Séance du 10 juin 1999
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Rappel au règlement
(p.
1
).
MM. Marcel Deneux, le président.
3.
Ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.
- Adoption d'un projet de loi (p.
2
).
Discussion générale : Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la
justice ; MM. Luc Dejoie, rapporteur de la commission des lois ; Adrien
Gouteyron, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles ;
Yann Gaillard, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Robert
Bret, Mme Dinah Derycke, MM. Jean-Jacques Hyest, Lucien Lanier, Serge
Lagauche.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.
Clôture de la discussion générale.
Article 1er (p. 3 )
Amendement n° 1 de M. Gouteyron, rapporteur pour avis, et sous-amendement n°
112 du Gouvernement. - M. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; Mme le
ministre, M. le rapporteur. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement
modifié.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 (p. 4 )
Amendement n° 103 de Mme Derycke. - Retrait.
Amendements n°s 30 à 32 de la commission. - M. le rapporteur, Mme la ministre,
M. René-Georges Laurin. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 2 (p. 5 )
Amendement n° 2 de M. Gouteyron, rapporteur pour avis. - MM. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; le rapporteur, Mme le ministre, M. René-Georges Laurin, Mme Dinah Derycke. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 3 (p. 6 )
Amendement n° 33 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption.
Amendement n° 128 du Gouvernement. - Devenu sans objet.
Amendements identiques n°s 34 de la commission et 3 de M. Gouteyron, rapporteur
pour avis. - MM. le rapporteur, Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; Mme le
ministre. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 7 )
Amendement n° 35 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Suspension et reprise de la séance (p. 8 )
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
Article 5. - Adoption (p.
9
)
Article 6 (p.
10
)
Amendement n° 36 de la commission et sous-amendements n°s 4 rectifié de M.
Gouteyron, rapporteur pour avis, et 113 du Gouvernement. - MM. le rapporteur,
Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; Mme le ministre. - Adoption des deux
sous-amendements et de l'amendement modifié.
Adoption de l'article modifié.
Article 7 (p. 11 )
Amendement n° 37 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 8 (p. 12 )
Amendements identiques n°s 38 de la commission et 5 de M. Gouteyron, rapporteur
pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des deux
amendements.
Amendement n° 39 de la commission et sous-amendement n° 115 du Gouvernement ;
amendement n° 6 de M. Gouteyron, rapporteur pour avis. - M. le rapporteur, Mme
le ministre. - Rejet du sous-amendement ; adoption des amendements identiques
n°s 39 et 6.
Amendement n° 114 rectifié du Gouvernement. - Mme le ministre, M. le
rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 9. - Adoption (p.
13
)
Article 10 (p.
14
)
Amendements n°s 7 de M. Gouteyron, rapporteur pour avis, et 40 de la
commission. - MM. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; le rapporteur, Mme
le ministre. - Retrait de l'amendement n° 7 ; adoption de l'amendement n°
40.
Amendements identiques n°s 41 de la commission et 8 de M. Gouteyron, rapporteur
pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des deux
amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 11 (p. 15 )
Amendements identiques n°s 42 de la commission et 9 de M. Gouteyron, rapporteur
pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des deux
amendements.
Amendements identiques n°s 43 de la commission et 10 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre, M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 12 (p. 16 )
Amendements identiques n°s 44 de la commission et 11 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre, M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements.
Amendements identiques n°s 45 de la commission et 12 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 13 (p. 17 )
Amendement n° 46 de la commission. - Adoption.
Amendements identiques n°s 47 de la commission et 13 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des deux
amendements.
Amendement n° 48 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, M.
René-Georges Laurin. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 14 (p. 18 )
Amendements n°s 49 de la commission et 14 rectifié de M. Gouteyron, rapporteur
pour avis. - MM. le rapporteur, Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; Mme le
ministre. - Retrait de l'amendement n° 14 rectifié ; adoption de l'amendement
n° 49.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 14 (p. 19 )
Amendement n° 50 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 15. - Adoption (p.
20
)
Article 16 (p.
21
)
Amendements identiques n°s 51 de la commission et 15 rectifié
bis
de
M. Gouteyron, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis ; Mme le ministre. - Adoption des deux amendements.
Amendement n° 104 de Mme Derycke. - Mme Dinah Derycke, M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Retrait.
Adoption de l'article modifié.
Article 17 (p. 22 )
Amendements n°s 52 et 53 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre.
- Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 18 (p. 23 )
Amendements identiques n°s 54 de la commission et 16 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis ; amendement n° 16 du Gouvernement. - MM. le rapporteur,
Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; Mmes le ministre, Dinah Derycke, M.
René-Georges Laurin. - Adoption des amendements n°s 54 et 16 ; l'amendement n°
116 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 19 (p. 24 )
Amendements identiques n°s 55 de la commission et 17 de M. Gouteyron, rapporteur pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des deux amendements rédigeant l'article.
Article 20. - Adoption (p.
25
)
Article 21 (p.
26
)
Amendement n° 105 de Mme Derycke. - Mme Dinah Derycke, M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Retrait.
Amendements identiques n°s 56 de la commission et 18 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements.
Amendements identiques n°s 57 de la commission et 19 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 22 (p. 27 )
Amendement n° 106 de Mme Derycke. - Retrait.
Amendements identiques n°s 58 de la commission et 20 rectifié de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 23 (p. 28 )
Amendements n°s 21 de M. Gouteyron, rapporteur pour avis, et 59 de la commission. - MM. Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait de l'amendement n° 59 ; adoption de l'amendement n° 21 rédigeant l'article.
Article 24 (p. 29 )
Amendements identiques n°s 60 de la commission et 22 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, Adrien Gouteyron, rapporteur pour
avis ; Mme le ministre. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 25 (p. 30 )
Amendements identiques n°s 61 de la commission et 23 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - M. le rapporteur. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 26 (p. 31 )
Amendement n° 62 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 107 de Mme Derycke. - Mme Dinah Derycke, M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Retrait.
Adoption de l'article modifié.
Article 27 (p. 32 )
Amendements identiques n°s 63 de la commission et 24 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis ; amendement n° 117 du Gouvernement. - MM. le rapporteur,
Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; Mme le ministre, MM. René-Georges
Laurin, Yann Gaillard, rapporteur pour avis. - Adoption des amendements n°s 63
et 24, l'amendement n° 117 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 28 (p. 33 )
Amendement n° 64 de la commission et sous-amendement n° 124 rectifié de M. Bret ; amendement n° 25 de M. Gouteyron, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, Robert Bret, Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; Mme le ministre, M. René-Georges Laurin. - Rejet du sous-amendement ; adoption des amendements identiques n°s 64 et 25 rédigeant l'article.
Article 29 (p. 34 )
Amendements n°s 65 et 66 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre,
M. Emmanuel Hamel. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 30 (p. 35 )
Amendements identiques n°s 67 de la commission et 26 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des deux
amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles 31 et 32. - Adoption (p.
36
)
Article 33 (p.
37
)
Amendements n°s 68 de la commission et 27 de M. Gouteyron, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis ; Mme le ministre. - Retrait de l'amendement n° 27 ; adoption de l'amendement n° 68 rédigeant l'article.
Article 34 (p. 38 )
Amendements identiques n°s 69 de la commission et 28 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements.
Amendements identiques n°s 70 de la commission et 29 de M. Gouteyron,
rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 35 (p. 39 )
Amendements identiques n°s 71 de la commission et 94 de M. Gaillard, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, Yann Gaillard, rapporteur pour avis ; Mme le ministre, M. Robert Bret, Mme Dinah Derycke. - Adoption des deux amendements rédigeant l'article.
Article 36 (p. 40 )
Amendements n°s 72 de la commission et 118 du Gouvernement. - M. le rapporteur,
Mme le ministre. - Adoption de l'amendement n° 72, l'amendement n° 118 devenant
sans objet.
Amendements n°s 73 de la commission et 119 du Gouvernement. - Adoption de
l'amendement n° 73, l'amendement n° 119 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 37 (p. 41 )
Amendements identiques n°s 74 de la commission et 95 de M. Gaillard, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, Yann Gaillard, rapporteur pour avis ; Mme le ministre. - Adoption des deux amendements rédigeant l'article.
Article 38. - Adoption (p.
42
)
Demande de réserve (p.
43
)
Demande de réserve de l'article 39. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - La réserve est ordonnée.
Article 40 (p. 44 )
Amendement n° 96 de M. Gaillard, rapporteur pour avis. - MM. Yann Gaillard, rapporteur pour avis ; le rapporteur, Mme le ministre ; M. Robert Bret, Mme Dinah Derycke. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 41 (p. 45 )
Amendement n° 108 de Mme Derycke. - Mme Dinah Derycke, M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Adoption.
Amendement n° 76 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 42 (p. 46 )
Amendements n°s 120 du Gouvernement et 77 de la commission. - Mme le ministre, M. le rapporteur. - Retrait de l'amendement n° 77, adoption de l'amendement n° 120 rédigeant l'article.
Article 43 (p. 47 )
Amendements n°s 78 de la commission, 97 de M. Gaillard, rapporteur pour avis,
et 121 du Gouvernement. - MM. le rapporteur, Yann Gaillard, rapporteur pour
avis ; Mme le ministre. - Retrait de l'amendement n° 97 ; adoption de
l'amendement n° 78, l'amendement n° 121 devenant sans objet.
Amendements n°s 79 et 80 de la commission. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Division et articles additionnels après l'article 43
et article additionnel après l'article 51 (p.
48
)
Réserve de l'amendement n° 102.
Amendements n°s 101
(priorité)
, et 98 de M. Gaillard, rapporteur pour
avis, 122
(priorité)
du Gouvernement, 99 et 100 de M. Gaillard,
rapporteur pour avis. - MM. Yann Gaillard, rapporteur pour avis ; le
rapporteur, Mme le ministre. - Adoption des amendements n°s 101 et 98 insérant
deux articles additionnels après l'article 43.
Suspension et reprise de la séance (p. 49 )
M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis ; Mme le ministre, M. le rapporteur. -
Retrait de l'amendement n° 99 ; adoption de l'amendement n° 122 insérant un
article additionnel après l'article 51 et de l'amendement n° 100 insérant un
article additionnel après l'article 43.
Amendement n° 102
(précédemment réservé)
de M. Gaillard, rapporteur pour
avis. - Adoption de l'amendement insérant une division additionnelle après
l'article 43 et son intitulé.
Article 44 (p. 50 )
Amendements n°s 81 et 82 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 44 (p. 51 )
Amendements n°s 83 de la commission et 126 de M. Bret. - MM. le rapporteur, Robert Bret, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement n° 83 insérant un article additionnel, l'amendement n° 126 devenant sans objet.
Article 39 (précédemment réservé) (p. 52 )
Amendements identiques n°s 75 de la commission et 125 de M. Bret. - MM. le
rapporteur, Robert Bret, Mme le ministre. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 45. - Adoption (p.
53
)
Article 46 (p.
54
)
Amendement n° 84 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 47 (p. 55 )
Amendement n° 85 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 48 (p. 56 )
Amendement n° 86 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article additionnel après l'article 48 (p. 57 )
Amendement n° 87 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles 49 et 50. - Adoption (p.
58
)
Article 51 (p.
59
)
Amendements n°s 109 de Mme Derycke et 88 de la commission. - Mme Dinah Derycke,
M. le rapporteur, Mme le ministre. - Retrait de l'amendement n° 109 ; adoption
de l'amendement n° 88.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 51 (p. 60 )
Amendements n°s 89 de la commission et 127 de M. Bret. - MM. le rapporteur, Robert Bret, Mme le ministre. - Retrait des deux amendements.
Articles 52 à 55. - Adoption (p.
61
)
Article 56 (p.
62
)
Amendement n° 90 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Articles additionnels après l'article 56 (p. 63 )
Amendement n° 91 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 92 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le
ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 93 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. -
Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 57. - Adoption (p.
64
)
Vote sur l'ensemble (p.
65
)
MM. Emmanuel Hamel, Robert Bret, Mme Dinah Derycke.
Adoption du projet de loi.
4.
Saisine du Conseil constitutionnel
(p.
66
).
5.
Transmission de propositions de loi
(p.
67
).
6.
Dépôt de rapports
(p.
68
).
7.
Ordre du jour
(p.
69
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
RAPPEL AU RÈGLEMENT
M. Marcel Deneux.
Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Deneux.
M. Marcel Deneux.
Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, la
commission des affaires économiques et du Plan du Sénat a constitué un groupe
de travail sur les industries agroalimentaires. Composé de trente-six
sénateurs, ce groupe de travail, que je préside, se propose, au moment où
intervient une nouvelle crise dans le secteur de l'alimentation, de dresser
l'état des lieux de ce secteur et d'en évaluer les atouts et les handicaps.
Dans la perspective des prochaines négociations internationales au sein de
l'Organisation mondiale du commerce et alors que se met en place la nouvelle
réforme de la politique agricole commune, le secteur de l'agroalimentaire,
situé à la charnière entre le monde de la production et celui de la
distribution, est confronté à de nouveaux défis d'une ampleur considérable tels
que, par exemple, la traçabilité des produits.
Au cours de nos premières auditions, nous avons pu constater certaines
carences quelque peu stupéfiantes. Passons sur le retard pris dans la mise en
place de l'Agence française pour la sécurité sanitaire des aliments, que notre
collègue Claude Huriet a stigmatisé la semaine dernière.
Face au silence dont fait preuve l'agence dans l'information sur la crise dite
« du poulet à la dioxine », nous sommes néanmoins en droit de nous demander si
le Gouvernement a bien pris la mesure de cet événement.
La parution de l'arrêté en date du 4 juin 1999, qui s'avère totalement
inapplicable, aux dires de la quasi-totalité des professionnels, en l'absence
d'une liste de critères hiérarchisés, nous inquiète au plus haut point : nous
avons l'impression de demeurer dans un schéma de concertation
interministérielle qui, sur ces dossiers sanitaires, a démontré ses lacunes.
Que diable fait cette agence ? Est-elle aux « abonnés absents » ? On pourrait
le penser ! Allons-nous demeurer immobiles au moment où notre industrie
agroalimentaire, premier secteur industriel français, risque de s'effondrer
?
Cette affaire revêt un aspect sanitaire et économique évident. Elle est aussi,
à l'aube des nouvelles négociations internationales dans le cadre de
l'Organisation mondiale du commerce, lourde de conséquences pour notre culture
alimentaire.
M. le président.
Acte vous est donné de ce rappel au règlement, monsieur Deneux.
3
VENTES VOLONTAIRES DE MEUBLES
AUX ENCHÈRES PUBLIQUES
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 555, 1997-1999)
portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques. [Rapport n° 366 (1998-1999), avis n°s 319 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez à examiner aujourd'hui, en
première lecture, le projet de loi portant réglementation des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques.
La vente aux enchères de meubles est une pratique très ancienne, qui a
toujours attiré de nombreux amateurs.
Au coeur de cette activité, un homme, le commissaire-priseur, juriste et homme
de l'art, est garant de la sécurité des opérations réalisées, notamment des
transferts de propriété.
La profession de commissaire-priseur, apparue au xvie siècle, appartient à
notre patrimoine juridique et culturel. Officiers publics et ministériels, les
commissaires-priseurs sont aujourd'hui au nombre de 456. Avec un chiffre
d'affaires, en 1998, de 8,5 milliards de francs, dont 3,6 milliards de francs
pour Paris, ces professionnels ont démontré leur compétence et leur dynamisme
pour l'adjudication d'environ six millions de lots chaque année.
C'est ce réseau important de professionnels qualifiés, allié à un patrimoine
d'une grande richesse, qui a d'ailleurs permis à la France d'être longtemps le
phare du marché de l'art.
Aujourd'hui, le contexte européen des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques est en évolution. Cette évolution a débuté par la directive
du 21 décembre 1988, qui a supprimé l'exigence de la nationalité française pour
exercer la profession de commissaire-priseur. Elle s'est poursuivie par la mise
en demeure adressée à la France par la Commission européenne, le 10 mars 1995,
sur la compatibilité de notre législation avec les articles 59 et suivants du
traité sur l'Union européenne. Cette mise en demeure a été suivie d'un avis
motivé, qui nous a été adressé le 10 août 1998. Ce contexte appelle, me
semble-t-il, une réforme de la réglementation française pour la mettre en
conformité avec les exigences communautaires.
Mais cette réforme a d'autres finalités importantes.
D'une part, cette réforme est nécessaire pour donner aux commissaires-priseurs
français les moyens juridiques et économiques de s'adapter à un marché devenu
de plus en plus concurrentiel. En effet, leur statut d'officier public et
ministériel, qui ne leur a permis ni de faire appel à des capitaux extérieurs
ni de pratiquer des techniques de vente utilisées par leurs homologues
étrangers, a constitué un véritable handicap qui a freiné leur
compétitivité.
D'autre part, cette réforme vise à redonner à la France la place qui a été la
sienne sur le marché de l'art jusqu'aux années cinquante : nous espérons, la
première place.
Tels sont les trois objectifs de la réforme des ventes volontaires aux
enchères de meubles qui vous est soumise aujourd'hui.
Vous le savez, en avril 1997, un précédent projet de loi, déposé sur le bureau
de l'Assemblée nationale, est devenu caduc du fait de la dissolution de
celle-ci.
Après examen de ce texte, j'ai souhaité le modifier sur deux points essentiels
: le dispositif d'indemnisation des commissaires-priseurs et l'organisation du
marché.
Le projet de loi déposé en mars 1997 prévoyait des modalités d'indemnisation
pour ces professionnels, qui faisaient ressortir un montant global d'environ
2,3 milliards de francs, lequel se révélait supérieur à la valeur vénale des
charges des commissaires-priseurs.
Ce mode de calcul ne pouvait, à l'évidence, être accepté par la Commission
européenne qui, par lettre du 12 juin 1997, a demandé des informations sur le
mode de calcul de l'indemnisation envisagée, afin d'en apprécier la
compatibilité avec les dispositions de l'article 92 du traité relatives aux
aides accordées par les Etats aux entreprises.
Compte tenu des difficultés que n'aurait pas manqué de susciter ce dispositif
et de la volonté du Gouvernement de retenir des dispositions économes des
deniers publics et respectueuses de l'égalité des citoyens devant la dépense
publique, j'ai souhaité que l'indemnisation soit revue sur des bases
nouvelles.
C'est sur le fondement d'une consultation du doyen Vedel d'octobre 1996 et
d'une étude réalisée à ma demande par un groupe de travail composé d'un
inspecteur général des finances, d'un conseiller à la Cour de cassation et d'un
président de chambre à la Cour des comptes, qu'un nouveau dispositif
d'indemnisation a été mis en place pour permettre une juste indemnisation du
préjudice réellement subi ; j'y reviendrai tout à l'heure.
Par ailleurs, il m'est apparu nécessaire, pour permettre aux opérateurs
français de rivaliser efficacement avec leurs concurrents, d'autoriser des
pratiques aujourd'hui prohibées en France, mais couramment pratiquées par les
grandes maisons internationales de ventes aux enchères ; c'est le cas de la
vente de gré à gré à l'issue d'enchères infructueuses, ainsi que de la faculté,
pour l'organisateur de la vente, de garantir un prix minimal d'adjudication et
de consentir au vendeur une avance sur le prix de la vente.
J'en viens à présent au contenu de la réforme que je vous propose
aujourd'hui.
L'activité de vente aux enchères se trouve au confluent de plusieurs
disciplines : le droit, l'économie et la culture.
Pour ces raisons, et je m'en réjouis, ce projet de loi a intéressé votre
commission des lois, votre commission des finances et votre commission des
affaires culturelles, et je souhaite rendre hommage au travail très approfondi
qu'ont accompli vos trois rapporteurs, qui ont permis d'enrichir la réflexion
et qui promet des débats fructueux.
Quelles sont les lignes de force du présent projet de loi ?
En premier lieu, il instaure la libre concurrence dans le secteur des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques, tout en entourant cette
ouverture de garanties pour protéger les différents acteurs du marché.
En deuxième lieu, il ouvre le marché français à la libre prestation de
services.
En troisième lieu, il maintient le régime actuel des ventes judiciaires.
En quatrième lieu, il prévoit un juste dispositif d'indemnisation des
commissaires-priseurs.
Enfin, il contient plusieurs mesures d'accompagnement indispensables au succès
de la réforme.
Sans entrer dans le détail des dispositions, ce que nous ferons lors de
l'examen des articles, je voudrais revenir sur ces différents axes.
Le premier, c'est la libre concurrence dans le secteur des ventes aux enchères
publiques avec les garanties nécessaires pour les acteurs du marché.
Cette réforme est indispensable au respect des principes énoncés dans le
traité sur l'Union européenne, relatif à la libre circulation des personnes,
mais notre réponse à la Commission européenne aurait pu être conçue de deux
façons.
Nous aurions pu nous orienter vers un libéralisme total et laisser les acteurs
de ces ventes dans un libre jeu concurrentiel. Le Gouvernement préfère proposer
une réforme fidèle dans son esprit à notre tradition juridique, qui assure la
sécurité à cette activité économique.
Je rappelle, en effet, que les ventes aux enchères publiques ont toujours été
réglementées de façon stricte, et la loi du 25 juin 1841, encore en vigueur,
précise dans son article 1er : « Nul ne peut faire des enchères publiques un
procédé habituel de l'exercice de son commerce. »
Plusieurs raisons militent en faveur de cette réglementation.
D'abord, le prix de l'objet adjugé, qui est le fruit de l'accord entre un
vendeur et un acheteur, est indépendant des règles de fixation des prix
habituellement admises sur le marché commercial. Cette activité, qui a une
incidence directe sur le commerce et sur l'ordre économique national, doit donc
être encadrée par des règles spécifiques.
Ensuite, cette technique de vente opère un transfert de propriété. Elle doit
donc être entourée de garanties pour la sécurité juridique tant des acheteurs
qui souhaitent acquérir un bien que des vendeurs qui sont parfois contraints de
vendre leurs biens. A l'heure actuelle, la réputation du marché français repose
en grande partie sur l'existence de ces garanties.
Enfin, je soulignerai que les autres pays ont, d'une manière générale, une
réglementation en matière de vente aux enchères et, quand il n'existe pas de
réglementation, les règles de la concurrence sont très contrôlées par les
opérateurs eux-mêmes ; ceux qui les enfreignent sont passibles de sanctions.
Quelles sont les règles qui ont été retenues dans le projet de loi pour ouvrir
le marché français tout en l'entourant de garanties ?
Premièrement, les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques seront
réalisées par des sociétés à forme commerciale.
D'abord, ces sociétés ne seront pas des sociétés commerciales car les ventes
aux enchères ne sont pas, et ne doivent pas devenir, je viens de le dire, une
activité commerciale. Ces sociétés de ventes auront un objet civil : le mandat
passé entre le vendeur et la société chargée de procéder à la vente. A ce
titre, ces sociétés ne pourront acheter pour revendre, comme le font les
commerçants.
Ensuite, ces sociétés de ventes seront agréées par un conseil des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques qui vérifiera qu'elles présentent
toutes les garanties propres à assurer une réelle protection des consommateurs.
Ce conseil des ventes, qui pourra prendre des sanctions disciplinaires en cas
de violation de la réglementation, sera une véritable autorité de régulation du
marché ouvert aux sociétés françaises comme étrangères, européennes et
internationales qui pourront librement s'installer sur notre territoire. Cette
régulation constituera une protection pour les consommateurs, mais également
pour les professionnels qui devront être protégés contre des pratiques
illégales anticoncurrentielles.
Enfin, ces sociétés devront comprendre, parmi leurs dirigeants, associés ou
salariés, une personne qui remplit les conditions requises pour procéder aux
adjudications et qui, seule, pourra réaliser les ventes. La sécurité juridique
du transfert de propriété impose l'intervention d'un homme de l'art qui a des
compétences juridiques et artistiques.
Deuxièmement, pour permettre aux professionnels français de rivaliser
efficacement avec leurs homologues étrangers, le projet de loi autorise, comme
je l'ai indiqué tout à l'heure, certaines pratiques. Cependant, celles-ci sont
encadrées pour éviter qu'elles ne soient détournées de leur objectif et pour
mettre nos professionnels à l'abri d'opérations qui pourraient nuire à la santé
économique de leur entreprise.
Je rappelle, enfin, que les ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques réalisées à titre accessoire par les notaires et les huissiers de
justice continueront à être faites par ces professionnels au sein de leurs
études.
Le deuxième axe de la réforme, c'est l'ouverture du marché français à la libre
prestation de services des ressortissants des autres Etats membres de la
Communauté européenne.
Le projet de loi définit avec précision les conditions dans lesquelles les
ressortissants communautaires pourront accomplir, à titre occasionnel,
l'activité de vente volontaire en France.
Si ces règles sont enfreintes, les ressortissants communautaires seront
passibles de sanctions pouvant aller jusqu'à l'interdiction de faire des ventes
sur le territoire français.
Le troisième axe, c'est le maintien du régime juridique actuel pour ce qui
concerne les ventes judiciaires.
Ces ventes, ainsi que les estimations qui leur correspondent, resteront du
monopole des commissaires-priseurs, sans préjudice, bien entendu, de la
compétence reconnue en la matière aux notaires et aux huissiers de justice.
La nature de ces ventes ainsi que la qualité des vendeurs qui sont concernés -
mineurs, majeurs protégés, héritiers, personnes faisant l'objet d'une saisie ou
d'une procédure de redressement judiciaire - justifient que cette activité
reste de la compétence d'officiers publics et ministériels et demeure
strictement encadrée et tarifée.
Le quatrième axe de la réforme consiste en un juste dispositif d'indemnisation
des commissaires-priseurs.
Comme je l'ai expliqué voilà quelques instants, j'ai souhaité que le
dispositif d'indemnisation retenu soit incontestable juridiquement, justifié
sur le plan économique et exempt de toute critique eu égard aux dispositions du
traité sur l'Union européenne relatives aux aides d'Etat.
Je souhaiterais m'attarder quelques instants sur les deux aspects essentiels
de l'indemnisation.
J'examinerai d'abord son fondement juridique.
Il me paraît important de rappeler les principes généraux que le code civil et
la jurisprudence ont dégagés en ce qui concerne le droit de propriété, et plus
particulièrement le droit de présentation.
La propriété apparaît comme le droit fondamental qu'une personne exerce sur un
bien.
Définie comme le droit en vertu duquel une chose se trouve soumise d'une façon
perpétuelle, absolue et exclusive à l'action et à la volonté d'une personne, «
la propriété est, aux termes de l'article 544 du code civil, le droit de jouir
et disposer des choses de la manière la plus absolue pourvu qu'on n'en fasse
pas un usage prohibé par les lois et par les règlements ».
Quant au droit de présentation, qui résulte de l'article 91 de la loi de
finances du 28 avril 1816, il s'analyse, aux termes de la jurisprudence de la
Cour de cassation, comme un droit personnel et patrimonial dans la mesure où,
en contrepartie de la présentation de son successeur au garde des sceaux, le
titulaire de la charge reçoit la « finance » de l'office, soit la valeur
financière de la charge telle qu'elle est arrêtée dans le traité de cession.
Mais la haute juridiction a cependant précisé que ce traité de cession est
soumis au contrôle de la Chancellerie, qui reste libre de donner ou de refuser
son agrément à cette convention.
Ainsi, le droit de présentation n'est pas un droit de propriété, lequel se
caractérise par la libre disposition de ce qui fait son objet.
Sa cession et son aliénation sont subordonnées à l'agrément du garde des
sceaux et cette condition suffit à ôter le caractère purement volontaire de
l'acte. L'inverse reviendrait à placer la mission de service public,
souverainement concédée par l'Etat, dans le domaine de la libre disposition
privée.
La conséquence essentielle de ce raisonnement est que l'on ne peut parler, en
l'espèce, d'expropriation d'un droit de propriété garanti par l'article XVII de
la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
En effet, d'une part, nous venons de le voir, le droit de présentation n'est
pas un droit de propriété et, d'autre part, le propriétaire d'un bien exproprié
en perd à la fois la valeur vénale et les revenus qu'il en tirait ou pouvait en
tirer : il perd purement et simplement son bien. Or, les commissaires-priseurs
pourront poursuivre leur activité, certes sous une autre forme juridique, mais
ils pourront, s'ils le décident, continuer, comme par le passé, à remplir
l'intégralité des fonctions qui étaient les leurs.
Ce débat a déjà eu lieu, comme vous le rappeliez, monsieur Dejoie, lors de la
réforme qui a supprimé les avoués auprès des tribunaux de grande instance, en
1971.
Lors de la discussion de cette réforme devant la Haute Assemblée, le garde des
sceaux de l'époque avait clairement écarté la thèse de l'expropriation, et pour
les mêmes raisons que celles que j'ai évoquées voilà un instant.
Je partage l'analyse du doyen Vedel et les conclusions du rapport de MM.
Cailleteau, Favard et Renard, qui vont dans le même sens et soutiennent que le
fondement juridique de l'indemnisation se trouve dans l'atteinte au principe
d'égalité devant les charges publiques, lequel découle de l'article XIII de la
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et a été constamment réaffirmé
par le Conseil constitutionnel.
S'agissant des commissaires-priseurs, il faut admettre que ces professionnels
ont acquis une charge pour exercer une activité monopolistique. Du fait de
l'ouverture du marché, le monopole disparaîtra en ce qui concerne les ventes
volontaires et, de ce fait, ils subiront, à l'évidence, un préjudice.
Celui-ci peut être considéré comme spécial, puisqu'il ne concerne qu'une
catégorie restreinte et bien spécifiée de personnes, anormal, puisqu'il dépasse
manifestement les aléas normaux de la vie économique, et, enfin, certain,
puisque la dépréciation du droit de présentation intervient dès l'entrée en
vigueur de la loi.
Dès lors, il faut indemniser ce préjudice.
Après le fondement juridique, j'évoquerai le montant de l'indemnisation.
L'indemnité sera déterminée sur le fondement de critères nouveaux qui
reflètent, je crois, une juste évaluation comptable des offices.
Lors des précédentes réformes, le critère retenu était celui des produits
demi-nets, c'est-à-dire le produit brut diminué du loyer, des salaires et
autres charges de structure.
Cette référence, qui conduisait à une appréciation subjective de la valeur de
l'office directement induite par les choix de gestion propres à chaque
commissaire-priseur, a été abandonnée au profit de critères économiques et
financiers plus fiables, qui figurent dans les déclarations fiscales. En outre,
il est tenu compte de la spécificité des offices parisiens.
Du fait du maintien du monopole sur l'activité de vente judiciaire, d'une
part, et de la continuation de l'activité de vente volontaire dans le cadre des
sociétés de vente, d'autre part, le préjudice subi par les
commissaires-priseurs en raison de la dépréciation du droit de présentation est
estimé à 50 % de la valeur des offices.
Sur ces bases, le montant de l'indemnisation s'élève globalement à environ 450
millions de francs.
Dernière précision, qui me paraît importante, l'indemnisation sera fiscalement
taxée comme une plus-value professionnelle, ce qui constitue un régime très
favorable.
Enfin, cinquième axe de la réforme, le projet de loi prévoit des mesures
d'accompagnement.
Premièrement, le projet de loi prévoit la création d'experts agréés par le
conseil des ventes : ces experts, qui devront justifier d'une compétence et
d'une expérience particulière, interviendront dans les ventes volontaires pour
apporter toute sécurité aux consommateurs et aux professionnels.
Toutefois, le projet de loi n'a pas voulu créer de monopole au profit de ces
experts. La création d'un monopole eut d'ailleurs été paradoxale dans un texte
dont la finalité est précisément de supprimer ceux qui existent.
Une autre garantie a été instituée au profit des consommateurs : l'existence
d'une solidarité entre l'expert et le professionnel qui aura organisé la vente.
Cette solidarité permettra d'assurer une protection accrue en cas d'actions en
responsabilité résultant d'un dommage.
Deuxièmement, le projet de loi aborde le régime de la responsabilité des
professionnels.
Il m'a paru utile, dans un souci de simplification, d'harmoniser les règles du
code civil et de retenir la durée de dix ans dans les deux cas. Cette durée,
dont le point de départ a été fixé au fait générateur du dommage, me paraît
suffisante pour assurer la protection des consommateurs.
Troisièmement, le projet de loi contient des mesures de reconversion
professionnelle pour les commissaires-priseurs qui souhaiteraient quitter la
profession.
Quatrièmement, enfin, le projet de loi prévoit un dispositif particulier en
faveur des commissaires-priseurs âgés de plus de soixante-cinq ans au jour de
l'entrée en vigueur de la loi et qui ne trouvent pas à céder leur office.
Par ailleurs, la commission des finances du Sénat a proposé un certain nombre
d'amendements de nature fiscale qui visent à assurer la neutralité de la
transformation des offices en sociétés à forme commerciale. Sans entrer dans
les détails de ces mesures, je souhaite, comme vous, aller dans le sens de la
neutralité ; mais, techniquement, je ne suis pas favorable aux amendements tels
qu'ils ont été adoptés par la commission des finances.
Le Gouvernement a évidemment conscience que les objectifs de cette réforme ne
seront véritablement atteints que si, parallèlement, des mesures sont prises en
faveur du développement du marché des oeuvres d'art, notamment pour réduire les
distorsions de concurrence qui existent à l'heure actuelle. Ces mesures
pourront être prises à partir des recommandations formulées dans le rapport
remis à la ministre de la culture et de la communication en avril 1998 par M.
André Chandernagor, président de l'Observatoire des mouvements internationaux
d'oeuvres d'art.
Ces mesures concernent, tout d'abord, la TVA à l'importation sur les objets
d'art - une action en faveur d'une réduction du taux dans l'ensemble de la
Communauté européenne, voire d'une exonération des objets d'art de toute TVA à
l'importation, sera entreprise - ensuite, la négociation du projet de directive
européenne sur le droit de suite visant à instaurer un taux dégressif, qui
devra rapidement progresser, et, enfin, la taxe sur les plus-values : un
alignement du taux de la taxe perçue pour les ventes effectuées par les
négociants d'art sur le taux de 4,5 % applicable aux ventes publiques sera
recherché.
Le projet de loi dont le Sénat va débattre constitue la pierre angulaire de la
modernisation du marché français des ventes de meubles aux enchères
publiques.
Cette modernisation donnera à nos professionnels l'essor nécessaire pour
accroître leur compétitivité dans un environnement international, et à la
France la place qui lui revient naturellement, me semble-t-il, au regard de son
important patrimoine culturel et artistique.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je regrette vivement
de ne pouvoir rester parmi vous pour la suite des débats sur le projet de loi
dont je viens d'exposer les grandes lignes.
J'avais pris toutes mes dispositions pour être présente le 4 mai dernier ;
mais, ce matin, j'ai des engagements avec le Premier ministre et, cet
après-midi, je dois participer au congrès de l'Union syndicale des greffiers :
ce rendez-vous ayant été fixé depuis plus de six mois, je ne peux évidemment
pas m'y dérober.
J'ai toutefois tenu à ce que la date d'aujourd'hui soit maintenue, tout
d'abord en raison de l'intérêt que je porte à la réforme qui est urgente et que
les commissaires-priseurs attendent. Par ailleurs, si cette réforme n'est pas
engagée, la Commission de Bruxelles introduira, comme elle nous l'a fait
savoir, une action en manquement contre la France. Ce texte doit être mis en
oeuvre afin que les commissaires-priseurs soient assurés du cadre dans lequel
ils vont pouvoir exercer et développer leur activité.
Je suis heureuse que Catherine Trautmann, évidemment très intéressée par ce
projet de loi qui concerne plusieurs ministres, ait accepté de représenter le
Gouvernement, et je l'en remercie.
Je vous renouvelle donc mes regrets. Je ne doute pas que les débats seront
riches et constructifs, comme ils le sont d'ailleurs habituellement au Sénat,
et qu'ils nous permettront de faire progresser cette réforme qui est voulue, me
semble-t-il, tant par le Gouvernement que par le Parlement.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen. - M. Lucien Lanier applaudit
également.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, madame la ministre, mes chers collègues, tout finit par arriver ! La
preuve en est que, après de multiples réflexions, discussions, concertations,
sûrement fructueuses, nous en sommes aujourd'hui à la premier lecture du projet
de loi portant réforme tant de la profession de commissaire-priseur que du
régime des ventes aux enchères publiques.
Tout à l'heure, Mme la ministre a développé les raisons justifiant cette
réforme. Il en est au moins une sur laquelle on peut s'interroger : je veux
parler des obligations dites européennes. En effet, aux termes de l'article 55
du traité de Rome, sont exceptées de l'application des dispositions relatives
au droit d'établissement les activités participant dans un Etat, même à titre
occasionnel, à l'exercice de l'autorité publique.
Que je sache, les commissaires-priseurs, officiers ministériels, officiers
publics sont détenteurs d'une parcelle de délégation de l'Etat quant à
l'authenticité. Par conséquent, une discussion aurait peut-être permis d'éviter
cette réforme. Tel n'est pas le parti qui a été retenu jusqu'à maintenant, une
sorte d'accord étant finalement intervenu sur le principe de la réforme. Je
tenais néanmoins à rappeler l'existence de cette disposition toujours en
vigueur du traité de Rome.
Mme la ministre a présenté le statut des commissaires-priseurs, hérité de
l'histoire. Les membres de cette profession exercent un monopole dans les
villes où ils sont installés ; de plus, accessoirement, les huissiers de
justice et les notaires jouent un rôle dans ce domaine. Le statut d'officier
ministériel des commissaires-priseurs a été fixé par les dispositions de
l'ordonnance du 26 juin 1816 et de l'ordonnance du 2 novembre 1945. Les
commissaires-priseurs sont nommés par le garde des sceaux à tel ou tel endroit
en qualité de titulaires de leur office, sur la présentation de leur
prédécesseur. Ils sont propriétaires de ce droit de présentation. Ils doivent
appartenir à une compagnie, doivent démontrer leur qualification
professionnelle par un diplôme approprié et assument une responsabilité
professionnelle.
Le système en place - ne l'oublions quand même pas - était non une protection
de telle ou telle profession, mais un élément de sécurité du consommateur. A
l'évidence, c'est une notion qu'il conviendra de conserver et de garder
présente à l'esprit puisque ces garanties qui protègent le consommateur sont
tout à fait essentielles.
Le régime juridique français des ventes aux enchères publiques, caractérisé
par le recours obligatoire à un officier ministériel spécialisé offrant des
garanties très étendues à l'acheteur, constitue, en Europe, une
particularité.
C'est peut-être aussi l'une des raisons pour lesquelles il n'a pas été fait
beaucoup de difficultés pour se conformer aux exigences européennes et pour
mettre sur pied cette réforme.
Je rappellerai très brièvement quelques chiffres : on dénombre actuellement
456 commissaires-priseurs, 9 compagnies régionales et 328 offices, certains
commissaires-priseurs exerçant à titre individuel, et d'autres sous forme de
société civile professionnelle. Au sein de cet ensemble, la Compagnie des
commissaires-priseurs de Paris regroupe 111 commissaires-priseurs et 70
offices.
J'évoquerai également l'organisation très particulière, pas forcément
simplificatrice - reconnaissons-le - des ventes effectuées au sein de l'Hôtel
Drouot.
Sans revenir sur les chiffres de ventes réalisées annuellement dans notre
pays, je dirai simplement que,
grosso modo,
80 % des adjudications
concernent des ventes volontaires, 20 % des adjudications concernant des ventes
judiciaires, ces pourcentages globaux pouvant subir quelques variations suivant
que l'on se trouve à Paris, en province ou dans tel ou tel office.
Compte tenu de la concurrence internationale à laquelle cette activité est
confrontée sur le marché de l'art, la place de Paris a vu son volume et son
importance diminuer considérablement. Si les raisons invoquées sur un plan très
général ne sont sans doute pas toutes étrangères à ce déclin, il faut tout de
même se garder d'oublier que les distorsions fiscales par rapport aux autres
pays constituent l'origine essentielle de ce recul. Je ne suis pas seul à
penser que, à cet égard, la qualification professionnelle de nos
commissaires-priseurs n'est nullement en cause.
Le projet de loi vise à supprimer le monopole, à mieux organiser et à
libéraliser la profession de commissaire-priseur.
Le texte qui nous est soumis tend à imposer la constitution de sociétés de
forme commerciale, toute forme de société, y compris la société unipersonnelle,
étant autorisée.
Ces sociétés de ventes seront soumises à un agrément du Conseil des ventes,
agrément pour l'obtention duquel un certain nombre de conditions sont requises.
Parmi ces dernières figure la condition de qualification professionnelle de
celui que l'on appelle « le teneur de marteau », condition essentielle aux yeux
de toutes les personnes que j'ai auditionnées et à laquelle je me range
facilement. C'est une garantie non seulement pour le marché, mais aussi pour le
consommateur, et elle doit bien sûr être maintenue.
Le projet de loi vise à légaliser un certain nombre de pratiques qui, jusqu'à
ce jour, sont interdites dans notre pays : les ventes de gré à gré, les prix
garantis, les avances, etc. En outre, et c'est important, il tend à organiser
sinon complètement, du moins partiellement, le statut d'expert agréé.
Le Conseil des ventes sera mis en place. Le marché sera ouvert à la
concurrence européenne : les ressortissants européens pourront, dans le cadre
de la libre prestation de services, voire du libre établissement, s'installer
ou exercer en France. Par voie de conséquence, le monopole des
commissaires-priseurs en matière de ventes volontaires sera, bien sûr,
supprimé, étant rappelé, comme Mme la ministre l'a dit très précisément, que
rien ne sera changé aux règles actuelles des ventes judiciaires.
J'en viens aux propositions de la commission des lois, au nom de laquelle je
m'exprime.
Je voudrais préciser d'emblée que ces propositions ont été établies en étroite
concertation avec M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires
culturelles, et avec M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis de la commission
des finances. Cette concertation transparaîtra d'ailleurs lors de la discussion
des amendements, dont la plupart sont communs aux trois commissions.
Le premier axe des propositions concerne le maintien des garanties à l'égard
des consommateurs. Je citerai à cet égard, par exemple, l'interdiction pour les
sociétés de vente d'acheter ou de vendre pour leur propre compte, ou la
condition de qualification, c'est-à-dire le diplôme, point sur lequel je me
suis déjà largement exprimé.
Le deuxième axe, commun avec les commissions saisies pour avis, tend à
permettre la plus grande libéralisation et la plus grande simplification
possibles dans l'organisation des ventes aux enchères publiques. Il s'agit
ainsi de donner aux nouvelles sociétés qui seront mises en place les meilleurs
moyens - du moins l'espérons-nous - d'affronter la concurrence internationale
et européenne.
A ce sujet, pour faciliter le recours aux nouvelles modalités de vente, nous
souhaitons une très grande libéralisation des garanties des prix et des avances
grâce à la suppression des mécanismes assez lourds, et assez contraignants, que
les auteurs du projet de loi avaient voulu mettre en place et qui n'auraient
pas permis d'atteindre l'objectif recherché.
La commission prévoit également l'allongement à quinze jours du délai pendant
lequel seront autorisées les ventes de gré à gré après la vente publique en
l'absence d'enchères ou en cas de retrait de la vente. Elle propose aussi
d'assouplir les dispositions concernant les experts.
Toujours dans un but de libéralisation, elle a considéré que, si le conseil
des ventes ne devait pas être entre les mains des seuls professionnels, il
devait cependant être composé majoritairement de professionnels, car on ne peut
à la fois parler de libéralisation et contraindre l'organisation des ventes en
limitant trop la place des professionnels dans ce conseil. Quoi qu'il en soit,
nous reviendrons sur les modalités de sa composition, je ne m'y attarde pas en
cet instant.
Par ailleurs, madame le garde des sceaux, il est un point de désaccord entre
nous, que je vous demande de me pardonner, au sujet du fondement même de
l'indemnisation. Il ne s'agit pas ici d'inégalité devant les charges publiques
- je suis en désaccord complet sur ce point avec un certain nombre de
professeurs et en accord complet avec d'autres, qui sont en plus grand nombre -
mais de l'application d'un principe constitutionnel : on prive quelqu'un de la
propriété de quelque chose ; cela relève donc obligatoirement et
constitutionnellement de l'expropriation, et pas d'autre chose.
Certes, on pourrait nous opposer que le droit de propriété, s'agissant du
droit de présentation, n'est pas un droit de propriété comme les autres parce
qu'il n'y a pas totale liberté en la matière. Mais, que je sache, tous les
droits de propriété, quels qu'ils soient - immobiliers, mobiliers ou autres -
font l'objet de restrictions ! Ce n'est donc pas parce que ce droit de
propriété général fait l'objet d'une restriction légale qu'il n'existe plus,
c'est un véritable droit de propriété.
Nous sommes donc bien ici dans le domaine de l'expropriation, qui prévoit une
juste indemnité, certes non préalable, dans le cas précis, car cela semblerait
un peu difficile, et j'insiste beaucoup sur ce point, après y avoir longuement
réfléchi et après en avoir parlé avec les rapporteurs des commissions saisies
pour avis.
Cette notion est essentielle pour parvenir à la juste indemnisation. Et je dis
bien « juste », parce qu'il faut qu'elle ne soit ni exagérée ni surtout
insuffisante, parce que si l'Etat a le droit de supprimer quelque chose à
quelqu'un dans l'intérêt général, il ne doit pas pour autant léser qui que ce
soit. Il faut donc prévoir un juste équilibre entre ce que l'Etat peut
souhaiter judicieusement et ce que les particuliers peuvent supporter.
C'est d'ailleurs pourquoi il a semblé aux rapporteurs de ce texte qu'il n'y
avait pas lieu d'indemniser totalement la valeur vénale d'un office de
commissaire-priseur, pour la juste raison - et le passé nous le rappelle - que
ces professionnels pourront continuer à exercer leur profession ; dans les
conditions de la nouvelle loi, certes, mais ils pourront continuer à l'exercer.
