concrets, écoutez celui-ci, mon cher collègue : si l'amendement n° 3 rectifié est adopté, l'agent communal recevant une demande de certificat de concubinage d'une jeune fille mineure enceinte ne pourra plus le lui donner dans la mesure où ce texte prévoit qu'« un acte de notoriété peut être délivré aux concubins majeurs et célibataires » ! Par conséquent, je ne peux pas croire que cela puisse vous convenir.
Une nouvelle fois, le dispositif proposé est un leurre, qu'il ne faut donc pas prendre plus au sérieux que cela, sauf naturellement en ce qui concerne les conséquences, qu'a tout à l'heure magnifiquement expliquées mon collègue M. Badinter. En effet, si l'amendement n° 3 rectifié est adopté, vous aurez créé une nouvelle discrimination ! Voilà ce que vous aurez fait !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Non !
M. Jean-Luc Mélenchon. Non seulement vous n'aurez réglé aucun des problèmes que nous posons, mais vous aurez créé des discriminations supplémentaires !
Vous êtes à contrepied de votre propre argumentation de ce matin. Vous vouliez à tout prix préciser que le mariage, que personne ne mettait en cause, devait être marqué par son caractère hétérosexuel. Et à cette heure-ci, où il s'agit de préciser qui est concubin, vous ne voulez plus entendre parler de sexe, sinon de celui des anges, puisqu'il ne peut pas être déterminé ! Voilà où nous en sommes !
M. Dominique Braye. Ce sont des effets de manche !
M. Jean-Luc Mélenchon. Non, ce ne sont pas des effets de manche ! Je vous parle de choses très concrètes, de la vie quotidienne.
Vous vous démasquez ! Vous ne voulez pas du PACS !
MM. Dominique Braye, Jean Chérioux et Alain Gournac. Non, nous n'en voulons pas, c'est vrai !
M. Jean-Luc Mélenchon. Nous l'avons bien compris !
Vous ne voulez pas du PACS, disais-je, et, par conséquent, vous faites semblant de lui préférer le concubinage ! Vous faites une ouverture en voulant le faire entrer dans le code civil, laissant entendre que, en même temps, serait réglé le problème des homosexuels.
A l'instant où vous êtes au pied du mur, où il s'agit du concubinage homosexuel, alors, là, vous acceptez le concubinage, mais refusez de parler des homosexuels, laissant à d'autres le soin de trancher au cas par cas la question de savoir si tel ou tel certificat de concubinage conclu entre des homosexuels serait validé ou non. Voilà le mécanisme de l'hypocrisie qui est à l'oeuvre !
Mais ce mécanisme va se retourner contre vous ! En effet, comme vous l'avez dit vous-même au début de notre discussion, le texte adopté par le Sénat sera transmis à l'Assemblée nationale, laquelle pourra retourner contre vous et contre vos amis qui siègent en son sein le piège que vous vous êtes tendu à vous-mêmes.
En effet, nous aurons comme bénéfice subsidiaire de la révolution culturelle que nous sommes en train de vous imposer que cet antre de la réaction qu'est cette assemblée aura accepté l'idée que le concubinage puisse entrer dans le code civil !
Croyez bien que mes collègues de tous les groupes de gauche, à l'Assemblée nationale, vont se précipiter, au nom de vos arguments,...
M. Alain Gournac. Tant mieux pour eux !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... pour que, en plus du PACS, soit introduit dans le code civil le concubinage, tant hétérosexuel qu'homosexuel, et ce sera bien fait !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Réjouissez-vous !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est la peine de vos hypocrisies ! (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - Vives exclamations sur les travées du RPR.)
M. Dominique Braye. Vous l'auriez fait sans nous !
M. Alain Gournac. Ce n'est pas à l'Assemblée nationale de nous dire ce que nous devons faire ici !
M. Emmanuel Hamel. Quelle décadence !
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Sur le fond de l'amendement n° 3 rectifié, je ne vais pas répéter plus mal ce qu'a dit excellemment M. Robert Badinter, que nous aurions tous intérêt à écouter.
Chers collègues de la majorité, vous vous enfermez vraiment dans vos contradictions !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Eh non ! Il n'y a pas de contradictions !
Mme Nicole Borvo. La loi doit être précise, avez-vous dit. Et vous refusez le PACS sous prétexte qu'il constituerait une véritable usine à gaz. Or, nous constatons maintenant que vous construisez vous-même une usine à gaz pour vous opposer au PACS : vous modifiez le mariage et vous insérez le concubinage qui, de votre propre aveu, est le plus petit commun dénominateur sur lequel vous pouvez vous mettre d'accord. Ce faisant, vous créez de nouvelles difficultés !
Depuis hier, vous vous opposez au PACS qui, selon vous, créerait des imbroglios juridiques ; mais en revanche, avec la sagesse qui caractérise la majorité sénatoriale,...
M. Alain Gournac. Vous avez raison !
M. Jean Chérioux. Tout à fait !
Mme Nicole Borvo. ... vous voulez créer une catégorie juridique tout à fait précise et applicable.
Il faut que soit clairement exprimé votre refus de la reconnaissance du couple homosexuel !
M. Alain Gournac. C'est faux !
M. Robert Bret. Même le mot vous fait peur !
Mme Nicole Borvo. Il faut que ce soit dit ! Vous vous êtes répandus dans la presse pour expliquer que l'Assemblée nationale avait fabriqué une usine à gaz. Il faut donc que soit dit clairement ici que vous refusez le PACS parce que vous refusez la reconnaissance du couple homosexuel, et que vous vous mettez d'accord sur le plus petit dénominateur commun, l'évocation du concubinage, en courant le risque de compliquer encore la jurisprudence.
Cela dit, je souscris à l'amendement n° 56 qui permet - nous avions d'ailleurs déposé un sous-amendement dans ce sens - de reconnaître que le concubinage s'applique aux couples homosexuels et hétérosexuels. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Alain Lambert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lambert.
M. Alain Lambert. Si j'interprète bien notre règlement, l'adoption de l'amendement n° 3 rectifié fera devenir sans objet les autres amendements. Cela me conduit à m'expliquer sur la position responsable qu'il nous faut prendre.
Tout d'abord, la réponse que Mme le garde des sceaux nous a donnée tout à l'heure nous éclaire, du point de vue juridique, sur la situation qui résultera du PACS, si ce dernier est adopté en dernière lecture.
Si je ne déforme pas vos propos, madame le garde des sceaux, les personnes vivant en couple pourront choisir entre trois régimes juridiques différents : le mariage, le PACS et l'union libre. (Mme le garde des sceaux fait un signe d'assentiment.)
J'ai cru également discerner dans vos réponses que le cadre juridique du PACS ne souffrira aucune introduction de convention répondant aux besoins spécifiques et propres de ceux qui le signeront.
Il est important pour les juristes de savoir que la réponse de Mme le garde des sceaux rend en quelque sorte d'ordre public toutes les dispositions du PACS,...
M. Patrice Gélard, rapporteur. Tout à fait !
M. Alain Lambert. ... et que, hors le contenu du PACS, aucune convention ne sera possible. Cela doit être connu de ceux qui le signeront.
J'attends naturellement que Mme le garde des sceaux me dise si j'ai mal interprété ses propos. Elle a estimé que l'adoption de l'amendement n° 31 ferait courir le risque de l'introduction, par les signataires, de conventions s'apparentant, au fond, à des conventions matrimoniales. Mais cela se fait tous les jours, madame le garde des sceaux !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Exactement !
M. Alain Lambert. En effet, certaines personnes ayant choisi de partager une vie rédigent des conventions qui s'apparentent à celles que le législateur a proposées à ceux qui se marient. Et ces contrats sont naturellement bornés par l'ordre public et les bonnes moeurs, comme nous le savons tous.
Mais, madame le garde des sceaux, vous ne pouvez pas nous laisser dans cet embarras juridique : avec la réponse que vous venez de nous donner, nous n'allons plus savoir si cela demeure possible ! Vous ne pouvez pas nous laisser dans cette espèce d'insécurité juridique qui va plonger les juristes dans une perplexité dramatique et qui peut susciter des contentieux juridiques importants. Et croyez bien que ma question n'est empreinte ni d'idéologie ni de mauvaise volonté, mais simplement du souci d'éclairer le législateur et tous ceux qui ont mission d'appliquer la loi. Dois-je comprendre que le fait que notre collègue Robert Badinter nous propose cet amendement visant à introduire dans le code civil la définition du concubinage signifie qu'il se rallie à la construction juridique du Sénat ? (Sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Oui, bonne question !
M. Alain Lambert. Estimez-vous, mon cher collègue, que l'Assemblée nationale a oublié de prévoir une telle définition et qu'il faut combler ce vide en insérant dans le texte la rédaction que vous nous proposez ? Ou considérez-vous, avec les qualités de juriste que nous vous connaissons, que le « monstre » - le mot n'est pas délicat, disons plutôt « la construction à parfaire » - de l'Assemblée nationale mérite tellement d'améliorations qu'il vaudrait mieux, finalement, se rallier à la proposition de la commission des lois ?
Si telle était, fondée sur votre conviction de juriste, votre intention, il serait utile de le dire au Sénat, car nous pourrions alors en débattre plus avant et peut-être aboutir, à terme, à un texte reprenant la rédaction proposée par la commission des lois qui soit commun au Sénat et à l'Assemblée nationale.
S'agissant enfin de l'amendement n° 31, la délicatesse dont M. le rapporteur a fait preuve en exprimant son avis défavorable m'oblige naturellement à être tout aussi délicat. M. le rapporteur m'a indiqué qu'il existe peu de différences entre ma proposition et celle de la commission. Si cela est vrai, l'insertion n'est cependant pas la même, ne pouvant accepter celle qu'il a choisie, je ne voterai pas l'amendement n° 3 rectifié de la commission. (Applaudissements sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 85:

Nombre de votants 312
Nombre de suffrages exprimés 309
Majorité absolue des suffrages 155
Pour l'adoption 192
Contre
117

M. Claude Estier. On a fait un grand progrès ! (Sourires.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l'article 1er, et les amendements n°s 56 et 31 n'ont plus d'objet.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. _ Le livre Ier du code civil est complété par un titre XII ainsi rédigé :

