Séance du 3 décembre 1999
M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant l'équipement, les transports et le logement : V. - Tourisme.
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec 423,4 millions de francs, les crédits du tourisme sont en hausse de 7,7 % par rapport à ceux qui étaient inscrits dans la loi de finances initiale pour 1999, à hauteur de 393,3 millions de francs. Dans les faits, la croissance des crédits de paiement dépassera 13,8 %.
Un tel budget mérite d'être voté unanimement, car aucun autre budget, mis à part celui de l'environnement, n'atteint une telle progression.
Il mérite également d'être voté parce qu'il est celui qui crée un bonheur possible de quelques semaines pour des millions de Français.
Soixante ans après l'apparition des congés payés, une trentaine d'années après l'essor du tourisme de masse, les vacances sont-elles devenues une habitude pour les Français? Malheureusement non : aujourd'hui encore, 16 % d'entre eux ne partent jamais en vacances et 24 % ne partent qu'une seule fois tous les deux ou trois ans !
Vous avez raison, madame la secrétaire d'Etat, de vous préoccuper de façon constante de ce problème de société. Trop de résidents de nos grandes cités sont privés de départ en vacances.
Il faut relever, par ailleurs, que, dans les 84 % de Français ayant pris des vacances, on englobe celles et ceux qui ont effectué un déplacement hors de leur domicile pour des visites à la famille ou à des amis.
A cela s'ajoute une tendance au raccourcissement significatif de la durée moyenne des séjours - 8,3 nuitées en 1999 - et notamment des vacances - séjours de 4 nuitées et plus - sur ces les mois de juillet et août.
Enfin, il faut également noter que 90 % des séjours touristiques personnels se déroulent sur le territoire national.
Vous avez raison, madame la secrétaire d'Etat, de considérer le droit aux vacances comme un objectif majeur de votre politique.
L'égalité des hommes s'exprime devant le droit au travail, mais aussi devant le droit aux vacances, comme devant celui à l'éducation, à la culture, au logement et à la santé.
Le budget du tourisme est un budget humaniste qui se doit de favoriser l'accès aux vacances de tous.
C'est aussi un budget générateur de richesses. La consommation touristique a représenté 7,3 % du produit intérieur brut, en 1998, soit douze fois la consommation de biens d'équipement ménager.
C'est encore un budget créateur d'emplois, directs et indirects. En matière d'hébergement et de restauration 600 000 salariés et plus de 185 000 non-salariés ont été employés en 1997. De 1998 à 1999, le secteur de l'hôtellerie et de la restauration aurait créé 20 000 emplois.
Mais le tourisme a encore bien d'autres potentialités !
Le tourisme, c'est un besoin d'équilibre humain, c'est une activité économique, c'est un secteur de travail et d'emploi, c'est un accès à la connaissance.
Pour juger de la qualité du budget du tourisme, examinons, tout d'abord, le niveau des activités du tourisme dans notre pays.
La France, avec ses 10 000 châteaux, dont celui de Versailles, monument le plus visité au monde, ses 220 variétés de fromage, son foie gras et ses truffes, ses paysages et ses sites si riches, divers et parfois enchanteurs, ses impressionnistes, son musée du Louvre, le plus grand du monde, et ses milliers de musées, grands et petits, est un appel, pour les hommes et les femmes du monde entier, à la connaissance, à l'émotion, au plaisir, à la détente, à la découverte de l'histoire, des arts et des lettres.
L'UNESCO ne vient-elle pas de classer au patrimoine mondial Saint-Emilion et son vignoble au titre des paysages culturels ? Ce patrimoine architectural englobe huit communes et classe pour la première fois un paysage viticole autour d'un village médiéval. D'autres valorisations sont possibles : c'est à nous, mes chers collègues, et aux élus en général, de prendre des initiatives.
Aucun autre pays au monde n'offre une palette aussi étendue. Pour paraphraser Théophile Gautier, qu'elle soit de bois ou de faïence, la palette France sait toujours y étaler la lumière.
Avec ses 70 millions d'arrivées touristiques internationales, la France a confirmé sa place de première destination touristique mondiale en 1998. Elle le confirmera, en 1999, avec une nouvelle progression qui permet d'envisager 72, 73 ou 74 millions d'arrivées. La part de la France dans le marché mondial atteint 11 %, contre 10,4 % en 1996 ; dans le marché européen, elle atteint 18,4 %, contre 17,7 % en 1996.
A ce propos, je souhaite faire deux remarques.
Premièrement, nous ne pouvons nous satisfaire du fait que 20 % du territoire absorbe 80 % de la demande touristique. Les produits touristiques ne doivent pas être réduits à un petit nombre de lieux. De ce point de vue, un effort doit certes être réalisé au niveau du ministère, mais beaucoup plus encore au niveau des collectivités territoriales, des contrats de plan, qui n'investissent pas suffisamment en matière d'entretien de notre patrimoine, d'image de marque, d'initiatives de promotion, de valorisation de lieux nouveaux.
Les crédits prévus à ce titre dans les contrats de plan s'élevant à 30 millions de francs, contre 17 millions l'année dernière, soit une augmentation de 69,5 % ; cette majoration doit permettre une meilleure préparation du douzième plan d'aménagement touristique du territoire.
Mais l'action en faveur du tourisme ne peut se réduire aux seules opérations financières menées par l'Etat au travers de ses différents budgets.
Je le dis d'autant plus sérieusement qu'aucune situation ne demeure acquise. J'attire en effet l'attention du Sénat sur le fait que, si, en juillet, la plupart des régions françaises ont enregistré des résultats en hausse, d'autres régions ont marqué le pas ou régressé, et pas des moindres, notamment la Bretagne.
Ces résultats doivent nous faire réfléchir, surtout lorsque l'on sait que, avec près de la moitié des nuitées, la mer demeure le lieu de séjour privilégié.
Il en va de même pour les régions intérieures du Sud-Ouest, de Rhône-Alpes, d'Alsace et du Nord - Pas-de-Calais. Pourquoi ? Des analyses et des correctifs s'imposent.
L'analyse est d'autant plus urgente qu'en août la fréquentation n'a pas augmenté dans l'Ouest, le massif alpin, où l'on note une régression, et en Ile-de-France, où l'on enregistre un simple maintien.
J'en appelle à vous, mes chers collègues, pour que vous preniez une part plus importante dans les analyses qui s'imposent et dans une réflexion nouvelle sur le tourisme rural, le tourisme fluvial, en pleine croissance, et le tourisme lié aux stations thermales - elles sont 104 en France - dont la fréquentation a diminué de 17,79 % en sept ans.
L'Agence française de l'ingénierie touristique, l'AFIT, groupement d'intérêt public créé en 1993 et dont le renouvellement a été décidé jusqu'en 2005, doit pouvoir jouer un rôle plus conquérant. Ce groupement a, en outre, pour mission de favoriser l'adaptation de l'offre touristique française aux évolutions de la société et de la consommation pour répondre à la demande, améliorer sa compétitivité, faire face à la concurrence internationale. Dans le rapport écrit, vous trouverez un certains nombre de rappels.
L'AFIT doit concentrer ses efforts sur l'aide au développement du tourisme sur l'ensemble du territoire français. Elle doit devenir encore plus un conseiller qu'un simple juge, même de la plus haute compétence.
Ma seconde remarque portera sur l'image que l'on peut présenter de notre pays à l'étranger.
Après une baisse d'activité en 1998, due à une réduction budgétaire, Maison de France a retrouvé une progression de plus de 23 % en 1999, avec une nouvelle augmentation de 13,4 % de la participation de l'Etat en 2000.
Nous voulons insister sur la nécessité pour Maison de France, groupement d'intérêt économique, de ne pas demeurer une simple vitrime de la France, d'être encore plus une force de proposition pour les touristes potentiels, notamment les jeunes désirant visiter la France.
Nous ne pouvons qu'encourager Maison de France dans sa décision de se tourner vers ce que l'on appelle des « marchés porteurs », notamment l'Europe de l'Est, avec l'ouverture d'un bureau en Pologne, et l'Asie, avec l'affirmation d'une présence en Chine.
En faisant mieux connaître la France, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous servons ses intérêts économiques et nous agissons pour développer l'emploi.
Certains chiffres doivent être retenus. Sur les sept premiers mois de 1999, les recettes de la balance des paiements ont augmenté de 17,9 %. L'excédent du poste « voyages » de la balance des paiements devrait dépasser 71 milliards de francs sur l'ensemble de l'année.
La France confirme sa position de première destination touristique, devant l'Espagne - 47,7 millions d'arrivées - et les Etats-Unis - 46,4 millions d'arrivées. Mais, malgré une progression de 8 % des recettes, elle n'est plus qu'au troisième rang mondial, avec 6,8 % du marché, derrière les Etats-Unis, 16,2 %, et l'Italie, 6,9 %.
Des progrès importants s'imposent. Le rapport écrit le note, les estimations pour 1998 du poste « voyages » de la balance des paiements laissent présager un taux de progression de l'ordre de 9 %. Ce résultat est encourageant. Mais nous ne pouvons nous satisfaire de ce simple constat.
Faisons une comparaison : en Italie, en un an, le taux d'arrivée de touristes a augmenté de 3,4 %, mais les recettes de plus de 5,4 %, en France, le taux d'arrivée a augmenté de 3,7 % ; mais les recettes de 4,9 %. La hausse des recettes touristiques est donc le problème majeur pour l'apport du secteur du tourisme à notre économie.
La capacité hôtelière de la France, avec 600 883 chambres, n'est que la troisième d'Europe derrière l'Allemagne et l'Italie. Une partie du patrimoine hôtelier mérite d'être modernisé.
Le secteur n'a créé que 20 000 emplois par an, alors qu'il pourrait en créer beaucoup plus - le double - à condition qu'une formation professionnelle de plus haut niveau permette aux jeunes d'investir ce vaste débouché. C'est là une condition essentielle au développement de l'emploi en matière touristique.
Madame la secrétaire d'Etat, en conclusion, je veux exprimer notre soutien à la priorité sociale que constitue le développement, dans notre pays, du droit aux vacances.
L'aide amorcée par la loi définissant l'accès au chèque-vacances, la tenue, en mai dernier, des états généraux du tourisme social, la mise en place d'une bourse « solidarité vacances », l'effort en faveur des hébergements associatifs sont autant de mesures que nous approuvons et qui constituent des décisions de progrès social, permettant aux plus démunis - pas tous encore ! - de bénéficier ou d'envisager de bénéficier du droit aux vacances. Cette action doit être articulée avec les efforts déployés en matière de politique de la ville.