Un certain nombre d'éléments de leur activité pourront être cédés
ultérieurement, lorsque telle sera leur volonté ou lorsqu'ils prendront leur
retraite, mais il n'en demeure pas moins, dans ces conditions, qu'il y a lieu,
judicieusement, légalement et justement, d'appliquer un abattement sur la
valeur vénale générale de l'office.
Le projet de loi, avec un incontestable arbitraire, prévoit que cet abattement
sera de 50 %. Pourquoi 50 % ? Nous n'en savons rien, et nous proposerons donc,
en accord avec les commissions saisies pour avis, de mettre en place un autre
système qui, tout en respectant la philosophie du projet de loi, permettrait
une évaluation au cas par cas du préjudice par la commission d'indemnisation,
commission dont je n'ai pas encore parlé mais que nous évoquerons longuement au
cours des débats.
Par ailleurs, à partir du moment où l'on prend comme fondement de
l'expropriation l'indemnisation, c'est à l'évidence une juridiction de l'ordre
judiciaire qui doit être saisie, et non point la Cour des comptes ou le Conseil
d'Etat, tout respect gardé pour ces grandes institutions. En effet, en matière
d'expropriation, c'est toujours une juridiction de l'ordre judiciaire qui est
compétente, et il ne semble pas y avoir de raison pour qu'il en aille
différemment dans le cas qui nous occupe aujourd'hui.
Il est une autre disposition à laquelle nous sommes assez attachés et qui
concerne l'extension du principe de l'indemnisation aux salariés des offices de
commissaires-priseurs qui, en conséquence directe de la mise en application de
la nouvelle loi, pourraient se trouver licenciés.
Enfin, comme le relevait Mme le garde des sceaux tout à l'heure, toute une
série d'amendements d'ordre fiscal, auxquels le rapporteur au fond que je suis
souscrit, ont été rédigés par la commission des finances. Mais je ne veux pas
dévoiler d'ores et déjà les idées de M. le rapporteur pour avis ni empiéter sur
ses prérogatives, sinon pour constater que Mme le garde des sceaux a elle-même
entrouvert une porte. En effet, il faudra bien un jour, si l'on veut sinon
mettre les professionnels français au même niveau que les autres, du moins les
doter des mêmes armes que celles dont disposent les autres professionnels des
autres pays européens ou du reste du monde, que les règles fiscales soient
harmonisées. A défaut, nos lois, si belles soient-elles, auront un effet
limité.
Au-delà de la neutralité fiscale totale à laquelle je souhaite que nous
parvenions dans le cadre du présent projet de loi, j'espère donc que, plus
tard, nous tendrons à l'harmonisation des systèmes fiscaux des différents pays
européens. C'est nécessaire dans de nombreux domaines, et spécialement dans
celui des ventes aux enchères publiques, que ce soit sur le marché de l'art ou
sur tout autre marché : personne, par exemple, n'a cité le marché des
automobiles, où les ventes aux enchères publiques représentent pourtant dans
notre pays un volume assez considérable.
Sous le bénéfice de ces différentes observations, que j'ai eu l'honneur de
vous présenter au nom de la commission des lois, je vous demanderai, mes chers
collègues, de bien vouloir adopter le présent projet de loi une fois que nous
aurons discuté, accepté ou refusé les différents amendements qui vous seront
soumis.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Monsieur
le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, la commission
des affaires culturelles s'est saisie pour avis d'un certain nombre d'articles
de ce projet de loi, et c'était légitime car, on le sait, le marché de l'art
représente environ - vous l'avez d'ailleurs rappelé, madame le garde des sceaux
- 60 % du chiffre d'affaires des ventes publiques.
Nous avons travaillé, je le redis après M. le rapporteur de la commission des
lois, en bonne intelligence, et nombre de propositions qui seront faites tout à
l'heure sont conjointes, ce qui facilitera sans doute le déroulement des débats
et aura l'avantage, madame le garde des sceaux, de montrer la cohérence du
travail du Sénat.
Je ne veux pas revenir sur les atermoiements des gouvernements successifs sur
ce sujet, M. le rapporteur y a fait allusion tout à l'heure. Je rappellerai
simplement que la réforme qui nous est proposée aujourd'hui se distingue sur
certains points de celle qu'avait proposée le précédent gouvernement. Néanmois,
elle repose sur les mêmes principes : l'ouverture du marché et le maintien
d'une réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques
dans le souci de protéger l'acheteur et d'assurer une transparence suffisante
du marché.
Je ne reviens pas sur la double nécessité à laquelle cette réforme répond.
S'agissant de la nécessité juridique, j'ai bien relevé tout à l'heure le
propos de M. le rapporteur : l'article 55 du traité de Rome aurait peut-être
permis d'échapper à cette contrainte juridique.
M. René-Georges Laurin.
C'est tout à fait exact !
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Quoi qu'il en soit, je me place dans l'attitude
juridique qui est celle de ce gouvernement et du gouvernement précédent, en
faisant simplement remarquer que la situation en vigueur dans notre pays
devenait de plus en plus contraire à la jurisprudence d'inspiration très
libérale élaborée par la Cour de justice des Communautés européennes pour
l'application du principe de la libre prestation de services. On peut peut-être
le regretter, mais on est obligé d'en tenir compte.
Le présent projet de loi procède à une profonde modification de l'organisation
de la profession de commissaire-priseur afin de la mettre en conformité avec
les dispositions du droit européen.
Comme le précédent projet de loi, il retient le principe de l'ouverture du
marché en confiant la réalisation des ventes volontaires à des sociétés à forme
commerciale et prévoit des dispositions destinées à garantir l'exercice de la
liberté de prestations de services.
Ces dispositions répondent peut-être à une nécessité juridique, mais elles
répondent aussi - c'est fondamental - à la nécessité d'adapter le secteur des
ventes publiques aux évolutions qui ont affecté, j'y insiste, le marché de
l'art : voilà longtemps, hélas ! que la France a perdu la suprématie dont elle
jouissait dans ce domaine. J'ai relevé tout à l'heure dans vos propos, madame
le garde des sceaux, l'espoir qu'elle la retrouverait. Nous occupions jadis la
première place ; je souhaite avec vous que nous y revenions, mais je n'ose
encore trop y croire.
Le marché de l'art présente aujourd'hui en France nombre de faiblesses
structurelles, au rang desquels figure l'inadaptation de l'organisation
professionnelle des ventes publiques.
Comme je le soulignais tout à l'heure, le marché de l'art représente environ
60 % du chiffre d'affaires des ventes publiques. Le montant de ces ventes
avoisinait, en 1997, 8,5 milliards de francs, dont 3,8 milliards de francs pour
Drouot.
Sans vouloir abuser des chiffres, je rappellerai seulement que le montant
total des ventes s'élevait, en 1997, pour Christie's et Sotheby's,
respectivement à 12,2 milliards et 11 milliards de francs ; ces chiffres se
passent, je crois, de commentaire !
Les nouvelles caractéristiques du marché de l'art, qui est désormais devenu un
marché international, imposent à ses acteurs d'être présents dans le monde
entier, et donc de disposer d'une dimension financière suffisante pour
développer les structures commerciales nécessaires et attirer les vendeurs.
La réglementation française, en confiant la réalisation des ventes publiques à
des officiers publics exerçant sous forme libérale, a limité, de fait, leurs
possibilités de recourir à des capitaux extérieurs et a inconstestablement
entravé une évolution qu'ont pu opérer les sociétés étrangères, favorisées par
leur statut commercial.
Par ailleurs, en dépit de mesures salutaires, comme la suppression de la
bourse commune de résidence ou l'instauration, en 1993, d'un tarif linéaire sur
l'acheteur, la réglementation des ventes publiques elle-même s'est révélée
pénalisante.
L'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des commissaires-priseurs
interdit notamment à ces professionnels de se livrer au commerce et de servir
d'intermédiaires pour des ventes amiables. De telles dispositions leur ont donc
interdit de recourir à des pratiques commerciales qui ont contribué, de manière
déterminante, au succès des grandes sociétés de ventes étrangères.
C'est aujourd'hui un constat unanimement partagé : confrontée à l'inéluctable
ouverture du marché, la profession apparaît trop dispersée et, finalement,
faiblement organisée face à des concurrents qui sont, en fait, des entreprises
multinationales.
Les retards pris dans l'ouverture du marché ont encore accentué ces handicaps
structurels. En effet, les vendeurs français comme étrangers ont été incités à
recourir aux bons offices des sociétés étrangères pour obtenir le meilleur prix
de leurs biens, encouragés en cela par l'abrogation de la loi douanière du 23
juin 1941. Or, comme le prouvent les exemples de Londres ou de New-York, le
dynamisme d'un marché repose, pour une large part, sur sa capacité à attirer
les objets.
Cette situation est d'autant plus dommageable que la vitalité du marché de
l'art apparaît comme une condition nécessaire pour accompagner la politique de
soutien à la création contemporaine conduite traditionnellement dans notre
pays, mais aussi pour assurer la sauvegarde et la protection du patrimoine
français. En effet, les ventes les plus prestigieuses ayant lieu plus
fréquemment à l'étranger qu'en France, des objets qui faisaient partie de notre
patrimoine culturel et historique ont quitté le territoire national sans grand
espoir de retour, et l'Etat n'a pu exercer son droit de préemption, on le sait,
que sur un volume très réduit d'oeuvres.
A ce titre, la commission des affaires culturelles n'a pu que se féliciter de
cette réforme.
Je ne reviens pas sur le détail des dispositions du texte ; Mme la ministre et
M. le rapporteur de la commission saisie au fond les ont présentées.
Je relève simplement, en premier lieu, que le projet de loi modifie
profondément les modalités d'exercice de l'activité des professionnels des
ventes publiques volontaires.
Sur ce point, le projet, s'il procède à une évolution nécessaire, n'ira sans
doute pas sans poser des difficultés d'adaptation aux commissaires-priseurs
spécialisés dans le secteur le plus concurrentiel, celui des oeuvres d'art. En
effet, en dépit du délai transitoire de deux ans prévu par le texte, il leur
faudra, dès la loi et ses décrets d'application publiés, modifier leurs
structures d'exercice, ce qui sera à la fois complexe et coûteux, alors que les
filiales de leurs concurrents étrangers seront, elles, très rapidement
opérationnelles. Il y a là un enjeu d'une extrême importance.
Le projet de loi ne pose aucune règle concernant la forme sociale de ces
sociétés ou encore le montant de leurs fonds propres. Bien entendu, ces
sociétés seront libres de fixer leurs tarifs.
Cependant, le projet de loi conserve nombre des aspects de la réglementation
actuelle.
Il ne remet pas en cause la spécificité française, qui déniait aux
commissaires-priseurs la qualité de commerçant : vous l'avez rappelé tout à
l'heure, madame la ministre, les sociétés de ventes auront une forme
commerciale mais un objet civil.
Par ailleurs, leur activité demeure réglementée ; à cet égard, le titre même
du projet de loi est assez évocateur.
Obligation est également faite aussi aux sociétés de compter parmi leurs
dirigeants, leurs associés ou leurs salariés - vous l'avez rappelé - au moins
une personne remplissant les conditions requises pour exercer l'activité de
commissaire-priseur.
Cette disposition, évidemment plus proche des traditions juridiques françaises
ou allemandes que de celles des pays anglo-saxons, est inspirée par le souci
d'assurer la sécurité des ventes, qu'a évoquée tout à l'heure M. le rapporteur
de la commission des lois.
Ce souci de garantir la fiabilité de notre marché est apparu légitime à notre
commission. En effet - j'insiste sur ce point - nous espérons que la sécurité
dont bénéficieront les transactions constituera un atout concurrentiel non
négligeable pour les futures sociétés de ventes françaises face à des maisons
anglos-saxonnes concurrentes qui n'offriront en la matière que des garanties de
nature contractuelle.
C'est ce même souci qui a inspiré le chapitre V du projet de loi, consacré aux
experts.
Aujourd'hui, l'exercice de cette profession est libre. Si cette situation ne
soulève guère de difficultés pour le public averti et initié aux subtilités du
marché de l'art, elle n'est pas, en revanche, de nature à apporter les mêmes
garanties à l'ensemble des consommateurs, parfois moins avertis.
Le projet de loi tend à consacrer l'existence de deux catégories d'experts :
les uns agréés, les autres non. Nous nous sommes rangés à cette possibilité de
faire appel à des experts non agréés. En effet, il nous a semblé que, dans le
cas de ventes très spécialisées, la nécessité de recourir à un expert très «
pointu », à un non-professionnel ou encore à un marchand était évidente et que
l'obligation de recourir à un expert agréé aurait été une contrainte tout à
fait insupportable.
Nous proposerons des amendements visant à préciser le dispositif proposé, mais
aussi - M. le rapporteur l'a indiqué tout à l'heure - à renforcer la
représentation des experts au sein du conseil des ventes volontaires de meubles
aux enchères publiques, qui constitue le nouvel organe de régulation.
En effet, telle qu'elle était prévue, la composition de ce conseil n'était,
semble-t-il, pas tout à fait conforme à votre intention profonde de libéraliser
l'organisation des ventes publiques, madame le ministre. Elle ne nous
paraissait pas davantage répondre à la vocation de cette institution et encore
moins être de nature à garantir son indépendance.
Les amendements que nous proposerons sur ce point sont donc, à nos yeux, tout
à faits essentiels.
J'en terminerai en évoquant un amendement que j'aurai l'honneur de défendre au
nom de la commission des affaires culturelles et qui concerne les ventes sur
Internet.
En effet, ces ventes, aujourd'hui, se multiplient ; les sites de vente
connaissent un véritable succès ; leurs résultats sont considérables.
Par ailleurs, les sociétés de ventes étrangères se tournent de plus en plus
résolument vers ce procédé qui permet de toucher au moindre coût un public très
large.
Il nous a donc paru nécessaire de ne pas priver les commissaires-priseurs de
cette possibilité. C'est là l'objet essentiel de l'amendement que je viens
d'évoquer.
Telles sont, madame la ministre, les orientations de la commission des
affaires culturelles, qui a beaucoup travaillé sur les chapitres et les
articles dont elle s'est saisie. Nous espérons que nos amendements recevront de
votre part un accueil favorable. En tout cas, nous les défendrons avec
conviction.
C'est au bénéfice de leur adoption, bien entendu, que nous donnerons un avis
favorable à l'adoption de ce projet de loi.
(Applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
ministre, mes chers collègues, le voici enfin devant nous, en première lecture,
ce texte tant attendu, dont l'objet est d'adapter l'organisation des ventes
publiques en France aux exigences de l'article 59 du traité de Rome !
Avec la suppression du monopole des commissaires-priseurs, hors ventes
judiciaires, c'est un nouveau pan de l'exception française qui tombe. En ce
sens, madame la ministre, on pourrait parler d'une loi « Sotheby's ». La
célèbre firme est en effet à l'origine de ce texte. Depuis 1992, elle n'a cessé
de harceler le Gouvernement français et la Commission. Elle vient encore de
manifester sa présence dans ce débat avec une vente fort médiatique, au château
de Groussay, la semaine dernière.
Faut-il, pour autant, déplorer cet aboutissement législatif, auquel nous
sommes conviés ? Non, puisque la position de notre pays était devenue
intenable. On ne peut, au contraire, que déplorer le temps perdu : trois ans de
non-réponse aux questions de plus en plus pressantes de la Commission, de 1992
à 1995 ; un premier texte déposé, après deux ans d'études, par le gouvernement
précédent, en avril 1997 ; la reprise à zéro du chantier, avec changement
d'experts, par le gouvernement actuel ; tout cela pour, finalement, rétablir à
peu de choses près l'architecture initiale, tout en divisant par cinq
l'indemnisation prévue pour les commissaires-priseurs, qui sont partagés entre
la protestation contre cette réduction drastique de leurs indemnités et le
désir de crever l'abcès.
En tout cas, ils ont abandonné l'attitude de procrastination qui était la leur
au début de cette longue histoire.
Bref, nous avons connu sept années de méandres, et l'on aurait pu, avec
profit, en économiser trois ou quatre, pendant lesquelles il ne semble pas,
hélas ! que la situation de notre pays sur le marché de l'art se soit
améliorée, bien au contraire.
En même temps qu'elle se saisissait pour avis des aspects financiers du
présent projet, la commission des finances a mené une enquête sur le marché de
l'art, moyennement important du point de vue économique, mais porteur des
symboles et des images de notre gloire passée. Nous avons procédé à de
nombreuses auditions et investigations, dont le résultat est contenu dans le
rapport d'information n° 330.
La réforme des ventes volontaires n'est qu'un des éléments, quoique crucial,
d'une problématique complexe et quelque peu désespérante.
Dans les mythiques années cinquante, la France régnait encore sur le marché de
l'art mondial, au point que certaines études parisiennes avaient été
sollicitées pour racheter une importante société américaine, Parke Bernet.
L'occasion ne fut pas saisie.
Au début des années quatre-vingt-dix, c'est-à-dire au sommet de la vague
spéculative qui toucha l'art comme l'immobilier et la Bourse, on pouvait
considérer que le jeu était réparti à peu près également entre les
commissaires-priseurs français, Sotheby's et Christie's, avec une légère
préférence pour les premiers.
En 1998, pour la partie « art » de leur activité et selon les informations
contenues dans les annuaires de vente, les deux majors anglo-saxonnes
dépassaient nettement nos commissaires-priseurs : 11,4 milliards de francs pour
Sotheby's, 11,3 milliards de francs pour Christie's, nos 460
commissaires-priseurs, répartis en 328 offices, ayant réalisé un chiffre
d'affaires de 8,7 milliards de francs, comme l'a rappelé M. Gouteyron.
Sur le marché mondial, pour s'en tenir à la peinture et au dessin, qui en sont
la fine pointe, on considère que 50 % du marché se traite désormais aux
Etats-Unis, 30 % en Grande-Bretagne et 6 % seulement en France.
Parler du marché de l'art, c'est agréger des réalités bien différentes. Le
nôtre tend à se provincialiser, à porter sur les oeuvres moyennes. Au-dessus de
500 000 francs, les « articles », pour parler comme le faisait Edgard Degas de
ses oeuvres, se négocient hors de France. Or, si l'on excepte l'art
contemporain, pour lequel notre pays semble avoir été durablement marginalisé
par l'Amérique et même par certains voisins comme la Grande-Bretagne ou
l'Allemagne, il est notable que les pièces échangées ont, pour la plupart, été
produites chez nous. Qu'il s'agisse des meubles du XVIIIe siècle, des dessins
des XVIIIe et XIXe siècles, des tableaux impressionnistes, puis de l'Ecole de
Paris, sans parler du mobilier « art déco ». Les catalogues des grandes ventes
internationales le montrent bien. Ils sont pleins d'objets français : de quoi
nourrir une profonde mélancolie, et aussi, pourquoi pas, des espoirs de
reconquête !
Parmi les causes du déclin, certaines sont de nature institutionnelle. Le
caractère obsolète du statut des commissaires-priseurs, auquel le présent texte
va mettre fin, en est une. D'autres sont d'ordre fiscal. Il est évident,
cependant, que les plus importantes sont d'ordre économique. Les grandes
fortunes, les grandes collections vont de pair. Le chef-d'oeuvre inspiré est à
la fois une production supérieure de l'esprit humain, un trésor national et un
trésor tout court, objet de valeur soumis aux aléas du marché comme d'autres
objets.
C'est à la lumière de ces considérations que la commission des finances a
étudié ce texte qui vous est soumis, en étroite concertation avec la commission
des lois et la commission des affaires culturelles.
Pour jouer au mieux les atouts dont dispose encore la France et relancer la
place de Paris, il faut que soient données toutes leurs chances aux nouvelles
sociétés de ventes volontaires qui sortiront de ce texte et aux professionnels
qui les animeront. Il ne s'agit plus de pleurer sur le lait renversé, il faut
sauver ce qui peut l'être. Tel est le but des observations et des amendements
que la commission des finances, parallèlement à la commisssion des lois et à la
commission des affaires culturelles, ou pour son propre compte, a présentés sur
ce projet. Elle en approuve l'orientation générale puisque c'est la seule
possible.
Nous ne nous sommes pas interrogés sur bien d'autres aspects de ce texte qui
ont fait l'objet d'observations et d'amendements pertinents de la part de la
commission des lois et de la commission des affaires culturelles.
Le rapport écrit qui vous a été distribué comporte, dans sa troisième partie,
une réflexion sur le nouveau régime des ventes volontaires, sous le thème du «
libéralisme tempéré ». Trop bien tempéré, pourrait-on dire : au moment où l'on
crée des sociétés de ventes volontaires, qui seront des sociétés commerciales
parmi d'autres, à quoi bon encore légiférer ? Les garanties du droit des
affaires et la déontologie de la probité commerciale, chère à César Birotteau,
ne suffisent-elles point ? Les Anglo-Saxons s'en contentent et ils ne s'en
portent pas si mal. Mais il est difficile de se défaire en une fois d'habitudes
séculaires. Je tiens également à relever l'importance de l'amendement proposé à
l'article 6 par la commission des affaires culturelles à propos de la vente
électronique.
Notre contribution se limitera donc à trois points : les modalités de
l'indemnisation, la fiscalité de l'indemnité et des restructurations et la taxe
sur les ventes.
Le premier point, qui est le plus important des trois, concerne
l'indemnisation. La commission des finances fait sienne l'analyse juridique
présentée par la commission des lois de la Haute Assemblée, et ce d'autant plus
volontiers que nous pouvons ainsi nous passer d'une discussion sur les
montants. Si l'on part du principe qu'il s'agit d'une expropriation, fût-elle
partielle, la conclusion évidente, au regard de nos principes constitutionnels,
est la compensation intégrale du préjudice. Cette compensation doit être placée
sous le contrôle du juge, d'où l'amendement qui transforme la nature de la
commission visée à l'article 43, en la plaçant sous la présidence d'un
magistrat de l'ordre judiciaire. Madame le garde des sceaux, vous qui, en tous
temps et en tous lieux, et dans les circonstances les plus difficiles, vous
faites le défenseur des magistrats, ne pouvez pas ne pas y être sensible.
En l'occurrence, la commission des finances propose, moins qu'une réfutation,
un perfectionnement du texte gouvernemental. Nous ratifions la méthode de
calcul définie par le comité d'experts réuni sur votre initiative, madame la
ministre, d'où résulte la rédaction de l'article 36, et nous retenons même ce
taux de 50 % de réfaction proposé à l'article 37, mais sans l'accompagner des
modulations de plus et moins 15 %, qui ne sauraient manquer de compliquer et de
ralentir le processus. Surtout, ce qui était réfaction imposée - et qui n'a pas
de justification juridique ou pratique, M. Dejoie vient de le rappeler à
l'instant - change de caractère. C'est l'intéressé lui-même qui choisit
librement cette hypothèse forfaitaire afin d'accélérer le règlement. Ceux, les
plus nombreux, qui continueront d'exercer éviteront ainsi les complications
administratives, et gagneront un temps précieux à un moment où le marché de
l'art risque d'être profondément déstabilisé. C'est donc une réflexion autant
économique que juridique qui nous guide.
Mais il faut prolonger cette réflexion, toujours dans le même souci d'aller
vite et de procurer à ces études, devenues entreprises, toute la sécurité
possible, notamment sur le plan fiscal.
Il nous est apparu étrange, ainsi qu'aux compagnies nationale et parisienne
des commissaires-priseurs, voire aux cabinets qui m'ont contacté, que la loi ne
comporte pas de volet fiscal. J'entends bien que Bercy aime faire du « sur
mesure », que la direction de la législation fiscale a du goût pour la
circulaire ou l'interprétation administrative. Mais la situation des
professionnels sera d'une grande vulnérabilité pendant les mutations juridiques
qu'on leur impose, qui sont comme un changement de carapace. Et les grands
prédateurs ne se font pas discrets...
J'ai demandé au ministère de la justice quel serait le régime fiscal de
l'indemnité, quelles mesures d'accompagnement seront prévues pour aider les
nouvelles sociétés de ventes volontaires à faire face à la concurrence
internationale. Les réponses à ces questions, que vous trouvez reproduites dans
mon rapport écrit, sont de caractère général. Elles ne suffisent pas à rassurer
les intéressés, ni à nous fixer sur leur sort.
Il a donc semblé nécessaire à la commission des finances d'approfondir la
réflexion sur le plan fiscal, afin de leur procurer une sécurité, c'est-à-dire
une définition de leur régime fiscal dans la loi, et un accompagnement,
notamment une suspension d'imposition, afin de neutraliser les coûts
superfétatoires qui risquent de bloquer les changements nécessaires. Bien
entendu, l'Etat retrouverait ses droits à la sortie.
C'est d'autant plus nécessaire qu'un grand nombre des professionnels exercent
sous le régime des SCP ou des SELARL qui, n'étant pas soumises à l'impôt sur
les sociétés, ne peuvent bénéficier des mêmes nécessités de report que les
entreprises individuelles.
Pour l'indemnité elle-même, il s'agirait de ne frapper de plus-values que la
part de celle-ci qui ne serait pas affectée au remboursement des dettes ou
réinvestie dans les sociétés de ventes volontaires.
Pour les mesures d'accompagnement fiscal des mutations juridiques, il s'agit,
en matière d'apports, de scissions de sociétés ou de droits d'enregistrement,
de faciliter les opérations nécessaires, en appliquant certaines mesures
suspensives ou simplificatrices, déjà prévues par le code général des impôts
pour d'autres types de sociétés, et inapplicables aux cas que nous prévoyons,
dans l'état actuel des textes.
Ces amendements sont sans doute perfectibles. Certains pourront peut-être être
considérés comme des amendements d'appel, au cas où le Gouvernement, prenant en
considération le problème soulevé, apporterait des réponses claires, des
engagements précis et des solutions alternatives.
(Mme le ministre de la culture et de la communication remplace Mme le garde
des sceaux au banc du Gouvernement.)
Nous nous sommes interrogés, en particulier, sur le devenir de l'Hôtel Drouot,
dont il est parfois de bon ton de critiquer l'organisation. Le mélange des
genres qui s'y pratique et un certain désordre bien sympathique seraient en
tout cas irremplaçables pour les amateurs. Qui se résignerait à le voir fermer
?
La loi rendra inévitable la remise en cause de cet outil, qui est géré par une
société anonyme, Drouot SA, propriété de la Compagnie des commissaires-priseurs
de Paris, qui appartient elle-même à ses membres. Les actifs commerciaux,
notamment
La Gazette de l'Hôtel Drouot,
ont une valeur non négligeable -
entre 150 millions et 200 millions de francs pour
La Gazette
. Quant aux
actifs immobiliers, ils sont détenus par une SCI, elle-même propriété des
commissaires-priseurs en exercice. Si la Compagnie des commissaires-priseurs
est considérée comme une personne morale, il faudra procéder à des transferts
d'actifs susceptibles de générer 53 millions de francs de plus-values, soit,
avec les avoirs fiscaux, un impôt net de 190 000 francs par part. En revanche,
si la compagnie n'a pas la personnalité morale, il s'agira, pour l'attribution
des actions, d'un simple partage en nature, qui n'entraîne pas de charges
fiscales pénalisantes. Mais la question n'est pas tranchée.
Je dois dire, madame la ministre, qu'elle ne l'est pas davantage après lecture
de l'amendement présenté par le Gouvernement sur l'Hôtel Drouot, qui nous a
paru de nature assez ésotérique. Mais peut-être pourrez-vous nous expliquer le
sens que vous lui attachez et les conséquences fiscales qu'il emporterait.
Jusqu'à présent, je le répète, nous avons en effet mené nos travaux de façon un
peu isolé puisque le ministère des finances n'a pas répondu à nos demandes
d'avis sur nos projets d'amendements. Ce qui nous importe, c'est le principe :
pas d'imposition superflue en raison des mutations juridiques. Si le
Gouvernement nous propose des solutions claires, écrites dans la loi, nous
serons prêts à les considérer avec beaucoup d'attention.
Retenant l'hypothèse pessimiste, la commission des finances présentera un
amendement permettant un report des plus-values dues et par la Compagnie et par
les commissaires-priseurs, l'impôt étant recouvré au moment où ceux-ci
sortiront des sociétés de ventes volontaires.
Enfin, c'est notre troisième point, la commission des finances a adopté un
amendement supprimant l'article 40 du projet de loi, qui instaure une taxe sur
les ventes de meubles aux enchères publiques.
Cette taxe existait déjà dans le projet de 1997. Le taux et la durée en ont
même été réduits de dix à cinq ans, et de 1,5 % à 1 % dans le présent texte, en
fonction de la réduction du coût envisagé par l'actuel gouvernement pour
l'indemnisation des commissaires-priseurs. La position de la commission des
finances ne repose donc pas, comme on le voit, sur un parti pris politique,
mais résulte d'une analyse triplement critique de cette taxe dans son fondement
juridique, dans son utilité financière et dans ses conséquences économiques.
Juridiquement, cette taxe ne paraît pas légitime, si l'on veut bien retenir la
position qui est celle de nos commissions des lois et des finances sur
l'expropriation. Il est clair qu'on peut concevoir la création d'une taxe
parafiscale pour financer la modernisation d'un secteur économique, non pour
exonérer l'Etat du devoir d'indemnisation qui est le sien quand il rachète un
droit qu'il a jadis vendu.
Financièrement, on notera que cette taxe n'est pas affectée à un compte
spécial du Trésor. Sa nature et son régime restent imprécis. La loi de finances
rectificative pour 1998 en a anticipé le rendement escompté, et ouvert des
crédits - 450 millions de francs - sur le chapitre 46-01 du budget du ministère
de la justice. Ils ont été inscrit à l'état H - crédits non soumis à
l'annualité budgétaire - par la loi de finances pour 1999. En outre, il faut
noter que le marché de l'art procurera des ressources plus importantes à
l'Etat, en raison du probable alignement du tarif « acheteur » des sociétés de
vente volontaire sur les tarifs anglo-saxons, qui est de 15 %, jusqu'à 300 000
francs.
Cette dépense, à vrai dire, on n'en connaît pas le montant exact, puisqu'elle
dépendra - si les amendements des commissions sont adoptés - des décisions
d'une commission présidée par un magistrat et du choix que feront un plus ou
moins grand nombre de commissaires-priseurs d'une indemnisation forfaitaire. On
peut toutefois considérer qu'elle est, pour l'essentiel, déjà financée.
Au demeurant - j'insiste sur ce point - on peut s'interroger sur la
rentabilité d'un tel impôt, au taux réduit, frappant un très grand nombre
d'opérations commerciales sur l'ensemble du territoire. Je regrette qu'il n'y
ait pas de représentant du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie au banc du Gouvernement.
La presse, ce matin encore, notamment
le Figaro
, se fait l'écho des
préoccupations du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la
rentabilité de notre système de recouvrement, moins bonne, à l'évidence, que
dans les pays voisins, en raison de la lourdeur des frais administratifs.
L'inspection générale des finances a rendu une étude à ce sujet. Il y a fort à
parier que, si pareille taxe existait déjà, elle serait au nombre de celles
dont la suppression serait envisagée par l'inspection, ou alors l'inspection ne
serait plus celle que j'ai connue.
Cependant, ce qui a motivé par-dessus tout la commission des finances, c'est
la considération de handicaps fiscaux dont souffre déjà notre marché de l'art,
comparé à ceux de nos grands concurrents. Il n'est pas un rapport, pas une
étude consacrée à ce sujet qui ne les dénonce, et le rapport d'information que
j'ai l'honneur de présenter au nom de la commission des finances, auquel j'ai
fait allusion tout à l'heure, comporte des développements sans ambiguïtés sur
les plus importants d'entre eux. Il ne nous a pas fallu faire un grand effort,
puisque l'essentiel a déjà été dit, et fort bien dit, par M. André
Chandernagor, président de l'Observatoire du marché de l'art, et par M.
Aicardi.
La TVA à l'importation des oeuvres d'art a beau avoir été réduite à 5,5 %,
elle joue le rôle d'un droit dissuasif quand le vendeur, et surtout le
professionnel du marché qui le conseille, choisit le lieu de vente. Pourquoi
vendre à Paris avec une taxe à 5,5 %, quand elle est, en fait, de zéro à New
York et de 2,5 % à Londres ? Il faut espérer que la Grande-Bretagne, le 30 de
ce mois, acceptera la fin de sa dérogation, mais on n'en est pas sûr en dépit
des propos optimistes qu'a tenus Mme le garde des sceaux avant de nous
quitter.
Le droit de suite a été inventé par et pour notre pays en faveur des artistes
et de leurs héritiers, et il a réussi à l'imposer à presque toute l'Europe mais
pas, jusqu'à présent, à la Grande-Bretagne, hélas ! ni aux Etats-Unis, bien
sûr. Voilà encore 3 % de charges, dont le bien-fondé n'est pas contestable,
mais...
Je passe sur les différences en matière de droit de reproduction - un
amendement très intéressant a d'ailleurs été déposé par notre collègue M.
Philippe François - ou de taxe forfaitaire. Mais, sur ce point, Mme le garde
des sceaux semble avoir pris des engagements très nets, ce dont nous nous
réjouissons.
Or, tout allégement de ces charges, au niveau européen, qui sont maintenant
négociées à Bruxelles, se heurte à des obstacles qui ne laissent guère espérer
une égalisation prochaine des conditions de concurrence, ne serait-ce que parce
que, dans les conseils européens, c'est le ministre des finances qui parle, non
la ministre de la culture, laquelle serait d'ailleurs, en matière de droit de
suite, divisée contre elle-même.
Aussi, mes chers collègues, en vous proposant de supprimer cette nouvelle taxe
sur les ventes, qui n'est ni justifiée, ni indispensable, la commission des
finances a-t-elle voulu adresser au Gouvernement et à l'opinion un message
clair. Si nous ne parvenons pas, dans un secteur donné, à diminuer rapidement
le poids des charges, au moins commençons par ne pas l'augmenter ! Et qu'on ne
me dise pas qu'elle est payée par l'acheteur et non par le vendeur car il est
très difficile de connaître l'incidence d'une charge. C'est un message
politique qui, s'il est écouté, augurerait bien de la loi nouvelle.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 31 minutes ;
Groupe socialiste, 26 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 19 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 17 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 11 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 9 minutes ;
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec le projet
de loi que nous examinons aujourd'hui, nous abordons un sujet important qui est
celui de la place de la France sur le marché de l'art et de la culture.
Cette réforme, essentiellement entamée sous l'impulsion de Sotheby's, grande
société commerciale britannique de ventes volontaires et concurrence directe de
Paris, est fortement inspirée du modèle libéral anglais.
Je ne reviendrai pas dans le détail sur l'historique de la procédure engagée
par cette société qui, souhaitant organiser des ventes volontaires en France, a
saisi, dès le 1er octobre 1992, la Commission européenne sur la base de
l'incompatabilité de la réglementation française avec l'article 59 du traité de
Rome relatif à la libre prestation de services.
Bruxelles n'apprécie décidément pas les monopoles et menace de traduire la
France devant la Cour de justice européenne en invoquant la libre prestation de
services au sein de la Communauté.
En conséquence, depuis le 16 mars 1995, la France est mise en demeure par la
Commission européenne d'adapter sa législation relative à l'organisation des
ventes volontaires et à la profession de commissaire-priseur, faisant fi, en
l'occurrence, de l'avenir des salariés ainsi que de notre tradition française
en ce domaine, dont le caractère exceptionnel a été souligné par M. le
rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Avec ce texte, nous nous apprêtons donc à ouvrir aux maisons étrangères le
marché français de l'art.
Il s'agit, concrètement, de permettre aux grandes multinationales Sotheby's et
Christie's, appartenant entre autres au groupe français Pinault et qui
détiennent 95 % du marché mondial, de diriger des ventes à Paris.
Ces deux grandes sociétés, sans foi ni loi, déplacent, au gré des disparités
fiscales et économiques, les oeuvres d'art dans le monde. Sotheby's fait ainsi
sortir des châteaux français 600 millions de francs dans l'année d'oeuvres
immédiatement mises en ventes à Londres ou à New York.
La présidente de Sotheby's France, Mme Laure de Beauvon-Craon, a d'ores et
déjà anticipé cette réforme puisqu'elle vient de diriger, en parfaite
illégalité, en France, sa première vente de prestige avec la dispersion aux
enchères du mobilier du château de Groussay. Pourquoi la France a-t-elle laissé
faire ?
Le projet de loi confie donc l'organisation et la réalisation des ventes
volontaires à de nouvelles sociétés de forme commerciale, mais à objet civil,
qui, en l'absence de précision du texte concernant le montant des fonds propres
de ces sociétés ou leur forme sociale, pourront prendre la forme aussi bien
d'une société cotée en bourse que d'une société unipersonnelle.
Notre système de ventes volontaires sera ainsi calqué sur celui de la
Grande-Bretagne : absence de monopole, libre concurrence, absence de tarif
imposé, utilisation de techniques de ventes telles que les transactions de gré
à gré, les avances sur fonds propres ou encore les prix garantis.
Cette réforme est justifiée par ses promoteurs par le fait que la France
connaît, depuis plusieurs années, un déclin quant à son activité et qu'il faut,
en conséquence, la doter de moyens lui permettant de faire face, à armes
égales, à ses concurrents.
Madame la ministre de la culture et de la communication, vous déclarez dans un
quotidien national aujourd'hui même : « C'est maintenant ou jamais que Paris
peut reprendre sa place perdue sur le marché mondial de l'art. » Je l'espère
vivement !
J'estime cependant que l'on peut légitimement douter des bienfaits d'une telle
libéralisation du marché, entraînant la suppression du monopole traditionnel
français dont bénéficient, depuis toujours, nos commissaires-priseurs.
Je rappelle ici qu'à l'origine l'organisation des ventes aux enchères a été
confiée à des officiers ministériels compétents et responsables, dans un souci
de protection du consommateur.
Cette réforme n'est donc pas sans soulever certaines questions à nos yeux, en
particulier celle des licenciements qui vont indubitablement en découler ou
encore celle de l'indemnisation des commissaires-priseurs.
On peut en revanche noter que certaines garanties sont prévues dans le but,
nous assure-t-on, de protéger le consommateur.
Chacun s'accorde à reconnaître que les restructurations rendues nécessaires
par la présente réforme vont entraîner des licenciements parmi le personnel
salarié des offices de commissaires-priseurs.
En effet, la transformation de la profession de commissaire-priseur va aboutir
au regroupement de plusieurs études qui, se retrouvant avec plusieurs clercs,
plusieurs comptables, plusieurs crieurs notamment, vont devoir se séparer d'une
partie de leurs salariés.
Je veux dire d'emblée qu'il est toujours regrettable d'envisager des
licenciements au nom de la modernisation et de la libéralisation de tel ou tel
secteur d'activité.
Nous estimons, pour notre part, qu'il est nécessaire de prévoir une
indemnisation juste et équitable pour les personnels concernés par ces
licenciements. Aussi avons-nous déposé un amendement sur lequel je reviendrai
plus en détail lors de la discussion des articles.
J'en viens à présent à l'indemnisation prévue pour les commissaires-priseurs
en contrepartie de la perte de leur monopole.
Le montant global de cette indemnisation a, entre le projet de loi Toubon et
l'actuel projet de loi, été revu à la baisse.
Dans un premier temps, on avait implicitement admis qu'après la réforme les
offices ne vaudraient plus rien et donc que le préjudice devrait être égal au
prix de ceux-ci. De plus, la méthode de calcul retenue gonflait,
artificiellement je pense, ce prix.
La méthode d'évaluation contenue dans le présent texte a changé puisqu'il a
été admis que, même après la disparition du monopole, les offices
conserveraient une valeur certaine, due notamment à l'existence d'une clientèle
et à la notoriété des dirigeants.
Il est désormais prévu d'allouer aux commissaires-priseurs 450 millions de
francs, financés par une taxe de 1 % sur les ventes pendant cinq ans.
Bien évidemment, la majorité sénatoriale de droite, notamment M. Gaillard,
rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, arguant du « trop
d'Etat » et du « trop de taxe », propose un dispositif fiscal et financier
éloigné des dispositions contenues dans le texte.
Vous prônez le moins-disant fiscal pour faciliter la pérennité des ventes
volontaires aux enchères publiques. Sachez que nous ne vous suivrons pas sur
cette voie. Nous ne voterons pas, par conséquent, les amendements proposés en
la matière par la commission des finances.
Mme le garde des sceaux nous a dit tout à l'heure que cette libéralisation du
marché de l'art s'accompagnera de garanties pour les consommateurs, comme pour
les vendeurs.
Celles-ci seront assurées, notamment par la création d'un « conseil des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques » et par un encadrement de la
profession d'expert.
On peut toutefois s'interroger sur l'intérêt d'élaborer un statut de l'expert
si, d'une part, il n'est pas fait obligation de recourir à des experts
présentant les qualités requises pour être agréés et si, d'autre part, aucune
qualification professionnelle n'est exigée.
Plus globalement, si cette libéralisation est juridiquement encadrée par le
projet de loi, les amendements des commission des lois et des finances
s'orientent, pour leur part, vers une libéralisation accrue des ventes aux
enchères, afin de donner à ces nouvelles sociétés de ventes les moyens
d'affronter la concurrence européenne dans des conditions satisfaisantes.
Permettez-moi d'aborder brièvement la question du droit de suite qui, nous
dit-on, constitue, avec la TVA à l'importation, la principale source de
distorsion de concurrence entre la France et les marchés étrangers, anglais et
américains notamment, où le droit de suite n'existe pas.
Ce droit existe aujourd'hui dans huit des quinze pays de l'Union
européenne.
Si ce droit de suite constitue, pour le moment, un handicap pour la France par
rapport à Londres, il suffirait que la directive européenne en cours
d'élaboration sur l'harmonisation européenne de ce droit de suite soit adoptée,
imposant le même cadre à tous les pays de l'Union européenne pour faire évoluer
la situation en France.
Le problème réside dans le fait - il faut que nous en ayons conscience - que
la Grande-Bretagne y est fermement opposée, car elle craint une délocalisation
du marché vers son concurrent new-yorkais. C'est ainsi que les Britanniques ont
refusé le projet présenté le 25 février 1999 ainsi que le compromis proposé par
la présidence allemande. Il convient de noter qu'un tel compromis n'est
possible que jusqu'au 21 juin prochain, date à laquelle il y aura un changement
de présidence.
Aussi peut-on noter la pugnacité avec laquelle la Grande-Bretagne impose ses
points de vue au niveau européen, notamment à la France : non seulement, en
introduisant une procédure devant Bruxelles contre la France, elle oblige
celle-ci, au nom de la libre concurrence, à supprimer le monopole des
commissaires-priseurs ; mais de surcroît, en refusant tout compromis européen
relatif au droit de suite, elle fausse le jeu de la concurrence au détriment de
la France.
Pour conclure, je serais tenté de dire que, même si la profession est prête
pour cette réforme, entamée depuis quatre ans et sans cesse repoussée, nous
demeurons quelque peu sceptiques sur la pertinence d'une telle démarche quant
aux résultats escomptés.
Qui peut nous assurer que la France aura effectivement les armes qui lui sont
indispensables pour lutter à égalité avec ses concurrents ?
Qui peut nous assurer, faute d'harmonisation européenne, en termes de droit de
suite notamment, que Londres n'investira pas la place de Paris ?
Certes, figurent dans ce texte certaines conditions imposées aux
ressortissants européens pour officier en France, ainsi que des garanties pour
les consommateurs. Mais est-ce suffisant ?
Cette interrogation est d'autant plus fondée que les amendements présentés par
la commission des lois allant dans le sens d'une libéralisation accrue, comme
je l'ai évoqué, ne sont pas pour nous rassurer en la matière.
Dans ces conditions, il nous sera difficile d'approuver un tel texte.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les
commissaires-priseurs font partie de ces professions qui occupent dans notre
imaginaire une place importante. C'est sans doute l'image du marteau d'ivoire,
l'écho du mot « adjugé », peut-être le « feu », la « folie » des enchères et la
valse des objets, qui confèrent à ce métier son aura. Aux frontières de mondes
différents et que l'on serait tenté de croire opposés, l'art, l'argent, la
justice, le commissaire-priseur est véritablement un « passeur ». C'est bien
parce que le passage de l'objet sur le marché de l'art doit se faire avec les
meilleures garanties, que l'Etat a jugé autrefois nécessaire de conférer à ce «
passeur » le titre d'officier ministériel.
Cette naissance de la profession telle qu'elle est encore aujourd'hui
réglementée procède d'une idée spécifiquement française, celle que l'Etat est
le gardien du patrimoine national et, partant, du marché de l'art. Ainsi, à
toutes les étapes de la transaction marchande, il a mis en place des mécanismes
juridiques et fiscaux dont la juste application doit permettre de concilier
l'inconciliable : le prix du marché et la protection des richesses artistiques
nationales. Par l'intermédiaire du commissaire-priseur, l'Etat garantit la
valeur de l'objet d'art, il protège l'acheteur, il protège le vendeur. Il
exerce un pouvoir de tutelle et de police sur l'ensemble des transactions, par
son droit de rétention et d'interdiction de sortie du territoire. Il exerce des
prérogatives exorbitantes du droit commun, notamment par son droit de
préemption.
Cette attitude protectrice a été en grandissant tout au long du xxe siècle,
avec notamment l'apparition des acheteurs américains. On connaît l'histoire des
cloîtres, démontés puis remontés pierre par pierre, ou encore la destination
d'une bonne partie du mobilier de nos châteaux. La France, avec les pays
d'Europe du Sud riches en patrimoine, est devenue structurellement exportatrice
d'oeuvres d'art. La protection du patrimoine national et l'intervention de
l'Etat sont donc aujourd'hui des données essentielles du marché de l'art
français.
Pour autant, la construction européenne, la mondialisation, l'évolution même
du marché de l'art ont remis en cause un protectionnisme accusé de scléroser
les ventes d'oeuvres d'art. Le dispositif préparé par le Gouvernement comporte,
outre le projet de loi que nous examinons aujourd'hui, un projet de loi sur la
sortie des biens culturels, qui permettra de libéraliser encore davantage la
circulation des biens culturels, telle qu'elle a été organisée par la loi du 31
décembre 1992 sous l'égide de M. Jack Lang.
