Séance du 30 novembre 1999
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Loi de finances pour 2000.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
1
).
Articles additionnels après l'article 5 (p. 2 )
Amendements n°s I-11 de la commission et I-95 de M. Charasse. - MM. Philippe
Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Michel Charasse,
Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie ; Alain Lambert, président
de la commission des finances. - Retrait de l'amendement n° I-95 ; adoption de
l'amendement n° I-11 insérant un article additionnel.
Amendement n° I-12 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire
d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° I-13 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire
d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° I-14 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire
d'Etat, le président de la commission. - Adoption de l'amendement insérant un
article additionnel.
Amendement n° I-15 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendement n° I-230 de M. Gaillard. - MM. Yann Gaillard, le rapporteur général,
le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-84 de M. Fréville. - M. Yves Fréville. - Retrait.
Article 5 bis (p. 3 )
Amendement n° I-16 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire
d'Etat, Paul Loridant. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 5 bis (p. 4 )
Amendement n° I-289 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 6 (p. 5 )
Amendement n° I-17 rectifié de la commission ; amendements identiques n°s I-137 de M. du Luart et I-233 de M. Oudin ; amendement n° I-74 de M. Fréville ; amendements identiques n°s I-111 de M. Ostermann et I-138 de M. du Luart. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, le président de la commission, Roland du Luart, Jacques Oudin, Yves Fréville, Joseph Ostermann, Claude Haut. - Adoption de l'amendement n° I-17 rectifié rédigeant l'article, les autres amendements devenant sans objet.
Article 7. - Adoption (p.
6
)
Articles additionnels après l'article 7 (p.
7
)
Amendements n°s I-75 de M. Arthuis, I-142 rectifié
bis
de M. Charasse et
I-166 rectifié de Mme Beaudeau. - MM. Denis Badré, Michel Charasse, Mme
Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Jean
Chérioux, Bernard Angels, Yann Gaillard. - Retrait des amendements n°s I-75 et
I-142 rectifié
bis ;
rejet de l'amendement n° I-166 rectifié.
Amendement n° I-18 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire
d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° I-19 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire
d'Etat, le président de la commission, Jacques Oudin. - Adoption de
l'amendement insérant un article additionnel.
Suspension et reprise de la séance (p. 8 )
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
Amendements n°s I-236 rectifié de M. Oudin et I-274 rectifié de M. Fréville. -
MM. Jacques Oudin, Yves Fréville, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat.
- Adoption de l'amendement n° I-236 rectifié insérant un article additionnel,
l'amendement n° I-274 rectifié devenant sans objet.
Amendements n°s I-65 de M. Badré, I-255 de M. Oudin et I-290 de la commission.
- MM. Denis Badré, Jacques Oudin, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat.
- Retrait des amendements n°s I-65 et I-255 ; adoption de l'amendement n° I-290
insérant un article additionnel.
Amendement n° I-256 de M. Oudin. - MM. Jacques Oudin, le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-21 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat, le président de la commission. - Retrait.
Amendement n° I-22 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire
d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 7
bis.
- Adoption (p.
9
)
Article additionnel après l'article 7
bis
(p.
10
)
Amendement n° I-96 de M. Angels. - MM. Bernard Angels, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Article 8 (p. 11 )
Amendements n°s I-139 de M. Jean Boyer et I-272 de M. Richert. - MM. Jean
Boyer, Yves Fréville, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Daniel
Hoeffel. - Retrait des deux amendements.
Amendement n° I-66 de M. Badré. - MM. Denis Badré, le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Retrait.
Adoption de l'article.
Articles additionnels avant l'article 8
bis
ou après l'article 8
bis
(p.
12
)
Amendements n°s I-113 rectifié, I-114 rectifié de M. Ostermann, I-126 rectifié bis de M. du Luart, I-273 rectifié de M. Fréville et I-179 de Mme Beaudeau. - MM. Auguste Cazalet, Roland du Luart, Yves Fréville, Paul Loridant, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des amendements n°s I-113 rectifié, I-114 rectifié et I-179 ; adoption de l'amendement n° I-126 rectifié bis insérant un article additionnel après l'article 8 bis, l'amendement n° I-273 rectifié devenant sans objet.
Articles 8
bis
et 9. - Adoption (p.
13
)
Article additionnel après l'article 9 (p.
14
)
Amendement n° I-248 rectifié de M. Gaillard. - MM. Yann Gaillard, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 10 (p. 15 )
Amendements n°s I-180 de Mme Beaudeau, I-23 et I-24 de la commission. - Mme
Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Jean
Chérioux. - Rejet de l'amendement n° I-180 ; adoption des amendements n°s I-23
et I-24.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 10 (p. 16 )
Amendement n° I-238 de M. Gaillard. - MM. Yann Gaillard, le rapporteur général,
le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-181 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le
rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendements n°s I-124 de M. du Luart et I-235 de M. Oudin. - MM. Roland du
Luart, Jacques Oudin, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait
des deux amendements.
Amendement n° I-249 de Mme Michaux-Chevry. - MM. Edmond Lauret, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-64 rectifié de M. Besse. - MM. Auguste Cazalet, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendement n° I-112 de M. Ostermann. - MM. Joseph Ostermann, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat, Jacques Oudin. - Adoption de l'amendement
insérant un article additionnel.
Amendement n° I-237 de M. Gaillard. - MM. Yann Gaillard, le rapporteur général,
le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Article 11 (p. 17 )
Amendements n°s I-239, I-250 de M. Oudin, I-25 de la commission, I-182, I-183
de Mme Beaudeau et I-295 du Gouvernement. - MM. Jacques Oudin, le rapporteur
général, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. le secrétaire d'Etat. - Retrait des
amendements n°s I-239, I-250 et I-182 ; adoption des amendements n°s I-25 et
I-295 ; rejet de l'amendement n° I-183.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 11 (p. 18 )
Amendement n° I-184 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Article 12 (p. 19 )
Amendement n° I-26 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article additionnel après l'article 12 (p. 20 )
Amendement n° I-185 de Mme Beaudeau. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Article 12 bis (p. 21 )
Amendements n°s I-27 de la commission et I-186 de Mme Beaudeau. - M. le
rapporteur général, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. le secrétaire d'Etat. -
Adoption de l'amendement n° I-27, l'amendement n° I-186 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 12 bis (p. 22 )
Amendement n° I-28 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat.
- Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° I-97 de M. Angels. - MM. Marc Massion, le rapporteur général, le
secrétaire d'Etat. - Retrait.
Article 13 (p. 23 )
MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat.
Adoption de l'article.
Article 13
bis. -
Adoption (p.
24
)
Article additionnel après l'article 13
bis
(p.
25
)
Amendement n° I-187 rectifié de Mme Beaudeau. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Article additionnel avant l'article 14 (p. 26 )
Amendement n° I-188 de M. Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Article 14 (p. 27 )
M. Yves Fréville.
Amendements n°s I-275 à I-279 de M. Fréville et I-30 à I-32 de la commission. -
MM. Yves Fréville, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption des
huit amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 14 (p. 28 )
Amendement n° I-98 de M. Massion. - MM. Marc Massion, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Suspension et reprise de la séance (p. 29 )
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
Amendement n° I-115 de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le rapporteur général,
le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendement n° I-150 de M. Ambroise Dupont. - MM. Ambroise Dupont, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Amendements n°s I-33 de la commission, I-208 de M. Ostermann, I-67 rectifié de
M. Fréville et I-151 de M. du Luart. - MM. le rapporteur général, Joseph
Ostermann, Yves Fréville, Joël Bourdin, le secrétaire d'Etat. - Retrait de
l'amendement n° I-67 rectifié ; adoption de l'amendement n° I-33 insérant un
article additionnel, les amendements n°s I-208 et I-151 devenant sans objet.
Amendement n° I-280 de M. Fréville. - Retrait.
Amendement n° I-85 rectifié de M. Fréville. - MM. Yves Fréville, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat, Pierre Jarlier, Philippe Nogrix. - Adoption de
l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements n°s I-189 et I-190 de M. Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le
rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des deux amendements.
Amendement n° I-140 rectifié de M. Revet. - MM. Joël Bourdin, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Article 14
bis
. - Adoption (p.
30
)
Article 14
ter
(p.
31
)
M. le rapporteur général.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 14 ter (p. 32 )
Amendement n° I-149 de M. Pintat. - MM. Xavier Pintat, le rapporteur général,
le secrétaire d'Etat, Yves Fréville. - Adoption de l'amendement insérant un
article additionnel.
Amendement n° I-192 de M. Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Article 14
quater
. - Adoption (p.
33
)
Articles additionnels après l'article 14
quater
(p.
34
)
Amendement n° I-194 de M. Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-193 rectifié de M. Foucaud. - MM. Paul Loridant, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendements n°s I-292 de la commission et I-262 de M. Oudin. - MM. le
rapporteur général, Auguste Cazalet, le secrétaire d'Etat, Yves Fréville. -
Retrait de l'amendement n° I-262 ; adoption de l'amendement n° I-292 insérant
un article additionnel.
Article 15 (supprimé) (p. 35 )
Amendement n° I-34 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption, par scrutin public, de l'amendement rétablissant l'article.
Articles additionnels après l'article 15 (p. 36 )
Amendement n° I-195 de Mme Beaudeau. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° I-252 de M. Gaillard. - MM. Auguste Cazalet, le rapporteur
général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article
addi-tionnel.
Amendement n° I-251 de M. Oudin. - MM. Auguste Cazalet, le rapporteur général.
- Retrait.
Amendement n° I-35 de la commission et sous-amendement n° I-152 rectifié de M.
du Luart. - MM. le rapporteur général, Roland du Luart, le secrétaire d'Etat. -
Retrait du sous-amendement ; adoption de l'amendement insérant un article
additionnel.
Articles 15
bis
et 16. - Adoption (p.
37
)
Articles additionnels après l'article 16 (p.
38
)
Amendements identiques n°s I-148 rectifié de M. Hamel et I-253 de M. Oudin. -
MM. Emmanuel Hamel, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des
deux amendements.
Amendements n°s I-99 de M. Dussaut, I-153 de M. du Luart, I-281 rectifié et
I-282 de M. Deneux. - MM. André Lejeune, Roland du Luart, Serge Franchis, le
rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des amendements n°s I-153
et I-282 ; adoption de l'amendement n° I-99 insérant un article additionnel,
l'amendement n° I-281 rectifié devenant sans objet.
Article 17 (p. 39 )
Amendement n° I-36 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 17
bis
. - Adoption (p.
40
)
Article 17
ter
(p.
41
)
Amendement n° I-37 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Emmanuel Hamel. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 18
(supprimé)
(p.
42
)
Article 19 (p.
43
)
Amendement n° I-38 de la commision. - MM. le rapporteur général, le secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 19
bis
. - Adoption (p.
44
)
Articles additionnels après l'article 19
bis
(p.
45
)
Amendements n°s I-197 à I-199 de M. Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le
rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des amendements n°s I-197
et I-199 ; adoption de l'amendement n° I-198 insérant un article
additionnel.
Amendement n° I-196 rectifié de M. Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le
rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant
un article additionnel.
Article 20. - Adoption (p.
46
)
Article 21 (p.
47
)
Amendements n°s I-154 de M. Emin et I-254 de M. Trégouët. - MM. Roland du
Luard, René Trégouët, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait de
l'amendement n° I-154 ; adoption de l'amendement n° I-254.
Adoption de l'article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
3.
Retrait d'une question orale avec débat
(p.
48
).
4.
Transmission d'un projet de loi
(p.
49
).
5.
Transmission d'une proposition de loi
(p.
50
).
6.
Ordre du jour
(p.
51
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
LOI DE FINANCES POUR 2000
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances
pour 2000 (n° 88, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 89
(1999-2000).]
Dans la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus
aux articles additionnels après l'article 5.
Articles additionnels après l'article 5
M. le président.
Je suis d'abord saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° I-11, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le paragraphe I de l'article 788 du code général des impôts est ainsi
rédigé :
«
I. -
Pour la perception des droits de mutation par décès, il est
effectué un abattement de 375 000 francs sur la part de chaque frère ou soeur,
célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps, constamment domicilié avec le
défunt pendant l'année précédant le décès. La preuve de la cohabitation est
apportée dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. »
« II. - La perte de recettes résultant des dispositions du paragraphe I est
compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-95, MM. Charasse, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM.
Demerliat, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 5, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du I de l'article 788 du code général des
impôts, la somme : "100 000 francs" est remplacée par la somme : "375 000
francs".
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions du I
sont compensées a due concurrence par une augmentation des tarifs fixés à
l'article 885 U du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n°
I-11.
M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet amendement va dans le même sens que
plusieurs préoccupations déjà exprimées hier à propos de la nécessité de
renforcer les solidarités et d'assurer un sort équitable aux fratries.
Il a pour objet d'améliorer le régime successoral dont bénéficient les frères
et soeurs isolés qui étaient domiciliés avec le défunt en ajustant l'abattement
dont ils bénéficient et en assouplissant ses conditions d'octroi, ce qui, à
notre sens, ne devrait requérir qu'une seule année de cohabitation avant le
décès.
Le régime actuel est extrêmement restrictif et il convient de rappeler que la
loi sur le pacte civil de solidarité, le PACS, a créé, en matière de
succession, un régime de faveur pour les personnes sans lien de parenté, ces
dernières bénéficiant d'un abattement de 375 000 francs à compter du 1er
janvier 2000.
Jusqu'à présent, dans le cas de frères et soeurs ayant le même domicile, le
montant de l'abattement est limité à 100 000 francs. Il est proposé de le
porter à 150 000 francs, et ce n'est que justice puisque le montant de 100 000
francs a été fixé en 1984.
M. le président.
La parole est à M. Charasse, pour défendre l'amendement n° I-95.
M. Michel Charasse.
Même si notre amendement I-95 n'est pas rédigé exactement de la même manière,
il est d'inspiration analogue à l'amendement qui vient d'être présenté par M.
Marini au nom de la commission des finances ; les deux amendements auraient
d'ailleurs des effets comparables.
Il s'agit d'aligner, en matière de droits de succession, la situation de ce
que l'on appelle les fratries, c'est-à-dire les frères et soeurs qui vivent
ensemble, sur la situation des personnes qui souscriront un PACS en application
de la loi récemment adoptée.
Le Gouvernement doit être bien convaincu de la nécessité de ne pas créer
d'inégalité entre des situations qui sont, de fait, quasiment les mêmes. Je dis
bien « quasiment les mêmes », ne souhaitant pas pousser les intéressés à
d'autres tentations !
(Sourires.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° I-95 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Comme l'a dit excellemment M. Charasse, cet
amendement est d'esprit analogue à celui que j'ai eu l'honneur de présenter et
propose un dispositif comparable. Il sera donc satisfait si le Sénat veut bien
adopter l'amendement n° I-11 de la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-11 et I-95 ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Les deux amendements sont effectivement
proches, M. Charasse se bornant à relever le seuil, M. Marini élargissant en
fait le dispositif à chaque frère ou soeur célibataire, veuf, divorcé ou séparé
de corps, constamment domicilié avec le défunt pendant l'année précédant le
décès.
Je tiens à souligner que le Gouvernement a constamment - et sous toutes les
majorités - assoupli et élargi dans un sens favorable aux héritiers le droit
fiscal applicable aux donations et aux mutations à titre gratuit. C'est ainsi
qu'un régime favorable pour les donations a été adopté dans le cadre de la loi
de finances de 1999.
Je rappelle que la réduction de droits de donation a été portée à 50 % lorsque
le donateur est âgé de moins de soixante-cinq ans et à 30 % lorsqu'il a
soixante-cinq ans révolus et moins de soixante-quinze ans. En outre - et c'est
important, car nous approchons de la date butoir - les donations consenties par
acte passé entre le 25 novembre 1998 et le 31 décembre 1999 par des donateurs
âgés de plus de soixante-quinze ans bénéficient de la réduction de droits de 30
%. Il reste donc un mois à ces donateurs éventuels pour réaliser effectivement
une donation.
Ces dispositions sont, bien entendu, applicables aux transmissions réalisées
entre frères et soeurs, et les objectifs de M. le rapporteur général et de M.
Charasse sont donc déjà atteints,...
M. Roland du Luart,
Mais non !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... par la voie de la donation, il est vrai.
C'est pourquoi je souhaite le retrait des deux amendements, à défaut de quoi
je serai contraint d'en demander le rejet.
Je saisis cette occasion pour indiquer à nouveau que Mme le garde des sceaux
et moi-même avons mis en place un groupe de travail entre les deux ministères
pour étudier les modalités de reconnaissance juridique et fiscale de la
communauté de vie entre collatéraux proches. Bien entendu, le Sénat et
l'Assemblée nationale seront tenus informés du résultat des études de ce groupe
de travail.
M. le président.
Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° I-11 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le président, il n'y a pas lieu de retirer
cet amendement.
M. le secrétaire d'Etat nous a rappelé l'existence d'un certain nombre de
dispositifs.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Favorables !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Peut-être, mais ce n'est pas le sujet. Le sujet,
c'est bien celui du sort des frères et soeurs ayant cohabité pendant un certain
temps au même domicile et qui sont soumis à un régime assorti d'un abattement
fixé en 1984. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous n'avez pas répondu sur ce
point.
Un abattement de 100 000 francs en 1984 ne représente plus la même chose
aujourd'hui, et c'est un message que nous voulons faire passer dans la
discussion du projet de loi de finances pour l'an 2000 : chaque fois que des
seuils en valeur absolue ont été fixés à des dates anciennes, il convient de
les réviser, faute de quoi on modifie de manière implicite et insidieuse la
pression fiscale et, par voie de conséquence, le système fiscal.
Nous proposons de relever le niveau de cet abattement en le portant à 375 000
francs. Par rapport aux intentions du législateur de 1984, l'Etat n'y perd pas
et, par rapport à ce qui a été voté dans la loi sur le PACS, nous rétablissons
l'équité, car il est tout à fait inacceptable de constater une hiérarchie des
avantages fiscaux décernés au uns ou aux autres selon leur situation de vie
privée ou de famille.
Monsieur le secrétaire d'Etat, au-delà des explications froidement
administratives que vous nous avez données à propos de l'amendement de la
commission comme de l'amendement présenté par Michel Charasse, de grâce, faites
un bon geste en faveur de ces frères et soeurs ! L'Etat n'y perdra pas par
rapport à ce qui avait été souhaité en 1984.
Monsieur le secrétaire d'Etat, commençons sous de bons auspices la discussion
des articles en ce mardi matin !
(Sourires.)
M. le président.
Monsieur Charasse, l'amendement n° I-95 est-il maintenu ?
M. Michel Charasse.
J'ai bien entendu ce que nous a dit M. le secrétaire d'Etat, pour qui, il le
sait, j'ai une grande amitié, ancienne et solide. Mais je voudrais lui demander
si, oui ou non, les avantages consentis en la matière dans le cadre d'un PACS
sont les mêmes que ceux que la loi consent aux frères et soeurs vivant
ensemble.
M. Gérard César.
Voilà !
M. Michel Charasse.
Je réponds à votre place, monsieur le secrétaire d'Etat, cela économisera du
temps : non !
(Sourires.)
Par conséquent, vous pouvez nous raconter tout ce que vous voulez, les
situations ne sont pas égales, et je ne m'explique pas encore pourquoi le
Conseil constitutionnel, quand il a examiné la loi sur le PACS, n'a pas relevé
ce point, étant certes entendu que ceux qui ont conclu un PACS font une
déclaration, alors que les frères et soeurs n'en font pas. Cependant, au regard
des droits de succession, dans la mesure où le code général des impôts et
l'administration fiscale appréhendent les situations de fait - c'est une des
particularités du droit fiscal -, les uns et les autres méritent d'être traités
rigoureusement de la même manière.
Pour parler clair, et je suis sûr, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous
connaissez de tels cas dans les Vosges, il s'agit, la plupart du temps, de
personnes âgées habitant, souvent depuis toujours, dans des villages isolés ou
dans de vieux quartiers urbains. Frères et soeurs, ils, elles n'ont pas choisi,
contrairement à ceux qui concluent un PACS, cette situation de cohabitation :
elle leur a été généralement imposée par la vie, par les hasards de la vie, par
les malheurs de la vie.
Bien entendu, ces personnes, que l'on ne connaît pas dans les rédactions
parisiennes, ne retiennent guère l'attention !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est bien vrai, hélas !
M. Michel Charasse.
Elles n'ont pas de comité de défense !
M. Michel Mercier.
Exactement !
M. Michel Charasse.
Elles ne défilent pas dans la rue pour les
rave parties
ou pour quelque
autre fête bruyante et colorée. Elles restent chez elles, elles sont vieilles
et elles sont angoissées dans la perspective de ce qui se passera quand l'un
des deux va disparaître. Pourront-ils garder la maison familiale ? Parce que
c'est la maison ou l'appartement familial !
C'est une situation réelle dont nous ne pouvons pas nous désintéresser, sauf à
considérer que, lorsque la publicité paye, on fait le PACS mais, quand ce n'est
pas le cas, on ne le fait pas, et ce quelles que soient les réalités des
situations.
De tels cas existent dans les montagnes françaises, notamment dans les Vosges,
dans les villes, dans les campagnes ! Croyez-vous vraiment, monsieur le
secrétaire d'Etat, que les principes d'égalité qui sous-tendent la République
auront encore un sens pour ces gens modestes qui, au terme de leur vie, verront
un couple « pacsé » acheter une vieille masure dans le village, avec la
possibilité, au bout d'un temps très bref, d'obtenir un avantage fiscal
substantiel...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument !
M. Michel Charasse.
... leur permettant essentiellement de conserver le domicile commun, alors
que, eux, seront menacés par la précarité en raison d'une situation qu'ils
n'auront pas choisie, je le répète, et qui, de surcroît, n'est pas organisée
par la loi, comme dans le cas du PACS ?
Par conséquent, trop c'est trop ! Monsieur le secrétaire d'Etat, dès lors que
vous nous confirmez que la situation fiscale entre les fratries, d'une part, et
les personnes « pacsées », d'autre part, pour lesquelles, croyez-le bien, je
n'ai aucune aversion ni aucun mépris, n'est pas la même au regard des droits de
succession, il faut voter l'amendement de M. Marini ou celui du groupe
socialiste.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que celles de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je souhaite éviter au
Gouvernement de commettre une erreur. En effet, il a marqué, récemment, sa
sollicitude à l'endroit de personnes qui ont choisi d'organiser leur vie en
commun. Par conséquent, il a montré un intérêt à l'égard des personnes qui
rencontrent des problèmes particuliers, mais il les a exclues du dispositif -
très imparfait à mes yeux, mais tel n'est pas le sujet - qu'il a mis en
place.
Dans les réponses que vous nous avez données, monsieur le secrétaire d'Etat,
vous me semblez être passé à côté du vrai sujet. Vous nous avez parlé, en
effet, non pas des mutations par décès, mais des mutations anticipées,
c'est-à-dire par donation. En réalité, quand on connaît la situation des
personnes qui sont touchées, par exemple à Saint-Dié, dans les Vosges, à
Compiègne, ou même en Alençon, on sait qu'il importe d'organiser la
transmission par décès, qui est un événement qu'on ne peut pas anticiper.
Il est donc souhaitable de retenir le dispositif proposé par M. le rapporteur
général : il couvre précisément cet aléa extrême, celui de la fin de la vie,
dont on ne peut prévoir ni l'instant ni la difficulté. Personne ne comprendrait
que nous nous refusions à régler ce problème.
M. Michel Charasse.
Sauf le parisianisme !
M. Michel Mercier.
Exactement !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Monsieur Charasse, le Sénat
n'est pas à la botte du parisianisme et il va le montrer dans un instant !
M. Michel Charasse.
C'est parfait !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il n'est pas interdit au Gouvernement de promouvoir
les dispositions favorables aux donations que j'ai rappelées tout à l'heure. Il
est même tout à fait normal que je redise ici à quel point ces dispositions ont
constitué un progrès dans le cas de figure de la donation...
M. Michel Charasse.
Les « pacsés » ont les mêmes !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... qui n'est pas étendu, c'est exact, à l'ensemble
des droits de mutation à titre gratuit. Je dois par ailleurs indiquer, monsieur
le rapporteur général, monsieur le président de la commission des finances, que
cette réforme si évidente, si urgente et si nécessaire n'a pas été entreprise,
vous l'avez indiqué, depuis 1984. Par conséquent, tout le monde a donné, si je
puis dire, dans le travers que vous avez, comme M. Charasse, fustigé.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous sommes ici et maintenant !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Effectivement ! Aussi vais-je répondre ici et
maintenant ! A l'époque, vous étiez en charge des responsabilités et vous
souteniez des gouvernements qui, eux non plus, n'ont pas accédé à la demande,
même pressante et logique, que vous venez d'exposer.
M. Philippe Arnaud.
Maintenant, il y a le PACS !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous avons voté le PACS !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Cela étant dit, M. Charasse a su trouver des accents
forts et vrais en évoquant des situations concrètes que nous rencontrons, que
je rencontre, bien entendu, dans ma région ; elles existent également dans le
Puy-de-Dôme. Celles-ci méritent attention.
Afin d'étudier la possibilité de prendre à cette mesure, je souhaite que nous
nous accordions quelques jours pour approfondir la rédaction, la portée et le
coût d'un tel dispositif au vu des arguments, excellents, de M. Charasse et de
la logique développée par M. le président de la commission et par M. le
rapporteur général.
A titre conservatoire, je prends solennellement l'engagement de bien étudier
cette mesure. Nous aurons l'occasion de nous revoir sur cette question. Par
conséquent, je demande aux auteurs des amendements de bien vouloir les
retirer.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteurgénéral.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ce débat représente déjà une avancée conceptuelle.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il suffirait d'aller un peu plus loin. Quelle
est l'utilité de laisser les choses traîner en longueur, sinon pour laisser à
l'Assemblée nationale le bénéfice d'une attitude plus ouverte ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Ce n'est pas mon style !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Bien entendu ! Mais c'est la Haute Assemblée qui vous
demande, de façon quasi unanime, de bien vouloir ajuster cette situation dans
un sens d'équité pour des situations qui le méritent. Porter l'abattement à 375
000 francs, alors que, je le souligne, il s'élève à 375 000 francs pour les «
pacsés », répond à une préoccupation tout à fait générale. Il paraît vraiment
difficile que, sur un sujet aussi simple, des études, des concertations, des
rapports, des réunions de toute nature aboutissent à un résultat différent de
celui que le bon sens inspire.
Le souci de la commission est de contribuer, de manière constructive, à
l'évolution de la politique fiscale dans ce pays. Pour être à vos côtés dans
cette discussion, monsieur le secrétaire d'Etat, le Sénat doit voter à
l'unanimité l'amendement n° I-11 proposé par la commission.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
C'est ce que nous allons faire
!
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je vous remercie de votre soutien !
M. Michel Charasse.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je souhaite apporter une brève explication et dire à M. Pierret que je le
remercie de sa réponse.
Le texte fera l'objet d'une commission mixte paritaire ou d'une nouvelle
lecture si la commission mixte paritaire n'aboutit pas. Cette navette peut donc
être mise à profit pour conduire la réflexion que le Gouvernement vient
d'annoncer.
J'admets parfaitement qu'un minimum de concertation soit nécessaire entre M.
le secrétaire d'Etat et le reste du Gouvernement, puisque notre proposition
avait été écartée, par arbitrage du Premier ministre, au moment du vote de la
loi sur le PACS. Cela signifie qu'il faut effectivement reposer le problème au
niveau de l'exécutif. Je ne veux pas non plus que l'on puisse croire que M.
Pierret s'est trop avancé devant le Sénat, mais il a pris un engagement et, je
le connais, c'est un homme de parole. Monsieur le président, je vais donc, pour
simplifier, retirer mon amendement au bénéfice de celui de la commission
pourtant légèrement différent.
J'en profite pour faire une explication de vote sur l'amendement de la
commission. En effet, afin de ne pas gêner M. le secrétaire d'Etat, je propose
de sous-amender cet amendement en ajoutant après les mots : « Pour la
perception des droits de mutation par décès, il est effectué... », les mots : «
à compter d'une date fixée par la loi ». Cela signifie que le texte n'est pas
définitif et qu'il sera soumis à concertation.
M. le président.
Il n'est pas possible, monsieur Charasse, de déposer un sous-amendement en
coursd'explication de vote.
M. Michel Charasse.
Dans ce cas, je voterai l'amendement de M. Marini, à moins qu'il n'accepte de
rectifier son amendement dans le sens que je viens de suggérer.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Il y aura une nouvelle lecture
!
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tout cela sera perfectible et nous pourrons revoir le
dispositif au cours de la navette, comme l'a très bien dit M. Charasse, soit en
commission mixte paritaire, soit en nouvelle lecture. Par conséquent, votons
cet amendement, qui pour l'essentiel est bon, et nous verrons comment le sujet
progresse d'ici à la prochaine échéance.
M. le président.
L'amendement n° I-95 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-11, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 5.
Par amendement n° I-12, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La fin du second alinéa de l'article 754 A du code général des impôts
est ainsi rédigée : "... acquéreurs pour la part de sa valeur inférieure à 750
000 francs."
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du
paragraphe I est compensée à due concurrence par une majoration des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est un sujet que nous avons également fait
resurgir, si je puis m'exprimer ainsi, lors de la discussion du texte sur le
pacte civil de solidarité : il concerne les contrats d'acquisition en commun
d'un immeuble assortis d'une clause dite « de tontine ». Dès lors qu'il s'agit
de la résidence principale, il est nécessaire d'ajuster le seuil fiscal fixé
autrefois pour favoriser la transmission de cette résidence principale au
survivant des acquéreurs en commun.
Il convient de rappeler que l'article 754 A du code général des impôts prévoit
que, lorsqu'il s'agit d'immeuble de valeur inférieure à 500 000 francs au
moment du premier décès et qui sont affectés à l'habitation principale commune
aux deux acquéreurs, la part transmise au survivant est passible non pas des
droits de mutation à titre gratuit, mais des seuls droits de vente d'immeuble.
Ce seuil a été fixé en 1980. Il est donc indispensable de le revaloriser. La
commission propose de le faire passer à 750 000 francs, ce qui est très modéré
par rapport à l'évolution des prix de l'immobilier depuis 1980.
Ce système, issu de notre vieux droit civil, permet d'assurer aux deux
personnes vivant sous le même toit leur sécurité immobilière réciproque, de
telle sorte qu'il demeure usité, notamment en région parisienne et dans les
villes ou les zones dont le marché immobilier est actif.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Les biens recueillis en vertu d'une clause de tontine
insérée dans un contrat d'acquisition en commun sont réputés transmis à titre
gratuit à chacun des bénéficiaires de l'accroissement. Les droits sont liquidés
en application des principes généraux au tarif en vigueur au jour du décès et
en fonction du lien de parenté existant entre le défunt et le ou les
bénéficiaires de la clause de tontine.
Par exception, cette disposition ne s'applique pas à l'habitation principale
commune à deux acquéreurs lorsque celle-ci a une valeur globale inférieure à
500 000 francs. Dans ce cas, les biens recueillis en vertu d'une telle clause
sont assujettis aux droits de mutation à titre onéreux.
Comme l'a rappelé M. le rapporteur général, ce dispositif est issu de la loi
de finances pour 1980. Compte tenu des raisons qui ont motivé l'adoption de
cette mesure - à l'époque, l'institution d'un plafond de 500 000 francs avait
été rendu nécessaire par le développement des recours à ce type de disposition
qui favorisait l'évasion fiscale - le Gouvernement n'est favorable ni au
relèvement de la valeur de 500 000 francs fixée par le texte de 1980 ni à
l'institution d'une franchise pour l'application des droits de mutation à titre
onéreux. Il s'oppose donc à l'adoption de cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-12.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je voudrais que M. le secrétaire d'Etat nous explique
en quoi ce dispositif peut favoriser l'évasion fiscale et pour quelle raison
l'administration fiscale est impuissante pour réprimer les abus.
M. le président.
Monsieur le secrétaire d'Etat, souhaitez-vous répondre à M. le rapporteur
général ?
(M. le secrétaire d'Etat fait un signe de dénégation.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est éloquent !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-12, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 5.
Par amendement n° I-13, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 764
bis
du code général des impôts est ainsi rédigé
:
«
Art. 764
bis. - Par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de
l'article 761, il est effectué un abattement de 20 % sur la valeur vénale
réelle de l'immeuble constituant au jour du décès la résidence principale du
défunt lorsque, à la même date, cet immeuble est également occupé à titre de
résidence principale par le conjoint survivant ou par un ou plusieurs enfants
mineurs ou majeurs protégés du défunt ou de son conjoint ou, encore, par le
frère ou la soeur du défunt. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du
paragraphe I est compensée à due concurrence par une majoration des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article 764
bis
du code général des impôts,
créé par l'article 17 de la loi de finances pour 1999, a instauré, en matière
de droits de mutation à titre gratuit, un abattement de 20 % sur la valeur
vénale réelle de l'immeuble constituant au jour du décès la résidence
principale du défunt lorsque, à cette date, cet immeuble est également occupé à
titre de résidence principale par le conjoint survivant ou par un ou plusieurs
de ses enfants. Les fratries ont été exclues du bénéfice de cet abattement
lorsqu'elles occupent la même habitation.
Lors du débat sur la proposition de loi relative au pacte civil de solidarité,
nombre de nos collègues ont critiqué le régime de faveur établi pour les
personnes sans lien de parenté alors qu'aucune mesure n'était prévue pour les
fratries. Nous avons abordé ce point voilà quelques instants.
Dans la ligne de ce qui a été décidé tout à l'heure lors de l'examen de
l'amendement n° I-11, il vous est proposé, par le présent article additionnel,
d'étendre l'abattement forfaitaire de 20 % applicable à l'évaluation de la
résidence principale du défunt en matière de droits de mutation à titre gratuit
aux fratries cohabitant avant le décès.
Là aussi, mes chers collègues, il s'agit d'une simple mesure d'équité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement paraît relativement logique, monsieur
le rapporteur général. L'institution d'un abattement de 20 % sur la valeur
vénale réelle de la résidence principale du défunt lorsque celle-ci est
occupée, à la même date, par son conjoint ou ses enfants constitue une
dérogation importante au principe d'évaluation des biens prévu à l'article 761
du code général des impôts.
Vous proposez d'élargir cette faculté d'une évaluation favorable au regard de
la fiscalité applicable au frère ou à la soeur du
de cujus
. Selon la
Cour de cassation, seule l'occupation du bien au jour du décès par le conjoint
survivant ou les enfants du défunt est susceptible d'être prise en compte pour
l'évaluation de son bien. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'aller
au-delà, en appliquant un abattement sur la valeur de la résidence principale
du défunt occupée par un autre membre de son groupe familial.
Par ailleurs, si cette disposition était appliquée, elle aurait une
conséquence sur le rendement de l'impôt de solidarité sur la fortune, compte
tenu des récents arrêts de la Cour de cassation concernant l'évaluation des
biens immobiliers occupés à titre de résidence principal par des tiers.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-13, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 5. Par amendement n° I-14, M. Marini, au
nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 5, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le 6° du 2 de l'article 793 du code général des impôts, sont
insérés cinq alinéas ainsi rédigés :
« 7° Lors de leur première transmission à titre gratuit, les immeubles ou
fractions d'immeubles mentionnés à l'article 1594 F
ter
, à concurrence
des trois quarts de leur valeur, lorsque l'acquisition par le donateur ou le
défunt est constatée par acte authentique signé à compter du 1er janvier 1999
et qu'elle n'a pas donné lieu au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée.
« L'exonération est subordonnée à la condition que les immeubles aient été
donnés en location par le propriétaire dans les conditions prévues au cinquième
alinéa du
e
du 1° du I de l'article 31, pendant une période minimale de
neuf ans.
« La location doit avoir pris effet dans les six mois de l'acquisition de
l'immeuble.
« Lorsqu'au jour de la transmission à titre gratuit le délai de neuf ans n'a
pas expiré, le bénéfice de l'exonération est surbordonné à l'engagement des
donataires, héritiers ou légataires pour eux et leurs ayants cause de maintenir
en location, dans les mêmes conditions, les biens transmis jusqu'à l'expiration
de ce délai.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application des
dispositions du présent 7°, notamment les obligations déclaratives incombant
aux redevables et pièces justificatives à fournir lors de la transmission
mentionnée au premier alinéa. »
« II. - A l'article 793
ter
du code général des impôts, les mots : "et
6°" sont remplacés par les mots : ", 6° et 7°".
« III. - A l'article 793
quater
du code général des impôts, après les
mots : "du 6°" sont insérés les mots : "ou du 7°".
« IV. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat des dispositions des
paragraphes I à III ci-dessus sont compensées, à due concurrence, par un
relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le présent article additionnel a pour objet de
permettre une exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit pour
les immeubles donnés en location, pendant neuf ans, dans les conditions fixées
par le régime dit Besson en faveur du logement ancien.
L'exonération partielle des droits de première mutation à titre gratuit en
faveur des logements locatifs anciens affectés à la résidence principale de
ménages répondant à certaines conditions de ressources a été adoptée dans le
cadre de la loi de finances rectificative pour 1995, sur l'initiative de M.
Alain Lambert, alors rapporteur général.
Le présent article reprend la philosophie de ce dispositif, qui visait à
exonérer les logements locatifs anciens des droits de première mutation à titre
gratuit, en les appliquant aux logements anciens qui entrent dans le nouveau
dispositif Besson.
En prévoyant une déduction forfaitaire majorée, 25 % au lieu de 14 %, le
nouveau régime fiscal ne donne pas une incitation suffisante par rapport au
régime fiscal en faveur du logement neuf.
Ainsi, pour un contribuable situé dans la tranche maximale d'imposition de 54
% qui décidrait de réaliser un investissement de un million de francs pour un
logement locatif, on observerait un écart de rendement de 30 % entre l'avantage
fiscal pour le neuf et l'avantage fiscal pour l'ancien.
Il convient de développer le secteur locatif conventionné et de rendre plus
attractif le dispositif fiscal en faveur de l'amélioration et du bon usage du
patrimoine de logements anciens.
Lors de la transmission d'un bien immobilier, les droits de mutation à titre
gratuit ont souvent pour effet d'obliger les héritiers ou les légataires à
vendre le bien afin de payer ces droits, si bien que l'immeuble sort du parc
locatif.
Cet article additionnel, en proposant une exonération partielle des droits de
première transmission pour les logements anciens nouvellement conventionnés,
permet de donner un signe positif aux investisseurs afin qu'ils s'engagent plus
facilement dans la location de logements à caractère intermédiaire.
Du point de vue de l'urbanisme, monsieur le secrétaire d'Etat, vous qui êtes
maire d'une ville moyenne, vous serez sans doute sensible à cet amendement. En
effet, il est bon d'inciter, par ce moyen, à la revalorisation du patrimoine
bâti, notamment des centres-villes, de faire en sorte qu'il demeure équilibré
socialement et qu'il puisse recevoir dans le cadre d'opérations d'amélioration
et de réhabilitation du patrimoine des familles de condition moyenne
susceptibles d'entrer dans les critères de ressources du dispositif Besson.
Il n'y a aucune raison d'avoir des dispositions de fiscalité immobilière qui,
de manière systématique, avantagent de façon excessive le logement neuf par
rapport au logement ancien.
Si on le faisait de manière trop systématique, on serait fondé à s'interroger
sur les biais ou sur le parti pris qui conduisent à des situations qui, à nos
yeux, ne sont pas toujours équitables.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'idée de M. le rapporteur général est de favoriser
les acquisitions de logements locatifs anciens réalisées à compter du 1er
janvier 1999.
Je dois rappeler, monsieur le rapporteur général, que l'article 31-1 du code
général des impôts, auquel vous faites référence, institue déjà une incitation
fiscale qui me paraît suffisante au regard de l'impôt sur le revenu pour les
propriétaires bailleurs.
Par ailleurs, les dispositions prises dans le passé en matière de droits de
mutation à titre gratuit au profit des immeubles neufs ou anciens donnés en
location ne pouvaient profiter qu'à des biens pour lesquels les avantages
accordés en matière d'impôt sur le revenu n'avaient pas été utilisés. Le
non-cumul des avantages fiscaux est un principe auquel il ne faut pas déroger.
Aussi, je vous demande de retirer cet amendement, car je suis convaincu que
vous êtes d'accord avec ce principe.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Lambert,
président de la commission de finances.
Je voudrais insister sur
l'importance de ce dispositif. Si, lorsqu'il a été en vigueur pendant un an et
demi, il n'a pas connu un grand succès, c'est parce que le marché de
l'immobilier était étale.
Vous l'avez rappelé hier, il est très dynamique en ce moment. C'est sans doute
l'occasion - je me tourne vers mes collègues de la province - d'aider à la
réhabilitation massive, quasi intégrale, du parc immobilier ancien vétuste de
nos belles régions. Il est beaucoup plus intelligent de s'y prendre de cette
manière, au lieu d'implanter aux alentours de nos magnifiques bourgs des
pavillons industrialisés qui défigurent le paysage.
Il s'agit en particulier, comme le disait très bien voilà un instant M. le
rapporteur général, de faire en sorte que, à l'occasion de l'ouverture d'une
succession, lorsque le bien se trouve indivis et qu'il est plus ou moins
abandonné par les héritiers, un acquéreur s'intéresse à ce bien pour le rénover
et le remettre sur le marché locatif. Il ne s'agit pas, comme voudrait le
laisser entendre M. le secrétaire d'Etat, d'offrir à cet acquéreur une sorte
d'avantage fiscal inconsidéré. En effet, il aurait sans doute intérêt, sur le
plan économique et patrimonial, à acquérir un appartement dans le VIe
arrondissement de Paris plutôt que dans le Cantal ou dans l'Orne. Mais ce qui
est important, c'est d'essayer de le convaincre de remettre le logement sur le
marché locatif, au bénéfice des personnes qui peuvent obtenir un
conventionnement, c'est-à-dire des personnes de condition modeste.
Sur le fond, monsieur le secrétaire d'Etat, il s'agit de savoir si la
philosophie du Gouvernement est que le parc social, dans notre pays, doit être
exclusivement détenu par la puissance publique. L'Etat et ses organismes
logeurs publics doivent-ils être les seuls à mettre des logements à la
disposition des Français les plus modestes, ou faut-il au contraire encourager
nos compatriotes à investir leur épargne dans le secteur immobilier locatif ?
Je crois que c'est la seconde voie qui doit être suivie, et c'est la raison
pour laquelle je vous invite vivement, mes chers collègues, à adopter cet
amendement.
M. François Trucy.
Très bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il ne me paraît pas de bonne gestion fiscale de faire
peser sur le contribuable le coût des incitations qui doivent être naturelles
dans la gestion du patrimoine immobilier de la part des propriétaires des
patrimoines anciens dont nous parlons.
Il existe déjà un certain nombre de dispositions favorables. Par exemple,
s'agissant des droits de mutation à titre onéreux, le neuf est taxé au taux
normal de TVA et l'ancien à 4,8 %, grâce à l'article 5 dont nous avons discuté.
Je rappelle l'effort de 20 milliards de francs que le Gouvernement vous propose
en abaissant au taux réduit, à 5,5 %, la TVA sur les travaux de rénovation
concernant les immeubles.
Un ensemble très complet, ordonné autour de l'objectif de l'emploi est mis en
oeuvre. Il ne convient pas de rajouter constamment une couche supplémentaire
d'avantages fiscaux. Il faut rester raisonnable. Il faut également donner aux
propriétaires de patrimoine immobilier la responsabilité d'une gestion saine,
dynamique, tournée vers l'avenir de ce patrimoine, et non pas substituer en
permanence la sollicitation qui est faite aux contribuables à la responsabilité
de bonne gestion, de gestion de croissance, qui doit être celle des
propriétaires de ce type de patrimoine. Sincèrement, nous nous égarerions si
nous allions dans le sens que vous préconisez.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Vos services n'ont jamais aimé
le logement ancien ! Ils ne croient qu'au logement neuf !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-14, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 5.
Par amendement n° I-15, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la seconde phrase du II de l'article 36 de la loi de finances pour
1999 (loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998), les mots : "25 novembre 1998 et le
31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "1er janvier 2000 et le 31
décembre 2001".
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I
ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des droits prévus
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit de la prolongation du régime instaurant une
réduction de 30 % sur les donations sans limite d'âge. Cet amendement, qui vise
à insérer un article additionnel, a effectivement pour objet de prolonger le
régime transitoire instauré sur notre initiative dans la loi de finances de
1999.
Il convient de rappeler que ce régime a été créé à titre transitoire et qu'il
vient à expiration au 31 décembre 1999. Or, monsieur le secrétaire d'Etat, en
l'absence d'une réforme générale que nous attendons toujours sur les droits de
mutation, qui tiendrait compte des évolutions de la société et allégerait les
prélèvements sur la transmission du patrimoine, il paraît nécessaire de
prolonger de deux ans ce régime.
En effet, si l'on tient compte des tables d'espérance de vie établies par
l'INSEE, une personne de soixante-quinze ans dispose à l'heure actuelle encore
de sept ans pour organiser sa succession, si c'est un homme, et de douze ans,
s'il s'agit d'une femme, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir.
Par ailleurs, une partie encore importante des patrimoines est détenue par des
personnes âgées de plus de soixante-quinze ans. Il est donc nécessaire
d'inciter ces personnes à organiser la transmission de leur patrimoine afin de
dynamiser la gestion et l'entretien des biens pour assurer le devenir des
générations futures. Cette mesure doit être rapprochée des dispositions de
l'article 5
bis
du projet de loi de finances pour 2000 tendant à
promouvoir la transmission des entreprises.
Il est rappelé, nous le verrons tout à l'heure, que cet article a pour objet
d'exonérer des droits de succession 50 % des parts et actions de sociétés, sous
réserve que leurs propriétaires se soient engagés à les conserver dans
certaines conditions.
Mes chers collègues, il est indispensable que la fiscalité des transmissions
de patrimoine soit modernisée et rendue plus équitable, en particulier pour les
petites successions lorsqu'il ne s'agit pas de relations familiales en ligne
directe. L'application de nos barèmes entraîne des effets spoliateurs auxquels
il faudrait absolument mettre fin.
La prolongation du régime transitoire proposée par la commission s'appliquant,
je le rappelle, aux donations, c'est-à-dire à l'organisation volontaire de la
succession, paraît nécessaire pour progresser dans le sens de l'équité.
M. Emmanuel Hamel.
Progressons !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement partage le souhait de M. le rapporteur
général d'octroyer un nouveau délai aux personnes âgées de plus de
soixante-quinze ans pour les encourager à effectuer, le cas échéant, la
répartition de leur patrimoine en faveur de leurs ayants droit.
M. Roland du Luart.
Très bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le délai nécessaire qui, je le rappelle, expire le 31
décembre 1999, n'a pas permis à nombre de ces personnes pour lesquelles les
démarches notariées sont complexes et qui n'ont pas été suffisamment informées,
malgré nos efforts de procéder à des donations.
Je reçois d'ailleurs, comme vous, monsieur le rapporteur général, des échos
venant des études de notaires faisant apparaître en cette fin d'année une sorte
de panique, une précipitation, chez les personnes âgées désireuses de
bénéficier des dispositions favorables que vous avez acceptées, sur proposition
du Gouvernement, lors de la discussion de la loi de finances de 1999.
J'accepte votre proposition, monsieur le rapporteur général, afin d'encourager
ces donations ou ces mutations à titre gratuit qui bénéficieront du taux de 30
% lorsqu'elles seront passées entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2001
par des donateurs de plus de soixante-quinze ans.
MM. Roland du Luart et François Trucy.
Très bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
J'indique au Sénat que je lève le gage qui est attaché
à cette disposition favorable, dont je vous remercie. Elle témoigne, une fois
de plus, de la grande convergence qui se dégage lorsque nous examinons le cas
des personne âgées, en particulier des plus modestes d'entre elles.
M. Michel Moreigne.
Très bien !
M. Roland du Luart.
Ce sujet fait en effet l'unanimité !
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° I-15 rectifié.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-15 rectifié, accepté par le
Gouvernement.
M. Thierry Foucaud.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 5.
Par amendement n° I-230, MM. Gaillard, Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont,
Delong, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 5,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 41 du code général des impôts est complété par un paragraphe
ainsi rédigé :
«
III. -
1. En cas de transmission à titre gratuit avec ou sans soulte
d'éléments d'actif immobilisé affectés à l'exercice de la profession à un ou
plusieurs héritiers ou successibles possédant un lien de parenté jusqu'au
troisième degré inclus, les plus-values constatées sont exonérées à hauteur de
75 % si le bénéficiaire de la transmission prend l'engagement de ne pas céder
ces biens à titre onéreux avant l'expiration d'un délai de dix ans et s'il
utilise les biens dans l'exercice de soli activité professionnelle.
« 2. Lorsque le bénéficiairede la transmission n'est pas un héritier ou un
successible possédant un lien de parenté jusqu'au troisième degré inclus mais a
le statut de jeune agriculteur, le taux de l'exonération est ramené à 25 % dans
la limite de 3 millions de francs. Un décret fixe les modalités d'application
du présent alinéa.
« 3. En cas de cession à titre onéreux dans le délai de dix ans, les
plus-values exonérées en vertu des paragraphes 1 et 2 sont réintégrées dans les
bénéfices de l'exercice en cours.
« II. - Après le deuxième alinéa du 3 de l'article 201 du code général des
impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de transmission à titre gratuit avec ou sans soulte, les stocks sont
évalués conformément aux dispositions du 3 de l'article 38. »
« III. - Le II de l'article 151
nonies
du code général des impôts est
ainsi rédigé :
«
II. -
1. En cas de transmission à titre gratuit avec ou sans soulte
de droits sociaux considérés, en application du I, comme des éléments d'actif
affectés à l'exercice de la profession, au profit d'un ou plusieurs héritiers
ou successibles possédant un lien de parenté jusqu'au troisième degré inclus,
les plus-values constatées sont exonérées à hauteur de 75 % dans la limite de 3
millions de francs si le bénéficiaire de la transmission prend l'engagement de
ne pas céder ces droits à titre onéreux avant l'expiration d'un délai de dix
ans et s'il exerce son activité professionnelle dans la société.
« 2. Lorsque le bénéficiaire de la transmission n'est pas un héritier ou un
successible possédant un lien de parenté jusqu'au troisième degré inclus mais a
le statut de jeune agriculteur, le taux de l'exonération est ramené à 25 % dans
la limite de 3 millions de francs. Un décret fixe les modalités d'application
du présent alinéa.
« 3. En cas de cession à titre miséreux dans le délai de dix ans, les
plus-values exonérées en vertu des paragraphes 1 et 2 sont réintégrées dans les
bénéfices de l'exercice en cours.
« IV. - L'éventuelle perte des recettes pour le budget de l'Etat résultant des
I à III est compensée par le relèvement à due concurrence des droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Il s'agit d'une amélioration du système de mutation à titre gratuit d'éléments
d'actifs ou de parts sociales affectés à un exercice professionnel.
Il est rappelé dans l'exposé des motifs que la mutation à titre gratuit, qui
est exclusive de tout flux financier, supporte pourtant une double taxation au
titre des droits de mutation et au titre des plus-values.
Cette taxation peut entraîner, dans certains cas, un risque de liquidation
d'une partie des actifs de l'entreprise. Certes, la loi avait déjà prévu des
dispositions permettant et facilitant la transmission des entreprises
individuelles comme des parts de société de personnes dans les articles 41 et
151
nonies
du code général des impôts. Mais l'impossibilité de procéder
à une division fait échec à l'application de ces dispositions, d'où les
améliorations qui sont proposées.
D'abord, en ce qui concerne la transmission à titre gratuit d'éléments
d'actifs immobilisés affectés à l'exercice de la profession à un ou plusieurs
héritiers jusqu'au troisième degré inclus, les plus-values constatées seraient
exonérées à hauteur de 75 %, à condition bien sûr que le bénéficiaire de la
transmission prenne l'engagement de ne pas céder ses biens à titre onéreux
avant l'expiration d'un délai de dix ans. S'il les cède, il y aurait, bien sûr,
réintégration.
Ensuite, une disposition certes incidente, mais importante pour la fiscalité
agricole, prévoit que, même lorsqu'il n'y a pas d'appartenance à la famille et
de degré de parenté, une exonération est possible lorsque le bénéficiaire de
cette mutation a le statut de jeune agriculteur. Le taux de l'exonération
serait dans ce cas ramené à 25 % dans la limite de 3 millions de francs. Un
dispositif analogue est proposé dans la deuxième partie de l'amendement pour
les droits sociaux.
Tel est l'objet de cet amendement n° I-230 que nous avons présenté avec un
certain nombre de nos collègues du groupe du RPR.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est un sujet intéressant, sur lequel la commission
désire entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cette
disposition, car son application aboutirait à une exonération définitive de la
majeure partie des plus-values constatées à l'occasion de la transmission à
titre gratuit d'entreprises lorsqu'elles sont exploitées directement ou au
travers de sociétés de personnes.
En effet, je rappelle que le régime de faveur qu'il est proposé de modifier,
celui de l'article 41 du code général des impôts et du II de l'article 151
nonies
du même code, vise à faciliter la transmission à titre gratuit
dans le cadre strictement familial des entreprises en permettant que
l'imposition des plus-values résultant de leur cession ou cessation d'activité,
qui est en principe immédiate, soit reportée à la date à laquelle les biens
transmis seront cédés par le nouvel exploitant, qui disposera alors des
liquidités nécessaires pour y faire face. Le nouvel exploitant prend
l'engagement que je viens d'énoncer.
Ce régime n'a donc pas pour objet d'exonérer définitivement les plus-values,
mais bien de les reporter lorsqu'elles apparaîtront à l'occasion d'une autre
transmission pour laquelle la personne concernée s'engage. L'exonération ne
serait pas légitime dès lors que les plus-values traduiraient l'accroissement
du patrimoine de l'exploitant.
En outre, la mesure consistant à reporter les profits sur stocks constatés
lors de la transmission à titre gratuit des entreprises, quelle que soit la
qualité du bénéficiaire de la transmission, n'est pas acceptable. Un tel report
ne se justifie, en effet, que par la poursuite de l'activité dans un cadre
strictement familial, ce qui est bien précisé par l'article 41 du code général
des impôts.
Je rappelle par ailleurs que la transmission d'exploitation agricole fait
également l'objet d'un examen dans le cadre du rapport de Mme Béatrice Marre.
Il est prématuré de légiférer sur cette question sans attendre les conclusions
de ce rapport.
Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je crains de rejoindre le Gouvernement dans une bonne
partie de son analyse.
L'article 151
nonies
du code général des impôts prévoit déjà un report
d'imposition de la plus-value jusqu'à la mutation ultérieure du bien. Voilà qui
semble répondre au moins dans une large mesure aux préoccupations qui ont été
exprimées.
Par ailleurs, l'amendement subordonne l'application du dispositif à
l'engagement pris par les héritiers bénéficiaires dudit dispositif de ne pas
céder les biens transmis pendant dix ans et de les utiliser dans le cadre de
l'exercice de leur activité professionnelle. Ces biens, je le rappelle, sont
des éléments d'actif immobilisés affectés à l'exercice d'une profession
notamment agricole.
Cet engagement de conserver pendant dix ans les biens transmis et de continuer
de les affecter à l'usage professionnel pendant dix ans est-il bien réaliste
dans l'état actuel de l'évolution des techniques ?
Cette simple interrogation ainsi que à certains des éléments évoqués par M. le
secrétaire d'Etat devraient conduire à un examen en profondeur du problème qui
se pose réellement, mais que l'amendement n° I-230 ne semble pas traiter de
manière absolument définitive et incontestable.
Aussi me paraît-il préférable qu'il soit retiré et que le problème fasse
l'objet d'une étude plus approfondie.
M. le président.
Monsieur Gaillard, accédez-vous à la demande de M. le rapporteur général ?
M. Yann Gaillard.
Je vais bien entendu retirer cet amendement.
Je souhaite toutefois qu'à l'issue de cette brève discussion ce problème non
négligeable soit mis dans la besace de Mme Béatrice Marre. Nous pourrons ainsi
en discuter à nouveau lorsque le Gouvernement nous fera des propositions sur la
base des résultats de son étude.
M. le président.
L'amendement n° I-230 est retiré.
Par amendement n° I-84, MM. Fréville et Branger proposent d'insérer, après
l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 790 du code général des impôts est complété par l'alinéa
suivant : "S'agissant de donations relatives aux titres ou parts de sociétés,
une réduction de 50 % des droits est appliquée quel que soit l'âge du donateur,
à la condition que le donateur et le ou les donataires prennent l'engagement de
conserver ces titres ou parts de société pendant huit ans.
« II. - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée à due
concurrence par le relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts. »
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Puisque l'amendement de la commission relatif aux donations a été tout à
l'heure adopté et comme l'amendement n° I-84 a un objet voisin, je le
retire.
M. le président.
L'amendement n° I-84 est retiré.
Article 5
bis
M. le président.
« Art. 5
bis
. _ I. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un
article 789 A ainsi rédigé :
«
Art. 789 A
. _ Sont exonérées de droits de mutation par décès, à
concurrence de la moitié de leur valeur, les parts ou les actions d'une société
ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale
si les conditions suivantes sont réunies :
«
a.
Les parts ou les actions mentionnées ci-dessus doivent faire
l'objet d'un engagement collectif de conservation d'une durée minimale de huit
ans en cours au jour du décès, qui a été pris par le défunt, pour lui et ses
ayants cause à titre gratuit, avec d'autres associés ;
«
b.
L'engagement collectif de conservation doit porter sur au moins 25
% des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la
société s'ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou, à
défaut, sur au moins 34 %, y compris les parts ou actions transmises.
« Ces pourcentages doivent être respectés tout au long de la durée de
l'engagement collectif de conservation.
« L'engagement collectif de conservation est opposable à l'administration à
compter de la date de l'enregistrement de l'acte qui le constate.
« Pour le calcul des pourcentages prévus au premier alinéa, il est tenu compte
des titres détenus par une société possédant directement une participation dans
la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de
conservation visé au
a
et auquel elle a souscrit.
« La valeur des titres de cette société qui sont transmis par décès bénéficie
de l'exonération partielle à proportion de la valeur réelle de son actif brut
qui correspond à la participation ayant fait l'objet de l'engagement collectif
de conservation ;
«
c.
Chacun des héritiers, donataires ou légataires prend l'engagement
dans la déclaration de succession, pour lui et ses ayants cause à titre
gratuit, de conserver les parts ou les actions transmises pendant une durée de
huit ans à compter de la date d'expiration du délai visé au
a
.
« En cas de démembrement de propriété, l'engagement de conservation est signé
conjointement par l'usufruitier et le nu-propriétaire. En cas de réunion de
l'usufruit à la nue-propriété, le terme de l'engagement de conservation des
titres dont la pleine propriété est reconstituée demeure identique à celui
souscrit conjointement ;
«
d.
L'un des associés mentionnés au
a
ou l'un des héritiers,
donataires ou légataires mentionnés au
c
exerce effectivement dans la
société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de
conservation, pendant les cinq années qui suivent la date de la transmission
par décès, son activité professionnelle principale si celle-ci est une société
de personnes visée aux articles 8 et 8
ter,
ou l'une des fonctions
énumérées au 1° de l'article 885 O
bis
lorsque celle-ci est soumise à
l'impôt sur les sociétés, de plein droit ou sur option ;
«
e.
La déclaration de succession doit être appuyée d'une attestation
de la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif
de conservation certifiant que les conditions prévues aux
a
et
b
ont été remplies jusqu'au jour du décès.
« A compter du décès et jusqu'à l'expiration de l'engagement collectif de
conservation visé au
a,
la société doit en outre adresser, dans les
trois mois qui suivent le 31 décembre de chaque année, une attestation
certifiant que les conditions prévues aux
a
et
b
sont remplies au
31 décembre de chaque année.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent
article, notamment les obligations déclaratives incombant aux redevables et aux
sociétés. »
« II. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 789 B ainsi
rédigé :
«
Art. 789 B
. _ Sont exonérés de droits de mutation par décès, à
concurrence de la moitié de leur valeur, l'ensemble des biens meubles et
immeubles, corporels ou incorporels affectés à l'exploitation d'une entreprise
individuelle ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole
ou libérale si les conditions suivantes sont réunies :
«
a.
L'entreprise individuelle mentionnée ci-dessus a été détenue
depuis plus de trois ans par le défunt lorsqu'elle a été acquise à titre
onéreux ;
«
b.
Chacun des héritiers, donataires ou légataires prend l'engagement
dans la déclaration de succession, pour lui et ses ayants cause à titre
gratuit, de conserver l'ensemble des biens affectés à l'exploitation de
l'entreprise pendant une durée de huit ans à compter de la date du décès.
« En cas de démembrement de propriété, l'engagement de conservation est signé
conjointement par l'usufruitier et le nu-propriétaire. En cas de réunion de
l'usufruit à la nue-propriété, le terme de l'engagement de conservation de
l'ensemble des biens dont la pleine propriété est reconstituée demeure
identique à celui souscrit conjointement ;
«
c.
L'un des héritiers, donataires ou légataires mentionnés au
b
poursuit effectivement pendant les cinq années qui suivent la date de
la transmission par décès l'exploitation de l'entreprise individuelle. »
« III. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 1840 G
nonies
ainsi rédigé :
«
Art. 1840 G
nonies
. _ En cas de manquement aux engagements
pris par un héritier, donataire ou légataire dans les conditions prévues aux
c
de l'article 789 A et
b
de l'article 789 B, celui-ci ou, le cas
échéant, ses ayants cause à titre gratuit sont tenus d'acquitter le complément
de droits de mutation par décès, majoré de l'intérêt de retard prévu à
l'article 1727 et, en outre, un droit supplémentaire égal à la moitié de la
réduction consentie. »
« IV. _ Au premier alinéa de l'article 885 H du code général des impôts, après
les mots : "droits de mutation par décès par", sont insérés les mots : "les
articles 789 A et 789 B,". »
Par amendement n° I-16, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose :
I. - Dans le deuxième
(a)
et le huitième
(c)
alinéas du texte
présenté par le paragraphe I de cet article pour l'article 789 A du code
général des impôts, de remplacer (deux fois) les mots : « huit ans » par les
mots : « cinq ans ».
II. - En conséquence, de procéder au même remplacement dans le troisième
alinéa du texte présenté par le paragraphe II de cet article pour l'article 789
B du code précité.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous abordons une
disposition qui peut, dans certaines conditions, représenter une avancée
sérieuse au bénéfice des entreprises puisque l'article 5
bis
qui a été
introduit à l'Assemblée nationale institue, au regard des droits de mutation,
un abattement de 50 % sur la valeur des titres ou des biens d'une entreprise
qui sont transmis par décès.
Il convient de rappeler qu'une disposition de même nature avait été adoptée
dans la loi de finances pour 1996, avec l'avis favorable de votre commission,
mais qu'elle avait été annulée par le Conseil constitutionnel à cause de sa
rédaction.
Cette fois-ci, les auteurs de l'article 5
bis
, forts de cette
expérience, ont préparé un texte qui semble répondre aux conditions de la
jurispridence du Conseil constitutionnel, au moins telle qu'elle est
actuellement formulée. En effet, l'octroi de l'avantage fiscal est, ici, soumis
à des conditions assez strictes.
En premier lieu, le donateur et ses associés doivent préalablement s'engager
collectivement à conserver pendant huit ans au moins un montant de titres
suffisant pour contrôler l'entreprise, c'est-à-dire un taux de détention
globale par les actionnaires ainsi liés de 25 % des droits financiers ou des
droits de vote attachés aux titres pour les sociétés cotées et de 34 % pour les
sociétés non cotées.
En deuxième lieu, les héritiers doivent eux-mêmes conserver les titres
transmis pendant huit ans à compter de la fin du délai précédent. La propriété
des biens transmis est donc gelée pendant seize ans.
C'est un point sur lequel nous reviendrons car, dans la vie économique
actuelle, on peut s'interroger sur le réalisme d'une telle disposition. Seize
ans ! Qui, aujourd'hui, dans le monde de l'entreprise, peut y voir clair dans
cette perspective ? Même si l'on atteint l'âge de se retirer, il faut penser à
la suite, il faut penser aux autres et s'interroger sur la visibilité de
l'entreprise et de sa détention pendant deux fois huit ans !
En troisième lieu, l'un des associés ou l'un des héritiers, donataires ou
légataires doit, durant les cinq années suivant la date de la transmission par
décès, assurer - et c'est bien ! - une fonction de direction de
l'entreprise.
Cet amendement n° I-16 a pour objet de réduire les délais minimaux de
détention des titres qui subordonnent l'octroi de l'avantage fiscal. Par
conséquent, dans le sens du réalisme que j'évoquais précédemment, il vise à
substituer deux fois cinq ans à deux fois huit ans. Il semble que l'on serait
ainsi un peu plus proche des nécessités économiques.
De plus, cet amendement a l'avantage d'aligner le délai pendant lequel les
héritiers ne pourront céder leurs titres sur la durée du sursis d'imposition
actuellement octroyé en matière de droits de mutation.
Enfin, notre formule est plus réaliste s'agissant du gel des biens d'une
entreprise individuelle. Comment est-il envisageable de contraindre le
propriétaire d'une exploitation individuelle à conserver tous les biens
nécessaires à l'exploitation pendant une durée minimale de huit ans ?
Pour l'ensemble des considérations que j'ai développées et reconnaissant un
caractère d'avancée positive à l'article 5
bis
introduit par l'Assemblée
nationale, la commission des finances préconise d'améliorer cette disposition
dans le sens du réalisme.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Comme toujours, monsieur le rapporteur général, vous
avez été extrêmement clair dans la rédaction du dispositif que vous
proposez.
Votre amendement tend à diminuer de trois ans les délais de conservation des
entreprises transmises par succession, selon le dispositif adopté en première
lecture à l'Assemblée nationale. Ce dispositif n'a d'ailleurs pas été adopté
sur proposition gouvernementale, monsieur le rapporteur général : vous
m'excuserez de rectifier vos propos sur ce point, mais la Haute Assemblée sera
certainement heureuse d'entendre que c'est bien un amendement d'origine
parlementaire, déposé par votre collègue M. Migaud, qui est à l'origine de
cette mesure.
Si nous vous suivions, monsieur le rapporteur général, les biens ou les titres
représentatifs d'une entreprise transmis par succession seraient conservés, en
définitive, pendant un délai de dix ans par le défunt et ses héritiers.
La rédaction actuelle cherche à concilier la stabilité de l'actionnariat - or
vous y êtes, je crois, sensible - et les contraintes juridiques qui résultent
de la décision du Conseil constitutionnel du 28 décembre 1995, laquelle a eu
pour objet d'établir un équilibre, une proportionnalité entre l'engagement à
prendre par le défunt et ses héritiers et l'avantage fiscal dont l'engagement
doit être la garantie.
Cela étant, je suis assez sensible à ce que vous dites : seize ans, dans la
vie d'une entreprise soumise à une évolution technologique qui change tous les
dix-huit mois,...
M. Roland du Luart.
C'est beaucoup !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... cela peut-être considéré comme long. Mais il faut
que ce dispositif vive et qu'on l'apprécie à la lumière de l'expérience.
Quoi qu'il en soit, l'existence d'un engagement de conservation des titres
transmis pendant une durée totale de seize ans lorsque l'entreprise a une forme
sociale est l'expression d'une volonté, qui doit être redite ici, de lier le
sort du patrimoine des héritiers au devenir de l'entreprise.
Il en est de même en présence d'une entreprise individuelle.
Je ne crois donc pas qu'il soit opportun de réduire les délais de conservation
imposés aux parties : cela fragiliserait encore davantage le dispositif du
point de vue constitutionnel, puisqu'il serait ainsi en rupture avec
l'équilibre souhaité par le juge constitutionnel.
Au bénéfice de ces explications, monsieur le rapporteur général, et parce que
je suis sensible à l'idée de favoriser la stabilité de l'actionnariat, à l'idée
de faciliter la transmission des entreprises, à l'idée d'assurer, au regard des
objectifs de l'emploi, une transmission des entreprises sans traumatismes qui
coûteraient cher à l'emploi, entreprises et aux actionnaires, mais aussi parce
que mon objection constitutionnelle est forte, je vous demanderai de bien
vouloir retirer votre amendement.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, sur le plan
constitutionnel, je ne puis partager votre appréciation, car le dispositif de
la loi de finances de 1996 prévoyait un délai de cinq ans ; la commission
propose de porter ce délai à deux fois cinq ans, soit dix ans.
Par ailleurs, dans la loi de finances de 1996, il n'y avait pas de conditions
relatives à l'exercice de fonctions de direction dans l'entreprise. Or je crois
que c'était ce point-là qui, sur le plan juridique, était essentiel s'agissant
de la bonne application du principe d'égalité.
Vous savez que, dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, l'égalité
doit s'appliquer à des personnes qui se trouvent dans la même situation, ou du
moins dans des situations équivalentes. Or il a différence de nature entre le
fait d'être un tiers par rapport à la société - un simple investisseur,
finalement - et le fait d'être un dirigeant de l'entreprise ou d'exercer une
responsabilité professionnelle réelle au sein de la direction de
l'entreprise.
Dans ces conditions, je ne crois pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que le
fait de diminuer, dans un souci de réalisme, de deux fois huit ans à deux fois
cinq ans les délais d'indisponibilité des titres puisse être de nature à
changer l'appréciation constitutionnelle.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je ne veux pas prolonger le débat avec cette
discussion très technique, mais, si le juge constitutionnel a, en effet, évoqué
la nécessité de l'exercice de fonctions de dirigeant dans l'entreprise, il a
également visé l'équilibre et la proportionnalité de l'engagement dans
l'entreprise par rapport aux avantages procurés.
Je suis donc à peu près certain que l'objection constitutionnelle est forte,
monsieur le rapporteur général, et que nous serions bien avisés, vous comme
moi, de remettre l'ouvrage sur le métier afin d'affiner le dispositif au regard
de cette contrainte posée en 1995 par le juge constitutionnel.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-16.
M. Paul Loridant.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs de la majorité
sénatoriale, vous qui brocardez volontiers la majorité plurielle qui soutient
le Gouvernement, vous êtes bien obligés d'admettre, je le constate, que vous
êtes en présence d'une belle initiative émanant de parlementaires de gauche, en
l'occurrence du rapporteur de l'Assemblée nationale, lequel affiche sa
préoccupation de la survie des entreprises. Cela vient un peu en contrepoint
des observations que vous faites, les uns et les autres, sur l'incapacité de la
gauche à connaître la réalité des entreprises !
Ensuite, s'agissant de l'objection constitutionnelle soulevée par M. le
secrétaire d'Etat, je pense que la Haute Assemblée est suffisamment attentive
et avertie des prises de position du Conseil constitutionnel pour que
l'argument avancé par M. le secrétaire d'Etat soit pris en considération.
A la réduction très importante des droits de mutation, opérée de façon
dérogatoire, doivent nécessairement correspondre des contreparties ! Or, de ce
point de vue, le délai de huit ans que vous contestez, monsieur le rapporteur
général, est aujourd'hui quasiment normal.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ah bon ?
M. Paul Loridant.
Mais si ! Ainsi, pour sortir sans être fiscalisé d'un plan d'épargne en
actions, d'un plan d'épargne populaire ou d'un contrat d'assurance vie...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mais, dans le cas présent, ce ne sont pas des
placements !
M. Paul Loridant.
... le délai de détention est bien de huit ans.
La majorité sénatoriale essaie systématiquement - et c'est une nouvelle fois
le cas -, au nom de la survie des entreprises mais aussi de la préservation de
l'emploi, de donner des avantages fiscaux aux nantis.
Dans ces conditions, je considère, monsieur le rapporteur général, que la
commission « tord le bâton » au regard des principes d'égalité de l'ensemble
des citoyens.
J'invite donc vigoureusement la Haute Assemblée à rejeter l'amendement de la
commission.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Très bien !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le président, je regrette de devoir
reprendre la parole, mais on ne peut pas entendre certaines choses sans
réagir.
M. Jacques Oudin.
Très bien !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur Loridant, il ne s'agit pas ici de placements
financiers !
M. Roland du Luart.
Vous mélangez tout !
M. Paul Loridant.
Ah bon ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Vous mélangez tout, en effet ! Vous parlez de PEA,
alors qu'il s'agit ici d'exercer le contrôle d'une entreprise. Ce n'est pas la
même chose que de détenir quelques actions d'une entreprise et d'avoir en même
temps à y exercer une activité professionnelle de dirigeant ! De grâce, ne
confondez pas tout, ne jetez pas le trouble dans cette assemblée - à supposer
qu'elle y soit accessible - ...
M. Jean Chérioux.
Non, heureusement !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... avec des comparaisons qui n'ont vraiment pas lieu
d'être.
Il faut quand même rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat, que cette petite
fenêtre, cette lucarne très étroite, doit être comparée à un régime de droit
commun des donations qui permet aux donataires de personnes âgées de moins de
soixante-cinq ans de bénéficier sans conditions particulières - Dieu merci ! -
d'avantages fiscaux égaux à celui qui est prévu ici lorsque les donateurs
aménagent la dévolution de leur patrimoine.
L'utilisation du pacte d'actionnaire est une bonne idée pour faciliter le
maintien du contrôle amical d'une entreprise, pour faciliter le maintien de la
ligne stratégique de cette entreprise malgré le passage de relais d'une
génération à l'autre. A cet égard, il faut rendre hommage au combat mené depuis
un certain nombre d'années, en particulier par M. Yvon Gattaz et ses amis de
l'association des moyennes entreprises patrimoniales.
Cela dit, en ce qui concerne l'aspect constitutionnel, lorsque cette affaire a
été examinée à la fin de 1995, il faut rappeler qu'il n'était pas prévu, je le
redis une nouvelle fois, que les intéressés exercent une fonction de dirigeant
dans l'entreprise.
Par ailleurs, le délai était de cinq ans. Nous doublons le délai de cinq ans
et nous créons la condition d'exercice de fonctions dans l'entreprise.
