Séance du 18 janvier 2000
ÉLOGE FUNÈBRE D'ALAIN PEYREFITTE,
SÉNATEUR DE SEINE-ET-MARNE
M. le président.
Madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais prononcer l'éloge
funèbre d'Alain Peyrefitte.
(Mme le ministre et M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se
lèvent.)
« Encore un peu plus oultre. »
Cette ardente exigence de dépassement exprimée par une vieille devise de
chevalerie, Alain Peyrefitte avait choisi de la faire graver sur la garde de
son épée d'académicien.
Elle est révélatrice de l'homme d'exception qu'était Alain Peyrefitte.
Elu du peuple, homme d'Etat, diplomate, académicien, essayiste d'envergure,
historien, homme de presse, polémiste, Alain Peyrefitte fut tout cela.
Mais cette multiplicité, dans laquelle se mêlent et s'harmonisent la
réflexion, l'action et l'écriture, n'altère ni la richesse ni la très profonde
unité de ce qu'a été la vie d'Alain Peyrefitte.
L'attachement à ses racines constitue peut-être l'une des lignes de force du
destin de notre collègue.
Alain Peyrefitte est né le 26 août 1925 à Najac, dans l'Aveyron, où son père
et sa mère étaient instituteurs.
La fidélité d'Alain Peyrefitte à ces terres nobles et austères de l'Aveyron,
de l'Ariège et de l'Aubrac, qui furent celles de sa jeunesse, est
essentielle.
Il y suivit ses parents au gré de leurs affectations.
Il y fit ses études primaires, puis secondaires.
Il y passa ses vacances d'enfant, d'adolescent, puis de jeune homme, avec pour
point fixe la maison familiale de Saint-Beauzely, construite de ses mains par
un aïeul artisan maçon. Il y prit le maquis pendant l'Occupation.
Ces années de formation tissent un écheveau dense de liens étroits
d'attachement à un terroir, à un pays et à des hommes.
On y décèle l'ombre tutélaire et les solides héritages intellectuels, humains
et moraux d'une famille modèle de la République, où se mêlent René, le grand
frère normalien, des parents instituteurs laïcs, un grand-père gendarme, des
aïeux paysans, un arrière-grand-père artisan maçon.
Elève exceptionnel, Alain Peyrefitte est reçu à l'Ecole normale supérieure à
dix-neuf ans. Quoiqu'il quittât la Rue d'Ulm pour intégrer la première
promotion de l'Ecole nationale d'administration, dont il sortit, dans un rang
brillant, le plus jeune, Alain Peyrefitte resta fidèle à l'Ecole normale.
Il y consacra l'un de ses premiers ouvrages,
Rue d'Ulm.
Plus tard, il n'omit jamais de témoigner sa fidélité et sa
sympathie tant à l'Ecole qu'à ses condisciples de la Rue d'Ulm.
Au sortir de l'ENA, Alain Peyrefitte choisit la diplomatie. Il y excella.
La construction européenne fut la dominante de sa carrière diplomatique.
D'abord à Bonn, où, auprès d'André François-Poncet, il poursuivit une formation
privilégiée, puis au Quai d'Orsay, où il apporta une contribution éclairée à la
constitution des institutions européennes en gestation et, enfin, après avoir
eu en charge le consulat de France à Cracovie, entre Bruxelles et Paris, où il
participa activement à la préparation du traité de Rome.
Cette expérience de la diplomatie fut une part importante du parcours d'Alain
Peyrefitte. Jamais la dimension internationale ne sera absente de ses
réflexions.
En 1958, sous l'action conjuguée de sa passion pour l'avenir de son pays et de
cette ardente exigence qui l'habitait, et qu'il appelait « le sens de la
réalité », Alain Peyrefitte entre en politique.
Il se présente en novembre 1958 dans la quatrième circonscription de
Seine-et-Marne, celle de Provins-Montereau, où ses parents s'étaient retirés.
Il y est élu. Réélu député jusqu'à son élection au Sénat en 1995, conseiller
général du canton de Bray-sur-Seine de 1964 à 1988, maire de Provins de 1965 à
1997, Alain Peyrefitte est resté pendant quarante et une années de mandats
l'ambassadeur fidèle de sa terre d'élection de Seine-et-Marne.
