Séance du 7 juin 2000






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Candidatures à un organisme extraparlementaire (p. 1 ).

3. Loi de finances rectificative pour 2000. - Discussion d'un projet de loi (p. 2 ).
Discussion générale : Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget ; MM. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Alain Lambert, président de la commission des finances.

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN

M. Charles Descours, rapporteur de la commission des affaires sociales.

4. Nomination de membres d'un organisme extraparlementaire (p. 3 ).

5. Loi de finances rectificative pour 2000. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 4 ).
Discussion générale (suite) : MM. Philippe Adnot, Gérard Cornu, Thierry Foucaud, Gérard Miquel, Yves Fréville, Jean-Claude Carle, François Autain, Jean-Pierre Demerliat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget ; M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er (p. 5 )

Mme Marie-Claude Beaudeau.
Amendement n° 68 rectifié de M. Jacques Oudin. - MM. Jacques Oudin, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Rectification de l'amendement.
Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 1er (p. 6 )

Amendement n° 53 de M. Thierry Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° 69 rectifié de M. Jacques Oudin. - MM. Jacques Oudin, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Rectification de l'amendement.
Amendements n°s 21 et 22 de M. Yves Fréville. - MM. Yves Fréville, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Rectification des deux amendements.
Amendements n°s 54 et 55 de M. Thierry Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Rejet des deux amendements.

Article 1er bis (p. 7 )

Amendement n° 1 de la commission. - M. le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 1er ter . - Adoption (p. 8 )

Article additionnel avant l'article 2 (p. 9 )

Amendement n° 82 de M. Denis Badré. - Retrait.

Article 2 (p. 10 )

M. Guy Fischer.
Amendement n° 51 rectifié de M. Bernard Angels. - MM. Gérard Miquel, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 (p. 11 )

Amendements n°s 70 rectifié de M. Philippe François, 2 de la commission et 23 rectifié de M. Claude Huriet. - MM. Jacques Oudin, le rapporteur général, Philippe Nogrix, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° 70 rectifié ; adoption de l'amendement n° 2, l'amendement n° 23 rectifié devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 3 (p. 12 )

Amendements n°s 89 de M. Roland du Luart et 71 rectifié de M. Jacques Oudin. - MM. François Trucy, Jacques Oudin, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° 71 rectifié ; rectification de l'amendement n° 89.
Amendement n° 72 rectifié de M. Philippe François. - MM. Jacques Oudin, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° 83 de M. Claude Huriet. - MM. Philippe Nogrix, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat, M. Denis Badré. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
M. le président.

6. Communication relative à des commissions mixtes paritaires (p. 13 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 14 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

7. Loi de finances rectificative pour 2000. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 15 ).

Articles additionnels après l'article 3 (suite) (p. 16 )

Amendements n°s 25, 26 de M. Pierre Hérisson, 73 rectifié de M. Jacques Oudin, 92 et 91 de M. Roland du Luart. - MM. Yves Fréville, Jacques Oudin, Jean-Claude Carle, Pierre Hérisson, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. - Retrait des amendements n°s 73 rectifié, 92, 26 et 91 ; rectification de l'amendement n° 25.
Amendement n° 56 de M. Thierry Foucaud. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° 74 rectifié de M. Jacques Oudin. - MM. Jacques Oudin, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements identiques n°s 81 rectifié de M. Paul Girod et 97 rectifié de M. Roland du Luart. - MM. Jacques Bimbenet, Jean-Claude Carle, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption des deux amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 84 de M. Philippe Nogrix. - MM. Philippe Nogrix, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 3 bis. - Adoption (p. 17 )

Article 4 (p. 18 )

Amendements n°s 75 rectifié bis de M. Philippe François, 28 rectifié à 31 rectifié de M. Claude Huriet et 3 de la commission. - MM. Gérard Cornu, André Dulait, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° 3 ; adoption de l'amendement n° 75 rectifié bis, les amendements n°s 28 rectifié à 31 rectifié devenant sans objet.
Amendement n° 4 de la commission. - M. le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 4 (p. 19 )

Amendement n° 76 rectifié de M. Philippe François. - MM. Jacques Oudin, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat, M. Jean-Pierre Raffarin. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 33 rectifié de M. Claude Huriet. - MM. Pierre Hérisson, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat, MM. Alain Lambert, président de la commission des finances ; Charles Revet, Jean-Pierre Raffarin. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 90 rectifié de M. Xavier Pintat. - MM. Xavier Pintat, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat, M. Philippe Nogrix. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 93 de M. Joël Bourdin. - MM. Jean-Claude Carle, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 5. - Adoption (p. 20 )

Article additionnel après l'article 5 (p. 21 )

Amendement n° 80 de M. Gérard Delfau. - MM. Gérard Delfau, le rapporteur général, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article addi-tionnel.

Article 5 bis . - Adoption (p. 22 )

Article 6 (p. 23 )

MM. le rapporteur général, Thierry Foucaud, Jean-Pierre Raffarin, Mme le secrétaire d'Etat.
Amendements n°s 5 de la commission, 35, 36 de M. Yves Fréville, 98 rectifié bis de M. Jean-Pierre Raffarin et 58 rectifié de M. Thierry Foucaud. - MM. le rapporteur général, Yves Fréville, Jean-Pierre Raffarin, Mmes Marie-Claude Beaudeau, le secrétaire d'Etat, MM. Gérard Delfau, Alain Vasselle, Pierre Hérisson, le président de la commission. - Retrait des amendements n°s 98 rectifié bis , 35 et 36 ; adoption de l'amendement n° 5, l'amendement n° 58 rectifié devenant sans objet.
Renvoi de la suite de la discussion.

8. Dépôt de projets de loi (p. 24 ).

9. Transmission d'un projet de loi (p. 25 ).

10. Dépôt d'une proposition de loi (p. 26 ).

11. Textes soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 27 ).

12. Dépôt de rapports (p. 28 ).

13. Dépôt de rapports d'information (p. 29 ).

14. Dépôt d'un avis (p. 30 ).

15. Ordre du jour (p. 31 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

CANDIDATURES A` UN ORGANISME
EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation des sénateurs appelés à siéger au sein du Conseil d'orientation des retraites.
La commission des affaires sociales a fait connaître qu'elle propose les candidatures de MM. Claude Domeizel et Alain Vasselle et la commission des finances a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. Joël Bourdin pour siéger au sein de ce nouvel organisme extraparlementaire.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.