« TITRE XII

« DU PACTE CIVIL DE SOLIDARITÉ

« Art. 515-1 . _ Un pacte civil de solidarité peut être conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune.
« Art. 515-2 . _ A peine de nullité, il ne peut y avoir de pacte civil de solidarité :
« 1° Entre ascendant et descendant en ligne directe, entre alliés en ligne directe et entre collatéraux jusqu'au troisième degré inclus ;
« 2° Entre deux personnes dont l'une au moins est engagée dans les liens du mariage ;
« 3° Entre deux personnes dont l'une au moins est déjà liée par un pacte civil de solidarité.
« Art. 515-3 . _ Deux personnes qui décident de conclure un pacte civil de solidarité doivent établir une déclaration écrite conjointe organisant leur vie commune.
« A peine de nullité, elles doivent la remettre au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel elles fixent leur résidence, en y annexant une copie de leur acte de naissance et un certificat du greffe du tribunal d'instance de leur lieu de naissance ou, en cas de naissance à l'étranger, du greffe du tribunal de grande instance de Paris attestant qu'elles ne sont pas déjà liées par un pacte.
« Le greffier inscrit cette déclaration sur un registre et en assure la conservation.
« Il fait porter mention de la déclaration sur un registre tenu au greffe du tribunal d'instance du lieu de naissance de chaque partenaire ou, en cas de naissance à l'étranger, au greffe du tribunal de grande instance de Paris.
« L'inscription sur le registre du lieu de résidence confère date certaine au pacte.
« Les modifications du pacte font l'objet d'un dépôt, d'une inscription et d'une conservation au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation du pacte, liant deux partenaires dont l'un au moins est de nationalité française, sont assurées par les agents diplomatiques et consulaires français. Le dépôt, l'inscription et la conservation des modifications du pacte sont également assurés par ces agents.
« Art. 515-4 . _ Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'apportent une aide mutuelle et matérielle. Les modalités de cette aide sont fixées par le pacte.
« Les partenaires sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante.
« Art. 515-5 . _ A défaut de stipulations contraires de l'acte d'acquisition, les biens des partenaires acquis à titre onéreux postérieurement à la conclusion du pacte sont soumis au régime de l'indivision. Les biens dont la date d'acquisition ne peut être établie sont également soumis au régime de l'indivision.
« Art. 515-6 . _ Les dispositions des articles 832 à 832-4 sont applicables en cas de dissolution du pacte civil de solidarité.
« Art. 515-7 . _ Supprimé .
« Art. 515-8 . _ Lorsque les partenaires décident d'un commun accord de mettre fin au pacte civil de solidarité, ils remettent une déclaration conjointe écrite au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel l'un d'entre eux au moins a sa résidence. Le greffier inscrit cette déclaration sur un registre et en assure la conservation.
« Lorsque l'un des partenaires décide de mettre fin au pacte civil de solidarité, il signifie à l'autre sa décision et adresse copie de cette signification au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« Lorsque l'un des partenaires met fin au pacte civil de solidarité en se mariant, il en informe l'autre par voie de signification et adresse copies de celle-ci et de son acte de naissance, sur lequel est portée mention du mariage, au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« Lorsque le pacte civil de solidarité prend fin par le décès de l'un au moins des partenaires, le survivant ou tout intéressé adresse copie de l'acte de décès au greffe du tribunal d'instance qui a reçu l'acte initial.
« Le greffier qui reçoit la déclaration ou les actes prévus aux alinéas précédents porte ou fait porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte initial. Il fait également procéder à l'inscription de cette mention en marge du registre prévu au troisième alinéa de l'article 515-3.
« A l'étranger, la réception, l'inscription et la conservation de la déclaration ou des actes prévus aux quatre premiers alinéas sont assurées par les agents diplomatiques et consulaires français qui procèdent ou font procéder également aux mentions prévues à l'alinéa précédent.
« Le pacte civil de solidarité prend fin, selon le cas :
« 1° Dès la mention en marge de l'acte initial de la déclaration conjointe prévue au premier alinéa ;
« 2° Trois mois après la signification délivrée en application du deuxième alinéa, sous réserve qu'une copie en ait été portée à la connaissance du greffier du tribunal désigné à cet alinéa ;
« 3° A la date du mariage ou du décès de l'un des partenaires.
« Les partenaires déterminent eux-mêmes les conséquences que la rupture du pacte entraîne à leur égard. A défaut d'accord, celles-ci sont réglées par le juge. »
Sur l'article 1er, je suis saisi de vingt-trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 4 est présenté par M. Gélard, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 32 est déposé par MM. Lorrain, Badré, Machet et Lambert.
Tous deux tendent à supprimer l'article 1er.
Par amendement n° 57 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-1 du code civil, après le mot : « majeures », d'insérer les mots : « non placées sous tutelle ».
Par amendement n° 34, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel » par les mots : « à la mairie de la commune dans laquelle ».
Par amendement n° 35, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, au début du troisième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « Le greffier inscrit » par les mots : « Les services de l'état civil inscrivent ».
Par amendement n° 58 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil :
« Il transmet à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires à fin d'inscription en marge du registre d'état civil. »
Par amendement n° 36, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 37, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie de leur résidence ».
Par amendement n° 38, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le sixième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-3 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 59 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, à la fin de la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-4 du code civil, de remplacer les mots : « une aide mutuelle et matérielle » par les mots : « une aide morale et matérielle ».
Par amendement n° 60 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter in fine le second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-4 du code civil :
« Les partenaires contribuent aux charges de la vie commune en proportion de leurs facultés. Toute dette contractée par l'un des partenaires pour les besoins de la vie commune oblige solidairement l'autre partenaire. Toutefois, celui-ci n'est pas tenu des dettes excessives eu égard aux ressources des partenaires. »
Par amendement n° 45 rectifié, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-5 du code civil :
« Art. 515-5. - Les partenaires peuvent déclarer de manière générale, qu'ils entendent contracter un pacte civil de solidarité sous l'un des régimes prévus au titre V du livre III du code civil.
« A défaut de stipulations spéciales dérogeant au régime de communauté ou le modifiant, les règles établies dans la première partie du chapitre II du titre V du livre III formeront le droit commun des partenaires liés par un pacte civil de solidarité.
« Les règles prévues au titre V du livre III du présent code s'appliquent aux partenaires ayant contracté un pacte civil de solidarité. »
Par amendement n° 61 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-5 du code civil :
« Art. 515-5. - Chaque partenaire peut prouver par tout moyen, tant à l'égard de l'autre partenaire que des tiers, qu'il a la propriété exclusive d'un bien.
« Les biens sur lesquels aucun des partenaires ne peut justifier d'une propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément. »
Par amendement n° 62 rectifié, Mme Derycke, M. Bel et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter in fine le texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-6 du code civil par les mots suivants : « pour l'attribution du domicile principal ».
Par amendement n° 39, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance dans le ressort duquel » par les mots : « à la mairie de la commune dans laquelle ».
Par amendement n° 63 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, à la fin de la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « dans le ressort duquel l'un d'entre eux au moins a sa résidence » par les mots : « dans lequel ils avaient déposé leur demande initiale ».
Par amendement n° 40, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, au début de la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « Le greffier inscrit » par les mots : « Les services de l'état civil inscrivent ».
Par amendement n° 41, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 42, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, dans le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « au greffe du tribunal d'instance » par les mots : « à la mairie ».
Par amendement n° 43, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent de rédiger comme suit le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil :
« Les services qui reçoivent la déclaration ou les actes prévus aux alinéas précédents portent ou font porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte initial. Ils font également procéder à l'inscription de cette mention en marge du registre prévu au troisième alinéa de l'article 515-3. »
Par amendement n° 64 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil :
« Le greffier qui reçoit la déclaration ou les actes prévus aux alinéas précédents porte ou fait porter mention de la fin du pacte en marge de l'acte initial. Il transmet également un extrait de la déclaration à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires à fin d'inscription en marge du registre d'état civil. »
Par amendement n° 44, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent, à la fin du neuvième alinéa (2°) du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, de remplacer les mots : « du greffier du tribunal désigné à cet alinéa » par les mots : « des services de la mairie ».
Par amendement n° 65 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, au début du dernier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 515-8 du code civil, avant les mots : « les partenaires », d'ajouter les mots : « lors de la rupture, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'amendement n° 4 n'a d'autre objet que de supprimer le PACS.
M. Dominique Braye. C'est clair !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Soyons logiques. Depuis ce matin, nous avons adopté trois dispositions. En premier lieu, nous avons affirmé que chacun était libre de sa vie personnelle et, du même coup, nous avons reconnu tous les comportements ; il n'est donc point besoin de les préciser. En deuxième lieu, nous avons reconnu que le mariage était l'union d'un homme et d'une femme. Enfin, en troisième lieu, nous avons inséré dans le code civil la notion de concubinage, qui est l'union de deux personnes qui vivent en couple, quelles qu'elles soient, quelles que soient les interprétations que les uns ou les autres veulent donner à ce terme de couple.
Comment peut-on conserver le PACS après le dispositif que nous avons adopté ?
Je suis obligé de reprendre ici les différentes dispositions que l'Assemblée nationale a adoptées et qui sont, je l'ai déjà dit dans mon rapport introductif, complètement dérogatoires au droit commun des contrats. En réalité, elles instituent un sous-mariage, nous le verrons bien avec tous les amendements qui ont été déposés par nos collègues du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen et qui visent, en fait, à rapprocher le PACS du mariage.
Prenons quelques exemples, que je ne détaillerai pas : cela prendrait trop de temps.
Tout d'abord, pourquoi réserver, dans l'article 515-1, la signature du contrat aux seules personnes majeures, alors que le droit général des contrats s'applique également aux mineurs émancipés, sans oublier que l'on ne parle pas ici des majeurs incapables qui, normalement, avec leur organe de tutelle, peuvent également signer des contrats ?
L'article 515-2 transpose ni plus ni moins les dispositions applicables au mariage en ce qui concerne les empêchements de signer un PACS. Pourquoi exclure les alliés ? Pourquoi exclure les collatéraux ? Ces dispositions découlent directement du mariage et elles démontrent bien que le PACS est une transposition du mariage.
L'article 515-3 dispose qu'est déposée une « déclaration écrite conjointe » - mais on ne sait pas qui dépose, si on dépose en personne ou si on fait déposer par quelqu'un d'autre - « organisant leur vie commune ». Cette déclaration vise-t-elle le contrat de PACS ou peut-il y avoir, à côté de la déclaration, un contrat pour la compléter ? Nous ne savons rien ! Quel document sera opposable aux tiers ? La déclaration ou le contrat ? Nous n'en savons pas.
M. Alain Lambert. Très bonne question !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Continuons : on nous dit que, « à peine de nullité... » Mais de quelle nullité s'agit-il ? Une nullité relative ou une nullité absolue ? Là encore, nous n'en savons rien, il faudra que la jurisprudence décide.
Ensuite, on nous dit qu'il y a une date certaine. Mais non, il n'y a pas de date certaine ! Le dépôt de la déclaration peut ne pas correspondre du tout avec la transposition sur le registre tenu par le greffier ! On peut très bien remettre la déclaration à un agent du greffe, qui décidera de l'enregistrer le lendemain, le surlendemain ou un mois plus tard, lorsque le greffier sera revenu de vacances ! Il n'y a donc pas de date certaine et les « pacsés » croiront que c'est la date à laquelle ils ont remis la déclaration - ou que l'un des deux l'aura remise, parfois, d'ailleurs, sans que l'autre le sache - alors qu'il peut s'agir de la date que le greffier aura retenue pour enregistrer ladite déclaration sur le registre. Là encore, que d'incertitudes !
Venons-en à l'article 515-4, sur lequel je ne m'étendrai pas non plus : je vous renvoie à mon rapport écrit pour ce qui est des détails.
Cet article dispose que le PACS comporte des obligations et des devoirs. Non ! Il ne comprend aucune obligation ni aucun devoir !
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Qu'entendez-vous par les mots « aide mutuelle matérielle » ? Ils ne veulent rien dire ! Faut-il comprendre que l'un va bricoler et que l'autre va faire la vaisselle ? Ces mots n'ont aucune signification ! (Vives protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste, républicain et citoyen.)
Mme Nicole Borvo. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !
M. Robert Bret. Est-ce que vous faites la vaisselle, monsieur Gélard ? (Sourires.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Disons-le nettement, le PACS ne comporte pas de devoir. Au demeurant, comment un contrat qu'il est possible de dénoncer à n'importe quel moment pourrait-il comporter un devoir ?
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Dominique Braye. Naturellement !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Quant à la solidarité pour dettes à l'égard des tiers, comment voulez-vous qu'elle puisse être organisée puisqu'il n'y a pas de publicité ? En effet, les pacsés pourront très bien faire état de leur situation ou la cacher ! Les tiers pourront donc l'ignorer. Cette solidarité est alors vaine, du moins dans l'état actuel de ce texte.
Et ne parlons pas d'indivision ! J'ai déjà abordé cette question : avez-vous bien lu les dispositions relatives à l'indivision qui figurent dans le code civil ? Savez-vous que tous les actes de gestion doivent être réalisés en commun ? Imaginez un commerçant qui « pacserait » avec une personne qui n'exerce pas cette activité, un artisan avec une personne qui n'est pas artisan, un exploitant agricole avec une personne qui ne le serait pas ? Comment voulez-vous que tous les actes de gestion soient contresignés par le « pacsé » ? Ce n'est pas sérieux ! C'est oublier, au moment de la rupture, toutes les difficultés que soulève l'indivision, sans même parler de l'enrichissement sans cause qui pourra en découler, et l'on pourrait multiplier les exemples à l'infini. Quant à l'article 515-6, relatif à l'attribution préférentielle, il est également totalement délirant. Je sais bien qu'un amendement vise à limiter simplement sa portée à l'habitation principale, mais, en ce qui concerne le fonds de commerce, l'exploitation agricole, son application n'est pas envisageable, sauf à se lancer dans des difficultés juridiques absolument insurmontables.
Enfin, la cerise sur le gâteau est constituée par la fin du PACS, qui est totalement dérogatoire au droit des contrats, y compris des contrats à durée indéterminée : on peut y mettre fin quand on veut. Ah ! bien sûr, on nous a dit qu'on avait ménagé une notification par exploit d'huissier trois mois auparavant. Mais à partir du moment où l'un des deux « pacsés » a disparu, comment va-t-on le retrouver ? L'exploit d'huissier va se perdre dans la nature !
Mme Dinah Derycke. Cela arrive dans bien des couples mariés !
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'un ou l'autre sera alors « dépacsé » sans le savoir, parce que l'on déroge aux règles contractuelles. En réalité, la partie la plus faible, la victime, ne sera absolument pas protégée dans ce système de dénonciation unilatérale.
De plus, il ne pourra pas être attribué de dommages et intérêts, car, pour cela, il faudrait qu'existe une faute. Le PACS ne génère donc pas d'obligation réelle ni de possibilité de dédommagement de la partie la plus faible en cas de rupture unilatérale.
J'aurais pu continuer comme cela très longtemps, en décortiquant en détail chacun des éléments d'un PACS qu'il n'est pas possible de conserver : il comporte tant de nids à contentieux, de difficultés, de dérogations au droit général que l'on peut même se poser la question de sa constitutionnalité !
Dès lors, on ne peut que demander la suppression du PACS. Au demeurant, si par malheur le texte était adopté en l'état par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, je suis sûr que celui qui, par mésaventure, aurait signé un premier PACS ne le referait plus jamais compte tenu des difficultés qu'il rencontrerait dans sa mise en oeuvre.
Disons-le franchement, en réalité le PACS est uniquement conçu pour que les « pacsés » bénéficient des avantages fiscaux qui y sont attachés. Nous nous trouvons là devant des inégalités, des discriminations totalement inacceptables.
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Oui, mes chers collègues, le PACS n'a été fait que pour des raisons fiscales! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste).
M. le président. La parole est à M. Machet, pour défendre l'amendement n° 32.
M. Jacques Machet. Comme l'amendement n° 4, l'amendement n° 32 vise à supprimer cet article.
Pourquoi faut-il supprimer le PACS ?
D'abord, parce qu'il est ambigu, cela a été dit et redit : sa nature juridique est indéterminée, on ne sait pas s'il s'agit d'un contrat ou d'un simple constat.
Ensuite, parce que le PACS, contrairement au mariage, ne prévoit aucune engagement sur l'avenir.
Mme Nicole Borvo. Ce n'est pas un mariage !
M. Jacques Machet. Il est une source d'instabilité et d'insécurité juridique pour tous ceux qui le signent : la protection du plus faible n'est pas assurée alors que la possibilité de rupture unilatérale ouverte à tout moment peut être considérée comme un retour à la répudiation. C'est une véritable régression.
Par ailleurs, il n'est nulle part question des enfants, beaucoup l'ont dit au cours de ces débats.
De plus, le PACS est fortement inégalitaire parce qu'il va créer une forte inégalité entre les concubins signataires et celles et ceux qui ne le désirent pas.
Mme Nicole Borvo. Et alors ?
M. Jacques Machet. L'union libre est pourtant un choix positif, revendiqué comme tel, d'un lien strictement privé.
Enfin, le PACS menace non seulement le mariage, ce qui est fort critiquable en soi, mais aussi le concubinage, ce qui est fort injuste. Le PACS n'est pas un cadre juridique pour le concubinage, il est une alternative au mariage pour sortir, précisément, du concubinage, alors que le concubinage n'a jamais été un danger pour le mariage.
Le PACS met donc fin à la reconnaissance progressive de l'union libre, alors que l'attachement au concubinage est réel.
Le PACS touche également à la famille, car il touche au couple. Pourtant, c'est dans la famille que s'exprime la solidarité, que s'apprend le respect de l'autre et que se transmettent les vraies valeurs.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
Mme Nicole Borvo. Pas toujours !
M. Jacques Machet. La famille, pour moi, cellule de base de la société, est un refuge pour les jeunes et les moins jeunes. La famille, c'est aussi et surtout le lieu de procréation privilégié, où l'enfant doit trouver le respect de sa personne, car il est bon de le souligner : on n'élève pas un enfant, on l'aide à s'élever.
M. Jean-Luc Mélenchon. Qu'est-ce que cela a à voir ?
M. Jacques Machet. La famille est un maillon central de la cohésion sociale, et c'est pourquoi elle doit être protégée et confortée.
Bref, il n'y a pas de place dans le code civil pour une nouvelle institution entre le mariage et l'union libre, et c'est pour ces raisons que les membres du groupe de l'Union centriste rejetteront le PACS. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 57 rectifié.
Mme Dinah Derycke. En préambule, je tiens à rappeler que nous avons toujours dit qu'il y avait place entre le concubinage et le mariage pour un nouveau cadre juridique, pour encourager la stabilité des couples homosexuels ou hétérosexuels qui, prenant l'engagement d'une vie commune, se soumettent volontairement et librement à des devoirs, à des obligations, et qui, en retour, reçoivent effectivement des droits. Cette forme de contact participe, en effet, de la cohésion sociale.
Contrairement à ce que propose M. le rapporteur, à savoir ni plus ni moins la suppression du PACS, nous nous sommes donc, pour notre part, attachés à porter sur ce texte un regard différent afin de rechercher s'il pouvait effectivement être amélioré et enrichi, et si les conditions - très particulières, il faut le rappeler - de sa discussion à l'Assemblée nationale n'avaient pas écarté tel ou tel point précis.
Nous nous sommes ainsi livrés à une étude juridique de ce texte sur le fond et nous présenterons toute une série d'amendements, dont le premier, l'amendement n° 57 rectifié, vise à préciser que le PACS ne sera pas ouvert aux personnes incapables placées sous tutelle.
Cet exemple montre bien que le texte adopté par l'Assemblée nationale est parfaitement amendable et peut tout à fait être enrichi.
M. le président. La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 34.
M. Robert Bret. Monsieur le président, en présentant l'amendement n° 34, je défendrai également les amendements n°s 35 à 44, qui en découlent directement.
Tous ces amendements ont trait au lieu d'enregistrement de la déclaration organisant la vie commune de deux personnes signataires d'un PACS. C'est une question importante.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement transférant de la préfecture vers les tribunaux d'instance le lieu de signature du PACS. Preuve est donc apportée que la solution de la préfecture, initialement retenue, n'était pas la bonne.
Pour notre part, nous estimons depuis le début que le PACS devrait être signé au service d'état civil de la mairie, plus connue, plus accessible et plus proche du citoyen.
De plus, c'est le lieu où sont déjà déclarés tous les actes importants de la vie : naissance, mariage, décès, y compris les certificats de vie commune et de concubinage. Il serait donc plus pratique et plus logique de regrouper tous les événements qui jalonnent la vie d'une personne dans un même lieu.
La solution retenue par l'Assemblée nationale, à savoir l'enregistrement au greffe du tribunal d'instance, pose davantage de problèmes qu'elle ne semble en résoudre.
En effet - la commission des lois l'a bien relevé - des problèmes vont rapidement se poser, dans la pratique, du fait que les greffiers sont d'ores et déjà en nombre insuffisant et donc surchargés. En outre, tous les tribunaux d'instance ne disposent pas d'un greffier à plein temps.
M. le président. L'amendement n° 35 a donc été défendu.
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 58 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Cet amendement vise, parmi d'autres, la publicité à l'égard des tiers, la rapidité de la transmission et la date d'effet du PACS.
Le PACS est déclaré au greffe d'instance, mais le greffier transmet l'information à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires aux fins d'inscription en marge du registre d'état civil. C'est à la fois plus simple et plus rapide et cela permet aux tiers, dans certains cas, la tenue d'un commerce ; par exemple, d'être informés que les personnes ont été pacsées.
M. le président. Les amendements n°s 36, 37 et 38 ont été défendus.
La parole est à Mme Derycke, pour soutenir les amendements n°s 59 rectifié et 60 rectifié.
Mme Dinah Derycke. L'amendement n° 59 rectifié vise à une meilleure rédaction de la formule « aide mutuelle et matérielle », qui a été très critiquée et qui, c'est vrai, laisse à désirer sur le plan de la langue.
Entre les personnes qui contracteront un PACS, il n'y a pas uniquement un lien d'ordre financier, d'ordre pécuniaire ; il y a aussi, bien sûr, un soutien moral, dans la maladie, dans les peines, mais également un partage des joies, qui sont le lot de tous ceux qui vivent en commun.
Voilà pourquoi nous proposons la formule : « aide morale et matérielle ».
Quant à l'amendement n° 60 rectifié, il a pour objet de limiter la solidarité à l'égard des tiers pour les dettes contractées par l'un des partenaires pour les besoins de la vie courante.
Dans un couple marié, il y a solidarité des dettes à l'égard des tiers. La jurisprudence a toutefois veillé à ce que cela ne se retourne pas contre le conjoint le plus faible. En l'espèce, nous adaptons quelque peu cette réalité aux couples qui contractent un PACS, en prévoyant que les dettes ne doivent pas être excessives eu égard aux ressources des partenaires. C'est un élément de justice et d'équité.
M. le président. La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 45 rectifié.
M. Robert Bret. L'article 515-5 du code civil, tel que rédigé par l'article 1er de la proposition de loi, soumet les personnes liées par un PACS au régime de l'indivision.
Ce régime présente plusieurs inconvénients.
Premièrement, l'indivision est instable. En effet, un indivisaire peut, à tout moment, en demander le partage. Dans les faits, c'est la loi du plus fort qui joue.
Deuxièmement, l'indivision est injuste. Par définition, dans ce régime, il n'y a pas de communauté, et chaque partenaire accroît son patrimoine de ses propres revenus.
Pour les biens immeubles, la preuve de la propriété est, somme toute, aisée à apporter. En revanche, les biens meubles, dont on n'aura pas forcément gardé la facture, seront considérés comme indivis.
En pratique donc, à supposer que l'un des partenaires soit aisé et l'autre RMIste, le premier le sera encore plus, alors que le second n'aura droit à rien de ce qu'ils auront acquis pendant leur vie commune.
Ce système se rapproche du régime de la séparation de biens des gens mariés (Voilà ! sur les travées du RPR), à la seule différence que les gens mariés ont aussi la possibilité d'être soumis, à défaut de contrat, au régime de la communauté.
M. Dominique Braye. Voilà ! Ce sont les régimes matrimoniaux !
M. Robert Bret. Les contractants à un PACS souhaitant, dans la plupart des cas, avoir un minimum de biens communs, pourquoi ne pas leur permettre, dès lors, d'être soumis au régime de la communauté réduite aux acquêts ?
Le texte, en l'état, ne leur permet pas ce choix.
C'est pourquoi nous proposons, par amendement, de laisser la liberté de choix en la matière, parce que toutes les situations ne sont pas égales.
Afin d'assurer une meilleure sécurité au couple et de protéger le plus faible, les pacsés devraient pouvoir choisir le régime qui leur est le plus adapté.
M. Dominique Braye. C'est le mariage sans le dire !
M. le président. La parole est à Mme Dinah Derycke, pour défendre les amendements n°s 61 rectifié et 62 rectifié.
Mme Dinah Derycke. L'amendement n° 61 rectifié concerne l'indivision. M. le rapporteur l'a dit, ce n'est pas un régime toujours très simple. De plus, ce régime n'est pas bien connu de nos concitoyens.
Comme l'on peut penser, et espérer, que nombreux seront ceux qui voudront contracter un PACS, il convient d'éviter quelques pièges.
Aux termes de notre amendement, l'indivision serait l'exception, la règle étant la séparation de biens, ou un régime qui s'en approche.
Nous espérons lever ainsi les réticences dont nous avaient fait part certains notaires et avocats concernant le régime qui doit régler la vie commune matérielle, cette fois, des personnes qui auront pacsé.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Ce sont des régimes matrimoniaux !
Mme Dinah Derycke. Quant à l'amendement n° 62 rectifié, il a pour objet de limiter l'application des articles 832 à 832-4 du code civil relatifs à l'attribution préférentielle en cas de dissolution du pacte civil de solidarité pour l'attribution du domicile principal.
M. le président. L'amendement n° 39 a été défendu.
La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 63 rectifié.
Mme Dinah Derycke. En cas de rupture du PACS, dans un souci de simplification et de rapidité des délais, nous prévoyons que la déclaration de rupture est remise au greffe où le PACS a été originellement conclu.
M. le président. Les amendements n°s 40 à 43 ont été présentés.
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 64 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Cet amendement prévoit que, à la fin du pacte civil de solidarité, le greffier du tribunal d'instance transmettra un extrait de la déclaration à la mairie du lieu de naissance de chacun des partenaires aux fins d'inscription en marge de l'état civil.
M. le président. L'amendement n° 44 a été défendu.
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 65 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Les partenaires ne peuvent, bien sûr, envisager les conséquences de la rupture du PACS au moment où ils le contractent. C'est lors de la rupture qu'ils pourront éventuellement se mettre d'accord sur les conséquences que celle-ci entraîne pour eux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements, à l'exception, bien sûr, de l'amendement n° 32, qui est identique au sien ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements est naturellement défavorable.
Je tiens tout de même à souligner une chose, madame le garde des sceaux.
Je salue le travail accompli par nos collègues du groupe socialiste et par ceux du groupe communiste républicain et citoyen pour tenter d'améliorer le PACS. Mais que dois-je constater, sinon qu'en voulant l'améliorer ils ne font rien d'autre que du mariage ?
Cela démontre bien ce que je disais au départ, à savoir que le PACS n'est pas amendable, sauf à en faire un sous-mariage.
M. Alain Lambert. Exactement !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Que nous proposent nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen dans les amendements n°s 34 à 44 ? De tout transférer à l'état civil,...
M. Jean-Jacques Hyest. Voilà !
M. Patrice Gélard, rapporteur. ... avec l'officier d'état civil, avec une cérémonie... exactement comme pour le mariage.
M. Robert Bret. Avec les grandes orgues aussi ! (Sourires.)
M. Patrice Gélard, rapporteur. Et pourquoi pas, pendant qu'on y est ?
De même, que nous propose-t-on, sinon tout simplement de réinventer les contrats de mariage, parce que l'on s'aperçoit que le régime prévu dans le PACS est inapplicable ?
En réalité, cela conforte ce que nous avons dit depuis le début,...
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Patrice Gélard, rapporteur. ... à savoir que le PACS est un sous-mariage qui ne veut pas dire son nom. La position de la commission des lois du Sénat en sort renforcée.
M. Lucien Lanier. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Les amendements n°s 4 et 32, s'ils étaient adoptés, auraient pour effet de supprimer l'article 1er de la proposition de loi adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale. Je ne peux donc évidemment pas les accepter puisque, ce faisant, ils remettent en cause le principe même du pacte civil de solidarité.
Je m'élève avec force contre l'argument qui veut que le pacte civil de solidarité soit de nature à porter atteinte au mariage.
Je le redis ici, le mariage est une institution qui est plébiscitée par 24 millions de nos concitoyens, qui décident de s'engager solennellement devant un officier de l'état civil, et toute l'originalité, tout l'intérêt du PACS est, précisément, d'offrir aux couples qui ne veulent pas ou qui ne peuvent pas se marier des droits nouveaux en contrepartie - je dis bien « en contrepartie » - d'un engagement à une stabilité de vie commune dès lors qu'ils le souhaitent et l'affirment socialement.
Par ailleurs, vingt et un amendements ont été déposés sur les six articles du code civil visés à l'article 1er de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale. Cela démontre qu'il est possible d'améliorer le texte, et je remercie leurs auteurs de participer à ce perfectionnement.
Parmi ces amendements, je ne peux pas accepter ceux qui concernent le lieu d'enregistrement, la mairie en l'occurrence, l'état civil ou les régimes matrimoniaux. Il importe en effet d'éviter, comme je l'ai déjà dit, toute confusion avec le mariage. En revanche, je peux en accepter d'autres, et je vais donner des indications sur ce point.
Certains amendements présentés notamment par Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et Mélenchon et portant sur la capacité, les obligations des partenaires, l'attribution préférentielle, permettent, sous réserve d'améliorations de rédaction, soit de lever des difficultés qui ont été soulevées lors du débat à l'Assemblée nationale ou, postérieurement, par des universitaires, des notaires, soit de préciser des points particuliers.
Ainsi, le Gouvernement n'est pas opposé à l'interdiction faite aux majeurs placés sous le régime de protection de la tutelle de contracter un pacte, à la limitation à certains biens des possibilités d'attribution personnelle ou encore à des précisions sur les obligations des partenaires du pacte civil de solidarité.
Pour ce qui est de l'indivision, le Gouvernement est prêt à apporter des précisions afin d'éviter les difficultés qui pourraient surgir en l'état de la rédaction du texte.
Si le Sénat suit la commission des lois et supprime l'article 1er de la proposition de loi, il faudra que, sur les points que je viens de citer, le débat se poursuive à l'Assemblée nationale.
Je tiens maintenant à répondre à la question qu'a posée M. Lambert concernant le régime juridique prévu par le PACS, qui ne permet pas, s'agissant de la gestion des biens, d'adopter n'importe quel mécanisme.
Pour les biens indivis - c'est volontaire de notre part - il ne peut y avoir que gestion individuelle ou gestion commune. Dans ce cas, les titulaires du PACS ont le choix entre ces deux régimes. Ils n'ont pas - c'est volontaire, je le répète - toute liberté d'organiser la gestion de leurs biens. Cette disposition était nécessaire, parce qu'il n'est pas question que le PACS puisse concurrencer le mariage en empruntant aux dispositions des régimes matrimoniaux.
Enfin, certains se sont inquiétés des difficultés pratiques qui pourraient résulter de l'enregistrement du PACS au sein des tribunaux d'instance, qui présentent l'avantage d'être très près de nos concitoyens et de nos concitoyennes. Selon eux, ces tribunaux ne disposeraient pas toujours des personnels nécessaires, notamment de greffiers.
Qu'il me soit permis de leur apporter les précisions suivantes : sur 473 tribunaux d'instance, 87 n'ont pas d'emploi localisé de greffier de catégorie B, mais 86 ont un greffier en chef de catégorie A qui accomplit les missions de greffier car la charge de travail de ces 86 tribunaux d'instance ne nécessite pas la présence d'un encadrement intermédiaire. En conséquence, un seul tribunal d'instance, celui de Saint-Flour, situé dans le ressort de la cour d'appel de Riom et dans celui du tribunal de grande instance d'Aurillac, ne dispose pas d'effectifs budgétaires de fonctionnaires, l'activité de cette juridiction étant toutefois assurée par le tribunal d'instance de Murat, qui est situé dans le même ressort.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 4 et 32.
M. Robert Bret. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Nous nous opposons vivement à l'adoption de ces deux amendements, qui, comme vient de le souligner Mme le garde des sceaux, tendent à supprimer l'article 1er, remettant ainsi en cause le travail accompli pendant plusieurs semaines par les députés.
Mais de quoi avez-vous peur, mes chers collègues de la majorité ? Contrairement à ce que vous ne cessez de répéter, le PACS ne porte nullement atteinte au mariage ou à la famille. Mais il n'y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre !
Le pacte vise simplement, ce qui est primordial, à faciliter la vie des couples non mariés en leur accordant des droits dont ils sont depuis trop longtemps exclus. Le PACS est, au contraire, un élément de cohésion sociale qui permet de faire avancer toute la société en faisant reculer les discriminations.
Vous refusez de voir la réalité en face, vous qui vivez avec une image de la société digne d'un autre siècle ! Pour que chacun prenne ses responsabilités lors du vote de ces amendements de suppression de l'édifice même du PACS, nous demandons un vote par scrutin public.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Après l'adoption de ces amendements - car nous avons de fortes raisons de penser qu'ils pourraient bien l'être, compte tenu des votes précédents ! - acta est fabula, disait Auguste. La pièce est jouée, dirai-je, plutôt que la messe est dite, pour ne pas choquer M. Chérioux !
M. Emmanuel Hamel. La laïcité, c'est respecter la conviction des autres !
M. Jean-Luc Mélenchon. En fait, avec le vote de ces amendements, on aura anéanti le travail de l'Assemblée nationale.
A l'occasion de cette discussion, on a de nouveau entendu d'émouvants plaidoyers pour la famille, dont je dirai seulement, par respect pour ceux qui les ont prononcés - car je les respecte, eux et leurs plaidoyers - qu'ils sont complètement hors sujet.
Personne ne peut en effet douter dans cet hémicycle que l'ensemble des « pacsés » ont une famille et que les « pacsés » hétérosexuels ont ou auront des enfants... à moins que l'on veuille laisser entendre qu'il s'agirait de « sous-familles » et, pourquoi pas ? de « sous-parents » !
On a aussi entendu une nouvelle fois notre éminent rapporteur M. Gélard dire : le PACS, c'est du « sous-mariage ». Et l'agitation de ce chiffon rouge aura suffi pour que la majorité rappelle, à force cris, tout le dégoût que lui inspire cette formule.
Mais, une fois de plus, cette remarque est hors sujet. En effet, cher rapporteur, s'il y a dans le PACS des formules qui sont inspirées du mariage, c'est parce que le mariage est la forme de communauté de vie de base que nous connaissons jusqu'à présent et que des dispositions qui lui sont applicables paraissent parfaitement judicieuses et méritent d'être étendues à d'autres formes de vie commune.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Voilà qui est clair !
M. Jean-Luc Mélenchon. Où est le scandale ?
Par ailleurs et dans le même temps, et c'est pourquoi nous ne pouvons accepter ce qualificatif de « sous-mariage », le PACS, c'est autre chose que le mariage, c'est un mode de vie commune pour d'autres situations que celles qui sont liées par le mariage.
Il n'y a là ni offense, ni matière à s'indigner. C'est pourquoi cela s'appelle, monsieur Patrice Gélard, non pas un « sous-mariage » mais un PACS !
Chers collègues de la majorité sénatoriale, vous aurez passé cette journée et la précédente à enfoncer des portes ouvertes, à vous faire peur et, ensuite, à vous rassurer avec toutes sortes d'amendements créant d'effroyables confusions. Nous espérons que l'Assemblée nationale saura y mettre bon ordre.
Dressons maintenant le bilan de la grande oeuvre législative à laquelle vous aurez procédé. Ce sera trèsrapide compte tenu de la matière. A cette occasion en effet, le Sénat de la République française aura établi - saluons cet événement - que le mariage réunit un homme et une femme. Bravo ! (M. Braye s'exclame.)
Etait-il bien nécessaire de réunir le Sénat et de discuter pendant cinq ou six heures pour établir ce point ? Nous pourrions aussi tenir un débat sur l'eau chaude, ... sur le fil à couper le beurre... ou sur ce qui prête à évidence ! Nous éblouirons ainsi ceux qui voudront bien contempler nos travaux législatifs.
Après avoir précisé que le mariage est hétérosexuel et l'avoir tout entier enfermé dans le caractère sexuel de ceux qui sont liés, pris soudain d'une espèce de recul sur la question du sexe, pour ce qui est du concubinage, vous avez estimé que, là, il n'y avait plus de sexe !
Le Sénat de la République française ne sait pas de quel sexe sont les personnes qui vivront en concubinage ! Il n'a aucune idée sur la question et il préfère s'en remettre aux bénéficiaires de l'opération.
M. Dominique Braye. Non, les deux sexes sont concernés.
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais au passage, le concubinage, qui était une liberté dont les bénéficiaires ne demandaient rien à personne, a été restreint par votre travail.
Voilà le bilan de notre discussion sur le PACS.
Le PACS, qui traduit une volonté d'ouverture, de liberté, d'aération de notre société, de tolérance, de bienveillance, est réduit à ceci par le Sénat : le mariage est le fait d'un homme et d'une femme, et personne ne sait de quel sexe sont les concubins. Voilà le travail qui a été accompli !
Après quoi, bien sûr, dans la suite de la discussion, vous allez proposer toutes sortes d'avantages fiscaux à tous le monde - après nous avoir reproché d'en concéder aux pacsés - sans distinction ni de sexe ni de situation, ni de liens de vie commune.
Voilà en quoi aura consisté votre grande opération visant à démontrer que la majorité sénatoriale n'est pas « ringarde ». J'emploie ce mot non pas parce qu'il me plaît, mais parce que vous avez semblé en être obsédés.
Je vous le dis en cet instant, vous êtes « reringardisés » et, après une nouvelle lecture de ce texte à l'Assemblée nationale, vous serez non seulement ringards mais tricards ! (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Lambert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lambert.
M. Alain Lambert. La République est très souvent invoquée dans cette assemblée, comme dans toutes les autres sans doute. Mais se référer à la République, c'est peut-être d'abord s'engager à se respecter les uns les autres, à respecter les convictions des autres.
Or, personnellement, je ne considère pas que d'avoir un point de vue formé, établi, réfléchi sur un sujet aussi grave que celui dont nous débattons depuis ce matin soit le fait de la ringardise... ou d'autres termes qui ont été utilisés tout à l'heure. Je considère au contraire que c'est la traduction d'une conception de la vie, d'une certaine idée des valeurs qui font qu'une société vit en paix et dans le respect de ceux qui la composent.
M. Dominique Braye. Bravo !
M. Alain Lambert. Voilà qui m'amène à vous dire que je n'ai pas souhaité, depuis ce matin, participer à ce débat trop philosophique pour moi. Je ne suis qu'un provincial, monsieur Mélenchon, pardonnez-m'en ! (Sourires.)
M. Emmanuel Hamel. Un grand provincial !
M. Alain Lambert. Cela étant, je m'intéresse aux conséquences juridiques des textes que nous adoptons, et je vous remercie, madame le garde des sceaux, des précisions que vous avez apportées voilà un instant et qui nous permettent de comprendre que, désormais, les personnes qui souscriront un PACS auront le choix entre deux régimes - que je ne qualifierai pas de matrimoniaux - dont l'un est un peu séparatiste et l'autre un peu communautaire.
Ces personnes n'auront aucune faculté de choisir d'autres dispositifs qui répondraient pourtant plus précisément à leurs souhaits. Cette précision méritait d'être donnée.
Mes chers collègues, je vais voter l'amendement de la commission avec la conscience profonde d'être utile à mes concitoyens et à mes compatriotes. En effet, juridiquement, le PACS est une construction dangereuse, dont on ne peut mesurer les effets, quels que soient les efforts que vous avez faits, mes chers collègues, pour déposer des amendements visant à le corriger.
Vous construisez un édifice dangereux et, ce faisant, vous détruisez l'agrégat jurisprudentiel, réglementaire, doctrinal qui s'est constitué au fil des années sur le concubinage. Cela veut dire que vous instaurez une insécurité juridique complémentaire.
Vous avez, par la décison de construire le PACS, détruit tout ce qui existait au plan juridique, ou vous l'avez menacé. Peut-être serai-je « ringard », mais, en tout cas, je ne serai pas apprenti sorcier ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Pierre Fourcade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je voterai l'amendement de la commission pour deux raisons.
Premièrement, comme vient de le dire excellemment mon collègue M. Lambert, je considère que nous sommes en présence d'une construction ex nihilo qui se rapproche plus ou moins du mariage sans en avoir les obligations ni les caractéristiques, notamment la présomption pater is est , qui est l'une des bases du mariage. A partir de là - et les amendements de Mme Derycke et M. Delanoë nous le montrent bien - on peut sans doute modifier quelques éléments du dispositif mais, structurellement, on ne peut pas le changer.
Deuxièmement, je ne comprends pas comment le Gouvernement soutient une telle proposition alors que, de nos jours, le problème central de notre société, c'est assurer la protection des enfants et leur adaptation aux formes nouvelles de la société de demain.
Ce texte prévoit l'organisation de la vie en couple. Nous vivons dans une société qui compte encore une majorité de couples hétérosexuels. Peut-être que, dans vingt ans, la majorité d'entre eux sera homosexuelle ; on ne peut pas savoir !
Que peut-il arriver lorsqu'un homme et une femme vivent ensemble ? La naissance d'un enfant. Je suis stupéfait, madame le garde des sceaux, que le Gouvernement privilégie la notion de couple au point de soutenir un texte qui reste muet sur le problème des enfants !
Qu'arrivera-t-il aux enfants nés de personnes ayant conclu un PACS ? La présomption de paternité existera-t-elle ? Quel sera le statut de cet enfant ? Comment va-t-il évoluer ? Quel sera son droit sur les biens indivis ou collectifs ? Quels seront les mécanismes de filiation ? Silence absolu !
Que nos collègues de l'Assemblée nationale déposent une proposition de loi visant à organiser la vie du couple, c'est parfaitement naturel. Mais que le Gouvernement s'engage dans ce processus comme le fait Mme le garde des sceaux, je ne le comprends pas ! Moi qui, depuis vingt ans, m'occupe des problèmes sociaux et des problèmes de famille, je suis, je l'avoue, totalement désemparé.
Je répète ma question au Gouvernement : dans le cadre d'un PACS conclu entre deux hommes ou entre deux femmes, sera-t-il possible d'accéder à l'adoption ou de recourir à la procréation médicalement assistée ? Voilà deux questions précises auxquelles je souhaite avoir une réponse. En tout état de cause, je voterai l'amendement n° 4 de la commission. Car que l'on ne me dise pas que l'adoption ou la procréation médicalement assistée sont impossibles en raison d'autres lois ! A partir du moment où l'on crée un nouveau système juridique dans lequel on fait figurer un certain nombre de dispositions alors qu'on oublie d'en insérer d'autres, il est clair que cela deviendra possible un jour !
Encore une fois, la vraie question qui nous est posée sur le terrain est la suivante : quel sera le statut des enfants de deux personnes ayant conclu un PACS ?
M. Jacques Pelletier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Contrairement à mes amis MM. Lambert et Fourcade, je suis contre les amendements de suppression n°s 4 et 32, car je suis favorable au principe du PACS - qui, à mes yeux, n'est ni un mariage ni un sous-mariage - et cela pour deux raisons.
Premièrement, près de 40 % des naissances ont lieu aujourd'hui hors mariage. C'est un phénomène de société dont nous devons tenir compte, et il est inutile de se voiler la face. D'ailleurs, qui parmi nous ne connaît pas chez ses enfants, dans sa famille ou dans son entourage proche des personnes vivant en concubinage et donc confrontées à la fragilité que suppose une telle situation ?
Le PACS apporte des garanties juridiques, administratives, fiscales, ce qui est une bonne chose.
Deuxièmement, en tant qu'élu, mais surtout en tant que médiateur de la République, j'ai connu des drames - je dis bien des drames - au sein de couples vivant, souvent de longue date, en concubinage homosexuel ou hétérosexuel, tout spécialement au moment du décès de l'un des concubins. Là encore, le PACS constitue une réponse, imparfaite, j'en suis sûr, mais une réponse tout de même à de telles situations de détresse.
En revanche, madame la ministre, je souhaite beaucoup qu'à l'occasion de la navette vous usiez de votre influence pour améliorer sérieusement ce texte, qui en a bien besoin ! (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Emmanuel Hamel. Oh que oui !
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Les données du débat sont à présent parfaitement explicites et, par touches successives, les positions défendues et préconisées par la majorité du Sénat s'établissent clairement.
En premier lieu, pour nous, l'essentiel, la pierre angulaire de la famille et de la société, c'est bien le mariage. Nous l'avons conforté par une rédaction écartant les dérives ou les tentations qui se font jour dans des pays voisins et qui, un jour ou l'autre, pourraient naître dans certains esprits dans notre pays.
En deuxième lieu, notre approche est réaliste et factuelle. Sans porter de jugement sur les comportements individuels, nous avons recherché et trouvé une formulation concernant le concubinage, situation de fait à laquelle correspondent certains droits et certains devoirs.
En troisième lieu - nous y viendrons dans la suite de cette discussion - nous précisons cette approche réaliste par des dispositifs juridiques et fiscaux qui tiennent compte de la réalité de la vie en commun de certains couples, quels que soient leur choix de vie.
Cela étant fait et le tout formant un ensemble cohérent, il est clair que le PACS n'a aucune place dans ce dispositif et qu'il tombe de lui-même. Par évidence, nous voterons contre cette forme de contrat, qui ne répond strictement à aucune nécessité ni à aucune opportunité.
Au demeurant, madame le ministre, dans les réponses que vous avez faites à nos collègues du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen, j'ai entendu un certain nombre d'arguments qui me renforcent dans le sentiment que je viens d'exprimer.
Lorsque Mme Derycke vous disait que l'indivision ne lui semblait pas être une situation acceptable, vous lui avez répondu que des précisions devront être apportées pour éviter certaines difficultés. Puis vous avez souligné que la gestion des biens des « pacsés » pourrait être individuelle ou commune. Cela ressemble furieusement - plusieurs de nos collègues l'ont remarqué - à des dispositions issues des régimes matrimoniaux existants. La confusion se trouve recréée entre l'institution du mariage et la formule hybride qu'est votre pacte civil de solidarité.
Vous avez conclu en indiquant que les partenaires n'auraient pas toute liberté d'organiser la gestion de leur bien. Avec M. le rapporteur de la commission des lois, nous avons fait valoir, que dans certaines circonstances, s'agissant notamment de professionnels, de commerçants et d'artisans, il pourrait résulter de cette formule des engagements extrêmement confus, pour les personnes concernées et pour les tiers, et que rien de sérieux n'avait été proposé aux assemblées parlementaires pour porter remède à de telles situations.
Madame le ministre, par rapport à ce « nid » à contentieux, à embrouilles, qu'est finalement votre pacte, la stratégie défendue par la majorité sénatoriale est parfaitement claire et limpide, parfaitement ouverte et parfaitement adaptée aux réalités du temps. C'est en vertu de cette analyse globale, que bien entendu, je voterai ces amendements de suppression.
M. Emmanuel Hamel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Robert Bret. Ça va chauffer ! (Sourires.)
M. Emmanuel Hamel. Comme l'explique si bien et si justement la présidente de l'Association pour la promotion de la famille - je vous invite, mes chers collègues, à relire et à méditer ses propos, qui figurent à la page 222 du rapport - le PACS « détruit le mariage républicain, détruit la cellule familiale ». On peut ajouter qu'il constitue une menace pour l'enfance.
C'est la raison pour laquelle, bien entendu, je voterai les amendements de suppression de l'article 1er.
M. Claude Estier. C'est un peu court !
Mme Nicole Borvo. Le PACS n'est pas une obligation !
M. Robert Bret. Il ne faut pas toujours croire tout ce qui est écrit dans les rapports ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 4 et 32, repoussés par le Gouvernement.
Je suis saisi de trois demandes de scrutin public émanant, la première, de la commission des lois, la deuxième, du groupe communiste républicain et citoyen et, la troisième, du RPR.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 86:

