Séance du 25 mai 2000
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Ma question s'adresse à Mme le garde des sceaux, qui est absente.
Depuis quelques semaines, le site du SNES, le syndicat national des enseignants du second degré, les panneaux des IUFM, les instituts universitaires de formation des maîtres, affichent un certain nombre de petites annonces présentant des offres curieuses du genre : « Cherche un ou une partenaire pour pacser rapidement, si possible avant le 1er mars. Merci de répondre le plus rapidement possible. » En effet, il faut du temps pour effectuer des démarches. Académie ciblée : Montpellier. On appelle cela non pas de l'amour mais de la rage ! (Protestations sur les travées socialistes.)
Le PACS est une chose noble, respectueuse : vous nous l'avez dit !
Le 27 février, on pouvait lire : « Salut à toi, je recherche aussi quelqu'un pour promesse de PACS. Veuillez me contacter rapidement au 01... » ; je ne vous communique pas la suite, mes chers collègues.
Plusieurs sénateurs sur les travées socialistes. Si ! Si !
M. Nicolas About. Je continue : « PACS urgent ; j'ai hâte de quitter le 93. »
Ou encore : « N'hésitez pas à vous pacser comme moi. »
M. René-Pierre Signé. Réactionnaire !
M. Jacques Mahéas. C'est l'ordre moral !
M. Nicolas About. Eh oui, monsieur le ministre, ces témoignages, de plus en plus fréquents, font état, au sein de l'éducation nationale, d'un nombre croissant de PACS - je n'oserais pas dire blancs - conclus uniquement aux fins d'obtenir une mutation avantageuse dans une région de la France.
La loi de 1999 relative au PACS, qui fut élaborée à la hâte par votre majorité (Protestations sur les travées socialistes), a étendu le droit prioritaire de mutation et de détachement aux fonctionnaires liés par un pacte civil de solidarité,...
M. René-Pierre Signé. La question !
M. Nicolas About. ... ce qui signifie en clair que, au même titre que les conjoints mariés, les enseignants pacsés bénéficient de 90 points de bonus sur le barème des mutations. Il leur est ainsi plus aisé d'obtenir l'affectation désirée au nom du vieux principe du rapprochement des couples de fonctionnaires, édicté par la loi Roustan.
M. le président. La question ?
M. Nicolas About. J'y viens.
Il n'en fallait pas moins pour que les petits malins profitent de l'aubaine et portent un coup bas à la loi Roustan. Le principe est simple, vous le connaissez très bien !
Mme la ministre s'est récemment félicitée de constater le nouvel engouement des Français pour le PACS.
M. le président. La question, monsieur About !
M. Nicolas About. Je la pose, monsieur le président. (Exclamations sur les travées socialistes.)
Peut-on nous dire combien, sur le nombre de contrats signés, ont été annulés depuis quelques mois ? Peut-on nous dire quelles mesures seront prises pour mettre fin à ces abus au sein de l'éducation nationale ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, la loi du 15 novembre 1999, en instituant le PACS, a donné aux partenaires de ce contrat certains avantages qui découlent d'une union qu'ils ont voulue stable et, dans une certaine mesure, publiquement reconnue. Parmi ces avantages, figure la faculté de rapprochement offerte aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles.
Il existe une rumeur, rapportée par la presse, selon laquelle des fonctionnaires de l'éducation nationale auraient contracté des PACS...
M. Nicolas About. Ce n'est pas une rumeur !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. ... non pas pour mener une vie commune, mais pour obtenir des chances supplémentaires de mutation.
L'information - vous le comprendrez - est à prendre avec précaution : les formalités du PACS ne permettent pas que quiconque soit interrogé sur les raisons pour lesquelles il contracte : cela relève évidemment de son intimité.
Aucun élément ne permet aux tiers de connaître, à partir des éléments confidentiels recueillis par les greffes, les fonctions des personnes concernées. Personne, bien sûr, ne peut préjuger la volonté des contractants de vivre plus ou moins longtemps ensemble : cela ne regarde qu'eux.
M. Nicolas About. Pas du tout !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. On ne peut manquer d'épouver une certaine gêne à l'énonciation de ce qui est présenté comme un phénomène social, mais dont la consistance est incertaine, parce qu'elle relève d'informations incontrôlables et manifestement incontrôlées.
M. Nicolas About. Vous ne voulez pas le contrôler ! Ce n'est pas pareil ! (Protestations sur les travées socialistes.)
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Mais il faut tout de même examiner l'éventualité, qui se présentera sans doute, du PACS de complaisance ou de pure convenance.
Les personnes qui seraient tentées par de tels détournements de la loi doivent en mesurer les conséquences. S'il est vrai que le PACS se défait plus facilement, il n'en demeure pas moins que les partenaires sont liés, pendant sa durée, par une solidarité vis-à-vis des tiers et par des obligations entre eux.
Par conséquent, il y aurait beaucoup d'inconvénients à ce que certains détournent cette loi au vu des risques qu'ils prendraient par rapport à leur contractant.
Dans le principe même, il manque à un PACS conclu sur de telles bases ce qui fait l'essentiel de l'engagement contractuel : la volonté de vivre ensemble et de se prêter mutuellement assistance. Rechercher dans un PACS non pas l'engagement personnel mais des avantages secondaires constituerait un détournement de sa finalité qui serait sanctionné par la loi et les juridictions. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
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