La réforme qui nous intéresse aujourd'hui fait donc partie de ce mouvement qui
consiste à faire tomber les barrières, à ouvrir largement le marché de l'art
français, à distribuer à tous les mêmes pions et à leur imposer les mêmes
règles du jeu. Ce faisant, nous formons un pari : avec un marché français
dynamisé, renforcé, les échanges seront plus importants, la création
contemporaine davantage reconnue, les acheteurs plus nombreux, les vendeurs
mieux protégés et notre patrimoine préservé.
Cette réforme se fait en deux temps. Dans un premier temps, le
commissaire-priseur, officier ministériel, héritier d'un système séculaire
typiquement français cesse d'exister, du moins pour la partie des ventes
volontaires. Indemnisé, il devient l'animateur principal d'une société
commerciale. Dans un deuxième temps, la société commerciale est habilitée à
exercer un certain nombre de pratiques. Auparavant proscrites par une
réglementation sévère, ces pratiques commerciales demeurent néanmoins
encadrées.
La réforme de la vente aux enchères publiques ne vise pas à supprimer une
profession. Il s'agit au contraire de lui donner un nouveau statut pour lui
offrir la possibilité de se développer et de se moderniser. Le projet de loi
met donc fin au monopole traditionnel des commissaires-priseurs et attribue aux
sociétés de ventes volontaires la compétence de l'organisation et de la
réalisation des ventes de meubles aux enchères publiques. La profession de
commissaire-priseur va ainsi passer d'une logique de service public à une
logique commerciale. Là où il y avait absence de liberté des tarifs, les
sociétés fixeront librement le prix de leur compétence. Là où il était
impossible de constituer des réserves, les sociétés auront pleine capacité
économique.
La forme de la société est, de fait, le moyen le plus efficace de différencier
les patrimoines et de permettre un contrôle de son fonctionnement par
l'autorité de marché. Aucun seuil financier n'a été prévu pour le montant du
capital de ces sociétés. La réforme offre donc une certaine souplesse qui
permet à chacun d'entrer à sa façon dans cette nouvelle ère de la vente aux
enchères. La forme de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée
pourra parfaitement être adoptée par un commissaire-priseur de province s'il ne
veut pas avoir une structure sociale trop importante. A Paris, les
regroupements d'études pourront se constituer en sociétés cotées en bourse
s'ils veulent s'ouvrir à des capitaux extérieurs.
L'indemnisation qui accompagne ce changement des règles du jeu permettra
également à la profession de se restructurer, et c'est pourquoi cette
indemnisation doit être rapide. Le groupe socialiste a déposé un amendement en
ce sens. Le principe d'un fonds d'indemnisation alimenté par une taxe de 1 %
pesant sur l'acheteur me semble bon. Il reste indolore pour l'Etat et ses
contribuables, et le recouvrement de la taxe est facilité, puisqu'il est
englobé dans les comptes de la société.
Ce projet de loi, que j'estime équilibré, libéralise considérablement la
profession, mais conserve au marché de l'art en France toutes ses garanties. Le
commissaire-priseur, agissant désormais pour le compte de la société de ventes
volontaires, doit en effet demeurer le mandataire de deux parties aux intérêts
opposés. Son statut, à la fois d'arbitre impartial et de garant de la vente,
doit rester entier. C'est pourquoi les sociétés de ventes ne pourront pas
effectuer des opérations d'achat-revente pour leur propre compte, et je
soutiens les propositions de la commission des lois visant à ne pas admettre
d'exception à ce principe.
L'inverse aurait contribué à déséquilibrer le marché de l'art, animé, comme
chacun le sait, par les commissaires-priseurs, mais aussi par les galeries et
par les grandes foires internationales marchandes. Il aurait aussi conduit à
perdre ce qui a fait et ce qui fait encore l'âme des ventes aux enchères.
Ainsi, au-delà de la réforme se maintient une déontologie qui fait l'image de
la France et dont aucun des acteurs du marché de l'art ne réclame l'abandon. Il
est inutile de préciser que cette déontologie, dont l'application sera
consciencieusement assurée par le Conseil supérieur des ventes, s'imposera
aussi aux sociétés de ventes étrangères exerçant leur art en France. C'est
ainsi que le marché de l'art français conservera, mais exportera aussi
peut-être son exception, une « exception française », une sécurité supérieure,
à la fois pour le vendeur et pour l'acheteur, à celle que l'on peut rencontrer
ailleurs.
Les trois règles d'or de la vente aux enchères sont ainsi conservées :
garantie d'origine des biens, garantie d'authenticité, garantie des fonds
confiés. La garantie trentenaire, qui était l'une des prérogatives des
commissaires-priseurs, est réduite à dix ans, ce qui correspond mieux aux
évolutions de l'expertise et de l'histoire de l'art. Elle reste néanmoins
supérieure au droit anglais non écrit et aux cinq ans de garantie pratiqués par
exemple par Sotheby's.
Les commissaires-priseurs continueront à établir un procès-verbal à l'occasion
de chaque vente. Il ne sera pas un acte authentique, mais il fera quand même
foi de la vente et devra être arrêté au plus tard dans les vingt-quatre
heures.
Les pratiques commerciales, nouvellement autorisées, demeurent néanmoins, je
l'ai dit, strictement encadrées. C'est un aspect fondamental du présent projet
de loi, mais un aspect qui était absent du texte préparé par M. Jacques
Toubon.
La vente à tempérament permettra à l'acheteur de bénéficier d'un crédit auprès
de la société, qui devient adjudicataire en cas de défaut de remboursement du
crédit. C'est ce qui était arrivé d'ailleurs à Sotheby's, lors de la vente des
fameux
Iris
.
La vente de gré à gré est également autorisée et permet de faire face à la
situation dans laquelle un bien ne trouve pas d'acheteur. Là où les sociétés
anglo-saxonnes, dans le même cas de figure, pratiqueraient l'achat-revente, les
sociétés françaises conservent des règles du jeu saines leur permettant de
rester en dehors de la partie.
De cet esprit de libéralisme mesuré, je dirais « encadré », procède également
le principe de l'agrément. Un certain nombre de conditions sont requises, dont
la qualification professionnelle. Je forme à ce sujet un voeu : que soit
maintenu le niveau d'excellence de la formation, qui contribue à l'image de
marque des commissaires-priseurs français. Le groupe socialiste a, dans ce
sens, déposé un amendement relatif à la formation professionnelle.
On retrouve également le souci de qualité du service et de garanties offertes
tant au vendeur qu'à l'acheteur par la définition d'un statut de l'expert agréé
par le conseil des ventes volontaires.
Il est évident que cette réforme induira un bouleversement des habitudes et
des pratiques, et je comprends les craintes exprimées par beaucoup de
commissaires-priseurs.
Les regroupements que le nouveau dispositif ne manquera pas de susciter ne
seront pas difficiles. Ils seront coûteux en termes d'emploi, et je me félicite
que la commission des lois ait déposé un amendement visant à indemniser au-delà
des conditions prévues par la convention collective les employés licenciés.
Le présent projet de loi ira aussi à l'encontre de la nature des
commissaires-priseurs, habitués à travailler en solitaire. C'était un métier
que l'on exerçait seul. Ils vont à la fois perdre leur titre et devenir des
experts en publicité et marketing : ce sera un nouveau métier, et il est vrai
qu'il faudra rassembler beaucoup d'énergie pour mettre sur pied une nouvelle
organisation, adopter de nouvelles pratiques.
On parle cependant de cette réforme depuis bientôt dix ans ; les premières
configurations sont apparues voilà déjà quatre ans. Les commissaires-priseurs
ont donc pu commencer, et certains l'ont fait, à organiser ce passage, à
l'exemple de grandes études sur la place de Paris, qui ont adopté depuis trois
ans la forme de la société en participation, en attendant de se transformer en
société commerciale. Par ailleurs, les observateurs remarquent que le recours
aux techniques commerciales s'est développé peu à peu dans ce corps que l'on
dit frileux. Nombreux, par exemple, sont les commissaires-priseurs qui, à la
manière des maisons de ventes internationales, annoncent qu'ils préparent une
vente spécialisée, ce qui est, en fait, un appel à la collecte des objets. Je
n'en doute pas, l'esprit de la réforme a déjà commencé de souffler dans les
salles de ventes et il inspire largement les plus dynamiques de nos
commissaires-priseurs.
Cette réforme est une véritable révolution. Elle peut être l'occasion
historique de relancer le marché de l'art en France, mais elle ne produira ses
pleins effets que si elle est accompagnée d'un aménagement du système des
droits et des taxes.
Certes, la concurrence à l'intérieur de l'Europe devrait être moins vive,
puisque la réduction de TVA accordée au Royaume-Uni sur les importations
d'oeuvres d'art ne sera pas prorogée au-delà du 30 juin.
Mais certaines anomalies demeurent, comme le taux de TVA de 20,6 % appliqué
aux manuscrits, à la numismatique et à une partie du mobilier, anomalies
d'autant plus choquantes lorsqu'elles permettent de distinguer, par exemple,
les masques d'art primitif taxés à 20,6 % et les statues d'art primitif taxées
à 5,5 % !
De même, il conviendrait de réformer la législation sur le droit de suite,
cela a été évoqué. Mais comme ce n'est pas l'objet du présent texte, je ne
m'attarderai pas sur cet aspect du problème.
Le groupe socialiste accueille favorablement le présent projet de loi qui lui
semble équilibré, mais il votera certaines modifications proposées par la
commission des lois, en particulier les dispositions plus favorables aux
salariés qui seraient licenciés. En revanche, il ne souhaite pas revenir sur la
composition du conseil des ventes et sur le dispositif prévu pour
l'indemnisation des commissaires-priseurs.
Il n'est pas non plus favorable à la suppression de la taxe prévue pour
alimenter le fonds d'indemnisation.
La profession des commissaires-priseurs a compris, je crois, que ce
bouleversement majeur est une chance pour son avenir. En tant que spécialiste
de ces ventes, la profession doit aborder ces changements dans un état d'esprit
positif, croire en la qualité du service qu'elle propose, croire en son
avenir.
Ainsi, le commissaire-priseur, qui ne perdra peut-être pas vraiment son titre,
continuera d'être appelé ainsi par le public ; il ne cessera pas d'être ce
qu'il a toujours été, c'est-à-dire l'un des animateurs de la vie culturelle, et
la salle de ventes restera, j'en suis persuadée, un peu de ce musée imaginaire
que nous avons tous en nous.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, selon le
rapporteur de la commission des lois, nous aurions peut-être pu, en vertu de
l'article 55 du traité de Rome, conserver les dispositifs actuels. Cependant,
les articles 59 et 60 paraissent tout de même nécessiter un aménagement du
dispositif légal en ce qui concerne le statut des ventes aux enchères
publiques.
Le Gouvernement avait bien vu les risques depuis longtemps, même s'il a
beaucoup tardé à déposer un projet de loi. Un texte avait été présenté, qui a
subi le sort de quelques autres en raison d'événements dont il n'est pas
nécessaire de rappeler la nature. Nous sommes donc amenés à examiner un nouveau
projet de loi.
Chaque fois qu'il est question de réformer une profession très ancienne - Mme
Derycke parlait de « musée imaginaire » - il est des mots qui sonnent bien et
que les juristes aiment bien, comme « greffier », « avoué » et «
commissaire-priseur ». J'allais même ajouter à cette liste les notaires, mais
cette profession n'est pas menacée.
Ce sont des professions reconnues qui participent avant tout à la sécurité
juridique de transactions. Tel est d'ailleurs le rôle essentiel des
commisseurs-priseurs. A partir du moment où nous sommes amenés à supprimer
cette profession - pour les ventes volontaires, car nous conservons bien
évidemment les commissaires-priseurs judiciaires - il faut donner à la fois au
vendeur et à l'acheteur des garanties suffisantes pour que cette activité ne
soit pas l'objet d'un libéralisme échevelé. Il serait intéressant de savoir si,
dans les pays qui n'ont aucune réglementation, il ne se produit pas parfois des
catastrophes.
Le projet de loi, tel qu'il est modifié par nos commissions, est équilibré
puisqu'il respecte les dispositions du traité de Rome sur la libre prestation
de services tout en apportant des garanties destinées à protéger les acheteurs
et les vendeurs.
D'une manière générale, la liberté d'établissement est toujours conçue de
manière protectrice dans notre pays. Nous l'avons vu notamment à l'occasion de
la réforme des professions judiciaires.
Nous devons inciter nos ressortissants à développer leurs activités dans les
autres pays de l'Union européenne et nous montrer plus offensifs, plutôt que
d'avoir cette conception bizarrement protectrice, tout en respectant, bien sûr,
les obligations qui résultent des dispositions du traité de Rome.
Mais comme le démontre notre collègue M. Gaillard dans son excellent rapport,
d'autres raisons sont à l'origine de la baisse d'activité du marché de l'art en
France, au profit d'autres pays. C'est ce qu'il a appelé « les handicaps
fiscaux ».
Nous devons faire un certain nombre de réformes, notamment en matière
d'harmonisation c'est indispensable dans ce domaine comme dans beaucoup
d'autres si nous ne voulons pas que les Français soient privés des moyens de
développer leurs activités.
Tant d'autres réformes sont indispensables, concernant la TVA, par exemple,
que je laisse le soin à la commission des finances et, surtout, au Gouvernement
de les proposer.
Mais revenons au projet de loi.
Aucune forme n'est imposée aux sociétés qui pourront prendre celle d'EURL,
puisqu'un certain nombre de commissaires-priseurs exercent de manière
individuelle. De toute façon, il faut garder le principe selon lequel le
commissaire-priseur, qui ne s'appellera plus ainsi, est un mandataire.
Je pense que toutes les initiatives qui ont été prises pour permettre au
professionnel, même à titre exceptionnel, de vendre pour son propre compte
doivent être repoussées ; les choses doivent être très claires.
A ce propos, l'article 11 me semble poser un problème. En effet, il y est dit
que le professionnel est rendu adjudiciaire en cas de prix inférieur au prix
garanti ; en l'absence d'enchères, que fait-on ? A-t-il droit de vendre pour
son propre compte ? Il y a une contradiction entre le fait qu'il soit
mandataire, qu'il ne puisse vendre pour son propre compte, et l'existence de ce
dispositif.
Madame la ministre, je souhaitais vous poser une question sur l'article 7. Cet
article dispose que les sociétés de ventes doivent comprendre au moins une
personne remplissant les conditions requises pour diriger une vente. Mais si
une société compte une seule personne qualifiée, que fait-on en cas d'absence
de cette personne au moment de la vente ? Sera-t-il possible de faire appel à
un professionnel agréé d'une société voisine ou faudra-t-il reporter la vente ?
Une telle décision pourrait avoir des conséquences considérables et le texte
n'est pas précis sur ce point. Il faudrait prévoir, à mon sens, que puisse être
requis un professionnel extérieur en cas d'empêchement, pour des raisons de
force majeure, du professionnel de la société.
En ce qui concerne les dispositions relatives aux experts, j'approuve
totalement les simplifications envisagées par la commission. Ainsi, il me
semble inopportun d'imposer le recours à un expert agréé, surtout dans certains
secteurs très spécialisés. Je rappelle que, en matière judiciaire, un magistrat
peut toujours faire appel à un expert non agréé par les tribunaux en cas de
besoin. Il faut donc rendre le texte plus libéral à cet égard.
Certaines des dispositions contenues dans le projet de loi sont à l'évidence
héritées des pratiques anglo-saxones ; il en est ainsi des propositions
figurant à l'article 8, relatives aux ventes de gré à gré, et de celles
figurant aux articles 11 et 12, ce dernier ayant reçu le qualificatif d'«
article Sotheby's » dans la mesure où il reprend des pratiques de cette grande
société en ce qui concerne le plafond de l'avance susceptible d'être consentie
au vendeur.
La commission des lois a prévu de supprimer un certain nombre de dispositifs
bizarres, notamment celui qui concerne la garantie des avances. Après tout, si
une société consent une avance, elle n'a qu'à prendre ses garanties ; il n'est
pas besoin d'inscrire dans la loi que le remboursement de l'avance doit être
garanti par un organisme d'assurance ou un établissement de crédit. Ce sera
possible même si les textes ne disent rien.
La commission a également décidé de proposer la suppression de la limitation
du montant des avances.
Le point le plus intéressant sur le plan juridique est, bien évidemment, celui
du fondement de l'indemnisation. Il donne lieu à un débat que je trouve
passionnant. Doit-on prendre comme référence l'article XIII de la Déclaration
des droits de l'homme et du citoyen, qui proclame l'égalité devant les charges
publiques, ou bien l'article XVII, qui reconnaît le droit de propriété. Comme
M. le rapporteur, je préfère m'en rapporter au second. La commission des lois
du Sénat fait d'ailleurs preuve d'une belle constance puisque telle était déjà
la position qu'elle avait adoptée à propos de l'indemnisation des avoués.
Au demeurant quelque intéressant sur le plan juridique que soit ce débat, qui
devrait faire l'objet de thèses, il n'emporte en fait aucune conséquence réelle
sur les conditions de l'indemnisation dès lors qu'est reconnue une valeur à la
charge, au droit de présentation.
La commission des lois entend confier à la commission d'indemnisation le soin
de fixer réellement la valeur du préjudice subi, de la perte de patrimoine,
devrait-on dire, dans la mesure où est reconnue une valeur patrimoniale au
droit de présentation. Je me demande, dans ces conditions, comment on pourrait
dire qu'il ne fait pas l'objet d'un droit de propriété.
Imaginez qu'un commissaire-priseur décède ; la valeur de sa charge entrera
bien dans le patrimoine de sa succession. C'est donc un bien réel et, quoi que
l'on puisse dire, par ailleurs, je pense que c'est sur ces bases-là que doit
être fixée l'indemnisation.
Il faut donc laisser une certaine souplesse au dispositif et prévoir une
garantie, car quelques cas risquent d'être très difficiles. La garantie de 50 %
me paraît réaliste, surtout pour un certain nombre de professionnels qui vont
abandonner leur activité et qui risquent de se voir entraîner dans des
discussions sans fin.
Je me réjouis aussi, monsieur le rapporteur de la commission des lois, que la
commission envisage une indemnisation des personnels plus forte que celle qui
était prévue par la convention collective, qui est ancienne.
Ce projet de loi entraînera sans doute des bouleversements dans certaines
charges. Il faut donc prévoir une indemnisation décente. C'est ce qu'avait fait
l'avant-projet de loi. Pour des raisons que nous arriverons peut-être à
comprendre - je pense que l'influence de Bercy n'est pas étrangère à l'affaire
puisqu'il en coûterait 40 millions de francs - cette indemnisation a été
fortement réduite puisqu'on en revient à la simple application de la convention
collective. Sur ce point, comme sur les autres, il y a lieu de suivre la
commission des lois.
Ce projet de loi arrive bien tard. Certes, il n'est jamais trop tard, mais il
est d'autant plus urgent qu'il a tardé à voir le jour. Sans doute ne
résoudra-t-il pas tous les problèmes. Nos professionnels, qui sont reconnus
dans le monde entier, n'avaient plus, pour des raisons fiscales, pour des
raisons d'organisation, les moyens de développer pleinement leur activité. Ce
texte leur ouvrira de nouvelles possibilités.
C'est pourquoi mon groupe le votera, assorti des amendements proposés par la
commission. Il devrait permettre à la France - du moins je l'espère - de
retrouver sa place dans le marché international de l'art.
(Applaudissements
sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Lanier.
M. Lucien Lanier.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, le présent
projet de loi relatif à la réglementation des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques se substitue à celui qui fut déposé le 9 avril 1997 sans
cependant - et nous le regrettons profondément - afficher autant
d'ambitions.
C'est pourquoi la commission des lois, saisie au fond, comme la commission des
finances et la commission des affaires culturelles saisies pour avis - et je
voudrais souligner le remarquable travail accompli par MM. les rapporteurs -
ont modifié sensiblement le projet déposé par le Gouvernement en premier lieu
au Sénat.
L'organisation actuelle des ventes aux enchères effectuées par des
commissaires-priseurs, officiers ministériels, jouissant d'un monopole, ne
correspondait plus à la réglementation européenne. Ce monopole, voire ce
privilège, était d'ailleurs devenu, au fil du temps, une entrave, ce qui
explique, parmi d'autres facteurs, la baisse des ventes à Paris, au regard des
résultats obtenus par les deux grandes sociétés anglo-saxonnes Sotheby's et
Christie's.
Le 10 mars 1995 - l'historique de cette question a été parfaitement exposé
dans le rapport de notre excellent collègue M. Dejoie - la Commission
européenne a finalement mis en demeure notre pays de se conformer au traité de
Rome sur la liberté des prestations de service et sur le droit d'établissement
au sein de la Communauté. Il devenait donc indispensable de légiférer, et c'est
ainsi que Jacques Toubon, alors garde des sceaux, avait déposé un premier
projet de loi dès le début de l'année 1997. Il aura fallu, madame la ministre -
je le dis sans aucune acrimonie - plus de deux ans pour que le Gouvernement
soumette à nouveau un texte au Parlement. Un tel retard est effectivement
préjudiciable.
Il est vrai que la nouvelle réglementation s'inspire fortement du projet de
1997. Elle n'apparaît donc pas foncièrement critiquable. Il suffit simplement
de corriger un certain nombre de négligences de rédaction, de supprimer
certaines facilités dangereuses et de modifier la composition du conseil des
ventes volontaires.
En revanche, le dispositif d'indemnisation mis en place pour les
commissaires-priseurs appelle les plus expresses réserves. Le projet de loi
porte sur l'organisation des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques, les commissaires-priseurs demeurant seuls compétents, sauf
exception, pour organiser les ventes judiciaires.
Après avoir précisé que les ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques ne peuvent porter, en principe, que sur des biens d'occasion, le
texte prévoit que ces ventes seront désormais « organisées et faites par des
sociétés de forme commerciale », sauf l'exception prévue en faveur des notaires
et des huissiers de justice, dont l'activité est marginale dans ce domaine.
Les sociétés pourront, en fait, revêtir les formes les plus variées et ne
seront pas soumises à un tarif réglementé. On ne peut qu'approuver cette
souplesse.
Les articles 3 à 15 réglementent l'objet et les conditions de fonctionnement
des sociétés de ventes volontaires, le niveau de compétence de leurs
dirigeants, associés ou salariés, l'organisation des ventes et les garanties
offertes aux vendeurs comme aux acheteurs.
Concernant l'objet des sociétés de ventes volontaires, il est, aux termes de
l'article 3, « limité à l'estimation de biens mobiliers et à la réalisation de
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ».
Cette rédaction paraît - peut-être à tort - lier l'estimation des biens à leur
vente volontaire, c'est-à-dire exclure une activité de conseil, qui était de la
compétence des commissaires-priseurs. Il arrive assez souvent, en effet, que
l'on demande à ces derniers de procéder à l'estimation de biens mobiliers en
dehors de tout intention de vente, notamment dans le cadre de successions ou de
partages.
En conséquence, les sociétés de ventes volontaires seront-elles habilitées à
procéder à des estimations dans les mêmes conditions ? J'aimerais sur ce point,
madame le ministre, obtenir quelques précisions.
Cela dit, sans revenir sur diverses dispositions qui ont été exposées avec
talent et analysées en profondeur par MM. les rapporteurs, permettez-moi de
relever quelques points.
Ainsi, le deuxième alinéa de l'article 3 reprend, pour les sociétés de vente,
qui sont de simples mandataires, l'interdiction traditionnellement faite aux
commissaires-priseurs d'acheter ou de vendre pour leur propre compte des biens
proposés à la vente aux enchères publiques, mais autorise, à titre
exceptionnel, les dirigeants, associés et salariés de ces sociétés à vendre des
biens leur appartenant, sous une simple condition de publicité.
La contradiction n'est-elle pas dangereuse ? Je partage, sur ce point, la
méfiance de la commission des lois, qui nous propose de supprimer cette
exception.
Les garanties prévues par le projet de loi en matière d'organisation et de
solidité financière des sociétés de vente, par exemple en matière de niveau de
diplômes et de qualification des dirigeants, associés et salariés de ces
sociétés, paraissent sérieuses. L'article 7 prévoit en particulier qu'une
personne au moins parmi ces dirigeants, associés ou salariés devra remplir les
conditions requises pour exercer l'activité de commissaire-priseur, et
l'article 8 précise que seules ces personnes seront habilitées à tenir le
marteau.
Certaines facilités sont offertes en matière de vente de gré à gré, de prix
garanti ou d'avance sur le prix du bien proposé à la vente. Inspirées des
pratiques des grandes maisons de vente anglo-saxonnes, ces mesures vont tout à
fait dans le sens de cette souplesse nouvelle qu'on ne peut qu'approuver, ainsi
d'ailleurs que la réglementation du prix de réserve.
La réglementation du statut des commissaires-priseurs devenant caduque, le
projet de loi met en place un conseil des ventes volontaires, doté de la
personnalité morale. Il sera notamment chargé d'agréer les sociétés de ventes
aux enchères et de vérifier si elles remplissent les conditions requises pour
enregistrer les déclarations préalables des ressortissants européens désireux
d'organiser des ventes en France. Ce conseil interviendra non seulement en
amont mais également en aval puisqu'il pourra s'opposer à l'organisation d'une
vente et disposera de compétences disciplinaires.
Le conseil sera composé de personnes qualifiées désignées par les ministres
intéressés et par des « représentants des professionnels ». On peut penser
qu'il convient d'entendre cette dernière expression au sens large et qu'il
pourra s'agir de toute personne travaillant dans une société de ventes, y
compris les salariés, et non pas seulement de celles des personnes qui
remplissent les conditions requises pour exercer l'activité de
commissaire-priseur.
On peut également supposer - car le texte n'en souffle mot, et c'est fâcheux -
que les représentants des professionnels seront élus par leurs pairs. Tout
autre mode de désignation paraîtrait en effet difficilement acceptable. La
commission des lois a d'ailleurs prévu d'introduire dans le texte cette utile
précision et de porter à six le nombre des représentants des professionnels.
Les articles 21 à 25 réglementent l'ouverture du territoire français aux
ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne concernant les
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. Le texte répond ainsi aux
légitimes exigences des instances communautaires, comme, sans aucun doute, aux
intérêts de notre pays : cette ouverture devrait en effet contribuer à « doper
» les ventes en France et à renforcer, en particulier, le rôle de la place de
Paris dans le marché international des objets d'art.
Demeure le grave problème de l'indemnisation des commissaires-priseurs et,
accessoirement - bien que le projet de loi n'en fasse pas mention - celui du
régime fiscal qui accompagnera les restructurations inévitablement entraînées
par la réforme.
C'est ici, constatons-le à regret, qu'on peut prendre la mesure de
l'indifférence du Gouvernement à l'égard du secteur des ventes publiques aux
enchères et, plus généralement, du marché de l'art.
On sent bien que ce projet de loi n'est - tardivement - soumis au Parlement
qu'en raison de l'obligation d'obéir aux injonctions communautaires et que le
Gouvernement considère par trop - je le dis sans acrimonie, croyez-le bien,
madame le ministre - que ce secteur d'activité fonctionne essentiellement pour
des privilégiés, les commissaires-priseurs étant trop souvent eux-mêmes
considérés comme des nantis.
Nous déplorons donc que l'on ne favorise pas comme on aurait pu le faire à
l'occasion de cette réforme le marché des objets d'art et que l'on n'indemnise
pas de manière équitable des officiers ministériels dont on supprime le
monopole.
Remercions ici de son très remarquable travail notre collègue Yann Gaillard,
rapporteur pour avis de la commission des finances, qui, conscient de
l'importance du marché de l'art dans notre pays, marché qu'il a largement
étudié dans un rapport aussi clair que pertinent, s'est prononcé sur le
fondement juridique de la suppression des charges des commissaires-priseurs et
propose donc une procédure d'indemnisation beaucoup plus juste.
Là où le Gouvernement ne voit qu'une « sorte de servitude d'alignement
européenne pesant sur les commissaires-priseurs et accessoirement sur les
huissiers et les notaires, dont l'indemnisation ne serait que celle du
préjudice au nom de l'égalité devant les charges publiques », la commission des
finances, au contraire, distingue très justement un cas de privation et de
dénaturation du droit de propriété et considère, en accord avec la commission
des lois, que le fondement juridique de l'indemnisation doit être
l'expropriation.
En conséquence, la suppression partielle du droit de présentation dont
bénéficiaient les commissaires-priseurs doit faire l'objet d'une indemnisation
conforme à l'article XVII de la Déclaration des droits de l'homme et du
citoyen.
L'analyse du Gouvernement aboutit à réduire de moitié, de façon forfaitaire -
et, disons-le, fantaisiste -, l'indemnité due aux commissaires-priseurs, ce qui
ne correspond à aucune réalité économique et à aucune justification
juridique.
Le projet de loi de 1997 disposait, lui, que les commissaires-priseurs étaient
« indemnisés en raison de la suppression du droit de présentation de leur
successeur dans le secteur des ventes volontaires », ce qui avait le mérite de
la clarté et était conforme à la réalité.
Les modalités de calcul retenues par le Gouvernement sont, en revanche, un
modèle de complexité et, souvent, d'arbitraire. Car comment savoir si
l'importance de l'endettement contracté par les commissaires-priseurs peut être
prise en compte ?
Même si l'on tient compte de la difficulté qu'entraîne le fait que les
commissaires-priseurs ne perdent pas l'intégralité de leur monopole et le fait
qu'ils auront la faculté de continuer d'exercer leur activité de ventes
volontaires, le système proposé par le Gouvernement s'apparente quand même à
une quasi-spoliation.
Aussi suivrons-nous notre commission des finances, qui propose le choix entre
une indemnité forfaitaire égale à 50 % de la valeur de l'office et une
indemnité au cas par cas, laquelle permettrait de compenser le préjudice réel
subi par chaque commissaire-priseur.
En outre, notre commission des finances propose une série d'articles
additionnels qui organisent le traitement fiscal des apports effectués par les
commissaires-priseurs aux sociétés de ventes.
Avec un double souci de justice et d'efficacité économique, elle aménage un
cadre fiscal neutre, car il serait effectivement injuste, pour ne pas dire
cynique, que des restructurations forcées donnent lieu à la perception
d'impôts.
La commission des finances rend applicable l'article 809 du code général des
impôts aux apports effectués par la société civile professionnelle ou les
sociétés d'exercice libéral non soumises à l'impôt sur les sociétés afin
d'éviter que les apports ne soient taxés au taux normal de 8,60 %.
Elle instaure un régime fiscal spécifique pour les commissaires-priseurs
parisiens qui feraient des apports par l'intermédiaire de leur compagnie. Cet
article est destiné à maintenir la compétitivité de l'Hôtel Drouot,
indispensable au dynamisme du marché de l'art.
En outre, un article additionnel aménage le régime fiscal de l'indemnité en
l'imposant à 16 % pour la part qui n'est pas affectée au remboursement des
emprunts contractés pour l'acquisition de l'office et un report d'impôt en cas
de souscription de parts ou d'actions des sociétés de ventes volontaires.
Enfin, il convient de s'interroger sur le montant de l'indemnisation dont
pourrait bénéficier le personnel licencié des offices de commissaire-priseur.
En l'absence de toute précision dans le projet de loi soumis au Parlement, la
commission des lois souhaite introduire un article additionnel après l'article
44 prévoyant une indemnisation équitable de ce personnel.
Mes chers collègues, ce texte, tant attendu à la fois par les professionnels
du marché de l'art et par tous ceux qui ont du goût, ce texte que rendait de
toute façon nécessaire l'évolution du marché de l'art doit permettre, d'une
part, à la France d'éviter de se marginaliser et, d'autre part, d'adapter la
profession aux nouvelles donnes du marché. Les mesures prévues et les
amendements proposés par nos rapporteurs devraient permettre de dynamiser un
marché qui est loin d'être négligeable dans un pays où la spécialisation, sur
le plan international, comporte notamment des produits à fort contenu
culturel.
C'est pourquoi le groupe du Rassemblement pour la République votera ce texte
sous réserve de l'adoption des amendements proposés par nos commissions.
(Applaudissements sur les travées du RPR ainsi que sur le banc des
commissions.)
M. le président.
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'Union
européenne intensifie chaque jour sa construction. Il convient, comme nous le
rappelle ce projet de loi, d'en respecter complètement les bases et grands
principes.
Ainsi, le traité de Rome pose, en son article 59, le principe de la libre
circulation des services.
En 1992, la société Sotheby's a soulevé la non-conformité de l'organisation
des ventes publiques françaises. La Commission européenne ayant été saisie, une
première mise en demeure a été adressée à la France en 1995.
Depuis, des propositions inadaptées, émanant de différents gouvernements, et
des calendriers parlementaires chargés ont repoussé la discussion de ce texte ;
celle-ci, aujourd'hui, ne peut plus être différée.
En tout état de cause, l'organisation des ventes publiques, dont les bases
remontent au xvie siècle, et la dimension du marché de l'art, qui représente en
France environ 60 % du chiffre d'affaires des ventes publiques, rendent
indispensable la modernisation.
Premier au monde il y a plus de cinquante ans, le marché de l'art français a
perdu sa place face à New York et à Londres.
Entre 1991 et 1994, le chiffre d'affaires des commissaires-priseurs était
compris entre 7,3 milliards de francs et 8 milliards de francs alors que celui
de Sotheby's et celui de Christie's étaient de l'ordre de 6 milliards à 7
milliards de francs. En 1997, avec des chiffres d'affaires d'environ 11
milliards de francs, les deux firmes distancent leurs concurrents français de
plus de 2,5 milliards de francs.
S'agissant des faiblesses qualitatives, l'excellent rapport de notre collègue
Yann Gaillard fournit, là aussi, des chiffres inquiétants. En ce qui concerne,
par exemple, la peinture et le dessin, le marché français, en 1997-1998, ne
représentait que 5,7 % du marché mondial, c'est-à-dire un chiffre d'affaires
d'un peu plus de 830 millions de francs, contre près de 50 % pour les
Etats-Unis et près de 30 % pour la Grande-Bretagne.
Prise en compte de l'internationalisation et de la globalisation du marché de
l'art, conditions commerciales attractives, énormes opérations de marketing
sont autant d'atouts que les Anglo-saxons ont su créer et développer, afin de
répondre à une clientèle plus riche et souvent à la recherche d'une
plus-value.
Les commissaires-priseurs français ne peuvent plus rivaliser avec de telles
firmes. D'ailleurs, Sotheby's vient d'organiser dans les Yvelines, en
association avec une étude parisienne, puisque la célèbre maison ne pouvait
encore tenir le marteau, la vente aux enchères du mobilier du château de
Groussay. Ce fut un succès tant médiatique que financier : les 100 millions de
francs espérés pour l'ensemble des 10 000 objets proposés à la vente ont été
dépassés dès le troisième jour, sur les cinq prévus, avec 115 millions de
francs enregistrés. Les estimations y ont été pulvérisées. Les expositions
avant la vente ont attiré en quatre jours 25 000 visiteurs, et de grands
marchands internationaux étaient présents.
Il faut permettre à la France de conserver son troisième rang mondial. Notre
pays est un berceau et une terre des arts : marchands, collectionneurs,
artistes, tous et de tout temps ont considéré notre pays comme un lieu
essentiel de développement de l'art.
Les expositions et les musées sont nombreux et fréquentés, tant à Paris qu'en
province.
Le patrimoine français est l'un des plus abondants et des plus diversifiés au
monde, mais aussi, comme le souligne le président-directeur du Louvre, l'un des
plus imprévisibles. Il n'est pas rare, en effet, que des chefs-d'oeuvre perdus
ou inconnus réapparaissent ou soient découverts à la faveur du hasard.
La renommée de Paris et celle de l'Hôtel Drouot sont considérables.
La multitude de musées et de galeries ainsi qu'une activité créatrice
omniprésente font de Paris une exposition permanente.
Mais il convient aussi de souligner la bonne santé relative des
commissaires-priseurs de province, particulièrement sensible après la crise du
début des années 1990. Certes, les oeuvres d'art représentent 60 % de leur
chiffre d'affaires contre 80 % pour Paris, mais les adjudications d'oeuvres
d'art en province ont doublé entre 1987 et 1997, pour une hausse de 55 % à
Paris au cours de la même période.
L'art est une caractéristique première de notre pays, et il convient de
l'exploiter davantage pour favoriser le marché français : l'art ancien, bien
entendu, qui, en dépit des inquiétudes dues aux incertitudes réglementaires qui
pesaient sur le marché français en l'absence de cette réforme, reste un secteur
très porteur ; mais aussi l'art contemporain, domaine dans lequel la domination
new-yorkaise semble maintenant irréversible.
Néanmoins, de nombreux efforts doivent être faits en France : aides accrues
aux créateurs et aux galeries, manifestation de plus d'intérêt de la part des
médias et développement de la culture artistique dans l'enseignement scolaire
sont autant d'axes essentiels pour favoriser la création contemporaine.
Dans le cadre de cette réforme, des adaptations sont nécessaires. Les actuels
commissaires-priseurs devront créer des réseaux, s'allier, sans trop
bouleverser leur structure première qui permet une flexibilité et une
connaissance des marchés régionaux indispensables.
Ils devront, ce dont ils ont déjà pris conscience, affirmer leur présence sur
le plan mondial en développant des accords internationaux.
Enfin, le développement du commerce électronique, l'intégration des nouvelles
technologies dans leur méthode de travail deviennent aujourd'hui
indispensables.
La transition sera, certes, difficile, mais cette réforme des ventes publiques
aux enchères devra être rapide pour défendre efficacement la place du marché de
l'art français.
Madame la ministre, nous nous félicitons que la loi sur les
commissaires-priseurs puisse voir le jour rapidement malgré le retard important
qui a été pris. Mais, en complément, une réforme indispensable pour la
protection de notre patrimoine est réclamée par tous. En effet, le souci de la
protection du patrimoine mobilier qui s'est développé à partir de la fin du
siècle dernier en raison des achats d'oeuvres, et qui a coïncidé avec
l'enrichissement considérable des collectionneurs américains, a obligé l'Etat à
mettre en place un arsenal juridique et réglementaire. Celui-ci comprend le
droit de préemption dans les ventes publiques, le droit de rétention, le droit
d'interdire l'expatriation et le droit de classer d'office un objet au titre
des monuments historiques.
La constitution, par l'Union européenne, d'un marché unique à partir de 1993 a
rendu nécessaire la révision de cette législation étroitement
protectionniste.
L'article 36 du traité de Rome prévoit des exceptions au principe de la libre
circulation des marchandises, qui sont justifiées par des raisons de protection
des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique.
Tel était l'objet de la loi du 31 décembre 1992, qui s'avère aujourd'hui
insuffisante et nécessite une réforme qui devrait tendre à favoriser
l'acquisition, par la puissance publique, des trésors nationaux, à un prix fixé
par référence au marché international.
Plusieurs mesures sont réclamées d'urgence, je citerai, entre autres,
l'augmentation de la durée de validité du certificat d'exportation de biens
culturels qui n'ont pas le caractère d'un trésor national et la création d'une
procédure d'acquisition de gré à gré des trésors nationaux, proche de celle qui
a fait ses preuves au Royaume-Uni. A défaut d'accord amiable, deux experts
seraient désignés, l'un par l'Etat, l'autre par le propriétaire, qui rendraient
leur avis sur la valeur de l'oeuvre. En cas de divergence, un tiers expert, à
l'avis déterminant, serait désigné d'un accord commun.
Je sais, madame la ministre, que des certificats pour des oeuvres de Cézanne,
Degas, Picasso, Renoir arriveront à expiration cette année. Nous comptons sur
vous et sur le Gouvernement pour que soit inscrit d'extrême urgence à l'ordre
du jour du Parlement, un projet ou une proposition de loi permettant de
sauvegarder notre patrimoine national et complétant le texte que nous sommes en
train d'élaborer. Je le répète, il y a urgence.
(Applaudissements sur les
travées socialistes. - MM. les rapporteurs pour avis applaudissent
également.)
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le président,
monsieur le président de la commission des affaires culturelles, messieurs les
rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je n'ai pu, malheureusement,
assister à l'intervention de ma collègue Elisabeth Guigou, qui a été obligée de
s'absenter. Je dois dire que j'ai plaisir à pouvoir m'associer à la fois au
travail qu'elle a réalisé et aux orientations qu'elle vous a présentées.
Au travers des rapports, excellents et extrêmement instructifs, mais aussi des
interventions qui viennent d'être prononcées, vous avez souhaité montrer
l'importance de cette réforme pour le marché de l'art français. Bien entendu,
le Gouvernement en est particulièrement convaincu.
L'ensemble des rapports qui ont été présentés ce matin partagent, dans leurs
grandes lignes, le souci de mettre en oeuvre le dispositif le mieux adapté
permettant de répondre à la nécessité d'une ouverture européenne du marché tout
en assurant - cela a été dit ici avec force, me semble-t-il, - la compétitivité
des professionnels français.
Je souhaite remercier M. Dejoie, rapporteur de la commission des lois, qui a
su mettre en valeur les aspects protecteurs du projet de loi à l'égard du
consommateur et les garanties apportées aux professionnels. Il est
effectivement très important que l'ouverture du marché ne vienne pas
compromettre la grande qualité de notre système de ventes publiques.
M. Gouteyron, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles,
a souligné les avancées contenues dans ce projet de loi, notamment en ce qui
concerne les ventes de gré à gré et le statut des experts. Les conditions
d'application du développement des ventes sur Internet méritent, en effet,
d'être précisées, en particulier en ce qui concerne l'exercice du droit de
préemption.
Enfin, M. Gaillard, rapporteur pour avis de la commission des finances, a
précisé quelle était l'évolution économique actuelle du marché de l'art dans
notre pays. Il a insisté, à juste titre, sur les mesures d'accompagnement de la
réforme en matière de fiscalité : la TVA à l'importation, le droit de suite et
les autres taxes qui pénalisent aujourd'hui le marché intérieur ou la position
de la France au sein du marché européen et international.
Sur ce point, monsieur Gaillard, le Gouvernement partage pleinement votre
souci d'aboutir, dans les plus brefs délais, à une harmonisation européenne de
la fiscalité du marché de l'art. L'étude qui a été réalisée au niveau de la
Commission européenne démontre que le marché français a été pénalisé par cette
distorsion dans l'application des dispositions fiscales.
Je reviendrai, lors de l'examen des articles, sur les différentes questions
qui ont été évoquées dans la discussion générale, afin d'expliquer la position
du Gouvernement. Mais je tiens, d'ores et déjà, à saluer la grande qualité du
travail d'analyse, de réflexion et de proposition de l'ensemble des
commissions, qui contribuera, j'en suis certaine, à améliorer le projet de loi
qui vous est soumis aujourd'hui.
M. Bret s'est montré très pessimiste sur l'avenir du marché français. Je ne
peux pas partager ce sentiment, car nous ne devons pas partir perdants en la
matière, même si nous sommes tous conscients des difficultés qui existent.
Le projet de loi présenté par le Gouvernement permet d'ouvrir le marché, afin
de dynamiser le secteur. Il donne aussi des garanties quant aux éléments qui en
ont fait sa réputation : exigence non seulement dans la déontologie des ventes
publiques, mais aussi dans la qualité scientifique et artistique.
En ce qui concerne la vente qui a été réalisée récemment par la société
Sotheby's, deux commissaires-priseurs parisiens y ont prêté leur concours, dans
le respect de leurs obligations. La vente a donc eu lieu dans des conditions
régulières.
Par ailleurs, je ne partage pas l'affirmation de Mme Derycke selon laquelle la
profession de commissaire-priseur allie art, argent et justice. Nous devons
trouver la façon de faire évoluer ce lien qui, parfois, n'est pas toujours
compris par l'ensemble de nos concitoyens.
Il s'agit d'une profession qui conserve une part de rêve. Dans le projet de
loi figure encore la référence à la « folle enchère ». Il faut que nous
puissions, pour la défense du français, faire comprendre combien ces
expressions ont un sens : elles sont la fierté d'un métier ! Toutefois, le rêve
ne doit pas empêcher de faire face aux réalités économiques. Je crois, comme
vous, que le présent projet de loi répond aux exigences de liberté, de sécurité
et de transparence auxquelles nous sommes tous attachés.
Je souhaite dire à lui que les compétences de nos professionnels sont
pleinement reconnues à l'étranger. Je crois, comme lui, que l'un des défis
qu'ils ont à relever est d'être plus entreprenants pour s'implanter et
travailler hors de nos frontières. Ce texte y contribuera, et je remercie le
groupe de l'Union centriste de bien vouloir l'approuver, sous réserve, bien
entendu, de l'adoption d'amendements.
Par ailleurs, contrairement à ce qu'a indiqué M. Lanier, le projet du
Gouvernement me paraît plus ambitieux que le précédent : les dispositions les
plus judicieuses ont été reprises, en tenant compte de l'ensemble des pratiques
et en les encadrant, ce qui permettra d'améliorer l'essor du marché.
En revanche, il est certain que les mesures proposées dans ce texte sont moins
onéreuses, ce qui nous évitera un recours tendant à contester les aides de
l'Etat.
Nous n'avons pas voulu, précisément, prévoir un alignement. Il aurait suffit,
dès lors, de permettre la libre prestation de services.
M. Lagauche a cité des chiffres qui permettent de mesurer la place de la
France dans le marché. Il nous a fait part de son souci de voir compléter le
dispositif par un projet ou par une proposition de loi relatif aux objets
mobiliers et, en particulier, à l'exercice du droit de préemption que l'Etat
peut exercer.
La France dispose d'un patrimoine particulièrement riche auquel nous sommes
attachés. Mais c'est aussi la raison pour laquelle nous risquons de plus en
plus de voir des ventes concernant des objets patrimoniaux français se réaliser
à l'extérieur de notre pays. L'enjeu consiste non pas à nous situer plus haut à
l'exportation, mais, au contraire, à conforter notre place à l'importation, de
façon à consolider fermement le marché de l'art en France.