Nombre de votants 314
Nombre de suffrages exprimés 314
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 216
Contre 98

M. Emmanuel Hamel. Et il s'est ainsi grandi en adoptant !
M. le président. En conséquence, l'article 1er est supprimé et les amendements n°s 57 rectifié, 34 et 35, 58 rectifié, 36 à 38, 59 rectifié, 60 rectifié, 45 rectifié, 61 rectifié, 62 rectifié, 39, 63 rectifié, 40 à 43, 64 rectifié, 44 et 65 rectifié n'ont plus d'objet.

Article additionnel après l'article 1er



M. le président.
Par amendement n° 66 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Sauf manifestation contraire de volonté du défunt, le partenaire lié à celui-ci par un pacte civil de solidarité, ou le concubin, participe à l'organisation des funérailles. »
La parole est à M. Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Un problème se pose de manière très concrète dans le cas où des familles, pour des raisons diverses, après le décès de l'un des leurs, entendent organiser seules les funérailles, rejetant le concubin ou la concubine qui n'a pas, en l'état actuel, de lien légal avec le défunt.
Je n'ai pas besoin de préciser que le problème est particulièrement aigu en cas de concubinage homosexuel, lorsque la famille n'a pas accepté l'homosexualité du défunt et projette ce rejet sur le compagnon ou la compagne de ce dernier.
Cet amendement a donc pour objet de préciser que le partenaire lié par un PACS, ou le concubin faisant partie des proches du défunt, est légitimement fondé à participer à l'organisation des obsèques de celui-ci.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Avis défavorable, naturellement. En effet, le PACS n'existant plus, on ne va pas adopter des amendements qui le conforteraient !
De plus, la loi du 15 novembre 1887 sur la liberté des funérailles prévoyant que tout majeur ou mineur émancipé peut régler les conditions de ses funérailles et charger une ou deux personnes de veiller à l'exécution de ses dispositions, l'amendement n'apporte rien de plus que ce qui est déjà prévu.
M. Jean-Jacques Hyest. Elle a été oubliée !
M. Claude Estier. Vous n'avez jamais connu de cas de ce genre ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Evidemment, je comprends le souci des auteurs de l'amendement n° 66 rectifié de trouver une solution à ce problème très douloureux qu'est l'organisation des funérailles. Toutefois, je rappelerai que, dans notre droit, hormis la loi du 15 novembre 1887, qui prévoit la possibilité d'organiser ses funérailles par testament, il n'existe pas de dispositions déterminant les personnes qui, à la place du défunt, peuvent organiser le déroulement des funérailles. C'est au juge d'instance, en cas de difficulté, de trouver des solutions aux conflits qui pourraient surgir.
Il n'est nulle part indiqué que le conjoint bénéficie d'un droit quelconque en la matière. Il serait paradoxal de prévoir qu'un membre du pacte civil de solidarité ou un concubin puisse se voir reconnaître une faculté qui n'est pas reconnue au conjoint.
Le texte proposé conduirait, par exemple, à privilégier l'amant d'une femme mariée qui décède par rapport à son mari.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Monsieur Bel, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Bel. Je le retire.
M. le président. L'amendement n° 66 rectifié est retiré.
(M. Jean-Claude Gaudin remplace M. Guy Allouche au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
vice-président