Au demeurant, monsieur le secrétaire d'Etat, si le Conseil constitutionnel
avait recommandé un jour de conserver les titres pendant cent ans, aurions-nous
dû faire semblant de considérer une telle position comme raisonnable alors
qu'elle défie l'entendement ? Ce n'est pas parce qu'on siège dans les palais
nationaux qu'on peut s'abstraire de la réalité, notamment de l'évolution
économique !
La mesure préconisée par l'amendement n° I-16 me paraît donc
constitutionnellement parfaitement correcte et un peu plus réaliste sur le plan
économique.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
M. le rapporteur général a cru devoir ébranler mes convictions, et je tiens
donc à confirmer que je voterai contre l'amendement.
Monsieur le rapporteur général, certes, les conditions sont extrêmement
rigoureuses et l'enjeu est important : il s'agit d'assurer la transmission et
la continuité d'entreprises, de garantir qu'une partie du patrimoine économique
de notre pays ne parte pas dans des conditions désastreuses à l'étranger. En
effet, ce phénomène concerne les toutes petites entreprises, mais il peut aussi
toucher les très grandes entreprises à l'heure des restructurations.
Le Gouvernement et le rapporteur général de l'Assemblée nationale, M. Didier
Migaud, ont donc, à mon avis, raison. Les avantages fiscaux sont considérables,
compte tenu des enjeux, et je regrette que vous ne l'ayez pas souligné dans
votre intervention. Dans ces conditions, il me paraît normal de définir des
conditions rigoureuses de transmission, et le délai de huit ans me paraît tout
à fait opportun.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur général, certes, ce n'est pas un
placement financier, mais cela touche tout de même au patrimoine des ménages !
Or, un principe d'égalité doit être respecté entre tous les épargnants, entre
tous les citoyens de ce pays, que le patrimoine des ménages prenne la forme
d'actifs d'entreprises ou d'actifs financiers. Le délai de huit ans me paraît
donc tout à fait justifié, et je m'oppose vigoureusement à l'amendement n°
I-16.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je crois, mesdames, messieurs les sénateurs, que la
disposition introduite sur l'initiative de M. Migaud et à laquelle le
Gouvernement a apporté son soutien est beaucoup plus importante que ce que M.
le rapporteur général veut bien dire.
Depuis une vingtaine, voire une trentaine d'années, cette question, dont M.
Loridant a eu raison de souligner l'importance, était discutée au Sénat et à
l'Assemblée nationale ! Nous avons enfin trouvé, certes avec un certain nombre
de conditions, la voie raisonnable qui, au-delà des avantages fiscaux procurés,
doit surtout être lue, à mon humble avis, comme la possibilité, pour une
entreprise moyenne dont le capital est détenu par des actionnaires issus de la
même famille - c'est le cas français typique de l'entreprise patrimoniale que
représente M. Gattaz avec l'association dont il est le président - d'organiser
la succession préalablement au décès de son fondateur, le plus souvent, ou du
fils de ce dernier, et de mettre clairement en place, par un pacte
d'actionnaires, la dévolution de l'entreprise sans que cette dernière crée de
traumatismes au sein de l'entreprise et en matière d'emploi.
La disposition adoptée par l'Assemblée nationale, sur proposition de M.
Migaud, constitue donc une rupture, un coin enfoncé dans un système que nous
n'avions cessé, sur toutes les travées, de critiquer. La transmission
d'entreprises en France était en effet une occasion d'affaiblissement de la
valeur de l'entreprise, d'éclatement de celle-ci, de mauvaise dévolution du
pouvoir entre les actionnaires et, finalement, de perte de substance économique
et sociale pour l'entreprise.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il nous faut à mon avis bien considérer les
objectifs de l'amendement Migaud et en apprécier tout l'aspect novateur et
toute la portée. Pour ce faire, il est nécessaire de le conserver dans sa
rédaction actuelle pour voir, à l'expérience, dans quelle mesure il conviendra
de renforcer ou de faire évoluer les dispositions qu'il comporte. Laissons du
temps au temps pour que ce dispositif novateur et fondamental, qui résout une
grande partie des inquiétudes élevées depuis de nombreuses années au sein des
deux assemblées, puisse bien fonctionner. Nous verrons, à l'expérience, et si
nécessaire, comment adapter le système.
Pour l'instant, laissons-lui du temps, laissons-lui du champ, et faisons
confiance à l'expérience ! Nous avons déjà gagné une très grande partie dans le
problème épineux, économiquement et socialement, de la transmission
d'entreprises. Constatons ce beau résultat et laissons à l'économie et à la
société française le soin de bien le gérer dans le temps.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est d'autant plus généreux que ce n'est pas
applicable !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-16, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5
bis
, ainsi modifié.
(L'article 5
bis
est adopté.)
Article additionnel après l'article 5
bis
M. le président.
Par amendement n° I-289, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 5
bis
, un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Après l'article 885 O
bis
du code général des impôts, il est
inséré un article 885 O
bis
A ainsi rédigé :
«
Art. 885 O
bis
A
. - Sont également considérées comme des biens
professionnels au sens de l'article 885 O
bis
des parts ou actions
détenues par des associés réunissant collectivement au moins 25 % des droits
financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s'ils
sont admis à la négociation sur un marché réglementé, ou, à défaut, sur au
moins 34 %, à condition que les associés soient liés par un engagement
collectif de conservation des titres pendant une periode de cinq ans au
moins.
« En cas de démembrement de propriété, l'engagement de conservation est signé
conjointement par l'usufruitier et le nu-propriétaire. En cas de réunion de
l'usufruit à la nue-propriété, le terme de l'engagement de conservation des
titres dont la pleine propriété est reconstituée demeure identique à celui
souscrit conjointement.
« L'engagement collectif de conservation est notifié à la société émettrice
des titres, en précisant le nombre de titres visés. Ce document est délivré à
tout associé qui en fait la demande. Il est communiqué à l'administration
fiscale.
« L'associé qui rompt l'engagement de conservation souscrit des déclarations
rectificatives de l'impôt de solidarité sur la fortune au titre des trois
années précédentes et acquitte, dans le mois suivant la rupture de
l'engagement, le supplément d'impôt en résultant augmenté de l'intérêt de
retard prévu à l'article 1727 et de la majoration visée à l'article 1731.
« Dans le cas où le seuil fixé au premier alinéa n'est plus respecté au 31
décembre de l'année d'imposition, les associés ayant souscrit l'engagement de
conservation perdent le bénéfice de la présente disposition jusqu'à ce que le
seuil soit de nouveau franchi.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent
article. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus sont
compensées par une majoration, à due concurrence, des droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mes chers collègues, c'est la suite du même débat :
si, tout à l'heure, je me permettais d'insister sur l'importance du délai,
c'était parce que j'avais tout à fait présentes à l'esprit les exigences
fiscales que signifie ce délai. En d'autres termes, que ce passe-t-il si le
délai n'est pas respecté ? C'est toute la requalification fiscale du dispositif
!
Par ailleurs, que va-t-il se passer pendant ce délai, qu'il soit, d'ailleurs,
de deux fois cinq ans ou de deux fois huit ans, pendant l'application du pacte
d'actionnaires ? Des associés, des actionnaires membres du pacte vont devoir
être associés à la direction de l'entreprise. Les titres qu'ils détiennent,
monsieur Loridant, sont loin d'être de simples placements financiers liquides.
En effet, même si la durée d'un PEA est de huit ans, les titres, au sein de
l'actif, peuvent tourner en permanence. Les détenteurs de ces actions ainsi
pactées et qui devront être conservées en tant que telles pendant deux fois
cinq ans, comme nous venons de le décider, peuvent se trouver dans la situation
suivante : il est concevable que, pendant cette période de deux fois cinq ans,
ce qui est encore long, les résultats financiers de l'entreprise ne soient pas
toujours excellents et que les actionnaires concernés ne puissent pas
percevoir, en tant que détenteurs patrimoniaux de ces titres, des dividendes
susceptibles de compenser la charge fiscale que l'impôt de solidarité sur la
fortune va éventuellement faire peser sur eux.
Au demeurant, cet amendement, qui vise à répondre à cette préoccupation, est
un simple texte de précision. En effet, la législation fiscale comme
l'interprétation jurisprudentielle qui en est faite peuvent conduire à examiner
de façon restrictive l'esprit des textes existants.
Or, en l'espèce, il y a bien pacte d'actionnaires pour être associé à un
contrôle de la stratégie d'une entreprise.
Dans ces conditions, il faut faire figurer de manière explicite dans la loi
que les titres ainsi détenus et ainsi réunis dans des pactes d'actionnaires
doivent avoir le caractère, au sens de l'impôt de solidarité sur la fortune, de
biens professionnels. C'est, à mon avis, une disposition indissociable de
l'article 5
bis
tel que nous venons de l'adopter.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, vous souhaitez lier
l'avantage fiscal nouveau en matière d'impôt de solidarité sur la fortune à
l'exercice d'un pacte d'actionnaires. Ce faisant, j'ai peur que vous ne fassiez
éclater la qualification de biens professionnels, instituée par la loi de 1982,
qualification relativement complexe que nous avions d'ailleurs eu du mal à
élaborer.
Ne soumettant les actionnaires liés par le pacte à aucune condition pour
l'exercice effectif, par l'un au moins d'entre eux ou par l'ensemble, de
fonctions dirigeantes dans l'entreprise, vous faites littéralement, par cet
amendement qui peut paraître anodin, éclater la qualification même de biens
professionnels dans le système de l'ISF. Je ne peux donc pas vous suivre sur
cette voie, monsieur le rapporteur général. Je suis même résolument opposé à ce
que l'on dénature complètement ce système qui a maintenant fait la preuve de
son efficacité et de son bien-fondé.
J'ai dit hier, en commençant notre débat, qu'un bon impôt était un vieil
impôt. Il faut laisser l'ISF vieillir sans bouleverser cet impôt chaque année
par des dispositions nouvelles et sans aller dans le sens d'une remise chantier
de la définition même des biens professionnels.
Par ailleurs, la non-application de votre dispositif aux entreprises
individuelles et l'absence d'exercice de fonction dirigeante par les associés
risqueraient, là encore, comme voilà un instant à propos d'un autre amendement,
de bouleverser l'équilibre qui doit exister entre les engagements des
actionnaires et l'avantage fiscal que ces derniers peuvent retirer des
dispositions qui leur sont favorables. Le juge constitutionnel ne manquerait
pas alors de censurer ce nouveau déséquilibre.
L'objection constitutionnelle vient à l'appui du souci, que je viens
d'exprimer, de conserver à l'ISF son régime de croisière. Cet impôt est
maintenant bien établi dans le paysage fiscal. Laissons-le vivre sa vie et ne
bouleversons pas chaque année, à l'occasion de la discussion du projet de loi
de finances, les dispositifs que nous avons d'ailleurs eu du mal à introduire
dans le paysage français. Cet impôt existe maintenant, laissons-le vivre !
M. Emmanuel Hamel.
Laissez-les vivre !
(Sourires.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-289, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 5
bis
.
Article 6
M. le président.
« Art. 6. _ A. _ Les articles 234
bis,
234
septies
et 234
decies
du code général des impôts sont abrogés pour les revenus perçus à
compter du 1er janvier 2001.
« B. _ Le 1° du II de l'article 234
bis
du code général des impôts est
ainsi rédigé :
« 1° Les revenus d'un local, fonds de commerce, clientèle, droit de pêche ou
droit de chasse dont le montant perçu en 1999, au titre des mêmes biens ou
droits, n'excède pas 36 000 francs ; ».
« C. _ Le deuxième alinéa du I de l'article 234
nonies
du code général
des impôts est complété par les mots : "dont le montant annuel est supérieur à
12 000 francs".
« D. _ L'article 234
decies
du code général des impôts est complété par
un alinéa ainsi rédigé :
« Aucune demande de dégrèvement ne peut être présentée après le 31 décembre
1999. »
« E. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 234
decies
A ainsi rédigé :
«
Art. 234
decies
A
. _ I. _ Les contribuables qui ont été
soumis, pour les mêmes biens, à la contribution au titre des revenus mentionnés
à l'article 234
ter
et, le cas échéant, à celle prévue à l'article 234
nonies
, et aux droits d'enregistrement prévus aux articles 736 à 741
bis
pour la période courant du 1er janvier au 30 septembre 1998, doivent
inscrire, sur la déclaration prévue à l'article 170 afférente à l'année 1999,
la base de ces droits d'enregistrement correspondant à la période précédemment
définie, à l'exclusion de la base des droits pour lesquels la demande de
dégrèvement prévue à l'article 234
decies
a été formulée avant le 1er
janvier 2000.
« II. _ Les contribuables mentionnés au I bénéficient d'un crédit d'impôt d'un
montant égal à 2,5 % de la base des droits d'enregistrement mentionnés aux
articles 736 à 741, déclarée dans les conditions prévues au I. Ce crédit
d'impôt s'impute sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 1999 pour les
personnes dont le total des recettes nettes définies au deuxième alinéa du I de
l'article 234
ter
n'excède pas 60 000 francs pour l'année 1999 et sur
l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2000 pour les autres personnes.
« Ce crédit s'impute sur l'impôt sur le revenu dû, après imputation des
réductions d'impôt mentionnées aux articles 199
quater
B à 200, de
l'avoir fiscal, des crédits d'impôt ou retenues non libératoires. S'il excède
l'impôt dû, l'excédent est restitué.
« III. _ 1. Sur leur demande, les contribuables mentionnés au I bénéficient,
en cas de cessation ou d'interruption, à compter du 1er janvier 1998, de la
location d'un bien dont les revenus ont été soumis au droit d'enregistrement
prévu à l'article 741
bis,
d'un crédit d'impôt d'un montant égal à celui
du droit d'enregistrement précité acquitté à raison de cette location au titre
de la période courant du 1er janvier au 30 septembre 1998.
« 2. La demande prévue au 1 doit être jointe à la déclaration mentionnée à
l'article 170, afférente à l'année au cours de laquelle la cessation ou
l'interruption de la location est intervenue.
« Ce crédit s'impute, dans les conditions prévues au deuxième alinéa du II,
sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année au cours de laquelle la
cessation ou l'interruption s'est produite. »
« F. _ Les articles 234
ter,
234
quater
, 234
quinquies
,
234
sexies
et 234
octies
du code général des impôts deviennent
respectivement les articles 234
undecies,
234
duodecies
, 234
terdecies
, 234
quaterdecies
et 234
quindecies
de ce
code.
« G. _ L'article 234
nonies
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Les premier et deuxième alinéas du I sont remplacés par un alinéa ainsi
rédigé :
« Il est institué une contribution annuelle sur les revenus retirés de la
location de locaux situés dans des immeubles achevés depuis quinze ans au moins
au 1er janvier de l'année d'imposition, acquittée par les bailleurs. » ;
« 2° Aux II et III, le mot : "additionnelle" est supprimé ;
« 3° Au III, les 1°, 2° et 3° deviennent respectivement 6°, 7° et 8° et il est
inséré les 1°, 2°, 3°, 4° et 5° ainsi rédigés :
«
l°
Dont le montant annuel n'excède pas 12 000 francs par local ;
«
2°
Qui donne lieu au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée ;
«
3°
Consentie à l'Etat ou aux établissements publics nationaux
scientifiques, d'enseignement, d'assistance ou de bienfaisance ;
«
4°
Consentie en vertu des titres III et IV du code de la famille et
de l'aide sociale et exclusivement relative au service de l'aide sociale ;
«
5°
A vie ou à durée illimitée ; ».
« 4° Les IV et V sont abrogés.
« H. _ L'article 234
undecies
nouveau du code général des impôts est
ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa du I, les mots : "et sous-locations" et les mots : "des
bénéfices agricoles selon l'un des régimes définis aux articles 64 et 68 F"
sont supprimés, les mots : "les régimes définis aux articles 50-0 et 50" sont
remplacés par les mots : "le régime défini à l'article 50-0" et le mot :
"
bis
" est remplacé par le mot : "
nonies
" ;
« 2° Au second alinéa du I, les mots : "et sous-locations" sont supprimés ;
« 3° Au II, les mots : "ou la sous-location" sont supprimés et le mot :
"
bis
" est remplacé par le mot : "
nonies
" ;
« 4° Au deuxième alinéa du III, les mots : ", puis sur la contribution
additionnelle prévue à l'article 234
nonies
" sont supprimés.
« I. _ L'article 234
duodecies
nouveau du code général des impôts est
ainsi modifié :
« 1° Au I, les mots : "ou la sous-location" sont supprimés et les mots :
"l'article 234
bis
" et "l'article 234
ter
" sont respectivement
remplacés par les mots : "l'article 234
nonies
" et "l'article 234
undecies
" ;
« 2° Au deuxième alinéa du III, le mot : "
ter
" est remplacé par le mot
: "
undecies
" et la deuxième phrase est supprimée.
« J. _ L'article 234
terdecies
nouveau du code général des impôts est
ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "ou sous-location" et les mots : "ou de la
déclaration mentionnée à l'article 65 A" sont supprimés et les mots :
"l'article 234
bis
" et "l'article 234
quater
" sont respectivement
remplacés par les mots : "l'article 234
nonies
" et "l'article 234
duodecies
" ;
« 2° Au deuxième alinéa, le mot : "
quater
" est remplacé par le mot :
"
duodecies
".
« K. _ L'article 234
quaterdecies
nouveau du code général des impôts
est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "ou sous-location" sont supprimés et les
références : "234
quater
", "234
quinquies
", "234
bis
" et
"234
ter
" sont respectivement remplacées par les références : "234
duodecies
", "234
terdecies
", "234
nonies
" et "234
undecies
" ;
« 2° Au troisième alinéa, le mot : "
ter
" est remplacé par le mot :
"
undecies
" et la seconde phrase est supprimée ;
« 3° Au quatrième alinéa, le mot : "
quater
" est remplacé par le mot :
"
duodecies
".
« L. _ L'article 234
quindecies
nouveau du code général des impôts est
ainsi rédigé :
«
Art. 234 quindecies
. _ La contribution prévue à l'article 234
nonies
est égale à 2,5 % de la base définie aux I et II de l'article 234
undecies
. »
« M. _ I. _ Au 1 de l'article 1664 du code général des impôts, les mots :
"donne lieu" sont remplacés par les mots : "ainsi que la contribution
mentionnée à l'article 234
undecies
donnent lieu".
« II. _ L'article 1681 F du code général des impôts est ainsi modifié :
«
a)
Au premier alinéa, les mots : "à l'article 234
ter
et à la
contribution additionnelle mentionnée à l'article 234
nonies
" sont
remplacés par les mots : "à l'article 234
undecies
" ;
«
b)
Au second alinéa, les mots : "ces contributions" sont remplacés
par les mots : "cette contribution".
« N. _ Au I
bis
de l'article 1657 du code général des impôts, les mots
: "et des contributions mentionnées aux articles 234
ter
et 234
nonies
" sont remplacés par les mots : "et de la contribution mentionnée
à l'article 234
undecies
".
« O. _ I. _ La contribution annuelle prévue à l'article 234
nonies
du
code général des impôts est à la charge du bailleur. Toutefois, lorsqu'elle est
due au titre de locaux loués à usage commercial situés dans des immeubles
comportant, à concurrence de la moitié au moins de leur superficie totale, des
locaux loués affectés à usage d'habitation ou à l'exercice d'une profession,
elle est, sauf convention contraire, supportée à concurrence de la moitié par
le locataire.
« II. _ Pour les contrats en cours, de quelque nature qu'ils soient, les
stipulations relatives à la contribution additionnelle à la contribution
annuelle représentative du droit de bail s'appliquent dans les mêmes conditions
à la contribution prévue à l'article 234
nonies
du code général des
impôts.
« P. _ I. _ Les dispositions des B et C s'appliquent aux revenus perçus au
cours de l'année 2000.
« II. _ Les dispositions des F à O s'appliquent aux revenus perçus à compter
du 1er janvier 2001.
« Q. _ Un décret fixe les modalités d'application du présent article. »
Je suis saisi de plusieurs amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° I-17, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de rédiger comme suit cet article :
« A. - Les articles 234
bis,
234
septies,
234
octies
et
234
decies
du code général des impôts sont abrogés pour les revenus
perçus à compter du 1er janvier 2000.
« B. - Les articles 234
ter
à 234
sexies
et 234
nonies
sont abrogés pour les revenus perçus à compter du 1er janvier 2001.
« C. - L'article 234
decies
du code général des impôts est complété par
l'alinéa suivant :
« Aucune demande de dégrèvement ne peut être présentée après le 31 décembre
1999. »
« D. - Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 234
decies
A ainsi rédigé :
«
Art. 234
decies
A. -
I. - Les contribuables qui ont été
soumis, pour les mêmes biens, à la contribution au titre des revenus mentionnés
à l'article 234
ter
et, le cas échéant, à celle prévue à l'article 234
nonies,
et aux droits d'enregistrements prévus aux articles 736 à 741
bis
pour la période courant du 1er janvier au 30 septembre 1998 doivent
inscrire, sur la déclaration prévue à l'article 170 afférente à l'année 1999,
la base de ces droits d'enregistrement correspondant à la période précédemment
définie, à l'exclusion de la base des droits pour lesquels la demande de
dégrèvement prévue à l'article 234
decies
a été formulée avant le 1er
janvier 2000.
« II. - Les contribuables mentionnés au I bénéficient d'un crédit d'impôt d'un
montant égal à 2,5 % de la base des droits d'enregistrement mentionnés aux
articles 736 à 741, déclarée dans les conditions prévues au I. Ce crédit
d'impôt s'impute sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 1999, après
imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199
quater
B
à 200, de l'avoir fiscal, des crédits d'impôt ou retenues non libératoires.
S'il excède l'impôt dû, l'excédent est restitué.
« III. - 1. Les contribuables mentionnés au I peuvent demander à bénéficier,
en cas de cessation ou d'interruption, à compter du 1er janvier 1998, de la
location d'un bien dont les revenus ont été soumis au droit d'enregistrement
prévu à l'article 741
bis,
d'un crédit d'impôt d'un montant égal à celui
du droit d'enregistrement précité acquitté à raison de cette location au titre
de la période courant du 1er janvier au 30 septembre 1998.
« 2. La demande prévue au 1 doit être jointe à la déclaration mentionnée à
l'article 170, afférente à l'année en cours de laquelle la cessation ou
l'interruption de la location est intervenue.
« Ce crédit s'impute, dans les conditions prévues au deuxième alinéa du II,
sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année au cours de laquelle la
cessation ou l'interruption s'est produite.
« 3. Si aucune demande n'a été formulée avant le 31 décembre 2001, les
contribuables bénéficient automatiquement d'un crédit d'impôt dans les
conditions prévues au 2, pour l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année
2001, sans condition de cessation ou interruption de la location. »
« E. - L'article 234
nonies
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Le I est ainsi rédigé :
« I. - Il est institué une contribution annuelle sur les revenus tirés de la
location de locaux situés dans des immeubles achevés depuis quinze ans au moins
au 1er janvier de l'année d'imposition, acquittée par les bailleurs. »
« 2° Aux II et III, le mot "additionnelle" est supprimé ;
« 3° Au III, les 1°, 2° et 3° deviennent respectivement 6°, 7° et 8° et il est
inséré les 1°, 2°, 3°, 4° et 5° ainsi rédigés :
«
1°
Dont le montant annuel n'excède pas 12 000 francs par local ;
«
2°
Qui donne lieu au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée ;
«
3°
Consentie à l'Etat ou aux établissements publics nationaux
scientifiques, d'enseignement, d'assistance ou de bienfaisance ;
«
4°
Consentie en vertu des titres III et IV du code de la famille et
de l'aide sociale et exclusivement relatives au service de l'aide sociale ;
«
5°
A vie ou à durée limitée ; »
« 4° Le IV est rédigé comme suit :
« IV. - La contribution est égale à 1,25 % de la base définie aux I et II de
l'article 234
ter.
»
« 5° Le V est abrogé.
« F. - L'article 234
ter
du code général des impôts est ainsi modifié
:
« 1° Au premier alinéa du I, les mots : "et sous-locations" et les mots : "des
bénéfices agricoles selon l'un des régimes définis aux articles 64 et 68 F"
sont supprimés, les mots : "les régimes définis aux articles 50-0 et 50" sont
remplacés par les mots : "le régime défini à l'article 50-0" et le mot :
"
bis
" est remplacé par le mot : "
nonies
" ;
« 2° Au second alinéa du I, les mots : "et sous-locations" sont supprimés ;
« 3° Au II, les mots : "ou la sous-location" sont supprimés et le mot :
"
bis
" est remplacé par le mot : "
nonies
" ;
« 4° Au deuxième alinéa du III, les mots : ", puis sur la contribution
additionnelle prévue à l'article 234
nonies
" sont supprimés.
« G. - L'article 234
quater
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Au I, les mots : "ou la sous-location" sont supprimés et la référence :
"234
bis
" est remplacée par la référence "234
nonies
" ;
« 2° Au deuxième alinéa du III, dans la première phrase, le taux : "2,5 %" est
remplacé par le taux : "1,25 %" et la deuxième phrase est supprimée.
« H. - L'article 234
quinquies
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« Au premier alinéa, les mots : "ou sous-location" et les mots : "ou de la
déclaration mentionnée à l'article 65 A" sont supprimés et la référence : "234
bis
" est remplacée par la référence : "234
nonies
".
« I. - L'article 234
sexies
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "ou sous-location" sont supprimés et la
référence : "234
bis
" est remplacée par la référence : "234
nonies
" ;
« 2° Au troisième alinéa, dans la première phrase, le taux : "2,5 %" est
remplacé par le taux : "1,25 %" et la seconde phrase est supprimée.
« J. - Au 1 de l'article 1664 du code général des impôts, les mots : "donne
lieu" sont remplacés par les mots : "ainsi que la contribution mentionnée à
l'article 234
ter
donnent lieu".
« K. - L'article 1681 F du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots "et à la contribution additionnelle
mentionnée à l'article 234
nonies
" sont supprimés ;
« 2° Au second alinéa, les mots : "ces contributions" sont remplacés par les
mots : "cette contribution".
« L. - Au 1
bis
de l'article 1657 du code général des impôts, les mots
: "et des contributions mentionnées aux articles 234
ter
et 234
nonies"
sont remplacés par les mots : "et de la contribution mentionnée
à l'article 234
ter
".
« M. - 1° La contribution annuelle prévue à l'article 234
nonies
du
code général des impôts est à la charge du bailleur. Toutefois, lorsqu'elle est
due au titre de locaux loués à usage commercial situés dans des immeubles
comportant à concurrence de la moitié au moins de leur superficie totale des
locaux à usage d'habitation ou à l'exercice d'une profession, elle est, sauf
convention contraire, supportée à concurrence de la moitié par le locataire
;
« 2° Pour les contrats en cours, de quelque nature qu'ils soient, les
stipulations relatives à la contribution annuelle représentative du droit de
bail s'appliquent dans les mêmes conditions à la contribution prévue à
l'article 234
nonies
du code général des impôts.
« N. - Les dispositions des E à M s'appliquent à compter de l'imposition des
revenus 2000.
« O. - Un décret fixe les modalités d'application du présent article.
« P. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la simplification des
mesures de remboursement et de suppression de la contribution représentative du
droit de bail, et de la suppression progressive de la contribution
additionnelle au droit de bail, est compensée à due concurrence par la
majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° I-213 rectifié, présenté
par MM. Othily et Bimbenet et tendant :
A. - Après le N du texte présenté par l'amendement n° I-17 pour l'article 6, à
insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Dans le second alinéa de l'article 1043 A du code général des impôts,
après les mots "droits d'enregistrement", sont insérés les mots : "de la
contribution annuelle prévue à l'article 234
nonies
". »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, à compléter
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la modification du
régime du droit de bail applicable en Guyane et compensée par un relèvement à
due concurrence des droits fixés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
L'amendement n° I-137, présenté par MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud,
de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et
Indépendants, et l'amendement n° I-233, déposé par MM. Oudin, Braun, Cazalet,
Chaumont, Delong, Joyandet, Ostermann, Trégouët, Lassourd, Leclerc et Murat,
sont identiques.
Tous deux tendent :
A. - I. - A la fin du A de l'article 6, à remplacer la date : "1er janvier
2001" par la date : "1er janvier 2000".
II. - En conséquence, à supprimer le B et le C de cet article.
III. - En conséquence, à supprimer le P de cet article.
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, à compléter
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'extension du bénéfice
de la suppression du droit de bail est compensée par la majoration, à due
concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Par amendement n° I-74, MM. Fréville et Branger proposent :
I. - De rédiger comme suit la seconde phrase du premier alinéa du II du texte
présenté par le E de l'article 6 pour l'article 234
decies
A du code
général des impôts :
« Ce crédit d'impôt s'impute sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année
1999 dans la limite de 1 100 francs et le cas échéant sur l'impôt sur le revenu
dû au titre de 2000 pour le complément. »
II. - Pour compenser la perte de recette résultant du I ci-dessus, de
compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes pour l'Etat résultant de la modification des
régies d'imputation du crédit d'impôt relatif à la restitution du droit de bail
est compensée à due concurrence par une majoration des droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-111, présenté par MM. Ostermann, Braun, Cazalet, Chaumont,
Gaillard, Lassourd, Leclerc, Murat, Oudin, Trégouët, et l'amendement n° I-138,
déposé par MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre,
Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, sont
identiques.
Tous deux tendent :
I. - A rédiger ainsi le G de l'article 6 :
« G. - L'article 234
nonies
du code général des impôts est abrogé. »
II. - Pour compléter la perte de recettes résultant du I ci-dessus, à
compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'abrogation de
l'article 234
nonies
du code général des impôts est compensée par la
majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
I-17.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il convient de rappeler que cet article concerne un
sujet qui a fait couler beaucoup de salive et beaucoup d'encre depuis un an,
notamment dans la presse spécialisée en matière immobilière ou en matière
d'épargne : c'est la malencontreuse, la maladroite réforme du droit de bail et
de sa taxe additionnelle.
M. Jacques Oudin.
Oh ! là là !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Sur ce sujet, monsieur le secrétaire d'Etat, je me
bornerai à dire que l'administration qui a conçu cet étrange dispositif et le
ministre qui était l'année dernière ici à ce banc eussent été bien inspirés
d'écouter les avertissements du Sénat concernant le caractère inextricable,
invraisemblable et contraire au bon sens de ce dispositif.
Parfois, il est des innovations qui apparaissent on ne sait comment ni
pourquoi, car le bon sens ne peut être partagé par tous, notamment dans
certains bureaux de l'administration...
Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, lorsqu'on est confronté à la réalité des
faits, c'est-à-dire à des objections qui émanent de la représentation nationale
des professionnels, de toutes celles et ceux qui ont un rôle actif et concret
dans l'affaire en question, il ne faut pas se crisper, il ne faut pas dire le
contraire de l'évidence !
Nous étions face à un problème de double perception du droit de bail de
l'année 1998 sur la période correspondant aux neuf premiers mois. On a
véritablement voulu nous faire prendre des vessies pour des lanternes.
L'argumentation utilisée - je le dis, au passage, avec le grand respect que
j'ai pour cette institution - a même été efficace, monsieur le secrétaire
d'Etat, auprès du Conseil constitutionnel.
Il n'en reste pas moins que, compte tenu des protestations que vous avez
enregistrées et qui ont été massives, compte tenu aussi de la réalité des
choses, de la réalité du terrain, il a bien fallu que vous reveniez sur cette
réforme extrêmement malencontreuse et maladroite du droit de bail et de la taxe
additionnelle.
Notre amendement vise, monsieur le secrétaire d'Etat, à vous aider dans
l'exercice - coûteux, d'ailleurs, puisqu'il y va de plusieurs milliards de
francs - de « collage » des morceaux cassés par le dispositif maladroit et
malencontreux de l'année dernière. Il a pour objet, en ce qui concerne le droit
de bail, de supprimer les nombreux plafonds introduits par le présent article,
plafonds qui, outre leur évidente complexité, engendrent des effets de seuil et
des iniquités.
C'est merveilleux ! L'année dernière M. Sautter est venu ici pour nous dire
qu'avec la réforme du droit de bail le but fixé était la simplification...
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il est modeste !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La simplification ! Mais, à l'examen, le dispositif
gouvernemental auquel on aboutirait, après une réforme avortée car impossible,
constitue-t-il bien une simplification ? Je vous laisse, mes chers collègues,
le soin d'apprécier !
Par ailleurs, en ce qui concerne la contribution additionnelle au droit de
bail, notre amendement vise à la supprimer progressivement et à en améliorer le
remboursement.
Premièrement, la commission des finances vous propose donc, mes chers
collègues, de rembourser tous les contribuables dès 2000 car s'il y a eu
trop-perçu - ce que vous reconnaissez aujourd'hui alors que vous ne le
connaissiez pas l'année dernière - il faut rembourser dès l'an 2000. Pourquoi,
en effet, attendre deux ans alors qu'il y a bien eu trop-perçu pendant la
période courant du 1er janvier au 30 septembre 1998 ? De plus, il est à mon
avis inéquitable et non conforme à la jurisprudence - du Conseil
constitutionnel, pour le coup - de mettre en place un seuil de 60 000 francs de
revenus fonciers pour établir dans quels délais on rembourse ou on ne rembourse
pas.
Deuxièmement, la commission des finances vous propose de supprimer
complètement le droit de bail à compter de l'imposition des revenus 2000, ce
qui entraîne la suppression du seuil de 36 000 francs par local, pour les
raisons que j'ai développées à propos du premier point de notre amendement.
Troisièmement, elle vous propose de supprimer progressivement la contribution
additionnelle au droit de bail. Elle sera réduite de moitié pour tous les
contribuables, soit 1,25 % du montant des loyers à compter de l'imposition des
revenus de 2000 avant d'être totalement supprimée pour l'imposition des revenus
de 2001.
Quatrièmement, la commission des finances propose de rembourser la
contribution additionnelle au droit de bail payée deux fois, et ce de manière
automatique à compter de l'imposition des revenus 2001 pour que les
contribuables n'ayant pas cessé de louer pendant cette période ne soient pas
pénalisés.
Mes chers collègues, avec ce dispositif nous corrigeons les erreurs qui ont
été faites l'an dernier. Personne ne demandait au Gouvernement de prendre une
initiative sur ce sujet. Monsieur le secrétaire d'Etat, il se trouve que vous
avez créé un climat tel qu'il vous a fallu en venir à nous proposer des
dispositions qui sont exactement inverses de celles que vous nous faisiez
approuver voilà un an.
L'année dernière, M. Lambert, qui connaît particulièrement bien ces sujets,
avait mis en garde M. Sautter, en lui disant que le droit de bail et la taxe
additionnelle ne concernaient pas que les propriétaires. Il avait insisté sur
l'aspect social de cette affaire, le prévenant que ce seront les locataires qui
se plaindront et qui amèneront le Gouvernement à revoir ses positions.
C'est exactement ce qui s'est produit. Une mesure que le Gouvernement
envisageait comme une mesure concevable, car ne s'attaquant qu'à quelques
catégories de propriétaires, s'est révélée être une mesure dont il a bien fallu
reconnaître qu'elle n'était pas socialement acceptable.
Enfin, et ce sera mon dernier point, la commission souhaite reprendre le
sous-amendement n° I-213 rectifié de MM. Bimbenet et Othily, et l'intégrer dans
l'amendement n° I-17 de la commission.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° I-17 rectifié, présenté par M. Marini,
au nom de la commission, et tendant à rédiger comme suit l'article 6 :
« A. - Les articles 234
bis
, 234
septies
, 234
octies
et
234
decies
du code général des impôts sont abrogés pour les revenus
perçus à compter du 1er janvier 2000.
« B. - Les articles 234
ter
à 234
sexies
et 234
nonies
sont abrogés pour les revenus perçus à compter du 1er janvier 2001.
« C. - L'article 234
decies
du code général des impôts est complété par
l'alinéa suivant :
« Aucune demande de dégrèvement ne peut être présentée après le 31 décembre
1999. »
« D. - Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 234
decies
A ainsi rédigé :
«
Art. 234
decies
A
. - I. - Les contribuables qui ont été
soumis, pour les mêmes biens, à la contribution au titre des revenus mentionnés
à l'article 234
ter
et, le cas échéant, à celle prévue à l'article 234
nonies
, et aux droits d'enregistrement prévus aux articles 736 à 741
bis
pour la période courant du 1er janvier au 30 septembre 1998 doivent
inscrire, sur la déclaration prévue à l'article 170 afférente à l'année 1999,
la base de ces droits d'enregistrement correspondant à la période précédemment
définie, à l'exclusion de la base des droits pour lesquels la demande de
dégrèvement prévue à l'article 234
decies
a été formulée avant le 1er
janvier 2000.
« II. - Les contribuables mentionnés au I bénéficient d'un crédit d'impôt d'un
montant égal à 2,5 % de la base des droits d'enregistrement mentionnés aux
articles 736 à 741, déclarée dans les conditions prévues au I. Ce crédit
d'impôt s'impute sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 1999, après
imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199
quater
B
à 200, de l'avoir fiscal, des crédits d'impôt ou retenues non libératoires.
S'il excède l'impôt dû, l'excédent est restitué.
« III. - 1. Les contribuables mentionnés au I peuvent demander à bénéficier,
en cas de cessation ou d'interruption, à compter du 1er janvier 1998, de la
location d'un bien dont les revenus ont été soumis au droit d'enregistrement
prévu à l'article 741
bis
, d'un crédit d'impôt d'un montant égal à celui
du droit d'enregistrement précité acquitté à raison de cette location au titre
de la période courant du 1er janvier au 30 septembre 1998.
« 2. La demande prévue au 1 doit être jointe à la déclaration mentionnée à
l'article 170, afférente à l'année au cours de laquelle la cessation ou
l'interruption de la location est intervenue.
« Ce crédit s'impute, dans les conditions prévues au deuxième alinéa du II,
sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année au cours de laquelle la
cessation ou l'interruption s'est produite.
« 3. Si aucune demande n'a été formulée avant le 31 décembre 2001, les
contribuables bénéficient automatiquement d'un crédit d'impôt dans les
conditions prévues au 2, pour l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année
2001, sans condition de cessation ou interruption de la location. »
« E. - L'article 234
nonies
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Le I est ainsi rédigé :
«
I. -
Il est institué une contribution annuelle sur les revenus tirés
de la location de locaux situés dans des immeubles achevés depuis quinze ans au
moins au 1er janvier de l'année d'imposition, acquittée par les bailleurs. »
« 2° Aux II et III, le mot "additionnelle" est supprimé ;
« 3° Au III, les 1°, 2° et 3° deviennent respectivement 6°, 7° et 8° et il est
inséré les 1°, 2°, 3°, 4° et 5° ainsi rédigés :
«
1°
Dont le montant annuel n'excède pas 12 000 francs par local ;
«
2°
Qui donne lieu au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée ;
«
3°
Consentie à l'Etat ou aux établissements publics nationaux
scientifiques, d'enseignement, d'assistance ou de bienfaisance ;
«
4°
Consentie en vertu des titres III et IV du code de la famille et
de l'aide sociale et exclusivement relatives au service de l'aide sociale ;
«
5°
A vie ou à durée limitée ; »
« 4° Le IV est rédigé comme suit :
«
IV. -
La contribution est égale à 1,25 % de la base définie aux I et
II de l'article 234
ter
. »
« 5° Le V est abrogé.
« F. - L'article 234
ter
du code général des impôts est ainsi modifié
:
« 1° Au premier alinéa du I, les mots : "et sous-locations" et les mots "des
bénéfices agricoles selon l'un des régimes définis aux articles 64 et 68 F"
sont supprimés, les mots : "les régimes définis aux articles 50-0 et 50" sont
remplacés par les mots : "le régime défini à l'article 50-0" et le mot :
"bis"
est remplacé par le mot :
"nonies"
;
« 2° Au second alinéa du I, les mots : et "sous-locations" sont supprimés ;
« 3° Au II, les mots : "ou la sous-location" sont supprimés et le mot :
"bis"
est remplacé par le mot :
"nonies"
;
« 4° Au deuxième alinéa du III, les mots : "puis sur la contribution
additionnelle prévue à l'article 234
nonies
" sont supprimés.
« G. - L'article 234
quater
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Au I, les mots : "ou la sous-location" sont supprimés et la référence :
"234
bis
" est remplacée par la référence "234
nonies"
;
« 2° Au deuxième alinéa du III, dans la première phrase, le taux : "2,5 %" est
remplacé par le taux : "1,25 %" et la deuxième phrase est supprimée.
« H. - L'article 234
quinquies
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« Au premier alinéa, les mots : "ou sous-location" et les mots : "ou de la
déclaration mentionnée à l'article 65 A" sont supprimés et la référence : "234
bis"
est remplacée par la référence : "234
nonies"
.
« I. - L'article 234
sexies
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "ou sous-location" sont supprimés et la
référence : "234
bis
" est remplacée par la référence : "234
nonies
" ;
« 2° Au troisième alinéa, dans la première phrase, le taux : "2,5 %" est
remplacé par le taux : "1,25 %" et la seconde phrase est supprimée.
« J. - Au 1 de l'article 1664 du code général des impôts, les mots : "donne
lieu" sont remplacés par les mots : "ainsi que la contribution mentionnée à
l'article 234
ter
donnent lieu".
« K. - L'article 1681 F du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "et à la contribution additionnelle
mentionnée à l'article 234
nonies
" sont supprimés ;
« 2° Au second alinéa, les mots : "ces contributions" sont remplacés par les
mots : "cette contribution".
« L. - Au 1
bis
de l'article 1657 du code général des impôts, les mots
: "et des contributions mentionnées aux articles 234
ter
et 234
nonies
" sont remplacés par les mots : "et de la contribution mentionnée
à l'article 234
ter
".
« M. - 1° La contribution annuelle prévue à l'article 234
nonies
du
code général des impôts est à la charge du bailleur. Toutefois, lorsqu'elle est
due au titre de locaux loués à usage commercial situés dans des immeubles
comportant à concurrence de la moitié au moins de leur superficie totale des
locaux à usage d'habitation ou à l'exercice d'une profession, elle est, sauf
convention contraire, supportée à concurrence de la moitié par le locataire.
« 2° Pour les contrats en cours, de quelque nature qu'ils soient, les
stipulations relatives à la contribution annuelle représentative du droit de
bail s'appliquent dans les mêmes conditions à la contribution prévue à
l'article 234
nonies
du code général des impôts.
« N. - Les dispositions des E à M s'appliquent à compter de l'imposition des
revenus 2000.
« O. - Dans le second alinéa de l'article 1043 A du code général des impôts,
après les mots droits d'enregistrement, sont insérés les mots : de la
contribution annuelle prévue à l'article 234
nonies
.
« P. - Un décret fixe les modalités d'application du présent article.
« Q. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la simplification des
mesures de remboursement et de suppression de la contribution représentative du
droit de bail et de la suppression progressive de la contribution additionnelle
au droit de bail est compensée, à due concurrence, par la majoration des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
« R. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la modification du régime
du droit de bail applicable en Guyane est compensée par le relèvement, à due
concurrence, des droits fixés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Voici un bel exemple de la faculté d'évolution du
Gouvernement.
(Exclamations amusées sur les travées du RPR)...
M. Jacques Oudin.
C'est bien dit !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... et de ses capacités auditives, puisqu'il a entendu
un certain nombre d'objections. Il a fait la part de celles qui étaient
purement polémiques...
M. Emmanuel Hamel.
Il n'y en a jamais !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... ou politiques, mais il a aussi, comme il est
normal pour un gouvernement qui prête une grande attention à l'opinion des
parlementaires, aussi bien à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, réétudié le
dispositif qu'il avait souhaité mettre en oeuvre.
Il a écouté toutes les objections et il en a fait son miel, afin de proposer
un dispositif qui soit mieux adapté aux problèmes posés par la contribution
relative au droit de bail.
La réforme proposée à l'article 6 du projet de loi de finances, parfaitement
cohérente avec les premières dispositions qui avaient été prises et que M.
Sautter avait défendues avec brio ici même, doit tenir compte de deux
nécessités : l'étalement du coût budgétaire de la suppression de la
contribution annuelle représentative du droit de bail et l'allégement rapide
des charges des locataires les plus modestes.
Je vous rappelle que M. Sautter avait, à juste titre, beaucoup insisté sur
l'objectif social du Gouvernement en réduisant la charge des plus
modestes,...
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Il a raté son objectif !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il est passé à côté !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... ce qui était le motif central qui sous-tendait et
irriguait toutes les dispositions - complexes, je le reconnais - que nous
avions prises s'agissant de ce droit de bail.
Nous en sommes donc aujourd'hui à la suppression en deux ans de cette
contribution relative au droit de bail. Mesdames, messieurs les sénateurs, il
s'agit d'un acquis poliquement et socialement tout à fait remarquable et d'un
bon compromis pour atteindre les deux objectifs que je viens de rappeler.
L'objectif que vous vous êtes fixé, monsieur le rapporteur général, qui est
d'exonérer dès l'année 2000 le plus grand nombre de locataires de condition
modeste, sera atteint, l'Assemblée nationale ayant, avec l'accord du
Gouvernement, relevé de 20 % la limite d'exonération de la contribution
annuelle représentative du droit de bail prévue par le texte du projet de loi
de finances. Toutes les locations au titre desquelles les loyers payés en 1999
n'auront pas excédé 36 000 francs seront exonérées de cette contribution dès le
1er janvier 2000.
Nous montrons ainsi l'orientation sociale du Gouvernement et de la majorité
plurielle qui le soutient.
S'agissant de la contribution sur les revenus des immeubles achevés depuis au
moins quinze ans, qui est appelée à se substituer à l'actuelle contribution
additionnelle, la diminution de moitié de son taux pour l'année 2000 et sa
suppression à compter de l'année 2001 ne peuvent évidemment pas être acceptées
par le Gouvernement, car ces mesures ne répondent pas à l'objectif d'allégement
des charges des locataires qui a conduit le Gouvernement à proposer la
suppression de la contribution annuelle représentative du droit de bail. Elles
auraient en outre pour effet de priver le budget de l'Etat d'une recette
fiscale d'environ 3,5 milliards de francs.
Cette perte budgétaire s'ajouterait à celle qui résulte de la suppression de
la contribution représentative du droit de bail, qui est estimée à plus de 3
milliards de francs pour l'année 2000.
Vous comprendrez, dans ces conditions, qu'il ne peut être envisagé de
supprimer la contribution sur les revenus des immeubles achevés depuis quinze
ans et plus, alors que des efforts importants sont consentis par ailleurs dans
le secteur du logement par le projet de loi de finances, nous en avons parlé
hier soir ici même.
La troisième mesure que vous proposez est l'aménagement du dispositif de
restitution du droit de bail et de la taxe additionnelle.
Comme vous le savez, monsieur le rapporteur général, le Gouvernement propose,
dans ce projet de loi de finances, de simplifier les modalités de restitution
du droit de bail - un bon impôt est un impôt simple - et de la taxe
additionnelle au droit de bail dans le cas de superposition des bases
d'imposition entre les anciens droits de bail et taxe additionnelle au droit au
bail et les nouvelles contributions en 1998. La restitution s'effectuerait sous
la forme d'un crédit d'impôt.
En ce qui concerne le droit de bail, la restitution interviendrait en totalité
au cours de l'année 2000 pour les personnes dont le montant total, en 1999, des
recettes soumises à la contribution annuelle représentative du droit de bail
n'aurait pas excédé 60 000 francs. Pour les autres contribuables, la
restitution aurait lieu en 2001. Cette restitution serait automatique sans
démarche particulière des contribuables - c'est là un allégement administratif
-...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ah oui ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... qui auront déclaré sur leur prochaine déclaration
de revenus la base du droit de bail dont ils peuvent prétendre au
remboursement. Il s'agit donc d'une obligation simple, automatique et
déclarative, à l'occasion de l'envoi de l'imprimé de déclaration des
revenus.
S'agissant de la taxe additionnelle au droit de bail, le crédit d'impôt
afférent à la base d'imposition de 1998 serait imputé, sur la demande des
contribuables, sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année de la cessation
ou de l'interruption de la location du bien, quelle que soit la durée de cette
interruption.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement ne souhaite pas modifier
ces modalités de restitution qui ont été arrêtées en concertation avec les
professionnels de l'immobilier. Comme toujours avec le gouvernement de M.
Jospin, il y a concertation, dialogue, écoute des professionnels...
(Sourires.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il fallait le faire l'année dernière, nous aurions
gagné du temps !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Pour le droit de bail, la limite de 60 000 francs
permettra de faire bénéficier de la restitution, dès l'année 2000, la majorité
des bailleurs.
S'agissant de la taxe additionnelle, l'aménagement du dispositif de
restitution est issu de la concertation conduite avec les professionnels.
Je suis heureux, personnellement, de vous faire part du fruit de ce dialogue,
de cette concertation, avec les milieux compétents, avec les experts. C'est
comme cela que l'on fait de la bonne législation !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Comme c'est émouvant !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On tape sur la tête des gens et on se concerte après
!
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Bonne méthode !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le dispositif constitue une avancée importante par
rapport à l'ancien système, c'est vrai. Il faut que vous le reconnaissiez
puisqu'aucune durée minimale d'interruption de la location n'est exigée et
qu'il accélérera notablement le remboursement.
Il n'est pas envisageable d'accorder de restitutions automatiques après le 31
décembre 2001, comme vous le demandez, car la superposition - vous parlez de «
double imposition », ce qui est significatif - des bases d'imposition n'est
pénalisante qu'en cas d'interruption de la location. C'était d'ailleurs
l'objection principale qui nous était opposée il y a quelques mois.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il fallait l'entendre !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Nous l'avons entendue !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Avec un an de retard !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Nous sommes ouverts, nous sommes des gens de
dialogue.
Enfin, le coût budgétaire, dès l'année 2000, de l'ensemble des mesures que
vous proposez serait tellement prohibitif qu'il suffirait, à lui seul, à
écarter ces mesures.
Pour ces différentes raisons, monsieur le rapporteur général, parce que vous
avez vu à quel point nous savons écouter les objections des députés, des
sénateurs et des professionnels...
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
N'en faites pas trop ! Les
larmes nous viennent !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Vos réactions ne sont pas très rapides !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... parce que nous sommes à l'écoute du pays...
M. Jean Chérioux.
Il ne faut pas en faire trop !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... et étant donné que nous avons évolué, nous vous
demandons de bien vouloir retirer cet amendement et de vous rallier au
dispositif simple, favorable aux contribuables. Je répète que nous supprimons
la contribution relative au droit de bail dans un certain nombre de cas dès le
1er janvier 2000.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Monsieur le président, je serai
très bref pour essayer de donner plus de force à mon propos.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement, l'an passé, malgré nos appels
au secours, n'a rien voulu entendre et il s'est trompé.
M. Roland du Luart.
Il s'est « planté » !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Le langage familier m'étant
autorisé par M. du Luart, je dirai qu'il s'est en effet « planté ».
J'ajoute, monsieur le secrétaire d'Etat, que, presque avec enthousiasme, vous
retournez dans le mur à une vitesse incroyable : vous appuyez des deux pieds
sur l'accélérateur et l'année prochaine - parce que nous vous souhaitons d'être
encore là l'année prochaine ! vous allez à nouveau devoir changer.
M. Jacques Oudin.
C'est évident !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Le droit de bail est en effet un
impôt dont il faut vous rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il est
prélevé sur le propriétaire, mais qu'il est répercuté par ce dernier sur le
locataire.
M. Roland du Luart.
Exactement !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
La victime innocente de votre
mauvaise législation, c'est donc le locataire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, chaque fois que vous vous levez pour rappeler
que vous êtes social, chaque fois que vous introduisez un seuil pour,
précisément, séparer les mauvais propriétaires et les bons propriétaires, c'est
le locataire qui est victime de cette vindicte gouvernementale.
M. Roland du Luart.
Tout à fait !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Le pauvre locataire qui se loge
à Paris alors qu'il paierait un loyer beaucoup moins cher à Saint-Dié, c'est
parce qu'il travaille dans la capitale et, s'il verse un loyer si élevé, ce
n'est pas parce qu'il l'a souhaité, c'est tout simplement parce que les
conditions économiques le condamnent à faire ce choix. Or, avec votre nouvelle
législation, ce locataire, vous êtes encore en train de le maltraiter.
Je vous lance un avertissement, monsieur le secrétaire d'Etat : l'année
dernière, nous vous avions mis en garde, vous n'avez rien voulu entendre ; et
aujourd'hui nous vous mettons en garde à nouveau et vous ne voulez rien
entendre ; l'année prochaine, quand vous viendrez, je crois franchement que le
Gouvernement devra présenter ses excuses à la nation.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Michel Charasse.
Si l'on faisait cela pour chaque mesure fiscale !
(Sourires.)
M. le président.
La parole est à M. Luart, pour présenter l'amendement n° I-581.
M. Roland du Luart.
Cet amendement prévoit la suppression du droit de bail pour le locataire. Le
Gouvernement prévoit de le faire sur deux ans. Nous souhaitons régler ce
problème en une seule année.
Compte tenu des marges budgétaires liées à la conjoncture économique, cela me
paraît réalisable. Je pense aussi que mon amendement est en partie satisfait
par le texte proposé par la commission des finances.
M. le président.
La parole est à M. Oudin, pour présenter l'amendement n° I-233.
M. Jacques Oudin.
Nous avons tous été particulièrement frappés par l'excellente démonstration de
M. le rapporteur général et par le plaidoyer vibrant du président de la
commission des finances.
Je n'arrive pas à comprendre l'obstination dont M. le secrétaire d'Etat et le
Gouvernement en général font preuve pour s'opposer à des mesures de bon sens.
Reprenons les débats de l'an dernier et gardons en mémoire les débats de cette
année. Je crois qu'ils sont l'illustration non pas d'une attitude d'écoute et
de concertation, mais d'une attitude malheureusement un peu dogmatique
vis-à-vis de certaines catégories de nos concitoyens.
La commission des finances est, je crois, en train de faire un excellent
travail pédagogique à l'intention du Gouvernement mais aussi de son
administration.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez une administration têtue, que vous
avez du mal à gérer. C'est le problème.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Mais non !
M. Jacques Oudin.
Mais vous n'êtes pas le seul. Lisez les chroniques d'anciens ministres des
finances, celle qui est intitulée
Dans les couloirs de Bercy,
par
exemple.
Ce que vous ressortez, ce sont les fonds de tiroirs de l'administration et
cela témoigne de ses blocages intellectuels et économiques.
(M. le
secrétaire d'Etat proteste.)
Je suis, comme vous, un ancien de l'administration. Bien sûr, vos
collaborateurs sont intelligents, travailleurs, fonctionnaires. Cela donne « le
mal français », qu'a si bien décrit notre regretté collègue Alain
Peyrefitte.
Cet amendement, qui est identique à l'amendement n° I-137, a pour objet
d'étendre dès l'an prochain le bénéfice de la suppression du droit de bail à la
totalité des locataires. Lorsqu'une erreur est commise, il faut la réparer le
plus rapidement possible. Cela ne fera de mal à personne.
La proposition du Gouvernement consistant à supprimer ce droit sur les deux
prochaines années et seulement pour 80 % des locataires en 2000 ne va pas assez
loin.
M. le président.
La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° I-74.
M. Yves Fréville.
Je serai bref, puisque M. le rapporteur général a très bien montré dans son
amendement la nécessité de supprimer tous les plafonnements inclus dans le
texte gouvernemental.
Mon amendement ne fait qu'illustrer, à partir d'un cas précis, l'absurdité du
système mis en place. Pour la restitution du crédit d'impôt, qui consiste à
restituer un impôt perçu à tort, le Gouvernement a prévu un seuil de 60 000
francs de revenus fonciers. Ainsi, un propriétaire qui perçoit 59 000 francs de
revenus fonciers, pouvant être nécessaires pour sa retraite, aura droit à la
restitution de la totalité de son crédit d'impôt. Si ce même propriétaire
perçoit 61 000 francs de revenus fonciers, il ne percevra rien, pour une
situation financière et fiscale presque similaire.
Cet amendement n'a pour objet - c'est un exemple parmi d'autres et je suis
prêt, après avoir entendu M. le rapporteur général, à me rallier à l'amendement
n° I-17 - que de montrer l'absurdité du système actuel.
Puisque l'occasion m'en est donnée, je veux en outre attirer l'attention de
nos collègues sur le problème connexe posé par la suppression de l'obligation
déclarative du droit de bail au regard de la fiscalité locale.
Si mes souvenirs sont exacts, lorsque, en 1990, les commissions
départementales des contributions directes avaient procédé à la révision des
bases de la fiscalité locale, la source statistique que nous avions à notre
disposition pour connaître les loyers payés et en fonction de laquelle on
pouvait établir les valeurs locatives était l'obligation déclarative du droit
de bail.
Ne viendra-t-on pas un jour nous dire que faute d'obligation déclarative du
droit de bail, on n'est plus en mesure de connaître les loyers et de réviser
les valeurs locatives et qu'il convient de supprimer les impôts locaux tels que
nous les connaissons actuellement.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
pardonnez-moi d'avoir un peu dévié du sujet en posant cette question qui me
paraît revêtir une certaine importance.
M. le président.
La parole est à Ostermann, pour présenter l'amendement n° I-111.
M. Joseph Ostermann.
Cet amendement vise à introduire une mesure de justice fiscale.
En effet, le présent projet de loi prévoit la suppression du droit de bail
supporté par les locataires, mais maintient le paiement par les bailleurs de
son accessoire, la contribution additionnelle au droit de bail.
Cette situation est injuste, d'autant plus que 80 % des propriétaires
bailleurs ont des revenus modestes.
Une telle mesure de simplification et de justice fiscale ne pourrait, par
ailleurs, qu'avoir un effet bénéfique sur la remise en location de logements
vacants.
M. le président.
La parole est à M. du Luart, pour présenter l'amendement n° I-138.
M. Roland du Luart.
Cet amendement est identique à celui de mon collègue M. Ostermann. Nous
souhaitons que l'équité règne entre le locataire et le propriétaire et que, le
plus vite possible, on supprime cette taxe additionnelle.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-137, I-233, I-74,
I-111 et I-138 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tous ces amendements sont excellents et seront
satisfaits par le vote de l'amendement n° I-17 de la commission, qui me semble
aborder l'ensemble du problème.
Mais je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il vous soit possible
de répondre à la sollicitation de notre collègue M. Yves Fréville qui a évoqué
les conséquences de la modification du régime du droit de bail et de la taxe
additionnelle sur les obligations déclaratives et donc sur certains éléments
relatifs à la fiscalité locale.
Il serait nécessaire qu'une réponse soit apportée à cette question, que ce
soit à l'occasion de ce débat ou par écrit. Ce point doit être élucidé.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements portant sur
l'article 6 ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je ne pense pas, mais sous réserve d'inventaire, qu'il
existe une relation directe entre la réforme de la contribution représentative
du droit de bail et la fiscalité locale. Je vais toutefois m'en assurer, et je
me propose de répondre par écrit à M. Fréville, comme M. le rapporteur m'y
invite.
J'ai longuement détaillé tout à l'heure le dispositif qui apparaît au
Gouvernement comme un fruit de son évolution, je ne reviendrai donc pas sur
l'ensemble des amendements qui ont été défendus à l'instant.
Je ne peux laisser passer, toutefois, les critiques vives et imméritées
adressées à l'administration du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie. En tant que ministre, au sens latin du terme, serviteur de l'Etat,
j'ai le devoir - qui ne me pèse pas du tout, car il rejoint mes convictions
intimes - de défendre une des administrations mondiales de la plus grande
qualité, celle des finances.
M. Michel Charasse.
C'est sûr !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je tenais à ce que cela soit dit : au ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie, les fonctionnaires sont d'une très
grande qualité intellectuelle et morale. Je tenais à leur rendre hommage à
titre personnel, mais aussi, certainement, au nom de l'immense majorité des
sénateurs.
(Applaudissements.)
M. Emmanuel Hamel.
Non ministrari sed ministrare.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-17 rectifié.
M. Claude Haut.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Haut.
M. Claude Haut.
Je tiens à rappeler les faits que M. le secrétaire d'Etat vient d'évoquer.
Le Gouvernement, comme il s'y était engagé au printemps dernier, nous propose
aujourd'hui un dispositif nouveau qui satisfait les deux objectifs majeurs
évoqués par M. le rapporteur général.
Il nous propose de résoudre les difficultés qui étaient apparues lors de la
mise en place de la réforme du droit de bail, l'année dernière, et il profite
de cette occasion pour aller plus loin encore, en supprimant en deux ans la
nouvelle contribution.
Sur ces deux sujets, M. le rapporteur souhaite en faire plus. Cette
surenchère, aujourd'hui, nous semble déplacée, et ce pour plusieurs raisons.
Le dispositif de neutralisation de la superposition des bases d'imposition va
permettre de clore définitivement le débat et de faire disparaître les
malentendus et les critiques qui avaient pu surgir depuis la mise en place de
la réforme. Pourquoi en faire plus puisque les cas où aurait pu véritablement
s'exercer une double imposition sont traités ici et résolus ?
Par ailleurs, je rappelle qu'en 1999 ni le bailleur ni son locataire n'auront
eu à verser au Trésor plus que ce qu'ils auraient versé à législation
inchangée, du fait du remboursement d'impôt prévu à l'origine, en cas de
cessation ou d'interruption de la location.
Enfin, vous trouvez que la suppression de la contribution représentative du
droit de bail ne va pas assez vite. Je vous rappelle que cette suppression
bénéficiera en 2000 à 80 % des locataires et à plus de 90 % des locataires
d'HLM.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il faut le dire !
M. Jean Chérioux.
Tant pis pour les autres !
M. Claude Haut.
Certes, on peut toujours en faire plus. Mais pourquoi ne pas l'avoir proposé
en d'autres temps ?
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-17 rectifié, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 6 est ainsi rédigé et les amendements n°s I-137,
I-233, I-74, I-111 et I-138 n'ont plus d'objet.
Article 7
M. le président.
« Art. 7. _ I. _ L'article 32 du code général des impôts est ainsi modifié
:
« 1° Le 1 est ainsi modifié :
«
a)
A la première phrase, la somme : "30 000 francs" et les mots :
"d'un tiers" sont respectivement remplacés par la somme : "60 000 francs" et
les mots : "de 40 %" ;
«
b)
La seconde phrase est supprimée ;
« 2° Au
c
du deuxième alinéa du 2, les mots : "logements neufs" sont
remplacés par le mot : "logements" ;
« 3° Le 3 est ainsi modifié :
«
a)
A la troisième phrase, les mots : "Toutefois, elle" sont remplacés
par les mots : "L'option" ;
«
b)
Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, en cas de changement de locataire, le contribuable peut renoncer
à son option à compter de l'imposition des revenus de l'année au cours de
laquelle le départ du locataire est intervenu. Cette renonciation doit être
notifiée à l'administration en même temps que la déclaration des revenus de
cette même année. »
« II. _ Le contribuable qui a exercé l'option prévue à l'article 32 du code
général des impôts lors du dépôt de sa déclaration des revenus des années 1997
ou 1998 peut y renoncer à compter de l'imposition de son revenu de l'année 1999
lorsque, pour cette année, le montant de son revenu brut foncier est compris
entre 30 001 francs et 60 000 francs.
« Ces dispositions s'appliquent dans les mêmes conditions pour l'imposition
des revenus de l'année 2000 perçus par un contribuable qui a exercé l'option
lors du dépôt de sa déclaration des revenus de l'année 1998, à condition que le
montant de son revenu brut foncier de l'année 1999 n'ait pas excédé 30 000
francs. » -
(Adopté.)
Articles additionnels après l'article 7
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° I-75, M. Arthuis et les membres du groupe de l'Union
centriste proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel rédigé
comme suit :
« I. - L'article 80
bis
du code général des impôts est abrogé.
« II. - Le deuxième alinéa du 4
bis
de l'article 94 A du code général
des impôts est supprimé.
« III. - Le 6 de l'article 200 A du code général des impôts est supprimé.
« IV. - L'article 92 B
bis
du code général des impôts est rédigé comme
suit :
«
Art. 92 B
bis. - Le gain net défini au paragraphe 4
bis
de
l'article 94 A est imposé dans les conditions prévues à l'article 92 B si la
levée de l'option intervient avant l'achèvement d'une période de cinq années à
compter de la date d'attribution de l'option et si la cession des titres est
postérieure à cette période.
« Si la condition prévue au premier alinéa n'est pas remplie, le gain réalisé
est imposé à l'impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux
traitements et salaires. La taxation est effectuée au titre de l'année au cours
de laquelle le salarié a cédé les actions. »
« V. - Les pertes de recettes résultant des paragraphes précédents sont
compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-142, MM. Charasse, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM.
Demerliat, Haut, Lise,Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 7, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le 6 de l'article 200 A du code général des impôts est complété par deux
phrases ainsi rédigées : "Pour les titres cédés à compter du 1er juillet 2000,
les dispositions du présent alinéa ne sont applicables que si l'assemblée
générale et le comité d'entreprise ont été informés du nom du bénéficiaire, du
nombre des titres cédés et de leur montant. Dans le cas contraire, la cession
est imposée à l'impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux
traitements et salaires. »
Par amendement n° I-166 rectifié, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après
l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le 6 de l'article 200 A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 6. L'avantage mentionné au 1 de l'article 163
bis
C est imposé à
l'impôt sur le revenu suivant les règles appliquées aux traitements et
salaires. »
La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° I-75.
M. Denis Badré.
On parle beaucoup ces temps-ci de stock-options, en bien ou en moins bien.
Le principal auteur de cet amendement n'est autre que le président de notre
groupe, M. Arthuis, qui propose une solution concrète à un vrai problème et qui
a l'ambition de démontrer qu'il est possible de progresser, pour peu qu'on en
ait la volonté politique.
Cet amendement vise à favoriser la distribution de stock-options à l'ensemble
du personnel. Il simplifie et allège le dispositif de taxation de ces produits,
en ne prévoyant leur taxation que lors de la cession des actions.
Je passe sur le détail de cet amendement, qui vise surtout à marquer une
volonté de progresser sur ce dossier.
M. le président.
La parole est à M. Charasse, pour défendre l'amendement n° I-142.
M. Michel Charasse.
La question des stock-options a refait surface récemment dans des conditions
un peu polémiques qui n'étaient pas d'ailleurs injustifiées tant les chiffres
annoncés étaient énormes. Mais, au-delà du tumulte et de l'écume des choses, et
parce que je fais partie de ceux qui n'aiment pas légiférer sous la pression de
l'actualité, il m'a paru utile de proposer une solution qui réglerait bien des
difficultés et qui, à mon avis, serait beaucoup plus efficace que toute
opération que l'on peut tenter de faire sur les taux d'imposition, les
modalités d'imposition, les conditions, etc.
Au fond, la situation française en matière de ce que l'on appelle les
stock-options n'est pas si fondamentalement différente de ce qui se passe dans
les autres pays étrangers, sans que cela suscite des drames dans l'opinion, des
interrogations, des jalousies. Il existe toutefois une très grande différence.
Pourquoi, partout ailleurs, tout est public et pourquoi, chez nous, tout est
secret ?
Quand on gagne de l'argent honnêtement, quand on estime que l'on vaut une
certaine somme, on doit avoir le courage de le dire ! Comme cela se fait
partout ailleurs dans le monde, et sans qu'il soit question d'entrer dans des
débats oiseux sur la taxation, la non-taxation, la surtaxation, l'allégement,
l'exonération ou autres, il suffit de dire la vérité aux actionnaires et aux
salariés !
Par conséquent, mon amendement a simplement pour objet de préciser que, pour
les titres, les stock-options qui seront cédés à compter du 1er juillet 2000 -
j'ai mis le 1er juillet parce qu'à partir du 1er janvier, cela n'ira pas
évidemment - les dispositions fiscales les plus favorables aux stock-options
s'appliqueront à partir du moment où l'assemblée générale des actionnaires et
le comité d'entreprise auront reçu la liste des bénéficiaires, le nombre des
titres cédés et le montant des droits qui leur sont accordés.
Cette façon de faire est d'une transparence absolue ; elle existe dans toutes
les démocraties occidentales libérales. Mais, chez nous, le système est plus
cadenassé que le plus cadenassé des secrets d'Etat, ce qui n'est tout de même
pas normal ! Dans ce cas-là, cela veut dire que l'argent est inavouable. Or,
moi, je considère qu'il est avouable, mais il doit être avoué.
Tel est l'objet de l'amendement n° I-142.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-166 rectifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Peut-être allez-vous nous objecter une certaine insistance et une vision un
peu trop sélective des données fiscales que nous défendons, mais force est de
constater qu'il est largement temps, de notre point de vue, de mettre un terme
aux privilèges fiscaux pour le moins exorbitants du droit commun que constitue
le système des options d'achat d'actions.
On sait que ce dispositif a été l'objet, ces dernières années, de multiples
évolutions, dont la moindre n'a pas été, en 1993, la levée temporaire de délai
de garde.
Il a aussi conduit à de multiples abus, dont le moins que l'on puisse dire est
qu'ils ont fait la « une » de la presse spécialisée comme de la presse
satirique ou de la presse d'opinion.
Les affaires Jaffré et Bébéar ont montré les abus auxquels pouvait conduire ce
dispositif.
Il n'est pas difficile de prévoir que la récente valorisation boursière de
certaines entreprises ou leur introduction sur les marchés seront de nouveau
l'occasion de constater le caractère choquant de ce dispositif.
Nous l'estimons comme tel pour des raisons qui ne sont pas seulement liées au
montant faramineux ou astronomique des sommes en jeu, mais qui tiennent à une
interprétation objective du processus de constitution de l'avantage fiscal.
On nous indique que le système des options d'achat est destiné à faciliter le
maintien en fonction des cadres dirigeants des entreprises concernées.
Sur un strict plan moral, on pourra donc s'interroger sur la valeur de
l'attachement de ces cadres à l'entreprise qu'ils dirigent, qui se mesurerait
ainsi de manière quantifiable et exclusivement monétaire...
La culture managériale serait-elle donc une dissimulation « idéologique » de
préoccupations simplement matérielles ?
Les options d'achat d'actions exercent, on le sait, une attraction
particulière dans les entreprises non cotées et appelées éventuellement à
intégrer les marchés suite à un développement plus ou moins rapide de leur
activité, et singulièrement de sa traduction comptable, le bénéfice.
Or, chacun sait qu'il est particulièrement aisé, sur un plan juridique, de
créer une entreprise non cotée à partir du démembrement d'une entreprise déjà
inscrite à la cote et dont on va distinguer une activité ou un segment
d'activité que l'on pressent porteur, à moyen terme, de plus-values
significatives.
Les choses étant ce qu'elles sont, la valeur de l'entreprise en question va
donc croître et embellir, et, le jour de l'introduction sur les marchés, les
cadres dirigeants pourront donc valoriser leurs achats de manière spectaculaire
et particulièrement rentable.
Je voudrais souligner ici que cette valorisation boursière est, désormais,
assez largement dépendante des conditions mêmes de l'activité, et notamment des
critères de partage entre salaires et valorisation des fonds propres qui sont
retenus dans la gestion de l'entreprise.
En clair, plus la précarité et la productivité apparente du travail sont
importantes, plus la marge de valorisation est élevée.
Le dispositif des options d'achat d'actions est donc une parfaite illustration
du moins-disant social qui sous-tend le libéralisme dans son expression la plus
pure.
C'est aussi ce qui pourrait justifier l'abandon du régime dérogatoire dont
bénéficient ces placements, qui s'apparentent un peu, quoi qu'on en dise, non
pas à un louable effort de développement de l'épargne salariale, mais bien
plutôt à une forme de délit d'initié organisé, couplé à une évasion fiscale
atteignant rapidement des montants surprenants et particulièrement élevés.
La démarche que nous préconisons est loin d'ailleurs d'être en dehors de
l'actualité, puisque, par exemple, même le gouvernement de M. Aznar en Espagne,
devant l'émotion suscitée par le montant des stock-options que se sont
octroyées les cadres de la Telefonica, a décidé de majorer sensiblement la
fiscalité de ces placements.
Exclure aujourd'hui d'apporter une solution au problème posé, car il doit
entrer dans le cadre plus général d'un débat sur l'épargne salariale, ne nous
apparaît pas pertinent.
Avec les stock-options, nous ne sommes pas dans le cadre de ce débat, nous
sommes dans celui de la perversion pure et simple de notre système fiscal au
profit exclusif de quelques initiés, par ailleurs souvent « donneurs de leçons
» quand il s'agit, par exemple, de prôner la modération salariale ou l'abandon
des principes de solidarité dans le financement de la protection sociale.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons donc à adopter cet
amendement de notre groupe.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-75, I-142 et I-166
rectifié ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ce débat important, qu'il faut reprendre dans cet
hémicycle, porte sur un sujet que nous voyons revenir de manière récurrente
dans nos discussions au gré de l'actualité et des propositions qui sont
présentées par les gouvernements successifs. De ce point de vue, l'initiative
de M. Jean Arthuis et des membres du groupe de l'Union centriste vient à
point.
M. Denis Badré.
Excellente initiative !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
En effet, il est bon de reprendre l'ensemble de ce
sujet, de remettre en perspective le régime fiscal des options de souscription
ou d'achat d'actions par rapport à l'évolution de l'économie et par rapport à
ce que l'on peut estimer être l'intérêt de nos entreprises.
Nous devons, mes chers collègues, être animés d'une véritable obsession, celle
de la compétitivité, non pas la compétitivité prise dans un sens trop étroit,
mais essentiellement, me semble-t-il, la compétitivité de notre pays, de son
ordre juridique et fiscal. Si l'on veut que, sur notre territoire, des gens
investissent, prennent des risques, aient intérêt à créer de l'activité et de
l'emploi, il faut à l'évidence que notre pays, en particulier son ordre
juridique et fiscal, soit compétitif, qu'on le veuille ou non !