La France est un lieu privilégié pour sa culture et son patrimoine et je ne
doute pas du dynamisme de tous les acteurs du marché.
Je pense, comme vous, qu'il est indispensable d'améliorer le dispositif en ce
qui concerne la circulation des oeuvres d'art.
Par ailleurs, je rappellerai que nous sommes extrêmement exigeants et
vigilants en ce qui concerne la dégradation des châteaux et le comportement,
que j'estime tout à fait préjudiciable, de certains propriétaires qui pillent
ou laissent détruire leur bien. Nous avons ainsi souhaité mettre en oeuvre le
droit qu'a l'Etat de retirer la propriété à ceux qui ne respectent pas des
bâtiments classés.
Autant nous voulons protéger notre patrimoine, autant nous devons réguler ce
marché et rendre les professionnels français parfaitement à même d'y être bien
présents pour répondre à ce souci, en associant l'intérêt public, celui des
propriétaires et des professionnels.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Chapitre Ier
Les ventes volontaires de meubles
aux enchères publiques
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - Les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ne
peuvent porter que sur des biens d'occasion ou sur des biens neufs issus
directement de la production du vendeur non commerçant ou non artisan. Ces
biens sont vendus au détail et par lot.
« Sont considérés comme d'occasion les biens qui, à un stade quelconque de la
production ou de la distribution, sont entrés en la possession d'une personne
pour son usage propre, par l'effet de tout acte à titre onéreux ou à titre
gratuit. »
Par amendement n° 1, M. Gouteyron, au nom de la commission des affaires
culturelles, propose de rédiger ainsi le premier alinéa de cet article :
« Les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ne peuvent porter
que sur des biens d'occasion ou sur des biens neufs issus directement de la
production du vendeur si celui-ci n'est ni commerçant ni artisan. Ces biens
sont vendus au détail. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement, n° 112 présenté par le
Gouvernement et tendant à compléter,
in fine
, la seconde phrase du texte
de l'amendement n° 1 par les mots : « et par lot ».
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 1.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
L'article 1er dispose, comme le faisait déjà la loi
de 1841, que les ventes volontaires aux enchères publiques ne peuvent porter
que sur des biens d'occasion. Les exceptions à ce principe de base reprennent
des dispositions jurisprudentielles bien connues et bien établies.
L'amendement n° 1 est purement rédactionnel.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre, pour donner l'avis du Gouvernement sur
l'amendement n° 1 et pour présenter le sous-amendement n° 112.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Nous n'avons pas considéré
que l'amendement n° 1 était purement rédactionnel.
Je ne suis pas favorable à la disparition de la précision selon laquelle les
biens sont vendus par lot. En effet, la vente par lot correspond à une pratique
habituelle. La notion de « lot » signifie que le bien vendu peut être
constitué, au choix du vendeur, de plusieurs objets et, dans ce dernier cas,
l'ensemble de ces objets forme un lot. Il n'y a pas d'ambiguïté possible, me
semble-t-il, avec la vente en gros.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a déposé un sous-amendement n°
112 tendant à compléter la seconde phrase du texte de l'amendement n° 1 par les
mots : « et par lot. »
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission des lois est favorable tant à l'amendement
qu'au sous-amendement. Ainsi, tout le monde sera satisfait !
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je souhaite simplement faire remarquer que notre
amendement ne supprime pas la possibilité de procéder à des ventes par lot.
Cela étant, je suis favorable au sous-amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 112, accepté par la commission.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 1, accepté par la commission
et par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, ainsi modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - Les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques sont,
sauf dans les cas prévus à l'article 52, organisées et faites par des sociétés
de forme commerciale régies par la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les
sociétés commerciales, et dont l'activité est réglementée par les dispositions
de la présente loi.
« Ces ventes peuvent également être organisées et faites par les notaires et
les huissiers de justice. Cette activité est exercée dans le cadre de leur
office et selon les règles qui leur sont applicables. Ils ne peuvent être
mandatés que par le propriétaire des biens. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 103, est présenté par Mme Derycke, M. Lagauche et les membres
du groupe socialiste et apparentés.
Le second, n° 110, est déposé par M. François.
Tous deux tendent, dans le premier alinéa de cet article, après les mots : «
enchères publiques », à insérer les mots : « , par quelque procédé que ce soit,
».
La parole est à M. Derycke, pour défendre l'amendement n° 103.
Mme Dinah Derycke.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 103 est retiré.
L'amendement n° 110 est-il soutenu ?...
Par amendement n° 30, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans le premier alinéa de l'article 2, de remplacer le mot : « faites » par le
mot : « réalisées ».
La parole et à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement d'harmonisation rédactionnelle, que
l'on retrouvera à plusieurs reprises.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 31, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans la première phrase du second alinéa de l'article 2, de remplacer le mot :
« faites » par le mot : « réalisées ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement est identique au précédent.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 32, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans la troisième phrase du second alinéa de l'article 2, de remplacer le mot :
« propriétaire » par le mot : « vendeur ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Dans le texte qui nous est présenté, les mots « vendeur » et
« propriétaire » sont utilisés alternativement et indifféremment. La commission
des lois considère qu'il est judicieux d'employer le mot « vendeur » partout,
ce qui correspond mieux à la réalité. En effet, un vendeur est toujours
propriétaire, mais un propriétaire n'est pas toujours un vendeur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je reconnais pleinement la
justesse de l'observation de M. le rapporteur. Nous n'avons en effet pas
utilisé le même mot partout, et j'apprécie sa volonté de simplification et
d'harmonisation.
Cependant, je ne peux être d'accord avec le choix fait au profit du mot «
vendeur ». En effet, il est important que seul le propriétaire de biens puisse
donner mandat de vendre. Un vendeur n'est pas nécessairement un propriétaire ;
ce peut être aussi un mandataire qui fait écran entre le propriétaire des biens
et le professionnel, et empêche ce dernier de contrôler non seulement l'origine
des biens mais aussi la réalité du consentement pour vendre.
Voilà pourquoi nous avons tenu compte de votre observation en proposant, à
l'article suivant, de remplacer le mot « vendeur » par les mots « propriétaire
des biens », par souci d'harmonisation.
En l'occurrence, je le reconnais, nos positions sont différentes, même si nous
partageons le même souci.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Nous allons tomber dans la sémantique mais j'ai la faiblesse
de penser que l'analyse de la commission des lois est plus conforme à la
réalité. Un propriétaire n'est pas forcément un vendeur ; un vendeur ne peut
pas être un mandataire, ou qui l'on veut, ce ne peut être que le propriétaire.
On n'imagine pas que je vende un bien qui ne m'appartienne pas ; je n'en n'ai
pas le droit. Pour être vendeur, il faut que je sois propriétaire.
M. René-Georges Laurin.
Bien sûr !
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
C'est l'évidence, sinon biblique du moins sémantique. La
commission a longuement réfléchi avant de choisir le mot « vendeur », auquel
nous tenons ; pardonnez-nous madame la ministre.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 32.
M. René-Georges Laurin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Laurin.
M. René-Georges Laurin.
Je suis totalement d'accord avec la commission des lois. Nous avons discuté de
l'ensemble du problème.
Je rappelle simplement, à l'intention de ceux qui ne connaissent pas les
traditions et les exigences juridiques en matière de ventes publiques, que le
commissaire-priseur demande à la personne qui lui remet un objet à vendre de
justifier de son identité. Aussi, c'est l'interprétation de la commission qui
prévaut, et absolument pas celle qui a été exposée par le Gouvernement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article additionnel après l'article 2
M. le président.
Par amendement n° 2, M. Gouteyron, au nom de la commission des affaires
culturelles, propose d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi
rédigé :
« Les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques réalisées à
distance par voie électronique sont soumises aux dispositions de la présente
loi. »
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Dans mon intervention liminaire, j'avais annoncé
cet amendement, qui me paraît avoir une certaine importance. En effet, il
précise que les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques organisées
sur Internet sont soumises aux dispositions de la présente loi. Comme je l'ai
dit tout à l'heure, il répond à deux objectifs.
D'abord, il vise à protéger les sociétés de ventes d'une concurrence qui, de
ce fait, ne serait pas équitable. Ensuite, il tend à permettre explicitement
aux sociétés de ventes d'organiser des ventes aux enchères sur Internet, alors
que certaines dispositions du projet de loi pouvaient laisser subsister une
incertitude sur ce point.
Une telle disposition serait conforme, nous semble-t-il, aux règles
européennes telles qu'elles résulteraient de la proposition de directive
relative à certains aspects du commerce électronique. Celle-ci précise en effet
que les services de la société de l'information doivent être soumis au régime
juridique de l'Etat membre dans lequel le prestataire de services est
établi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Nous le savons bien, l'amendement ne réglera pas tous les
problèmes. La compatibilité du texte avec le système de vente par Internet
n'est pas totalement démontrée.
Toutefois, il nous paraît indispensable d'évoquer cette question. Aussi, la
commission des lois souhaiterait entendre les explications de Mme le ministre
avant de se prononcer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Les ventes volontaires de
meubles aux enchères publiques se caractérisent par trois éléments :
l'ouverture au public, des enchères et la nature mobilière des biens vendus. Si
l'un des éléments fait défaut, il ne s'agit plus de vente volontaire de meubles
aux enchères publiques et la présente législation n'est pas applicable.
Le développement d'Internet aura des incidences sur les modalités
d'organisation des enchères dans la mesure où celles-ci pourront être portées
par ce canal. Toutefois ce procédé se distingue peu des enchères par téléphone
qui est une pratique largement utilisée. Bien entendu, les enchères portées par
le biais d'Internet doivent être entourées des mêmes précautions que les
enchères par téléphone afin d'éviter les enchères fictives. En revanche, si une
vente était organisée sur le seul réseau Internet, sans aucun lien avec le
déroulement d'une vente dans une salle des ventes, il faudrait considérer
qu'elle n'est pas ouverte à l'ensemble du public et qu'en conséquence les
dispositions de la présente loi ne seraient pas applicables.
Dans l'avenir, la directive relative au commerce électronique, actuellement en
cours de négociation à Bruxelles, permettra de fait de réglementer les contrats
entièrement conclus en ligne, et donc les ventes réalisées par Internet. Mais
ces ventes, comme je l'ai indiqué, ne peuvent être considérées comme des ventes
publiques car elles seront réservées à ceux qui seront en ligne, c'est-à-dire
aux internautes. Il s'agira de ventes purement commerciales, et non de ventes
aux enchères publiques comme celles qui sont visées par le présent projet de
loi.
C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. René-Georges Laurin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Laurin.
M. René-Georges Laurin.
Les auteurs de la solution électronique se bercent totalement d'illusions.
Nombre de commissaires-priseurs, que je connais, placent dans Internet un
espoir fou quant à la hausse du prix des objets. Je ne partage pas ce
sentiment.
Les réserves que Mme le ministre vient d'émettre sont minimales. Il faut
renvoyer l'ensemble de ce problème au projet de loi sur le commerce
électronique. Lors de l'examen de celui-ci, il sera aisé d'adopter, si cela
paraît utile, un amendement prévoyant que le dispositif s'applique aux ventes
publiques. Personnellement, je suis contre l'amendement n° 2. Je ne souhaite
pas que ce problème soit résolu aujourd'hui, alors qu'existent les pires
difficultés et de très nombreuses surprises, notamment en ce qui concerne le
paiement par les personnes qui achètent par le biais d'Internet, et pas
seulement pour les ventes publiques.
Il est mauvais de continuer à répandre l'illusion que la voie électronique est
un moyen pratique. Il faut attendre les résultats précis des enquêtes qui sont
réalisées sur cette question, notamment aux Etats-Unis où le phénomène a pris
une très grande ampleur. A mon avis, il convient d'être prudent.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 2 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je rappelle que cet amendement émane de la commission des
affaires culturelles. Il est préférable d'attendre un texte qui réglera le
problème, a dit M. Laurin. En attendant, que fait-on ? Je n'en sais rien.
Tout à l'heure, j'ai parlé de compatibilité. Je me demande si l'adoption de
cet amendement ne serait pas de nature à gêner un développement anarchique de
ces ventes par Internet. Certes, face à l'impossibilité d'agir, on sera bien
forcé de sortir un texte. Mais, en attendant, l'adoption de cet amendement
pourrait permettre d'éviter certaines dérives.
Sous le bénéfice de cette remarque pragmatique, sinon juridique, j'émets un
avis favorable.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je me réjouis de l'avis que vient d'émettre la
commission saisie au fond. Je ferai remarquer à mon ami M. Laurin que, comme
vient de le relever le rapporteur M. Dejoie, une partie de ses arguments se
retourne contre la position qu'il a défendue.
Madame la ministre, je maintiens bien entendu cet amendement, ne serait-ce que
pour poser le problème, qui est bien réel. On ne peut attendre. Ce sujet
justifie une étude approfondie. Je vais tenter de répondre aux deux objections
que vous avez présentées. Puisque l'occasion nous est donnée de débattre sur ce
point, il faut la saisir, même si nous n'allons pas jusqu'au bout de la
discussion.
Une vente aux enchères par Internet ne serait pas une vente publique,
avez-vous dit, madame la ministre. Cela est tout de même difficile à admettre.
En effet, si la participation à la vente n'est soumise à aucune condition, la
vente, quel que soit le lieu, matériel ou non, où elle se déroule, doit être
considérée comme publique. Une telle position présente un avantage dans la
mesure où l'absence de distinction entre les ventes publiques par Internet et
les ventes publiques traditionnelles permettrait d'appliquer de manière
uniforme à ces deux types de vente les dispositions protectrices des droits des
consommateurs prévues dans le présent projet de loi et sur lesquelles nous
avons, les uns et les autres, insisté lors de nos intervention dans la
discussion générale.
Une vente aux enchères par Internet devrait être régie par les dispositions
propres au commerce électronique, et non par le projet de loi, avez-vous dit.
Cela revient à dire que tout le monde pourra faire des ventes aux enchères
électroniques, sauf les sociétés de ventes. C'est une situation difficilement
supportable. C'est d'ailleurs cet argument qui nous a amenés à déposer le
présent amendement.
Je souhaite simplement, au nom de la commission des affaires culturelles, que
le débat ne s'arrête pas après le vote qui va avoir lieu dans un instant. Il
s'agit d'un sujet d'actualité et compte tenu de son importance il mérite d'être
sérieusement étudié. Aussi, nous ne devons pas nous contenter, pardonnez-moi de
le dire, madame la ministre, d'une sorte de fin de non-recevoir. Je le répète :
le sujet est important et il mérite d'être approfondi.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je souhaite simplement
dire à M. Gouteyron que Mme Guigou et moi-même, nous travaillons déjà à la
préparation du projet de loi sur les nouveaux services en matière de commerce
électronique et que nous avons bien évidemment prévu d'étudier des dispositions
relatives aux ventes par le biais d'Internet.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Le groupe socialiste votera cet amendement au profit duquel j'avais retiré
tout à l'heure l'amendement n° 103. C'est une proposition utile, et le débat
doit se poursuivre.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 2.
Section 1
Les sociétés de ventes volontaires de meubles
aux enchères publiques
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - L'objet des sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques est limité à l'estimation de biens mobiliers et à la réalisation de
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques dans les conditions fixées
par la présente loi.
« Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques
agissent comme mandataires du vendeur. Elles ne sont pas habilitées à acheter
ou à vendre directement ou indirectement pour leur propre compte des biens
meubles proposés à la vente aux enchères publiques. Cette interdiction
s'applique également aux dirigeants, associés et salariés de la société. A
titre exceptionnel, ceux-ci peuvent cependant vendre, par l'intermédiaire de la
société, des biens leur appartenant à condition qu'il en soit fait mention dans
la publicité. »
Par amendement n° 33, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans le premier alinéa de cet article, après les mots : « à l'estimation de
biens mobiliers », d'insérer les mots : « , à l'organisation ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 128, le Gouvernement propose, à la fin de la première phrase
du second alinéa de l'article 3, de remplacer le mot : « vendeur » par les mots
: « propriétaire du bien ».
Compte tenu d'un vote précédemment intervenu, cet amendement n'a plus
d'objet.
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 34 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 3 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à supprimer la dernière phrase du second alinéa de l'article
3.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 34.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'article 3, qui traite de l'interdiction faite aux
dirigeants, associés et salariés de vendre des objets pour leur propre compte,
ménage,
in fine,
des exceptions.
La commission des lois souhaite supprimer la dernière phrase, car l'exception
ôte tout intérêt à l'article lui-même. Tel est l'objet de cet amendement n° 34,
qui est important.
M. René-Georges Laurin.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 3.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Même démarche, même proposition, même argumentation
: nous considérons, en effet, que cette phrase doit être supprimée pour garder
son efficacité au dispositif du projet de loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 34 et 3 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Avis défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 34 et 3, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques ne peuvent exercer leur activité qu'après avoir obtenu l'agrément du
conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques institué à
l'article 16.
« Elles doivent présenter des garanties suffisantes, notamment en ce qui
concerne leur organisation, leurs moyens techniques et financiers,
l'honorabilité et l'expérience de leurs dirigeants ainsi que les dispositions
propres à assurer pour leurs clients la sécurité des opérations. »
Par amendement n° 35, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans le second alinéa de cet article, de supprimer le mot : « , notamment ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 35 est purement rédactionnel. J'ai toujours
entendu dire dans cette maison que le mot : « notamment » n'a aucune
signification juridique et qu'il doit donc être proscrit. Tel est l'objet de
cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Avis favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, ainsi modifié.
(L'article 4 est adopté.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures,
sous la présidence de M. Paul Girod.)
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi portant réglementation des
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 5.
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques doivent, quelle que soit leur forme, désigner un commissaire aux
comptes et un commissaire aux comptes suppléant.
« Elles doivent justifier :
« 1° De l'existence dans un établissement de crédit d'un compte destiné
exclusivement à recevoir les fonds détenus pour le compte d'autrui ;
« 2° D'une assurance couvrant leur responsabilité professionnelle ;
« 3° D'une assurance ou, dans les conditions fixées par décret en Conseil
d'Etat, d'un cautionnement garantissant la représentation des fonds mentionnés
au 1°. » - (
Adopté.
)
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques donnent au conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques toutes précisions utiles sur les locaux où auront lieu de manière
habituelle les expositions de meubles offerts à la vente ainsi que les
opérations de ventes aux enchères publiques. Lorsque l'exposition ou la vente a
lieu dans un autre local, la société en avise le conseil des ventes volontaires
de meubles aux enchères publiques, un mois au moins avant la vente projetée,
par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. En cas d'urgence
justifiée, ce délai est ramené à huit jours. »
Par amendement n° 36, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
remplacer les deuxième et troisième phrases de cet article par une phrase ainsi
rédigée :
« Lorsque l'exposition ou la vente a lieu dans un autre local, la société en
avise préalablement le conseil. »
Cet amendement est assorti de deux sous-amendements.
Le sous-amendement n° 4 rectifié, présenté par M. Gouteyron, au nom de la
commission des affaires culturelles, vise, dans le texte de l'amendement n° 36,
après les mots : « dans un autre local », à insérer les mots : « ou à distance
par voie électronique ».
Le sous-amendement n° 113, déposé par le Gouvernement, tend à compléter,
in
fine
, l'amendement n° 36 par les mots : « dans des conditions fixées par
décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 36.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de simplifier la procédure
d'information du conseil des ventes dans le cas où la vente a lieu dans un
endroit inhabituel, en supprimant un certain nombre de formalités.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter le
sous-amendement n° 4 rectifié.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Ce sous-amendement tend à prévoir une information
du conseil des ventes en cas de vente sur Internet.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 113.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Pour un bon déroulement
des ventes et dans l'intérêt du consommateur, les modalités de l'information
qui doit être communiquée au conseil des ventes en cas de vente dans un autre
lieu que celui qui est habituellement utilisé par la société doivent être
fixées par décret.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 4 rectifié et
113 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Le sous-amendement n° 4 rectifié tire la conséquence des
dispositions qui ont été précédemment adoptées. La commission l'accepte
donc.
Pour ce qui est du sous-amendement n° 113, la commission n'a pas d'objection
majeure, mais elle considère qu'il n'est pas indispensable puisque l'article 57
prévoit déjà qu'un décret interviendra en tant que de besoin. La commission des
lois y est donc, formellement, défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 36 et sur le
sous-amendement n° 4 rectifié ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement est
favorable à l'amendement n° 36 et défavorable au sous-amendement n° 4 rectifié,
comme il l'a été ce matin à un amendement similaire. Mais j'imagine que le
Sénat demeurera cohérent !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4 rectifié, accepté par la commission
et repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 113, repoussé par la commission.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 36, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, ainsi modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques doivent comprendre parmi leurs dirigeants, leurs associés ou leurs
salariés, au moins une personne remplissant les conditions requises pour
exercer l'activité de commissaire-priseur ou titulaire d'un titre, d'un diplôme
ou d'une habilitation reconnu équivalent en la matière dans des conditions
définies par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 37, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques doivent
comprendre parmi leurs dirigeants, leurs associés et leurs salariés, au moins
une personne ayant la qualification requise pour diriger une vente ou titulaire
d'un titre, d'un diplôme ou d'une habilitation reconnu équivalent en la
matière, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Nous proposons une nouvelle rédaction de l'article 7 en
mentionnant explicitement que chaque société devra comprendre au moins une
personne ayant la qualification requise pour diriger une vente.
Cette nouvelle rédaction permettra d'éviter toute ambiguïté, tout en
respectant l'esprit même du projet de loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé.
Article 8
M. le président.
« Art. 8. - Les personnes mentionnées à l'article précédent sont seules
habilitées à diriger la vente, à désigner le dernier enchérisseur comme
adjudicataire ou à déclarer le bien non adjugé et à dresser le procès-verbal de
cette vente.
« Le procès-verbal est arrêté au plus tard un jour franc après clôture de la
vente. Il mentionne les nom et adresse déclarés par l'adjudicataire, l'identité
du vendeur, la désignation de l'objet ainsi que son prix constaté
publiquement.
« Dans le délai de huit jours à compter de la vente, le vendeur peut, par
l'intermédiaire de la société, vendre de gré à gré les biens déclarés non
adjugés à l'issue des enchères. Cette transaction ne peut être précédée
d'aucune exposition, ni publicité et ne peut être faite à un prix inférieur à
l'enchère atteinte lors du retrait du bien de la vente. Elle fait l'objet d'un
acte annexé au procès-verbal de la vente. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 38, est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
Le second, n° 5, est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent, dans la première phrase du dernier alinéa de cet article, à
remplacer les mots : « de huit jours » par les mots : « de quinze jours ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 38.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Le projet de loi prévoit que, à défaut d'adjudication d'un
bien lors de la vente ou lors de la tentative de vente, une vente de gré à gré
peut avoir lieu dans les huit jours.
A la réflexion, il est apparu que ce délai était insuffisant et nous proposons
de le doubler. Il sera donc suffisamment long pour réaliser la vente de gré à
gré, mais pas assez long, là encore, pour modifier véritablement l'esprit
général du texte.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 5.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je fais mienne l'argumentation de M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je m'en remets à la
sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 38 et 5, pour lesquels le
Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 39, est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
Le second, n° 6, est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à remplacer la deuxième phrase du dernier alinéa de
l'article 8 par les dispositions suivantes : « Cette transaction n'est précédée
d'aucune exposition ni publicité. Elle ne peut être faite à un prix inférieur à
la dernière enchère portée avant le retrait du bien de la vente ou, en
l'absence d'enchères, au montant de la mise à prix. Le dernier enchérisseur est
préalablement informé s'il est connu. »
Par ailleurs, l'amendement n° 39 est assorti d'un sous-amendement n° 115,
présenté par le Gouvernement, et tendant, dans la deuxième phrase du texte de
l'amendement n° 39, à supprimer les mots : « ou, en l'absence d'enchères, au
montant de la mise à prix ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 39.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
S'agissant de la vente à l'amiable, nous proposons simplement
d'introduire une sécurité supplémentaire pour le consommateur,... et pour tout
le monde, d'ailleurs !
M. le président.
La parole est à Mme le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 115.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement est
favorable à l'amendement n° 39, mais il ne souhaite pas qu'une vente de gré à
gré puisse intervenir en l'absence d'enchères.
Admettre une telle vente dans ce cas comporterait plusieurs risques, et
d'abord celui de dénaturer la vente aux enchères en la détournant de son
objectif, qui est de mettre les acquéreurs en concurrence par le biais des
enchères.
On risquerait, ensuite, de fausser le marché, car on aboutirait à une
confusion des métiers. Les ventes de gré à gré sont, en effet, de la compétence
des galeristes et des antiquaires. Nous pensons qu'elles doivent le rester, et
il ne faut donc pas que les sociétés de vente puissent les pratiquer trop
librement. L'équilibre du marché est, vous le savez, un objectif auquel le
Gouvernement est très attaché.
Enfin, l'absence de publicité pour les ventes de gré à gré et le risque de
perte d'indépendance des sociétés de ventes vis-à-vis du vendeur au moment de
la fixation du montant de la mise à prix et de la transaction posent des
problèmes de garantie à l'égard des consommateurs.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 6.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Cet amendement est identique à celui de la
commission des lois ; je reprends donc et fais mienne l'argumentation de M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 115 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission y est défavorable puisque la possibilité
dénoncée par le Gouvernement existe déjà dans le texte du projet de loi : la
vente est possible, qu'il y ait enchère ou non.
Ainsi, aux termes du projet de loi, « dans un délai de huit jours à compter de
la vente, le vendeur peut, par l'intermédiaire de la société, vendre de gré à
gré les biens déclarés non adjugés à l'issue des enchères ». Or un bien sur
lequel il n'y a pas eu d'enchère n'est pas adjugé, la question ne se pose même
pas ! Par conséquent, il sera possible de vendre à l'amiable non seulement les
biens sur lesquels s'étaient portées plusieurs enchères, mais aussi ceux qui
n'ont fait l'objet d'aucune enchère.
En réalité, la vente commence au moment où le commissaire-priseur déclare que
tel lot est mis aux enchères à tel prix, et non pas au moment où a lieu la
première enchère !
Dans ces conditions, la commission est défavorable au sous-amendement n° 115
du Gouvernement et s'en tient à son amendement n° 39.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 115, repoussé par la commission.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 39 et 6, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Par amendement n° 114 rectifié, le Gouvernement propose, après la deuxième
phrase du dernier alinéa de l'article 8, d'insérer une phrase ainsi rédigée : «
Elle est notifiée au ministre chargé de la culture, qui dispose d'un délai de
quinze jours pour faire connaître, le cas échéant, sa décision de préempter le
bien. »
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
La possibilité de conclure
des ventes après le retrait du bien des enchères ne doit pas avoir pour effet
d'empêcher l'Etat d'exercer son droit de préemption, dans les conditions
prévues par l'article 37 de la loi du 31 décembre 1921.
Afin de permettre, le cas échéant, à l'Etat de se substituer dans les droits
et obligations de l'acheteur, sans intervenir directement dans les
transactions, il convient de prévoir un mécanisme d'information permettant
d'exercer ce droit de préemption, qui est tout particulièrement cher à la
ministre de la culture et de la communication.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission est favorable à cet amendement, car il lui a
semblé que, formellement, ce droit de préemption était maintenu. Mais mieux
vaut le dire.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 114 rectifié, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques tiennent jour par jour un registre en application des articles 321-7
et 321-8 du code pénal ainsi qu'un répertoire sur lequel elles inscrivent leurs
procès-verbaux. » - (
Adopté.
)
Article 10
M. le président.
« Art. 10. - Chaque vente volontaire de meubles aux enchères publiques donne
lieu à une publicité sous toute forme appropriée.
« Les mentions devant figurer sur la publicité sont fixées par décret.
« Le prix de réserve est le prix minimal arrêté avec le vendeur au-dessous
duquel le bien ne peut être vendu. Lorsque la publicité comporte une
estimation, ce prix ne peut être fixé à un montant supérieur à cette estimation
ou, le cas échéant, à l'estimation la plus basse figurant dans la publicité ou
annoncée publiquement par la personne qui procède à la vente et consignée au
procès-verbal. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 7, M. Gouteyron, au nom de la commission des affaires
culturelles, propose de remplacer les deux premiers alinéas de cet article par
un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque vente volontaire de meubles aux enchères publiques fait l'objet d'une
publicité. »
Par amendement n° 40, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
supprimer le deuxième alinéa de cet article.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 7.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Cet amendement tend à rédiger autrement l'article,
qui nous paraît excessivement formaliste. Il suffit, à notre sens, d'affirmer
le principe de bon sens selon lequel les ventes publiques doivent faire l'objet
d'une publicité.
L'amendement de la commission des lois a, au fond, le même objet, mais il
emprunte une voie différente : nous, nous proposons de rédiger autrement les
deux premiers alinéas de l'article ; la commission des lois supprime carrément
un alinéa dudit article.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 40 et donner
l'avis de la commission sur l'amendement n° 7.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 40 prévoit la suppression de la fixation par
décret des mentions qui doivent figurer dans la publicité, qui, en tout état de
cause, ne nous semble pas indispensable. Là encore, l'observation que j'ai
faite tout à l'heure me paraît fondée.
Quant à l'amendement n° 7, il est satisfait par notre propre amendement, et
c'est pourquoi je demande à M. Gouteyron de bien vouloir le retirer.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je le retire, monsieur le président, car, je l'ai
dit, les deux amendements ont effectivement le même objet.
M. le président.
L'amendement n° 7 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 40 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
La publicité est
essentielle, dans le secteur des ventes aux enchères. Il faut que le public
soit informé, par exemple, de l'existence de l'agrément délivré par le conseil
des ventes, du lieu d'exposition, du nom de l'expert, s'il en a été désigné un,
et de ses conclusions.
C'est la raison pour laquelle le principe de l'existence de la publicité doit,
à nos yeux, figurer dans la loi.
Cependant, il m'apparaît utile de prévoir, comme cela est indiqué dans le
projet de loi, que chaque opérateur choisira la forme de publicité qui lui
paraîtra la plus appropriée.
Par ailleurs, il est nécessaire d'indiquer que les mentions devant figurer sur
la publicité seront fixées par décret, afin que le règlement puisse apporter
toute précision utile pour assurer la protection du consommateur.
Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 40, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 41 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 8 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à rédiger ainsi la seconde phrase du dernier alinéa de
l'article 10 : « Si le bien a été estimé, ce prix ne peut être fixé à un
montant supérieur à l'estimation la plus basse figurant dans la publicité ou
annoncée publiquement par la personne qui procède à la vente et consignée au
procès-verbal. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 41.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement tend à apporter une clarification en ce qui
concerne le prix de réserve.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 8.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je fais mienne l'argumentation de M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 41 et 8
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 41 et 8, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
M. le président.
« Art. 11. - Une société de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques peut garantir au vendeur un prix d'adjudication minimal du bien
proposé à la vente. Dans le cas où il existe une estimation, le prix ainsi
garanti ne peut être supérieur à l'estimation, telle qu'elle est définie à
l'article 10.
« Cette faculté n'est offerte qu'à la société qui a passé avec un organisme
d'assurance ou un établissement de crédit un contrat aux termes duquel cet
organisme ou cet établissement devient propriétaire du bien si le montant du
prix garanti n'est pas atteint lors de la vente aux enchères.
« Lorsque le bien n'atteint pas le prix garanti, l'organisme ou
l'établissement mentionné à l'alinéa précédent est déclaré adjudicataire au
prix garanti.
« La société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ne peut
détenir aucune participation dans l'organisme ou l'établissement avec lequel
elle contracte. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 42 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 9 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à rédiger ainsi la seconde phrase du premier alinéa de
l'article 11 : « Si le bien a été estimé, ce prix ne peut être fixé à un
montant supérieur à l'estimation mentionnée à l'article 10. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 42.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
C'est un amendement de clarification concernant le prix
garanti.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 42.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Là encore, je fais mienne l'argumentation de M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 42 et 9
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 42 et 9, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 43 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 10 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à remplacer les deuxième àquatrième alinéas de l'article 11
par deux alinéas ainsi rédigés :
« Si le montant du prix garanti n'est pas atteint à l'issue des enchères, la
société visée au premier alinéa est déclarée adjudicataire du bien au prix
garanti.
« Par exception aux dispositions du second alinéa de l'article 3, elle peut
revendre ce bien aux enchères publiques. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 43.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement important apporte à la fois une simplification
et une sécurité.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 10.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je continue à faire mienne l'argumentation de M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 43 et 10
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
L'avis du Gouvernement est
défavorable.
La garantie de prix a été introduite afin de permettre aux professionnels
français de rivaliser efficacement avec leurs homologues étrangers. Cette
modalité de vente est strictement encadrée par l'obligation, pour les sociétés
de ventes, de passer un contrat avec un établissement de crédit ou un organisme
d'assurance. Pourquoi ?
Tout d'abord, pour éviter de faire exception au principe prohibant l'achat et
la vente. Dans l'hypothèse où le bien n'a pas trouvé adjudicataire au prix
garanti, la société d'assurance ou l'établissement de crédit prend en charge ce
prix à la place de la société de ventes et devient ainsi propriétaire du
bien.
Il n'est en effet pas envisageable d'admettre que la société de ventes puisse
devenir propriétaire du bien, sous peine de vider de tout sens le principe
d'interdiction d'achat et de vente.
Je souligne, à cet égard, que la commission des lois et la commission des
affaires culturelles, qui présentent ces amendements, semblaient, au travers
des amendements n°s 3 et 34, partager le point de vue du Gouvernement sur le
strict respect de ce principe puisqu'elles entendaient supprimer toute
exception en interdisant la vente par un salarié, un associé ou un dirigeant de
la société de ventes d'un bien lui appartenant par le biais de cette
société.
L'exception au principe contenue dans les amendements n°s 10 et 43, qui
prévoient que la société de ventes devient propriétaire si le prix garanti
n'est pas atteint, est beaucoup plus grave. Elle est de nature à vider la règle
édictée de sa portée.
Par ailleurs, ce principe répond à un besoin de protection du consommateur et
de la société de ventes. Le contrat apporte en effet au consommateur toute
sécurité sur l'opération proposée par la société de ventes et il met cette
dernière à l'abri d'engagements hasardeux qu'elle ne pourrait respecter.
J'ajoute, enfin, qu'il est nécessaire que la société de ventes ne détienne
aucune participation dans l'organisme ou l'établissement de crédit avec lequel
elle contracte, de sorte que cet organisme apporte sa garantie en toute
liberté. En cas de mauvaise santé financière de l'organisme d'assurance ou de
l'établissement de crédit, la société de ventes risquerait d'être
fragilisée.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Ce que vient de dire Mme la ministre ne nous avait pas
échappé. Mais le prix garanti, à partir du moment où l'on admet son principe,
c'est déjà une obligation pour le commissaire-priseur de le fournir ! Ce peut
être une justification pour l'adjudication à son propre nom.
Par ailleurs, comment faire intervenir un organisme financier, quel qu'il
soit, qui, lui, deviendrait propriétaire du bien ? Pour en faire quoi ? Au nom
du réalisme économique, ce sera parfaitement inapplicable.
C'est pourquoi il a semblé préférable à la commission des lois de prévoir en
l'espèce - et en l'espèce seulement - une exception au principe : la société
est « déclarée adjudicataire » et elle peut « revendre ce bien ». C'est un
raisonnement logique et cohérent qui nous a amenés à proposer cette
formulation.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Ce qui a animé la commission des affaires
culturelles, madame la ministre, c'est la volonté de ne pas mettre les sociétés
de ventes françaises en difficulté.
Le dispositif que vous envisagez est très complexe. Comme vient de le dire M.
le rapporteur, il est, sinon inapplicable, à tout le moins très difficile à
appliquer.
Ce que nous craignons, dès lors, c'est que les grandes sociétés étrangères
aient la possibilité, elles, de faire intervenir des sociétés d'assurance qui
appartiendraient au même groupe.
Nous ne voudrions pas que le dispositif envisagé aboutisse à une difficulté
pour les sociétés françaises.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 43 et 10, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
M. le président.
« Art. 12. - Une société de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques peut consentir au vendeur une avance sur le prix d'adjudication du
bien proposé à la vente. Cette avance ne peut être supérieure à 40 % de
l'estimation mentionnée à l'article 10.
« Le remboursement de cette avance doit être garanti par un organisme
d'assurance ou un établissement de crédit.
« La société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques ne peut
détenir aucune participation dans l'organisme ou l'établissement avec lequel
elle contracte. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 44 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 11 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à supprimer la seconde phrase du premier alinéa de l'article
12.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 44.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 44 traite de l'avance qui peut être consentie
au vendeur.
Il n'apparaît pas du tout indispensable à la commission de limiter le montant
de cette avance à 40 % de l'estimation.
Ce matin, dans la discussion générale, notre collègue Jean-Jacques Hyest s'est
même posé la question de savoir pourquoi l'on maintenait le principe de cette
avance dans le texte.
Après réflexion, il est apparu à la commission et à son rapporteur que ne pas
le prévoir pouvait constituer un risque de contravention à la loi bancaire.
C'est pourquoi il nous a semblé préférable de maintenir le principe de
l'avance sans l'assortir de conditions de quelque nature que ce soit.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 11.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je fais mienne l'argumentation de M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 44 et 11
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
L'avis du Gouvernement est
défavorable.
J'ai déjà explicité la position du Gouvernement en ce qui concerne la garantie
de prix. Je n'y reviens pas.
Concrètement, messieurs les rapporteurs, si l'on ne prévoit pas de limitation,
on pourra se porter acquéreur d'une oeuvre avec une avance de 100 % du prix, au
risque d'être ensuite confronté à des difficultés. Je ne suis d'ailleurs pas
certaine que les banques soient prêtes à prendre ce risque maximal.
C'est donc une mesure de sagesse qui est proposée ; même si ce n'est pas un
modèle, le fait qu'elle soit appliquée par les maisons anglo-saxonnes me
conduit, en tout cas, à le penser.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il nous a semblé qu'il appartenait aux professionnels
compétents de la société de prendre leurs responsabilités.
Par ailleurs, il m'a également été dit que si certaines sociétés
anglo-saxonnes annoncent publiquement pratiquer cette limite de 40 %, la
plupart du temps elles ne s'y tiennent pas. Faut-il donc continuer à y voir une
véritable référence ?
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
A l'instar d'un certain nombre d'articles que nous
avons déjà examinés, celui-ci illustre cette pratique réglementaire excessive
du Gouvernement.
Au contraire, il faut libérer le plus possible le marché de toutes contraintes
et s'en remettre à la déontologie et aux pratiques commerciales admises partout
dans le monde.
Ce texte, bien qu'il constitue un progrès, est encore un carcan excessif si
l'on veut libérer nos sociétés de ventes par rapport à nos concurrents
étrangers, qui ne s'en tirent pas si mal, sans créer de situations
scandaleuses.
Je soutiens donc ces amendements identiques.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 44 et 11, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 45 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 12 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à supprimer les deuxième et troisième alinéas de l'article
12.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 45.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement a le même objet que le précédent : il vise à
supprimer l'intervention des organismes d'assurance ou des établissements de
crédit.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 12.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Mon argumentation est la même que celle de M. le
rapporteur : il s'agit, là encore, de responsabiliser les sociétés.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements identiques n°s 45 et
12 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Même argumentation : avis
défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 45 et 12, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
Article 13
M. le président.
« Art. 13. - Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques sont responsables à l'égard du vendeur et de l'acheteur du paiement
et de la délivrance des biens dont elles ont effectué la vente. Toute clause
qui vise à écarter ou à limiter leur responsabilité est réputée non écrite.
« Le bien adjugé ne peut être délivré à l'acheteur que lorsque la société en a
perçu le prix ou lorsque toute garantie lui a été donnée sur la solvabilité de
l'acquéreur.
« A défaut de paiement par l'adjudicataire, après mise en demeure restée
infructueuse, le bien est remis en vente à la folle enchère de l'adjudicataire
défaillant.
« Les fonds détenus pour le compte du vendeur doivent être versés à celui-ci
au plus tard deux mois à compter de la vente. »
Par amendement n° 46, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans la première phrase du premier alinéa de cet article, de remplacer les mots
: « du paiement » par les mots : « de la représentation du prix ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement n° 46 apporte une précision rédactionnelle.
Certains parleraient peut-être de pointillisme juridique !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 46, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 47 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 13 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent, dans le deuxième alinéa de l'article 13, à remplacer les
mots : « la solvabilité de » par les mots : « le paiement du prix par ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 47.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Nous savons tous que certaines personnes parfaitement
solvables ne paient jamais. S'agissant de la livraison du bien, mieux vaut
prévoir comme garantie le paiement du prix plutôt que la solvabilité de
l'acquéreur, insuffisante pour le vendeur.
M. René-Georges Laurin.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 13.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Il est clair que l'on peut être solvable et mauvais
payeur. Notre argumentation est la même que celle de M. le rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 47 et 13
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Avis favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 47 et 13, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Par amendement n° 48, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit l'avant-dernier alinéa de l'article 13 :
« A défaut de paiement par l'adjudicataire après mise en demeure restée
infructueuse, le bien est remis en vente, sur la demande du vendeur, à la folle
enchère de l'adjudicataire défaillant ; si le vendeur ne formule pas cette
demande dans un délai d'un mois à compter de l'adjudication, la vente est
résolue de plein droit, sans préjudice de dommages et intérêts dus par
l'adjudicataire défaillant. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement est important. Ce matin, la folle enchère a
été évoquée de manière plus lyrique ou romantique que juridique.
(Sourires.)
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Voire littéraire !
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
En fait, lorsque, à l'occasion d'une adjudication, un bien a
été adjugé à une personne et que celle-ci ne paie pas, voire disparaît dans la
nature, s'applique alors une procédure extrêmement compliquée : la folle
enchère. Cette procédure permet de remettre en vente le bien aux enchères. Or,
dans la pratique, la revente sur folle enchère est extrêmement rare parce que
difficile à appliquer.
C'est pourquoi nous proposons de rédiger ainsi l'avant-dernier alinéa de
l'article 13 : « A défaut de paiement par l'adjudicataire après mise en demeure
restée infructueuse, le bien est remis en vente, sur la demande du vendeur, à
la folle enchère de l'adjudicataire défaillant ; si le vendeur ne formule pas
cette demande dans un délai d'un mois à compter de l'adjudication, la vente est
résolue de plein droit, sans préjudice de dommages et intérêts dus par
l'adjudicataire défaillant. »
Il ne faut pas oublier que le transfert de propriété a eu lieu au profit de
l'adjudicataire mauvais payeur ou non payeur aussitôt le coup de marteau donné
par le commissaire-priseur. Il semble à la commission des lois que la rédaction
qu'elle propose évitera bien des difficultés.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Cette proposition me
paraît intéressante. En effet, le vendeur bénéficiera d'un choix lui permettant
de recourir à la procédure qui lui semblera le plus appropriée. En outre, en
cas de résolution de la vente, le vendeur pourra demander des dommages et
intérêts à l'acheteur défaillant. Le vendeur, s'il a subi un préjudice, doit
pouvoir en demander réparation.
Vous voyez l'esprit d'ouverture du Gouvernement qui reconnaît parfaitement la
précaution et la prudence de M. le rapporteur. J'aurais souhaité que M. le
rapporteur, précédemment, rejoigne la prudence du Gouvernement !
Cela dit, le Gouvernement est favorable à l'amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 48.
M. René-Georges Laurin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Laurin.
M. René-Georges Laurin.
Pour les non-professionnels, la procédure de la folle enchère telle que la
propose la commission des lois est considérablement améliorée.
La folle enchère, aux termes du code civil, s'organise de la façon suivante :
M. X. remporte une enchère, par exemple pour l'article 222 ; on lui réclame
d'en payer le prix et il refuse de le faire. S'il n'a pas obtempéré avant la
mise aux enchères de l'article 223, l'article 222 peut être alors immédiatement
remis en vente sur folle enchère.
Grâce à la procédure qui nous est proposée par la commission, on pourra
désormais organiser la défaillance de l'adjudicataire de mauvaise foi et en
tirer des conclusions.
J'ai vécu, pendant ma carrière, des expériences épouvantables. J'ai, un jour,
adjugé à la vente de
yearlings
de Deauville un merveilleux cheval. Or
l'acheteur était fou : on l'a poursuivi sans résultat pour essayer de le faire
payer ! J'ai donc été propriétaire d'un cheval pendant quinze jours et cela
coûte cher de nourrir un cheval pendant quinze jours !
(Sourires.)
Mais
je ne pouvais réclamer la somme à personne.
Les précautions que préconise la commission permettront d'éviter de telle
difficultés. Ainsi, les gens de mauvaise foi ne pourront plus continuer à agir
comme ils le font aujourd'hui. Il y a en effet des spécialistes de la question.
Je partage donc l'avis du Gouvernement et de M. le rapporteur sur cet
amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 48, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
Article 14
M. le président.
« Art. 14. - I. - Est puni de 2 ans d'emprisonnement et de 2 500 000 F
d'amende le fait de procéder ou de faire procéder à une ou plusieurs ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques sans que la société qui organise
la vente soit titulaire de l'agrément du conseil des ventes volontaires prévu à
l'article 4 ; sans que la personne dirigeant la vente remplisse les conditions
requises pour exercer l'activité de commissaire-priseur ou soit titulaire d'un
titre, d'un diplôme ou d'une habilitation reconnu comme équivalent ; malgré
l'interdiction à titre temporaire ou définitif de diriger de telles ventes ; ou
malgré la suspension ou le retrait temporaire ou définitif de cet agrément.
« Les personnes physiques coupables de l'une des infractions aux dispositions
prévues au présent article encourent également les peines complémentaires
suivantes :
« 1° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer une
fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans
l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise
;
« 2° L'affichage ou la diffusion de la condamnation prononcée dans les
conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ;
« 3° La confiscation des sommes ou objets irrégulièrement reçus par l'auteur
de l'infraction, à l'exception des objets susceptibles de restitution.