Article 2



M. le président.
« Art. 2. _ I. _ Le 1 de l'article 6 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité défini à l'article 515-1 du code civil font l'objet, pour les revenus visés au premier alinéa, d'une imposition commune à compter de l'imposition des revenus de l'année du troisième anniversaire de l'enregistrement du pacte. L'imposition est établie à leurs deux noms, séparés par le mot : "ou". »
« II. _ Après le 6 de l'article 6 du code général des impôts, il est inséré un 7 ainsi rédigé :
« 7. Chacun des partenaires liés par un pacte civil de solidarité est personnellement imposable pour les revenus dont il a disposé l'année au cours de laquelle le pacte a pris fin dans les conditions prévues à l'article 515-8 du code civil.
« Lorsque les deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité et soumis à imposition commune contractent mariage, les dispositions du 5 ne s'appliquent pas.
« En cas de décès de l'un des partenaires liés par un pacte civil de solidarité et soumis à imposition commune, le survivant est personnellement imposable pour la période postérieure au décès. »
« III. _ Les règles d'imposition et d'assiette, autres que celles mentionnées au dernier alinéa du 1 et au 7 de l'article 6 du code général des impôts, les règles de liquidation et de paiement de l'impôt sur le revenu et des impôts directs locaux ainsi que celles concernant la souscription des déclarations et le contrôle des mêmes impôts prévues par le code général des impôts et le livre des procédures fiscales pour les contribuables mentionnés au deuxième alinéa du 1 de l'article 6 du code général des impôts s'appliquent aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité qui font l'objet d'une imposition commune. »
Je suis saisi de huits amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 5, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de rédiger ainsi cet article :
« I. - A la fin du premier alinéa de l'article 6 du code général des impôts, les mots : "et 196 A bis", sont remplacés par les mots : ", 196 A bis et 196 A ter ".
« II. - L'article 196 du code général des impôts est complété par un 3° ainsi rédigé :
« "3° Les enfants à charge de la personne mentionnée à l'article 196 A ter ".
« III. - Après l'article 196 A bis, il est inséré dans le code général des impôts un article 196 A ter ainsi rédigé :
« Art. 196 A ter. - Tout contribuable peut considérer comme étant à sa charge une personne majeure vivant sous son toit, dont le montant des revenus perçus dans l'année est inférieur au montant cumulé sur les douze mois du revenu minimum d'insertion fixé pour une personne en application de l'article 3 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988.
« Le contribuable qui accepte le rattachement à son foyer fiscal de la personne visée à l'alinéa précédent bénéficie d'un abattement sur son revenu global net dont le montant est égal à celui mentionné à l'article 196 B. »
Par amendement n° 24, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de rédiger ainsi l'article 2 :
« I. - A la fin du premier alinéa de l'article 6 du code général des impôts, les mots : "et 196 A bis " sont remplacés par les mots : ", 196 A bis et 196 A ter ".
« II. - L'article 196 du code général des impôts est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Les enfants à charge de la personne mentionnée à l'article 196 A ter . »
« III. - Après l'article 196 A bis, il est inséré dans le code général des impôts un article 196 A ter ainsi rédigé :
« Art. 196 A ter. - Tout contribuable peut considérer comme étant à sa charge une personne majeure :
« qui est son ayant droit en application de l'article L. 161-14 du code de la sécurité sociale, à compter du 1er janvier de l'année qui suit la reconnaissance de cette qualité,
« ou qui vit effectivement sous son toit, à condition que ses revenus perçus dans l'année soient inférieurs à un montant égal au cumul sur douze mois du revenu minimum d'insertion fixé pour une personne isolée en application de l'article 3 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988.
« Le contribuable qui accepte le rattachement à son foyer fiscal de la personne susmentionnée, bénéficie d'un abattement sur son revenu global net dont le montant est égal à celui mentionné à l'article 196 B. »
Par amendement n° 46, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent :
A. - Après les mots : « imposition commune », de supprimer la fin de la première phrase du texte présenté par le I de l'article 2 pour compléter le 1 de l'article 6 du code général des impôts.
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, d'insérer, après le I, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Les pertes éventuelles de recettes pour l'Etat résultant de l'application de l'imposition commune des partenaires dès la signature du pacte civil de solidarité sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Les trois amendements suivants sont présentés par Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du goupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 67 rectifié bis tend :
I. - Dans le texte proposé par le I de l'article 2 pour compléter le 1 de l'article 6 du code général des impôts, à supprimer les mots : « de l'imposition des revenus de l'année du troisième anniversaire » ;
II. - Après le paragraphe I de cet article, à insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de la suppression du délai de trois ans à compter de la date d'enregistrement du pacte pour l'imposition commune pour les partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 68 rectifié vise, dans le texte proposé par le I de l'article 2 pour le 1 de l'article 6 du code général des impôts ; à remplacer les mots : « de l'imposition des revenus de l'année du troisième aniversaire de l'enregistrement du pacte » par les mots : « du 1er janvier qui suit le deuxième anniversaire de l'enregistrement du pacte ».
L'amendement n° 69 rectifié est ainsi rédigé :
A. - Après la première phrase du texte proposé par le I de l'article 2 pour le 1 de l'article 6 du code général des impôts, insérer une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, cette condition de durée ne s'applique pas aux partenaires, qui peuvent prouver par tout moyen l'antériorité de plus de trois ans de leur vie commune. »
B. - Compléter cet article par un paragraphe nouveau ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de la suppression de la condition de durée du pacte civil de solidarité de trois ans pour pouvoir bénéficier de l'imposition commune sont compensées à due concurrence par une majoration du tarif prévu aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Les deux derniers amendements sont présentés par MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade.
L'amendement n° 47 tend :
A. - A compléter le texte proposé par le I de l'article 2 pour compléter par un alinéa le 1 de l'article 6 du code général des impôts par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, la condition de durée imposée aux partenaires d'un pacte civil de solidarité ne s'applique pas lorsque ceux-ci peuvent prouver, par tout moyen, avoir au moins deux ans de vie commune. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, à insérer, après le I, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes éventuelles de recette pour l'Etat résultant de la non-application de la durée minimale de vie commune pour l'imposition commune des partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 48 vise :
A. - A compléter le texte proposé par le I de l'article 2 pour compléter par un alinéa le 1 de l'article 6 du code général des impôts par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, la condition de durée imposée aux partenaires d'un pacte civil de solidarité ne s'applique pas lorsque ceux-ci peuvent prouver, par tout moyen, avoir reconnu dans le délai légal au moins un enfant. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, à insérer, après le I, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes éventuelles de recettes pour l'Etat résultant de la non-application de la durée minimale de vie commune lorsque les partenaires liés par un pacte civil de solidarité ont reconnu un enfant sont compensées à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 5.
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'amendement n° 5, ainsi que d'autres amendements que nous examinerons ultérieurement concernent le volet fiscal du dispositif.
Nous n'avons pas enterré toutes les dispositions prévues dans le cadre du PACS. Elles n'étaient pas mauvaises en soi et réglaient toute une série de problèmes posés par le concubinage. Cependant, au lieu d'en limiter le bénéfice à une catégorie, ce qui aurait créé des inégalités, notre commission et la commission des finances ont décidé de les étendre à tout le monde.
Toutefois, la commission des lois a décidé de se rallier aux amendements proposés par la commission des finances. Aussi, je retire l'amendement n° 5 au bénéfice de l'amendement n° 24, que va présenter M. le rapporteur pour avis.
M. le président. L'amendement n° 5 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 24.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. En effet, la commission des finances a souhaité, en proposant une réécriture de l'article 2 de la proposition de loi, ouvrir la possibilité pour un contribuable quelconque de rattacher à son foyer fiscal une personne à faibles ressources, quelle que soit la relation susceptible d'exister entre ces personnes.
Nous nous situons donc dans un contexte tout à fait différent de celui où se plaçait l'Assemblée nationale puisque cette dernière assimilait les « pacsés » aux couples mariés et les faisait bénéficier - c'était probablement l'une des seules dispositions claires de ce curieux texte - de l'imposition commune et du régime du quotient familial. Elle opérait donc simplement une transposition des dispositions applicables aux couples mariés en matière d'impôt sur le revenu.
Quelles sont les conséquences concrètes du dispositif adopté par l'Assemblée nationale ?
Dans le rapport que j'ai eu l'honneur de remettre, au nom de la commission des finances, j'ai fait figurer des tableaux chiffrés, que je vais brièvement résumer.
Prenons l'exemple de personnes « pacsées » sans enfants disposant d'un revenu net fiscal de 400 000 francs. Alors que l'impôt dû par le titulaire du revenu de 400 000 francs - je prends, pour simplifier, l'hypothèse que l'un des membres du PACS dispose de 400 000 francs de revenu et l'autre de zéro francs de revenu ; naturellement, j'aurais pu prendre d'autres exemples, mais celui-ci me semble particulièrement démonstratif - atteindrait 154 000 francs selon le régime actuel, avec le système retenu par l'Assemblée nationale, il ne serait plus que de 107 000 francs, ce qui représenterait un gain financier net de près de 47 000 francs...
M. Emmanuel Hamel. Une perte pour le Trésor !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Il s'agirait surtout d'un gain pour les catégories de population concernées.
On a pu évoquer, sans jeter l'opprobre sur personne, certaines manières de vivre. Citons l'exemple de vieux messieurs du quartier de Saint-Germain-des-Prés, disposant de revenus relativement importants et accueillant sous leur toit des personnes sans revenu. Ce serait un beau cadeau qui leur serait fait, ce qui ne semble pas répondre à un objectif d'équité sociale !
Au sein de la commission des finances, nous avons suivi une logique tout à fait différente.
Nous estimons que les avantages liés à l'imposition commune ne se justifient, dans le cas du mariage, qu'en raison des contraintes de celui-ci et dans la perspective de l'éducation des enfants. C'est ce qui forme la légitimité de ce régime fiscal : il y a des obligations ; il y a des droits.
Madame le ministre, j'ai présenté naturellement un cas un peu « limite », mais j'aurais pu prendre l'exemple d'un revenu de un million de francs, et l'intérêt fiscal aurait été encore plus grand.
Compte tenu de l'efficacité de ce levier fiscal, le risque, me semble-t-il, est grand de voir proliférer des PACS de complaisance. Je voudrais qu'on m'explique comment on va pouvoir éviter ce réflexe, bien naturel chez les contribuables, surtout chez les contribuables disposant de certaines capacités contributives, consistant à rechercher dans les textes toutes les possibilités d'optimisation fiscale.
Mes chers collègues, ne croyez-vous pas qu'avec un tel dispositif vous ouvrez une brèche considérable, dont un mauvais usage pourra être fait, ce qui ira à l'encontre des objectifs que vous défendez par ailleurs si souvent, notamment au cours des discussions budgétaires, lorsque vous voulez nous faire croire que tel ou tel élément de la panoplie fiscale serait conçu uniquement pour telle ou telle catégorie de revenus.
La commission des finances se défie naturellement des risques d'optimisation fiscale. Elle propose donc un dispositif différent : il lui semble préférable de se référer à une notion objective, celle d'une personne dépendante économiquement qui dispose de faibles ressources, et d'accorder au contribuable qui accueille sous son toit cette personne dépendante un abattement de 25 000 francs.
La définition de cette situation de dépendance économique peut obéir à des critères parfaitement simples et objectifs.
Le premier de ces critères peut être le fait d'avoir été l'ayant droit du contribuable pour l'ouverture du droit à prestations en nature de l'assurance maladie : c'est la notion de personne à la « charge effective totale et permanente » du contribuable, selon la formule de l'article L. 161-14 du code de la sécurité sociale.
Le second critère est le fait - les deux critères étant alternatifs - d'avoir vécu, au cours de l'année précédente, sous le toit du contribuable et d'avoir des revenus annuels inférieurs à un montant de référence égal à celui qui ouvre droit au revenu minimum d'insertion, c'est-à-dire un revenu très faible, un revenu de subsistance.
Il est apparu nécessaire de compléter le premier critère dans la mesure où des personnes, effectivement complètement dépendantes du contribuable, comme certains chômeurs en fin de droits, peuvent, bien qu'elles soient sans ressources, continuer à avoir des droits propres en matière de prestations maladie.
On remarquera, en outre, qu'un dispositif de type pacte civil de solidarité est d'autant moins nécessaire que, dans cette logique de solidarité, les enfants de la personne ainsi rattachée donnent droit au quotient familial. Telle est la portée du paragraphe II du présent amendement.
Nous pensons, par cet amendement, effectuer une démarche d'encouragement à des solidarités tout à fait dignes de considération. Nous respectons la neutralité la plus complète car ces solidarités peuvent exister quel que soit le contexte affectif ou relationnel entre les personnes dont il s'agit. Nous estimons que ce dispositif est plus équitable et beaucoup plus simple que celui qui figure dans l'actuel article 2 de la proposition de loi.
M. le président. La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 46.
Mme Nicole Borvo. Je défendrai en même temps les amendements n°s 47 et 48, qui sont des amendements de repli.
L'article 2 de la proposition de loi concerne le volet fiscal du PACS et plus précisément la possibilité d'établir une imposition commune pour les personnes ayant décidé de se lier par un PACS.
Actuellement, le texte prévoit qu'une déclaration fiscale commune pourra être faite à partir du troisième anniversaire de l'enregistrement du PACS.
A l'évidence, ce délai traduit le soupçon que certains portent sur la nature même des relations entre partenaires pacsés et met en exergue le risque des PACS blancs. Je rappellerai que ce sont les mêmes qui s'insurgent contre les mariages blancs, qui seraient selon eux très répandus.
Mais qu'en est-il des mariés qui divorcent avant deux ans ? Aucun délai n'est imposé ; les mariés peuvent divorcer immédiatement après leur mariage.
Ce texte, qui prétend mettre fin aux discriminations et aux injustices subies par les homosexuels, en crée une nouvelle avec ce délai supplémentaire.
J'ajoute que, pour effectuer le calcul des prestations sociales des personnes se trouvant dans une situation précaire, est pris en compte le revenu de la personne qui partage leur vie, et ce sans délai.
Ainsi, les personnes « pacsées » se verront retirer, dès la signature du PACS, des prestations dont ils pouvaient bénéficier avant sans pour autant pouvoir, avant un délai de deux ans, bénéficier de possibles réductions d'impôts.
Ainsi, par exemple, les articles 5 bis et 5 ter suppriment sans délai l'allocation veuvage et l'allocation pour soutien de famille.
Pourquoi imposer des délais pour l'obtention de droits nouveaux alors que les éventuels droits antérieurs sont immédiatement supprimés ?
C'est pour réparer cette injustice que nous proposons au Sénat d'adopter l'amendement n° 46.
Au cas où il ne serait pas voté, nous avons déposé deux amendements visant à faire bénéficier de l'imposition commune au moins les personnes qui peuvent faire la preuve d'une vie commune de deux ans ou à celles qui ont des enfants.
M. le président. La parole est à Mme Derycke, pour défendre les amendements n°s 67 rectifié bis , 68 rectifié et 69 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Ces trois amendements sont également relatifs au délai prévu par le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale.
Pour des raisons identiques à celles que vient d'exposer Mme Borvo, nous souhaitons réduire ce délai.
Pour notre part, nous sommes attachés à l'imposition commune. Or qui dit imposition commune dit foyer fiscal et qui dit foyer fiscal dit reconnaissance d'un foyer. Je comprends bien que la majorité sénatoriale y soit opposée.
Mais, pour les raisons qu'a bien exposées Mme Borvo, dès que le PACS sera conclu, certains des avantages dont pouvaient bénéficier les intéressés disparaîtront immédiatement, que ce soit des minima sociaux, des prestations d'assurances veuvage, etc. Il ne me semble pas normal que, d'un côté, les avantages disparaissent alors que, de l'autre côté, le bénéfice de l'imposition commune et d'éventuelles réductions d'impôt n'est pas effectif.
Nous savons bien que, le PACS ayant été supprimé par le Sénat, nos amendements ne peuvent être retenus, mais nous pensons que la navette avec l'Assemblée nationale permettra de réétudier sereinement ces problèmes de délais.
Tel est l'esprit dans lequel nous défendons ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 46, 67 rectifié bis , 68 rectifié, 69 rectifié, 47 et 48 ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je formulerai cet avis, à travers deux simples remarques.
J'observerai tout d'abord que, comme Mme Derycke vient de le dire, ces amendements n'ont plus de raison d'être puisqu'ils portent sur le PACS et que nous avons supprimé celui-ci.
Je relèverai par ailleurs que, dans une certaine mesure, les auteurs de la propositon de loi avaient vu le danger du PACS, danger qu'a souligné M. Marini : que l'on utilise le PACS uniquement pour des raisons fiscales, ouvrant du même coup la voie à toute une série de fraudes. Dès lors, en raccourcissant les délais, on ne peut que susciter d'emblée la fraude fiscale.
C'est la raison pour laquelle je suis bien entendu défavorable à ces six amendements.
Au demeurant, comme l'a souligné l'un des membres du groupe socialiste, les raisons financières sont parmi les raisons essentielles du PACS : il s'agit non pas tant de reconnaître le couple homosexuel que de concéder des avantages fiscaux à un certain nombre de personnes. C'est là, en fait, le fond de l'affaire !
Mme Nicole Borvo. De tels propos sont inacceptables !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Nous, nous voulons faire en sorte que tout le monde puisse en bénéficier, sans discrimination.
Mme Nicole Borvo. Il n'y a pas que l'argent dans la vie !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il n'y a pratiquement que cela, et vous le savez bien !
M. Robert Bret. Pour vous, peut-être !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les sept amendements restant en discussion ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Sur l'amendement n° 24, je veux d'abord rappeler que l'objet du PACS est d'offrir un cadre législatif de nature à régler différents problèmes d'ordre juridique ou patrimonial aux personnes qui souhaitent construire un projet de vie commune.
En tant que contrat, le PACS suppose, à peine de nullité, que les souscripteurs soient juridiquement capables. Cette condition postule l'existence d'une égalité des parties.
Or la solution du rattachement traduirait l'existence d'une incapacité fiscale de la personne rattachée, qui devrait, à l'instar des enfants majeurs, formuler une demande de rattachement que l'autre membre du couple ayant souscrit le PACS serait libre d'accepter ou de refuser.
Un tel dispositif s'apparenterait en réalité à une réintroduction insidieuse de la notion de chef de famille en matière d'impôt sur le revenu pour les seules personnes ayant conclu un PACS. Il établirait ainsi une discrimination parmi les contribuables liés par un PACS en excluant du bénéfice de la mesure les contribuables dont le concubin disposerait de revenus excédant, même faiblement, la limite fixée.
Cette première raison me semble à elle seule suffisante pour préférer le dispositif de la proposition de loi à celui que suggère M. Marini.
Mais l'amendement n° 24 est aussi critiquable au regard de sa cohérence d'ensemble.
Il pose d'abord un problème de compatibilité avec le dispositif prévu à l'article 196 A bis du code général des impôts, aux termes duquel tout contribuable qui recueille sous son toit une personne titulaire de la carte d'invalidité prévue à l'article 173 du code de la famille et de l'aide sociale - invalidité d'au moins 80 % - bénéficie d'une majoration de quotient familial.
La combinaison de ce dispositif avec les termes de l'amendement conduirait à différencier, en fonction du critère d'invalidité, les modalités de prise en charge fiscale du concubin : celui qui serait valide ou reconnu invalide à moins de 80 % serait rattaché sous forme d'abattement ; celui qui serait invalide à au moins 80 % se verrait ouvrir le droit à un avantage de quotient familial.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Et alors ? C'est bien !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. La logique de cette distinction n'apparaîtrait probablement pas de façon immédiate aux contribuables et, de ce fait, porterait atteinte à la lisibilité de l'impôt sur le revenu, que le Gouvernement souhaite simplifier.
M. Philippe Marini, rapporteur. Oh là là !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Enfin, la proposition de M. Marini conduit à accorder un avantage de quotient familial au titre d'enfants que le contribuable n'a pas reconnus, alors que le père ou la mère de ceux-ci n'ouvriraient droit qu'à un abattement sur le revenu imposable. Je dois vous avouer que la justification d'un tel dispositif m'échappe complètement !
Toutes ces raisons me conduisent à souhaiter le rejet de cet amendement.
Quant aux observations abondamment développées par M. Marini concernant l'équité, je voudrais dire que le PACS ne profite ni aux riches ni aux pauvres. Il sera seulement plus favorable pour les partenaires dont les revenus sont très inégaux, comme l'est d'ailleurs l'imposition commune des couples mariés.
S'agissant des amendements n°s 46, 47 et 48, je ferai observer que les auteurs de la proposition de loi ont, me semble-t-il, fait preuve de sagesse en prévoyant que l'imposition commune des partenaires d'un PACS - avantage fiscal qui peut être important - ne pourrait intervenir qu'à partir de l'imposition des revenus de l'année du troisième anniversaire de la conclusion du PACS.
Ce délai vise à garantir de façon objective l'existence d'une période de vie commune suffisamment longue pour attester de la volonté des partenaires d'inscrire leur union dans la durée. C'est la logique même du PACS qui nous a conduits à inscrire ce délai.
Admettre l'imposition dès l'enregistrement du PACS encouragerait sans doute la signature de PACS de pure opportunité. Des personnes trouveraient en effet dans cette facilité un moyen d'optimisation fiscale, ce qui signifierait qu'elles ne placent pas leur démarche dans la finalité du PACS telle qu'elle est définie par l'article 1er de la proposition de loi, à savoir le moyen pour deux personnes d'organiser leur vie commune.
C'est pourquoi je ne suis pas favorable à ces amendements.
Les remarques qui précèdent valent également pour les amendements n°s 67 rectifié bis , 68 rectifié et 69 rectifié.
Il est vrai, madame Derycke, que vous substituez à la condition de délai le critère de l'existence d'une vie commune antérieure à la conclusion du PACS. Mais cela ne me paraît pas judicieux dans la mesure où l'administration de la preuve de l'existence d'une telle communauté de vie poserait de nombreux problèmes. Il en résulterait, à mon sens, une insécurité juridique préjudiciable aux intéressés, et aussi une rupture d'égalité au détriment des couples qui ne seraient pas en mesure d'apporter une telle preuve.
Je crois que les dispositions prévues par la proposition de loi sont préférables parce qu'elles garantissent de façon objective l'existence d'une période de vie commune constatée dans les mêmes conditions pour tous et suffisamment longue pour attester de la volonté des partenaires d'inscrire leur union dans la durée.
Je souhaiterais donc que ces amendements soient retirés.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Il est bien clair que notre proposition s'inscrit non pas dans l'optique du PACS, que nous avons rejeté, mais dans celle, tout à fait différente, de l'encouragement à des gestes de solidarité privée.
C'est pourquoi les objections relatives à la position dissymétrique dans laquelle peuvent être placées les deux personnes en cause ne sont plus recevables.
En ce qui concerne la conjugaison avec la disposition spécifique portant sur les personnes invalides, il ne me semble pas injustifié qu'une personne invalide bénéficie d'un avantage social et pécuniaire plus important qu'une personne valide.
Notre approche, s'agissant des personnes à charge et du rattachement des enfants, montre que, en tout état de cause, nous voulons avant tout privilégier les enfants.
Enfin, je soulignerai que ce dispositif a ceci de particulier par rapport au PACS qu'il ne nécessite pas de délai probatoire, la prise en compte des liens de solidarité étant immédiate.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 24.
M. Emmanuel Hamel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. En vérité, vous me voyez extrêmement heureux en cet instant, madame le garde des sceaux.
En effet, je ne peux pas concevoir que le Gouvernement ait ignoré les conséquences financières qu'aurait pour le Trésor l'adoption du PACS. S'il a accepté ces conséquences, qu'a analysées M. Marini, comment pourrait-il s'opposer aujourd'hui à une politique familiale beaucoup plus active, notamment au regard de l'aide à la natalité ? (Sourires.)
Je vois donc dans l'attitude du Gouvernement favorable au PACS la certitude que les familles vont bientôt recevoir l'assurance d'une politique beaucoup plus active en leur faveur.
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Tout d'abord, je veux répondre favorablement à la sollicitation de Mme le garde des sceaux.
J'ai bien indiqué tout à l'heure que nos amendements concernaient le PACS et que, celui-ci n'existant plus, de par la volonté de la majorité sénatoriale, ces amendements n'avaient plus vraiment de raison d'être.
Ils doivent simplement être regardés comme une contribution au débat qui va nécessairement se poursuivre. Nous souhaitions attirer l'attention sur des problèmes d'équité, tenant au fait que des avantages, notamment sociaux, seraient suspendus ou supprimés et qu'aucune réduction fiscale ne serait accordée dans les mêmes délais.
Bien entendu, nous pouvons maintenant retirer ces amendements.
Par ailleurs, je souhaite répondre à M. Gélard et à M. Marini que nous sommes bien conscients que le PACS peut faire naître des tentations d'optimisation fiscale, voire de fraude fiscale. Cependant, n'oublions pas qu'il y a aussi des mariages d'intérêt et même des divorces de complaisance.
En 1981, lorsque la gauche a créé l'impôt sur les grandes fortunes, certains couples, pourtant bien-pensants, mais aussi bien nantis, pour éviter d'avoir à payer cet impôt, n'ont pas hésité à divorcer tout en continuant leur vie commune. Cela explique qu'une disposition ait été prise pour imposer les concubins à l'impôt sur les grandes fortunes.
M. Philippe Marini. De tels couples ne constituent certes pas des exemples ! (Sourires.)
Mme Dinah Derycke. On voit ainsi que le souci d'optimisation fiscale peut revêtir les formes les plus diverses.
Cela dit, il est bien évident que nous ne voterons aucun des amendements concernant les dispositions fiscales qui ont été déposés par M. Gélard ou par M. Marini, car ils ne nous semblent vraiment pas avoir leur place dans le cadre de la présente proposition de loi : ils relèvent plutôt d'un DDOF.
M. le président. Les amendements n°s 67 rectifié bis , 68 rectifié et 69 rectifié sont retirés.
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Il est certain que nos amendements n° 46, 47 et 48 n'ont pas lieu d'être maintenus.
Cela dit, je ne suis pas entièrement convaincue. Je persiste à considérer qu'il n'est pas équitable de supprimer des avantages alors que les personnes concernées ne peuvent pas, en contrepartie, en obtenir d'autres avant un certain délai.
S'agissant de l'amendement n° 24, j'ai plaisir à noter que la commission des finances est déterminée, avec les encouragements de la commission des lois, à faire la chasse, partout et en tout lieu, à la fraude fiscale et aux exonérations de toutes sortes. Nous savons vous le rappeler en d'autres circonstances, monsieur Martini.
Par ailleurs, j'ai cru comprendre que, à vous suivre, on devrait supprimer les avantages fiscaux dont bénéficient les couples mariés qui n'ont pas d'enfants puisque, d'après vous, ces avantages fiscaux sont liés à la capacité des couples mariés à se reproduire. Le mariage, cette institution à vos yeux sacrée ne se trouve-t-il pas ainsi soudainement désacralisé ?
J'ajoute que réserver l'imposition commune aux seuls couples mariés revient, dans les faits, à créer une forme d'iniquité fiscale. Pourtant, le fisc ne s'intéresse qu'à la réalité des faits. En l'occurrence, on peut considérer qu'il y a communauté de fait. Aussi, sur le plan fiscal, il me parait injuste de ne pas accorder aux couples non mariés qui ont choisi de vivre ensemble, de partager leurs revenus, les avantages dont bénéficient les couples mariés.
M. le président. Les amendements n°s 46, 47 et 48 sont retirés.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé.

