Séance du 1er décembre 1999
M. le président. Par amendement n° I-146, M. Charasse propose d'insérer, après l'article 34 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter du 1er janvier 2000, le conseil d'administration des services départementaux d'incendie et de secours vote chaque année à son profit les taux applicables aux bases des taxes directes locales, visées aux articles 1380, 1393, 1407 et 1447 du code général des impôts, des communes qui lui sont affiliées.
« II. - Le vote des taxes directes locales visées au I ci-dessus s'effectue dans les mêmes conditions et délais que pour les communes. Ces taxes sont assises, recouvrées et versées aux bénéficiaires selon les mêmes règles que pour les communes.
« III. - A compter du 1er janvier 2000, il est interdit aux collectivités locales et à leurs groupements de participer sous quelque forme que ce soit au financement des dépenses mises à la charge des services départementaux d'incendie et de secours en vertu de la loi n° 96-369 du 3 mai 1996 relative aux services d'incendie et de secours.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Monsieur le président, il est tard. Répondant à l'appel du président et du rapporteur général de la commission des finances, je m'exprimerai donc en style télégraphique.
La situation créée dans les départements du fait de la départementalisation des services d'incendie et de secours est devenue insupportable, tout le monde le sait. Les pompiers professionnels se livrent à un véritable assaut contre les élus et les contribuables, et la progression des charges qui résulte de leurs exigences ne peut plus être acceptée.
Les citoyens sont largement indifférents, car la profession est sympathique, beaucoup confondant professionnels, minoritaires mais très onéreux, et volontaires, beaucoup plus nombreux, modestes, désintéressés et peu exigeants. Il est temps de mettre nos compatriotes devant la réalité d'aujourd'hui et de demain. Il n'y a pas d'autre solution que de faire apparaître le coût réel du corporatisme égoïste des pompiers professionnels sur la feuille d'impôt du contribuable.
Je propose donc que les actuelles contributions des collectivités locales financées en cachette par l'impôt local - puisque cela ne figure clairement nulle part - soient remplacées par l'impôt direct local voté par le SDIS, de façon à apparaître clairement aux yeux de tous et à permettre ainsi aux élus responsables d'être compris et soutenus par la population face aux troupes de manifestants en tenue qui vont jusqu'à s'en prendre aux bâtiments publics, comme on l'a vu hier à Lyon ! (Très bien ! sur divers travées.)
M. Roland du Luart. Vous allez faire éclater votre majorité plurielle !
M. le président. Voilà un amendement qui participe de la volonté de tous pour la transparence, si j'ai bien compris !
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, vous m'avez devancé ! Il s'agit effectivement d'un amendement de transparence. Il faut dire aux gens la vérité : le coût d'un service qui ne peut qu'être financé par l'impôt, un impôt spécifique, afin que chacun sache exactement ce que représente la charge de ce service public indispensable.
M. Michel Charasse. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En ce qui me concerne, je suis favorable à l'objectif ainsi défini, et je veux croire que le Gouvernement n'est pas contre la transparence, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Bien sûr que nous sommes pour la transparence ! Bien sûr que la situation évoquée avec vivacité et brio par M. Charasse se présente en différents points du territoire ! Bien sûr qu'une lassitude se fait jour dans un certain nombre de communes face à cette situation !
Toutefois, monsieur Charasse, le mode actuel de financement des SDIS apparaît conforme à leur mission.
Votre système alourdirait la pression fiscale sur les contribuables puisque je ne crois pas que vous prévoyiez de réduire à due concurrence les taux d'imposition des collectivités qui seraient ainsi déchargées du financement des SDIS.
M. Michel Charasse. Les collectivités les réduiront automatiquement !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Il faudrait donc compléter votre amendement par sa conséquence pour les collectivités locales, faute de quoi il y aurait un alourdissement des prélèvements obligatoires auquel je ne pourrais souscrire.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-146.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez plaidé très brillamment tout à l'heure pour dire que nous n'avions pas à dicter leur conduite aux collectivités locales.