Il est des comparaisons qui sont élaborées à chaque instant entre les
différents ordres juridiques et les différents ordres fiscaux. De ce point de
vue, Jean Arthuis veut faire un peu de pédagogie, et cet objectif est
naturellement tout à fait digne d'estime.
L'ordre du jour de la prochaine séance publique réservée aux propositions
d'origine sénatoriale, précisément le 16 décembre, comporte deux propositions
de loi qui touchent à ces sujets abordés sous l'angle de l'organisation de
l'entreprise, du droit des sociétés et du droit social.
M. Jean Chérioux a pris l'initiative d'un texte qui va tout naturellement être
rapporté par la commission des affaires sociales. Par ailleurs, M. Jean
Arthuis, à titre complémentaire et, à mon avis, dans la même démarche, va faire
des préconisations concernant les options de souscription ou d'achat d'actions.
Ce texte sera, comme il est naturel en la matière, rapporté par la commission
des finances. Nous nous retrouverons donc en séance pour reprendre l'examen de
l'ensemble du sujet, chacun avec ses préoccupations respectives.
Sur le fond, je me bornerai à trois remarques.
En premier lieu, il faut progresser dans le sens d'une plus grande
transparence. A cet égard, l'amendement n° I-142 de M. Michel Charasse est
largement satisfait par un amendement voté par le Sénat à l'occasion de la loi
sur l'innovation et la recherche, et conçu sur l'initiative du rapporteur pour
avis, M. René Trégouët, amendement que le Gouvernement aurait été bien inspiré,
monsieur le secrétaire d'Etat, de laisser subsister dans le texte jusqu'au
terme de son existence.
Il s'agissait des dispositions suivantes : « L'assemblée générale
extraordinaire d'une société fixe les conditions dans lesquelles l'assemblée
générale ordinaire est informée chaque année des attributions nominatives
d'options. Cette information nominative doit porter au minimum sur les options
de souscription ou d'achat d'actions de la société ou des sociétés ou
groupements qui lui sont liés - cela est important, vous le savez - consenties
au cours de l'exercice écoulé et détenues par : premièrement, le président du
conseil d'administration ou du directoire, les directeurs généraux ou les
gérants ; deuxièmement, les membres du conseil d'administration ou du
directoire et du conseil de surveillance ; troisièmement, les dix salariés de
la société et des sociétés ou groupements qui lui sont liés autres que les
personnes mentionnées ci-dessus pour lesquelles le nombre d'options consenties
au cours de l'exercice écoulé est le plus élevé. »
Ainsi, pour ce qui est de la transparence, sans aller tout à fait jusqu'à la
désignation nominative des bénéficiaires suggérée par Michel Charasse, le
Sénat, en adoptant l'amendement de M. Trégouët, a fait la preuve de sa volonté
de progresser, dans des conditions acceptables au regard de la culture de nos
entreprises.
En deuxième lieu, il faut bien veiller à ce que les stock-options ne puissent
être utilisées sur le marché boursier par des personnes détenant des
informations privilégiées, de telle manière que les opérations réalisées sur ce
marché pourraient se trouver perturbées.
De ce point de vue, depuis des années, nous formulons des propositions
auxquelles il convient de revenir, propositions visant en particulier à éviter
que des dirigeants d'entreprise ne puissent lever les options ou vendre les
titres correspondants à certains moments de la vie de l'entreprise,
c'est-à-dire lorsqu'il y a proximité ou coïncidence avec une information dont
ils sont détenteurs, qui va être rendue publique mais dont le marché n'a pas
encore connaissance.
En troisième lieu, il est un aspect à prendre en compte qui est tout aussi
essentiel que les précédents, c'est la prise de risque.
Le traitement fiscal des options de souscription ou d'achat d'actions comme
plus-values de valeurs mobilières n'est légitime que s'il y a un minimum de
prise de risque de la part de leurs détenteurs. Cela signifie que les
opérations en question doivent être conçues comme une véritable association au
capital supposant, de la part des bénéficiaires, mise de fonds, détention de
titres réelle, physique, ce qui implique qu'ils réalisent les financements
correspondants pendant au moins une certaine période.
C'est bien ce que prévoyait le dispositif que la commission des finances avait
fait voter à la Haute Assemblée lors de l'examen, voilà quelques mois, du texte
présenté par M. Claude Allègre, puisque nous avions prévu la réinstauration du
délai de portage d'un an au minimum, en vertu de ce raisonnement très simple :
oui, les options sont nécessaires et légitimes ; oui, il convient de ne pas
considérer leur mise en jeu comme un surcroît de rémunération, mais à la
condition qu'il y ait bien prise de risque, association au capital, et que les
intéressés fassent un minimum d'efforts pour se trouver dans cette
situation.
A ce moment-là, le système est équilibré, et c'est cet équilibre qui est
institué dans de nombreuses législations étrangères.
Il sera souhaitable de revenir sur ce débat à l'occasion de l'examen, le 16
décembre, des textes qui ont été déposés, d'une part, par Jean Chérioux,
d'autre part, par Jean Arthuis. Sous le bénéfice de cette observation, les
amendements n°s I-75 et I-142 devraient pouvoir, me semble-t-il, être
retirés.
S'agissant de l'amendement n° I-166 rectifié, Mme Beaudeau acceptera que je
lui dise, avec toute la considération qui lui est due, que c'est son amendement
qui m'apparaît comme relevant d'une perversion complète.
M. le président.
L'amendement n° I-75 est-il maintenu, monsieur Badré ?
M. Denis Badré.
Monsieur le président, nous tenions dès aujourd'hui à donner le ton du débat
très important qui se tiendra le 16 décembre à l'occasion de l'examen des
propositions de loi de nos collègues Jean Chérioux et Jean Arthuis. Nous
voulions montrer que ce débat méritait d'être soigneusement préparé par tous et
insister sur la nécessité d'être à la fois - et c'est possible - simple et
pratique, transparent et lisible, ambitieux autant pour l'ensemble des
personnels que pour la compétitivité de nos entreprises, comme le demandait
fort opportunément à l'instant M. le rapporteur général.
Bien entendu, sous le bénéfice de ces remarques, je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-75 est retiré.
L'amendement n° I-142 est-il maintenu, monsieur Charasse ?
M. Michel Charasse.
Je souhaiterais d'abord entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président.
J'ai effectivement omis, monsieur le secrétaire d'Etat, de demander l'avis du
Gouvernement sur les différents amendements soumis à cette discussion
commune.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je remercie M. Charasse de préserver les droits du
Gouvernement, qui n'avaient d'ailleurs été nullement négligés, j'en suis
persuadé, par la présidence.
Bien que l'amendement n° I-75 ait d'ores et déjà été retiré, je tiens à
préciser qu'il est étonnant de vouloir supprimer le taux de 30 % applicable à
la plus-value d'acquisition réalisée par les détenteurs de stock-options, ou
plutôt d'options de souscription d'actions, car cela me semble revenir sur la
réforme des options de souscription d'actions qui avait été préconisée dans le
rapport déposé par MM. Arthuis et Marini en 1995.
MM. Paul Loridant et Philippe Marini,
rapporteur général.
Et M. Loridant !
(Sourires.)
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Et M. Loridant, effectivement ! Justice vous en soit
rendue, monsieur le sénateur !
En même temps, je comprends cette proposition puisque les mesures prises à
l'époque, puis celles qui ont été adoptées en 1997 n'ont pas réussi à instaurer
pour les options de souscription d'actions un régime juridique, fiscal et
social équilibré, et c'est un euphémisme.
Or instaurer un régime juridique, fiscal et social équilibré pour les options
de souscription d'actions est bien l'objectif que poursuit le Gouvernement.
Celui-ci va insérer la réforme de ces options de souscription d'actions dans
une réforme d'ensemble concernant l'épargne salariale et qui sera engagée dès
que le rapport de M. Balligand, député de l'Aisne, et de M. de Foucauld, ancien
commissaire au Plan, sera publié, c'est-à-dire à la fin du mois de janvier ou
dans les premières semaines du mois de février.
Ce rapport fera le point sur les travaux antérieurs, vos travaux, monsieur le
rapporteur général, ceux d'autres membres de la Haute Assemblée et d'autres
contributions.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous ne devons pas préjuger ce que seront
les mesures préconisées par le rapport Balligand - Foucauld.
Je peux toutefois indiquer dès aujourd'hui que, selon moi, les propositions de
plus grande transparence, ce sont celles du rapporteur général. Ce sont
également celles - avec une inflexion encore plus marquée vers la transparence
effective - de M. Charasse puisque celui-ci complète, en quelque sorte, le
dispositif du rapporteur général en proposant que la transparence aille jusqu'à
l'énoncé nominatif des bénéficiaires des plans de souscription d'actions.
Ces dispositions de transparence paraissent nécessaires au Gouvernement. Il
faut, dès à présent, indiquer que cet objectif politique est indispensable non
pas simplement pour moraliser - argument qui est, à juste titre, invoqué par
certains - le système des options de souscription d'actions mais aussi pour
l'aligner sur l'expérience étrangère.
Si ce système est bon pour l'économie, s'il la dynamise, s'il est favorable à
la création d'entreprises, à l'investissement, à la croissance, nul doute que
personne ne souhaitera le cacher, le rendre obscur ou illisible.
Une deuxième idée complète peut-être celle que M. Charasse a incluse dans son
amendement. Pourquoi ne s'interrogerait-on pas sur une distribution des options
de souscription allant, dans la hiérarchie de l'entreprise, plus bas que les
seuls dirigeants ou que la seule poignée de dirigeants qui, dans les
expériences connues jusqu'à présent en matière de distribution d'options de
souscription, en ont été les seuls bénéficiaires ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Arrosage municipal !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il faut sans doute, dans ce domaine, ne pas se
cantonner au sommet de l'entreprise et descendre dans la hiérarchie. Jusqu'où ?
Le rapport de MM. Balligand et Foucauld nous le dira.
Monsieur le rapporteur général, outre l'exigence de transparence, très appuyée
dans l'amendement de M. Charasse, vous avez ajouté deux notions qui me
paraissent devoir être versées aux débats.
Sans que je me prononce au nom du Gouvernement sur ces options, il me paraît
effectivement intéressant, à titre personnel, de veiller à ce que l'exercice de
ces options à des moments favorables, ou du fait la détention d'informations
privilégiées, ne vienne contrecarrer le cours normal de l'évolution du titre ou
perturber le marché. Je considère que c'est une bonne idée.
De plus, vous avez souhaité encourager la prise de risque, distinguant
l'option de souscription d'actions d'une simple rémunération complémentaire aux
salaires versés aux dirigeants. Cela participe de la dynamique de moralisation,
d'une part, et d'efficacité économique, d'autre part. En effet, ou il s'agit
d'éléments de rémunération, et ces options doivent être regardées sur le plan
fiscal comme un revenu,...
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Parfaitement !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... ou il s'agit d'une prise de risque, d'une nature
proche d'un engagement effectif de l'actionnaire, et il est alors légitime que
ces options de souscription bénéficient d'un traitement fiscal particulier.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tout à fait !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Vous avez bien posé le problème que nous aurons à
résoudre dans les prochaines semaines : transparence, précautions prises pour
que le marché ne soit pas perturbé, accent mis sur la prise de risque - car
c'est bien la nature même de l'option de souscription d'actions - celle-ci
devant avoir une traduction financière.
Sur ce dernier point, il peut y avoir, notamment en ce qui concerne le délai
de partage associé à la notion de prise de risque, une forme de contrainte.
En effet, il sera plus facile aux dirigeants de l'entreprise, ceux qui sont au
sommet, qu'à des membres du personnel situés plus bas dans la hiérarchie
d'emprunter pour financer leurs options de souscription d'actions.
Autrement dit, le délai de portage évoqué par le rapporteur général peut être
tourné par les recours à des mécanismes financiers et il gênera moins les
dirigeants du sommet que les autres bénéficiaires éventuels des options de
souscription, puisque je considère, je le répète, que ces options ne doivent
pas être réservées au seul sommet, au seul « top du top » des dirigeants.
L'objection que je viens d'élever me paraît fondée, car le recours à l'emprunt
dans la perspective de la prise de risque sera toujours plus facile pour
quelqu'un ayant déjà acquis un patrimoine qu'il présentera en garantie à son
banquier - et qui pourra ainsi plus facilement souscrire - que pour d'autres
membres de l'entreprise qui n'auront pas le même patrimoine ni les mêmes
facilités.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On ne tond pas un oeuf !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Tout cela, mesdames, messieurs, est en débat. Le
Gouvernement ne souhaite pas, en l'état actuel de ce dossier, prendre position.
Il souhaite attendre la remise du rapport. Cela dit, la discussion de grande
qualité qui se déroule ce matin au Sénat est une contribution importante à ce
débat. Nous y reviendrons lorsque nous vous soumettrons un plan global consacré
au développement de l'épargne salariale de l'entreprise.
(Applaudissements.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-142.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
J'ai écouté avec l'attention que l'on imagine ce qui vient d'être dit par le
rapporteur général, d'une part, et par le secrétaire d'Etat, d'autre part.
M. le secrétaire d'Etat a rappelé que des réflexions étaient actuellement en
cours sur l'ensemble de la question dite des stock-options - même si le terme a
de quoi hérisser ceux qui n'aiment pas beaucoup le franglais - en ce qui
concerne leur taxation, leur régime fiscal, les modalités de leur distribution,
etc.
Je dirai amicalement à M. le secrétaire d'Etat que ce sont des éléments
importants mais que, quelle que soit la manière dont on aborde la question des
stock options
, dans tous les cas on retrouve, à mon avis, la question de
la transparence, qui est pour moi une exigence.
De ce point de vue, il n'y a donc pas de désaccord, me semble-t-il, entre le
Gouvernement et moi, ni même, d'ailleurs, entre M. le rapporteur général et mes
amis et moi, puisque c'est un amendement qui est présenté par les membres de
mon groupe.
Monsieur le rapporteur général, vous avez dit que nous avions satisfaction
grâce à l'amendement de M. Trégouët, et vous avez rappelé les termes de cet
amendement. Mais, le problème, c'est que cette information paraît insuffisante,
partielle, bref, on a l'air de faire du camouflage, contrairement à ce qui se
passe à l'étranger.
En outre, le code des sociétés comporte une disposition qui renvoie à un
décret le soin d'assurer la transparence. Il se trouve que ce décret n'a jamais
été pris - c'est donc la faute des gouvernements, de l'exécutif - mais pour une
raison très simple : les dispositions concernant la transparence sont, à
l'évidence, des dispositions de nature législative. Par conséquent, je ne vois
pas comment l'exécutif aurait pu, même par délégation du législateur, sans
doute très maladroite, intervenir par voie réglementaire dans un domaine qui
touche au patrimoine et qui, par nature, relève du domaine réservé à la loi par
l'article 34 de la Constitution.
Nous avons donc l'amendement de M. Trégouët, information partielle et
insuffisante, un décret prévu dans le code des sociétés, mais qui n'a pas été
pris parce que la matière ne relève pas vraiment du domaine réglementaire, et
un tronc commun de toutes les dispositions à l'étude annoncées par M. le
secrétaire d'Etat. On prône la transparence ! Pourquoi ne pas l'instaurer tout
de suite ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
On va le faire !
M. Michel Charasse.
Comme je l'indiquais tout à l'heure, on a toujours intérêt à dire la vérité.
Pourquoi cela est possible ailleurs et par chez nous ? C'est une antienne que
je ne cesserai de prononcer. Pourquoi faudrait-il que l'argent soit chez nous
honteux - c'est sans doute la raison pour laquelle on le cache - alors que,
normalement, il ne l'est jamais et il ne peut pas l'être lorsqu'il est justifié
par le génie, par le talent, par le travail, par les services que l'on rend à
l'économie, à la société, à son pays, à l'emploi.
M. Jean Chérioux.
Et par le risque !
M. Michel Charasse.
Et par le risque que l'on prend, encore que l'on ne doive pas forcément
arroser excessivement les risque-tout. Il y a une différence entre celui qui
prend des risques et le cascadeur, car l'un peut recevoir des stock-options et
l'autre éventuellement une distinction dans un grand ordre national.
(M. le
rapporteur général sourit.)
Ce n'est pas tout à fait la même chose !
Cela étant, je suis perplexe. M. le secrétaire d'Etat me demande de retirer
l'amendement. Je serais tenté de le faire en me disant que je vais attendre
l'ensemble du dispositif. Mais la question transcende tout le reste ! Je veux
bien, en accord avec mes amis, retirer l'amendement...
(L'orateur se tourne
vers les membres de son groupe qui font des signes de dénégation.)
M. Emmanuel Hamel.
Il y a doute !
M. Michel Charasse.
Eh bien ! je ne le retire pas !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-142.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je dois dire que je suis assez satisfait d'avoir entendu ce que je viens
d'entendre, en particulier venant d'un gouvernement issu de la gauche plurielle
: celle-ci vient de découvrir les mérites de la participation et de l'épargne
salariale, de tout ce qui a été combattu par la gauche depuis une quarantaine
d'années. C'est une grande satisfaction pour moi.
(M. le secrétaire d'Etat fait un signe dubitatif.)
On ne peut pas dire
que la gauche a été le champion de la participation, monsieur le secrétaire
d'Etat ! Vous n'allez pas nous enlever cela !
Vous avez dit, et j'en suis très heureux, que vous alliez vous inspirer des
débats du Sénat et de l'Assemblée nationale. J'espère donc, monsieur le
secrétaire d'Etat, que vous vous intéresserez aux deux propositions de loi qui
seront débattues ici même, le 16 décembre prochain, même si vous ne leur
donnerez sans doute pas votre agrément parce que vous allez présenter votre
propre texte. En tout cas, vous y apprendrez des choses qui pourront vous être
extrêmement utiles et qui seront surtout utiles à la nation.
Cela dit, parmi les différents interlocuteurs que vous avez envisagés, vous en
avez oublié un, qui est pour moi très important : je fais allusion à une
institution que j'ai contribué à créer, le Conseil supérieur de la
participation. Je souhaite qu'en la matière le Gouvernement demande l'avis de
ce Conseil supérieur de la participation. Il oeuvre depuis un certain nombre
d'années déjà sur ce problème et il a des idées très précises sur le sujet.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
Monsieur le secrétaire d'Etat, avant de vous donner la parole, j'informe le
Sénat que je suis saisi, par M. Charasse, d'une demande de rectification
portant sur son amendement. Il s'agira donc de l'amendement n° I-142 rectifié,
dont je vous donne lecture :
« Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le 6 de l'article 200 A du code général des impôts est complété par deux
phrases ainsi rédigées :
« Pour les titres cédés à compter du 1er juillet 2000, les dispositions du
présent alinéa ne sont applicables que si l'assemblée générale et le comité
d'entreprise ont été informés dans des conditions fixées par décret du nom du
bénéficiaire, du nombre des titres cédés et de leur montant. Dans le cas
contraire, la cession est imposée à l'impôt sur le revenu suivant les règles
applicables aux traitements et salaires. »
Je vous donne maintenant la parole, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je souhaite réagir à ce qu'a dit M. Chérioux. La
majorité plurielle et le Gouvernement ne viennent pas de découvrir les vertus
de l'épargne salariale. Je procéderai à un simple rappel historique.
J'ai le souvenir, comme d'autres certainement dans cet hémicycle, que c'est le
ministre des finances, M. Jacques Delors, qui, en 1983, a proposé un texte
concernant le développement de l'épargne salariale dans la loi de finances
initiale pour 1984. C'est donc dès le début de son accession au gouvernement
que la gauche a manifesté son intérêt pour ce type d'association des salariés à
la marche des entreprises.
M. Michel Charasse.
Les mutuelles pratiquent l'épargne salariale depuis le début du siècle !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'épargne salariale date, bien sûr, du mouvement
mutualiste.
M. Jean Chérioux.
La gauche n'est pas allée jusqu'à la participation !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je ne disconviens pas que vous ayez une antériorité
sur nous en ce qui concerne la participation. Toutefois, dans le souci,
d'ailleurs, d'aller dans votre sens...
M. Emmanuel Hamel.
Merci, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre bon sens !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... puisque nous manifestons, les uns et les autres,
un intérêt à l'égard de ces dispositifs, je voulais rétablir la vérité
historique : en 1983, la gauche a également proposé une réforme de l'épargne
salariale par la création de fonds salariaux...
M. Jean Chérioux.
Faiblement !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... qui rencontrent du reste un certain succès
aujourd'hui dans nombre d'entreprises françaises.
S'agissant de l'amendement n° I-142 rectifié présenté par M. Charasse, malgré
le progrès que constitue le renvoi à un décret, le Gouvernement s'en tient à sa
position initiale : un rapport circonstancié sera rendu public dans quelques
semaines et c'est sur cette base que nous bâtirons les modifications
législatives qui nous apparaîtront nécessaires.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement n° I-142 rectifié ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Des dispositions en la matière doivent être
clairement rédigées dans la loi. Dès lors, il n'est point besoin de décret.
L'amendement de M. Trégouët, tel que nous l'avons voté, est extrêmement clair,
mais je rappelle qu'il n'a pas force de loi puisque, le 30 juin dernier, lors
de la discussion du projet de loi sur l'innovation et la recherche, on nous a
opposé la clôture de la session : nous avons dû voter le texte conforme afin
que les universités puissent disposer des crédits nécessaires.
Nous avons été l'objet de suffisamment de pressions sur ce sujet pour que nous
soyons empêchés d'améliorer ce texte comme il aurait fallu le faire !
L'amendement de M. Trégouët, qui, bien entendu, viendra de nouveau en
discussion le 16 décembre prochain est, je le répète, tout à fait clair : il
est contraignant et ne nécessite aucun décret.
En la matière, il faut bien comprendre qu'il y a le pouvoir non seulement de
la loi, mais aussi des statuts. C'est bien la raison pour laquelle nous avons
insisté sur la première phrase de l'amendement de M. Trégouët : « L'assemblée
générale extraordinaire fixe les conditions dans lesquelles l'assemblée
générale ordinaire est informée chaque année des attributions nominatives
d'option ». Par conséquent, la loi impose un minimum de transparence, mais
l'assemblée générale extraordinaire peut faire plus que la loi.
Ce texte se suffit largement à lui-même ! Il n'est vraiment pas nécessaire de
donner au pouvoir réglementaire une marge de manoeuvre en la matière. Le
législateur doit prendre ses responsabilités ! Les fondateurs et les
actionnaires d'une société doivent aussi prendre leurs responsabilités !
Telles sont les raisons de fond pour lesquelles je suis défavorable à cet
amendement n° I-142 certifié.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Monsieur le président, je rectifie de nouveau mon amendement : je supprime la
référence au décret, puisque, si j'ai bien compris, M. le rapporteur général y
serait alors favorable.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° I-142 rectifié
bis,
présenté par
MM. Charasse et Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Demerliat, Haut, Lise, Massion,
Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés et
tendant à insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le 6 de l'article 200-A du code général des impôts est complété par deux
phrases ainsi rédigées :
« Pour les titres cédés à compter du 1er juillet 2000, les dispositions du
présent alinéa ne sont applicables que si l'assemblée générale et le comité
d'entreprise ont été informés du nom du bénéficiaire, du nombre des titres
cédés et de leur montant. Dans le cas contraire, la cession est imposée à
l'impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux traitements et
salaires. »
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement n° I-142 rectifié
bis
?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Notre divergence n'est pas énorme : selon la
commission des finances, il faut une gradation : un minimum de transparence
doit être imposé par la loi et il faut que les entreprises puissent, statuant
en assemblée générale extraordinaire, aller au-delà de ce minimum, minimum qui
est nominatif dans l'amendement de M. Trégouët.
Un débat aura lieu en la matière le 16 décembre prochain. Il sera vraiment
focalisé, d'un côté, sur l'épargne salariale et, de l'autre, sur les
différentes modalités d'association au capital des entreprises.
Très franchement, mes chers collègues, il serait plus productif de régler
cette question dans le cadre dudit débat.
Par ailleurs, sans nier, loin de là, l'importance des sujets dont nous
traitons, je dirai, sous le contrôle de la présidence, que nous ne progressons
peut-être pas au rythme qui nous permettrait d'« écluser », d'ici à demain
soir, tous les amendements - plus de cent cinquante - qui restent en
discussion. Je ne voudrais pas que nous prenions le risque, les uns et les
autres, de désorganiser la suite des débats. Dès lors que nous avons la
possibilité de traiter cette question le 16 décembre prochain, faisons-en un
bon usage.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous demande de bien
vouloir retirer vos amendements.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-142 rectifié
bis.
M. Bernard Angels.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels.
Le débat qui nous occupe est très intéressant. M. le rapporteur général
affirme que nous sommes tous d'accord sur le sujet. Dès lors, pourquoi ne pas
marquer cet accord à l'égard de l'opinion publique ?
Les dernières péripéties de l'actualité française nous ont tous convaincus que
les Français ont, de plus en plus, une vision de l'argent et de l'entreprise
qu'il faut combattre. Il faut réconcilier les Français - je rejoins là M.
Chérioux - avec ceux qui travaillent, ceux qui prennent des risques pour créer
des emplois et pour que l'entreprise fonctionne. Aujourd'hui, nous avons
l'occadion, unanimement, d'y parvenir en étant d'accord sur la nécessité
d'instaurer une transparence des stock-options. Dans la mesure où les autres
pays européens l'ont fait, ayons le courage de nous aligner sur eux !
Nous maintenons donc notre amendement et je demande que le Sénat se prononce
par un scrutin public.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je suis étonné de l'acharnement du groupe socialiste. Pourquoi voter ce texte
aujourd'hui ? Le groupe socialiste est peut être ennuyé d'avoir à s'associer à
notre travail le 16 décembre prochain. Peut-être prendra-t-il une position de
principe contre ce que nous proposerons ? Comme le dispositif qu'il prévoit
aurait sans doute été alors examiné avec beaucoup d'intérêt, il essait
aujourd'hui de faire un coup de publicité autour de celui-ci. C'est dommage.
En effet, comme l'a dit M. le rapporteur général, ce texte a indiscutablement
sa place, non pas dans le présent projet de loi de finances, mais dans les
textes que nous examinerons le 16 décembre prochain.
C'est la raison pour laquelle je voterai contre cet amendement.
M. Denis Badré.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
Mon groupe votera, lui aussi, contre cet amendement. Je précise que c'est non
pas par désintérêt pour le sujet que nous évoquons ni même pour l'amendement
qui est présenté, mais parce que nous pensons que le sujet est suffisamment
important pour donner lieu à un véritable débat, bien préparé et bien conduit,
qui débouchera sur un bon texte.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je l'ai dit tout à l'heure, il y a plusieurs éléments dans cette question des
stock-options. Le vrai débat portera bien sûr sur les points signalés par M. le
secrétaire d'Etat, qui font l'objet d'études approfondies à l'heure actuelle.
Mais, sur la transparence, il ne peut pas y avoir débat, sinon cela signifie
que l'on ne veut pas sortir du mystère actuel, de l'incertitude, du camouflage,
c'est-à-dire que l'on ne veut pas vraiment que les choses soient mises sur la
place publique.
Les propositions de notre collègue M. Trégouët, pour lequel j'ai une très
grande estime, ne vont pas complètement au bout. M. le rapporteur général nous
a dit que l'on pourrait faire un effort pour aller un peu plus loin. Pourquoi
ne publie-t-on pas toute la liste ? Qu'y a-t-il de honteux à la publier ?
M. Chérioux, et je l'écoute toujours avec beaucoup d'attention, nous dit qu'il
ne comprend pas l'acharnement du groupe socialiste et il se demande pourquoi on
traite aujourd'hui de cette question. Mon cher collègue, si nous avions été à
l'Assemblée nationale, nous l'aurions traitée avant, puisque la question a déjà
fait l'objet d'une discussion au Palais-Bourbon. Mais il se trouve que
l'Assemblée nationale est saisie du projet de loi de finances avant nous, selon
la Constitution, et cela est normal puisque c'est l'assemblée élue au suffrage
direct. Pourquoi serait-il interdit au Sénat de se préoccuper des mêmes
questions que l'Assemblée nationale ? Par conséquent, nous sommes dans notre
rôle.
On nous dit que, quelles que soient les solutions trouvées sur l'ensemble des
points techniques signalés par M. Pierret, se posera toujours sur chacun d'eux
la question de la transparence, puisqu'elle est commune à l'ensemble et que
nous sommes d'accord. Eh bien, réglons l'affaire aujourd'hui. Le problème est
très simple.
De surcroît, le dispositif ne joue que pour les titres qui seront distribués à
compter du 1er juillet 2000, c'est-à-dire après la prochaine assemblée générale
de chaque société, puisque cette assemblée générale ne peut pas connaître des
titres distribués préalablement, en 1999. Telle est la précaution que nous
avons prise. Dans ces conditions, pourquoi attendre ?
Je pense que l'image du Sénat en sortirait grandi sur ce point. Ainsi, nous
montrerons une véritable intention, comme l'a très bien dit M. Angels, de
réconcilier les Français et l'argent, de leur faire admettre que ceux qui sont
valeureux, qui travaillent beaucoup, qui déploient du génie, qui courent des
risques, comme l'a dit M. Chérioux, bref, ceux qui le méritent, reçoivent une
rémunération qui, par rapport à l'ensemble mondial dans lequel nous vivons, n'a
rien de scandaleux. Par conséquent, réglons la question aujourd'hui.
J'ajoute, mes chers collègues, qu'il y a une navette. Nous verrons bien ce que
l'Assemblée nationale pensera de notre initiative. Trouvera-t-elle que nous
sommes trop « transparents » ? Ce serait un comble ! En tout cas, tentons
l'opération. Cela ne coûte rien, on est en première lecture ; on a encore tout
le temps de voir.
En tout cas, ce serait un signe formidable que nous donnerions à l'opinion
publique après ce qui s'est passé récemment et que je trouve personnellement
tout à fait malsain.
M. Yann Gaillard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Nous assistons à une discussion passionnante. Cette compétition vertueuse vers
le bon sens entre la droite et la gauche nous fait espérer qu'une solution sera
trouvée à ce problème qui n'a que trop fait l'objet de stériles polémiques.
Je rends à César ce qui est à César et j'avoue avoir apprécié les propos de M.
le secrétaire d'Etat et la matière dont il a résumé la question. Si le rapport
Balligand-Foucauld nous permet de parvenir à ce genre de solution, ce sera un
grand pas en avant.
La transparence est, en effet, la clé d'une solution. A partir du moment où il
y aura transparence et où celle-ci sera reconnue par tout le monde, les
stock-options n'auront plus cet aspect sulfureux qu'une partie de l'opinion
leur reconnaît.
Doit-on, suivant la prière expresse de M. Charasse, régler cette question dès
aujourd'hui ou attendre le 16 décembre prochain ? Je suis partagé.
En tout cas, nous pouvons donner acte à notre collègue M. Charasse de l'effort
très important qu'il a accompli pour se rapprocher d'une solution commune en ce
domaine. La transparence est effectivement importante puisqu'elle mettrait
notre pays dans un état de civilisation financière comparable à celle où vivent
les grands pays libéraux.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le débat que nous avons est suffisamment important,
profond, intéressant et de grande qualité pour que je dise que je suis
complètement en accord avec ce que MM. Angels et Charasse ont indiqué voilà un
instant sur la transparence et sur la nécessité, de manière dépassionnée,
ouverte, au nom des principes mêmes de prise en compte du risque et de
dynamisation de l'économie française, de nous aligner - le mot n'est pas
excessif - sur la pratique d'autres pays en Europe. En effet, plusieurs membres
de l'Union européenne n'ont pas peur, eux, de la transparence, et la
démonstration en a été faite excellement par les deux orateurs que je viens de
citer.
Par conséquent, ce n'est ni sur le fond, ni sur les objectifs, ni sur la
nécessité de promouvoir enfin, dans ce débat plutôt empoisonné, une ligne de
conduite simple, claire, ouverte et dépassionnée que j'ai demandé tout à
l'heure à M. Charasse de retirer son amendement. Mais s'agissant de la méthode,
il ne me paraît pas bon, au détour d'un amendement de cette nature, même s'il
est discuté avec la profondeur qui caractérise le Sénat et en dépit de la
qualité des intervenants, quelles que soient les travées sur lesquelles ils
siègent, il ne me paraît pas bon, disais-je, de ne pas se donner quelques
semaines de réflexion, messieurs Charasse et Angels, en attendant les
conclusions du rapport Balligand-Foucauld, qui permettra, grâce à la qualité de
ses auteurs, de lever les quelques imprécisions qui entachent encore quelque
peu le débat.
M. Charasse a évoqué dans son amendement les titres cédés mais, oralement, il
a parlé de levée de l'option pour le 1er juillet 2000.
M. Michel Charasse.
C'est une erreur de ma part.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Bref, il faut savoir comment nous pouvons procéder. Le
débat mérite mieux qu'un vote trop rapide sur un amendement de ce type.
M. Denis Badré.
Absolument !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Ayant réaffirmé l'objectif, de transparence et
d'ouverture de ce dispositif que tout le monde a mentionné, et le Gouvernement
le premier, je crois, messieurs Charasse et Angels, qu'il serait vraiment
utile, pour la sérénité et la profondeur du débat, d'attendre les conclusions
du rapport puisque le Gouvernement a pris solennellement l'engagement de
revenir sur cette question à la lumière des travaux qui sont actuellement
engagés.
M. le président.
Monsieur Charasse, l'amendement n° I-142 rectifié
bis
est-il maintenu
?
M. Michel Charasse.
Monsieur le président, en concertation avec mes amis, je retire l'amendement
(Marque d'approbation au banc des commissions.)
Mais il est entendu que nous tenons, nous, à la transparence totale pour tout
le monde et que, si les dispositions qui nous seront présentées ne comportent
pas ce dispositif, vous nous retrouverez à ce moment-là avec la même pugnacité
et la même vigueur.
Et maintenant, chers amis, puisqu'il est l'heure de déjeuner, bon appétit !
(Sourires.)
M. le président.
L'amendement n° I-142 rectifié
bis
est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-166 rectifié, repoussé par la commission et
par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° I-18, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A l'article 150 Q du code général des impôts :
« - la somme "6 000 francs" est remplacée par la somme : "19 679 francs" ;
« - la somme "20 000 francs" est remplacée par la somme : "65 596 francs" ;
« - la somme "30 000 francs" est remplacée par la somme : "91 834 francs" ;
« - la somme "10 000 francs" est remplacée par la somme : "32 798 francs" ;
« - la somme "75 000 francs" est remplacée par la somme : "229 585 francs"
;
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du
paragraphe I est compensée à due concurrence par une majoration des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
J'ai déjà eu l'occasion, à plusieurs reprises, de
souligner la montée des prélèvements rampants. Monsieur le secrétaire d'Etat,
j'attire votre attention sur ce phénomène, qui tient largement au fait que le
barème de l'impôt sur le revenu est simplement indexé sur les prix et ne tient
pas compte de la croissance réelle ; nous avons déjà évoqué ce sujet hier.
Mais aux effets de la progressivité du barème - j'insiste sur ce point -
s'ajoutent la non-réévaluation de tout un ensemble de seuils ponctuels, comme
en témoigne le tableau qui figure à la page 126 du tome II de mon rapport
écrit, dont les effets, bien que moins sensibles en période d'inflation
ralentie, ne sont pas négligeables sur la réalité du taux de la pression
fiscale.
S'agissant de mesures symboliques, il est proposé d'actualiser les montants
figurant à l'article 150 Q du code général des impôts, qui n'ont jamais été
revalorisés depuis 1977. Ceux-ci comportent notamment l'abattement général de 6
000 francs par an sur le total des plus-values réalisées au cours d'une même
année, l'abattement spécifique de 75 000 francs lorsque les plus-values
résultent d'une expropriation ou d'une cession à l'Etat ou à ses établissements
publics administratifs, ainsi que les abattements spécifiques en cas de cession
de la première résidence taxable, à savoir 20 000 francs par époux, 30 000
francs pour un veuf et 10 000 francs par enfant.
Il s'agit de tenir compte de l'évolution des prix du marché immobilier, qui,
même s'ils ont baissé au cours des années quatre-vingt-dix, restent très
largement supérieurs à ce qu'ils étaient à la fin des années soixante-dix.
Cette mesure d'équité paraît d'autant plus nécessaire que son coût devrait
être limité. A ce titre, je citerai le dernier alinéa du commentaire de cet
amendement qui figure dans mon rapport écrit : « La commission s'est contentée
d'actualiser les abattements sur la base de l'évolution de l'indice général des
prix. En anticipant sur les prochaines années, elle vous propose de fixer ces
abattements en francs mais par rapport à une valeur arrondie en euro. »
(Sourires.)
Monsieur le secrétaire d'Etat, ces dispositions représentent, de la part de
notre commission, un effort peignage du droit fiscal et des seuils en valeur
absolue. Il conviendrait que, de son côté, l'administration s'attache au même
effort, c'est-à-dire à réexaminer de façon permanente la législation en vigueur
pour bien s'assurer que l'intention du législateur est toujours respectée.
En effet, dix ans ou quinze ans après la fixation d'un seuil en valeur
absolue, l'intention du législateur peut être complètement pervertie si ledit
seuil n'est pas modifié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, permettez-moi de dire
avec humour qu'en matière de trivialité, vous avez franchi le seuil de
l'inacceptable en prononçant le mot « euro ».
(Sourires.)
Votre collègue
M. Emmanuel Hamel ne vous le pardonnera certainement pas.
Il serait ni raisonnable ni équitable de réduire de la sorte le rendement de
l'impôt sur cette catégorie de revenus que constituent les plus-values sur les
particuliers, rendement qui est déjà faible, il faut le reconnaître, compte
tenu de l'importance des abattements et des très nombreuses exonérations
initialement prévues par le législateur. Donc, ma position se fonde d'abord sur
un argument d'ordre budgétaire.
Je rappelle aussi que ce régime d'imposition a été considérablement assoupli
depuis l'entrée en vigueur de la loi du 19 juillet 1976, notamment en 1983, par
la suppression de la taxation spécifique des plus-values spéculatives
occasionnelles, l'application de l'abattement par année de détention dès la
troisième année de possession du bien au lieu de la onzième année et
l'institution d'une exonération pour première cession d'un logement.
Surtout, ces plus-values imposées selon le barème de l'impôt sur le revenu
bénéficient chaque année du relèvement des limites des tranches décidé par le
Parlement dans le cadre de l'examen de la loi de finances initiale.
J'ajoute que l'allégement du régime d'imposition des plus-values des
particuliers que vous proposez n'aurait en fait pas d'impact notable sur le
marché immobilier. En effet, contrairement à une idée peut-être trop largement
répandue, il est avéré que l'effet de ce régime sur le marché est négligeable.
Je vois bien l'intérêt de fixer des seuils en euro tout ronds : le Gouvernement
est sensible à cet aspect, et je vous annonce que nous travaillons sur un texte
qui visera à résoudre cette difficulté.
Pour l'ensemble de ces raisons, je vous demande, monsieur le rapporteur
général, de bien vouloir retirer l'amendement que vous venez de défendre.
M. le président.
Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° I-18 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-18, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 7.
Par amendement n° I-19, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est inséré après le deuxième alinéa de l'article 151
sexies
du code général des impôts un alinéa ainsi rédigé :
« Pour le calcul des plus-values réalisées lors de la vente d'un fonds de
commerce, lorsque le bien est cédé plus de deux ans après son acquisition, le
prix d'acquisition est révisé proportionnellement à la variation de l'indice
moyen annuel des prix à la consommation depuis l'acquisition. »
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus sont
compensées par le relèvement à due concurrence des droits visés aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement a pour objet de prendre en compte,
pour le calcul des plus-values résultant de la vente d'un fonds de commerce
possédé depuis plus de deux ans, l'inflation constatée sur la durée de
l'exploitation.
En effet, à l'heure actuelle, la plus-value imposable d'un contribuable qui
exerce une activité agricole, commerciale, artisanale ou libérale et qui cède
son fonds de commerce est déterminée, comme il est naturel, par la différence
entre le prix d'achat et le prix de cession, mais sans mise à jour du prix
d'acquisition en fonction de l'inflation.
Il serait anormal que le Trésor public s'approprie une partie de la plus-value
qu'a fait naître l'inflation.
De plus, ce régime fiscal est nettement moins favorable que le régime des
plus-values immobilières qui se caractérise non seulement par la revalorisation
du prix d'acquisition en fonction de l'inflation, mais également par un
abattement sur la plus-value de cession de 5 % par année de possession de
l'immeuble, et ce au-delà de la deuxième.
S'agissant des fonds de commerce, il est donc proposé cette mesure d'équité,
notamment par rapport au régime des plus-values immobilières. Au nom de quoi
traite-t-on plus mal l'activité économique détenue sous forme de fonds de
commerce que le patrimoine immobilier qui, quelles que soient ses vertus, peut
être moins créateur d'emplois que ne l'est l'exploitation d'un fonds de
commerce ?
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
La disposition est certainement plus importante pour
les petites et moyennes entreprises que pour les plus grandes.
Nous savons tous que les petites entreprises dont les résultats sont soumis à
l'impôt sur le revenu bénéficient de nombreuses mesures d'allégement. Ainsi, la
plus-value est exonérée d'impôts si l'activité est exercée depuis au moins cinq
ans, sous réserve que les recettes de l'année de cession, ramenées à douze
mois, et celles de l'annnée précédente n'excèdent pas le double des limites du
régime des micro-entreprises.
Dans ces conditions, prenant en compte l'existence de nombreux abattements et
exonérations, je vous prie de bien vouloir retirer cet amendement. A défaut, je
demanderai au Sénat de voter contre.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Monsieur le président, je
souhaite soutenir avec vigueur la proposition qui est présentée par M. le
rapporteur général, car elle prend en compte une réalité qui a beaucoup changé
depuis l'institution de la CSG.
Il est vrai que ces impositions de plus-values étaient acceptables par le
redevable car le taux qui était imposé était tolérable par rapport aux
plus-values dégagées. Or il s'y est ajouté une telle sédimentation d'impôts
nouveaux que les redevables en viennent à considérer qu'il s'agit d'un impôt
purement et simplement confiscatoire.
Lorsqu'ils réalisent leur fonds de commerce, le prélèvement de 26 % leur
paraît insoutenable, puisque le coût d'acquisition est parfois devenu
symbolique en raison de l'inflation. C'est ainsi que l'Etat les exproprie en
quelque sorte d'un quart du fruit du travail de toute une vie
professionnelle.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous prenez un exemple certes sympathique mais
qui couvre un cas peu fréquent, celui de l'exonération au-delà des cinq années.
Vous savez que les seuils sont si faibles qu'ils ne visent presque plus
personne.
Comme vous êtes un membre du Gouvernement très présent sur le terrain et
parfaitement averti de la réalité des petites et moyennes entreprises, vous ne
pouvez rester insensible à la proposition qui vous est faite par M. le
rapporteur général. Je suis convaincu qu'une réflexion supplémentaire ne pourra
que vous amener à approuver plus tard cette proposition. Fruit du bon sens,
elle démontre à quel point le Sénat est indispensable à la République.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-19.
M. Jacques Oudin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin.
Je n'ai pas trouvé dans les explications de M. le secrétaire d'Etat de réponse
à la proposition excellemment développée par M. le rapporteur général et par M.
le président de la commission des finances.
C'est vraiment une proposition de bon sens et de justice puisqu'il s'agit de
revaloriser un prix d'acquisition en fonction de la variation de l'indice moyen
annuel des prix à la consommation depuis cette même acquisition.
Je ne vois pas en quoi et sur quelles bases le Gouvernement pourrait refuser
des mesures de cette nature.
M. René Ballayer.
C'est le bon sens !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
J'ai l'impression que nos adresses au secrétaire
d'Etat ne sont pas suffisamment efficaces. Alors, pendant un instant, je ne
vais plus m'adresser au secrétaire d'Etat mais au maire de Saint-Dié. Qu'il
veuille bien m'écouter !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je ne suis que son premier adjoint !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Au premier adjoint au maire de Saint-Dié, soit !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
C'est désormais un titre
glorieux !
M. le président.
Il rendra compte au maire !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Nous sommes presque gênés d'être
maires !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Imaginons la situation suivante : un commerçant, qui
se situe dans l'une des rues commerciales de Saint-Dié, vient à arrêter son
activité.
Ce commerçant, qui a travaillé normalement mais qui n'a jamais connu une vie
fastueuse, arrive tout simplement à l'âge de la retraite. Il exploitait avec
son épouse. Il n'y a pas de successeurs parmi ses enfants ou, tout simplement,
il n'a pas d'enfants. Il doit, par conséquent, céder son fonds de commerce.
Or, ce commerçant exerce dans la même rue depuis trente, trente-cinq, voire
quarante ans - peu importe - et a succédé lui-même à son père qui exerçait au
même endroit la même activité, ou une activité similaire. Il va devoir céder ce
fonds de commerce et trouver un successeur.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
C'est l'horloger de Saint-Dié
!
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Pourquoi pas ?
On va considérer, à ce moment-là, qu'il y a une plus-value entre la valeur
d'entrée dans son patrimoine, c'est-à-dire tout simplement à la succession de
son père, voilà trente-cinq ou quarante ans, et la valeur vénale de cession du
fonds de commerce à une autre activité commerciale. L'administration va donc,
si j'ai bien compris, taxer au taux de 26 % la différence entre la valeur
historique et la valeur vénale actuelle.
Comment voulez-vous, monsieur le premier adjoint, que le commerçant en
question ne vienne pas vous trouver, sachant que vous exercez quelques
responsabilités gouvernementales, pour vous dire que c'est fondamentalement
injuste ? Il faut que l'administration puisse répondre à ce type de
sollicitation. C'est une simple question de bon sens qui concerne des personnes
qui, après toute une vie de travail, se trouvent ainsi piégées par la
fiscalité.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande instamment d'apporter une
réponse, éventuellement progressive, à notre préoccupation. Sachez que nous
serions prêts à accepter que vous nous proposiez de procéder sur ce sujet par
paliers. Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le premier adjoint, vous
ne pouvez pas rester insensible à de tels appels.
M. le président.
Monsieur le secrétaire d'Etat, avez-vous entendu l'appel, qui est non pas
celui de l'horloge, mais celui de Saint-Dié ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je répondrai à ce commerçant que le Gouvernement
comprend bien ses problèmes, puisque la transmission des fonds de commerce fait
l'objet, dans le présent projet de loi de finances, d'une disposition
favorable, qui tend à diminuer les droits perçus à cette occasion de 11,4 % à
4,8 %.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
C'est l'acquéreur qui les
paye.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Voilà pour la première partie de ma réponse.
Je répondrai par ailleurs que la réforme de 1975 relative à la taxe
professionnelle n'a pas défavorisé - c'est le moins que l'on puisse dire - le
petit commerce par rapport à l'industrie.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Vous allez être recalé deuxième
adjoint !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
En outre, au cours de sa vie professionnelle de trente
ans - c'était l'hypothèse que vous preniez -...
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
J'ai parlé de quarante ans !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
On ne peut pas aller au-delà de quarante ans puisque
la rue principale de Saint-Dié a été détruite par les nazis en 1944.
Au cours de ses quarante ans de vie professionnelle, disais-je, le petit
commerçant en question a bénéficié de dispositions favorables au petit commerce
relatives à l'imposition de la taxe professionnelle.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Dites-le-lui !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Il va vous prendre pour un
énarque !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je peux le prouver tous les jours. J'aurais rassuré ce
commerçant en lui indiquant combien le Gouvernement, concrètement, dans le
présent projet de loi de finances est attentif à ses problèmes.
Vous le savez bien ! Vous cherchez à pousser le bouchon plus loin, monsieur le
rapporteur général. C'est la fonction qui le veut.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
C'est pour vous aider !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Pour aider le premier adjoint !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je vous remercie de votre sollicitude, mais ma très
grande capacité d'écoute pour comprendre les appels de ceux qui s'adressent au
Gouvernement par mon intermédiaire ne va pas jusqu'à épouser votre
raisonnement.
Je demande donc au Sénat de rejeter votre amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-19, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquent, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 7.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous
les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la
présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté
par l'Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles de la première partie, nous poursuivons
l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après
l'article 7.
Je suis tout d'abord saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° I-236 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Gaillard, Joyandet, Ostermann, Tregouët, Murat, Leclerc, Braye et Le Grand
proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Au premier alinéa de l'article 151
septies
du code général des
impôts, les mots : "le double de" sont remplacés par les mots : "deux fois et
demie".
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du code général des impôts.
»
Par amendement n° I-274 rectifié, MM. Fréville, Amoudry, Branger et Baudot
proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 151
septies
du code général
des impôts, les mots : "le double de" sont remplacés par les mots : "deux fois
et demie".
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par une majoration à
due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. Oudin, pour défendre l'amendement n° I-236 rectifié.
M. Jacques Oudin.
Monsieur le président, mes chers collègues, nous avons eu ce matin une longue
discussion à propos de la revalorisation de certains montants qui, fixés il y a
de nombreuses années, n'ont pas été ajustés en fonction de l'évolution de
l'inflation.
Cet amendement concerne plus précisément les professions libérales, qui ont
été particulièrement oubliées depuis deux ans.
Les seuils de recettes en deçà desquels les plus-values professionnelles
réalisées par les contribuables exerçant leur activité depuis cinq ans
bénéficient d'une exonération dont les seuils sont restés inchangés depuis
1988. Cela fait donc plus de dix ans. Or, au cours de cette période,
l'inflation s'est accrue d'un peu plus de 26 %.
Afin de restituer son plein effet à la mesure décidée à l'époque par le
législateur, et toujours dans le souci qu'a souligné M. le rapporteur général
de respecter la volonté initiale du législateur lorsqu'il a été amené à fixer
des seuils, il conviendrait d'ajuster les différents plafonds et de les
revaloriser dans les mêmes proportions.
Tel est l'objet du présent amendement.
M. le président.
La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° I-274 rectifié.
M. Yves Fréville.
Mon amendement est similaire à l'amendement que vient de défendre notre
collègue M. Oudin.
Il s'agit de participer à l'effort de « peignage » des seuils que la
commission des finances a brillamment entamé ce matin. Comme cela vient d'être
dit, il faut tenir compte de l'inflation que nous avons connue depuis 1988 et
de relever le seuil d'exonération à deux fois et demie les limites du
forfait.
Je tiens à préciser que je parle sous le contrôle de la commission des
finances. En effet, mon amendement n'a de valeur que si ce forfait n'a pas été
lui-même réévalué ! Sous cette réserve, nous améliorerons le sort non seulement
des professions libérales, mais également de certaines autres professions, les
professions agricoles par exemple, qui sont concernées par le relèvement de ce
seuil.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-236 rectifié et
I-274 rectifié ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission remercie MM. Oudin et Fréville de cette
contribution à l'effort qu'il faut absolument réaliser pour actualiser des
seuils qui, fixés depuis longtemps, ont quelque peu perdu leur sens initial.
Par conséquent, il convient de soutenir ces deux amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Aujourd'hui, les plus-values réalisées dans le cadre
d'une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale par des
contribuables dont les recettes n'excèdent pas le double des limites du régime
des micro-entreprises sont exonérés d'impôt sur le revenu, à condition que
l'activité ait été exonérée pendant au moins cinq ans.
Ce n'est pas un dispositif marginal ! Ce matin, M. le président de la
commission des finances s'inquiétait du champ de ces dispositions et s'étonnait
de ne voir qu'une petite poignée d'entreprises en bénéficier. En vérité, j'ai
mis à profit la suspension de séance pour faire vérifier ce point : en réalité,
ce sont plus de 800 000 entreprises qui en bénéficient, soit 60 % des
entreprises individuelles. Il faut donc redire ici combien le champ de cette
disposition fiscale favorable est étendu.
Je ne propose pas, contrairement aux auteurs des amendements, d'aller plus
loin : le coût budgétaire d'une telle mesure serait prohibitif et le régime des
plus-values à long terme serait mis en cause par ces amendements.
Je propose donc d'en rester là et je demande au Sénat de ne pas adopter les
amendements n°s I-236 rectifié et I-274 rectifié.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-236 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 7, et l'amendement n° I-274 rectifié n'a
plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° I-65, M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste
proposent d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - L'article 163
quinquies
D du code général des impôts est
complété par un paragraphe rédigé comme suit :
«
V. -
Les titres des sociétés ayant leur siège dans un Etat membre de
la zone euro sont éligibles aux plans d'épargne en actions. »
« II. - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée à due
concurrence par le relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts. »
Par amendement n° I-255, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Joyandet, Ostermann et Tregouët proposent d'insérer, après l'article 7, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 163
quinquies
D du code général des impôts est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les titres des sociétés ayant leur siège dans un Etat membre de l'Union
européenne sont éligibles aux plans d'épargne en actions. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du code général des impôts.
»
Par amendement n° I-290, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 2 du I de l'article 2 de la loi n° 92-666 du 16 juillet 1992
relative au plan d'épargne en actions est ainsi rédigé :
«
2.
Les émetteurs des titres mentionnés aux
a
et
b
doivent avoir leur siège dans un Etat membre de l'Union européenne.
« Lorsque, à la suite d'une opération d'offre publique d'échange, de fusion,
de scission ou d'absorption, les titres reçus lors de l'échange ne répondent
plus à la condition énoncée à l'alinéa précédent, ils doivent être inscrits
dans un compte ordinaire. Cette opération n'entraîne pas la clôture du plan
d'épargne en actions.
« II. - Le
f
du I de l'article 125-0 A du code général des impôts est
ainsi rédigé :
«
f)
Titres admis aux négociations sur les marchés réglementés de
valeurs de croissance de l'Espace économique européen. La liste de ces marchés
est déterminée par arrêté.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions des I et
II ci-dessus est compensée à due concurrence par une majoration des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° I-65.
M. Denis Badré.
Cet amendement élargit les plans d'épargne en actions, les PEA, aux titres des
sociétés ayant leur siège social dans la zone euro et non plus seulement en
France. Il a, pour nous, un intérêt financier et économique évident puisqu'il
rendra plus actif le marché unique en renforçant les échanges entre la France
et ses partenaires.
J'ai plaisir à lui donner également - et je pense que vous m'y autoriserez -
une force de symbole au terme de cette première année de vie de l'euro.
M. le président.
La parole est à M. Oudin, pour défendre l'amendement n° I-255.
M. Jacques Oudin.
On est parfois surpris que certaines évidences ne soient pas admises par tous
! Tout à l'heure, nous avons évoqué la revalorisation de certains plafonds, qui
ont été fixés il y a dix ou quinze ans, en fonction de l'inflation. Le
Parlement - du moins de Sénat - souhaite qu'un ajustement, qui semble d'une
élémentaire justice, soit effectué. Et on nous le refuse !
Avec cet amendement n° I-255, il s'agit simplement de faire en sorte que les
PEA, qui restent actuellement réservés aux seules actions françaises, puissent
désormais être ouverts aux actions de nos partenaires européens. Il s'agit donc
d'autoriser la souscription directe de titres européens sur les plans d'épargne
en actions, et notre ami Denis Badré a parfaitement indiqué qu'il y avait,
derrière tout cela, non seulement un intérêt économique et financier évident,
mais aussi un intérêt symbolique.
Comment justifier, à l'heure actuelle, l'ostracisme où se trouveraient des
investissements en titres européens alors même que nous venons de créer l'euro
? Je n'arrive pas à le comprendre et j'attends avec le plus grand intérêt la
réponse de M. le secrétaire d'Etat.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-290
et donner l'avis de la commission sur les amendements n°s I-65 et I-255.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article additionnel que nous proposons a lui aussi
pour objet d'apporter certains aménagements indispensables, s'agissant non
seulement des plans d'épargne en actions mais aussi des contrats d'assurance
vie dits « DSK », afin de tenir compte à la fois des exigences européennes et
du contexte économique de l'Union européenne et monétaire.
Vous le savez, mes chers collègues, aujourd'hui, les sommes versées sur les
PEA doivent être investies en valeurs éligibles : actions de sociétés
françaises, bons de souscription et droits d'attribution attachés à ces mêmes
actions, actions de SICAV détenant au moins 60 % d'actions françaises, parts de
fonds communs de placement dont l'actif est composé au minimum de 75 %
d'actions françaises.
S'agissant des contrats d'assurance vie dits « DSK », ces derniers doivent
être investis au moins pour 50 % en actions françaises et au moins pour 5 %
dans des titres d'entreprises non cotées ou du nouveau marché.
Ces dispositions sont clairement, d'un côté comme de l'autre, en contradiction
avec le droit européen puisqu'elles introduisent une double discrimination,
d'abord entre les sociétés françaises et les autres sociétés européennes, puis
entre le marché boursier français et les autres bourses de l'Union
européenne.
Il convient de rappeler que la bourse européenne des valeurs de croissance,
dite « EASDAQ », a déposé une plainte auprès de la Commission européenne à
l'encontre des contrats d'assurance vie dits « DSK ». Cette dernière a adressé,
à ce titre, un avis motivé à la France en date du 15 octobre dernier à propos
des discriminations dont il s'agit. Or la même analyse est susceptible d'être
conduite à tout moment pour les plans d'épargne en actions !
Par ailleurs, se pose aussi le problème de la rigidité des critères
d'éligibilité aux PEA, révélé par plusieurs opérations de restructuration
récemment intervenues au niveau européen.
Chacun sait que Dexia, naguère Crédit local de France, va devenir, par la voie
d'une offre publique d'échange, Dexia Belgium, de droit belge ; que Pechiney va
se fondre dans une nouvelle société de droit canadien ; que la SEITA va devenir
Altadis, de droit espagnol ; et personne ne peut ignorer
qu'Aerospatiale-Matra-DASA, société dans laquelle l'Etat continue de détenir
une participation significative, est en train de devenir une société de droit
néerlandais.
En perdant leur nationalité française, les titres de ces sociétés perdent leur
éligibilité au PEA, et les actionnaires qui vont recevoir de tels titres en
contrepartie de titres français éligibles se trouveront pénalisés si nous ne
faisons rien.
Il est clair qu'une telle rigueur est tout à fait dépassée dans l'optique de
l'instauration de la zone euro. Afin d'éviter une éventuelle condamnation de la
France - à mon avis, elle est d'ailleurs inévitable - mais aussi pour adapter
dans un esprit constructif la législation française à l'union économique et
monétaire, il est indispensable d'agir.
S'agissant des plans d'épargne en actions, la commission des finances vous
propose, mes chers collègues, de les étendre franchement aux titres émis par
des sociétés ayant leur siège dans un Etat membre de l'Union européenne. Cette
solution présente le double avantage d'éliminer toute distorsion entre les
sociétés françaises, d'une part, et les sociétés européennes, d'autre part, et
de résoudre le problème de l'éligibilité des titres au régime fiscal du plan
d'épargne en actions lorsqu'il s'agit de situations telles que celles qui ont
été citées tout à l'heure et qui résultent d'offres publiques d'échange.
Toutefois, les opérations de fusion n'ont pas lieu qu'à l'échelle européenne ;
elles ont également lieu, beaucoup plus largement, à l'échelle internationale.
A cet égard, il est clair que le régime fiscal du PEA ne doit s'appliquer qu'à
l'intérieur du périmètre de l'Union européenne.
La commission des finances vous propose donc d'adopter cette solution et,
chemin faisant, de l'appliquer aussi aux contrats d'assurance vie dits « DSK
».
Désormais, le souscripteur de ces contrats s'engagerait à investir au moins 50
% de son épargne en actions de sociétés ayant leur siège dans un Etat de
l'Union européenne et 5 % dans des titres d'entreprises non cotées ou cotées
sur les marchés réglementés de valeurs de croissance de l'Espace économique
européen.
Il est important, monsieur le secrétaire d'Etat, de donner un signal clair sur
ces sujets, et ce dans l'intérêt de la politique de l'épargne et du
développement de la place financière de Paris. Mieux vaut s'adapter franchement
à un contexte que l'on a délibérément choisi plutôt que d'y être contraint et
forcé par des procédures et d'avoir l'air de traîner les pieds. En effet, si
l'on estime que l'union économique et monétaire constitue un progrès, il faut
en accepter toutes les conséquences.
Les amendements n°s I-65 et I-255 vont assurément dans le bon sens. Toutefois,
je souhaiterais que leurs auteurs acceptent de les retirer au bénéfice de
l'amendement n° I-290, dont le dispositif est plus complet.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-65, I-255 et I-290
?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je dois d'abord rappeler quel est le format, la
dynamique du PEA et combien il coûte au contribuable.
La dépense fiscale qui correspond au régime de faveur du plan d'épargne en
actions est de 7,5 milliards de francs pour l'an 2000. Elle est supportée
exclusivement par les résidents en France. Il est donc logique d'assurer à cet
effort fiscal important ce que l'on pourrait appeler « un retour sur
investissement », en favorisant principalement les entreprises françaises, qui
sont les plus à même d'investir et de créer des emplois et des richesses en
France.
Par ailleurs, vous le savez, les plans d'épargne en actions, qui utilisent la
faculté qui leur est offerte d'investir dans les OPCVM, les organismes de
placement collectif en valeurs mobilières, peuvent déjà détenir des titres émis
par des sociétés ayant leur siège dans l'Union européenne dans la limite de 25
% de leurs actifs pour les fonds communs de placement et de 40 % pour les
SICAV. Les épargnants peuvent donc diversifier leur portefeuille au-delà des
seules entreprises françaises.
J'ajoute - mais vous allez voir que je vais aller ensuite dans le sens des
auteurs des amendements - que la France n'a reçu aucune demande de la
Commission concernant le plan d'épargne en actions, contrairement à ce que
certains peuvent penser.
M. Denis Badré.
On peut prendre des initiatives de temps en temps !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Tout à fait ! Nous pouvons prendre une initiative,
monsieur le sénateur, d'autant plus que nos convictions européennes sont
fortes.
Le Gouvernement est conscient que de récentes opérations de places ont mis en
évidence des situations particulières dans lesquelles se trouvent les
contribuables titulaires d'un plan d'épargne en actions qui, en échange
d'actions françaises, reçoivent des actions de sociétés européennes et qui ne
peuvent les réemployer et les inscrire dans le compte titres de leur plan
d'épargne en actions. Il y a là une lacune du droit.
C'est pourquoi, lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative
pour 1999, le Gouvernement proposera au Parlement de tenir compte des fusions
européennes en permettant aux épargnants de garder au sein de leur plan
d'épargne en actions les titres ainsi reçus en échange. Le projet de loi de
finances rectificative comportera donc, monsieur le rapporteur général, une
disposition identique à celle que vous proposez, voire plus large.
Vous avez évoqué, à travers votre amendement, le cas des contrats d'assurance
vie investis en actions. Tout d'abord, je salue le soutien que vous apportez
aux contrats DSK. Le Gouvernement a décidé de vous proposer la conformité du
dispositif DSK aux règles communautaires dans le cadre du projet de loi de
finances rectificative pour 1999. Ce sera l'article 11 du projet de loi, dont
l'objet est plus large que celui de votre amendement, puisqu'il traite des
marchés réglementés européens, de la transposition de la condition
d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés pour les sociétés européennes, en
particulier.
J'ajoute que nous ne devons pas avoir de complexe quant à notre situation à
l'égard du PEA puisque nombre de nos partenaires européens disposent de
mécanismes comparables, avec la même limitation de leurs effets favorables aux
entreprises résidentes.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il faut les attaquer !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Un mouvement de convergence est en effet nécessaire,
et nous devrons l'organiser en concertation avec nos partenaires. Laissez-moi
prendre deux exemples. En Italie, le prélèvement libératoire de 12,5 % est
appliqué aux intérêts des obligations supérieures à dix-huit mois de maturité
cotées en Italie.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ce n'est pas correct ! Il faut les attaquer !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du
Nord, les plans PEP sont exonérés des intérêts des plus-values sur l'obligation
émise par des sociétés résidentes au Royaume-Uni. Et nous pourrions multiplier
les exemples.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il faut les attaquer !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Plutôt que de les attaquer, monsieur le rapporteur
général,...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Faites respecter le droit européen !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... nous préconisons de faire converger les pratiques
et les droits fiscaux des différents Etats par une concertation dynamique, ce
qui nous permettra, en tout cas pour ce qui nous concerne, de montrer le chemin
et d'ouvrir la voie, comme vous l'avez souhaité et comme les auteurs des autres
amendements, pour un cas quelque peu différent des contrats DSK, l'ont souhaité
pour les PEA.
Je vous propose de tenir compte de toutes ces remarques dans le prochain
projet de loi de finances rectificative. Nous irons plus loin, sans doute, que
ce que vous souhaitiez pour les contrats DSK, mais nous irons dans la direction
proposée par les auteurs des autres amendements.
En conséquence, pouvons-nous attendre le projet de loi de finances
rectificative ? La réponse est oui. Je vous propose donc de retirer vos
amendements puisque vous aurez satisfaction par un texte qui est déjà déposé
sur le bureau des assemblées et dont vous discuterez dans quelques jours.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Dans un mois et demi !
M. le président.
Monsieur Badré, l'amendement n° I-65 est-il maintenu ?
M. Denis Badré.
Sur cette question, nous devons, comme le rappelait M. le secrétaire d'Etat
voilà un instant, être irréprochables et donner l'exemple. C'est la meilleure
manière d'être en situation soit d'attaquer nos partenaires, soit de les
appeler à converger avec nous dans le bon sens.
Sous réserve de cette observation générale et après avoir insisté sur
l'intérêt de mon amendement n° I-65, qui est identique à l'amendement n° I-255
de mon collègue Jacques Oudin, je me rallie à l'amendement n° I-290 de la
commission, souhaitant qu'il puisse être adopté dès aujourd'hui. En effet,
pourquoi attendre demain pour faire ce que nous pouvons faire dès aujourd'hui,
alors même qu'un débat nous a permis d'aller au fond de la question ?
Je voterai donc l'amendement n° I-290, dont le champ est plus large que celui
de l'amendement n° I-65. J'espère simplement, au moment de retirer ce dernier,
que les dispositions de l'amendement n° I-290 ne visant pas les PEA ne risquent
pas de tout faire « capoter », ce qui entraînerait alors la disparition de ma
proposition.
Sur cette réserve, je retire l'amendement n° I-65 au bénéfice de l'amendement
n° I-290.
M. le président.
L'amendement n° I-65 est retiré.
Monsieur Oudin, l'amendement n° I-255 est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin.
Adoptant bien entendu la même position que notre ami Denis Badré, je retire
l'amendement n° I-255 au profit de l'amendement n° I-290.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je m'étonne toujours d'entendre dire que ce qui
n'est pas possible aujourd'hui le sera dans quelques semaines, en l'occurrence
lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative. Si ce sera
possible dans quinze jours, pourquoi ne le serait-ce pas tout de suite ? Il
suffit de vous rallier à l'amendement de notre excellent rapporteur général
pour que les choses puissent avancer et converger !
M. le président.
L'amendement n° I-255 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-290, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 7.
Par amendement n° I-256, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 7, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le second alinéa du III de l'article 199
terdecies
OA du code général
des impôts est abrogé. »
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin.
Cet amendement tend à dynamiser les investissements.
Les contribuables bénéficiant de la réduction d'impôt pour souscriptions en
numéraire au capital des sociétés non cotées ne peuvent pas faire figurer ces
actions ou parts dans un plan d'épargne en actions. Il convient donc de
supprimer cette impossibilité et, à vrai dire, de repenser un peu l'ensemble du
dispositif des plans d'épargne en actions.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous avons par ailleurs relevé les plafonds
d'investissement au titre de la loi Madelin. Les préoccupations exprimées par
les signataires de l'amendement sont intéressantes et fondées. Mais le
dispositif proposé mériterait une étude complémentaire, surtout afin de
s'assurer qu'un même investissement ne cumule pas plusieurs avantages
fiscaux.
Au bénéfice de ces observations et en attendant un approfondissement de la
question, il serait préférable, à ce point du débat, que M. Oudin accepte de
retirer l'amendement n° I-256.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je partage l'avis de M. le rapporteur général.
M. le président.
L'amendement n° I-256 est-il maintenu, monsieur Oudin ?
M. Jacques Oudin.
Je me rallie aux avis convergents de la commission et du Gouvernement, et je
retire donc mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-256 est retiré.
Par amendement n° I-21 rectifié, M. Marini, au nom de la commision des
finances, propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - L'article 762 du code général des impôts est ainsi rédigé :
«
Art. 762. - I. -
Pour la liquidation des droits de mutation à titre
gratuit, la valeur de la nue-propriété et de l'usufruit est déterminée par une
quotité exprimée en pourcentage de la propriété entière, en fonction de l'âge
de l'usufruitier, conformément au barème ci-après :
A^GE DE L'USUFRUITIER |
BÉNÉFICIAIRES
|
|
---|---|---|
Usufruit |
Nue- propriété |
|
Moins de 25 ans | 80 | 20 |
De 25 ans à moins de 30 ans | 75 | 25 |
De 30 ans à moins de 35 ans | 70 | 30 |
De 35 ans à moins de 40 ans | 65 | 35 |
De 40 ans à moins de 45 ans | 60 | 40 |
De 45 ans à moins de 50 ans | 55 | 45 |
De 50 ans à moins de 55 ans | 50 | 50 |
De 55 ans à moins de 60 ans | 45 | 55 |
De 60 ans à moins de 65 ans | 40 | 60 |
De 65 ans à moins de 70 ans | 35 | 65 |
De 70 ans à moins de 75 ans | 30 | 70 |
De 75 ans à moins de 80 ans | 25 | 75 |
De 80 ans à moins de 85 ans | 20 | 80 |
De 85 ans à moins de 90 ans | 15 | 85 |
De 90 ans à moins de 95 ans | 10 | 90 |
Plus de 95 ans révolus | 5 | 95 |
« Pour déterminer la valeur de la nue-propriété, il est tenu compte des usufruits ouverts au jour de la mutation de cette nue-propriété ainsi que des usufruits successifs éventuellement stipulés au contrat.
« II. - L'usufruit constitué pour une durée fixe est estimé aux deux dixièmes de la valeur de la propriété entière pour chaque période de cinq ans de la durée de l'usufruit, sans fraction et sans égard à l'âge de l'usufruitier. »
« II. - Les dispositions du I s'appliquent aux donations effectuées et aux successions ouvertes à compter du 1er juillet 2000.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez dit, dans une autre phase du débat, qu'un bon impôt était un vieil impôt.
M. Jacques Oudin. Ou pas d'impôt du tout !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais il faut parfois chercher un peu dans l'histoire des finances publiques l'origine des dispositions toujours en vigueur.
Mes chers collègues, je vous invite quelques instants à vous livrer à un exercice d'archéologie financière. (Sourires.)
L'utilisation du démembrement du droit de propriété, c'est-à-dire sa séparation en nue-propriété et en usufruit, est fréquente dans le cadre des politiques patrimoniales susceptibles d'être conduites par les agents économiques. Mais, bien entendu, ce démembrement suppose de savoir évaluer les droits ainsi démembrés : la nue-propriété, d'un côté, l'usufruit, d'un autre côté. Pour ce faire, il existe deux méthodes, l'une dite économique et l'autre dite fiscale, déterminée par l'article 762 du code général des impôts.
En termes économiques, le droit d'usufruit d'un bien correspond au flux de revenus futurs distribués par ce bien pendant la durée de vie de l'usufruit ou le temps convenu pour terme du démembrement.
Pour évaluer l'usufruit, deux paramètres doivent donc être connus : le rendement du bien et la durée de l'usufruit, qui est assimilée à la durée de vie de l'usufruitier, dans le cas où l'usufruit est viager, c'est-à-dire limité à la vie de son bénéficiaire. Cet élément peut être défini à partir des tables d'espérance de vie publiées par l'INSEE.
L'article 13 de la loi du 25 février 1901 - je dis bien 1901 - portant fixation du budget général des dépenses et des recettes de l'exercice 1901 a créé le barème fiscal de l'actuel article 762 du code général des impôts, toujours en vigueur.
Ainsi, ce barème est fondé sur les tables d'espérance de vie de la période 1898-1903 et évalue, par ailleurs, à 2 % le rendement des biens détenus en usufruit.
Or, il n'échappera à personne que ces paramètres sont aujourd'hui - à vrai dire depuis fort longtemps - complètement obsolètes : l'espérance de vie, inutile d'y insister, a, au cours de ce siècle, quelque peu augmenté - de plus de 60 % en moyenne - tandis qu'un écart significatif - hélas, ce n'est pas la parité ! - s'est creusé entre les hommes et les femmes.
Par ailleurs, le postulat d'un rendement uniforme de 2 % est complètement hors de la réalité.
L'utilisation de tels paramètres conduit, dans les faits, à surévaluer la nue-propriété, et les conséquences économiques peuvent être significatives. Selon les informations que j'ai recueillies, cette surévaluation peut dépasser 70 % de la nue-propriété, pour des investissements d'un rendement égal ou supérieur à 10 %.
Or, l'obsolescence du barème n'est pas neutre fiscalement. En cas de donation ou de donation-partage avec réserve de l'usufruit, elle se révèle pénalisante pour les contribuables lorsque l'assiette de l'impôt est maximisée par une sous-estimation artificielle de la valeur de l'usufruit.
C'est pourquoi nous prenons l'initiative, au nom de la commission des finances, de vous proposer de réactualiser le barème. Le taux de rendement du bien retenu est de 4 %. La durée de l'usufruit est calculée en fonction de l'espérance de vie constituée à partir de la table de mortalité 1990-1992 établie par l'INSEE et qui se substituerait donc à la table analogue de la période 1898-1903. En outre, les tranches d'âge sont fixées de cinq ans en cinq ans.
Je tiens à ajouter, enfin, que la rectification qui a été apportée à notre amendement ne modifie en rien les principes que je viens d'énoncer. Il s'agit simplement d'appliquer le nouveau barème aux donations effectuées et aux successions ouvertes à compter du 1er juillet 2000 afin de laisser au contribuable le temps de prendre en compte les conséquences de ce nouveau barème sur leur stratégie de transmission du patrimoine.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ces remarques, que nous avons formulées à partir de dispositions qui sont d'application quasi quotidienne chez les professionnels, mais qui sont complètement obsolètes, doivent logiquement nous conduire à moderniser, à adapter notre législation.