3

LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2000

Discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2000 (n° 351, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 371 (1999-2000) et avis de la commission des affaires sociales.]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, le collectif que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui est celui d'une croissance retrouvée et solide que le Gouvernement s'attache à rendre durable et solidaire.
Cette volonté politique est visible sur le front de l'emploi : grâce à la politique menée depuis trois ans, un million d'emplois ont été créés et nous avons pour objectif la création d'un million d'emplois supplémentaires d'ici à la fin 2002, pour passer sous la barre des deux millions de chômeurs.
Cette volonté politique est également visible dans la gestion de nos finances publiques. A croissance exceptionnelle, recettes exceptionnelles : c'est de ce succès que proviennent les 51 milliards de francs de recettes qui figurent dans ce projet de loi de finances rectificative. Ces recettes sont mises au service d'une stratégie de croissance, grâce à des allégements d'impôts favorables à l'emploi et au pouvoir d'achat. Au total, 80 milliards de francs auront ainsi été rendus aux Français sur la seule année 2000.
Cette stratégie de croissance passe également par le renforcement des services publics, avec 10 milliards de francs de dépenses nouvelles, au titre de l'indemnisation des tempêtes et de la solidarité dans des domaines essentiels de la vie des Français, comme l'hôpital ou l'éducation nationale.
Enfin, cette volonté politique est celle qui guide notre stratégie de finances publiques. Transparente et prévisible, elle conforte les anticipations en faveur de la croissance.
Transparence pour les évaluations de recettes : le montant figurant dans le collectif a été évalué sur la base notamment du rapport de M. Didier Migaud sur « les fruits de la croissance retrouvée », déposé au début du mois de mars de cette année. Je comprends d'ailleurs que cette évaluation est confirmée par l'étude demandée par votre commission des finances à l'Observatoire français des conjonctures économiques, l'OFCE, pour le taux de croissance associé au collectif.
Transparence de nos débats : plutôt que de recourir à des méthodes réglementaires et opaques, le Gouvernement a fait le choix du débat démocratique devant la représentation nationale. Ce moment en est l'illustration.
Transparence enfin du comportement du Gouvernement : Laurent Fabius et moi-même nous nous sommes engagés à ce que tout surplus de recettes au-delà de ce qui est prévu dans ce collectif et toute moindre dépense qui pourrait être constatée en exécution soient affectés à la réduction du déficit, donc à la réduction de la dette et des impôts de demain.
M. Michel Sergent. Très bien !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Y aura-t-il un surplus de recettes ? De combien sera ce surplus de recettes au-delà de ce qui est prévu dans le collectif ? Il m'est encore impossible de le dire.
En effet, je ne suis pas en mesure de chiffrer précisément à ce stade de l'année le taux de croissance qui sera finalement celui de l'année 2000. Lorsque nous avons déposé ce projet de loi de finances rectificative devant l'Assemblée nationale, l'INSEE, l'Institut national de la statistique et des études économiques, situait la croissance dans une fourchette allant de 3,4 % à 3,8 %, ce qui explique le taux de croissance moyen de 3,6 % associé à ce collectif, situé au centre de la fourchette.
Lorsque, il y a quelques semaines, je défendais ce projet de loi devant l'Assemblée nationale, des hypothèses de croissance allant parfois au-delà de 4 % ont été évoquées par certains instituts de conjoncture.
A l'inverse, la semaine dernière, l'INSEE a publié un chiffre de croissance au premier trimestre un peu plus faible que prévu, 0,7 %, inférieur à la prévision de 0,9 % faite un mois plus tôt par ce même institut.
Dans ces conditions, il n'y a pas de raison de modifier, à ce stade, l'évaluation des recettes figurant dans le collectif qui vous est présenté aujourd'hui.
De même, toutes les dépenses ne seront pas effectuées au centime près jusqu'au plafond autorisé par le Parlement. C'est ainsi chaque année, dans des proportions variables, et sans que nous sachions dire a priori sur quels chapitres et avec quelle ampleur il en sera ainsi.
Tous ces éléments ont fait dire au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, lors du débat qui a eu lieu devant l'Assemblée nationale, que nous espérions un déficit en exécution 2000 de l'ordre de 200 milliards de francs. Tel est bien notre objectif. Telle est aussi notre volonté de transparence vis-à-vis du Parlement.
Mais nous ne saurions, à cette époque de l'année, le traduire dans notre projet de loi sans prendre de risques excessifs. Nous aurons donc l'occasion d'en reparler au moment de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2001 et lors de la discussion du collectif de fin d'année, sur la base de nouvelles évaluations de recettes qui seront expertisées, comme Laurent Fabius l'a indiqué hier, par la Commission économique de la nation. Dès cette année, le Parlement disposera donc d'un avis extérieur au Gouvernement sur les évaluations de recettes à la fois pour l'année 2000 et pour l'année 2001.
Au-delà de ce débat, le projet de loi soumis aujourd'hui à votre examen reflète donc deux grandes orientations politiques du Gouvernement, la baisse des impôts et des dépenses nouvelles en faveur de la solidarité.
Il s'agit d'abord de baisser les impôts, je l'ai rappelé d'emblée.
Il s'agit d'une baisse massive : quarante milliards de francs qui s'ajoutent aux quarante milliards déjà décidés dans la loi de finances pour 2000.
Il s'agit également d'une baisse instantanée. L'impôt sur les revenus de 1999, que les Français ont déclarés en mars, baissera dès cette année. Il en sera de même de la taxe d'habitation. Et il nous est proposé de pérenniser la baisse de la TVA, qui est effective depuis le 1er avril.
C'est enfin une baisse productive et solidaire. Il s'agit en effet de faire bénéficier tous les Français de la croissance et d'aider ceux qui voient aujourd'hui leurs impôts augmenter trop vite lorsqu'ils retrouvent un emploi, afin de prendre en compte leur situation.
Nous vous proposons, d'abord, une baisse d'un point des deux premiers taux de l'impôt sur le revenu dès 2000. Pour plus de 650 000 foyers, cela se traduira par une exonération complète de l'impôt sur le revenu. Pour tous, ce sera un allégement, important pour les plus bas revenus, modeste mais non négligeable pour les autres, dans le respect du principe de progressivité et de redistributivité de l'impôt. Cette mesure représente 11 milliards de francs.
S'y ajoutent deux dispositions introduites par voie d'amendements à l'Assemblée nationale : l'une concerne la solidarité due aux victimes de l'amiante et l'autre l'aménagement du régime des dons dans le cas de l'abandon de produits financiers en faveur d'associations.
Nous vous proposons ensuite une réforme profonde de la taxe d'habitation. Cette mesure est évidemment complémentaire de la précédente car, si tout le monde ne paie pas l'impôt sur le revenu, tout le monde est concerné par la taxe d'habitation.
Or vous en connaissez et vous en éprouvez les défauts : une assiette vieillissante, une complexité croissante et, surtout, une véritable injustice d'une taxe qui demande plus aux plus modestes, même avec les mécanismes existants d'allégement qui existent déjà.
En visant à supprimer sa part régionale, le projet de loi s'adresse à tous les contribuables et concerne la fraction de cette taxe qui est la plus éloignée du citoyen et la plus faible dans son produit.
A l'égard des régions, après un dégrèvement en 2000, une compensation indexée comme la dotation globale de fonctionnement sera mise en place à partir de 2001. Je n'ignore pas les opinions qui ont été exprimées à ce sujet et je sais qu'ici, au Sénat, nous en débattrons en profondeur. J'estime que cela préserve la responsabilité et l'autonomie des régions.
Par ailleurs, il est proposé de réformer les mécanismes de dégrèvement, sans, bien entendu, diminuer les dispositions actuelles de complète exonération.
Malgré les efforts du Gouvernement et de la majorité - je pense en particulier au prolongement du dégrèvement total, pour les titulaires du RMI, l'année où ils retrouvent un emploi, ou bien à l'abaissement de 1 500 à 1 200 francs du minimum de taxe laissé à la charge des plus modestes - le système actuel comporte encore trop d'injustices : des inégalités car, à ressources égales, on n'est pas traité de la même manière selon l'origine des revenus ; des effets de seuil, qui, par leur brutalité, n'encouragent pas la reprise d'activité ; un poids de la taxe par rapport aux revenus plus faible pour les revenus moyens que pour les revenus modestes.
C'est pourquoi le Gouvernement vous propose un système unifié et plus juste, qui fonctionne pour tous en deçà d'un certain seuil de revenu, sans montant minimum fixe à la charge des contribuables. Cela permettra à 1 300 000 contribuables de bénéficier d'un dégrèvement total. Cette mesure représente, elle aussi, 11 milliards de francs.
Enfin, nous vous proposons une baisse d'un point du taux de TVA au bénéfice de tous. Ce faisant, le Gouvernement accompagne la croissance en rendant du pouvoir d'achat aux Français et donne sur les prix un signal de baisse à l'heure où des tensions apparaissent dans certains secteurs. L'effet positif de la mesure apparaît d'ailleurs dans la stabilité des prix constatée en avril.
Le Gouvernement veut aussi, tout simplement, achever de restituer aux Français la hausse décidée par un précédent gouvernement en août 1995. Avec les baisses ciblées mises en oeuvre depuis 1998, qui ont représenté 30 milliards de francs, ce sera chose faite puisque la mesure proposée aujourd'hui, qui représente plus de 18 milliards de francs dès 2000, mais en représentera 30 milliards de francs en année pleine en 2001, porte donc nos baisses de TVA à plus de 60 milliards de francs au total, soit l'équivalent de ce qui avait été prélevé en plus en 1995.
Ce collectif a aussi vocation à financer les dépenses de solidarité liées aux tempêtes ou à des domaines essentiels dans la vie des Français, comme l'hôpital ou l'éducation.
Une solidarité exceptionnelle, d'abord, s'exercera pour faire face à des circonstances elles-mêmes exceptionnelles et aider les personnes qui ont souffert des deux ouragans qui ont balayé notre territoire, du cyclone Lenny aux Antilles ou de la marée noire de l' Erika.
Les engagements pris par le Premier ministre ont été tenus, les crédits nécessaires étant évidemment mobilisés de manière immédiate. Ils seront donc confirmés et confortés grâce à ce collectif, puisque plus de 6 milliards de francs y sont consacrés.
Quelles sont les grandes mesures qui trouvent leur tradition dans ce collectif ?
Des crédits d'un montant de un milliard de francs sont ouverts en faveur des forêts et deux mesures fiscales viennent renforcer le dispositif : le taux de TVA sur les travaux forestiers, qui est ramené de 20,6 % à 5,5 %, et l'achat de parcelles forestières ou de terrains nus destinés à être reboisés, qui est temporairement exonéré de droits.
Autre axe fort de ce collectif : l'aide apportée aux collectivités locales sinistrées en métropole et aux Antilles, avec l'ouverture d'un milliard de francs de crédits et 500 millions de francs au titre de l'accélération des remboursements de TVA pour les travaux réalisés par les collectivités locales à la suite de la tempête. (Très bien ! sur les travées socialistes.)
Plus de 700 millions de francs sont ouverts par ailleurs pour la restauration du réseau routier et des digues, des phares et des balises, ainsi que des infrastructures portuaires endommagées.
L'Etat s'est également engagé à aider les secteurs économiques les plus touchés : près de 600 millions de francs sont ouverts pour les agriculteurs, les pêcheurs et les conchyliculteurs, les entreprises contraintes au chômage partiel, l'hôtellerie de plein air, le tourisme social et, plus généralement, l'ensemble du secteur du tourisme. Il importe que la saison soit réussie sur nos côtes, et ce à la hauteur des efforts déployés par tous pour nettoyer et remettre en état nos plages et nos rochers.
Un effort particulier de plus de 500 millions de francs a également été prévu pour restaurer les monuments historiques.
Le budget de l'environnement et de l'aménagement du territoire est lui-même abondé de près de 300 millions de francs pour accompagner la restauration des sites et des écosystèmes affectés par la marée noire de l' Erika et les tempêtes.
Enfin, l'Etat a immédiatement apporté son soutien à l'effort de solidarité déployé par les communes et les organismes sociaux par une dotation exceptionnelle aux commissions d'aide sociale d'urgence. A ce titre, 350 millions de francs sont ouverts.
Cette solidarité exceptionnelle ne doit pas nous faire oublier la solidarité au quotidien, pour l'école, la santé et la ville notamment.
Le collectif propose donc d'ouvrir 2,6 milliards de francs d'engagements au profit des hôpitaux, à la suite du protocole d'accord négocié et signé par Martine Aubry et Dominique Gillot. Cet argent servira principalement à payer le remplacement d'agents absents, ce qui se traduira par une amélioration du service pour nos concitoyens, en particulier dans les services d'urgence.
Un milliard de francs est ouvert au profit de l'éducation nationale, car, dans ce collectif, nous avons voulu marquer notre soutien au corps enseignant, montrer aux familles que leurs préoccupations sont les nôtres. La réforme de l'enseignement professionnel va permettre de moderniser les équipements et de renforcer le suivi des élèves en stage. Dans le second degré, 1 000 maîtres d'internat seront recrutés dès la rentrée prochaine pour améliorer l'encadrement et lutter contre la violence. Le suivi médico-social des élèves, système d'alerte et de soins essentiel dans les collèges et lycées les plus défavorisés, sera aussi renforcé. Enfin, des moyens pédagogiques supplémentaires seront mis à la disposition des enseignants et les carnets de correspondance qui sont le lien entre l'école et la famille seront désormais gratuits. Comme vous le savez, comme la lettre de cadrage signée par Lionel Jospin l'indique, l'éducation nationale sera toujours une priorité dans le projet de loi de finances pour 2001.
Par ailleurs, 450 millions de francs sont consacrés à la politique de la ville, une politique de la ville qui est d'ailleurs souvent étroitement liée à la politique d'éducation nationale. Le renforcement sans précédent des crédits qui y sont consacrés depuis deux ans doit éviter que la croissance ne s'arrête à la porte des quartiers les plus en difficulté, car la croissance retrouvée doit être celle de tous les Français. Grâce à ce collectif, le programme des 10 000 adultes-relais pourra donc débuter. Ces adultes-relais vont contribuer à rénover les liens sociaux en accompagnant les habitants dans leurs démarches, en facilitant le dialogue entre générations et en contribuant à résoudre les petits conflits de la vie quotidienne. Par ailleurs, 150 équipes emploi-insertion seront également constituées et disponibles sur le terrain. Enfin, des crédits nouveaux sont ouverts pour la revitalisation économique des quartiers, et pour encourager le maintien et le développement des services publics.
Mais les dépenses qui vous sont proposées ne concernent pas seulement l'école, la santé ou la ville. En effet, il est prévu d'abonder à hauteur de 250 millions de francs la dotation de compensation de la taxe professionnelle, venant ainsi consacrer les progrès de l'intercommunalité qui a été voulue par le Gouvernement et dont le succès ne peut que nous réjouir collectivement.
M. Michel Sergent. Très bien !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. En outre, la formation professionnelle des transporteurs routiers et le fonctionnement du Comité national routier sont améliorés.
La mise en oeuvre du plan d'urgence pour les prisons, dont la Haute Assemblée s'est saisie, est accélérée, avec des moyens pour la modernisation et la construction d'établissements pénitentiaires.
Plus de 200 millions de francs sont débloqués pour le programme de dépistage de la maladie dite « de la vache folle ».
Enfin, 50 millions de francs seront consacrés à la création artistique, et 40 millions de francs financeront un « appel à projets » en direction des initiatives d'économie solidaire.
Voilà l'essentiel des mesures que le Gouvernement soumet à votre approbation. Comme vous le voyez, elles s'incrivent dans la stratégie de long terme, cohérente et déterminée, en faveur d'une croissance au service de la lutte contre les inégalités. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, après un long débat hier, au cours de l'après-midi et de la soirée, et même encore tôt ce matin jusqu'à une heure cinquante, sur des considérations de caractère général, nous passons à des considérations budgétaires et comptables plus précises avec ce projet de loi de finances rectificative.
Pour établir la liaison avec nos récents propos, je rappelle que le Gouvernement souhaite - cela figure dans le rapport préparatoire au débat d'orientation budgétaire, madame le secrétaire d'Etat, - entamer « une nouvelle étape pour la politique des finances publiques françaises ». A cette fin, il définit un certain nombre d'orientations : « la priorité est à la fois de réduire nos déficits et de viser des baisses significatives des impôts, pour aujourd'hui et pour demain, au travers de la charge de la dette publique que nous transmettons aux jeunes générations. La clé de voûte de cette stratégie des finances publiques est une évolution maîtrisée des dépenses publiques ».
A cela, bien entendu, la commission des finances ne peut que souscrire. Mais elle remarque que la réalité des choses est assez loin du verbe que vous maniez avec profusion. (Exclamations sur les travées socialistes.)
C'est la réalité des choses, mes chers collègues !
M. Jean-Claude Carle. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons écouté Mme le secrétaire d'Etat avec attention et sans l'interrompre !
Mes chers collègues, on ne peut se contenter de pétitions de principe et de voeux pieux. Il faut quand même regarder la réalité des choses et des chiffres ! (Très bien ! sur les travées du RPR, de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Or que voyons-nous ? Nous rectifions une loi de finances votée très récemment en remettant au pot, en quelque sorte, 51 milliards de francs de surplus de recettes fiscales et non fiscales. Nous le savons, ce n'est que la suite de ce que l'on a appelé improprement - mais l'expression est sur toutes les lèvres - l'épisode de la cagnotte » ! (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. François Autain. Ma cassette !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Et l'on sait - mais vous ne devriez pas vous en réjouir...
M. Michel Sergent. Mais si !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... que le Parlement a été particulièrement maltraité dans cette affaire puisque, pendant tout le second semestre de l'année 1999 et au cours des derniers mois encore, on nous a raconté des craques, mes chers collègues. (Exclamations sur les travées socialistes.)
Si, on nous a raconté des histoires !
M. François Autain. Vous n'avez rien compris !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous pouvez me faire confiance, nous le démontrerons, chiffres et documents en mains ! Les informations, nous les connaîtrons et nous reconstituerons la réalité des choses !
M. Philippe Madrelle. C'est plus facile à dire qu'à faire !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous allons le faire tous ensemble ; nous avons d'ailleurs commencé l'exercice qui, je peux le dire, en gêne plus d'un, car c'est l'épreuve de vérité et c'est l'exercice des droits du Parlement.
M. Jean-Claude Carle. Eh oui !
M. Jean Chérioux. C'est cela, la transparence !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous sommes donc en présence d'un surplus de recettes de 51 milliards de francs, pour une bonne part poussés consciencieusement et volontairement par le Gouvernement au-delà du 31 décembre 1999.
M. Michel Sergent. Il vaut mieux des cagnottes que des déficits !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ecoutez : soit on parle de comptes, soit on se borne à faire de la politique politicienne ! Et, si l'on parle de comptes, il faut une certaine permanence de méthode et que les comptes clos au 31 décembre répondent à certaines règles.
M. Charles Descours. Eh oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En fait, selon la commission, on a franchi allègrement l'exercice budgétaire pour pousser devant soi des recettes qu'on ne voulait pas avouer au titre de 1999. Et maintenant, au titre de l'exercice 2000, on redéploie ces recettes...
M. François Autain. Ce n'est pas bien grave ?
M. le président. Ne vous laissez pas interrompre, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais je suis prêt à écouter ce qu'on veut me dire !
M. Charles Descours. Ils n'ont pas d'arguments ! Ils n'ont que des invectives !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Répondre à des invectives, c'est difficile !
M. le président. Il ne faut pas répondre !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En revanche, je suis tout à fait prêt à répondre à des arguments.
Donc, ce collectif affiche plus de 51 milliards de francs de surplus de recettes fiscales et non fiscales, qu'il affecte à des mesures de baisse d'impôts éparses - ce qui répond plus à un souci électoraliste qu'à une volonté politique - à une augmentation de la dépense, pour 10 milliards de francs, et enfin, à titre infinitésimal, à une réduction du déficit budgétaire.
Le déficit budgétaire apparaît dans ce collectif à hauteur de 215 milliards de francs, alors même que Mme le secrétaire d'Etat vient de nous dire que le bon chiffre est 200 milliards de francs. Il est difficile de comprendre pourquoi on nous fait voter un collectif avec 215 milliards de déficit si le véritable chiffre est 200 milliards de francs !
M. François Autain. Mme le secrétaire d'Etat l'a expliqué.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les questions qui ont été posées hier à ce sujet n'ont pas reçu de réponses. Soit un document budgétaire est un document sincère et reflète les meilleures prévisions possibles de recettes et de dépenses, soit c'est un document de convenance ! Si le ministre pense que le bon chiffre est 200 milliards de francs, c'est le seul qu'il doit faire apparaître ; c'est une question de bon sens !
En fait, je pense que M. le ministre, qui a pris connaissance de ce document au moment où il est entré en fonctions, n'a pas pu ne pas être quelque peu choqué intellectuellement de constater que les 215 milliards de francs affichés sont supérieurs aux 206 milliards de francs avoués pour la clôture de l'exercice de 1999. Il y a là quelque chose de surprenant et difficile à expliquer.
Dans ce cadre, que je me suis permis de rappeler brièvement, quelles sont les analyses et propositions de la commission des finances.
La commission estime tout d'abord que les principes annoncés doivent être traduits dans les faits.
Or vous annoncez, madame le secrétaire d'Etat, une maîtrise des dépenses publiques, vous annoncez aussi pour la fin de l'année 2000 d'éventuelles réductions des dépenses publiques, et vous commencez par faire approuver 10 milliards de francs de dépenses supplémentaires ! Certes, ces dépenses sont pour une part des dépenses exceptionnelles liées aux phénomènes climatiques, mais il s'agit aussi de dépenses supplémentaires de fonctionnement affectant un certain nombre de rubriques, comme l'éducation nationale, ainsi que l'expliquait fort bien hier soir notre collègue M. Darcos, entre autres.
La commission des finances estime que les 10 milliards de francs en question, dont elle ne conteste pas la nécessité, doivent être financés par redéploiement, c'est-à-dire grâce à des économie réalisées sur d'autres rubriques, économies qui ne sauraient concerner les budgets régaliens, à savoir la défense, les affaires étrangères, l'intérieur et la décentralisation, les anciens combattants, la justice, etc. Un effort d'environ 1 % doit donc porter sur les dépenses de fonctionnement des budgets civils non régaliens figurant aux titres III et V. C'est une affaire de volonté : sur une assiette globale de 1 000 milliards de francs, cet effort peut être accompli.
Comme plusieurs de nos collègues l'ont noté au cours de la séance d'hier, je ferai observer que, si le fonctionnement continue à progresser, l'investissement, lui, marque le pas. Nous ne pouvons pas ne pas tirer à nouveau la sonnette d'alarme sur cet aspect des choses. Les budgets militaires, notamment, nous semblent mal traités.
Qu'en est-il exactement à ce sujet ?
Des crédits d'équipement sont annulés pour financer une commande de vingt-sept hélicoptères, conformément au programme NH 90. Cette décision d'équipement militaire et de technique industrielle avait d'ailleurs déjà été prise. Elle est confirmée. Et vis-à-vis du monde militaire, on fait apparaître cela comme un élément positif. Mais, parallèlement, d'autres crédits d'équipement conformes à la programmation militaire et prévus dans les documents budgétaires pour l'an 2000 sont annulés plus que proportionnellement. Le tour de passe-passe est assez surprenant, d'autant plus que le programme d'achat d'hélicoptères nécessite non pas 6,9 milliards de francs, ce que vous faites apparaître comme un élément positif, mais 8 milliards de francs. En conséquence, l'annuité prévue dans le collectif budgétaire est d'ores et déjà insuffisante pour faire face à cet engagement.
Je mentionne cet élément parmi d'autres pour démontrer une nouvelle fois combien la politique conduite en la matière, non conforme à la programmation militaire, est regrettable et susceptible de soulever des doutes, des problèmes, à la fois réels et psychologiques, au sein de nos forces armées, avec toutes les conséquences qui en résulteront et qu'il faudra ensuite gérer, ce qui nous promet bien des difficultés.
La commission des finances propose donc un redéploiement de 10 milliards de francs pour compenser les dépenses nouvelles qui nous seront soumises.
S'agissant des prélèvements obligatoires, vous connaissez nos convictions ; je les ai exprimées hier, et je n'y reviendrai donc pas. Je dirai simplement que j'ai été surpris d'entendre M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, la nuit dernière, aller jusqu'à contester la notion de prélèvements obligatoires. Il s'est exprimé comme si cette notion était gênante, ne cadrant pas avec son argumentation générale. Lorsqu'une notion est gênante, lorsqu'elle n'entre pas dans le langage officiel, mieux vaut donc l'écarter, comme d'autres ont pu effacer les visages de certaines photographies !
Et pourtant, le taux des prélèvements obligatoires, le poids des impôts et des cotisations sociales demeurent des préoccupations tout à fait fondamentales, surtout lorsque l'on compare la situation de notre pays à celle de ses principaux partenaires en Europe.
Il est donc nécessaire - la commission des finances ne peut que réitérer ce point de vue - d'assigner des objectifs assurant notre compétitivité. Il s'agit, je le répète, de ne pas être plus mauvais que notre principal partenaire - l'Allemagne - c'est-à-dire de nous fixer un taux de prélèvements obligatoires - impôts et cotisations sociales - qui ne soit pas, d'ici à trois ans, supérieur à celui de l'Allemagne. Cela suppose un réel effort de réduction des prélèvements obligatoires de 250 milliards de francs en l'espace de trois ans, mais aussi de ralentissement des dépenses publiques à un rythme annuel inférieur à 1 % en volume. Manifestement, cela peut être fait et serait opportun en termes de politique économique, afin d'avoir un effet anticyclique, alors que la politique que vous menez tire parti de la belle croissance et des tendances favorables de la consommation sans réellement préparer l'avenir.
Venons-en, si vous le voulez bien, mes chers collègues, au contenu fiscal de ce collectif budgétaire.
Je le considère comme décevant, car l'efficacité économique à terme des baisses d'impôt que vous nous proposez me semble vraiment sujette à caution. Or il est temps de faire quelque chose dans ce domaine. Selon vos propres chiffres - sans doute est-ce l'illustration du fameux théorème Strauss-Kahn - les prélèvements obligatoires ont augmenté de 435 milliards de francs entre 1997 et 2000. Hier, M. Fabius a eu l'air de s'étonner de ces évaluations en demandant d'où elles émanaient. Mais, madame le secrétaire d'Etat, notre source est la réponse à la question n° 29 du questionnaire de la commission des finances et vient donc de chiffres établis par vos services ! Nous avons comparé la somme des prélèvements obligatoires pour 2000 et ceux de 1997. Nous n'avons rien inventé.
Bien entendu, les baisses d'impôt proposées doivent être acceptées, mais nous nous interrogeons sur la méthode que vous utilisez en ce qui concerne la taxe d'habitation. Nous ne sommes pas favorables à la réduction de l'autonomie fiscale des collectivités territoriales.
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous proposerons donc au Sénat le maintien de la part régionale, mais nous proposerons également un effort fiscal en faveur des contribuables de l'ordre de 12 milliards de francs au total, soit un effort quelque peu supérieur à celui que vous préconisez. Sur ces 12 milliards de francs, 10 milliards de francs bénéficieront aux contribuables à la taxe d'habitation et 2 milliards de francs aux contribuables à la taxe foncière, contribuables qu'ils ne faut pas oublier non plus.
Nous sommes favorables à la simplification, à l'harmonisation des dispositifs de dégrèvement, mais nous considérons que, par la suppression des frais d'assiette et d'évaluation, il est tout à fait possible d'apporter aux contribuables locaux ce soulagement de 12 milliards de francs.
Nous allons un peu plus loin que vous sur un certain nombre de sujets. Je citerai à ce propos les amendements que nous avons déposés concernant le régime fiscal des sociétés de capital risque.
Je voudrais également évoquer - je sais que c'est un sujet auquel s'intéresse particulièrement M. le président du Sénat...
M. François Autain. Le quinquennat !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... les problèmes fiscaux et de trésorerie rencontrés par un grand nombre d'entreprises touchées par la marée noire.
M. Serge Vinçon. Il a raison !
M. François Autain. Heureusement qu'il est là !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela vous surprend, monsieur Autain ? Je pense que cela devrait vous faire plaisir ? J'espère donc que vous voterez avec enthousiasme l'amendement que nous avons déposé, après concertation avec de nombreux élus locaux de ces régions, concernant les reports d'imposition pour les entreprises situées dans les départements, dont le vôtre, victimes de la marée noire.
Il est effectivement nécessaire d'aider les entreprises qui peuvent connaître des situations de trésorerie délicates - je pense notamment à celles qui oeuvrent dans les activités touristiques - à franchir un cap difficile.
C'est une mesure qui ne figure pas dans les préconisations du Gouvernement et qui peut, me semble-t-il, utilement s'y ajouter. En tout cas, elle ne me paraît pas mériter votre ironie, car elle concerne des entreprises et des emplois tout à fait réels dans un certain nombre de départements qui ont été durement frappés.
M. François Autain. Ce n'est pas cela qui suscite notre ironie !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Enfin, mes chers collègues, nous vous soumettrons diférentes suggestions sur des sujets de nature institutionnelle, s'agissant en particulier des prérogatives des commissions des finances et du rôle des rapporteurs spéciaux. Nous comprenons bien que les demandes formulées à cet égard par l'Assemblée nationale doivent être appréciées dans le cadre de relations bilatérales entre le Gouvernement et sa majorité plurielle.
Dans le cours de la discussion, madame le secrétaire d'Etat, je serai amené à vous interroger plus avant sur ces sujets, lorsque seront examinés les articles 15 A à 15 D du projet de loi.
Nous restons par ailleurs un peu perplexes devant l'article 21, qui tend à améliorer - sur le papier - l'information du Parlement quant aux relations entre l'Etat et la sécurité sociale. Nous vous donnons bien entendu acte des bonnes intentions ainsi affichées, mais Charles Descours, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, serait mieux placé que moi pour rappeler nos demandes communes de discussion consolidée, des perspectives financières de l'Etat et des organismes de sécurité sociale.
En effet, de plus en plus, les débats limités à la seule loi de finances que nous tenons prennent un caractère sinon surréaliste, du moins très partiel. Nous savons bien que nous ne parlons plus que de 40 % environ des prélèvements obligatoires, les 60 % restants prenant naissance dans d'autres textes, avec des affectations qui obéissent à d'autres règles juridiques et financières.
Au titre des initiatives qu'elle vous proposera, mes chers collègues, la commission des finances vous demandera également de confirmer votre position sur le régime de France Télécom en matière de taxe professionnelle. Nous avions déjà voté sur ce point, notamment lors de la discussion de la loi de finances initiale pour 1999, et nous demanderons au Sénat de réitérer la position qu'il avait alors adoptée.
Il semble important, dans l'intérêt tant de nos collectivités territoriales que de France Télécom, d'amener cette entreprise à respecter le droit commun des impôts locaux, sans pour autant, bien sûr, nier les problèmes de répartition que posent les impositions susceptibles d'être levées sur France Télécom
La proposition que nous formulerons visera donc à affecter 50 % d'une taxe professionnelle calculée dans les conditions de droit commun aux communes sur le territoire desquelles s'exercent les activités et 50 % au Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.
J'en termine en rappelant que le collectif que nous examinons aujourd'hui suscite de la part de la commission un sentiment d'insatisfaction. A la vérité, il s'agit d'un texte d'attente, d'un texte de rattrapage après les atermoiements de l'année dernière. (Protestations sur les travées socialistes.) C'est un texte qui est dépassé par les faits avant même d'être voté. Il nous contraint à nous prononcer sur des chiffres dont M. le ministre lui-même nous dit qu'ils ne sont pas complets, ce ministre qui manie le terme de transparence avec une habileté que nous saluons tous, mais à qui nous demandons de mettre sa pratique gouvernementale en harmonie avec les principes qu'il énonce et auxquels l'ensemble du Sénat ne peut pas ne pas souscrire.
Entre les intentions et les faits, il est tentant d'établir des comparaisons. Or nous avons, à cet égard, une expérience toute récente : celle de l'année 1999, au cours de laquelle, c'est le moins que l'on puisse dire, la transparence n'a pas régné de manière incontestable sur les relations entre le Gouvernement et le Parlement ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur celles du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. L'année 1997 a aussi été une année importante !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Gouvernement s'est soudain senti contraint de rédiger à la hâte un collectif budgétaire, celui que nous sommes appelés à examiner cet après-midi.
Pourtant, ce collectif aurait pu, selon moi, être évité. Contrairement à l'objectif qu'il affiche, M. le rapporteur général vient de le dire, il ne contribue même pas à éclairer la nation.
Les gouvernements proposent, en général, un collectif budgétaire au printemps lorsqu'ils réorientent sensiblement la politique des finances du pays. C'est le cas, par exemple, lors d'un changement de majorité à l'Assemblée ou lors d'un changement de gouvernement, ce qui n'est pas le cas, du moins pour l'instant.
Certes, ce projet prévoit trois réductions d'impôt, concernant la TVA, l'impôt sur le revenu et la taxe d'habitation. Mais ces réductions d'impôts ne sont pas révolutionnaires. Tout en entrant en vigueur cette année, elles auraient pu figurer dans la loi de finances pour 2001 ou dans la loi de finances rectificative de fin d'année.
Quant aux ouvertures de crédits, si l'on souhaite vraiment que la représentation nationale en débatte, il aurait été bien préférable de nous les soumettre avant qu'elles ne soient décidées. Sous cette réserve, elles auraient d'ailleurs pu être, comme c'est l'habitude, ratifiées dans le collectif de fin d'année.
Non, la vraie raison de ce collectif est tout simplement que la loi de finances adoptée pour 2000 était erronée, et elle l'était dès son dépôt sur le bureau des assemblées. Après s'être obstinée à ne pas vouloir changer quoi que ce soit pendant les trois mois de débat parlementaire, de septembre à décembre 1999, le Gouvernement a fini par reconnaître dès février 2000 - l'encre de la loi de finances était à peine sèche ! - qu'il fallait revoir substantiellement l'équilibre de cette loi.
M. René-Pierre Signé. Parce qu'il y a eu la croissance, et c'est le signe d'une réussite !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Reste une énigme, mais je ne doute pas que M. Signé pourra l'élucider. Le Gouvernement a-t-il cherché à cacher des éléments qui étaient en sa possession dès cet hiver ? Ou bien ne disposait-il pas des instruments lui permettant de réviser ses hypothèses en temps réel ?
M. François Autain. Voilà, c'est cela !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Quel est votre sentiment, mes chers collègues ?
M. Jean-Pierre Raffarin. Mensonge ou incompétence ?
M. Jean-Claude Carle. Les deux !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Dans les deux cas, les finances de notre pays sont bien mal pilotées ! (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Serge Vinçon. C'est vrai !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Afin de vous montrer toute l'objectivité de la majorité sénatoriale, je dirai que cela ne date pas d'aujourd'hui.
Nous essaierons donc de déterminer, dans le cadre des travaux pour lesquels le Sénat a doté la commission des prérogatives de commission d'enquête, laquelle de ces deux tristes hypothèses doit être privilégiée.
Quoi qu'il en soit, si le Gouvernement, dont vous faisiez d'ailleurs déjà partie, madame le secrétaire d'Etat, avait davantage accepté le dialogue lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2000, il aurait échappé à ce pensum qu'est le collectif. C'est le défaut d'information des assemblées lors de l'examen du projet de loi de finances - un défaut qui est totalement aberrant dans un pays moderne et démocratique - qui a engendré ce collectif.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Il n'aurait jamais dû exister, et j'espère que nous n'aurons pas à en connaître d'autres de ce type.
Au surplus, ce collectif n'atteint pas l'objectif fixé, qui devrait être de fournir un éclairage à la nation sur l'état de nos finances publiques, qui demeurent toujours aussi opaques.
En effet, cet acte budgétaire demeure, même si le mot est un peu sévère, tronqué, et ce au moins à trois points de vue.
En premier lieu, le Gouvernement s'apprête à lancer sa procédure d'attribution des licences de téléphones mobiles de la troisième génération : 130 milliards de francs, mes chers collègues ! Une petite somme !
M. Ladislas Poniatowski. Une nouvelle et bien belle cagnotte !
M. Serge Vinçon. Ce n'est pas rien !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Eh bien ! mes chers collègues, on ne trouve aucune trace financière de ces 130 milliards de francs dans le document budgétaire qui nous est proposé.
M. Gérard Cornu. C'est cela, la transparence des socialistes !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. En deuxième lieu, alors que le Gouvernement révise les hypothèses de la loi de finances, il ne le fait pas pour les hypothèses de la loi de financement de la sécurité sociale, qui sont pourtant les mêmes, et je parle ici sous le contrôle du président de la commission des affaire sociales, Jean Delaneau, et de Charles Descours.
En toute logique, les recettes de sécurité sociale devraient être réévaluées d'au moins 14 milliards de francs, si l'on suit les estimations de l'OFCE.
En troisième lieu, une question se pose : de quoi débattons-nous, mes chers collègues ? Dans ce projet, sont soumis au vote des assemblées des recettes, très précisément fixées, au franc près, des dépenses et un déficit. Toutefois, le ministre ajoute, comme M. le rapporteur général l'a souligné, que ces chiffres ne sont sans doute pas les bons puisque l'on affiche un déficit de 215 milliards de francs mais qu'il sera probalement de 200 milliards de francs.
Comment parvient-on à ce résultat ? Est-ce que ce sont les recettes qui seront modifiées ? Seront-ce les dépenses ? Ou bien les deux ? Dans une loi de finances, il serait quand même utile d'obtenir des réponses sur ce sujet.
En effet, les chiffres qui vous sont soumis, mes chers collègues, sont liés à des calculs savants. Mais le seul calcul savant que nous ne pouvons pas faire, c'est celui du montant précis des recettes estimées à la date d'aujourd'hui et celui du montant des dépenses. En tout cas, lors de l'examen du collectif de fin d'année, nous essaierons de comprendre les raisons pour lesquelles il ne nous est pas donné davantage de précisions aujourd'hui.
Dès lors, à quoi rime ce débat ? Au fond - le rapporteur général a esquissé cette hypothèse - ne s'agit-il pas de donner un habit flambant neuf de transparence à la présentation de nos finances publiques ? Si tel est l'objectif, beaucoup de progrès restent à faire.
Je relève d'ailleurs que nos collègues de la commission des finances de l'Assemblée nationale ne se contentent pas des éléments fournis par le Gouvernement puisqu'ils ont jugé utile d'étendre les prérogatives des rapporteurs généraux et des rapporteurs spéciaux des commissions des finances.
Ce collectif, madame la secrétaire d'Etat, ne m'inspire guère. Je doute qu'il soit d'une franche opportunité et, s'agissant de la transparence, mieux vaudrait que vous comptiez sur notre commission des finances pour continuer à vous y encourager, de manière que, comme le prescrit la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, tous les citoyens exercent effectivement leur « droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ».
En vérité, mes chers collègues, ce n'est pas notre droit, c'est notre devoir ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
(M. Jean-Claude Gaudin remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN,
vice-président