« II. - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement,
dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions
définies au présent article. Les peines encourues par les personnes morales
sont :
« 1° L'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal
;
« 2° Pour une durée de cinq ans au plus, les peines mentionnées aux 1°, 2°,
3°, 4°, 8° et 9° de l'article 131-39 du code pénal. L'interdiction mentionnée
au 2° de l'article 131-39 du code pénal porte sur l'activité dans l'exercice ou
à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Par amendement n° 49, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
remplacer le premier alinéa du I de cet article par quatre alinéas ainsi
rédigés :
« Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 2 500 000 francs d'amende le
fait de procéder ou de faire procéder à une ou plusieurs ventes volontaires de
meubles aux enchères publiques :
« - si la société qui organise la vente ne dispose pas de l'agrément prévu à
l'article 4, soit qu'elle n'en est pas titulaire, soit que son agrément a été
suspendu ou retiré à titre temporaire ou définitif ;
« - ou si le ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou
d'un Etat partie à l'accord sur l'espace économique européen qui organise la
vente n'a pas procédé à la déclaration prévue à l'article 21 ;
« - ou si la personne qui dirige la vente ne remplit pas les conditions
prévues à l'article 7 ou est frappée d'une interdiction à titre temporaire ou
définitif de diriger de telles ventes. »
Par amendement n° 14 rectifié, M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles, propose de remplacer le premier alinéa du I de l'article
14 par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 2 500 000 francs d'amende le
fait de procéder ou de faire procéder à une ou plusieurs ventes volontaires de
meubles aux enchères publiques :
« - si la société qui organise la vente ne dispose pas de l'agrément prévu à
l'article 4, soit qu'elle n'en est pas titulaire, soit que son agrément a été
suspendu ou retiré à titre temporaire ou définitif ;
« - ou si le ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou
d'un Etat partie à l'accord sur l'espace économique européen qui organise la
vente n'a pas procédé à la déclaration prévue par l'article 21 ;
« - ou si la personne qui dirige la vente ne remplit pas les conditions
requises par l'article 7 ou est frappée d'une interdiction à titre temporaire
ou définitif de diriger de telles ventes. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 49.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'objet de cet amendement n'est pas uniquement rédactionnel,
il vise également à étendre les sanctions pénales susceptibles d'être encourues
par les professionnels, non seulement aux professionnels nationaux, mais
également aux professionnels étrangers qui exerceront dans notre pays au titre
de la libre prestation de services.
Selon le projet de loi, un professionnel autorisé à vendre en France,
puisqu'il est Français, pourrait être sanctionné s'il enfreint la loi, alors
qu'un étranger ne pourrait pas l'être. Nous proposons de supprimer cette
discrimination négative pour nos nationaux.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 14 rectifié.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Cet amendement est identique à l'amendement n° 49
à deux mots près. Dans le dernier alinéa, nous parlons des conditions «
requises par l'article 7 », alors que la commission des lois parle des
conditions « prévues à l'article 7 ». Cela ne justifie pas une grande
bataille.
(Sourires.)
L'objectif est le même : il s'agit de prévoir les mêmes sanctions pénales
pour les ressortissants européens exerçant à titre occasionnel en France que
pour les Français.
Mais je retire mon amendement au bénéfice de celui de la commission des
lois.
M. le président.
L'amendement n° 14 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 49 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement est
défavorable à cet amendement.
Il faut bien distinguer deux choses : la situation des ressortissants
communautaires qui viennent s'établir en France et qui, par conséquent, sont
concernés par le droit applicable dans notre pays, et celle des professionnels
qui viennent occasionnellement exercer leur activité de services sur notre
sol.
Du point de vue de la législation et de la jurisprudence communautaires, je
voudrais rappeler qu'il a été jugé par la Cour de justice des Communautés, dans
un arrêt du 26 février 1991 « Commission contre France », qu'« un Etat membre
ne peut subordonner l'exécution de la prestation de services sur son territoire
à l'observation de toutes les conditions requises pour son établissement, sous
peine de priver de tout effet utile les dispositions destinées à assurer la
libre prestation de services ».
Il faut donc considérer que, le prestataire de services étant déjà soumis à la
législation de son Etat d'établissement, il serait discriminatoire de lui
imposer des contraintes pénales supplémentaires. D'ailleurs, ce qui vaudrait,
dans l'hypothèse de la commission, pour les ressortissants communautaires
agissant ponctuellement en France, vaudrait aussi et serait également
discriminatoire par exemple pour des Français, si un autre pays décidait de
mettre en oeuvre une telle disposition.
Nous devons donc attirer votre attention, monsieur le rapporteur, sur les
effets qu'entraînerait l'adoption de l'amendement que vous avez présenté.
En outre, ces contraintes pénales paraissent disproportionnées au regard des
objectifs visés. En effet, les ressortissants communautaires ne sont soumis
qu'à une obligation de déclaration auprès du conseil des ventes lorsqu'ils
souhaitent exercer, sous forme de prestations de services ; des sanctions
disciplinaires sévères, comme par exemple l'interdiction d'exercer sur le
territoire français, suffiront à nos yeux à assurer le respect de la loi.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il ne nous semble pas qu'il s'agisse véritablement ici d'une
entorse au droit communautaire.
Dans un cas, le professionnel n'a qu'une déclaration à faire ; dans l'autre,
il doit obtenir un agrément. En matière de droit pénal, il ne m'apparaît pas
qu'un étranger ait le droit de faire ce qui serait interdit à un Français.
Autrement, il y aurait impunité, et l'on ne doit pas pouvoir la reprocher à
l'Etat français dans ces conditions particulières.
Nous pouvons en discuter longuement, mais la jurisprudence évoquée par Mme la
ministre ne me semble pas s'appliquer dans ce cas de figure. Jugez-en : j'agis
mal, je ne suis pas honnête et, au prétexte que je suis étranger, on ne peut
rien me dire ; j'agis mal et je ne suis pas honnête et, au prétexte que je suis
Français, je peux être puni. Il y a là quelque chose que je ne peux pas
comprendre, et je ne sais pas comment expliquer plus précisément que je viens
de le faire mon incompréhension. Pour moi, l'assimilation me semble évidente.
Peut-être, lors des lectures ultérieures, pourrons-nous y revenir mais, pour
l'heure, je préfère maintenir le point de vue de la commission des lois.
M. René-Georges Laurin.
Il faut le maintenir !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 49, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14, ainsi modifié.
(L'article 14 est adopté.)
Article additionnel après l'article 14
M. le président.
Par amendement n° 50, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose
d'insérer, après l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le quatrième alinéa (2°) de l'article 313-6 du code pénal, après les
mots : "sans le concours de l'officier ministériel compétent", sont insérés les
mots : "ou d'une société de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques agréée". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet article additionnel tire les conséquences de la
suppression du monopole des commissaires-priseurs en matière de ventes
volontaires dans la rédaction de l'article 313-6 du code pénal, qui sanctionne
le fait de procéder ou de participer à une remise aux enchères sans le concours
de l'officier ministériel compétent. Puisque les commissaires-priseurs ne
seront plus officiers ministériels, il y a donc lieu de faire cette
modification purement formelle.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 50, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 14.
Article 15
M. le président.
« Art. 15. - Les dispositions de l'article 29 de la loi n° 73-1193 du 27
décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat ne sont pas
applicables aux locaux utilisés par les sociétés mentionnées à l'article 2 de
la présente loi. » - (Adopté.)
Section 2
Le conseil des ventes volontaires de meubles
aux enchères publiques
Article 16
M. le président.
« Art. 16. - Il est institué un conseil des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques, doté de la personnalité morale.
« Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques est
chargé :
« 1° D'agréer les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques ainsi que les experts visés au chapitre V de la présente loi ;
« 2° D'enregistrer les déclarations des ressortissants des Etats mentionnés au
chapitre II de la présente loi ;
« 3° D'assurer le respect par les sociétés de ventes volontaires de meubles
aux enchères publiques, les experts agréés et les ressortissants des Etats
mentionnés au chapitre II des dispositions législatives et réglementaires qui
leur sont applicables. A cette fin le conseil vérifie les conditions de
création et d'exploitation des sociétés de ventes mentionnées ci-dessus et
veille à la régularité de leur fonctionnement. Il veille également à la
régularité de l'activité des experts agréés et des ressortissants des Etats
mentionnés au chapitre II qui procèdent à des ventes volontaires à titre
occasionnel. Il peut s'opposer, s'il y a lieu, à une vente organisée par ces
derniers ;
« 4° De réprimer les manquements constatés.
« La décision du conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques qui refuse ou retire l'agrément d'une société ou d'un expert ou
l'enregistrement de la déclaration d'un ressortissant d'un Etat mentionné au
chapitre II doit être motivée. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 51 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 15 rectifié
bis
est déposé par M. Gouteyron, au nom de
la commission des affaires culturelles.
Tous deux tendent à remplacer les cinquième (3°) et sixième (4°) alinéas de
cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« 3° De sanctionner, dans les conditions prévues à l'article 19, les
manquements aux lois, règlements et obligations professionnelles applicables
aux sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, aux
experts agréés et aux ressortissants d'un Etat membre de la Communauté
européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'espace économique européen
exerçant à titre occasionnel l'activité de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques en France. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 51.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 51 a pour objet de condenser et d'alléger les
dispositions de l'article 16, qui paraissent quelque peu redondantes, en
fusionnant les 3° et 4° dudit article.
On imagine mal que le conseil des ventes puisse assurer le respect de la
réglementation autrement qu'en sanctionnant disciplinairement les éventuels
manquements constatés. Il semble donc préférable de regrouper dans un seul
alinéa - le 3° - les dispositions relatives aux missions du conseil en matière
disciplinaire.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 15
rectifié
bis
.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Notre amendement étant identique au précédent,
j'ajouterai seulement que la rédaction proposée dissipe une incertitude que
pourrait faire naître la rédaction actuelle du projet de loi sur d'éventuels
pouvoirs d'investigation du conseil des ventes.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 51 et 15
rectifié
bis ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 51 et 15 rectifié
bis
,
acceptés par le Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Par amendement n° 104, Mme Derycke, M. Lagauche, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'avant-dernier alinéa (4°)
de l'article 16, un alinéa ainsi rédigé :
« ... d'assurer la formation professionnelle. »
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Cet amendement concerne la formation professionnelle des
commissaires-priseurs.
Actuellement, la chambre nationale des commissaires-priseurs est chargée, aux
termes de l'ordonnance de 1945, d'assurer l'organisation des cours
professionnels. La perte d'environ 80 % de ses recettes, à la suite de la
réforme, ne lui permettra plus d'assumer cette tâche.
Le conseil des ventes, organisme indépendant, pourrait être chargé de cette
mission. L'octroi de cette compétence au conseil garantirait une formation
indépendante de tout organe professionnel.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission est défavorable à cet amendement.
Tout d'abord, il est imprécis. De qui s'agit-il d'assurer la formation
professionnelle ? Des professionnels ? Des salariés ? On ne sait pas !
Vous savez qu'une partie de cette formation est assurée par l'Etat. par
l'Etat, et vous connaissez les conditions dans lesquelles le diplôme de
commissaire-priseur est obtenu.
Par ailleurs - et c'est une question de principe -, ni le projet de loi ni
même l'esprit du projet de loi ne permettent de penser que le conseil des
ventes, qui a pour objet d'agréer les sociétés et de sanctionner les
manquements, puisse avoir le rôle d'assurer la formation. Ce n'est pas du tout
dans sa mission, ni première, ni seconde.
Il semble enfin à la commission et à son rapporteur que la formation peut
parfaitement être organisée par la voie réglementaire, c'est-à-dire par un
décret.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Madame Derycke, il est
effectivement très intéressant d'évoquer la question de la formation des
professionnels appelés à réaliser les ventes, et le Gouvernement partage votre
préoccupation. Toutefois, l'organisation de cette formation relève du
décret.
De plus, il me paraît difficile, en tout état de cause, de la confier au seul
conseil des ventes, dans la mesure où subsiste une activité strictement
judiciaire et une chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires.
La mise en commun des compétences de ces deux organismes sera sans doute utile
pour mettre au point les modalités de la réforme et élaborer le décret.
C'est pourquoi je vous suggère, madame Derycke, de retirer cet amendement.
Dans le même temps, je prends l'engagement que vous serez, bien sûr, tenue
informée des démarches qu'entreprendra le Gouvernement pour les aspects du
décret relatif à la formation.
M. le président.
Madame Derycke, l'amendement n° 104 est-il maintenu ?
Mme Dinah Derycke.
Nous souhaitions attirer l'attention sur la question de la formation
professionnelle, qui est tout à fait importante. Mais je retire l'amendement en
raison des explications que vient de donner Mme la ministre.
M. le président.
L'amendement n° 104 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16, modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Article 17
M. le président.
« Art. 17. - Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques informe les chambres départementales des huissiers de justice et des
notaires, la chambre nationale et les chambres des commissaires-priseurs des
agissements qui ont été portés à sa connaissance et qui porteraient atteinte à
la réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.
« Les chambres départementales des huissiers de justice et des notaires, la
chambre nationale et les chambres des commissaires-priseurs procèdent à la même
information envers le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques. »
Par amendement n° 52, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit le premier alinéa de cet article :
« Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques informe
la chambre nationale et les chambres des commissaires-priseurs judiciaires,
ainsi que les chambres départementales des huissiers de justice et des
notaires, des faits commis dans le ressort de celles-ci qui ont été portés à sa
connaissance et qui porteraient atteinte à la réglementation des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement a une vertu simplificatrice, qui ne doit pas,
à mon sens, soulever de grandes difficultés.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 52, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 53, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans le second alinéa de l'article 17, après les mots : « les chambres des
commissaires-priseurs », d'insérer le mot : « judiciaires .»
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit d'un simple amendement de coordination, qui vise à
insérer le mot « judiciaire » puisque les commissaires-priseurs en tant que
tels n'existeraient plus.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 53, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17, modifié.
(L'article 17 est adopté.)
Article 18
M. le président.
« Art. 18. - Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques comprend, outre un président nommé par décret sur proposition du
garde des sceaux, ministre de la justice, dix membres nommés pour quatre ans
:
« 1° Cinq personnes qualifiées désignées respectivement par le garde des
sceaux, ministre de la justice, par le ministre chargé de l'économie et des
finances, par le ministre chargé de la culture, par le ministre chargé de
l'intérieur et par le ministre chargé du commerce ;
« 2° Cinq représentants des professionnels, dont un expert.
« Des suppléants sont désignés en nombre égal et dans les mêmes formes.
« Un magistrat du parquet est désigné pour exercer les fonctions de
commissaire du Gouvernement auprès du conseil des ventes volontaires de meubles
aux enchères publiques.
« Le financement du conseil est assuré par le versement de cotisations
professionnelles acquittées par les sociétés de ventes volontaires de meubles
aux enchères publiques et par les experts agréés. Le montant de ces cotisations
est fixé par le conseil en fonction de l'activité des assujettis.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'organisation et de
fonctionnement du conseil. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 54 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 16 est déposé par M. Gouteyron au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à remplacer les premier à troisième alinéas de cet article
par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques comprend
onze membres désignés pour quatre ans :
« - cinq personnes qualifiées nommées par le garde des sceaux, ministre de la
justice ;
« - six représentants élus des professionnels, dont deux experts agréés.
« Le président est élu par les membres du conseil en leur sein. »
Par amendement n° 116, le Gouvernement propose de rédiger ainsi le deuxième
alinéa (1°) de l'article 18 :
« 1° Cinq personnes qualifiées nommées par le garde des sceaux, ministre de la
justice ; »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 54.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 54 tend à modifier la composition du conseil
des ventes qui est créé par la loi.
A entendre les orateurs lors de la discussion générale, le but c'est de
libéraliser, d'organiser de manière plus simple la profession pour permettre
d'affronter la concurrence internationale dans de meilleures conditions.
Pourtant, le conseil des ventes est placé entre les mains de
non-professionnels.
Il nous est apparu qu'il y avait là une certaine contradiction et nous
proposons une nouvelle rédaction de l'article.
Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques comprendra
onze membres désignés pour quatre ans. Sur ce point, il n'y a pas de
problème.
Il comprendra cinq personnes qualifiées nommées par le garde des sceaux,
ministre de la justice. Certes, il aurait été possible de prévoir qu'elles
soient nommées par cinq ministères différents. Mais nous savons très bien que,
en ce cas, cela prendrait non pas cinq fois, mais peut-être cinquante fois plus
de temps. Aussi, apparaît-il beaucoup plus simple de prévoir que ces personnes
seront désignées par le garde des sceaux.
Le conseil comprendra, en outre, six représentants élus des professionnels,
dont deux experts agréés.
Enfin, le président sera élu par les membres du conseil en leur sein. Cette
modification est importante, je veux bien le reconnaître, par rapport au projet
de loi, mais la commission a la faiblesse de penser qu'elle correspond plus à
l'esprit même de libéralisation qui sous-tend le projet de loi.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 16.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Ainsi que vous l'avez remarqué, l'amendement de la
commission des affaires culturelles est identique à celui de la commission des
lois. Nous avons en effet travaillé ensemble sur ce point, qui est très
important.
Je n'ai pas grand-chose à ajouter aux propos que vient de tenir M. le
rapporteur, si ce n'est pour préciser que la désignation des personnes
qualifiées par un seul ministre permettra non seulement d'accélérer le
processus, mais aussi de mieux équilibrer les nominations.
Il est normal, par ailleurs, de porter de cinq à six le nombre des
représentants des professionnels en leur adjoignant un second expert agréé. En
effet, cet organisme ne doit pas être assimilé à une autorité administrative
indépendante, comme on en connaît aujourd'hui beaucoup dans notre pays.
C'est un organe à la fois professionnel et de surveillance auquel sont
associés les pouvoirs publics. Il faut tenir compte de cela. C'est pourquoi le
président est élu en son sein.
Il s'agit d'un dispositif qui va dans le sens d'une plus grande
libéralisation et d'une plus grande confiance accordée à la profession. Il faut
le reconnaître. Il va, nous semble-t-il, dans la ligne de ce que vous avez
voulu faire, madame la ministre. Nous espérons donc que vous donnerez sur ce
point important un avis favorable à la proposition qui est formulée.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre, pour présenter l'amendement n° 116 et pour
donner l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 54 et 16.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
En présentant l'amendement
n° 116, je pense que, une fois de plus, le Gouvernement fait un pas dans le
sens de votre honorable assemblée. Je voudrais par ailleurs expliquer pourquoi
il émet un avis défavorable sur les amendements n°s 54 et 16.
La création d'un conseil des ventes revient à mettre en place une autorité de
régulation du marché chargée de faire respecter, dans l'intérêt des
consommateurs et des sociétés de ventes, la législation relative au secteur des
ventes volontaires.
Il entre, en effet, dans le cadre de ses compétences de délivrer un agrément
aux sociétés de ventes après avoir vérifié qu'elles présentent toutes les
garanties nécessaires ainsi que de prendre des sanctions disciplinaires en cas
de violation de la réglementation.
Compte tenu de l'importance de ces missions, il importe que le conseil des
ventes puisse agir en toute impartialité. C'est la raison pour laquelle le
projet de loi prévoit que le conseil sera composé, à parité, par des personnes
qualifiées désignées par le Gouvernement ainsi que par des représentants des
professionnels. Cet équilibre est essentiel pour assurer l'indépendance et, par
là même, asseoir l'autorité de ce conseil.
Je suis défavorable aux amendements n°s 16 et 54, qui posent plusieurs
difficultés.
D'une part, ils favorisent les professionnels au détriment des personnes
qualifiées et rompent ainsi l'équilibre indispensable dans la composition du
conseil des ventes.
D'autre part, l'organisation d'élections pour les représentants des
professionnels, ainsi que le prévoient les amendements, sera en pratique
extrêmement difficile. En effet, il s'avère très délicat de trouver un mode de
scrutin adapté afin notamment d'éviter un risque de surreprésentation des
petites structures.
Cependant, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous
envisageons une désignation des membres du conseil des ventes qui représentent
les professionnels par l'autorité publique.
Actuellement, des réflexions sont en cours pour trouver des critères qui
permettront d'assurer la meilleure représentation possible des sociétés de
ventes et des experts, ce qui rejoint, je crois, votre avis sur le fond.
En effet, il conviendra que soient présentes au conseil des ventes les
différentes composantes de cette nouvelle profession, c'est-à-dire qu'il y ait
des représentants des professionnels parisiens et des professionnels
provinciaux, en tenant compte des nationaux, des ressortissants communautaires
et des étrangers.
La mise au point d'un mécanisme adapté n'est pas simple et je ne puis vous en
dire davantage aujourd'hui sur les modalités de désignation qui seront, en tout
état de cause, précisées dans le décret d'application de la loi.
Je tenais à présenter ces réflexions pour témoigner de l'importance qu'apporte
le Gouvernement à ces modalités de désignation, à leur simplification et à la
prise en compte des professionnels.
Les ministres adresseront leurs propositions au garde des sceaux, qui nommera.
Cette simplification est certainement de bon aloi.
Telles sont les raisons qui motivent l'amendement n° 116 et l'avis défavorable
du Gouvernement aux amendements n°s 16 et 54.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Sans aucun esprit de systématisme, je crois, madame la
ministre, que vos paroles ont, à l'instant, certainement dépassé votre pensée
quand vous avez dit que le système proposé faisait la part trop belle aux
professionnels par rapport aux personnes qualifiées. Que sont les
professionnels sinon d'abord des personnes qualifiées ? Ils sont, je crois, les
premières personnes qualifiées et il ne faut donc pas les distinguer
différemment !
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Vous jouez sur les mots
!
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Dans un pays comme le nôtre, comment peut-on ne pas admettre
que le meilleur système, le plus démocratique qui soit, est l'élection et non
la désignation pure et simple par le Gouvernement ?
En tant que rapporteur, il me semble que le meilleur moyen, le plus juste, le
plus équilibré, c'est bien l'élection.
De surcroît, ce n'est pas parce que ce sont des professionnels élus qu'ils
sont dans l'incapacité de définir ou d'appliquer des sanctions. Il existe bien
d'autres professions dans notre pays au sein desquelles les représentants élus
sont détenteurs et titulaires d'un pouvoir disciplinaire ! Si cela ne pose
aucun problème dans d'autres professions, je ne vois pas pourquoi cela en
poserait ici !
Je maintiens donc le point de vue de la commission des lois sur la composition
du conseil des ventes et sur les modalités d'élection des professionnels et des
experts.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 54 et 16.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole contre les amendements.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Nous ne voterons pas ces deux amendements, car nous ne pouvons accepter - et
sur ce point nous partageons l'opinion de Mme la ministre - la prédominance des
représentants élus des professionnels, qui sont au nombre de six, par rapport
aux cinq personnes qualifiées.
Il en est de même pour l'élection des représentants des professionnels, qui
pose d'énormes difficultés. Les professionnels eux-mêmes nous ont fait savoir
qu'il leur était difficile de procéder à une telle élection en respectant tous
les critères de représentativité des uns et des autres. De plus, une élection
par les professionnels risquerait de compromettre l'entrée au conseil de
représentants des sociétés étrangères.
Par ailleurs, la présence de deux experts nous paraît inutile. Celui qui est
prévu dans le projet de loi nous semble suffisant.
Nous n'acceptons pas non plus que le président soit élu au sein du conseil et
non plus désigné par le garde des sceaux.
Un point néanmoins nous semble positif dans ces amendements : les cinq
personnalités qualifiées, désignées par le Gouvernement, le seront par le seul
garde des sceaux et non plus par tous les ministres concernés, comme il est
prévu dans le texte initial. En effet, nous le savons bien, quand cinq
ministres doivent intervenir pour désigner des personnes, les délais sont
beaucoup plus longs.
Pour toutes ces raisons, je ne peux voter les amendements des deux
commissions. Je me rallierai donc à l'amendement n° 116 du Gouvernement, qui
confie au garde des sceaux la nomination de ces cinq personnes qualifiées,
solution plus rapide et moins lourde à gérer.
J'aurais néanmoins souhaité qu'il soit précisé que ces cinq personnes sont
nommées par le garde des sceaux, sur proposition des ministres concernés, en
considérant que le ministre de la culture, au moins, devrait avoir son mot à
dire ! Je n'ai pas déposé de sous-amendement sur ce point. Nous reviendrons sur
ce sujet à l'occasion de la deuxième lecture.
M. René-Georges Laurin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Laurin.
M. René-Georges Laurin.
Il ne faut pas oublier, c'est important, que ce conseil des ventes jouera, en
matière disciplinaire, le même rôle que celui qui est actuellement dévolu aux
compagnies, ce qu'on appelait autrefois les chambres.
Connaissant bien ces milieux, il me paraît impossible de confier aux
fonctionnaires le soin de se prononcer sur la discipline ou sur
l'indiscipline.
Ce qui me fait encore plus peur, c'est d'avoir entendu tout à l'heure l'un de
nos collègues parler de la place qu'il fallait laisser aux sociétés étrangères
dans ce conseil des ventes. Il n'est nullement question de faire un conseil des
ventes européen ! Il s'agit de créer un conseil des ventes qui sera chargé
d'organiser les ventes et de les vérifier.
Il me paraît préférable de revenir à la rédaction de la commission. L'élection
du président est importante pour asseoir son autorité. En effet, s'il est nommé
par le secrétaire d'Etat à la formation professionnelle, par exemple, il n'aura
aucune autorité. Donc, ce n'est pas sérieux.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 54 et 16, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 116 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 18, ainsi modifié.
(L'article 18 est adopté.)
Article 19
M. le président.
« Art. 19. - Tout manquement aux lois et règlements applicables aux sociétés
de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et aux experts ainsi
qu'à leurs obligations professionnelles peut donner lieu à sanction
disciplinaire. Lesdits manquements se prescrivent par trois ans à compter de
leur réalisation.
« Le conseil statue par décision motivée. Aucune sanction ne peut être
prononcée sans que les griefs aient été communiqués au représentant légal de la
société ou de l'expert, que celui-ci ait été mis à même de prendre connaissance
du dossier et qu'il ait été entendu ou dûment appelé.
« Les sanctions, compte tenu de la gravité des faits reprochés, sont
l'avertissement, l'interdiction à titre temporaire pour une durée qui ne peut
excéder trois ans et le retrait de l'agrément de la société ou la radiation de
l'expert.
« Le président du conseil peut, en cas d'urgence et à titre conservatoire,
prononcer, à l'encontre de la société de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques ou de l'expert, la suspension provisoire de l'exercice de
tout ou partie de l'activité pour une durée qui ne peut excéder un mois, sauf
prolongation décidée par le conseil pour une durée qui ne peut excéder trois
mois. Il en informe aussitôt le conseil.
« Le conseil peut également sanctionner la personne habilitée à diriger la
vente en prononçant à son encontre les sanctions de l'avertissement, du blâme
ou de l'interdiction à titre temporaire ou définitif de diriger des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques. Les droits de la défense prévus
au deuxième alinéa et les dispositions relatives à la suspension figurant au
quatrième alinéa s'appliquent à la personne habilitée à diriger la vente. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 55 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 17 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à rédiger ainsi cet article :
« Tout manquement aux lois, règlements ou obligations professionnelles
applicables aux sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques, aux experts agréés et aux personnes habilitées à diriger les ventes
en vertu du premier alinéa de l'article 8 peut donner lieu à sanction
disciplinaire. La prescription est de trois ans à compter du manquement.
« Le conseil statue par décision motivée. Aucune sanction ne peut être
prononcée sans que les griefs aient été communiqués au représentant légal de la
société, à l'expert ou à la personne habilitée à diriger les ventes, que
celui-ci ait été mis à même de prendre connaissance du dossier et qu'il ait été
entendu ou dûment appelé.
« Les sanctions applicables aux sociétés de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques, aux experts agréés et aux personnes habilitées à diriger
les ventes, compte tenu de la gravité des faits reprochés, sont :
l'avertissement, le blâme, l'interdiction d'exercice de tout ou partie de
l'activité à titre temporaire pour une durée qui ne peut excéder trois ans et
le retrait de l'agrément de la société ou de l'expert ou l'interdiction
définitive de diriger des ventes.
« En cas d'urgence et à titre conservatoire, le président du conseil peut
prononcer la suspension provisoire de l'exercice de tout ou partie de
l'activité d'une société de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques, d'un expert agréé ou d'une personne habilitée à diriger les ventes,
pour une durée qui ne peut excéder un mois, sauf prolongation décidée par le
conseil pour une durée qui ne peut excéder trois mois. Il en informe sans délai
le conseil. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 55.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement rédactionnel a simplement pour objet
d'harmoniser les sanctions disciplinaires qui sont applicables aux sociétés de
ventes, aux experts agréés et aux personnes habilitées à diriger les ventes, en
prévoyant une échelle de sanctions de quatre niveaux.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 17.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
L'argumentation est la même que pour l'amendement
n° 55.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 55 et 17
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 55 et 17, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 19 est ainsi rédigé.
Article 20
M. le président.
« Art. 20. - Les décisions du conseil des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques et de son président peuvent faire l'objet d'un recours
devant la cour d'appel de Paris. Le recours peut être porté devant le premier
président de ladite cour statuant en référé. »
- (Adopté.)
Chapitre II
Libre prestation de services de l'activité de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques par les ressortissants des Etats membres de la Communauté
européenne et des Etats parties à l'accord sur l'Espace économique
européen
Article 21
M. le président.
« Art. 21. - Les ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne
ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, qui exercent à
titre permanent l'activité de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques dans l'un de ces Etats autre que la France, peuvent accomplir, en
France, cette activité professionnelle à titre occasionnel. Cette activité ne
peut être accomplie qu'après déclaration faite au conseil des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques. La déclaration est faite au
moins trois mois avant la date de la première vente réalisée en France. Les
ventes suivantes font l'objet d'une information du conseil, adressée un mois au
moins avant la date de la vente. »
Par amendement n° 105, Mme Derycke, M. Lagauche et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, dans la première phrase de cet article,
après les mots : « exercent à titre permanent », d'insérer les mots : « et
principal ».
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
L'article 21 prévoit que des sociétés de la Communauté européenne ou de
l'Espace Schengen exerçant l'activité de ventes publiques aux enchères à titre
permanent pourront organiser, en France, à titre occasionnel, ces mêmes
ventes.
Nous souhaitons préciser que ces sociétés doivent avoir la vente aux enchères
pour activité « principale ». Il convient d'éviter d'ouvrir à une concurrence
déloyale le secteur des ventes publiques, en autorisant des sociétés qui ne
pratiquent qu'une ou deux ventes par an, à titre tout à fait accessoire, à en
organiser en France.
Nous sommes pour l'ouverture à la concurrence du secteur ; encore convient-il
d'en poser les limites.
Tel est le sens de nos amendements n° 105 et 106 aux articles 21 et 22.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission est défavorable à cet amendement pour une
raison simple.
Dans notre pays, rien n'interdisant à un professionnel d'exercer une autre
activité, dès lors qu'il n'est plus officier ministériel, je ne vois pas
pourquoi on interdirait à un étranger d'exercer conjointement, comme peut le
faire un professionnel français, une ou deux activités. Ce serait une véritable
discrimination anti-européenne !
L'amendement n'est recevable ni sur un plan juridique ni sur un plan
éthique.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je rejoins l'analyse qui
vient d'être faite par M. le rapporteur, car cet établissement implique un
caractère de permanence, comme le montre d'ailleurs l'arrêt Gebhard, de façon
stable et continue.
En revanche, le droit communautaire n'impose pas que l'activité dans l'Etat où
est établie l'entreprise constitue une activité principale. En conséquence,
l'Etat membre dans lequel est réalisée une prestation de service ne peut
imposer des conditions supplémentaires qui n'existent pas dans l'Etat
d'origine. Voilà pourquoi je ne puis accepter cet amendement tel qu'il est
formulé.
De plus, s'il était adopté, nous serions susceptibles d'être poursuivis devant
les instances européennes.
M. le président.
Madame Derycke, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Dinah Derycke.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 105 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 56 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 18 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à rédiger ainsi la dernière phrase de l'article 21 : « Le
conseil est informé des ventes suivantes un mois au moins avant leur
réalisation. »
La parole est à M. le rapporteur pour défendre l'amendement n° 56.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement est purement rédactionnel.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 18.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Mêmes arguments, monsieur le président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 56 et 18
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 56 et 18, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.).
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 57 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 19 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à compléter l'article 2 par une phrase ainsi rédigée : « Il
peut s'opposer, par décision motivée, à la tenue d'une de ces ventes. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 57.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement de nature rédactionnelle a pour objet de
reprendre une disposition prévue à l'article 16 pour l'insérer à l'article 21,
où elle est mieux à sa place, à notre sens. Il s'agit de la libre prestation de
services.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 19.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Même démarche, monsieur le président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 57 et 19
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 57 et 19, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21, modifié.
(L'article 21 est adopté.)
Article 22
M. le président.
« Art. 22. - Les personnes exerçant l'activité de ventes volontaires de
meubles aux enchères publiques à titre permanent dans leur pays d'origine font
usage, en France, de leur qualité exprimée dans la ou l'une des langues de
l'Etat où elles sont établies, accompagnée d'une traduction en français, ainsi
que du nom de l'organisme professionnel dont elles relèvent. »
Par amendement n° 106, Mme Derycke, M. Lagauche et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, dans cet article, après les mots : «
enchères publiques à titre permanent », d'insérer les mots : « et principal
».
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 106 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 58 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 20 rectifié est déposé par M. Gouteyron, au nom de la
commission des affaires culturelles.
Tous deux tendent, à la fin de cet article, avant les mots : « du nom de
l'organisme professionnel dont elles relèvent », à insérer les mots : «, s'il y
a lieu, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 58.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Monsieur le président, cet amendement a pour objet de
préciser « s'il y a lieu », car on n'est pas sûr qu'il existe toujours dans le
pays étranger en question l'organisme professionnel auquel il est fait
référence.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 20 rectifié.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Mêmes arguments que pour l'amendement n° 58.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identique n°s 58 et 20
rectifié ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 58 et 20 rectifié, acceptés
par le Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 22, ainsi modifié.
(L'article 22 est adopté.)
Article 23
M. le président.
« Art. 23. - Pour pouvoir exercer l'activité de ventes aux enchères publiques
de manière occasionnelle, le ressortissant d'un Etat membre de la Communauté
européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen doit
être titulaire de l'un des diplômes, titres ou habilitations prévus à l'article
7.
« Il doit, s'il s'agit d'une personne morale, comprendre parmi ses dirigeants,
ses associés ou ses salariés une personne titulaire de l'un des diplômes,
titres ou habilitations prévus à l'article 7.
« Il doit justifier auprès du conseil des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques qu'il remplit les conditions prévues à l'alinéa précédent et
lui apporter la preuve de l'existence d'un établissement dans son pays
d'origine et de garanties de moralité professionnelle et personnelle. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement, n° 21, M. Gouteyron, au nom de la commission des affaires
culturelles, propose de rédiger ainsi cet article :
« Pour pouvoir exercer l'activité de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques à titre occasionnel, le ressortissant d'un Etat membre de la
Communautié européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique
européen doit justifier auprès du conseil des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques qu'il est titulaire de l'un des diplômes, titres ou
habilitations prévus à l'article 7 ou, s'il s'agit d'une personne morale, qu'il
comprend parmi ses dirigeants, ses associées ou ses salariés une personne
remplissant cette condition.
« Il doit également apporter la preuve auprès du conseil de l'existence d'un
établissement dans son pays d'origine et de garanties de moralité
professionnelle et personnelle. »
Par amendement, n° 59, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans le premier alinéa de l'article 23, après le mot : « ventes », d'insérer
les mots : « volontaires de meubles ».
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 21.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 59 et pour
donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 21.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 59 est un amendement de précision.
Par ailleurs, la commission est favorable à l'amendement n° 21.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, j'attire votre attention sur le fait que votre
amendement n'aura plus d'objet si l'amendement n° 21 est adopté. Mais il est
vrai qu'il est satisfait par cet amendement n° 21.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
En effet, monsieur le président, je retire donc l'amendement
n° 59.
M. le président.
L'amendement n° 59 est retiré.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 21 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 21.
M. René-Georges Laurin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Laurin.
M. René-Georges Laurin.
Quand nous parlons, comme vient de le faire M. le rapporteur, de ventes de
meubles, je tiens à préciser qu'il s'agit de ventes de biens meubles,
c'est-à-dire aussi de tableaux, de monnaies, en un mot de tout ce qui est
mobilier au sens juridique du terme.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 23 est ainsi rédigé.
Article 24
M. le président.
« Art. 24. - Les ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne
ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen sont tenus de
respecter les règles régissant l'activité de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques prévues par la présente loi, notamment l'interdiction de
l'achat pour revendre, sans préjudice des obligations non contraires qui leur
incombent dans l'Etat dans lequel ils sont établis. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 60 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 22 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent, dans cet article, à supprimer les mots : « , notamment
l'interdiction de l'achat pour revendre, ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 60.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 60 est rédactionnel. Il s'agit de supprimer
une mention purement pédagogique, qui n'a aucune valeur juridique réelle. Je
n'ose pas dire qu'elle est « superfétatoire », ce serait discourtois, mais elle
n'est en tout cas nullement indispensable. C'est pourquoi nous suggérons de la
supprimer.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 22.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Même avis et même amendement, même s'il me déplaît
d'avoir l'air de penser ou entendre que la pédagogie est inutile !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 60 et 22
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je viens d'écouter
attentivement M. Gouteyron, qui pense que la pédagogie peut être utile. Je
partage ce sentiment. Il est bon en effet de rappeler ce principe
d'interdiction d'achat pour revendre pour attirer l'attention des
ressortissants étrangers sur cette obligation essentielle, cela d'autant plus
que, dans les pays anglo-saxons, les ventes aux enchères sont de nature
commerciale. Ils ne connaissent donc pas une telle obligation.
Dans un souci pédagogique, il est bon de maintenir cette disposition et je
suis donc défavorable aux amendements n°s 60 et 22.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 60 et 22, repoussés par le
Gouvernement.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par
assis et levé, adopte les amendements.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 24, ainsi modifié.
(L'article 24 est adopté.)
Article 25
M. le président.
« Art. 25. - En cas de manquement aux dispositions du présent chapitre, les
ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne et des Etats
parties à l'accord sur l'Espace économique européen sont passibles des mesures
et sanctions prévues à l'article 19. Ils sont également passibles d'une
interdiction définitive d'accomplir l'activité définie à l'article 21.
« En cas de sanction, le conseil des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques en avise l'autorité compétente de l'Etat d'origine. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 61 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 23 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à rédiger ainsi le premier alinéa de cet article :
« En cas de manquement aux dispositions du présent chapitre, les
ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne et des Etats
parties à l'accord sur l'espace économique européen sont soumis aux
dispositions de l'article 19. Toutefois, les sanctions de l'interdiction
temporaire de l'exercice de l'activité et du retrait de l'agrément sont
remplacées par les sanctions de l'interdiction temporaire ou définitive
d'exercer en France l'activité de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 61.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de clarifier les sanctions
applicables aux ressortissants européens qui interviennent en France au titre
de la libre prestation de services.
La rédaction proposée par la commission des lois s'inspire très précisément de
celle qui avait été retenue, s'agissant de la libre prestation de services,
pour les avocats européens. Elles nous apparaît plus claire.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 23.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je me rallie aux explications données par M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 61 et 23
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 61 et 23, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 25, ainsi modifié.
(L'article 25 est adopté.)
Chapitre III
Les prisées et ventes judiciaires
de meubles aux enchères publiques
Article 26
M. le président.
« Art. 26. - Sont judiciaires au sens de la présente loi les ventes de meubles
aux enchères publiques prescrites par la loi ou par décision de justice, ainsi
que les prisées correspondantes.
« Les titulaires d'un office de commissaire-priseur dont le statut est fixé
par l'ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre 1945 prennent le titre de
commissaires-priseurs judiciaires. Sans préjudice des pouvoirs conférés par les
lois et règlements en vigueur aux autres officiers publics ou ministériels ou
aux personnes légalement habilitées, les commissaires-priseurs judiciaires ont
seuls compétence pour organiser les ventes judiciaires de meubles aux enchères
publiques, y procéder et faire les inventaires et prisées qui leur
correspondent.
« Ils assurent la police des ventes et peuvent faire toute réquisition pour y
maintenir l'ordre.
« Les commissaires-priseurs judiciaires peuvent exercer des activités de
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques au sein des sociétés à
forme commerciale prévues à l'article 2 de la présente loi. »
Par amendement n° 62, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit la seconde phrase du deuxième alinéa de cet article :
« Ils ont, avec les autres officiers publics ou ministériels et les autres
personnes légalement habilitées, seuls compétence pour organiser et réaliser
les ventes judiciaires de meubles aux enchères publiques, et faire les
inventaires et prisées correspondants. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie.
L'amendement n° 62 vise à écarter toute ambiguïté quant aux compétences
respectives des intéressés, officiers publics ou ministériels et autres
personnes légalement habilités.
Il s'agit d'indiquer clairement que les huissiers de justice et les notaires
conservent leurs compétences actuelles, concurremment à celles des
commissaires-priseurs.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 62, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 107, Mme Derycke, M. Lagauche et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer, après le deuxième alinéa de
l'article 26, un alinéa ainsi rédigé :
« Dans toutes les villes ou lieux où est établie la résidence d'un
commissaire-priseur judiciaire, il est interdit à tout autre officier
ministériel ou officier public de s'immiscer dans les opérations de ventes
judiciaires aux enchères publiques, d'inventaires et prisées correspondants
sous peine d'amende qui ne pourra excéder le quart du prix des objets prisés ou
vendus. »
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Cet amendement vise à réaffirmer le principe du monopole à résidence des
commissaires-priseurs judiciaires, qui existe actuellement. Cette précision
nous paraît d'autant plus importante qu'un amendement n° 90 à l'article 56,
déposé par la commission des lois, tend à abroger les textes qui établissent ce
monopole, à savoir la loi du 27 ventôse an IX et l'article 89 de la loi du 28
avril 1816 sur les finances. Sans vouloir préjuger le sort, favorable ou non,
qui sera réservé à cet amendement, nous préférons introduire expressément à
l'article 26 une disposition ayant trait au monopole des commissaires-priseurs
judiciaires à leur lieu de résidence.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission comprend l'esprit de cet amendement, qui
pourtant lui apparaît intutile, et ce pour deux raisons.
Premièrement, l'article 26 réaffirme clairement le monopole des
commissaires-priseurs judiciaires.
Deuxièmement, l'article 3 de l'ordonnance du 26 juin 1816, qui prévoit que les
autres officiers ministériels ne peuvent effectuer des ventes publiques dans
les villes où sont établis des commissaires-priseurs, n'est pas abrogé et
restera en vigueur.
Donc, pour ne pas dire que la commission est défavorable à cet amendement, je
dirai qu'il est satisfait !
M. René-Georges Laurin.
Par la loi !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Madame la sénatrice, j'ai
bien compris votre inquiétude, motivée par un amendement qui viendra
ultérieurement en discussion. Mais je peux vous rassurer : l'ordonnance du 26
juin 1816 est maintenue.
L'amendement n° 107 n'introduit donc pas de garanties supplémentaires
concernant le monopole des commissaires-priseurs judiciaires à leur
résidence.
M. le président.
Madame Derycke, l'amendement n° 107 est-il maintenu ?
Mme Dinah Derycke.
Mme le ministre m'ayant donné l'assurance que j'escomptais, je le retire,
monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 107 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 26, modifié.
(L'article 26 est adopté.)
Chapitre IV
Dispositions communes aux ventes volontaires et aux ventes judiciaires de
meubles aux enchères publiques
Article 27
M. le président.
« Art. 27. - Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques et les officiers publics ou ministériels compétents pour procéder aux
ventes judiciaires et volontaires engagent leur responsabilité au cours ou à
l'occasion des ventes de meubles aux enchères publiques, conformément aux
règles applicables à ces ventes.
« Les clauses qui visent à écarter ou à limiter leur responsabilité sont
interdites et réputées non écrites.
« Les actions en responsabilité civile engagées à l'occasion des prisées et
des ventes volontaires et judiciaires de meubles aux enchères publiques se
prescrivent par dix ans à compter du fait générateur du dommage. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 63 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 24 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à rédiger ainsi le dernier alinéa de cet article :
« Les actions engagées à l'occasion des ventes volontaires et judiciaires de
meubles aux enchères publiques, ainsi que des expertises correspondantes et des
prisées, se prescrivent par dix ans à compter du fait générateur du dommage, à
savoir l'adjudication ou la prisée. »
Par amendement n° 117, le Gouvernement propose de compléter,
in fine,
le dernier alinéa de l'article 27 par les mots : « à savoir l'adjudication
ou la prisée ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 63.
M. Luc Dejoie
rapporteur.
L'amendement n° 63 revêt une grande importance.
Il vise en effet à réduire à dix ans non seulement la prescription des actions
en responsabilité, mais aussi celle des actions en annulation consécutives à
une vente volontaire de meubles aux enchères publiques, ainsi que toutes les
actions engagées à l'occasion des ventes volontaires ou judiciaires.
On peut procéder à un long débat juridique sur ce point. Il n'en demeure pas
moins que nous sommes le pays où, même ramenée à dix ans, la prescription sera
la plus longue : dans les autres pays, la prescription est beaucoup plus
courte. Or, à l'heure actuelle, nous en sommes à des prescriptions
trentenaires, ce qui ne va pas dans le sens de la sécurité des transactions.
Diminuer ce délai de prescription sera un élément de simplification, de
sécurisation, qui rendra possible une plus grande fluidité du marché.
Avoir dix ans devant soi pour se plaindre, c'est bien suffisant.