En conclusion, je m'étonnerai que l'administration, simplement par inattention ou par paresse, n'ait jamais pris l'initiative de faire remarquer les effets pervers auxquels nous avions abouti.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Ce problème de l'application de l'article 762 du code général des impôts qui fixe les valeurs respectives de l'usufruit et de la nue-propriété lors des transmissions à titre gratuit, dont la propriété est démembrée, est un vrai problème. Trois questions se posent à cet égard et je suis d'accord avec vous, monsieur le rapporteur général, l'archéologie ou l'histoire fiscale a toute sa place dans nos réflexions pour éclairer nos décisions.
Tout d'abord, il est légitime de s'interroger sur l'adéquation de ce barème instauré au début de ce siècle - vous avez parlé des années 1898 - 1903 et des tables de mortalité de l'époque - au regard de deux évidences : le rendement des actifs patrimoniaux a changé et l'allongement de la durée de vie humaine a modifié les tables de mortalité : nous gagnons un trimestre d'espérance de vie par an.
Les données ne sont donc plus ce qu'elles étaient en 1903, et c'est la raison pour laquelle je suis favorable à engager une réflexion de fond afin d'examiner dans leur globalité les difficultés que pose l'application de l'article 762 du code général des impôts.
Pour autant, cette réflexion ne peut être résumée ni cantonnée au seul aspect de l'actualisation du barème lui-même.
Ainsi, outre l'aggravation de la situation fiscale du conjoint survivant dont la valeur de l'usufruit serait majorée par la révision du barème, il est indispensable de s'interroger sur l'incohérence de la situation d'aujourd'hui dans laquelle la méthode d'évaluation des biens démembrés est différente selon que ces biens sont transmis à titre onéreux ou à titre gratuit.
Par ailleurs, la réflexion semble devoir également porter sur le maintien de l'article 1133 du code général des impôts, qui prévoit une exonération d'impôt lors de la réunion de l'usufruit à la nue-propriété.
Vous conviendrez, monsieur le rapporteur général, que ce sujet complexe, pour lequel une réponse précontrainte et systématiquement identique avait été faite depuis des années et des années, chaque fois que le sujet était évoqué devant le Parlement par les gouvernements successifs, mérite d'être approfondi et qu'il suppose de ne pas traiter de manière autonome l'indexation et l'adéquation du barème sans évoquer les autres aspects, en particulier les deux aspects fondamentaux que je viens de mentionner.
Je peux vous donner l'assurance que ce chantier sera ouvert en l'an 2000, que nous le traiterons avec ouverture et dans le souci de faire évoluer une situation devenue, c'est vrai, mesdames, messieurs les sénateurs, largement absurde. Je vous demande donc de prendre patience, de nous faire confiance, et de nous laisser revoir cette question devant vous dès que l'occasion s'en présentera en l'an 2000. M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez expliqué la problématique de cette révision du barème, en reconnaissant qu'il n'est pas totalement invraisemblable de se préoccuper de l'actualisation d'un barème qui a un siècle.
Vous avez dit que modifier ce barème ainsi que nous le préconisons risquerait d'instaurer un équilibre différent entre la valeur de l'usufruit et celle de la nue-propriété ; le barème actuel a tendance à sous-évaluer la valeur de l'usufruit et à surévaluer celle de la nue-propriété.
L'effet mécanique de cette révision serait, nous dites-vous, de majorer fiscalement la valeur reçue par les conjoints survivants mais, en contrepartie, de diminuer la valeur fiscale réputée reçue par les nus-propriétaires.
Il conviendrait donc, si nous voulons travailler de manière constructive, que vous fassiez « tourner vos ordinateurs » et que vous nous fassiez connaître les effets d'une telle mesure, en prenant par exemple la moyenne des successions.
Il est d'ailleurs assez difficile d'obtenir des renseignements complètement éclairants sur un tel sujet. Mais un fait mérite cependant d'être souligné : aujourd'hui, sur le plan civil, les parties, c'est-à-dire l'usufruitier et le nu-propriétaire, lorsqu'elles veulent évaluer les droits, que ce soit sur l'usufruit ou sur la nue-propriété, ne tiennent plus aucun compte du barème fiscal parce qu'il n'a plus aucune réalité économique ; elles se trouvent dans une situation extrêmement difficile à gérer puisque le traitement fiscal est différent de celui des conventions qu'elles passent entre elles sur le plan civil.
Il est donc absolument indispensable que la réalité fiscale puisse rejoindre la réalité civile, étant entendu qu'il faut également que s'écoule un certain délai entre le moment où le barème est institué et celui où il entre en vigueur afin que nos concitoyens n'aient pas le sentiment que cette mise à jour du barème est faite contre eux, dans l'intention de les surprendre, d'engendrer des effets secondaires qu'ils n'auraient pas pu anticiper.
A cet égard, M. le rapporteur général, avec beaucoup de sagesse, a eu raison de rectifier son amendement de façon à rendre opérationnel son dispositif à compter du 1er juillet 2000 seulement, ce qui permettra à tous les redevables, à tous les contribuables de se préparer à une majoration de la valeur de l'usufruit et, en contrepartie, à une minoration de la valeur de la nue-propriété. On ne peut donc pas arguer simplement de l'effet négatif de cette disposition : elle sera négative pour certains redevables mais positive d'autres.
Que constatons-nous lors de l'ouverture d'une succession ? Dans la plupart des cas aujourd'hui, s'agissant d'une famille de condition moyenne, le conjoint survivant n'est pas redevable de droits de succession, mais en revanche les enfants nus-propriétaires le sont car la nue-propriété est surévaluée avec le barème actuellement en vigueur. Que se passe-t-il alors ? C'est le conjoint survivant qui est tout simplement obligé d'avancer les droits de succession, puisqu'ils ne peuvent pas être payés par les nus-propriétaires.
Nous ne pouvons pas nous satisfaire de cette situation. Je ne sais pas quel sort M. le rapporteur général, dans son immense sagesse, fera à son amendement mais, en tout état de cause, il conviendrait, sur un sujet de cette importance, que le Gouvernement ne se contente pas de travailler en laboratoire de son côté, mais qu'il travaille dans la plus grande concertation.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, il faut faire confiance aux jeunes, aux nouvelles générations, bien entendu. La mesure que nous proposons est une mesure qui est en effet structurellement favorable aux nus-propriétaires plutôt qu'aux usufruitiers. Mais naturellement, tous ces aménagements qui nécessitent des simulations sont complexes et il faut y veiller de près.
Je crains un peu, si nous ne votons pas cet amendement, que la bonne volonté que vous exprimez, qui est tout à fait réelle et qui n'est, bien entendu, pas un instant mise en doute, ne se perde dans la multiplicité des problèmes, des réunions et des arcanes fiscaux ou économiques.
Dans la mesure où vous pourriez nous assurer qu'un travail technique, concerté et sérieux sera engagé immédiatement et mené à son terme pour la fin du premier semestre 2000, c'est-à-dire en temps utile pour que vous puissiez élaborer de nouvelles dispositions à soumettre au Parlement à la rentrée parlementaire de 2000, je pourrais alors, dans le souci d'une bonne compréhension réciproque et en vue d'une analyse suffisamment fouillée de cette disposition retirer notre amendement.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je voudrais donner l'assurance à M. le rapporteur général, au président de la commission des finances ainsi qu'à chacun d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement procédera par simulations et par une observation attentive de la réalité, en concertation permanente avec le Sénat et l'Assemblée nationale.
C'est une question difficile, et j'ajoute, en réponse à vos interrogations, que, comme l'a fort bien remarqué M. le président de la commission des finances, il faudra veiller à ce que les personnes concernées par ce partage entre l'usufruit et la nue-propriété puissent adopter leur propre stratégie. Il faudra donc ménager des transitions et prévoir des périodes d'adaptation. Certes, cette réforme est attendue depuis de nombreuses années, vous l'avez rappelé fort pertinemment tout à l'heure, mais nous ne pouvons pas de manière brutale, par une mutation inconsidérée, rompre le paysage dans lequel s'exerce la nue-propriété et l'usufruit.
Il faut être patients et conscients de la difficulté d'une telle transition. Nous reviendrons donc sur ce problème au cours du premier semestre 2000, avec tous ceux qui, au sein de la commission des finances, s'y intéressent. Vous pouvez compter sur l'engagement du Gouvernement, il sera strictement tenu.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Dans ces conditions, je retire l'amendement n° I-21 rectifié. M. le président. L'amendement n° I-21 rectifié est retiré.
Par amendement n° I-22, M. Marini, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - I. - Dans la troisième phrase du cinquième alinéa du e du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, les mots : ", un ascendant ou un descendant" sont supprimés.
« II. - Dans la première phrase du sixième alinéa du e du 1° du I dudit article, les mots : "ou de ses descendants et ascendants" sont supprimés.
« B. - I. - A la fin de la deuxième phrase du troisième alinéa du g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, les mots : ", un ascendant ou un descendant" sont supprimés.
« II. - Dans la dernière phrase du même alinéa, les mots : "ou de ses descendants et ascendants" sont supprimés.
« III. - Dans la deuxième phrase du troisième alinéa du 2 du g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, les mots : ", un ascendant ou un descendant" sont supprimés.
« C. - Le e et le g du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le locataire est un ascendant ou un descendant du contribuable, celui-ci ne peut bénéficier des dispositions du 2° du II de l'article 156 au titre de la pension alimentaire versée au locataire. »
« D. - La perte de recette résultant pour l'Etat de l'extension du dispositif en faveur des logements donnés en location aux ascendants et descendants du bailleur, est compensée à due concurrence par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avec cet amendement, nous revenons sur un point qui a été évoqué, voilà un an, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1999 et lors de la mise en place du dispositif dit « Besson ». Ce dispositif est certes moins bon que le système « Périssol », mais il a le mérite d'exister.
Nous avons alors approuvé le principe de la création d'un secteur locatif intermédiaire et nous nous sommes réjouis - cela a été dit ce matin - d'un certain rééquilibrage en faveur du logement ancien, que nous avions, à de nombreuses reprises, appelé de nos voeux.
Des améliorations avaient toutefois semblé nécessaires et le Sénat y a pris sa part. Notre assemblée a ainsi obtenu l'an dernier que les investisseurs puissent amortir jusqu'à 65 % de la valeur de l'immeuble neuf, contre seulement 50 % dans le projet initial du Gouvernement.
Nous n'avions pourtant pas eu gain de cause sur un point qui nous paraissait important, il s'agissait de la suppression de l'interdiction faite à l'investisseur de louer à un ascendant ou à un descendant. Selon le Gouvernement, représenté alors par M. Christian Sautter, il s'agissait d'éviter des abus.
Considérant que le dispositif fiscal s'accompagne de nombreuses conditions relatives en particulier aux revenus du locataire, la commission des finances a estimé que les cas d'abus devraient être exceptionnels et que l'administration ne serait, au demeurant, dans ce cas de figure comme dans d'autres, pas démunie de moyens d'action pour mettre en valeur, dénoncer et poursuivre de tels abus.
Il apparaît en outre que l'interdiction de louer à un ascendant ou à un descendant peut être contournée, notamment lorsque l'ascendant ou le descendant partage le logement avec une autre personne, qui peut être titulaire du bail.
La commission estime qu'il n'y a pas de raison qu'un contribuable ne puisse bénéficier d'un avantage fiscal s'il loue à un membre de sa famille dont les ressources ne sont pas élevées, c'est-à-dire dans le cadre du plafond du dispositif dit « Besson », et à condition que la personne en cause ne soit pas membre du foyer fiscal, cela afin de ne pas accumuler des avantages fiscaux différents, et si le bailleur ne dispose pas par ailleurs de la déduction au titre du versement d'une pension alimentaire.
Mes chers collègues, l'encouragement à l'investissement locatif conventionné est d'autant plus important que la reprise du marché immobilier est en train de créer de nouveau des tensions sur le marché locatif. Rendre le dispositif fiscal pour le logement intermédiaire encore plus incitatif apparaît comme un objectif prioritaire, d'autant plus que nous sommes bien dans une phase de reprise du marché immobilier.
Il vous est donc proposé d'adopter cet article additionnel, dont le coût pour l'année 2000 devrait être modeste.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement qui a déjà été discuté et repoussé l'année dernière par le Parlement.
Vous souhaitez que soit supprimée l'interdiction faite aux contribuables de bénéficier du statut de bailleur conventionné neuf ou ancien si le logement est loué ou sous-loué à l'ascendant ou au descendant, à condition, dans le même temps, que le propriétaire s'interdise de lui verser une pension alimentaire.
La location à des membres de la famille a déjà été admise dans le passé, au bénéfice de certains régimes d'incitation fiscale. Mais l'expérience concrète a montré que, par ce biais, les avantages fiscaux étaient détournés de leur objet et servaient à constituer à moindre coût un patrimoine familial et non à financer des biens destinés à être mis de manière effective et durable en location sur le marché. Des abus tout à fait condamnables ont été notés.
La mesure d'incitation fiscale - nous en avons beaucoup parlé ce matin - est la contrepartie du risque pris par les investisseurs. Il y a un avantage, donc il y a forcément une contrepartie. S'il y a avantage, c'est qu'il y a risque et l'on ne peut pas accorder des avantages sans risque réel. C'est un principe de droit fiscal.
Vous conviendrez avec moi, monsieur le rapporteur général, que, lorsqu'un lien familial unit le locataire et le propriétaire, l'orientation sociale du dispositif se trouve très largement contredite, au minimum édulcorée. La modération des loyers dans le cadre d'un lien familial ne constitue pas un réel sacrifice pour le bailleur. La mesure d'incitation fiscale perd, dès lors, toute justification et constitue ce que l'on appelle très souvent « une aubaine » pour le propriétaire bailleur.
Je sais bien que, dans le même temps, la commission prévoit, par une fausse fenêtre, de rétablir un équilibre entre l'avantage et la contrepartie, d'interdire au propriétaire de verser une pension alimentaire à l'ascendant ou au descendant locataire du logement. Mais l'alternative entre déduction d'un amortissement et versement d'une pension alimentaire n'est pas recevable, car ce qui est choquant ce n'est pas que le contribuable verse une pension - il peut par ailleurs y être contraint par des obligations civiles - c'est qu'il puisse utiliser le mécanisme de l'amortissement à des fins purement patrimoniales et d'optimisation fiscale sans qu'il y ait une contrepartie réelle.
C'est là que pèche votre raisonnement parce qu'une fois de plus - nous avons vu une foultitude d'amendements du même type - si nous sommes disposés, les uns et les autres, à admettre l'avantage fiscal pour encourager une certaine vision, d'autant plus qu'il s'agit le plus souvent d'encourager une vision sociale des choses, nous ne pouvons, s'il n'y a pas de contrepartie réelle, si la mesure est déséquilibrée et si l'avantage ne sert qu'à accroître le patrimoine sans que la contrepartie dynamique soit au rendez-vous de l'équilibre du dispositif, cautionner cette sorte d'abus ; en tout cas, le Gouvernement ne souhaite pas l'encourager.
Par conséquent, ayant démontré, avec, je crois, bonne foi et clarté, le fait que cet amendement était déséquilibré, j'en demande le rejet. Mais peut-être, monsieur le rapporteur général, convaincu par mon argumentation, accepterez-vous de le retirer.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-22, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 7.
Article 7
bis
M. le président.
« Art. 7
bis
. _ Dans le premier alinéa de l'article 199
quindecies
du code général des impôts, les mots : "âgé de plus de soixante-dix ans"
sont supprimés. » -
(Adopté.)
Article additionnel après l'article 7
bis
M. le président.
Par amendement n° I-96, MM. Angels, Lagorsse, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse,
Demerliat, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du
groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 7
bis
, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 199
quindecies
du code général des impôts est complété
in fine
par un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de la réduction d'impôt est porté à 50 % du montant des sommes
versées, retenues dans la limite de 45 000 francs, lorsque les dépenses ont été
engagées pour des personnes en état végétatif persistant, et que le foyer
fiscal comprend un ou plusieurs enfants à charge. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par une
majoration des droits prévus à l'article 885 U du code général des impôts. »
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels.
Cet amendement a pour objet de renforcer la portée de l'avantage fiscal
consenti en matière de frais d'hospitalisation de long séjour pour certains cas
bien déterminés qui nécessitent, à notre sens, d'être tout particulièrement
aidés.
A l'heure actuelle, les structures d'hospitalisation de long séjour sont
inadaptées aux malades jeunes et sont particulièrement onéreuses.
Aucune structure publique n'est prévue pour les prendre en charge, notamment
lorsqu'ils sont en état végétatif persistant, comme le prévoyaient pourtant les
dispositions de l'article L. 711-2 résultant de la loi du 31 juillet 1991 et
qui n'ont malheureusement pas été mises en application.
Les frais engagés sont particulièrement lourds pour les foyers fiscaux ayant
encore des enfants à charge. Il est donc proposé de renforcer la portée de
l'avantage fiscal pour ces foyers.
Qui plus est, nous nous efforçons, avec le dispositif proposé, de donner une
cohérence à la législation actuelle en matière de frais de ce type.
Les nouvelles limites choisies sont en effet calquées sur celles de la
réduction d'impôt pour frais de personnel de maison : un taux de réduction de
50 % au lieu de 25 % et un plafond de dépenses éligibles de 45 000 francs au
lieu de 15 000 francs.
Cet amendement complète par ailleurs ce qui vient d'être voté en première
lecture à l'Assemblée nationale, à savoir la suppression de toute limite d'âge
pour l'octroi de la réduction d'impôt pour frais d'établissement de long
séjour.
Cet amendement répond au souci que nous avions exprimé, voilà deux ans, de
prévoir un aménagement particulier, à savoir un plafond maintenu à 90 000
francs et non pas 45 000 francs pour les personnes invalides lorsqu'elles
emploient du personnel de maison.
Pourquoi des personnes invalides qui emploient, en raison de leur handicap, du
personnel de maison peuvent-elles compter sur un avantage non négligeable
pouvant s'élever jusqu'à 45 000 francs alors que, des personnes qui sont
justement dans une situation de handicap telle qu'elles ne peuvent rester chez
elles et sont obligées de recourir à des établissements spécialisés, n'ont
droit qu'à un avantage en impôt maximum de 3 750 francs ?
Nous comprenons, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il n'est pas possible de
faire tout et tout de suite. C'est pourquoi nous avons fixé une limite
raisonnable au nouveau plafond de dépenses de 45 000 francs et non pas de 90
000 francs, comme il pourrait pourtant nous paraître justifié de le faire.
Il semble pour le moins cohérent de faire en sorte que les malades n'ayant pas
d'autonomie de vie puissent bénéficier au moins du même avantage fiscal que
celui dont profitent les contribuables valides pour se faire aider à la
maison.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission souhaite entendre le Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
J'ai bien écouté la présentation par M. Angels de son
amendement et je dois donner quelques précisions. Le paysage est peut-être plus
complexe et diversifié qu'il ne l'a indiqué à l'instant.
La réduction d'impôt en faveur des personnes hébergées en établissement de
long séjour ou dans une section de cure médicale a pour objectif d'aider les
personnes âgées dépendantes en allégeant leurs cotisations d'impôt sur le
revenu, alors que la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile
constitue une incitation directe à la création d'emplois familiaux. Il existe
donc deux avantages distincts qui ont deux objectifs distincts. Le second
avantage tendait notamment à la création d'emplois, qui contribue à faciliter
la vie quotidienne de ces personnes, et c'est bien normal.
De plus, la réduction d'impôt à laquelle vous vous référez n'a pas pour objet
de prendre en charge l'intégralité du coût de l'hébergement en établissement ;
il existe d'autres dispositifs pour cela. Elle s'intègre dans un ensemble de
mesures qui permettent d'alléger de façon substantielle et parfois, dans de
nombreux cas d'ailleurs, d'annuler la cotisation d'impôt des personnes
lourdement handicapées ne disposant que de revenus modestes. Ainsi, lorsque ces
personnes sont titulaires de la carte d'invalidité prévue à l'article 173 du
code de la famille et de l'aide sociale, elles bénéficient, quels que soient
leur âge et leurs ressources, d'une demi-part supplémentaire de quotient
familial.
En outre, quel que soit leur âge, les contribuables invalides de condition
modeste bénéficient d'un abattement sur leurs revenus imposables.
Enfin, depuis deux ans, une prestation spécifique dépendance attribuée sous
condition de ressources est accordée aux personnes âgées de plus de
soixante-cinq ans dont l'état de dépendance est reconnu par une équipe
médico-sociale, que ces personnes vivent chez elles ou qu'elles soient
hébergées dans un établissement de long séjour.
Ainsi, la mesure adoptée par l'Assemblée nationale, qui supprime la condition
d'âge de soixante-dix ans pour bénéficier de la réduction d'impôt constitue
déjà une mesure importante et très attendue. Elle répond à un besoin partagé
par l'ensemble des contribuables concernées par un état de santé invalidant
quel que soit leur niveau de ressources.
Comprenant bien, monsieur Angels, la générosité de votre propos, et ayant
rappelé l'ensemble des dispositions existantes très favorables qui sont encore
enrichies par la mesure adoptée par l'Assemblée nationale, je vous suggère de
tenir compte de cette évolution positive depuis 1997 et de retirer votre
amendement.
Nous avons déjà franchi quelques obstacles, essayons de nous inscrire dans la
durée et, étape après étape, d'améliorer les dispositifs, comme vous le
souhaitez à juste titre.
M. le président.
Monsieur Angels, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Angels.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre réponse. J'ai pris
bonne note que nous avancions étape par étape, je l'ai signalé dans mon
intervention. Néanmoins, c'est un problème qu'il faudra régler au fond.
Je retire mon amendement aujourd'hui, mais il est bien évident que nous aurons
l'occasion d'y revenir. En tout cas, je voudrais être certain que, dans les cas
très graves d'enfants alités, etc. et quand elles rencontrent d'énormes
difficultés, les familles auront les moyens de faire face.
M. le président.
L'amendement n° I-96 est retiré.
Article 8
M. le président.
« Art. 8. _ I. _ A l'article 206 du code général des impôts, il est inséré un
1
bis
ainsi rédigé :
« l
bis.
Toutefois, ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés
prévu au 1 les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les
associations régies par la loi locale maintenue en vigueur dans les
départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, les fondations
reconnues d'utilité publique, les fondations d'entreprise et les congrégations,
dont la gestion est désintéressée, lorsque leurs activités non lucratives
restent significativement prépondérantes et le montant de leurs recettes
d'exploitation encaissées au cours de l'année civile au titre de leurs
activités lucratives n'excède pas 250 000 francs.
« Les organismes mentionnés au premier alinéa deviennent passibles de l'impôt
sur les sociétés prévu au 1 à compter du 1er janvier de l'année au cours de
laquelle l'une des trois conditions prévues à l'alinéa précité n'est plus
remplie.
« Les organismes mentionnés au premier alinéa sont assujettis à l'impôt sur
les sociétés prévu au 1 en raison des résultats de leurs activités financières
lucratives et de leurs participations. »
« II. _ Le
b
du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts est
complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Les organismes mentionnés au premier alinéa du 1
bis
de l'article 206
et qui en remplissent les conditions, sont également exonérés pour leurs autres
opérations lorsque les recettes encaissées afférentes à ces opérations n'ont
pas excédé au cours de l'année civile précédente le montant de 250 000
francs.
« Les opérations mentionnées au 7° et au 7°
bis
de l'article 257 et les
opérations donnant lieu à la perception de revenus patrimoniaux soumis aux
dispositions de l'article 219
bis
ne bénéficient pas de l'exonération et
ne sont pas prises en compte pour le calcul de la limite de 250 000 francs.
« Lorsque la limite de 250 000 francs est atteinte en cours d'année,
l'organisme ne peut plus bénéficier de l'exonération prévue au deuxième alinéa
à compter du premier jour du mois suivant celui au cours duquel cette limite a
été dépassée. »
« III. _ A. _ L'article 1447 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est précédé d'un I ;
« 2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
«
II. _
Toutefois, la taxe n'est pas due par les organismes mentionnés
au premier alinéa du 1
bis
de l'article 206 qui remplissent les trois
conditions fixées par ce même alinéa. »
« B. _ L'article 1478 du code général des impôts est complété par un VI ainsi
rédigé :
«
VI. _
Les organismes mentionnés au II de l'article 1447 deviennent
imposables dans les conditions prévues au II, à compter de l'année au cours de
laquelle l'une des trois conditions prévues au premier alinéa du 1
bis
de l'article 206 n'est plus remplie. Lorsque l'organisme se livrait à une
activité lucrative l'année précédant celle au cours de laquelle il devient
imposable, la réduction de base prévue au troisième alinéa du II n'est pas
applicable.
« Sous réserve des dispositions du deuxième alinéa du I, l'organisme reste
redevable de la taxe au titre de l'année au cours de laquelle il remplit les
conditions prévues au premier alinéa du 1
bis
de l'article 206,
lorsqu'il ne les remplissait pas l'année précédente. »
« C. _ A l'article 1467 A du code général des impôts, les mots : "et IV
bis
de l'article 1478" sont remplacés par les mots : "IV
bis
et VI de
l'article 1478".
« D. _ Au premier alinéa du
a
du 2° du II de l'article 1635
sexies
du code général des impôts, les mots : "à l'article 1447" sont
remplacés par les mots : "au I de l'article 1447".
« IV. _ Le 1 de l'article 1668 du code général des impôts est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« Les organismes mentionnés au premier alinéa du 1
bis
de l'article 206
et dont le chiffre d'affaires du dernier exercice clos est inférieur à 350 000
francs sont dispensés du versement des acomptes. »
« V. - Les dispositions du I s'appliquent aux exercices clos à compter du 1er
janvier 2000.
« Les dispositions du III s'appliquent pour les impositions établies au titre
de l'an 2000 et des années suivantes. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Par amendement n° I-139, M. Jean Boyer et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants proposent :
I. - A la fin du premier alinéa du texte présenté par le I de cet article
pour le 1
bis
de l'article 206 du code général des impôts, de remplacer
la somme : « 250 000 francs » par la somme : « 500 000 francs ».
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, de
compléter l'article 8 par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... 1° La perte de recettes pour les collectivités territoriales de
l'augmentation du plafond de recettes à 500 000 francs permettant aux
associations de ne pas être passibles de l'impôt sur les sociétés est compensée
à due concurrence par le relèvement de la dotation globale de
fonctionnement.
« 2° La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la
majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Par amendement n° I-272 MM. Richert, Hoeffel, Grignon et Fréville proposent
:
I. - A la fin du deuxième alinéa du I de l'article 8, d'ajouter les mots : «
ou 500 000 francs si leurs recettes d'exploitation encaissées au cours de
l'année civile au titre d'activités non lucratives sont supérieures à 10
millions de francs ».
II. - En conséquence, dans les trois derniers alinéas du II de l'article 8,
après la somme : « 250 000 francs », d'insérer les mots : « ou, le cas échéant,
de 500 000 francs ».
III. - Afin de compenser les pertes de recettes résultant des paragraphes
précédents, d'insérer après le II de l'article 8, un paragraphe additionnel
ainsi rédigé :
« ... La perte de recettes résultant de l'extension de l'exonération d'impôt
sur les sociétés au profit des institutions dont les recettes d'exploitation au
titre de leurs activités lucratives sont comprises entre 250 000 francs et 500
000 francs est compensée à due concurrence par l'augmentation des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Jean Boyer, pour défendre l'amendement n° I-139.
M. Jean Boyer.
Je précise tout de suite qu'il s'agit, à l'origine, d'un amendement d'appel,
un appel au Gouvernement et un appel à la clarification.
L'instruction fiscale du 15 septembre 1998 et celle du 16 février 1999 ont en
effet suscité de très grandes inquiétudes au sein du monde associatif.
De nombreuses associations, souvent municipales ou paramunicipales, craignent
de voir leur avenir menacé malgré l'institution d'une exonération des impôts
commerciaux en faveur des associations qui exercent des activités accessoires,
sous réserve que ces recettes n'excèdent pas 250 000 francs.
L'amendement n° I-139 tend à assouplir le dispositif initial, dont
l'application a déjà été repoussée. Il porte à 500 000 francs le plafond des
recettes ouvrant droit à l'exonération des impôts commerciaux.
Mais là n'est pas l'essentiel. L'objectif est surtout de répondre aux
inquiétudes des associations que nous avons tous eu l'occasion de rencontrer
dans nos départements. Beaucoup craignent de dépasser le plafond de 250 000
francs, sans pour autant avoir le sentiment de se livrer à une activité
commerciale.
La situation n'est évidemment pas aussi simple. Par exemple, nous savons que
plusieurs critères déterminent l'imposition ou l'exonération fiscale.
Le groupe des Républicains et Indépendants considère que nous devons tout
faire pour supprimer les zones d'ombre qui subsistent encore. Le Gouvernement
ne doit pas refaire les mêmes erreurs que celles qu'il a commises lors de
l'annonce de l'instruction fiscale du 15 septembre 1998.
Notre groupe est disposé à retirer cet amendement si M. le secrétaire d'Etat
nous fournit des explications convaincantes sur la mise en oeuvre du nouveau
régime fiscal et sur ses conséquences pour les associations, en particulier
locales.
M. le président.
La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° I-272.
M. Yves Fréville.
Notre amendement complète celui de M. Jean Boyer. Effectivement, la question
est de savoir dans quel cas les associations peuvent ne pas être assujetties à
l'impôt sur les sociétés.
Il faut qu'elles remplissent un certain nombre de conditions : que leurs
activités soient désintéressées et que leurs activités lucratives accessoires
ne dépassent pas un certain seuil que le projet de loi fixe à 250 000 francs.
Comme M. Jean Boyer, nous pensons qu'il conviendrait d'élever ce seuil à 500
000 francs.
Il faut cependant raison garder. Ces activités lucratives ne doivent pas être
trop importantes eu égard au chiffre d'affaires. C'est pourquoi - et c'est la
différence avec l'amendement n° I-139 - nous proposons de n'augmenter le seuil
d'exonération de l'impôt sur les sociétés à 500 000 francs que si le chiffre
d'affaires de l'association est supérieur à 10 millions de francs, ce qui
arrive fréquemment pour les grandes associations, en particulier celles qui
oeuvrent dans le domaine social et qui sont largement subventionnées par les
conseils généraux.
Nous voulons attirer l'attention du Gouvernement sur le fait que beaucoup
d'associations se sentent agressées, en quelque sorte, par le fait d'être
soumises à l'impôt sur les sociétés. Nous pensons donc qu'en relevant le seuil,
au moins pour celles d'entre elles qui ont des activités non lucratives
importantes - plus de 10 millions de francs - nous rendrons service au monde
associatif.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-139 et I-272 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
J'ai le sentiment que ces amendements, qui traduisent
les nombreuses inquiétudes du monde associatif sont surtout des amendements qui
appellent des précisions. Pouvez-vous y répondre, monsieur le secrétaire d'Etat
?
M. le président.
Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais donner moi-même la parole à M.
le secrétaire d'Etat. Vous ne pouvez pas tout faire, monsieur Marini, malgré
votre talent !
(Sourires.)
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-139 et I-272 ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Ce problème, qui est important, a déjà fait l'objet de
plusieurs questions d'actualité et de questions orales sans débat.
Le Gouvernement tient, une fois de plus, à dire combien il apprécie
l'importance et le dynamisme du secteur associatif...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il a raison !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... dans le paysage français, culturel, sportif,
caritatif - que sais-je encore -, et veut vraiment rendre hommage à un tel
dynamisme.
Il veut aussi, en apaisant les inquiétudes des associations, les assurer
qu'elles pourront continuer leurs activités non lucratives - car c'est de cela
qu'il s'agit, j'y reviendrai dans un instant - dans un paysage sécurisé,
rassurant et tout à fait clair quant au partage entre ces activités non
lucratives et les activités lucratives.
Je rappelle - car c'est d'un problème de définition que nous discutons - que
seules sont lucratives les activités exercées en concurrence avec des
entreprises et dans des conditions similaires aux activités de celles-ci.
Afin de prendre toute la mesure des spécificités du secteur associatif et de
ses difficultés à obtenir les financements nécessaires au maintien de ses
activités, il est proposé, dans l'article 8 du présent projet de loi de
finances, que les associations qui se trouvent dans cette situation ne soient
pas assujetties aux impôts commerciaux si les recettes réalisées - il s'agit de
recettes accessoires, lucratives et accessoires, à l'activité principale des
associations - n'excèdnet pas 250 000 francs.
Il est clair que, si le montant de 250 000 francs est dépassé, il ne s'agit
plus de ce que l'on peut appeler des recettes « de poche ». Il faut alors en
tirer les conséquences, d'autant plus que la vraie question sous-jacente à la
problématique du soutien, unanime, je pense, y compris du Gouvernement, de
l'activité associative non lucrative est l'éventuelle concurrence avec des
petites et moyennes entreprises.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tout à fait !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il faut que nous agissions avec précaution afin de ne
pas encourager par une disposition généreuse pour le secteur associatif, qui
est une des fiertés françaises, une concurrence malsaine, qui pourrait, dans
certains cas, porter préjudice à l'activité économique des PME et, en
définitive, à tout le monde.
Le Gouvernement comprend bien l'importance de préserver le dynamisme du
mouvement associatif qui n'est pas mis en cause par les dispositions de la loi
de finances et qui est préservé puisque, pour toutes les activités non
lucratives, le problème ne se pose pas et que les activités annexes lucratives
accessoires font l'objet d'un traitement favorable jusqu'à 250 000 francs.
Nous avons pris la mesure de ce qu'il convenait de faire pour ne pas casser la
dynamique associative et, en même temps, de ce qu'il est impératif de mettre en
oeuvre - j'attire l'attention du Sénat sur cette question très difficile - afin
de ne pas désorganiser le secteur des petites et moyennes entreprises par une
générosité mal maîtrisée, qui finirait par entrer en contradiction avec les
objectifs visés par l'ensemble des groupes du Sénat.
C'est pourquoi je pense que les auteurs de l'amendement seraient bien
inspirés, ces précisions étant apportées, de le retirer, d'autant plus que nous
avons annoncé, dès mars 1999, le report, au 1er janvier 2000, de l'application
de la mesure que je viens de décrire, et que nous avons établi - c'est M.
Sautter qui l'a fait immédiatement, voulant ainsi manifester sa bonne volonté à
l'égard du secteur associatif - dans chaque direction départementale des
services fiscaux un correspondant chargé de répondre aux questions et de
résoudre les problèmes auxquels peuvent être confrontées les associations.
Enfin, le site Internet du ministère permet d'apporter toutes les réponses
concrètes et détaillées aux questions que peuvent se poser les associations.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission souscrit bien volontiers à une bonne
partie des propos que vient de tenir M. le secrétaire d'Etat, mais elle
apprécierait qu'il puisse lui dire comment a été fixé le chiffre de 250 000
francs.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Ce chiffre a été choisi de manière très pragmatique.
(M. le rapporteur général sourit.)
Je ne prétends pas qu'il résulte
d'une économétrie fort complexe et raffinée. L'objectif est de se
rapprocher...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Du barème de 1901 !
(Sourires.)
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Pas du tout ! Ce n'est pas le barème de 1901, encore
moins celui de 1898 à 1903 !
(Nouveaux sourires).
Il s'agit tout
simplement d'une limite qui paraît de bonne foi et de bon aloi.
Enfin, le Gouvernement a décidé d'abandonner tous les redressements fiscaux
pour les associations de bonne foi dès le mois de septembre 1998. Il y a donc,
de notre part, un véritable effort fait en faveur du secteur associatif qui
appréciera certainement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-139.
M. Daniel Hoeffel
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel
Vous avez bien voulu, monsieur le secrétaire d'Etat, rappeler combien le
Gouvernement était attentif à l'action importante que jouent les associations
dans les domaines sportif, culturel et surtout social.
Incontestablement, quels que soient le dynamisme des collectivités locales et
l'action des entreprises, elles ne pourront jamais faire face, à elles seules,
aux besoins qui peuvent s'exprimer - je pense particulièrement aux quartiers
sensibles - dans le domaine social. Ce sont les associations qui portent toute
une série de projets. Sans elles, ces besoins ne seraient pas satisfaits.
Bien entendu, nous comprenons également vos préoccupations et nous les
ressentons dans nos secteurs géographiques respectifs. Les petites et moyennes
entreprises, en particulier, ont parfois le sentiment que les associations
accomplissent des missions dans des domaines qui relèvent d'elles. Mais, je le
répète, le plus souvent, il n'y a pas de concurrence. Les initiatives des
associations sont complémentaires de celles des petites et moyennes
entreprises. Ces dernières ne doivent donc pas se sentir menacées par l'action
que conduisent les associations avec beaucoup de sensibilité.
Pourquoi avoir fixé le plafond à 250 000 francs ? Pourquoi ne pas avoir retenu
le montant de 500 000 francs qui, sur un chiffre d'affaires de l'ordre de 10
millions de francs, ne représente que 5 % ? Est-ce si considérable qu'on ne
puisse l'envisager ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je tiens à répondre à M. Hoeffel, qui a bien compris
la difficulté du sujet.
Monsieur Hoeffel, je partage tout à fait votre sentiment sur le rôle des
associations, sur leur efficacité et sur le mouvement dont elles sont les
supports dans le domaine social notamment.
Au demeurant, je crois que vous avez satisfaction car, s'il n'y a pas de
concurrence, l'activité réelle n'est pas lucrative. En conséquence,
l'association est exonérée sans qu'intervienne de plafond puisque celui-ci ne
porte que sur la partie lucrative de l'activité.
Par définition, lorsqu'il n'y a pas de petites entreprises sur le créneau
d'activité qui est occupé par l'association, c'est que l'activité de cette
association n'est pas lucrative. Je le répète, celle-ci est donc exonérée
totalement.
C'est un vrai problème, car, dans certains cas, on pourrait parler de «
paracommercialisme ». Nous avons donc voulu éviter que les associations ne
soient elles-mêmes confrontées à une situation qui leur serait défavorable.
Lorsque l'association mène une activité lucrative accessoire cantonnée dans
une partie de l'action associative, activité qui se trouve dans un créneau qui
pourrait être occupé par une entreprise petite ou moyenne, nous ouvrons la
possibilité d'exonération jusqu'à 250 000 francs, chiffre pragmatique au-delà
duquel doivent s'appliquer les dispositions de l'impôt sur les sociétés. Le
système est clair et, croyez-moi, protecteur des associations.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Après les explications de M. le secrétaire d'Etat, il
est possible de faire le point.
Lorsque M. Daniel Hoeffel compare les 250 000 francs par rapport au volume
d'activité d'une grande association, il apporte un élément utile. Mais il
serait également possible de considérer le cas, comme vous l'avez fait
vous-même, mon cher collègue, d'un cafetier indépendant dont l'activité se
situerait juste à côté du stade ou des locaux associatifs, qui paierait impôt
sur le revenu, taxe professionnelle et charges sociales et qui risquerait
d'être pénalisé.
Il faut donc trouver une solution. Le seuil de 250 000 francs n'est
certainement pas parfait, mais procède d'une bonne intention. De toute façon,
il n'est pas dans l'intérêt des associations de les inciter au mélange des
genres, de les encourager à mener de manière pérenne, à la fois, des activités
d'intérêt général et des activités lucratives pour un volume trop élevé car une
association n'est pas nécessairement faite pour entretenir une activité
paracommerciale pérenne sans risque.
Disant cela, nous voyons surtout l'intérêt des dirigeants d'associations et de
leurs présidents qui sont civilement, voire pénalement, responsables pour
l'ensemble des activités qu'ils sont censés contrôler et qu'ils n'ont pas
toujours les moyens concrets de contrôler de manière aussi efficace qu'il le
faudrait, compte tenu des difficultés de la vie actuelle.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission pense que ces amendements
devraient être retirés, d'autant que, si j'ai bien compris, dans les cas
spécifiques où la bonne foi des associations est reconnue, l'administration
s'efforce, autant que possible, d'arranger les choses.
M. le président.
Monsieur Jean Boyer, votre amendement est-il maintenu ?
M. Jean Boyer.
Tout d'abord, je tiens à remercier M. le secrétaire d'Etat d'avoir reconnu
immédiatement la difficulté du problème.
Par ailleurs, compte tenu des assurances qu'il nous a données et des
explications fournies par M. le rapporteur général, je retire mon
amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-139 est retiré.
Monsieur Hoeffel, votre amendement est-il maintenu ?
M. Daniel Hoeffel.
Je vais également retirer mon amendement. Mais je ne voudrais pas que l'on
voie dans ce retrait une quelconque défiance à l'égard des associations dont
les motivations seraient par trop imprégnées de paracommercialisme. Les
associations mènent leur travail avec abnégation, en remplissant des missions
que personne ne peut remplir à leur place.
C'est dans cet état d'esprit, monsieur le secrétaire d'Etat, que j'accède à
votre demande. Nous verrons l'année prochaine si l'esprit dans lequel cet
échange de vues a eu lieu se trouve conforté ou infirmé.
M. le président.
L'amendement n° I-272 est retiré.
Par amendement n° I-66, M. Badré et les membres du groupe de l'Union centriste
proposent :
I. - Après le premier alinéa du texte présenté par le I de l'article 8 pour le
1
bis
de l'article 206 du code général des impôts, d'insérer un alinéa
rédigé comme suit :
« Ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés les associations
subventionnées, pour au moins la moitié de leurs ressources, par les
collectivités publiques, ou qui remplissent une mission pour le compte de ces
collectivités. »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, de
compléter cet article par un paragraphe rédigé comme suit :
« ... - La perte de recettes pour l'Etat de l'exonération à l'impôt sur les
sociétés des associations subventionnées est compensée à due concurrence par
l'augmentation des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré.
Dans le même esprit - pour reprendre la formule de M. Hoeffel - que celui qui
a amené nombre d'entre nous et vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, à
évoquer avec éloquence le rôle important joué par les grandes associations et
les difficultés auxquelles elles se heurtent, je voudrais évoquer le cas des
associations culturelles pour revenir sur le problème de la
paracommercialité.
Ces associations culturelles répondent souvent à l'attente d'un public qui n'a
pas les moyens d'aller au cinéma ou à des enfants qui, grâce à elles,
découvrent le théâtre. Les prix qu'elles pratiquent, j'y reviens toujours, sont
très différents de ceux du secteur commercial sans qu'elles fassent à celui-ci
le moins du monde concurrence. Au contraire, je pense que les enfants ayant
découvert le cinéma par l'intermédiaire de ces associations fréquenteront plus
tard les salles commerciales. Ces dernières ne sont pas perdantes aujourd'hui
et elles seront gagnantes demain.
Je ne m'inscrirai donc pas dans le cadre de ce que vous appeliez à l'instant,
monsieur le secrétaire d'Etat, la générosité mal maîtrisée.
J'ai noté l'effort que vous avez fait en annonçant un arrêt des poursuites
fiscales. C'est dans le même esprit et à titre d'appel afin que l'action de ces
associations soit clairement encouragée et mieux soutenue que, par cet
amendement, je propose de les exonérer de l'impôt sur les sociétés.
Je sais que cela pose des problèmes de principe mais cela pourrait rapporter
gros, si vous me permettez d'employer cette expression un peu triviale, et il
convient parfois de choisir l'audace, surtout lorsqu'il s'agit de la culture,
des jeunes, de la vie associative et de nos communes.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mon cher collègue, les cas que vous avez évoqués ne
se situent pas pour l'essentiel dans le domaine des activités lucratives, qu'il
s'agisse des séances de cinéma, de concerts, de conservatoire de musique, etc.
Ce sont des activités d'intérêt général, de service public, exercées dans le
cadre de services liés à des collectivités territoriales.
M. le secrétaire d'Etat pourrait peut-être confirmer l'interprétation que je
viens de donner et tenir des propos de nature à rassurer l'auteur de
l'amendement.
En revanche, il me semble - et je parle au nom de la commission qui en a
délibéré - que le dispositif proposé ne peut pas être voté en l'état car il
ouvrirait une brèche très large, qui risquerait d'inciter de très nombreuses
associations à développer leur chiffre d'affaires commercial ou paracommercial
au détriment des activités de même nature exercées par les professionnels.
La commission estime donc que cet amendement devrait être retiré.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Sincèrement, je ne vois pas les raisons pour
lesquelles il faudrait réserver un sort particulier aux associations qui sont
financées, à plus de 50 % de leurs ressources, par des collectivités
publiques.
Je pense avoir été clair tout à l'heure dans la distinction que j'ai opérée
entre activités accessoires lucratives, d'une part, et activités non
lucratives, d'autre part.
Les associations, mêmes financées à plus de 50 % de leurs ressources par des
collectivités publiques, entrent, lorsqu'elles n'ont pas d'activité lucrative,
dans le champ du dispositif général de la loi. Je vous donne sur ce point,
monsieur le sénateur, tous les apaisements que vous pouriez souhaiter.
M. le président.
Monsieur Badré, l'amendement est-il maintenu ?
M. Denis Badré.
Personnellement, je suis tout à fait apaisé, mais ce qui m'inquiète c'est que
de nombreux responsables d'associations restent dans une méconnaissance
complète de la réalité. Ils ne savent ni à quoi ils ont droit ni les devoirs
qui s'imposent à eux.
Je crois vraiment, d'où l'intérêt des amendements qui viennent d'être
présentés, qu'une information très claire doit être portée à la connaissance
des associations afin qu'elles puissent jouer leur rôle sans perdre leur temps
à traiter des problèmes administratifs et fiscaux de cette nature. Ce serait
vraiment un service à leur rendre.
Au bénéfice de ces observations, je retire bien entendu mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-66 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8.
(L'article 8 est adopté.)
Articles additionnels avant l'article 8
bis
ou après l'article 8
bis
M. le président.
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° I-113 rectifié, MM. Ostermann, Braun, Cazalet, Chaumont,
Delong, Oudin et Trégouët proposent d'insérer, avant l'article 8
bis,
un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions de la section II du chapitre III du titre Ier ainsi
que celles des articles 1679 à 1679
bis
du code général des impôts sont
abrogées.
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-114 rectifié, MM. Ostermann, Braun, Braye, Cazalet,
Chaumont, Delong, Gaillard, Joyandet, Leclerc, Legrand, Murat, Oudin et
Trégouët proposent d'insérer, après l'article 8
bis,
un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du 2
bis
de l'article 231 du code général
des impôts, la somme : "32 800 francs" est remplacée par la somme : "41 570
francs" et la somme : "65 600 francs" est remplacée par la somme : "83 060
francs".
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-126 rectifié
bis
, MM. du Luart, Bourdin, Clouet,
Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 8
bis
,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le second alinéa de l'article 1679 du code général des impôts, les
sommes de : "4 500 francs" et de "9 000 francs" sont respectivement remplacées
par les sommes : "9 000 francs" et "18 000 francs".
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par une majoration à
due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Par amendement n° I-273 rectifié, MM. Fréville, Amoudry, Branger et Baudot
proposent d'insérer, après l'article 8
bis,
un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Dans le second alinéa de l'article 1679 du code général des impôts, la
somme : "4 500 francs" est remplacée deux fois par la somme : "6 000 francs" et
la somme : "9 000 francs" est remplacée deux fois par la somme : "12 000
francs".
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par une majoration à
due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Enfin, par amendement n° I-179, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après
l'article 8
bis,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le 2
bis
de l'article 231 du code général des impôts, il
est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... le taux majoré de 13,60 % prévu au 2
bis
ne s'applique pas aux
salaires, indemnités et émoluments versés par les associations à caractère
sportif, éducatif, social ou philanthropique, régies par la loi du 1er juillet
1901 et qui sont reconnues d'utilité publique. »
« II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, le taux
prévu à l'article 219 du code général des impôts est relevé à due concurrence.
»
La parole est à M. Cazalet, pour défendre les amendements n°s I-113 rectifié
et I-114 rectifié.
M. Auguste Cazalet.
La taxe sur les salaires représente une charge importante pour les entreprises
et les organismes qui ne sont pas soumis à la TVA. Elle constitue, en outre, un
frein important à l'embauche pour les entreprises qui y sont soumises.
L'amendement n° I-113 rectifié vise donc à annuler les dispositions de la
section II du chapitre III du titre Ier, ainsi que celles des articles 1679 à
1679
bis
du code général des impôts.
Quant à l'amendement n° I-114 rectifié, c'est un amendement de repli qui tend
à proposer la réévaluation des tranches d'imposition.
M. le président.
La parole est à M. du Luart, pour défendre l'amendement n° I-126 rectifié
bis
.
M. Roland du Luart.
Il s'agit, par cet amendement, de relever le plafond de la taxe sur les
salaires, car nous considérons que, pour les professions médicales et les
agents généraux d'assurance, il y a là un frein à l'embauche et à la promotion
interne du personnel.
Dans la continuité de la mesure prise à la fin de 1994, il conviendrait que la
franchise et la décote fassent l'objet d'un relèvement substantiel. Tout en
allégeant les charges pesant sur les libéraux employant du personnel salarié,
cette solution présenterait l'avantage d'avoir un coût budgétgaire très réduit
dans la mesure où elle resterait sans incidence sur les impositions des
principaux cotisants, banques ou compagnies d'assurance.
Pour un libéral employant un salarié unique, le relèvement de la décote
préconisé par cet amendement porterait la limite d'exonération de 73 700 francs
à 110 000 francs de rémunération annuelle.
M. le président.
La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° I-273 rectifié.
M. Yves Fréville.
Mon amendement répond exactement aux mêmes motivations que celui qui vient
d'être excellemment présenté par M. du Luart.
Il tend à remonter la franchise pour le paiement de la taxe sur les salaires
de 4 500 francs à 6 000 francs et le seuil de la décote de 9 000 francs à 12
000 francs.
L'objectif est clair : il s'agit d'aider les professions libérales. Je me
permets de signaler qu'un certain nombre de ces professions n'ont pas bénéficié
de la suppression progressive de la base salaires de la taxe professionnelle.
Par conséquent, c'est un véritable problème de justice qui se pose pour ces
professions lorsqu'elles emploient des salariés.
Accepter cet amendement serait, pour le Gouvernement, une manière d'accorder
ce qu'il n'a pas voulu donner dans un autre domaine.
M. le président.
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° I-179.
M. Paul Loridant.
Nous proposons, par cet amendement, de compléter le dispositif voté par
l'Assemblée nationale à l'article 8
bis,
qui tend à relever le seuil
d'exonération de la taxe sur les salaires due par les associations.
L'institution d'un tel seuil d'exonération est une mesure assez ancienne, qui
figure à l'article 1679 A du code général des impôts. Elle est d'un coût
relativement modeste.
Celle que nous proposons est également d'un coût limité puisqu'elle ne porte
que sur les salaires versés par les associations reconnues d'utilité publique.
Je note que nos collègues de la majorité sénatoriale se préoccupent des
professions libérales quand notre groupe se préoccupe, lui, des associations
reconnues d'utilité publique...
Leur nombre est assez restreint, en tout cas moins important que celui des
associations dont nous avons déjà débattu à propos de l'article 2
ter.
Cet amendement a donc une portée plutôt symbolique, mais il se justifie compte
tenu de la place que ces associations occupent dans la vie économique et
surtout dans la vie sociale.
On observera d'ailleurs que, la plupart du temps, elles ne sont pas concernées
directement par les dispositions de l'article 1679 A, attendu qu'elles comptent
bien souvent plus de trente salariés.
Au demeurant, c'est sur l'ensemble de la situation fiscale du milieu
associatif que la réflexion doit porter.
Nous l'avons déjà indiqué lors de l'examen de l'article 2
ter
, il est
évident que nous devons encore avancer dans ce domaine, l'instruction fiscale
récente qui a été prise sur cette question ne répondant pas de manière
totalement satisfaisante à l'ensemble des questions posées.
Notre société est confrontée à des problèmes essentiels : la lutte contre
l'exclusion, la solidarité entre les générations, l'action contre
l'illettrisme, l'inégalité devant le droit à la santé ou à la culture,
l'insertion professionnelle et sociale, etc. Or le secteur associatif et
notamment les associations d'utilité publique jouent un rôle essentiel pour
répondre à ces problèmes.
Alors même que nous célébrerons bientôt le centenaire de la loi de 1901, nous
souhaitons vivement que cette question soit traitée au fond dans le cadre de la
réflexion sur le rôle et la place du monde associatif dans notre société. Nous
cherchons, avec cet amendement, à apporter une modeste contribution à cette
réflexion.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-113 rectifié, I-114
rectifié, I-126 rectifié
bis
, I-273 rectifié et I-179 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission souhaiterait que les auteurs des
amendements n°s I-113 rectifié et I-114 rectifié veuillent bien se rallier aux
amendements n°s I-126 rectifié
bis
et I-273 rectifié qui portent sur le
même sujet mais dont le dispositif est moins coûteux, et sur lesquels la
commission a émis un avis favorable.
En ce qui concerne l'amendement n° I-179, la commission considère que le gage
est inacceptable et donne donc un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'amendement n° I-113 rectifié ne me paraît pas
acceptable : il tend à supprimer, ni plus ni moins, 3 % des recettes nettes de
l'Etat, soit 50 milliards de francs ! Je ne pense pas que l'on puisse opérer
une telle amputation dans le budget de l'Etat au détour d'un amendement
consacré à la taxe sur les salaires.
Les amendements n°s I-114 rectifié, I-126 rectifié
bis
et I-273
rectifié peuvent recevoir la réponse que je souhaite formuler sur l'amendement
n° I-179, présenté par le groupe communiste républicain et citoyen.
Nous faisons un effort particulier pour les associations puisque l'article 8
bis,
qui résulte d'ailleurs de l'adoption d'un amendement du groupe
communiste de l'Assemblée nationale, relève de 29 710 francs à 33 000 francs, à
compter du 1er janvier 2000, l'abattement annuel de taxe sur les salaires dont
bénéficient les associations régies par la loi du 1er juillet 1901.
Cette mesure a un coût qui n'est pas négligeable et qui s'ajoutera au coût
total de l'abattement, lui-même déjà important : 1 300 millions de francs. Elle
permettra d'alléger la taxe sur les salaires due par les associations sans pour
autant, et nous revenons au débat que nous avons eu une dizaine de minutes ici
même, créer des distorsions de concurrence ou des inégalités devant l'impôt.
Je rappelle enfin que les tranches du barème de la taxe sur les salaires sont
actualisées tous les ans, comme la première tranche du barème de l'impôt sur le
revenu.
Il serait souhaitable que, sous le bénéfice de ces observations, tenant compte
de la réelle avancée qui a déjà été réalisée à l'Assemblée nationale - et que
le Sénat peut accepter - le groupe communiste républicain et citoyen veuille
bien retirer son amendement.
Quant aux autres amendements, je demande au Sénat de les repousser.
M. le président.
Monsieur Cazalet, les amendements n°s I-113 rectifié et I-114 rectifié
sont-ils maintenus ?
M. Auguste Cazalet.
Je les retire, monsieur le président, me ralliant aux amendements n°s I-126
rectifié
bis
et I-273 rectifié.
M. le président.
Les amendements n°s I-113 rectifié et I-114 rectifié sont retirés.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-126 rectifié
bis.
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Je ne saurais me satisfaire de la réponse de M. le rapporteur général sur les
amendements émanant de la majorité sénatoriale, d'une part, et sur celui que
j'ai présenté, d'autre part.
L'amendement n° I-126 rectifié
bis
, qui vise à alléger la taxe sur les
salaires pour les professions libérales, a reçu un avis favorable de la
commission. Dont acte ! Cependant, notre amendement n° I-179 vise, quant à lui,
à alléger la taxe sur les salaires pour des associations reconnues d'utilité
publique, et M. le rapporteur général, prenant prétexte du gage, a émis un avis
défavorable.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Changez le gage !
M. Paul Loridant.
Je trouve le procédé inacceptable !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est votre gage qui est inacceptable !
M. Paul Loridant.
On voit bien que l'inclination de la commission des finances et de sa majorité
est d'aider les professions libérales et le grand capital !
(Exclamations et rires sur les travées des Républicains et Indépendants et du
RPR.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est incroyable ! Changez-le, votre gage !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-126 rectifié
bis
, accepté par la
commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 8
bis,
et l'amendement n° I-273
rectifié n'a plus d'objet.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-179.
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Il est vrai, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'article 8
bis
constitue un pas essentiel fait en direction des associations. Néanmoins, je
répète que les associations d'utilité publique sont en nombre restreint.
Je retire mon amendement mais je souhaite que vos services étudient la
possibilité, eu égard à la faible incidence de cet amendement sur les recettes,
d'intégrer une disposition de cette nature à l'occasion de la discussion d'un
prochain projet de loi de finances.
M. le président.
L'amendement n° I-179 est retiré.
Article 8
bis
M. le président.
« Art. 8
bis.
_ A la fin de la première phrase de l'article 1679 A du
code général des impôts, la somme : "28 000 francs" est remplacée par la somme
: "33 000 francs". » -
(Adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. _ I. _ L'article 238
bis
du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Au 1 :
«
a)
Les mots : "bénéfice imposable" sont remplacés par le mot :
"résultat" ;
«
b)
Les mots : "ou au bénéfice de la Fondation du patrimoine, même si
le nom de l'entreprise versante est associé aux opérations réalisées par cet
organisme" sont supprimés ;
«
c)
Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du premier alinéa s'appliquent même si le nom de
l'entreprise versante est associé aux opérations réalisées par ces organismes.
» ;
« 2° Au 3 :
«
a)
Les mots : "bénéfices imposables" sont remplacés par le mot :
"résultats" ;
«
b)
Le deuxième alinéa est supprimé.
« II. _ Dans l'article 238
bis
A du code général des impôts, les mots :
"bénéfice imposable" sont remplacés par le mot : "résultat". » -
(Adopté.)
Article additionnel après l'article 9
M. le président.
Par amendement n° I-248 rectifié, MM. Gaillard, Oudin, Braun, Cazalet,
Chaumont, Delong, Joyandet, Ostermann, Trégouët et de Broissia proposent
d'insérer, après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 238
bis
0A du code général des impôts est ainsi rédigé
:
«
Art. 238
bis
0A. -
Les entreprises qui achètent, à compter du
1er janvier 2000, des objets mobiliers classés avec le consentement de leur
propriétaire en application de la loi modifiée du 31 décembre 1913 et les
inscrivent à un compte d'actif immobilisé peuvent déduire du résultat imposable
de l'exercice d'acquisition et des neuf années suivantes, par fractions égales,
une somme égale au prix d'acquisition.
« La déduction ainsi effectuée au titre de chaque exercice ne peut excéder la
limite mentionnée au premier alinéa du 2 de l'article 238
bis,
minorée
du total des déductions mentionnées à l'article 238
bis
A du code
général des impôts.
« Pour bénéficier de la déduction prévue au premier alinéa, l'entreprise doit
exposer au public le bien qu'elle a acquis dans un musée national, un musée
classé ou contrôlé ou tout autre établissement agréé par le ministre chargé de
la culture, pendant au moins trois ans au cours de la période de déduction.
« L'entreprise doit inscrire à un compte de réserve spéciale au passif du
bilan une somme égale à la déduction opérée en application du premier alinéa.
Cette somme est réintégrée au résultat imposable en cas de non-respect de
l'obligation prévue à l'alinéa précédent, de cession de l'oeuvre ou de
prélèvement sur le compte de réserve. »
« II. - Le premier alinéa de l'article 238
bis
AB du code général des
impôts est ainsi rédigé :
« Les entreprises qui achètent, à compter du 1er janvier 2000, des oeuvres
originales d'artistes vivants et les inscrivent à un compte d'actif immobilisé
peuvent déduire du résultat imposable de l'exercice d'acquisition et des quatre
années suivantes, par fractions égales, une somme égale au prix d'acquisition.
»
« III. - Les troisième et quatrième alinéas de l'article 238
bis
AB du
code général des impôts sont ainsi rédigés :
« Pour bénéficier de la déduction prévue au premier alinéa, l'entreprise doit
exposer au public le bien qu'elle a acquis dans un musée national, un musée
classé ou contrôlé ou tout autre établissement agréé par le ministre chargé de
la culture, pendant au moins un an au cours de la période de déduction.
« L'entreprise doit inscrire à un compte de réserve spéciale au passif du
bilan une somme égale à la déduction opérée en application du premier alinéa.
Cette somme est réintégrée au résultat imposable en cas de non-respect de
l'obligation prévue à l'alinéa précédent, de cession de l'oeuvre ou de
prélèvement sur le compte de réserve. »
« IV. - Les pertes de recettes résultant des paragraphes I à III ci-dessus
sont compensées par le relèvement à due concurrence des droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Cet amendement, qui concerne les achats d'oeuvres d'art ancien ou contemporain
par les entreprises, reprend la proposition de loi n° 468, dont j'étais
co-signataire, déposée sur le bureau du Sénat le 30 juin 1999 à la suite du
rapport n° 330 sur le marché de l'art que j'avais eu l'honneur de rédiger et
qui faisait suite à une longue étude entreprise par la commission des
finances.
Nous cherchons, modestement, sans bouleverser la législation, à assouplir les
conditions dans lesquelles les entreprises peuvent acquérir des oeuvres d'art
et participer à deux tâches d'intérêt national : la sauvegarde du patrimoine
national et la revitalisation du marché de l'art contemporain.
Les dispositifs que nous souhaitons modifier figurent aux articles 238
bis
0A et 238
bis
AB du code général des impôts et ils datent de
la loi du 23 juillet 1987. Pourquoi cette loi a-t-elle été un échec ?
Parcequ'elle assortissait les avantages accordés aux entreprises - minces
avantages ! - de précautions tout à fait tatillonnes, notamment en matière
d'exposition au public.
S'agissant de l'art ancien, l'article 238
bis
OA du code général des
impôts permet à une entreprise d'acheter ou de s'engager à acheter une oeuvre
présentant une « haute valeur artistique ou historique » dans le but, dix ans
après au plus tard, de l'offrir à l'Etat si celui-ci accepte la proposition.
Pendant toute cette période, l'entreprise est tenue d'exposer l'oeuvre au grand
public.
S'agissant de l'art contemporain, l'article 238
bis
AB du code général
des impôts prévoit que les entreprises qui achètent des oeuvres originales
d'artiste vivant, peuvent déduire, dans certaines conditions et limites, une
somme égale au prix d'acquisition des oeuvres concernées.
Dans le cas d'achat d'oeuvre d'artiste vivant, le système est presque
identique à celui qui est applicable aux oeuvres d'art ancien, à cela près que
l'objectif est non d'enrichir les collections publiques mais de favoriser la
création contemporaine. L'entreprise reste donc propriétaire de l'oeuvre. En
revanche, on retrouve la même déduction sur dix ans du prix d'achat - sous
réserve du plafond - en contrepartie de la même obligation d'exposer au grand
public. Cette déduction est pratiquée par fractions égales au titre de
l'exercice d'acquisition et des neuf années suivantes.
Il y aurait beaucoup à dire sur ce système, mais il a semblé difficile, à ce
stade de la réflexion, de changer radicalement les dispositions de la loi. Cet
amendement prévoit un aménagement pragmatique, afin d'assouplir les régimes
existants compte tenu des récentes évolutions du marché de l'art.
Pour l'art ancien, il a paru souhaitable, premièrement, de limiter le bénéfice
du régime aux seuls biens classés avec le consentement de leur propriétaire.
Cela simplifie la tâche des entreprises, qui n'auront pas à demander un
agrément, et favorise le maintien sur le territoire français de biens de nature
à constituer des « trésors nationaux ».
D'ailleurs, la reflexion sur la protection des trésors nationaux devrait être
prolongée. Nos collègues socialistes s'apprêteraient à déposer une proposition
de loi en la matière dans les semaines ou les mois à venir, dans le cadre de
l'ordre du jour réservé aux propositions d'origine parlementaire. Cet
amendement est donc complémentaire du texte qui viendra en discussion.
Il a également paru souhaitable, deuxièmement, de substituer, au système de
donation sous reserve d'usufruit, un régime d'acquisition en pleine propriété ;
troisièmement, d'autoriser, comme pour les achats d'art contemporain, la
déduction du bénéfice et non du bénéfice imposable ; enfin, quatrièmement,
d'alléger la contrainte d'exposition au public pour la remplacer par une
obligation de prêt limitée : trois ans sur les dix ans de la période de
déduction.
On note que, pour l'art ancien, on ne fait que calquer le nouveau régime sur
celui qui est déjà applicable à l'art contemporain, ce afin d'inciter les
entreprises qui le souhaiteraient à constituer de véritables collections.
Ce qui manque le plus à notre pays pour revitaliser le marché de l'art
français et pour véritablement protéger les trésors nationaux contre une
évolution jurisprudentielle qui fait que l'Etat n'a plus les moyens d'assurer
cette protection, sinon par des dépenses extraordinaires, c'est un relais dans
le secteur privé. Ce relais existe en Grande-Bretagne et en Italie, où des
banques, des caisses d'épargne ont constitué de véritables collections
d'oeuvres d'art. Cela leur permet de protéger plus efficacement et de manière
moins onéreuse leurs trésors en les laissant sur le territoire national.
L'important est non pas nécessairement d'enrichir les collections publiques
françaises, mais de maintenir des oeuvres sur le territoire national pour
permettre, suivant l'évolution normale des dations, des héritages, que se
constituent, au siècle prochain, de nouvelles galeries et de nouvelles
collections publiques, sur le modèle de ce que nous ont légué les grands
mécènes dont nous célébrons les mérites, comme Mariette ou Vivant Denon.
Encore une fois, la stratégie préconisée par cet amendement est de créer un
marché intérieur pour les oeuvres classées, réduisant d'autant la pénalité qui
résulte, pour les propriétaires qui acceptent le classement, de l'impossibilité
d'exporter, donc de pouvoir bénéficier des hauts prix du marché
international.
Nous essayons ainsi de trouver un moyen terme entre l'impossibilité pour
l'Etat d'assurer la protection de ses trésors nationaux, compte tenu de la
jurisprudence Walter, qui, maintenant, rend le classement hors de portée du
budget, et la possibilité d'avoir un véritable secteur privé qui prenne le
relais.
Pour l'art contemporain, on se contenterait de conserver le régime actuel en
en assouplissant les modalités, comme pour l'achat d'oeuvres anciennes : la
déduction serait encouragée par un raccourcissement de la durée de la période
de déduction, qui passerait ainsi de dix à cinq ans ; la contrainte
d'exposition serait allégée en conséquence par simple obligation de prêt d'un
an sur la période de cinq ans.
Les artistes des galeries attendent que le législateur et le Gouvernement
prennent des mesures de relance qui ne soient pas trop contraignantes et qui
permettent de revitaliser le marché de l'art français qui se trouve
actuellement, comme on a pu le constater à la lecture du rapport d'enquête,
dans une situation très difficile.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Notre collègue Yann Gaillard est intervenu à bon
escient pour présenter une bonne mesure, qui figure d'ailleurs parmi les
différentes propositions de l'excellent rapport qu'il a récemment rédigé au nom
de la commission des finances. La commission soutient donc les dispositions
qu'il vient de présenter.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement souhaite rappeler que le dispositif
prévu en faveur du mécénat est fondé sur le concept de don, d'une part, et
d'intérêt général, d'autre part. L'inconvénient majeur du dispositif proposé
réside dans la subordination du régime de faveur à l'exposition des oeuvres
d'art au grand public. Or votre amendement, monsieur le sénateur, limite le
temps de cette exposition à un an par période de cinq ans, alors que le
dispositif actuel est beaucoup plus ouvert, puisque la période d'ouverture
minimale est fixée à dix ans.
Pour ces deux raisons, je demande au Sénat de repousser la mesure qui vient
d'être présentée longuement et en détail par M. Gaillard.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-248 rectifié.
M. Yann Gaillard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
C'est justement cette obligation d'exposition de très longue durée des oeuvres
d'art au public qui a rendu pratiquement inopérant le dispositif de 1987. Nous
cherchons non pas à substituer aux musées publics une sorte de musées privés,
mais à constituer une richesse privée sur le territoire national en oeuvres
d'art ancien et d'art contemporain...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. Yann Gaillard.
... qui, plus tard, dans vingt, trente ou quarante ans, sera la source à
laquelle s'abreuvera la richesse des musées nationaux. Cela revient à amorcer
la pompe qui, précisément, permet à des pays comme l'Italie ou la
Grande-Bretagne de vivre.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Exactement !
M. Yann Gaillard.
Monsieur le secrétaire d'Etat, votre objection...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est une vision à courte vue !
M. Yann Gaillard.
... montre que vous continuez à raisonner en termes d'expositions au public
dans des musées nationaux. Telle n'est pas la question ! Il s'agit d'amasser
sur le territoire français...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument !
M. Yann Gaillard.
... un potentiel d'oeuvres et de richesses qui, plus tard, reviendra forcément
dans les musées. C'est un dispositif de long terme.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je maintiens mon objection, car je pense qu'il ne peut
pas y avoir d'avantage fiscal sans contrepartie.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La contrepartie, c'est le patrimoine !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
La contrepartie, c'est la mise à disposition de ce
patrimoine de tous ceux qui ont besoin de cette culture, en particulier la
jeunesse.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Vous ne pensez qu'aux générations à venir !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
D'ailleurs, dans le dispositif italien que vous
évoquez, les oeuvres d'art sont ouvertes au grand public, de manière très
libérale, par les entreprises, les banques et autres organismes du même type :
ils achètent des oeuvres d'art selon des dispositifs fiscaux favorables, mais
ils les mettent pendant longtemps à la disposition du public, en particulier de
la jeunesse.
Deux philosophies s'affrontent : l'une tend à acquérir ces oeuvres d'art, à
bénéficier d'un avantage fiscal, et à les conserver pendant un certain temps
dans un milieu fermé et privé ; l'autre consiste à adopter la même démarche,
mais en assurant, en contrepartie, une ouverture très large au grand public. Ce
n'est pas la même chose ! Par conséquent, je maintiens mon objection.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-248 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 9.
Article 10
M. le président.
« Art. 10. _ I. _ Au premier alinéa du 1 de l'article 92 B
decies
du
code général des impôts et au II de l'article 160 du même code, les mots :
"réalisée du 1er janvier 1998 au 31 décembre 1999" sont supprimés.
« II. _
Supprimé
.
« III. _ A. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 810
bis
ainsi rédigé :
«
Art. 810
bis
. _ Les apports réalisés lors de la constitution
de sociétés sont exonérés des droits fixes de 1 500 francs prévus au I
bis
de l'article 809 et à l'article 810. »
« B. _ Au dernier alinéa du III de l'article 810 du code général des impôts,
les mots : "ou ont supporté le droit fixe prévu au troisième alinéa" sont
remplacés par les mots : "ou qui ont supporté le droit fixe prévu au troisième
alinéa ou en ont été exonérés en application de l'article 810
bis
". »
« IV. _
Supprimé
. »
Sur cet article, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Par amendement n° I-180 Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste, républicain et citoyen proposent de supprimer cet
article.
Les deux amendements suivants sont présentés par M. Marini, au nom de la
commission des finances.
L'amendement n° I-23 tend à rétablir, dans la rédaction suivante, le
paragraphe II de l'article 10 :
« II. - L'article 163
bis
G du code général des impôts est ainsi
modifié :
« A. - Au 1 du II, les mots : "exercer une activité autre que celles
mentionnées au deuxième alinéa du 2 au I de l'article 44
sexies
et" sont
supprimés.
« B. - Le V est supprimé. »
L'amendement n° I-24 a pour objet de rétablir, dans la rédaction suivante, le
paragraphe IV de l'article 10 :
« IV. - Les dispositions du II s'appliquent à compter du 1er janvier 2000.
»
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-180.
Mme Marie-Claude Beaudeau
Cet amendement tend, je le rappelle, à supprimer l'article 10, article qui a
déjà été largement corrigé à l'issue du débat à l'Assemblée nationale, puisque
les paragraphes II et IV ont été supprimés. Ne restent donc en débat,
aujourd'hui, que les paragraphes I et III, dont nous souhaitons la suppression.
Nous estimons, en effet, ne pas être parvenus au bout de la réflexion sur
l'appui que l'Etat peut apporter au développement de l'initiative et à la
création d'entreprise.
Le paragraphe I prévoit de proroger le dispositif incitatif de défiscalisation
lié au report d'imposition des plus-values réinvesties dans le capital de
sociétés nouvelles.
L'évaluation des voies et moyens nous indique d'ailleurs que, aujourd'hui, le
coût de cette mesure incitative n'est pas véritablement chiffré, alors que tout
laisse penser, de manière objective, que les autres dispositions incitatives -
je pense, par exemple, à l'avoir fiscal - permettent largement de faciliter ces
choix et ne justifient pas la mise en place d'un autre dispositif, que je
considère quelque peu redondant.
Par conséquent, la portée de la mesure étant assez largement du niveau de la
clause de style, nous ne pensons pas utile de prolonger son application.
Le paragraphe II concerne une mesure dont la portée est pour le moins
également relativement faible.
Le coût de cette mesure, estimé à 200 millions de francs, ne nous paraît pas
non plus justifié au regard de la situation de l'emploi ou de celle des
entreprises.
Ce texte participe, certes, d'un mouvement général de réduction des droits
d'enregistrement qui semble plus ou moins guidé par des impératifs de nature
communautaire, mais il ne nous paraît pas plus pertinent. Il ne représente pas
le meilleur appui que l'Etat puisse accorder au développement de l'activité
économique, dans ce que l'on pourrait appeler la lutte contre la disparition
précoce des entreprises.
D'ailleurs, de manière générale, nous estimons qu'une réflexion plus
approfondie doit aujourd'hui être menée sur la consistance du soutien accordé
par les politiques publiques à la création et au développempent des petites et
moyennes entreprises, attendu que les principaux obstacles qui existent à une
parfaite réussite des projets de création sont plus souvent générés par le coût
des services bancaires que par les contraintes de la fiscalité.
