Séance du 3 juin 1999
M. le président. La parole est à M. Bourdin.
M. Joël Bourdin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche et concerne la contamination par la dioxine d'une partie de la filière poulet. Elle est donc complémentaire de la question qui a été posée précédemment par notre collègue M. Huriet, et j'irai rapidement au fait.
Après la crise de la vache folle, voilà quelques années, qui nous avait alertés et pris au dépourvu, après toutes les réflexions, les rapports, les contrôles effectués sur la filière bovine, la traçabilité, qui ont suivi, nous nous étonnons du dysfonctionnement d'autres filières, celles du poulet, des oeufs, voire du porc.
Monsieur le ministre, vos services ont-ils pu maintenant déterminer de manière précise le cheminement des transactions et des transformations qui ont eu lieu, de telle sorte qu'il soit possible de savoir quelles entreprises ont pu être contaminées ?
Notre collègue M. Huriet a évoqué ce point tout à l'heure : il semblerait que vous auriez été informé au début du mois de l'éventualité d'une contamination par des dioxines ayant pour origine des graisses animales. Pourquoi des mesures n'ont-elles pas été prises à ce moment-là ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, dans cette crise, je mettrai un terme à la querelle stérile sur la date à laquelle les autorités françaises auraient été averties. Il est exact que, le 3 mai 1999, un service du ministère de l'économie et des finances a été averti, informé d'un incident survenu en Belgique. Mais, dans ce fax que j'ai sous les yeux et que je tiens à votre disposition, car le Gouvernement veut absolument la transparence dans cette affaire, il est écrit : « Suite à l'enquête, nous avons de fortes raisons de penser que la contamination provient d'un accident ponctuel et que les livraisons postérieures au 19 janvier ne devraient pas poser de problèmes. » C'était donc un fax anodin.
M. Charles Descours. Pourquoi l'agence sanitaire n'a-t-elle pas été alertée ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. C'est à l'émetteur qu'il faut s'adresser, c'est-à-dire aux autorités belges !
M. Charles Descours. Le ministère de l'agriculture ne favorise pas toujours l'Agence !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je vous en prie, il s'agit d'une fausse querelle !
M. le président. Monsieur le ministre, ne vous laissez pas interrompre !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. C'est difficile dans un contexte polémique, monsieur le président !
Comme je l'ai dit, c'est une mauvaise querelle que d'essayer d'opposer entre eux les services de l'Etat. Je parle en présence de Martine Aubry et de Bernard Kouchner, comme je le ferais en présence de Dominique Strauss-Kahn ou de Marylise Lebranchu. Notre devoir est de faire travailler ensemble les services de la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes, la direction générale de la santé et la direction générale de l'alimentation...
M. Charles Descours. Ces services sont regroupés dans l'agence et cela ne fonctionne pas !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. ... ce qu'ils font déjà, d'ailleurs et très bien, depuis quelques jours en particulier, je peux en témoigner, monsieur Descours. Donc pas de mauvaise querelle : l'Etat, c'est l'Etat, et quand un service est informé, tout le monde l'est !
Voilà pour le premier point.
Second point : la meilleure preuve que ce n'était pas une alerte, c'est que celle-ci s'est produite selon la procédure du réseau d'alerte européen. C'est le deuxième fax, celui en date du 28 mai, où il est indiqué : « Rapid alert, system for food ». Là, nous étions alertés ; c'était vendredi dernier et, à ce moment-là, tous les services de l'Etat, d'une manière harmonieuse, se sont mis à travailler.
Les dispositions que nous avons prises sont extrêmement simples.
Premièrement, nous avons retiré du marché français tous les produits belges, que ce soient des poulets ou des oeufs, d'une manière quasi immédiate, par une traçabilité simple, en alertant tous les réseaux de distribution.
Deuxièmement, nous avons, grâce aux informations que nous avons reçues des autorités belges, procédé au repérage des élevages qui s'étaient fournis, soit en Belgique, soit auprès d'une entreprise française, qui, elle-même, s'était fournie en graisse animale en Belgique. Quelques dizaines d'élevages, sont concernés ; ils ont été placés sous séquestre, c'est-à-dire avec l'interdiction de commercialiser leurs produits dans l'attente du résultat des analyses.
Je tiens à dire que, autant nous devons faire jouer le principe de précaution et mettre à l'abri les consommateurs, autant, à ce stade, rien ne prouve que la France ait été atteinte par cette contamination.
Nous prenons des précautions, mais nous n'avons encore aucune preuve de cas de contamination en France.
Je vous informe par ailleurs que l'Union européenne a pris hier des décisions quant au retrait des produits dérivés des oeufs contenant plus de 2 % d'oeufs belges, c'est-à-dire aussi bien des pâtes, des biscuits ou des mayonnaises.
Et, dès cet après-midi, à seize heures trente, nous mettons en place une cellule de crise réunissant des représentants des trois administrations et des professionnels, pour étudier dans quelles conditions nous allons appliquer très scrupuleusement cette directive (Applaudissements sur les travées socialistes.)
CONSTRUCTION D'UNE DÉFENSE COMMUNE
EUROPÉENNE