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Charles Descours, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il n'est pas habituel que le rapporteur des lois de financement de la sécurité sociale intervienne dans une loi de finances rectificative. Mais nous n'avons pas, pour l'instant, de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. C'est pourtant un budget, comme viennent de le rappeler M. le président de la commission des finances et M. le rapporteur général, plus important que celui de l'Etat.
Si le budget de l'Etat n'est pas aussi transparent que le souhaiterait la commission des finances, que dire des lois de financement de la sécurité sociale ? Mais il paraît que nous sommes au début de la démocratie sociale ! Je souhaiterais qu'elle avance un peu plus vite.
Si la commission des affaires sociales a demandé à être saisie pour avis du collectif budgétaire de printemps, ce n'est pas seulement parce que quelques ajustements de crédits ont été opérés sur divers budgets sociaux relevant de la loi de finances. Ce n'est pas non plus pour examiner les crédits budgétaires mobilisés par la « nouvelle étape hospitalière », selon l'expression utilisée par Mme Aubry, décidée par le Gouvernement dans le protocole du 14 mars dernier.
Vous venez de le souligner, madame la secrétaire d'Etat, 2 milliards de francs sont inscrits en dépenses ordinaires dans un chapitre nouveau intitulé « aide exceptionnelle au service public hospitalier » et vous avez noté - c'est exact, d'ailleurs - que ces 2 milliards de francs ont vocation à financer les remplacements de personnel.
Par ailleurs, 100 millions de francs complètent la dotation en crédits de paiement du fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, le FIMHO.
Mais, je souhaite insister sur ces 2 milliards de francs. Je comprends bien, madame la secrétaire d'Etat, la logique qui autorise le subventionnement par l'Etat d'investissements hospitaliers. Je ne comprends pas, en revanche, celle qui conduit aujourd'hui le Gouvernement à inscrire au budget de l'Etat des dépenses de fonctionnement, en l'occurrence des dépenses de personnel. Je me fais ici le porte-parole des représentants des dirigeants hospitaliers qui sont très inquiets à ce sujet.
En effet, les personnels hospitaliers sont normalement payés par l'assurance maladie au travers de la dotation globale hospitalière ; c'est en tout cas ainsi depuis de nombreuses années. Ce nouveau financement par le budget de l'Etat répond-il à une évolution des principes de financement de notre système de santé et à un changement de nature ? Si tel est le cas, il faut le dire et ce nouveau pas vers une nationalisation de la sécurité sociale doit donner lieu à un débat et non pas se faire en catimini, car il s'agit d'un changement radical de politique.
Dans le cas contraire, madame la secrétaire d'Etat - et là vous êtes tout à fait dans vos fonctions - quelle sera la pérennité de ces crédits ?
J'ai bien entendu Mme Aubry : quand elle a parlé d'un plan de 10 milliards de francs, elle a clairement indiqué que le Gouvernement s'engageait pour trois ans. J'en prends acte ! Mais je voudrais rappeler que les crédits budgétaires sont votés chaque année et peuvent être périodiquement remis en cause. Au bout de ces trois ans, que fera-t-on des personnels qui auront été recrutés pendant ce temps-là ?
M. Jean-Pierre Fourcade. C'est la même logique que pour les emplois-jeunes !
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Effectivement, monsieur Fourcade !
J'ai rencontré les représentants des hôpitaux : ils se réjouissent de cette manne hospitalière, justifiée. Voyez que je suis plein de mansuétude pour le Gouvernement ! Mais, dans trois ans, comment va-t-on payer ces personnels ?
En fait, ces crédits budgétaires ne sont que la partie d'un tout. Parallèlement, en effet, le Gouvernement a décidé une dépense supplémentaire - qui ne figure évidemment pas dans la loi de finances - de près de 2 milliards de francs à la charge de l'assurance maladie, qui majore donc du même montant l'objectif de dépenses de cette branche de la sécurité sociale, et dont plus de 1 milliard de francs s'impute sur l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, le fameux ONDAM, le reliquat étant inscrit au fonds d'accompagnement social pour la modernisation des établissements de santé, le FASMO, et constitue une dépense de l'assurance maladie non incluse dans l'ONDAM.
Il serait injuste de reprocher au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie que sa collègue la ministre de l'emploi et de la solidarité n'ait pas jugé bon de présenter au Parlement un collectif social qui aurait permis d'aborder, dans le cadre qui convient, cette nouvelle étape hospitalière. Je rappelle au Parlement, si besoin était, que ce qui a été décidé par la loi doit être modifié par la loi.
Je constate en outre que, lors de la discussion de ce collectif budgétaire à l'Assemblée nationale, ni Mme Aubry ni Mme Gillot n'ont jugé bon d'intervenir.
L'exposé des motifs du présent projet de loi consacre seulement un paragraphe de cinq lignes au « programme annoncé par la ministre de l'emploi et de la solidarité » et conclut : « la modernisation des hôpitaux pourra ainsi être menée dans des conditions budgétaires satisfaisantes ».
Nous ne pouvons que prendre acte de la volonté du Gouvernement de refuser tout débat sur la « nouvelle étape hospitalière » décidée par Mme Martine Aubry. C'est, en réalité, une curieuse conception du Parlement qui semble prévaloir dans le domaine social.
Ainsi, le Gouvernement modifie, de son propre chef, les objectifs de dépenses votés solennellement par le Parlement. Je rappelle que, avant la réforme de 1996, le vote par le Parlement d'un « budget social » avait été demandé par tous les groupes, qui avaient déposé des propositions de loi en ce sens.
Le Parlement vote donc solennellement, depuis 1996, cette loi de financement.
Dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, l'objectif de dépenses de la branche maladie est arrêté par l'article 39. L'objectif national de dépenses de l'assurance maladie est fixé par l'article 40.
Par ailleurs, cette loi crée un fonds de financement des trente-cinq heures et prévoit que des parlementaires doivent siéger à son conseil de surveillance. Ce fonds est en principe opérationnel depuis le 1er janvier 2000 mais, curieusement, le Gouvernement n'a toujours pas demandé au Parlement de désigner ses représentants, chargés pourtant de contrôler la gestion des flux financiers considérables qui transiteront par ce fonds.
En revanche, le Gouvernement décide de son propre chef, le 21 mars dernier, de créer un Conseil d'orientation des retraites. Au cours de mon intervention de cette nuit, j'ai cité les propos étonnants de son président : surtout ne pas proposer de réforme !
Dès le 10 mai, le décret est publié. Dans la foulée, le président de ce conseil est désigné - un haut fonctionnaire - et la date de la première réunion est fixée. Accessoirement, le Parlement est sommé de désigner toutes affaires cessantes - nous venons de le faire au début de cette séance, monsieur le président - ses représentants dans cette instance qui est chargée - rappelons-le - de conseiller le Premier ministre et de lui rédiger des rapports.
D'ailleurs, je n'ai pas très bien compris à quel article de la Constitution on faisait référence en demandant aux parlementaires de rédiger des rapports pour le Premier ministre !
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas constitutionnel !
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. On voit bien que le Gouvernement fait peu de cas de ce qui figure dans la loi. En revanche, pour essayer de faire croire qu'il agit en matière de retraites, alors que chacun sait qu'il ne fait rien, il crée ce Conseil d'orientation des retraites. Or il a été clairement indiqué, lors de sa première réunion, qu'il n'y aura pas de « grand soir » des retraites, parce qu'il faudrait être plus courageux que velléitaire.
Le Parlement aurait aimé que pareille célérité s'appliquât aux organismes qu'il a lui même décidé de créer par la loi.
Curieuse conception de la hiérarchie des normes, de l'ordre des priorités et du rôle du Parlement sur laquelle j'aurais souhaité recueillir le sentiment, non pas du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui était présent la nuit dernière, mais bien de l'ancien président de l'Assemblée nationale.
Pourquoi la commission des affaires sociales s'est-elle saisie pour avis du collectif budgétaire ? Parce qu'elle s'inquiète, comme la commission des finances, de la cohérence des comptes de l'Etat avec ceux de la sécurité sociale.
De quoi s'agit-il ?
Vous vous souvenez, mes chers collègues, que la branche famille verse une allocation de rentrée scolaire, qui est une prestation familiale de l'ordre de 430 francs, à laquelle les familles sont légitimement attachées, ainsi que nous-mêmes, sur quelque travée que nous siégions.
Le Gouvernement avait pris l'habitude, depuis 1993, de décider une majoration substantielle de cette allocation, majoration qui, naturellement, était à la charge du budget de l'Etat, puisque c'était une décision de l'Etat. Cette majoration n'était pas automatique et le Gouvernement se réservait la possibilité de prendre cette décision en cours d'année. Aussi, les crédits nécessaires - et c'était tout à fait logique - figuraient non pas dans la loi de finances initiale, mais dans la loi de finances rectificative et, de fait, dans le collectif de fin d'année.
La Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, faisait l'avance des sommes versées en septembre et n'était remboursée généralement qu'avec quatre mois de retard.
En juillet 1999, changement de décor ! Lors de la Conférence de la famille, le Gouvernement - par la voix du Premier ministre ! - annonce solennellement la pérennisation de cette majoration. Le « relevé de décision » de cette conférence en témoigne : « ce Gouvernement a décidé de pérenniser l'allocation de rentrée scolaire majorée. » Bravo !
Mais cette bonne nouvelle pour les familles est accompagnée d'une moins bonne nouvelle pour la sécurité sociale : c'est la branche famille qui doit prendre progressivement en charge cette majoration, qui représente la modique somme de 7 milliards de francs.
A titre de modeste contrepartie, le Gouvernement annonce qu'il décharge la branche famille des dépenses du fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leur famille, le FASTIF, soit 1 milliard de francs.
Dès la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, une première tranche de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire est mise à la charge de la branche famille, soit 2,5 milliards de francs.
Mais, première surprise, ni le reliquat de cette majoration pérennisée ni les crédits du FASTIF, soit au total 5,5 milliards de francs, ne sont symétriquement inscrits dans la loi de finances pour 2000.
Votre rapporteur pour avis, qui est tout indulgence à l'égard du Gouvernement, veut bien croire que ce dernier avait alors quelques raisons techniques à faire valoir : le projet de loi de finances a été déposé avant le projet de loi de financement ; les comparaisons entre lois de finances initiales sont plus lisibles lorsqu'elles peuvent être faites à structure constante. Or la majoration de l'allocation de rentrée scolaire était inscrite traditionnellement dans le collectif budgétaire.
En revanche, madame la secrétaire d'Etat, il est proprement incompréhensible que cette prestation, qui sera versée en septembre 2000, ne soit pas inscrite dans le collectif budgétaire de printemps dont nous sommes en train de discuter.
Dès lors, il y a un défaut de sincérité quelque part : soit dans les comptes de l'Etat - le président de la commission des finances le disait voilà un instant - soit dans les comptes de la sécurité sociale, soit encore dans le discours que l'on tient aux familles, ce qui serait encore pire et je n'ose y croire.
Première hypothèse : le Gouvernement n'entend inscrire ces 5,5 milliards de francs que dans le collectif de fin d'année. Ce choix appelle trois observations.
Cela veut dire, d'abord, que la branche famille, en septembre prochain, devra en faire l'avance au prix d'une majoration par décret des plafonds d'emprunt autorisés par le Parlement et, en tout état de cause, d'une charge de trésorerie qui est totalement injustifiée, dès lors que le Gouvernement dispose de l'instrument qu'est le collectif budgétaire de printemps et peut donc mobiliser les fonds nécessaires en temps utile, d'autant que le Gouvernement lui-même l'a annoncé l'année dernière.
Mais cela signifie également que les comptes de l'Etat pour 2000, tels qu'ils sont présentés au Parlement, ne sont pas sincères, car ils n'intègrent pas une dépense certaine.
Mes chers collègues, moi je crois, comme l'opinion, ce que dit M. le Premier ministre : il dit que l'Etat va prendre en charge ces 5,5 milliards de francs. Cela ne figure nulle part ! Cela veut dire, que ces comptes ne sont pas sincères. En d'autres termes, le déficit de l'année 2000, serait non pas de 215 milliards de francs mais de 220 milliards de francs. Il est vrai que M. Fabius nous a dit hier qu'il s'élèverait peut-être à 200 milliards de francs. Alors, 200, 215, ou 220 milliards de francs...
Tout cela, M. le rapporteur général vient de le souligner, est d'une confusion absolue. Je rappelle que le désir de transparence qui anime le ministère des finances a été rappelé à plusieurs reprises hier par M. Fabius. Nous souhaitons vivement que cette transparence concerne aussi les comptes sociaux.
Peut-être le Gouvernement entend-il cultiver les effets d'annonce jusqu'au bégaiement. En effet, en juillet 1999, il a décidé solennellement de pérenniser l'allocation de rentrée scolaire majorée. Or, comme la Conférence de la famille se réunit le 15 juin 2000, peut-être va-t-il annoncer la majoration de l'allocation de rentrée scolaire de 2000. Mais nous lui rappellerons alors qu'il l'avait déjà annoncée l'année dernière. Certes, mieux vaut se répéter que se contredire, mais il faut tout de même tenir compte des décisions que l'on annonce. La commission des affaires sociales du Sénat s'est donc résolue à envisager une autre hypothèse, tout à fait inquiétante, qui seule pourrait expliquer l'absence de cette dépense certaine dans le collectif de printemps.
Cette deuxième hypothèse, peut-être plus grave encore, serait la suivante : le Gouvernement a décidé de transférer à la charge de la branche famille dès 2000 - je puis vous dire que les associations familiales sont inquiètes - et sans compensation l'intégralité de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire.
Je rappelle que, le 6 avril dernier, M. le Président de la République prenait la défense d'une politique familiale ambitieuse et estimait qu'« il est indispensable de garantir la progression des recettes de la branche famille et d'appliquer scrupuleusement ce principe fondamental de la sécurité sociale qui veut que les excédents de la Caisse nationale d'allocations familiales ne puissent être dérivés pour le financement d'autres branches ». Nous avons même voté, en 1994, une loi qui l'interdit. C'est la raison pour laquelle il n'y a pas, contrairement à ce qu'a annoncé Mme Aubry, un excédent de 250 millions de francs de la sécurité sociale. Il y a un excédent de la branche famille de quatre milliards de francs, un excédent de la branche retraite de cinq milliards de francs et un déficit de la branche maladie de neuf milliards de francs. Voilà la réalité des comptes de la sécurité sociale !
M. Serge Vinçon. Tout à fait !
M. Jean Chérioux. En effet !
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, le Gouvernement a, en effet, détourné une partie du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine pour la transférer de la branche famille vers le fonds de réserve pour les retraites.
Si la deuxième hypothèse que je suis en train d'évoquer se vérifiait, cela voudrait dire qu'une nouvelle ponction de 5,5 milliards de francs aurait lieu sur la branche famille, ce qui serait une décision d'une exceptionnelle gravité.
Ce faisant, j'observe que la branche famille financerait indirectement, et bien au-delà, la contribution budgétaire de deux milliards de francs que vous venez de nous annoncer, madame le secrétaire d'Etat.
En tout cas, si cette hypothèse était exacte, cela voudrait dire que, cette fois, ce sont les comptes sociaux qui ne sont pas sincères et que la commission des comptes de la sécurité sociale, qui s'est réunie le 22 mai dernier, a présenté des chiffres erronés pour l'exercice 2000 : l'excédent de la branche famille pour 2000, évalué à 4,5 milliards de francs, recouvrirait, en réalité, un déficit d'un milliard de francs. Nous verrons bien !
Ou bien les comptes de l'Etat ne sont pas sincères ou bien les comptes de la sécurité sociale ne le sont pas et une ponction lourde sera opérée sur la branche famille.
Voilà quelques jours, M. Alain Vasselle, M. Jacques Machet et moi-même avons présenté un rapport d'information sur ce sujet. Nous y reviendrons lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
Cela étant dit, puisque vous seule, madame le secrétaire d'Etat, avez la possibilité de déposer des amendements « dépensiers », je vous suggère, pour lever cette ambiguïté et afin que le Gouvernement montre la sincérité des comptes tant du budget de l'Etat que du budget des affaires sociales, de déposer un amendement visant à majorer les crédits budgétaires des 5,5 milliards de francs nécessaires au financement de l'allocation de rentrée scolaire qui sera versée aux familles en septembre prochain.
M. Jean-Pierre Raffarin. On l'appellera « l'amendement Descours » !
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Je vous assure, madame le secrétaire d'Etat, que les familles vous en seront très reconnaissantes. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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NOMINATION DE MEMBRES
D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires sociales et la commission des finances ont proposé des candidatures pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Joël Bourdin, Claude Domeizel et Alain Vasselle membres du conseil d'orientation des retraites.
M. Charles Descours. Ça c'est important !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ils vont pouvoir conseiller le Gouvernement.

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LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2000