L'autre série de mesures engagées afin de favoriser le gisement d'emplois que représente le tourisme constitue un autre volet d'une politique visant également au progrès social.
Les travailleurs saisonniers, nombreux dans le tourisme, doivent bénéficier de droits nouveaux.
Il s'agit, pour la plupart, de travailleurs vivant dans la précarité ; 60 % sont des travailleurs occasionnels. Ils représentent environ 420 000 personnes, au statut mal défini, très souvent en dehors de la réglementation du travail, aux salaires très insuffisants.
J'ai eu l'occasion d'interpeller le Gouvernement pour obtenir qu'ils puissent subir un contrôle médical à l'embauche.
Les salaires et les conditions de travail doivent également être revalorisés.
Leur formation professionnelle est trop faible, parfois même inexistante. Ils sont employés dans des PME qui, pour la plupart, ont des moyens insuffisants. Le secteur doit pouvoir bénéficier des fonds de la formation professionnelle. Le temps hors saison pourrait être utilisé pour organiser cette formation, devenue une condition d'un développement de qualité du tourisme dans l'ensemble du pays.
La convention collective pour le secteur de l'hôtellerie a été signée cette année.
Des accords sur la réduction du temps de travail sont en préparation. C'est d'autant plus nécessaire que, vous le savez, madame la secrétaire d'Etat, dans cette branche d'activité, les temps de travail hebdomadaire sont souvent élevés.
Voilà donc, madame la secrétaire d'Etat, une politique noble, équilibrée, alliant droit aux vacances, politique d'emploi et de progrès économique, une politique associant à la valorisation des richesses de notre pays une politique de progrès social. L'ensemble est harmonieux, car il constitue tout à la fois un intérêt national et une réponse à une évolution vers un droit aux vacances partagé par un plus grand nombre.
Madame la secrétaire d'Etat, je voudrais en conclusion regretter le vote unique sur les crédits du ministère de l'équipement, qui vous privera vraisemblablement, au sein de la Haute Assemblée, d'un vote positif, pourtant mérité et justifié dans la mesure où vous présentez des orientations valables pour une politique nouvelle et conquérante en matière de tourisme et de vacances. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Charles Ginésy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec plus de 70 millions d'arrivées touristiques en 1998, la France confirme sa place de premier pays d'accueil, loin devant les Etats-Unis et l'Espagne. Le tourisme constitue toujours, avec un solde de 71,7 milliards de francs, le premier poste excédentaire des transactions courantes, en progression de 7,5 % sur un an.
Le tourisme, c'est également, et surtout, un tissu de 200 000 entreprises, le plus souvent petites ou moyennes, qui témoignent d'un grand dynamisme, s'agissant notamment de l'hôtellerie-restauration, avec 20 000 emplois créés entre mars 1998 et mars 1999.
Il s'agit d'une donnée fondamentale en termes d'aménagement du territoire. Le développement touristique contribue à renforcer un maillage de petites entreprises, créatrices d'emploi et réparties sur l'ensemble du territoire.
Il convient donc de se féliciter de la hausse de 7,7 % des crédits du tourisme qui s'élèvent à 423 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 2000, confirmant ainsi la hausse déjà enregistrée l'an dernier.
Néanmoins, et au-delà du strict cadre budgétaire, je suis amené à faire trois séries de remarques.
Premièrement, madame le secrétaire d'Etat, je salue votre volonté d'accroître la fréquentation touristique française, en renforçant la mise en pratique du droit aux vacances pour tous au travers des moyens attribués au secteur associatif qui permettent de financer des mesures spécifiques pour les familles et les jeunes en grande difficulté. De plus, la reconduction des crédits inscrits au chapitre 66-03 vous permettra de poursuivre, voire sans doute d'achever le programme de réhabilitation du parc immobilier du secteur associatif.
S'agissant de la loi du 12 juillet 1999 relative au chèque-vacances, qui conforte la vocation sociale de ce dispositif en l'étendant aux salariés des PME de moins de cinquante salariés, je regrette qu'une démarche consensuelle n'ait pas prévalu lors des débats alors que l'ensemble des parlementaires était convaincu de l'intérêt du chèque-vacances.
Le Sénat, adoptant les propositions de la commission des affaires sociales, défendait une position plus pragmatique et ambitieuse, prenant mieux en compte les familles, afin d'encourager la mise en place effective du dispositif : je déplore que ces dispositions n'aient pas été retenues.
S'agissant de la promotion de la France à l'étranger, l'augmentation de la dotation au groupement d'intérêt économique Maison de la France se limite à compenser l'assujettissement de ce groupement à la TVA, alors qu'un effort plus important aurait été nécessaire pour promouvoir la destination France sur les marchés étrangers.
Ma deuxième observation porte sur le développement territorial du tourisme : je soulignerai à cet égard l'effort budgétaire finançant le volet « tourisme » des contrats de plan conclus pour la période 2000-2006. Mais permettez-moi de me demander si tout cela, malgré l'augmentation de plus de 50 % des moyens de paiement inscrits pour 2000, est suffisant. Je souhaite que la répartition de la deuxième enveloppe, lors de la réunion du comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire prévue en décembre, tienne mieux compte du volet « tourisme » reconnu comme composante essentielle du développement économique de nos régions.
Ma troisième série de remarques concerne l'aide apportée à nos infrastructures touristiques et aux entreprises du secteur.
S'agissant de la réhabilitation de l'immobilier qui a été adoptée par voie d'amendement dans le projet de loi de finances pour 1999 et qui repose sur le concept de village résidentiel de tourisme ouvrant droit à la récupération de TVA, il est très regrettable que les décrets d'application ne soient toujours pas publiés : c'est inadmissible au regard tant de la volonté du Parlement que des besoins constatés localement. En outre, que va-t-il advenir de ce dispositif dont l'intérêt semble indirectement remis en question par la mesure d'abaissement du taux de TVA intervenue depuis le 15 septembre dernier et qui porte sur l'ensemble des travaux effectués dans un logement ?
Plus généralement, et sans sous-estimer a priori l'intérêt du fonds de garantie pour le tourisme dont vous envisagez la mise en place au plus tard en 2001, madame le secrétaire d'Etat, la commission des affaires économiques reste très préoccupée par les difficultés auxquelles sont confrontées les entreprises du secteur, en particulier dans l'hôtellerie-restauration. Elle s'inquiète notamment de très graves répercussions qu'aura l'application de la réduction du temps de travail sur l'industrie du tourisme, exposée à une concurrence très vive de la part de nos proches voisins européens.
Dans ces conditions, on ne peut que regretter très vivement que le Gouvernement n'ait rien pu obtenir sur le plan européen, s'agissant de l'application d'un taux réduit de TVA pour la restauration traditionnelle. Cette mesure, créatrice d'emplois, aurait pu atténuer l'impact négatif de la loi sur les 35 heures dans ce secteur.
Compte tenu de ces observations, et malgré certains aspects positifs de ce projet de budget, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés au tourisme dans le projet de loi de finances pour 2000. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe socialiste, 11 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 7 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 7 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 5 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Bony.
M. Marcel Bony. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec une augmentation équivalente à celle de l'an dernier, le projet de budget du tourisme se place au troisième rang pour la progression budgétaire en dépenses. Autant dire que, une nouvelle fois, madame la secrétaire d'Etat, vous vous êtes très bien sortie de cet exercice difficile, mettant fin, pour le plus grand profit du développement durable, aux années noires qu'a connues ce ministère.
Le tourisme, nous le savons bien, est l'un des principaux producteurs d'aménagement et de développement du territoire au sens actuel du terme, c'est à dire dans ses dimensions économique, sociale et territoriale proprement dites. C'est donc à juste titre que le Gouvernement souhaite favoriser ce secteur, dont l'importance n'échappe à personne.
L'activité touristique ne s'infléchit pas dans notre pays, qui demeure la première destination touristique mondiale. Il faut s'en réjouir, mais quelques problèmes subsistent cependant.
Vous le savez bien, on trouve toujours une statistique pour démentir l'autre. En effet, avec 11 % du tourisme mondial, la France n'obtient pas plus de 6,8 % des recettes dégagées, ce qui pose un problème de rendement. Dans l'âpre compétition internationale, notre pays est moins bien placé que l'Espagne ou l'Italie. Le budget est l'occasion de changer la donne, il n'est pas en tête de la hiérarchie en valeur absolue, mais chacun voit bien l'effet de levier qu'il procure, via d'autres participations publiques ou privées. D'ailleurs, madame le secrétaire d'Etat, nous nous associons à la démarche que vous entreprenez de récapituler tous les efforts financiers de l'Etat pour le tourisme, en incluant les crédits des autres ministères et les concours versés aux communes. Il serait à mon avis légitime de connaître précisément le volume de l'intervention de l'Etat.
Pour transformer un espace de transit presque toujours rural en espace de destination, il est indispensable d'agir sur de nombreux ressorts. L'Etat pourrait mettre en valeur la complémentarité des prestations offertes sur l'ensemble du territoire, en évitant toutefois d'encourager des activités coûteuses créées à partir de rien et quelquefois sans avenir. En effet la légitimité touristique ne se décrète pas.
Dans cette orientation, l'immobilier touristique doit faire l'objet d'une remise à niveau. Je souscris donc aux préconisations de mon collègue rapporteur à l'Assemblée nationale d'en assurer le principe de financement par une mise sur le marché dynamique, gageant la rénovation sur des recettes à venir. Cela vaut spécialement en zone rurale et de montagne, où le patrimoine rural est prisé s'il correspond à certaines normes.
Les hôteliers-restaurateurs sont demandeurs de soutiens et de retours sur investissement. Le fonds de garantie en faveur de l'hôtellerie familiale que vous avez l'intention de constituer est une bonne chose pour le parc hôtelier traditionnel. Sera-t-il possible d'aller plus loin et de penser à un fonds d'intervention dédié à ce type d'hôtellerie ? Ce serait, je crois, une bonne chose. Les PME et les travaux publics de l'Etat doivent disposer des moyens nécessaires pour proposer un produit touristique renouvelé et renouvelable. Par ailleurs, les hôteliers-restaurateurs sont souvent liés par des chartes de qualité dans le cadre de labels multiples dont la juxtaposition finit quelquefois par poser problème. Il faudrait davantage de cohésion. Je n'insisterai pas sur la question de la TVA pour la restauration, que j'ai soulevée à plusieurs reprises.