Quand on fait le tour de la question, on observe, en effet, que
l'élargissement du régime des micro-entreprises, les baisses de taux de la taxe
sur la valeur ajoutée ciblées ou la réforme de la taxe professionnelle, toutes
mesures déjà prises, n'auront de portée réelle que lorsque seront créées les
conditions d'un allégement du coût d'accès au crédit pour les PME et les
PMI.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite à adopter le présent
amendement.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre les amendements n°s
I-23 et I-24.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit simplement, monsieur le secrétaire d'Etat,
de rétablir le texte initial du Gouvernement en ce qui concerne les bons de
souscription de parts de créateurs d'entreprise.
Très justement inspiré, l'ancien ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie avait prévu une extension particulièrement opportune de ce régime :
d'une part, la mesure s'appliquait à toutes les sociétés de moins de quinze
ans, quelle que soit leur activité, et ce à compter du 1er janvier 2000 ;
d'autre part, le régime, qui n'était jusqu'ici que temporaire, était
pérennisé.
Si l'on veut que de tels systèmes soient efficaces, il faut offrir aux
investisseurs et aux acteurs de l'économie une sécurité juridique : ils doivent
bénéficier de la visibilité pour monter et financer leur projet
d'investissement. Une telle exigence ne peut guère se concilier avec un régime
d'application expérimental et temporaire.
Par ailleurs, on ne voit pas au nom de quoi, aujourd'hui, on établirait des
distinctions entre des bonnes et des mauvaises sociétés, entre des bonnes et
des mauvaises activités. Le monde actuel se caractérise de plus en plus par
l'émergence de nouvelles activités de services. Pour quelle raison mettrait-on
à part les activités de certaines catégories d'entreprises qui peuvent fort
bien se situer dans l'économie moderne, même en exerçant des activités
financières, immobilières, bancaires, d'assurances et de pêche maritime ? En
effet, par une aberration que je ne comprends pas, d'ailleurs, jusqu'à présent,
la pêche maritime est exclue des bons de souscription de parts de créateurs
d'entreprise, au même titre que la banque, l'assurance et l'immobilier.
C'est donc à juste titre que M. Dominique Strauss-Kahn avait prévu cette
extension particulièrement opportune.
J'avoue ne pas avoir compris comment l'Assemblée nationale, sous le coup d'un
émoi soudain, a pu en quelque sorte jeter le bébé avec l'eau du bain. Une
polémique est née, en effet, sur le cas, déjà cité ici, de l'ancien président
Elf Aquitaine. Compte tenu de l'émotion suscitée par cette affaire, l'une des
idées les plus novatrices de ce projet de loi de finances, et il n'en comporte
pas beaucoup,...
M. René-Pierre Signé.
Oh !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Vous êtes sévère !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... qui plus est introduite sur l'initiative
personnelle du ministre, a été littéralement liquidée au terme d'un débat tout
à fait pitoyable.
Par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat, pour soutenir l'intention
initiale du Gouvernement, et dans un esprit constructif, il importe de revenir
à la version première du projet de loi de finances soumis à l'Assemblée
nationale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-180, I-23 et I-24
?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, nous avons déjà
discuté de cette question ce matin, et fort longuement, lorsque nous avons
abordé la question des options de souscription d'actions.
J'ai indiqué, à cette occasion, que le Gouvernement souhaitait enrichir sa
réflexion des conclusions du rapport de MM. Balligand-Foucauld - c'est une
affaire de quelques semaines, puisque la publication est attendue au mois de
janvier - et mettre à plat l'ensemble du système incitatif, bien entendu dans
le droit-fil des orientations définies, pour les bons de souscription de parts
de créateur d'entreprise, par M. Dominique Strauss-Kahn, auquel je tiens à
rendre hommage.
J'ai aussi indiqué qu'il n'était pas opportun, alors que l'Assemblée nationale
a statué de manière différente,...
M. Jean Chérioux.
Sous le coup de l'émotion !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... de revenir aujourd'hui sur des dispositions que la
majorité plurielle à l'Assemblée nationale avait souhaité voir adoptées, avant
que nous ayons pu approfondir les questions de la nécessaire dynamique de la
création d'entreprises, de la nécessaire dynamique fiscale propre à encourager
la prise de risques dans la petite entreprise, notamment dans la petite
entreprise innovante, qui constitue, bien entendu, comme MM. Strauss-Kahn,
Allègre et Sautter l'ont déjà dit ici même, le socle de l'action du
Gouvernement en faveur de l'emploi et de la promotion de l'esprit
d'entreprise.
M. Marcel-Pierre Cléach.
Surréaliste !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Comprenne qui pourra !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Sans donc remettre en cause les dispositions adoptées
par l'Assemblée nationale, sans remettre en cause l'esprit qui a inspiré le
vote de vos collègues députés,...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est difficile !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... le Gouvernement ne souhaite pas, mesdames,
messieurs les sénateurs, que vous adoptiez les amendements en discussion.
D'ailleurs, madame Beaudeau, les dispositions adoptées par l'Assemblée
nationale vous donnent déjà largement satisfaction, et je ne pense pas qu'il
serait opportun de remettre en cause la surprime du droit fixe de 1 500 francs
pour la création de l'entreprise. La surprime de ce droit contribue à la
mobilisation en faveur de la création d'entreprises, objectif qui rassemble, je
pense, l'ensemble des sénateurs, sur toutes les travées. Je ne vous suivrai
donc pas sur ce point.
Par ailleurs, s'agissant des amendements n°s I-23 et I-24 de M. Marini, j'ai
déjà fait connaître l'avis du Gouvernement ce matin : je souhaite qu'ils soient
repoussés au bénéfice des dispositions qui seront prises à la suite du rapport
de MM. Balligand-Foucault dont je parlais tout à l'heure.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-180.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je m'exprimerai, en fait, sur les trois amendements.
Je suis étonné des déclarations de M. le secrétaire d'Etat. Comme ce matin, on
nous renvoie à des études, à des rapports imminents. Tout cela est extrêmement
gênant pour M. Strauss-Kahn, parce que cela signifie que, lorsqu'il avait
présenté ses propositions, il n'avait pas réfléchi, il n'avait pas diligenté
d'études préalables...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tout à fait !
M. Jean Chérioux.
... et qu'il s'agissait, sinon d'amuser la galerie, du moins d'agir dans la
précipitation. Ce n'est sûrement pas le cas, en réalité, car ce n'est pas dans
la nature de M. Strauss-Kahn. Par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat,
cet argument n'est pas très pertinent.
En fait, ce que vous n'osez pas dire, c'est que l'Assemblée nationale a pris
cette décision sous le coup d'une émotion excessive et aujourd'hui, alors que
le Sénat, qui réfléchit toujours un peu plus et qui travaille avec un peu plus
de recul par rapport à l'événement, reprend la question, vous nous opposez
cette décision dont on sait que, à l'évidence, compte tenu des conditions dans
lesquelles elle a été prise, elle ne devrait pas être suivie.
Mais je vous comprends, vous avez une majorité plurielle, monsieur le
secrétaire d'Etat, et je n'aurai pas la cruauté d'insister davantage.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-180, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-23, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-24, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 10
M. le président.
Par amendement n° I-238, MM. Gaillard, Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont,
Delong, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article
10, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après les mots : " d'imposition ", la fin du premier alinéa du I de
l'article 151
octies
du code général des impôts est ainsi rédigée : "
d'éléments de l'actif immobilisé affectés à l'exercice d'une activité
professionnelle, peuvent bénéficier des dispositions suivantes : ".
« II. - Les deux derniers alinéas du I du même article sont supprimés.
« III. - L'éventuelle perte des recettes pour le budget de l'Etat résultant
des I et II ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des
droits visés aux article 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Dans le dessein de faciliter l'évolution des structures juridiques des
entreprises, le législateur a institué un mécanisme visant à éviter le coût
fiscal de la constitution d'une société. Ce dispositif est codifié à l'article
151
octies
du code général des impôts, dont la rédaction donne
malheureusement lieu à des interprétations restrictives rendant son application
très aléatoire. En particulier, l'exigence que l'apport soit le fait d'un
exploitant agricole individuel a amené l'administration à refuser l'application
de ce dispositif dès lors que l'apporteur est détenteur d'un contrat de
métayage pour tout ou partie de son exploitation.
Il est donc proposé de simplifier ce régime en permettant son application à
tous les apports de bien affectés à l'exercice d'une activité professionnelle
au profit d'une société soumise à un régime réel d'imposition.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission admire le brio avec lequel notre
collègue passe de la culture à l'agriculture.
(Sourires.)
En la matière, il soulève un problème délicat, qui impose sans doute un
approfondissement de la question, du fait des considérations de technique
comptable et fiscale qu'il met en oeuvre. A ce stade, donc, je souhaiterais
obtenir quelques précisions de la part du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le régime de faveur prévu à l'article 151
octies
du code général des impôts a pour objet de faciliter la mise en
société d'entreprises individuelles afin qu'elles puissent faire appel à des
capitaux extérieurs pour assurer leur développement. C'est pourquoi son
application est subordonnée à la condition que l'apport concerne l'ensemble des
biens affectés à l'activité de l'entreprise transmise.
Je pense que vous avez satisfaction puisque, en matière agricole, les
immeubles ne sont pas apportés s'ils sont immédiatement mis à disposition de la
société bénéficiaire des apports dans le cadre de certains contrats visés par
le code rural. Le droit positif existant répond donc à votre préoccupation et
je vous invite à retirer sans crainte cet amendement.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
M. le secrétaire d'Etat nous ayant apporté une
réponse précise, l'amendement a joué son rôle et son auteur peut maintenant le
retirer.
M. le président.
Monsieur Gaillard, l'amendement est-il maintenu ?
M. Yann Gaillard.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° I-238 est retiré.
Par amendement n° I-181, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article
10, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le troisième alinéa du 9°
quater
de l'article 157 du code
général des impôts, la somme de : "30 000 francs" est remplacée par la somme de
: "40 000 francs".
« II. - Il est institué, au sein de l'encours de la collecte CODEVI, une ligne
prioritaire égale à 25 % du montant de celui-ci.
« Cette ligne est destinée à financer les investissements des entreprises
répondant aux critères suivants :
« 1° La société a réalisé un chiffre d'affaires de moins de 50 millions de
francs et n'est pas mère d'un groupe mentionné à l'article 223 A du code
général des impôts ;
« 2° Le capital de la société, entièrement libéré, est détenu de manière
continue, pour 75 % au moins, par des personnes physiques ou par une société
répondant aux conditions visées au 1° dont le capital est détenu, pour 75 % au
moins, par des personnes physiques.
« Le taux d'intérêt des emprunts accordés sur cette ligne prioritaire est égal
au taux de rémunération des livres CODEVI en vigueur au jour d'émission.
« III. - Les taux de prélèvements libératoires, prévus au paragraphe III
bis
de l'article 125 A du code général des impôts, sont relevés à due
concurrence. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement illustre, d'une certaine manière, la position que nous avons,
et depuis plusieurs années, sur le problème du financement des petites et
moyennes entreprises.
En effet, nous proposons ici de relever le seuil de placement autorisé pour
les comptes pour le développement industriel, les CODEVI, à hauteur de 40 000
francs.
Le coût actuel de ces comptes pour le budget de l'Etat est limité, on le sait,
à l'exonération des intérêts perçus. Ce coût suit assez précisément l'encours
global et l'effet du taux de rémunération de ces livrets.
Compte tenu de la baisse de la rémunération des livrets dits défiscalisés, il
est estimé pour l'an 2000 à 1,2 milliard de francs, alors même que l'encours
disponible, lui, est plus de cent fois supérieur.
Nous avions déjà eu dans le passé un échange de vues sur cette question, nos
collègues MM. Marini, Arthuis et Loridant ayant notamment participé à la
rédaction d'un rapport d'information sur le sujet qui préconisait un certain
nombre de mesures.
De manière générale, si l'on peut s'interroger sur la qualité des choix opérés
par les établissements de crédit en matière d'utilisation de la collecte des
livrets CODEVI, notamment sur le fait qu'une part de cette collecte n'est pas
utilisée conformément à son objet initial, on se doit tout de même de
déterminer des solutions éventuelles à ce processus.
Notre amendement s'inscrit dans cette logique, en ce sens qu'il crée, sur ce
qui devrait être la clientèle normale des emprunts adossés sur la collecte des
CODEVI, une ligne prioritaire de financement assortie d'une bonification des
taux d'intérêt faisant notamment disparaître la part du taux des emprunts
servis correspondant aux coûts de collecte des établissements de crédit.
Nous serions donc amenés à proposer aux petites et moyennes entreprises des
emprunts assortis d'un taux de 2,25 %, taux largement inférieur, en théorie
comme en pratique, au taux de croissance réelle de l'économie, rendant donc ce
produit éminemment attractif pour une entreprise en développement et souvent
confrontée à la cherté du coût du crédit bancaire banalisé.
Nous pensons donc que l'optimisation fiscale ou l'allégement des cotisations
sociales sont loin de constituer les seuls moyens de favoriser le développement
des entreprises de notre pays. C'est dans ce sens que nous vous invitons à
adopter cet amendement qui porte sur le régime des prêts CODEVI.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini.
rapporteur général.
L'avis de la commission est franchement défavorable,
monsieur le président. La commission a en effet le sentiment qu'une part des
ressources actuellement collectées par les CODEVI ne peut être utilisée selon
les règles d'affectation fixées par les textes en vigueur. Il serait donc
paradoxal de vouloir augmenter les ressources des CODEVI, alors qu'on ne sait
toujours pas aujourd'hui les utiliser complètement conformément à ces règles
d'affectation.
Je crains, madame Beaudeau, que cet amendement ne soit trop favorable au
système bancaire !
(Exclamations sur certaines travées du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. Paul Loridant.
C'est à front renversé !
(Sourires.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il existe aujourd'hui, madame Beaudeau, une large
gamme de produits financiers totalement exonérés d'impôt sur le revenu et de
prélèvements sociaux. L'épargne administrée représente une part importante du
financement de notre économie qu'il ne paraît pas nécessaire d'augmenter encore
par un relèvement du plafond des CODEVI.
Cela étant, le Gouvernement partage votre souci de mobiliser les ressources en
faveur des PME. Le CODEVI constitue l'un des principaux outils de cette
mobilisation. C'est pourquoi il a été imposé aux établissements de crédit
dépositaires des ressources CODEVI d'en affecter au moins 86,5 % au financement
des besoins de trésorerie et d'investissement des petites et moyennes
entreprises. Par ailleurs - vous le savez, car nous en débattons depuis deux
jours - le projet de loi de finances pour 2000 poursuit l'effort engagé en
faveur des petites et moyennes industries de manière très dynamique.
C'est pourquoi vous pourriez retirer votre amendement : il est largement
satisfait par la foultitude d'actions gouvernementales en faveur des petites et
moyennes entreprises.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-181, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° I-124, MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca
Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants
proposent d'insérer, après l'article 10, un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Le II de l'article 199
terdecies
OA du code général des impôts
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 1999, les limites
mentionnées au premier alinéa sont portées respectivement à 50 000 francs et
100 000 francs et la réduction d'impôt mentionnée au I est égale à 50 % des
souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital
de sociétés non cotées. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est
compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-235, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Gaillard, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article
10, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 199
terdecies
OA du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1. Au premier alinéa du paragraphe I, le taux : "25 %" est remplacé par le
taux : "40 %".
« 2. Le paragraphe II est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 1999, les limites
mentionnées au premier alinéa sont portées respectivement à 50 000 francs et
100 000 francs. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du code général des impôts.
»
La parole est à M. du Luart, pour défendre l'amendement n° I-124.
M. Roland du Luart.
L'article 199
terdecies
OA prévoit une réduction de l'impôt sur le
revenu pour les particuliers qui souscrivent au capital des PME.
Cet article a été prorogé, par la loi de finances pour 1999, jusqu'au 31
décembre 2001. Néanmoins, les plafonds retenus me semblent insuffisants. Aussi
vous est-il proposé, mes chers collègues, de porter le plafond permettant de
favoriser le financement des PME de 50 kilofrancs à 100 kilofrancs
(Exclamations sur plusieurs travées),
de 50 000 francs à 100 000 francs,
si vous préférez, mais, dans la Sarthe, on dit souvent « kilofrancs ».
M. le président.
La parole est à M. Oudin, pour présenter l'amendement n° I-235.
M. Jacques Oudin.
Cet amendement est du même ordre que celui que vient de présenter M. du Luart.
Toutefois, en Vendée, on parle encore souvent en anciens francs, et non en
kilofrancs ; c'est une petite différence avec la Sarthe.
(Sourires.)
Quoi qu'il en soit, cet amendement vise à rendre plus attractifs les
investissements dans les petites et moyennes entreprises par un relèvement des
plafonds de réduction d'impôt pour la souscription au capital de ces
entreprises. Hier, nous avons déjà eu un débat sur la manière dont la fiscalité
peut aider à la dynamisation des PME. Le présent amendement fait partie des
mesures permettant cette dynamisation.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-124 et I-235 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ces deux amendements, qui sont très proches, visent à
augmenter l'avantage fiscal auquel donne droit la souscription au capital de
sociétés non cotées. Comme l'ont rappelé MM. du Luart et Oudin, le régime en
vigueur comporte des conditions d'éligibilité exagérément étroites. A cet
égard, ces amendements rejoignent les propositions que notre commission des
finances avait formulées, voilà quelques mois, lors de l'examen du projet de
loi sur la recherche et l'innovation. Il s'agissait alors d'aligner les
plafonds des versements donnant droit à l'avantage Madelin pour investissement
dans les sociétés non cotées sur ceux qui donnent droit à la réduction d'impôt
pour souscription de parts de fonds commun de placement dans l'innovation, à
savoir 75 000 francs et 150 000 francs.
Les amendements qui viennent d'être présentés vont un peu plus loin. Si
l'objectif qu'ils cherchent à atteindre est louable, ils généreraient une
dépense fiscale assez importante. De plus, ils s'appliqueraient dès les revenus
de 1999 et, de ce point de vue, ils n'auraient donc pas de caractère
incitatif.
Pour toutes ces raisons, la commission souhaite que ces amendements soient
retirés et présentés de nouveau lors de l'examen de la deuxième partie du
projet de loi de finances, afin que le dispositif s'applique à compter des
revenus perçus en 2000.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Ayant été hostile hier au relèvement des plafonds de
cette exonération, je suis hostile aujourd'hui au relèvement des taux.
M. le président.
Monsieur du Luart, l'amendement n° I-124 est-il maintenu ?
M. Roland du Luart.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° I-124 est retiré.
M. Jacques Oudin.
L'amendement n° I-235 est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin.
Je retire cet amendement et le présenterai de nouveau lors de l'examen de la
deuxième partie du projet de loi de finances. Je regrette que le Gouvernement
soit hostile à l'ajustement des taux et des plafonds. J'en suis presque à me
demander s'il n'est pas hostile au développement des petites et moyennes
entreprises.
M. le président.
L'amendement n° I-235 est retiré.
Par amendement n° I-249, Mme Michaux-Chevry et M. Lauret proposent d'insérer,
après l'article 10, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le IV
bis
de l'article 217
undecies
du code général des impôts
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, la reprise de l'avantage n'est pas effectuée lorsque les biens
ayant ouvert droit à déduction sont transmis dans le cadre des opérations
mentionnées aux articles 210 A ou 210 B si le bénéficiaire de la transmission
s'engage à maintenir l'exploitation des biens outre-mer dans le cadre d'une
activité mentionnée au premier alinéa du I pendant la fraction du délai de
conservation restant à courir. »
La parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret.
Le paragraphe IV de l'article 217
undecies
du code général des impôts
prévoit une obligation spécifique de conservation des investissements réalisés
dans les départements d'outre-mer par les sociétés soumises à l'impôt sur les
sociétés, sans application de l'abattement du tiers prévu à l'article 217
bis
, portant sur la durée normale d'utilisation des investissements
concernés.
L'abattement proposé vise à étendre à l'obligation de conservation spécifique
ainsi introduite, qui peut être excessivement contraignante eu égard à sa
durée, notamment dans le cas d'investissements immobiliers, et aux pénalités
qui en sanctionnant le non-respect les aménagements indispensables à la
mobilité des exploitations, prévus au paragraphe I en ce qui concerne
l'obligation générale de conservation des biens acquis avec le bénéfice de
l'aide fiscale.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'objectif que cherchent à atteindre les auteurs de
cet amendement est louable : il s'agit de ne pas remettre en cause un avantage
fiscal en cas de restructuration d'entreprise et dès lors que les conditions à
remplir continuent d'être satisfaites.
Toutefois, il y aurait lieu de prévoir en quelque sorte une clause de sanction
pour le cas où les engagements seraient rompus. De ce point de vue, le
dispositif devrait être complété. Peut-être serait-il utile que les auteurs de
l'amendement, qui ont eu une bonne idée, se rapprochent du Gouvernement pour
améliorer le dispositif proposé ? D'ailleurs, je souhaiterais entendre le
Gouvernement avant d'exprimer définitivemenet l'avis de la commission.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Dans un esprit d'ouverture, je partage ce que vient de
dire M. le rapporteur général. Je propose à M. Lauret de reparler avec mes
services de la mesure qu'il a présentée, afin de prévoir, en cas de non-respect
de l'engagement, des dispositions particulières.
La réflexion n'étant pas encore mûre en l'instant, il conviendrait de retirer
l'amendement. Je prends l'engagement de discuter à nouveau de ce dispositif
avec M. Lauret.
M. le président.
Monsieur Lauret, l'amendement n° I-249 est-il maintenu ?
M. Edmond Lauret.
Je remercie M. le secrétaire d'Etat de sa contre-proposition. Je retire
l'amendement et je me rapprocherai de ses services.
M. le président.
L'amendement n° I-249 est retiré.
Par amendement n° I-64 rectifié, M. Besse et les membres du groupe du
Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 10, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A la fin du premier alinéa du 4 de l'article 238
bis
du code
général des impôts, les mots : "à la création d'entreprises" sont remplacés par
les mots "à la création et à la reprise d'entreprises".
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I
ci-dessus sont compensées par un relèvement, à due concurrence, des droits
prévus aux article 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Cazalet.
M. Auguste Cazalet.
Il s'agit de résoudre une difficulté pratique rencontrée par les organismes
d'aide à la création d'entreprise, et notamment les plates-formes d'initiative
locale.
Ces plates-formes sont des associations d'aide à la création d'entreprise.
Elles distribuent des prêts d'honneur aux créateurs d'entreprise.
Elles peuvent recueillir l'agrément fiscal du ministre du budget, ce qui
constitue pour elles un gage de sérieux dans leurs négociations avec les
donateurs potentiels, qu'il s'agisse de collectivités ou d'entreprises.
Toutefois, l'agrément fiscal n'est accordé qu'aux plates-formes qui se
consacrent exclusivement à la création d'entreprise, et non à la reprise
d'entreprise.
De ce fait, en milieu rural, certaines plates-formes renoncent à demander
l'agrément fiscal, car elles souhaitent pouvoir aider les reprises afin
d'éviter, par exemple, la fermeture d'une boulangerie ou d'un bar dans un
village.
Autoriser les aides à la reprise d'entreprise est important pour l'aménagement
du territoire. Dans cette perspective, il faut tout d'abord modifier l'article
238
bis
du code général des impôts, qui permet aux entreprises de
déduire de leur bénéfice imposable leurs dons aux plates-formes, sous réserve
que ces dernières consacrent exclusivement leur activité à la création
d'entreprise et qu'elles disposent de l'agrément fiscal du ministère.
Cette modification ouvrira la voie à une révision des modalités d'attribution
de l'agrément fiscal aux plates-formes, définies par décret, sans exclure
d'office celles qui aident à la reprise d'entreprise.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Notre collègue M. Roger Besse, en sa qualité de
rapporteur spécial de la commission des finances pour les crédits de
l'aménagement du territoire, nous présente une proposition issue de ses travaux
et très intéressante, qui tend à faciliter le maintien d'entreprises en milieu
rural et à encourager les dons aux plates-formes d'initiative locale, non
seulement pour les créations d'entreprise mais aussi pour les reprises
d'entreprises en difficulté.
Il convient de rappeler que le Sénat a déjà voté une disposition de cette
nature dans le cadre de la discussion de la loi dite Voynet.
L'avis de la commission des finances est donc très favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
M. Besse fait avancer concrètement le débat sur la
création d'entreprises en proposant que les dispositions favorables au mécénat
lorsque les entreprises participent à la création d'une entreprise soient
étendues à la reprise d'entreprise. Il s'agit d'une disposition très
intéressante.
Je propose à M. Besse que nous puissions en discuter - c'est bien sûr un
engagement que je prends - lors des assises nationales de la création
d'entreprises, que le Gouvernement organisera très prochainement. En
conséquence, dans l'attente d'un autre rendez-vous législatif et dans la mesure
où la proposition formulée pourra être examinée et insérée dans une dynamique
globale
(M. le rapporteur général est dubitatif),
car, monsieur le
rapporteur général, la question est bien d'avoir une perspective forte, qui
soit un signal politique à l'opinion française,...
M. Philippe Marini.
rapporteur général.
Vous reconnaissez qu'il n'y a pas de perspective
forte dans le projet de loi de finances...
M. Emmanuel Hamel.
Pourquoi remettre toujours à plus tard ce qui peut être fait maintenant ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Effectivement !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... afin que nous nous mobilisions en faveur de la
création d'entreprises, je propose à ces auteurs d'affiner avec nous cette
mesure, pour qu'elle ait une plus grande résonance lors des assises nationales
que je viens d'évoquer.
Aussi, je propose de la retenir pour cette époque. Il faut tenir compte des
bonnes dispositions du Gouvernement à l'égard de cette disposition. Je demande
donc le retrait de cet amendement dans l'immédiat, pour valoriser cette
proposition lors de ces assises nationales, ce qui me paraît normal.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Elle serait encore plus valorisée si elle était votée
!
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-64 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 10.
Par amendement n° I-112, MM. Ostermann, Braun, Cazalet, Chaumont, Oudin et
Trégouët proposent d'insérer, après l'article 10, un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Les deuxième et troisième alinéas du 1° de l'article 726 du code
général des impôts sont ainsi rédigés :
« - pour les actes portant cessions d'actions de parts de fondateurs ou de
parts bénéficiaires et de titres en capital, souscrits par les clients des
établissements de crédit mutualistes ou coopératifs ;
« - pour les cessions de parts sociales dans les sociétés dont le capital
n'est pas divisé en actions ; »
« II. - Le deuxième alinéa du 2° du même article est rédigé comme suit :
« - pour les cessions de participations dans des personnes morales à
prépondérance immobilière y compris les cessions de parts ou de titres du
capital souscrits par les clients des établissements de crédit mutualistes ou
coopératifs à prépondérance immobilière ; »
« III. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application des I
et II ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création
d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
L'article 726 du code général des impôts établit une distinction entre les
droits exigibles en matière de cession de droits sociaux selon que les cessions
concernent des sociétés par action, les SA, ou d'autres sociétés, comme les
sociétés à responsabilité limitée, les SARL.
Depuis 1991, les premières bénéficient, en effet, d'un droit préférentiel de 1
% plafonné à 20 000 francs par mutation, alors que les secondes sont
assujetties au taux de 4,8 %. Rien ne justifie une telle différence de
traitement, qui pénalise injustement les petites sociétés d'artisans ou de
commerçants notamment, qui sont généralement constituées sous forme de SARL.
Le présent amendement prévoit donc une harmonisation à 1 % dans la limite de
20 000 francs, quelle que soit la forme sociétaire.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
A juste raison, M. Ostermann rappelle que la
fiscalité doit être neutre par rapport aux formes d'organisation choisies par
les sociétés commerciales. Il est anormal que nous continuions à subir cet
archaïsme : d'un côté, pour les sociétés anonymes, des conditions de cession
très favorables et, de l'autre, pour les SARL, un droit de 4,5 % sur la valeur
des parts, qui est bien sûr pénalisant.
Cela explique que, dans notre pays, un nombre significatif d'entreprises
utilisent le formalisme de la société anonyme, alors qu'elles pourraient fort
bien, compte tenu de leur projet économique, se contenter du statut de SARL
plus souple, aux contraintes moins fortes, mieux adapté à la réalité du terrain
des petites et moyennes entreprises.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous qui êtes favorable aux petites et moyennes
entreprises, vous ne pouvez pas rejeter un tel amendement qui répond à une
nécessité en lançant un signal fort attendu par de très nombreux
entrepreneurs.
Il faut donc, me semble-t-il, adhérer à la démarche proposée par cet
amendement qui reprend diverses suggestions faites au cours de ces dernières
années. En tout cas, monsieur le secrétaire d'Etat, vous ne vous étonnerez pas
que la commission émette un avis très favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement vise à soumettre toutes les cessions de
droits sociaux à un droit d'enregistrement de 1 % plafonné à 20 000 francs. Le
coût budgétaire est considérable...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Seulement 600 millions de francs !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Non, 4,5 milliards de francs. C'est beaucoup !
M. Michel Mercier.
Cela fait trop !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Cette réduction serait destinée à faire cesser la
discrimination qui existe entre les cessions d'actions et les cessions de
parts, pas seulement de SARL d'ailleurs, mais également de sociétés en nom
collectif.
Cependant, cette discrimination ne me paraît pas tout à fait injustifiée...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Si, elle l'est !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... en ce sens qu'elle tient compte du fait que les
actions sont librement négociables, contrairement aux parts de sociétés dont le
capital n'est pas divisé en actions.
Dans les sociétés en nom collectif, et les sociétés à responsabilité limitée,
l'
affectio societatis
et l'
intuitu personae
sont des données
essentielles à la constitution et à la vie de l'entreprise. Et j'espère que M.
Hamel ne m'en voudra pas d'utiliser des expressions latines.
(Sourires.)
Je dois vous rappeler que la politique fiscale engagée en matière de
droits de mutation consiste à unifier les tarifs exigibles à raison des ventes
de biens, que ceux-ci soient ou non logés dans des sociétés.
Cela s'est traduit l'an dernier par une réduction à 4,80 % du tarif des ventes
d'immeubles professionnels et par l'exigibilité corrélative d'un tarif
identique sur les cessions de participation dans les personnes morales à
prépondérance immobilière.
Cela se poursuit cette année, comme je l'ai expliqué hier, par l'unification à
4,80 % du tarif des ventes d'immeubles, mais surtout par l'application de ce
même tarif aux ventes de fonds de commerce.
L'unification tarifaire ainsi menée permet de soumettre au même tarif les
cessions de parts de SARL et les cessions de fonds de commerce. Aussi, la
baisse des droits d'enregistrement sur les droits sociaux ne peut s'inscrire
que dans le cadre d'une baisse des tarifs portant également sur les immeubles
et les fonds de commerce, sauf à creuser à nouveau l'écart de traitement que le
Gouvernement s'est efforcé de combler.
Comme vous pouvez le constater, monsieur Ostermann, votre proposition ne
s'inscrit donc pas vraiment dans les priorités fiscales du Gouvernement. Je
demande donc le rejet de votre amendement.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini.
rapporteur général.
Permettez-moi de m'étonner d'un point qui rend
particulièrement difficiles les travaux de la commission des finances : je veux
parler de l'évaluation des conséquences budgétaires des mesures proposées.
En effet, la commission des finances ne peut pas travailler si le Gouvernement
et ses services ne lui transmettent pas des éléments d'information fiables.
J'ai cité tout à l'heure le chiffre de 600 millions de francs à propos du coût
de la mesure dont nous débattons. Ce chiffre, je ne l'ai pas sorti de mon
chapeau, c'est celui qui nous été donné - sous réserve de vérifications que
nous sommes en train d'effectuer - l'année dernière par le service de
législation fiscale, lorsque la même mesure a été soumise au Sénat.
Je souhaite donc que le Parlement soit éclairé sur ce point fondamental que
j'évoque ici, à propos de l'amendement n° I-112, mais que je pourrais soulever
dans de très nombreuses autres circonstances s'y prêteraient également. En
effet, monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons fréquemment le sentiment - qui
n'est d'ailleurs pas le monopole des sénateurs, car il est partagé par les
députés - que les estimations de pertes de recettes fiscales sont faites au «
doigt mouillé » et selon l'occurrence.
Au demeurant, pour y voir clair sur ce sujet, il faudrait non pas se contenter
de nous donner un chiffre, mais nous dire comment il est calculé et selon
quelles hypothèses. En effet, il est trop facile de lancer un chiffre global
dans la discussion pour impressionner ses interlocuteurs. Il va de soi que je
fais confiance à la probité intellectuelle d'une administration brillante dont
vous avez souligné ce matin, monsieur le secrétaire d'Etat, les qualités.
J'insiste sur un point de méthode.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai bien compris votre point de vue et je ne
le partage pas. On ne peut pas laisser perdurer le clivage fiscal très
important entre les différentes formes de société.
Il faudrait au moins qu'il y ait un geste de bonne volonté, un effort de
rapprochement.
Il faudrait esquisser le mouvement afin d'éviter que, comme cela arrive trop
souvent, des créateurs de petites entreprises ne soient amenés à monter de
fausses sociétés anonymes, avec de faux conseils d'administration, alors que de
bonnes petites SARL suffiraient pour leur projet.
C'est une question d'état d'esprit. Pour favoriser la création d'entreprises,
il faut améliorer l'environnement juridique des chefs d'entreprise qui seront
encouragés à respecter le droit. En les contraignant, à l'inverse, à créer de
fausses sociétés anonymes avec de conseils d'administration, on ne les incite
pas à respecter le droit. C'est extrêmement grave pour l'état d'esprit des
entrepreneurs.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je tiens à rassurer M. le rapporteur général en lui
indiquant que les chiffrages qui sont établis par les services de législation
fiscale sont parfaitement fiables. Les 4,5 milliards de francs que j'ai cités à
l'instant correspondent au coût du passage à 1 % des cessions de droits sociaux
et des fonds de commerce.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ce n'est pas la même chose ! Vous ne répondez pas à
la question posée !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Pour notre part, nous estimons que si on fait l'un, on
fait l'autre.
Nous estimons aussi que la dynamique de la mesure que vous proposez entraîne
ipso facto
à terme irréversiblement l'adoption d'une mesure plus
large.
C'est pourquoi le chiffre de 600 millions de francs est à confirmer, tandis
que celui de 4,5 milliards de francs constitue la véritable mesure de ce que
l'on pourrait appeler « la menace globale d'une pareille évolution ».
J'indique aussi à M. le rapporteur général et à M. le président de la
commission des finances que les fonctionnaires du ministère de l'économie, des
finances et de l'industrie sont à leur disposition pour approfondir, avec les
administrateurs du Sénat, les différentes hypothèses que la commission leur
soumettra.
Vous savez que vous pouvez user et abuser de leurs services, parce qu'ils ont
le souci de la démocratie et qu'ils sont les serviteurs du Parlement tout
entier.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-112.
M. Jacques Oudin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin.
Monsieur le président, je voudrais expliquer les raisons pour lesquelles je
voterai l'amendement n° I-112, en revenant sur trois points qu'a excellemment
développés M. le rapporteur général.
Premièrement, je suis persuadé que le Parlement ne sortira de ce dilemme des
problèmes d'évaluation qu'en se dotant de son propre outil d'évaluation. Si
l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques, dont c'était en
quelque sorte la mission, ne fonctionne pas comme nous l'aurions souhaité,
autant que la commission des finances fasse ce travail.
Deuxièmement, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai le regret de vous dire que
nombre de chiffres avancés par le passé ici ou au Palais-Bourbon se sont
parfois révélés assez éloignés de la vérité lors de l'application des mesures
dont nous débattons. Je crois que cette différence péchait plutôt par excès.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Tout à fait !
M. Jacques Oudin.
Troisièmement, je reviens sur l'un des points que j'avais évoqués hier, le
calcul de l'évaluation se fait sans tenir compte des effets secondaires et
induits que peut entraîner une mesure fiscale en termes de développement.
Une mesure fiscale qui entraîne un développement génère de nouvelles recettes
fiscales que l'on ne prend généralement pas en compte. Aussi souvent, à terme,
apparaissent des différences.
C'est la raison pour laquelle je ne suis pas inquiet de certaines évaluations.
Je crois qu'il y aura des conséquences économiques favorables. Aussi voterai-je
l'amendement de notre collègue M. Ostermann.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-112, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 10.
Par amendement n° I-237, MM. Gaillard, Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont,
Delong, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article
10, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 730
bis
du code général des impôts est ainsi rédigé
:
«
Art. 730
bis. - Les cessions de gré à gré de parts de groupements
agricoles d'exploitation en commun, d'exploitations agricoles à responsabilité
limitée mentionnées au 5° de l'article 8 et de sociétés civiles à objet
principalement agricole sont enregistrées au droit fixe de 500 francs. »
« II. - L'éventuelle perte des recettes pour le budget de l'Etat résultant du
I ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Cet amendement vise à aligner le régime fiscal des cessions de parts de
sociétés civiles d'exploitation agricole, SCEA, sur celui des cessions de parts
de GAEC, groupements agricoles d'exploitation en commun, et d'EARL,
exploitations agricoles à responsabilité limitée.
Les premières sont taxées au taux de 4,80 % et les autres au droit fixe de 500
francs. Il est proposé de taxer tout le monde au droit fixe de 500 francs.
C'est une mesure de simplification et d'allégement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le président, la commission est évidemment
favorable aux simplifications que cet amendement semble favoriser.
Cela étant dit, la question est de savoir si cette mesure, qui paraît en effet
tout à fait raisonnable, trouve bien sa place ici ou s'il paraît plus utile de
l'inscrire dans le cadre un peu plus général du réexamen de la fiscalité
agricole.
Avant d'exprimer l'avis de la commission, je souhaiterais, sur ce point,
connaître celui du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'amendement n° I-237 a pour objet d'assujettir au
droit fixe les cessions de parts de sociétés civiles d'exploitation agricole.
Il faut rappeler, en effet, monsieur le rapporteur général, l'économie du
dispositif de taxation des cessions de droits sociaux.
Afin d'unifier le régime de taxation des cessions de cheptel et autres biens
mobiliers, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont cédés, les cessions
de parts de GAEC et d'EARL représentatives de l'apport de tels biens sont
assujetties à un modeste droit fixe de 500 francs, à la condition que ne soient
pas cédées corrélativement au même acquéreur les parts représentatives de
l'apport du fonds exploité.
Lorsque cette condition n'est pas remplie, il y a lieu de leur appliquer le
régime de droit commun, duquel il résulte que les cessions de parts sociales,
dans les sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions, ce qui est le
cas des sociétés civiles agricoles, donnent ouverture à un droit proportionnel
de 4,80 % et non à un droit fixe de 500 francs.
Dans ces conditions, il ne peut être fait état d'une quelconque discrimination
à l'encontre des acquéreurs de parts de sociétés civiles agricoles, ce que ne
manquerait pas de provoquer l'adoption de votre amendement à plus d'un
titre.
Enfin, il faut ajouter qu'il me semble précipité de modifier le régime des
droits d'enregistrement dus sur les cessions de parts de sociétés agricoles,
alors que le rapport Marre n'est pas encore sorti. C'est pourquoi je ne peux
que vous demander, monsieur Gaillard, de bien vouloir retirer votre
amendement.
M. Emmanuel Hamel.
Il y en a marre !
(Sourires.)
M. le président.
Monsieur Gaillard, votre amendement est-il maintenu ?
M. Yann Gaillard.
Bien sûr, je le retire. J'attends tout du rapport Marre, puisque nous ne
faisons que cela depuis le début de la journée.
(Nouveaux sourires.)
M. le président.
L'amendement n° I-237 est retiré.
Article 11
M. le président.
« Art. 11. _ A l'article 223
septies
du code général des impôts, les
mots : "inférieur à 1 000 000 francs" sont remplacés par les mots : "compris
entre 500 000 francs et 1 000 000 francs". »
Sur cet article, je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont présentés par MM. Oudin, Braun, Cazalet,
Chaumont, Delong, Joyandet, Ostermann et Trégouët.
L'amendement n° I-239 tend à rédiger ainsi cet article :
« I. - Les articles 223
septies
à 223
decies
sont abrogés.
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du code général des impôts.
»
L'amendement n° I-250 vise à rédiger ainsi l'article 11 :
« A. - Le deuxième alinéa de l'article 223
septies
du code général des
impôts est supprimé.
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'extension de
l'allégement de l'imposition forfaitaire annuelle est compensée par la
majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts. »
« C. - En conséquence, faire précéder cet article de la mention : « I. -...
»
Par amendement n° I-25, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose :
A. - De compléter
in fine
l'article 11 par un paragraphe ainsi rédigé
:
« II. - A l'article 220 A du code général des impôts, le chiffre : "deux" est
remplacé par le chiffre : "quatre". »
B. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention :
« I. -... »
C. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, de
compléter
in fine
cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé
:
« ... Les pertes de recettes résultant du doublement du délai d'imputation de
l'imposition forfaitaire annuelle sont compensées par le relèvement à due
concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Par amendement n° I-182, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - De compléter l'article 11 par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Cette disposition n'est toutefois pas applicable aux entreprises dont
l'actif est composé essentiellement de titres de placement ou de participation.
»
B. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention :
« I. -... »
Par amendement n° I-295, le Gouvernement propose de compléter l'article 11 par
un alinéa ainsi rédigé :
« Aux deuxième à neuvième alinéas de l'article 223
septies
du code
général des impôts, après les mots : "chiffres d'affaires" sont insérés les
mots : "majoré des produits financiers". »
Par amendement n° I-183, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - De compléter cet article par un paragraphe II ainsi rédigé :
« II. - Les septième, huitième et neuvième alinéas du même article sont ainsi
rédigés :
« 80 000 francs pour les personnes morales dont le chiffre d'affaires est
compris entre 50 000 000 francs et 100 000 000 francs ;
« 120 000 francs pour les personnes morales dont le chiffre d'affaires est
compris entre 100 000 000 francs et 500 000 000 francs ;
« 360 000 francs pour les personnes morales dont le chiffre d'affaires est
égal ou supérieur à 500 000 000 francs ».
B. - En conséquence, de faire précéder le texte de l'article de la mention : «
I. -. »
La parole est à M. Oudin, pour présenter les amendements n°s I-239 et
I-250.
M. Jacques Oudin.
L'imposition forfaitaire annuelle, ou IFA, est exigible des sociétés même si
celles-ci ne réalisent pas de bénéfices. Elle est donc payée par des
entreprises qui peuvent se trouver en difficulté.
L'amendement n° I-239 tend à supprimer l'IFA, ce qui permettra aux entreprises
qui sont dans cette situation d'élaborer un meilleur plan de redressement et -
nous l'espérons - de sortir de ces difficultés.
Si l'imposition forfaitaire annuelle n'est pas totalement supprimée, il
convient d'aller plus loin que la disposition adoptée à l'Assemblée
nationale.
La suppression de la première tranche d'imposition - objet de l'amendement n°
I-250 - constituerait un signal fort à l'égard des petites entreprises, celles
qui réalisent un chiffre d'affaires inférieur à 1 million de francs n'étant
plus assujetties à l'IFA.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
I-25.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Les entreprises peuvent parfois avoir le sentiment
d'être prises entre le marteau et l'enclume, le marteau de l'impôt sur les
sociétés si elles réalisent des bénéfices et l'enclume de l'imposition
forfaitaire annuelle si elles sont déficitaires.
Afin d'alléger le poids de l'imposition forfaitaire annuelle pour les
entreprises dont la situation financière est fragile, cet amendement vise à
porter de trois à cinq ans le délai au cours duquel cette imposition est
déductible de l'impôt sur les sociétés. Il ne s'agit là que d'une facilité de
trésorerie !
De plus, au terme d'un délai de quatre ans et s'il s'avère que l'entreprise
est toujours déficitaire, l'impôt serait définitivement acquis au Trésor.
En d'autres termes, une avance serait faite pendant cinq années et celle-ci se
transformerait en prélèvement définitif si la société demeurait déficitaire au
terme de ce délai.
Monsieur le secrétaire d'Etat, cette disposition nous semble de bon sens et la
commission propose au Sénat de l'adopter.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-182.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Pour des raisons assez évidentes de commodité et pour la cohérence de
l'argumentation, je vous propose, monsieur le président, de défendre les
amendements n°s I-182 et I-183.
M. le président.
Je vous en prie, madame Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Nous reviendrons, dans un premier temps, sur la teneur même de l'article 11
qui consiste, de manière assez symétrique avec l'extension du régime des
micro-entreprises qui a été réalisée l'an dernier, à mettre en place un seuil
d'exonération des entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés au titre
de l'imposition forfaitaire annuelle.
Cette imposition serait donc recalibrée, à partir d'une exonération sous un
plafond de chiffre d'affaires inférieur à 500 000 francs.
Sur le fond, nous tenons à souligner que, dans une certaine mesure, cette
disposition ne nous semble pas parfaitement opportune. L'imposition
forfaitaire annuelle constitue en effet une sorte de cotisation minimale
d'imposition des sociétés, une forme d'impôt citoyen, qui peut d'ailleurs tout
à fait se concevoir dans un système fiscal sans cesse perfectionné et tendant à
cerner au plus près les réalités économiques et sociales.
Exonérer de cette imposition un certain nombre d'entreprises - plus de 60 000
selon le coût estimé de la mesure préconisée par l'article 11 - ne nous paraît
pas tout à fait souhaitable.
Toutefois, pour peu que l'on accepte le principe d'un seuil d'exonération, il
nous paraît - et c'est là le sens de nos deux amendements - que les fondements
mêmes de l'imposition forfaitaire doivent être renforcés et réaffirmés.
Notre première proposition consiste à exclure du champ d'application de
l'exonération les sociétés dont l'actif est essentiellement constitué par des
titres de participation et qui, dans le cadre de groupes, ont souvent comme
particularité de ne pas réaliser des chiffres d'affaires mirobolants mais en
revanche des résultats financiers de haut niveau, liés à la perception du
produit de ces participations.
Notre seconde proposition tend à relever le montant de l'imposition
forfaitaire pour les entreprises entrant dans les tranches de chiffre
d'affaires les plus élevées du barème de l'imposition forfaitaire et dont les
facultés contributives, qui sont réelles, ne seront pas véritablement entamées
par la mesure que nous préconisons.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour présenter l'amendement n°
I-295.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'amendement du Gouvernement va dans le sens souhaité
par Mme Beaudeau.
Les sociétés holding participent, comme toute autre société, à la couverture
des dépenses publiques. C'est ce que nous souhaitons, comme Mme Beaudeau. Il
est donc proposé que le barème de l'imposition forfaitaire annuelle prenne en
compte les produits financiers. Ainsi, les sociétés holding seront assujetties
à l'IFA en fonction de leur capacité contributive.
Bien entendu, elles pourront bénéficier, si elles en remplissent les
conditions, de l'exonération proposée dans le projet de loi de finances pour
2000.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-239, I-250, I-182,
I-295 et I-183 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Les amendements n° I-250 et I-239 sont intéressants
mais ils sont, dans leur esprit, largement satisfaits par l'amendement n° I-25
de la commission. Je demande donc à leurs auteurs de bien vouloir s'y
rallier.
L'amendement n° I-182 pourrait opportunément, me semble-t-il, être retiré au
bénéfice de l'amendement n° I-295 du Gouvernement, sur lequel la commission
s'en remet à la sagesse du Sénat.
Enfin, la commission est défavorable à l'amendement n° I-183.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-239, I-250, I-25,
I-182 et I-183 ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'amendement n° I-239 a un coût brut de 9,5 milliards
de francs. Or il existe d'ores et déjà des mesures destinées à éviter de
pénaliser les personnes morales dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500
000 francs, sur lesquelles l'imposition forfaitaire annuelle pourrait peser
lourdement : nous vous avons proposé d'aménager la première tranche en
supprimant l'imposition forfaitaire annuelle pour les personnes morales dont le
chiffre d'affaires est inférieur à 500 000 francs, et il ne me paraît pas
nécessaire d'aller au-delà. Je propose donc le rejet de l'amendement n°
I-239.
Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° I-250, pour les
mêmes raisons : il n'est pas justifié d'aller plus loin que les dispositions
proposées par le Gouvernement car le seuil de 500 000 francs est communément
utilisé pour délimiter les régimes mis en place pour alléger les obligations
des plus petites entreprises, qu'il s'agisse du régime des micro-entreprises ou
de la franchise en matière de bases de TVA. Si l'on créait un nouveau seuil,
cela me semblerait contraire à l'effort de simplification. La multiplication
des seuils est source de confusion et de complexité pour les entreprises.
Quant à l'amendement n° I-125, j'en demande également le rejet car la mesure
proposée me paraît inutile : les entreprises disposent d'ores et déjà d'un
délai de trois ans pour imputer l'IFA,...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous le portons à cinq ans !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... ce qui permet de soulager les entreprises qui
connaissent des difficultés.
Par ailleurs, est-il besoin de vous rappeler, monsieur le rapporteur général,
que l'exonération de l'IFA que propose le Gouvernement profitera aux
entreprises sur lesquelles elle pesait le plus lourdement, le barème étant
inchangé depuis 1992 pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est
inférieur à 50 millions de francs ?
J'ai demandé à Mme Beaudeau, en présentant l'amendement du Gouvernement, de
bien vouloir retirer l'amendement n° I-182. Je pense qu'elle en comprendra
l'opportunité.
Enfin, je me prononce contre l'amendement n° I-183, pour des raisons déjà
évoquées.
M. le président.
Monsieur Oudin, maintenez-vous les amendements n°s I-239 et I-250 ?
M. Jacques Oudin.
Je réponds favorablement à la sollicitation de M. le rapporteur général et je
me rallie à l'amendement n° I-25 de la commission des finances.
M. le président.
Les amendements n°s I-239 et I-250 sont retirés.
Madame Beaudeau, maintenez-vous l'amendement n° I-182 ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
M. le secrétaire d'Etat vient de présenter l'amendement n° I-295 et il nous
propose de prendre en compte les produits financiers pour le calcul de
l'imposition forfaitaire annuelle.
L'amendement n° I-295 nous satisfait totalement et nous retirons l'amendement
n° I-182.
M. le président.
L'amendement n° I-182 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-25, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?
Je mets aux voix l'amendement n° I-295, pour lequel la commission s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-183, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article additionnel après l'article 11
M. le président.
Par amendement n° I-184, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer après l'article
11, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 209 A du code général des impôts est rétabli dans la rédaction
suivante :
«
Art. 209 A
. - Lorsqu'une entreprise, passible de l'impôt sur les
sociétés, détient directement ou indirectement des droits dans une société
relevant du régime fiscal des sociétés de personnes mentionné à l'article 8,
que l'activité de cette société est une activité de location ou n'est pas
directement liée à la sienne et qu'elle n'exerce pas une part active dans sa
gestion, cette entreprise est soumise à l'impôt sur les sociétés sur les
résultats bénéficiaires de cette société, dans le cadre d'une imposition
séparée.
« Lorsqu'une entreprise détient des droits de la nature de ceux visés au
premier alinéa dans plusieurs sociétés, elle est soumise à l'impôt sur les
sociétés sur le résultat bénéficiaire de l'ensemble de ces sociétés. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement reprend
stricto sensu
le texte d'un amendement que nos
collègues de l'Assemblée nationale ont cru devoir déposer, dans le droit-fil
des recommandations et conclusions du rapport sur la fraude fiscale réalisée
par notre collègue Jean-Pierre Brard.
Dans notre souci de participer à la lutte contre la fraude fiscale, notre
démarche vise à empêcher la poursuite d'un processus de réduction de la
contribution des entreprises au travers d'un jeu sur les statuts juridiques et
les imputations de résultats déficitaires.
Dans son rapport, notre collègue Jean-Pierre Brard propose en particulier de
circonscrire l'imputation des déficits et des résultats de ces investissements
d'entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés dans des sociétés de
personnes à d'autres sociétés de personnes présentant les mêmes
caractéristiques. A défaut, ce serait le régime général de l'impôt sur les
sociétés qui trouverait à s'appliquer.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Totalement défavorable, monsieur le président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
La mesure présentée par Mme Beaudeau a pour effet
d'empêcher l'imputation des déficits des sociétés de personnes sur les
résultats bénéficiaires des associés soumis à l'impôt sur les sociétés.
Les cas les plus abusifs concernant les avantages que vous dénoncez, madame,
ont été supprimés en 1998 par un projet de loi portant diverses propositions
d'ordre économique et financier, dont l'article 77 a limité la déduction des
amortissements des biens donnés en location par des sociétés de personnes dont
les associés sont des personnes morales.
L'imputation des déficits provenant de sociétés de personnes par des associés
soumis à l'impôt sur les sociétés, que vous critiquez, est ainsi déjà interdite
dans cette situation particulière, sauf obtention d'un agrément de
l'administration fiscale.
Votre amendement est donc déjà très largement satisfait et je vous demande de
bien vouloir le retirer.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-184 repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 12
M. le président.
« Art. 12. _ Au deuxième alinéa du I de l'article 216 du code général des
impôts, le taux : "2,5 %" est remplacé par le taux : "5 %". »
Par amendement n° I-26, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de rédiger comme suit cet article :
« La première phrase du deuxième alinéa du I de l'article 216 du code général
des impôts est ainsi modifiée :
« 1° Le taux : "2,5 %" est remplacé par le taux : "3,75 %" ;
« 2° Après les mots : "des participations", les mots : ", crédit d'impôt
compris" sont supprimés. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article 12 a pour objet de porter de 2,5 % à 5 % la
fraction des produits de participation reçus de ses filiales par une société
mère qui doit être réintégrée dans son bénéfice imposable.
En d'autres termes, il s'agit d'une mesure destinée à freiner, en la rendant
plus coûteuse fiscalement, la remontée des résultats au sein de deux sociétés
liées par le régime des sociétés mères et filiales.
Or, si le taux de 5 % qui est proposé respecte le taux maximum autorisé par la
directive du 23 juillet 1990 concernant le régime des sociétés mères et
filiales, en revanche, s'agissant des charges non déductibles du bénéfice
imposable de la société mère, l'assiette retenue par la France n'est pas
conforme à celle qui est prescrite par ce texte communautaire. En effet,
l'article 216 du code général des impôts prévoit que la quote-part imposable
est calculée sur le total formé par les dividendes et les crédits d'impôt qui
leur sont attachés, alors que l'article 4 de la directive précitée fixe comme
plafond 5 % des bénéfices distribués par la société filiale. L'assiette retenue
par la législation française est donc plus large que celle qui est prévue par
la directive.
Il est clair que l'article 12 comporte des effets économiques très
défavorables pour les entreprises. Si je ne m'abuse, son rendement est de plus
de 4 milliards de francs de fiscalité supplémentaire sur les entreprises
En conséquence, l'amendement n° I-26 vise à ne retenir comme assiette de la
quote-part que les produits de participation, à l'exclusion des crédits
d'impôt. En contrepartie, et pour ne pas affecter l'équilibre des finances
publiques - la commission des finances a le sens des responsabilités ! - il est
proposé de porter le taux de cette quote-part à 3,75 % contre 2,5 % dans la
législation actuelle et 5 % dans l'article 12.
Mes chers collègues, pardonnez le caractère assez technique de cette
présentation volontairement abrégée. Vous trouverez dans le rapport écrit
toutes les indications nécessaires. Il s'agit vraiment d'un débat important ;
nous ne pouvons pas laisser passer en l'état l'article 12.
M. Michel Charasse.
Merci pour les fumeurs !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
La fixation à 5 % d'une quote-part de frais et charges a pour objet de mieux
prendre en compte les charges relatives à la gestion des participations dont
les produits sont exonérés. Cette mesure concerne essentiellement les
holdings.
Elle n'est pas pénalisante : si les sociétés
holdings
exposent des charges d'un montant inférieur à la quote-part forfaitaire,
seules ces charges sont réintégrées. Dans le cas contraire, elles sont
avantagées par le caractère forfaitaire de la réintégration, qui constitue
ainsi un plafond. Or ce cas est fréquent, compte tenu des charges financières
qui s'attachent généralement à l'acquisition des titres de participation.
Dans ces conditions, prévoir de ramener la quote-part à 3,75 % au lieu de 5 %
ne se justifie pas.
Il en est de même de la seconde proposition que vous avez avancée, monsieur le
rapporteur général, et qui consiste à calculer la quote-part sur le produit net
des participations et non pas sur le produit brut : ce serait un moyen de
minorer le montant des charges réintégrées en réduisant la base au lieu de
diminuer le taux. La démarche est la même.
En outre, j'observe que ce dispositif est expressément prévu par une directive
communautaire du 23 juillet 1990 relative au régime mère-fille dans l'Union
européenne.
Enfin, cette mesure ne remettra pas en cause l'attractivité du régime
mère-fille, puisque celui-ci restera plus favorable que le droit commun. Les
dividendes reçus par les sociétés non mères sont en effet assujettis aux
contributions assises sur l'impôt sur les sociétés. Par ailleurs, ils subissent
la réduction du taux de l'avoir fiscal à 45 %, voire à 40 %, comme prévu à
l'article 12.
Le Gouvernement demande donc le rejet de cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-26.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
L'amendement n° I-26 de la commission des finances porte sur la question de
l'imposition des sociétés mères de groupes.
Nous avons déjà eu l'occasion de souligner à quel point le régime d'imposition
des groupes était pour le moins discutable. Il consiste en effet à donner une
forme de légalité à un processus de confiscation de la richesse créée par le
travail des salariés au travers de structures juridiques à vocation uniquement
capitalistique.
Chacun connaît la conséquence essentielle du processus : une divergence de
traitement entre les entreprises qui sont soumises au régime normal de
l'imposition et celles qui bénéficient des effets du régime intégré.
Nous aurons encore l'occasion de le dire, mais il est notoire que certains
grands groupes, réalisant pourtant des bénéfices tous à fait confortables,
n'ont été véritablement soumis ces dernières années qu'aux deux majorations
exceptionnelles de l'impôt sur les sociétés, le régime intégré conduisant à une
défiscalisation de fait d'une part essentielle de leurs résultats.
L'article 12 tend à majorer le pourcentage de la quote-part de frais et
charges pris en compte dans le calcul des résultats consolidés des groupes de
sociétés. Comme vient de l'indiquer M. le rapporteur général, cette mesure est
productrice d'une majoration de plus de 4 milliards de francs du produit de
l'impôt sur les sociétés.
Si la commission des finances ne remet pas tout à fait en cause le principe du
relèvement de cette quote-part, elle en réduit la portée et rend en quelque
sorte 2 milliards de francs aux groupes de sociétés. Cette mesure n'a donc pas
seulement un petit côté technique.
Le régime consolidé n'est par conséquent pas estimable quant à son coût, mais
cet article a le mérite de nous en faire percevoir l'un des contours les plus
signifiants.
Rien ne semble, de notre point de vue, justifier la proposition de la
commission, surtout dans le contexte que nous avons rappelé : celui d'une très
sensible amélioration de la situation financière des entreprises qu'illustre
d'ailleurs l'actualité boursière récente et que prouve encore le mouvement
quelque peu indécent, sous certains égards, de fusions et de prises de contrôle
qui alimentent la chronique économique.
Le niveau de dividendes distribués par les sociétés en 1998 et cette année
encore - on a dépassé le seuil des 500 milliards de francs de distribution -
est une preuve assez éclatante du phénomène.
Nous ne voterons donc pas cet amendement n° I-26 qui nous apparaît comme
disproportionné dans le contexte économique et social actuel et négateur des
principes de justice fiscale qui fondent notre législation.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je voudrais apporter très rapidement trois éléments
d'information complémentaires.
Tout d'abord, et contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le secrétaire
d'Etat, il ne me paraît absolument pas évident que cette mesure soit en
conformité avec le droit communautaire. S'il est possible de débattre de ce
sujet, la solution n'est pas évidente. En tout cas, je ne pense pas que ce
point puisse être tranché de manière incontestablement positive et avec
l'assurance que vous avez affichée voilà quelques instants.
Par ailleurs, en ce qui concerne la constitutionnalité de l'article 12, il
faut appeler l'attention sur un point : cet article est source de distorsions
de traitement au détriment des sociétés mères françaises détentrices de
participations dans des sociétés françaises. En effet, ces sociétés seront
imposées sur 7,5 % des dividendes reçus de leurs filiales alors que, à produit
égal, les sociétés détentrices de filiales établies dans un autre Etat membre
de l'Union européenne supporteront une imposition sur une assiette limitée à 5
%. Il y a donc distorsion au détriment des sociétés mères françaises de
filiales françaises. Cela me semble poser un problème d'égalité devant l'impôt,
problème qui devra être apprécié en tant que tel.
Enfin, l'amendement n° I-26 prévoit une mesure de réajustement dont j'ai dit
qu'elle visait à ne pas déséquilibrer les finances de l'Etat. Je précise
qu'elle est destinée à maintenir le produit fiscal de la mesure qui a déjà été
adoptée dans la loi de finances pour 1999 sur le même sujet. Je rappelle que
les prélèvements sur les remontées de résultats au sein des groupes ont
rapporté, l'année dernière, 4,5 milliards de francs, somme que nous préservons
- on ne peut pas revenir sur ce qui a été voté au titre de la loi de finances
pour 1999 - et qu'ils rapporteront, cette année, 4,2 milliards de francs
supplémentaires, soit un total, en deux ans, de 8,7 milliards de francs.
Alors, qu'on ne nous dise pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que le
Gouvernement conduit une politique de baisse de l'impôt !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-26, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 12 est ainsi rédigé.
Article additionnel après l'article 12
M. le président.
Par amendement n° I-185, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article
12, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 223 U du code général des impôts, il est inséré un article
223 V ainsi rédigé :
«
Art. 223 V. -
Le bénéfice des dispositions des articles 223 A à U est
plafonné à 20 millions de francs. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement porte sur la question assez importante de l'application du
régime des sociétés mères et d'imposition des groupes.
Nous avons déjà eu maintes fois l'occasion de souligner à quel point ce
dispositif, guidé par une conception pour le moins discutable de la fiscalité
des entreprises, nous paraissait exorbitant du droit commun.
Première observation : l'évaluation des voies et moyens, qui ne quantifie plus
le coût réel du dispositif d'imposition de groupe, nous indique la motivation
profonde qui a présidé à la mise en oeuvre de ce régime. Il s'agit, selon ce
document, d'« assurer la neutralité de l'impôt sur les sociétés au regard de
l'organisation et de la structure des groupes de sociétés ».
Posons-nous la question : la fiscalité doit-elle venir au secours des
entreprises, doit-elle appuyer par ses règles les décisions de gestion de ces
dernières ? Nous ne le croyons pas, et ce d'autant que le régime d'imposition
des groupes, malgré les mesures qui ont récemment pu être prises et qui sont
encore inscrites dans ce projet de loi de finances - je pense notamment aux
dispositions relatives à l'avoir fiscal portant sur les produits de
participations - demeure extrêmement favorable et a un coût largement excessif
au regard de ce qu'il apporte à la collectivité.
Il crée en fait, pour les sociétés les plus intégrées de notre pays, un statut
privilégié qui les fait échapper très largement à la règle commune en matière
d'impôt sur les sociétés.
Les sociétés placées sous le régime des groupes ne paient pas un impôt
équivalent au tiers de leur résultat fiscal, comme toute entreprise banalement
assujettie à l'impôt. Il est bien moindre, et, sur un plan de simple équité
fiscale, cela n'est pas véritablement supportable.
L'amendement n° I-185 vise donc à limiter la portée de l'application du régime
des groupes à un niveau d'exemption fiscale que l'on pourrait qualifier de «
raisonnable » et qui s'élèverait à 20 millions de francs par groupe
constitué.
A défaut d'une remise à plat de l'ensemble du dispositif, qui nous semble tout
à fait indispensable, ce serait un premier pas accompli dans la voie d'une
moralisation fiscale pour le moins nécessaire.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Franchement défavorable.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Franchement...
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement comprend bien la préoccupation des
auteurs de l'amendement. Mais les mesures de durcissement de la fiscalité des
dividendes pour les sociétés mères et l'alourdissement du taux de l'avoir
fiscal pour les autres entreprises répondent mieux à l'objectif que nous
recherchons en commun.
En effet, le régime dont il est proposé de limiter la portée se révèle
absolument indispensable dans la mesure où il instaure au sein d'un groupe sans
actionnaire minoritaire significatif la neutralité des diverses formes
d'exploitation.
Si l'on vous suivait et si l'on durcissait le régime, monsieur le rapporteur
général, l'avantage fiscal escompté serait immédiatement annulé du fait de la
réponse des groupes par des voies le plus souvent licites à cette nouvelle
donne fiscale.
J'observe aussi que ce régime ne met pas en opposition, contrairement à ce que
l'on pourrait penser à première vue, les grands groupes et les PME.
Les petits groupes familiaux organisés en plusieurs structures bénéficient
naturellement, eux aussi, de ce régime favorable. Les chiffres que je vais vous
indiquer vont sans doute vous étonner, mesdames, messieurs les sénateurs : deux
tiers des groupes ont un chiffre d'affaires inférieur à 60 millions de
francs,...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... et 55 % des groupes ne sont formés que de deux
sociétés.
(M. le rapporteur général acquiesce.)
Des mesures allant dans le sens souhaité par le groupe communiste
républicain et citoyen ayant été prises par ailleurs, j'invite les auteurs de
cet amendement à le retirer : il est en effet déjà satisfait par la philosophie
qui nous est commune.
En outre, je le répète, cet amendement, s'il était adopté, aurait des effets
pervers d'un point de vue fiscal, effets qui seraient très préjudiciables aux
petites et moyennes entreprises.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est une perversité !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-185, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 12
bis
M. le président.
« Art. 12
bis.
_ I. _ Le II de l'article 158
bis
du code général
des impôts est ainsi modifié :
« 1° Le taux : "45 %" est remplacé par le taux : "40 %";
« 2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le crédit d'impôt calculé dans les conditions prévues à l'alinéa précédent
est majoré d'un montant égal à 20 % du précompte versé par la société
distributrice. Pour le calcul de cette majoration, il n'est pas tenu compte du
précompte dû à raison d'un prélèvement sur la réserve des plus-values à long
terme. »
« II. _ La deuxième phrase du premier alinéa du 1 de l'article 223
sexies
du code général des impôts est supprimée.
« III. _ Les dispositions du 1° du I s'appliquent aux crédits d'impôt imputés
ou restitués à compter du 1er janvier 2000.
« Les dispositions du 2° du I et du II s'appliquent aux distributions mises en
paiement à compter du 1er janvier 2000. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° I-27, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose :
A. - De supprimer le 1° du I de cet article.
B. - De modifier comme suit le texte présenté par le 2° du I de cet article
pour compléter le II de l'article 158
bis
du code général des impôts
:
« 1° Dans la première phrase, remplacer le pourcentage : "20 % " par le
pourcentage : "10 %" ;
« 2° Dans la première phrase, remplacer le mot : "versé" par le mot : "dû"
;
« 3° Compléter ce texte par deux phrases ainsi rédigées : "Cette majoration du
crédit d'impôt est reçue en paiement de l'impôt sur les sociétés. A défaut,
cette majoration s'impute sur le précompte afférent à des distributions de
produits encaissés au cours des exercices clos depuis 5 ans au plus". »
C. - Pour compenser la perte de recettes résultant du B ci-dessus, de
compléter
in fine
cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé
:
« ... Les pertes de recettes résultant de la possibilité d'imputer le crédit
d'impôt non utilisé sur le précompte afférent à des distributions ultérieures
sont compensées par le relèvement à due concurrence des droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-186, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le deuxième alinéa
(1°) du I de l'article 12
bis,
de remplacer le pourcentage : « 40 % »
par le pourcentage : « 33,33 % ».
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
I-27.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'article 12
bis
prévoit de ramener de 45 % à
40 % le taux de l'avoir fiscal pour les sociétés qui ne bénéficient pas du
régime spécial des sociétés mères et filiales. Cette mesure est rétrogade et
antidémocratique. Elle accroît, en outre, le « frottement » fiscal sur la
remontée des dividendes.
Par le présent amendement, la commission vous propose, d'une part, de ne pas
accepter la diminution de l'avoir fiscal pour les personnes morales et, d'autre
part, d'apporter plusieurs améliorations techniques au dispositif tendant à
neutraliser la diminution de l'avoir fiscal intervenue dans la loi de finances
pour 1999 au regard du précompte.
D'abord, par cohérence avec le maintien du taux de l'avoir fiscal à 45 %, le
montant à rajouter en cas de paiement du précompte correspond à 10 % de ce
dernier et non à 20 %.
Ensuite, la correction doit porter sur l'ensemble du précompte dont la société
est redevable, quelle que soit la manière dont la société décide de s'acquitter
de ce précompte, soit par imputation des avoirs fiscaux ou crédits d'impôt,
soit par versement en espèce.
Ensuite, afin que la correction du précompte soit effective, que l'actionnaire
soit en situation bénéficiaire ou pas, il convient de prévoir que la majoration
du crédit d'impôt est imputable soit sur l'impôt sur les sociétés, soit sur le
précompte exigible en cas de distribution au cours des cinq exercices
suivants.
En d'autres termes, monsieur le secrétaire d'Etat, nous corrigeons la copie de
manière à ne pas faire subir aux entreprises et à leurs détenteurs des
ponctions supplémentaires et de bien appréhender tous les aspects et toutes les
conséquences du dispositif de l'avoir fiscal et du précompte.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, pour présenter l'amendement n° I-186.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cet amendement qui, je le pressens, ne sera pas du goût de M. le rapporteur
général ni de la majorité de la commission des finances, porte sur l'avoir
fiscal et prolonge les dispositions adoptées dans la loi de finances pour 1999
et lors de la discussion de la première partie du présent projet de loi de
finances à l'Assemblée nationale.
Il s'agit pour nous de faire réaliser au budget de la nation une sensible
économie, qui pourrait se chiffrer en milliards de francs, par la simple
adaptation du taux de l'avoir fiscal au taux actuel de l'impôt sur les
sociétés.
A ce sujet, il importe donc de procéder à un rappel de quelques données que je
considère comme essentielles.
Le principe même de l'avoir fiscal, nous avons déjà eu l'occasion de le dire
et de le redire, nous paraît pour le moins discutable, et d'ailleurs le plus
grand des pays libéraux de la planète, les Etats-Unis, ne l'applique pas. Pour
autant, rien ne justifie aujourd'hui qu'il persiste à être plus important que
le taux de l'impôt auquel il se rapporte.
Par exemple, un taux de 50 % d'avoir fiscal n'a pas de sens au regard d'un
simple calcul. Quand une entreprise réalise 100 de résultat imposable, elle est
redevable d'un impôt égal à 33,33 % de ce résultat selon le taux actuel. Elle
est donc en mesure de mettre en oeuvre, dans l'absolu et sous réserve de
dispositions contraires, une distribution de dividendes de 66,66 % de ce
résultat. Un avoir fiscal de 50 % sur cette somme serait, dans les faits,
exactement équivalent au montant de l'impôt sur les sociétés dû, ce qui est
tout de même pour le moins étonnant, vous en conviendrez.
Je n'insisterai pas sur les conséquences que peut avoir un tel dispositif en
matière d'impôt sur le revenu - ce n'est l'objet ni de l'article ni de cet
amendement - ou d'impôt sur les sociétés, sinon pour indiquer que certaines
entreprises très importantes sont, depuis 1995, dans une situation en apparence
assez paradoxale. En effet, elles ne sont véritablement soumises, en matière
d'impôt sur les sociétés, qu'aux deux majorations décidées dans le collectif
budgétaire de l'été 1995 et dans le projet de loi portant mesures d'urgence à
caractère fiscal et financier de l'été 1997, tandis que leur cotisation «
normale » demeure d'une modicité remarquable.
Il nous semble donc logique qu'à partir du moment où le taux normal de l'impôt
sur les sociétés est de 33,33 %, le taux de l'avoir fiscal doit être
strictement équivalent au taux d'imposition. Le taux actuel de 50 %, même
réduit pour les revenus de participation définis dans le cadre de cet article,
est une survivance, monsieur le rapporteur général, de l'ancien taux historique
qu'il convient de faire disparaître comme anomalie de notre système fiscal.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° I-186 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission ne peut être favorable à cet
amendement, qui traduit une démarche diamétralement opposée à celle qui est
suivie par la majorité de la commission, Mme Beaudeau le sait bien.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-27 et I-186 ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'amendement n° I-27 a pour objet de supprimer
l'essence même de l'article 12
bis
, en faisant disparaître son 1°,
lequel prévoit de ramener à 40 % le taux de l'avoir fiscal dont bénéficient les
associés et personnes morales non sociétés mères. Or cette mesure qui vise plus
spécifiquement les dividendes issus des titres de placement tend à inciter les
sociétés à consacrer plus leurs résultats à des investissements productifs qu'à
de simples placements en actions.
En outre, cette baisse de l'avoir fiscal est cohérente avec la mesure proposée
par le Gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2000 qui vise à
porter le montant de la quote-part de frais et charges, applicable dans le
cadre du régime des sociétés mères, de 2,5 % à 5 % du produit brut des
participations. Elle permet ainsi le maintien d'un avantage relatif substantiel
accordé aux sociétés bénéficiant du régime des sociétés mères - exonération -
par rapport à celles qui utilisent l'avoir fiscal - imputation impôt sur impôt
- avantage justifié par le différentiel de risques : la société mère s'implique
dans la gestion de sa participation alors que la société non mère spécule sur
une société tierce.
La deuxième proposition de la commission vise à calculer la majoration de
l'avoir fiscal en retenant non seulement le précompte effectivement versé par
la société distributrice, mais également le précompte acquitté au moyen de
crédits d'impôts par les sociétés bénéficiant du régime des sociétés mères.
Cette solution n'est pas acceptable car elle conduirait à annuler l'effet de
la mesure de réduction du taux de l'avoir fiscal à 40 % - d'ailleurs, c'est
l'objectif que vous poursuivez, monsieur le rapporteur général - pour les
dividendes reçus par les sociétés non mères et distribués par des sociétés
mères. En effet, dès lors que celles-ci continuent à bénéficier d'un avoir
fiscal à 50 % qu'elles imputent en totalité sur leur précompte, le dispositif
de majoration de l'avoir fiscal que vous proposez conduirait alors à maintenir
systématiquement à 50 % le taux de l'avoir fiscal octroyé aux personnes morales
actionnaires des sociétés mères.