Il aimait profondément ce qu'il appelait ce « microcosme français », où il
installa sa maison, aux abords de la cité médiévale de Provins. Il en défendait
opiniâtrement la cause et en admirait le dynamisme. Il en aimait les habitants,
auprès desquels il retrouvait les valeurs qui avaient orienté sa jeunesse.
Alain Peyrefitte fut un grand parlementaire.
A son retour à l'Assemblée nationale après les événements de mai 1968, il y
présida avec autorité et dynamisme la commission des affaires culturelles.
Quittant définitivement le Gouvernement en 1981, Alain Peyrefitte retourna au
Palais-Bourbon, où il siégea sans discontinuer jusqu'en septembre 1995, date à
laquelle il représenta la Seine-et-Marne dans notre Haute Assemblée, où il
rejoint la commission des affaires étrangères.
Qu'il s'agisse de l'équilibre des finances publiques, du statut de la
magistrature, de la présomption d'innocence ou de la construction européenne,
ses interventions dans cet hémicycle, justes et réfléchies, et souvent
prémonitoires, resteront dans les mémoires.
Parlementaire de talent, Alain Peyrefitte fut aussi un homme d'Etat, huit fois
ministre - toujours dans des postes clefs - sur une durée cumulée de onze
années et sous trois Présidents de la République successifs : le général de
Gaulle, Georges Pompidou et Valéry Giscard d'Estaing.
C'est, une fois encore, comme le plus jeune qu'il débuta, à l'âge de
trente-sept ans, une carrière ministérielle en entrant dans le premier
gouvernement Pompidou comme secrétaire d'Etat à l'information.
Ministre délégué aux rapatriés à la suite de la signature des accords d'Evian,
il fut nommé ministre de l'information en décembre 1962 et conservera jusqu'en
janvier 1966 ces fonctions, qui firent de lui, plus tard, le mémorialiste du
général de Gaulle.
Ministre de la recherche scientifique et des questions atomiques et spatiales
de janvier 1966 à avril 1967, Alain Peyrefitte fut ministre de l'éducation
nationale dans le quatrième gouvernement de Georges Pompidou, qu'il quitta au
lendemain des événements de mai 1968.
Revenu au Gouvernement, il fut ministre chargé des réformes administratives et
du Plan, puis ministre des affaires culturelles et de l'enseignement et, après
une interruption de trois années de ses fonctions ministérielles, il devint, de
mars 1977 à juin 1981, garde des sceaux du gouvernement Barre.
Homme politique de premier plan, Alain Peyrefitte fut aussi un intellectuel
engagé dans son siècle. Sa vie fut une synthèse achevée entre l'action et la
réflexion.
Cette fusion rare et parfaite, il l'avait mise brillamment en lumière chez
André Malraux dans le magnifique hommage qu'il lui rendit, ici même, en séance
publique, le 3 décembre 1996. D'André Malraux, Alain Peyrefitte disait : «
Comme le Tchen de
La Condition humaine,
il ne pouvait vivre une
idéologie qui ne se transforme immédiatement en actes. » Parce que,
ajoutait-il, « dans l'acte, il retrouve forcément l'homme et que, dans
l'action, c'est soi-même qu'on met en jeu et qu'on révèle. »
Tel était également Alain Peyrefitte.
L'oeuvre écrite d'Alain Peyrefitte est immense.
Elle est littéraire par la limpidité et la précision de son style.
Elle est scientifique par la rigueur de sa construction, la profondeur et la
multiplicité des recherches préalables qui la sous-tendent.
Mais, réflexion prospective sur son temps, alimentée aux sources d'une immense
culture, d'un sens aigu de l'histoire, et nourrie d'une expérience personnelle
des responsabilités politiques, l'oeuvre écrite d'Alain Peyrefitte s'élève au
niveau d'un témoignage éclairé de ce siècle.
La réflexion qu'Alain Peyrefitte a ouverte en 1973 sur la Chine avec la
publication de
Quand la Chine s'éveillera
et qu'il poursuivit au long de huit livres de
même ampleur est révélatrice de la méthode d'analyse et du système de pensée
qui furent ceux d'Alain Peyrefitte.