Les élus qui votent l'impôt savent parfaitement ce qu'ils ont à faire. Seulement, quand on leur demande tous les ans 30 % d'augmentation des contributions au service départemental d'incendie et de secours, pour l'instant, ils sont condamnés à augmenter les impôts locaux.
Il est bien évident que si, demain, cela passe directement par l'impôt, les collectivités locales n'auront plus à contribuer et il en résultera une détente sur la fiscalité locale au niveau des départements et des communes qui contribuent aujourd'hui. Les élus locaux en tireront les conséquences, soit en affectant les sommes disponibles à des actions auxquelles ils ne peuvent pas aujourd'hui consacrer suffisamment d'argent, soit en réduisant les taux. Ils n'ont pas besoin qu'on leur tienne la main !
Mais je pense qu'au moment où les foyers français vont recevoir la visite des pompiers pour les fameux calendriers (Murmures d'approbation sur de nombreuses travées), au moment où l'on mélange allègrement, dans le sentiment populaire, le pompier professionnel, qui est un fonctionnaire payé pour la tâche qu'il assume, et le pompier volontaire qui, lui, ne réclame rien...
M. Guy Fischer. Il est payé aussi !
M. le président. Monsieur Fischer, s'il vous plaît !
M. Michel Charasse. Notre collègue ne doit pas gérer de SDIS !
M. Guy Fischer. Vous croyez que, dans l'agglomération lyonnaise, nous ne connaissons pas le problème ?...
M. Michel Charasse. ... je dis simplement que les Français doivent savoir ce que leur coûtent leur « chers » pompiers ! (Très bien ! sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Guy Fischer. Il fallait y penser en 1996 !
M. le président. Monsieur Fischer, voulez-vous la parole pour explication de vote ?
M. Guy Fischer. Non, monsieur le président !
M. le président. Alors, taisez-vous ! (Sourires.) M. Jean Delaneau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delaneau.
M. Jean Delaneau. Je soutiens totalement l'amendement de notre collègue Michel Charasse, sans pour autant faire entièrement mienne son argumentation.
Pour ma part, j'ai déjà pris publiquement position dans ce sens, avant même que n'aient été perpétrées les exactions auxquelles M. Charasse a fait allusion.
M. le secrétaire d'Etat, vous avez des arguments assez curieux. Tout d'abord, vous prenez les collectivités territoriales pour ce qu'elles ne sont pas.
M. Michel Charasse. Des vaches à lait !
M. Jean Delaneau. Il serait heureux que les collectivités territoriales puissent être dispensées d'acquitter cette contribution au SDIS.
Certes, les sommes en cause viendraient des mêmes contribuables, mais au moins tous ceux qui réclament en permanence davantage de protection et de sécurité sauraient bien à quoi correspond ce qu'ils paient. J'ai, pour ma part, prévenu les habitants de mon département qu'ils devaient s'attendre à des augmentations de 10 % à 15 % pendant quatre ou cinq ans afin que l'on puisse faire face aux besoins.
Je pense que les collectivités territoriales, départements ou communes, tireraient elles-mêmes les conséquences sur l'appel à l'impôt local.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez dit que cette mesure accroîtrait la pression fiscale. Mais qu'avez-vous fait, tout à l'heure, en nous expliquant qu'il était très bien que les collectivités territoriales relèvent de 0,5 % leur contribution à la CNRACL ? C'est pourquoi j'ai voté tout à l'heure l'amendement qui était présenté par nos collègues du groupe communiste républicain citoyen. Chaque année, nous sommes finalement conduits à augmenter notre contribution à la caisse. S'agissant des SDIS, il en va de même.
Dans ces conditions, cet argument ne me paraît pas recevable, et je voterai donc aussi l'amendement de M. Charasse.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-146, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 34 bis.
M. Guy Fischer. Quelle démagogie !
M. Michel Charasse. Et les pompiers, ce n'est pas de la démogogie ?
Article 34 ter