Elus ruraux de moyenne montagne, Jean Besson et moi-même, ainsi que nombre de nos collègues, sommes attachés au tourisme vert, qui semble marquer le pas cette année. Votre action à ce titre doit rester primordiale, madame la secrétaire d'Etat, et j'observe avec un grand intérêt la création d'une conférence permanente du tourisme rural. Il faut en effet parvenir à changer la proportion actuelle, qui est de 80 % des touristes sur 20 % du territoire.
La moyenne montagne est aussi notre préoccupation, et nous savons qu'une mission vous a été confiée par M. le Premier ministre lors du Conseil national de la montagne. Qu'elle soit l'occasion d'explorer toutes les niches : diversification, élargissement des saisons, qualité, fonds de mutualisation en cas d'absence d'enneigement, etc. !
Le tourisme thermal doit également s'employer à harmoniser sa qualité par le haut. On peut penser que l'alerte générale autour des positions de la Caisse nationale de l'assurance-maladie, heureusement non validées par le Gouvernement, servira d'accélérateur à la mise en oeuvre d'une diversification touristique. La logique de projet doit primer et s'appuyer sur une structuration du territoire en réseau. La contractualisation avec les collectivités locales est essentielle. Nous attendons, particulièrement en Auvergne, que l'Etat intervienne résolument pour la mise en tourisme des stations.
L'aspect social, autre facette du développement durable, est bien présent dans votre budget.
Les états généraux du tourisme social en ont balisé les évolutions. La modernisation entreprise est à mettre à votre actif, madame la secrétaire d'Etat. Elle est d'autant plus importante qu'elle concorde avec la lutte contre les exclusions vis-à-vis des familles modestes ou des handicapés. Il reste que le secteur associatif n'est pas sorti de la crise et que son assujettissement aux impôts commerciaux ne va pas simplifier les choses.
La bourse solidarité-vacances ainsi que l'extension du chèque-vacances aux salariés des PME constituent également des avancées vers la banalisation de la consommation touristique qu'il convient de mentionner spécialement. Il y a là un gisement à exploiter, car les vacances sont loin d'être synonymes de tourisme, ni même de départ pour toutes les familles. Je vous remercie d'avoir fait du droit aux vacances pour tous votre priorité.
Le sort des travailleurs saisonniers est l'une de vos grandes préoccupations, et la mise en oeuvre du rapport de M. Le Pors en est la traduction. Cependant, le plus gros reste à faire, et je souhaite que ce document soit proposé comme outil de réforme lors de la présidence française de l'Union européenne. La formation professionnelle en est l'une des clés.
Le troisième point que je voulais aborder en matière de développement durable est l'organisation touristique sur le territoire.
Maison de la France est le fer de lance de notre politique touristique. Son enveloppe augmentera de plus de 13 %, mais elle va être assujettie à la TVA à compter de l'an prochain. Il faudra compter avec la participation des comités régionaux du tourisme, les CRT, qui s'était singulièrement amenuisée les années passées. Interrogeons-nous sur l'évolution du contexte mondial et sur les moyens que nous consacrons à la promotion par rapport à nos principaux concurrents européens.
Les délégations régionales au tourisme n'ont pas de très gros moyens au regard de leurs missions. Le budget pour 2000 leur donnera certes plus de souplesse de fonctionnement, mais il leur manque encore une dimension territoriale.
L'Agence française d'ingénierie touristique constitue un complément nécessaire, en prise avec la démarche prospective. Son efficacité, reconnue par de plus en plus de partenaires, n'est probablement pas suffisamment valorisée par l'Etat : la subvention de ce dernier a pratiquement été divisée par deux depuis la création de l'Agence, que vous avez pourtant su défendre dans l'attribution des crédits. Une décentralisation interrégionale - Massif central, par exemple - serait bienvenue.
L'outil d'assemblage le plus incontournable pour l'aménagement est le contrat de plan. La prochaine génération autorisera une forte progression des crédits au titre du tourisme. La seconde enveloppe a largement confirmé cette tendance, et je vous en félicite. Jean Besson souhaite qu'une attention toute particulière soit portée au volet infrarégional, puisque la loi permet maintenant aux pays de passer directement des contrats. J'exprime le même voeu. Ce serait une excellente occasion de tirer leur épingle du jeu pour les régions rurales, la région Auvergne en particulier. (Sourires.) Toutefois, le nouveau contrat de Plan ne distingue pas à l'intérieur des crédits du tourisme, le thermalisme. Il faudra donc veiller à ce que ce ne soit pas oublié.
Je ferai deux remarques pour conclure.
La cristallisation de la dotation touristique au sein de la DGF n'est pas satisfaisante. J'espère que le Gouvernement lèvera rapidement cette barrière du gel.
Le recouvrement de la taxe de séjour, archaïque, fait l'objet de nombreuses fraudes qui peuvent rejaillir sur le fonctionnement des offices de tourisme. Ne peut-on imaginer une modernisation, une dénomination différente et une intégration dans un processus d'accueil qui permettrait, outre de meilleures « rentrées » d'argent, une commercialisation plus intégrée et performante des communes classées ?
Madame la secrétaire d'Etat, votre budget démontre que la politique que vous avez initiée s'inscrit dans la durée. Le groupe socialiste le votera avec enthousiasme, en formant le voeu qu'il soit placé sous le signe des 35 heures. En effet, la réduction du temps de travail va produire une transformation sociale susceptible de faire évoluer le tourisme. Comme cela a été dit, « les temps libres des uns deviendront les temps de travail des autres ». Je ne doute pas que votre action contribue pleinement à adapter l'offre à ce changement. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le rapporteur spécial et le rapporteur pour avis nous ont encore fourni cette année, grâce à leurs rapports, une somme essentielle d'informations sur le secteur du tourisme ; je voudrais, au nom de mon groupe, les remercier. Cette recherche d'un véritable bilan me paraît extrêmement précieuse alors même que le tourisme, acteur essentiel de développement des vingt dernières années, s'apprête à franchir un siècle nouveau.
Il serait intéressant, madame la secrétaire d'Etat, que vous nous disiez si le « tourisme de l'an 2000 » est, en France, mieux ou moins bien positionné que celui de nos voisins, et quelles ont été les mesures prises pour aider, essentiellement les petites et moyennes structures du tourisme, à franchir ce siècle.
Je souhaite examiner avec vous les différentes formes de tourisme et attirer votre attention, chaque fois que cela sera nécessaire, sur la nécessité de conforter ou de réformer.
Les moyens financiers et matériels mis à la disposition de l'administration centrale et des services déconcentrés - je pense, notamment, aux délégations régionales de tourisme - sont toujours insuffisants. Que dire d'un secrétariat d'Etat qui engloutit plus de 40 % de ses moyens de fonctionnement en loyers pour des locaux le plus souvent mal situés et quelquefois d'accès peu aisé ?
Que dire aussi des locaux affectés à Maison de la France, sans vitrine sur la rue, alors que, dans le même quartier, des stations touristiques, des départements, des Etats exposent, légitimement, avec ostentation leur image et développent leur présence ?
Et pourtant, le tourisme confirme, année après année, son importance économique et un potentiel toujours renouvelé en matière de création d'emplois.
Malgré la modestie des crédits publics, il s'affirme comme catalyseur de l'aménagement du territoire, comme émulateur pour la conservation et la valorisation du patrimoine et comme créateur d'activités dans le secteur rural.
Quelles sont donc les actions où le ministère joue un rôle important ? Il m'apparaît possible de résumer ainsi son rôle : en premier lieu, le ministère assure la cohérence et la coordination des initiatives publiques vers le privé et l'associatif ; en deuxième lieu, il tente, depuis plusieurs années, de définir et de procurer des statistiques exploitables pour permettre de mieux dynamiser ce secteur ; en troisième lieu, par le biais de la Maison de la France, de l'agence française de l'ingénierie touristique et du service d'aide et d'aménagement touristique de la montagne, il favorise la promotion du tourisme et valorise son offre. En l'espèce, madame le secrétaire d'Etat, ces actions sont positives.
Je n'oublie pas non plus le volet social, si important dans la promotion du droit aux vacances pour tous et afin de lutter contre l'exclusion. Ce secteur est peut-être celui qui bénéficie le plus des initiatives de votre secrétariat d'Etat.
Globalement, les crédits que nous examinons aujourd'hui se caractérisent, en fin de compte, par un sous-dimensionnement par rapport aux ambitions affirmées. Maison de la France, pierre angulaire de la promotion touristique de la France, doit redéployer ses moyens pour conduire sa démarche compte tenu des aléas de son budget. L'ouverture de nouveaux bureaux qui correspondait au plan triennal, « Chine et Europe de l'Est », a entraîné, faute de moyens supplémentaires, des fermetures au Portugal, en Norvège, à Berlin et à Toronto, ruinant ainsi les efforts engagés depuis plusieurs années sur ces marchés.
L'agence française de l'ingénierie touristique, qui tend à favoriser l'adaptation de l'offre touristique française aux évolutions de la société, a développé, malgré, là aussi, des moyens limités, trois stratégies complémentaires : elle s'est chargée d'établir un inventaire de l'offre, elle participe avec son savoir-faire au développement territorial, elle assiste les structures et les entreprises à l'export.
Le service d'aide et d'aménagement touristique de la montagne est, quant à lui, un partenaire essentiel des stations de montagne et un observatoire avancé de l'évolution de l'activité, notamment axée sur la neige. Ses crédits de fonctionnement lui permettent à peine de poursuivre les actions engagées : il ne peut ni faire face à une modernisation de son parc informatique, ni lancer la réhabilitation de ses locaux.
L'an 2000 verra aussi la mise en place du plan Etat-régions, dont la durée sera désormais de sept ans. L'enveloppe relative au tourisme demeure modeste, comme l'ensemble des engagements publics sur ce secteur. En ce domaine, rien n'a changé : le tourisme, qui est essentiel pour l'aménagement du territoire, demeure le parent pauvre des contrats de plan.
Je souhaite qu'une part des investissements dégagés dans le contrat de plan soit réservée à la modernisation de la petite hôtellerie indépendante.
En matière de tourisme social, il faut désormais s'astreindre à maintenir l'identité de ce secteur en accentuant les actions de lutte contre les exclusions et en poursuivant la rénovation des hébergements. Le tourisme social serait d'ailleurs peut-être mieux soutenu si les chèques-vacances étaient plus largement distribués, et ce par un assouplissement des rigidités qui entourent encore son attribution. Mais les évolutions constatées cette année vont dans le bon sens, madame le secrétaire d'Etat.
Les interventions communautaires sur le tourisme demeurent limitées par l'absence d'une véritable reconnaissance. La prochaine présidence française pourrait s'honorer en mettant enfin en place un nouveau plan pluriannuel.