Rejoignant sur ce point essentiel la pensée du général de Gaulle, Alain
Peyrefitte estimait qu'un peuple devait rester lui-même, tel que sa culture et
son histoire l'ont fait, avec ses croyances, ses légendes, sa foi, sa volonté
de bâtir son avenir. Ainsi était pour Alain Peyrefitte la Chine, cet océan de
mercure, cette civilisation ancestrale, pourtant porteuse d'un formidable
avenir.
Le recensement des pesanteurs, mais aussi l'exaltation de cette volonté de
perpétuel renouvellement que toute nation porte en elle constituent peut-être
la colonne vertébrale de la réflexion d'Alain Peyrefitte.
C'est une démarche semblable qu'illustrent les brillants essais d'Alain
Peyrefitte sur la société française, qu'il s'agisse du plus connu d'entre eux,
Le Mal français,
publié en 1976, ou, dans un domaine plus spécifique,
Les Chevaux du lac Lagoda,
publié en 1981, et qui reste une réflexion -
ô combien actuelle ! - sur la justice.
Enrichie par la compréhension, l'action doit s'adapter aux circonstances comme
aux données immuables de toute société. Elle ne doit pas négliger le « principe
de confiance », ce « tiers facteur immatériel », sous-jacent de toute l'oeuvre
d'Alain Peyrefitte et qui, au-delà du travail et du capital, favorise le
développement de toute société.
Le corps de pensée d'Alain Peyrefitte rejoignait ainsi spontanément et
profondément celui du gaullisme.
C'est en ce sens qu'Alain Peyrefitte était spontanément et profondément
gaulliste.
C'est en ce sens qu'Alain Peyrefitte servit spontanément et sans faille le
gaullisme.
Serviteur éclairé du gaullisme au Parlement, au Gouvernement, Alain Peyrefitte
le fut aussi pour l'Histoire.
Avec son mémorial
C'était de Gaulle,
Alain Peyrefitte porta au sommet
la conjonction entre l'écrivain et le ministre.
De 1962 à 1969, Alain Peyrefitte fut sans interruption ministre du général de
Gaulle, qu'il rencontra quelque trois cents fois. Avec une précision rigoureuse
et un grand tact, il s'en fit l'incomparable biographe. Faisant oeuvre
d'historien, il témoigne d'une exigente volonté de toujours comprendre cet
homme, dont il disait si bien qu'il était « hanté par une idée plus grande que
lui, une idée de la France tellement haute qu'il en était transfiguré ».
Reçu à l'Académie française le 13 octobre 1977, Alain Peyrefitte fut appelé en
1983 à la présidence du comité éditorial du
Figaro.
Véritable homme de presse par sa rigueur professionnelle, par son combat
militant pour la langue française et par la hauteur de réflexion de ses
éditoriaux, Alain Peyrefitte fut aussi un redoutable polémiste. Il prolongea ce
talent aigu par la publication de plusieurs ouvrages de nature politique.
Alain Peyrefitte était un homme complexe.
Réservé, en raison d'une pudeur qui pouvait apparaître comme de la froideur,
animé d'une exigence morale de dépassement de soi qui pouvait apparaître comme
de l'ambition, habité par un sens rigoureux de l'Etat qui pouvait apparaître
comme de l'intransigeance, mû par une rigueur intellectuelle aiguë qui pouvait
le faire croire hautain, Alain Peyrefitte était avant tout un chrétien, un
gaulliste et un homme de coeur.
La foi chrétienne est sans doute l'un des ressorts intimes qui dirigea sa
vie.
Gaulliste, Alain Peyrefitte l'a été dans l'action et dans l'écriture et, peut
être aussi, au plus profond de sa personnalité. Ne rejoignait-il pas là encore
le général de Gaulle lorsque, évoquant la grandeur, il disait : « Cette
grandeur ne tient qu'à nous, à chacun de nous. Chacun y est appelé, mais
personne d'autre que soi-même ne peut entendre l'appel, en relever le défi. Ce
n'est pas la cause pour laquelle on se bat qui nous justifie. C'est la qualité
du combat. » ?