Au demeurant, je reconnais bien volontiers, en tant que juriste, que cette
transformation est d'importance ; elle m'apparaît toutefois souhaitable.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 24.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Les amendements n°s 63 et 24 étant identiques, je
m'abrite derrière l'autorité et la solidité juridique de M. le rapporteur de la
commission des lois. Je fais donc mienne son argumentation en soulignant
l'importance de cette proposition.
J'ajouterai simplement que l'amendement apporte une précision qui n'est pas
uniquement rédactionnelle puisqu'il est indiqué que le fait générateur du
dommage est l'adjudication ou la prisée.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre, pour défendre l'amendement n° 117 et pour
donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 63 et 24.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je ne suis pas opposée,
bien au contraire, puisque c'est le sens de l'amendement n° 117, à ce qu'il
soit précisé que le fait générateur est constitué par l'adjudication ou la
prisée.
En revanche, le fait d'aligner sur le même régime la prescription de toutes
les actions engagées à l'occasion de la vente pose plusieurs difficultés.
En effet, de quelles actions s'agit-il ?
Il s'agit des actions en nullité relative pour erreur sur les qualités
substantielles qui permettent au vendeur ou à l'acheteur de demander la nullité
de la vente. Celles-ci sont, dans les faits, fréquemment concomitantes d'une
action en responsabilité engagée à l'encontre du commissaire-priseur ou de
l'expert.
Il s'agit, également, des actions en garantie des vices cachés, lorsque le
bien acquis contient un vice de conception ou de fabrication qui le rend
impropre à sa destination. Cette action, fréquemment utilisée lors de l'achat
de véhicules, se prescrit selon les dispositions de l'article 48 du code civil
par un bref délai à compter du jour de la découverte du vice. Cependant, vous
l'avez compris, ces actions ne sont pas spécifiques aux ventes aux
enchères-mais concernent des pans entiers du droit civil, notamment le droit
des contrats.
Par ailleurs, ces actions ont des régimes différents, notamment en ce qui
concerne le délicat problème du point de départ de la prescription. En matière
de nullité, par exemple, la prescription court à compter de la découverte de
l'erreur, et est ainsi nettement plus protectrice que si le point de départ
était constitué de la vente ou de la prisée.
En effet, cette action subsiste tant que l'erreur n'est pas apparue. Une
modification du point de départ pourrait être à l'origine d'une grave
insécurité juridique.
A cet égard, je voudrais rappeler que la prescription ne court pas contre
celui qui ne peut agir. Ainsi, dans l'ignorance du vice, il est impossible
d'agir, qu'il s'agisse d'une action en nullité du mariage pour bigamie ou d'une
action en nullité d'une vente aux enchères. Il n'est donc pas concevable de
modifier, à l'occasion de la réforme des ventes aux enchères, l'ensemble des
régimes de prescription qui touchent à des principes généraux de droit civil et
ont une portée qui va bien au-delà de la présente réforme.
Cependant, je suis sensible à l'intérêt que représenterait l'harmonisation des
délais de prescription. Ainsi que me l'a affirmé madame le garde des sceaux,
les réflexions vont se poursuivre pour aboutir à une réforme globale.
Quant à la précision relative aux expertises, elle ne me paraît pas
indispensable. En effet, les actions en responsabilité engagées à l'occasion
des ventes de meubles aux enchères publiques incluent celles qui seraient
relatives aux expertises réalisées lors de ces ventes.
Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements n°s 63 et 24.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 117 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 117 est satisfait par le nôtre.
A propos de la garantie contre les vices cachés, je rappelle que nous
discutons ici de la vente d'objets d'occasion usagés, pas d'objets neufs.
Au demeurant, je pense que le meilleur moyen d'obtenir un débat de fond sur
cette harmonisation des prescriptions est de voter notre amendement, qui fera
l'objet de la navette. Il n'y a pas si longtemps, lors d'un débat précédent,
j'ai retiré un amendement contre la promesse d'un texte à paraître. Or le texte
n'est toujours pas paru ! Je me permets donc, non par tactique, mais par souci
d'efficacité, de maintenir cet amendement relatif à la prescription décennale
généralisée, pour que nous en débattions de nouveau au cours de la navette.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n° 63 et n° 24.
M. René-Georges Laurin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Laurin.
M. René-Georges Laurin.
Comme M. le rapporteur l'a souligné, il s'agit d'un problème très
important.
Ce qui a tendu les rapports entre les Anglo-Saxons et nous, c'est que le
retour pour non-conformité au catalogue d'un tableau attribué à tel peintre et
vendu à Londres devait être effectué dans les huit jours. En France, ce délai
était de trente ans.
Voilà quelques années, un de nos éminents collègues, alors vice-président, qui
avait acheté un tableau de Boilly, vingt-sept ans auparavant, entendait déposer
une réclamation. Au-delà du fait que, trente ans après, nombre de personnes
physiques avaient disparu, il est certain que le marché français était assorti
de garanties solides puisque nos catalogues mentionnaient que l'attribution
d'un objet ou d'un tableau était pratiquement garantie éternellement.
Dix ans, c'est encore trop long car les choses vont vite. En tout cas il
faudra obtenir des maisons de ventes étrangères qui viendront opérer à Paris
qu'elles respectent les mêmes règles.
C'est sur des points comme celui-là et comme ceux qui ont été évoqués tout à
l'heure, à propos des avances financières, que se poseront des problèmes. C'est
pourquoi je suis favorable aux amendements identiques n°s 63 et 24.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Je souhaite donner lecture des conditions faites
par Christie's en cas de faux :
« Si, dans les cinq ans suivant la date de la vente aux enchères, l'acheteur
nous fournit la preuve que le lot est un faux, alors, si l'acheteur, à ce
moment-là, n'a pas réglé la totalité du montant dû, nous aurons le droit
d'annuler la vente et/ou, si nous avons réglé au vendeur, à ce moment-là, tout
ou partie de la totalité du montant qui est dû au vendeur, le vendeur devra
alors nous rembourser, à première demande, l'intégralité du montant payé. Dans
ce dernier cas, nous exercerons un droit de gage sur toute propriété
appartenant au vendeur sous notre contrôle comme sûreté pour garantir le
montant dû. »
M. René-Georges Laurin.
Chacun fera ce qu'il voudra !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 63 et 24, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 117 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 27, ainsi modifié.
(L'article 27 est adopté.)
Chapitre V
Des experts agréés par le conseil des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques
Article 28
M. le président.
« Art. 28. - Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques établit la liste des experts agréés auxquels peuvent avoir recours
les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, les
huissiers de justice, les notaires et les commissaires-priseurs judiciaires.
»
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 64 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 25 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à rédiger ainsi cet article :
« Les experts auxquels peuvent avoir recours les sociétés de ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques, les huissiers de justice, les
notaires et les commissaires-priseurs judiciaires peuvent être agréés par le
conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques dans des
conditions fixées par décret.
« Le conseil établit une liste des experts agréés. »
Par ailleurs, l'amendement n° 64 est assorti d'un sous-amendement n° 124
rectifié, présenté par MM. Bret, Duffour et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen, et tendant à compléter
in fine
le texte de
l'amendement n° 64 par un alinéa ainsi rédigé :
« Les conditions d'agrément des experts inscrits sur la liste sont
déterminées, au regard de leurs capacités et de leur qualification
professionnelle, par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 64.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de préciser que les sociétés de
vente ont la faculté, et non l'obligation, de recourir à un expert agréé.
Il est également prévu qu'un décret fixera les conditions de l'agrément des
experts.
Nous avons estimé que la rédaction du projet était ambiguë et qu'il était
préférable de préciser explicitement que les commissaires-priseurs pourront ou
non faire appel à un expert agréé et auront, à cet égard, une totale
liberté.
M. René-Georges Laurin.
Et une totale responsabilité !
M. le président.
La parole est à M. Bret, pour défendre les sous-amendement n° 124 rectifié.
M. Robert Bret.
Les articles 28 à 34 du présent projet de loi visent à remédier à l'absence,
depuis 1985, de réglementation relative à la profession d'expert. N'importe qui
peut, en effet, aujourd'hui, se proclamer expert dans telle ou telle
spécialité.
Le Gouvernement, soucieux d'assurer la fiabilité des ventes publiques et
d'apporter aux consommateurs des garanties, souhaite encadrer ces ventes,
notamment pour ce qui est des compétences des experts.
Le projet prévoit, en conséquence une procédure d'agrément assortie
d'obligations, telles que l'obligation d'assurance et de responsabilité
solidaire, un contrôle disciplinaire et le respect de règles déontologiques.
On peut néanmoins s'interroger sur l'intérêt qu'il y a à élaborer un « statut
de l'expert » si, d'une part, il n'est pas fait obligation de recourir à des
experts présentant les qualités requises pour être agréés et si, d'autre part,
aucune qualification professionnelle n'est exigée.
Aussi proposons-nous que les conditions d'agrément des experts inscrits sur la
liste soient déterminées, au regard de leurs capacités et de leur qualification
professionnelle, par décret en Conseil d'Etat. Il conviendrait, en
l'occurrence, d'imposer un cursus à partir d'une formation de base.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 25.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je me contenterai d'insister sur un point.
Le projet de loi, s'il précise les conditions requises pour que les sociétés
de ventes obtiennent l'agrément, ne prévoit rien de tel pour les experts. Nous
prévoyons donc qu'un décret fixera les conditions d'agrément pour ces derniers,
à l'instar de ce qui est prévu pour les sociétés de ventes.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 124 rectifié ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Ce sous-amendement ne me semble pas indispensable car la
fixation des conditions d'agrément est déjà visée dans l'amendement de la
commission des lois. Comment pourrait-on imaginer que le décret ne tienne pas
compte des compétences ou de la qualification professionnelle nécessaires pour
obtenir l'agrément ?
Je me permets donc de suggérer à M. Bret de bien vouloir retirer son
sous-amendement, qui est, en réalité, satisfait.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 64 et 25,
ainsi que sur le sous-amendement n° 124 rectifié ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement émet un
avis favorable sur les deux amendements, qui permettent de recourir à des
experts, y compris à des personnalités dont l'expertise est très particulière.
La rédaction proposée répond au souci des professionnels, et nous y souscrivons
pleinement.
Par ailleurs, il me paraît utile pour l'information du consommateur et des
experts eux-mêmes, que les conditions de délivrance de l'agrément par le
conseil des ventes soient prévues expressément et fixées par décret.
Par voie de conséquence, sur le sous-amendement n° 124 rectifié, je ferai
pratiquement la même remarque que M. le rapporteur : il appartient au décret de
préciser l'ensemble des critères, et ce sous-amendement est donc satisfait.
M. le président.
Monsieur Bret, maintenez-vous le sous-amendement n° 124 rectifié ?
M. Robert Bret.
Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président.
Je vais donc le mettre aux voix.
M. René-Georges Laurin.
Je demande la parole contre le sous-amendement n° 124 rectifié.
M. le président.
La parole est à M. Laurin.
M. René-Georges Laurin.
M. Bret a raison : à ce jour, et pas seulement en matière de meubles et
d'objets d'art, tout le monde peut revendiquer la qualité d'expert. Si demain,
vous prend l'envie de vous installer rue de Tournon comme expert, rien ne vous
interdit de le faire ! On vous demandera sans doute en quoi vous êtes expert,
mais vous pourrez répondre n'importe quoi, parce qu'il n'y a pas de possibilité
de contrôle.
Pourquoi les commissaires-priseurs - demain, les vendeurs de meubles des
sociétés - font-ils appel à un expert ? Dans 80 % des cas, c'est tout
simplement parce qu'ils mesurent, sur tel ou tel objet, les limites de leurs
compétences. Or, dans tous les domaines, qu'il s'agisse de tableaux anciens, de
tableaux modernes, de meubles français du xviie siècle, d'instruments de
musique japonais, que sais-je encore ? il y a des spécialistes qui écrivent des
livres, parfois sur un thème très précis. Il est donc utile, dans l'intérêt
même de l'acheteur, qu'un officier vendeur de meubles, quand il est obligé de
faire une attestation ou de rédiger un catalogue qui l'engage, puisse se faire
assister par un expert.
Cela étant, il est évident que le décret qui fixera les conditions de
l'agrément, donnera toutes garanties quant à la moralité et aux compétences des
experts qui seront agréés.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 124 rectifié, repoussé par la
commission et par le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 64 et 25, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 28 est ainsi rédigé.
Article 29
M. le président.
« Art. 29. - Tout expert agréé doit être inscrit dans l'une des spécialités
dont la liste est établie par le conseil des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques.
« Nul ne peut l'être dans plus de deux spécialités, à moins qu'il ne s'agisse
de spécialités connexes aux précédentes dont le nombre ne peut être supérieur à
deux. »
Par amendement n° 65, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans le premier alinéa de cet article, de remplacer le mot : « liste » par le
mot : « nomenclature. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement purement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 65, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 66, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
supprimer le second alinéa de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Aux termes du second alinéa de l'article 29, les experts ne
peuvent pas se targuer de leur qualification dans plus de deux spécialités. Le
rapporteur et la commission se posent la question : pourquoi deux seulement ?
Il nous a semblé que, au moins dans cette matière, le cumul pouvait être admis.
(Sourires.)
Nous souhaitons donc supprimer cette limitation à deux spécialités qui ne
semble pas nécessairement correspondre ni à la réalité ni surtout aux
besoins.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
M. le rapporteur a parlé
d'une limitation à deux spécialités. En fait, il faut y ajouter,
éventuellement, deux spécialités connexes. Par conséquent, la limitation à deux
spécialités ne concerne que les spécialités principales.
Je suis tout à fait défavorable à cet amendement dans la mesure où la
limitation du nombre de spécialités est une garantie essentielle pour les
consommateurs de la compétence des experts agréés. Par exemple, dans un secteur
aussi complexe que les oeuvres d'art, je ne crois pas qu'il soit possible qu'un
expert soit à la fois spécialiste de la peinture hollandaise du xviie siècle,
du mobilier « Art Déco » et de l'art d'Extrême-Orient.
M. Emmanuel Hamel.
Pourquoi pas ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Les experts sont, non pas
des généralistes détenteurs de connaissances globales, mais des spécialistes
qui doivent posséder une parfaite maîtrise dans leur domaine d'élection. C'est
aussi une garantie pour le commissaire-priseur. Ils engagent parfois très
lourdement leur responsabilité, et ils doivent faire preuve d'un
professionnalisme sans faille.
C'est la raison pour laquelle ils ne peuvent être réellement compétents que
dans un ou deux domaines et, éventuellement, dans un ou deux domaines
connexes.
J'ajoute que c'est également, pour les personnes concernées, une condition de
la reconnaissance de leur compétence.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Madame la ministre, je reconnais que mon propos a été un peu
trop bref et que j'ai omis de parler des spécialités connexes.
Cela étant, je ne vois pas pourquoi la loi interdirait d'avoir trois
spécialités principales. Cela relève de la responsabilité du conseil des
ventes. Celui-ci agréera ou n'agréera pas M. Untel pour une, deux, trois ou
quatre matières. Je ne vois pas pourquoi on interdirait au conseil des ventes
de considérer que M. Untel est en fait compétent dans quatre domaines
distincts.
Je crois qu'il faut laisser cette responsabilité au conseil des ventes, dont
c'est précisément la mission.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 66.
M. Emmanuel Hamel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Madame le ministre, pourquoi limiter à un nombre si restreint de domaines le
champ des spécialités ? Vous êtes là en contradiction avec ce que vous
représentez vous-même : en tant que ministre de la culture et de la
communication, n'êtes-vous pas spécialiste dans des dizaines de domaines !
Alors, madame le ministre, pourquoi interdire aux autres de s'approcher de
l'étendue de vos connaissances et de votre dynamisme intellectuel ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Puisque M. Hamel m'a
interpellée, monsieur le président, je tiens à lui répondre.
Je considère que j'ai acquis certains droits à l'expertise dans un domaine :
les manuscrits coptes du Ier au IVe siècle, en particulier les manuscrits
scripturaires ou apocryphes.
Je ne considère pas que, dans mes fonctions ministérielles, je puisse être
qualifiée d'experte. Je m'appuie, dans mes décisions, sur les conseils
d'experts, car gouverner, c'est tenter de satisfaire à l'intérêt public de la
manière la plus ouverte possible, sans faire valoir uniquement son expertise
propre.
En matière d'histoire de l'art et d'art en général, comme dans les autres
domaines, l'expertise requiert une compétence extrêmement précise.
Nous devons éviter que certains experts ne se targuent d'un très vaste champ
de connaissances pour faire prévaloir leur avis sur celui d'autres personnes
qui ont pris la peine d'approfondir un domaine particulier.
Si la France peut s'honorer d'avoir des experts reconnus dans de très
nombreuses disciplines, c'est précisément parce que nos experts ont su acquérir
des connaissances tout à fait pointues dans leur spécialité.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 66, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 29, modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Article 30
M. le président.
« Art. 30. - Tout expert agréé est tenu de contracter une assurance
garantissant sa responsabilité professionnelle.
« Il est solidairement responsable avec l'organisateur de la vente. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 67 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 26 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent à compléter,
in fine
le second alinéa de l'article 30
par les mots : « pour ce qui relève de son activité ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 67.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement concerne la responsabilité solidaire de
l'expert par rapport aux commissaires-priseurs ou aux professionnels chargés de
la vente.
Le second alinéa de l'article 30 dispose, s'agissant de l'expert : « Il est
solidairement responsable avec l'organisateur de la vente. » Notre amendement
tend à apporter la précision suivante : « pour ce qui relève de son activité ».
Il est bien évident, en effet, que l'expert ne peut pas être responsable
solidairement de quelque chose qui ne relève pas de son activité.
D'aucuns diront qu'il s'agit d'une limitation. C'est plutôt une précision, qui
paraît très judicieuse à la commission.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 26.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je me rallie aux explications données par M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 67 et 26
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 67 et 26, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 30, ainsi modifié.
(L'article 30 est adopté.)
Articles 31 et 32
M. le président.
« Art. 31. - Toute personne inscrite sur la liste prévue à l'article 28 ne
peut faire état de sa qualité que sous la dénomination d'"expert agréé par le
conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques". »
« Cette dénomination doit être accompagnée de l'indication de sa ou ses
spécialités. »
- (Adopté.)
« Art. 32. - Le fait, pour toute personne ne figurant pas sur la liste
prévue à l'article 28, d'user de la dénomination mentionnée à cet article, ou
d'une dénomination présentant une ressemblance de nature à causer une méprise
dans l'esprit du public, est puni des peines prévues par l'article 433-17 du
code pénal. »
- (Adopté.)
Article 33
M. le président.
« Art. 33. - Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques peut prononcer la radiation d'un expert agréé en cas d'incapacité
légale, de faute professionnelle, d'agissement contraire à l'honneur, à la
probité ou aux bonnes moeurs. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 68, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques peut
prononcer le retrait de l'agrément d'un expert en cas d'incapacité légale, de
faute professionnelle grave, de condamnation pour faits contraires à l'honneur,
à la probité ou aux bonnes moeurs. »
Par amendement n° 27, M. Gouteyron, au nom de la commission des affaires
culturelles, propose de rédiger comme suit ce même article :
« Le conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques peut
prononcer le retrait de l'agrément d'un expert en cas d'incapacité légale, de
faute professionnelle grave, de condamnation pour faits contraires à l'honneur,
à la probité et aux bonnes moeurs. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 68.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 68 a pour objet d'harmoniser les conditions
de retrait de l'agrément de l'expert avec celles qui sont prévues par loi de
1971 pour la radiation des experts judiciaires. En effet, il n'appartient pas
au conseil des ventes d'apprécier lui-même les agissements contraires à
l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs. Il est simplement chargé de
sanctionner l'expert qui a fait l'objet d'une condamnation pour de tels
agissements. Autrement dit, ce n'est pas le conseil des ventes qui condamne :
il constate et, le cas échéant, il prononce la radiation.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 27.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je me rallie à l'amendement de la commission. Par
conséquent, je retire l'amendement n° 27.
M. le président.
L'amendement n° 27 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 68 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 68, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 33 est ainsi rédigé.
Article 34
M. le président.
« Art. 34. - Un expert agréé ne peut estimer, ni mettre en vente un bien lui
appartenant ni se porter acquéreur directement ou indirectement d'un bien dans
les ventes aux enchères publiques auxquelles il apporte son concours.
« Toute infraction aux dispositions du présent article est punie d'une année
d'emprisonnement et de 100 000 F d'amende. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 69 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 28 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux tendent, dans le premier alinéa de cet article, après les mots : «
directement ou indirectement », à insérer les mots : « pour son propre compte
».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 69.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de faire apparaître clairement
que l'interdiction faite à un expert de se porter acquéreur d'un bien dans une
vente ne l'empêche pas d'exécuter un ordre d'achat en tant que mandataire d'un
client. Il s'agit, à mon sens, d'une précision utile.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 28.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je me rallie aux explications données par M.
Dejoie.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 69 et 28
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 69 et 28, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Je suis à nouveau saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 70 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 29 est déposé par M. Gouteyron, au nom de la commission des
affaires culturelles.
Tous deux ont pour objet de supprimer le second alinéa de l'article 34.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 70.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 70 vise à supprimer les sanctions pénales
prévues par l'article 34 et relatives à l'interdiction faite aux experts
d'acheter ou de vendre pour leur propre compte lors de ventes aux enchères
publiques.
En effet, les sanctions disciplinaires déjà prévues à l'article 19 paraissent
bien suffisantes pour assurer le respect de cette interdiction. En maintenant
cette disposition, nous donnerions l'impression - ce ne serait pas seulement
une impression ! - de traiter plus sévèrement les experts que les organisateurs
de ventes, ce qui ne semble pas justifié.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 29.
M. Adrien Gouteyron,
rapporteur pour avis.
Je fais miennes les explications données par M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 70 et 29
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement s'en
remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 70 et 29, pour lesquels le
Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 34, modifié.
(L'article 34 est adopté.)
Chapitre VI
L'indemnisation
Article 35
M. le président.
« Art. 35. - Les commissaires-priseurs sont indemnisés en raison du préjudice
subi du fait de la dépréciation de la valeur pécuniaire de leur droit de
présentation résultant de la suppression du monopole conféré jusqu'à l'entrée
en vigueur de la présente loi à ces officiers ministériels dans le domaine des
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 71 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 94 est déposé par M. Gaillard, au nom de la commission des
finances.
Tous deux tendent à rédiger comme suit cet article :
« Les commissaires-priseurs sont indemnisés en raison de la perte du droit de
présentation de leur successeur en matière de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques et de la suppression du monopole qui leur était conféré dans
ce domaine jusqu'à l'entrée en vigueur de la présente loi. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 71.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit là de l'indemnisation des commissaires-priseurs
pour l'expropriation partielle de leur droit de présentation dans le domaine
des ventes volontaires de meubles.
La rédaction que nous proposons pour l'article 35 ne fait qu'affirmer le
principe du droit à indemnisation.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 94.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Nous nous sommes largement exprimés sur ce sujet
au début de la matinée. Par conséquent, je n'y reviens pas.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 71 et 94
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement est
défavorable à ces amendements identiques. Nous abordons ici l'un des points les
plus importants de ce débat.
Le droit de présentation a été institué par l'article 91 de la loi de finances
du 28 avril 1816.
Ce droit comprend deux éléments : d'abord, le titre et la fonction proprement
dite, qui est insaisissable et intransmissible ; ensuite, la « finance », qui
correspond à la valeur vénale attachée à la présentation par le titulaire de
l'office de son successeur à l'agrément de l'autorité publique.
Ainsi que Mme le garde des sceaux l'a exposé ce matin, le Gouvernement
considère que l'atteinte à la valeur pécuniaire du droit de présentation ne
constitue pas une expropriation au sens de l'article XVII de la Déclaration des
droits de l'homme et du citoyen.
En effet, le droit de présentation n'est pas un droit de propriété, car son
titulaire n'en a pas la libre disposition. Il ne peut l'aliéner que si le garde
des sceaux y consent.
Certes, un droit de propriété peut subir des restrictions, mais encore faut-il
que ces restrictions ne soient pas propres à dénaturer ce droit et à empêcher
son existence même. Or l'agrément du garde des sceaux peut faire obstacle à
l'une des caractéristiques essentielles du droit de propriété, l'
abusus,
c'est-à-dire le droit d'en disposer librement.
La raison d'être de cette restriction trouve son fondement dans la mission de
service public, et parfois même la délégation de puissance publique, que le
garde des sceaux va donner au nouveau titulaire du droit de présentation.
Le ministre de la justice est en droit de refuser de donner cette délégation
et il ne saurait en être autrement, car une mission de service public ne peut
être librement cédée.
Admettre un droit de propriété sur le droit de présentation reviendrait, en
quelque sorte, à faire revivre le régime de la vénalité des offices aboli par
la Constitution du 5 septembre 1791.
(Sourires sur le banc des commissions.)
M. René-Georges Laurin.
Ah non ! Pas ça !
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
En outre, la suppression
des offices de commissaires-priseurs, du fait de la libéralisation du secteur
des ventes volontaires, n'équivaut pas à une expropriation dans la mesure où
les commissaires-priseurs conserveront, en qualité d'officiers ministériels, le
monopole des ventes judiciaires et pourront, à ce titre, exercer leur droit de
présentation.
Pour ce qui concerne les ventes volontaires, les commissaires-priseurs ne
perdent pas leur bien ; ils pourront continuer à exercer la même activité et
vendre leur bien s'ils le décident. Ils ne sont pas dépossédés de leur bien.
Le Gouvernement partage l'analyse faite par le doyen Vedel, pour lequel cette
« atteinte portée à l'habilitation d'exercer certaines activités réglementées
assorties d'un
mumerus clausus »
met en cause le principe d'égalité
devant les charges publiques. Ce même principe a été retenu par les experts qui
ont été désignés par le garde des sceaux pour l'éclairer sur les conditions de
l'indemnisation.
En effet, en abrogeant le monopole des commissaires-priseurs sur les ventes
volontaires et en diminuant la valeur du droit de présentation des
professionnels en fonction, le projet de loi porte atteinte à la valeur
d'échange des offices et, en conséquence, au patrimoine de leurs titulaires.
Ce texte place donc les intéressés en situation d'inégalité devant les charges
publiques, que ce soit comparativement à leurs prédécesseurs, auprès de qui ils
ont acquis le droit de présenter leur futur cessionnaire à l'agrément du garde
des sceaux, ou par rapport aux autres officiers publics ou ministériels, pour
lesquels le pouvoir de céder la finance de leur office est maintenu.
Les conditions de mise en oeuvre du principe sont réunies puisque le préjudice
invoqué est spécial, anormal et certain : le préjudice subi doit donc être
indemnisé.
M. Emmanuel Hamel.
Est-ce une note de Bercy que vous nous avez lue !
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Madame la ministre, nous venons d'entendre votre plaidoyer. A
mes yeux, certaines de vos affirmations sont contraires à la réalité.
La caution du doyen Vedel a été demandée. Qu'il me soit permis de dire très
respectueusement, dans son rapport, le droit de présentation est traité très
brièvement, d'une manière extrêmement légère. Cela ne peut être considéré comme
une quelconque caution. Je le dirais devant lui s'il était là !
Un certain nombre de professeurs de droit estiment, au contraire, que le droit
de présentation est un véritable droit de propriété.
Le droit de présentation des commissaires-priseurs résulte de la loi de 1816,
qui a reconnu aux officiers ministériels le droit de présenter leurs
successeurs à l'agrément « pourvu qu'il réunissent les qualités exigées par les
lois. » La jurisprudence de la Cour de cassation a toujours reconnu au droit de
présentation une valeur patrimoniale, propriété susceptible de faire l'objet
d'une vente dans le cadre de la cession de l'office.
Un arrêt du 23 mai 1854 a consacré la transmission du droit de présentation
aux héritiers du titulaire décédé, évoquant une « propriété d'une nature
exceptionnelle et soumise à des règles qui en circonscrivent et limitent
l'exercice ».
Un autre arrêt du 11 novembre 1857 réaffirme que le droit de présentation
constitue pour les officiers ministériels une « propriété de nature spéciale »,
en précisant « qu'ils ne peuvent disposer de cette propriété que sous les
restrictions et aux conditions... » - il s'agit des conditions habituelles.
Ultérieurement, un arrêt du 9 décembre 1946 confirme la valeur pécuniaire du
droit de présentation.
Encore récemment, un arrêt de la première chambre civile du 22 mars 1983 a
jugé que « l'indemnité mise par le garde des sceaux à la charge du successeur
du notaire destitué et consignée au profit des créanciers de celui-ci
représente la valeur de l'étude et fait partie du patrimoine du notaire
destitué », consacrant ainsi le droit de propriété de l'officier ministériel
sur la valeur de son office.
La valeur patrimoniale de l'office est d'ailleurs traditionnellement garantie
lorsqu'une décision de l'Etat entraîne une modification de son « périmètre ».
Un droit à l'indemnisation est, en effet, reconnu en cas de suppression, de
transfert ou de création d'office.
Je ne peux donc pas laisser dire sans réagir que le droit de présentation
n'est pas un droit de propriété !
Si vous aviez été présente ce matin, madame la ministre, lors de mon exposé
liminaire, vous m'auriez entendu indiquer que tout droit de propriété est
affecté de restrictions légales et constitutionnelles et qu'il n'en demeure pas
moins un droit de propriété !
La Cour de cassation a ainsi reconnu, à plusieurs reprises, que le droit de
présentation était un droit de propriété. En tant que tel, il ouvre droit à
indemnisation sur le fondement de l'expropriation. Par conséquent, je ne peux
pas laisser dire au sein de la Haute Assemblée qu'il ne s'agit pas d'un droit
de propriété. Ce n'est pas exact !
Bien entendu, l'Etat a la possibilité de mettre fin à ce droit de propriété,
mais uniquement par la voie de l'expropriation, c'est-à-dire avec une juste et
préalable indemnité.
Pardonnez la vivacité de mon propos, mais il est juridiquement incontestable.
Je mets au défi qui que ce soit de le contredire, si ce n'est, comme on a pu
l'entendre, par une simple affirmation, sans démonstration.
(M. René-Georges
Laurin applaudit.)
M. Emmanuel Hamel.
Très bien ! Vous êtes un grand juriste !
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Je n'aurai évidemment pas l'outrecuidance d'ajouter
quoi que ce soit à la démonstration juridique de M. le rapporteur. Je souhaite
simplement attirer l'attention de nos collègues sur le fait que nous sommes au
coeur du sujet.
Le projet de loi comprend trois articles qui sont liés, les articles 35, 37 et
43, ce dernier étant relatif à la composition de la commission d'indemnisation.
Nous avons le choix entre deux systèmes : celui qui est présenté par le
Gouvernement repose sur une analyse juridique, dont notre collègue M. Dejoie
vient de démontrer l'aspect contestable en ce qui concerne l'égalité devant les
charges publiques ; celui que nous présentons est fondé sur la constatation
d'un droit de propriété, donc sur le fondement de l'expropriation. C'est
pourquoi nous proposerons, à l'article 43, que la commission d'indemnisation
soit présidée par un magistrat de l'ordre judiciaire.
Il s'agit véritablement de deux systèmes entre lesquels il faut choisir. Je
précise que c'est à nous, législateur, qu'incombe ce choix. Il nous revient de
trancher la question après avoir analysé toute la jurisprudence et la doctrine.
(M. René-Georges Laurin applaudit.)
M. Emmanuel Hamel.
Tranchons !
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 71 et 94.
M. Robert Bret.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Avec cet article 35, nous entrons dans le débat sur les modalités fiscales et
financières de la transposition dans notre législation des injonctions de la
Commission européenne.
Je formulerai d'ailleurs une observation liminaire : dès lors que nous sommes
mis en demeure de transposer dans notre législation des règles de
fonctionnement découlant de l'application de textes d'origine communautaire,
nous nous trouvons dans l'obligation d'accompagner les effets de cette
transposition et cela coûte quelque peu à chaque fois.
La question de la quotité de l'indemnisation versée aux commissaires-priseurs
dans le cadre de la perte de leur monopole d'activité est centrale, en termes
de coûts pour le budget de l'Etat et les amendements de la commission des
finances tendent tout à fait concrètement à l'accroître quelque peu. Pour
autant, cela ne permet pas d'occulter la véritable question, à savoir la
pérennité même de la place de Paris en tant que lieu d'échange et de
transaction sur les biens meubles, et singulièrement sur les objets d'art.
Nous avons un peu l'impression que la quotité et la qualité de l'indemnité
compensatrice ne feront qu'accompagner un processus de restructuration,
évidemment avec des coûts sociaux pour l'emploi, de l'ensemble de la
profession. Cela dépasse donc le strict cadre qui nous est présenté.
Faut-il pour autant rejeter les amendements qui nous sont aujourd'hui
présentés, comme nous le propose Mme la ministre ? Pour le moment, nous nous
abstiendrons.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Nous partageons l'analyse qui a été présentée par Mme la ministre, au nom du
Gouvernement. Bien entendu, nous ne voterons pas ces amendements.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 71 et 94, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. Emmanuel Hamel.
Très bon vote !
M. le président.
En conséquence, l'article 35 est ainsi rédigé.
Article 36
M. le président.
« Art. 36. - La valeur de l'office, limitée à l'activité des ventes
volontaires, est calculée :
« - en prenant pour base la somme de la recette nette moyenne au cours des
exercices 1992 à 1996 et de trois fois le solde moyen d'exploitation de
l'office au cours des mêmes exercices ;
« - en affectant cette somme d'un coefficient de 0,5 pour les offices du
ressort des compagnies de commissaires-priseurs autres que celle de Paris et de
0,6 pour les offices du ressort de la compagnie des commissaires-priseurs de
Paris ;
« - en ajoutant à ce résultat la valeur nette des immobilisations corporelles,
autres que les immeubles, inscrite au bilan du dernier exercice clos à la date
d'entrée en vigueur de la présente loi ;
« - en multipliant le total ainsi obtenu par le rapport du chiffre d'affaires
moyen de l'office correspondant aux ventes volontaires au cours des exercices
1992 à 1996 sur le chiffre d'affaires global moyen de l'office au cours des
mêmes exercices.
« La recette nette est égale à la recette encaissée par l'office, retenue pour
le calcul de l'imposition des bénéfices, diminuée des débours payés pour le
compte des clients et des honoraires rétrocédés.
« Le solde d'exploitation est égal à la recette nette augmentée des frais
financiers et des pertes diverses et diminuée du montant des produits
financiers, des gains divers et de l'ensemble des dépenses nécessitées pour
l'exercice de la profession, telles que retenues pour le calcul de l'imposition
des bénéfices en application des articles 93 et 93 A du code général des
impôts.
« Les données utilisées sont celles qui figurent sur la déclaration fiscale
annuelle et dans la comptabilité de l'office. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 72, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans le deuxième alinéa de l'article 36, de remplacer les mots : « au cours des
exercices 1992 à 1996 » par les mots : « au cours des cinq derniers exercices
connus à la date de la promulgation de la présente loi ».
Par amendement n° 118, le Gouvernement propose, dans le deuxième alinéa de
l'article 36, de remplacer les mots : « au cours des exercices 1992 à 1996 »
par les mots : « de l'exercice 1992 au dernier exercice dont les résultats
seraient connus de l'administration fiscale au moment de la publication de la
loi ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 72.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit de modifier le point de départ de la période de
référence retenue pour déterminer la valeur des offices en vue de
l'indemnisation.
Le projet de loi prenait en compte les exercices 1992 à 1996. Or nous sommes
bientôt en l'an 2000. D'ailleurs, mon raisonnement serait tout de même valable
si j'avais la certitude que ce texte entrera effectivement en application le
1er janvier 2000.
Il nous a paru préférable de préciser qu'il convient de prendre comme
référence les cinq derniers exercices connus à la date de promulgation de la
présente loi. En effet, ce délai, qui est la référence habituelle, correspond à
une réalité. De surcroît, remonter plus loin ne me semble pas forcément
bénéfique, pour personne d'ailleurs, aussi bien pour le créancier que pour le
débiteur. En outre, si on retenait toutes les années depuis 1992, soit sept ou
huit ans, cela ne correspondrait plus à la véritable valeur vénale d'un droit
de présentation. C'est pourquoi il nous a paru judicieux de retenir les cinq
derniers exercices connus à la date de promulgation de la présente loi.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre, pour défendre l'amendement n° 118 et pour
donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 72.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je souscris au souci de
retenir la période la plus récente, de manière à assurer le plus facilement
possible l'indemnisation d'un préjudice. Avec les deux amendements présentés
par le Gouvernement, la période à laquelle nous faisons référence va de
l'exercice 1992 au dernier exercice dont les résultats seraient connus de
l'administration fiscale au moment de la publication de la loi. Cette rédaction
tend à assurer une fidèle indemnisation des commissaires-priseurs.
Cela étant dit, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n°
72.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 118 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Si
je prends comme référence les années 1992 à 1999, la valeur de l'office serait
calculée sur huit années. Or, que ce soit dans le domaine industriel ou en
matière commerciale, l'évaluation, d'un fonds de commerce par exemple, n'est
jamais faite à partir des huit derniers exercices. Sont prises en compte,
souvent les trois dernières années, et plus généralement les cinq dernières
années.
Sans démontrer ce qui serait favorable ou défavorable pour qui que ce soit, je
considère qu'un produit qui remonte à huit ans n'a rien de comparable avec un
produit de l'année en cours. Aussi, remonter à 1992 ne me semble pas judicieux.
La prise en compte des cinq dernières années reflète mieux la valeur réelle de
l'office à la date de l'indemnisation.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 72, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 118 n'a plus d'objet.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 73, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans le cinquième alinéa de l'article 36, de remplacer les mots : « au cours
des exercices 1992 à 1996 » par les mots : « au cours des cinq derniers
exercices connus à la date de la promulgation de la présente loi ».
Par amendement n° 119, le Gouvernement propose, dans le cinquième alinéa de
l'article 36, de remplacer les mots : « au cours des exercices 1992 à 1996 »
par les mots : « de l'exercice 1992 au dernier exercice dont les résultats
seraient connus de l'administration fiscale au moment de la publication de loi
».
La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 73.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Même situation que sur l'amendement précédent !
M. le président.
La parole est à Mme la ministre, pour présenter l'amendement n° 119 et pour
donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 73.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
La situation est la même
que précédemment. Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 73.
M. le président.
Et la commission, défavorable à l'amendement n° 119 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 73, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 119 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 36, modifié.
(L'article 36 est adopté.)
Article 37
M. le président.
« Art. 37. - Le préjudice subi du fait de la dépréciation de la valeur
pécuniaire du droit de présentation est fixé à 50 % de la valeur déterminée à
l'article 36. L'indemnisation correspondante peut être augmentée ou diminuée de
15 % au plus par la commission prévue à l'article 43 en fonction de la
situation particulière de chaque office et de son titulaire. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 74, est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 95, est déposé par M. Gaillard, au nom de la commission des
finances.
Tous deux tendent à rédiger comme suit cet article :
« Le préjudice indemnisé en application de l'article 35 est évalué sur la base
de la valeur de l'office déterminée à l'article 36, en tenant compte de la
valeur des éléments d'actifs incorporels de nature à être cédés par le
titulaire de l'office en cas de cessation de son activité de ventes volontaires
de meubles aux enchères publiques.
« Le titulaire de l'office peut demander le bénéfice d'une indemnisation
forfaitaire fixée à 50 % de la valeur déterminée à l'article 36. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 74.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement, qui est très important, a été évoqué par
plusieurs orateurs au cours de la discussion générale.
L'article 35 détermine le fondement de l'indemnisation et l'article 36 prévoit
d'une manière très détaillée les modalités d'évaluation de la valeur de
l'office. Je précise d'ailleurs au passage que la commission des lois n'a
nullement contesté ces modalités bien qu'elles diffèrent profondément des
modalités habituelles. En effet, il nous a été indiqué que les présentes
modalités étaient plus judicieuses sur le plan économique. Rangeons-nous à cet
avis. Nous ne proposons donc aucun changement à cet égard.
Je rappelle les termes de notre amendement à l'article 37 :
« Le préjudice indemnisé en application de l'article 35 est évalué sur la base
de la valeur de l'office déterminée à l'article 36, en tenant compte de la
valeur des éléments d'actifs incorporels de nature à être cédés par le
titulaire de l'office en cas de cessation de son activité de ventes volontaires
de meubles aux enchères publiques.
« Le titulaire de l'office peut demander le bénéfice d'une indemnisation
forfaitaire fixée à 50 % de la valeur déterminée à l'article 36. »
De quoi s'agit-il ? Pour son indemnisation, le commissaire-priseur aura un
choix à faire.
S'il entend éviter, non pas toute discussion, mais tout délai dans l'obtention
de l'indemnisation, il demandera le bénéfice de l'indemnisation forfaitaire
fixée à 50 % de la valeur déterminée à l'article 36 et l'affaire sera close.
En revanche, s'il estime que son préjudice est supérieur à l'indemnisation
forfaitaire, il pourra demander une évaluation personnelle et particulière,
mais il sera alors bien évidemment tenu compte des éléments dont il gardera la
propriété et qui pourront faire l'objet d'une cession lorsque l'intéressé
mettra fin à son activité de ventes volontaires. Cela correspond au principe
même de l'expropriation et à la juste indemnité à laquelle il a réellement
droit.
Je pense avoir été clair.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 95.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Même argumentation !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 74 et 95
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Si M. le rapporteur a
effectivement été très clair, il n'a cependant pas convaincu le
Gouvernement.
Je suis défavorable à cette disposition, notamment en raison de la première
branche de l'alternative que vous avez évoquée. D'une part, parce qu'elle ne
permet pas d'évaluer avec précision le montant de l'indemnisation qui serait
obtenue sur cette base de calcul. D'autre part, parce qu'elle ne prévoit aucun
délai pour sa mise en oeuvre, ce qui rend son application difficile et
constitue un élément d'incertitude pour les commissaires-priseurs sur la date à
laquelle interviendra l'indemnisation. Enfin, elle pourrait favoriser les
professionnels dont l'indemnisation serait proportionnelle à l'inertie
économique.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 74 et 95, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 37 est ainsi rédigé.
Article 38
M. le président.
« Art. 38. - A l'expiration d'un délai de trois ans à compter de l'entrée en
vigueur de la présente loi, les huissiers de justice et les notaires sont
indemnisés s'ils apportent la preuve d'avoir subi dans le secteur des ventes
volontaires un préjudice anormal et spécial du fait de la présente loi. La
demande est portée devant la commission prévue à l'article 43. »
-
(Adopté.)
Demande de réserve
M. le président.
La commission des lois a demandé la réserve de l'article 39 jusqu'après
l'examen de l'amendement n° 126 tendant à insérer un article additionnel après
l'article 44.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
La réserve est ordonnée.
Article 40
M. le président.
« Art. 40. - Il est inséré dans le code général des impôts un article 302
bis
ZE ainsi rédigé :
«
Art. 302
bis
ZE
. - I. - Il est institué, pour une durée de
cinq ans à compter du premier jour du mois qui suit l'entrée en vigueur de la
loi n° du portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques, une taxe sur les ventes de meubles aux enchères publiques,
judiciaires ou volontaires.
« II. - Ne sont pas assujetties à cette taxe les ventes publiques volontaires
réalisées par les courtiers de marchandises assermentés mentionnés à l'article
52 de la loi précitée, les ventes des biens appartenant à l'Etat relevant de
l'article L. 68 du code du domaine de l'Etat, les ventes effectuées en la forme
domaniale dans les conditions prévues par l'article L. 69 du même code ainsi
que celles effectuées par les receveurs régionaux des douanes.
« III. - La taxe est acquittée, pour le compte de l'adjudicataire, par les
sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, les
commissaires-priseurs judiciaires et les autres officiers publics ou
ministériels compétents pour procéder aux ventes judiciaires et volontaires et
les ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne et des Etats
parties à l'accord sur l'Espace économique européen habilités à procéder aux
ventes volontaires.
« IV. - La taxe est exigible lors de l'adjudication des biens ou de leur
cession en application du troisième alinéa de l'article 8 de la loi n° du
précitée.
« V. - L'assiette de la taxe est constituée par le prix d'adjudication ou de
cession de chaque bien. »
« VI. - Le taux de la taxe est fixé à 1 %.
« VII. - La taxe est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous
les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée.
Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles
applicables à cette même taxe. »
Par amendement n° 96, M. Gaillard, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer cet article.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
J'ai beaucoup insisté sur ce point au cours de
l'exposé liminaire que j'ai eu l'honneur de présenter.
La commission des finances propose de supprimer cet article 40, c'est-à-dire
la taxe sur les ventes de meubles aux enchères publiques, judiciaires ou
volontaires. Elle invoque plusieurs arguments, que je résume.
Premièrement, aux termes des dispositions que nous venons d'adopter, le
fondement, c'est l'expropriation. Dans ce cas, l'indemnisation ne peut provenir
que de l'Etat. Il est contradictoire de considérer qu'une expropriation doit
être financée par les expropriés, fût-ce d'une manière indirecte.
Deuxièmement, cette taxe n'est pas nécessaire sur le plan financier. En effet,
le Gouvernement a inscrit un crédit de 450 millions de francs dans la loi de
finances rectificative pour 1998 par anticipation au chapitre 46-01 du budget
du ministère de la justice, placé à l'état H des crédits non soumis à
l'annualité budgétaire par le projet de loi de finances pour 1999. Cela
signifie que les fonds sont déjà là. On ne sait pas s'ils seront suffisants.
Cela dépendra en effet du processus législatif, en l'occurrence si le Sénat a
gain de cause à la fin de celui-ci. Cela dépendra aussi des décisions de la
commission d'indemnisation et du nombre de professionnels qui souhaiteront être
indemnisés plus rapidement, c'est-à-dire forfaitairement, comme le prévoit
l'article 37, modifié sur l'initiative des commissions et que le Sénat a adopté
voilà un instant.