Article additionnel après l'article 2



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 6, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le 2° ter du II de l'article 156 du code général des impôts, il est rétabli un 3° ainsi rédigé : «
« 3e Sommes versées ou avantages en nature consentis à un parent collatéral jusqu'au troisième degré, célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps dont le montant des revenus perçus dans l'année ne dépasse pas le montant cumulé sur les douze mois du revenu minimum d'insertion fixé pour une personne en application de l'article 3 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988. La déduction opérée par le contribuable ne peut excéder par bénéficiaire le montant mentionné à l'article 196 B. ».
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 25, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé : «
« I. - Après le 2° ter du II de l'article 156 du code général des impôts, il est rétabli un 3° ainsi rédigé : «
« 3° Sommes versées ou avantages en nature consentis à un parent collatéral jusqu'au troisième degré, célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps, dont les revenus perçus dans l'année ne dépassent pas un montant égal au cumul sur douze mois du revenu minimum d'insertion fixé pour une personne isolée en application de l'article 3 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988. La déduction opérée par le contribuable ne peut excéder le montant mentionné à l'article 196 B. ».
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6.
M. Patrice Gélard. rapporteur. Je tiens à faire observer à Mme Borvo que le mariage est une institution de la République. Le reste relève de la vie privée. L'un justifie l'autre !
Mme Nicole Borvo. Alors, il ne faut pas défendre le mariage au nom de l'enfant !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Nous ne parlons pas de l'enfant ! Nous avons assisté aujourd'hui à des dérives.
Mme Nicole Borvo. On nous a pourtant dit que les avantages fiscaux étaient liés aux enfants !
M. le président. Madame Borvo, veuillez laisser M. le rapporteur s'exprimer.
M. Patrice Gélard, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 6, je formulerai la même remarque que tout à l'heure. Cet amendement a un objet similaire à celui qui a été adopté par la commission des finances. Aussi, la commission des lois le retire et laisse la place à M. le rapporteur pour avis pour défendre l'amendement n° 25.
M. le président. L'amendement n° 6 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 25.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Il s'agit de permettre aux contribuables de déduire les sommes versées ou les avantages en nature consentis à des collatéraux jusqu'au troisième degré disposant de faibles ressources. Nous nous situons toujours dans la même logique, qui est celle de la solidarité.
Actuellement, aucune déduction n'est possible pour les pensions versées à des collatéraux : frères, soeurs, oncles, tantes, nièces, neveux.
Seule existe une possibilité pour le contribuable de déduire de son revenu global les avantages en nature consentis à des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans vivant sous son toit, dès lors que leur revenu imposable n'excède pas le plafond de ressources fixé pour l'octroi des allocations supplémentaires versées par le Fonds de solidarité vieillesse et par le Fonds spécial invalidité. Le montant déductible est de 17 840 francs.
Il est proposé de créer, sur ce même modèle, à l'article 156 du code général des impôts, un régime favorable pour les collatéraux sans ressources, en permettant au contribuable de déduire une pension alimentaire d'un montant égal à celui qui est fixé à l'article 196 B et qui serait porté à 25 000 francs, sans conditions d'âge ni de domicile.
Pour nous, il s'agit encore d'un élément utile pour encourager des solidarités, et ce sans confusion avec le régime institutionnel du mariage.
Je reviens brièvement sur le propos de Mme Borvo. Sans doute n'a-t-elle pas oublié qu'un article du code civil dispose que les deux époux « pourvoient à l'éducation des enfants et préparent leur avenir ». Tous les maires ici présents le lisent fréquemment devant les mariés, qu'ils soient jeunes ou moins jeunes.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement souhaite le rejet de cet amendement.
D'abord, les sommes versées à une personne dans le besoin ne sont déductibles du revenu global de leur auteur, conformément aux dispositions du 2° du II de l'article 156 du code général des impôts, que parce qu'elles relèvent de l'obligation alimentaire telle qu'elle est définie aux articles 205 à 211 du code civil.
Or, le droit civil n'établit pas d'obligation alimentaire entre frères et soeurs, si bien que, aussi digne d'intérêt que soit la situation des personnes qui consentent une aide alimentaire en dehors de toute obligation légale, il n'est pas possible de consacrer dans le droit fiscal des relations que le droit civil chargé de régir les rapports familiaux ne reconnaît pas lui-même.
C'est d'ailleurs pour ces raisons que j'ai émis des réserves sur les dispositions de l'article 10 de la proposition de loi relative aux fratries. J'ai ainsi suggéré, au nom du Gouvernement, lors de la première lecture à l'Assemblée nationale, qu'un parlementaire, ou un groupe de parlementaires, fasse des propositions concrètes sur ce sujet, qui est digne d'intérêt et qui doit, je crois, être traité dans un autre cadre. Cette proposition, que j'ai faite, bien entendu, avec l'accord de mes collègues des finances, MM. Dominique Strauss-Kahn et Christian Sautter, est raisonnable.
Cela étant, diverses dispositions fiscales répondent déjà dans une large mesure aux attentes qui ont été manifestées. Ainsi, les contribuables peuvent considérer comme étant à leur charge les collatéraux qui vivent sous leur toit et sont titulaires de la carte d'invalidité prévue à l'article 173 du code de la famille et de l'aide sociale. Ils bénéficient alors d'une part entière de quotient familial par personne recueillie. Par ailleurs, ceux qui recueillent des collatéraux non titulaires de cette carte d'invalidité, mais âgés de plus de soixante-quinze ans et dont le revenu imposable n'excède pas le plafond de ressources fixé pour l'octroi de l'allocation supplémentaire prévue par le code de la sécurité sociale, peuvent aussi déduire de leurs revenus, dans la limite d'un plafond qui s'élève, par personne recueillie, à 17 680 francs pour 1998, les avantages en nature qu'ils consentent aux intéressés.
Ces dispositions permettent d'accompagner et d'encourager l'entraide familiale dans les situations de faiblesse les plus caractéristiques que sont l'invalidité, l'âge ou l'absence de ressources suffisantes. Mais, encore une fois, ces dispositions peuvent être améliorées dans un autre cadre et selon la méthode que j'ai rappelée voilà un instant.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 25.
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Certes, vous venez de dire, madame le garde des sceaux, que vous n'aviez pas été favorable à l'article 10 ; mais l'Assemblée nationale s'était tout de même interrogée sur les cas d'entraide familiale.
A partir du moment où on crée ce pacte, les dispositions prévues doivent être étendues. Dans des régions difficiles notamment, nombre de frères et soeurs vivent ensemble quand leurs parents sont décédés. Souvent, il s'agit d'exploitants ou d'anciens exploitants. Des dispositions sont prévues pour les invalides et pour les personnes de plus de soixante-quinze ans, avez-vous dit. Ce que propose la commission des finances, ce n'est pas autre chose, sauf qu'elle ne fixe pas de limite d'âge.
Faut-il vraiment attendre soixante-quinze ans ? Croyez-vous vraiment qu'à cinquante ans, soixante, les gens ne sont pas en détresse et n'ont pas besoin de solidarité ? S'ils ont un frère ou une soeur qui dispose de moyens, ceux-ci ne peuvent-ils les accueillir et bénéficier d'avantages ? Il existe pourtant de nombreuses possibilités, dans le PACS ou dans d'autres dispositifs, de tourner la loi, même s'il n'y a pas communauté de vie réelle.
Il s'agit d'une mesure d'équité. Elle encouragerait les solidarités familiales, si indispensables. Nous éviterions ainsi à des personnes de se retrouver dans la solitude de structures sociales qui ne sont certainement pas le meilleur de notre société.
M. Denis Badré. Très bien !
M. Jean-Pierre Bel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Pour des raisons de fond qui ont déjà été longuement évoquées et qu'il ne me semble pas nécessaire de reprendre à ce point du débat, le groupe socialiste votera contre cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 2.

Article additionnel avant l'article 3



M. le président.
Par amendement n° 26, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, avant l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le début du premier alinéa du 3 de l'article 6 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Toute personne majeure âgée de moins de vingt et un ans, ou de moins de vingt-cinq ans lorsqu'elle poursuit ses études ou est demandeur d'emploi, ainsi que, quel que soit son âge... » ( Le reste sans changement. )
« II. - L'article 196 B du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 196 B. - Le contribuable qui accepte le rattachement des personnes désignées au 3 de l'article 6 bénéficie d'un abattement de 25 000 francs sur son revenu global net par personne ainsi prise en charge. »
« III. - La perte de recettes résultant des dispositions des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. L'ensemble de ces amendements fiscaux résultent, bien entendu, d'un travail en commun entre la commission des lois et la commission des finances.
Le présent article additionnel à un double objet. En premier lieu, il vise à permettre le rattachement au foyer fiscal des enfants de plus de vingt ans et de moins de vingt-cinq ans à la recherche d'un emploi. En second lieu, il s'agit de relever à 25 000 francs l'abattement pour les personnes rattachées en application de l'article 196 B du code général des impôts et d'étendre cet abattement à tous les enfants rattachés de plus de vingt ans et de moins de vingt-cinq ans.
Ainsi, nous souhaitons augmenter l'avantage fiscal consenti à la personne ayant de faibles ressources et qui est rattachée au contribuable, en application de l'article 2 qui a été adopté voilà quelques instants.
Mes chers collègues, la substitution à l'imposition commune des partenaires d'un pacte de solidarité d'un système d'abattement devrait dégager, comme M. Hamel l'a rappelé tout à l'heure, de substantielles économies, qu'il est proposé d'affecter aux besoins des familles.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. La commission des finances propose en ce sens les deux dispositions que j'ai exposées à l'instant et qui répondent aux besoins concrets de toutes les familles, quel que soit leur statut.
Dans le contexte actuel, souvent marqué par les difficultés liées à l'accès au premier emploi, il ne semble pas anormal de traiter fiscalement les jeunes de moins de vingt-cinq ans à la recherche d'un emploi de la même façon que l'on traite les enfants étudiants.
Certes, madame le ministre, vous allez sans doute nous rappeler qu'il est toujours possible de verser une pension alimentaire à un enfant en difficulté. Mais outre que cette possibilité, aux contours mal définis, est source de contestations multiples avec l'administration fiscale, il faut noter que la possibilité de rattachement permet de conserver le bénéfice des demi-parts supplémentaires accordées aux familles nombreuses. C'est donc un dispositif plus simple, moins porteur d'insécurité en termes de vérifications fiscales et plus généreux compte tenu de l'application du quotient familial.
Par ailleurs, il vous est proposé, mes chers collègues, dans le même esprit, d'accroître le montant de l'abattement dont bénéficient actuellement les seuls enfants mariés ou ayant eux-mêmes des enfants, en application de l'article 196 B du code général des impôts, et d'en étendre le bénéfice à tous les enfants à charge de vingt et un à vingt-quatre ans inclus.
La généralisation de l'abattement à tous les enfants de plus de vingt ans et de moins de vingt-cinq ans qui dépendent de leurs parents, qu'ils soient ou non mariés ou qu'ils aient ou non eux-mêmes des enfants, est logique dans le monde actuel où les jeunes ont un grand esprit d'indépendance mais doivent, pendant une longue période, compter sur leurs proches et sur leurs parents pour assurer leur autonomie économique. La situation justifie, nous semble-t-il, que soient séparés l'avantage accordé aux plus de vingt ans et de moins de vingt-cinq ans et celui qui résulte du quotient familial.
La mesure que nous préconisons doit être replacée dans son contexte, à savoir l'aller-retour du Gouvernement sur la mise sous condition de ressources des allocations familiales.
Nous proposons de porter le montant de cet abattement à 25 000 francs, au lieu du plafond de 20 370 francs fixé dans la dernière loi de finances. Un tel relèvement doit être interprété non comme la volonté de revenir sur une décision politique qui a été prise par la majorité de l'Assemblée nationale, mais plutôt, dans le cadre du texte que nous examinons aujourd'hui, comme le témoignage de notre intention de répondre aux besoins des familles et aux divers besoins de solidarité de la société actuelle.
Il est important de souligner qu'il s'agit d'une mesure de politique familiale, qui est susceptible de profiter à tous les foyers imposables, et pas seulement à ceux qui sont touchés par le plafonnement prévu par la dernière loi de finances. Nous avons d'ailleurs fait figurer dans le rapport écrit un tableau montrant les conséquences chiffrées de cette proposition.
M. Robert Bret. Vous êtes hors sujet !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Non, nous ne sommes pas hors sujet ! Nous sommes simplement dans une logique de proposition fondamentalement différente du système contenu dans la proposition de loi sur le PACS, que nous critiquons.
L'amendement n° 26 prévoit un gage, qui est simplement formel et qui reflète une précaution, dans la mesure où les avantages dont il s'agit seront, à notre avis, financés pour une large part, et probablement de façon suffisante, par les économies dégagées précédemment par la suppression de l'imposition commune. J'ai la conviction, mes chers collègues, que l'ensemble des éléments de notre dispositif seraient moins coûteux que le dispositif accepté par le Gouvernement dans le cadre de la proposition de loi sur le PACS.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je tiens à rappeler que, lorsqu'ils sont âgés de plus de vingt et un ans, les enfants majeurs qui ne poursuivent pas d'études sont personnellement imposables à l'impôt sur le revenu. Ils ne peuvent donc pas demander leur rattachement au foyer fiscal de leurs parents.
Cela étant, les parents peuvent toutefois déduire de leur revenu imposable, dès lors qu'ils sont en mesure de les justifier, les dépenses qu'ils supportent à titre de pension alimentaire pour l'entretien de leurs enfants majeurs dans la limite d'un plafond fixé à 20 370 francs pour l'imposition des revenus de 1998. L'obligation alimentaire peut être exécutée en nature ou en espèces.
Au sein de ce plafond, il est toutefois admis, lorsque l'enfant majeur vit durant toute l'année civile sous le toit de ses parents, que les dépenses de nourriture et d'hébergement soient évaluées par référence à l'estimation forfaitaire des avantages en nature retenue en matière de sécurité sociale, soit 17 840 francs pour l'imposition des revenus de 1998. Dans cette situation, seule la fraction de pension alimentaire déductible excédant cette évaluation forfaitaire doit être justifiée.
Enfin, la pension alimentaire n'est imposable entre les mains de l'enfant que dans la limite admise pour sa déduction, ce qui lui permet d'être exonéré d'impôt dès lors qu'il ne dispose par d'autres revenus.
Le droit positif répond ainsi très largement à la préoccupation exprimée par cet amendement qui, au demeurant, je le rappelle, vise une situation totalement étrangère à l'objet de la proposition de loi (M. le rapporteur pour avis sourit) ...
Mme Dinah Derycke. Tout à fait !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. qui - je le répète encore une fois - est neutre à l'égard des enfants.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l'article 3.
Mes chers collègues, il nous reste à examiner trente-six amendements. Je vous invite donc à la concision, si vous souhaitez achever l'examen de ce texte ce soir. Oui ! sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.) Sinon, il nous faudra en renvoyer l'examen à mardi prochain. (Oh non ! sur les mêmes travées.)
M. Claude Estier. Achevons ce soir, monsieur le président !