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2000.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République : 31 minutes ;
Groupe socialiste : 25 minutes ;
Groupe de l'Union centriste : 19 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants : 17 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen : 10 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe : 7 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, dans l'intitulé du présent projet de loi, il y a les mots « finances » et « rectificative ».
S'agissant des finances, il ne me semble pas anormal qu'en dernier ressort l'Etat connaisse une évolution dans la masse réelle de ses recettes, et il faut se réjouir que ce soit en plus.
Ce qui peut paraître plus anormal, c'est l'existence de recettes cachées car des obligations ne sont pas remplies. Je cite, par exemple, le report en 1999 du versement à l'Etat de la dette de la CADES, la caisse d'amortissement de la dette sociale. Nous verrons bien, mais il est vraisemblable que cela ressortira comme par miracle à la fin de l'année 2000.
A propos de la CADES, je vous réitère ma demande, madame la secrétaire d'Etat, pour que le Gouvernement communique à la commission des finances et à moi-même le tableau d'amortissement de cette dette. Jusqu'à présent, nous n'avons pas pu l'obtenir.
Par ailleurs, il me semblerait logique que l'excédent de la sécurité sociale soit affecté en priorité au remboursement de cette dette qui, je le rappelle, est le stock de déficits antérieurs de la sécurité sociale. Cela éviterait de faire prendre des risques aux générations futures puisque, lors de la dernière consolidation, l'échéance de remboursement de cette dette a été portée de treize ans à dix-huit ans.
En ce qui concerne la partie rectificative, c'est l'occasion de corriger un certain nombre d'erreurs que chacun constate et sur lesquelles tout le monde est d'accord.
J'évoquerai deux amendements que nous examinerons et qui me semblent significatifs.
Le premier a trait à la fiscalité des entreprises de services de moins de cinq salariés. Sont concernés les titulaires de bénéfices non commerciaux, les agents d'affaires et intermédiaires de commerce qui n'ont pas bénéficiés de la baisse de la taxe professionnelle car le mode de calcul de leur prélèvement est différent.
Le second amendement concerne la baisse de la TVA dans la restauration. Il faut mettre fin au scandale de l'avantage que représente pour les fast foods l'application d'une TVA de 5 % seulement. Nous critiquons sans cesse les méfaits culturels de ces établissements, mais ils bénéficient là d'un avantage indu. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
J'évoquerai également trois sujets qui ne font pas l'objet d'amendements, mais qui me paraissent très importants et sur lesquels vous pourrez, je l'espère, madame la secrétaire d'Etat, nous apporter une réponse positive.
Je vous avais interrogée sur la suppression du décalage de remboursement de la TVA concernant les collectivités locales. Il manque effectivement quelque 0,9 %. Dans votre proposition de baisser d'un point la TVA, il n'y a rien en faveur des collectivités locales. Je pense que vous avez là une excellente occasion de réparer cet oubli.
Les entreprises, agricoles ou non, qui ont été durement touchées par la tempête, vont voir leurs indemnisations considérées comme des bénéfices exceptionnels et donc être imposés comme tels, de la même façon que leur sera prélevée une cotisation sociale importante.
Ainsi, entre une augmentation des coûts de construction que, à l'heure actuelle, on peut chiffrer à environ 30 % et les prélèvements exceptionnels que je viens d'évoquer, il manquera à peu près la moitié de la somme nécessaire à la reconstitution de leur outil de travail. Je pense, madame la secrétaire d'Etat, qu'il y a là une excellente occasion de montrer que l'Etat, avec ses recettes, peut mettre un terme à cette difficulté.
Les éleveurs dont les troupeaux ont été abattus à cause de l'ESB, la maladie de la « vache folle », connaissent exactement la même situation. C'est plus de 25 % du montant de l'indemnisation qui leur est accordée qui sera prélevée, et ils sont donc dans l'incapacité de renouveler leur cheptel. Il me semble tout de même anormal que l'Etat profite de ces circonstances difficiles pour prélever un impôt supplémentaire qui empêchera les éleveurs de reformer leur troupeau.
M. Gérard Cornu. C'est même scandaleux !
M. Hilaire Flandre. C'est du racket !
M. Philippe Adnot. J'avais déjà évoqué cette question devant vous, madame la secrétaire d'Etat, et vous vous étiez engagée à essayer de trouver une solution. J'attends avec intérêt de savoir quelles mesures concrètes vous compter prendre. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les hasards de l'ordre du jour du Sénat font de cette première semaine de juin un minimarathon budgétaire. Après nous être projetés hier dans le futur, nous voici de nouveau à la tâche pour rectifier le présent, avant de nous replonger dès demain dans le passé, avec le projet de loi de règlement définitif du budget de 1998. Il convient de féliciter notre rapporteur général, M. Philippe Marini, de la qualité de ses travaux.
M. Jean-Claude Carle. C'est vrai !
M. Serge Vinçon. Comme toujours !
M. Gérard Cornu. Ses réflexions et ses propositions nous permettront d'effectuer un travail de qualité sur ce collectif budgétaire.
Quatre mois après avoir été adopté par le Parlement, le budget pour 2000 doit être rectifié, à la demande du Gouvernement. Ce que nous disions en décembre dernier était la vérité : les hypothèses sur lesquelles était construit le budget n'étaient pas sincères, à savoir des dépenses mal estimées et des recettes fiscales sous-estimées.
Il convient, pour les analyser, de rappeler les justifications qui ont été avancées par le Gouvernement à l'appui de ce collectif budgétaire. Il s'agit, d'une part, de la nécessaire prise en compte des recettes supplémentaires résultant de la croissance. Il s'agit, d'autre part, d'un ajustement des dépenses à de nouveaux besoins.
Le Gouvernement annonce un montant de recettes fiscales supplémentaires de 51 milliards de francs, qu'il propose de répartir comme suit : 40 milliards de réductions d'impôts et 11 milliards de francs de dépenses nouvelles.
Sur le montant global des recettes supplémentaires, nous avons le sentiment que nous allons revivre, en 2000, la mauvaise pièce que le Gouvernement nous a jouée en 1999. S'agissant de la croissance, tout d'abord, le collectif est fondé sur un taux de 3,6 % - on nous a expliqué qu'il s'agit d'un taux intermédiaire entre 3,4 % et 3,8 % ; c'est incontestable ! - au lieu des 2,8 % du budget 2000, dont tout le monde dénonçait la forte sous-évaluation. Cette prévision révisée reste en deçà de ce qui est prévu par la plupart des instituts de conjoncture, qui tablent sur une croissance dépassant 4 %. Personne ne se plaindra d'un taux de croissance de plus de 4 %, sauf peut-être nos compatriotes lorsqu'ils comprendront que le Gouvernement, par cette sous-estimation, leur confisque in fine une partie des fruits de la croissance.
Comment peut-on faire confiance au Gouvernement, alors que le rapport préliminaire de la Cour des comptes sur le budget de 1999 montre que les recettes supplémentaires pour l'an dernier dépassaient de 27 milliards les 30,7 milliards reconnus par le Gouvernement devant le Sénat, après, il faut bien le dire, quelques tergiversations ? La fin de l'année 2000 verra, comme la précédente, le Gouvernement multiplier les reports de recettes ou les retards d'encaissement pour masquer la réalité des recettes.
La Cour des comptes chiffre ainsi à 18 milliards de francs les recettes non fiscales de 1999 reportées à 2000, auxquelles s'ajoutent 9 milliards de francs de recettes fiscales tardivement encaissées. Ces 27 milliards de francs qui auraient dû être comptabilisés en 1999 auraient permis de réduire d'autant le déficit budgétaire. Le résultat de 1999 était donc un déficit non pas de 206 milliards de francs, mais de 179 milliards de francs. La piètre performance affichée par le Gouvernement en 2000 en matière de réduction du déficit budgétaire est pire. Non seulement avec 215 milliards de francs, le déficit 2000 est supérieur au déficit de 1999, mais il convient d'y ajouter, par orthodoxie budgétaire, les 27 milliards de francs précités pour arriver à 242 milliards de francs. On en revient, peu ou prou, au niveau de déficit constaté en 1998.
Pour bien comprendre que la réduction du déficit budgétaire n'est plus une priorité pour le Gouvernement, en dépit des avertissements répétés des autorités communautaires, il suffit de constater que ce collectif ne réduit le déficit que de 50 millions de francs, c'est-à-dire d'un montant égal aux crédits supplémentaires accordés à la création artistique ou aux initiatives d'économie solidaire. Loin de nous l'idée de considérer ces secteurs comme minimes, mais, au sein de la politique budgétaire de l'Etat, la réduction des déficits est, pour nous, porteuse d'enjeux plus primordiaux. Ce choix du Gouvernement n'a pourtant pas fait l'objet de commentaires de la part des membres de la majorité plurielle. Chacun ses priorités, mais ce ne sont pas les nôtres !
Nous avons entendu à plusieurs reprises Mme la secrétaire d'Etat au budget railler la politique budgétaire que nous soutenions entre 1993 et 1997. Cette politique a présenté au moins deux avantages : elle mettait les discours en conformité avec les actes, contrairement à ce que fait le gouvernement actuel, et elle a réduit le déficit budgétaire de 6,4 % à 3,5 % du produit intérieur brut.
A l'occasion du débat d'orientation budgétaire, il nous a été indiqué que toutes les marges de manoeuvre supplémentaires dégagées par la croissance d'ici à la fin de cette année seraient affectées à la réduction du déficit budgétaire.
Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a d'ailleurs une idée assez précise de ces marges de manoeuvre puisque M. Fabius a annoncé un déficit budgétaire pour 2000 autour de 200 milliards de francs, ce qui reste très élevé par rapport à nos partenaires européens et au taux de croissance rectifié de 2000.
Les mesures fiscales incluses dans ce collectif budgétaire appellent divers commentaires.
Il convient tout d'abord de rappeler que l'année 1999 a été marquée par la collecte de 113 milliards de francs d'impôts d'Etat supplémentaires, chiffre qui figure dans le rapport de la Cour des comptes et ne peut donc être contesté.
M. Roland du Luart. C'est vrai !
M. Gérard Cornu. Sur ces 113 milliards de francs, le Gouvernement propose de n'en restituer que 80 milliards en 2000.
Pour l'impôt sur le revenu, le même raisonnement doit être tenu : plus de 30 milliards de francs d'augmentation en 1999, et seuls 11 milliards de francs restitués en 2000 avec la baisse des taux des deux premières tranches du barème. C'est largement insuffisant.
Le Gouvernement indique que cette mesure permettra de sortir du barème 650 000 contribuables. Certes, mais il faut se souvenir que, en 1999, avec la réduction du plafond du quotient familial, ce sont 1,3 million de personnes supplémentaires qui ont été assujetties à l'impôt sur le revenu. En 2000, il restera donc encore 650 000 contribuables à l'impôt sur le revenu qui le sont devenus en 1999, à cause de la politique fiscale du Gouvernement.
M. Roland du Luart. Tout à fait exact !
M. Gérard Cornu. Les états mensuels des recettes fiscales de l'Etat que l'on retrouve sur le site Internet du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie sont pleins d'enseignements, mes chers collègues.
Les derniers chiffres disponibles à la fin du mois d'avril laissent présager de bien mauvaises surprises pour les contribuables, comme en 1999, lorsque ces derniers recevront leur dernier tiers provisionnel ou leur dernière mensualité. Les recettes de l'impôt sur le revenu ont progressé de 6,1 % par rapport au mois d'avril 1999, soit, sur un an, 20 milliards de francs supplémentaires.
On est loin des 11 milliards de francs généreusement rendus par le Gouvernement !
Pour l'impôt sur les sociétés, les résultats sont aussi intéressants, avec une progression des recettes de 20,8 % entre avril 1999 et avril 2000, ce qui représente plus de 17 milliards de francs en sus.
Ajoutez à cela une progression des recettes de TVA de 3 % et une augmentation de la TIPP de 4 % pour comprendre qu'il sera à nouveau difficile au Gouvernement d'expliquer aux Français que les impôts baissent alors que les prélèvements obligatoires continuent de progresser.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Théorème de Strauss-Kahn !
M. Gérard Cornu. C'est là une mise en garde dont l'auteur, alors président de l'Assemblée nationale et aujourd'hui sur d'autres bancs, nous permettra de la reprendre à notre compte.
Vos propositions en matière d'impôt sur le revenu ne sont pas assez ambitieuses au regard des moyens dont vous disposez. C'est pourtant là que devrait porter l'essentiel de l'effort de l'Etat.
Le Premier ministre a annoncé un budget pour 2001 dont la priorité sera la baisse des impôts directs. Nous sommes sceptiques sur ce que sera l'ampleur de cette baisse. La seule véritable réforme passe par une réduction du nombre des tranches, un élargissement de l'assiette et une baisse des taux, y compris le taux marginal.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ah !
M. Gérard Cornu. Cette réforme s'apparente, en fait, à celle que le Gouvernement a malencontreusement arrêtée en 1997.
On ne peut pas parler de la trop forte pression fiscale subie par nos compatriotes sans en évoquer l'une des conséquences majeures : la délocalisation de personnes physiques contribuables de l'impôt sur le revenu et/ou redevables de l'ISF. La note remise à ce sujet par le Gouvernement en annexe du présent collectif se caractérise par des avertissements de la direction générale des impôts sur le caractère incomplet de l'étude et le manque d'informations disponibles.
Le président de la commission des affaires économiques nous a communiqué hier, à l'occasion du débat d'orientation bugdétaire, des données très précises à ce sujet, qui seront complétées par les travaux de la mission d'information nommée par le Sénat.
Le deuxième allégement concerne la taxe d'habitation. Vous prévoyez de supprimer la part régionale de la taxe d'habitation et de remplacer les mécanismes actuels de dégrèvement par un plafonnement unique. Cette proposition, sur laquelle le soutien de sa majorité a fait défaut au Gouvernement, puisque ce dernier a dû recourir à une seconde délibération après la suppression, par l'Assemblée nationale, de l'article 6, remet à l'évidence en cause le principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Gérard Cornu. Nos suffrages iront plutôt à l'excellente proposition de M. le rapporteur général, qui aboutit à un allégement de la taxe d'habitation équivalent sans suppression de la part régionale, mais par la remise en cause des frais d'assiette et de recouvrement des taxes locales qui atteignent des taux prohibitifs.
Le dernier volet de vos propositions fiscales, madame la secrétaire d'Etat, concerne la baisse d'un point de la TVA. En dépit des très fortes réserves exprimées par le ministère de l'économie des finances et de l'industrie, qui semblait préférer les baisses ciblées, l'annonce en a été faite par le Premier ministre, et il convient maintenant d'exécuter cette mesure fort onéreuse, puisqu'elle s'élève à 18 milliards de francs pour 2000 et à 31 milliards de francs en année pleine.
Les effets de cette décision de réduction prise en période de croissance ne seront pas à la hauteur des attentes du Gouvernement. Les consommateurs finaux ne bénéficieront pas ou presque pas - chacun, ici peut bien le reconnaître - de la baisse du taux, qui sera absorbée par les circuits de distribution.
D'ailleurs, les consommateurs s'aperçoivent peu d'une baisse d'un point du taux de TVA, et une telle diminution n'est au demeurant pas suffisante pour inciter à consommer davantage.
Les premiers chiffres publiés par la direction générale de la concurrence et de la consommation sur les effets de cette mesure, entrée en vigueur le 1er avril dernier, justifient nos craintes : la baisse du taux normal de la TVA a été répercutée entre 57 % et 65 % suivant la nature des magasins étudiés ; ce sont donc de 11 à 13 milliards de francs qui, chaque année, ne seront pas répercutés sur les consommateurs.
Face aux 51 milliards de francs de recettes supplémentaires, le Gouvernement propose 11 milliards de francs de dépenses nouvelles, dont on peut immédiatement suite regretter qu'elles n'aient pas été financées par redéploiements budgétaires. Ce point a d'ailleurs été déjà évoqué par M. le rapporteur général ainsi que par M. le président de la commission des finances.
Nous tenons à faire part de notre préoccupation quant à la gestion de la dépense publique par le Gouvernement. Chacun sait que rien ne peut se faire sans maîtrise des dépenses. Or, que constatons-nous à la lecture du rapport de la Cour des comptes ? Alors que le Gouvernement s'était engagé sur une augmentation des dépenses de 1 % en volume en 1999, le résultat final est de 2,8 %. Triste performance !
En ce qui concerne le volet « dépenses », il convient de revenir sur le problème posé par le déséquilibre du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, le FOREC, institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Il manque 7 milliards de francs de ressources à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du mois de décembre dernier. Ce fonds est un établissement public à caractère administratif dont les comptes doivent être équilibrés soit par des recettes affectées, soit par une subvention de l'Etat. Il n'y a rien, dans le collectif budgétaire, qui vienne procéder à cet équilibre, ce qui remet en cause sa sincérité.
Je dirai quelques mots sur les finances locales, pour dénoncer l'attitude de certains députés qui, moins d'un an après l'adoption de la loi sur l'intercommunalité, profitent de ce collectif budgétaire pour remettre en cause l'équilibre qui avait été trouvé en commission mixte paritaire à propos de l'intégration de la redevance d'assainissement dans le coefficient d'intégration fiscale.
M. Jacques Oudin. Très bien !
M. Gérard Cornu. On ne peut pas se parer des habits de promoteur de l'intercommunalité et installer les établissements publics de coopération intercommunale dans l'insécurité juridique et l'instabilité financière. Nous en reparlerons à l'occasion de l'examen des articles, mais sachez déjà que nous ne saurions admettre de telles méthodes.
M. Jacques Oudin. Bravo !
M. Roland du Luart. Très bien !
M. Gérard Cornu. Le coût des nombreuses créations de communautés d'agglomération n'a pas été intégralement pris en compte dans ce collectif budgétaire seulement 250 millions de francs, alors qu'il fallait 497 millions de francs, soit deux fois plus.
Le budget pour 2001 devra intégrer 500 millions de francs pour la dotation de solidarité urbaine, 150 millions de francs pour la dotation de solidarité rurale, 200 millions de francs pour les conséquences du recensement et 500 millions de francs pour la coopération intercommunale, soit un total de 1 350 millions de francs qu'il convient de budgétiser dès maintenant.
A l'évidence, ce projet de loi de finances rectificative pour 2000 manque de souffle et les marges de manoeuvre dégagées par la croissance ne sont pas utilisées à bon escient. Le déficit budgétaire pour 2000 est supérieur à celui de 1999. Les dépenses ne sont pas maîtrisées.
Le groupe du Rassemblement pour la République soutiendra les propositions de la commission des finances, qui visent à modifier en profondeur ce collectif afin de le rendre plus en phase avec les légitimes attentes de nos compatriotes qui produisent des richesses et créent des emplois. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les plus-values fiscales dégagées en 1999 et celles qui sont prévisibles pour l'an 2000 engendrent un mouvement de plus de 50 milliards de francs. C'est donc dans un débat quant à la répartition des fruits de la croissance que nous nous plaçons.
Pour ce qui nous concerne, nous avons demandé, voire « porté » ce collectif, afin de mieux répondre tant aux revendications exprimées ces derniers temps, notamment dans les écoles, dans les hôpitaux et dans les services publics que, plus généralement, aux besoins exprimés dans notre pays.
Je ne reviendrai pas sur tous ces mouvements sociaux ; mais nous nous devons de lever les doutes des uns et des autres sur la répartition de la croissance et, en même temps, de donner le signe précurseur de bouleversements plus profonds à venir dans le cadre de la loi de finances de 2001.
Bien sûr, nous voyons dans ce collectif une première réponse au financement de besoins clairement identifiés, mais nous y voyons aussi, malheureusement, des financements qui nous apparaissent plus comme un saupoudrage que comme une réponse réelle à la demande.
C'est notamment le cas pour l'éducation nationale, avec 2 % des crédits de ce collectif.
Nous apprécions évidemment l'effort qui est accompli, avec des ouvertures de crédits pour 1 milliard de francs, mais nous estimons que c'est encore trop peu. De multiples défis doivent, en effet, être relevés : comment mieux former les jeunes ? Comment leur permettre d'accéder aux métiers de demain ?
Même si M. le ministre de l'éducation nationale s'est engagé dans une large concertation avec l'ensemble des acteurs de l'éducation, nous estimons utile, pour notre part, que ce collectif soit l'occasion de marquer plus nettement encore notre attachement commun à l'école de la réussite en majorant de 1 milliard de francs les crédits ouverts par le projet de loi initial.
C'est aussi le cas concernant le plan de modernisation des établissements hospitaliers, qui recouvre des questions comme le statut des internes, celui des personnels ou les moyens nécessaires à l'adaptation des établissements.
N'en déplaise à notre collègue Charles Descours, les 2,6 milliards de francs correspondent à une partie de ce que demandaient les agents et que nous-mêmes demandions.
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Nous aussi !
M. Thierry Foucaud. Tout laisse cependant penser, monsieur Descours, que les sommes mobilisées vont apparaître insuffisantes pour faire face aux besoins tels qu'ils s'expriment au cas par cas de l'analyse de la situation de chaque établissement.
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Demandez avec moi un collectif sur la loi de financement !
M. Thierry Foucaud. Une autre préoccupation concerne l'emploi des jeunes et le devenir du plan emploi-jeunes.
Il nous semble important que l'on crée les conditions d'une intégration dans l'emploi et dans les statuts existants des jeunes concernés et qu'ils puissent, par exemple, passer tel ou tel concours.
L'expérience des emplois-jeunes doit donc être validée dans le rapport qu'elle a permis de créer entre la population et certains services publics, comme dans le rapport qu'elle a recréé entre ces jeunes et l'emploi. Il serait dommage que cet acquis, faute de sortie positive, soit dilapidé.
Nous proposerons donc un amendement visant à mettre à la disposition des collectivités et des administrations accueillant aujourd'hui ces jeunes, sous forme de crédits d'intervention à répartir, les sommes nécessaires à la réalisation de toute action susceptible de positiver l'acquis et l'expérience des emplois-jeunes.
Vous comprendrez qu'au-delà de certains engagements pris par le Gouvernement en matière européenne c'est aussi le respect des engagements pris devant le peuple en 1997 qui doit guider les choix budgétaires de notre pays.
Répondre aux besoins collectifs, oeuvrer à rendre plus efficace la dépense publique, la majorer, au besoin, en fonction des priorités du développement social et de celui du pays, voilà ce qui doit être au coeur de la démarche du gouvernement de la gauche plurielle.
Cela dit, revenons-en aux recettes de ce collectif budgétaire.
Compte tenu de la date de sa discussion, ce projet de loi de finances rectificative présente, bien entendu, d'autres caractéristiques qu'un collectif de fin d'année, qui tend un peu, dans l'absolu, à « solder les comptes de l'exercice ».
Plus de 40 milliards de francs sont mobilisés par la baisse des impôts, qui concerne d'abord l'impôt sur le revenu, la taxe sur la valeur ajoutée et la taxe d'habi-tation.
Nous aurons évidemment l'occasion, dans le cadre de la discussion des articles, de revenir plus complètement sur les mesures qui sont préconisées, mais permettez-moi d'emblée de poser un certain nombre de questions.
Nous sommes évidemment très favorables à la réduction du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée, et nous souhaitons d'ailleurs clairement que soit définitivement effacée, dans un proche avenir, la majoration décidée par la majorité de droite en 1995.
Cher collègue Gérard Cornu, vous venez de dire que 1 % de moins, cela ne se voit pas ; mais permettez-moi de dire que 2 % de plus en 1995, cela s'est vu !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous n'avions pas la croissance !
M. Thierry Foucaud. Ni la même politique non plus !
M. Guy Fischer. Ne défendez pas l'indéfendable, monsieur le rapporteur général !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il fallait bien équilibrer les comptes !
M. Thierry Foucaud. Nous pensons qu'il faut même envisager d'aller plus loin en matière de droits indirects, car les taxes sur l'essence et le fioul sont trop importantes et pèsent sur la consommation des produits pétroliers. Et je ne suis pas seul à le dire, pas plus que le groupe communiste républicain et citoyen : c'est ce que disent toutes les Françaises et tous les Français.
M. Jean-Claude Carle. Tout le monde le dit, en effet ! Nous sommes d'accord à cet égard.
M. Thierry Foucaud. Si nous apprécions la mesure sur l'impôt sur le revenu, nous attendons que, pour renforcer son efficacité, soit réalisée une évolution sensible de son assiette.
Le maintien de nombreuses dispositions dérogatoires favorables aux placements et revenus financiers ne participe pas des objectifs généraux de justice fiscale, de redistribution sociale et d'efficacité économique que l'impôt sur le revenu doit essayer d'atteindre.
Comment tolérer, en effet, que persiste aujourd'hui un tel décalage entre la contribution sociale généralisée et l'impôt sur le revenu, les salaires et revenus assimilés étant largement plus soumis à imposition ?
Le choix d'un allégement de la contribution sociale généralisée aurait pu être effectué, étant immédiatement palpable par l'ensemble de nos compatriotes, dont celles et ceux qui ne paient pas aujourd'hui d'impôt sur le revenu et que l'aménagement du barème ne concerne donc pas.
S'agissant des impôts locaux, nous estimons là encore que le choix opéré est pleinement justifié et légitime, mais qu'il mérite de manière évidente d'être intégré à une réforme plus générale de la fiscalité locale.
Réduire la taxe d'habitation est un bon choix, mais cela ne clôt pas le débat, en particulier sur la taxe professionnelle, la révision des valeurs locatives, l'importance relative des dotations et de la fiscalité dans le budget des collectivités locales.
En effet, venant après la suppression progressive de la part imposable assise sur les salaires, la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation participe tant de la réduction des capacités autonomes de gestion des collectivités territoriales que d'une spécialisation des recettes fiscales qui peut poser problème.
De plus, la charge fiscale pesant sur les ménages demeure assez largement supérieure à celle qui est imposée aux contribuables de la taxe professionnelle.
Nous attendons donc du débat sur ce projet de loi de finances rectificative comme du débat sur le projet de loi de finances pour 2001 qu'ils permettent de prendre mieux en compte ces réalités.
Nous avons eu l'occasion de le souligner dans le cadre de la discussion des orientations budgétaires, et c'est particulièrement valable ici.
Nous nous plaçons donc dans ce débat sur une ligne claire : nous partageons une part importante des choix opérés par le texte, mais nous estimons nécessaire, dans certains domaines, de relancer la réflexion et de formuler des propositions libérées de critères de gestion trop restrictifs.
Le groupe des sénateurs et des sénatrices communistes républicains et citoyens entend marquer ce débat en faisant des propositions pour aider à développer la politique menée par la majorité de gauche plurielle.
Il se situera donc clairement à l'encontre des propositions de la majorité sénatoriale, dont l'indignation fiscale s'avère une fois de plus pour le moins sélective et se plie sans cesse au dogme de la réduction des dépenses publiques.
Nous faisons et ferons de nos propositions et de nos observations un élément dynamique de la démarche politique de la gauche plurielle, répondant par là même aux attentes qu'expriment nos compatriotes.
En fin de compte, pour revenir, en quelque sorte, au point de départ de mon intervention et faire un lien avec le très intéressant débat d'orientation que nous avons eu hier, permettez-moi de vous poser une question, madame le secrétaire d'Etat.
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie nous a annoncé un nouveau collectif budgétaire de fin d'année, collectif qui ramènerait le déficit final des comptes publics pour 2000 à moins de 200 milliards de francs, et plus précisément aux alentours de 195 milliards de francs.
M. Hilaire Flandre. Cela fait combien de SMIC ?
M. Thierry Foucaud. Cela signifie-t-il que l'exercice auquel nous nous livrons aujourd'hui n'a qu'une portée relative et une valeur d'étape, en quelque sorte, puisque le rythme d'encaissement des recettes fiscales est suffisamment soutenu pour que de nouvelles marges voient le jour ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est probable !
M. Thierry Foucaud. L'état de l'exécution budgétaire fin avril 2000 nous apporte d'ailleurs des indications significatives : le déficit a été réduit de près de 25 milliards de francs par rapport à avril 1999, et cette réduction est imputable tant à la maîtrise des dépenses, en baisse de près de deux points, qu'au dynamisme des recettes, avec des rendements en hausse de trois points pour la TVA, de six points pour l'impôt sur le revenu et de plus de vingt points pour l'impôt sur les sociétés.
Ce sont près de 25 milliards de francs de recettes fiscales nouvelles qui ont été perçues en quatre mois, et je pense que les mesures de réduction d'impôt prévues par le collectif actuel ne ralentiront pas fortement ce mouvement de progression.
Nous ne nous en plaindrons d'ailleurs pas forcément, le niveau des rentrées fiscales attestant l'amélioration de la situation économique. Nous estimons donc qu'une part plus importante des marges existantes doit, dès lors, être effectivement consacrée à répondre aux besoins, notamment sociaux.
Les amendements que nous défendrons au fil de l'examen des articles porteront sur ce point. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Miquel.
M. Gérard Miquel. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'examen de ce collectif témoigne de la capacité du Gouvernement à accompagner la reprise économique tout en permettant aux Français de bénéficier des fruits de la croissance retrouvée. Il montre également que la politique de réformes se poursuit.
Que n'a-t-on entendu sur les travées de la majorité sénatoriale : les 35 heures, les emplois-jeunes, toutes ces mesures devaient pénaliser notre économie, freiner l'investissement et casser la croissance. Force est de constater qu'à jouer les oiseaux de mauvaise augure, il arrive, bien heureusement, qu'on se trompe !
Que vous le vouliez ou non, chers collègues de la majorité sénatoriale, le Gouvernement a su rapidement gagner la confiance de nos concitoyens, alors que vous aviez mis si peu de temps pour la perdre. Et cette confiance retrouvée s'inscrit dans la durée !
Aujourd'hui, sur ce collectif, 40 milliards de francs sont réservés à des baisses d'impôts, sur un total de 51,4 milliards de francs, qui viennent s'ajouter aux 40 milliards de francs votés en loi de finances initiale.
Ce niveau de recettes exceptionnel est dû à un niveau de croissance rarement atteint, qui dépasse les prévisions les plus optimistes tout en étant supérieur à ceux de nos principaux partenaires. La France est devenue la locomotive économique de l'Europe.
La réduction de notre déficit se poursuit et atteindra, en fin d'année, 200 milliards de francs environ. Le taux de chômage, encore trop élevé, est passé sous la barre des 10 % de la population active. Nous nous réjouissons tous de ces résultats, que la plupart d'entre nous n'avaient pas imaginés.
La baisse de la TVA de 20,6 % à 19,6 % entraîne une hausse du pouvoir d'achat des ménages qui peut être évaluée à 18,5 milliards de francs. Elle fait suite aux baisses ciblées, en particulier à celle qui s'applique aux logements sociaux et aux travaux d'entretien et de réhabilitation des logements, où le taux est passé de 20,6 % à 5,5 %.
Nos concitoyens sont sensibles à ces mesures, qu'ils apprécient d'autant plus qu'ils considèrent cet impôt comme particulièrement injuste.
L'allégement de l'impôt sur le revenu de 11 milliards de francs prévu dans ce collectif permet, lui aussi, une hausse du pouvoir d'achat des ménages, due à la baisse, pour l'imposition des revenus de 1999, des taux d'imposition des deux premières tranches du barème, qui passent de 10,5 % à 9,5 % et de 24 % à 23 %. Cette baisse profite relativement plus aux foyers de condition modeste ou moyenne, puisque 650 000 foyers supplémentaires seront exonérés de l'impôt sur le revenu.
J'en viens à la réduction de la taxe d'habitation. Pour la rendre plus juste et plus efficace économiquement tout en n'affectant pas les ressources des collectivités locales - puisqu'elle sera compensée par dégrèvement en 2000 et par une compensation dans la DGF à partir de 2001 - la suppression de la part régionale a été choisie. Elle représente 5,8 milliards de francs.
Le remplacement du dégrèvement actuel par un plafonnement de la taxe en fonction du revenu fiscal de référence des redevables modestes et moyens représente, lui, 5,2 milliards de francs. C'est donc 11 milliards de francs de pouvoir d'achat supplémentaire qui seront injectés dans l'économie.
Je n'aurai garde d'oublier les 190 millions de francs d'allégements fiscaux dus à diverses mesures.
Notre solidarité s'exprime aussi en direction des victimes des intempéries : inondations, cyclones, marée noire, tempêtes. A cet effet, 10 milliards de francs sont prévus dans ce collectif.
Nous ne pouvons que nous réjouir, par ailleurs, des crédits supplémentaires alloués à l'éducation nationale et aux hôpitaux. Nos concitoyens sont en effet attachés à leur système de soins et de protection sociale. Nous sommes loin des orientations de M. Juppé, qui avait fixé l'augmentation des dépenses hospitalières à 1 % !
Bien qu'elle ne suffise pas à corriger toutes les inégalités, l'augmentation de 2,4 % décidée cette année témoigne de la volonté du Gouvernement de faire fonctionner notre service public dans de meilleures conditions. C'est seulement ainsi que nous pourrons garantir des soins de qualité à tous.
Vous nous proposez, madame la secrétaire d'Etat, un plan de diminution des prélèvements fiscaux de 120 milliards de francs entre 2000 et 2003, auxquels s'ajoutent les 40 milliards de francs prévus dans ce collectif, soit un total de 160 milliards de francs.
Cet effort très significatif me paraît raisonnable ; il permet de préserver les capacités d'investissement de l'Etat tout en maintenant les services publics indispensables à l'équilibre social et territorial de notre pays.
Monsieur le rapporteur général, j'ai lu avec beaucoup d'intérêt un article publié dans La Tribune, dans lequel vous écrivez qu'il faut aller « plus loin, plus vite, plus fort ».
Vous êtes insatiable, monsieur le rapporteur général !
M. Serge Vinçon. Il a raison !
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'ai encore de l'appétit !
M. Gérard Miquel. Les réductions de prélèvements fiscaux proposées par le Gouvernement vous paraissent trop faibles. Vous proposez des baisses massives et durables d'impôts et de cotisations sociales,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Voilà !
M. Gérard Miquel. ... à hauteur de 250 milliards de francs.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais aider le Gouvernement !
M. Gérard Miquel. Vous critiquez la proposition de suppression de la part régionale de la taxe d'habitation, mesure de justice sociale s'il en est, et vous proposez de diminuer l'impôt sur le revenu sur certaines tranches.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Toutes les tranches !
M. Gérard Miquel. Là, je crains le pire !
Pour ce qui est des réductions des cotisations patronales, que vous souhaitez, il faudrait vous mettre d'accord avec vos collègues députés, qui, eux, proposent une réduction de la part salariale.
En fait, il semble qu'il manque un volet essentiel à toutes vos propositions. En effet, dans quel secteur ferez-vous baisser les dépenses publiques : l'éducation, la santé, la justice, la sécurité, la défense - je vous ai entendu réclamer plus de crédits pour la défense - ou les investissements structurants ? Pour être crédible, vous devriez aller au bout de votre démarche.
De 1993 à 1997, vous n'avez eu de cesse d'augmenter les prélèvements. Ainsi, le taux de la TVA a été majoré de deux points. Inutile de souligner que ces augmentations restent ancrées dans toutes les mémoires !
Aujourd'hui, le Gouvernement va à son rythme, et les Françaises et les Français apprécient la méthode équilibrée retenue. Bien sûr, sa réussite agace parfois certains d'entre vous, mais les résultats obtenus démontrent de façon évidente la justesse des mesures prises.
Monsieur le rapporteur général, évoquant, tout comme M. le président de la commission des finances, l'attribution des quatre réseaux de téléphonie mobile de troisième génération, dont on attend un résultat financier de 130 milliards de francs, vous avez dénoncé la façon dont cette somme serait utilisée. M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie nous a pourtant donné des explications très précises sur cette utilisation et sur la méthode retenue.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Eh bien, si vous trouvez que c'était précis !
M. Gérard Miquel. Souvenez-vous, monsieur le rapporteur général, de la manière dont a été utilisée la soulte de France Télécom ! A l'époque, que je sache, je ne vous ai pas entendu la dénoncer !
M. Philippe Marini, repporteur général. Cela n'a rien à voir, cela a été décidé par le Parlement !