Homme de coeur, Alain Peyrefitte l'était par ses fidélités. Il l'était aussi
par ses meurtrissures. Certaines ingratitudes et certaines attaques l'ont
profondément affecté. Jamais il n'oublia l'attentat qui l'avait visé et dont
son chauffeur fut la victime. A jamais, malgré sa foi, il fut meurtri par la
mort de Christel, sa fille.
A ses collègues du groupe du Rassemblement pour la République, à ses collègues
de la commission des affaires étrangères, aux élus de Seine-et-Marne et à la
municipalité de Provins, à Mme Alain Peyrefitte, à ses filles, Florence,
Véronique et Emmanuelle, à son fils, Benoît, je voudrais dire, en notre nom à
tous, mes condoléances sincères, émues et profondément attristées.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, haut fonctionnaire, normalien, diplomate,
intellectuel, académicien, journaliste, historien, ministre, homme politique,
l'immense carrière d'Alain Peyrefitte ne ressemble à aucune autre.
Cet homme brillant, aux multiples talents, aura marqué de sa présence, et
souvent de son empreinte, l'histoire contemporaine de notre pays.
En remontant le cours de son itinéraire hors du commun, on est frappé de
constater qu'il manque peu de distinctions, peu d'honneurs, voire peu de
talents, à celui qui avait reçu en partage les dons innés de l'esprit et la
faveur du destin.
Pourtant, au moment d'évoquer sa mémoire, après avoir été saisi par la
multitude de ses facettes, une question jaillit d'elle-même : qui était
réellement AlainPeyrefitte ? Certes, on m'objectera qu'un secret aussi
jalousement gardé constitue, en soi, l'un des plus beaux hommages que l'on
puisse rendre à un homme de cette stature ayant à ce point marqué les esprits
dans des domaines si différents. Néanmoins, une lecture attentive de son
parcours ramène sans cesse à l'esprit quelques images clés, quelques mots
symboles d'une trajectoire dont on parviendrait finalement à saisir le fil
conducteur.
Ainsi, comme un leitmotiv, reviennent les termes de fidélité, combat,
contraste, recherche et... confiance.
C'est, par exemple, mû par le sentiment de confiance, qui sera le sujet de
l'un de ses premiers essais, que ce fils d'instituteur aveyronnais « monte » à
Paris poursuivre ses études.
Que ce soit sur les bancs de l'Ecole normale, de l'ENA et de la Sorbonne ou
sur ceux de l'Académie française, du Palais-Bourbon ou du Luxembourg, dans son
bureau à Provins, en poste à l'étranger ou devant la page blanche du livre,
partout il promène sa soif de savoir, sa rigueur légendaire et parfois les
affirmations au ton polémique visant à relancer et nourrir le débat.
Sa formation et sa carrière le placent dans la lignée de ceux qui accèdent,
par leur mérite, aux plus hautes dignités de la nation.
Produit pur de l'élitisme républicain, dont il a pourtant critiqué les
travers, Alain Peyrefitte faisait partie de ces hommes qui se sont pliés aux
règles imposées par une formation et un parcours essentiellement classiques,
mais qui ont su, parallèlement, préserver, forger et épanouir pleinement leur
talent personnel.
Alain Peyrefitte illustre cette tradition avec toute la complexité et la
richesse qui sont les siennes. C'était un homme paradoxal, assurant la synthèse
impossible entre les charges d'un grand serviteur de l'Etat, sept fois
ministre, et les activités de l'écrivain, historien, journaliste, féru d'esprit
critique et de liberté.
Nul doute que l'exercice du pouvoir a été pour cet intellectuel engagé un
exercice de style lui permettant de passer à l'action.
Il l'a fait, comme toujours, en se donnant corps et biens à la mission qu'il
s'était vu confier et en fidélité totale à ceux qui la lui avaient confiée.
Il l'a fait en sacrifiant tout à ces deux axiomes, ses sympathies partisanes
comme ses préventions de chercheur.