Article 3



M. le président.
« Art. 3. _ I. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 777 bis ainsi rédigé :
« Art. 777 bis . _ La part nette taxable revenant au partenaire lié au donateur ou au testateur par un pacte civil de solidarité défini à l'article 515-1 du code civil est soumise à un taux de 40 % pour la fraction n'excédant pas 100 000 F et à un taux de 50 % pour le surplus lorsque lesdits partenaires sont, à la date du fait générateur des droits, liés depuis au moins deux ans par un pacte civil de solidarité.
« Toutefois, la condition de durée imposée aux partenaires d'un pacte civil de solidarité ne s'applique pas au legs consenti par un testateur reconnu atteint d'une affection de longue durée au sens des 3° et 4° de l'article L. 322-3 du code de la sécurité sociale. »
« II. _ A l'article 780 du code général des impôts, les mots : "articles 777" sont remplacés par les mots : "articles 777, 777 bis, ". »
« III. _ L'article 779 du code général des impôts est complété par un III ainsi rédigé :
« III. _ Pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il est effectué un abattement de 300 000 francs sur la part du partenaire lié au donateur ou au testateur par un pacte civil de solidarité défini à l'article 515-1 du code civil lorsque lesdits partenaires sont, à la date du fait générateur des droits, liés depuis au moins deux ans par un pacte civil de solidarité. Pour les mutations à titre gratuit entre vifs consenties par actes passés à compter du 1er janvier 2000 et pour les successions ouvertes à compter de cette date, le montant de l'abattement est de 375 000 F.
« Toutefois, la condition de durée imposée aux partenaires d'un pacte civil de solidarité ne s'applique pas au legs consenti par un testateur reconnu atteint d'une affection de longue durée au sens des 3° et 4° de l'article L. 322-3 du code de la sécurité sociale. »
« IV. _ Les pertes de recettes résultant des I et III du présent article sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Sur cet article, je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 7, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de rédiger ainsi cet article :
« I. - Avant l'article 788, il est inséré dans le code général des impôts un article 787 A bis ainsi rédigé :
« Art. 787 A bis. - Pour la perception des droits de mutation par décès, il est effectué un abattement de 300 000 francs sur la part revenant à un légataire désigné par le testateur. Cet abattement ne peut bénéficier qu'à un seul légataire. Il n'est cumulable avec aucun autre abattement. »
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 27, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de rédiger ainsi l'article 3 :
« I. - Avant l'article 788, il est inséré dans le code général des impôts un article 787 A bis ainsi rédigé :
« Art. 787 A bis. - Pour la perception des droits de mutation par décès, il est effectué un abattement de 250 000 francs sur la part revenant à un légataire, personne physique, désigné par le testateur, lorsque ce légataire ne bénéficie pas d'un abattement en application de l'article 779-I. Cet abattement ne peut bénéficier qu'à un seul légataire. Il n'est cumulable, pour le bénéficiaire du legs, avec aucun autre abattement. »
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 70 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
A. - I. - De rédiger comme suit le texte présenté par le I de l'article 3 pour l'article 777 bis du code général des impôts :
« Art. 777 bis. - La part nette taxable revenant au partenaire lié au donateur ou au testateur par un pacte civil de solidarité défini à l'article 515-1 du code civil est soumise à un taux de 20 % pour la fraction n'excédant pas 100 000 francs et à un taux de 40 % pour le surplus. »
II. - De rédiger comme suit le texte présenté par le III de l'article 3 pour l'article 779 du code général des impôts :
« III. - Pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il est effectué un abattement de 250 000 francs sur la part du partenaire lié au donateur ou au testateur par un pacte de solidarité défini à l'article 515-1 du code civil. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter l'article 3 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de l'abaissement du taux d'imposition de l'actif successoral des partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 71 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
A. - I. - De rédiger comme suit le texte présenté par le I de l'article 3 pour l'article 777 bis du code général des impôts :
« Art. 777 bis. - La part nette taxable revenant au partenaire lié au donateur ou au testateur par un pacte civil de solidarité défini à l'article 515-1 du code civil est soumise à un taux de 20 % pour la fraction n'excédant pas 100 000 francs et à un taux de 40 % pour le surplus lorsque lesdits partenaires sont, à la date du fait générateur des droits, liés depuis au moins deux ans par un pacte civil de solidarité.
« Toutefois, la condition de durée imposée aux partenaires d'un pacte civil de solidarité ne s'applique pas en matière de succession.
« Cette condition ne s'applique pas également, en matière de succession comme de donation, aux partenaires qui peuvent justifier par tout moyen de l'antériorité de leur vie commune de plus de deux ans avant la conclusion du pacte civil de solidarité. »
II. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par le III de l'article 3 pour le III de l'article 779 du code général des impôts, de remplacer la somme : 300 000 francs par la somme : 250 000 francs.
III. - De supprimer la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par le III de l'article 3 pour le III de l'article 779 du code général des impôts.
IV. - De remplacer le second alinéa du texte présenté par le III de l'article 3 pour le III de l'article 779 du code général des impôts par deux alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, la condition de durée imposée aux partenaires d'un pacte civil de solidarité ne s'applique pas en matière de succession.
« Cette condition ne s'applique pas également, en matière de succession comme de donation, aux partenaires qui peuvent justifier par tout moyen de l'antériorité de leur vie commune de plus de deux ans avant la conclusion du pacte civil de solidarité. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter l'article 3 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« Les pertes de recettes résultant de l'accroissement des abattements sur l'actif successoral des partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 49, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent :
A. - I. - Après les mots : « le surplus », de supprimer la fin du premier alinéa du texte présenté par le paragraphe I de l'article 3 pour l'article 777 bis du code général des impôts.
II. - De supprimer le texte présenté par l'article 3 pour le second alinéa de l'article 777 bis du code général des impôts.
III. - Après les mots : « code civil », de supprimer la fin de la première phrase du premier alinéa du texte présenté par le paragraphe III de l'article 3 pour le paragraphe III de l'article 779 du code général des impôts.
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter l'article 3 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« .... - Les pertes de recettes résultant de l'assouplissement du régime des droits de succession des partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 50, MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent :
A. - Dans le texte présenté par le paragraphe III de l'article 3 pour le paragraphe III de l'article 779 du code général des impôts, de remplacer la somme : « 300 000 francs » par la somme : « 330 000 francs ».
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter l'article 3 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« .... - Les pertes de recettes résultant de l'accroissement de l'abattement sur l'actif successoral des partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 74 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
A. - De rédiger comme suit le second alinéa du texte présenté par le paragraphe III de l'article 3 pour compléter l'article 779 du code général des impôts :
« Toutefois, cette condition de durée ne s'applique pas aux partenaires , qui peuvent prouver par tout moyen l'antériorité de plus de deux ans de leur vie commune. »
B. - De compléter l'article 3 par un paragraphe ainsi rédigé :
« .... - Les pertes de recettes résultant de la suppression du délai pour bénéficier du taux préférentiel des droits sur les successions et donations sont compensées à due concurrence par la majoration du tarif prévu aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 7.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je retire cet amendement au profit de l'amendement n° 27 de la commission des finances, qui, naturellement, recueille l'avis favorable de la commission des lois.
M. le président. L'amendement n° 7 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 27.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Les dispositions fiscales que nous évoquons dans le cadre de ce texte sont de deux natures : les unes concernent l'impôt sur le revenu et les autres, les impôts sur les droits de mutation à titre gratuit. Sur le plan fiscal, les problèmes posés à des personnes qui cohabitent ressortent de deux catégories d'impôts : l'impôt sur le revenu, d'une part, les droits de mutation à titre gratuit, c'est-à-dire l'impôt sur le patrimoine, d'autre part. Nous estimons, en étroit accord avec la commission des lois et reprenant d'ailleurs une idée qui avait été initialement émise par notre collègue Patrice Gélard, qu'il faut réexaminer le régime de nos droits de succession et que ceux-ci, s'ils font, comme il est normal, une part importante aux liens de famille, directs ou indirects, rendent aujourd'hui complètement dissuasives les conditions de cession d'un élément de patrimoine à une personne qui ne serait pas directement liée à celui qui teste.
Nous inscrivant dans une autre logique, nous préférons donc substituer à la disposition prévue par la proposition de loi, qui institue en faveur d'un signataire d'un pacte civil de solidarité un régime de droits de mutation spécifique comportant un allégement du barème en matière de mutations et un abattement élevé, un autre dispositif d'application générale, à savoir la possibilité pour une personne, quelle qu'elle soit, de désigner un légataire, et un seul, susceptible de bénéficier d'un abattement de 250 000 francs. C'est ce que l'on a appelé le « legs électif universel », et qui, dans une première version, était dénommé « legs affectif universel », l'idée étant bien la même.
Dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, l'article 3 tend à créer, je le rappelle, un régime particulier de droits de mutation à titre gratuit applicable aux transmissions de patrimoine entre partenaires liés par un pacte civil de solidarité.
La commission des finances a considéré, à la suite de la commission des lois, qu'il n'y a pas lieu de créer un régime spécifique, et, en particulier, de toucher aux règles actuelles lorsqu'il s'agit de mutations entre vifs.
A défaut d'une réforme d'ensemble qui simplifierait les régimes et allégerait les barèmes, elle a estimé que ce texte pouvait être l'occasion de faire, dans notre législation successorale, une place aux affinités choisies indépendamment des liens du sang ou des alliances.
Il est donc proposé, sans toucher au barème, de créer un abattement particulier dans la limite duquel il sera possible de faire à une personne de son choix un legs en franchise d'impôt.
M. Guy Allouche. Abrégez votre propos, monsieur le rapporteur pour avis !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Nous suggérons que cet abattement soit fixé à 250 000 francs, monsieur Allouche, ce qui n'est pas négligeable, en particulier pour les personnes qui cohabitent.
M. Guy Allouche. Soyez concis !
M. Robert Bret. L'heure tourne !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. J'ai cru comprendre, monsieur Allouche, que l'on s'interrogeait ici sur les problèmes patrimoniaux de personnes qui cohabitent et que l'on recherchait des solutions pour leur permettre de mieux conjuguer leurs étroites solidarités !
M. Guy Allouche. Ce que vous faites ici, l'Assemblée nationale le refusera !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je crois que la proposition ici faite va vraiment dans le sens de vos préoccupations. C'est pour cette raison que je m'efforçais de la développer de manière aussi claire que possible.
M. Guy Allouche. Il faut être concis !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je conclus en disant, pour répondre à votre légitime curiosité (Sourires), que ce montant de 250 000 francs a été ainsi déterminé pour des raisons précises. D'ailleurs, vous vous interrogez sans doute sur les raisons pour lesquelles nous proposons ce montant de 250 000 francs.
Mme Dinah Derycke. Pas du tout !
M. Guy Allouche. Non, nous ne nous interrogeons pas !
Mme Dinah Derycke. D'autant que nous connaissons la réponse !
M. Guy Allouche. Il y a des questions que l'on préfère ne pas poser !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. En premier lieu, il a semblé à la commission qu'il était cohérent que le montant de l'abattement relatif à ce legs électif soit, pour des raisons de principe, inférieur à celui qui est accordé aux enfants. Vous m'entendez souvent parler des enfants, et vous seriez donc surpris que je n'y fasse pas référence.
Or, l'abattement pour enfant étant de 300 000 francs, il faut donc se situer - cela semble logique - un peu en dessous, c'est-à-dire à 250 000 francs.
M. Guy Allouche. Cela relève de la loi de finances !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. En second lieu, il a paru souhaitable d'en revenir au montant de 250 000 francs qui figurait dans le texte de la proposition, mais en étendant sensiblement le nombre des bénéficiaires.
Il faut admettre effectivement que cette disposition, si elle était appliquée, permettrait de favoriser d'autres personnes que les cohabitants : ce pourrait être des petits-enfants, de colatéraux, des personnes sans lien de parenté.
Tout cela nous semble donc aller dans le sens de la politique d'incitation à la solidarité, qui est l'inspiration de nos propositions fiscales.
M. le président. La parole est à Mme Derycke, pour présenter les amendements n°s 70 rectifié, 71 rectifié et 74 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Je présenterai ces trois amendements ensemble, monsieur le président, mais je serai beaucoup plus brève que M. le rapporteur pour avis dans la mesure où ces amendements avaient effectivement trait, eux, au texte dont nous devions discuter et que la majorité sénatoriale a refusé.
Ces amendements étaient notamment relatifs aux délais. Le débat a eu lieu précédemment sur l'imposition sur le revenu.
Madame la ministre va certainement me demander de retirer ces amendements, et j'indique d'ores et déjà que j'accepterai alors de le faire, sachant qu'ils seront versés pour contribution à la suite du débat. ( Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Bret, pour défendre les amendements n°s 49 et 50.
M. Robert Bret. L'amendement n° 49 porte sur la question tout à fait essentielle des règles appliquées en matière de succession et de donation pour les participants à un pacte civil de solidarité.
Il s'agit ici, pour nous, de ne pas affecter ces opérations de conditions discriminatoires d'application, en supprimant, en particulier, les conditions de déroulement et d'ancienneté que le texte actuel de la proposition de loi retient.
Nous souhaitons, par cet amendement, procéder à la suppression de l'ensemble des dispositions de cette nature inscrites actuellement dans le texte.
Cet amendement vise, dans le texte proposé par l'article 3 pour le paragraphe I de l'article 777 bis du code général des impôts, à modifier le premier alinéa et à supprimer les dispositions du second alinéa, le cas que recouvre ce dernier étant couvert par la banalisation du statut des partenaires d'un pacte civil de solidarité.
La même démarche vaut évidemment pour le paragraphe III de l'article 779 du même code général des impôts, relatif aux abattements appliqués en matière de mutation à titre gratuit.
Avec l'amendement n° 50, nous proposons que les règles appliquées au partenaire d'un pacte civil de solidarité survivant à l'issue d'une mutation à titre gratuit soient identiques à celles qui sont appliquées aux couples mariés.
Nous ne suggérons pas cela dans la perspective de faire du PACS une forme de mariage bis, mais pour que soit pris en compte le fait qu'un pacte civil de solidarité est bel et bien un engagement clair et conscient de deux parties dont la finalité est pour le moins aussi estimable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 27, 70 rectifié, 71 rectifié, 49, 50 et 74 rectifié ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Sur l'amendement n° 27, le Gouvernement émet un avis défavorable, pour des raisons à la fois juridiques et techniques.
Juridiquement et fiscalement, notamment pour l'application des droits de mutation par décès, la loi ne distingue pas selon que l'héritier vient à la succession en vertu de la dévolution légale ou bien d'un testament. Les droits applicables sont uniquement fixés en fonction du lien de parenté existant entre le défunt et le bénéficiaire.
Un tel dispositif pourrait par ailleurs, dans certains cas, aboutir à des situations moins favorables que celles qui existent actuellement.
En outre, techniquement, la question se pose de savoir quel légataire bénéficiera de cet abattement en cas de pluralité de légataires désignés dans le testament. Or rien ne permet d'obliger un testateur à désigner un seul légataire dans son testament.
De plus, cette mesure conduirait directement à substituer à l'abattement de 10 000 francs actuellement applicable entre personnes non parentes un abattement de 300 000 francs si ces mêmes personnes sont instituées légataires, ce qui aurait un coût budgétaire élevé.
J'en viens aux amendements n°s 70 rectifié, 71 rectifié et 74 rectifié.
Madame Derycke, soyez certaine que, lorsque nous examinerons, comme je l'ai proposé, d'autres questions, nous tiendrons naturellement compte des propositions que vous avez formulées ici.
S'agissant de l'amendement n° 49, il me paraît légitime de supprimer tout délai tenant à la durée du PACS en cas de décès puisque ce dernier constitue, par définition, un événement fortuit. Mais la même suppression ne me semble pas souhaitable pour les donations car, contrairement aux dispositions testamentaires, la donation au partenaire emportera dessaisissement immédiat et irrévocable du donateur. Il s'agit d'un acte grave qui ne peut être encouragé par le biais d'un avantage fiscal que si l'union présente une certaine durée et une certaine stabilité.
Enfin, l'amendement n° 50 tend à porter l'abattement applicable sur la part du partenaire lié au donateur ou au testataire depuis au moins deux ans à 330 000 francs. Or le PACS n'a pas pour objet de concurrencer le mariage, puisqu'il réalise un alignement sur le régime des époux.
M. Jean-Jacques Hyest. Absolument !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Aucun rapport ne doit être donc établi entre l'abattement applicable au partenaire d'un PACS et celui qui est applicable au conjoint survivant.
J'ajoute que le relèvement de l'abattement pour le conjoint survivant était justifié par le fait que celui-ci n'avait pas été revalorisé depuis de nombreuses années.
Il ne peut être envisagé par ailleurs d'accorder au partenaire un abattement dont le montant serait égal ou supérieur à celui dont bénéficient les ascendants ou les descendants en ligne directe, car on toucherait ainsi aux principes fondamentaux du droit de la famille, ce qui n'est, je crois, ni votre intention ni celle du Gouvernement.
Par conséquent, j'émets un avis défavorable sur cet amendement n° 50.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 est ainsi rédigé et les amendements n°s 70 rectifié, 71 rectifié, 49, 50 et 74 rectifié n'ont plus d'objet.

Articles additionnels après l'article 3



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 8, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le paragraphe I de l'article 788 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« I. - Pour la perception des droits de mutation par décès, il est effectué un abattement de 150 000 F sur la part de chaque frère ou soeur constamment domicilié avec le défunt pendant l'année précédant le décès.
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. » Par amendement n° 28, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le paragraphe I de l'article 788 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« I. - Pour la perception des droits de mutation par décès, il est effectué un abattement de 150 000 F sur la part de chaque frère ou soeur, célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps, constamment domicilié avec le défunt pendant l'année précédant le décès. La preuve de la cohabitation est apportée dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat.
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 8.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Comme lors de l'examen des amendements précédents, la commission des lois retire cet amendement au profit de celui de la commission des finances.
M. le président. L'amendement n° 8 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 28.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Cet article additionnel a pour objet, par cohérence avec le dispositif que nous venons d'adopter à l'article 3, d'améliorer le régime successorial dont bénéficient les frères et soeurs isolés, domiciliés avec le défunt, en portant à 150 000 francs l'abattement dont ils bénéficient et en assouplissant les conditions d'octroi de cet abattement, qui ne suppose plus qu'une seule année de cohabitation avant le décès.
Comme vous le savez, mes chers collègues, les frères et soeurs bénéficient, en application de l'article 788 du code général des impôts, d'un abattement spécial de 100 000 francs dès lors qu'ils sont célibataires, veufs, divorcés ou séparés de corps et à la double condition qu'ils soient, au moment de l'ouverture de la succession, âgés de plus de cinquante ans ou atteints d'une infirmité les mettant dans l'impossibilité de subvenir à leurs besoins, et constamment domiciliés avec le défunt pendant les cinq années précédant le décès.
A partir du moment où nous avons créé, par notre précédent vote, un régime de faveur pour une personne sans lien de parenté, il serait peu cohérent de conserver un régime aussi restrictif pour les frères et soeurs isolés domiciliés avec le défunt. Nous avons d'ailleurs constaté, madame le ministre, qu'à l'Assemblée nationale de longs débats ont eu lieu sur la question de la solidarité au sein des fratries. Il est proposé, par cet amendement, de relever à 150 000 francs le montant de l'abattement. Je souligne au passage que le montant de cet abattement n'a pas été modifié depuis 1984.
Nous suggérons aussi d'assouplir les conditions d'accès à cet abattement en ne conservant qu'une exigence de domiciliation commune pendant l'année précédant le décès.
Tout ce dispositif reflète la logique différente qui est la nôtre, je le répète, en ce qui concerne les incitations fiscales vis-à-vis de toutes sortes de formes de solidarité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je serai concise : la proposition de relever l'abattement qui existe aujourd'hui de 100 000 francs à 150 000 francs et d'assouplir ses conditions d'application en ne conservant qu'une exigence de domiciliation commune pendant l'année précédant le décès et en éliminant les autres conditions qui tiennent aujourd'hui à la situation de famille, à l'âge et à l'état physique du frère ou de la soeur héritier ne peut être acceptée par le Gouvernement.
L'institution de cet abattement spécial visait essentiellement à alléger le montant des droits de mutation par décès qui seraient exigibles de la part d'héritiers sans foyer vivant sous le même toit que le défunt.
La suppression de la condition tenant à la situation personnelle des intéressés dépasserait donc le but recherché par l'institution de cet abattement. Une telle proposition ne peut être retenue.
En tout état de cause, puisqu'il s'agit de favoriser les fratries, nous pourrons tenir compte de cette propostion dans un autre débat que celui qui a trait au PACS.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 3.

Article 4



M. le président.
« Art. 4. _ I. _ Après le quatrième alinéa de l'article 885 A du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité défini par l'article 515-1 du code civil font l'objet d'une imposition commune. »
« II. _ Au II de l'article 885 W du code général des impôts, après les mots : "Les époux", sont insérés les mots : "et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité défini par l'article 515-1 du code civil".
« III. _ A l'article 1723 ter -00 B du code général des impôts, après les mots : "Les époux", sont insérés les mots : "et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité défini par l'article 515-1 du code civil". »
Par amendement n° 9, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination : le PACS n'existant plus, il faut supprimer cet article 4.
Je rappelle d'ailleurs que les concubins font actuellement l'objet d'une imposition commune sur ce point.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est supprimé.