M. Gérard Miquel. Bien sûr, cela a été décidé par le Parlement, mais ces 37,5 milliards de francs qui ont été affectés au budget général en 1997 étaient destinés à un autre usage.
A tout prendre, je préfère la méthode utilisée pour les 130 milliards de francs qui vont arriver progressivement dans les caisses de l'Etat au cours des prochaines années à celle qui a été employée en 1997 pour la soulte de France Télécom.
Je terminerai mon propos en constatant que la politique volontariste du Gouvernement porte aujourd'hui ses fruits, en alliant efficacité économique et justice sociale.
C'est pourquoi le groupe socialiste, dans son ensemble, apportera un soutien sans réserve à ce collectif que vous nous proposez, madame la secrétaire d'Etat. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce débat est quelque peu paradoxal. En effet, on a l'habitude de discuter ici d'un collectif budgétaire en cas de changement de gouvernement ou de majorité.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Ce sera peut-être le cas !
M. Serge Vinçon. Présage !
M. Yves Fréville. A la suite d'un rapport de MM. Nasse et Bonnet, le gouvernement de M. Jospin avait trouvé bon le budget que la majorité sénatoriale avait adopté, avec la majorité d'alors de l'Assemblée nationale, puisqu'il n'y avait pas eu besoin de faire un collectif budgétaire.
M. Jean-Pierre Demerliat. A ce moment-là, il n'y avait pas d'argent en trop !
M. François Autain. C'est sûr !
M. Yves Fréville. Et voilà que, lorsque apparaît une croissance dite « exceptionnelle », mais qui n'a rien d'exceptionnelle puisque la France.
M. Yves Fréville. ... se situe dans la moyenne mondiale, le Gouvernement, totalement surpris, nous présente un collectif budgétaire !
Il semble bien - M. le rapporteur général l'a très bien dit - qu'il s'agisse, en réalité, de l'examen de rattrapage de l'épisode de la vraie-fausse cagnotte de 1999.
Au fond, il est d'assez bonne guerre que la majorité plurielle ait rappelé au Gouvernement, et à Bercy, que certaines réalités électorales ne devaient pas être ignorées, qu'il existait un calendrier des élections locales et nationales et que, par conséquent, certains changements de politique s'avéraient nécessaires, surtout après le coup de semonce résultant de l'annonce de prélèvements obligatoires atteignant le niveau record de 45,7 % du PIB, soit 0,8 % de plus que l'année passée - du jamais vu !
J'ai néanmoins apprécié, hier soir, l'humour de M. le ministre des finances, qui nous a expliqué que ce n'était pas là l'objet essentiel du collectif, qu'il s'agissait uniquement d'obtenir l'autorisation de 10 milliards de dépenses supplémentaires.
Je suis très étonné que l'on n'ait pas trouvé d'autre méthode pour arriver à ce même résultat.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Un décret d'avance !
M. Yves Fréville. Oui, un décret d'avance qui aurait été régularisé dans le collectif de fin d'année, comme cela est régulièrement le cas.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument ! On le fait chaque année.
M. Yves Fréville. Cet argument des dépenses supplémentaires me paraît d'autant plus faux que Mme le secrétaire d'Etat n'a pas manqué de nous dire tout à l'heure que l'on verrait sans doute des dépenses disparaître, qu'il ne s'agissait que de plafonds de dépenses et que, par conséquent, rien n'obligeait à dépenser tout ce qui avait été inscrit.
La réalité est donc bien celle que j'ai dite : nous avons là un programme qui prépare à certaines échéances.
De plus, mes chers collègues, ce collectif change une donne essentielle, je dirai même marque une rupture, avec la fin du processus de réduction du déficit budgétaire.
Nous avions un déficit budgétaire qui était, en exécution, l'an passé, de 206 milliards de francs ; nous avons aujourd'hui 50 milliards de francs de recettes supplémentaires. Et que voyons-nous ? Que le déficit budgétaire reste à 215 milliards de francs.
Bien sûr, s'il y a encore des recettes supplémentaires, il nous est dit que peut-être à la fin de l'année !... Je voudrais en avoir la certitude parce qu'il y a toujours, en fin d'année, des dépenses supplémentaires à financer, comme l'a très bien dit M. Descours. Nous aurons sans doute la note du FOREC à payer.
En tout cas, je note un changement complet de ligne directrice, l'abandon de la réduction progressive du déficit budgétaire, le choix fait de réduire les impôts d'aujourd'hui au détriment des impôts de demain, comme cela a été dit en conclusion par M. le rapporteur général.
Ne voulant pas reprendre l'ensemble du débat que nous avons eu hier soir, je ferai porter mon propos simplement sur deux points.
Ma déception, au fond, est grande, d'abord, quant aux progrès de la transparence. Vous avez dit tout à l'heure, madame le secrétaire d'Etat, que la transparence était l'idée maîtresse de ce collectif budgétaire.
Mon inquiétude est encore plus vive, ensuite, quant à votre vision à courte vue de certaines réformes fiscales, et je me contenterai, à cet égard, d'aborder le problème de la réforme des finances locales.
Tout d'abord, devons-nous parler, dans ce collectif, d'obscurité ou de transparence ? Il faut choisir !
Je formulerai quatre remarques.
D'abord, j'aurais parfaitement compris la nécessité d'un collectif s'il avait été fondé sur une révision en forte hausse des prévisions de croissance. Or, vous nous proposez une révision à 3,6 %. C'est effectivement 0,8 % de mieux que ce que l'on prévoyait à la mi-1999, et je m'en réjouis, mais ce n'est jamais que la moyenne mondiale, ainsi que je l'ai dit.
Ce qui m'étonne - et c'est là que je vois quelque obscurité dans vos propos - c'est qu'une telle accélération aujourd'hui reconnue, acquise, de 0,8 % - il ne s'agit pas de savoir si nous aurons encore plus à la fin de l'année - ne produirait qu'une dizaine de milliards de francs de ressources supplémentaires.
Ma deuxième remarque - on l'a dit et redit, mais il faut parfois enfoncer le clou ! - c'est que vous engrangez une quinzaine de milliards de francs de recettes non fiscales qui ont été reportées de 1999 sur 2000 par un simple jeu de cavalerie qui vous a valu un sévère rappel à l'ordre de la Cour des comptes, entendez des versements différés de la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, de la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur, la COFACE, et de la Caisse des dépôts, versements que l'on avait omis d'appeler pour le 31 décembre.
Si ces ressources avaient été encaissées avant le 31 décembre, conformément à la volonté du Parlement, le déficit budgétaire en aurait été réduit d'autant. Aussi, la seule façon logique, à mes yeux, de couvrir cette grave irrégularité eût été de réduire le déficit exactement du même montant dans ce collectif : les 15 milliards de francs auraient dû être encaissés l'année dernière et auraient servi à réduire le déficit ; comme cela n'a pas été fait, il fallait le faire cette année.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !
M. Yves Fréville. Telle est, me semble-t-il, la deuxième irrégularité.
Ma troisième remarque relative à l'obscurité a trait à ce qu'on appelle, dans le jargon financier, le rebasage des recettes de l'an 2000, à la suite d'une sous-évaluation des recettes de l'an passé. C'est une opération purement technique, mais pas inintéressante, dans le détail de laquelle je n'entrerai pas.
Ce qui est intéressant, c'est que la Cour des comptes nous informe que l'opération de cavalerie de fin 1999 concernait également les comptes d'imputation provisoire de la TVA à hauteur de 9 milliards de francs, qui s'ajoutaient donc aux 15 milliards de francs dont je viens de parler.
Il aurait été parfaitement logique que ces 9 milliards de francs supplémentaires réapparaissent en sus des recettes de cette année. Or, tel n'est pas le cas. D'où ma question très simple : cela veut-il dire que vous comptez, à la fin de l'année, recommencer l'opération une nouvelle fois, en créant de nouveaux comptes d'imputation provisoire, avec 9 milliards de francs supplémentaires ?
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Jusqu'en 2002 !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n'est pas l'envie qui manque !
M. Yves Fréville. J'ai tout de même pris acte, madame le secrétaire d'Etat, de votre promesse que les éventuelles recettes supplémentaires serviraient à réduire le déficit. Nous attendons ; nous verrons bien ce qu'il en sera lors du collectif de fin d'année.
J'ajoute - ce sera ma dernière remarque concernant les problèmes de transparence - qu'il faut supprimer une absurdité qui réduit de façon totalement fictive les recettes et les dépenses de l'Etat dans l'article d'équilibre. J'ai d'ailleurs déposé un amendement en ce sens.
Mes chers collègues, certains d'entre nous vont voter - je ne préjuge pas des votes - 11 milliards de francs de réduction de la taxe d'habitation, c'est-à-dire 11 milliards de francs de dégrèvement. Tout citoyen sensé pourrait croire, bien entendu, qu'il y aura, de ce fait, 11 milliards de francs de dépenses supplémentaires dans le budget de l'Etat. Eh bien, pas du tout ! Les dépenses ne vont pas augmenter ; ce sont les recettes de l'Etat qui vont diminuer de 11 milliards de francs parce que l'on rembourse les contribuables locaux de cette somme !
Permettez-moi de dire que ce jeu d'écriture prend des allures de plus en plus graves parce que, en 1999, le total des dégrèvements d'impôts locaux s'est élevé à 64 milliards de francs, 64 milliards de francs qui, véritablement, échappent à une lecture saine et cohérente du budget général.
Voilà quelques remarques sur les problèmes d'obscurité ou de transparence.
Je voudrais maintenant aborder une question de fond et dire mon inquiétude quant à la vision à courte vue de la réforme de la fiscalité locale que traduit ce collectif.
En affectant 40 milliards de francs à la baisse des impôts, le Gouvernement se donnait les moyens de procéder à une vraie politique de réforme fiscale. Mais il a préféré la technique du saupoudrage ; nous avons abordé ce sujet au cours de la nuit dernière, je n'y reviendrai pas. Je rappellerai simplement que mon groupe regrette très vivement que le Gouvernement ne se soit pas engagé dans une politique de réduction du « coin fiscal », c'est-à-dire de l'écart entre les salaires bruts et les salaires nets par une politique de crédit d'impôt qui aurait bénéficié à tous les salariés dont les revenus sont inférieurs à 1,3 fois le SMIC. Mais ce que vous nous proposez, c'est un allégement de taxe d'habitation à hauteur de 11 milliards de francs.
Cet allégement est-il justifié ? Je voudrais commencer par demander si l'Etat est partiellement responsable de certaines injustices en matière de taxe d'habitation. Je crois que oui, et cela pour deux raisons essentielles.
Il est tout à fait vrai - notre collègue M. Delfau le rappelait hier soir - que les collectivités, qui lèvent une forte taxe d'habitation, sont souvent celles qui perçoivent peu de taxe professionnelle. Et si cette situation subsiste, c'est bien parce que notre politique de péréquation est absolument insuffisante. Faute d'avoir corrigé suffisamment les inégalités de potentiel fiscal entre nos communes, nos départements, on est entré voilà déjà quinze ou vingt ans dans une mécanique absolument démentielle qui consiste à essayer de corriger les inégalités par des dégrèvements qui concernent les contribuables, lesquels dégrèvements et compensations s'élèvent actuellement à près de 90 milliards de francs. Comme des sommes énormes sont ainsi mises au service de cette politique, on ne dispose plus de sommes pour la péréquation.
Or, ce que nous propose le Gouvernement, c'est d'aller encore plus loin dans cette direction : non contents d'abandonner la péréquation, on corrige à coups de dégrèvements l'absence de péréquation.
Ensuite, et tout le monde ne sera sans doute pas d'accord avec mes propos - comme le rappelait hier notre collègue M. du Luart, pas un gouvernement n'a eu le courage de mettre en application la révision des bases locatives. Comment voulez-vous que des évaluations cadastrales vieilles d'une trentaine d'années aient encore quelque sens et ne conduisent à des situations individuelles iniques en matière de taxe d'habitation.
J'ajouterai - et cela a été bien vu par la commission - que ces injustices sont doublées pour les propriétaires accédants, car, elles concernent non seulement les bases de la taxe d'habitation, mais également celles de la taxe foncière, pour laquelle, d'ailleurs, les dégrèvements sont négligeables, et qui frappe aussi les organismes d'HLM puisqu'elle est comprise dans leurs charges.
Madame le secrétaire d'Etat, vous aviez l'occasion d'utiliser la marge de manoeuvre du collectif pour mettre enfin en place cette révision des bases en atténuant les transferts de charges qu'elle engendrerait et en redonnant ainsi un fondement sain à notre fiscalité locale frappant les ménages.
Nous savons tous que le principal blocage à lever résulte de la décision de créer un groupe spécifique d'évaluation pour les HLM. De ce fait, si l'on appliquait la réforme de 1990 telle quelle, plus une commune comprendrait d'HLM, dont les valeurs ont été réduites, plus la charge de la taxe d'habitation serait reportée sur les autres habitants.
Il aurait suffi - et cela aurait pu être accepté par votre majorité plurielle - de recycler une partie de ces ressources en faveur des communes comptant de nombreux logements HLM, et vous auriez rendu la réforme viable.
Telles sont les responsabilités de l'Etat. Le Gouvernement n'ayant pas voulu s'engager dans la politique à long terme que je viens de préconiser, ses propositions à court terme sont néanmoins inacceptables à la fois pour les collectivités locales et pour les contribuables locaux.
Pourquoi s'être engagé dans cette politique ? Je me le demande ! Véritablement, ces propositions gouvernementales vont tout à fait à l'encontre de la politique de décentralisation et d'autonomie des collectivités locales que vous prétendez défendre. Dans ce domaine, votre politique est quelque peu schizophrène, à moins qu'il ne s'agisse d'une politique de Gribouille - je ne sais comment la qualifier - puisque vous faites, d'un côté, ce qu'il ne faut pas faire, de l'autre.
Plusieurs de nos collègues ont d'ailleurs très bien démontré - c'est pourquoi j'irai très vite - qu'il n'y a plus d'autonomie locale si les collectivités ne conservent pas la possibilité de fixer librement au moins une partie de leurs ressources. Or l'indice de dépendance, c'est-à-dire le rapport des compensations et des dégrèvements à la fiscalité directe locale, explose. Si la liberté d'agir des collectivités locales se limite à affecter entre diverses dépenses des enveloppes fixées par l'Etat, ce sont de véritables principaux fictifs qui renaissent, et la décentralisation est mort-née.
De plus, et c'est un argument fort, il faut que les élus locaux soient fiscalement responsables devant leurs électeurs également contribuables puisque le marché « politique » - employons le mot même s'il fait hurler certains - ne peut fonctionner que si plus de dépenses locales se traduisent par plus de cotisations sur la feuille d'impôt, que moins de dépenses conduisent à moins d'impôts. Comment voulez-vous autrement juger de l'efficacité des équipes municipales ou départementales ?
A cet égard, votre réforme est deux fois discutable.
Vous supprimez la part régionale de la taxe d'habitation. Alors, quel est le lien qui demeurera entre la région et l'ensemble des ménages appartenant à cette région ? Il n'y a pas d'autres impôts que la taxe d'habitation qui, aujourd'hui, lie la région à tous ses électeurs. Bien sûr, on pourrait imaginer d'autres impôts : une taxe sur le téléphone ou une taxe régionale sur le revenu. Mais ce n'est pas l'enjeu. Vous supprimez le seul lien, et je crois, par conséquent, que la commission a eu parfaitement raison de le maintenir, faute d'une autre réforme proposée par le Gouvernement.
Mais, surtout, votre mécanisme de dégrèvement est totalement déresponsabilisant. Certes, vous avez raison de le simplifier, mais en fait vous allez cumuler tous les inconvénients des anciens systèmes. Quand on regarde les chiffres - et vous avez publié un rapport fort intéressant sur la taxe d'habitation - plus une commune élève sa pression fiscale, plus elle augmente le taux de la taxe d'habitation et plus l'Etat va verser à ses contribuables des dégrèvements. On aboutit à une situation où, dans les grandes villes qui pratiquent des taux d'imposition élevés, 50 % de la population bénéficie d'exonérations, de dégrèvements de taxe d'habitation.
Le dégrèvement, c'est l'anesthésie du contribuable local. Dès lors, quel intérêt y a-t-il à gérer avec rigueur une ville si la moitié des électeurs n'en constate pas les effets ?
Par voie de conséquence, le mécanisme des dégrèvements est devenu totalement « contre-péréquateur ».
J'ai étudié les chiffres, de votre rapport, madame le secrétaire d'Etat. J'ai calculé combien les dégrèvements rapportaient dans chaque département. Les résultats sont absolument extraordinaires.
Savez-vous, mes chers collègues, quel est le département où les dégrèvements apportés par l'Etat sont les plus élevés ?... Les Alpes-Maritimes avec plus de 500 francs par habitant.
Savez-vous quel est le département qui bénéficie le moins de cette politique de l'Etat ? Il s'agit d'un département dont personne n'imaginait la richesse : la Lozère !
Si cet exemple ne vous satisfait pas, j'indique que le département qui précède la Lozère dans ce classement est celui de la Haute-Saône, avec un dégrèvement de 100 francs par habitant. Le département des Alpes-Maritimes - quand j'évoque le département, il s'agit en fait de l'ensemble de ses collectivités locales et de ses habitants - est-il le plus pauvre de France, et la Lozère est-elle le département le plus riche ? Evidemment non.
Cette politique déresponsabilisante, dont les effets vont à l'encontre de la péréquation, ne peut pas être considérée comme une politique fiscale rationnelle.
J'aurai également l'occasion, lors de l'examen des articles, de montrer que le mécanisme de dégrèvement proposé se fonde sur une formule de calcul fallacieuse, mais je crois que la commission a eu parfaitement raison de faire en sorte que cette réforme des finances locales soit ramenée à sa juste mesure en rétablissant la part régionale de taxe d'habitation. Pour le reste, le chantier doit rester ouvert.
Je conclurai mon propos, madame le secrétaire d'Etat, en vous disant que j'ai apprécié à sa juste valeur le « don gratuit » - c'est une formule qui était employée sous l'Ancien Régime - de 250 millions de francs que le Gouvernement, dans sa générosité, a accordé aux collectivités locales, qui avaient été taxées à hauteur de 500 millions de francs au titre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, ce qui avait valu à certaines d'entre elles une réduction de 16,5 % de leurs recettes à ce titre.
Madame le secrétaire d'Etat, l'Etat incite à la création de communautés d'agglomération, et c'est très bien.
M. le président. Et des communautés urbaines !
M. Yves Fréville. En effet, monsieur le président, des communautés urbaines aussi. Il se réjouit de leur succès, vous l'avez dit tout à l'heure. Il avait promis, lors de nos discussions, que le recours éventuel sur la DCTP ne commencerait qu'en 2001. Et voilà que le Gouvernement ne se révèle pas capable, alors qu'il dispose de 50 milliards de francs de recettes supplémentaires, d'en dégager 1 % pour tenir non pas un engagement juridique, car ce n'en était pas un, je le reconnais parfaitement, mais du moins une promesse morale de faire en sorte que toutes les communautés d'agglomération reçoivent de l'Etat les 250 francs par habitant qui leur avaient été promis.
Si c'est à partir de comportements de ce type que les relations financières doivent être établies entre l'Etat et les collectivités locales, il ne pourra s'agir de relations de confiance.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, ce collectif appelle de la part de notre groupe beaucoup de réticences. Je me réjouis de constater que la commission, dans la limite du possible, a pu en corriger les plus graves erreurs, mais ce n'est naturellement que lors du vote du collectif de fin d'année que nous vérifierons, madame le secrétaire d'Etat, si le déficit budgétaire est bien réduit et si vous avez engagé une véritable politique de réforme fiscale. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, hier après-midi, le groupe des Républicains et Indépendants, par la voix de notre collègue Roland du Luart, a dénoncé un débat d'orientation budgétaire qui tend à devenir un débat de « désorientation » politique.
Aujourd'hui, le Gouvernement nous en administre, si vous me permettez l'expression, la preuve par dix et non par neuf : dix milliards de francs d'ouvertures nettes de crédits inscrits dans le collectif budgétaire alors que le ministre de l'économie nous parle de maîtrise des dépenses. Dix milliards de francs, c'est considérable ! C'est plus de trois fois le budget de la jeunesse et des sports. Mme Buffet ferait beaucoup de choses avec une telle somme.
Dix milliards de francs pour quoi faire ? Madame le secrétaire d'Etat, vous nous dites que cet argent est d'abord destiné à financer la réparation des dégâts causés par la marée noire et les tempêtes de la fin de l'année dernière. Très bien, car la solidarité nationale doit jouer dans ce domaine. Mais cela peut et devrait se faire à enveloppe constante. Cela n'excuse pas le dérapage global des dépenses de l'Etat. Des économies auraient peu être réalisées ailleurs, grâce à de vraies réformes structurelles.
Je constate par exemple que l'on prévoit 1 milliard de francs de plus pour l'enseignement scolaire. Je dirai, au risque de choquer, que c'est attristant ! L'école a besoin d'une vraie réforme structurelle, pas d'un nouveau saupoudrage de crédits, pour un gain politique à court terme mais aucun résultat à moyen ou à long terme. J'ai été l'un des rapporteurs de la commission d'enquête sur la situation et la gestion des personnels enseignants. Le coût de la mauvaise gestion des personnels peut être chiffré à 10 milliards de francs.
Nous sommes donc sûrs que le milliard de francs de dépenses nouvelles n'améliorera en aucun cas la qualité de l'enseignement. Il permettra tout juste de calmer temporairement la grogne de certains personnels.
Je pourrai dire la même chose de la politique de la ville : 450 millions de francs supplémentaires sont prévus, mais pour quel résultat ? Pour quelle politique ? La méthode actuelle est un échec : jamais les phénomènes de violence et d'insécurité n'ont été aussi forts.
Ces deux exemples - éducation et politique de la ville - montrent l'échec des politiques centralisées. L'Etat est incapable de faire face aux corporatismes et, de ce fait, apporte une seule réponse : le toujours plus budgétaire.
Il est urgent de mettre un terme à autant de pertes en ligne. Il suffit de voir le temps que l'Etat met à débloquer les aides aux sinistrés de la marée noire et des tempêtes !
Nous devons inverser le sens de la démocratie et rapprocher le plus possible la décision de l'action. Nous devons passer d'une démocratie descendante à une démocratie ascendante. C'est sur le terrain que se posent les vrais problèmes. C'est donc là que doivent être prises les décisions.
Mes chers collègues, nous devons mettre fin au toujours plus et refuser la fuite en avant budgétaire.
C'est pourquoi notre groupe approuve la démarche de la commission des finances qui propose de financer les 10 milliards de francs de dépenses nouvelles par redéploiement, ce qui permet de diminuer d'autant le déficit budgétaire. C'est là un choix raisonnable et une décision responsable.
Le Gouvernement nous promet la lune. Nous préférons garder les pieds sur terre. Notre pays doit préparer l'avenir et non pas s'en tenir à la satisfaction de tel ou tel corporatisme. Ne jouons pas avec l'avenir des générations futures, avec leurs impôts, avec leurs retraites.
Comme d'habitude, l'Etat est très doué pour donner des leçons aux autres et il se montre généreux avec l'argent qui n'est pas le sien, que ce soit celui des contribuables ou celui des collectivités locales.
Il rend aujourd'hui 40 milliards de francs aux Français, après leur en avoir prélevé des centaines depuis 1997.
Il propose de supprimer la part régionale de la taxe d'habitation, mais sans toucher aux frais d'assiette et de recouvrement qu'il perçoit lui-même ; notre commission des finances propose très justement d'y remédier.
Il nous parle de transparence alors que la Cour des comptes ne cesse de le rappeler à l'ordre.
Le Gouvernement nous présente un collectif qui prévoit un déficit budgétaire de 215 milliards de francs en 2000, soit près de 10 milliards de francs de plus qu'en 1999. Mais, dans le même temps, il laisse entendre que ce déficit pourrait n'être finalement que de 200 milliards de francs.
Voilà donc un gouvernement qui envisage un nouveau surplus de recettes d'une quinzaine de milliards de francs. Les « cagnotteries » continuent !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est que l'on appelle la transparence !
M. Jean-Claude Carle. C'est la transparence, en effet !
Voilà un ministre de l'économie et des finances qui présente au Parlement un projet de budget en admettant lui-même que les chiffres peuvent ne pas être exacts. Devons-nous y voir une nouvelle manière de pratiquer la « transparence » budgétaire ?
Le précédent ministre de l'économie niait farouchement tout surplus fiscal.
M. Philippe Marini, rapporteur général. On voit où cela l'a conduit !
M. Jean-Claude Carle. Le nouveau en reconnaît l'existence, sans pour autant accepter de l'inscrire dans le collectif budgétaire et d'en discuter avec le Parlement.
Hier, le Gouvernement privait secrètement les parlementaires de leur droit de regard sur une bonne partie du budget. Aujourd'hui, il ne s'en cache même plus, il le fait ouvertement.
Il ne pouvait mieux manifester son mépris pour le Parlement et ce, bien au-delà des clivages politiques.
Une fois de plus, le Gouvernement excelle dans l'art du leurre en attirant l'attention sur certains points pour mieux cacher l'essentiel.
Le Sénat doit-il tomber dans le piège et examiner seulement les sujets que le Gouvernement accepte d'aborder ? Non ! Nous devons dénoncer cette caricature de la démocratie et dire ce que nous voulons vraiment pour notre pays.
Faire du saupoudrage budgétaire ne fait pas une politique. Si le ciblage peut paraître habile, le résultat sera décevant.
Des dépenses supplémentaires doivent s'inscrire dans une perspective de réforme. Le Gouvernement se contente d'ouvrir les vannes. Les milliards risquent, une fois encore, de se perdre dans les siphons des administrations.
Chacun sait que ces dépenses nouvelles ne peuvent suffire, par exemple, à pallier l'absence de véritable politique hospitalière, pas plus qu'ils ne résoudront la crise du collège ou de l'enseignement professionnel.
Le Gouvernement pratique la politique du carnet de chèque ou du droit de tirage. Il veut apaiser la fièvre sans soigner le mal. Le Sénat doit proposer une autre voie, celle de la réforme de l'Etat et de la fiscalité.
C'est ce qu'attendent nos compatriotes face à la mondialisation et à l'évolution inquiétante des régimes sociaux, et c'est dans cet esprit que notre groupe aborde l'examen de ce projet de loi de finances rectificative, en saluant le travail de notre commission des finances, de son président et de son rapporteur général, dont nous soutiendrons les initiatives et les propositions. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Merci !
M. le président. La parole est à M. Autain.
M. François Autain. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme vous avez pu le constater tout à l'heure en écoutant l'intervention de mon excellent collègue M. Charles Descours ; la commission des affaires sociales a demandé à être saisie pour avis de ce projet de loi de finances rectificative.
Pourquoi cette procédure exceptionnelle ? Est-ce parce que, pour la première fois depuis quatorze ans, les comptes de la sécurité sociale sont enfin équilibrés ? Est-ce parce que le chômage vient de passer sous la barre des 10 % ? Est-ce pour célébrer la première année de mise en oeuvre de la CMU, qui permet enfin l'accès au tiers payant de six millions de Français ? Est-ce pour fêter à sa manière la première année d'application des 35 heures, à laquelle la majorité de notre assemblée est particulièrement attachée... (Sourires) notamment la majorité de la commission des affaires sociales, à laquelle j'appartiens ?
Je me perds en conjectures. Certes, j'ai cru comprendre, monsieur le rapporteur général, que vous ne pensiez pas que du bien de la politique du Gouvernement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous avez bien compris !
M. François Autain. En écoutant mon collègue Charles Descours, j'ai aussi cru comprendre qu'il n'appréciait pas véritablement la nouvelle « étape » hospitalière - pour reprendre un terme utilisé par Mme Aubry - décidée par le Gouvernement...
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Enfin !
M. François Autain. ... comme le lui permettent pourtant les crédits inscrits dans le collectif budgétaire qui nous est aujoud'hui soumis.
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Ne soyez pas caricatural !
M. François Autain. Il est vrai que la fonction d'opposant - que je connais bien - n'incline pas toujours à reconnaître les mérites d'un Gouvernement qui a su, aussi rapidement et aussi bien, répondre à l'appel des personnels hospitaliers.
En 1995, il avait fallu attendre beaucoup plus longtemps pour que le Gouvernement daigne entendre les salariés qui étaient descendus dans la rue.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il n'y avait pas d'argent !
M. François Autain. Depuis la signature du protocole du 13 mars dernier et après deux mois de discussion, les praticiens hospitaliers et le Gouvernement ont su établir un réel climat de confiance qui laisse bien augurer de la réunion du comité de suivi qui se tiendra le 9 juin prochain.
Permettez-moi de vous féliciter, madame le secrétaire d'Etat, d'avoir inscrit les crédits qui permettront au Gouvernement de respecter ses engagements à l'égard des personnels hospitaliers. Il n'y rien de choquant à ce qu'une partie de ces crédits soit inscrite dans le budget de l'Etat.
Je vous ai aussi entendu, monsieur le rapporteur pour avis, déplorer l'absence de collectifs sociaux - c'est pour vous une critique récurrente - au motif notamment que les crédits destinés au financement du protocole du 14 mars dernier, c'est-à-dire ceux qui sont affectés au personnel hospitalier, seraient supportés par l'assurance maladie, modifiant ainsi l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. Vous oubliez sans doute, ce faisant, la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui estime que le recours au collectif social ne saurait être obligatoire.
Vous avez aussi critiqué le retard apporté à la constitution du fonds de financement des 35 heures créé par la dernière loi de financement de la sécurité sociale en oubliant un peu vite que, à son époque, un Premier ministre, je pense qu'il s'agissait de M. Juppé, avait lui aussi tardé...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Heureusement qu'il était là, sinon que diriez-vous ?
M. François Autain. J'aurais pu évoquer son prédécesseur !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ça commence à dater !
M. François Autain. C'est long, pour vous, je le reconnais, mais cela ne fait que trois ans !
M. Juppé avait donc mis un certain temps à constituer les conseils de surveillance des caisses de sécurité sociale annoncés à la fin de 1995...
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Oui, mais nous avions protesté et je ne vous ai pas entendu !
M. François Autain. Vous n'aviez pas protesté publiquement avec autant de véhémence !
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Comment ? On l'avait menacé d'une conférence de presse ! Faites-en autant avec M. Jospin !
M. François Autain. Faisant ce constat, je me demande quelle est la vraie raison de la saisine pour avis de la commission des affaires sociales.
Elle s'inquiète de la cohérence des comptes de l'Etat avec ceux de la sécurité sociale et elle accuse ni plus ni moins le Gouvernement de mensonge.
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Je n'ai pas dit cela !
M. François Autain. C'est ce que j'avais cru comprendre, même si l'on sent une hésitation sur la vraie nature de ce mensonge.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est le manque de transparence !
M. François Autain. Je m'explique : le Premier ministre a annoncé l'an dernier à la conférence de la famille qu'il entendait inscrire dans le droit la pérennisation de fait de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire en faisant de l'allocation majorée une véritable prestation familiale.
Le Premier ministre a ajouté que, dès lors, le coût de cette prestation, comme celui de toutes les autres d'ailleurs, devrait être supporté, à terme, par la Caisse nationale des allocations familiales.
Ce transfert, parfaitement fondé sur le plan social, était aussi parfaitement justifié sur le plan financier, puisqu'au déficit de la branche famille laissé par les deux gouvernements précédents, lié en grande partie à une loi qu'ils n'avaient pas financée, le Gouvernement a substitué une situation excédentaire durable.
Réduire un peu le déficit de l'Etat, en prenant soin, année par année, de garantir l'équilibre de la branche famille, avec, au bout de la route, une prestation sociale consolidée, je me demande où est l'erreur ! (M. le rapporteur pour avis s'exclame.)
Aussitôt dit aussitôt fait, la loi de financement pour l'an 2000 a prévu, à titre provisionnel, une première tranche de transfert de 2,5 milliards de francs, en promettant, à titre de contrepartie, de décharger la branche famille des dépenses du FASTIF, soit 1 milliard de francs.
Mieux, dans l'article 9 du projet de loi initial de financement de la sécurité sociale pour 2000, le Gouvernement garantissait les ressources de la CNAF, en précisant notamment que cette garantie tenait compte des crédits d'Etat correspondant à la part prise par celui-ci dans le financement de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire.
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Pas du tout ! Vous ne faites pas attention à ce que je dis.
M. François Autain. On ne pouvait mieux tenir l'engagement pris par le Premier ministre devant la conférence de la famille et la promesse que, de toute façon, la caisse disposerait des ressources nécessaires.
Malheureusement, le Conseil constitutionnel n'a pas voulu de cet article 9 et l'a annulé au motif qu'il ne respectait pas le principe de l'annualité budgétaire.
Le Gouvernement a, dès lors, respecté la décision du Conseil constitutionnel. Pouvait-il faire autrement ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, il ne pouvait pas faire autrement.
M. François Autain. La loi de financement, comme je l'ai déjà dit, a anticipé la part laissée cette année à la Caisse nationale d'allocations familiales.
Dans quelques jours, le Premier ministre rendra compte devant la conférence de la famille de la première étape de réalisation de son engagement. Il le fera chaque année jusqu'à ce qu'il soit pratiquement réalisé.
Ensuite, rien ne s'opposera à ce que la part revenant de l'Etat soit inscrite, en conséquence, comme elle l'est d'une manière immuable depuis 1993, dans le collectif budgétaire d'automne. Pourquoi en serait-il autrement cette année alors que tous les indicateurs économiques sont au vert ?
Ainsi, l'une des deux hypothèses les plus pessimistes imaginée par M. le rapporteur pour avis doit être écartée.
A l'évidence, l'autre de ces deux hypothèses les plus noires est également écartée : le Gouvernement ne reviendra pas sur l'engagement pris devant la conférence de la famille, l'an dernier, de pérenniser à terme la majoration de l'allocation de rentrée scolaire. Nul doute qu'il le confirmera, comme le suggère le rapporteur pour avis lui-même, devant la conférence de la famille le 15 juin prochain.
Cette manière de faire est conforme - je le dis parce que vous aimez, cher Charles Descours, le citer - au souhait du Président de la République qui veut plus de dialogue social et plus de concertation privilégiée avec les partenaires sociaux et les acteurs du système de protection sociale.
M. Charles Descours, rapporteur pour avis. Décidément !
M. François Autain. Dès lors, il reste la dernière hypothèse envisagée par la majorité de la commission des affaires sociales et qui voudrait que le Gouvernement ait différé l'inscription de la contribution de l'Etat afin de laisser à la caisse la charge de trésorerie.
Je note que, ce faisant, le Gouvernement n'agira pas autrement que ses prédécesseurs. Je précise toutefois que cette charge de trésorerie pèse désormais sur une caisse dont les résultats financiers laissent apparaître de forts excédents. Il faut reconnaître qu'il n'en a pas toujours été ainsi !... Je n'aurai pas l'indélicatesse de rappeler certains déficits que nous avons connus.
Enfin, je relève, pour revenir à la question initiale que je posais et y répondre, que la saisine pour avis de la commission des affaires sociales n'avait pas de vraie raison.
Dans ces conditions, monsieur le rapporteur pour avis, plutôt que de procéder à un examen critique avec une rigueur notariale du calendrier retenu par le Gouvernement pour garantir les équilibres généraux des finances publiques de l'année 2000, je vous suggère d'inviter la commission à réfléchir à l'amélioration de notre système de protection sociale.
Pas plus tard que lundi, d'ailleurs, le Président de la République - je vais finir par le citer plus souvent que vous ne le faites - nous y invitait tous. A cette invitation-là, si vous nous la proposez, je répondrai ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat. Je souhaite, madame la secrétaire d'Etat, centrer mon propos sur les conséquences des intempéries qui ont, chacun s'en souvient, profondément marqué, je dirais même traumatisé, une grande partie du pays les 25 et 27 décembre dernier ainsi que sur les mesures prises par le Gouvernement pour faire face aux lourds dégâts occasionnés par cette catastrophe naturelle majeure qui a touché plus des deux tiers du territoire.
L'arrêté portant état de catastrophe naturelle est à ce titre explicite, car il concerne soixante-neuf départements.