Les certitudes du combattant politique pouvaient-elles se satisfaire des
doutes et des questions de l'intellectuel ? Il les mit officiellement entre
parenthèses, allant jusqu'à déstabiliser ceux qui l'avaient connu sous d'autres
cieux, menant d'autres quêtes consacrées au questionnement du monde et à son
ordonnancement.
Pourtant, sous la cuirasse du combattant, il ne s'est jamais départi des
habits du chercheur.
Le fil rouge qui traverse sa vie est celui qui relie ses débuts à l'Ecole
normale à la thèse qu'il soutient en 1994 à la Sorbonne. C'est le fil rouge de
l'éternel chercheur qu'il a toujours été, du grand voyageur qui avait choisi
pour tout premier poste celui de diplomate alors qu'il n'avait jamais quitté la
France. C'était un voyageur comme seuls le sont ceux qui ont grandi dans leur
village et qui demeurent profondément enracinés à leur terroir. Un voyageur qui
s'était donné pour mission de faire connaître un pays mythique mais mal connu,
la Chine, ou de dénoncer un autre univers kafkaïen, l'administration française.
Un voyageur dans le temps aussi, émule de Tocqueville, qui a beaucoup écrit sur
l'histoire et la philosophie politique.
L'écrivain, l'essayiste, l'éditorialiste tour à tour érudit ou acerbe du
Figaro,
était devenu ces dernières années le brillant mémorialiste du
gaullisme. Il avait donné pour titre à son ouvrage :
C'était de Gaulle.
Avec ses dernières forces, il venait d'en achever le troisième volume.
C'est assez dire l'énergie, la capacité de mémoire et d'organisation de ce
grand témoin, pédagogue passionné, chez qui l'érudition et l'expérience ont
donné naissance à de magnifiques ouvrages salués par la critique mais aussi le
grand public.
Dans ces ouvrages consacrés au général de Gaulle, on le retrouve effacé,
admiratif jusqu'à la dévotion devant ce qu'il appelait lui-même « le miracle »
de Gaulle, devant ce héraut du pragmatisme qui avait réussi selon lui ce qu'il
y a de plus grand en politique : redonner et inspirer la confiance.
Alain Peyrefitte n'a pas seulement consacré des années de travail littéraire à
celui qui constitue sans doute l'ultime repère de sa carrière : il lui avait
auparavant donné trente ans de sa vie. C'est au nom de cette fidélité qu'il
s'est fait combattant, souvent rugueux, profondément engagé dans les débats de
notre temps. En 1958, âgé de trente-trois ans, il est élu député gaulliste de
la Seine-et-Marne et le restera jusqu'à son élection au Sénat en 1995.
L'histoire d'Alain Peyrefitte est l'histoire d'une fidélité : fidélité à un
homme, le général de Gaulle, fidélité à l'Etat, qu'il sert avec un don de soi
total, fidélité à la France et à Provins, qu'il sert comme maire pendant
trente-deux ans.
Du chercheur perpétuel au secrétaire général de l'UDR en passant par le
ministre, l'homme de presse, l'académicien auteur d'immenses succès publics, ce
sont tous ces personnages simultanés qu'il tâchait d'accorder en lui et qui
faisaient la personnalité si contrastée d'Alain Peyrefitte, son intelligence si
aiguë et son destin hors du commun.
Son ultime performance restera sans doute d'avoir su nous faire profiter, et
parfois nous faire subir, tous ces talents avec une égale réussite. Chacun
d'entre nous a été à un moment ou à un autre impressionné par AlainPeyrefitte.
Je l'ai été. Au-delà des affrontements, il restera comme un symbole
d'excellence, un de ces hommes qui ont tout donné aux passions qui étaient les
leurs, un de ces hommes qui font honneur à la politique, un grand Français.
Madame, Florence, Véronique, Emmanuelle, Benoît, c'est en pensant aussi à
Christel, votre fille, votre soeur, trop vite disparue et que j'associe dans ma
mémoire, que je vous adresse les condoléances sincères du Gouvernement,
auxquelles j'ajoute mes personnelles pensées chaleureuses.
M. le président.
Mes chers collègues, selon la tradition, nous allons interrompre nos travaux
quelques instants en signe de deuil.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures
quarante-cinq.)