Articles additionnels après l'article 4



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 10, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La fin du second alinéa de l'article 754 A du code général des impôts est ainsi rédigée :
« ... acquéreurs pour la part de sa valeur inférieure à 1 million de francs. »
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 29, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La fin du second alinéa de l'article 754 A du code général des impôts est ainsi rédigée :
« ... acquéreurs pour la part de sa valeur inférieure à 750 000 francs. »
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 10.
M. Patrice Gélard, rapporteur. La commission retire cet amendement pour se rallier à celui de la commission des finances.
M. le président. L'amendement n° 10 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 29.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Cet article additionnel a pour objet d'aménager le régime des contrats d'acquisition en commun avec clause dite usuellement « tontine » pour rendre possible la transmission de la résidence principale sans application, à concurrence de 750 000 francs, du tarif des droits de mutation à titre gratuit.
Madame la ministre, les contrats d'acquisition en commun familièrement qualifiés de tontines sont régis par l'article 754 A du code général des impôts. C'est une vieille disposition de droit civil qui prévoit que les biens concernés sont, du point de vue fiscal, réputés transmis à titre gratuit, et donc soumis, à défaut de liens de parenté, au taux le plus élévé - 60 % - et à l'abaissement le plus faible - 10 000 francs.
Mais le deuxième alinéa de cet article dispose que, lorsque les immeubles ont une valeur inférieure à 500 000 francs au moment du premier décès et lorsqu'ils sont affectés - et dans cette hypothèse seulement - à l'habitation principale commune à deux acquéreurs, la part transmise au survivant est passible non pas des droits de mutation à titre gratuit, mais des seuls droits de vente d'immeuble.
Nous observons donc qu'à l'intérieur d'un plafond de 500 000 francs le régime fiscal de transmission du patrimoine est extrêmement avantageux.
La commission des lois et la commission des finances se sont souvenues de l'existence de cette disposition traditionnelle du droit civil et ont voulu l'adapter, précisément pour tenir compte des besoins qui peuvent être exprimés par des cohabitants. Nous pensions là tout particulièrement à des couples vivant en concubinage, qu'il s'agisse de concubinage de nature hétérosexuelle ou homosexuelle.
La sécurité du patrimoine est un sujet qui est souvent évoqué et je crois que nous faisons ici la démonstration que, en utilisant un instrument de droit commun qui est neutre et qui ne conduit pas à porter de jugement sur la forme de vie des uns et des autres, il est possible de trouver des éléments de solution à certains problèmes justifiés qui peuvent être invoqués.
Mieux vaut, nous semble-t-il, rechercher des solutions de ce genre plutôt que fabriquer des dispositifs aussi étranges et aussi contestables, de notre point de vue, que le pacte civil de solidarité.
Mais il restait une modification à opérer, car il éclate aux yeux que le seuil de 500 000 francs n'est plus en rapport avec les réalités du marché immobilier, notamment en région parisienne. Au demeurant, ce montant n'a pas été relevé depuis 1980.
Considérant que ce système, malgré sa rigidité, représente un bon moyen pour deux personnes vivant sous le même toit d'assurer leur sécurité immobilière réciproque, la commission des finances a proposé - en étroit accord avec la commission des lois - de transformer le seuil en franchise. Ce régime pourrait alors fonctionner pour des biens d'une valeur plus élevée.
Par ailleurs, compte tenu de cette modification et de l'évolution des prix sur les marchés immobiliers, notamment sur le marché parisien, il nous semble que le seuil de cette franchise doit être porté de 500 000 francs à 750 000 francs.
Il est difficile d'évaluer le coût de cette mesure car, compte tenu du faible niveau du plafond, le nombre de tontines est probablement en très fort déclin. Cependant, avec un dispositif comme celui que nous proposons et avec une franchise de 750 000 francs, nous n'avons aucune raison de penser que la pratique ne répondrait pas à de nombreux besoins et ne serait pas reprise par un nombre non négligeable de cohabitants.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des finances et la commission des lois ont formulé cette proposition.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, monsieur le président.
L'institution d'un plafond de 500 000 francs avait été rendue nécessaire par le développement, à l'époque, du recours à ce type de stipulations qui favorisaient une évasion fiscale. Compte tenu des raisons qui ont motivé l'adoption de cette mesure et qui restent valables aujourd'hui, le Gouvernement n'est pas favorable au relèvement de la valeur de 500 000 francs ni à l'institution d'une franchise pour l'application des droits de mutation à titre onéreux.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Je voudrais simplement m'étonner de cette réponse compte tenu de l'impact fiscal et du coût de l'imposition commune - nous en avons fait la démonstration - qui serait accordée aux partenaires du PACS.
Rejeter notre proposition d'un revers de la main en arguant du fait que le système de la tontine serait un avantage excessif, je crois que c'est franchement abusif ! Cette proposition mérite mieux que ce revers de main quelque peu dédaigneux - pardonnez-moi, madame le ministre - d'autant qu'il s'agit d'un seuil qui date de 1980 et qui avait été fixé à la veille d'une période de très forte inflation. Or nous sommes presque en l'an 2000, vingt ans après !
De plus, cette disposition me paraît tout à fait cohérente avec l'objectif que vous visez et que visent même très vraisemblablement les auteurs de la proposition de loi à l'Assemblée nationale : il s'agit d'assurer la sécurité juridique des personnes qui cohabitent dans une résidence principale.
Ce contrat est parfaitement bien encadré, nous proposons simplement de le remettre un peu au goût du jour.
Je regrette donc - pardonnez-moi de vous le dire - que, parce que cette proposition est présentée par nos commissions, elle ne mérite que la réponse que vous avez bien voulu nous faire.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 4.
Par amendement n° 30, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement dépose chaque année, en annexe de la loi de finances, un rapport sur l'application de la présente loi.
« Ce rapport indique, notamment, le coût et le nombre de bénéficiaires des mesures fiscales, ainsi que, en matière d'impôt sur le revenu, la répartition des avantages qui en résultent, par niveaux de revenus.
« Le présent article entre en vigueur à compter de la loi de finances pour 2002. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Mes chers collègues, il s'agit du dernier amendement de cette série fiscale.
Cet amendement n° 30 reflète le souci que nous avons des finances publiques : nous voudrions, par cet article additionnel, que le Parlement soit informé sur l'application des dispositions prévues par le présent texte, et qu'il soit notamment éclairé a posteriori sur le coût et sur la répartition par bénéficiaire des avantages fiscaux procurés par le PACS.
Mes chers collègues, aussi étonnant que cela puisse paraître, on pourrait chercher en vain dans les débats de l'Assemblée nationale une estimation, engageant le Gouvernement, du coût du pacte civil de solidarité.
Et depuis hier matin, madame le ministre, je n'ai pas entendu plus d'informations de votre part sur le coût de ce dispositif, qui, selon certains chiffres qui ont circulé, se situerait quelque part entre 5 milliards et 8 milliards de francs par an !
Mais encore faut-il envisager des hypothèses, et pour cela bénéficier d'une attitude coopérative de la part des services du ministère de l'économie, des finances et du budget !
Or, je le dis avec une certaine solennité, car nous sommes ici vraiment au coeur de nos compétences, en dépit des questions qu'elle a adressées par écrit pour obtenir un certain nombre d'estimations sur le nombre de personnes susceptibles de se « pacser », sur les coûts induits pour les finances publiques, la commission des finances du Sénat - je le dis avec regret - n'a pas été éclairée comme elle aurait dû l'être.
M. Claude Estier. Quel est le coût de vos propositions ?
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Moindre que celui du texte venant de l'Assemblée nationale !
M. Robert Bret. Mais encore ?
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. D'ailleurs, mes chers collègues, vous savez fort bien, étant accoutumés aux travaux parlementaires, que nous n'avons pas les moyens, sans la coopération active des services du Gouvernement, de chiffrer nous-mêmes toute la batterie d'hypothèses qui peuvent être sous-tendues par nos amendements. Seul le service de la législation fiscale dispose des moyens techniques pour le faire.
Nous avons donc questionné le Gouvernement, je l'ai dit. Si j'ose m'exprimer ainsi, nous n'avons pas été payés de retour, et je le regrette.
Cela étant, en termes de recevabilité financière, la base de référence est non pas la législation préexistante mais le texte voté à l'Assemblée nationale, et nous savons bien que le dispositif que préconise la commission des finances du Sénat est moins coûteux que celui qu'a retenu l'Assemblée nationale, et ce pour une raison simple : le texte voté à l'Assemblée nationale prévoit l'imposition commune pour les personnes « pacsées », dans les mêmes conditions que pour le mariage, alors que nous nous sommes limités à un système d'abattement, évidemment beaucoup moins coûteux.
M. Claude Estier. Oui, mais vous le faites pour tout le monde !
Mme Dinah Derycke. Eh oui ! les avantages sont accordés à tout le monde !
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Voilà ce qui nous permet de formuler nos propositions.
Mes chers collègues, il n'est pas normal que le Parlement soit amené à légiférer en matière financière sur fond de rumeurs - 5 milliards de francs, 6 milliards de francs, 8 milliards de francs... - qu'il n'ait pas d'éléments tangibles à se mettre sous la dent.
Nous avons le droit de disposer d'une étude d'impact qui, à défaut de prévisions précises - nous comprenons bien que, s'agissant de matières touchant à la vie privée, on ne puisse avoir de certitudes - nous permettrait d'établir des hypothèses et d'envisager des fourchettes de coûts.
N'ayant pas été en mesure d'obtenir ces chiffrages ex ante, il est d'autant plus indispensable que le Parlement organise son information ex post, et c'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, au travers de cet amendement, nous demandons au Gouvernement, avec beaucoup d'insistance, la fourniture d'un bilan détaillé et exhaustif du coût des différentes mesures prévues par la présente proposition de loi.
Nous avons prévu que ce rapport figure en annexe à la loi de finances.
Par ailleurs, compte tenu du temps nécessaire pour que le dispositif se mette en place, ce rapport ne serait exigé qu'à compter de la loi de finances pour 2002. On aurait donc tout le temps nécessaire pour préparer une méthodologie. Il convient de prendre date dès maintenant, pour que le système de collecte de renseignements se mette en place dans les conditions les plus opportunes.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Monsieur Marini, je dirai d'abord qu'il est paradoxal de demander un rapport sur le PACS alors que vous venez de supprimer ce dernier !
Mme Dinah Derycke et M. Claude Estier. Très bien !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je ferai ensuite remarquer que l'objectif du dispositif fiscal sur le pacte civil de solidarité est d'assurer une parfaite neutralité entre les contribuables qui vivent en couple et assument les mêmes charges de famille.
En conséquence, rien ne justifie de distinguer, parmi ces personnes, celles qui ont choisi de construire leur union sur la base d'un pacte civil de solidarité. C'est pourtant bien ce sur quoi déboucherait la proposition que vous formulez. Le rapport que vous souhaitez reviendrait à montrer du doigt une catégorie de citoyens, en laissant d'ailleurs soupçonner à l'opinion publique qu'elle coûte cher aux finances publiques, alors que le pacte civil de solidarité conduit, au contraire, à réparer une injustice.
Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
J'ajoute que, si cet amendement est adopté, il risque bien d'être le seul dans ce cas sur la proposition de loi, ce qui ruinerait votre théorie selon laquelle la proposition de loi est inamendable. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Guy Allouche. Voilà M. Marini renvoyé dans les cordes. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 4.
M. Claude Estier. Vous avez amendé le PACS !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Mes chers collègues, après un très long débat, nous voici arrivés à l'heure à laquelle il avait été décidé par la conférence des présidents que nous interrompions nos travaux.
En cet instant, il reste plus de vingt amendements à examiner. Par ailleurs, un débat de la qualité de celui que nous avons eu mérite d'être clos par des explications de vote réfléchies et approfondies, qui ne sauraient donc être bâclées, si tant est que l'un quelconque d'entre nous ait l'intention de bâcler son explication de vote, ce que, bien évidemment, je n'ai jamais imaginé.
Voilà pourquoi il serait sage, monsieur le président, de lever maintenant la séance, afin qu'à la reprise de cette discussion, au moment qui sera fixé, nous puissions, après avoir examiné les amendements restant en discussion, entendre des explications de vote qui seraient à la hauteur du débat de qualité que nous avons eu.
Je ne doute pas un instant que ceux qui interviendraient maintenant le feraient avec toute la compétence nécessaire. Il ne m'apparaît toutefois pas opportun que le débat se termine dans de telles conditions.
M. Emmanuel Hamel. De grandes voix manqueraient !
M. Claude Estier. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. Le groupe socialiste souhaite que nous en terminions ce soir, comme on s'y était engagé en conférence des présidents.
En conférence des présidents, M. le ministre chargé des relations avec le Parlement avait demandé s'il fallait prévoir une séance de nuit pour achever l'examen du texte. M. le président Larché lui-même avait alors pris l'engagement qu'on terminerait avant le repas.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Ce n'est pas ma faute si tel n'est pas le cas !
M. Claude Estier. Il reste une vingtaine d'amendements à examiner. Nous pourrions très bien prolonger nos débats jusqu'à vingt heures trente, par exemple, comme cela arrive parfois.
A défaut, vous le savez bien, il sera difficile de poursuivre l'examen de ce texte la semaine prochaine puisque, dès mardi matin, doit commencer le débat sur la loi relative à l'aménagement du territoire.
M. Emmanuel Hamel. On repoussera l'aménagement du territoire !
M. Robert Bret. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Le groupe communiste républicain et citoyen souhaite également que le débat se poursuive jusqu'à son terme.
Non seulement vous avez fait le choix de ne pas discuter du PACS, mais de plus, maintenant, vous jouez la montre, comme M. Marini, depuis un certain temps. (M. Philippe Marini proteste.)
M. Henri de Raincourt. C'est désobligeant !
M. Robert Bret. Le Sénat ne sortirait pas grandi d'une telle manoeuvre.
Si vous voulez retarder la navette avec l'Assemblée nationale, dites-le carrément, au lieu de vous retrancher derrière des arguties !
M. Emmanuel Hamel. La fatigue du personnel, ce n'est pas une argutie !
M. le président. Personne ne veut retarder quoi que ce soit. Tout le monde peut s'exprimer.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je souhaite que l'examen de ce texte puisse s'achever ce soir. Pour cela, je suis prête soit à poursuivre jusqu'à ce que nous en ayons terminé, soit, s'il y a une interruption, à revenir en séance de nuit.
M. le président. Madame le garde des sceaux, nous n'avons pas prévu de séance de nuit.
En revanche, nous pouvons essayer d'aller au moins jusqu'à vingt heures trente. Peut-être aurons-nous terminé à ce moment-là.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Pas les explications de vote !
M. le président. Soit, monsieur Larché, s'il y avait un peu plus de monde...
M. Jean-Luc Mélenchon. Très bien !
M. Jacques Larché président de la commission des lois. Encore une fois, ce n'est pas ma faute, monsieur le président !
M. le président. Pour l'instant, nous continuons.
Nous allons donc aborder l'examen de l'article 4 bis .
M. Emmanuel Hamel. Gare aux infarctus ! (Rires.)
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Je demande quon en décide par un vote, monsieur le président.
M. le président. J'insiste pour que nous continuions. Monsieur Larché, la seule chose que la conférence des présidents a indiquée, c'est qu'il n'y aurait pas de séance de nuit, et parfois, nous poursuivons nos travaux jusqu'à vingt heures.
M. Claude Estier et Mme Dinah Derycke. Absolument !
M. le président. Vous avez demandé un vote, monsieur Larché. Je vais donc y procéder.
Je consulte le Sénat sur la proposition de poursuivre jusqu'à vingt heures ?...
Il en est ainsi décidé.
Si chacun est un peu plus concis dans ses interventions, nous pourrons presque en terminer.

Article 4 bis



M. le président.
« Art. 4 bis. _ Le premier alinéa de l'article L. 161-14 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en est de même de la personne liée à un assuré social par un pacte civil de solidarité lorsqu'elle ne peut bénéficier de la qualité d'assuré social à un autre titre. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 11, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 75 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
A. - De compléter l'article 4 bis par un paragraphe ainsi rédigé :
« Après les mots : "à défaut", la fin du deuxième alinéa de l'article L. 361-4 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée : "au partenaire lié par un pacte civil de solidarité survivant, ou, à défaut, aux descendants, et dans le cas ou le "de cujus" ne laisse ni conjoint survivant, ni partenaire lié par un pacte civil de solidarité survivant, ni descendants, ni ascendants. »
B. - En conséquence, de faire précéder le premier alinéa de cet article de la mention : « I ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'article 4 bis est inutile. En effet, la qualité d'ayants droit pour la sécurité sociale est immédiatement acquise pour les concubins. Et comme les concubins homosexuels sont assimilés, dans notre texte, aux concubins hétérosexuels, le problème est dès lors résolu.
M. le président. La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 75 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Cet amendement tend à inclure le partenaire lié par un pacte civil de solidarité survivant parmi les ayants droit de l'assuré défunt pouvant bénéficier du versement du capital dans le cadre de l'assurance décès.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 75 rectifié ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement parce qu'il n'est pas conforme aux dispositions que nous avons précédemment adoptées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 11 et 75 rectifié ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 11 et favorable à l'amendement n° 75 rectifié.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 bis est supprimé et l'amendement n° 75 rectifié n'a plus d'objet.

Articles additionnels après l'article 4 bis



M. le président.
Par amendement n° 76 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 4 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« En cas d'hospitalisation, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de la personne malade peut être informé par le médecin de l'évolution de son état de santé et des soins qu'elle reçoit. Sauf nécessité thérapeutique ou manifestation contraire de volonté de la personne malade, la possibilité de rendre visite à celle-ci ne peut lui être refusée. »
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Il s'agit d'assurer les conditions du maintien des liens affectifs entre la personne hospitalisée et son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, ou son concubin, ainsi que l'information de celui-ci.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.
La charte du patient hospitalisé peut régler ce problème. Il suffirait que l'administration donne des consignes pour que le concubin soit considéré comme un proche dans n'importe quel hôpital ou clinique.
Cet amendement n'est pas utile.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Le Gouvernement comprend le souci d'humanité manifesté par cet amendement qui porte sur l'information ouverte aux proches d'un malade. Toutefois, ce n'est pas dans la loi relative au PACS, mais par le biais d'un texte de portée générale sur le droit des patients qu'il pourrait être envisagé de remédier aux lacunes du dispositif législatif et réglementaire actuel.
Je ne suis donc pas favorable à cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 76 rectifié est-il maintenu ?
Mme Dinah Derycke. Je le retire, étant entendu que le problème doit être réglé.
M. le président. L'amendement n° 76 rectifié est retiré.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 77 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 4 bis un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa de l'article L. 671-3 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« En cas d'urgence, le donneur peut être le conjoint, ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité, ou le concubin. »
Par amendement n° 80, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 4 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa de l'article L. 671-3 du code de la santé publique est complété par les mots : "ou le concubin". »
La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 77 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Cet amendement s'inscrit lui aussi dans les préoccupations extrapatrimoniales. Il s'agit de prévoir parmi les donneurs d'organes potentiels liés à un receveur le partenaire lié par un pacte civil de solidarité, ou le concubin.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 77 rectifié et pour défendre l'amendement n° 80.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Monsieur le président, l'amendement n° 77 rectifié déposé par Mme Derycke, MM. Bel et Delanoë pose un vrai problème. La commission des lois l'a pris en considération, parce qu'il faut effectivement tenter de le régler.
C'est la raison pour laquelle la commission a repris l'amendement n° 77 rectifié de Mme Derycke dans son amendement n° 80 en ne retenant que le concubin, puisqu'elle a par ailleurs rejeté le PACS.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 77 rectifié et 80 ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je comprends évidemment les motivations de l'amendement n° 77 rectifié, déposé par Mme Derycke, et j'en comprends également l'esprit. Mais je ne peux souscrire à cette propostion parce que, selon moi, c'est à l'occasion de la révision de la loi de 1994, qui devra faire l'objet, avant le 29 juillet 1999, d'un réexamen, qu'il faudra poser cette question.
Je fais la même réponse à M. Gélard : avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 77 rectifié est-il maintenu ?
Mme Dinah Derycke. Non, je le retire !
M. le président. L'amendement n° 77 rectifié est retiré.
L'amendement n° 80 est-il maintenu ? M. Patrice Gélard, rapporteur. Nous avions adopté cet amendement parce que nous avions été sensibles aux arguments de Mme Derycke. A partir du moment où Mme Derycke ne défend plus son amendement, nous retirons bien évidemment le nôtre.
M. le président. L'amendement n° 80 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 78 rectifié, Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 4 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Le dernier alinéa de l'article L. 671-7 du code de la santé publique est complété par les mots : ", ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, ou de son concubin". »
Par amendement n° 81, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 4 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 671-7 du code de la santé publique est complété par les mots : "ou de son concubin". »
La parole est à Mme Derycke, pour présenter l'amendement n° 78 rectifié.
Mme Dinah Derycke. Toujours dans le même esprit que précédemment, il s'agit de préciser les personnes susceptibles d'être consultées par le médecin dans le cas de prélèvements d'organes sur une personne décédée.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 81.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Ayant été encore une fois très sensibles aux arguments présentés par Mme Derycke, nous avons adapté son amendement au texte que nous avions adopté en commission des lois, en supprimant les mots « ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité » pour ne garder que les termes « ou de son concubin ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Ces amendements anticipent sur les débats qui vont bientôt avoir lieu dans le cadre de la révision des lois sur la bioéthique.
M. le président. Madame Derycke, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Dinah Derycke. Je le retire.
M. le président. L'amendement n° 78 rectifié est retiré.
M. Philippe Marini. Je le reprends !
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 78 rectifié bis.
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Je le reprends pour apporter la démonstration qu'il n'est point besoin du PACS pour résoudre certains problèmes. Ce fut le cas pour la disposition précédente, et c'est le cas pour les prélèvements d'organes.
Il n'est point besoin de PACS, comme M. Gélard en a fait la démonstration par les amendements qu'il a adaptés, notamment avec l'amendement n° 81.
Ayant donné cette explication, moi aussi, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. Claude Estier. Quelle astuce !
M. le président. L'amendement n° 78 rectifié bis est retiré.
Monsieur le rapporteur, maintenez-vous l'amendement n° 81 ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 81 est retiré.

Article 5



M. le président.
« Art. 5. _ Les dispositions des articles L. 223-7, L. 226-1, quatrième alinéa, et L. 784-1 du code du travail sont applicables aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité. »
Par amendement n° 12, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit cet article :
« Dans le quatrième alinéa de l'article L. 226-1 du code du travail, après le mot : "conjoint", sont insérés les mots : ", d'un concubin". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit de supprimer des dispositions prévues pour les partenaires liés par un PACS en matière de droit du travail, à savoir le droit à congé simultané, le droit à congé pour décès, le droit du salarié partenaire du chef d'entreprise.
En revanche, nous prévoyons le droit à congé pour décès d'un concubin, ce qui n'est pas prévu dans la législation actuelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 5 est ainsi rédigé.

Article 5 bis



M. le président.
« Art. 5 bis . _ Le deuxième alinéa de l'article L. 523-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Lorsque le père ou la mère titulaire du droit à l'allocation de soutien familial se marie, conclut un pacte civil de solidarité ou vit en concubinage, cette prestation cesse d'être due. »
Par amendement n° 13, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit de supprimer l'article 5 bis, qui prévoit de ne pas accorder aux partenaires du PACS l'allocation de soutien familial.
L'assimilation des concubins homosexuels aux concubins hétérosexuels fera disparaître la possibilité de bénéficier de cette allocation, puisque celle-ci ne sera pas versée en cas de concubinage. Le problème est donc déjà réglé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 5 bis est supprimé.

Article 5 ter



M. le président.
« Art. 5 ter. _ Le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 356-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 1° Se remarie, conclut un pacte civil de solidarité ou vit en concubinage ; ».
Par amendement n° 14, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est encore un amendement de coordination. Nous supprimons la disposition qui excluait les partenaires du PACS du bénéfice de l'allocation veuvage, l'assimilation entre concubins hétérosexuels et homosexuels faisant disparaître cette allocation, qui n'est pas versée en cas de concubinage.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 5 ter est supprimé.

Article 6



M. le président.
« Art. 6. _ La conclusion d'un pacte civil de solidarité constitue l'un des éléments d'appréciation des liens personnels en France, au sens du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, pour l'obtention d'un titre de séjour. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 15, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 51, MM. Bret, Duffour et Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam et Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade proposent de rédiger comme suit ce même article :
« Est considéré comme ayant des liens personnels en France, au sens du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, l'étranger lié à un Français par un pacte civil de solidarité, tel que défini par les articles 515-1 et 515-8 du code civil. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 15.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit, là encore, d'un amendement de coordination, qui vise à supprimer un article prévoyant, en l'occurrence, de supprimer la prise en compte des partenaires du PACS pour l'attribution d'un titre de séjour « vie privée et familiale ».
La circulaire d'application de l'article 12 bis de l'ordonnance de 1945 autorise l'attribution d'un titre de séjour à un concubin vivant depuis cinq ans et ayant des enfants avec une personne en situation régulière sur le territoire. Par conséquent, il n'y a pas lieu de changer la législation actuelle.
M. le président. La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 51.
Mme Nicole Borvo. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 51 ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit naturellement d'un avis défavorable. Là encore, il y a, en fin de compte, assimilation du PACS au mariage.
Pour les mêmes raisons, je donnerai également un avis défavorable aux amendements n°s 52 et 53.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 15 et 51 ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Il est défavorable, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 est supprimé et l'amendement n° 51 n'a plus d'objet.

Article 7



M. le président.
L'article 7 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais je suis saisi de deux amendements tendant à le rétablir et pouvant faire l'objet d'une discussion commune.
Tous deux sont représentés par MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Ralite, Renar et Mme Terrade.
L'amendement n° 52 tend à rétablir l'article 7 dans la rédaction suivante :
« L'étranger lié à un Français par un pacte civil de solidarité, tel que défini par les articles 515-1 à 515-8 du code civil, peut acquérir la nationalité française par déclaration, à condition qu'à la date de cette déclaration, la communauté de vie n'ait pas cessé et que le partenaire français ait conservé sa nationalité. »
L'amendement n° 53 vise à rétablir ce même article dans la rédaction suivante :
« Le fait pour un étranger d'être lié à un Français depuis au moins un an par un pacte civil de solidarité, tel que défini par les articles 515-1 à 515-8 du code civil, est pris en compte pour apprécier son assimilation à la communauté française au sens de l'article 21-24 du code civil. »
La parole est à M. Bret, pour présenter ces deux amendements.
M. Robert Bret. L'article 7 figurant dans les conclusions de la commission des lois de l'Assemblée nationale était un apport en matière de droit des étrangers. Il a malheureusement été supprimé par les députés et nous proposons de le rétablir, dans une rédaction toutefois plus ambitieuse.
M. le président. M. le rapporteur a déjà indiqué qu'il était défavorable aux amendements n°s 52 et 53.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable.
M. le président. Monsieur Bret, maintenez-vous vos amendements ?
M. Robert Bret. Je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements n°s 52 et 53 sont retirés.
L'article 7 demeure donc supprimé.

Article 8



M. le président.
« Art. 8. _ I. _ Dans la deuxième phrase du quatrième alinéa de l'article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, après les mots : "raisons professionnelles,", sont insérés les mots : "aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité".
« II. _ Dans les premier et deuxième alinéas de l'article 54 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, après les mots : "raisons professionnelles", sont insérés les mots : ", les fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité".
« III. _ Dans l'article 38 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, après les mots : "raisons professionnelles", sont insérés les mots : ", les fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité". »
Par amendement n° 16, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je tiens à souligner un certain nombre d'éléments à propos de cet amendement n° 16, qui vise à supprimer l'article 8 prévoyant le rapprochement des fonctionnaires séparés quand ils sont partenaires d'un PACS.
En premier lieu, je ne pense pas que cette disposition relève du domaine législatif.
En second lieu, plusieurs administrations prennent déjà en compte la situation des concubins, notamment lorsqu'ils sont chargés d'enfants.
Il ne convient pas d'inscrire cette pratique dans la loi, d'autant plus que le rapprochement des personnes déjà prioritaires - époux, handicapés, personnes travaillant en secteur difficile - est extrêmement ardu à réaliser.
Dans la pratique, chacun sait que, même pour les personnes prioritaires, les délais sont parfois de dix ou quinze ans dans certaines administrations. Ne compliquons pas les choses et ne faisons pas en sorte que, par exemple, un partenaire de PACS ait plus de droits au rapprochement qu'une personne qui veut rejoindre son père ou sa mère extrêmement malade et qui a besoin de sa présence dans ses derniers moments.
J'estime que cette mesure est strictement démagogique.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 8 est supprimé.