Heureusement, les fonds structurels ont largement bénéficié au secteur du tourisme, notamment au développement des zones rurales.
Le tourisme rural, devenu la première destination des Français pour leurs déplacements personnels, représente près de 37 % des séjours et 34 % des nuitées. Il est caractérisé par des séjours courts, en moyenne de cinq jours. Il canalise à son profit une fréquentation massive et régulière de la part de la population urbaine de proximité. Destination touristique en toute saison, le tourisme rural confirme, année après année, l'attachement des Français à une offre peu coûteuse et riche en activités. A cette occasion, je voudrais souligner la qualité des publications du Centre national des ressources du tourisme en espace rural.
Le marché du voyage d'affaires progresse cette année de plus de 9 %. Ce phénomène se traduit par une forte augmentation du nombre de voyages en Europe.
Afin de rationaliser ou de comprimer leurs dépenses, les entreprises ont défini une nouvelle politique de voyage en associant les agents de voyage. Il serait intéressant de savoir comment les pouvoirs publics encouragent la modernisation des entreprises de tourisme, que je juge indispensable si celles-ci veulent conserver une part significative du marché.
Je voudrais également attirer votre attention, madame la secrétaire d'Etat, sur trois points.
La situation des stations de sports d'hiver nécessite la revitalisation de leur fréquentation et la modernisation, dans la sécurité, de leurs activités. Des développements lourds sont nécessaires, en particulier pour les remontées mécaniques. Nos concurrents investissent trois fois plus que nous dans ce domaine.
De même, les professionnels attendent d'urgence les décrets d'application concernant le dispositif de réhabilitation de l'immobilier de loisirs. En ce domaine, c'est une modernisation complète qui doit être engagée pour adapter l'offre à la demande. Les aménagements doivent être entièrement repensés.
Il faut également évoquer la question primordiale de l'évolution du statut des saisonniers et celle du développement des aides au tourisme thermal par le maintien du remboursement des cures et le soutien à la thalassothérapie.
Je m'associe en outre aux demandes réitérées de mes collègues pour un réaménagement de la dotation touristique au sein de la dotation globale. La situation actuelle est source d'injustices et ne favorise en aucune manière les communes qui investissent.
Avant de conclure, je souhaite engager le Gouvernement, face à la croissance des flux touristiques dans les prochaines années, à développer des initiatives nouvelles. Vous avez évoqué la création d'un comité d'éthique du tourisme. Je crois qu'il faut effectivement donner à une institution les moyens d'alerter le consommateur sur les désordres éventuels qui accompagneront cette croissance.
Le tourisme doit se développer dans le respect des ressources naturelles, culturelles et sociales. Sa gestion doit s'affirmer dans le cadre de la responsabilité.
En concluant, je veux souligner que, malgré la poursuite du redressement des crédits du tourisme, les moyens mis en place ne permettent pas à notre pays de relever les défis du troisième millénaire. Voter favorablement serait pour notre groupe cacher aux Français la faiblesse chronique des engagements des pouvoirs publics pour développer le tourisme. Notre groupe votera, madame la secrétaire d'Etat, contre ce projet de budget. (M. Joly applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'année 1998 restera dans les mémoires comme une année riche en symboles. Après la Coupe du monde de football qu'elle a remportée, la France a battu le record du nombre de touristes étrangers accueillis sur son territoire. Le cap des soixante-dix millions d'arrivées a été franchi, confirmant la position de notre pays comme première destination touristique, loin devant l'Espagne et les Etats-Unis.
Bien évidemment, madame la secrétaire d'Etat, on ne peut que se réjouir d'une telle situation. Il n'en demeure pas moins que l'avenir du tourisme reste à construire. Rien ne serait pire que l'autosatisfaction. Les lauriers ne doivent pas nous endormir, mais nous stimuler.
En effet, si selon les projections de l'Office mondial du tourisme, la France devrait accueillir quatre-vingt-treize millions de touristes étrangers en 2020, la part de marché de l'Europe, dans son ensemble, devrait diminuer de 59 % à 46 % au profit de la zone Asie-Pacifique. C'est dire que, dans les vingt prochaines années, la concurrence mondiale va s'exacerber. Dans ce contexte, maintenir ou même améliorer la position de la France sera un combat de tous les jours.
Le rapporteur pour avis, notre éminent collègue Charles Ginésy a d'ailleurs fort judicieusement souligné les fragilités de l'économie du tourisme. Structurellement, la France a tendance à être un pays de transit, marqué par des séjours nettement plus courts que ceux qui sont enregistrés par ses concurrents directs. En conséquence, les recettes engendrées sont moindres.
Dans ces conditions, madame la secrétaire d'Etat, tout doit être fait, et au plus vite, pour renforcer notre compétitivité. Alors, une seule question se pose : le projet de budget que vous nous présentez aujourd'hui permet-il de relever les défis du siècle prochain ? Votre politique est-elle à la hauteur des enjeux, des vrais enjeux ?
Certes, avec une enveloppe de 423 millions de francs en moyens de paiement, le budget 2000 du tourisme progresse de 7,7 % par rapport à l'an passé. Bien ! Si nul ne peut d'ailleurs contester cette augmentation en valeur relative, qui fait suite à celle de 7,2 % en 1999, je note toutefois, madame la secrétaire d'Etat, qu'il va falloir tenir bon pour éviter qu'à l'avenir votre budget ne redevienne une variable d'ajustement du budget de l'Etat. Et nous savons tous que les tentations ne manqueront pas, tant il faudra bien financer les projets coûteux et dangereux, à mon sens, de ce gouvernement.
Il vous faudra encore plus de persévérance pour atteindre votre objectif de 700 millions de francs en 2003.
Mais l'essentiel n'est pas là. En économie, il y a ce qui se voit et il y a ce qui ne se voit pas.
Ce qui se voit, ce sont les moyens qui permettent d'intervenir. Encore faut-il qu'ils soient affectés aux bons endroits, pour les bonnes interventions.
Ce qui ne se voit pas, en tout cas pas toujours, c'est ce qui contribue au développement d'une activité économique, c'est l'environnement ou les conditions favorables qu'il importe de créer.
S'agissant des moyens, je ne reprendrai pas le détail des dispositions contenues dans ce projet de budget, celles-ci ayant été excellemment exposées par les rapporteurs.
Je voudrais simplement insister sur les outils de promotion de la France à l'étranger. Dans le climat concurrentiel que nous connaissons, il est plus que jamais indispensable de renforcer les moyens de Maison de la France. A cet égard, je regrette vivement que l'augmentation de 13,4 % des crédits alloués à ce groupement d'intérêt économique soit absorbée en quasi-totalité par son assujettissement à la TVA à compter de l'an prochain.
Ce n'est pas par cette « opération blanche » que Maison de la France pourra intensifier ses actions sur les marchés extérieurs. Cela est d'autant plus regrettable, mes chers collègues, que si un effort particulier doit être fait dans ce budget, c'est bien sur ce poste qu'il doit se manifester, et de façon significative !
Or tout se passe comme si les fêtes de l'an 2000 ne représentaient pas une formidable occasion de promouvoir la France à l'extérieur et d'inciter des centaines de milliers d'étrangers à venir découvrir les charmes et les richesses de notre pays et goûter cette véritable exception française : l'art de vivre de nos douces provinces.
Pensons au passage à l'an 2000, bien évidemment - sur les Champs-Elysées, par exemple - mais aussi - et surtout tout au long de l'année 2000.
A Paris, de nombreuses manifestations seront organisées jusqu'en janvier 2001 et c'est avec un grand plaisir que je vous en offrirai le programme, madame la secrétaire d'Etat... si vous ne l'avez déjà !
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme. Merci !
M. Bernard Plasait. A Nice, les délices de la baie des Anges inciteront les touristes à revenir pour s'embarquer sur des paquebots de croisière, le jour où, bien entendu, l'Etat participera au financement d'un nouveau quai d'embarquement.
Ailleurs également, en tous points de notre territoire, des merveilles sont à découvrir.
Bref, madame la secrétaire d'Etat, ne manquons pas l'occasion ! Aussi, je vous demande quels moyens supplémentaires vous entendez dégager, étant entendu que les 4 millions de francs que la « Mission 2000 » a donnés, cette année, à Maison de France sont très largement insuffisants.
Enfin, je voudrais rappeler une fois encore la nécessité d'adapter et de moderniser l'appareil touristique hexagonal. Je constate en effet que le développement de notre industrie touristique est entravé de toutes parts. Les entreprises familiales sont confrontées à de redoutables problèmes de transmission. Véritable gisement d'emplois, le secteur est sur-réglementé, sur-administré et sur-fiscalisé.
Je partage pleinement les craintes déjà exprimées quant à l'application des 35 heures dans le secteur de l'hôtellerie et de la restauration.
En revanche, je me félicite de l'adoption lundi soir, par notre assemblée, d'un amendement instituant un taux de TVA à 5,5 % pour la restauration traditionnelle. Cette heureuse initiative satisfait la proposition de loi que le groupe des Républicains et Indépendants a déposée en juin dernier.
Cette disposition est une nécessité pour éviter les distorsions de concurrence entre les différentes formes de restauration.
Elle se justifie également par l'obligation d'harmoniser notre régime de TVA avec ceux de nos voisins européens. Nos principaux concurrents sur le marché touristique appliquent en effet un taux réduit unique de TVA à la restauration.
Enfin, et surtout, le secteur des cafés, hôtels et restaurants emploie 800 000 actifs dont 600 000 salariés, ce qui fait de lui le quatrième employeur de France. Et la présente mesure favorisera la création d'au moins 12 000 nouveaux emplois en un an, selon certaines organisations professionnelles.
Dans ces conditions, je vous demande, madame la secrétaire d'Etat, de tout faire pour que cette disposition, que je crois essentielle pour le secteur touristique, soit maintenue par l'Assemblée nationale.
A la subvention, mieux vaut l'exonération. Aussi, pour ne pas être contraints d'aider massivement demain une industrie touristique en déclin, gardons-nous de l'accabler aujourd'hui. Au contraire, incitons-la à se développer en la libérant de ses entraves. Je ne doute pas que si elle est demain à égalité de concurrence elle ne remporte de durables et considérables succès dans la compétition mondiale.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. L'année dernière, au moment de l'examen des crédits destinés au tourisme pour 1999, j'avais eu l'occasion de vous féliciter, madame la secrétaire d'Etat, pour l'action que vous aviez entreprise à la tête du secrétariat d'Etat au tourisme. Sans tomber dans une complaisance que certains jugeraient partisane, je ne peux que saluer à nouveau votre volonté, qui continue de s'afficher, d'intervenir de façon plus efficace et dynamique encore, pour conforter, moderniser et développer un secteur essentiel à bien des égards à l'activité économique de la France, mais aussi à l'aménagement de notre territoire.