Face à une situation encore critique aujourd'hui, ce collectif budgétaire consacre les engagements du Gouvernement envers toutes les victimes des intempéries : particuliers, entreprises et collectivités territoriales. Ce sont près de 5,5 milliards de francs qui nous sont proposés dans ce projet de loi de finances rectificative et qui recouvrent des mesures aussi diverses que la remise à neuf des bâtiments et ouvrages collectifs endommagés, les baisses ou exonérations d'impôts ou les mesures en faveur des exploitants forestiers ; et je suis loin d'être exhaustif !
Ces crédits traduisent donc bien un réel effort de solidarité nationale et correspondent, en outre, aux mesures d'urgence qui ont été prévues par le Premier ministre, lorsque celui-ci s'est rendu immédiatement sur les lieux les plus durement touchés par les intempéries.
Mes chers collègues, je souhaite m'étendre un peu plus longuement sur les mesures prises en faveur des communes dans ce vaste plan gouvernemental.
En Haute-Vienne, l'un des départements les plus touchés avec la Dordogne et la Charente-Maritime, des milliers d'hectares de forêt ont été complètement dévastés, des centaines de kilomètres de routes communales ont été endommagées, des centaines de kilomètres de lignes électriques et téléphoniques ont été mises hors service et des centaines de kilomètres de rivière et des dizaines de ponts ont été encombrés par des embâcles et le sont encore ; hélas ! parfois encore.
Madame la secrétaire d'Etat, j'ai bien conscience qu'il nous est imposé une certaine rigueur budgétaire, néanmoins il serait difficile d'expliquer aux Français qui ont été privés d'électricité parfois pendant des semaines, aux maires qui ont vu leurs dépenses de fonctionnement et d'investissement augmenter considérablement, voire exploser, et ce de manière bien évidemment imprévue et imprévisible, il serait difficile, donc, de leur expliquer que le respect des grands équilibres budgétaires prime sur l'aide que l'Etat se doit de leur apporter !
Mes chers collègues, les décisions prises par le Gouvernement sont à la mesure de ces événements. Elles répondent à des situations d'une extrême gravité et d'une urgence absolue ; et résolvent les problèmes les plus immédiats.
Toutefois, s'agissant des collectivités locales, certains progrès pourraient encore être accomplis. Cela nécessiterait quelques efforts budgétaires supplémentaires, car les estimations des nouvelles charges résultant de cette catastrophe n'ont pu, et ne peuvent encore, dans un grand nombre de communes, être convenablement estimées. En effet, en ce qui concerne notamment les routes, les ponts et, de manière plus générale, tous les ouvrages d'art, on ne pourra évidemment faire le bilan définitif que plus tard, peut-être dans plusieurs années.
Comme je l'ai déjà dit, les dégâts causés par la tempête ont occasionné un grand nombre de dépenses exceptionnelles pour faire face à l'urgence, dépenses à la charge des collectivités locales non seulement pour les personnels - heures supplémentaires, frais liés à la restauration et à l'hébergement des bénévoles - mais aussi pour la réfection des routes communales, la restauration des fossés, etc. Depuis décembre dernier, les dépenses des personnels ont augmenté de plus de 15 % dans la plupart des communes !
En outre, certains dégâts, je l'ai déjà dit, notamment ceux qui affectent la voirie communale, ne sont pas encore correctement appréciés et pourraient ne se révéler pleinement, au mieux, qu'à l'automne prochain, sous les effets du gel et du débardage des chablis.
Madame la secrétaire d'Etat, je profite de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour poursuivre le débat et anticiper sur les prochaines échéances budgétaires. Pourquoi ne pas envisager, en conséquence, d'abonder la dotation globale de fonctionnement et la dotation globale d'équipement attribuées aux collectivités locales les plus durement sinistrées, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2001 ? Les majorations de ces dotations pourraient être déterminées en fonction d'éléments tout à fait objectifs qui sont maintenant presque tous répertoriés, tels que le nombre d'hectares de forêt détruits, de kilomètres de routes endommagées, ou en fonction, bien évidemment, de l'ampleur des surcharges de frais de personnels des communes.
Ces éléments chiffrés ou faciles à chiffrer permettraient d'établir le compte précis de ce que chaque commune pourrait percevoir et de ce dont elle a absolument besoin, afin de prolonger, dans le cadre du prochain budget - et sans doute des suivants - l'élan de solidarité nationale qui a été donné par le gouvernement de Lionel Jospin.
Au total, ces deux majorations, de la DGF et celle de la DGE, nécessaires au maintien de la cohésion de notre territoire ainsi qu'au principe d'égalité devant les charges publiques, pourraient ne pas se révéler très coûteuses et ne pas dépasser le milliard de francs par an. Les grands équilibres macroéconomiques seraient maintenus et la solidarité nationale renforcée.
Il reste à étudier, madame la secrétaire d'Etat, comment ces majorations pourraient, techniquement, être inscrites dans la prochaine loi de finances et les suivantes si besoin est, cela dans le respect, bien évidemment, de l'équité entre communes.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Gouvernement a montré sur ce point précis du traitement des conséquences des tempêtes, comme sur tous les autres, qu'il savait apporter des solutions efficaces et pertinentes aux problèmes les plus difficiles. Ce collectif en est, si besoin en était, une preuve supplémentaire. C'est pourquoi les socialistes voteront votre projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je commencerai par répondre à M. le rapporteur général, puisque c'est lui qui a ouvert la discussion.
M. Marini ne conteste pas la pertinence de la maîtrise des dépenses ; il ne conteste pas l'opportunité de baisser les impôts ; il ne conteste pas non plus la nécessité de réduire les déficits. Néanmoins, j'ai cru comprendre que le projet de collectif que nous proposons à la Haute Assemblée ne lui agrée pas tout à fait, et je crains d'utiliser une litote en m'exprimant ainsi !
En effet, s'il ne remet pas en cause, les dépenses proposées, notamment pour répondre aux dommages causés par les intempéries, les dépenses pour la solidarité, pour le renforcement du service public, en revanche il nous propose des redéploiements et c'est un débat que nous devrions mener de manière extrêmement rigoureuse. Sur ce point, je ne vois pas très bien sur quels postes on nous suggère de faire des économies, de faire porter les réductions de dépenses. J'en déduis que celles-ci portent sur les 10 milliards de francs supplémentaires que nous proposons d'ouvrir.
A propos de la fiscalité, vous nous avez dit qu'il s'agissait de baisses d'impôt éparses, et que nous avions une approche de la fiscalité plus électoraliste que structurante. Ce sont des propos un peu rudes et emportés, contrairement à ce que j'entends depuis les quelques mois que je fréquente la Haute Assemblée ! Pour autant, j'en accepte tout à fait l'aspect polémique.
Cependant, sur le fond, vous avez reconnu, dans votre rapport notamment, que la baisse de l'impôt sur le revenu allait dans le bon sens. Vous avez adhéré à la refonte des mécanismes de dégrèvement de la taxe d'habitation et je ne peux que me féliciter de ces approches constructives.
En revanche, vous vous êtes dit déçu, et de ce point de vue on n'en sera pas très surpris. Mais que veut-on ? cinquante milliards de francs de recettes, 40 milliards de francs de baisse d'impôt et 10 millliards de francs affectés à des dépenses qui nous paraissent indispensables pour la collectivité, c'est peut-être décevant de votre point de vue, mais je crois que c'est en tout cas extrêmement clair eu égard à la construction de ce collectif et aux objectifs que nous cherchons à atteindre.
S'agissant du cas particulier de la taxe d'habitation, vous nous avez indiqué que vous déposeriez des amendements, dont un viserait à remettre en cause la suppression de la part régionale. Si je reconnais que votre proposition a sa logique, je ne partage pas, loin de là, l'idée selon laquelle cette suppression briserait le lien citoyen qu'entretient le contribuable avec la collectivité régionale. Je vous ferai simplement remarquer que, en vous rabattant sur les frais d'assiette, comme nous le verrons de façon plus approfondie au cours de ce débat, vous déplacez assez nettement la cible, qui ne se limite pas seulement aux redevables de la taxe d'habitation, car les frais d'assiette concernent l'ensemble des revenus des impôts locaux.
M. Gérard Cornu. Caricature !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. M. le président de la commission des finances comme M. le rapporteur général ont abordé le problème de la réduction du déficit. Je souhaite redire à l'un et à l'autre que les recettes fiscales prévues dans ce collectif sont associées à taux de croissance qui, comme je l'ai indiqué, est de 3,6 %, taux moyen de croissance prévu par l'INSEE au moment où nous avons déposé ce collectif. Cette évaluation me paraît confirmée par celle que vous avez vous-même demandée, à juste raison.
Je ne crois pas prudent, à ce stade de l'année, de n'entendre que les sirènes des quelques instituts de conjoncture, selon lesquels le taux de croissance serait supérieur à 4 %. Comme l'a fort bien dit M. Fréville, nous verrons bien, dans quelques mois, ce que la croissance de l'année 2000 sera. A ce stade, je m'en tiens à une évaluation moyenne.
Si la croissance est plus forte, ce que bien évidemment nous espérons, et vous partagez, je crois, cet espoir, alors, les recettes elles-mêmes seront plus fortes. De plus, comme chaque année, les dépenses inscrites en loi de finances initiale, corrigée par le collectif soumis à votre assemblée, en ce moment même n'atteindront pas forcément, une fois exécutées, le plafond autorisé par le Parlement.
Enfin, si nous espérons, en exécution, que le déficit sera inférieur à celui qui était prévu en loi de finances initiale, il nous paraîtrait imprudent de traduire dès maintenant cette baisse de déficit. Reste que nous avons bon espoir que cela soit possible, compte tenu de tout ce que j'ai dit sur l'évolution des recettes fiscales.
Je considère par conséquent qu'il s'agit de notre part d'un geste de transparence, et je souhaite qu'il soit salué comme tel.
Le président de la commission des finances s'est également interrogé sur le calendrier du collectif qui vous est soumis ; je m'en étonne un peu. Selon lui, ce collectif n'était pas indispensable et, à ce stade de l'année, nous aurions pu procéder autrement. Il me semble pourtant qu'il eût été difficile de procéder autrement dans la mesure où nous souhaitions pouvoir faire bénéficier les Français, dès cette année, des baisses d'impôts de 40 milliards de francs qui sont proposées aujourd'hui. Or ne pas présenter de collectif aujourd'hui, c'eût été renvoyer ces baisses d'impôts à l'année 2001. Inscrites dans le collectif d'automne ou dans le projet de loi de finances pour 2001, les baisses d'impôts n'auraient pu être effectives en 2000.
Quant aux dépenses, fallait-il là encore, comme il est de règle, renvoyer la ratification des dépenses du collectif en fin d'année ? Le fait de recourir au décret d'avance, qui était une solution alternative, n'aurait pas été plus respectueux, loin de là, à l'égard du Parlement, et celui-ci n'y aurait pas nécessairement gagné sur le plan de sa mission de contrôle.
Enfin, s'agissant de la transparence, sujet que vous avez vous-même évoqué, monsieur le président de la commission, les engagements pris par M. Laurent Fabius hier soir devant vous et par moi-même sont très clairs. Je ne doute pas que vous nous jugerez sur nos actes ; c'est ainsi que nous concevons les choses.
Vous vous êtes interrogé sur les recettes de la troisième génération des téléphones mobiles, en vous inquiétant de ne pas les voir figurer dans ce projet de collectif. La raison est simple : il ne s'agit pas de recettes pour 2000, c'est pourquoi elles ne figurent pas dans le collectif de printemps. Elles ne figureront pas non plus dans le collectif d'automne, je le précise d'emblée, en espérant que vous ne nous ferez donc pas à nouveau part de votre inquiètude à ce moment-là.
M. Descours s'est fait l'écho des préoccupations de la commission des affaires sociales. Il a réitéré son souhait, déjà exprimé hier soir, de voir le Parlement saisi d'une loi de financement de la sécurité sociale rectificative similaire à la loi de finances rectificative dont nous discutons en ce moment. Il comprendra que je laisse à ma collègue Martine Aubry le soin de lui répondre sur ce point particulier.
Pour le reste, je pense que M. Descours comprendra également que nous devons attendre les annonces que fera le Premier ministre lors de la conférence de la famille.
Au demeurant, monsieur le sénateur, j'aurais apprécié que vous notiez l'effort qui est fait dans la présente loi de finances rectificative en faveur du secteur hospitalier dans son ensemble. Cela étant, votre contestation ne portait pas sur le fond me semble-t-il.
Je tiens également à souligner les efforts que compte faire le Gouvernement pour introduire une transparence plus grande dans cet exercice délicat qu'est la coordination entre la loi de finances, qui concerne l'Etat, et la loi de financement, qui concerne la sécurité sociale. Nous nous sommes en effet engagés à déposer à l'automne un document dit « jaune », qui récapitulera l'ensemble de ces relations financières. Nous souhaitons que ce document plus lisible rende plus compréhensible une matière que, à juste titre, vous qualifiez de complexe.
M. Adnot s'est inquiété du sort réservé aux 5 milliards de francs de la caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, qui n'ont pas été encaissés en 1999. Je l'invite tout simplement à se reporter à l'état A du présent collectif budgétaire, où cette somme figure en toutes lettres. J'espère ainsi avoir apaisé son inquiétude.
Par ailleurs, il a soulevé plusieurs questions relatives à la fiscalité, notamment sur le sort réservé aux indemnités reçues après un sinistre et qui, pour des raisons comptables évidentes, constituent soit une augmentation d'actifs, soit un produit. Ces indemnités compensant une perte de stock, une perte de marchandises, ne doivent pas déboucher nécessairement sur une imposition. J'ajoute, sans trop entrer dans les détails de la technique fiscale, que des mécanismes spécifiques et avantageux permettent d'adosser la fiscalisation de ces indemnités et l'amortissement des biens qui sont remplacés.
Il a également évoqué la taxe professionnelle sur les bénéfices non commerciaux et des questions relatives à la restauration. Je me propose d'aborder ces questions de manière détaillée lors de la discussion des articles.
M. Cornu nous promet une croissance supérieure à 4 %. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je ne peux que partager cet espoir mais, dans les fonctions qui sont les miennes au sein du Gouvernement, vous comprendrez que je ne puisse être aussi affirmative. Il n'est pas question pour nous d'échapper à un débat sur le partage des fruits de la croissance puisque, comme vous le savez, nous avons annoncé que, si la croissance et, par conséquent, les recettes fiscales, étaient supérieures à celles qui étaient prévues dans ce collectif, nous les affecterions à une réduction du déficit. Cet engagement, pris devant l'Assemblée nationale, je le réitère devant la Haute Assemblée.
M. Cornu s'est également ému de l'évolution des prélèvements obligatoires. Son inquiétude est partagée par M. le rapporteur général. Sur ce sujet, bien connu de vous tous, je rappelle qu'il faut simplement reconnaître les faits.
Tout d'abord, je tiens à rappeler, comme l'a fait M. Laurent Fabius hier soir, que certains pays décomptent, dans les prélèvements obligatoires, tout ce qui, par exemple, concerne les retraites complémentaires - c'est notre cas ; ce n'est pas celui de l'Allemagne - ce qui, a priori, fausse la comparaison.
J'en viens ensuite à l'évolution du taux des prélèvements obligatoires même si je ne reprends pas un théorème devenu célèbre aujourd'hui.
Dans la mesure où un taux, c'est une fraction, avec un numérateur et un dénominateur - en l'occurrence le numérateur est constitué des prélèvements obligatoires et le dénominateur de la croissance - dans la mesure, également, où les prélèvements obligatoires sont constitués pour moitié à peu près des impôts prélevés au titre des revenus de l'année précédente, le ralentissement du taux de croissance se traduit, à législation fiscale constante, par une augmentation du taux des prélèvements obligatoires. Voilà qui m'amène - là encore, je ne fais que répéter des principes que vous connaissez bien - à distinguer l'effet croissance de l'effet taux. Nous connaissons une croissance forte : nous abaissons le taux de la fiscalité et les prélèvements obligatoires augmentent. Cette situation est bien évidemment plus enviable que celle qu'ont connue nos prédécesseurs qui, avec plus d'impôts, avaient une croissance moins forte. De ce point de vue, pour une bonne compréhension, il est utile, comme le fait M. Laurent Fabius, d'opérer une distinction entre les prélèvements obligatoires et les impôts, et, en l'occurrence, leur baisse respective.
M. Foucaud a évoqué l'ampleur des besoins qui se manifestent dans le domaine de l'éducation nationale, secteur très important, et la santé. Il souligne, à juste raison, que ces besoins sont certainement supérieurs aux ouvertures opérées dans ce collectif. Je suis évidemment très sensible à cette préoccupation et je rappelle que l'éducation nationale, comme je l'ai dit voilà quelques instants, est, depuis 1997, une priorité budgétaire du Gouvernement. Le ministre de l'éducation nationale, qui s'est engagé dans une concertation avec les organisations syndicales de ce secteur, prépare en ce moment un plan pluriannuel dont les premiers effets seront traduits dans le projet de loi de finances pour 2001. Nous aurons par conséquent l'occasion d'en reparler d'ici à quelque temps.
En ce qui concerne les questions fiscales, je me réjouis de vous voir souscrire à la mesure qui consiste à baisser le taux de TVA. Cette mesure, ajoutée à l'ensemble des dispositions prises dans ce domaine depuis trois ans, représente un effort considérable, qui se traduira en pouvoir d'achat, en emplois et en allègement des charges pour les familles.
En matière d'impôts locaux, les préoccupations que vous exprimez sont très légitimes. Vous avez bien voulu admettre que les réformes envisagées vont dans le bon sens, qu'il s'agisse de la taxe professionnelle ou de la taxe d'habitation. Vous reconnaissez aussi que l'autonomie de gestion des collectivités locales est préservée. En tout cas, le fait que nous attendions les propositions de la commission présidée par votre collègue M. Pierre Mauroy indique que nous n'en n'avons pas terminé sur l'ensemble de ces sujets.
M. Miquel, quant à lui, s'est demandé, comme moi tout à l'heure, comment nous pouvions répondre aux redéploiements qui sont proposés par M. le rapporteur général. Je crois que nous partageons le même sentiment d'obscurité à l'égard de ces propositions.
Je le remercie d'avoir salué et reconnu pour ce qu'elles sont les mesures fiscales qui sont contenues dans ce collectif. Elles sont favorables au pouvoir d'achat des Français, de tous les Français, je tiens à le souligner, en particulier des plus modestes d'entre eux. Dans l'avenir, la même préoccupation animera le Gouvernement afin d'instaurer plus de solidarité, d'encourage l'activité, notamment l'activité salariée, mais aussi d'encourager la reprise d'activité, action très importante à notre sens.
M. Fréville a déclaré, après M. le président de la commission des finances, qu'il aurait préféré un décret d'avance. Cela m'étonne un peu ; j'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer sur ce point.
Il a exprimé également une inquiétude en matière de transparence. Sans doute n'avons-nous pas la même conception de ce mot puisque, je le répète, ce collectif me semble participer d'une transparence que je qualifierai d'active, en tout cas supérieure à celle d'un décret d'avance.
En matière de fiscalité, il a dit des choses intéressantes quoique un peu contradictoires ; il m'excusera de ce jugement.
En effet, monsieur le sénateur, vous avez souhaité un allégement immédiat de la taxe d'habitation. Cela a déjà été demandé par le Parlement à l'automne dernier, par le biais d'un amendement adopté par les deux assemblées. Or il me semble que la réponse apportée par le collectif répond bien à la demande qui a été faite.
S'agissant de la révision, évidemment, c'est une autre paire de manches ! Vous l'avez reconnu vous-même. Vous en avez souligné toute la difficulté, notamment à propos du secteur des HLM. Vous avez également reconnu que c'était en enjeu de long terme. Pour notre part, nous essayons de traiter les choses les plus indispensables le plus rapidement possible.
Vous vous êtes demandé si la réforme proposée rapprocherait vraiment le citoyen de la région. En tout cas, si nous avons fait ce choix de supprimer la part régionale de la taxe d'habitation, c'est parce que nous avons considéré que cela représentait 7,8 % du produit fiscal des régions, 93 francs par habitant et 225 francs en moyenne par article. Dans ces conditions, il ne nous a pas semblé que nous outrepassions ce qui était raisonnable en la matière.
Vous avez également beaucoup blâmé le système des dégrèvements, ce qui n'est pas tout à fait, je crois, le point de vue du rapporteur général.
Vous avez repris un argument que j'avais déjà entendu développer à l'Assemblée nationale par M. Méhaignerie, qui reproche à l'Etat, d'une certaine manière, de trop compenser les département déjà riches. Mais si l'on considère les données non plus par habitant mais pour l'ensemble des départements, on constate par exemple que, dans les Alpes-Maritimes, les dégrèvements représentent 11 % de la taxe d'habitation, soit 288 millions de francs, alors que, dans le département du Nord, ils représentent 15 % de la prise en charge, soit 418 millions de francs. Alors, entre les deux départements quel est le plus riche ? Je vous laisse le soin d'apporter vous-même la réponse, elle me paraît évidente.
M. Carle a apporté un soutien énergique aux propositins d'économie qui ont été faites par la commission des finances.
Ces dix milliards de francs lui paraissent correspondre à des choix raisonnables, à des décisions responsables. Là encore, je me demande sur quel chapitre précisément, sur quel type de dépenses exactement l'on souhaite ainsi revenir. Il me semble que c'est seulement lorsque nous le saurons que nous pourrons juger du caractère responsable ou non de la proposition. Je crois qu'en matière de redéploiement vous nous promettez un peu la lune, monsieur le rapporteur général, si je puis reprendre une expression que vous avez employée.
M. Philippe Marini, rapporteur général. M'autorisez-vous à vous interrompre, madame le secrétaire d'Etat ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Mais certainement, monsieur le rapporteur général.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, avec l'autorisation de Mme le secrétaire d'Etat.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais simplement, madame le secrétaire d'Etat, me référer à la page 30 du rapport déposé par le Gouvernement pour le débat d'orientation budgétaire, car la réponse à la question que vous nous posez s'y trouve.
Vous écrivez : « Le financement des priorités de dépenses de l'Etat pour 2001 sera facilité par le redéploiement des ressources publiques. » Nous, nous disons que vous pouvez aller un peu plus vite.
Vous ajoutez très justement que compte tenu de la forte progression de l'emploi, il y aura une baisse du chômage, et vous précisez : « Cette évolution positive a une incidence directe sur la politique de l'emploi ou sur certains minima sociaux. »
Vous écrivez encore : « Les interventions en faveur de l'emploi pourraient progressivement retrouver leur niveau de la fin des années 1980, à mesure que la situation de l'emploi s'améliore, avec une répartition des outils de la politique de l'emploi plus axée sur le traitement durable du chômage et de l'exclusion... De la même façon, le nombre des allocataires de certains minima sociaux est sensible au retour d'une croissance durable marquée par une progression soutenue du pouvoir d'achat... Depuis trois ans, les lois de finances dégagent chaque année 30 milliards de francs d'économies, au fur et à mesure que des programmes anciens voient leur utilité se réduire. »
Nous prétendons que les redéploiements, vous pouvez les faire en appliquant vos propres principes. Car vous vous gardez volontairement de la marge dans l'exécution budgétaire de 2000. D'ailleurs, le ministre de l'économie et des finances ne dit pas autre chose quand il annonce qu'à la fin de l'année le déficit atteindra 200 milliards de francs. Cela veut dire qu'il préjuge en quelque sorte les marges qui vont pouvoir être dégagées du fait des économies que vous allez réaliser sur des dépenses d'intervention sociale aujourd'hui surdimensionnées compte tenu de la baisse du chômage et de la belle conjoncture, dont tout le monde se réjouit, bien entendu.
Ainsi, madame le secrétaire d'Etat, la réponse à la question que vous nous posez, vous la trouvez dans vos propres documents. Nous ne sommes nullement en désaccord sur le fond.
M. Gérard Braun. Très bien !
M. le président. Veuillez poursuivre, madame le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, les rédéploiements, nous savons les faire puisque, depuis que nous élaborons des lois de finances, c'est-à-dire depuis l'été 1997, nous avons, année après année - et le rapport l'indique très clairement - redéployé régulièrement des crédits entre les différents budgets, à hauteur d'une trentaine de milliards de francs par an.
En outre, lorsque nous procédons à des redéploiements, nous indiquons précisément sur quoi ils portent et la représentation nationale les vote année après année.
Monsieur Autain, je vous remercie d'avoir souligné que le Gouvernement tenait ses engagements à l'égard du secteur hospitalier.
Vous avez également bien voulu rappeler les préoccupations qui sont les nôtres en matière de politique familiale. Vous ne m'en voudrez pas de laisser à M. le Premier ministre le soin de donner, le 15 juin prochain, la primeur des annonces à la conférence de la famille.
Enfin, M. Demerliat a souligné à quel point les décisions que le Gouvernement a prises à la suite des tempêtes ont été à la hauteur de leurs conséquences souvent dramatiques.
Vous souhaitez, monsieur le sénateur, qu'un effort complémentaire puisse ête consenti dans le cadre de la loi de finance pour 2001.
M. Michel Moreigne. Et il a raison !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je crois sage d'attendre l'automne pour en reparler. Nous aurons eu, d'ici là, le temps de faire l'inventaire des éventuels besoins supplémentaires qui pourraient surgir. L'effort déjà accompli est très important, mais il va de soi que, si c'était nécessaire, il serait complété.
En conclusion, j'insisterai sur le fait que ce débat a vu s'exprimer une demande générale de plus de transparence.
M. le rapporteur général s'est ému de ce que, au-delà du présent collectif et de ce qu'il est possible d'y traduire de manière fiable et l'état actuel de nos connaissances, le ministre de l'économie et des finances lui ait indiqué que notre objectif en matière de déficit se situait autour de 200 milliards de francs. Je vois là, pour ma part, une affirmation parfaitement claire de notre ambition.
M. Lambert a critiqué les évaluations de recettes du collectif. Là encore, je ne peux que redire qu'elles sont le fruit d'évaluations qui sont assez bien partagées par un certain nombre d'experts.
J'aimerais que le Sénat soit reconnaissant au Gouvernement de ses efforts en matière de transparence. Il ne faut pas, dans ce domaine, céder à la facilité des effets d'annonce. Ce qui compte, c'est ce que l'on fait effectivement, et non la future bonne mesure, qui est toujours meilleure que celle qu'on vient d'annoncer. Il serait sage de s'en souvenir. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES
DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - I. - Au 1 du I de l'article 197 du code général des impôts, les taux : "10,5 %" et "24 %" sont respectivement remplacés par les taux : "9,5 %" et "23 %" ».
II. - Les dispositions du I s'appliquent pour l'imposition des revenus de 1999. »
Sur l'article, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'article 1er porte sur la réduction de l'impôt sur le revenu.
Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale consiste en fait à alléger d'un point le taux d'imposition des deux premières tranches d'imposition, le seuil d'application concernant des revenus annuels de 126 000 francs environ, soit un montant assez proche de la moyenne des revenus salariaux.
Je formulerai d'abord deux observations techniques.
D'une part, je constate que le dispositif s'applique dans les faits à l'ensemble des contribuables imposables et qu'il se renforce de manière marginale pour les foyers fiscaux disposant d'un plus grand nombre de parts.
D'autre part, je souligne que les contribuables seront, en cette fin d'année 2000, placés en situation d'être créanciers de l'Etat, et ce à moindre coût pour ce dernier. En effet, la réduction d'imposition découlant de la modification du barème sera imputée, soit sur le troisième versement pour les contribuables qui acquittent leur impôt par tiers, soit sur le dernier versement pour ceux qui ont opté pour la mensualisation.
Je voudrais également relever que la réalité de la progression de l'impôt sur le revenu ne risque pas d'être profondément affectée par les dispositions que nous allons voter puisque l'évaluation des voies et moyens associée à ce projet de loi de finances rectificative neutralise les effets de la baisse des taux de barème par la hausse de l'assiette imposable.
Je tiens à insister sur quelques-unes des préoccupations qui nous animent en matière d'impôt sur le revenu.
Selon nous, plus que par une évolution de son barème, l'impôt sur le revenu gagnerait en efficacité s'il était profondément repensé.
En cette année 2000, persiste dans notre législation fiscale une situation telle que l'essentiel des revenus financiers et du patrimoine des personnes imposables continue de bénéficier d'une large exemption.
Aujourd'hui, le produit de la contribution sociale généralisée est un peu plus représentatif de la réalité des revenus des ménages. On observera que de nombreux salariés dispensés du paiement de l'impôt sur le revenu, et qui ne bénéficieront donc pas des mesures prévues à l'article 1er, sont dans le même temps assujettis à la CSG et qu'ils acquittent à ce titre des sommes lourdes pour certains.
Peut-on, madame la secrétaire d'Etat, penser que le projet de loi de finances pour 2001 prévoira un allégement de la CSG pour les salariés et pensionnés, de manière que le mouvement de « baisse des impôts » n'oublie personne ?
S'agissant de l'impôt sur le revenu, même si près de la moitié des contribuables assujettis sont finalement dispensés du paiement d'une cotisation du fait de la modicité, pour ne pas dire plus, de leurs revenus imposables, il me semble indispensable de remettre en question, au travers de la loi de finances pour 2001, les dispositions dérogatoires au droit commun que sont, notamment, l'avoir fiscal, le régime séparé d'imposition des plus-values et les prélèvements libératoires, dont l'application ramène à 3 % la part des revenus du capital dans l'assiette de l'impôt sur le revenu.
De la même manière - et avec le souci de respecter la triple orientation : justice, redistribution, efficacité - nous pensons que l'impôt sur le revenu doit être modulé en fonction d'évolutions que l'on peut d'ailleurs aussi imprimer aux autres éléments de notre fiscalité, notamment à la fiscalité indirecte.
M. le président. Par amendement n° 68 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Fournier, Joyandet, Marest, Murat, Ostermann, Trégouët, Valade et Cornu proposent :
« A. - De rédiger ainsi le I de l'article 1er :
« I. - Le 1 du I de l'article 197 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 1. L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 26 230 francs le taux de :
« - 9,5 % pour la fraction supérieure à 26 230 francs et inférieure ou égale à 51 600 francs ;
« - 23 % pour la fraction supérieure à 51 600 francs et inférieure ou égale à 90 820 francs ;
« - 32 % pour la fraction supérieure à 90 820 francs et inférieure ou égale à 147 050 francs ;
« - 41 % pour la fraction supérieure à 147 050 francs et inférieure ou égale à 239 270 francs ;
« - 46 % pour la fraction supérieure à 239 270 francs et inférieure ou égale à 295 070 francs ;
« - 52 % pour la fraction supérieure à 295 070 francs. »
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter in fine l'article 1er par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la modification du barème de l'impôt sur le revenu des personnes physiques visé à l'article 177 du code général des impôts est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. L'article 1er tend à ne modifier que certains taux du barème. Cet amendement a pour objet de diminuer proportionnellement le taux d'imposition de chaque tranche du barème de l'IRPP.
Il ne faut pas remettre en cause la progressivité de cet impôt, qui a pour conséquence d'alourdir la contribution en fonction du revenu. La diminution souhaitable des taux d'imposition doit, par conséquent, être proportionnelle.
Toute autre méthode accentue la progressivité, ce qui ne peut pas fonder une réforme juste de l'IRPP.
Nous appelons tous une telle réforme de nos voeux. Malheureusement, nous n'en avons pas tous la même conception.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, dans sa majorité, souscrit à la démarche des auteurs de l'amendement.
J'ai eu l'occasion de rappeler par deux fois, dans la discussion générale, le choix qui est le nôtre d'une politique plus résolue de baisse des prélèvements obligatoires, politique qui doit suivre deux axes : d'une part, la baisse de toutes les tranches de l'impôt sur le revenu ; d'autre part, la baisse des charges qui pèsent sur les entreprises, par le biais des cotisations sociales.
La proposition de Jacques Oudin va bien dans le sens de notre programme qui, je le rappelle, porte sur une baisse des prélèvements obligatoires de 250 milliards de francs en trois ans, là où le Gouvernement, jusqu'ici, ne prévoit que 160 milliards de francs.
Puisque, madame le secrétaire d'Etat, vous avez bien voulu revenir sur les points de méthode, permettez-moi de dire un mot, en ce qui concerne les prélèvements obligatoires, sur la comparaison entre la France et l'Allemagne.
Vous faites remarquer que les taux de prélèvements obligatoires ne représentent pas la même chose en France et en Allemagne ; peut-être, mais il se trouve qu'en France le financement des retraites est centralisé et qu'il fait l'objet de cotisations obligatoires. Dès lors, il est logique qu'il soit intégré dans le ratio : prélèvements obligatoires/produit intérieur brut.
Du système de protection vieillesse allemand, je crois me souvenir qu'il est beaucoup plus divers, beaucoup plus décentralisé, beaucoup plus complexe que le nôtre, et, disant cela, je ne porte pas de jugement de valeur.
Autrement dit, en intégrant ici dans les prélèvements obligatoires ce qu'on n'y intègre pas là, on respecte strictement la réalité.
En France, il s'agit bien d'un « prélèvement obligatoire » parce qu'il y a un système centralisé et contraignant. En Allemagne, on a davantage affaire à des mécanismes de financement de l'économie libérale, pas à ceux d'une écononomie administrée.
La baisse des prélèvements obligatoires jusqu'à être à parité avec l'Allemagne est un objectif que l'on ne peut contester. Pour y parvenir, il faut aller au-delà des 160 milliards de francs que vous envisagez.
Revenant à l'amendement présenté par M. Oudin, je dirai qu'il est excellent. Je crains cependant qu'il ne dégrade un peu trop le solde dont nous avons déjà parlé.
Dans la mesure où c'est un amendement qui exprime essentiellement une volonté, je pense qu'il devrait être rectifié de manière que nous puissions le voter dans la deuxième partie, c'est-à-dire après l'article 15.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Avant de me prononcer sur l'amendement n° 68 rectifié, je voudrais, en quelques mots, répondre à Mme Beaudeau.
Je comprends tout à fait la sensibilité de son groupe sur la question de la fiscalité directe pesant sur les ménages, et en particulier s'agissant de l'impôt sur le revenu des personnes physiques.
Je crois, moi aussi, que la mesure proposée dans ce collectif correspond à un effort légitime et important puisqu'il est dirigé vers les plus modestes et qu'elle aidera aussi au retour au travail, préoccupation essentielle au sein de la majorité purielle.
Vos suggestions, madame Beaudeau, sur la baisse éventuelle de la CSG et sur l'avoir fiscal méritent considération, mais il faut bien en mesurer les avantages et les inconvénients. Or des inconvénients existent. Nous aurons vraisemblement l'occasion d'en débattre à l'automne.
Cela étant, toutes ces observations prennent place au sein d'une réflexion globale qui aura lieu lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2001. Cette réflexion devra prendre en compte les attentes de tous les Français, les disponibilités que nous offre la « bonne » croissance, comme le dit M. le rapporteur général, ainsi que les choix permettant de favoriser l'emploi et le retour au travail. Nous aurons l'occasion d'y revenir.
L'amendement n° 68 rectifié, présenté par M. Oudin, tend à étendre à la troisième tranche de l'impôt sur le revenu la baisse de un point que nous proposons sur les deux premières tranches et à faire baisser de deux points au lieu de un point le taux des trois dernières tranches.
Vous comprendrez, monsieur le sénateur, que cette mesure ne peut recueillir l'approbation du Gouvernement à la fois parce qu'elle a un coût - M. le rapporteur général vient de le souligner - que nous ne pouvons pas financer en 2000 et parce qu'elle correspond à une philosophie qui n'est pas celle que nous développons dans ce collectif.
M. le président. Monsieur Oudin, accédez-vous à la demande de M. le rapporteur général de modifier votre amendement en le reportant après l'article 15 ?
M. Jacques Oudin. J'accepte, bien entendu, la proposition de la commission de finances et je rectifie mon amendement en conséquence.
M. le président. L'amendement n° 68 rectifié bis sera donc appelé après l'article 15.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Articles additionnels après l'article 1er