L'objectif de réduction du taux de l'avoir fiscal pour cette catégorie
d'actionnaires ne serait donc pas atteint, ce qui serait, en outre, directement
contraire au principe d'égalité devant l'impôt puisque les actionnaires non
mères, objets de la mesure, seraient traités de manière discriminante en
fonction de la qualité de la société distributrice.
Enfin, vous proposez que la majoration de l'avoir fiscal puisse s'imputer sur
le précompte lorsque l'amputation sur l'impôt sur les sociétés ne peut être
effectuée compte tenu de la situation déficitaire de l'actionnaire personne
morale.
Comme vous le savez, monsieur le rapporteur général, l'avoir fiscal qui
s'attache à des produits imposables mais non imposés en raison de la situation
déficitaire de la société qui perçoit ces produits ne peut s'imputer faute de
base d'imputation, c'est-à-dire d'impôt. C'est au demeurant logique, puisque
l'avoir fiscal a pour objet d'atténuer une double imposition qui, en
l'occurrence, n'existe pas.
Sauf à détruire cette cohérence, ces principes qui ne peuvent que s'appliquer
à la partie de l'avoir fiscal correspondant à l'excédent de précompte acquitté
par la société distributrice. L'imputation de l'avoir fiscal sur le précompte
étant expressément réservée à la redistribution de produits ayant bénéficié du
régime mère-fille, votre proposition ne peut donc être acceptée et j'en demande
le rejet.
J'en viens à l'amendement n° I-186, présenté par Mme Beaudeau.
La mesure proposée, qui consiste à réduire à 33,33 % l'avoir fiscal - au lieu
de 40 % dans notre proposition - sur les sommes effectivement versées par la
société distributrice, vise à éviter le remboursement aux actionnaires, sous
forme d'avoir fiscal, de l'intégralité de l'impôt sur les bénéfices payé par la
société distributrice.
Or, vous le savez, madame Beaudeau, des dispositions ont été prises depuis
1997 qui permettent déjà d'écarter cette conséquence et je vous le démontre.
En effet, la contribution sur l'impôt sur les sociétés, égale à 10 % de cet
impôt, n'a pas de contrepartie en avoir fiscal.
De même, la contribution sociale de 3,30 % de l'impôt sur les bénéfices,
prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne créera pas
d'avoir fiscal pour les actionnaires et constituera donc un prélèvement
définitif.
En outre, la loi de finances pour 2000 prévoit déjà - nous venons d'en parler
- de diminuer le taux de l'avoir fiscal à 40 % des sommes effectivement versées
par la société distributrice à ses actionnaires autres que les personnes
physiques et les sociétés possédant la qualité de société mère. Cette
proposition qui a été adoptée par l'Assemblée nationale permet d'atteindre
votre objectif.
En conséquence, tout en partageant les principes qui sous-tendent votre
argumentation, je considère que votre amendement est superfétatoire - je viens
de vous en faire la démonstration - et je vous demande de bien vouloir le
retirer.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-27, repoussé par le Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste républicain et citoyen est franchement contre !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je m'en doutais !
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° I-186 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 12
bis,
ainsi modifié.
(L'article 12
bis
est adopté.)
Articles additionnels après l'article 12
bis
M. le président.
Par amendement n° I-28, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 12
bis,
un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Le deuxième alinéa du 1 de l'article 223
sexies
du code général
des impôts est ainsi rédigé :
« Il est également exigible lorsque les produits distribués sont prélevés sur
les résultats d'exercices clos depuis une date antérieure au 1er janvier 1965
ou, pour les distributions antérieures au 17 novembre 1999, sur les résultats
d'exercices clos depuis plus de cinq ans. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées par le
relèvement à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code
général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous abordons un point important. Cet amendement a
pour objet de mettre fin à la règle de l'exigibilité du précompte pour les
distributions opérées sur les bénéfices clos depuis plus de cinq ans. En effet,
cette règle conduit à imposer deux fois les bénéfices distribués, ce que je
n'hésite pas à appeler un racket fiscal...
M. Michel Charasse
Oh !
M. Philippe Marini
rapporteur général
... racket fiscal qui peut être un obstacle à la
transmission d'entreprises et, d'ailleurs, le conseil des impôts ne s'y est pas
trompé. Je lis en effet, dans un rapport qui date de quelques années, le
paragraphe suivant : « L'intérêt économique d'une distribution rapide
n'apparaît cependant pas. Cette disposition pénalise en fait les sociétés qui
souhaitent maintenir un niveau de distribution constant malgré une baisse
temporaire de leurs résultats. Elle constitue également l'un des obstacles
fiscaux à la dissolution des sociétés devenues inactives qui ne peut être levé
que sur agrément prévu par l'article 239
bis
B du code général des
impôts. »
Mes chers collègues, cette disposition qui vous est proposée fait donc partie
de la révision nécessaire de notre système fiscal, en application du principe
de neutralité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Cela n'étonnera personne, le Gouvernement n'est pas du
tout favorable à l'amendement de M. Marini.
(Sourires.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je suis surpris !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le délai de cinq ans que vous souhaitez supprimer
répond à une logique forte.
Je rappelle que le précompte est exigible lorsque les distributions sont
prélevées sur des résultats n'ayant pas été soumis à l'impôt ou sur des
résultats d'exercices clos depuis plus de cinq ans, et l'amendement veut
supprimer ce délai de cinq ans. Or il faut le maintenir pour inciter les
entreprises à ne pas geler durablement des réserves dont elles n'ont pas
l'emploi.
Les distributions de dividendes - monsieur le rapporteur général, je pense que
vous serez d'accord avec moi sur ce point - constituent le meilleur moyen
d'attirer l'épargne vers les placements en actions. A cet égard, le précompte a
les mêmes objectifs que l'avoir fiscal, dont il constitue le gage. Encourager
les distributions régulières, c'est notre but pour obtenir une meilleure
rémunération de l'épargne, afin d'assurer un bon financement des
investissements.
Il s'agit vraiment là d'un amendement discriminant entre nous, monsieur le
rapporteur général. J'ajoute que le délai de cinq ans constitue une mesure de
simplification. A défaut, les sociétés seraient dans l'obligation de conserver
sur de longues périodes la trace de documents juridiques, comptables et fiscaux
susceptibles de prouver la réalité de l'assujettissement à l'impôt des
résultats distribués.
Cet alourdissement des obligations administratives n'est pas souhaitable, et
n'est en outre pas conforme à l'objectif actuel de réduction du coût de gestion
de l'impôt, objectif sur lequel doit porter toute notre attention.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-28, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 12
bis.
Par amendement n° I-97, M. Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Demerliat,
Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 12
bis,
un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le paragraphe II de l'article 44
sexies
du code général
des impôts, il est inséré un nouveau paragraphe ainsi rédigé :
«
II
bis. - Le capital des sociétés nouvelles ne doit pas être détenu,
directement ou indirectement, pour plus de 50 %, par une personne physique qui
a dirigé directement ou indirectement au moins deux sociétés qui ont déposé
leur bilan dans le même secteur. »
« II. - Le deuxième alinéa du
c
de l'article 44
septies
du code
général des impôts est ainsi rédigé :
« Cette exonération est accordée sur agrément du ministre chargé du budget.
»
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Cet amendement vise un problème mettant en péril la survie de nombre de
petites entreprises dans notre pays.
Un dépôt de bilan est en général une catastrophe pour le chef de l'entreprise
concernée, mais il engendre souvent également des difficultés considérables
pour d'autres entreprises en relation commerciale avec elle, contraignant même
certaines au dépôt de bilan, puisqu'elles ne peuvent en général récupérer les
sommes qui leur sont dues. Ce phénomène est d'ailleurs aggravé par la longueur
des délais de paiement dans notre pays.
Or, après deux mises en cessation de paiement par un entrepreneur dans un même
secteur d'activité, on peut s'interroger sur les capacités de chef d'entreprise
de celui-ci ou sur les causes réelles de ces décisions de cessation de
paiement.
Il semblerait en effet que certains chefs d'entreprise, volontairement ou non,
mettent en difficulté leur entreprise jusqu'à la cessation de paiement, puis la
reprennent ou recréent une nouvelle société dans le même secteur, après
conservation de sa clientèle, voire après rachat des actifs de l'ancienne en
utilisant alors un prête-nom.
La législation n'apparaît pas suffisante pour empêcher de telles manoeuvres
qui, si elles sont certainement peu nombreuses, entraînent néanmoins chaque
année la faillite d'entreprises pourtant en bonne santé.
Par amendement nous proposons donc qu'au moins dans ces cas précis les
avantages fiscaux prévus aux articles 44
sexies
et 44
septies
du
code général des impôts ne puissent bénéficier à ces personnes.
Pour l'article 44
sexies,
deux décisions récentes du Conseil d'Etat ont
précisé les conditions dans lesquelles les entreprises nouvellement créées
étaient susceptibles de bénéficier du régime d'exonération des entreprises
nouvelles de l'impôt sur les sociétés, dans le cadre d'un zonage jusqu'à cette
année. Ces arrêts ont clairement défini l'exclusion des entreprises nouvelles
en tant qu'extension d'activités préexistantes.
Mais il ressort de ces arrêts que l'exonération est accordée lorsqu'il s'agit
d'une nouvelle société créée par une personne physique, même si cette dernière
dirigeait des sociétés auparavant dans le même secteur. Cet amendement prévoit
donc d'exclure de l'exonération d'impôt les sociétés nouvelles détenues
directement ou indirectement, pour plus de 50 %, par une personne physique qui
a dirigé personnellement ou par l'intermédiaire de tiers au moins deux sociétés
ayant déposé leur bilan dans le même secteur.
Pour l'article 44
septies,
qui prévoit l'exonération d'impôt sur les
sociétés lors d'une reprise d'une entreprise en redressement ou en liquidation
judiciaire, l'agrément du ministre devrait s'appliquer à toutes les demandes
d'exonération réalisées dans le cadre de la procédure prévue afin que
l'administration fiscale puisse empêcher les « vraies-fausses » cessations de
paiement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission a estimé que l'amendement n'est pas
utile. En effet, l'exonération d'impôts pour les entreprises nouvelles n'est
pas accordée lorsque l'entreprise est créée dans le cadre d'une concentration,
d'une restructuration ou d'une extension d'activités existantes. Ces conditions
sont déjà appréciées de façon restrictive par l'administration fiscale, ce qui
permet d'ores et déjà d'éviter les « vrais-faux » dépôts de bilan évoqués par
l'auteur de l'amendement.
Par ailleurs, on peut considérer, s'agissant de l'article 44
septies
du
code général des impôts, que l'état de difficulté de l'entreprise reprise est
avéré par le fait qu'elle a fait l'objet d'une procédure judiciaire. Il est
donc inutile d'alourdir les modalités d'octroi de l'exonération par un agrément
préalable du ministre chargé du budget. Cela ne pourrait que susciter un
embouteillage administratif supplémentaire et ne serait certainement pas de
bonne administration.
Ce sont les raisons pour lesquelles la commission des finances a émis un avis
défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Un peu à l'opposé de M. le rapporteur général du Sénat
- je le prie de m'en excuser - je trouve que l'amendement défendu par M.
Massion est utile, au moins par la réflexion qu'il suscite.
Autrefois, on a parlé de la nécessité d'un « permis de conduire » les
entreprises. Le mot n'est plus à la mode, mais votre préoccupation est, au
fond, d'assurer une certaine sécurité, notamment lors de la reprise d'une
entreprise en difficulté afin de procurer une réelle sécurité à chacun des
salariés et de préserver le mieux possible l'emploi.
Si l'objectif est d'éviter d'accorder un avantage fiscal à des entreprises
dirigées ou contrôlées par des personnes ayant commis des fautes de gestion, au
sens du code du commerce, ou des fautes lourdes de gestion, les règles
juridiques actuelles s'opposent en tout état de cause à ce que des dirigeants
ayant été déclarés en faillite personnelle puissent exercer une activité
commerciale ou gérer toute personne morale ayant une activité économique.
Ce sont très certainement un certain nombre de cas concrets, notamment dans
votre région, monsieur le sénateur, qui ont motivé le dépôt de cet amendement
par le groupe socialiste.
S'agissant du régime des entreprises nouvelles, le dispositif actuel exclut
déjà toute possibilité d'accorder l'avantage fiscal dans l'hypothèse où une
entreprise serait créée à la suite d'un « vrai-faux » dépôt de bilan, pour
reprendre votre expression. Les entreprises créées dans le cadre d'une reprise
ou d'une restructuration d'activité préexistante ne peuvent pas être
considérées comme des entreprises nouvelles.
J'ai rappelé les principes, monsieur Massion. Il était nécessaire de le faire.
Je vous remercie de m'en avoir donné l'occasion. Je me propose d'ailleurs, à la
suite du dépôt de votre amendement, de rappeler ces lignes strictes et claires
au service des impôts, ce qui permettra de valoriser pleinement, dans la
pratique et dans nos régions respectives, les objectifs sérieux, forts et
positifs, à l'égard de l'emploi notamment, que vous avez indiqués lorsque vous
avez défendu l'amendement.
Au bénéfice de cet engagement que prend le Gouvernement devant le Sénat et
devant le groupe socialiste, peut-être pourriez-vous retirer votre texte,
monsieur Massion.
M. le président.
Monsieur Massion, l'amendement n° I-97 est-il maintenu ?
M. Marc Massion.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de la réponse que vous m'avez
faite et de l'engagement que vous avez pris publiquement devant le Sénat. Je
retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-97 est retiré.
Article 13
M. le président.
« Art. 13. _ I. _ Au deuxième alinéa du 6 de l'article 39
duodecies
, au
III de l'article 54
septies
et à l'article 210 B du code général des
impôts, les mots : "cinq ans" sont remplacés par les mots : "trois ans".
« II. _ A. _ Le premier alinéa du 1 de l'article 210 B du code général des
impôts est supprimé.
« B. _ 1. Au 1 de l'article 210 B du code général des impôts, les mots :
"Toutefois l'agrément est supprimé en ce qui concerne l'apport partiel d'actif
d'une branche complète d'activité ou d'éléments assimilés" sont remplacés par
les mots : "Les dispositions de l'article 210 A s'appliquent à l'apport partiel
d'actif d'une branche complète d'activité ou d'éléments assimilés".
« 2. Au 1 de l'article 210 B du code général des impôts, les mots : "Il en est
de même en cas de scission" sont remplacés par les mots : "Les dispositions de
l'article 210 A s'appliquent à la scission".
« C. _ L'article 210 B du code général des impôts est complété par un 3 ainsi
rédigé :
« 3. Lorsque les conditions mentionnées au 1 ne sont pas remplies, les
dispositions de l'article 210 A s'appliquent aux apports partiels d'actif et
aux scissions sur agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649
nonies
.
« L'agrément est délivré lorsque, compte tenu des éléments faisant l'objet de
l'apport :
«
a)
L'opération est justifiée par un motif économique, se traduisant
notamment par l'exercice par la société bénéficiaire de l'apport d'une activité
autonome ou l'amélioration des structures, ainsi que par une association entre
les parties ;
«
b)
L'opération n'a pas comme objectif principal ou comme un de ses
objectifs principaux la fraude ou l'évasion fiscales ;
«
c)
Les modalités de l'opération permettent d'assurer l'imposition
future des plus-values mises en sursis d'imposition. »
« III. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 210 B
bis
ainsi rédigé :
«
Art. 210 B
bis
. _ 1. Les titres représentatifs d'un apport
partiel d'actif ou d'une scission grevés de l'engagement de conservation de
trois ans mentionné à l'article 210 B peuvent être apportés, sans remise en
cause du régime prévu à l'article 210 A, sous réserve du respect des conditions
suivantes :
«
a)
Les titres sont apportés dans le cadre d'une fusion, d'une
scission ou d'un apport partiel d'actif placé sous le régime de l'article 210 A
;
«
b)
La société bénéficiaire de l'apport conserve les titres reçus
jusqu'à l'expiration du délai de conservation prévu à l'article 210 B.
« L'engagement de conservation est souscrit dans l'acte d'apport par les
sociétés apporteuse et bénéficiaire de l'apport.
« En cas d'apports successifs au cours du délai de conservation prévu à
l'article 210 B, toutes les sociétés apporteuses et bénéficiaires des apports
doivent souscrire cet engagement dans le même acte pour chaque opération
d'apport.
« 2. Le non-respect de l'une des dispositions prévues au 1 entraîne la
déchéance rétroactive du régime de l'article 210 A appliqué à l'opération
initiale d'apport partiel d'actif ou de scission rémunérée par les titres
grevés de l'engagement de conservation. »
« IV. _ A. _ Les dispositions du I s'appliquent aux opérations d'apports
partiels d'actif et de scissions réalisées à compter du 15 septembre 1999 et à
celles déjà réalisées à cette date pour lesquelles les engagements de
conservation sont en cours au 15 septembre 1999.
« B. _ Les dispositions du III s'appliquent aux opérations de fusions, de
scissions et d'apports partiels d'actif réalisées à compter du 15 septembre
1999.
« C. _ Les dispositions du II s'appliquent aux décisions d'agrément délivrées
à compter du 1er janvier 2000. »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet article 13 vise notamment à ramener de cinq à
trois ans le délai de conservation des titres qui subordonne l'octroi du régime
de faveur des fusions aux opérations de scission et d'apport partiel
d'actif.
Je rappelle que le régime de faveur consiste en un sursis d'imposition des
plus-values réalisées à l'occasion d'opérations de scission et d'apport partiel
d'actif. Un tel objectif est, à l'évidence, tout à fait correct et répond aux
nécessités des entreprises.
Toutefois, l'article 13, dans sa rédaction actuelle, comporte quelques
ambiguïtés que j'aurais souhaité voir levées par M. le secrétaire d'Etat à
l'occasion de cette discussion.
Qu'en est-il, en particulier, des opérations qui bénéficiaient du régime de
faveur des fusions sur agrément ? Les agréments délivrés actuellement
prévoient-ils un délai de conservation des titres pendant cinq ans comme dans
le régime de droit commun ? Si tel est le cas, monsieur le secrétaire d'Etat,
prévoyez-vous de faire bénéficier les opérations correspondantes d'une
réduction de délai similaire à celle que vous octroyez aux opérations qui
bénéficient du régime de faveur sans agrément ?
Par ailleurs, les dispositions de l'article 210 B du code général des impôts
sur les scissions et les apports partiels s'appliquent-elles aux opérations
transfrontalières ? La directive européenne du 23 juillet 1990 sur les fusions
permet-elle ou non de subordonner l'octroi du régime de sursis d'imposition à
une durée de détention minimale des titres ?
Si oui, pourquoi avoir refusé d'inscrire parmi les conditions d'octroi de
l'agrément la nécessité de détenir les titres pendant un délai de trois ans,
comme la commission des finances de l'Assemblée nationale vous y invitait ? Si
non, pourquoi avoir déclaré que cette condition serait systématiquement
demandée ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ces éclaircissements
paraissent nécessaires pour voter en toute connaissance de cause l'article
13.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Sur cette matière difficile et technique, je remercie
M. le rapporteur général de m'avoir communiqué ses questions par avance afin
que, aidé de mes services, je puisse, grâce à leur expertise, apporter une
réponse qui figurera au
Journal officiel.
C'est aussi la fonction du
législateur d'attirer l'attention du Gouvernement sur des points
particulièrement délicats qui, d'ailleurs, ont trait à une actualité
récente.
Monsieur le rapporteur général, votre première question concerne le délai de
conservation des titres dans le cas de l'agrément.
Dans l'agrément qu'il délivre, le ministre fait systématiquement référence au
délai de conservation mentionné à l'article 210 B du code général des impôts
applicable aux opérations placées sous le régime de faveur de plein droit. Ce
délai sera désormais de trois ans.
S'agissant des agréments en cours, la réduction du délai s'appliquera non pas
ipso facto
mais au cas par cas. Les contribuables pourront introduire
une nouvelle demande formelle s'ils le souhaitent, sur le fondement de
l'article 1756 du code général des impôts, qui prévoit que les conséquences du
non-respect d'une condition d'agrément peuvent être atténuées.
Votre deuxième question porte sur l'application de l'article 210 B du code
général des impôts aux opérations frontalières. Cet article s'applique en cas
d'apport d'une société étrangère à une société française. Dans le sens inverse,
c'est l'article 210 C du code général des impôts qui s'applique.
La directive sur les fusions de 1990 permet la fixation d'un délai si celui-ci
n'a pour finalité que de lutter contre l'évasion fiscale et reste proportionné
à cette finalité. L'idée de délai n'est pas contraire à la directive
européenne.
En revanche, un délai généralisé ne prenant pas en compte chaque cas serait
contraire à la directive. Tel est le sens de l'arrêt Loer Bloem de la Cour de
justice des Communautés européennes rendu le 17 juillet 1997. Voilà pourquoi le
Gouvernement a apporté ces réponses à l'Assemblée nationale puis les a
réitérées devant vous à propos de ce texte dont vous avez souligné dans votre
rapport les mérites et la transparence.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je souhaite simplement remercier M. le secrétaire
d'Etat du caractère très précis et complet des réponses qu'il a bien voulu
apporter.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13.
(L'article 13 est adopté.)
Article 13
bis
M. le président.
« Art. 13
bis.
_ L'article 220
octies
du code général des impôts
est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa du 1 est complété par les mots : "en 1998";
« 2° A la fin du deuxième alinéa du 1, les mots : "constatée pendant l'année
par rapport à l'année précédente de l'effectif salarié" sont remplacés par les
mots : "de l'effectif salarié déterminée dans les conditions prévues au 3";
« 3° Le dernier alinéa du 1 est supprimé ;
« 4° Dans le premier alinéa du 2 :
«
a)
Les mots : "calculé au titre d'une année" sont supprimés ;
«
b)
Les mots : "au cours de cette même année" sont remplacés par les
mots : "en 1998";
« 5° Les deuxième et avant-dernier alinéas du 2 sont supprimés ;
« 6° Dans le 3, les mots : "mentionné au 1 afférent à 1998" sont supprimés. »
-
(Adopté.)
Article additionnel après l'article 13
bis
M. le président.
Par amendement n° I-187 rectifié, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après
l'article 13
bis
, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le second alinéa de l'article 235
ter
ZB du code général des impôts
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elle est maintenue pour toute société dont le résultat d'exploitation du
dernier exercice clos a été bénéficiaire et qui procède, durant l'exercice
suivant, à la mise en oeuvre de plans de restructuration accompagnés de
suppressions d'emplois ou de licenciements. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement porte sur la question du devenir de la majoration
exceptionnelle de l'impôt sur les sociétés instituée en 1997 et qui s'achève en
1999.
On sait d'ailleurs que cette mesure temporaire est en fait l'une des
moins-values fiscales les plus importantes de l'an 2000, puisque la suppression
de la majoration constitue une perte de recettes fiscales d'un montant de 12,4
milliards de francs.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On les retrouve dans la sécurité sociale !
M. Thierry Foucaud.
D'aucuns, ici, je l'entends déjà, nous rappelleront que cette suppression va
de pair avec une mesure sur la quote-part de frais et charges du régime des
groupes, d'un rendement attendu de plus de 4 milliards de francs, et, sur un
autre plan, avec la contribution des sociétés au financement de la réforme des
cotisations sociales, dont le rendement attendu est d'environ 4 milliards de
francs.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous y voilà !
M. Thierry Foucaud.
Nous n'avons d'ailleurs pas été autrement surpris de constater que la majorité
sénatoriale a combattu les deux mesures, montrant ainsi toute sa sollicitude,
traditionnelle dès lors qu'il s'agit de ces questions.
Comme par habitude, quand il s'agit de taxation des profits, il existe
toujours des marges pour en atténuer l'effet.
Nous proposons donc, monsieur le rapporteur général, de procéder tout à fait
autrement, en maintenant la majoration exceptionnelle de l'impôt sur les
sociétés instituée en 1997 dès lors que les entreprises qui y sont assujetties
procèdent, malgré leurs résultats bénéficiaires, à la mise en oeuvre de plans
de licenciement et de suppression d'emplois.
Cette proposition est évidemment liée à la révélation de la situation d'une
entreprise comme Michelin, encore que je ne sois pas certain, compte tenu du
caractère particulier de l'entreprise concernée sur le plan juridique - c'est,
en effet, une société en commandite par actions -, qu'elle ait eu à subir les
effets de la majoration exceptionnelle.
Quant au fond, et indépendamment des spécificités de telle ou telle
entreprise, il nous semble cependant nécessaire de mettre en place une
fiscalité qui rende dissuasif le recours systématique des grandes sociétés à la
gestion des personnels à flux tendu, qui apparaît au travers de la persistance
et de la périodicité quasi annuelle des plans de licenciement.
Sans insister sur le fait que la liquidation d'emplois - qu'elle passe par les
incitations au départ volontaire, la mise en oeuvre d'une convention FNE ou par
des licenciements secs - a aussi une portée négative sur le potentiel humain et
la créativité même d'une entreprise, nous pensons qu'il faut cesser de
favoriser de telles mesures.
Cet amendement prolonge, par exemple, la mesure que nous avions prise à
l'occasion de la loi de finances pour 1998 et qui mettait un terme à la
déductibilité fiscale des provisions pour licenciement, et tend donc à la
compléter.
Tel est le sens de cet amendement que nous vous invitons à adopter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On aura compris que l'approche de la commission est
assez diamétralement opposée à celle qui vient d'être exposée.
Je voudrais dire à M. Foucaud que le statut juridique de sociétés en
commandite par actions n'exonère pas de l'impôt sur les sociétés ; ce serait
trop facile. L'entreprise Michelin y est donc assujettie, comme toutes les
autres sociétés commerciales, quel que soit leur statut juridique.
La commission est défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Là encore, le Gouvernement partage les objectifs du
groupe communiste républicain et citoyen qui viennent d'être rappelés par M.
Foucaud, et sa préoccupation de mettre un frein à certains comportements peu
soucieux des conséquences sociales qu'ils entraînent.
Nous avons d'ailleurs agi dans ce sens. En effet, j'ai défendu voilà quelques
jours à l'Assemblée nationale la création d'une contribution de 3,30 % assise
sur l'impôt sur les sociétés, contribution dite CBS, prévue dans le cadre du
projet de loi sur le financement de la sécurité sociale. C'est une illustration
parmi beaucoup d'autres.
Enfin, le Premier ministre a indiqué, lors de son discours de Strasbourg, que
le Gouvernement apportait son appui à une réflexion des partenaires sociaux,
dans le cadre de l'UNEDIC, sur un dispositif de pénalisation, au titre des
cotisations d'assurance chômage, pour les entreprises qui licencient.
Plutôt que de prendre des mesures fiscales éparses et peu adaptées finalement
à l'objectif fixé, il est plus judicieux, me semble-t-il, d'attendre les
résultats de cette réflexion, de mettre en perspective la somme considérable de
mesures que prend le Gouvernement et qui marquent une détermination politique
franche. Elles ont été annoncées, elles vont être affinées et elles donneront
satisfaction à la majorité plurielle, qui n'a jamais failli dans son soutien au
Gouvernement.
Monsieur Foucaud, il faut faire un geste et montrer que l'engagement réitéré
par M. le Premier ministre au début de cet automne a été compris. Peut-être
pourriez-vous retirer votre amendement ?
M. le président.
Monsieur Foucaud, acceptez-vous de retirer votre amendement ?
M. Thierry Foucaud.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis d'accord avec vous sur la détermination
franche du Gouvernement. Toutefois, au regard de la situation, qui, encore une
fois, n'est pas du fait du Gouvernement, et pour garantir l'avenir, voire pour
prévenir les situations futures, permettez-moi, tout en soulignant le caractère
positif de votre intervention, que je comprends compte tenu de la politique de
la majorité plurielle, de maintenir néanmoins cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-187 rectifié, repoussé par la commission et
par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel avant l'article 14
M. le président.
Par amendement n° I-188, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant
l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 1° de l'article 1467 du code général des impôts est complété par un
quatrième et un cinquième alinéas
c
ainsi rédigés :
«
c)
L'ensemble des titres de placement et de participation, les titres
de créance négociables, les prêts à court, moyen et long termes. Ces éléments
sont pris en compte pour la moitié de leur montant figurant à l'actif du bilan
des entreprises assujetties. Pour les établissements de crédit et les sociétés
d'assurance, le montant net de ces actifs est pris en compte après réfaction du
montant des actifs représentatifs de la couverture des risques, contreparties
et obligations comptables de ces établissements.
« La valeur nette des actifs, déterminée selon les dispositions du précédent
alinéa, est prise en compte après réfaction de la valeur locative des
immobilisations visée au
a.
»
« II. - L'article 1636 du code général des impôts est rétabli dans la
rédaction suivante :
«
Art. 1636. -
Le taux grevant les actifs définis au
c
de
l'article 1467 est fixé à 0,5 %.
« Il évolue chaque année, pour chaque entreprise assujettie, à proportion d'un
coefficient issu du rapport entre la valeur relative des actifs définis au
c
de l'article 1467 au regard de la valeur ajoutée créée pour l'activité de
l'entreprise. »
« III. -
a)
Le paragraphe II de l'article 1648 A
bis
du code
général des impôts est complété par un septième alinéa (6°) ainsi rédigé :
«
6°
La moitié du produit résultant de l'imposition des actifs définis
au
c
de l'article 1467, suivant les règles fixées par l'article 1636.
»
«
b)
Le paragraphe I de l'article 1648 B
bis
est complété par un
quatrième alinéa (3°) ainsi rédigé :
«
3°
La moitié du produit résultant de l'imposition des actifs définis
au
c
de l'article 1467, suivant les règles fixées par l'article 1636.
»
« IV. - Dans le deuxième alinéa
a
du paragraphe I
ter
de
l'article 1647 B
sexies
du code général des impôts, après les mots : "la
base" sont insérés les mots : "à l'exception de celle définie par le
c
de l'article 1467".
« V. - Compléter
in fine
le premier alinéa du 4° du paragraphe I de
l'article 39 du code général des impôts par les mots : "et de l'imposition
résultant de la prise en compte des actifs définis au
c
de l'article
1467, selon les règles fixées par l'article 1636. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement vise à inclure, dans les bases de la taxe professionnelle, les
actifs financiers.
La réforme adoptée l'an dernier vise à alléger la charge de la taxe
professionnelle. Bien sûr, nous nous félicitons de la disparition progressive
de la part salaire, car nous ne pouvons que souhaiter la baisse du chômage.
Plus une entreprise embauchait, plus son prélèvement augmentait : il fallait
donc mettre fin à ce paradoxe.
Néanmoins, nous avons fait part de nos inquiétudes quant aux effets de la
mesure sur l'emploi et la pérennité de la taxe professionnelle comme impôt
local.
Le rapport remis fin septembre au Parlement ne traite que sommairement de la
question de l'emploi. Ce sont de dix-huit mille à vingt mille emplois qui
devraient être créés du fait de la réforme. Cela nous semble peu eu égard au
coût de la réforme.
La question de la pérennisation de la taxe professionnelle est entièrement
posée. Dans la mesure où elle n'est assise que sur l'investissement, de fait la
progression des bases est ralentie.
De plus, indexée sur la dotation globale de fonctionnement, l'évolution de la
compensation financière de la part salaire risque de ne pas tenir compte des
réelles progressions de base de taxe professionnelle si nous ne proposons pas,
comme cette année, une réactualisation de la compensation de la taxe
professionnelle.
L'article 14
ter
introduit à l'Assemblée nationale prévoit au titre de
2000 « la compensation de la dotation globale de fonctionnement visée au
premier alinéa de l'article L. 1613-I du code général des collectivités locales
».
Toutefois il reste du chemin à parcourir pour que les collectivités locales ne
soient pas les grandes perdantes de cette réforme !
La nécessité tant d'assurer la pérennité des collectivités locales que de
permettre aux secteurs économiques d'apporter leur réelle contribution à la
nation, de même que l'équité fiscale, imposent de s'orienter vers l'intégration
des actifs financiers.
Les actifs financiers représentent aujourd'hui le double des actifs
industriels. Ramener ces actifs, qui ne font que nourrir la spéculation
financière, vers les budgets locaux par des péréquations audacieuses constitue,
à nos yeux, un geste de justice sociale autant qu'une obligation économique.
Pour y parvenir, il est plus que jamais nécessaire de « réalimenter » la taxe
professionnelle, en faisant entrer dans son assiette une part de cette richesse
financière qui constitue aujourd'hui une des formes de la richesse réelle des
sociétés. M. Delevoye ne parlait-il pas d'ailleurs, lors du congrès des maires
de 1996, d'une « sous-fiscalisation de la richesse financière » ?
Selon le rapport sur les comptes de la nation, les actifs financiers
représentaient 29 000 milliards de francs en 1998 contre 270 milliards de
francs en 1972. Par actifs financiers, il faut entendre le stock d'argent placé
par les entreprises - y compris, bien sûr, les banques - c'est-à-dire les
actions et autres participations, les obligations ou les titres du marché
monétaire.
Ainsi conçue, cette taxation aurait aussi l'avantage, non pas de prendre à
l'un pour donner à l'autre, dans une logique exclusive de mise en compétition
des hommes et des territoires, mais de dégager des recettes fiscales
supplémentaires, susceptibles, par exemple, d'alimenter le fonds national de
péréquation de la taxe professionnelle au bénéfice des collectivités locales et
redistribué selon des priorités sociales.
Elle permettrait en fait de réduire considérablement les problèmes d'inégalité
de richesse entre communes et de disparité du poids de la taxe professionnelle.
La péréquation est en effet très faible ; elle atteint seulement 6 milliards de
francs.
Elle permettra peut-être aussi de ramener cette question à l'ambiguïté de la
loi sur les coopérations intercommunale et aux problèmes posés aujourd'hui aux
collectivités locales.
La réalimentation des bases de taxe professionnelle étant une nécessité
absolue pour nos communes, je vous demande d'adopter l'inclusion des actifs
financiers dans l'assiette de cette taxe.
Monsieur le président, pardonnez-moi d'avoir été un peu long, mais nous
pensons que cet amendement est fondamental.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Avis franchement défavorable, monsieur le
président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Là encore, il faut souligner la réflexion importante
qui est celle du groupe communiste républicain et citoyen.
M. Joseph Ostermann.
Eh oui, il n'arrête pas !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Monsieur Foucaud, beaucoup a été fait depuis deux ans
pour accroître la contribution des actifs financiers à la solidarité nationale.
Je citerai trois exemples : l'imposition au taux normal et non plus au taux
réduit des plus-values sur les actifs financiers ; la baisse du taux de l'avoir
fiscal pour les sociétés qui n'ont pas la qualité de société mère, nous venons
d'en parler,...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
En effet !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... la taxation d'une fraction des dividendes perçus
par les sociétés mères. Ces deux dernières mesures sont d'ailleurs durcies par
le projet de loi dont nous discutons.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Hélas !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
J'ajouterai l'augmentation de la cotisation minimale
sur la valeur ajoutée en matière de taxe professionnelle et la création de la
contribution sociale sur les bénéfices pour financer l'allégement des charges
sociales pesant sur les bas salaires.
Je dois dire que le groupe communiste à l'Assemblée nationale et le groupe
communiste républicain et citoyen au Sénat ont joué un rôle moteur dans cette
orientation de la politique fiscale du Gouvernement, puisque c'est sur leur
initiative que plusieurs de ces mesures ont été décidées.
(Sourires sur les
travées du RPR.)
Faut-il dès maintenant aller plus loin en instituant aujourd'hui une taxe sur
les actifs financiers ? Je ne suis pas sûr que cette réflexion soit mûre.
Aujourd'hui, l'institution d'une taxe additionnelle à la taxe professionnelle
assise sur les actifs financiers est difficilement conciliable avec les règles
qui régissent la taxe professionnelle, compte tenu - et M. Foucaud sera
sensible à cet argument - du caractère facilement délocalisable des actifs
financiers.
L'adoption de cette mesure conduirait en effet à une double taxation. Les
titres du portefeuille et les valeurs mobilières constituent la part
représentative du capital social d'autres entreprises qui ont utilisé ces
fonds, notamment pour l'acquisition d'immobilisations déjà imposées au titre de
la taxe professionnelle.
Sous le bénéfice de ces explications, je pense, monsieur Foucaud, que vous
pourriez retirer votre amendement. Beaucoup a été fait et vous y avez contribué
de manière décisive. Laissez à chaque loi de finances initiale le caractère
d'une étape pour progresser dans le bon sens.
M. Michel Caldaguès.
Comme cela, c'est distrayant !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On sait à quoi il faut s'attendre !
M. le président.
Monsieur Foucaud, l'amendement n° I-188 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Qu'il me soit permis de remercier M. le secrétaire d'Etat d'avoir rappelé le
rôle joué par notre groupe, aussi bien à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, et
de lui dire que notre proposition, au travers de cet amendement relatif aux
actifs financiers, n'a qu'un seul objet, celui de permettre d'aller un peu plus
loin, un peu plus vite et, surtout, de donner des moyens à nos collectivités
qui en ont le plus grand besoin.
Certes, monsieur le secrétaire d'Etat, il y a déjà eu des avancées positives.
Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1999, j'avais cru
comprendre, dans le propos du ministre, que l'on devait se rencontrer et
discuter de ces questions. En ce qui nous concerne, nous sommes à votre
disposition pour faire avancer la réflexion.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-188, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 14
M. le président.
« Art. 14. _ Le I
ter
de l'article 1647 B
sexies
du code général
des impôts est ainsi modifié :
« 1° Les quatre premiers alinéas constituent un 1 et le dernier alinéa
constitue un 3 ;
« 2° Il est inséré un 2 ainsi rédigé :
« 2. Pour l'application des trois premiers alinéas du 1, lorsqu'un
établissement public de coopération intercommunale perçoit, pour la première
fois, à compter de l'année 2000, la taxe professionnelle au lieu et place des
communes conformément à l'article 1609
nonies
C, le taux à retenir pour
le calcul de la cotisation éligible au plafonnement est le plus faible des deux
taux suivants :
«
a)
Le taux retenu pour le calcul des cotisations éligibles au
plafonnement l'année précédant la première année où l'établissement public de
coopération intercommunale perçoit la taxe professionnelle conformément à
l'article 1609
nonies
C pour la ou les collectivités auxquelles
l'établissement de coopération intercommunale s'est substitué.
« Lorsque l'établissement public de coopération intercommunale fait
application du processus de réduction des écarts de taux, ce taux est, chaque
année jusqu'à l'achèvement du processus de réduction des écarts de taux,
augmenté de la correction positive des écarts de taux ; à compter de la
dernière année du processus de réduction des écarts de taux, ce taux est majoré
de la correction des écarts de taux applicable cette dernière année dans la
commune du seul fait de la réduction des écarts de taux.
« Lorsqu'il n'est pas fait application du processus pluriannuel de réduction
des écarts de taux, le taux retenu, pour le calcul des cotisations éligibles au
plafonnement l'année précédant la première année où l'établissement public de
coopération intercommunale perçoit la taxe professionnelle conformément à cet
article, est majoré de l'écart positif de taux constaté entre le taux voté par
l'établissement public de coopération intercommunale la première année
d'application des dispositions dudit article et le taux voté par la commune
l'année précédente majoré, le cas échéant, du taux du ou des établissements
publics de coopération intercommunale auxquels elle appartenait ;
«
b)
Le taux effectivement appliqué dans la commune.
« Ces modalités sont applicables dans les mêmes conditions lorsqu'il est fait
application dans les établissements publics de coopération intercommunale visés
au premier alinéa des dispositions prévues aux I et V de l'article 1638
quater
. » ;
« 3° Le mot : "groupement" est remplacé par les mots : "établissement public
de coopération intercommunale". »
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Quand j'ai pris connaissance de l'article 14, je fus fort étonné parce que je
pensais que le problème qu'il traite était résolu depuis 1995. J'avais de
bonnes raisons de le croire puisque, dans une autre enceinte, j'ai été à
l'origine de la solution qui est reprise dans ce texte.
Sur le fond, je suis d'accord avec ce que propose le Gouvernement.
Lorsqu'une entreprise bénéficie d'un dégrèvement au titre du plafonnement de
ses cotisations en fonction de la valeur ajoutée, on calcule ce dégrèvement à
partir du taux de 1995 et non pas à partir du taux réel si ce taux réel est
supérieur au taux de 1995. Cette mesure avait pour objet de responsabiliser les
collectivités locales et elle évitait de faire porter aux finances publiques le
coût des augmentations discrétionnaires de taux postérieures à 1995.
Un problème se posait lorsque des entreprises se trouvaient dans des
groupements à taxe professionnelle unique ou à taxe de zone qui pratiquaient
des augmentations parfois très fortes de taux dans le cadre du processus de
lissage des taux. Il était alors parfaitement logique d'accorder des
dégrèvements aux entreprises en tenant compte de ces hausses de taux
puisqu'elles étaient compensées par des baisses d'un montant égal pour d'autres
entreprises.
Ce dispositif est parfaitement logique ; il avait été accepté en 1995 par le
Gouvernement d'alors et je me réjouis de constater que le Gouvernement actuel
s'est rallié à cette position.
Cependant, une difficulté demeure dans l'application de ces dispositions.
Il n'y a pas de problème pour les entreprises appartenant à un groupement qui
avait adopté la taxe professionnelle unique avant le 1er janvier 1996 : le
système mis en place à la fin de 1995 s'applique à elles.
On aurait pu croire que ce système s'appliquerait aux entreprises présentes
dans les groupements créés ou ayant opté pour la taxe professionnelle unique
après 1996. Il n'en est rien : pour des raisons sur lesquelles il n'y a pas
lieu de revenir, le Gouvernement propose de faire bénéficier de ce dispositif
les entreprises créées à partir du 1er janvier 2000.
Dans ces conditions, les entreprises appartenant à des EPCI à taxe
professionnelle unique qui ont opté pour ce dispositif entre 1996 et 2000 ne
bénéficieront ni des anciennes dispositions de 1995 ni des nouvelles.
Je pense, mes chers collègues, que vous voyez bien la difficulté.
Comment expliquer dans un département comme le mien - je suis certain que la
même situation se retrouve dans bien d'autres départements - où plus des deux
tiers des communes font partie d'établissements de ce type, comment expliquer,
dis-je, à des chefs d'entreprises que, si leur EPCI a opté pour la taxe
professionnelle unique avant 1996, ils bénéficient de la mesure, que si leur
EPCI a été créé après le 1er janvier 2000, ils en bénéficient également, mais
que si leur EPCI a été créé dans la période intermédiaire, ils n'en bénéficient
pas ?
Les amendements que j'ai déposés sur cet article n'ont donc qu'un seul
objectif : définir un système unique, simplifié, conforme à la logique adoptée
dans l'article et à celle qui a été suivie en 1995. C'est au fond une mesure de
simplification et d'équité fiscale.
M. le président.
Sur l'article 14, je suis saisi de huit amendements que, pour la clarté du
débat, je vais appeler ensemble.
Les trois premiers sont présentés par MM. Fréville et Branger.
L'amendement n° I-275 vise :
I. - Dans le deuxième alinéa (1°) de l'article 14, après les mots : « quatre
premiers alinéas », à insérer les mots : « à l'exception des trois dernières
phrases du troisième alinéa qui sont supprimées ».
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, à
compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la suppression des trois
dernières phrases du troisième alinéa du I
ter
de l'article 1647 B
sexies
est compensée par la majoration, à due concurrence, des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-276 tend :
A. - Dans le deuxième alinéa du 2° de l'article 14, à supprimer les mots : « ,
pour la première fois, à compter de l'année 2000 ».
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, à compléter
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la suppression de la
mention de l'année 2000 dans le second alinéa du 2° du I du présent article est
compensée, à due concurrence, par la majoration des droits prévus aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-277 a pour objet :
A. - Dans le troisième alinéa
(a)
du 2° de l'article 14, après les mots
: « éligibles au plafonnement », à insérer les mots : « en 1995 ou, s'il est
plus faible et si cette année est postérieure à 1995, ».
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, à compléter
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'alignement du taux
retenu pour les groupements à taxe professionnelle unique avant prise en compte
de la correction positive de taux due au processus de convergence sur celui
retenu pour les communes est compensée, à due concurrence, par la majoration
des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-30, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose, à la fin du deuxième alinéa
(a)
du texte présenté par le 2° de
cet article pour le 2 du I
ter
de l'article 1647 B
sexies
du code
général des impôts, de remplacer les mots : « la ou les collectivités
auxquelles l'établissement de coopération intercommunale s'est substitué. » par
les mots : « la commune et, le cas échéant, le ou les établissements publics de
coopération intercommunale auxquels il s'est substitué pour la perception de
cet impôt. »
Les deux amendements suivants sont également déposés par MM. Fréville et
Béranger.
L'amendement n° I-278 vise :
A. - A compléter le quatrième alinéa du 2° de l'article 14 par une phrase
ainsi rédigée : « Si le processus de réduction des écarts de taux a débuté
avant 1995, la correction positive des écarts de taux n'est prise en compte que
pour sa fraction postérieure à 1995. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, à compléter
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... La perte de recettes résultant pour l'Etat de la prise en compte
postérieurement à 1995 de la correction positive des écarts de taux de taxe
professionnelle est compensée à due concurrence par la majoration des droits
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-279 tend :
A. - Dans le cinquième alinéa du 2° de cet article, après les mots : «
éligibles au plafonnement », à insérer les mots : « en 1995, ou s'il est plus
faible et si cette année est postérieure à 1995, » ;
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, à compléter
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... La perte de recettes résultant pour l'Etat de la modification du mode de
calcul des cotisations éligibles au plafonnement de la taxe professionnelle est
compensée à due concurrence par la majoration des droits prévus aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
Enfin, les deux derniers sont déposés par M. Marini, au nom de la commission
des finances.
L'amendement n° I-31 vise :
A. - A compléter le dernier alinéa du texte proposé par le 2° de cet article
pour le 2 du I
ter
de l'article 1647 B
sexies
du code général des
impôts par les mots : « , au II de l'article 1609
quinquies
C, au I de
l'article 1609
nonies
BA, et aux articles 1638 et 1638
bis
» ;
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, à compléter
in fine
cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'extension de la prise en
compte des augmentations de taux de taxe professionnelle résultant du processus
de réduction des écarts de taux pour le calcul du plafonnement en fonction de
la valeur ajoutée de la cotisation de taxe professionnelle aux entreprises
implantées dans des établissements publics de coopération intercommunale à
fiscalité propre qui feront application, pour la première fois à compter de
2000, des dispositions du II de l'article 1609
quinquies
C, du I de
l'article 1609
nonies
BA, et des articles 1638 et 1638
bis
du
code général des impôts est compensée par une majoration à due concurrence des
droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° I-32 a pour objet de compléter l'article 14 par un alinéa
nouveau ainsi rédigé :
« 4° Dans le quatrième alinéa, les mots : "fiscalité propre" sont remplacés
(deux fois) par les mots : "fiscalité additionnelle". »
La parole est à M. Fréville pour présenter les amendements n°s I-275, I-276,
I-277, I-278 et I-279.
M. Yves Fréville.
Ces cinq amendements n'en formaient qu'un au départ, mais, pour des nécessités
tout à fait logiques, liées à l'organisation de la séance, cet amendement a été
découpé au fur et à mesure de l'évolution de la réflexion.
Ma proposition est très simple : il s'agit de supprimer ce qui existait en
1995 et de créer un régime unifié conforme à la volonté du Gouvernement pour
l'an 2000, de manière que toutes les entreprises situées dans les EPCI à taxe
professionnelle unique ou à taxe professionnelle de zone, c'est-à-dire tous les
EPCI qui pratiquent une procédure de lissage des taux pour parvenir à un taux
moyen unifié, bénéficient du même régime. Un tel système ne pourra qu'être
favorable au développement de la taxe professionnelle unique, ce qui est le but
recherché par tous.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter les amendements n°s
I-30, I-31, I-32 et donner l'avis de la commission sur les amendements n°s
I-275, I-276, I-277, I-278 et I-279.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'amendement n° I-30 est purement rédactionnel.
Quant à l'amendement n° I-31, il demande une explication un peu plus
longue.
L'article 14 a pour objet d'éviter que les augmentations de taux de la taxe
professionnelle liées au passage à la taxe professionelle unique dans un
établissement public de coopération intercommunale ne se traduisent par une
augmentation des cotisations de taxe professionnelle acquittées par les
entreprises implantées sur son territoire.
L'amendement n° I-31 vise à étendre ce dispositif à tous les EPCI à fiscalité
intégrée, notamment à ceux qui font application de la taxe professionnelle de
zone, la TPZ. Depuis la loi sur l'intercommunalité du 12 juillet 1999, la TPZ
est réservée aux EPCI de moins de 50 000 habitants.
Cet amendement aboutit donc à éviter de pénaliser les entreprises qui
s'installent dans les zones rurales. Il complète les amendements proposés par
M. Fréville.
Enfin, l'amendement n° I-32 est un amendement de précision.
J'en viens à l'amendement n° I-275 et à ses conséquences, que sont les
amendements n°s I-276, I-277, I-278 et I-279.
Notre collègue M. Yves Frétille, qui a été à l'origine du dispositif de 1995
en tant que député, connaît remarquablement ce sujet et nous propose une
solution simple, très élégante, pour que le dispositif
d'harmonisations'applique comme il convient.
L'article 14 a en effet pour objet de faire en sorte que le passage d'un
établissement public de coopération intercommunale à la taxe professionnelle
unique à compter du 1er janvier 2000 n'entraîne pas une augmentation de la taxe
professionnelle acquittée par les entreprises implantées sur le territoire de
cet établissement public.
L'amendement de M. Fréville a pour objet essentiel d'étendre ce dispositif à
tous les établissements publics de coopération intercommunale à taxe
professionnelle unique quelle que soit la date à laquelle ils ont adopté ce
régime fiscal. Toutes les entreprises seraient donc traitées de la même
manière.
Le dispositif est équitable et neutre. Il améliore beaucoup la teneur de
l'article 14. La commission recommande donc chaleureusement le vote de cet
amendement et de ses amendements de conséquence.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-275, I-276, I-277,
I-30, I-278, I-279, I-31 et I-32 ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est favorable aux amendements n°s I-30
et I-32, qui me paraissent positifs.
En revanche, il est défavorable à l'amendement n° I-31 de la commission, ainsi
qu'aux amendements n°s I-275 à I-279 de M. Fréville. Je vais m'en expliquer.
Par ces propositions, monsieur le sénateur, vous souhaitez unifier les règles
de détermination du taux applicable au plafonnement en fonction de la valeur
ajoutée dans tous les EPCI à taxe professionnelle unique quelle que soit la
date de leur assujettissement à ce régime.
Je suis défavorable à ces modifications, car le dispositif proposé par le
Gouvernement doit s'entendre comme une incitation supplémentaire aux
dispositions mises en place dans le cadre de la loi sur l'intercommunalité en
faveur du régime de la taxe professionnelle unique.
La proposition du Gouvernement a pour objet de neutraliser, pour les seuls
EPCI qui percevront la taxe professionnelle unique à compter de 2000, les
effets de l'augmentation des taux liés à l'adhésion d'une commune à un tel
groupement. C'est utile localement, croyez-moi.
Dans ce contexte, il ne peut pas être envisagé d'étendre ce dispositif aux
EPCI qui ont déjà perçu la taxe professionnelle unique avant 2000.
Au surplus, cette mesure poserait de lourdes difficultés de gestion pour
l'administration, qui devrait, commune par commune, déterminer la correction à
appliquer pour fixer la cotisation de référence à retenir pour chacun des
établisssements situés sur son territoire.
L'argumentation que je viens de développer me semble très simple et très
prégnante par rapport aux cas concrets que nous rencontrons au sein de la
coopération intercommunale.
Pour les deux raisons essentielles que j'ai évoquées, je demande au Sénat de
repousser tous les amendements portant sur l'article 14, hormis les amendements
n°s I-30 et I-32.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Je souhaiterais obtenir une précision de la part de M. le secrétaire d'Etat
car, avant que nous votions, il faut que les choses soient claires.
J'ai bien compris la position du Gouvernement pour la période postérieure à
l'année 2000 et pour la période allant de 1996 à 2000. Mais je voudrais avoir
confirmation du fait que les EPCI, qui avaient adopté la taxe professionnelle
unique entre le vote de la loi Joxe et le 1er janvier 1996 conservent le
bénéfice des dispositions de 1995.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je confirme à M. Fréville que l'interprétation qu'il
vient de donner est la bonne ; c'est celle du Gouvernement.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Une incitation au système intégré, il en existe une,
c'est la DGF majorée. Il ne peut pas y avoir trente-six sortes d'incitation.
Mais, ici, on ne raisonne pas en termes d'incitation ; on dit simplement que
pour des collectivités, d'une part, et des entreprises, d'autre part, qui sont
dans une même situation, on ne peut pas accepter les distorsions selon la date
à laquelle a été prise la décision de créer un EPCI à taxe professionnelle
unique. C'est cela, l'amendement proposé par M. Fréville : il tend à rétablir
la neutralité.
Franchement, monsieur le secrétaire d'Etat, je suis surpris de la réponse que
vous avez faite, et votre bonne foi n'est nullement en cause. Sur ces sujets
très techniques, très complexes, qui nécessitent une analyse et un certain vécu
de la coopération intercommunale, je le dis sans malignité, croyez-le bien, les
dialogues que nous avons avec le ministre de l'intérieur sont beaucoup plus
constructifs que celui que nous avons ensemble ce soir. Une approche purement
budgétaire, réglementaire, fiscale de ces sujets n'est certainement pas la
bonne.
On ne peut quand même pas nous faire croire que, s'agissant de gens qui sont
objectivement dans la même situation, il y aurait une application différente de
la loi selon l'année de création de l'établissement à taxe professionnelle
unique. Ce n'est certainement pas conforme à l'intention du législateur, qu'il
s'agisse de la loi de 1995 ou de la loi Chevènement du 12 juillet 1999.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je veux simplement évoquer une expérience
personnelle.
Je suis coauteur, avec Alain Richard, des dispositions fiscales favorables à
la coopération intercommunale de la loi du 6 février 1992. J'étais en effet
rapporteur de ce texte à l'Assemblée nationale. Je dois d'ailleurs avouer qu'à
la relecture, quelques années après, de ces dispositions, il m'a semblé que
nous avions construit une véritable « usine à gaz », en tout cas un texte
extrêmement complexe.
Je n'ai donc pas une vision purement budgétaire, abstraite, uniquement tournée
vers les questions fiscales. J'ai aussi une vision très motivée sur la
coopération intercommunale, je vous l'assure, parce que cette loi de 1992 a
fait franchir énormément d'étapes dans l'essor de la coopération
intercommunale, vous le savez bien.
Il reste qu'une différence doit être faite entre les établissements publics de
coopération intercommunale qui ont déjà mis en oeuvre les dispositions fiscales
et les autres. Ce n'est pas une discrimination que de reconnaître qu'il y a des
« coups partis » et des « coups à venir ». C'est tout simplement ce que nous
disons, ni plus ni moins, et nous en tirons les conséquences.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-275, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-276, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-277, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-30, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-278, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-279, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-31, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-32, accepté par le Gouvernement ?.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14, modifié.
(L'article 14 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 14
M. le président.
Par amendement n° I-98, M. Massion et les membres du groupe socialiste et
apparentés proposent d'insérer, après l'article 14, un article additionnel
ainsi rédigé :
« I. - Le 2° de l'article 1449 du code général des impôts est complété par les
mots suivants : "ainsi que les sociétés de manutention portuaire."
« II. - Les pertes de recettes pour les collectivités locales résultant du I
sont compensées par une augmentation à due concurrence de la dotation de
compensation de la taxe professionnelle.
« III. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence
par une hausse des tarifs prévus à l'article 885 U du code général des impôts.
»
La parole est à M. Massion.
M. Marc Massion.
Cet amendement a pour objet de permettre aux collectivités locales d'exonérer
de la taxe professionnelle les équipements spécifiques des entreprises de
manutention portuaire.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la Cour des comptes vient de publier un rapport
sur la politique portuaire française. J'extrais une phrase de sa conclusion : «
L'Etat n'a pas su ou voulu mettre en oeuvre une politique déterminée et
cohérente à l'égard des ports maritimes. »
En effet, il y a eu carence en matière d'évolution du statut des ports, de
poursuite de la réforme de la filière portuaire, d'aménagement des dessertes
routières, ferroviaires et fluviales. Je n'en donnerai qu'un seul exemple :
c'est seulement dans le prochain contrat de plan que figure la mise à deux fois
deux voies d'une route qui relie la Beauce au premier port exportateur de
céréales en Europe. Si nos voisins hollandais ou belges s'étaient trouvés dans
la même situation géographique, je peux vous affirmer que la desserte serait
assurée depuis des décennies !
Tous les acteurs des communautés portuaires ont aussi leur part de
responsabilité.
A cette difficulté franco-française s'ajoutent les conditions de concurrence
avec les autres ports européens, notamment belges et hollandais, aussi bien sur
le plan des financements publics que sur celui de la fiscalité.
Malgré les apparences, les financements publics sont beaucoup plus importants
chez nos voisins. Ainsi, en Belgique, 600 millions de francs sont consacrés à
l'entretien de trois ports, dont 260 millions de francs pour le seul port
d'Anvers, alors qu'en France 400 millions de francs seulement sont alloués à
cinq ports.
Au regard de la fiscalité, les ports français sont également pénalisés. La
taxe professionnelle ou la taxe équivalente sur les équipements portuaires
n'existe pas dans les ports européens, ce qui contribue à les rendre plus
attractifs.
Ce dossier a été présenté à la Commission européenne, qui s'est d'abord
montrée hostile, puis réservée et, maintenant, bienveillante. Il convient donc
de marquer notre souci et notre volonté de contribuer à l'harmonisation des
règles de concurrence entre les ports européens. C'est une des conditions du
maintien et du développement de l'emploi dans ce secteur.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission souhaite entendre le Gouvernement avant
de seprononcer.
M. le président.
Quel est, donc, l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement reconnaît en M. Massion un défenseur
acharné - mais ce n'était plus à prouver ! - de l'activité portuaire française
et notamment de celle du Havre. Nous avons déjà eu souvent l'occasion de nous
en entretenir, et je crois qu'il est légitime que je dise combien l'un de vos
collègues, mesdames, messieurs les sénateurs, se porte aux avant-postes d'un
combat économique européen en faveur de l'essor économique de nos installations
portuaires et du développement de l'emploi qui en découle.
M. Massion propose d'instituer une exonération facultative de taxe
professionnelle, sur délibération des collectivités locales concernées, des
outillages spécifiques de manutention portuaire situés dans les ports exonérés
de cette taxe.
Le problème, monsieur Massion, est que ce type d'aide tombe sous le coup de ce
qu'on appelle à Bruxelles des « aides d'Etat » et qu'elle devrait rester
conforme, pour être acceptée, à nos engagements européens.
Cela signifie qu'elle doit faire l'objet d'une notification à la Commission.
Cela a été fait. Dans le cas particulier, la Commission a souhaité, hélas !
ouvrir la procédure de l'article 88 du traité des Communautés européennes,
procédure qui a un effet suspensif et qui prévoit la publication au
Journal
officiel des Communautés européennes
de la mesure projetée afin de
permettre à nos partenaires, et donc aux concurrents que vous venez de citer,
de faire valoir leurs observations. Cette procédure est actuellement en
cours.
L'adoption de votre amendement serait prématurée, car la mise en oeuvre d'une
telle disposition pourrait nuire aux entreprises concernées, dès lors que la
Commission n'a pas manqué de nous rappeler que toute aide octroyée de manière
non conforme au droit communautaire ferait l'objet, auprès de son bénéficiaire,
d'une récupération - cela me rappelle un autre débat, que connaît bien celui
qui, au Gouvernement, est en charge de l'industrie - majorée d'un intérêt.
Voilà où nous en sommes.
Je rends hommage à votre « punch » concernant l'activité portuaire, mais je
pense qu'il serait plutôt contreproductif d'aller au-delà, car nous attirerions
le regard acéré des ports européens concurrents sur des mesures qui seraient
considérées comme des aides d'Etat.
Nous nous battons bien dans le bon sens, il n'y a pas d'ambiguïté à cet égard,
mais attendons la réponse de la Commission européenne.
M. le président.
Quel est, maintenant, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Compte tenu de ce qui a été dit par M. le secrétaire
d'Etat, je crains que M. Massion ne doive retirer son amendement, car celui-ci
paraît prématuré. Il serait éventuellement dangereux, en effet, qu'il fût voté
avant que la procédure qui est de rigueur en la matière ne se soit déroulée
jusqu'à son terme.
M. le président.
Monsieur Massion, l'amendement n° I-98 est-il maintenu ?
M. Marc Massion.
Je sais bien que la Commission européenne est très susceptible, monsieur le
secrétaire d'Etat, mais il faut garder présent à l'esprit le fait qu'elle
travaille aussi sous la pression des Néerlandais et des Belges, qui sont
beaucoup plus influents et présents à Bruxelles que nous ; je veux dire : les
pouvoirs publics et les professions portuaires.
Par cet amendement, nous ne proposons pas de conférer un avantage aux ports
français, puisque l'exonération que je propose porte sur une taxe qui n'existe
pas ailleurs. Il s'agit au contraire de mettre tout le monde sur un pied
d'égalité.
Cependant, au bénéfice de l'engagement que vous avez pris de soutenir cette
proposition à Bruxelles,...
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Nous l'avons déjà fait !
M. Marc Massion.
... je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-98 est retiré.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une
heures trente, sous la présidence de M. Jacques Valade.)
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 1999, adopté
par l'Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles de la première partie, nous continuons
l'examen des articles additionnels après l'article 14.
Je suis saisi d'un amendement n° I-115, présenté par M. Loridant, et tendant à
insérer, après l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 1457 du code général des impôts, il est inséré un
article additionnel ainsi rédigé :
«
Art. ...
- Sont exonérées de la taxe professionnelle les sociétés
d'investissement à capital variable gérées par une société de gestion visée à
l'article 15 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des
activités financières ou à l'alinéa 1 de l'article 12 de la loi n° 88-1201 du
23 décembre 1988 relatives aux organismes de placement collectif en valeurs
mobilières et portant création des fonds communs de créances. »
« II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par le relèvement
des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Cet amendement, de nature technique, a pour objet de clarifier les conditions
d'imposition de certains organismes de placement collectif en valeurs
mobilières, les OPCVM.
Il s'agit d'assurer l'égalité de traitement de l'épargne, d'éviter une double
imposition et de supprimer la distorsion de concurrence européenne qui se fait
au détriment des SICAV.
En effet, les SICAV et les fonds communs de placement, les FCP, sont l'un et
l'autre des OPCVM, c'està-dire des instruments de gestion collective soumis à
des règles identiques. Il faut donc analyser les conditions d'imposition des
deux produits au regard de la qualité du porteur final.
Les FCP étant dépourvus de personnalité morale, leurs porteurs sont réputés
gérer leur patrimoine privé par l'intermédiaire du fonds. Ils sont, en
conséquence, non imposables à la taxe professionnelle, ce qui n'est pas
toujours le cas pour les SICAV.
En effet, dans leur quasi-totalité, les SICAV n'assurent pas elles-mêmes la
gestion de leur portefeuille, parce qu'elles ne disposent pas de moyens propres
pour ce faire. Elles délèguent donc cette gestion à des sociétés de gestion
spécifiquement agréées par la Commission des opérations de bourse.
Ces sociétés de gestion sont normalement assujetties à la taxe professionnelle
en raison de cette activité de gestion déléguée. Par conséquent, les porteurs
de SICAV ne devraient pas faire l'objet d'une imposition au titre de la taxe
professionnelle.
Il est donc question ici d'assurer aux SICAV une égalité de traitement fiscal
par rapport aux FCP, et d'éviter ainsi tout risque de double imposition en
matière de taxe professionnelle.
En outre, l'adoption de cet amendement assurerait aux SICAV françaises des
performances comparables ou supérieures aux produits européens. Ainsi, nous
serions en mesure de limiter le risque de délocalisation ou la tentation des
produits étrangers pour les investisseurs.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement est bien inspiré en ce qu'il vise à
supprimer une double imposition. La commission des finances ne peut donc qu'y
être favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je m'en remets au commentaire de M. le rapporteur
général, en suggérant toutefois au Sénat de rejeter cet amendement.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Oh !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Certes, la disposition est intéressante, et je peux
comprendre l'inquiétude des SICAV, qui sont redevables d'une cotisation
minimale de taxe professionnelle assise sur la valeur ajoutée. Cependant, j'ai
demandé aux services du ministère d'engager une réflexion avec les
professionnels des SICAV pour mieux apprécier leur situation au regard de cette
imposition d'Etat. Une concertation est en cours.
Sous le bénéfice de ces observations, M. Loridant pourrait peut-être retirer
son amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-115, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 14.
Par amendement n° I-217, Mme Pourtaud propose d'insérer, après l'article 14,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 1464 A du code général des impôts est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« ...° dans la limite de 100 %, les associations titulaires, en application de
l'article 29 de la loin° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de
communication, d'une autorisation d'exploiter un service de radiodiffusion
sonore diffusé par voie hertzienne terrestre et bénéficiant de l'aide
mentionnée à l'article 80 de la même loi, pour leur activité de radiodiffusion
sonore. »
« II. - Les pertes de recettes pour les collectivités locales résultant du I
sont compensées par une augmentation à due concurrence de la dotation globale
de fonctionnement.
« III. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence
par une hausse des tarifs prévus à l'article 885 U du code général des impôts.
»
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° I-150, M. Ambroise Dupont et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 14, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 1465 A du code
général des impôts, les mots : "dans les conditions et sous réserve, le cas
échéant, de l'agrément prévu à l'article 1465" sont remplacés par les mots :
"sous réserve de la création d'au moins cinq emplois."
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par
la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. Ambroise Dupont.
M. Ambroise Dupont.
Cet amendement tend à rendre réalisable l'objectif de création d'emplois dans
les zones de revitalisation rurale, les ZRR.
Dans le cadre des aides à l'aménagement du territoire, une entreprise peut en
effet bénéficier d'une exonération de taxe professionnelle lorsqu'elle procède
à certaines opérations dans une zone de revitalisation rurale, aux termes de
l'article 1465 A du code général des impôts.
L'article 1465 du même code précise les opérations qui sont concernées, à
savoir les décentralisations, extensions ou créations d'activités industrielles
ou de recherche scientifique et technique, la reconversion dans le même type
d'activité ou la reprise d'établissements industriels en difficulté exerçant le
même type d'activités.
Le même article précise néanmoins que l'exonération, décidée par la
collectivité locale concernée, est soumise à un agrément délivré par la
direction régionale des impôts en cas de création ou de décentralisation de
services de direction, d'études, d'ingénierie et d'informatique.
Dans ce cas, le 2° de l'article 121
quinquies
DB
sexies
de
l'annexe IV dispose que l'agrément n'est délivré que si le transfert de la
société s'accompagne de la création de vingt emplois. Et c'est là où le bât
blesse.
En effet, cette condition apparaît trop restrictive et pénalise à la fois les
entreprises et les collectivités locales qui pourraient bénéficier de leur
implantation en zones de revitalisation rurale.
Il est donc proposé ici de simplifier le dispositif prévu pour ces zones en
prévoyant que les entreprises qui procéderont aux opérations précitées seront
exonérées de taxe professionnelle à la condition qu'au moins cinq emplois
soient créés dans les communes concernées, et ce quelle que soit
l'opération.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'en ai bien conscience, le dispositif peut
paraître simplificateur, mais il faut simplifier lorsque l'on veut envoyer des
messages clairs, notamment aux entreprises. Or le dispositif actuel est si
contraignant que je ne connais pas d'entreprise qui ait pu l'utiliser dans la
zone de revitalisation rurale créée dans mon département, le Calvados. Et
pourtant, ce n'est pas faute, pour certaines, d'avoir essayé de s'y implanter.
En fait, le seuil trop élevé réduit à néant la mesure initiale.
Le Gouvernement pourrait nous reprocher de contourner des dispositions
réglementaires en modifiant l'article 1465 A du code général des impôts. Reste
qu'il s'agit de revenir à la source, à l'esprit même des zones de
revitalisation rurale. Mon amendement ne prévoit rien d'autre que d'aligner les
moyens sur les objectifs affichés pour les zones de revitalisation rurale.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission reconnaît que cet amendement est tout à
fait opportun.
D'une part, c'est au législateur et non pas au pouvoir réglementaire de
déterminer les conditions à remplir pour bénéficier d'un avantage fiscal.
D'autre part, la création de vingt emplois, qui était la condition exigée
jusqu'ici, est excessive au regard des possibilités concrètes des entreprises
dans les zones de revitalisation rurale et compte tenu du caractère parfois
déprimé ou faible de l'activité économique dans de telles zones. A cet égard,
un minimum de cinq emplois créés paraît plus réaliste.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission est favorable à cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Monsieur Ambroise Dupont, le Gouvernement partage
votre intérêt pour le développement économique des zones de revitalisation
rurale, sans pour autant que cela le conduise à approuver cet amendement.
Vous souhaitez fixer uniformément à cinq le nombre d'emplois créés pour ouvrir
droit à l'exonération, et ce quel que soit le secteur d'activité, et,
parallèlement, supprimer toute procédure d'agrément préalable.
Sur le premier point, je précise à M. le rapporteur général qu'il s'agit, dans
les zones de revitalisation rurale, non pas de vingt emplois mais de six. Par
conséquent, l'amendement n° I-150, qui tend à porter à cinq le nombre des
emplois créés pour ouvrir droit à l'exonération, n'introduirait pas grand-chose
de nouveau pour la création et l'extension d'activités industrielles.
En ce qui concerne les autres opérations, notamment la création ou la
décentralisation d'activités tertiaires, pour lesquelles le seuil est
effectivement de vingt,...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est cela : le seuil de vingt emplois correspond aux
activités tertiaires !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... le seuil étant de six pour les activités
industrielles, la mesure proposée devrait être examinée dans le cadre, plus
général, de la refonte, qui est actuellement à l'étude, des aides accordées au
titre de l'aménagement du territoire.
J'en viens à la suppression de l'agrément. Le législateur, en instituant une
procédure d'agrément, a souhaité que l'on vérifie que certaines opérations,
plus complexes que d'autres, correspondent bien à l'objectif annoncé. D'où la
procédure, qui n'est pas si lourde que cela, de l'agrément.
Un agrément est ainsi nécessaire pour la reprise et la création de certains
services pour lesquels il permet d'apprécier la nature, les modalités des
activités éligibles à l'aide ou l'état de difficulté de l'établissement.
En outre, la suppression de toute procédure d'agrément risquerait d'être
étendue ensuite à l'article 1465 et, ainsi, on détournerait de son objet d'une
manière significative l'ensemble du dispositif d'aide institué dans le cadre de
l'aménagement du territoire, en termes d'efficacité comme en termes de coût.
Ainsi le bon vieil agrément permet-il, pour les opérations de reprise ou de
reconversion en zones de revitalisation rurale, comme d'ailleurs dans les
autres zones, de vérifier les modalités de la reprise ou de la reconversion et
la nature des activités, s'agissant, je le rappelle, d'exonérations compensées
par l'Etat.
Voilà autant de motifs suffisants pour que je demande au Sénat de rejeter cet
amendement bien que, vous le voyez, je sois partagé et que je souscrive à
l'ambition de M. Ambroise Dupont, qui mise sur l'emploi et la vitalité des
zones concernées. Peut-être acceptera-t-il d'attendre que la recomposition et
la redistribution des aides à l'aménagement du territoire nous permettent d'y
voir plus clair et de reprendre l'esprit de son amendement, sans, toutefois, en
suivre la lettre ?
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-150.
M. Ambroise Dupont.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Ambroise Dupont.
M. Ambroise Dupont.
Je suis sensible aux explications de M. le secrétaire d'Etat, car je n'ai
d'autre but, effectivement, que de rendre efficace un dispositif par ailleurs
très heureux. Cependant, les seuils qu'il a évoqués me paraissent beaucoup trop
compliqués, même si un examen ultérieur peut permettre d'améliorer le texte.
Je vais maintenir cet amendement pour que le Gouvernement réponde à cet
objectif de simplification et, surtout, d'efficacité s'agissant d'un dispositif
très utile.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-150, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 14.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° I-33, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa du 2° de l'article 1467 du code général des impôts
est ainsi rédigé :
« Dans le cas des titulaires de bénéfices non commerciaux, des agents
d'affaires et intermédiaires de commerce, employant moins de cinq salariés, le
onzième des recettes en 2000, le douzième en 2001, le treizième en 2002 et le
quatorzième à partir de 2003, ainsi que la valeur locative des seules
immobilisations passibles des taxes foncières sur les propriétés bâties et non
bâties et dont le contribuable a disposé pour les besoins de son activité
professionnelle pendant la période de référence définie au
a
du 1°. »
« II. - Le prélèvement sur les recettes de l'Etat institué au I du D de
l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998)
est majoré à due concurrence de la perte de recettes résultant de l'application
du I.
« III. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par la majoration,
à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général
des impôts. »
Par amendement n° I-208, MM. Ostermann, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Leclerc, Le Grand, Murat, Oudin et Trégouët proposent d'insérer, après
l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa du 2° de l'article 1467 du code général des impôts
est ainsi rédigé :
« Dans le cas des titulaires de bénéfices non commerciaux, des agents
d'affaires et intermédiaires de commerce, employant moins de cinq salariés, le
quatorzième des recettes en 2000, le seizième en 2001, le dix-huitième en 2002
et le vingtième à partir de 2003, ainsi que la valeur locative des seules
immobilisations passibles des taxes foncières sur les propriétés bâties et non
bâties et dont le contribuable a disposé pour les besoins de son activité
professionnelle pendant la période de référence définie au
a
du 1°. »
« II. - Le prélèvement sur les recettes de l'Etat institué au I du D de
l'article 44 de la loi de finances pour 1999 est majoré à due concurrence de la
perte de recettes résultant pour les collectivités locales de l'application du
I.