Article 9



M. le président.
« Art. 9. _ I. _ Après le troisième alinéa de l'article 14 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« _ au profit du partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité ; ».
« II. _ Après le septième alinéa du même article 14, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« _ au partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité ; ».
« III. _ Dans la deuxième phrase du premier alinéa du I de l'article 15 de la même loi, après les mots : "bailleur, son conjoint,", sont insérés les mots : "le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la date du congé,". »
« IV. _ Dans la deuxième phrase du premier alinéa du I du même article 15, après les mots : "ceux de son conjoint", le mot : "ou" est remplacé par les mots : ", de son partenaire ou de son". »
Par amendement n° 17, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l'article 9, qui prévoit le transfert du droit au bail au partenaire lié par un PACS ainsi que la reprise du bail à son bénéfice.
La Cour de cassation a refusé de reconnaître ce droit aux couples homosexuels dans sa décision du 17 décembre 1997.
Le transfert et la reprise s'appliqueront dorénavant automatiquement aux concubins homosexuels justifiant d'un an de vie commune avec le preneur, ou avec le bailleur, du fait de l'assimilation des concubins homosexuels aux concubins hétérosexuels. Il n'y a donc pas lieu de maintenir l'article 9.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 9 est supprimé.

Article 10



M. le président.
« Art. 10. _ Les dispositions des articles 2, 4 à 9 relatives aux signataires d'un pacte civil de solidarité sont applicables à deux frères, deux soeurs ou un frère et une soeur qui résident ensemble.
« Les délais prévus, le cas échéant, par ces articles pour l'ouverture de droits commencent à courir, pour les frères et soeurs, à compter de la justification par eux apportée de leur résidence commune. »
Je suis saisi de trois amendements identiques.
Le premier, n° 18, est présenté par M. Gélard, au nom de la commission des lois.
Le deuxième, n° 54, est déposé par MM. Bret, Duffour, Foucaud, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Le troisième, n° 79, est présenté par Mme Derycke, MM. Bel, Delanoë et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tout trois tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 18.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Nous avons beaucoup parlé des fratries. La façon dont nous avons traité le PACS résout le problème des fratries.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Exactement !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Grâce aux dispositions de nature fiscale ou financière que nous avons adoptées, il n'existe plus de problèmes liés aux fratries. C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l'article 10.
Le PACS a été supprimé. Les avantages prévus par notre rédaction seront applicables aux frères et aux soeurs. Dès lors, il devient inutile de conserver l'article 10.
Je donne par avance un avis favorable aux amendements n°s 54 et 79. Leurs auteurs visent le même objectif que la commission, mais, je le déplore, avec des motivations fondamentalement différentes.
M. le président. La parole est à M. Bret, pour présenter l'amendement n° 54.
M. Robert Bret. Nous proposons de supprimer les dispositions ouvrant le pacte civil de solidarité aux fratries, estimant qu'elles altéreraient la nature et le symbole même du PACS.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Symbole, le terme est intéressant ! (En effet ! sur la travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 79.
Mme Dinah Derycke. S'agissant d'un amendement identique, monsieur le président, je ne répète pas ce que vient de dire M. Bret.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je suis favorable à ces trois amendements.
Evidemment, je préfère les raisons avancées par M. Bret et Mme Derycke à celles qui ont été données par M. Gélard, avec lesquelles je suis en désaccord.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Vous avez tort !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 18, 54 et 79, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 10 est supprimé.

Article 11



M. le président.
« Art. 11. _ Les conditions d'application de la présente loi sont fixées par décrets en Conseil d'Etat.
« Le décret relatif aux conditions dans lesquelles sont traitées et conservées les informations relatives à la formation, la modification et la dissolution du pacte civil de solidarité est pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. »
Par amendement n° 19, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de supprimer le second alinéa de cet article.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer le deuxième alinéa de l'article 11, alinéa qui porte sur le décret relatif à l'enregistrement du PACS et qui n'a plus de raison d'être compte tenu de la logique des amendements précédemment adoptés. Il s'agit donc d'une coordination.
Nous n'avons pas parlé précisément de ce problème de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Je me demande d'ailleurs comment, dans le texte du PACS, toutes ces dispositions s'articuleront. Mais nous n'allons pas ouvrir de nouveau un débat qui a été précédemment engagé !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11, ainsi modifié.

(L'article 11 est adopté.)

Article 11 bis



M. le président.
« Art. 11 bis. _ Les articles 1er et 11 sont applicables aux territoires d'outre-mer et à la collectivité territoriale de Mayotte sous réserve des adaptations suivantes pour les territoires d'outre-mer : les mots : "tribunal d'instance" sont remplacés par les mots : "tribunal de première instance". »
« L'article 9 est applicable au territoire de la Polynésie française. »
Par amendement n° 20, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. L'article 11 bis rend applicables aux territoires d'outre-mer les dispositions de la proposition de loi. Or la Constitution impose la consultation préalable des assemblées territoriales.
Cela n'ayant pas été fait, nous sommes face à une inconstitutionnalité réelle. Mais, ne voulant pas pour autant poursuivre dans cette voie, je propose purement et simplement de supprimer l'article 11 bis .
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable, et je précise que la consultation est en cours.
M. Philippe Marini, rapporteur pour avis. Il est temps !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Mais elle n'a pas eu lieu !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 11 bis est supprimé.

Article 12



M. le président.
L'article 12 a été supprimé par l'Assemblée nationale.

Intitulé de la proposition de loi



M. le président.
Par amendement n° 21, M. Gélard, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit l'intitulé de la proposition de loi :
« Proposition de loi relative au mariage, au concubinage et aux liens de solidarité ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Voici la cerise finale ! (Sourires.)
Puisque l'ensemble des propositions de la commission des lois et de la commission des finances ont été approuvées par notre Hautre Assemblée, il ne reste plus qu'à en tirer la conclusion, c'est-à-dire à mettre l'intitulé de la proposition de loi en conformité avec les dispositions que nous avons adoptées.
J'insiste particulièrement sur les liens de solidarité, que nous avons mis en avant, et sur un certain nombre des éléments que nous avons, nous, soulignés, mais que l'Assemblée nationale n'avait pas vus !
M. Emmanuel Hamel. Ce n'est pas la cerise finale, c'est la lutte finale ! (Sourires.)
M. Guy Allouche. Allez, les révolutionnaires, levez le poing ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé de la proposition de loi est ainsi rédigé.

Mise au point au sujet d'un vote



M. Jacques Pelletier.
Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier. A la suite d'une erreur matérielle, mes collègues MM. Abadie, Bimbenet et Othily ont été portés comme ayant voté pour l'amendement n° 3 rectifié, qui avait pour objet d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel relatif au concubinage.
En réalité, MM. Abadie et Othily entendaient voter contre cet amendement. M. Bimbenet, quant à lui, ne souhaitait pas prendre part au vote.
Je vous serais reconnaissant, monsieur le président, de bien vouloir tenir compte de cette rectification.
M. le président. Je vous donne acte de cette mise au point.

Rappel au règlement



M. Jean-Luc Mélenchon.
Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, je souhaite que les dispositions soient prises pour que les plaisanteries extrêmement déplaisantes auxquelles s'est livré M. Braye autour de mon nom soient retirées du compte rendu intégral de nos travaux, dont j'ai pu avoir connaissance pour la partie qui me concerne. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. le président. Nous allons voir cela.

Renvoi de la suite de la discussion



M. le président.
Mes chers collègues, nous en arrivons au vote sur l'ensemble.
M. Henri de Raincourt. Pas aujourd'hui !
M. Jean-Jacques Hyest. Il est vingt heures cinq !
M. Henri de Raincourt. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Chacun ayant le droit de s'exprimer, je dois vous dire, monsieur le président, que nous sommes absolument hostiles à ce qu'il soit procédé en cet instant aux explications de vote et au vote sur la proposition de loi.
Nous avons bien des choses à dire. En effet, nous entendons répondre à un certain nombre des arguments qui ont été avancés tout au long de cette journée, car nous ne voulons pas que la position du Sénat soit caricaturée.
Par conséquent, je demande que les explications de vote et le vote lui-même aient lieu mardi matin en tout début de séance. Ce ne sera pas très long, mais il y en aura quand même pour une heure !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je maintiens la position que j'ai exprimée tout à l'heure, monsieur le président : je suis tout à fait disposée à ce que le débat se poursuive jusqu'à son terme.
M. le président. Madame le garde des sceaux, si la suite de la discussion était renvoyée mardi matin, à dix heures trente, pourriez-vous être présente au banc du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Non, car le conseil des ministres se tient exceptionnellement ce jour-là.
M. Jean-Jacques Hyest. Alors, l'après-midi !
M. Guy Allouche. Terminons donc maintenant. Chaque explication de vote ne dure que cinq minutes !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Si nous devions achever la discussion maintenant, je suis prête à rester encore une heure. Ce serait effectivement la meilleure solution, à moins que le Sénat n'accepte de se réunir mardi à neuf heures du matin, ce qui me permettrait d'être à l'heure au conseil des ministres, ou de n'arriver que légèrement en retard.
M. Jean Delaneau. Ça se fait à l'Assemblée nationale !
M. le président. Nous pourrions renvoyer la discussion - j'imagine que le président du Sénat n'y serait pas hostile - mardi matin à onze heures. Cela permettrait à Mme le garde des sceaux d'assister au conseil des ministres ; nous serions même éventuellement prêts à l'attendre un peu. Ce grand débat ne mérite pas d'être terminé à la hâte.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est l'inverse : Mme le garde des sceaux demande que le Sénat se réunisse à neuf heures !
M. le président. Madame le garde des sceaux, pourriez-vous venir à onze heures quinze ? Neuf heures, ce n'est pas la tradition ici. J'essaie d'être le plus arrangeant possible, j'en ai fait la démonstration !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je veux bien faire tout ce qui est agréable au Sénat, mais il arrive que le conseil des ministres dure plus longtemps !
M. le président. Nous vous attendrons, madame le garde des sceaux. Il se trouve que c'est moi qui présiderai aussi la séance de mardi matin.
Je vous remercie de votre compréhension.
M. Claude Estier. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. Si c'est vous qui présidez la séance de mardi matin, vous savez qu'à dix heures trente était prévue par la conférence des présidents la discussion du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. Cela nous amènerait donc à modifier l'ordre du jour !
M. le président. Non, monsieur Estier, nous le décalerons d'autant, simplement.
Cela me paraît être une position raisonnable, à laquelle, dans leur sagesse, tous les groupes du Sénat peuvent, me semble-t-il, se rallier.
Je remercie Mme le garde des sceaux de bien vouloir être présente à partir de onze heures quinze mardi matin.
Il en est ainsi décidé.

5

TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à l'épargne et à la sécurité financière.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 273, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

6

TRANSMISSION D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le président de l'Assemblée nationale, une proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la délivrance des grades dans les disciplines relevant des arts martiaux.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 274, distribuée et renvoyée à la commission des affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

7

DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président. J'ai reçu de MM. Gérard Larcher, Claude Belot et Charles Revet un rapport fait au nom de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence (n° 203, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 272 et distribué.

8

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, fixée au mardi 23 mars 1999, à onze heures quinze et à seize heures :
1. Suite de la discussion de la proposition de loi (n° 108, 1998-1999), adoptée par l'Assemblée nationale, relative au pacte civil de solidarité.
Rapport (n° 258, 1998-1999) de M. Patrice Gélard, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Avis (n° 261, 1998-1999) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Aucun amendement à cette proposition de loi n'est plus recevable.
2. Discussion du projet de loi (n° 203, 1998-1999) d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence.
Rapport (n° 272, 1998-1999) de MM. Gérard Larcher, Claude Belot et Charles Revet, fait au nom de la commission spéciale.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 22 mars 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 mars 1999, à dix-sept heures.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale (n° 220, 1998-1999) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 31 mars 1999, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 30 mars 1999, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures dix.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
COMMISSION D'ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS

En application du décret n° 78-1136 du 6 décembre 1978, M. le président du Sénat a désigné, le 17 mars 1999, Mme Gisèle Printz en qualité de membre suppléant de la commission d'accès aux documents administratifs.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Attribution des aides aux détaillants
en carburants en difficulté

493. - 18 mars 1999. - M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la mise en place du nouveau dispositif d'attribution des aides aux détaillants en carburant par le comité professionnel de la distribution de carburants (CPDC). Dans le cadre de la loi n° 96-588 du 1er juillet 1996 relative à la loyauté et à l'équilibre des relations commerciales, et afin de préserver le réseau des détaillants traditionnels, essentiel au maintien de l'activité notamment en zone rurale, il était prévu que le CPDC redistribue le produit de la majoration de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, instituée, aux petites stations-service en difficulté. En conséquence, la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 novembre 1996), les décrets du 15 mai 1997 et du 2 mars 1998 ont fixé le taux et les modalités de répartition du produit de cette extension de taxe, collectée par la Caisse nationale de l'organisation autonome d'assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales (ORGANIC). Or, pour que le CPDC puisse redistribuer les sommes recueillies, évaluées à soixante millions de francs, le décret n° 98-112 du 2 mars 1998 a imposé qu'un arrêté conjoint du ministre chargé de l'industrie, du ministre chargé du commerce et de l'artisanat et du ministre chargé du budget fixe chaque année le plafond des ressources affectées au CPDC. Cet arrêté ministériel n'est toujours pas paru au Journal officiel. En conséquence, faute de cet arrêté interministériel, une loi votée voici près de trois ans et deux décrets sont privés de toute portée pratique. Plus grave, l'ORGANIC perçoit, depuis ce décret n° 97-59 du 15 mai 1997, le produit d'une taxe spécifique devenue sans objet, puisque la loi est détournée. Ces fonds ne sont toujours pas destinés aux petites stations-service de plus en plus en difficulté, pour qui ils sont prélevés. C'est pourquoi il lui demande de mettre sans délai un terme à cette situation inadmissible, soit en attribuant définitivement à cette taxe sa destination : les petites stations-service, soit en la supprimant puisque sans objet.

Accueil des enfants handicapés en établissement
d'enseignement spécialisé

494. - 18 mars 1999. - M. Yann Gaillard attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le nombre croissant d'enfants handicapés en attente d'accueil dans un établissement d'enseignement spécialisé. Ainsi, dans le seul département de l'Aube, soixante-quinze enfants et adolescents étaient en attente d'une place en institut médico-éducatif (IME) en septembre dernier. Les insuffisances quantitatives du dispositif destiné aux jeunes enfants relevant de l'éducation spéciale sont bien connues. Pourtant, les différentes démarches menées par la préfecture auprès du ministère de l'emploi et de la solidarité, et notamment les demandes de moyens supplémentaires, n'ont pas, à ce jour, abouti. Que dire encore de ces parents qui souhaiteraient, pour le bien-être de leur enfant, le faire changer d'orientation et donc d'établissement pour le diriger vers une branche plus apte à favoriser son épanouissement et qui, faute de places, ne peuvent pas leur donner cette chance ? Il est en effet très difficile d'envisager un changement d'établissement sachant qu'aucune place n'est disponible et qu'il existe même des listes d'attentes de jeunes qui n'ont pu malheureusement trouver une solution. Il lui demande donc ce qu'elle compte faire pour, dans un premier temps, permettre l'accès de tous ces enfants à l'enseignement et, dans un second temps, leur garantir un véritable choix d'orientation. Cela ayant pour finalité, faut-il le rappeler, d'offrir à tous ces jeunes un moyen d'épanouissement et une chance d'orientation dans la vie professionnelle et sociale.

Retrait du permis de conduire
aux cyclistes ayant commis des infractions
au code de la route

495. - 18 mars 1999. - M. Franck Sérusclat souhaite interroger M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la sanction infligée à certains cyclistes ne respectant pas le code de la route : le retrait du permis de conduire automobile. En effet, certains cyclistes n'ayant, par exemple, pas respecté un feu de signalisation, se voient retirer leurs permis de conduire automobile, alors même que les dispositions relatives au permis à points ne leurs sont pas applicables. Une telle sanction semble disproportionnée et injuste. Au moment du vote de la loi sur le permis à points, le législateur avait - et avec raison - considéré que l'on ne saurait enlever les points d'un permis de conduire non nécessaire à la conduite d'un vélo à son titulaire, sauf à admettre une discrimination tout à fait disproportionnée à l'encontre des titulaires du permis de conduire et, par ailleurs, cyclistes, ayant commis des infractions. Or, si des retraits de points ne sont pas admis, en revanche, des retraits de permis sont encore pratiqués (des témoignages récents en attestent). Cette situation est en contradiction avec la volonté du législateur. Elle est également injuste en ce qu'elle crée une situation d'inégalité entre les cyclistes titulaires d'un permis de conduire automobile (qui peuvent faire l'objet d'un tel retrait) et ceux qui ne disposent pas de ce permis (et ne peuvent pas être sanctionnés de la même façon). Elle est d'autant plus incompréhensible que le cycliste contribue à l'amélioration du cadre de vie dans nos cités. Il insiste auprès de lui sur le fait qu'un retrait de permis sans retrait préalable de points constitue une sanction d'une particulière gravité qui, dans l'essentiel des cas, ne saurait être appliquée à un cycliste, ce dernier mettant en effet très rarement en cause la vie d'autrui par sa seule conduite, à la différence des conducteurs de voitures commettant de graves excès de vitesse ou téléphonant tout en conduisant... Il aimerait connaître la position du ministre en la matière, ainsi que son éventuelle volonté de mettre fin à cette pratique.



ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du jeudi 18 mars 1999


SCRUTIN (n° 84)



sur l'amendement n° 2, présenté par M. Patrice Gélard au nom de la commission des lois, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 1er de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative au pacte civil de solidarité (définition du mariage).

Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 312
Pour : 206
Contre : 106

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 18.
Contre : 3. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer et Yvon Collin.
Abstention : 1. _ M. Jacques Pelletier.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 93.
Contre : 2. _ MM. Jacques Chaumont et Jean-Jacques Robert.
Abstention : 1. _ M. Yann Gaillard.
N'ont pas pris part au vote : 3. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat, M. Gérard Larcher, qui présidait la séance, et M. Emmanuel Hamel.

GROUPE SOCIALISTE (78) :

Contre : 78.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :

Pour : 45.
Contre : 5. _ MM. Denis Badré, Jean-Jacques Hyest, Pierre Jarlier, Alain Lambert et Jean-Louis Lorrain.

Abstention : 1. _ M. Pierre Fauchon.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Jacques Machet.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (47) :

Pour : 47.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (7) :

Pour : 3.

Contre : 2. _ MM. Gérard Delfau et Bernard Seillier.
Abstention : 1. _ M. Philippe Darniche.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Alfred Foy.

Ont voté pour


François Abadie
Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jean-Paul Bataille
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Alain Peyrefitte
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Denis Badré
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Jacques Chaumont
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Alain Lambert
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Jean-Jacques Robert
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Bernard Seillier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions


MM. Philippe Darniche, Pierre Fauchon, Yann Gaillard et Jacques Pelletier.

N'ont pas pris part au vote


MM. Alfred Foy, Emmanuel Hamel et Jacques Machet.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Gérard Larcher, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 317
Nombre de suffrages exprimés : 313
Majorité absolue des suffrages exprimés : 157
Pour l'adoption : 207
Contre : 106

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 85)



sur l'amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Patrice Gélard au nom de la commission des lois, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 1er de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative au pacte civil de solidarité (définition du concubinage).

Nombre de votants : 311
Nombre de suffrages exprimés : 308
Pour : 192
Contre : 116

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :
Pour : 18.
Contre : 4. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Jacques Pelletier.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :
Pour : 92.
Contre : 5. _ MM. Michel Caldaguès, Philippe de Gaulle, François Gerbaud, Emmanuel Hamel et Jean-Jacques Robert.

N'ont pas pris part au vote : 2. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat et M. Alain Vasselle.

GROUPE SOCIALISTE (78) :
Contre : 77.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Allouche, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :
Pour : 40.
Contre : 9. _ MM. Denis Badré, Maurice Blin, André Bohl, Jean Huchon, Alain Lambert, Henri Le Breton, Jean-Louis Lorrain, Louis Moinard et Philippe Nogrix.

Abstentions : 3. _ MM. Pierre Jarlier, Louis Mercier et Michel Souplet.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (47) :

Pour : 42.
Contre : 5. _ MM. Jean-Paul Bataille, Jean Boyer, Louis Boyer, Louis Grillot et Henri Revol.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (7) :

N'ont pas pris part au vote : 7.

Ont voté pour


François Abadie
Nicolas About
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Annick Bocandé
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Patrice Gélard
Alain Gérard
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Alain Peyrefitte
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Raymond Soucaret
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Denis Badré
Jean-Paul Bataille
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Maurice Blin
André Bohl
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Michel Caldaguès
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Philippe de Gaulle
François Gerbaud
Serge Godard
Louis Grillot
Jean-Noël Guérini
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Roger Hesling
Jean Huchon
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Alain Lambert
Dominique Larifla
Henri Le Breton
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Louis Moinard
Michel Moreigne
Philippe Nogrix
Jean-Marc Pastor
Jacques Pelletier
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Henri Revol
Roger Rinchet
Jean-Jacques Robert
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions


MM. Pierre Jarlier, Louis Mercier et Michel Souplet.

N'ont pas pris part au vote


MM. Philippe Adnot, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Hubert Durand-Chastel, Alfred Foy, Bernard Seillier, Alex Türk et Alain Vasselle.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Allouche, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 312
Nombre de suffrages exprimés : 309
Majorité absolue des suffrages exprimés : 155
Pour l'adoption : 192
Contre : 117

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 86)



sur les amendements n° 4, présenté par M. Patrice Gélard au nom de la commission des lois et n° 32 présenté par M. Jean-Louis Lorrain, Denis Badré, Jacques Machet et Alain Lambert, tendant à supprimer l'article 1er de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative au pacte civil de solidarité (création d'un pacte civil de solidarité).

Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages exprimés : 313
Pour : 216
Contre : 97

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 18.
Contre : 4. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Jacques Pelletier.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 98.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (78) :

Contre : 77.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Guy Allouche, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :

Pour : 52.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (47) :

Pour : 47.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (7) :

Pour : 1. _ M. Bernard Seillier.
N'ont pas pris part au vote : 6.

Ont voté pour


François Abadie
Nicolas About
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jean-Paul Bataille
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Alain Peyrefitte
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Jean-Jacques Robert
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Jacques Pelletier
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


MM. Philippe Adnot, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Hubert Durand-Chastel, Alfred Foy et Alex Türk.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Allouche, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 314
Nombre de suffrages exprimés : 314
Majorité absolue des suffrages exprimés : 158
Pour l'adoption : 216
Contre : 98

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.