M. le président.
Par amendement n° 53, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 158 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 158 bis. - Les personnes qui perçoivent des dividendes distribués par des sociétés françaises disposent à ce titre d'un revenu constitué :
« a) Par les sommes qu'elles perçoivent de la société ;
« b) Par un avoir fiscal représenté par un crédit ouvert sur le Trésor.
« Ce crédit d'impôt est égal à 45 % des sommes effectivement versées par la société.
« Il ne peut être utilisé que dans la mesure où le revenu est compris dans la base de l'impôt sur le revenu dû par le bénéficiaire. Il est reçu en paiement de cet impôt. »
« II. - Les dispositions du I ci-dessus sont applicables à compter du 1er juillet 2000. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement se situe dans la perspective de la loi de finances pour 2001, mais il prend évidemment une importance particulière dans le cadre de ce collectif budgétaire.
Nous partageons une partie des préoccupations des membres de la majorité sénatoriale, comme d'ailleurs du Gouvernement, quant à la nécessité de mettre en oeuvre tous les moyens de réduire une partie du déficit budgétaire. Encore faut-il s'entendre sur l'outil, et c'est ce à quoi tend cet amendement.
Nous proposons, en effet, de mettre un terme à une situation qui dénature profondément la logique même du barème de l'impôt progressif au profit exclusif de ceux qui ont l'opportunité de tirer de quelques placements un revenu financier plus ou moins important.
L'avoir fiscal est et demeure de notre point de vue, n'en déplaise à ses laudateurs, une entorse au principe d'équité fiscale.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est tout le contraire ! M. Thierry Foucaud. Il l'est d'autant plus que son montant est, aujourd'hui, encore plus important que celui qui devrait découler de la stricte application de la loi. En effet, pour les particuliers, le taux de l'avoir fiscal demeure fixé à 50 % alors même que le taux de l'impôt sur les sociétés, auquel il est censé faire référence, est de 33,33 %.
Ce décalage, même en admettant la neutralité de l'avoir fiscal, est, dans les faits, difficilement acceptable et ne trouve guère d'autre justification que celle de majorer encore le revenu financier net du détenteur. On est donc loin, en cette matière, de l'équité fiscale.
Sur le fond, cet amendement prévoit une utile extension de l'assiette de l'impôt sur le revenu.
Enfin, de manière tout à fait ponctuelle, il tend à appréhender l'augmentation sensible des dividendes versés par les entreprises privées ces dernières années, augmentation dont on pourrait souhaiter simplement qu'elle soit, de temps en temps, plutôt transformée en hausses de salaires ou en création d'emplois.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est tout à fait défavorable à cet amendement. En effet, si l'avoir fiscal existe, c'est par souci d'équité : il évite de payer l'impôt sur l'impôt. La suppression de la restitution de l'avoir fiscal non imputé nous semble d'ailleurs non constitutionnelle.
Il est préférable d'éviter ce genre d'initiative, qui n'appelle pas d'autre commentaire de ma part.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Comme j'ai eu l'occasion de le dire à l'instant en réponse àMme Beaudeau, nous sommes sensibles aux préoccupations qui sont développées par les auteurs de cet amendement. D'ailleurs, le Gouvernement l'a prouvé puisque le mécanisme de l'avoir fiscal a été modifié plusieurs fois depuis 1997.
Cependant, pour des raisons à la fois pratiques et de bon sens, il nous semble qu'une mesure de cette nature ne peut trouver sa place dans un collectif de printemps, ne serait-ce qu'en raison de la date de son entrée en vigueur et des multiples difficultés techniques que cela pourrait poser.
Par conséquent, je vous propose, monsieur Foucaud, de retirer cet amendement. Cela dit, si vous souhaitez que nous débattions de cette question, nous aurons l'occasion de le faire lors de l'examen, à l'automne, du prochain projet de loi de finances.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette annonce est importante !
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Foucaud ?
M. Thierry Foucaud. Dans la mesure où un débat s'engagera - et c'est une bonne chose - je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 53 est retiré.
Par amendement n° 69 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Fournier, Joyandet, Marest, Murat, Neuwirth, Ostermann, Trégouët, Valade et Cornu proposent d'insérer, après l'article 1er, un article ainsi rédigé :
« I. - Au 2° du I de l'article 197 du code général des impôts, la somme : "11 060 francs" est remplacée par la somme : "19 070 francs".
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du relèvement du plafond du quotient familial est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Cet amendement en faveur des familles revient sur la baisse, adoptée l'an dernier, du plafond du quotient familial.
Rapprocher cette baisse du quotient familial et le rétablissement des allocations familiales pour toutes les familles, comme le fait le Gouvernement, est irrecevable, ne serait-ce qu'en raison d'une différence de nature : les allocations familiales sont une prestation et le quotient familial relève de la fiscalité.
Par ailleurs, cet amendement prévoit de porter le plafond du quotient familial au même niveau que celui qui est retenu pour l'abattement de la taxe d'habitation. Aucune raison ne peut justifier la différence existant actuellement entre les deux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est favorable sur le principe. Cet amendement traduit des orientations partagées par la commission. Toutefois, je demande à M. Oudin de bien vouloir rectifier son amendement afin de le transformer en article additionnel après l'article 15, ce qui nous permettra de nous prononcer à ce sujet lors de l'examen des articles de la deuxième partie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Il s'agit de revenir sur une mesure qui avait été décidée après concertation avec les associations familiales et qui était la contrepartie du rétablissement de l'universalité des allocations familiales. Je rappellerai simplement que, pour un couple marié avec un enfant, seules sont concernées par le plafonnement du quotient familial les familles qui perçoivent plus de 36 485 francs de revenus déclarés par mois. Ce sont donc des personnes qui disposent de revenus relativement substantiels.
En ce qui concerne la situation des foyers monoparentaux, nous n'avons pas modifié le plafond de la majoration du quotient familial.
Pour ces raisons, ainsi que pour celles qui sont liées au coût budgétaire de cette mesure, qui aurait pour conséquence de déséquilibrer le budget de l'Etat - je rappelle qu'en contrepartie de la suppression de la mise sous conditions de ressources des allocations familiales le budget de l'Etat a pris à sa charge le coût résultant du versement de l'allocation de parent isolé - je ne peux qu'être défavorable à cet amendement.
M. le président. Monsieur Oudin, accédez-vous à la suggestion de M. le rapporteur général de modifier votre amendement en le reportant après l'article 15 ?
M. Jacques Oudin. J'accepte la proposition de la commission et je rectifie mon amendement en ce sens.
M. le président. L'amendement n° 69 rectifié bis sera donc appelé après l'article 15.
Je suis saisi de deux amendements présentés par MM. Fréville et Badré, Mme Bocandé et les membres du groupe de l'Union centriste et qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 21 tend à insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 4 du I de l'article 197 du code général des impôts est complété par le membre de phrase suivant : "; pour un couple marié soumis à imposition commune, le montant de l'impôt est diminué, dans la limite de son montant, de la différence entre 5 020 F et son montant ;".
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la réduction de l'exonération de taxe intérieure sur les produits pétroliers prévue à l'article 265 bis (1 b ) du code des douanes. »
L'amendement n° 22 tend à insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 4 du I de l'article 197 du code général des impôts est complété par le membre de phrase suivant : "; pour un couple marié soumis à imposition commune, le montant de l'impôt est diminué, dans la limite de son montant, de la différence entre 6 700 F et son montant ;".
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la réduction de l'exonération de taxe intérieure sur les produits pétroliers prévue à l'article 265 bis (1 b ) du code des douanes. »
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Mon second amendement est un amendement de repli par rapport au premier.
Notre groupe a lu avec une extrême attention, madame le secrétaire d'Etat, le rapport déposé par le Gouvernement pour le débat d'orientation budgétaire. Il y est écrit, à la page 24 : « Il faut veiller à ce que le système de prélèvement et de transferts ne vienne pas entretenir un phénomène de "trappe à inactivité". » On cite l'exemple d'un coupe marié dont l'un des conjoints accepte un travail, soit à temps partiel, soit à plein temps : cela entraîne une très forte augmentation de leur imposition.
Naturellement, l'une des raisons de ce phénomène - et c'est un point sur lequel nous avons attiré souvent votre attention et celle de votre prédécesseur - est que le mécanisme de la décote n'est pas « conjugalisé ». Par conséquent, lorsque deux salariés percevant le SMIC se marient ou qu'un membre d'un couple se remet à travailler, leur foyer fiscal subit une très forte augmentation de son impôt sur le revenu.
Je suis certain que notre amendement, dont le coût diminue, d'ailleurs, en raison de la réduction du taux des deux premières tranches du barème, va tout à fait dans le sens souhaité par le Gouvernement de réduction du phénomène de la « trappe à inactivité », ainsi que d'une meilleure prise en compte de la famille. Je suis certain que le Gouvernement lèvera le gage en l'acceptant.
M. le président. Quel est l'avis de la Commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission partage l'analyse de M. Fréville, d'une part, pour des raisons de politique familiale, d'autre part, pour encourager la reprise d'activité. Dans la période actuelle de croissance, tout ce qui peut être fait pour éviter ces handicaps au retour à l'emploi, mérite, bien entendu, d'être encouragé.
Par conséquent, la commission est favorable à ces amendements. Cela étant, compte tenu du coût de la mesure proposée, il serait souhaitable, de la même manière que pour les amendements précédents qui ont été présentés par M. Oudin, que M. Fréville rectifie ces amendements en les reportant après l'article 15, c'est-à-dire après l'article d'équilibre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. On ne peut pas mener une réflexion sur la décote indépendamment de la réflexion sur le barème de l'impôt sur le revenu car, comme vous le savez, le mécanisme de la décote est celui qui conditionne l'entrée dans le barème de l'impôt sur le revenu. Par conséquent, modifier un paramètre sans s'interroger sur l'ensemble dans lequel on s'inscrit nous paraît un peu délicat.
C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas accepter l'amendement en l'état. Pour autant, je rappelle que l'article 1er du collectif budgétaire a pour objet d'alléger l'impôt sur le revenu des deux premières tranches du barème. C'est une première étape avec l'allégement de la taxe d'habitation. Mais le Gouvernement est décidé à engager la réflexion sur la fiscalité qui pèse sur les ménages et nous aurons l'occasion de reparler de tout cela dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2001. Nous pourrons donc, à ce moment-là, reparler du système de la décote si vous le souhaitez.
M. le président. Monsieur Fréville, accédez-vous à la demande de M. le rapporteur général de rectifier vos amendements et de les reporter après l'article 15 ?
M. Yves Fréville. J'ai bien entendu la réponse encourageante du Gouvernement et la sollicitation de M. le rapporteur général. J'accepte, monsieur le président, de rectifier mes amendements n°s 21 et 22 dans le sens proposé par M. le rapporteur général.
M. le président. Les amendements n°s 21 rectifié et 22 rectifié seront donc appelés après l'article 15.
Je suis saisi de deux amendements, présentés par M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 54 tend à insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 978 du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Les opérations d'achat ou de vente des valeurs de toute nature effectuées par une personne physique ou morale qui est domiciliée ou établie hors de France donnent lieu à la rédaction d'un bordereau soumis à un droit de timbre correspondant à 1,5 pour 1 000 du montant de la transaction. »
L'amendement n° 55 vise à insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le huitième alinéa de l'article 980 bis du code général des impôts est abrogé. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Ces deux amendements portant sur le droit de timbre affectant les opérations menées sur les marchés financiers par les non-résidents seront défendus de manière commune, l'un étant l'indispensable complément de l'autre.
Le développement de la place boursière de Paris ces dernières années est une réalité, notamment à l'examen de l'évolution spectaculaire de la capitalisation, de celle du CAC 40 et de l'accroissement du volume des transactions menées.
Même si le second marché est aujourd'hui soumis aux soubresauts et aux incertitudes originelles de la « Net-économie », nous sommes dans un contexte global de majoration sensible de la valeur de la place.
Cette majoration de la valeur de la place accompagne la croissance économique et tend d'ailleurs à en consommer une partie essentielle, puisque les dividendes distribués par les entreprises inscrites à la cote officielle ne cessent de connaître une augmentation constante, à peu de choses près équivalente à celle qui n'affecte pas la part des salaires et de l'emploi dans la valeur ajoutée.
D'une certaine manière, les marchés boursiers sont un lieu où l'on peut, chaque jour, constater que la croissance porte des fruits assez mal répartis et que les fruits de première qualité semblent dévolus à un nombre réduit de consommateurs.
Pour autant, notre législation fiscale comporte aujourd'hui un certain nombre de dispositions dont on ne peut que constater qu'elles n'ont pas lieu d'être. Ainsi en va-t-il de celle qui veut que les non-résidents bénéficient d'une exemption d'acquitter tout impôt de bourse dans le cadre des opérations qu'ils peuvent mener sur le marché français.
Dans cet esprit, l'objectif de la mesure était, à l'origine, de faciliter le développement de la place boursière de Paris, et l'on peut objectivement considérer qu'il a été atteint presque au-delà de toute espérance.
On doit à la vérité de dire que certains citoyens français ont eu tôt fait, en vue de bénéficier, entre autres dispositions, de cette mesure, de déménager à l'étranger pour continuer de mener des opérations sur les marchés financiers de notre pays et que, de manière apparemment marginale, mais néanmoins réelle, ces dispositions ont encouragé une certaine forme d'expatriation fiscale dont nous ne pouvons que contester les motivations.
Nous connaissons la position de fond de la commission des finances qui, dès lors qu'elle est pour la baisse du niveau des prélèvements obligatoires, pour la baisse des dépenses publiques et la baisse des déficits conjuguées, est évidemment très favorable à la quasi-disparition de toute imposition portant sur les flux, comme les revenus du capital.
Mais soyons sérieux : que peut représenter dans l'absolu la mise en place d'une taxation de 0,15 % sur les mouvements effectués sur les places boursières au regard des taux annuels de valorisation boursière ou encore de certaines évolutions qui, au quotidien, peuvent marquer les titres échangés ?
Rien qui soit de nature à pénaliser fondamentalement les investisseurs mais tout pour, d'une certaine manière, contribuer au bien-être de la collectivité.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite à adopter ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis vraiment désolé que l'on puisse encore aujourd'hui présenter de tels amendements. (M. Thierry Foucaud s'exclame.) J'en suis sincèrement désolé, mon cher collègue !
J'ai été surpris d'entendre Mme Beaudeau ou vous-même affirmer que la Bourse serait un exercice très dangereux car elle serait sur le point de s'effondrer. Mais réjouissez-vous ! Si les capitalistes se ruinent, ma foi, soyez heureux ! Moi, si j'étais communiste, je souhaiterais la ruine des capitalistes. Alors, souhaitez que la bulle financière se développe de plus en plus et qu'il arrive une catastrophe. Cela vous donnera peut-être raison.
M. Guy Fischer. En général, ce sont essentiellement les petits qui paient quand la Bourse baisse !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Plus on est gros et plus la baisse a de conséquences ! Au total, cela apporterait tout de même de l'eau à votre moulin. Cela étant dit, personne, naturellement, ne doit souhaiter de telles catastrophes.
Pour redevenir sérieux - permettez-le-moi - et s'agissant de votre premier amendement, vous me surprenez tout de même. Vous dites qu'il faut pénaliser les opérations que ceux qui se sont expatriés fiscalement continueront à faire sur le marché de Paris. Mais, s'ils sont pénalisés, ils ne viendront plus sur le marché de Paris ! Ils feront leurs opérations à Zurich, Amsterdam, New York, Tokyo, où l'on veut, sauf à Paris ! Je pense donc que cette mesure ne permet pas d'atteindre l'objectif visé.
Si vous voulez être cohérents avec vous-mêmes, il faut proposer de rétablir le contrôle des mouvements de capitaux. Voilà qui serait clair et cohérent. C'est une vue doctrinale claire, qui n'est plus tout à fait de notre époque, mais je comprendrais que vous proposiez une telle disposition.
S'agissant du second point, nous discuterons tout à l'heure de la fameuse taxe sur les transactions financières. Votre second amendement, c'est un ersatz de taxe Tobin, cela relève de la même philosophie. C'est quelque chose qui, ou bien est réalisé par tout le monde, au même taux et au même moment, ou bien n'est réalisé nulle part, par personne, sinon celui qui l'appliquerait se verrait pénalisé par rapport aux autres. Ce n'est pas plus compliqué que cela !
Je comprends et je respecte vos convictions ; j'apprécie les gens de conviction. Mais, permettez-moi de vous le dire, on ne peut absolument pas envisager de retenir les amendements que venez de présenter. Ils suscitent un avis très défavorable de la part de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, vous proposez la suppression de l'exonération de l'impôt sur les opérations de bourse. Cette proposition ne me semble pas opportune, car le critère déterminant pour l'application de cet impôt, c'est le recours à un intermédiaire français, et non le lieu d'opérations d'achat ou de vente. Par conséquent, supprimer cette exonération risquerait plus de délocaliser l'opération d'intermédiation que de soumettre l'investisseur étranger à cet impôt, ce que, je crois, vous souhaitez.
Par ailleurs, cela aurait un effet induit en termes de perte de recettes, lié à la diminution des transactions sur la place de Paris, notamment sous l'angle de la TVA.
Pour ces raisons, nous ne sommes pas favorables à cette disposition.
En complément de cette proposition, vous souhaitez, par ailleurs, l'instauration d'une taxe additionnelle à cet impôt, qui ne frapperait que les achats et ventes de valeurs par les non-résidents. Cela nous renvoie à un débat beaucoup plus large que nous aurons plus tard au cours de l'examen du présent projet de loi. Vous savez que deux rapports devront être prochainement remis, l'un par le Gouvernement, l'autre par MM. Fuchs et Feurtet. Par conséquent, sans entrer dans le fond du sujet, il me semble que cette proposition est prématurée à ce stade, mais j'aurai l'occasion de me prononcer ultérieurement au fond sur ce type de disposition.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 54, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 55, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 1er bis