« III. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du II sont compensées à
due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A
du code général des impôts. »
Par amendement n° I-67 rectifié, MM. Fréville, Baudot, Badré et les membres du
groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 14, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le 2° de l'article 1467 du code général des impôts, les mots : "le
dixième des recettes" sont remplacés par les mots : "le vingtième des
recettes".
« II. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales est
compensée par une majoration à due concurrence de la dotation globale de
fonctionnement.
« III. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par une majoration à
due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
Par amendement n° I-151, MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca
Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants
proposent d'insérer, après l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Dans le cinquième alinéa (2°) de l'article 1467 du code général des
impôts, les mots : "le dixième des recettes" sont remplacés par les mots : "le
cinquième des recettes".
« II. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales résultant du
I ci-dessus est compensée par une majoration à due concurrence de la dotation
globale de fonctionnement.
« III. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du II ci-dessus est
compensée par une majoration à due concurrence des droits visés aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
I-33.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit de réduire l'assiette de la taxe
professionnelle des titulaires de bénéfices non commerciaux employant moins de
cinq salariés afin de les faire également bénéficier de l'allégement de base de
taxe professionnelle accordé par la loi de finances pour 1999 aux autres
redevables.
Or les différentes professions concernées - experts-comptables, avocats,
divers conseils, géomètres, professions de santé - acquittent aujourd'hui, au
titre de la taxe professionnelle, selon le secteur d'activité, entre 2 % et 4 %
de leur chiffre d'affaires toute taxes comprises.
Mes chers collègues, il est inéquitable, au motif que la taxe professionnelle
de ces contribuables repose sur leurs recettes et non sur leur masse salariale,
qu'on ne leur permette pas de bénéficier d'une réforme qu'ils contribuent à
financer et qui vise à supprimer progressivement la part salariale de la taxe
professionnelle.
Ainsi, ces professionnels libéraux sont dans une situation d'inégalité, qui
s'accroîtra au fil des ans.
En outre, vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, nous assistons, dans
le domaine du conseil, à une très vive concurrence entre ceux qui exercent de
manière traditionnelle et les cabinets intégrés dont la taille est plus
importante et qui, souvent, sont rattachés à des réseaux pluridisciplinaires.
Il est clair que ces entreprises, qui sont performantes, il faut le
reconnaître, sont à présent dans une situation infiniment plus favorable au
regard de la taxe professionnelle qu'un cabinet français traditionnel de moins
de cinq salariés. Ainsi existe et s'aggrave au fil des ans une rupture
d'égalité manifeste.
C'est pourquoi, par cet amendement, nous proposons de ramener progressivement
la fraction des recettes prise en compte dans les bases de taxe professionnelle
des titulaires de bénéfices non commerciaux de 10 % à 7 % en quatre ans. Vous
le constatez, ce dispositif s'applique progressivement et il est donc
réaliste.
M. le président.
La parole est à M. Ostermann, pour défendre l'amendement n° I-208.
M. Joseph Ostermann.
Cet amendement a le même objet que celui que vient d'exposer M. le rapporteur
général.
M. le président.
La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° I-67 rectifié.
M. Yves Fréville.
Je retire cet amendement au profit de l'amendement n° I-33, d'autant plus
qu'un amendement identique au mien est défendu par M. du Luart et ses
collègues.
M. le président.
L'amendement n° I-67 rectifié est retiré.
La parole est à M. Bourdin, pour défendre l'amendement n° I-151.
M. Joël Bourdin.
Le sujet sur lequel notre excellent rapporteur général vient de s'exprimer
nous préoccupe tous.
Pour les contribuables qui relèvent du régime des bénéfices non commerciaux et
qui emploient moins de cinq salariés, l'assiette de taxe professionnelle fondée
en partie sur les recettes est un peu trop lourde. En effet, la comparaison
avec des entreprises assez voisines montre que, souvent, la base taxable est
deux ou trois fois plus importante. Aussi le groupe des Républicains et
Indépendants a-t-il souhaité - c'est la seule différence avec la proposition
faite par M. le rapporteur général - que l'assiette soit constituée par
seulement 5 % des recettes. Mais l'important, c'est que nous allions vers cet
objectif. Aussi, je me rallie bien volontiers à l'amendement de la
commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-33, I-208 et I-151
?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Tous ces amendements procèdent de la même philosophie,
même s'ils varient par les chiffres de la fraction des recettes qui serait
prise en compte dans la base de taxe professionnelle.
Je ne peux malheureusement suivre les auteurs de ces amendements. Le coût du
dispositif est extrêmement élevé, et il devrait donc donner lieu à compensation
de la part de l'Etat, 1,4 milliard de francs pour l'amendement présenté par M.
Marini.
(M. le rapporteur général fait un signe de dénégation.)
J'ajoute que la fraction de recettes imposable que M. le rapporteur
général et les auteurs des autres amendements souhaitent réduire tient compte
notamment du fait que les titulaires de bénéfices non commerciaux, les agents
d'affaires et les intermédiaires de commerce employant moins de cinq salariés
ne sont pas imposés, contrairement aux autres redevables, sur la valeur des
équipements et biens mobiliers dont ils disposent pour les besoins de leur
activité professionnelle. Par ailleurs, on tient compte du fait que, parmi ces
redevables, figurent des contribuables qui n'emploient aucun salarié.
Or, la logique de la réforme de la taxe professionnelle est une logique
d'encouragement à l'emploi. En l'occurrence, on peut imaginer qu'elle incitera
au regroupement des professions libérales. Ainsi, deux sociétés civiles
professionnelles pourront se regrouper et elles dépasseront alors le seuil
d'emplois requis pour bénéficier de la réduction de la charge de la taxe
professionnelle. Ce contexte favorable à l'emploi n'est pas pris en compte dans
les amendements. Par ailleurs, compte tenu de la contrainte budgétaire
excessive qu'ils généreraient, ces amendements sont mal fondés et inopportuns.
Aussi, je demande au Sénat de les rejeter.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteurgénéral.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Une nouvelle fois, nous rencontrons un problème
d'évaluation d'une mesure fiscale. Les éléments qui m'ont été donnés concernant
une année faisaient état, pour le dispositif que j'ai proposé, d'un coût de 300
millions de francs. Là encore, je voudrais comprendre. J'ai l'impression que le
chiffre cité par M. le secrétaire d'Etat cumule plusieurs années de mise en
oeuvre d'un tel régime...
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le chiffre de 1,4 milliard de francs s'apprécie au
terme de l'évolution du processus. Il n'est donc pas contradictoire.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Certes, monsieur le secrétaire d'Etat, mais
l'incidence sur le solde de l'année 2000 est bien de 300 millions de francs.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-33.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Je me permettrai tout d'abord de suggérer à mes collègues de corriger leur
amendement n° I-151, car il s'agit non pas du cinquième des recettes, mais du
vingtième.
(M. Joël Bourdin fait un signe de dénégation).
Nos deux amendements ayant le même objet, je me permets de proposer le
même traitement.
J'ai bien entendu ce que vient de dire M. le secrétaire d'Etat. J'approuve les
propos de M. le rapporteur général s'agissant de l'équité, qui est essentielle
en ce domaine. En effet, si on réduit la base taxable pour tous les autres
contribuables assujettis à la taxe professionnelle, pourquoi ne le fait-on pas
pour les professions libérales ? Il n'aurait pas été difficile, monsieur le
secrétaire d'Etat - c'est la proposition que je ferai tout à l'heure ;
j'annonce dès maintenant la couleur - de réduire la masse des salaires pour les
professions libérales dans les mêmes conditions que pour les autres
entreprises, à savoir 18 %, avec un processus transitoire.
Telle est la question que je me permets de vous poser, monsieur le sécrétaire
d'Etat.
J'ai trouvé dans le
Journal officiel,
édition des débats de l'Assemblée
nationale, la réponse de M. Sautter. Je dois d'ailleurs dire que les arguments
budgétaires que vous venez de défendre me plaisent davantage que ce que j'ai pu
lire. En effet, à plusieurs reprises, le ministre de l'économie, des finances
et de l'industrie a prononcé à peu près les paroles suivantes, dont vous
retrouverez facilement la transcription : « De toute façon, le régime des
professions libérales a été très avantageux pendant une vingtaine d'années. Par
conséquent, s'il est moins avantageux maintenant, cela est assez normal. »
Il s'agit là d'un raisonnement purement macroéconomique, monsieur le
secrétaire d'Etat. En effet, quand vous dites à un jeune médecin ou à un jeune
avocat qui s'installe que ses prédécesseurs ont bénéficié pendant vingt ans
d'un régime plus favorable, il est bien évident qu'un tel argument ne passe
pas. Or, je crains que ce ne soit ce type de raisonnement, plutôt que des
arguments budgétaires, qui vous amène à vous opposer à l'adoption de cette
mesure d'équité.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-33, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 14, et les amendements n°s I-208 et I-151
n'ont plus d'objet.
Par amendement n° I-280, MM. Fréville, Badré, Jacques Baudot, Branger et les
membres du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 14,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 1468 du code général des impôts est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« Pour les contribuables visés au 2° de l'article 1467, de 6 % en 2000, 12 %
en 2001, 18 % en 2002 et au-delà du montant des salaires versés au sens du 1 de
l'article 231. »
« II. - Les pertes de recettes pour les collectivités locales sont compensées
à due concurrence par une majoration de la dotation globale de
fonctionnement.
« III. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence
par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général
des impôts. »
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Monsieur le président, je retire cet amendement, car il est satisfait par
l'amendement n° I-33 de la commission.
M. le président.
L'amendement n° I-280 est retiré.
Par amendement n° I-85 rectifié, MM. Fréville, Hoeffel, Jarlier et les membres
du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 14, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Après le troisième alinéa du 1° du III de l'article 1609
nonies
C du
code général des impôts est inséré l'alinéa suivant :
« Lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale faisant
application du régime prévu au II de l'article 1609
quinquies
C opte
pour le régime prévu au présent article ou devient soumis à ce régime, le taux
constaté dans une commune l'année précédente est le taux appliqué en dehors des
zones d'activités économiques existant sur son territoire antérieurement au
changement de régime ; le taux constaté l'année précédente dans chaque zone ou
fraction de zone si celle-ci est implantée sur le territoire de plusieurs
communes est alors assimilé à celui d'une commune-membre supplémentaire pour
l'application des dispositions du III du présent article. »
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Il s'agit, là aussi, d'un amendement technique, qui vise à préciser
l'interprétation à donner à la loi en matière de fixation du taux de la taxe
professionnelle lorsqu'un établissement public passe du régime de la taxe
professionnelle de zone au régime de la taxe professionnelle unique
d'agglomération.
La législation est ainsi faite qu'au moins trois interprétations circulent.
Certains appliquent l'article 1639 A
ter
du code général des impôts.
D'autres, les services fiscaux me semble-t-il, donnent une autre interprétation
et estiment qu'il convient de déterminer le taux moyen pondéré de taxe
professionnelle applicable dans chaque commune dotée d'une zone d'activités
avant de procéder au lissage des taux.
Le premier objectif de cet amendement est de définir le sens de la loi pour
que les EPCI qui veulent passer de la taxe professionnelle de zone au régime de
la taxe professionnelle unique sachent à quel saint se vouer.
Le deuxième objectif correspond tout à fait, monsieur le secrétaire d'Etat, à
ce que vous disiez à propos de l'article 14, à savoir trouver un système
incitant au passage de la taxe professionnelle de zone à la taxe
professionnelle unique d'agglomération. Pour que ce système soit incitatif, il
faut que le passage du taux qui est appliqué dans une zone d'activité
économique au taux qui sera appliqué dans la communauté d'agglomération ne soit
pas trop brutal. Or, selon certaines interprétations - et je n'entre pas dans
les détails -, on pourrait, dans certaines communes, avoir dans des zones
d'activité économique des augmentations brutales de taux, de l'ordre de quatre
ou cinq points, ce qui est bien sûr inacceptable pour les entreprises. Autant
des évolutions peuvent être progressives, autant des évolutions brutales sont
inacceptables. Par conséquent, les communautés de communes concernées, en
particulier celle de Saint-Flour, mais j'ai un autre exemple dans mon
département, ne feront pas le saut.
De caractère technique, cet amendement vise à considérer pour le « lissage »
des taux chaque zone comme équivalente à une commune ayant son taux initial qui
passera progressivement vers le taux final qui est le taux moyen de toutes les
zones et communes hors zone du groupement.
Tel est l'esprit de cet amendement, qui vise notamment à faciliter le passage
du régime de la taxe professionnelle de zone à celui de la taxe professionnelle
unique, afin que les entreprises ne soient pas brutalement pénalisées. Tel est
l'objectif que nous cherchons à atteindre ensemble, monsieur le secrétaire
d'Etat.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission est favorable à ce très utile
amendement de clarification.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement assez technique témoigne, monsieur le
sénateur, de votre parfaite maîtrise de la science fiscale des établissements
publics de coopération intercommunale.
Il a pour objet de préciser les règles de calcul du taux moyen pondéré de taxe
professionnelle. Il prévoit un mécanisme de lissage des taux de taxe
professionnelle lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale à
taxe professionnelle de zone passe sous le régime de la taxe professionnelle
unique.
S'agissant du calcul du taux moyen pondéré, il me semble que votre
préoccupation est déjà satisfaite.
Certes, le texte en vigueur, issu de la loi relative au renforcement et à la
simplification de la coopération intercommunale, ne prévoit pas explicitement
les modalités de calcul de ce taux dans la situation que vous évoquez.
Toutefois, les dispositions actuelles conduisent à calculer ce taux en faisant
le rapport entre, d'une part, la somme des produits perçus au profit des
communes, au profit du groupement hors de la zone et au profit du groupement
dans la zone, l'année précédant l'application de la taxe professionnelle unique
et, d'autre part, la somme des bases nettes communales et des bases nettes
imposées au profit du groupement dans la zone au cours de cette même année.
Cette explication me paraît répondre à votre préoccupation.
Par ailleurs, vous souhaitez prévoir un mécanisme de lissage spécifique dans
cette situation
Vous envisagez d'opérer une unification progressive différente dans la zone et
hors de la zone.
Cette solution irait, me semble-t-il, à l'encontre du principe selon lequel le
passage à la taxe professionnelle unique conduit à créer un territoire unique
soumis au même régime fiscal.
C'est pourquoi il apparaît préférable de rapprocher le taux communal en
vigueur - correspondant au taux moyen calculé en prenant en compte les produits
et les bases communales dans la zone et hors zone - du taux de taxe
professionnelle unique fixé par le groupement. Cette règle résulte d'ailleurs
de la loi actuellement en vigueur.
Au surplus, la solution que vous proposez serait d'une gestion complexe et
nécessiterait une adaptation des déclarations pour identifier à l'avenir les
établissements situés dans la zone antérieurement à la taxe professionnelle
unique, et ce pendant la toute la période d'unification, qui peut aller jusqu'à
douze ans.
Aussi, monsieur le sénateur, il me semble que les solutions actuellement en
vigueur concilient les légitimes préoccupations que vous avez exprimées et la
maîtrise de leur gestion par l'administration.
Compte tenu de ces explications, je vous demande de bien vouloir retirer votre
amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-85 rectifié.
M. Pierre Jarlier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Jarlier.
M. Pierre Jarlier.
Je voudrais plaider en faveur de cet important amendement, qui vise à rétablir
l'équité fiscale pour toutes les entreprises implantées sur un territoire ayant
opté pour le régime de la taxe professionnelle unique.
Aujourd'hui, à la suite de l'entrée en vigueur de la loi Chevènement, de
nombreuses structures intercommunales se montrent très fortement intéressées
par ce nouveau dispositif.
Néanmoins, l'option de la TPU se heurte à des difficultés de mise en oeuvre
dans certaines communautés de communes qui avaient, préalablement à la nouvelle
loi, opté pour le régime de la taxe professionnelle de zone. En effet, si le
lissage des taux de taxe professionnelle des communes adhérentes s'opère dans
la durée pour parvenir au taux moyen pondéré, il n'en est pas de même pour le
taux de TP de zone qui est remplacé, dès l'option prise pour le régime de la
TPU, par le taux de TP de la commune sur laquelle est implantée la zone.
Cette situation induit dans certains cas une augmentation brutale pouvant
aller jusqu'à 100 % de la TP des entreprises situées sur la zone
intercommunale. Dans un cas que je connais, le taux de TP de la zone étant de 9
% et celui de la commune étant de 18 %, voire de 19 %, il interviendra d'une
année sur l'autre un différentiel de dix points sur la taxe professionelle.
Cet écart constaté est d'autant plus important et fréquent que le choix
initial de la TP de zone était dans beaucoup de cas motivé par le constat d'un
différentiel élevé entre les taux pratiqués dans les bourgs centres au regard
des taux voisins pratiqués en zone rurale.
Cet amendement permet d'appliquer le même lissage dans le temps du taux de TP
de zone et du taux des communes membres. Il permet surtout d'organiser
progressivement l'harmonisation de la fiscalité des entreprises sur l'ensemble
des territoires économiquement solidaires.
Enfin, il lève ainsi un obstacle majeur à la mise en place du régime de la
TPU.
C'est pourquoi je souhaite que nous soyons nombreux à l'adopter.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Comme vient de l'indiquer M. Jarlier, je crois qu'il y a une incompréhension
entre M. le secrétaire d'Etat et nous. Ce dont nous ne voulons pas c'est de la
première disposition qu'a rappelée M. le secrétaire d'Etat et qui consiste à
faire la moyenne pondérée dans une commune.
M. Jarlier a très bien expliqué que si, dans une commune, le taux de taxe
professionnelle est de 9 % dans la zone d'activités et de 19 %, hors de la
zone, si on fait la moyenne avant de commencer le lissage, on passera
naturellement à la moyenne de 9 % et de 19 %, ce qui doit faire 14 %, et vous
aurez une augmentation immédiate de 5 % du taux.
M. Michel Moreigne.
C'est exact !
M. Yves Fréville.
Le début du dispositif envisagé par M. le secrétaire d'Etat conduit à la
catastrophe car une entreprise n'acceptera jamais que le taux de TP auquel elle
est assujettie passe de 9 % à 19 %.
Je tenais à vous le dire car il semble que notre amendement fasse l'objet
d'une mauvaise interprétation alors qu'il visait précisément à éviter ce
résultat.
M. Pierre Jarlier.
C'est très important !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, un exemple
supplémentaire de l'intérêt que revêt le débat approfondi et intéressant que
nous avons ce soir après bien d'autres de la même qualité qui se sont déroulés
devant la Haute Assemblée.
Vous soulevez une difficulté réelle. En ma double qualité de représentant du
Gouvernement et d'élu local, j'imagine que les cas de figure que vous venez
d'évoquer ne sont pas des hypothèses d'école.
M. Michel Moreigne.
Je suis d'accord !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
J'ai pour ma part, au nom des administrations que je
dirige, soulevé également une objection réelle, qui concerne la difficulté de
gestion du système que vous proposez.
Nous sommes en présence d'un texte très récent, puisqu'il date de juillet
1999. Il me paraît nécessaire de prendre un peu de recul afin de surmonter les
divers obstacles mentionnés.
C'est pourquoi nos services vont travailler avec le ministère de l'intérieur
et certainement en liaison avec la commission des finances du Sénat, pour
rechercher une solution concrète.
Je tiens à remercier le Sénat, dont la réflexion a permis d'approfondir une
difficulté d'application.
M. Philippe Nogrix.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix.
Je voudrais insister auprès de M. le secrétaire d'Etat sur la nécessité
d'aller très vite, car il faut qu'au 1er janvier nous soyons fixés sur la façon
dont nous appliquerons les nouveaux taux.
Je voterai l'amendement de M. Fréville.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-85 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 14.
Je suis à présent saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune et qui sont deux présentés par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M.
Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° I-189 vise à insérer, après l'article 14, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les 4° et 5° du paragraphe II de l'article 1635
sexies
du code
général des impôts sont supprimés.
« II. - Le 6° du paragraphe II de l'article 1635
sexies
du code général
des impôts est ainsi rédigé :
«
6°
Le produit des cotisations afférentes aux impositions visées au I,
diminué de la fraction des cotisations afférentes aux taxes mentionnées aux
articles 1520 et 1528, est perçu par les collectivités locales accueillant, sur
leur territoire, un établissement de La Poste ou de France Télécom, à hauteur
de la moitié du montant global des produits subvisés, l'autre moitié étant
versée au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle visé à
l'article 1648 A
bis.
»
« III. - Pour compenser les pertes de recettes résultant des I et II
ci-dessus, l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
L'amendement n° I-190 tend à insérer, après l'article 14, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les 4° et 5° du paragraphe II de l'article 1635
sexies
du code
général des impôts sont supprimés.
« II. - Le 6° du paragraphe II de l'article 1635
sexies
du code général
des impôts est ainsi rédigé :
«
6°
Le produit des cotisations afférentes aux impositions visées au I,
diminué de la fraction des cotisations afférentes aux taxes mentionnées aux
articles 1520 et 1528, est perçu par les collectivités locales accueillant sur
leur territoire un établissement de La Poste ou de France Télécom, à hauteur de
la moitié du montant global des produits susvisés, l'autre moitié étant
répartie selon les dispositions de l'article 1475 A du code général des impôts.
»
« III. - Après l'article 1475 du code général des impôts, il est inséré un
article 1475 A ainsi rédigé :
«
Art. 1475 A.
- La moitié des produits des cotisations afférentes aux
impositions visées à l'article 135
sexies
est répartie entre les
communes comprises dans la circonscription de taxe de l'établissement imposé.
»
« IV. - Pour compenser les pertes de recettes résultant des I et II ci-dessus,
l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Foucaud, pour défendre l'amendement n° I-189.
M. Thierry Foucaud.
L'amendement que nous soumettons à la discussion n'est pas nouveau. Je traite
d'un thème malheureusement récurrent depuis 1991, date à laquelle les
établissements France Télécom ont changé de statut, sans pour autant que leur
non-imposition à la taxe professionnelle soit remise en cause. Depuis, la
situation perdure, les municipalités des communes accueillant un établissement
France Télécom demandent que le droit commun soit rétabli.
Certaines ont d'ailleurs entamé une procédure devant la Cour de justice des
Communautés européennes pour non-respect des règles concurrentielles entre les
entreprises. Et il est presque sûr qu'elles vont obtenir satisfaction eu égard
aux disparités devant l'imposition entre France Télécom et les entreprises de
téléphonie telles que Cégétel ou Bouygues.
Nous ne souhaitons pas, pour autant, occulter le rôle péréquateur joué par le
produit de la taxe professionnelle acquittée par France Télécom. C'est la
raison pour laquelle nous ne vous proposons pas un retour complet au droit
commun.
Les collectivités locales accueillant des établissements pourraient, c'est
d'ailleurs l'objet de l'amendement n° I-189, en bénéficier à même hauteur que
le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.
L'autre solution que nous vous proposons pour la répartition, et qui fait
l'objet de l'amendement n° I-190, est le système en vigueur pour les centrales
hydroélectriques. La péréquation jouerait ici entre les communes incluses dans
le périmètre de circonscription de taxe de l'établissement France Télécom
imposé.
Ce mécanisme a pour avantage de tenir compte des frais engagés par les
communes, du fait de l'accueil des salariés dudit établissement.
Lors du débat budgétaire à l'Assemblée nationale, le ministre a, à plusieurs
reprises, confirmé qu'un groupe de travail recensait les bases France Télécom
et que le Gouvernement devrait rapidement être en mesure de faire des
propositions.
Pouvez-vous nous indiquer si des pistes de réflexion ont déjà été dégagées
quant à la répartition du produit de la taxe professionnelle acquittée par
France Télécom et nous confirmer la date à laquelle l'étude des bases et leurs
répartitions géographiques sera rendue publique ?
Pour l'heure, nous vous soumettons, mes chers collègues, ces amendements.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat,
mes chers collègues, si je fais un instant abstraction des gages que la
commission ne considère pas comme tout à fait adéquats - vous le comprendrez -
je ne peux que soutenir la thèse défendue par M. Foucaud et ses collègues.
En effet, l'amendement n° I-189 est le même que celui que le Sénat a adopté
l'année dernière sur l'initiative de la commission des finances. Nous estimons
qu'il convient - et vite, monsieur le secrétaire d'Etat, car il en est question
depuis déjà un certain nombre d'années et vous connaissez ce sujet, puisque le
domaine couvert est sous votre tutelle ministérielle - de s'orienter vers une
banalisation du statut de La Poste et de France Télécom en ce qui concerne la
taxe professionnelle, les impôts locaux dus au titre des implantations de ces
établissements.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous souhaiterions d'abord savoir comment la
situation a évolué depuis un an, car le Sénat avait alors manifesté très
largement - à l'unanimité, je crois - son souci de voir aboutir cette question,
à la fois dans l'intérêt des collectivités territoriales et dans celui de
France Télécom, dans la mesure où cette entreprise se trouve aujourd'hui dans
une situation incertaine tant du point de vue de la concurrence que des règles
communautaires applicables en la matière.
Monsieur le secrétaire d'Etat, où en êtes-vous ? A-t-on progressé ? On nous
parle beaucoup de concertations, de réunions, de rapports. Quelles ont été les
dernières concertations, quel est le contenu des derniers rapports ?
Allons-nous enfin déboucher sur du concret ?
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-189 et I-190 ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Là encore, je crois que le problème visé par les
amendements de M. Foucaud est réel et que le travail que nous effectuons ce
soir en commun peut déboucher sur des solutions concrètes positives.
Il s'agit d'assujettir La Poste et France Télécom à la taxe professionnelle en
fonction du taux de chaque collectivité locale sur le territoire de laquelle se
trouvent les établissements concernés et de répartir le produit de cette
imposition entre ces collectivités et le fonds national de péréquation.
Comme l'a dit M. le rapporteur général, le Gouvernement a engagé une réflexion
sur les modaltiés d'assujettisement de France Télécom aux impôts locaux.
Je dois rappeler qu'une telle réforme conduit à diminuer les recettes de
l'Etat de 4,8 milliards de francs - d'où le gage trouvé par le groupe
communiste républicain et citoyen - mais aussi celles des collectivités
locales, bénéficiaires pour 1,7 milliard de francs du fonds national de
péréquation de la taxe professionnelle. Or ces collectivités locales ne sont
pas les mêmes que celles sur le territoire desquelles se trouvent les
établissements de La Poste ou de France Télécom. Il faut faire attention aux
problèmes que cela ne manquera pas de poser !
Aussi, lorsque l'on réfléchit à ce problème difficile, il convient de se
placer dans la perspective du maintien d'une certaine homogénéité territoriale
des recettes issues de la fiscalisation de l'exploitant. Et la question est
plus complexe qu'il n'y paraît au premier abord !
Ces objectifs nécessitent un travail d'expertise technique préalable et une
concertation approfondie. Un groupe de travail technique, qui associe la
direction générale des impôts et France Télécom, a été mis en place pour
apprécier au niveau local les effets d'une taxation des bases de France Télécom
au profit des collectivités territoriales d'implantation de ces établissements.
Ces travaux sont importants. Ils nécessitent l'inventaire par l'exploitant des
bases locales, inventaire qui n'avait pas été opéré jusqu'à présent.
Le recensement par France Télécom de ses équipements et de ses biens mobiliers
a commencé. L'entreprise a fourni au mois d'octobre les premiers éléments
concernant la répartition entre ses divers établissements de ses biens et de
ses équipements mobiliers. Des travaux complémentaires sont nécessaires, mais
les instructions ont été données pour qu'ils soient menés avec la diligence
voulue et la volonté d'aboutir.
La question est difficile, car l'inventaire de ces biens n'est pas chose
aisée, et elle est techniquement très complexe.
Cependant, monsieur le rapporteur général, nous devons constater que les
instructions sont données, que le mouvement est lancé, que la volonté exprimée
par M. Sautter il y a un an ici même a été suivie d'opérations concrètes allant
dans le sens que vous souhaitez. Le Gouvernement progresse, les travaux sont en
cours de réalisation.
Notre réelle bonne volonté de trouver une solution - qui, je le rappelle
encore, peut créer des problèmes entre les collectivités locales elles-mêmes -
n'est pas à mettre en cause, nous avons la volonté d'aboutir.
En fonction de cette volonté et compte tenu de ces explications, je crois
qu'il serait bon que vous retiriez cet amendement pour nous laisser le temps
d'aboutir à des solutions concrètes acceptables par toutes les collectivités
territoriales concernées.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ces propos sont
utiles, certes, mais il y manque une précision que nous attendions, à savoir le
délai.
France Télécom nous dit avoir recensé et communiqué l'ensemble de ces bases.
Grâce aux études effectuées par la commission de la production et des échanges
de l'Assemblée nationale, nous savons que 15 000 communes sont concernées.
S'agissant de la répartition entre collectivités territoriales, le dispositif
de l'amendement n° 1-189, identique à celui qu'avait proposé la commission,
contient une solution de bon sens, qui vise à partager le produit entre, d'une
part, les collectivités locales siège des établissements et, d'autre part, le
fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.
Je ne pense pas que l'on puisse trouver solution plus équitable, je me permets
de le dire après avoir, comme d'autres, beaucoup travaillé sur ces sujets et
avoir examiné, dans le cadre d'une proposition de loi qui avait été élaborée
avec notre colègue Jean-Paul Delevoye, différentes simulations de
répartition.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il est cependant un point que vous avez évoqué
et qui ne peut nous laisser insensibles : je veux parler du coût de la mesure -
plusieurs milliards de francs - qui serait de nature à dégrader
significativement le solde de la première partie de cette loi de finances.
Dans ces conditions, peut-être pourrais-je suggérer aux auteurs de ces deux
amendements de bien vouloir, à ce stade, les retirer, de telle sorte que nous
les réintroduisions - et si possible à l'unanimité, comme l'année dernière,
pour bien marquer notre volonté - dans la seconde partie de la loi de
finances.
M. le président.
Monsieur Foucaud, maintenez-vous vos amendements ?
M. Thierry Foucaud.
Monsieur le président, une fois n'est pas coutume, nous sommes d'accord avec
M. le rapporteur général. Nous discuterons donc de cette question au moment de
l'examen de la deuxième partie.
Compte tenu de la réponse positive de M. le secrétaire d'Etat et des
explications de M. le rapporteur général, je retire les deux amendements,
monsieur le président.
M. le président.
Les amendements n° I-189 et I-190 sont retirés.
Par amendement n° I-140 rectifié, M. Revet et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 14, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le I
sexies
de l'article 1648 A du code général des impôts est ainsi
rédigé :
«
I
sexies. - A compter du 1er janvier 1998, lorsqu'à la suite d'une
opération intervenue après le 31 décembre 1993, d'apport ou de scission
d'entreprise, d'une part, de cession ou de mise à disposition à titre gratuit
ou onéreux de biens visés à l'article 1469, d'autre part, les éléments
d'imposition d'un établissement qui a donné lieu, l'année de l'opération, au
prélèvement prévu au I sont répartis entre plusieurs établissements imposables
dans la même commune au nom de personnes différentes ; ces établissements sont
réputés constituer un seul établissement pour l'application des dispositions du
I. »
La parole est à M. Bourdin.
M. Joël Bourdin.
Monsieur le président, mon collègue Charles Revet m'a demandé de défendre cet
amendement, ce que je fais volontiers.
Dans un certain nombre de départements où sont implantés des établissements
importants, de nombreux grands groupes français, notamment dans le secteur de
la pétrochimie et de l'automobile, procèdent à des ajustements fiscaux visant à
diviser leur base taxable en plusieurs établissements.
Il est permis de s'interroger sur cette méthode, qui conduit une entreprise à
avoir ses immobilisations, ses investissements dans un lieu et ses personnels
dans un autre. C'est un phénomène que nous avons d'ailleurs évoqué ici même
l'an dernier.
Ce mouvement de « filialisation » a des conséquences directes sur les fonds
départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, dont le calcul est
assuré établissement par établissement.
L'amendement de Charles Revet vise à préserver cette péréquation
départementale en permettant aux services fiscaux, lors du calcul de
l'écrêtement, de passer outre ces divisions de bases et de faire masse de tous
les éléments d'imposition.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Notre collègue Charles Revet, président du conseil
général de la Seine-Maritime, propose de modifier sur deux points un dispositf
adopté voilà seulement deux ans.
Tout d'abord, il nous propose de tenir compte des scissions intervenues depuis
1993, et non depuis 1995 comme le prévoit le droit actuel ; il nous propose
ensuite de supprimer la condition selon laquelle les entreprises issues de la
scission doivent continuer à exercer les mêmes activités que précédemment.
Concrètement, cet amendement aboutirait, je le constate, à reprendre aux
communes des recettes qu'elles percevaient depuis 1993 pour les transférer aux
conseils généraux, qui gèrent les fonds départementaux de péréquation de la
taxe professionnelle.
La commission des finances s'est par ailleurs interrogée sur le caractère
quelque peu rétroactif de cet amendement.
Peut-être serait-il utile, dans ces conditions, que notre collègue Joël
Bourdin, une fois qu'il aura entendu l'avis du Gouvernement, puisse retirer cet
amendement dans l'attente de discussions ultérieures.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le dispositif actuellement en vigueur, issu de la loi
de finances de 1998, nous paraît empreint de sagesse, car il se limite aux
opérations intervenues à compter du 1er janvier 1996 et ne retient pas les
cessions de biens visées à l'article 1469 du code général des impôts.
En effet, d'une part, la cession de biens peut être sans incidence sur
l'activité de l'établissement en question et, d'autre part, il semble dangereux
et contraire au principe de la sécurité juridique de remettre en cause la
stabilité financière des communes d'implantation de ces établissements.
Si la proposition de M. Revet était acceptée, elle porterait atteinte à des
ressources acquises par les communes depuis maintenant six ans, ressources
qu'elles considèrent à bon droit comme stables.
En méconnaissant la sagesse qui a présidé à l'élaboration de ce dispositif, je
crains qu'une extension excessive du dispositif n'affaiblisse le consensus
difficile qui a été dégagé lors du vote de la proposition initiale.
Vous proposez notamment de supprimer toute condition de contrôle entre les
entreprises issues de la restructuration. Or cette condition est essentielle.
En effet, elle légitime le dispositif qui a été conçu pour corriger les effets
négatifs sur l'alimentation des fonds départementaux des restructurations
intervenues à l'intérieur d'une même société ou d'un groupe de sociétés.
Supprimer cette condition reviendrait à nier toute évolution économique dans la
commune et à réduire indûment les ressources fiscales de celle-ci.
Au surplus et subsidiairement, la mesure que vous proposez d'adopter
s'appliquerait aux seuls établissements écrêtés imposés au profit des communes
et non des groupements à fiscalité propre qui leur sont substitués. Sur le plan
technique, cela imposerait de mettre en place un dispositif supplémentaire,
dont la gestion serait difficile.
Je vous demande donc de retirer cet amendement, monsieur Bourdin. A défaut, je
me verrais contraint d'en demander le rejet.
M. le président.
Monsieur Bourdin, l'amendement n° I-140 rectifié est-il maintenu ?
M. Joël Bourdin.
J'ai bien entendu M. le rapporteur général et M. le secrétaire d'Etat. C'est
d'ailleurs la seconde fois que j'entends M. le rapporteur général, puisque je
suis membre de la commission des finances : je connaissais donc bien la
position qu'il allait prendre.
M. Revet a raison, à mon avis, d'insister sur ce point. Il est d'ailleurs déjà
à l'origine de l'amendement qui avait été adopté ici sur le même thème voilà
deux ans.
J'ai cru comprendre que son signal avait été entendu et que l'on allait
continuer à réfléchir sur cette proposition afin de donner aux entreprises un
certain degré d'autonomie pour qu'elles puissent déplacer leurs bases.
Son appel ayant été lancé et, je crois, entendu, je crois pouvoir retirer cet
amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-140 rectifié est retiré.
Article 14
bis
M. le président.
« Art. 14
bis.
- I. - A la fin de la première phrase de l'article 1414
bis
du code général des impôts, la somme : "1 500 francs" est remplacée
par la somme : "1 200 francs".
« II. - Les dispositions du I sont applicables pour les impositions établies
au titre de 2000 et des années suivantes. » -
(Adopté.)
Article 14
ter
M. le président.
« Art. 14
ter.
- L'avant-dernier alinéa du II du D de l'article 44 de
la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) est complété par
une phrase ainsi rédigée :
« Au titre de 2000, la compensation est actualisée en tenant compte du taux
d'évolution de la dotation globale de fonctionnement visé au premier alinéa de
l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales. »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, au sujet de la taxe
professionnelle, il convient de rappeler que notre assemblée s'est opposée,
l'an dernier, à la réforme proposée par le Gouvernement, et ce pour quatre
raisons.
En premier lieu, le choix d'une compensation aux collectivités locales plutôt
que d'un dégrèvement conduit à priver ces dernières des ressources liées aux
créations d'emplois sur leur territoire et réduit, de ce fait, les incitations
à mettre en place des politiques dynamiques au profit du développement de nos
différentes régions, départements et communes.
En deuxième lieu, les modalités de calcul de la compensation, en particulier
de l'indexation sur la DGF, pénalisent les collectivités locales puisque la DGF
augmente moins vite que les anciennes bases assises sur les salaires.
A ce sujet, je regrette, monsieur le secrétaire d'Etat, de n'avoir jamais reçu
les détails du calcul auquel l'administration et le Gouvernement ne manquent
jamais de se référer et selon lequel la DGF aurait augmenté plus vite que les
salaires de 1992 à 1999.
En troisième lieu, nous nous sommes opposés à cette réforme, car elle est de
nature à pénaliser le développement de la taxe professionnelle unique et donc
de l'intercommunalité.
En quatrième lieu, nous nous y sommes opposés parce que cette réforme comporte
de nombreux effets pervers non maîtrisables, en particulier sur les potentiels
fiscaux et les seuils d'écrêtement des établissements exceptionnels au profit
des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle.
Or je constate que, cette année, vous revoyez votre copie sur deux des points
que je viens d'évoquer et qui étaient présents dans nos débats de la loi de
finances pour 1999.
Tout d'abord, dans le projet de loi sur les conséquences du recensement, que
nous examinerons dans quelques jours, vous corrigez les effets pervers de la
réforme sur le potentiel fiscal des communes et ses conséquences sur les
ressources du fonds de solidarité de la région d'Ile-de-France.
Ensuite, dans le présent article 14
ter
, vous revalorisez le taux
d'indexation de la compensation aux collectivités locales. Vous reconnaissez
donc par là même que le taux retenu l'an dernier était pénalisant. Peut-être
allez-vous nous dire que la réforme ne pénalise pas les collectivités locales
car, en 1999, leurs ressources n'ont pas été affectées ? Mais c'est normal
parce que la réforme est progressive et parce que la compensation versée la
première année, nous nous en souvenons, était pratiquement une compensation au
franc le franc.
En outre, si j'en crois le rapport qui a été remis au Parlement ces dernières
semaines, les entreprises les plus importantes sont très pénalisées par la
réforme. Certaines d'entre elles ont même vu leur fiscalité augmenter en 1999
au titre de la taxe professionnelle.
J'ajoute que, dans la loi sur l'intercommunalité promulguée en juillet
dernier, il a été prévu que les structures intercommunales à taxe
professionnelle unique pourront également prélever des impôts sur les ménages
si les recettes de la taxe professionnelle ne suffisent pas à financer leurs
compétences.
La suppression de la part salaire conduit donc partiellement à une
augmentation de la pression fiscale et en particulier de celle qui pèse sur les
ménages.
Je vais malgré tout, monsieur le secrétaire d'Etat, voter l'article 14
ter
, car la revalorisation de l'indexation de la compensation versée aux
collectivités locales constitue indéniablement un progrès par rapport au
dispositif initial. Je pense que nos remarques de l'année passée ont constitué
un élément de cette prise de conscience, même si elle se révèle tardive. Je
tiens toutefois à vous redire que je regrette, au nom de la commission des
finances, que le Gouvernement ait choisi, par cette réforme, d'accélérer le
démantèlement de la fiscalité locale plutôt que de s'engager dans sa réforme.
(Très bien ! sur les travées des Républicains et Indépendants.)
M. Le président
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14
ter
.
(L'article 14 ter est adopté.)
Articles additionnels après l'article 14
ter
M. le président
Par amendement n° I-149, M. Pintat propose d'insérer, après l'article 14
ter,
un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1648 A du code général des impôts est ainsi modifié :
« A. - Après le troisième alinéa du II, il est inséré un alinéa libellé comme
suit :
« Le conseil général ou, le cas échéant, la commission interdépartementale
peut également préléver au profit des communes dans lesquelles le montant du
prélèvement qu'elles versent au fonds augmente, en raison de la disparition des
bases correspondant à la fraction de l'assiette de la taxe professionnelle
assise sur les salaires en application des dispositions du A de l'article 44 de
la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266), les sommes destinées à compenser en
totalité ou en partie la perte de recettes enregistrée par la commune. Le
montant de l'attribution versée à ces communes est arrêté par convention entre
le conseil général concerné et la commune. »
« B. - Après le premier alinéa du 1° du IV
bis
, il est inséré un alinéa
ainsi rédigé :
« Le conseil général ou, le cas échéant, la commission interdépartementale
peut également prélever au profit des établissements publics de coopération
intercommunale soumis, de plein droit ou après option, aux dispositions de
l'article 1609
nonies C
, dans lesquels le montant du prélèvement au
profit du fonds augmente, en raison de la disparition des bases correspondant à
la fraction de l'assiette de la taxe professionnelle assise sur les salaires en
application des dispositions du A de l'article 44 de la loi de finances pour
1999 (n° 98-1266), les sommes destinées à compenser en totalité ou en partie la
perte de recettes enregistrée par l'établissement public de coopération
intercommunale. Le montant de l'attribution versée à ces établissements publics
de coopération intercommunale est arrêté par convention entre le conseil
général concerné et l'établissement public de coopération intercommunale. »
La parole est à M. Pintat.
M. Xavier Pintat.
Cet amendement tend à moduler les incidences de la réforme de la taxe
professionnelle en ouvrant la faculté - aux départements en charge de la
répartition des moyens des fonds départementaux de péréquation de la taxe
professionnelle - de compenser de manière conventionnelle la perte de recettes
issue de la réduction des bases des communes écrêtées dans lesquelles est
installé un établissement exceptionnel.
Mécaniquement, la suppression de la part salaire entraîne pour certaines
communes une réduction des bases non écrêtées, et donc une augmentation
desmontants écrêtés en direction des fonds départementaux de péréquation de la
taxe professionnelle. C'est sur la part de ces surplus de recettes versés au
fonds départemental qu'il vous est proposé d'instituer de manière souple un
mécanisme de reversement négociable dans son principe et son montant par
rapport aux réalités des situations locales.
Cette mesure présente ainsi l'avantage de temporiser les incidences de la
réforme de la taxe professionnelle pour la perte possible de recettes non
compensées de ces communes sans occasionner un manque à gagner pour les
communes éligibles au fonds départemental de péréquation de la taxe
professionnelle.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'amendement de M. Pintat met en évidence une des
conséquences du choix du Gouvernement de ne pas compenser aux collectivités
locales la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle par la
méthode du dégrèvement que nous avions soutenue au Sénat.
Nous avions parlé d'une conséquence potentielle l'année dernière ; elle est
devenue de fait une conséquence réelle. Dans certaines communes, en effet, la
suppression de la part salaire entraîne une baisse du seuil d'écrêtement des
établissements exceptionnels, donc une perte de recettes pour les communes et
une augmentation des ressources du fonds départemental.
Cet amendement permet aux conseils généraux qui le souhaiteraient de reverser
aux communes tout ou partie de la fraction du produit de taxe professionnelle
ainsi perdue au profit du FDPTP. C'est un dispositif souple que préconise
l'amendement, permettant de s'adapter à toutes les situations locales et qui ne
remet pas en cause la péréquation. C'est pourquoi la commission est très
favorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je vais également rejoindre M. Pintat et M. le
rapporteur général...
M. Emmanuel Hamel.
Quel grand moment !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... en proposant au Sénat d'adopter cet amendement
excellent.
M. Emmanuel Hamel.
Excellent !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le seuil d'écrêtement devrait naturellement baisser du
fait de la suppression progressive de la fraction imposable des salaires et, de
ce fait, les communes et les établissements publics de coopération
intercommunale verront les bases de leurs établissements exceptionnels écrêtées
proportionnellement plus que dans la législation ancienne.
Afin de ne pas bouleverser le système de péréquation existant, M. Pintat, dans
son amendement n° I-149, propose que le conseil général ou la commission
interdépartementale puisse neutraliser, le cas échéant, cet effet lors de la
redistribution des sommes affectées au fonds départemental de péréquation de la
taxe professionnelle. Suite à un accord conventionnel entre le ou les conseils
généraux concernés et la commune, ou l'établissement public de coopération
intercommunale d'implantation, un reversement du fonds départemental de
péréquation de la taxe professionnelle pourrait leur être attribué pour
compenser cette perte de recettes.
Je demande au Sénat d'adopter cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-149.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Frévile.
M. Yves Fréville.
Je souhaiterais poser une question à M. le rapporteur général et à M. le
secrétaire d'Etat en ce qui concerne le B de l'amendement n° I-149,
c'est-à-dire dans le cas où le FDPTP est implanté dans une communauté de
communes ou un district qui applique les dispositions de l'article 1609
nonies
C relatives à la taxe professionnelle unique.
Le problème est le suivant - et je connais ce problème puisque, en
Ille-et-Vilaine, nous sommes dans cette situation : à l'heure actuelle, le
conseil général ou la commission départementale a déjà la possibilité
d'affecter entre 20 % et 40 % des recettes au profit de l'établissement public.
Ma question est donc la suivante : ce prélèvement supplémentaire s'ajoute-t-il
aux 20 % et aux 40 % - c'est-à-dire peut-il dépasser 40 % - ou est-il compris
dans ces pourcentages ?
Je pose cette question pour le cas très particulier où il n'y a pas de
réduction de base : il se trouve que, dans un certain nombre de fonds
départementaux, des bases sont garanties pour les établissements qui existaient
avant 1979.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Sous toutes réserves, je crois pouvoir répondre à
notre collègue que le prélèvement dont il s'agit est purement contractuel,
c'est-à-dire qu'il résultera de la libre négociation entre l'établissement
public de coopération intercommunale et le fonds départemental, à savoir le
conseil général. Il peut donc s'agir ou non d'un ajout selon la négociation et
les résultats de cette dernière entre les deux parties.
M. Yves Fréville.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-149, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
M. Thierry Foucaud.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 14
ter
.
M. Emmanuel Hamel.
Toute la Gironde se réjouit !
M. le président.
Par amendement n° I-192, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après
l'article 14
ter
, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La seconde phrase du second alinéa de l'article L. 1613-2 du code
général des collectivités territoriales est abrogée.
« II. - Les taux d'imposition des deux dernières tranches du barème de l'impôt
sur le revenu des personnes physiques sont relevés à due concurrence des pertes
de recettes résultant du I. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet article additionnel que nous proposons d'insérer après l'article 14
ter
a pour objet de supprimer la disposition dite « amendement Auberger
». Ce dispositif, instauré en même temps que le pacte de stabilité du
gouvernement Juppé, autorise l'utilisation par l'Etat de la dotation de
compensation de la taxe professionnelle comme variable d'ajustement de
l'enveloppe normée des concours financiers de l'Etat.
Je le dis sans malice à l'égard du Gouvernement, le maintien d'un tel
mécanisme pour les collectivités territoriales, par un gouvernement attaché à
l'idée de progrès, de solidarité et animé d'une réelle volonté d'aller plus
loin dans la décentralisation, n'est-il pas contradictoire ?
A l'origine, en effet, la dotation de compensation de la taxe professionnelle,
instituée par l'article 6 de la loi de finances pour 1987, était destinée à
compenser les pertes de recettes de la taxe professionnelle résultant des
mesures législatives d'allégement.
La DCTP se compose de la compensation de l'abattement de 16 % des bases de la
taxe professionnelle, de la compensation du plafonnement des taux de la taxe
professionnelle et de celle, depuis l'an dernier, qui est liée à la suppression
progressive de la part salaire.
Or, force est de constater aujourd'hui, et chaque année le confirme, que la
DCTP est loin de compenser intégralement les recettes des collectivités locales
perdues au titre de divers allégements et exonérations consentis par l'Etat aux
contribuables locaux, et ce d'autant plus que le nombre des compensations ne
cesse d'augmenter.
De 1993 à 1999, la dotation de compensation de la taxe professionnelle a
baissé de près de 30 %. Elle est passée de 18,85 milliards de francs en 1993 à
12,4 milliards de francs en 1999. L'an dernier, cette baisse n'a pas été
accusée de la même façon par l'ensemble des communes. Comme vous le savez, le
Gouvernement a souhaité limiter la perte de recettes des communes éligibles à
la dotation de solidarité urbaine ou des communes dites « bourg-centre »
bénéficiaires de la dotation de solidarité rurale.
En revanche, les collectivités non éligibles à l'une de ces dotations de
solidarité doivent prendre à leur charge cette nouvelle diminution de la
DCTP.
Leurs propres taux de diminution s'établit ainsi en 1999 : moins 23,14 % pour
les communes, moins 12,88 % pour les départements et moins 16,60 % pour les
régions.
Cette année, l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale a
permis de réduire les effets pervers en améliorant le dispositif de
compensation de la suppression de la base salaire de la taxe professionnelle en
reconduisant les dotations exceptionnelles de 500 millions et 150 millions de
francs qui permettent de réduire les répercussions pour les communes éligibles
aux dotations de solidarité.
Ce sont de bonnes mesures, mais elles ne sont que ponctuelles. La seule
solution est de supprimer la possibilité d'utiliser la DCTP comme variable
d'ajustement de l'enveloppe normée. C'est ce que nous proposons par notre
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement montre l'attachement de ses auteurs
aux ressources des collectivités territoriales.
La question de la suppression de la régularisation négative de la DGF se pose
en effet : non seulement cette régularisation pénalise les ressources des
collectivités mais, en outre, elle conduit par son mécanisme à rendre
excessivement complexe le système de relations financières entre l'Etat et les
collectivités locales.
Comme vous le savez, mes chers collègues, notre mission sur la
décentralisation - dont le président est M. Jean-Paul Delevoye et le rapporteur
M. Michel Mercier - travaille sur ce sujet.
Dans le cadre de la loi de finances, il est bon que le débat puisse porter sur
cette question. Il serait cependant utile que nous connaissions l'avis du
Gouvernement avant de dire quel sort nous réservons à l'amendement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Compte tenu du poids de la DGF dans les concours de
l'Etat aux collectivités locales et du mode de calcul de l'évolution de cette
dotation d'une année sur l'autre, il est difficilement envisageable qu'il ne
soit pas procédé à une actualisation de l'indice d'évolution de la DGF en
fonction des indicateurs économiques. C'est une démarche technique qui tient
compte des mécanismes et du calendrier régissant l'élaboration de la loi de
finances.
L'esprit de cette régularisation - les sénateurs en sont certainement
persuadés - n'est jamais de chercher à réduire les moyens affectés aux
collectivités locales puisque l'article 1613-2 du code général des
collectivités locales s'applique aussi bien en cas de régularisation négative
qu'en cas de régularisation positive.
Le Gouvernement s'est toujours montré sensible aux arguments des élus locaux
en faveur d'une participation des collectivités locales aux fruits de la
croissance. C'est pourquoi il a décidé d'indexer le contrat de croissance et de
solidarité sur une fraction significative du produit intérieur brut.
Par rapport à la situation de référence correspondant à la reconduction du
dispositif législatif antérieur, cette indexation a donné aux collectivités
locales un supplément de ressources de 970 millions en 1999. J'annonce en outre
au Sénat que ce supplément de ressources devrait être de 1,9 milliard en 2000,
au titre de la seule indexation, ce montant étant porté à 3,8 milliards de
francs compte tenu des divers abondements exceptionnels.
Aller au-delà, en supprimant un ajustement technique lorsqu'il se révèle
défavorable aux collectivités locales, ne me paraîtrait pas légitime. La
liaison avec les indicateurs économiques doit rester valable dans tous les cas
de figure.
C'est pourquoi je suis hostile à l'amendement et propose qu'il soit retiré.
M. le président.
Quel est désormais l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mes chers collègues, M. le secrétaire d'Etat a raison
de nous parler des variables économiques et de l'intégration de ces variables,
pour une certaine part, dans le calcul des concours de l'Etat aux collectivités
territoriales. Nous faisons en effet de ce sujet, plus précisément de la prise
en compte de 50 % du taux de croissance du produit intérieur brut pour le
calcul de l'enveloppe normée, notre objectif principal dans la discussion de la
loi de finances, ici, au Sénat, pour l'année 2000.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez parlé de l'augmentation des
concours de l'Etat dans le cadre de ladite enveloppe normée, mais vous ne
pouvez pas ignorer que l'augmentation des rémunérations liée mécaniquement à
l'application de l'accord salarial dans la fonction publique du 10 février 1998
nous conduit à dépenser, au titre des différents budgets locaux, autant que
l'augmentation de la DGF, qui est la principale composante de l'enveloppe
normée.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il faut voir les recettes, mais aussi les
charges, et appréhender le solde pour les budgets des collectivités
territoriales comme pour tout autre budget.
Par ailleurs, avec notre collègue M. Michel Mercier, nous souhaitons la prise
en compte des résultats du recensement sur deux ans et non pas sur trois.
La prise en compte de 50 % de la croissance dans l'enveloppe normée, d'un
côté, et la prise en compte du recensement en deux ans et non pas en trois, de
l'autre, sont les deux caps prioritaires que la commission des finances va
tenter de franchir dans ce débat budgétaire pour l'an 2000 en ce qui concerne
les ressources locales.
Mes chers collègues, il ne semble pas possible de faire tout dans la première
partie de la loi de finances, et, même si vos intentions sont bonnes, il n'est
pas concevable d'intégrer cet amendement dans la première partie de la loi de
finances pour des raisons de solde budgétaire. En revanche, je ne verrai aucun
inconvénient à ce qu'il soit réexaminé dans la seconde partie. A ce stade, je
vous demande donc de bien vouloir le retirer.
M. le président.
L'amendement n° I-192 et-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-192, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 14
quater
M. le président.
« Art. 14
quater.
- Le Gouvernement présentera, avant le 30 avril 2000,
un rapport proposant et analysant diverses modalités de réforme de la taxe
d'habitation susceptibles d'aboutir, à compter de l'imposition perçue au titre
de 2000, à un allégement significatif de la charge supportée par les
contribuables. » -
(Adopté.)
Articles additionnels après l'article 14
quater
M. le président.
Par amendement n° I-194, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après
l'article 14
quater
, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le paragraphe I de l'article 1414 du code général des impôts est
complété par un alinéa (4°) ainsi rédigé :
«
4°
A compter de l'année 2000, les jeunes âgés de moins de 25 ans,
dont les revenus sont inférieurs ou équivalents au revenu minimum d'insertion.
»
« II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, le
taux prévu pour la plus haute tranche du tarif fixé à l'article 885 U du code
général des impôts est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement a pour objet de faire bénéficier les jeunes de moins de
vingt-cinq ans ayant des ressources inférieures au revenu minimum d'insertion
du dégrèvement d'imposition à la taxe d'habitation prévu à l'article 1414 du
code général des impôts.
Le bénéfice de cet article est accordé aux personnes âgées de plus de soixante
ans, aux RMIstes, aux contribuables atteints d'une infirmité ou d'un
handicap.
Or, l'évolution économique et sociologique de notre pays amène les jeunes à
poursuivre plus longtemps leurs études, ce qui repousse l'âge d'entrée dans le
monde du travail. Si l'on ajoute à cela le taux de chômage des jeunes et la
grande précarité des premières années de travail, à savoir les questions de
temps partiel, de travail intérimaire, notamment, il est aisé d'imaginer qu'il
est difficile, voire impossible, pour un jeune d'assumer un appartement et les
charges qui s'y attachent.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le gage n'est pas bon, monsieur le président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Chacun sait que les titulaires du revenu minimum
d'insertion - j'en viendrai ensuite au cas des jeunes de moins de vingt-cinq
ans - sont dégrevés à 100 % du montant de la taxe d'habitation, et cela
systématiquement.
C'est certainement dans cet esprit que M. Foucaud propose d'exonérer
totalement de taxe d'habitation les jeunes de moins de vingt-cinq ans, qui ne
peuvent bénéficier du revenu minimum d'insertion.
Je ne peux accepter cette proposition, et ce pour différentes raisons que je
veux exposer en détail.
En premier lieu, la proposition de M. Foucaud ne peut être appliquée que par
référence au revenu porté sur une déclaration souscrite par le jeune.
Dès lors, le dispositif dont vous envisagez l'instauration, monsieur Foucaud,
conduit à traiter de façon différente les jeunes selon qu'ils sont ou non
rattachés au foyer fiscal de leurs parents.
Dans le premier cas, le jeune peut, pour le logement dont il dispose
personnellement, bénéficier des dégrèvements prévus aux articles 1414
bis
à 1414 C du code général des impôts selon le niveau de revenu du foyer
auquel il est rattaché.
Dans le second cas - imposition directe distincte de celle des parents - il
pourrait bénéficier, selon votre proposition, d'une exonération totale de la
taxe afférente à ce logement.
En deuxième lieu, votre proposition peut, par l'incitation qu'elle crée à la
déclaration séparée des revenus du jeune, aboutir à l'octroi d'une exonération
totale de taxe d'habitation pour le logement d'un jeune dont les parents
disposent de revenus élevés. C'est un effet secondaire et non voulu de votre
proposition, mais qui peut apparaître.
En troisième lieu, la collectivité nationale consent déjà un important effort
en faveur de la population visée. Ainsi, les jeunes de moins de vingt-cinq ans
disposant de faibles ressources peuvent bénéficier du dégrèvement partiel de la
taxe d'habitation afférente à leur habitation principale pour la fraction de la
cotisation qui excède 1 500 francs.
Il est vrai que le Gouvernement partage vos préoccupations concernant les
conditions auxquelles est subordonné le bénéfice de l'allégement des
cotisations de taxe d'habitation prévu en faveur des redevables disposant des
revenus les plus faibles.
C'est pourquoi M. Sautter a accepté, lors de l'examen du projet de loi de
finances à l'Assemblée nationale, que la limite au-delà de laquelle la
cotisation de taxe d'habitation est totalement dégrevée soit abaissée de 1 500
francs à 1 200 francs, témoignant ainsi de compréhension au regard de ce que
vous proposez. Je ne crois pas que nous puissions aller au-delà.
Au surplus, les jeunes de moins de vingt-cinq ans qui éprouvent de réelles
difficultés pour s'acquitter des cotisations demeurant à leur charge peuvent
présenter auprès du comptable du Trésor des demandes de délai de paiement ou,
auprès des services des impôts, des demandes de modération ou de remises
partielles ou totales de la cotisation.
Ces mesures grâcieuses me paraissent plus adaptées pour régler des situations
évolutives que l'institution d'un dégrèvement systématique qui serait inopérant
pour les objections essentielles que j'ai évoquées au début de mon propos.
Je vous demande donc de retirer votre amendement.
M. le président.
M. Foucaud, l'amendement est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° I-194 est retiré.
Par amendement n° I-193 rectifié, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après l'article
14
quater,
d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 1414 C du code
général des impôts, le taux : "3,4 %" est remplacé par le taux : "2 %".
« II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, les
taux applicables aux deux plus hautes tranches de l'impôt sur le revenu sont
relevés à due concurrence. »
La parole est à M Loridant.
M. Paul Loridant.
Cet amendement tend à plafonner à 2 % des revenus des contribuables le montant
maximum de la taxe d'habitation.
Ce taux est habituellement de 3,4 %. C'est dire à quel point le montant des
revenus des ménages n'est pas pris en compte dans le calcul de la taxe
d'habitation.
La pression fiscale par rapport à la faculté contributive de chacun atteint
parfois des niveaux exorbitants.
En 1999, un certain nombre de contribuables ont vu leur taxe d'habitation
augmenter fortement.
En dehors des augmentations de taux votés par les collectivités locales, d'une
part, et de la revalorisation du coefficient des valeurs locatives, qui était
de 1 % en 1999, d'autre part, cette progression peut provenir des plafonds de
revenus à ne pas dépasser pour bénéficier des allégements. Ainsi, l'abattement
pour enfant marié ou chargé de famille rattaché, a été réduit de 30 330 francs
à 20 370 francs et la déduction pour pension alimentaire versée à des enfants
majeurs a été plafonnée à 20 370 francs.
Ces éléments, qui entrent dans le calcul du revenu fiscal de référence, ont eu
des répercussions sur la détermination des limites de versement de la taxe
d'habitation en 1999.
Certes, les allégements actuels permettent de limiter la charge de cette taxe,
mais ils peuvent être nettement améliorés. C'est l'objectif de notre
amendement.
L'injustice et l'archaïsme de cet impôt sont reconnus par tous et une réforme
s'impose.
Le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale proposait de supprimer
la part régionale de cette taxe moyennant une compensation de cinq milliards de
francs de l'Etat. Pour sa part, le président de la commission des finances de
l'Association des maires de France dénonçait le remplacement du pouvoir fiscal
local par des subventions d'Etat.
En tout cas, le Gouvernement s'est engagé à présenter un rapport proposant les
modalités d'une réforme en vue d'un allégement significatif de la charge des
contribuables.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous faire part de l'état
d'avancement de ce dossier ?
Quant au calendrier, il semble que la réforme ne puisse être envisagée avant
le budget pour 2002.
Si nous regrettons que les réformes fiscales avancent au rythme des échéances
électorales, nous espérons que le temps sera mis à profit pour construire une
réforme ambitieuse, englobant une révision des valeurs locatives qui tienne
compte des améliorations de l'habitat depuis 1970.
Pour l'heure, avec cet amendement, nous vous proposons de plafonner à 2 % des
revenus des familles la charge de la taxe d'habitation. Cette solution a
également le mérite de ne pas toucher à l'autonomie fiscale des collectivités
locales. Elle nous semble être la meilleure. C'est pourquoi nous invitons la
Haute Assemblée à adopter notre amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement reprend un amendement présenté l'année
dernière, qui avait été retiré après un avis défavorable de la commission et
une demande de retrait formulée par le Gouvernement. M. Sautter avait dit : «
Il s'agit d'un amendement d'appel ».
Monsieur le secrétaire d'Etat, avez-vous entendu le message et, si oui,
envisagez-vous, compte tenu des relations, parfois complexes, que vous avez
avec votre majorité plurielle, d'aller plus loin que l'écoute ?
M. Paul Loridant.
C'est pire de votre côté !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je ne voudrais pas être un témoin indiscret de vos
relations, parfois compliquées
(Exclamations sur les travées
socialistes),
permettez-moi néanmoins d'être un observateur intéressé. C'est pourquoi je
serais heureux d'entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je tiens d'abord à rassurer M. le rapporteur général :
la majorité plurielle est unie, elle est dynamique et elle obtient des
résultats lorsqu'elle propose des avancées sociales ; je vais vous le prouver
immédiatement.
M. Marcel Charmant.
Bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'abaissement des pourcentages de 3,4 % à 2 %
introduirait une grande incohérence dans le dispositif de prise en charge par
l'Etat de la personnalisation de la taxe d'habitation. Il en résulterait, au
sein des mécanismes de dégrèvement, que plus le revenu du contribuable serait
élevé, moins il devrait consacrer une part importante de son revenu à la taxe
d'habitation. Ce dispositif ne ferait qu'accroître les inégalités de la taxe
d'habitation, que l'auteur de l'amendement dénonçait voilà un instant.
Nous avons donc écouté d'autres propositions de la majorité plurielle. Elles
ont d'ailleurs souvent émané soit du groupe socialiste, soit du groupe
communiste, soit du groupe communiste républicain et citoyen, et nous nous
sommes engagés dans une réforme plus large de la taxe d'habitation. Dans
l'immédiat, sans préjudice de ce que nous nous ferons dans l'avenir - je
rappelle à cet égard les derniers propos de M. le Premier ministre concernant
l'évolution de l'impôt sur le revenu, de l'imposition locale et notamment de la
taxe d'habitation - nous avons d'abord accepté que la limite au-delà de
laquelle la cotisation de taxe d'habitation est totalement dégrevée soit
abaissée de 1 500 à 1 200 francs, ce qui touchera les plus modestes d'entre nos
concitoyens. Cela coûtera 500 millions de francs. Vous voyez quel est le prix
de l'expression de la majorité plurielle en termes de dépense fiscale ! Elle ne
se limite pas à de petits amendements.
De même, nous avons proposé le maintien du bénéfice du dégrèvement total de la
taxe d'habitation pour les Rmistes dans l'année qui suit leur retour à
l'emploi. Là encore, ce sont 400 millions de francs de dépenses fiscales. C'est
dire que nous écoutons notre majorité et que les inflexions fortes que nous
donnons au système d'imposition locale sont toutes ordonnées en faveur de la
dynamique de l'emploi et de celle de la justice sociale.
Au demeurant, monsieur le rapporteur général, le Gouvernement fournira au
Parlement avant le mois d'avril 2000 un rapport sur la taxe d'habitation,
rapport dans lequel il évaluera les conséquences de l'ensemble des dispositifs
qui, au fil du temps, ont été apportés comme autant de modifications, de
plafonnements, de décotes.
Nous ferons alors le point avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour
examiner dans quelle mesure il faut aller plus loin pour que la taxe
d'habitation soit moins injuste et plus adaptée à la faculté contributive
réelle des contribuables locaux.
M. Philippe Marini,
rapporteur.
Et l'amendement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
J'ai déclaré au début de mon propos que j'y étais
hostile.
(M. le président de la commission des finances et M. le rapporteur
général s'esclaffent.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est intéressant, je ne l'avais pas entendu.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il convient de le rejeter s'il n'est pas retiré,
compte tenu des progrès allant dans le sens souhaité par le groupe communiste
républicain et citoyen que le Gouvernement a engagés par les deux mesures que
je viens de rappeler.
M. le président.
Monsieur Loridant, l'amendement n° I-193 est-il maintenu ?
M. Paul Loridant.
A entendre les propos du rapporteur général, qui est très soucieux des
relations au sein de la majorité plurielle, j'ai cru comprendre que, dans
l'opposition ou dans la majorité sénatoriale, tout était rose et qu'il n'y
avait aucun problème.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le rose, ce n'est pas notre couleur favorite !
(Sourires.)
M. Paul Loridant.
Je voudrais le rassurer, en lui disant que la dialectique peut exister au sein
de la majorité plurielle et que le débat fait progresser le dialogue.
J'ai bien écouté l'analyse qu'a faite de notre amendement M. le secrétaire
d'Etat, le rappel des mesures qui ont été prises par le Gouvernement, ainsi que
l'annonce du dépôt prochain du rapport sur la taxe d'habitation.
Des avancées sociales importantes, j'en conviens, ont été traduites dans le
projet de loi de finances, en particulier sur l'initiative des députés. Dans
ces conditions, même si nous souhaitons aller un peu plus loin, faisant
confiance au Gouvernement pour reprendre le sujet le moment venu, je retire cet
amendement.
M. le président.
L'amendement n° I-193 rectifié est retiré.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° I-292, MM. Mercier et Marini, au nom de la commission des
finances, proposent, après l'article 14
quater,
d'insérer un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le II de l'article 1641 du code général des impôts est complété par un
alinéa ainsi rédigé :
« A compter de 2000, ce taux est réduit à 4,2 % pour la taxe d'habitation, 2,1
% pour les taxes foncières et 1 % pour la taxe professionnelle. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I est
compensée par une majoration, à due concurrence, des droits visés aux articles
575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-262, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Gaillard, Joyandet, Ostermann, Tregouët et Chérioux proposent, après l'article
14
quater,
d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le II de l'article 1641 du code général des impôts est ainsi rédigé
:
«
II.
- Pour frais d'assiette et de recouvrement, l'Etat perçoit 5 % du
montant des taxes visées au I ainsi que de la taxe d'habitation due pour les
locaux meublés affectés à l'habitation principale. Ce taux est réduit à 4 %
pour les impositions perçues au profit des collectivités locales et de leurs
groupements. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du code général des impôts.
»
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n°
I-292.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est sur l'initiative de Michel Mercier que la
commission a décidé de déposer cet amendement.
Il vise à réduire réellement la pression fiscale sur les contribuables locaux.
En effet, nous estimons qu'il faut prendre en compte le montant réel des frais
d'assiette et de recouvrement pour le calcul du prélèvement de l'Etat sur les
impositions perçues par les collectivités locales et leurs groupements.
Mes chers collègues, nous constatons, depuis des années, une situation
absolument injustifiable d'enrichissement sans cause de l'Etat sur le dos du
contribuable et des collectivités locales : l'Etat perçoit 4,4 % du produit des
taxes directes locales au titre des frais d'assiette et de recouvrement, alors
qu'un récent rapport de l'administration, en l'espèce de l'inspection générale
des finances, dont je ne saurais, bien entendu, mettre la perspicacité en
doute, évalue le coût de gestion pour l'Etat à 4,17 % pour la taxe
d'habitation, 2,03 % pour les taxes foncières et 1 % pour la taxe
professionnelle. Cela signifie que, au-delà de ces taux, le prélèvement est
véritablement indû et constitue une ressource de poche sans base pour
l'Etat.
C'est une situation totalement inadmissible, monsieur le secrétaire d'Etat :
on trompe le contribuable en faisant figurer sur chaque feuille d'impôts locaux
cette rubrique « frais d'assiette », « frais de prélèvement » au profit de
l'Etat, comme si les sommes dont il s'agit représentaient bien la réalité
desdits frais.
M. André Lejeune.
Ce n'est pas nouveau !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mais ne souhaitez-vous pas que cela cesse ? Etes-vous
pour plus de justice, plus d'équité ? Il est toujours temps de faire mieux, mes
chers collègues !
Si vous êtes favorable aux prélèvements qui ne disent pas leur nom, si vous
êtes favorable aux mécanismes de fiscalité rampante, dites-le ! Mais vous êtes
d'ailleurs en train de le dire, montrant par là la conception que vous avez
d'une certaine gestion de l'Etat, qui n'est pas acceptable !
Il n'est pas normal en effet, mes chers collègues, que l'Etat prélève, au
détriment des contribuables locaux, des sommes supérieures à des frais de
gestion réels. C'est inadmissible du point de vue de la transparence due à nos
concitoyens.
Si vous trouvez cela bien, assumez votre position, dites-le aux contribuables
locaux !
La commission des finances, elle, demande instamment que le prélèvement de
l'Etat corresponde aux frais de gestion réels. C'est pourquoi nous avons déposé
cet amendement, que nous soutenons vigoureusement.
M. Marcel Charmant.
Nous l'avons vu !
M. le président.
La parole est à M. Cazalet, pour défendre l'amendement n° I-262.
M. Auguste Cazalet.
Pour financer la révision des bases locatives, l'Etat opère un prélèvement sur
le produit des impôts locaux. Cet amendement propose de supprimer ce
prélèvement.
En effet, les frais engagés par l'Etat à cette fin doivent maintenant être
amortis étant donné le temps écoulé depuis les permières études. Si d'autres
études ou d'autres travaux doivent être élaborés, le financement pourra être
opéré par le budget de l'Etat sans qu'il y ait lieu de ponctionner à nouveau
les collectivités locales et les contribuables.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 1-262 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nos collègues ont raison de poser ce problème, mais
la commission pense qu'il serait suffisant qu'ayant exprimé ce point de vue,
justifié dans son principe, ils se rallient à l'amendement que j'ai présenté il
y a quelques instants.
M. Auguste Cazalet.
Je m'y rallie.
M. le président.
L'amendement n° 1-262 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1-292 ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Après le plaidoyer vibrant de M. le rapporteur
général, j'ai le devoir moral, pardonnez-moi l'expression, de remettre les
pendules à l'heure.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ah !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je vais donc comparer les ressources, frais d'assiette
et de recouvrement et frais de dégrèvement perçus par l'Etat, aux emplois
auxquels celui-ci procède pour aider les collectivités locales à assurer leur
gestion.
Dans la colonne de gauche de mon tableau figurent les ressources.
M. Emmanuel Hamel.
Colonne de gauche !
(Sourires.)
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
J'y vois : frais d'assiette et de recouvrement :
15,669 milliards de francs ; frais de dégrèvement : 10,496 milliards de francs,
soit, au total, 26 milliards de francs ; ressources, frais divers perçus - vous
venez de les critiquer - 26 milliards de francs.
Dans la colonne emploi, je lis : coût de la gestion, environ : 6,5 milliards
de francs ;...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est cher !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Trop cher !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... dégrèvements : 60 milliards de francs ; diverses
compensations, comme la DCTP : 40 milliards de francs ; total : 106,6 milliards
de francs.
Ce sont donc 106,6 milliards de francs de compensations, de dégrèvements et de
coûts de gestion qui sont affectés aux collectivités locales contre 26
milliards de francs de ressources, frais d'assiette et frais de dégrèvement.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le raisonnement n'est pas convaincant !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le bilan est éloquent : la comparaison entre les
ressources et les emplois se fait très largement au profit des collectivités
locales. CQFD !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Oh !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances
Non, non !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
D'autre part, s'agissant des ménages, les dégrèvements
en faveur des redevables les plus modestes - on l'a dit à l'envi ce soir - ont
été aménagés pour que la limite au-delà de laquelle la cotisation de taxe
d'habitation est totalement dégrevée soit abaissée de 1 500 francs à 1 200
francs.
De même, il a été proposé de maintenir le bénéfice du dégrèvement total pour
les RMIstes dans l'année qui suit leur retour à l'emploi. Je rappelle qu'un
rapport permettant d'évaluer correctement l'ensemble de ces questions sera
déposé en avril 2000.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous sommes sauvés !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
En tout cas, 106,6 milliards de francs au profit des
collectivités locales contre 26 milliards de francs de prélèvement... il n'y a
plus qu'à fermer le ban, monsieur le rapporteur général !