Les crédits au titre du tourisme pour 2000 s'élèvent à 423,4 millions de francs, soit, si l'on s'en tient à la loi de finances initiale pour 1999, une hausse de près de 7,7 %. On note donc que les moyens des services sont préservés et que les moyens d'intervention sont en nette reprise.
Dans ce dernier domaine, permettez-moi de noter la hausse de 69,5 % de la dotation aux contrats de plan Etat-régions.
En ce qui concerne ma région, l'Ile-de-France, l'Etat contribue pour la première fois, et à hauteur de 50 millions de francs, au développement du tourisme régional. C'est une première qu'il faut signaler et porter à votre actif, madame la secrétaire d'Etat, ainsi qu'à celui de la nouvelle majorité plurielle du Conseil régional.
Cette participation permettra notamment de développer les axes suivants : l'information et la mise en réseau territorial et régional, l'amélioration de la signalétique touristique en coordination avec l'Etat, les départements et les communes, la formation dans les métiers du tourisme, l'accueil des personnes handicapées, les dispositifs en direction des publics jeunes, la « mise en tourisme » de nouveaux territoires franciliens pour augmenter le nombre de pays d'accueil en Ile-de-France. Ce dernier point, qui est particulièrement important dans l'aménagement du territoire régional, devrait permettre d'appréhender le tourisme en Ile-de-France plus largement que les traditionnels sites de Paris intra muros, Versailles et Eurodisney !
Je referme cette parenthèse régionale pour revenir plus précisément au projet de budget pour 2000, et je note une nouvelle hausse, cette fois de 13,4 %, des crédits destinés à Maison de la France.
Enfin, les dépenses en capital connaissent, elles aussi, un traitement favorable, si l'on fait abstraction des augmentations de crédits non reconductibles qui sont intervenues au cours de la discussion du budget du tourisme pour 1999.
Cependant, la progression positive que vous réservez à ce budget, madame la secrétaire d'Etat, ne doit pas nous faire oublier l'écart gigantesque qui existe entre l'effort public directement consacré au tourisme et ce que cette activité apporte à l'économie française, tant en termes d'emplois que de recettes améliorant le solde de la balance des paiements.
Ce contraste va d'ailleurs être de plus en plus visible. En effet, les principaux résultats enregistrés depuis le début de l'année, vous nous l'avez confirmé, nous laissent à penser que l'année 1999 sera marquée par de nouveaux records de fréquentation et de consommation. Ces chiffres sont très positifs et c'est là une excellente chose.
Les conséquences sur la croissance et l'emploi sont d'ailleurs non négligeables. Je pense notamment aux hébergements, avec un taux d'occupation déjà en hausse, mais aussi à la progression du trafic d'Air France et de la SNCF. Je pense aussi à la création de 25 000 emplois dans le secteur des hôtels, des cafés et des restaurants.
Ces bons résultats doivent nous encourager à poursuivre une politique qui ait à coeur de promouvoir et de développer un tourisme durable et équilibré sur l'ensemble du territoire. Ils doivent également permettre l'accès aux vacances et aux loisirs pour tous, et donc avoir une incidence sur le tourisme social.
J'insisterai quelques instants sur ce dernier point, cher au groupe communiste républicain et citoyen.
Comment ne pas être sensible à ces chiffres, dont la réalité paraît si dure ? En effet, 40 % des Français ne partent pas en vacances et sont ainsi privés de ce droit fondamental, pourtant inscrit dans la loi relative à la lutte contre l'exclusion... Comme Mme Beaudeau le rappelait tout à l'heure, 50 % de ceux qui partent le font dans leur famille, faute de moyens. Ces indicateurs révèlent bien l'ampleur des dispositifs à mettre en place et qui ne relèvent pas, bien entendu, de votre seul secrétariat d'Etat.
Pour ce qui vous concerne, vous avez mis en place cet été bourses solidarité-vacances - 1 300 familles sont parties en vacances grâce à ces bourses - et vous envisagez de permettre le départ d'au moins 10 000 familles en l'an 2000.
Il est une autre mesure à laquelle nous tenons et qui contribue à rendre effectif le droit aux vacances pour tous : le chèque-vacances. Son élargissement permettra d'aller dans le sens d'une vraie démocratisation des vacances puisque 6 millions de personnes devraient pouvoir en bénéficier.
De plus, nous venons d'apprendre que les emplois-jeunes pourraient désormais bénéficer du chèque-vacances. Pouvez-vous, madame la secrétaire d'Etat, nous le confirmer ?
Je dirais maintenant quelques mots sur l'emploi dans le tourisme.
Ce secteur d'emplois reste encore trop souvent synonyme de précarité et de bas salaires. Les salariés du tourisme sont fréquemment en dehors des dispositions protectrices du droit du travail du fait de la durée de leur contrat. Ils sont par ailleurs, plus que les autres, victimes de difficultés de transport et de logement.
Il est urgent d'élargir leurs droits, notamment en matière de formation, d'assurance maladie et d'indemnisation du chômage. Ces améliorations seraient bien entendu profitables aux salariés, elles permettraient également d'améliorer la qualité de l'accueil.
Voilà près d'un an, avec Mme Martine Aubry vous avez demandé à M. Anicet Le Pors un rapport sur les saisonniers du tourisme. Nous connaissons la grande diversité de situation des 420 000 saisonniers de ce secteur. Ce rapport formule de nombreuses propositions.
Au-delà de la parution du guide des saisonniers, pouvez-vous préciser les actions que votre secrétariat d'Etat, mais également les autres ministères concernés comptent entreprendre dans ce domaine ?
Enfin, s'agissant des trente-cinq heures, pouvez-vous nous donner quelques éléments sur la mise en place de la réduction du temps de travail dans le secteur du tourisme ?
En conclusion, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, permettez-moi de regretter l'attitude de la majorité sénatoriale, qui a décidé de rejeter en bloc les crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement. Cette attitude d'opposition de principe ne me paraît guère constructive. Certains de mes collègues sur les travées de droite l'ont d'ailleurs également remarqué, puisqu'ils étaient plutôt partisans d'une position moins tranchée et proposaient de s'en remettre à la sagesse du Sénat.
Quant au groupe communiste républicain et citoyen, c'est sans état d'âme et avec conviction qu'il votera votre projet de budget. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur celles du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'activité touristique revêt une double importance dans la vie de notre pays. Elle a d'abord pris le relais de secteurs défaillants sur lesquels était fondée notre économie et son essor n'est pas terminé. Ensuite, elle contribue fortement à l'aménagement durable du territoire.
Alors que ce n'est pas une priorité à proprement parler dans les choix budgétaires, il convient de noter une augmentation de pratiquement un point des crédits de ce département si l'on exclut la compensation accordée à la Maison de la France, qui est désormais assujettie à la TVA.
Les objectifs de développement local et de valorisation de l'offre s'appuient fort opportunément sur une amélioration de l'observation économique. Toutefois, les recettes retirées par la France de son activité touristique restent nettement inférieures à celles qui sont enregistrées par les Etats-Unis, l'Espagne et l'Italie, qui sont nos principaux concurrents.
Déjà 73 % de la fréquentation touristique de notre pays ne concerne que 20 % du territoire. Il y a là un gros déséquilibre et un manque à gagner à tous points de vue.
Comme cela a souvent été constaté, les résultats sont médiocres, en termes commerciaux et économiques, pour une partie quantitativement importante de l'offre française, celle qui est offerte par des structures artisanales isolées et dispersées. Cela résulte du caractère aléatoire et incertain des flux de clientèle qui assurent leurs ressources financières. Cela engendre une fragilité structurelle qui est préjudiciable à la qualité et au dynamisme de ces entreprises. L'équilibre n'est obtenu qu'au prix d'une gestion extrêmement économe en investissements, charges et salaires, quelles que soient les méthodes employées pour limiter les charges à un niveau supportable.
Le tissu des PME, bien que fragile, est un élément très important du tourisme français. Il secrète une offre très riche et très diversifiée, ses capacités d'adaptation au marché et de créativité sont importantes, il génère des emplois dans des zones prioritaires quant à l'aménagement du territoire.
Pour l'instant, les tentatives d'amélioration n'ont pas abouti, qu'elles émanent d'initiatives publiques au niveau local - les SLA, les OTSI - ou de mouvements professionnels. En aucun cas ces structures n'ont réellement vocation à organiser le marché ni les moyens de le faire.
La démarche doit être conduite à l'échelon national. En effet, par définition, la dispersion engendre des quantités trop faibles dans chaque territoire pour supporter le poids des investissements indispensables pour attaquer le marché, qui est lui-même diffus dans l'ensemble français et européen.
L'expérience de l'agence française de l'ingénierie touristique - très bel outil qui mériterait des moyens supplémentaires - montre que peuvent être envisagées la conception et la conduite d'une politique nationale de mise en marché de cette offre dispersée avec des chances certaines de résultats. Il convient d'assortir cette mission de dispositifs assurant l'ensemble des fonctions nécessaires dans le cadre de cahiers des charges précis les dotant de moyens contractuellement déterminés pour une période limitée dans le temps.
Autour d'approches thématiques, l'offre artisanale, plus proche des terroirs, mieux articulée avec toutes les ressources de la destination, peut rencontrer facilement une clientèle à condition d'être accessible après avoir été sélectionnée et formatée suivant des process professionnels.
Permettez-moi de vous poser plusieurs questions, madame la secrétaire d'Etat.
La structure nationale spécifique contractualiserait avec les ministères concernés, notamment pour le volet budgétaire, les régions pour leur participation et Maison de la France pour la promotion. Pour les missions qui déborderaient de ce cadre, pourrait-on envisager la création d'offices comme ceux qui organisent le marché par produits en agriculture ?
Je viens d'évoquer le rôle des régions en matière d'activité touristique. A travers les contrats de Plan peut-on vraiment attendre que les efforts portent plus particulièrement sur les investissements, où les besoins sont encore réels ? Comment se traduiront vos propos, madame la secrétaire d'Etat, en matière de revitalisation économique en milieu rural, via le tourisme, dont les contrats de Plan devraient être le ballon d'oxygène ?
Dans cette même perspective, beaucoup d'espoirs ont été mis dans les travaux de la conférence permanente du tourisme rural. Répondent-ils aux attentes ?