En tout état de cause, le budget de l'Etat va déjà engranger un certain nombre
de ressources supplémentaires du fait de l'alignement des tarifs professionnels
sur ceux que pratiquent les sociétés anglo-saxonnes. Il ne semble donc pas que,
financièrement, cette taxe soit absolument nécessaire, les fonds étant là.
En outre, le Gouvernement, assez curieusement, n'a pas précisé la nature de
cette taxe. Il n'a pas créé un mécanisme d'affectation spéciale. Ce n'est pas
un compte spécial du Trésor. Entre, d'un côté, une taxe et, de l'autre, un
crédit budgétaire, aucun rapport n'est établi. Voilà qui montre bien que,
fondamentalement, le Gouvernement n'est pas totalement satisfait ou certain de
la solution qu'il a avancée.
Troisièmement, nous nous interrogeons sur l'efficacité de ce système. Vous
avez tous pu lire dans la presse, mes chers collègues, et encore tout
spécialement ce matin dans les pages saumon du journal
Le Figaro,
que M.
le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie s'interroge très
sérieusement sur l'efficacité de notre système de recouvrement, beaucoup plus
cher et nettement moins efficace que celui des pays voisins du fait de la
multiplication du nombre d'administrations de recouvrement. D'ailleurs, de
grandes discussions ont lieu actuellement au sein de l'administration des
finances.
L'inspection générale des finances elle-même...
M. Emmanuel Hamel.
Dont vous êtes l'un des plus brillants fleurons !
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
... a été chargée de faire une étude sur ce point.
Je suis persuadé, compte tenu de l'expérience que j'ai pu avoir autrefois de
cet honorable corps, que, si cette taxe avait existé au moment de la
réalisation de cette étude, l'Inspection générale des finances en aurait
dénoncé la lourdeur et le peu de rentabilité. En effet, cette taxe devra
s'appliquer à un nombre très important d'opérations sur l'ensemble du
territoire, et son rendement ne sera pas, à mon avis, très intéressant.
Quatrièmement, nous devons donner un signal au marché. Mme le garde des sceaux
a pris ce matin des engagements assez intéressants sur le plan de la fiscalité.
Elle a en effet déclaré que les objectifs visés par la réforme ne seront
véritablement atteints que si, parallèlement, des mesures sont prises en faveur
du développement du marché des oeuvres d'art, notamment pour réduire les
distorsions de concurrence existant actuellement. Ces mesures concernent tout
d'abord la TVA à l'importation sur les objets d'art, « une action en faveur
d'une réduction du taux dans l'ensemble de la Communauté européenne, voire
d'une exonération des objets d'art de toute TVA à l'importation, sera
entreprise », a déclaré Mme le garde des sceaux.
J'imagine que Bercy et la direction de la législation fisclae ont dû céder sur
ce point car, quand nous leur avions posé la question, nous nous étions trouvés
devant un
non possumus
absolu !
Je salue donc cette grande victoire ! Cette proposition va d'ailleurs tout à
fait dans le sens du rapport sur le marché de l'art que nous avons présenté.
Elle ne fait que reprendre les propositions et les demandes incessantes des
plus grands spécialistes de l'affaire, tels M. Chandernagor et M. Aicardi.
Mais Mme le garde des sceaux a évoqué également deux autres mesures : d'une
part, la négociation du projet de directive européenne sur le droit de suite
visant à instaurer un taux dégressif, qui devra rapidement progresser, et,
d'autre part, la taxe sur les plus-values, un alignement du taux de la taxe
perçue pour les ventes effectuées par les négociants d'art sur le taux de 4,5 %
applicable aux ventes publiques devant être recherché - espérons qu'il sera
obtenu ! Ce dernier point correspond d'ailleurs à une demande que la commission
des finances a reprise dans son rapport sur le marché de l'art.
Je conseillerai donc au Gouvernement de ne pas s'arrêter en si bon chemin !
Qu'il continue cette action si nécessaire d'allégement des charges fiscales sur
le marché de l'art ! Et puisqu'il en est à une telle orientation, que je salue
vraiment - il y a beaucoup de joie dans les cieux pour le pêcheur repenti !
(Sourires)
- qu'il ne commence pas par créer une taxe nouvelle dont j'ai
essayé de montrer à la fois l'inefficacité, la lourdeur et le manque de
fondement juridique. Donnons ce signal aux professionnels et au marché de
l'art. Ne commençons pas par faire une réforme en créant une taxe !
Voilà pourquoi, mes chers collègues, je demande, au nom de la commission des
finances, la suppression de l'article 40.
M. René-Georges Laurin.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission des lois est bien sûr favorable à la
suppression de la taxe sur les opérations de vente suggérée par la commission
des finances, et je vous présenterai à cet égard, mes chers collègues, une
sorte d'argumentation complémentaire.
Le texte en discussion va donc libéraliser la profession et supprimer les
tarifs légaux, de sorte que c'est la seule loi du marché qui fera la
rémunération du professionnel. Croyez-vous vraiment, madame la ministre, qu'il
pourra ajouter à sa marge bénéficiaire le 1 % correspondant à la nouvelle taxe
? Sûrement pas ! Ce 1 % sera finalement pris sur la rémunération du
professionnel, lequel pourra dire alors, sans trop de mauvais esprit : « on me
donne une indemnisation, mais, en fait, je la rembourse ! » Dans cette
hypothèse, ce ne serait plus véritablement une indemnisation résultant d'une
expropriation !
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Ce n'est pas une
expropriation !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je ne souscris pas, au nom
du Gouvernement, à tous les arguments qui ont été évoqués par M. le rapporteur
pour avis de la commission des finances. Il s'est en effet référé de nouveau à
ce qui nous oppose, c'est-à-dire à l'expropriation, point sur lequel je ne
reviendrai pas.
Si le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement, c'est
la preuve que, lorsque ma collègue garde des sceaux s'est exprimée ce matin,
elle l'a fait au nom du Gouvernement. Elle a parlé des travaux qui sont en
cours et qui ont été motivés à la fois par l'écoute et la consultation de
l'ensemble des professionnels concernés par le marché de l'art : je pense à cet
égard, bien sûr, aux commissaires-priseurs, mais aussi à tous les antiquaires,
aux galeristes, aux restaurateurs, bref à tous les professionnels concernés de
façon directe ou indirecte par la vitalité de ce marché.
Nous montrons donc cette volonté et, sans être des pêcheurs repentis, nous
sommes là ! Je tiens à le souligner, car vous pouvez ainsi constater, messieurs
les rapporteurs, qu'il y a là un signe tout à fait positif que je n'avais point
vu dans les cieux précédemment !
(Sourires. - Applaudissements sur les
travées socialistes.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 96.
M. Robert Bret.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Par cet amendement n° 96, la commission des finances nous propose de supprimer
l'article 40 du projet de loi.
Cependant, cette suppression soulève un certain nombre de questions sur
lesquelles je souhaiterais revenir ici.
Les crédits nécessaires au financement de la réforme, ou, plus exactement, à
la transposition dans notre droit de règles communautaires ont en effet été
inscrits dans la loi de finances rectificative pour 1998, attendu qu'il
existait une marge budgétaire mobilisable, quand bien même certains pourraient
contester, à bon droit, une telle inscription par anticipation.
Il est vrai, chers collègues de la majorité sénatoriale, que vous avez voté,
il n'y a pas si longtemps, des lois de finances rectificatives prévoyant des
prélèvements autoritaires, pour combler des dépenses non prévues ou
arbitrairement sous-estimées pour obtenir un effet d'affichage.
Indépendamment de cet aspect de la question, la taxe sur les opérations de
vente instituée par le présent article présente néanmoins l'avantage d'avoir
d'un recouvrement assuré, ce qui n'est pas tout à fait le cas du surplus de
taxe sur la valeur ajoutée décrit par le rapport de notre collègue Yann
Gaillard en exergue de sa proposition.
Pour cette raison au moins, nous voterons contre cet amendement de suppression
de l'article 40, d'autant que nous ne sommes pas convaincus, en ce domaine
comme en bien d'autres, que la levée de « contraintes » fiscales soit une
condition
sine qua non
du développement d'une activité économique,
quelle qu'elle soit.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
J'ai annoncé ce matin, dans la discussion générale, que nous ne voterions pas
la suppression de la taxe proposée ici. Nous n'avons toujours pas été
convaincus en l'état actuel du débat.
J'ajoute simplement que, de l'avis des professionnels eux-mêmes, la taxe est
indolore, contrairement à ce que vient de dire M. le rapporteur. Il est vrai
que les tarifs étaient fixés à 9 %, ce qui met en évidence un différentiel,
notamment par rapport à la Grande-Bretagne, où les tarifs sont de 15 %. On
pouvait donc sans crainte ajouter une taxe de 1 % et, de même, augmenter le
tarif. Il n'y avait pas de risque pour la profession. S'agissant donc d'une
taxe indolore, nous voterons contre l'amendement n° 96.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 96, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence l'article 40 est supprimé.
Article 41
M. le président.
« Art. 41. - La demande d'indemnité doit être présentée par les
commissaires-priseurs dans le délai de deux ans à compter de la publication du
décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 43. L'indemnité est versée dans les
douze mois suivant le dépôt de la demande. Ce versement est subordonné, d'une
part, à la production d'une attestation d'assurance couvrant la responsabilité
encourue par les commissaires-priseurs à l'occasion de l'exercice des ventes
volontaires pour les dix années antérieures à l'entrée en vigueur de la loi et,
d'autre part, à la production d'un quitus délivré par la compagnie des
commissaires-priseurs. »
Par amendement n° 108, Mme Derycke, M. Lagauche, les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, dans la deuxième phrase de cet article, de
remplacer le mot « douze » par le mot « six ».
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Cet amendement porte sur le délai d'indemnisation, qui doit être le plus court
possible. Je ne reviendrai pas sur le débat qui vient d'avoir lieu ni sur ce
que j'ai dit ce matin, mais il est extrêmement important que l'indemnité soit
rapidement versée, car elle servira - du moins le souhaitons-nous - à la
restructuration des commissaires-priseurs sous forme de société commerciale
pour mieux affronter la concurrence étrangère.
C'est pourquoi nous proposons de ramener ce délai de douze mois à six mois.
J'ai parfaitement conscience que cette réduction du délai, qui est cohérente
avec les positions de mon groupe sur le mode d'indemnisation, sera plus
difficile à appliquer du fait de l'adoption par le Sénat, sur proposition de la
commission des lois, d'un mode d'évaluation du préjudice subi qui prendra
forcément plus longtemps. Comme l'a dit Mme la ministre, ce sera beaucoup plus
long.
Pourtant, le problème reste fondamental, car l'indemnisation n'en doit pas
moins être très rapide.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Le rapporteur peut se laisser convaincre par les propos qui
lui sont tenus. Nous avions pensé qu'un délai de douze mois était préférable à
un délai de six mois, qui nous paraissait trop court. Mais après tout, essayons
le délai de six mois ! La commission émet donc un avis favorable sur
l'amendement n° 108.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable également.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 108, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 76, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans la dernière phrase de l'article 41, de remplacer les mots : « par les
commissaires-priseurs à l'occasion de l'exercice des ventes volontaires pour
les dix années antérieures à l'entrée en vigueur de la loi », par les mots : «
par le commissaire-priseur à l'occasion de l'exercice des ventes volontaires à
compter de son entrée en fonctions et au plus pour les dix années antérieures à
la promulgation de la présente loi ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'article 41 prévoit que le versement de l'indemnité est
subordonnée à la production par les commissaires-priseurs d'une attestation
d'assurance pour les dix années antérieures à l'entrée en vigueur de la loi. Il
est bien évident que certains d'entre eux ne pourront jamais justifier de dix
années d'exercice puisqu'ils ne seront installés que depuis trois, quatre ou
cinq ans.
L'amendement n° 76 vise donc à régler ce petit problème qui ne présente aucune
difficulté.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 76, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 41, modifié.
(L'article 41 est adopté.)
Article 42
M. le président.
« Art. 42. - Les indemnités dues aux sociétés civiles professionnelles
titulaires d'un office de commissaire-priseur sont réglées à chacun de leurs
membres en proportion de leurs droits d'associés et suivant les modalités
concernant les différentes catégories déterminées par la présente loi. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 120, le Gouvernement propose de rédiger comme suit cet
article :
« Lorsqu'une société est titulaire d'un office de commissaires-priseurs,
l'indemnité mentionnée à l'article 35 est versée à la société dans les
conditions prévues à l'article 41. Elle la répartit entre les associés en
proportion de leurs droits dans la société. »
Par amendement n° 77, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose, à
la fin de l'article 42, de supprimer les mots : « et suivant les modalités
concernant les différentes carégories déterminées par la présente loi ».
La parole est à Mme le ministre, pour défendre l'amendement n° 120.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
La nouvelle rédaction
proposée prévoit que les indemnités dues aux sociétés civiles professionnelles
ou sociétés d'exercice libéral leur soient versées puis réparties entre leurs
membres en fonction de leurs droits.
Cette rédaction est plus conforme au principe d'indemnisation de la
dépréciation de la valeur pécuniaire du droit de présentation des offices de
commissaire-priseur.
En effet, lorsque la profession est exercée dans le cadre d'une société, c'est
la personne morale qui est titulaire de l'office, et c'est donc à cette
dernière que doit être versée l'indemnisation.
Au surplus, si la rédaction initiale était maintenue, les créanciers de la
société risqueraient d'avoir des difficultés pour exercer leurs droits.
Bien évidemment, cette nouvelle rédaction ne donnera pas lieu à une double
fiscalisation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 77 et pour
donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 120.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
En ce qui concerne les commissaires-priseurs, la notion de «
catégories » n'apparaît pas clairement définie à la lecture des autres articles
du projet de loi. L'amendement n° 77 vise donc à supprimer la référence à cette
notion.
S'agissant de l'amendement n° 120, madame le ministre, je vous ai entendue.
Sur le principe, je pense que vous avez raison : c'est à la société de
percevoir et de distribuer. Je me permets toutefois de solliciter de votre
bienveillance l'affirmation réitérée qu'il ne s'agit pas - non pas de votre
fait, mais, là encore, les cieux doivent jouer un certain rôle en la matière -
d'un moyen pour créer un étage fiscal supplémentaire avec une première
imposition au niveau de la société et une seconde au niveau des
commissaires-priseurs. Il ne faudrait pas que ce mécanisme aboutisse à réduire
l'indemnité du commissaire-priseur individuel !
Si vous nous assurez, madame le ministre, qu'il n'y aura point d'étage fiscal
supplémentaire, je donne alors un avis tout à fait favorable à l'amendement du
Gouvernement, qui est d'ailleurs plus conforme aux principes.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je peux rassurer
pleinement M. le rapporteur : il n'y aura pas double imposition, je l'ai dit,
je le confirme et je le signe.
M. Emmanuel Hamel.
C'est intéressant !
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Dans ces conditions, je confirme l'avis favorable de la
commission sur l'amendement n° 120 et je retire l'amendement n° 77.
M. le président.
L'amendement n° 77 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 120, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 42 est ainsi rédigé.
Article 43
M. le président.
« Art. 43. - Les demandes d'indemnisation sont portées devant une commission
nationale présidée par un magistrat de la Cour des comptes, dont la composition
et le fonctionnement sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
« La commission évalue le montant de l'indemnisation, conformément aux règles
prévues par les articles 35 à 38.
« La commission établit un rapport sur le déroulement de l'indemnisation et
l'équilibre financier du fonds.
« Les décisions de la commission peuvent faire l'objet d'un recours de pleine
juridiction porté devant le Conseil d'Etat. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 78, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit le premier alinéa de cet article :
« Les demandes d'indemnisation sont portées devant une commission nationale
présidée par un magistrat de l'ordre judiciaire et comprenant, en nombre égal,
d'une part, des représentants des commissaires-priseurs et, d'autre part, des
personnes qualifiées désignées par le garde des sceaux, ministre de la justice.
Des suppléants sont désignés en nombre égal et dans les mêmes formes. Les
modalités de constitution et de fonctionnement de la commission sont fixées par
décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 97, M. Gaillard, au nom de la commission des finances,
propose de rédiger comme suit le premier alinéa de cet article :
« Les demandes d'indemnisation sont portées devant une commission nationale
présidée par un magistrat de l'ordre judiciaire et comprenant, en nombre égal,
d'une part, des représentants des commissaires-priseurs et, d'autre part, des
personnes qualifiées désignées par le garde des sceaux. Des suppléants sont
désignés en nombre égal et dans les mêmes formes. Les modalités de
fonctionnement de la commission sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 121, le Gouvernement propose, dans le premier alinéa de cet
article, de remplacer les mots : « par un magistrat de la Cour des comptes »
par les mots : « par un membre du Conseil d'Etat ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 78.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement est relatif à la commission nationale
d'indemnisation.
Pour éviter que l'on ne me demande de le préciser ultérieurement, j'indique
d'ores et déjà que le décret prévu
in fine
devra bien évidemment prévoir
que, lorsqu'il s'agira de l'indemnité d'un membre de la commission
d'indemnisation, ce dernier devra être remplacé, car il ne saurait être à la
fois juge et partie.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement
n° 97.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Il s'agit d'un amendement parallèle au précédent,
et les parallèles se rejoignent, comme chacun sait.
M. le président.
Certes, mais je ne peux pas mettre les deux amendements aux voix !
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Dans ces conditions, je me rallie à celui de la
commission de lois et je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 97 est retiré.
La parole est à Mme le ministre, pour présenter l'amendement n° 121 et pour
donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 78.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
L'amendement n° 121
prévoit, dans un souci de compromis entre le texte du Gouvernement et la
proposition de la commission des lois, de confier la présidence de la
commission nationale d'indemnisation à un conseiller d'Etat compte tenu du
fondement retenu pour la détermination de ladite indemnisation, à savoir le
principe de l'égalité devant les charges publiques.
Cela étant, je sais aussi que cet amendement risque de devenir sans objet si
l'amendement n° 78 de la commission est adopté. Or je suis défavorable à cet
amendement, qui vise à confier la présidence de la commission nationale à un
magistrat de l'ordre judiciaire et qui précise, par ailleurs, la composition de
cette commission.
Sur le premier point, je l'ai dit, la solution proposée ne paraît pas pouvoir
être retenue compte tenu du fondement de l'indemnisation.
Sur le second point, il revient au pouvoir réglementaire de fixer la
composition de la commission, qui devra être équilibrée en évitant les conflits
d'intérêt qui pourraient naître entre les professionnels concernés par
l'indemnisation et ceux qui siégeraient au sein de la commission. M. le
rapporteur a d'ailleurs, à ce propos, soulevé le cas d'une personne concernée
par l'indemnisation et membre de la commission. En effet, les professionnels
risqueraient d'être juge et partie et leur présence au sein de cette commission
ne me paraît pas opportune, y compris vis-à-vis de leur pairs.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 121 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission des lois est défavorable à cet amendement. Il
est souhaitable que la commission nationale soit présidée par un magistrat de
l'ordre judiciaire puisqu'il s'agit d'expropriation. Ni le Conseil d'Etat ni la
Cour des comptes n'ont à intervenir en la matière !
Il y a donc, permettez-moi de le dire, une relative cohérence dans l'esprit du
rapporteur et de la commission des lois.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 78, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 121 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 79, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
dans l'avant-dernier alinéa de l'article 43, après le mot : « rapport »,
d'insérer le mot : « annuel ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement pratiquement formel : la commission
ne pourra probablement pas achever ses travaux en une seule année et nous
prévoyons donc un rapport annuel ; il y en aura peut-être un, deux ou trois
!
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 79, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 80, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit le dernier alinéa de l'article 43 :
« Les décisions de la commission peuvent faire l'objet d'un recours devant la
cour d'appel de Paris. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Toujours dans le même esprit de cohérence évoqué tout à
l'heure, nous proposons que les décisions de la commission puissent faire
l'objet d'un recours devant la cour d'appel de Paris.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Cohérent avec la position
qu'il a prise tout à l'heure, le Gouvernement est défavorable à cet
amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 43, modifié.
(L'article 43 est adopté.)
Division et articles additionnels après l'article 43
et article additionnel après l'article 51
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Monsieur le président, je souhaite la réserve de l'amendement
n° 102 jusqu'à ce que l'amendement n° 100 ait été examiné.
Par ailleurs, je demande l'examen en priorité de l'amendement n° 101, avant
l'amendement n° 98.
Il y aurait un illogisme total à procéder d'une autre manière !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les demandes de réserve et de priorité
formulées par la commission ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement y est
favorable.
M. le président.
La réserve et la priorité sont ordonnées.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
De son côté, monsieur le
président, le Gouvernement demande que l'amendement n° 122 soit examiné en
priorité après l'amendement n° 98.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur cette demande de priorité ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
La priorité est ordonnée.
J'appelle donc tout d'abord l'amendement n° 101, présenté par M. Gaillard, au
nom de la commission des finances, et tendant à insérer, après l'article 43, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le rapport d'imposition prévu au
a
du I de l'article 151
octies
du code général des impôts est maintenu en cas d'apport par une
société mentionnée aux articles 8 et 8
ter
du même code, titulaire d'un
office de commissaire-priseur ou associant des commissaires-priseurs, à une
société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.
« II. - Les dispositions des I et II de l'article 151
octies
du code
général des impôts sont applicables aux plus-values dégagées en cas d'apport
par une société mentionnée aux articles 8 et 8
ter
du même code,
titulaire d'un office de commissaire-priseur ou associant des
commissaires-priseurs, à une société de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques.
« III. - L'apport à une société de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques de l'activité de ventes volontaires par le titulaire d'un office de
commissaire-priseur est assimilé à l'apport d'une branche complète d'activité
pour l'application de l'article 210 B du code général des impôts.
« Les dispositions du premier alinéa du V de l'article 93
quater
du
code des impôts sont applicables à la scission d'une société mentionnée aux
articles 8 et 8
ter
du même code, titulaire d'un office de
commissaire-priseur ou associant des commissaires-priseurs.
« IV. - Les pertes de recettes résultant des paragraphes I à III ci-dessus,
sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Nous abordons, monsieur le président, mes chers
collègues, une série d'amendements qui ont pour objet de préciser le régime
fiscal des opérations qui seront effectuées à l'occasion de l'application de
cette loi.
Comme j'ai été amené à le dire ce matin, nous nous sommes beaucoup étonnés que
le présent projet de loi ne comporte pas de volet fiscal. Peut-être le
Gouvernement a-t-il des solutions à l'esprit, mais elles ne sont pas écrites
dans le projet de loi et il ne nous en a pas fait part de façon claire et
précise. Nous avons donc tenté de pallier cette carence en précisant un certain
nombre de points.
L'amendement n° 101 est le plus important de cette série fiscale, et il est
effectivement logique de commencer par lui.
Il vise à insérer un article additionnel dont l'objet est triple. Je vous prie
de m'excuser si je suis un peu long, mais la technicité du sujet l'impose.
Premièrement, il étend le régime applicable aux apports en société des
entreprises individuelles aux apports, fusions ou scissions des sociétés
civiles professionnelles et des sociétés d'exercice libéral.
Deuxièmement, il prévoit le maintien du report d'imposition de la plus-value,
éventuellement précédemment obtenu lors de la mise en société de l'office de
commissaire-priseur.
Troisièmement, il tend à conforter pour les scissions le régime de report
d'imposition de la plus-value d'échange de titres par les associés du V de
l'article 93
quater
5 du code général des impôts et précise que la
scission des branches « ventes volontaires » et « ventes judiciaires » aboutit
bien à donner la possiblité aux commissaires-priseurs de faire apport d'une
branche complète d'activité au sens du code général des impôts.
Les aménagements prévus ne sont pas intégrés dans le code général des impôts,
de façon à bien souligner qu'il s'agit de mesures propres aux
commissaires-priseurs.
Dans un double souci de justice et d'efficacité économique, il vous est
proposé d'aménager le régime des apports des commissaires-priseurs aux sociétés
de vente aux enchères de façon à garantir la neutralité fiscale - c'est une
expression que vous avez utilisé à l'instant, madame la ministre : pas de
double imposition - des opérations de restructurations imposées par la présente
loi et à faciliter la capitalisation des nouveaux opérateurs.
Toutes les opérations de scission et d'apport résultant du nouveau régime mis
en place par la présente loi doivent pouvoir être réalisées dans un cadre
fiscal neutre, quelles que soient les structures d'exercice, que celles-ci
soient ou non soumises à l'impôt sur les sociétés.
Il serait injuste que des restructurations opérées sous contrainte légale
donnent lieu à la perception d'impôts, tant en matière de plus-values que de
droits d'enregistrement, alors qu'il ne serait dégagé aucune liquidité.
En l'état actuel du droit, il n'existe pas, pour les sociétés non soumises à
l'impôt sur les sociétés - ce qui est le cas de la grande majorité des sociétés
civiles professionnelles et des sociétés d'exercice libéral de
commissaires-priseurs, dans la mesure où le passage à l'impôt sur les sociétés
comporte des coûts immédiats - de régime de faveur permettant d'assurer la
neutralité fiscale des opérations de restructuration.
L'absence d'un tel régime pourrait menacer la survie d'un certian nombre
d'offices et, en tout cas, compromettre la modernisation de la profession.
En particulier, le transfert à des sociétés commerciales de l'activité de
ventes volontaires des sociétés civiles professionnelles ou des sociétés
d'exercice libéral, non soumises à l'impôt sur les sociétés, s'analyserait, en
l'état actuel du droit, comme une cessation partielle d'entreprises, entraînant
l'exigibilité de certains impôts : taxation immédiate des bénéfices non encore
imposés et des plus-values latentes afférentes à l'activité. L'exigibilité est
encourue, quelles que soient les modalités du transfert d'activité, qu'il
s'agisse d'une vente, d'un apport ou d'une scission.
La solution que nous vous proposons consiste donc à prévoir que l'article 151
octies
s'applique aux opérations de restructuration entraînées par le
nouveau régime des ventes volontaires de meubles aux enchères. Ainsi, le régime
prévu au paragraphe II permettrait un report de l'imposition des plus-values
afférentes aux éléments non amortissables et, en particulier, à la
clientèle.
Dans le même esprit - et c'est le paragraphe I de l'article additionnel que
vous propose la commission des finances -, il est prévu le maintien du report
d'imposition éventuellement obtenu précédemment lors de la mise en société de
l'office de commissaires-priseurs, car il ne faudrait pas que l'apport ou la
scission de l'activité de ventes volontaires mette fin à un report précisément
obtenu, s'agissant du passage d'une société de personnes à une société
commerciale, en application de l'article 151
octies
du code général des
impôts.
La recherche d'une neutralité fiscale suppose également que soit aménagé le
régime des opérations et scissions pour permettre le report d'imposition de la
plus-value d'échange de titres réalisée par les associés de la société scindée.
Il est donc proposé, au paragraphe III du présent article additionnel, de
rendre applicable à ces opérations le paragraphe V de l'article 95
quater
du code général des impôts.
En outre, il a paru opportun de préciser que l'apport de l'activité de ventes
volontaires, telle qu'elle peut être délimitée à l'occasion des opérations
d'indemnisation, est présumé constituer l'apport d'une branche complète
d'activité au sens du code général des impôts, ce qui dispense les
commissaires-priseurs de l'agrément nécessaire à la mise en jeu du report
d'imposition prévu au V de l'article 93
quater
du code général des
impôts.
La commission des finances vous propose donc d'adopter cet article additionnel
qui, tout en favorisant la modernisation de la profession, apporterait une
précision et donnerait une sécurité fiscale aux opérations issues de la
présente loi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Sans doute serai-je plus
brève que M. le rapporteur pour avis, qui vient de se livrer à une analyse
extrêmement détaillée à l'appui de son argumentation.
Le Gouvernement partage votre souci, monsieur le rapporteur pour avis,
d'assurer la neutralité fiscale des opérations d'apport ou de scission liées à
la création des sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques. Le moyen d'y parvenir techniquement est toutefois un sujet complexe,
notamment compte tenu des particularités du régime fiscal des sociétés de
personnes.
Dans son état actuel, l'article 151
octies
du code général des impôts
règle le problème de l'apport d'une branche complète d'activité par une
personne physique à une société.
Il traite aussi le cas de la fusion de deux sociétés civiles professionnelles.
De fait, il ne règle pas l'apport par une SCP à une société soumise à l'impôt
sur les sociétés.
Je ne vous cache pas que le meilleur moyen d'assurer la neutralité fiscale que
nous souhaitons tous est que les SCP optent d'abord pour l'impôt sur les
sociétés, puis apportent leurs actifs aux nouvelles sociétés de ventes
volontaires. C'est, en effet, un chemin fiscal parfaitement balisé.
L'amendement emprunte une autre voie, et si je ne condamne pas la direction,
je suis plutôt opposée au véhicule. Il n'est sans doute pas de bonne méthode
qu'une loi qualifie à ce point des situations de fait, ce qui est le cas en
l'espèce.
Il est préférable d'envisager la modification du dispositif de l'article 151
octies
. Mais cela demande, évidemment, des études sérieuses.
Mon collègue chargé des finances a demandé à ses services, sur ce sujet, des
propositions de solution, dont je n'ai donné qu'un aperçu, dans le cadre de la
préparation de la loi de finances ou du prochain collectif budgétaire, qui
seront examinés cet automne.
En tout état de cause, le Gouvernement s'engage à régler le cas particulier
des commissaires-priseurs.
En ce qui concerne la qualification de branches complètes d'activité, la
proposition de la commission des finances ne peut être accueillie
favorablement, dans la mesure où elle conduirait à accorder systématiquement un
régime fiscal de faveur prévu pour rendre possibles les restructurations
d'entreprises.
Or, la consistance des biens apportés par les offices n'est pas définie
a
priori
. Là encore, mon collègue des finances s'est engagé à définir avec
les commissaires-priseurs les conditions de la qualification de leurs actifs
apportés en branche complète d'activité en vue de l'application de plein droit
de ce régime fiscal.
Une telle démarche m'apparaît plus constructive et garantit une meilleure
application des régimes fiscaux de faveur, qui reposent sur une appréciation de
fait, en prenant en compte les préoccupations de la profession.
Je veux exprimer ici la reconnaissance de tous les ministres qui s'intéressent
à ce projet de loi et qui disposent, auprès des professionnels, d'une
contribution éminemment positive leur permettant de trouver la meilleure des
solutions pour aboutir à la neutralité fiscale.
Le Gouvernement demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, il sera
évidemment obligé de s'y opposer.
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, monsieur le rapporteur pour avis ?
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
J'ai bien noté les indications très intéressantes
de Mme le ministre.
Cela étant, nous sommes au début d'une procédure. Nous aurons tout le temps
d'apprécier les fruits de la réflexion du Gouvernement, dont je ne mets
d'ailleurs pas en doute la bonne volonté.
A ce stade, il m'apparaît préférable que le Sénat maintienne sa demande, qu'à
titre conservatoire, si je puis dire, il vote donc l'amendement, tout en
sachant pertinemment qu'au cours de la procédure ce texte sera probablement
modifié, voire disparaîtra, si le Gouvernement répond à nos préoccupations.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 101, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 43.
Par amendement n° 98, M. Gaillard, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 43, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions du I
bis
de l'article 809 du code général des
impôts sont applicables aux apports effectués par une société mentionnée aux
articles 8 et 8
ter
du même code, titulaire d'un office de
commissaire-priseur ou associant des commissaires-priseurs à une société de
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.
« II. - Les pertes de recettes résultant du paragraphe I ci-dessus sont
compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
En l'absence de cet article additionnel, les
apports rendus nécessaires par la présente loi seraient taxés au taux normal de
8,60 % - 11,40 % avec les taxes annexes - puisque l'on se trouve dans le cas de
l'article 809-1, qui dispose que les apports faits à une personne morale
passible de l'impôt sur les sociétés par une personne non soumise à cet impôt
sont assimilés à des mutations à titre onéreux. Il s'agit de permettre
l'application d'un droit fixe et non d'un droit proportionnel.
Cela aussi fait partie de cet ensemble qui sera soumis à la réflexion générale
à la lumière des avancées que le Gouvernement pourra nous proposer, mais qui ne
sont pas encore, à ce jour, assez formalisées.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Pour des raisons
identiques à celles qui ont été présentées à l'encontre de l'amendement n° 101,
le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 98, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 43.
Par amendement n° 122, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 51,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est créé une compagnie des commissaires-priseurs judiciaires de Paris,
comportant la chambre de discipline actuellement attachée à la compagnie des
commissaires-priseurs de Paris.
« La compagnie des commissaires-priseurs de Paris est transformée en société
anonyme dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Cette
transformation n'entraîne pas création d'une personne morale nouvelle. »
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Cet amendement est
important.
Actuellement, la compagnie des commissaires-priseurs de Paris se compose de la
chambre de discipline, à laquelle sont conférés l'ensemble des pouvoirs
ordinaux et dont le maintien est nécessaire, et d'une société holding détenant
les titres de la société anonyme Drouot.
Cette organisation résulte d'un accord passé, en 1990, entre la compagnie, le
ministère du budget et la Chancellerie.
La réforme impose une adaptation de ce dispositif afin de ne pas pénaliser les
commissaires-priseurs parisiens.
Il est donc proposé, dans un premier temps, de transférer la chambre de
discipline de la compagnie des commissaires-priseurs de Paris à la future
compagnie des commissaires-priseurs judiciaires. La chambre de discipline
n'étant pas assujettie à l'impôt sur les sociétés, cette opération n'engendrera
aucun coût fiscal.
Parallèlement, la partie de la compagnie des commissaires-priseurs non
transférée, actuellement soumise à l'impôt sur les sociétés, sera transformée
en société anonyme. La transformation d'une entité qui reste soumise à l'impôt
sur les sociétés ne conduit à l'application des règles fiscales de cessation
d'entreprise, et donc à l'imposition de tous les profits et plus-values
latents, que si la transformation entraîne la création d'une personne morale
nouvelle, conformément à l'article 221-2 du code général des impôts.
En l'occurrence, la compagnie des commissaires-priseurs de Paris, qui se
transforme en société anonyme, reste soumise à l'impôt sur les sociétés et
conserve sa personnalité morale. Par conséquent, les règles fiscales de
cessation d'entreprise ne s'appliquent pas, ce qui permet d'éviter l'imposition
immédiate des profits et plus-values latents.
Voilà des arguments qui, je l'espère, sauront convaincre !
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Je damande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
La commission des finances, qui n'avait pas
connaissance de cette nouvelle proposition du Gouvernement, a déposé un
amendement qui traite du même sujet et qui va venir en discussion dans quelques
intants.
Il se pose, en fait, un double problème.
Il y a d'abord les rapports entre la compagnie et Drouot SA. Ce problème est
réglé par l'amendement du Gouvernement, qui nous donne l'assurance qu'il n'y
aura pas d'imposition de structure, si je puis dire.
L'autre problème, c'est la fiscalisation des opérations d'apport de parts des
commissaires-priseurs dans les futures sociétés de ventes volontaires, problème
précédemment évoqué et sur lequel je n'insiste donc pas.
Pour ce qui est des problèmes structurels de Drouot - j'y reviens - il semble,
en toute bonne foi, que le Gouvernement fasse un pas important, et j'approuve
donc l'amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Tout cela est très compliqué, et je reconnais que tout le
monde fait preuve de bonne volonté pour essayer de régler le problème de
l'Hôtel Drouot.
La commission des finances proposera, dans l'amendement n° 99, un système qui
permettrait d'aboutir à la neutralité fiscale pour Drouot.
Quant à Mme la ministre, elle prétend arriver au même résultat au travers de
l'amendement n° 122. Soit ! mais j'ai tout de même un léger doute.
En effet, Mme la ministre a dit que telle compagnie n'était pas assujettie à
l'impôt sur les sociétés et que, donc, il y aurait neutralité fiscale. Or, je
connais au moins un cas où l'administration fiscale a taxé une organisation
professionnelle qui n'était pas en société, en faisant valoir que, après tout,
elle avait fait une opération qui relevait du droit des sociétés.
Que l'on ne se méprenne pas : je ne mets en doute la parole de personne. Je
fais seulement remarquer que le cas s'est déjà produit.
Voilà pourquoi, plutôt que d'accepter dès aujourd'hui cet amendement, je
préfère m'en remettre à celui que va présenter la commission des finances, qui
a le même objet, mais qui me semble offrir plus de sécurité sur le plan de la
neutralité fiscale.
M. le président.
Mes chers collègues, compte tenu de la complexité de la situation, il me
paraît plus sage que le Sénat interrompe ses travaux quelques instants afin de
permettre à Mme le ministre et à MM. les rapporteurs de se concerter.
M. Emmanuel Hamel.
Excellente suggestion !
M. le président.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit
heures dix.)
M. le président.
La séance est reprise.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
La commission des finances en est arrivé à la
conclusion - provisoire - suivante : deux problèmes se posent, d'une part, le
problème des structures - les SCP, Drouot SA, etc. - de la compagnie des
commissaires-priseurs et, d'autre part, le problème des commissaires-priseurs
eux-mêmes ou des sociétés qu'ils constituent pour leurs apports aux futures
sociétés de ventes volontaires.
Le premier problème que nous souhaitions résoudre avec l'amendement n° 99,
dont l'objet était double - j'en parle déjà à l'imparfait ; il pâlit cet
amendement ! - me paraît en voie de règlement, compte tenu des engagements très
précis qu'a pris Mme la ministre, s'agissant de l'amendement n° 122. Il
conviendra sans doute de revoir ce texte au cours de la navette car sa
rédaction actuelle, quelque peu elliptique, nous inquiète. Je souhaite donc que
le Gouvernement, dans la suite de la procédure parlementaire, améliore et
précise son texte.
S'agissant du second problème, le plus important, celui des
commissaires-priseurs eux-mêmes et de leurs sociétés, nous retombons, c'est
vrai, sur le cas général qui a été réglé par l'adoption de l'amendement n° 98,
présenté par la commission des finances, et auquel le Gouvernement s'est
opposé, arguant qu'il étudierait des solutions alternatives qu'il précisera
dans la suite de la procédure législative. Nous verrons donc la solution que
nous proposera le Gouvernement.
Je me résume, s'agissant du premier problème, je fais confiance aux
engagements de Mme le ministre ; c'est une avancée dont je dois dire sans
exagération - on peut de temps en temps se féliciter soi-même - qu'elle est un
peu le fruit de nos efforts ; s'agissant du second problème, il faudra
approfondir la réflexion au cours de la navette.
En conclusion, je laisse chacun se déterminer en son âme et conscience sur
l'amendement n° 122 du Gouvernement. Pour part, je le voterai.
Monsieur le président, s'agissant de l'amendement n° 99, je le retirerai
compte tenu de l'engagement qui a été pris par le Gouvernement d'approfondir sa
réflexion sur le problème des commissaires-priseurs, par le biais de l'article
151
octies
du code général des impôts.
Je souhaite donc que Mme le ministre confirme mes propos, sinon rien n'est
fait !
M. Emmanuel Hamel.
Elle va se dire d'accord !
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Une bonne affaire doit
s'adjuger vite !
(Sourires.)
Monsieur Gaillard, s'agissant d'améliorer la rédaction du texte présenté par
le Gouvernement avec l'amendement n° 122, pour éviter toute ambiguïté, je suis,
bien entendu, d'accord avec vous : nous y veillerons au cours de la navette.
Je vous remercie par ailleurs d'avoir reconnu que la proposition du
Gouvernement relative aux commissaires-priseurs constituait une avancée,
qu'elle était en même temps assez simple et réglait bien le problème de la
société Drouot SA. Nous convenons l'un et l'autre qu'il faut régler cette
situation au mieux, que ce soit grâce à la solution que vous avez préconisée,
qui a été retenue par le biais de votre amendement n° 98, ou que ce soit par la
modification de l'article 151
octies
du code général des impôts telle
que nous la recommandons. Ce sera, à ce moment-là, au vu de la solution que
nous pouvons mettre en oeuvre qu'il conviendra d'opter pour l'une ou l'autre
solution.
Vous le constatez, monsieur le président, nous avons bien cheminé pendant
cette suspension de séance.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, l'avis de la commission sur l'amendement n° 122 a-t-il
changé ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Compte tenu des propos de Mme le ministre, selon lesquels le
résultat atteint par son amendement correspondra à celui qui est recherché par
la commission des finances, je ne peux que donner un avis favorable à cet
amendement.
Nous sommes entre gens de confiance. Les plus grands spécialistes examineront
ce problème avec toute l'attention nécessaire. Nous en reparlerons
nécessairement. Mais nous sommes rassurés par les propos de Mme la ministre sur
la neutralité fiscale permise par cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 122, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 51.
Par amendement n° 99, M. Gaillard, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 43, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Sont exonérées d'impôt sur les sociétés ou d'impôt sur le revenu, dans
les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas ci-dessous, les
plus-values constatées à l'occasion des opérations de distribution, d'apport,
d'échange ou d'attribution des actions de la société Drouot SA effectuées par
la compagnie des commissaires-priseurs de Paris, les commissaires-priseurs et
sociétés membres de cette compagnie.
« Cette exonération est surbonnée à la condition que les actions de Drouot SA
soient apportées, avant le 31 décembre 2001, à une société de ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques ou à une société détenant
directement ou indirectement les actifs de Drouot S.A.
« La plus-value de cession des parts ou actions des sociétés mentionnées à
l'alinéa précédent, correspondant aux actions de Drouot SA sera calculée sur le
prix de cession desdits titres.
« II. - Les pertes de recettes résultant du paragraphe I ci-dessus sont
compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 99 est retiré.
Par amendement n° 100, M. Gaillard, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 43, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les indemnités versées aux commissaires-priseurs en application des
articles 41 et 42 de la présente loi sont soumises à l'impôt aux taux prévu au
I de l'article 39
quindecies
du code général des impôts, sous réserve
des dispositions des paragraphes II et III ci-dessous.
« II. - L'impôt n'est dû que pour la part de l'indemnité non affectée au
remboursement de la dette contractée pour l'acquisition de l'office.
« III. - En cas d'affectation de la totalité de l'indemnité à la souscription
de parts ou d'actions d'une société de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques, l'imposition due en application du I ci-dessus fait l'objet
d'un report jusqu'à la date de la cession des titres acquis au moyen de
l'indemnité.
« IV. - Les pertes de recettes résultant des paragraphes II et III ci-dessus
sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gaillard, rapporteur pour avis.
M. Yann Gaillard,
rapporteur pour avis.
Nous en sommes parvenus au régime fiscal de
l'indemnité, sujet également très important.
Cet article additionnel a pour objet de préciser le régime fiscal de
l'indemnisation en disposant que l'indemnité donne lieu à imposition au taux de
16 % prévu au 2 de l'article 200 A du code général des impôts sous réserve des
aménagements suivants.
D'une part, l'indemnité n'est imposable que pour la part qui n'est pas
affectée au remboursement des emprunts contractés pour l'acquisition de
l'office.
D'autre part, un report de l'impôt est possible en cas de souscription de
parts ou actions des sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
jusqu'à la cession des parts et actions correspondantes.
Nous souhaitons que les commissaires-priseurs ne soient imposés que sur la
part de leur indemnisation non affectée au remboursement des dettes contractées
pour acquérir leur office. Quant aux autres, c'est-à-dire ceux qui
réinvestiraient cette indemnité dans une société de vente volontaire, ils
pourraient bénéficier d'un report de l'impôt dû à ce titre. Bien entendu, cette
suspension s'arrête le jour où l'intéressé sort du système.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Cet amendement vise à
préciser le mode d'imposition de l'indemnité prévue pour les
commissaires-priseurs et à l'aménager dans certains cas.
S'agissant de la première mesure préconisée par ce texte, je voudrais indiquer
que l'application du régime des plus-values professionnelles, qui résulte des
principes généraux, sera précisée dans une instruction administrative, dès la
publication de la loi. J'en prends devant vous l'engagement.
S'agissant des deux autres mesures contenues dans cet amendement, le
Gouvernement y est opposé.
La mesure consistant à ne pas imposer l'indemnité à concurrence du
remboursement des emprunts contractés pour l'acquisition de l'office de
commissaire-priseur serait contraire aux principes généraux de l'impôt sur le
revenu. En effet, l'affectation d'un revenu imposable au remboursement d'une
dette constitue un emploi de ce revenu qui ne peut faire échec au paiement de
l'impôt.
Je rappelle que l'indemnisation a pour objet de réparer le préjudice subi du
fait de la dépréciation de la valeur pécuniaire du droit de présentation à la
clientèle. Dès lors, il ne serait absolument pas justifié de traiter
différemment sur le plan fiscal les commissaires-priseurs selon qu'ils doivent
ou non rembourser un emprunt lié à l'acquisition dudit droit.
L'institution d'un report d'imposition en cas de réinvestissement d'indemnités
dans une société de ventes volontaires ne serait pas justifiée dès lors que le
versement de l'indemnité s'effectuerait en une seule fois, selon l'article 41
du projet de loi, et que les commissaires-priseurs disposeraient tout de suite
des sommes nécessaires pour payer l'impôt correspondant à la plus-value.
Les sommes disponibles après paiement de l'impôt que les commissaires-priseurs
auraient en tout état de cause la possibilité de réinvestir dans les sociétés
de ventes volontaires représenteraient un pourcentage non négligeable du
montant de l'indemnité compte tenu du taux d'imposition des plus-values à long
terme, 26 %, prélèvements sociaux inclus.
Là aussi, il s'agit d'un emploi du revenu qui, comme tel, ne justifie pas
l'application d'un régime fiscal particulier. La mesure que vous proposez
risquerait de créer un précédent qu'il serait difficile de ne pas étendre à
d'autres situations où une indemnité imposable est versée. En outre, au regard
de la Commission de Bruxelles, qui nous a demandé des explications, cette
mesure pourrait être considérée comme une aide de l'Etat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 100, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi,
après l'article 43.
Nous en revenons maintenant à l'amendement n° 102, qui a été précédemment
réservé.
Par cet amendement n° 102, M. Gaillard, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 43, une division additionnelle ainsi rédigée
: « Chapitre... Dispositions fiscales ».
Quel est l'avis de la commission ?