M. James Bordas.
C'est un peu fort !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Vous avez eu tort d'annoncer, tout à l'heure, dans les
termes dans lesquels vous l'avez fait, que les collectivités locales étaient «
spoliées ». C'est exactement l'inverse qui se produit.
Je réaffirme le soutien qu'apporte l'Etat aux collectivités locales et la
politique globale que nous menons en faveur des collectivités locales,
politique manifestement très en leur faveur.
Pour répondre à une objection que vous aviez faite tout à l'heure en ce qui
concerne la réforme de la taxe professionnelle, je suis heureux de vous
apporter cette précision chiffrée : les ressources des collectivités locales
seront supérieures de près de 400 millions de francs en 1999 à ce qu'elles
auraient été en l'absence de réforme.
Par ailleurs, puisque vous avez aussi évoqué cette question, les grandes
entreprises bénéficieront à terme de cette réforme à travers une baisse moyenne
de 35 % de leurs charges au titre de la taxe professionnelle. Si cela ne
constitue pas une mesure favorable à l'emploi, je me demande quelles mesures
fiscales pourraient l'être !
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Sans tenir compte de la suppression de la REI !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-292.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
J'étais tenté, je l'avoue, de ne pas voter l'amendement de la commission.
Cependant, c'est la réponse même de M. le ministre qui m'a convaincu qu'il
fallait que je le vote.
J'ai fait des calculs concernant les dégrèvements et les frais d'assiette.
S'agissant des dégrèvements, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez dit que
vous mettiez 10 milliards de francs dans votre colonne de gauche et environ 63
milliards de francs dans votre colonne de droite.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
C'est cela !
M. Yves Fréville.
Dans les
Notes bleues
, une excellente publication, je lis en effet,
pour 1998 : 62,997 milliards de francs.
Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, vous confondez deux choses.
Chaque fois que vous nous faites voter une réduction d'impôt - et nous l'avons
encore fait avec les droits de mutation -, vous nous dites : l'Etat va devoir
payer !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Et vous nous envoyez la facture
!
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est extraordinaire !
M. Yves Fréville.
Ça, ce sont les dégrèvements législatifs, que vous confondez avec une autre
forme de dégrèvements, lesquels font effectivement l'objet d'une péréquation
entre contribuables locaux : les dégrèvements individuels, qui s'élèvent, eux,
à moins de 10 milliards de francs.
Par conséquent, votre raisonnement est complètement biaisé. En réalité, vous
voulez tout simplement dire que c'est le contribuable local, en payant ces 10
milliards de francs de dégrèvement, qui devrait combler les 50 milliards de
francs de dégrèvement que vous nous faites voter chaque fois que vous réduisez
un impôt local !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
C'est le sapeur Camember !
M. Yves Fréville.
Permettez-moi de vous dire, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il y a tout de
même là une exagération, et vous en percevez sûrement vous-même tout le sel.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est inacceptable !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
C'est sans doute de l'humour
!
M. Yves Fréville.
Je formulerai une deuxième observation qui portera sur les frais d'assiette, à
la suite de la très juste remarque de notre collègue Cazalet.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai été tout à fait étonné de constater que,
dans les services fiscaux, depuis 1990, on continuait à tenir en double toute
la fiscalité locale, ce qui revient à dire qu'on calcule, pour chaque
habitation, à la fois selon l'ancienne base et selon la nouvelle base.
Permettez-moi de vous suggérer une économie très simple : faites la révision
des bases et vous aurez au moins ainsi une réduction des frais d'assiette !
Je pense que, dans ce domaine, la position de la commission est tout à fait
sage et que le raisonnement que vous avez tenu, en particulier sur les
dégrèvements, pardonnez-moi de vous le dire, ne tient pas la route.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-292 repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 14
quater.
Article 15
M. le président.
L'article 15 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais, par amendement n° I-34, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de le rétablir dans la rédaction suivante :
« Le tarif prévu à l'article 885 U du code général des impôts est ainsi
modifié :
FRACTION DE LA VALEUR
nette taxable du patrimoine
TARIF APPLICABLE
(en pourcentage)
N'excédant pas 4 730 000 F 0
Comprise entre 4 730 000 F et 7 680 000 F 0,55
Comprise entre 7 680 000 F et 15 240 000 F 0,75
Comprise entre 15 240 000 F et 23 660 000 F 1
Comprise entre 23 660 000 F et 45 810 000 F 1,3
Comprise entre 45 810 000 F et 100 500 000 F 1,65
Supérieure à 100 500 000 F 1,8
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mes chers collègues, là encore, la commission
voudrait seconder le Gouvernement dans ses efforts.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Quelle sollicitude !
M. Philippe Marini.
rapporteur général.
La commission exprime sa solidarité avec le ministre
Dominique Strauss-Kahn, qui avait fait des propositions très avisées dans le
premier état du projet de loi de finances. Nous souhaitons en effet rétablir
l'indexation de la cotisation due au titre de l'ISF, l'impôt de solidarité sur
la fortune, sur l'évolution des prix telle qu'elle figurait dans les
propositions conservatoires - et avisées, je le répète - du précédent ministre
de l'économie, des finances et de l'industrie.
La loi de finances pour 1999 avait, on s'en souvient, particulièrement alourdi
le poids des cotisations à l'ISF. A l'époque, la commission des finances avait
émis de nombreuses réserves. Non seulement nous nous montrions sceptiques
devant les chiffres annoncés, mais nous avions critiqué l'utilisation
idéologique de cet impôt et souligné les dangers d'un rejet de ce dernier par
les contribuables concernés.
Les derniers chiffres publiés par le Gouvernement concernant le rendement de
l'impôt de solidarité sur la fortune nous donnent totalement raison. Ainsi, son
produit ne serait pas, en 1999, de 14,9 milliards de francs, comme M. Sautter
l'annonçait l'année dernière, mais seulement de 12,5 milliards de francs, alors
même que le marché de l'immobilier a repris, que le barème a augmenté, qu'une
tranche nouvelle a été créée et que les valeurs mobilières ont connu une
progression très dynamique tout au long de l'année 1998.
Où les bases sont-elles passées, monsieur le secrétaire d'Etat ? L'impôt ne
commence-t-il pas à tuer l'impôt ? On peut logiquement se demander si les
mesures d'alourdissement de l'ISF n'ont pas atteint leur limite, et si ce
dernier ne devient pas, du fait de son excès, un impôt à rendement
décroissant.
C'est en vertu de cette analyse que la commission des finances avait constaté
avec satisfaction que le projet de loi de finances initial ne comportait aucune
nouvelle mesure d'alourdissement de l'ISF, mais prévoyait au contraire de
relever les seuils des tranches d'imposition du barème en proportion de la
hausse prévisible des prix en 1999, soit 0,5 %, et ce pour la première fois en
trois ans.
Or l'Assemblée nationale, sous l'effet de ses emportements idéologiques
habituels, a rejeté l'actualisation du barème de l'ISF, et cette décision se
justifie moins par une recherche d'équité que par le souci de faire bonne
figure vis-à-vis de certains éléments de l'électorat de la majorité
plurielle.
La commission des finances ne peut que juger cette attitude dangereuse. C'est
pourquoi elle vous propose, mes chers collègues, de rétablir l'article qui
figurait opportunément dans le projet de loi de finances initial.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'Assemblée nationale a souhaité supprimer
l'indexation du barème de l'ISF sur la hausse des prix. Je n'ai pas de
commentaire à faire.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-34.
M. Paul Loridant.
Je demande un scrutin public, monsieur le président.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-34, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste
républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
18:
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 313 |
Majorité absolue des suffrages | 157 |
Pour l'adoption | 214 |
Contre | 99 |
En conséquence, l'article 15 est rétabli dans cette rédaction.
Articles additionnels après l'article 15
M. le président.
Par amendement n° I-195, présenté par Mme Beaudeau, MM. Loridant, Foucaud et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer,
après l'article 15, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions du dernier alinéa de l'article 885 A du code général
des impôts sont remplacées par les dispositions suivantes :
« A compter d'une valeur de 6 000 000 francs, les biens professionnels sont
pris en compte pour l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune. Leur
valeur est toutefois l'objet d'un abattement de 50 % et est intégrée à
l'assiette imposable selon les règles définies à l'article 885 U
bis
.
»
« II. - Après l'article 885 U du même code, il est inséré un article 885 U
bis
ainsi rédigé :
«
Art. 885 U
bis. - Les biens professionnels sont inclus dans les bases
de l'impôt pour 50 % de leur valeur. Le taux d'intégration varie pour chaque
contribuable en fonction de l'évolution du ratio masse salariale/valeur ajoutée
des sociétés et entreprises où sont situés les biens professionnels qu'ils
possèdent sur la base suivante :
ÉVOLUTION DU RATIO
Masse salariale/valeur ajoutée
% TAUX
d'intégration
Egale ou supérieure à une évolution de 2 points 15
Egale ou supérieure à une évolution de 1 point 35
Egale à 1 50
Entre 1 et - 1 65
Entre - 1 et - 2 85
Entre - 2 et - 3 100
Entre - 3 et - 4 et au-delà 125
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement, qui porte sur l'assiette de l'impôt de solidarité sur la
fortune, est la traduction de l'une de nos positions de principe sur la réforme
nécessaire de notre fiscalité directe.
Nous avions déja eu l'occasion, lors de la discussion de la loi de finances
pour 1999, de soutenir cette proposition.
Il est en effet indispensable que l'impôt de solidarité sur la fortune cesse
d'être aussi peu représentatif de la réalité du patrimoine des contribuables
assujettis.
L'intégration des actifs professionnels constitue une condition d'un retour à
l'égalité de traitement entre contribuables de l'impôt de solidarité sur la
fortune.
Il est grand temps de mettre fin au fait que, s'abritant derrière leurs
fonctions de dirigeant d'entreprise, un grand nombre de contribuables
bénéficient d'une exemption fiscale qui est refusée par les textes aux
détenteurs minoritaires de parts sociales ou aux détenteurs majoritaires
n'exerçant pas de fonctions dirigeantes.
Notre proposition d'intégration est assortie d'un traitement innovant de la
base d'imposition. Il s'agit de moduler l'intégration des actifs professionnels
concernés en fonction de critères d'efficacité sociale dans leur gestion
quotidienne.
Selon que l'utilisation de ces actifs par leurs détenteurs aura contribué ou
non à l'investissement, à la création d'emplois ou au relèvement du niveau des
salaires, la base d'intégration sera plus ou moins importante.
Notre objectif est d'accroître, dans un premier temps, le rendement de l'impôt
de solidarité sur la fortune, d'en équilibrer l'efficacité et de
responsabiliser les détenteurs de patrimoine au regard des intérêts de la
collectivité.
On observera que le rendement de l'impôt de solidarité sur la fortune n'a pas
été, en 1999, tout à fait à la hauteur de ce qui était attendu au moment où a
été votée la loi de finances de cette année.
Nous pensons que cette situation, au-delà de la délocalisation éventuelle des
patrimoines, est en grande partie imputable au fait que cette mesure, que nous
préconisions déjà l'an dernier, n'a pas été retenue.
S'agissant de la délocalisation, je suis enclin à m'interroger sur le
patriotisme des détenteurs de patrimoine ; les deux mots ont la même racine
mais ils n'ont pas manifestement la même portée pour ceux qui optent pour
l'émigration !
L'impôt de solidarité sur la fortune n'a rien de confiscatoire. On ne
rappellera jamais assez qu'il s'agit d'un impôt déclaratif. D'ailleurs,
l'évaluation des biens fait l'objet d'un contentieux nourri.
Quoi qu'il en soit, notre proposition est susceptible de renforcer la portée
de l'ISF, y compris sa portée symbolique, et d'asseoir sa légitimité dans notre
paysage fiscal.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission est d'un avis franchement défavorable,
monsieur le président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il faut être courageux, et je vais dire ici, une fois
de plus, ce que je pense profondément.
M. Fabius, à l'époque ministre du budget, et moi-même, alors rapporteur
général à l'Assemblée nationale, sommes à l'origine de l'exonération des biens
professionnels pour l'impôt de solidarité sur la fortune. Nous avons eu raison
d'exonérer les biens professionnels, et les effets sur l'économie seraient
entièrement négatifs si nous faisions entrer aujourd'hui les biens
professionnels dans l'assiette de cet impôt. L'ISF mérite que l'on ne retouche
pas sans cesse son régime et qu'on lui assure un parcours long et stable, sans
le « polémiquer », sans le « polémiser », si vous me permettez ces expressions
audacieuses.
Pour ce faire, il ne faut pas, chaque année, chercher à le raffiner, à
l'adoucir, à le durcir, bref, à le changer.
Telle est ma conviction, et je suis heureux de l'exprimer, même si cela
m'interdit de rejoindre le groupe communiste républicain et citoyen sur cette
question. Mesdames, messieurs les sénateurs, je crois qu'il faut en rester là
et assurer à cet impôt le même rythme de croisière pendant plusieurs années,
afin qu'il soit définitivement inclus, sans polémique et sans contestation,
dans le paysage fiscal de notre pays.
M. Emmanuel Hamel.
Déclaration courageuse, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-195, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° I-252, MM. Gaillard, Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont,
Delong, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article
15, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 885 P du code général des impôts est complété par une phrase
ainsi rédigée :
« Il en est de même lorsque le bail à long terme est consenti à une société
contrôlée par une ou plusieurs de ces personnes exerçant, au sein de cette
société, leur profession principale. »
« L'article 885 Q du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en est de même lorsque le bail à long terme est consenti à une société
contrôlée par une ou plusieurs de ces personnes exerçant, au sein de cette
société, leur profession principale. »
« III. - L'éventuelle perte des recettes pour le budget de l'Etat résultant
des I et II ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des
droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Cazalet.
M. Auguste Cazalet.
Les immeubles utilisés par leurs propriétaires dans l'exercice de leur
profession principale sont exonérés de l'impôt de solidarité sur la fortune.
Il en est de même des immeubles loués par bail à long terme au conjoint du
propriétaire, à ses ascendants ou ses descendants ou à ses frères et soeurs,
lorsque le preneur utilise ces biens pour l'exercice de sa profession
principale. La même exonération s'applique, sous certaines conditions, aux
parts de groupement familial ayant consenti un bail à long terme au détenteur
des parts ou à un membre de son groupe familial.
En revanche, lorsque le bail à long terme est consenti à une société
d'exploitation contrôlée par les membres du groupe familial qui y exercent leur
profession principale, l'exonération n'est pas applicable.
Il est proposé de mettre fin à cette incohérence qui pénalise les sociétés
familiales, alors que le recours à cette formule facilite la transmission des
entreprises et en favorise la pérennité.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est un excellent amendement. La commission y est
tout à fait favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je ne saurais me rallier à cet amendement, que je
demande au Sénat de rejeter.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-252, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 15.
Par amendement n° I-251, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong,
Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 15, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 885 O
bis
du code général des impôts est complété par
un alinéa ainsi rédigé :
« ... Par dérogation aux 1° et 2° du présent article, sont également
considérés comme des biens professionnels, dans la limite d'un million de
francs, les parts ou actions de sociétés acquises dans le cadre d'une opération
de souscription au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés,
créées depuis moins de cinq ans à la date de la souscription. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I
ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une
taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du code général des impôts.
»
La parole est à M. Cazalet.
M. Auguste Cazalet.
A l'heure où la France crée de moins en moins d'entreprises chaque année, et
ce en dépit de la croissance économique, il convient d'adopter des dispositifs
plus incitatifs pour développer les investissements dans les petites et
moyennes entreprises.
Cet amendement assimile à des biens professionnels les titres de sociétés
créées depuis moins de cinq ans acquis par un investisseur, dans une limite
d'un million de francs, soit lors de la création de la société, soit à
l'occasion d'une augmentation de capital.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous pouvons considérer que cet amendement est
satisfait par l'amendement n° I-289, qui, précédemment adopté par le Sénat, est
devenu l'article 5
ter
de ce texte.
M. Cazalet peut, en conséquence, retirer son amendement.
M. Auguste Cazalet.
Dans ces conditions, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° I-251 est retiré.
Par amendement n° I-35, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose d'insérer, après l'article 15, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article 885 V
bis
du
code général des impôts est supprimée.
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I
ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des droits prévus
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° I-152 rectifié, présenté
par MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et
les membres du groupe des Républicains et Indépendants, et tendant à insérer,
après le I de l'amendement n° I-35, un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Le premier alinéa de cet article est complété par une phrase ainsi
rédigée :
« Il est tenu compte de la contribution sociale généralisée et de la
contribution pour le remboursement de la dette sociale dans le calcul du
plafonnement de la cotisation de l'impôt de solidarité sur la fortune. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n°
I-35.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
On le sait, la loi de finances pour 1989 avait
introduit un plafonnement de la cotisation de l'impôt de solidarité sur la
fortune pour éviter que le montant de l'impôt dû n'excède les revenus.
Il avait été alors décidé, que le montant de l'impôt global dû au titre de
l'impôt de solidarité sur la fortune, de l'impôt sur le revenu des personnes
physiques et du prélèvement libératoire ne devait pas dépasser 70 % du revenu
annuel global. Le taux de plafonnement avait été porté à 85 % dans la loi de
finances pour 1991.
C'est malencontreusement l'article 5 de la loi de finances pour 1996 qui a
limité les effets du mécanisme de plafonnement de la cotisation d'impôt de
solidarité sur la fortune en fonction du revenu disponible.
La commission des finances du Sénat a, sur ce sujet, une position constante.
Elle a déjà fait remarquer que la mise en oeuvre de cette mesure a pour
résultat, dans certains cas, d'obliger les contribuables à aliéner une partie
de leur patrimoine pour s'acquitter de leur cotisation au titre de l'impôt de
solidarité sur la fortune, et a souligné le risque croissant de délocalisation
de nombreuses fortunes.
Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1997, notre assemblée
avait adopté un amendement visant à revenir au régime de plafonnement de 1991.
Le gouvernement de l'époque a été sans doute mal inspiré,...
M. Roland du Luart.
Sûrement !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
... car il n'a pas soutenu notre initiative jusqu'au
bout, comme il aurait dû le faire, et l'Assemblée nationale n'y a pas souscrit.
Nous avions été nombreux à l'époque à déplorer une telle situation.
Cette année, aucun débat n'a eu lieu à l'Assemblée nationale sur une
éventuelle suppression de la limitation des effets du plafonnement lors de
l'examen des articles de la première partie. Pourtant, face au résultat assez
décevant - j'ai cité les chiffres tout à l'heure - du rendement de l'ISF pour
1999, certaines voix s'étaient élevées au sein même de votre majorité
plurielle, monsieur le secrétaire d'Etat, pour s'interroger sur l'opportunité
de revenir sur une telle limitation du plafonnement de la cotisation d'ISF.
La commission des finances, fidèle à sa position constante, demande donc au
Sénat d'adopter cet amendement, c'est-à-dire de maintenir la ligne qu'elle a
toujours fait prévaloir sur ce sujet.
M. le président.
La parole est à M. du Luart, pour défendre le sous-amendement n° I-152
rectifié.
M. Roland du Luart.
Mon argumentation est exactement la même que celle de M. le rapporteur
général. Simplement, je considère qu'il faut, pour être objectif et aller
jusqu'au fond des choses, intégrer dans nos méthodes de calcul les transferts
de fiscalité entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité
sociale. En effet, aujourd'hui, la contribution sociale généralisée n'est pas
prise en compte, alors que son poids dans les prélèvements obligatoires n'a
cessé de croître.
Aussi, je considère qu'il faut remédier à cette situation dans un souci
d'équité afin que le système de plafonnement de la cotisation sur l'impôt de
solidarité sur la fortune ne soit pas contourné.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai entendu avec beaucoup d'intérêt ce que
vous aviez dit lorsque vous étiez rapporteur général du budget en 1982. Vous
aviez parfaitement compris qu'il fallait ménager certaines échappatoires,
notamment avec les biens professionnels, en faveur des chefs d'entreprise. Cela
étant, je suis persuadé que, lorsque M. Rocard a réintroduit le plafonnement en
1990, il ne souhaitait pas plus la spoliation.
Nous devons déjà cumuler les erreurs commises par les gouvernements, de gauche
comme de droite - M. Marini l'a rappelé précédemment, le gouvernement Juppé a
commis des erreurs fâcheuses dans la loi de finances de 1996...
M. Emmanuel Hamel.
Oh que oui !
M. Roland du Luart
... et, aujourd'hui, il nous faut de surcroît compter avec la contribution
sociale généralisée, qui vient aggraver encore la situation au point que de
nombreux détenteurs de patrimoine arrivent aujourd'hui à payer plus d'impôts
qu'ils n'ont de revenus ! Comment cela se traduit-il ? Certains quittent la
France et décident d'aller créer de la valeur ajoutée ailleurs.
Voilà contre quoi je m'élève. Tout d'abord, plus d'équité est nécessaire, car
l'impôt ne doit pas être spoliateur. Ensuite, nous devons faire en sorte de
préserver l'avenir en n'incitant pas la richesse à s'en aller produire dans les
autres pays.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° I-152 rectifié ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° I-35 et sur le
sous-amendement n° I-152 rectifié ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Pour la raison que j'évoquais tout à l'heure en ce qui
concerne les biens professionnels, je milite en faveur d'une stabilité de
l'impôt de solidarité sur la fortune pour qu'il soit établi définitivement et
sans conteste dans notre paysage fiscal. C'est pourquoi je suis hostile à ce
qui pourrait le durcir comme ce qui pourrait l'alléger, le risque étant, dans
un cas comme dans l'autre, que cet impôt ne s'en trouve fragilisé.
C'est la raison pour laquelle je demande le rejet de l'amendement comme du
sous-amendement de M. du Luart, non sans lui avoir précisé qu'une instruction
très récente, du 1er juin 1999, sur l'impôt de solidarité sur la fortune, lui
donne satisfaction. On y lit le paragraphe suivant : « Il est admis que les
prélèvements et contributions additionnels à l'impôt sur le revenu,
c'est-à-dire la contribution sociale généralisée, les contributions pour le
remboursement de la dette sociale et le prélèvement social de 2 % dû au titre
de l'année précédant celle de l'imposition à l'impôt de solidarité sur la
fortune, à raison des revenus perçus par chaque membre du foyer fiscal au sens
de l'impôt de solidarité sur la fortune, doivent être inclus dans les impôts à
prendre en compte pour le calcul du plafonnement. » Vous avez donc désormais
satisfaction, monsieur du Luart, depuis quelques mois. Sous l'ancien système,
en effet, la solution administrative n'était pas la même.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° I-152 rectifié.
M. Roland du Luart.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart.
Je suis très intéressé par ce que vient de nous dire M. le secrétaire d'Etat
car, finalement, étant donné que cette instruction est parue au début du mois
de juin et que l'impôt était exigible au 15 juin, elle n'a pas pu être
appliquée pour le calcul de l'impôt dû au titre de 1998, les contribuables n'en
ayant pas eu connaissance au moment d'établir leur déclaration, à part
peut-être quelques conseillers spécialisés. C'est d'ailleurs la première fois
que j'entends moi-même parler d'une telle instruction.
C'est une excellente chose si elle peut s'appliquer à partir de l'année
prochaine parce que, vous en conviendrez avec moi, il y avait véritablement
abus dans la mesure où, avec un taux de 10 %, on dépassait la capacité
contributive des contribuables.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je souhaite préciser à M. du Luart que, la déclaration
d'impôt de solidarité sur la fortune s'effectuant avant le 15 juin de l'année
qui suit l'évaluation de la fortune et cette circulaire datant elle-même du 1er
juin 1999, les dispositions dont je viens de donner connaissance au Sénat ont
été appliquées aux éléments de patrimoine constatés au 31 décembre 1998.
M. Roland du Luart.
Pour ceux qui étaient au courant !
M. le président.
Monsieur du Luart, le sous-amendement n° I-152 rectifié est-il maintenu ?
M. Roland du Luart.
Le
Journal officiel
en fera foi, ce sous-amendement n'a plus de raison
d'être, si j'en juge par les propos retenus par M. le secrétaire d'Etat. Je
laisse à la commission le soin de décider pour le reste.
Je persiste cependant à penser que seuls quelques heureux initiés ont eu
connaissance de l'instruction en question. En effet, vous le savez, on a bien
trop peur du fisc pour attendre le dernier jour et rédiger
in extremis
sa déclaration. Donc, entre le 1er juin et le 15 juin, ces dispositions
nouvelles n'ont pas pu être diffusées auprès de chaque assujetti.
Monsieur le secrétaire d'Etat, sera-t-il possible d'obtenir un remboursement
?
(Sourires.)
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Absolument !
M. Roland du Luart.
Eh bien, il y aura du travail ! Cela étant, je retire le sous-amendement.
M. le président.
Le sous-amendement n° I-152 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-35, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 15.
Articles 15
bis
et 16
M. le président.
« Art. 15
bis.
- L'article 885-I du code général des impôts est ainsi
modifié :
« 1° Dans le premier alinéa, les mots : "et les droits de la propriété
littéraire et artistique" sont supprimés ;
« 2° Il est ajouté un dernier alinéa ainsi rédigé :
« Les droits de la propriété littéraire et artistique ne sont pas compris dans
la base d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune de leur auteur.
Cette exonération s'applique également aux droits des artistes-interprètes, des
producteurs de phonogrammes et des producteurs de vidéogrammes. » -
(Adopté.)
« Art. 16. - A. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Les articles 302
bis
L et 302
bis
M sont abrogés ;
« 2° L'article 302
bis
X est abrogé ;
« 3° Les articles 562 et 562
bis
sont abrogés ;
« 4° L'article 1582
bis
et le II de l'article 1699 sont abrogés.
« B. - A l'article L. 178 du livre des procédures fiscales, les mots : "et la
taxe annuelle sur les jeux de boules et de quilles comportant des dispositifs
électromécaniques prévue à l'article 1582
bis
du même code" sont
supprimés.
« C. - Le premier alinéa de l'article 24 de la loi n° 67-1175 du 28 décembre
1967 portant réforme du régime relatif aux droits de port et de navigation est
ainsi rédigé :
« Les dispositions de la présente loi relatives au droit annuel sur les
navires, au droit de port et aux redevances d'équipement sont applicables dans
les ports fluviaux ouverts au trafic par bâtiments de mer. Les dispositions de
la présente loi relatives au droit de port et aux redevances d'équipement sont
également applicables dans les ports du Rhin et de la Moselle. »
« D. - Le code des douanes est ainsi modifié :
« 1° A l'article 226, les mots : ", dans les ports du Rhin et de la Moselle,"
sont remplacés par le mot : "et" ;
« 2° A l'article 240, les mots : ", ainsi que dans les ports du Rhin et de la
Moselle" sont supprimés. »
« E. - 1. L'article 235
ter
du code général des impôts et l'article L.
169 B du livre des procédures fiscales sont abrogés pour les bénéfices réalisés
au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 1999.
« 2. Au premier alinéa de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales,
les mots : "le prélèvement spécial sur les bénéfices réalisés à l'occasion de
la création de la force de dissuasion," sont supprimés.
« 3. Au 1° de l'article L. 204 du livre des procédures fiscales, les mots :
"ou le prélèvement spécial sur les bénéfices réalisés à l'occasion de la
création de la force de dissuasion" sont supprimés. » -
(Adopté.)
Articles additionnels après l'article 16
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-148 rectifié est présenté par M. Hamel.
L'amendement n° I-253 est proposé par MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont,
Joyandet, Ostermann et Trégouët.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 16, un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - A la fin du III de l'article 302
bis
MA du code général des
impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
«
c)
Les dépenses engagées par les organismes de formation
professionnelle visés au livre IX du code du travail. »
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus pour le budget de l'Etat
est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle sur
les droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Hamel, pour présenter l'amendement n° I-148 rectifié.
M. Emmanuel Hamel.
Monsieur le secrétaire d'Etat, à l'article 302
bis
MA du code général
des impôts est instituée une taxe sur certaines dépenses de publicité.
Cette taxe a été instituée en fait pour dissuader les grandes surfaces
d'inonder nos boîtes à lettres, notamment en cette période de veille de fêtes,
de trop de publicités, et pour éviter que les trottoirs ne soient pollués par
des publicités excessives jetées par les passants.
Or, le paradoxe veut que cette taxe sur certaines dépenses de publicité,
inspirée par un noble motif, ait pour conséquence de frapper les organismes de
formation professionnelle qui diffusent des catalogues présentant leur
programme de formation pour leurs salariés. C'est tout à fait illogique !
Mon amendement tend donc à exonérer les organismes de formation
professionnelle de cette taxe sur certaines dépenses de publicité. Je ne peux
pas croire que vous ne conviendrez pas qu'il s'agit d'un amendement de sagesse
et que vous n'allez pas me dire : oui, monsieur le sénateur, nous allons
exonérer les organismes de formation professionnelle de cette taxe.
M. Roland du Luart.
Chacun sait combien est grande la sagesse de M. Hamel !
M. le président.
La parole est à M. Cazalet, pour présenter l'amendement n° I-253.
M. Auguste Cazalet.
Il est défendu, monsieur le président.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-148 rectifié et
I-253 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit d'amendements intéressants et leurs auteurs
sont animés d'intentions que la commission approuve. Nous souhaiterions
connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
M. Hamel et M. le rapporteur général ont entièrement
raison, mais je suis un peu perplexe, car je crois que le texte actuel exclut
déjà de l'assiette de la taxe sur les dépenses de publicité les dépenses
engagées à ce titre par les personnes morales de droit public, par les
organisations syndicales, par les organisations politiques et par les
organismes sans but lucratif s'agissant des activités non soumises à la TVA, en
application respectivement des articles 256 B, 261-4 (9°) et 261-7 (1°) du code
général des impôts. Les actions de formation professionnelle dispensées par ces
organismes entrent pleinement dans le champ de ces dispositions. Par
conséquent, j'ai le sentiment, mais peut-être me trompé-je, que les amendements
de MM. Hamel et Cazalet sont déjà satisfaits.
Au demeurant, une instruction du 23 juin 1998 parue au bulletin officiel des
impôts précise bien qu'il y a exonération dans tous les cas de figure que je
viens d'évoquer. Voici cette instruction.
(M. le secrétaire d'Etat montre le document.)
D'ores et déjà, vous avez gagné, monsieur Hamel !
M. Emmanuel Hamel.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je n'ai pas gagné, j'ai défendu une bonne
cause. Vous m'apprenez qu'elle est déjà reconnue par l'Etat, et je m'en
réjouis. Confirmez-le aux organismes de formation professionnelle, qui ne le
savent pas encore !
M. le président.
Monsieur Hamel, l'amendement n° I-148 rectifié est-il maintenu ?
M. Emmanuel Hamel.
Je ne veux pas croire, compte tenu de son honnêteté qui va de pair avec son
immense talent, que M. le secrétaire d'Etat cherche à m'abuser. J'ai donc la
certitude que les organismes de formation professionnelle seront désormais
dispensés d'avoir à payer cette taxe de publicité prévue par l'article 302
bis
MA du code général des impôts.
Merci, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Sans but lucratif !
M. Emmanuel Hamel.
Beaucoup d'organismes de formation professionnelle n'ont pas de but lucratif,
ils tendent simplement à former. Il ne faut pas charger avec excès les dépenses
et les charges de leur compte d'exploitation.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
J'ai bien compris que c'était ceux-là que vous
visiez.
M. Emmanuel Hamel.
Bien sûr !
M. le président.
L'amendement n° I-148 est retiré.
Monsieur Cazalet, l'amendement n° I-253 est-il maintenu ?
M. Auguste Cazalet.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° I-253 est retiré.
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° I-76 est présenté par MM. Barraux, Huchon, Moinard, Arnaud et
Badré.
L'amendement n° I-99 est déposé par MM. Dussaut, Pastor et les membres du
groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent, après l'article 16, à insérer un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Dans le III de l'article 302
bis
ZD du code général des impôts,
après les mots : "valeur ajoutée", sont insérés les mots : "ainsi que les
entreprises immatriculées au répertoire des métiers ou dont la surface de vente
est inférieure à 300 mètres carrés". »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées à due
concurrence par l'augmentation du taux d'imposition de la taxe sur les achats
de viande, prévu au V de l'article 302
bis
ZD. »
Par amendement n° I-153, MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca
Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants
proposent d'insérer, après l'article 16, un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Au III de l'article 302
bis
ZD du code général des impôts, après
les mots : "valeur ajoutée", sont inscrits les mots : "ainsi que les
entreprises immatriculées au répertoire des métiers ou dont la surface de vente
est inférieure à 300 mètres carrés". »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence
par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général
des impôts. »
Les deux amendements suivants sont présentés par MM. Barraux, Deneux,
Franchis, Huchon, Moinard, Arnaud et Badré.
L'amendement n° I-281 rectifié tend à insérer, après l'article 16, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Au III de l'article 302
bis
ZD du code général des impôts, après
les mots : "valeur ajoutée" sont insérés les mots : "ainsi que les entreprises
immatriculées au répertoire des métiers ou dont le chiffre d'affaires est
inférieur à 3 millions de francs". »
« II. - La perte de recettes résultant du I est compensée à due concurrence
par l'augmentation du taux d'imposition de la taxe sur les achats de viandes,
prévu au V de l'article 302
bis
ZD. »
L'amendement n° I-282 vise à insérer, après l'article 16, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Au III de l'article 302
bis
ZD du code général des impôts, après
les mots : "valeur ajoutée" sont insérés les mots : "ainsi que les entreprises
immatriculées au répertoire des métiers dont le chiffre d'affaires est
inférieur à 3 millions de francs". »
« II. - La perte de recettes résultant du I est compensée à due concurrence
par l'augmentation du taux d'imposition de la taxe sur les achats de viandes,
prévu au V de l'article 302
bis
ZD. »
L'amendement n° I-76 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Lejeune, pour présenter l'amendement n° I-99.
M. André Lejeune.
Cet amendement concerne la taxe d'équarrissage qui est payée par les artisans
bouchers ainsi que par les bouchers-charcutiers, et qui est très importante.
A travers cet amendement, c'est le maintien du petit commerce dans nos zones
rurales et dans les quartiers des villes qui est en question. Notre devoir,
c'est de contribuer à la survie de ces commerces. Ils sont en effet nécessaires
à la vie de la collectivité. On peut même considérer qu'ils rendent une sorte
de service public.
Cet amendement vise à exclure les artisans bouchers et les
bouchers-charcutiers du champ d'application de cette taxe. Le coût de cette
mesure, de l'ordre de 200 millions de francs, pourrait être compensé par une
augmentation de la taxe sur les achats de viande acquittée par les magasins de
détail d'une surface de vente supérieure à 300 mètres carrés. Ces derniers
peuvent en effet étaler ce surcoût sur les milliers d'articles qu'ils
vendent.
M. le président.
La parole est à M. du Luart, pour défendre l'amendement n° I-153.
M. Roland du Luart.
Cet amendement est identique à l'amendement n° I-99. Cependant, le gage que
les membres du groupe des Républicains et Indépendants et moi-même avons
proposé est moins satisfaisant que celui que prévoit le groupe de l'Union
centriste ou le groupe socialiste. Comme il s'agit du même amendement, je
retire mon amendement n° I-153 au profit de l'un des autres. Le tout est que
nous arrivions à un bon résultat.
En effet, il est inadmissible de taxer ainsi les artisans bouchers. Cette taxe
d'équarrissage est un dispositif unique en Europe. Je crois d'ailleurs savoir
que la Commission a adressé une mise en demeure à la France en lui demandant de
respecter l'équilibre financier de tous les intervenants de la filière, sans le
faire au détriment de l'aval. Je souhaite donc que nous trouvions dès ce soir
une solution à ce délicat problème de nos campagnes françaises.
M. le président.
L'amendement n° I-153 est retiré.
La parole est à M. Franchis, pour défendre les amendements n°s I-281 rectifié
et I-282.
M. Serge Franchis.
L'amendement n° I-281 rectifié a le même objet que les amendements précédents,
excepté le fait qu'il retient comme critère non pas la surface de vente mais le
chiffre d'affaires, qui devra être inférieur à 3 millions de francs.
Quant à l'amendement n° I-282, il est quasiment identique. Aussi, je le
retirerai.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-99, I-281 rectifié
et I-282 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ces amendements ont un bon objectif, qui est
d'exonérer totalement de taxe d'équarrissage les artisans bouchers et les
bouchers-charcutiers. En effet, 10 % d'entre eux acquitteraient actuellement
cette taxe car leur chiffre d'affaires serait supérieur à 2,5 millions de
francs.
Parmi les amendements déposés, c'est l'amendement n° I-281 rectifié qui, aux
yeux de la commission, est le meilleur sur le plan technique, sachant que tous
poursuivent, je le répète, le même objectif. En effet, c'est le critère du
chiffre d'affaires qui est le plus simple d'utilisation. Cet amendement vise à
relever le seuil d'exonération de 2,5 millions à 3 millions de francs pour
permettre d'exonérer un plus grand nombre d'artisans bouchers et de
bouchers-charcutiers. Cette mesure devrait être suffisante pour atteindre les
buts que se sont assignés les différents auteurs des amendements. Je
souhaiterais donc que les autres amendements soient retirés au profit de
l'amendement n° I-281 rectifié.
M. le président.
Monsieur Lejeune, l'amendement n° I-99 est-il maintenu ?
M. André Lejeune.
Oui, monsieur le président, je le maintiens.
M. le président.
Monsieur Franchis, l'amendement n° I-282 est-il maintenu ?
M. Serge Franchis.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° I-282 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-99 et I-281 rectifié
?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le niveau auquel a été fixé le seuil d'exonération
permet à l'immense majorité des bouchers-charcutiers d'être exonérés de cette
taxe.
Aujourd'hui, avec un seuil de 2,5 millions de francs hors TVA de chiffre
d'affaires, plus de 90 % des bouchers-charcutiers sont exonérés. Par
conséquent, est-il nécessaire de changer ce seuil ? Je ne le pense pas. Je
propose au Sénat d'en rester au texte actuel, et donc de rejeter ces deux
amendements.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-99, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 16, et l'amendement n° I-281 rectifié n'a
plus d'objet.
Article 17
M. le président.
« Art. 17. - I. - Les articles 947, 949
bis
et 950, le deuxième alinéa
de l'article 952, les articles 960 et 961, les I à III de l'article 963 et les
articles 966, 968 A, 968 C et 1018 B du code général des impôts sont
abrogés.
« II. - L'article 7 de la loi n° 53-1327 du 31 décembre 1953 relative au
développement des crédits affectés aux dépenses du ministère des travaux
publics, des transports et du tourisme pour l'exercice 1954 est abrogé.
« III. - L'article 949 du code général des impôts est abrogé à compter du 1er
janvier 2000. »
Par amendement n° I-36, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer le III de cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'Assemblée nationale a inséré dans cet article un
paragraphe III visant à supprimer le droit de timbre de 220 francs dû au titre
de la délivrance de la carte de séjour des étrangers. Or, une telle mesure
risque d'entraîner un afflux de demandes et l'administration aura peut-être des
difficultés pour y faire face, comme cela s'est d'ailleurs produit à la suite
de la décision, prise l'année dernière, de rendre gratuite la délivrance de la
carte nationale d'identité. Il ne paraît pas nécessaire de créer cet appel
d'air. C'est pourquoi la commission propose cet amendement de suppression du
paragraphe III de l'article 17.
M. Louis Boyer.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je ne suivrai pas le rapporteur général dans ce
rétablissement de l'exigibilité du droit de timbre sur la carte de séjour des
étrangers.
M. Louis Boyer.
C'est dommage !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur général, non seulement la
mesure que vous proposez pourrait faire renaître des débats que ni vous ni moi
ne souhaitons voir revenir sur le devant de la scène politique, mais elle va à
l'encontre de la politique que nous menons en matière de simplification des
démarches administratives. Ces deux arguments m'empêchent vraiment de vous
suivre.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-36, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17, ainsi modifié.
(L'article 17 est adopté.)
Article 17
bis
M. le président.
« Art. 17
bis.
- I. - L'article 834
bis
du code général des
impôts est ainsi rédigé :
«
Art. 834
bis. - Les opérations d'augmentation ou de réduction de
capital rendues nécessaires par la conversion en euros du capital des sociétés
sont exonérées de droits d'enregistrement et de timbre. »
« II. - Les dispositions du I sont applicables aux augmentations et réductions
de capital réalisées à compter du 1er janvier 1999. » -
(Adopté.)
Article 17
ter
M. le président.
« Art. 17
ter.
- I. - L'article 1089 B du code général des impôts est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les requêtes engagées contre une décision de refus de visa sont dispensées
du droit de timbre. »
« II. - Le tarif des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code
général des impôts est majoré à due concurrence des pertes de recettes
résultant pour l'Etat de l'application du I. »
Par amendement n° I-37, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement, de même inspiration que le précédent,
tend à supprimer l'article 17
ter
introduit par l'Assemblée
nationale.
Cet article vise à dispenser du droit de timbre les requêtes engagées devant
une juridiction administrative contre une décision de refus de visa.
Une telle mesure ne peut que favoriser la multiplication des requêtes devant
les juridictions administratives qui sont déjà confrontées à une croissance
considérable du contentieux. C'est un mauvais signal. Il convient donc de
supprimer l'article 17
ter
.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je suis défavorable à cet amendement.
M. Emmanuel Hamel.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Cet amendement arrive à un moment historique : nous entrons dans le dernier
mois du deuxième millénaire car la cloche vient de sonner les douze coups de
minuit et nous sommes le 1er décembre.
M. le président.
Le Sénat mesure l'importance de l'événement et remercie le sénateur Emmanuel
Hamel de nous le faire apprécier.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-37, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 17
ter
est supprimé.
Article 18
M. le président.
L'article 18 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Article 19
M. le président.
« Art. 19. - A l'article 1762 A du code général des impôts, il est inséré un
III
bis
ainsi rédigé :
« III
bis.
- La majoration de 3 % prévue aux I et II n'est pas
applicable aux mensualités de taxe d'habitation et de taxes foncières lorsque
la défaillance du contribuable intervient avant la date limite de paiement des
impositions concernées. »
Par amendement n° I-38, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose :
A. - De compléter
in fine
cet article par un paragraphe ainsi rédigé
:
« « II. - L'article 1681
quater
du code général des impôts est abrogé.
»
B. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention :
« I ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel, monsieur le
président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il n'est pas uniquement rédactionnel ! Je m'apprêtais
à saluer un amendement que je pourrais soutenir car il apporte une
simplification administrative. Félicitations, monsieur le rapporteur général,
pour avoir réussi à emporter notre conviction.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Merci, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-38, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 19, ainsi modifié.
(L'article 19 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 19
M. le président.
Par amendement n° I-63, MM. Gaillard et Ambroise Dupont proposent d'insérer,
après l'article 19, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du 1° de l'article 1382 du code général des
impôts, après les mots : "non productifs de revenus", insérer le mot :
"locatifs".
« II. - Les dispositions du I s'appliquent aux impositions établies à compter
de 1999.
« III. - La perte de recettes éventuelle pour les collectivités locales
résultant du I ci-dessus est compensée par une majoration à due concurrence de
la dotation globale de fonctionnement.
« IV. - Les pertes de recette pour l'Etat résultant du II ci-dessus sont
compensées par un relèvement à due concurrence des droits mentionnés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Je suis maintenant saisi de deux amendements présentés par M. Vasselle et qui
peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-209 rectifié tend à insérer, après l'article 19, un article
additionnel ainsi rédigé :
« Dans le I° du II de l'article 1609
bis
du code général des impôts,
après les mots : "la taxe", les mots : "ou la redevance" sont insérés. »
L'amendement n° I-287 tend à insérer, toujours après l'article 19, un article
additionnel ainsi rédigé :
« Après la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2333-76 du code
général des collectivités territoriales, insérer une phrase ainsi rédigée :
« Le recouvrement de cette redevance est assuré par les services fiscaux dans
les mêmes conditions que la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. »
Ces amendements sont-il soutenus ?...
Article 19
bis
M. le président.
« Art. 19
bis.
- I. - Le III de l'article 1414 du code général des
impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du premier alinéa sont maintenues au titre de l'année
suivant celle au cours de laquelle le redevable cesse d'être bénéficiaire du
revenu minimum d'insertion. »
« II. - Les dispositions du I sont applicables pour les impositions établies
au titre de l'année 2000 et des années suivantes. » -
(Adopté.)
Articles additionnels après l'article 19
bis
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements présentés par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M.
Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen qui peuvent
faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-197 tend à insérer, après l'article 19
bis
, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa de l'article 1390 du code général des impôts est
ainsi rédigé : "Les titulaires de l'allocation supplémentaire mentionnée à
l'article L. 815-2 ou à l'article L. 815-3 du code de la sécurité sociale, les
contribuables âgés de plus de soixante ans, ainsi que les veuves et veufs, dont
le montant des revenus de l'année précédente n'excède pas la limite prévue à
l'article 1417 ; les contribuables atteints d'une infirmité ou d'une invalidité
les empêchant de subvenir, par leur travail, aux nécessités de l'existence
lorsque le montant de leurs revenus de l'année précédente n'excède pas la
limite prévue à l'article 1417 ; les bénéficiaires du revenu minimum prévu à
l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu
minimum d'insertion, les bénéficiaires de l'allocation solidarité spécifique
mentionnée à l'article L. 351-10 du code du travail sont exonérés de la taxe
foncière sur les propriétés bâties dont ils sont passibles à raison de leur
habitation principale".
« II. - L'article 1391 du code général des impôts est abrogé. »
« III. - Pour compenser les pertes de recettes résultant des I et II
ci-dessus, les taux applicables aux deux dernières tranches du tarif fixé à
l'article 885 U du code général des impôts sont relevés à due concurrence. »
L'amendement n° I-198 vise à insérer, après l'article 19
bis
, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 1390 du code général des impôts,
après les mots : "code de la sécurité sociale" sont insérés les mots : ", les
bénéficiaires du revenu minimum prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er
décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion, les bénéficiaires de
l'allocation solidarité spécifique mentionnée à l'article L. 351-10 du code du
travail". »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par un
relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts. »
L'amendement n° I-199 a pour objet d'insérer, après l'article 19
bis
,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 1390 du code général des impôts,
après les mots : "code de la sécurité sociale" sont insérés les mots : "les
bénéficiaires du revenu minimum prévu à l'article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er
décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion ».
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par un
relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du
code général des impôts. »
La parole est à M. Foucaud, pour défendre les trois amendements.
M. Thierry Foucaud.
Cet amendement tend à exonérer de la taxe foncière sur les propriétés bâties
les contribuables âgés de plus de soixante ans, les veuves et veufs ne
dépassant pas un certain plafond de ressources, les contribuables atteints
d'une infirmité ou d'une invalidité, les RMIstes, les bénéficiaires de
l'allocation solidarité spécifique.
L'ensemble de ces contribuables bénéficient d'une exonération de taxe
d'habitation mais ne sont aucunement aidés pour le paiement de leurs impôts
locaux, attachés à leur résidence principale quand ils sont propriétaires.
La propriété n'est pas toujours synonyme d'aisance.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Ah ! C'est vrai ce que vous
dites !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Nous l'avons toujours dit !
M. Thierry Foucaud.
De plus en plus de propriétaires, vous le savez, sont surendettés. Ils le
doivent souvent à l'achat d'un bien immobilier suivi d'un changement brusque et
imprévu, tel le chômage ou un divorce.
La seule exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties concerne
les bénéficiaires du minimum vieillesse.
Il est temps d'adapter notre législation fiscale aux évolutions de notre
société. Même si la mesure en elle-même témoigne d'un grand souci de solidarité
et d'humanité, il ne suffit pas d'annuler les dettes fiscales des personnes
surendettées.
Il faut s'inspirer de l'exemple de la taxe d'habitation pour régler le
problème en amont et exonérer de la taxe foncière sur les propriétés bâties
toutes les personnes qui ont des revenus modestes.
Les amendements suivants ne sont que des déclinaisons du premier. Ils
pourraient être des étapes successives de la mise en place des exonérations que
nous vous proposons de consentir aux personnes en difficulté.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-197, I-198 et I-199
?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission considère qu'il n'y a aucune raison de
ne pas transposer à la taxe foncière sur les propriétés bâties le régime
d'exonération établi en matière de taxe d'habitation.
Dans la mesure où nous avions voté l'an dernier un amendement de ce type, il
convient de renouveler ce vote. Je propose de le faire en faveur de
l'amendement n° I-198. Par conséquent, je suggère à notre collègue de bien
vouloir retirer les amendements n°s I-197, I-198 et I-199.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-197, I-198 et I-199
?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'amendement n° I-197 pose une question importante sur
laquelle le Gouvernement a eu l'occasion de s'exprimer très récemment à
l'Assemblée nationale.
Les services fiscaux examinent toujours la situation des personnes en
difficulté avec une ouverture d'esprit qui mérite d'être saluée. Les
dégrèvements fiscaux accordés aux redevables de la taxe foncière sur les
propriétés bâties, qui représente une lourde charge pour les redevables les
plus modestes, ont excédé 100 millions de francs en 1998.
Comme je l'ai déjà dit, le Gouvernement a accepté, sur proposition de
l'Assemblée nationale, de rédiger un rapport sur les modalités de réforme de la
taxe d'habitation.
De plus, j'ai indiqué la semaine dernière au cours de la discussion à
l'Assemblée nationale que le problème que vous évoquez, monsieur le sénateur,
serait inclus dans cette réflexion qui devrait conduire à des premières mesures
dès l'automne 2000.
D'ores et déjà, je rappelle que le Premier ministre a décidé que les personnes
les plus défavorisées, celles qui sont en situation de surendettement,
bénéficieraient de mesures de grande ampleur en ce qui concerne l'abandon de
dettes fiscales et sociales.
En outre, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances,
l'Assemblée nationale a adopté, sur proposition du Gouvernement, le maintien de
l'avantage dont bénéficient les RMIstes en matière de taxe d'habitation,
c'est-à-dire le dégrèvement total de leur cotisation en cas de retour à
l'emploi.
Par ailleurs, j'ai rappelé tout à l'heure que le Gouvernement avait accepté
l'allégement du poids de la taxe d'habitation qui pèse sur les plus modestes
des redevables, ce qui représente une somme de 500 millions de francs.
Compte tenu de ces précisions, des engagements forts et datés pris par le
Gouvernement - j'ai parlé de l'automne de l'an 2000 - je pense que les auteurs
des amendements pourraient aisément les retirer.
M. le président.
Monsieur Foucaud, maintenez-vous vos amendements ?
M. Thierry Foucaud.
Je retire les amendements n°s I-197 et I-199, mais je maintiens l'amendement
n° I-198.
M. le président.
Les amendements n°s I-197 et I-199 sont retirés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-198, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 19
bis
.
Par amendement n° I-196, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après
l'article 19
bis
, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du paragraphe V de l'article 1417 du code
général des impôts, après les mots : "montant net", insérer les mots : "après
application éventuelle des règles de quotient défini à l'article 163 O-A".
« II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, les
droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés
à due concurrence. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet
amendement porte sur la question pour le moins spécifique de l'application du
système du quotient en matière d'imposition du revenu au regard de la
législation propre à la taxe d'habitation.
Un simple rappel de l'état des lieux s'impose.
En matière d'imposition des revenus différés des particuliers, la loi de
finances pour 1993 a mis un terme au système de l'étalement, réservant celui-ci
à certains revenus exceptionnels spécifiques comme les primes de départ à la
retraite qui demeurent, sous option du contribuable, soumis au régime de
l'article 163 A.
Si le système du quotient a permis de préserver pour l'essentiel les droits
des contribuables au titre de l'impôt sur le revenu, il se trouve qu'il est
venu se télescoper, en quelque sorte, avec le dispositif d'allégement de la
taxe d'habitation mis en place à partir de 1997 et faisant désormais référence
au revenu imposable et non plus à la cotisation fiscale.
Il se trouve en effet que le revenu fiscal de référence des contribuables de
l'impôt sur le revenu, utilisé pour déterminer éventuellement le montant
maximal de leur cotisaton de taxe d'habitation, se trouve, l'année de
déclaration et de perception de revenus exceptionnels, parfois augmenté dans
des proportions importantes, subissant, dès lors, les effets de seuil les plus
redoutables.
On a ainsi pu voir des contribuables exonérés de la taxe d'habitation se
retrouver, dès leurs droits à perception des revenus différés rétablis, en
situation de devoir acquitter une taxe d'habitation sans plafonnement, alors
même que leur situation financière n'a pas, pour autant, été sensiblement
améliorée.
Je passe sur le fait que, dans certains cas, le relèvement du revenu fiscal de
référence peut aussi avoir une conséquence sur le montant de prestations
sociales servies, telle une aide personnelle au logement.
Vous conviendrez que le prix est élevé pour avoir obtenu, après parfois
plusieurs années d'attente, ce que l'on était en droit d'obtenir...
Notre amendement vise donc tout simplement à permettre que le revenu fiscal de
référence des personnes ayant perçu des revenus différés ou exceptionnels ne
fasse pas l'objet d'une majoration excessive. Par ailleurs, leur cotisation de
taxe d'habitation tiendrait compte de cette situation, ce qui aurait d'ailleurs
été le cas si ces revenus avaient été perçus en temps normal.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite donc, mes chers
collègues, à adopter cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le sujet concerne les modalités de calcul du revenu
pris en compte pour l'application des dégrèvements de taxe d'habitation.
Nos collègues proposent d'intégrer les revenus exceptionnels dans le revenu de
référence suivant les modalités de l'article 163 OA consistant à diviser par
quatre le revenu exceptionnel et à multiplier par quatre l'impôt dû au titre
dudit revenu.
Vous aurez compris, mes chers collègues, que ce mécanisme est complexe et
nécessite les éclaircissements du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
L'objet du revenu fiscal de référence est
d'appréhender les facultés contributives réelles de chaque contribuable,
notamment pour définir le domaine des dégrèvements et exonérations d'impôts
locaux pratiqués en faveur des contribuables les plus modestes.
C'est à cette fin que certains revenus exonérés d'impôt ou certaines charges
admises en déduction du revenu global sont réintégrés dans le revenu imposable
pour déterminer le revenu fiscal de référence.
Je comprends tout à fait la logique de l'amendement, qui consiste à tenir
compte du mécanisme du quotient pour le calcul du revenu de référence.
Toutefois, ce mécanisme a un objet spécifique à l'impôt sur le revenu,
puisqu'il vise à réduire la progressivité de celui-ci en présence de revenus
exceptionnels ou différés.
La démarche préconisée par MM. Foucaud et Loridant est tout à fait logique et
cohérente. Elle posera probablement à nos services des problèmes de gestion,
mais ceux-ci pourront sans doute être surmontés grâce à la proverbiale bonne
volonté desdits services.
Je m'en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée, et je lève le gage.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° I-196 rectifié.
Quel est, dans ces conditions, l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission s'en remet également à la sagesse du
Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-196 rectifié, pour lequel la commission et
le Gouvernement s'en remettent à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 19
bis.
Article 20
M. le président.
« Art. 20. - L'article 50 de la loi de finances pour 1963 (n° 63-156 du 23
février 1963) (2e partie. - Moyens des services et dispositions spéciales) et
l'article 23 de la loi n° 48-1516 du 26 septembre 1948 fixant l'évaluation des
voies et moyens du budget général pour l'exercice 1948 et relative à diverses
dispositions d'ordre financier sont abrogés. » -
(Adopté.)
Article 21
M. le président.
« Art. 21. - I. - L'article 45 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du
30 décembre 1986) est ainsi modifié :
« 1° Les B et C du I sont abrogés ;
« 2° Au 1° du VII, les mots : "au double du montant" sont remplacés par les
mots : "au montant" ;
« 3° Il est ajouté un VIII ainsi rédigé :
«
VIII.
- Les titulaires d'autorisations délivrées en application des
articles L. 33-1 ou L. 34-1 du code des postes et télécommunications relatives
à des réseaux ou services de télécommunications à caractère expérimental
autorisés pour une durée inférieure à trois ans sont exonérés des taxes prévues
aux A et F du I et au VII du présent article. »
« II. - L'exonération prévue au 3° du I du présent article est applicable à
compter du 1er janvier 1998. Les sommes qui ont été acquittées au titre des
taxes dues en 1998 et 1999 par les titulaires des autorisations délivrées en
application des articles L. 33-1 ou L. 34-1 du code des postes et
télécommunications, relatives à des réseaux ou services de télécommunications à
caractère expérimental autorisés pour une durée inférieure à trois ans, leur
sont reversées. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° I-154, MM. Emin, Pépin et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants proposent :
I. - Avant le 2° du I de cet article, d'insérer deux alinéas ainsi rédigés
:
« Le 1° du A du I est ainsi rédigé :
« 1° Le montant de la taxe est fixé à 3 centimes par habitant. »
II. - De compenser la perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus,
à due concurrence, par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575
A du code général des impôts.
Par amendement n° I-254, MM. Trégouët, Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong
et Joyandet proposent d'insérer, après le premier alinéa du I de l'article 21,
dix alinéas ainsi rédigés :
« 1° A. - Le 1° du A du I est ainsi rédigé :
« 1° Le montant de la taxe résulte du produit entre le nombre d'habitants
d'une zone géographique et le coût unitaire par habitant des licences
d'opérateur.
« Les zones géographiques retenues pour les réseaux sont :
« - tout ou partie d'une unité urbaine d'au plus 100 000 habitants,
« - un département,
« - une région,
« - cinq régions,
« - plus de cinq régions.
« Le coût unitaire par habitant est de 0,03 franc.
« Les réseaux utilisant exclusivement des capacités de télécommunications par
satellite acquittent une taxe forfaitaire d'un montant de 250 000 francs. »
La parole est à M. du Luart, pour présenter l'amendement n° I-154.
M. Roland du Luart.
Mes collègues Jean-Paul Emin et Jean Pépin m'ont demandé de défendre en leur
nom cet amendement, qui a pour objet d'attirer l'attention du Sénat et du
Gouvernement sur le coût des communications pour l'accès au réseau Internet
dans les zones rurales : ils considèrent que ce coût est trop élevé en raison
d'un manque de concurrence.
Nous souhaitons pouvoir modifier le système car la distorsion de concurrence
provient du fait que, dans les zones comptant au plus 100 000 habitants, le
coût est de un franc par habitant alors que, dans certaines autres zones, il
est de 5,8 centimes pour une couverture nationale. Cela prouve bien que les
zones rurales sont défavorisées par cette taxe !
Accepter notre amendement permettrait de ramener la taxe de constitution de
dossier à 3 centimes par habitant quelle que soit la zone couverte et de
parvenir ainsi à une certaine équité sur l'ensemble du territoire. Les PME
pourraient ainsi mieux équiper leurs sites dans les zones rurales.
Nous considérons que cette mesure pourrait avoir, à terme, un impact positif
sur les recettes de l'Etat grâce au développement d'activités nouvelles liées à
Internet.
M. le président.
La parole est à M. Trégouët, pour défendre l'amendement n° I-254.
M. René Trégouët.
Cet amendement a exactement le même objet, monsieur le président.
Il est vrai que les petites et moyennes entreprises qui veulent accéder à des
licences connaissent actuellement un réel problème. En effet, comme vient de le
dire notre collègue Roland du Luart, le coût qu'elles doivent supporter est
beaucoup trop élevé. Au demeurant, aucune licence locale n'a été demandée à
l'ART, l'autorité de régulation des télécommunications, depuis l'instauration
de cette mesure, ce qui montre bien qu'il y a un vrai problème.
Comme l'a dit M. du Luart, les coûts dépassent un franc par habitant dans le
monde rural alors qu'une licence au niveau national représente 3,5 millions de
francs, donc à peine six centimes par habitant.
Je vous demande donc, en adoptant cet amendement, de bien vouloir établir une
certaine équité dans la concurrence pour l'accès à la boucle locale, ce qui est
extrêmement important pour l'accès à Internet.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements n°s I-154 et I-254 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ces deux amendements tendent à porter le taux de la
taxe de constitution de dossier à trois centimes par habitant quelle que soit
la zone couverte par les réseaux de communication.
Les auteurs de ces amendements estiment que les taux actuels pénalisent
l'accès au réseau Internet dans les zones rurales. Il convient toutefois de
rappeler que la loi de finances de 1998 a abaissé le montant de cette taxe de
200 000 francs à 50 000 francs pour la couverture la plus restreinte, tandis
que la même taxe était portée de 200 000 francs à 1,750 million de francs pour
une couverture d'au moins cinq régions.
Par ailleurs, l'article 21 du présent projet de loi de finances réduit de
moitié le montant de la taxe de gestion et de contrôle acquittée par les
titulaires des autorisations.
Les dispositions actuelles ne semblent donc pas inadaptées, mais la commission
des finances souscrit bien volontiers aux objectifs visés par les auteurs des
amendements.
Sur le plan technique, il est cependant sans doute nécessaire d'obtenir
quelques précisions du Gouvernement afin de connaître - nous n'avons pas
beaucoup d'éléments sur ce sujet - quel serait le coût estimé d'une telle
mesure.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Les opérateurs sont soumis à deux taxes : la taxe de
constitution de dossier et la taxe annuelle de gestion et de contrôle.
Monsieur Trégouët, le Gouvernement est favorable au dégroupage de la boucle
locale, je l'ai annoncé ce matin en ce qui concerne Internet à haut débit.
C'est une mesure dont la portée est immense, puisqu'elle établit sur une boucle
locale la technologie ADSL -
asynchronous digital subscriber line
,
pardonnez-moi, monsieur Hamel - avec une véritable concurrence, c'est-à-dire
une véritable ouverture par rapport à l'ancien monopole de l'opérateur
historique. Depuis ce matin, l'appel d'offres est donc ouvert, sous certaines
conditions, pour certaines fréquences : vous avez satisfaction.
Les amendements qui ont pour objet de modifier la structure des taxes risquent
d'aboutir à une complexification du dispositif actuel et de sa gestion alors
que les opérateurs ont besoin de lisibilité pendant la période qui couvre leur
autorisation.
Comme M. le rapporteur général l'a fort élégamment rappelé, le Gouvernement a
déjà allégé très significativement le dispositif en vigueur, puisque nous avons
divisé par deux la taxe de gestion et de contrôle due chaque année par
l'ensemble des titulaires d'autorisation et que nous avons aussi pris en compte
l'objectif de développement des réseaux locaux à travers l'exonération des
réseaux expérimentaux qui concernent notamment la boucle locale radio, dont je
viens de parler.
Au total, les allégements décidés par le Gouvernement sont très importants
puisqu'ils contribuent à diminuer les taxes de près de 90 millions de francs en
2000, le produit de ces taxes étant ramené à un total d'environ 80 millions de
francs. Le niveau des taxes sera donc ainsi faible par rapport aux coûts de
développement des nouveaux réseaux.
Avec cet article 21, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, le
Gouvernement entend accompagner le développement du secteur des
télécommunications, qui contribue fortement à la croissance de notre économie
et qui représente déjà 5 % de notre produit intérieur brut. En croissance de
plus de 10 % par an, il est certainement une source potentielle forte
d'emplois.
C'est pourquoi je pense, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous devriez
tenir compte de nos efforts, de l'ouverture à la concurrence, du fait que nous
encourageons volontairement ce secteur. Dans ces conditions, peut-être
pourriez-vous retirer vos amendements, monsieur du Luart, monsieur Trégouët
?
M. le président.
Monsieur Trégouët, maintenez-vous l'amendement n° I-254 ?
M. René Trégouët.
M. le secrétaire d'Etat nous a dit qu'il avait fait une annonce ce matin
concernant l'ADSL et le dégroupage. Je considère que c'est une très bonne
nouvelle pour la concurrence sur la boucle locale en France.
Il aurait toutefois fallu qu'il aille au terme de son raisonnement ! Je me
suis d'ailleurs permis de lui envoyer ce jour une question écrite pour
connaître exactement la portée de sa décision. Je souhaite en effet savoir dans
combien de temps l'ADSL sera disponible dans le monde rural, car nous savons
tous combien le large débit est important en la matière.
J'ai eu l'occasion de poser la question récemment à M. Michel Bon, président
de France Télécom, et je crois que la concurrence va pouvoir s'exprimer assez
rapidement dans les villes de France. Mais qu'en est-il, monsieur le secrétaire
d'Etat, de l'accès dans le monde rural en France ? Dans cette assemblée, qui se
préoccupe beaucoup des questions d'aménagement du territoire, nous aurons
certainement l'occasion d'en reparler bientôt, car nous sommes en train de
créer un déséquilibre supplémentaire entre le monde urbain et le monde rural.
En effet, grâce au dégroupage que vous nous avez annoncé, monsieur le
secrétaire d'Etat, l'ADSL pourra utiliser les fils de cuivre partout dans le
monde urbain, mais aucun programme n'est prévu pour le monde rural.
L'amendement n° I-254 n'a d'autre objet que de tenter de favoriser l'accès à
Internet pour le monde rural, surtout compte tenu de la décision que vous avez
prise aujourd'hui.
Il faut rééquilibrer notre territoire ! Quand on constate qu'à ce jour aucune
licence locale n'a été demandée à l'ART pour accéder à Internet dans le monde
rural, on se rend compte qu'il y a là un réel problème !
Est-il normal que seuls des opérateurs de grande taille, disposant des sommes
suffisantes, puissent accéder au marché national tandis que, dans le même
temps, on ne peut accéder localement à Internet ?
Je trouve que c'est regrettable, et c'est pourquoi, monsieur le secrétaire
d'Etat, je maintiens mon amendement.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
La meilleure des mesures que nous ayons prises,
monsieur Trégouët, c'est la baisse des tarifs d'accès à Internet. La France a
aujoud'hui le tarif le plus bas, exception faite d'un de nos partenaires de
l'Union européenne. En effet, cent francs pour vingt heures d'Internet, c'est
un des tarifs les meilleurs, et cela s'adresse aussi au monde rural
J'habite personnellement un village de 400 habitants et je suis connecté au
réseau Internet en débit simple. J'estime que, cent francs pour vingt heures,
c'est un tarif extrêmement attractif, qui emporte d'ailleurs l'adhésion de
l'ensemble des internautes et de leurs associations.
Quant à l'ADSL et à son développement dans le monde rural, il faut rappeler
que le haut débit permet de passer de quelques kilobits à un, voire deux
mégabits par seconde dans la transmission des données. Cela signifie que, avec
l'ADSL, Internet peut être un instrument de travail pour les entreprises grâce
à la transmission à haut débit de données interentreprises. Cela modifie en
effet complètement le paysage industriel français !
L'ADSL sera ouvert à environ 200 grandes connurbations en France avant la fin
de l'année 2000 ou vers le milieu de l'année 2001. Mais, vous le savez,
monsieur le sénateur, cette technologie suppose de nombreux investissements.
C'est pourquoi, dans un premier temps, l'investissement sera réalisé là où les
clients sont les plus nombreux. Dans un second temps, le monde rural sera
atteint par le haut débit et pourra bénéficier des facultés décuplées qu'il
offre par rapport aux possibilités techniques d'aujourd'hui.
Le coût de l'accès à Internet demeure cependant la principale préoccupation
des internautes. Or nous avons franchi, à cet égard, grâce à des tarifs
accessibles à tous, une étape extrêmement importante qui place la France parmi
les meilleurs pays dans ce domaine.
M. le président.
Monsieur du Luart, votre amendement est-il maintenu ?
M. Roland du Luart.
Je retire mon amendement au profit de celui de M. Trégouët.
M. le président.
L'amendement n° I-154 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-254, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21, ainsi modifié.
(L'article 21 est adopté.)
M. le président.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
3
RETRAIT D'UNE QUESTION ORALE
AVEC DÉBAT
M. le président.
J'informe le Sénat que M. Hubert Haenel a fait connaître qu'il retire la
question orale avec débat n° 19 qu'il avait posée à M. le ministre de
l'équipement, des transports et du logement.
Cette question avait été communiquée au Sénat le 10 novembre 1999.
Acte est donné de ce retrait.
4
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2000, adopté avec modifications par
l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 105, distribué et renvoyé à la
commission des afffaires sociales.
5
TRANSMISSION D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi,
adoptée par l'Assemblée nationale, modifiant les conditions d'acquisition de la
nationalité française par les militaires étrangers servant dans l'armée
française.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 104, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
6
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée à aujourd'hui, mercredi 1er décembre 1999, à neuf heures trente, à quinze
heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté par
l'Assemblée nationale (n°s 88 et 89, 1999-2000). - M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Première partie. - Conditions générales de l'équilibre financier :
Article 35 (Evaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au
titre de la participation de la France au budget des Communautés
européennes).
M. Denis Badré, rapporteur spécial (rapport n° 89, tome II, fascicule 2 :
affaires européennes et article 35).
Suite de l'examen des articles de la première partie : articles 22 à 36 et
état A (à l'exception de l'article 35).
Aucun amendement aux articles de la première partie de ce projet de loi de
finances n'est plus recevable.
Eventuellement, seconde délibération.
Explications de vote.
Vote sur l'ensemble de la première partie.
En application de l'article 59, premier alinéa, du règlement, il sera procédé
à un scrutin public ordinaire.
En outre, à quinze heures :
Scrutin pour l'élection d'un juge suppléant de la Cour de justice de la
République, en remplacement de M. Claude Saunier, devenu juge titulaire.
Le scrutin à la majorité absolue des suffrages exprimés aura lieu dans la
salle des conférences ; à la suite de la proclamation de l'élection, le juge
élu sera appelé à prêter le serment prévu par la loi organique.
Nomination d'un membre titulaire de l'Office parlementaire d'évaluation des
choix scientifiques et technologiques, en remplacement de M. Franck Sérusclat,
qui a démissionné de son mandat de sénateur.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant
l'examen des crédits de chaque ministère
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant
l'examen des crédits de chaque ministère est fixé à la veille du jour prévu
pour la discussion, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements aux crédits budgétaires pour le
projet de loi de finances pour 2000
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits budgétaires
et articles rattachés du projet de loi de finances pour 2000 est fixé à la
veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.
Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, adopté avec
modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 105,
1999-2000).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mercredi 1er décembre 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 1er décembre 1999, à
dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 1er décembre 1999, à zéro heure
trente.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Politique de diversification énergétique
et de valorisation de la forêt française
669.
- 30 novembre 1999. -
M. Jean Faure
attire l'attention de
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement
sur la situation dans laquelle se trouvent certaines communes devant
l'inadéquation qui perdure entre les objectifs du Gouvernement en matière de
diversification énergétique et les outils financiers mis en oeuvre pour assurer
la réalisation de ces objectifs. Chacun s'accorde, en effet, à reconnaître
l'intérêt de la production décentralisée d'énergie en termes d'aménagement du
territoire, et notamment de la filière bois très développée dans le département
de l'Isère. Or, les communes rurales, qui sont pourtant les mieux placées pour
mettre en oeuvre d'ambitieux projets de diversification, se trouvent dans une
situation ubuesque : en effet, les projets énergétiques qu'elles ont mis à
l'étude sont jugés excellents, techniquement et économiquement. Par exemple, la
mise en place de chaufferies à plaquettes leur ferait économiser des sommes
importantes sur leur budget de fonctionnement, les temps de retour de ces
investissements étant très courts (de l'ordre de quelques années). Elles
obtiennent des subventions diverses au titre des politiques énergétiques menées
par l'Etat, l'Europe et les collectivités régionales et départementales.
Pourtant, elles ne trouvent aucune structure financière pour assurer
l'autofinancement restant à leur charge, qu'elles ne sont pas en mesure
d'avancer. Car ces communes sont confrontées à des besoins urgents en matière
de voirie, de sauvegarde du patrimoine ou à des dépenses obligatoires qui leur
interdisent tout investissement autre, aussi rationnel et porteur d'avenir
soit-il. Or ces communes rurales sont mises en demeure de résorber leur déficit
structurel et d'abonder leur capacité d'autofinancement. A l'heure de
l'adoption du budget de l'ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de
l'énergie), il lui demande si le Gouvernement a l'intention de doter cette
agence d'une structure financière capable soit de financer directement les
projets n'ayant pu être pris en charge dans le cadre de financements
traditionnels, soit de se porter caution auprès des prêteurs traditionnels. Il
lui rappelle que c'est à ce prix que la politique de diversification
énergétique et de valorisation de la forêt française pourra obtenir des
résultats significatifs.
Réglementation des « rave party »
670.
- 30 novembre 1999. -
M. Josselin de Rohan
appelle l'attention de
M. le ministre de l'intérieur
sur les conséquences du développement du phénomène des « rave party ». En
effet, ces manifestations échappent à l'exigence du respect des conditions
tenant à la sécurité et à l'ordre public. En conséquence, il lui demande s'il
envisage de prendre des dispositions afin de réglementer ce type de
rassemblement.
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mardi 30 novembre 1999
SCRUTIN (n° 18)
sur l'amendement n° I-34, présenté par M. Philippe Marini au nom de la
commission des finances, tendant à rétablir l'article 15 du projet de loi de
finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale (actualisation du barême
de l'ISF).
Nombre de votants : | 311 |
Nombre de suffrages exprimés : | 311 |
Pour : | 212 |
Contre : | 99 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre :
16.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
18.
Contre :
5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer,
Yvon Collin et Gérard Delfau.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (98) :
Pour :
96.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ M. Christian Poncelet, président du
Sénat, et Jacques Valade, qui présidait la séance.
GROUPE SOCIALISTE (78) :
Contre :
78.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :
Pour :
52.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :
Pour :
46.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (8) :
N'ont pas pris part au vote :
8.
Ont voté pour
Nicolas About
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Jean-Jacques Robert
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Maurice Ulrich
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac
Ont voté contre
François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
N'ont pas pris part au vote
MM. Philippe Adnot, Philippe Darniche, Jacques Donnay, Paul Dubrule, Hubert
Durand-Chastel, Alfred Foy, Bernard Seillier et Alex Türk.
N'ont pas pris part au vote
MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Jacques Valade, qui présidait
la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 313 |
Nombre de suffrages exprimés : | 313 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 157 |
Pour l'adoption : | 214 |
Contre : | 99 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.