En qualité de président national des comités départementaux de tourisme, je m'interroge sur l'application qui sera faite à ces structures des nouvelles dispositions fiscales relatives aux associations. Ces comités commercialisent certains produits touristiques, reçoivent des défraiements, éditent des documents et tarifient des prestations. Que va-t-il en être, madame la secrétaire d'Etat ?
Autre question importante : le développement de RESINFRANCE. Puisque vous semblez croire, madame la secrétaire d'Etat, en cet instrument, quels moyens allez-vous mettre en oeuvre en l'an 2000 pour asseoir et développer cet outil, l'objectif étant qu'il devienne un moyen de réservation moderne et adapté aux nouvelles technologies ?
Comme notre excellent rapporteur, Charles Ginésy, et mon cher collègue Plasait, une fois de plus, je reviens sur le taux de TVA appliqué à la restauration traditionnelle et je m'interroge sur l'attitude du Gouvernement français lors de l'examen, le 27 juillet dernier à Bruxelles, des secteurs bénéficiaires du taux réduit de la TVA.
La restauration, à la demande de la France et de l'Allemagne, a été retirée de la liste. Or le 13 octobre 1998, à l'Assemblée nationale, l'un de vos collègues, madame la secrétaire d'Etat, avait déclaré souhaitable de voir cette activité y figurer.
Déjà, en 1991, il y avait eu recul des représentants nationaux à Bruxelles. En conséquence, ce secteur d'activité à forte utilisation de main-d'oeuvre, considéré par un observatoire international comme majeur pour l'économie dans les années futures, a été sacrifié.
Loin de moi l'idée de contester le bien-fondé de la mesure d'application du taux réduit aux travaux d'amélioration de l'habitat, mais il n'est pas admissible de revenir sur un engagement pris devant le Parlement et de justifier ce revirement par un diktat de Bruxelles. C'est un mauvais coup porté à votre département, madame la secrétaire d'Etat.
Autre mauvaise disposition pour les activités saisonnières ou connaissant des pics horaires : la réduction du temps de travail. Bien qu'il faille s'appliquer à créer des produits et des événements tendant à gommer ces pics afin d'équilibrer la fréquentation, il faut dire clairement que ces nouvelles contraintes sont particulièrement inadaptées. Le client va-t-il se soumettre aux trente-cinq heures quand il lui prendra l'envie de dîner à vingt-deux heures ?
J'espère, madame la secrétaire d'Etat, que votre budget, que mon collègue Georges Mouly et moi-même voterons, si les réponses aux questions que nous avons posées sont satisfaisantes, augmentera dans les années à venir en proportion de la réduction du temps de travail converti en temps libre, ce temps libre élevé fugitivement au rang de ministère voilà deux décennies ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaiterais, en premier lieu, remercier Mme le rapporteur spécial de la commission des finances et M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour la qualité de leur travail et pour le soutien qu'ils m'apportent en vue d'une meilleure prise en compte de l'économie touristique dans le budget de la nation.
Je remercierai également les orateurs des différents groupes pour l'intérêt qu'ils portent à la question du développement touristique.
Alors que nous nous apprêtons à franchir le cap de l'an 2000 en ayant enregistré, cette année encore, d'excellents résultats pour le tourisme français, le projet de budget du tourisme, dont nous discutons aujourd'hui et sur lequel vous m'interpellez, affiche une volonté d'intervenir de façon plus cohérente et plus dynamique encore pour conforter, moderniser et développer un secteur essentiel à l'activité économique de la France, mais aussi à l'aménagement du territoire.
L'an dernier, ici même, j'ai déjà eu l'occasion de vous dire combien le tourisme est un secteur d'activité en croissance dans le monde et combien, surtout, il est créateur de richesses et d'emplois dans notre pays, combien - vous l'avez à nouveau fortement souligné - ce secteur est porteur d'espoir et pour notre économie nationale et pour l'ensemble de nos concitoyens.
Un an d'exercice supplémentaire et les très bons résultats du premier bilan de la saison touristique 1999 ne font que renforcer cette conviction.
Je puis vous confirmer en effet que nous battrons encore, en 1999, des records de fréquentation comme de consommation.
Je citerai à titre d'illustration quelques chiffres révélateurs.
Comme vous l'indiquiez il y a quelques instants, madame Beaudeau, le record atteint l'an dernier de 71 millions de visiteurs étrangers devrait être dépassé en 1999 puisque, pendant la saison estivale, le nombre de ces visiteurs était en hausse de 10 % ; cet accroissement s'est également confirmé durant les premiers mois d'automne.
Cette fréquentation accrue a fait sentir ses effets positifs sur le secteur tant au niveau des hébergements, où les taux d'occupation enregistrent globalement une croissance de plus de deux points, qu'au niveau des transports.
Les répercussions sur l'emploi sont tout aussi significatives, comme en témoignent les excellents résultats du secteur hôtels-cafés-restaurants. Celui-ci a en effet connu, entre juin 1998 et juin 1999, une augmentation de près de 4 % de ses effectifs salariés, augmentation qui s'est traduite par la création de plus de 25 000 emplois nouveaux.
Vous avez été plusieurs à rappeler que l'activité touristique nationale, qui représente désormais plus de 7,3 % du produit intérieur brut, a contribué pour plus de 71 milliards de francs au solde positif de la balance des paiements en 1998, ce qui la place aux tout premiers rangs de notre économie.
Permettez-moi de vous annoncer que ce solde sera, une fois encore, en progression en 1999 si j'en crois le bilan des huit premiers mois de l'année, qui affiche une croissance de cet indicateur de 17,9 %.
Ces bons résultats constituent un encouragement dans la politique que je conduis depuis plus de deux ans, une politique qui affirme son ambition de développer un tourisme durable, équilibré et harmonieux sur tout le territoire national, une politique qui encourage la croissance économique du secteur et la création d'emplois, une politique, enfin, qui favorise l'accès de tous aux vacances et aux loisirs.
Cette politique s'inscrit autour de trois convictions fortes.
Premièrement, le tourisme doit être reconnu à sa juste valeur, c'est-à-dire comme un important secteur économique de notre pays.
Deuxièmement, il correspond à une aspiration légitime de nos concitoyens à partir en vacances, à découvrir d'autres horizons, d'autres cultures. Favoriser ce droit légitime à l'épanouissement personnel et familial que constitue le temps de vacances devient alors, au-delà d'un acte de solidarité, un véritable acte de citoyenneté.
Enfin, le tourisme est une activité économique à laquelle se rattache une éthique fondée sur des valeurs : celles de l'amitié, de la solidarité, de l'échange des cultures. Il est facteur de progrès pour la tolérance et pour la paix.
Pour répondre à tant d'attentes et d'ambitions, il nous faut mener une action publique forte et cohérente, qui fédère les acteurs et les énergies, les soutienne et les accompagne dans leurs efforts pour offrir les meilleures prestations à nos visiteurs, de façon à promouvoir, dans notre propre pays comme à l'étranger, l'image d'une France séduisante et accueillante.
Une telle politique nécessite, vous l'avez tous souligné, des moyens à la hauteur des ambitions qui sont affichées. Aussi, le projet de budget dont nous discutons aujourd'hui est-il en hausse de près de 14 % par rapport à celui de 1999. Il constitue, pour la deuxième année consécutive, un signe fort envers la grande famille du tourisme.
En effet, les moyens consacrés au tourisme seront ainsi passés, en deux ans, de 335 millions de francs à 423,5 millions de francs.
Ces chiffres ne tiennent compte - c'est vrai, monsieur Bony - ni de la dotation touristique de un milliard de francs ni des crédits issus des autres ministères et qui viennent soutenir les démarches touristiques de territoires et de filières.
Comme vous l'évoquiez dans votre propos, j'envisage de les identifier plus précisément d'ici à 2001 afin d'offrir une meilleure lisibilité de l'intervention globale de l'Etat dans ce secteur.
Ce budget pour 2000 devrait donc contribuer à donner au tourisme les moyens de mieux exprimer ses potentialités en matière de croissance et d'emploi et vous avez été nombreux à exprimer cette préoccupation.
Cela passe tout d'abord par la valorisation des atouts de nos terroirs et par un soutien actif aux initiatives de développement local.
Cette indispensable « mise en désir et en tourisme » des territoires s'appuiera avant tout sur les contrats de Plan « tourisme », à la préparation et à la définition desquels j'ai attaché la plus grande importance, comme vous l'avez d'ailleurs souligné dans votre rapport, monsieur Ginésy.
Ceux-ci ne pouvaient être en effet, pour moi, un simple catalogue de bonnes intentions ni une procédure élitiste réservée à quelques initiés, mais ils devaient, au contraire, constituer un soutien au développement local de nos pays et agglomérations, qui repose sur les potentialités des territoires, mais aussi un soutien aux dynamiques qui se créent sur le terrain et qui sont, ne l'oublions pas, l'expression des attentes d'une population.
La première enveloppe de 520 millions de francs en faveur des contrats de plan « tourisme », annoncée voilà quelques mois, était déjà en augmentation de plus de 69 % pour le titre IV, soit 30 millions de francs en crédits, d'intervention et 20 millions de francs en crédits de paiement au titre des investissements.
Comme vous l'aurez noté, la seconde enveloppe attribuée à ces contrats confirme bien cette nouvelle priorité donnée au tourisme par l'Etat et les régions. Mon ministère consacrera donc 764 millions de francs à sa politique contractuelle, ce qui représente une augmentation de plus de 171 % par rapport au XIe plan, sommes auxquelles il faut ajouter 109 millions de francs pour le développement touristique des massifs et 10 millions de francs pour le plan Loire.
De même, je puis vous assurer, monsieur Arnaud, que j'agis pour que le tourisme figure en bonne place dans les DOCUP, les documents uniques de programmation, connaissant l'enjeu que représentent - vous l'avez souligné - les fonds structurels européens pour le financement du développement touristique.
Bien sûr, messieurs Bony et Joly, le tourisme rural devra trouver toute sa place dans ce développement et dans ces contrats, d'autant, comme vous l'avez rappelé justement, qu'il correspond de plus en plus aux nouvelles attentes telles que le besoin de nature, de culture, de retour aux racines et à la connaissance des traditions.
De plus, son développement s'inscrit dans la logique d'une meilleure répartition touristique des flux sur l'ensemble du territoire, dans la perspective d'une croissance qui s'affirme.
Enfin, nous le savons tous, son action de revitalisation économique est un ballon d'oxygène pour l'agriculture, le commerce et l'artisanat.