M. Luc Dejoie.
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement s'en remet
à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 102, accepté par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, une division additionnelle ainsi rédigée est insérée dans le
projet de loi, après l'article 43.
Chapitre VII
Dispositions diverses et transitoires
Article 44
M. le président.
« Art. 44. - Les dispositions des articles L. 321-1 et suivants du code du
travail s'appliquent dans les cas de licenciement pour motif économique
survenant en conséquence directe de l'entrée en vigueur de la présente loi.
« La priorité de réembauchage prévue à l'article L. 321-14 du même code
s'étend aux sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques au
sein desquelles l'ancien employeur est devenu dirigeant ou associé. »
Par amendement n° 81, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose
d'ajouter, avant le premier alinéa de cet article, un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail s'appliquent au
personnel salarié des commissaires-priseurs qui poursuivent leur activité de
ventes volontaires en qualité de dirigeant ou d'associé d'une société de ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement vise à préciser que l'article L. 122-12 du
code du travail s'applique aux personnels salariés des commissaires-priseurs
qui poursuivent leur activité de ventes volontaires en qualité de dirigeants ou
d'associés de sociétés de ventes. Il apporte une clarification.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement est
défavorable à cet amendement, même s'il partage la volonté de la commission des
lois et de son rapporteur de voir les dispositions de l'article L. 122-12 du
code du travail s'appliquer lors des transformations et des cessions de fonds
qui vont intervenir.
Conformément à ce dernier texte, les contrats de travail en cours doivent se
poursuivre avec le nouvel employeur, afin de préserver l'emploi des salariés de
ce secteur. Il ne fait pas de doute que les personnels des
commissaires-priseurs, comme tous les salariés, pourront légitimement prétendre
au bénéfice des dispositions de l'article L.122-12 du code du travail. C'est
d'ailleurs valable quelle que soit la forme juridique sous laquelle s'exerce
initialement l'activité de commissaire-priseur.
Toutefois, l'amendement soulève un double problème.
La référence à l'article L. 122-12 du code du travail ne permet pas de régler
le problème posé par l'affectation indifférenciée d'un salarié aux ventes
judiciaires et aux ventes volontaires, qui est la seule véritable question
susceptible d'être posée pour le transfert du contrat de travail à la société
de ventes volontaires.
Par ailleurs, une disposition spéciale, qui ne couvre pas elle-même toutes les
situations dans lesquelles l'article L. 122-12 peut trouver à s'appliquer, est
de nature à engendrer des difficultés dans le cas de contentieux éventuels
portant sur des situations non prévues par le texte.
Il paraît préférable dans ces conditions de laisser le juge statuer sur
l'application de l'article L. 122-12 du code par référence à la jurisprudence
constituée sur l'application de cette disposition afin de régler au mieux les
situations dans leur diversité.
Le Gouvernement vous demande donc le rejet d'une disposition qui non seulement
ne règle pas le problème, mais dont l'application est susceptible de créer des
difficultés supplémentaires.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Les explications données par Mme la ministre tendent à
démontrer que l'amendement qui vous est proposé est inutile, puisqu'il est
satisfait. Dans ces conditions, je le retire bien évidemment.
M. le président.
L'amendement n° 81 est retiré.
Par amendement n° 82 rectifié, M. Dejoie, au nom de la commission des lois,
propose, dans le premier alinéa de cet article, de remplacer les mots : "du
code du travail", par les mots : "du même code".
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Par coordination, cet amendement est également retiré.
M. le président.
L'amendement n° 82 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 44.
(L'article 44 est adopté.)
Article additionnel après l'article 44
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 83, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose
d'insérer, après l'article 44, un article additionnel ainsi rédigé :
« En cas de licenciement pour motif économique survenant en conséquence
directe de l'entrée en vigueur de la présente loi, les indemnités de
licenciement dues par les commissaires-priseurs sont calculées à raison d'un
mois de salaire par année d'ancienneté dans la profession, dans la limite de
trente mois. Elles sont versées directement aux bénéficiaires par le fonds
d'indemnisation institué par l'article 39 lorsque le licenciement intervient
dans le délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi.
« Toutefois, lorsqu'il est procédé à un licenciement économique alors que le
commissaire-priseur poursuit son activité de ventes volontaires au sein d'une
société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, les indemnités
versées par le fonds sont déduites de l'indemnité due à ce
commissaire-priseur.
« Les dispositions du premier alinéa sont applicables aux indemnités de
licenciement pour motif économique dues, en conséquence directe de l'entrée en
vigueur de la présente loi, par les compagnies régionales de
commissaires-priseurs ou la chambre nationale des commissaires-priseurs, ainsi
que par toute société dont le capital est détenu en majorité par des
commissaires-priseurs ou qui salarie des personnes travaillant au sein d'un
office de commissaire-priseur. Ces indemnités sont dues aux personnes employées
directement par elles au jour de la promulgation de la présente loi et
licenciées dans un délai de deux ans à compter de cette date. »
Par amendement n° 126, MM. Bret, Duffour et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 44, un article
additionnel ainsi rédigé :
« En cas de licenciement pour motif économique survenant en conséquence
directe de l'entrée en vigueur de la présente loi, les indemnités de
licenciement pour motif économique dues par les commissaires-priseurs sont
calculées à raison d'un mois de salaire par année d'ancienneté dans la
profession, dans la limite de trente mois. Elles sont versées directement aux
bénéficiaires par le fonds d'indemnisation institué par l'article 39 lorsque le
licenciement intervient dans le délai de quatre ans à compter de la
promulgation de la présente loi.
« Toutefois, lorsqu'il est procédé à un licenciement économique alors que le
commissaire-priseur poursuit son activité de ventes volontaires au sein d'une
société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, les indemnités
versées par le fonds sont déduites de l'indemnisation due à ce
commissaire-priseur.
« Les dispositions du premier alinéa sont applicables aux indemnités de
licenciement pour motif économique dues, en conséquence directe de l'entrée en
vigueur de la présente loi, par les compagnies régionales de
commissaires-priseurs ou la chambre nationale des commissaires-priseurs, ainsi
que par toute société dont le capital est détenu en majorité par des
commissaires-priseurs ou qui salarie des personnes travaillant au sein d'un
office de commissaire-priseur. Ces indemnités sont dues aux personnes employées
directement par elles au jour de la promulgation de la présente loi et
licenciées dans un délai de quatre ans à compter de cette date. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 83.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement prévoit l'indemnisation des personnels des
offices de commissaires-priseurs et de Drouot SA qui seront licenciés en
conséquence directe de la réforme, les indemnités de licenciement étant
calculées à raison d'un mois de salaire par année d'ancienneté dans la
profession dans la limite de trente mois et étant mises à la charge du fonds
d'indemnisation, sous réserve d'une imputation sur l'indemnité due au
commissaire-priseur - retenez bien cela - si celui-ci poursuit son activité de
ventes volontaires.
M. le président.
La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 126.
M. Robert Bret.
Similaire à celui de la commission des lois, notre amendement prévoit une
juste et équitable indemnisation des personnels des offices de
commissaires-priseurs licenciés du fait de l'entrée en vigueur de la loi.
Il est regrettable que le présent projet de loi n'apporte aucune précision en
la matière, renvoyant purement et simplement ces salariés à la convention
nationale du personnel qui lui est peu avantageuse, puisqu'elle limite
l'indemnisation en question à trois vingtièmes de mois de salaire par année
d'ancienneté et au maximum à quatre mois de salaire.
Pourtant, le rapport dit des trois sages, rendu en janvier 1998, notait déjà
que « le personnel des offices était peu nombreux : environ 2 000 personnes, y
compris Drouot ».
Les experts relevaient également qu'il était « inéquitable de prévoir une
indemnisation complète des titulaires des offices et l'application pure et
simple aux salariés d'une convention collective d'un niveau minimum ».
Ils avaient en conséquence retenu que, si un commissaire-priseur cessait
définitivement son activité, ses employés seraient indemnisés par l'Etat, au
travers de l'indemnisation versée aux commissaires-priseurs. Dans le cas où un
commissaire-priseur déciderait de continuer son activité sous une forme
commerciale, il devrait lui verser un mois de salaire par année de présence
dans la profession, dans la limite de trente mois.
Avec notre amendement, nous reprenons cette proposition.
Il s'agit ainsi d'éviter d'encourager les licenciements. Le fait est que
certaines études, anticipant la réforme, ont également anticipé les
licenciements à moindre coût.
Le montant de l'indemnisation du personnel que nous proposons a été chiffré
dans le rapport des trois sages à 40 millions de francs dans l'hypothèse où 10
% des salariés seraient touchés par des licenciements et au plus à environ 50
millions de francs, ce qui, somme toute, n'est pas excessif.
La différence entre notre amendement et celui de la commission porte sur le
délai dans lequel intervient le licenciement.
Sans faire de « surenchère », nous proposons que l'indemnité soit due lorsque
le licenciement intervient dans le délai de quatre ans à compter de la
promulgation de la présente loi, au lieu de deux ans.
Bien évidemment, si notre amendement n'est pas adopté, nous nous rallierons à
celui de la commission des lois.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 126 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'amendement n° 126 est identique à l'amendement n° 83, mis à
part le délai dont on vient de faire état.
Il nous semble que le délai de deux ans est suffisant. Au-delà, on ne pourrait
plus dire qu'il s'agit de la conséquence directe de la mise en application de
la loi. C'est pourquoi je m'en tiens à l'amendement de la commission des
lois.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 83 et 126 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
La position du
Gouvernement est identique pour les deux amendements : défavorable.
Si le Gouvernement reconnaît et partage le souci vis-à-vis des personnels
licenciés, il y a là, cependant, une affaire de principe : ce domaine est
encadré par une convention collective et ce qui a été élaboré sous l'égide des
partenaires sociaux ne peut être rayé d'un trait de plume par le législateur,
même si celui-ci est animé des meilleures intentions.
Ces considérations militent pour une discussion avec les partenaires sociaux
du secteur. Ceux-ci négocient habituellement dans le cadre d'une commission
mixte présidée par un représentant de la ministre de l'emploi. Ils seront
réunis avant la fin de ce mois.
Il faut laisser cette négociation se dérouler. La question pourra être
réexaminée en deuxième lecture à la lumière de ses résultats.
Telle est la démarche que je préconise, plutôt que de voter aujourd'hui un
amendement venant en porte-à-faux avec le dialogue social qui me paraît
indispensable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 83, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 44, et l'amendement n° 126 n'a plus d'objet.
Nous revenons à l'article 39, qui avait été précédemment réservé.
Article 39
(précédemment réservé)
M. le président.
« Art. 39. - Il est institué, dans les conditions fixées par la loi de
finances, un fonds d'indemnisation chargé du paiement des indemnités dues aux
commissaires-priseurs et de celles dues, en application de l'article 38, aux
autres officiers publics ou ministériels procédant à des ventes aux enchères
publiques. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 75 est présenté par M. Dejoie, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 125 est présenté par MM. Bret, Duffour et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à compléter
in fine
cet article par les mots : « ,
ainsi que des indemnités dues aux salariés licenciés dans les conditions
prévues à l'article 44
bis
. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 75.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
La parole est à M. Bret, pour défendre l'amendement n° 125.
M. Robert Bret.
Cet amendement, identique à celui de la commission des lois, est un amendement
de coordination avec l'amendement n° 126 que nous avons déposé après l'article
44 du projet de loi.
Il s'agit de préciser que le fonds d'indemnisation chargé d'indemniser les
commissaires-priseurs après la perte de leur monopole sera également chargé du
paiement des indemnités dues aux salariés licenciés du fait de l'entrée en
vigueur de la présente loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 75 et 125
?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 75 et 125, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 39, ainsi modifié.
(L'article 39 est adopté.)
Article 45
M. le président.
« Art. 45. - A titre transitoire, la convention collective nationale réglant
les rapports entre les commissaires-priseurs et leur personnel ainsi que les
avenants à ladite convention sont applicables à l'ensemble du personnel salarié
des nouvelles sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques,
dans les conditions prévues par les articles L. 132-7 et L. 132-8 du code du
travail.
« La classification du personnel est faite, à défaut d'accords particuliers,
par référence aux classifications définies dans la convention collective
mentionnée à l'alinéa précédent.
« Le personnel des sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques qui était au service des commissaires-priseurs devenus dirigeants ou
associés de ces sociétés commerciales continue à bénéficier, dans ses relations
avec son employeur, d'avantages individuels au moins équivalents à ceux dont il
bénéficiait en vertu de la convention collective réglant les rapports entre les
commissaires-priseurs et leur personnel. »
- (Adopté.)
Article 46
M. le président.
« Art. 46. - Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques dont les locaux changent d'affectation dans les cinq ans suivant
l'entrée en vigueur de la présente loi sont dispensées de l'autorisation
administrative prévue à l'article L. 631-7 du code de la construction et de
l'habitation. »
Par amendement n° 84, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques sont
dispensées de l'autorisation administrative prévue à l'article L. 631-7 du code
de la construction et de l'habitation pour procéder à des changements
d'affectation de leurs locaux dans un délai de cinq ans à compter de la
promulgation de la présente loi. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement rédactionnel concerne les questions de
changement d'affectation des locaux à la suite de la mise en application de la
nouvelle loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Avis favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 46 est ainsi rédigé.
Article 47
M. le président.
« Art. 47. - Les actions en responsabilité civile professionnelle engagées à
l'occasion des prisées et des ventes judiciaires et volontaires de meubles aux
enchères publiques, en cours à la date d'entrée en vigueur de la présente loi,
se prescrivent par un délai de dix ans à compter de cette date, à moins que la
prescription ne soit acquise, selon les règles applicables antérieurement,
avant ce délai. »
Par amendement n° 85, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Les actions engagées à l'occasion des ventes volontaires et judiciaires de
meubles aux enchères publiques, ainsi que des expertises correspondantes et des
prisées, en cours à la date de promulgation de la présente loi, se prescrivent
par dix ans à compter de cette date, à moins que la prescription ne soit
acquise, selon les règles applicables antérieurement, avant ce délai. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement de coordination avec l'amendement n° 63, que
nous avons examiné à l'article 27 et qui concerne la réduction à dix ans de la
prescription applicable aux actions consécutives à une vente aux enchères, a
pour objet d'assurer une harmonisation avec ce qui a été décidé à l'article
27.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
J'harmonise l'avis du
Gouvernement, monsieur le président, et je suis donc défavorable à l'amendement
n° 85.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 85, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 47 est ainsi rédigé.
Article 48
M. le président.
« Art. 48. - Pendant deux ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente
loi, les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques pourront être
faites concurremment par les commissaires-priseurs et par les sociétés à forme
commerciale mentionnées à l'article 2. »
Par amendement n° 86, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Pendant un délai de deux ans à compter de la date de promulgation de la
présente loi, les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques pourront
être organisées et réalisées concurremment par les commissaires-priseurs en
fonctions à cette même date et par les sociétés de forme commerciale
mentionnées à l'article 2. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement rédactionnel détermine ce qui se passera
pendant la période transitoire de deux années à partir de la date de
promulgation de la loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 86, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 48 est ainsi rédigé.
Article additionnel après l'article 48
M. le président.
Par amendement n° 87, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose
d'insérer, après l'article 48, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les personnes ayant subi avec succès l'examen d'aptitude à la profession de
commissaire-priseur remplissent la condition de qualification mentionnée à
l'article 7. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement concerne les diplômes et la qualification
professionnelle des commissaires-priseurs. Il précise que les personnes ayant
subi avec succès l'examen d'aptitude à la profession de commissaire-priseur
remplissent la condition de qualification mentionnée à l'article 7. Si cela
allait sans dire, cela va encore mieux en le disant.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 87, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 48.
Articles 49 et 50
M. le président.
« Art. 49. - Les commissaires-priseurs qui cèdent leur activité de ventes
judiciaires de meubles aux enchères publiques sans créer de société de ventes
volontaires aux enchères publiques peuvent, sur leur demande présentée dans un
délai de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, accéder
aux professions de greffier de tribunal de commerce ou d'huissier de justice ou
de mandataire judiciaire à la liquidation des entreprises.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent
article, notamment en ce qui concerne les dispenses, totales ou partielles, de
diplômes et de formation professionnelle. »
- (Adopté.)
« Art. 50. - Une société titulaire d'un office de commissaire-priseur
peut être dissoute si l'un ou plusieurs de ses membres constituent des sociétés
différentes de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. A la
demande de tous les associés, l'un des commissaires-priseurs est nommé dans
l'office dont la société dissoute était titulaire, le ou les autres
commissaires-priseurs dans un ou plusieurs offices créés à la même résidence.
Dans ce cas, l'article 1-3 de l'ordonnance du 26 juin 1816 n'est pas
applicable. »
- (Adopté.)
Article 51
M. le président.
« Art. 51. - Les offices au sein desquels est exercée l'activité de ventes
judiciaires, appartenant à des commissaires-priseurs âgés de plus de
soixante-cinq ans au jour de l'entrée en vigueur de la loi et qui, faute
d'avoir trouvé un successeur, n'ont pu, dans le délai d'un an à compter de
cette date, exercer leur droit de présentation, sont déclarés vacants. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 109, Mme Derycke, M. Lagauche et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° 88, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
compléter
in fine
l'article 51 par les mots : « sur la demande de leur
titulaire ».
La parole est à Mme Derycke, pour défendre l'amendement n° 109.
Mme Dinah Derycke.
L'article 51 ne me paraissant pas très clair, cet amendement vise à le
supprimer. Mais peut-être vos explications m'amèneront-elles à retirer mon
amendement, madame le ministre.
A l'heure actuelle, conformément à la circulaire du 21 mai 1976, un office
public ou ministériel peut être déclaré vacant dans deux cas.
Le premier concerne la condamnation du titulaire. Cela ne nous intéresse pas
ici.
Le second cas intervient lorsque l'officier public ou ministériel renonce ou
s'abstient, au moment où il donne sa démission, de présenter un successeur, et
ce sans condition d'âge.
Il est prévu dans le projet de loi de déclarer vacants les offices
ministériels appartenant à des commissaires-priseurs âgés de plus de
soixante-cinq ans si aucun successeur n'a été trouvé un an après l'entrée en
vigueur de la loi.
Est donc réaffirmé dans l'article ce qui existe depuis longtemps, mais une
condition restrictive est ajoutée, à savoir l'âge de soixante-cinq ans.
Nous proposons donc la suppression de cet article, mais nous attendons avec
impatience des éclaircissements de la part du Gouvernement.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 88 et pour
donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 109.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
La commission est défavorable à l'amendement n° 109, bien
qu'il soit, en quelque sorte, satisfait. Je m'explique.
A l'heure actuelle, la circulaire du 21 mai 1976 permet de déclarer vacant un
office public ou ministériel lorsque le titulaire renonce ou s'abstient, au
moment où il donne sa démission, de présenter un successeur.
Le projet de loi autorise le commissaire-priseur âgé de plus de soixante-cinq
ans à bénéficier de la procédure de vacance s'il ne parvient pas à trouver un
successeur.
La procédure de vacance de droit commun est maintenue. Il est seulement ajouté
que, sur sa demande, le commissaire-priseur bénéficie automatiquement de cette
procédure de vacance. Ce régime est tout de même plus favorable pour les
commissaires-priseurs âgés de plus de soixante-cinq ans.
Si nous supprimons l'article 51, nous pénaliserons les commissaires-priseurs
âgés de plus de soixante-cinq ans, car le fait de dire que, pour ceux qui sont
âgés de plus soixante-cinq ans, toutes les formalités relatives à cette
déclaration de vacance sont supprimées, selon nous, est un avantage dont il ne
nous apparaît pas convenable de les priver.
Quant à l'amendement n° 88, il prévoit simplement que la vacance ne pourra
être déclarée que sur la demande de l'intéressé.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 109 et 88 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je répondrai d'abord à Mme
Derycke, qui souhaitait obtenir du Gouvernement des explications
complémentaires sur la procédure de vacance.
Dans la procédure habituelle, la décision du garde des sceaux déclarant la
vacance d'un office n'est jamais automatique, si je me réfère à la circulaire
du 21 mai 1976. Elle n'intervient qu'après la démission du titulaire de
l'office, et celle-ci peut toujours être refusée par le garde des sceaux.
Elle suppose également une étude approfondie par l'autorité judiciaire de la
situation de l'office, de sa viabilité économique et de son intérêt pour le
service public de la justice. Le garde des sceaux décide en opportunité et peut
donc refuser la déclaration de vacance s'il estime que cette vacance ne se
justifie pas.
Je voudrais préciser que, dans les faits, le commissaire-priseur est souvent
démissionnaire pour raisons de santé, et la vacance est déclarée faute pour lui
d'avoir eu le temps de trouver un successeur. Dans les autres cas, le
commissaire-priseur démissionnaire doit prouver qu'il a effectué toutes les
démarches pour trouver un successeur et que celles-ci se sont révélées
infructueuses. En effet, la vacance n'est jamais de droit. Si cette preuve est
rapportée et si l'office est viable, alors la vacance peut être déclarée ; si
l'office ne se révèle pas viable, il sera supprimé.
Aussi la procédure habituelle de vacance suppose-t-elle la démission du
commissaire-priseur, que celui-ci prouve qu'il a effectué sans succès des
démarches pour se trouver un successeur et que l'office soit viable. Cette
procédure est longue et, entre le moment de la démission et la déclaration de
vacance, l'office, qui ne fonctionne plus, perd donc de sa valeur.
Afin d'éviter cette procédure longue, complexe et aléatoire, l'article 51 du
projet de loi prévoit la mise en place d'un système plus favorable aux
commissaires-priseurs. En effet, pour ces professionnels âgés de plus de
soixante-cinq ans qui n'ont pas trouvé de successeur dans le délai d'un an, la
vacance de l'office sera ouverte de droit sans autres investigations et la
procédure lancée immédiatement. Leur office aura donc pu continuer à
fonctionner sans interruption.
Voilà pourquoi, Madame Derycke, je crois que votre amendement maintenait, sur
le fond, une question ouverte. Je pense que l'amendement de M. le rapporteur y
répond. Le Gouvernement est favorable à celui-ci, et j'espère que mes
explications vous auront éclairée.
Mme Dinah Derycke.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Je suis satisfaite des précisions que vient d'apporter Mme la ministre ; je
souhaitais qu'elles soient apportées en séance publique. En conséquence, je
retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 109 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 88, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 51, ainsi modifié.
(L'article 51 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 51
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 89, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose
d'insérer, après l'article 51, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les commissaires-priseurs judiciaires, lorsqu'ils exercent simultanément
leurs activités dans le cadre de leur office de commissaire-priseur judiciaire
et au sein de sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques,
sont exclusivement affiliés, pour le risque vieillesse, à la caisse d'assurance
vieillesse des officiers ministériels, officiers publics et des compagnies
judiciaires. »
Par amendement n° 127, MM. Bret, Duffour et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 51, un article
additionnel ainsi rédigé :
« Les commissaires-priseurs judiciaires, lorsqu'ils exercent simultanément
leur activité dans le cadre de leur office de commissaire-priseur judiciaire et
au sein des sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques,
sont exclusivement affiliés, pour le risque vieillesse, à la caisse d'assurance
vieillesse des officiers ministériels, officiers publics et des compagnies
judiciaires.
« Les cotisations au régime d'assurance vieillesse de base et complémentaire
de la caisse sont assises sur les revenus de l'avant-dernière année, comprenant
les revenus professionnels non salariés tels que mentionnés à l'article L.
131-6 du code de la sécurité sociale et les rémunérations mentionnées à
l'article L. 242-1 dudit code, déduction faite des cotisations salariales
d'origine légale ou conventionnelle imposées par la loi. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 89.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement, qui concerne le régime des systèmes de
retraite des professionnels intéressés, a pour objet, sinon de sécuriser, du
moins de pérenniser l'existence de la caisse d'assurance vieillesse des
officiers ministériels, officiers publics et des compagnies judiciaires, la
CAVOM.
En effet, à défaut d'une telle précision, cette caisse pourrait se trouver en
situation délicate, et ce au détriment des professionnels déjà retraités ou
suceptibles de le devenir très rapidement.
En fait, cet amendement permet d'interroger Mme le ministre sur le devenir de
cette caisse.
M. le président.
La parole est à M. Bret, pour présenter l'amendement n° 127.
M. Robert Bret.
L'amendement n° 127, tout comme celui de la commission des lois, qui est
similaire, est relatif au régime de retraite des commissaires-priseurs, qui
sont affiliés à la CAVOM.
Dans le souci, d'une part, de maintenir l'équilibre de cette caisse, qui verra
le nombre de ses cotisants diminuer du fait de la loi et, d'autre part, de
préserver les droits à la retraite acquis, notamment par les jeunes
commissaires-priseurs ayant cotisé moins de dix ans, nous proposons de
maintenir l'affiliation à la CAVOM des futurs commissaires-priseurs
judiciaires, exerçant une activité de ventes volontaires dans une société de
ventes.
Tel est le sens de l'amendement n° 127. Il semble que le second alinéa de cet
amendement pose quelques problèmes. Peut-être M. le rapporteur nous en
dira-t-il plus. En tout cas, je suis prêt à retirer cet amendement au profit de
celui de la commission des lois.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 127 ?
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
J'avais précisément l'intention de demander à notre collègue
de retirer son amendement, qui est satisfait par celui de la commission et dont
le second alinéa ne paraît effectivement pas d'une grande nécessité.
M. le président.
Monsieur Bret, l'amendement n° 127 est-il maintenu ?
M. Robert Bret.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 127 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 89 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement est
défavorable à cet amendement, et je vais expliquer pourquoi.
L'amendement de M. le rapporteur, tout comme celui que M. Bret vient de
retirer, ont pour objet d'affilier uniquement à la CAVOM les
commissaires-priseurs en cas de double activité dans le cadre judiciaire et au
sein des sociétés de ventes. Il vise donc à déroger à une règle de base de la
sécurité sociale en matière d'assurance vieillesse qui pose le principe de la
double affiliation pour les salariés exerçant simultanément une activité non
salariée. En effet, comme vous le savez, le code de la sécurité sociale
assimile les gérants minoritaires des SARL et les présidents et directeurs
généraux des sociétés anonymes à des salariés.
L'application des dispositions de droit commun, telle qu'elle est prévue
implicitement dans le projet de loi, conduira donc à affilier les
commissaires-priseurs exerçant une pluriactivité, d'une part, à la CAVOM pour
leur activité libérale de ventes judiciaires, d'autre part, au régime général
et aux régimes conventionnels ARRCO-AGIRC pour leur activité au sein des
sociétés de ventes volontaires lorsqu'ils y seront salariés ou y exerceront les
fonctions évoquées précédemment.
Ce dispositif de droit commun n'apparaît pas défavorable aux personnes
concernées puisqu'il ne remet pas en cause les droits acquis à la CAVOM des
commissaires-priseurs qui continueront, par leurs cotisations, à acquérir des
droits supplémentaires dans cette caisse, aussi bien au titre du régime de base
que du régime complémentaire, et qu'il leur ouvre des droits nouveaux,
cumulables avec les précédents, dans le régime général et dans les régimes
ARRCO-AGIRC.
En outre, il ne menace en rien l'équilibre financier de la CAVOM, qui
bénéficie de réserves importantes et qui ne devrait constater qu'une diminution
d'assiette sur une part très minoritaire de ses cotisants.
Le Gouvernement n'est donc pas favorable à l'amendement n° 89, qui reste en
discussion.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Madame la ministre, je me permets de vous poser à nouveau la
question sous une forme plus précise : si le régime de retraite qui sera
applicable aux actuels commissaires-priseurs à l'issue de la présente réforme
reste inchangé, si ces derniers ont en particulier l'assurance de conserver
leurs droits acquis au titre des cotisations à la CAVOM, je suis tout prêt à
retirer l'amendement n° 89.
Vous comprenez qu'il s'agit d'une question de sécurité pour ces
professionnels, et c'est pourquoi je me permets de vous interroger sur ce point
précis, madame la ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Je peux répondre de façon
très positive et sans ambiguïté à M. le rapporteur.
La question posée au travers de votre amendement a été préalablement examinée
lors d'une réunion interministérielle. Il est évident que les droits acquis à
la CAVOM sont, si j'ose dire, acquis et qu'ils restent donc de fait valables.
Il n'y a aucune ambiguïté sur ce point.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Dans ces conditions, je retire l'amendement n° 89.
M. le président.
L'amendement n° 89 est retiré.
Articles 52 à 55
M. le président.
« Art. 52. - Les ventes en gros de marchandises aux enchères publiques
continuent à être faites par le ministère des courtiers de marchandises
assermentés dans les cas, conditions et formes indiqués par les lois et
règlements en vigueur.
« Les ventes aux enchères publiques de meubles appartenant à l'Etat définies à
l'article L. 68 du code du domaine de l'Etat, ainsi que toutes les ventes de
biens meubles effectuées en la forme domaniale dans les conditions prévues à
l'article L. 69 du même code, continuent d'être faites selon les modalités
prévues par ces articles.
« Les ventes de meubles aux enchères publiques relevant du code des douanes
continuent d'être faites selon les modalités prévues par le même code. » -
(Adopté.)
« Art. 53. - L'article 37 de la loi du 31 décembre 1921 portant fixation du
budget général de l'exercice 1922 est ainsi modifié :
« I. - Au premier alinéa, les mots : "ministre des Beaux-Arts" sont remplacés
par les mots : "ministre chargé de la culture" et les mots : "ou de la société
habilitée à organiser la vente publique" sont ajoutés après les mots : "de
l'officier public ou ministériel dirigeant les adjudications".
« II. - Cet article est complété par l'alinéa suivant :
« L'officier public ou ministériel chargé de procéder à la vente publique des
biens mentionnés au premier alinéa ou la société habilitée à organiser une
telle vente en donne avis au ministre chargé de la culture au moins quinze
jours à l'avance, avec toutes indications utiles concernant lesdits biens.
L'officier public ou ministériel ou la société informe en même temps le
ministre du jour, de l'heure et du lieu de la vente. L'envoi d'un catalogue
avec mention du but de cet envoi tiendra lieu d'avis. » -
(Adopté.)
« Art. 54. - Au premier alinéa de l'article 19 de la loi n° 79-18 du 3 janvier
1979 modifiée sur les archives, les mots : "ou toute société habilitée à
organiser une telle vente" sont ajoutés après les mots : "tout officier public
ou ministériel chargé de procéder à la vente publique d'archives privées". » -
(Adopté.)
« Art. 55. - Les tribunaux civils sont seuls compétents pour connaître des
actions en justice relatives aux activités de ventes dans lesquelles est partie
une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques constituée
conformément à la présente loi. Toute clause contraire est réputée non écrite.
Néanmoins, les associés peuvent convenir, dans les statuts, de soumettre à des
arbitres les contestations qui surviendraient entre eux ou entre sociétés de
ventes volontaires à raison de leur activité. » -
(Adopté.)
Article 56
M. le président.
« Art. 56. - Les troisième et quatrième alinéas de l'article 1er de la loi du
25 juin 1841 portant réglementation des ventes volontaires aux enchères
publiques sont abrogés. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 90, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Sont abrogés :
« - la loi du 27 ventôse an IX portant établissement de quatre-vingts
commissaires-priseurs vendeurs de meubles à Paris ;
« - l'article 89 de la loi du 28 avril 1816 sur les finances ;
« - l'article 8 de l'ordonnance du 26 juin 1816 qui établit, en exécution de
la loi du 28 avril 1816, des commissaires-priseurs ;
« - les deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 1er de la loi du
25 juin 1841 portant réglementation des ventes volontaires aux enchères
publiques. »
Par amendement n° 111, M. François propose de compléter l'article 56 par un
alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cinquième alinéa
d
du 3° de l'article L. 122-5 du code de la
propriété intellectuelle, les mots : "par un officier public ou ministériel"
sont supprimés. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 90.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet d'abroger quelques articles de
textes relativement anciens qui subsistent encore et qui n'ont pas échappé à un
examen attentif du rapporteur. En effet, ces articles sont devenus inutiles.
M. le président.
L'amendement n° 111 est-il soutenu ?...
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 90 ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 90, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 56 est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l'article 56
M. le président.
Par amendement n° 91, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose
d'insérer, après l'article 56, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 871 du code général des impôts est complété
in fine
par les mots : ", ou par des sociétés de ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques agréées".
« II. - Le deuxième alinéa de l'article 873 du même code est complété par les
mots : "ou la personne habilitée à diriger la vente". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
L'article 871 du code général des impôts ne mentionnait que
les commissaires-priseurs. Il faut y ajouter les sociétés de ventes volontaires
de meubles aux enchères publiques agréées.
Il convient également d'ajouter les mots : « ou la personne habilitée à
diriger la vente » au deuxième alinéa de l'article 873.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 91, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 56.
Par amendement n° 92 rectifié, M. Dejoie, au nom de la commission des lois,
propose d'insérer, après l'article 56, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans l'avant-dernier alinéa (3°) de l'article 1er de la loi du 1er juin
1924 portant introduction des lois commerciales françaises dans les
départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, après les mots : "Les
fonctions attribuées aux commissaires-priseurs", est inséré le mot :
"judiciaires".
« II. - Les huissiers de justice et les notaires exerçant dans ces
départements les fonctions attribuées aux commissaires-priseurs bénéficient des
dispositions de l'article 38 de la présente loi. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet premier de limiter pour l'avenir
au seul domaine des ventes judiciaires le régime particulier applicable aux
ventes aux enchères en Alsace-Moselle où, en l'absence de commissaire-priseur,
les ventes aux enchères sont organisées par les huissiers et par les
notaires.
Ce texte tend également à préciser explicitement que les huissiers et notaires
d'Alsace-Moselle pourront être indemnisés, en application des dispositions de
l'article 38.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Le Gouvernement est
favorable à cet amendement. Mais je ne limiterai pas là mon propos, me sentant
particulièrement concernée, même si mon souci doit aller à l'intégralité du
territoire français.
Evidemment, les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle sont
soumis à un régime spécifique qui résulte de la loi du 1er juin 1924 portant
introduction des lois commerciales françaises, qui est toujours en vigueur.
Dans ces départements, comme vous l'avez rappelé, il n'existe pas de
commissaire-priseur. Les ventes aux enchères sont exclusivement réalisées par
les huissiers de justice et par les notaires.
Le projet de loi a, bien entendu et fort heureusement, vocation à s'appliquer
sur l'étendue du territoire. De ce fait, dans le secteur des ventes
volontaires, les huissiers de justice et les notaires d'Alsace-Moselle vont se
trouver désormais en concurrence avec les sociétés de ventes.
Pour ce qui concerne les ventes judiciaires, les huissiers de justice et les
notaires des trois départements précités conserveront le régime actuel.
Afin d'éviter toute ambiguïté de nature à porter atteinte à la sécurité
juridique des transactions, il paraît en effet opportun de modifier l'article
1er de la loi du 1er juin 1924 de façon à préciser que, dorénavant, le monopole
des huissiers de justice et des notaires en Alsace-Moselle ne s'appliquera plus
que dans le secteur des ventes judiciaires.
Cette modification pouvant entraîner un préjudice pour les professionnels
intéressés, ceux-ci pourront être indemnisés suivant les modalités prévues à
l'article 38 concernant les huissiers de justice et les notaires des autres
départements du fait de l'ouverture du secteur des ventes volontaires.
M. Emmanuel Hamel.
Vive l'Alsace et son ministre !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 92 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 56.
Par amendement n° 93, M. Dejoie, au nom de la commission des lois, propose,
après l'article 56, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans l'ordonnance du 26 juin 1816 qui établit, en exécution de la loi du 28
avril 1816, des commissaires-priseurs et l'ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre
1945 relative au statut des commissaires-priseurs, les mots :
"commissaire(s)-priseur(s)" sont remplacés par les mots :
"commissaire(s)- priseur(s) judiciaire(s)". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann,
ministre de la culture et de la communication.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 93, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 56.
Article 57
M. le président.
« Art. 57. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application de
la présente loi. » -
(Adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Hamel pour explication de vote.
M. Emmanuel Hamel.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, membre de leur
groupe, je tiens à exprimer ma gratitude à nos très éminents collègues MM.
Dejoie et Gaillard, sénateurs du groupe du RPR, pour leur remarquable
contribution à l'amélioration du texte du projet de loi que nous allons voter,
texte important pour les commissaires-priseurs, leurs employés et le marché de
l'art en France.
Ne tardez pas à défendre notre texte devant l'Assemblée nationale, madame la
minsitre.
A l'avance, et j'espère ne pas être naïf mais seulement optimiste, je vous en
remercie.
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Madame la ministre, vous m'avez trouvé pessimiste ce matin. Au terme de nos
débats, je suis au regret de vous dire que je reste avec mes interrogations et
mes inquiétudes quant à l'évolution du marché de l'art français et au devenir
des personnels et de leur indemnisation.
Cette réforme, souhaitée par toute la profession, permettra-t-elle à notre
pays de revenir au tout premier plan sur la marché de l'art ? J'en doute, mais
l'avenir nous le dira. En tout cas, j'espère vivement me tromper.
Je crains en effet que ce texte, assorti des amendements adoptés par la
majorité sénatoriale, ne contribue un peu plus à la libéralisation de notre
marché de l'art.
Pour toutes ces raisons, le groupe communiste républicain et citoyen
s'abstiendra.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Comme nous l'avons dit ce matin, cette réforme est nécessaire ; elle est même
urgente. Je crois qu'elle va redynamiser le marché. Je suis donc plus optimiste
à cet égard que notre collègue M. Bret.
Toutefois, si nous adhérons à la philosophie du projet de loi tel qu'il nous a
été soumis, nous ne souscrivons pas à certains des amendements qui ont été
présentés par la commission des lois et par la commission des finances.
Quoi qu'il en soit, comme nous sommes en première lecture et que nous pensons
que nos collègues députés examineront attentivement cet important projet de loi
et l'amenderont peut-être dans un sens plus favorable à nos souhaits, pour
l'instant nous nous abstiendrons.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
4
SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
M. le président a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une
lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a été
saisi, le 9 juin 1999, en application de l'article 61, alinéa 2, de la
Constitution, par plus de 60 députés, d'une demande d'examen de la conformité à
la Constitution de la loi d'orientation agricole.
Acte est donné de cette communication.
Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de
la distribution.
5
TRANSMISSION DE PROPOSITIONS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi,
adoptée par l'Assemblée nationale, portant sur diverses professions relevant du
ministère de la justice, la procédure civile et le droit comptable.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 416, distribuée et renvoyée à
la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi
organique, adoptée par l'Assemblée nationale, relative au statut de la
magistrature.
La proposition de loi organique sera imprimée sous le n° 417, distribuée et
renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de
la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions
prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi,
adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la substitution de l'expression «
aux opérations effectuées en Afrique du Nord » par l'expression « à la guerre
d'Algérie et aux combats en Tunisie et au Maroc ».
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 418, distribuée et renvoyée à
la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle
d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
6
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu un rapport déposé par M. Henri Revol, président de l'Office
parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur les
nouvelles techniques de recyclage et de valorisation des déchets ménagers et
des déchets industriels banals, établi par M. Gérard Miquel, sénateur, et M.
Serge Poignant, député, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix
scientifiques et technologiques.
Le rapport sera imprimé sous le n° 415 et distribué.
J'ai reçu de M. Charles Jolibois un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur :
- le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, renforçant la protection
de la présomption d'innocence et les droits des victimes (n° 291, 1998-1999)
;
- et la proposition de loi de MM. Xavier Dugoin, Louis Althapé, Louis de
Broissia, Robert Calmegane, Désiré Debavelaere, Christian Demuynck, Bernard
Fournier, Patrice Gélard, Georges Gruillot, Roger Husson, Robert Laufoaulu,
Paul Natali, Jacques Oudin, Victor Reux et Louis Souvet, visant à filmer et
enregistrer les gardes à vue (n° 264 rectifié, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 419 et distribué.7
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mardi 15 juin 1999 :
A neuf heures trente :
1. Discussion des conclusions du rapport (n° 409, 1998-1999) de M. Henri
Revol, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan, sur
:
- la proposition de loi (n° 436, 1997-1998) de Mme Hélène Luc, MM. Ivan Renar,
Jack Ralite, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Luc Bécart, Mmes Danielle
Bidard-Reydet, Nicole Borvo, MM. Jean Derian, Michel Duffour, Guy Fischer,
Pierre Lefebvre, Paul Loridant, Louis Minetti, Robert Pagès et Mme Odette
Terrade tendant à améliorer la représentation parlementaire au sein de l'Office
parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ;
- et la proposition de loi (n° 235, 1998-1999) de MM. Henri Revol, Marcel
Deneux, Charles Descours, Pierre Laffitte et Franck Sérusclat tendant à
modifier l'article 6
ter
de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958
modifiée relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.
Délai limite pour le dépôt des amendements à ces conclusions : lundi 14 juin
1999, à dix-sept heures.
2. Discussion de la question orale avec débat n° 13 de Mme Nicole Borvo à M.
le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur la disparition de la
gynécologie médicale.
Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à
l'action sociale sur les difficultés que rencontre la gynécologie médicale en
France. Depuis 1986, la spécialité de gynécologie médicale est supprimée et
remplacée par la spécialité « chirurgicale » de gynécologie-obstétrique, plus
technique et plus orientée vers l'obstétrique et la chirurgie. On n'enseigne
plus la gynécologie médicale depuis treize ans et il n'y aura plus un seul
gynécologue médical dans vingt-cinq ans. Pourtant, les consultations de
gynécologie médicale ne coûtent pas cher et font faire de grosses économies
tant humaines que financières, car elles ont développé la prévention depuis
trente ans : prévention des cancers, des maladies sexuellement transmissibles
(MST), nette diminution des interventions mutilantes, des stérilités, des
interruptions volontaires de grossesse (IVG), de l'ostéoporose... 60 % des
femmes aujourd'hui s'imposent un suivi gynécologique régulier, grâce à la
confiance qu'elles ont acquise au fil du temps dans ces médecins
complémentaires des gynéco-obstétriciens, spécialement formé(e)s pour la
prévention et les soins. Si les femmes n'ont plus la liberté de choisir leur
médecin dans ce domaine délicat, beaucoup risquent de ne plus consulter. A
l'heure où l'on cherche à améliorer le dépistage et la prévention des MST et
des cancers féminins, est-ce bien le moment de supprimer ceux et celles qui ont
été spécifiquement formés dans ce sens, qui ont développé cette prévention
jusqu'à ce jour et exercent leur métier avec compétence et efficacité ? Il est
à noter que 150 000 femmes ont signé une pétition pour le maintien de la
gynécologie médicale telle qu'elle existe aujourd'hui.
Elle lui demande ce que prévoit le Gouvernement :
1. Pour garantir dans les textes officiels, à toutes les femmes de ce pays, le
libre accès à leur gynécologue ;
2. Pour recréer une filière universitaire de formation spécifique de
gynécologie médicale, spécialité Santé publique, avec l'attribution d'un titre
distinct de la gynéco-obstétrique, spécialité à plateau technique lourd.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 14 juin
1999, à dix-sept heures.
A seize heures :
3. Discussion du projet de loi (n° 291, 1998-1999), adopté par l'Assemblée
nationale, renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits
des victimes.
Rapport (n° 419, 1998-1999) de M. Charles Jolibois, fait au nom de la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale.
Avis (n° 412, 1998-1999) de M. Louis de Broissia, fait au nom de la commission
des affaires culturelles.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 14 juin 1999, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi : lundi 14 juin
1999, à dix-sept heures.
A vingt et une heures trente :
4. Discussion des conclusions du rapport (n° 410, 1998-1999) de M. Jean-Louis
Lorrain, fait au nom de la commission des affaires sociales, sur la proposition
de loi (n° 396, 1998-1999) de MM. Jean Arthuis, Guy Cabanel, Henri de Raincourt
et Josselin de Rohan, relative à la famille.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 14 juin 1999, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements à ces conclusions : lundi 14 juin
1999, à dix-sept heures.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant création de
l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (n° 358, 1998-1999)
:
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 21 juin 1999, à dix-sept
heures ;
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture,
tendant à limiter les licenciements des salariés de plus de cinquante ans (n°
390, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 21 juin 1999, à dix-sept
heures ;
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, modifiant
l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances
(n° 402, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 21 juin 1999, à dix-sept
heures ;
Sous réserve de sa transmission, projet de loi de règlement du budget 1997
(AN, n° 1277) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 21 juin 1999, à dix-sept
heures ;
Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, d'orientation budgétaire :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 21 juin
1999, à dix-sept heures.
Projet de loi relatif à l'élection des sénateurs (n° 260, 1998-1999) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mardi 22 juin 1999, à dix-sept heures ;
Date limite pour le dépôt des amendements : mardi 22 juin 1999, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures cinquante-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL,
DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Charles Jolibois a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 374
(1997-1998), adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à limiter la détention
provisoire dont la commission des lois est saisie au fond.
M. Henri de Richemont a été nommé rapporteur de la proposition de loi
organique n° 417 (1998-1999), adoptée par l'Assemblée nationale, relative au
statut de la magistrature dont la commission des lois est saisie au fond.
M. Jacques Larché a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 362
(1998-1999) de M. Jean Bernadaux créant une incompatibilité entre le mandat de
maire d'une commune et la qualité de membre d'une association subventionnée par
cette dernière dont la commission des lois est saisie au fond.
NOMINATION D'UN MEMBRE DU BUREAU
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE
Dans sa séance du
mercredi 9 juin 1999,
la commission d'enquête sur la
conduite de la politique de sécurité menée par l'Etat en Corse a complété son
bureau et a désigné M. Robert Bret comme secrétaire.
Le bureau est ainsi constitué :
Président :
M. Jean-Patrick Courtois.
Vice-présidents :
MM. Jean-Paul Amoudry, Marcel Debarge.
Secrétaires :
MM. André Vallet, Robert Bret.
Rapporteur :
M. René Garrec.