A ce propos, vous avez évoqué dans votre rapport, monsieur Ginésy, le délicat problème du loup. La présence de cet animal dans ses aspects touristiques n'a pas, pour l'instant, fait l'objet d'une démarche particulière. Un travail interministériel devra avoir lieu sur cette question dans le cadre de l'élaboration du « plan loup » que le Gouvernement prépare pour le début de l'année prochaine.
Pour en revenir au tourisme rural, je suis convaincue que le travail que j'ai engagé depuis maintenant un an avec les acteurs du monde rural, en lien avec mes collègues Jean Glavany et Dominique Voynet, devrait permettre de redonner l'élan et le dynamisme souhaitables à cette forme de tourisme, en s'appuyant sur les contrats de plan, bien entendu, mais aussi sur les nouvelles politiques issues des lois d'orientation agricole et d'aménagement et de développement du territoire.
Dans quelques semaines, verra ainsi le jour la conférence permanente du tourisme rural, qui fédérera l'ensemble des acteurs oeuvrant dans cette filière et qui deviendra l'interlocuteur privilégié des pouvoirs publics intervenant en faveur de son développement. Gageons, monsieur Joly, que ce nouvel outil conférera une nouvelle efficacité à nos interventions dans cette filière pleine de promesses.
A l'image de l'espace rural, la montagne, en particulier la moyenne montagne, fera l'objet d'une attention particulière de mon ministère, dans l'esprit de la mission qui m'a été confiée par M. le Premier ministre à l'occasion du dernier conseil national de la montagne.
Cette mission s'articule, je le rappelle, autour de logiques de diversification, d'amélioration de la qualité de l'offre et de plurisaisonnalité des activités. Là comme ailleurs - sur le littoral, dans nos villes d'art et d'histoire - nous nous attacherons à privilégier l'étalement de la fréquentation touristique sur l'ensemble des mois de l'année.
Je serai tout aussi attentive au développement du tourisme et des loisirs de proximité, qui constituent de nouveaux enjeux, tant le besoin d'activité en fin de semaine s'exprime de plus en plus chez nos concitoyens ; et ces enjeux sont d'autant plus importants que la réduction du temps de travail devrait encore amplifier ces attentes.
Puisque je parlais à l'instant du développement de nos filières et territoires, et en particulier de la montagne, je souhaiterais évoquer le thermalisme, cher à M. Bony.
Vous avez pu le noter, la position prise par le Gouvernement confirme le remboursement de l'intégralité des cures thermales, reconnaissant ainsi leur fonction sanitaire et leur contribution au bien-être de la population. Cela permet, certes, de préserver les intérêts du secteur, mais aussi et surtout de poursuivre le travail engagé pour moderniser les stations et les adapter à la double exigence médicale et touristique.
Le secrétariat d'Etat au tourisme poursuivra donc l'action qu'il a entreprise et dont l'objectif est de mettre en oeuvre, dans les stations qui le souhaitent, de façon individualisée, des schémas de mise en tourisme.
Favoriser la croissance et l'emploi signifie, bien sûr, répondre à la multitude et à la diversité des attentes en terme d'aménagement et d'équipement de nos territoires. Mais cela passe aussi par la mobilisation de l'ensemble des acteurs pour améliorer, diversifier, commercialiser et promouvoir l'offre touristique française, avec pour mot d'ordre la qualité : qualité de l'offre en termes d'équipements, mais aussi qualité de l'accueil.
Il nous faut donc accompagner les efforts qu'accomplissent les quelque 200 000 entreprises françaises qui oeuvrent dans le tourisme, pour moderniser leurs équipements et adapter leur offre aux nouveaux comportements et aux nouvelles exigences des vacanciers. C'est d'autant plus nécessaire que, à l'instar de la mobilisation autour de la coupe du monde de football, les célébrations de l'an 2000 en France nous offrent l'occasion de réaliser encore d'importants progrès. C'est tout le sens de la mobilisation de la grande famille du tourisme que j'ai engagée autour de la promotion d'événements festifs, en particulier le long de la « méridienne verte ».
Là encore, les contrats de plan Etat-région pourront utilement soutenir les initiatives publiques, privées ou associatives prises en la matière.
C'est pourquoi l'essentiel des augmentations du titre VI porte sur l'enveloppe « investissements » de ces contrats de plan, qui devra permettre d'encourager les démarches qualité, la modernisation de l'hébergement touristique, en particulier celui de la petite hôtellerie indépendante, que vous avez été nombreux à évoquer.
Mais vous m'avez aussi interpellée sur le financement de l'investissement touristique et sur les mesures à prendre en faveur des petites et moyennes entreprises, notamment pour faciliter leur désendettement ou leur accès au crédit.
Je souhaiterais, en réponse, vous indiquer rapidement quelles sont mes principales pistes de travail.
Comme vous l'avez indiqué, monsieur le rapporteur pour avis, j'envisage, pour aider les PME du secteur qui souhaiteraient adapter leurs équipements et améliorer les services qu'elles offrent à leurs visiteurs, la mise en place d'un fond de garantie.
Ce secteur, qui souffre d'une mauvaise image auprès des milieux bancaires, est tout à fait spécifique, étant à la fois à forte intensité capitalistique et de main-d'oeuvre, et à faible taux de marge. C'est à partir de ce constat que je fais procéder actuellement, par mes services, à une analyse micro-économique d'une centaine de PME constituant un « panel » du secteur de l'hôtellerie-café-restauration, dans huit départements, dont les Alpes-Maritimes, monsieur Ginésy, afin d'identifier les besoins en investissements du secteur à l'échelon national.
Cette étude permettra d'affiner la détermination de l'enveloppe nécessaire à ce fonds de garantie, que j'espère voir mis en place au plus tard en 2001.
Monsieur Arnaud, ce fonds, une fois qu'il sera opérationnel, viendra utilement compléter le dispositif existant de restructuration de la dette des entreprises hôtelières au travers des crédits de la Société française pour l'assurance du capital-risque, la SOFARIS, et les prêts bonifiés accordés au secteur de la restauration pour financer ses travaux de mise aux normes.
Vous avez été nombreux à évoquer le poids de la TVA sur les entreprises de restauration. Je crois qu'il faut avoir à l'esprit toute la complexité de ce dossier qui, comme l'a indiqué récemment ici même mon collègue Christian Sautter, reste ouvert : le débat continue de progresser.
Au demeurant, monsieur le rapporteur pour avis, d'autres leviers peuvent jouer en matière de création d'emplois dans ce secteur.
Ainsi, les allégements de charges que nous étudions, notamment dans le cadre de la loi sur la réduction du temps de travail, complétée par un ambitieux « plan emploi-formation » à la préparation duquel je m'attache depuis plusieurs mois, constituent des pistes de réflexion majeures pour répondre aux graves problèmes d'attractivité du secteur vis-à-vis des jeunes, de création et de meilleure qualification des emplois. Ils peuvent également contribuer, à terme, à l'amélioration des marges des entreprises.
Concernant le financement des collectivités, vous avez rappelé, monsieur Bony, que la loi de 1993 avait gelé la dotation aux communes touristiques et thermales, ce qui entraîne, il faut le reconnaître, des inégalités de situation entre les stations.
J'ai, pour ma part, appelé l'attention du ministre de l'intérieur sur ces distorsions et les inégalités qu'elles engendrent. Aussi, je me réjouis qu'en réponse une réflexion s'engage, sur l'initiative de mon collègue Jean-Pierre Chevènement et sous l'égide de la direction générale des collectivités locales, sur l'ensemble du mécanisme de péréquation.
Le Gouvernement est prêt, je vous le confirme, à examiner dans les meilleurs délais, avec les communes touristiques mais aussi hospitalières, les problèmes spécifiques qu'elles rencontrent en matière de dotations forfaitaires.
D'autres mesures, que j'avais annoncées ici même l'an dernier, entrent désormais en vigueur et contribueront, elles aussi, à cet effort qualitatif consenti en faveur de notre offre touristique nationale.
Je pense à la concrétisation du dispositif « villages résidentiels de tourisme », qui a pour objectif, vous l'avez rappelé, de favoriser la rénovation et la mise en marché de l'immobilier de loisirs de nos stations littorales ou de montagne, en particulier celles qui ont vieilli et qui doivent s'adapter aux nouvelles attentes des touristes.
Je tiens à vous confirmer, monsieur le rapporteur pour avis, que les textes d'application liés à ce dispositif viennent d'être validés au niveau interministériel et transmis au Conseil d'Etat. Je mettrai tout en oeuvre pour que ces textes paraissent au Journal officiel avant la fin de cette année.
Je pense aussi au nouveau processus de classement des restaurants de tourisme que mon ministère vient de mettre en place en partenariat avec la profession.
Je pense, enfin, aux mesures d'incitation et de promotion du classement des meublés de tourisme, définies en lien avec les loueurs et leurs représentants, mesures qui devraient permettre un meilleur suivi qualitatif du parc de meublés et en faciliter la mise en marché, en particulier auprès de nos visiteurs étrangers.
Vous avez, madame Beaudeau, évoqué le nécessaire soutien à la promotion et à la mise en marché de cette offre ainsi renouvelée.
Je vous rappelle, à cet égard, que le chapitre « promotion à l'étranger » de ce projet de budget pour 2000 est à nouveau conforté, ce qui permet d'augmenter la dotation à Maison de la France, dans la logique de redressement budgétaire engagée en 1999. Cela permet aussi et surtout d'en assurer l'assujettissement à la TVA. Cela permet enfin de mobiliser de façon plus significative l'indispensable partenariat des collectivités territoriales et du secteur privé.
J'indique à M. Plasait que Maison de la France a assuré, tout au long de cette année, la promotion des événements festifs liés aux célébrations de l'an 2000, en partenariat étroit avec la mission pour l'an 2000. Elle y consacrera encore des moyens importants l'an prochain.
Chacun le sait ici, le tourisme est un secteur aux évolutions rapides. Le fractionnement des séjours, les mutations du monde du travail, les changements intervenus dans la structure familiale ou encore l'essor considérable des nouvelles technologies et l'irruption du commerce en ligne sont autant d'éléments qu'il nous faut prendre en compte.
C'est la raison pour laquelle nous avons soutenu, dans le domaines de l'information et de la réservation, les projets défendus par les professionnels et les grandes fédérations territoriales du tourisme que sont la FNCRT, la FNCDT et la FNOTSI.
Je songe ici, bien sûr, au serveur RESINFRANCE, monsieur Joly, qui est entré en fonctionnement cette année et qui constitue un outil essentiel de la commercialisation de nos produits tant en France qu'à l'étranger. Ce système, qui permet, d'une part, le regroupement en un même site d'une offre représentative de la production touristique française et de sa diversité et, d'autre part, d'en favoriser la lisibilité, continuera d'être soutenu par nous dans ses développements à venir.
Cependant, je formule le voeu que l'ensemble des organismes institutionnels ou professionnels du tourisme puissent contribuer, par leur implication, à en faire l'outil efficace permettant à la France de valoriser son image et ses produits en Europe et dans le monde.
Pour aider les porteurs de projet et les PME du secteur à bâtir des projets viables, j'ai souhaité, comme je m'y étais engagée devant vous l'an dernier, soutenir l'élaboration d'un dispositif national d'observation et d'analyse des phénomènes touristiques et développer l'action de conseil et d'accompagnement conduite par l'Agence française d'ingénierie touristique.
C'est la raison pour laquelle le chapitre « Etudes » du titre III est en augmentation de 137 %, pour atteindre 17,3 millions de francs.
Cette forte progression permettra de réaliser la nouvelle enquête aux frontières qu'il nous faut adapter aux nouvelles contraintes de l'euro et qui constitue un outil majeur d'aide à la décision, tant pour les pouvoirs publics que pour les professionnels.
J'ai parallèlement demandé, dans l'esprit de la réforme de l'Etat, que la direction du tourisme procède à une réorganisation qui lui permette de mieux prendre en compte l'ensemble des éléments de la politique que ce budget traduit.
Dans le même esprit, et pour répondre à votre attente, madame Beaudeau, l'Agence française d'ingénierie touristique, outil très apprécié, vous l'avez dit, des investisseurs publics et privés, verra ses crédits augmenter de 12,5 % afin que puissent se développer ses missions de service public en faveur de la valorisation et de l'adaptation de l'offre touristique française.
Par ailleurs, pour lui donner ce rôle plus « conquérant » et lui permettre d'élargir le champ de ses interventions, nous conforterons cet outil au niveau de son personnel.
Pour accompagner les entreprises mais également et surtout les collectivités locales dans leur développement au service de la croissance et de l'emploi, j'ai souhaité combler le vide législatif qui handicape notre économie touristique. Vous savez à quel point je suis sensible à ce que nos textes et règlements évoluent au même rythme que le secteur pour favoriser et non pénaliser son développement. Or le caractère diffus de ces textes ne favorise pas, c'est vrai, la lisibilité et la prise en compte du secteur touristique dans toute sa dimension.
L'année dernière, ici même, j'avais évoqué la possibilité de recenser et de réformer l'ensemble de ces textes dans le cadre d'une grande loi d'orientation. Un premier travail de recensement exhaustif des difficultés rencontrées a été fait, à ma demande, par l'inspection générale du tourisme. A cette occasion, il est apparu que l'examen et le toilettage des textes actuels pouvaient être délicats et, surtout, extrêmement longs. Aussi ai-je préféré effectuer ce toilettage au travers de l'élaboration d'un code du tourisme, que je proposerai très prochainement au Premier ministre. Sa mise en oeuvre, par voie législative et réglementaire, devrait être finalisée à l'horizon 2001.
Vous avez tous souligné votre intérêt pour l'action menée dans le cadre de ma politique sociale du tourisme. Permettez-moi d'y revenir pour en souligner les avancées en termes d'actions.
Outre le fait d'avoir, pour la deuxième année consécutive, maintenu le doublement des crédits d'aide à la réhabilitation du patrimoine social, ce qui a permis, cette année, le soutien à plus de cent projets de rénovation, c'est une action beaucoup plus globale que j'ambitionne de mener.
J'ai d'ailleurs souhaité, pour ne pas la mener seule, y associer non seulement les régions, les départements et les collectivités locales, qui, souvent, en apprécient les retombées en termes de développement local et touristique, mais aussi le secteur associatif et les comités d'entreprise qui en sont les partenaires et les animateurs attentifs.
C'est dans cet esprit que j'ai organisé en mai dernier les états généraux du tourisme. C'est dans le même esprit que j'ai voulu diversifier les modes d'action de cette politique sociale.
Il en est ainsi du chèque-vacances, qui a montré son efficacité et qui est aujourd'hui renforcé par son extension aux salariés des petites et moyennes entreprises. Ce nouveau dispositif se met en place.
Cette politique sociale du tourisme n'aurait pas de sens si elle ne mettait pas en lumière l'invisible, c'est-à-dire, celles et ceux qui, étant exclus du travail, exclus des fruits du progrès, sont d'autant plus exclus du droit aux vacances. Il fallait à leurs yeux, mais aussi pour la puissance publique, revaloriser ce droit. C'est la raison pour laquelle il a été affiché clairement dans la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions comme un droit fondamental. C'est dans ce cadre que la bourse solidarité-vacances a vu le jour cet été.
Le budget 2000 renforcera encore les moyens budgétaires de cette structure. Mon objectif, je vous le confirme, est maintenant de la faire fonctionner toute l'année et de permettre le départ, en l'an 2000, d'au moins dix mille familles.
Vous avez été plusieurs à le souligner, l'emploi dans le tourisme est au coeur des enjeux de son développement.
En effet, c'est de l'importance des progrès que nous réaliserons en ce domaine que dépendent la qualité et la compétitivité de ce secteur, dont nous souhaitons que la croissance lui apporte stabilité et pérennité.
C'est animée de cette ambition que j'ai demandé, avec Martine Aubry, un rapport sur les saisonniers du tourisme à Anicet Le Pors.
Moins d'un an après la remise de ses conclusions, madame Terrade, on peut déjà parler d'une prise de conscience, d'une sensibilisation, voire d'une première mobilisation de tous les acteurs concernés.
Avec ce rapport, au-delà des conditions de vie, de travail, de logement et de santé, nous savons désormais que ces 420 000 saisonniers vivent une grande diversité de situations et qu'il convient d'aborder leurs problèmes dans leur extrême complexité.
J'ai donc choisi une méthode de travail fondée sur une importante action interministérielle, sur une mobilisation des services de l'Etat sur le terrain pour aborder le mieux possible cette diversité des situations ; et sur une sensibilisation et une concertation des partenaires sociaux.
Qu'en est-il dix mois après la parution du rapport ?
Un guide des saisonniers est disponible depuis deux mois, et nous travaillons avec les collectivités locales concernées à la mise en place de deux maisons de saisonniers expérimentales, l'une située dans les Alpes, l'autre dans les Pyrénées.
Pour ce qui concerne le logement, les propositions que nous préparons avec mon collègue Louis Besson s'inscrivent dans deux axes : une aide à la pierre spécifique pour la création de logements saisonniers et une aide à la personne par l'adaptation à la problématique du salarié saisonnier des textes en vigueur.
Pour ce qui concerne la formation, je tiens à signaler que les travaux de M. Le Pors ont été intégrés dans le chantier de la réforme de la formation professionnelle.
Par ailleurs, nous travaillons à une reconnaissance des acquis, des compétences et de la polyvalence de l'exercice des métiers du tourisme.
Une opération expérimentale sera menée dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Enfin, toutes les questions du respect du droit du travail en vigueur, des contrats de travail, de la sécurisation des embauches, des conditions d'exercice du dialogue social sont autant des pistes de coopération avec le ministère de Martine Aubry.
Concernant la saison d'hiver, vous avez évoqué, monsieur Bony, le problème du manque d'enneigement et l'opportunité de mettre en place un fonds de mutualisation.
Je vous informe que j'ai proposé, avec mon collègue Jean-Claude Gayssot, aux représentants de la profession des remontées mécaniques la mise en place, dans un cadre négocié, du fonds que vous appelez de vos voeux.
Cette proposition a reçu un accueil favorable des employeurs. Je ne doute pas que, dans les semaines et les mois à venir, des progrès soient effectués sur ce point dans ce cadre. Je ne manquerai pas, bien entendu, de vous en tenir informés.
Monsieur Joly, vous avez abordé la question de la réduction du temps de travail dans le secteur du tourisme.
Alors que, comme pour vous, monsieur Joly, il était impossible à beaucoup d'imaginer cette perspective - la nature des métiers y ferait obligatoirement obstacle - force est de constater que la réalité vient visiblement démentir ces mauvais augures, nous offrant ainsi la possibilité de relever le défi.
A ce jour, ce sont près de 200 000 salariés du tourisme qui sont concernés par les accords aujourd'hui signés, dont la plupart sont des accords offensifs et s'accompagnent donc de créations d'emplois.
Je ne saurais terminer cette intervention sans souligner l'effort consenti en faveur de l'international.
Observant que la croissance des flux touristiques mondiaux annoncée pour les vingt ans à venir pourrait donner le vertige à ses promoteurs et conduire à des désordres, il m'est apparu très vite indispensable d'engager la réflexion et la concertation à l'échelle tant européenne que mondiale.
Cette maîtrise des flux et de leurs conséquences sur l'environnement fait l'objet, dans notre pays, d'un réel savoir-faire issu d'une longue expérience.
C'est précisément ce savoir-faire que j'ai souhaité mettre au service des pays avec lesquels nous engageons des démarches de coopération synonymes d'enrichissement mutuel.
Je ne développerai pas ici tous les projets que je conduis. Ils s'articulent tous autour des notions de développement durable et de respect du code d'éthique que j'entends défendre partout où je me rends et dont j'ai appelé de mes voeux la définition lors de la dernière assemblée générale de l'Organisation mondiale du tourisme, en septembre dernier, à Santiago du Chili.
Ce code, élaboré par cent trente-huit pays membres, jouera le rôle de garde-fou face au triplement des flux mondiaux annoncé pour les prochaines années. Il prône un tourisme respectueux des hommes, des cultures locales et de l'environnement.
C'est animée de cette même conviction que j'ai pris récemment une initiative forte à destination du tourisme en Palestine et en Israël, autour de la constitution d'un circuit de la Paix qui unira la Palestine, Israël, la Jordanie et l'Egypte, et qui valorisera cette région, berceau de nos civilisations.
Le tourisme, faut-il le rappeler ? est porteur de valeurs fortes, celles de la tolérance, de l'amitié entre les peuples, de l'échange des cultures et des savoirs. Ce sens, je souhaitais le redonner à la politique touristique de la France. C'est ce qui m'enthousiasme et me guide dans l'ensemble des combats que je livre au service de ce secteur si essentiel à la société que nous voulons construire ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant le tourisme, inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement », seront mis aux voix aujourd'hui même, à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 1 201 471 218 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 2 566 390 791 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 8 623 500 000 francs ;
« Crédits de paiement : 4 153 330 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 15 059 753 000 francs ;
« Crédits de paiement : 6 626 678 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le tourisme.
I. - SERVICES COMMUNS
II. - URBANISME ET LOGEMENT