M. le président.
« Art. 1er bis . - Dans le premier alinéa du 1 de l'article 200 du code général des impôts, après le mot : "versements", sont insérés les mots : ", y compris l'abandon exprès de revenus ou produits,". »
Par amendement n° 1, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Le a du 1 du même article est complété par les mots suivants : "répondant aux conditions fixés au b" ».
B. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : « I. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d'une précision rédactionnelle visant à parfaire le texte qui avait été adopté à ce sujet sur l'initiative de notre commission dans la loi de finances initiale pour 2000.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis favorable. Il s'agit d'un amendement rédactionnel de précision fort utile, qui lève une ambiguïté ?
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er bis , ainsi modifié.

(L'article 1er bis est adopté.)

Article 1er ter



M. le président.
« Art. 1er ter . - I. - L'indemnité de cessation d'activité prévue au V de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998) est exonérée d'impôt sur le revenu et exclue de l'assiette des cotisations de sécurité sociale, de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale.
« II. - Les dispositions du I sont applicables aux indemnités de cessation d'activité perçues depuis la date d'entrée en vigueur de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 précitée. » - (Adopté.)

Article additionnel avant l'article 2



M. le président.
Par amendement n° 82, MM. Badré et Fréville proposent d'insérer, avant l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La première phrase du II de l'article 87 de la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 de finances pour 1987 est complétée par les mots : "ou pour les sous-louer à un tiers" ;
« II. - Les dépenses éventuellement entraînées par l'application du I sont compensées par l'augmentation, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 82 est retiré.

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - I. - A l'article 278 du code général des impôts, le taux "20,60 %" est remplacé par le taux "19,60 %" ».
« II. - A l'article 296 du code général des impôts, le taux "9,50 %" est remplacé par le taux "8,50 %".
« III. - Les dispositions des I et II s'appliquent aux opérations pour lesquelles la taxe est exigible à compter du 1er avril 2000. »
Sur l'article, la parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Le Gouvernement, à la date du 1er avril, a donc opté, parmi d'autres mesures, pour un allégement général du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée, en ramenant ce taux à 19,6 %. Cette mesure revient, dans les faits, sur une partie de la hausse appliquée au taux normal en juillet 1995 par le collectif budgétaire Juppé, hausse dont l'effet, on s'en souvient, avait été particulièrement négatif sur la croissance économique de l'époque.
On soulignera également que, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2000, notre groupe avait proposé une telle réduction, première étape vers un retour au taux de 18,6 % qui doit être directement visé, nous semble-t-il, dans la programmation de la réforme fiscale dont notre pays a besoin pour les prochaines années.
Il est sans doute trop tôt aujourd'hui pour mesurer les effets de la mesure de réduction du taux normal. On ne peut toutefois manquer d'observer qu'elle semble n'avoir de portée que pour les transactions concernant des biens et des services dont la valeur est assez élevée. Dans l'absolu, nous le savons, toute baisse du taux de la taxe sur la valeur ajoutée peut se traduire de trois manières : tout d'abord, par la baisse du prix de la prestation ou du bien assujetti, cas de figure a priori le plus automatique ; ensuite, par l'accroissement de la marge brute du collecteur d'impôt, c'est-à-dire de l'entreprise soumise à la déclaration de TVA ; enfin, par l'utilisation de la marge financière créée pour embaucher de nouveaux salariés, susceptibles notamment de répondre à l'augmentation éventuelle de la demande, consécutive à la réduction du prix.
S'agissant de la réduction du taux de la TVA pour l'activité de second oeuvre du bâtiment, dont nous avons discuté lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, ses effets doivent être analysés en tenant compte de ces trois facteurs.
Dans le cas de la réduction d'un point du taux normal, il semble bien que la portée de la mesure, que nous n'apprécierons en dernière instance que dans quelques mois, soit assez strictement limitée aux deux premiers termes que j'évoquais à l'instant, singulièrement au second, à savoir l'accroissement de la marge brute.
Tout au plus, cette réduction du taux normal permettra de limiter une poussée inflationniste, mais elle n'aura que peu de portée sur le niveau de l'emploi.
Pour notre part, nous aurions préféré que le Gouvernement s'engage plus directement dans la voie d'une réduction du taux normal plus audacieuse et plus sensible, en le ramenant, dans un premier temps, à 18,6 % et en envisageant, dans un second temps, de placer notre pays plus près du plancher autorisé par la directive « TVA », c'est-à-dire 15 %.
A ce propos, la France, qui va exercer dans quelques jours et pour six mois la présidence de l'Union européenne, devrait, nous semble-t-il, prendre l'initiative d'une réflexion et de propositions sur de nouvelles modifications de la directive concernée, en vue, notamment, de permettre que le taux réduit s'applique à un niveau encore plus faible et, éventuellement, pour un nombre de produits plus important ou que certains secteurs dont l'activité est aujourd'hui soumise au taux normal bénéficient d'un reclassement au taux réduit.
Telles sont les quelques observations que nous souhaitions formuler à l'occasion de l'examen de cet article 2, aux objectifs duquel nous souscrivons, mais qui doit faire l'objet de prolongements dans les mois à venir.
M. le président. Par amendement n° 51, M. Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
A. - De compléter l'article 2 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... 1. Les ventes d'immeubles à construire au sens des articles L. 261-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, réalisés par un vendeur n'ayant pas été autorisé à acquitter la taxe selon les encaissements, bénéficient du taux de 19,60 % ou de 8,50 % dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion, pour les encaissements intervenus à compter du 1er avril 2000, lorsque les conditions suivantes sont remplies :
« - l'acte qui constate la mutation a été conclu avant le 1er avril 2000 ;
« - l'achèvement de l'immeuble intervient à compter du 1er avril 2000.
« 2. Pour chaque vente d'immeuble à construire dont le prix ou la fraction du prix doit être acquitté à compter du 1er avril 2000, le vendeur, autorisé ou non à acquitter la taxe selon les encaissements, adresse à l'acquéreur, au plus tard lors du dernier appel de fonds, une facture rectificative faisant apparaître l'incidence de la réduction du taux de la taxe sur la valeur ajoutée. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du 1 ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes pour le budget de l'Etat résultant de l'application de la baisse du taux de la taxe à la valeur ajoutée sur les ventes d'immeubles à construire est compensée par le rélèvement à due concurrence de la taxe intérieure sur les produits pétroliers visée à l'article 265 du code des douanes. »
La parole est à M. Miquel.
M. Gérard Miquel. Le présent amendement vise à garantir l'application de la baisse du taux de la taxe sur la valeur ajoutée aux ventes d'immeubles à construire.
L'article 2 du projet de loi de finances rectificative prévoit l'abaissement du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée à compter du 1er avril 2000.
Ce dispositif conduit à faire application du nouveau taux lorsque la taxe est exigible à compter de cette même date.
Or, s'agissant d'immeubles à construire, c'est-à-dire les ventes à terme ou en état futur d'achèvement, deux situations peuvent se présenter. La première : l'exigibilité intervient au moment de la signature de l'acte. Il en est ainsi lorsqu'un promoteur n'a pas opté pour acquitter la taxe selon les encaissements. Seconde situation : l'exigibilité intervient au fur et à mesure des encaissements lorsque cette option a été exercée.
Afin de donner à la mesure un effet aussi large que possible, une instruction du 27 mars 2000 a précisé que le nouveau taux s'applique à compter du 1er avril 2000, que le vendeur ait ou non été autorisé à acquitter la taxe selon les encaissements lorsque l'acte qui constate la mutation a été conclu avant le 1er avril 2000 et que l'achèvement de l'immeuble intervient à compter du 1er avril 2000.
L'application du taux de 19,6 % ou de 8,50 % aux sommes encaissées à compter du 1er avril 2000 lorsque le vendeur n'a pas exercé l'option pour la taxation selon les encaissements constitue une mesure favorable pour l'acquéreur.
Le présent amendement a pour objet de donner un fondement incontestable à la mesure dans cette situation.
Par ailleurs, il convient d'apporter une sécurité juridique suffisante aux parties en présence - vendeur, acquéreur, administration - sans formalisme excessif et sans coût supplémentaire pour l'acquéreur.
A cet égard, au lieu d'un acte notarié rectificatif, l'émission par le vendeur d'une simple facture rectificative faisant apparaître l'incidence de la réduction du taux de la TVA peut répondre à ces préoccupations.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Madame le secrétaire d'Etat, dans son paragaphe 1, cet amendement permet le passage à 19,6 % des encaissements de TVA à compter du 1er avril 2000 pour les ventes d'immeubles à construire lorsque l'acte qui constate la mutation a été conclu avant le 1er avril 2000 et lorsque la date d'achèvement de l'immeuble intervient après cette date. Il s'agit donc de permettre aux opérations immobilières engagées de bénéficier du nouveau taux de TVA alors que la mutation est intervenue auparavant. Le contribuable non sousmis au régime des encaissements aurait, si cette mesure n'est pas prise, l'obligation de payer une TVA à 20,6 % sur la totalité du prix de vente en raison du fait générateur de la taxe.
Quant au paragraphe 2, il déroge au principe général de parallélisme des formes. En effet, la modification du taux de TVA devrait entraîner la rédaction d'un nouveau contrat de mutation. L'amendement prévoit qu'une simple facture rectificative, c'est-à-dire un acte unilatéral, sera suffisante, ce qui évitera des frais supplémentaires.
Madame le secrétaire d'Etat, j'ai cru comprendre que cet amendement puisait à bonne source puisque, si je ne me trompe, une instruction fiscale du 29 mai 2000 évoque cette mesure. La commission y est favorable, tout en souhaitant que vous lui indiquiez le coût estimé de la mesure.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. J'ai bien entendu les observations de M. Fischer.
S'agissant de la répercussion de la baisse du taux de TVA, je la crois bonne dans un certain nombre de secteurs, notamment dans celui de la distribution, c'est-à-dire des biens de consommation.
Sur les aspects de second oeuvre que vous avez évoqués, je ne peux que me féliciter que cette mesure limite aussi les pressions inflationnistes que l'on peut constater dans ce secteur.
Enfin, vous avez souhaité que le taux normal de TVA soit ramené vers 15 %. La moyenne européenne est de 19,4 %. Grâce à la baisse du taux de un point que nous vous proposons, nous revenons à 19,6 %, ce qui nous place véritablement dans la moyenne. C'est là un point important qu'il fallait souligner.
J'en viens à l'amendement n° 51. Le Gouvernement ne peut que se féliciter d'une disposition visant à donner une base légale à une correction qu'il avait d'ores et déjà fait figurer dans une instruction de la direction générale des impôts. Il émet donc un avis favorable sur cet amendement, qui vise à garantir la répercussion effective de la baisse du taux de la TVA au profit de l'acquéreur et qui simplifie, comme M. le rapporteur général vient de le souligner, le formalisme lié à cette réduction du taux. Par conséquent, il lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 51 rectifié.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. S'agissant du coût estimé de la mesure, j'avoue ne pas pouvoir répondre pour l'instant ; mais le renseignement vous sera apporté un peu plus tard, au cours de ce débat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 51 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, ainsi modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - I. - Le b septies) de l'article 279 du code général des impôts est ainsi rétabli :
« b septies . Les travaux sylvicoles et d'exploitation forestière réalisés au profit d'exploitants agricoles ; »
« II. - Les dispositions du I s'appliquent aux opérations pour lesquelles une facture a été émise à compter du 1er janvier 2000. »
Sur cet article, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 70 rectifié, MM. François, Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Darcos, Delong, Fournier, Gaillard, Ginésy, Joyandet, Murat, Neuwirth, Ostermann, de Richemont, Trégouët, Valade et Cornu proposent :
I. - A la fin du texte présenté par le paragraphe I de l'article 3 pour rétablir le b septies de l'article 279 du code général des impôts, de remplacer les mots : « réalisés au profit d'exploitants agricoles ; » par les mots : « , y compris les travaux d'entretien des chemins forestiers ; ».
II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du paragraphe I ci-dessus, de compléter in fine ce même article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'extension du bénéfice du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée aux travaux d'entretien des chemins forestiers est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 2, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de compléter le texte présenté par le paragraphe I de l'article 3 pour le b septies de l'article 279 du code général des impôts par les mots : « y compris les travaux d'entretien des sentiers forestiers ; ».
Par amendement n° 23 rectifié, MM. Huriet, Faure, Badré, Hoeffel, Lorrain, Grignon, Richert, Dulait, Bécot, Arnaud, Nogrix, Souplet, Fanchis, Huchon, Bohl, Moinard, Deneux, Branger, Hyest, Machet, Jarlier, Vecten, Amoudry, Hérisson et Barraux proposent :
A. - De compléter le texte présenté par le paragraphe I de l'article 3 pour le b septies de l'article 279 du code général des impôts par les mots : « y compris les travaux d'entretien des sentiers forestiers ; ».
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter ce même article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de l'extension de l'abaissement du taux de TVA aux travaux d'entretien des sentiers forestiers sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Oudin, pour présenter l'amendement n° 70 rectifié.
M. Jacques Oudin. Permettez-moi, monsieur le président, de revenir un instant sur le propos que vient de tenir Mme le secrétaire d'Etat. J'ai en effet été étonné d'entendre cette dernière déclarer qu'elle ne pouvait pas répondre à M. le rapporteur général sur le chiffrage de cet amendement. Généralement, on oppose aux amendements parlementaires des chiffrages toujours très précis et parfois considérables. Là, un amendement qui reçoit l'approbation du Gouvernement et dont il lève le gage ne peut être chiffré. Je le note, c'est tout !
M. Philippe Marini, rapporteur général. « Selon que vous serez puissant ou misérable... ». Nous sommes misérables !
M. Jacques Oudin. L'amendement n° 70 rectifié a un double objet.
Il convient, d'une part, de préciser que le taux réduit de la TVA est applicable aux travaux d'entretien des chemins forestiers, afin d'éviter tout risque d'interprétation restrictive de la notion de « travaux sylvicoles et d'exploitation forestière ».
D'autre part, le taux de TVA étant déterminé par l'objet des opérations auxquelles il s'applique, indépendamment de la qualité des personnes au profit desquelles elles sont réalisées, il semble inutile de préciser, comme l'a fait l'Assemblée nationale et comme l'a laissé passer le Gouvernement, que ne sont concernés que les travaux forestiers réalisés « au profit des exploitations agricoles », sans compter d'ailleurs que certains propriétaires forestiers ne sont pas en même temps exploitants agricoles.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 2.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'initiative de la commission recoupe celle des auteurs de l'amendement n° 70 rectifié. Elle tend à préciser - c'est une mesure attendue par les forestiers - que le taux réduit de TVA s'applique aussi à l'entretien des sentiers forestiers, conformément, d'ailleurs, à ce qui est prévu par l'instruction de la direction générale des impôts en date du 23 mars 2000. Comme, en matière fiscale, l'instruction est d'une valeur supérieure au décret, qui est d'une valeur supérieure à la loi... (Sourires.)
M. Jacques Oudin. C'est vrai ! (nouveaux sourires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pardonnez-moi cette ironie ! J'espère que vous soutiendrez nos efforts.
La commission préfère la rédaction de son amendement n° 2, qui lui paraît suffisamment explicite : c'est une précision utile aux mesures qui ont déjà été décidées en ce domaine et qui sont attendues par les forestiers.
M. le président. La parole est à M. Nogrix, pour défendre l'amendement n° 23 rectifié.
M. Philippe Nogrix. L'instruction de la direction générale des impôts du 23 mars 2000 a précisé que l'abaissement du taux de TVA sur les travaux forestiers concernait également l'entretien des sentiers. Il est nécessaire de le préciser, car il n'est pas évident que cela soit assimilable aux « travaux sylvicoles et d'exploitation forestière ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est favorable aux amendements n°s 2 et 23 rectifié, qui sont quasiment identiques, au gage près, dès lors qu'il s'agit bien de « travaux sylvicoles et d'exploitation forestière » sur les sentiers. Ces travaux nous paraissent pouvoir être éligibles au taux réduit de la TVA. Mais, bien entendu, les travaux d'aménagement des sentiers forestiers à des fins touristiques, éducatives ou autres resteront en tout état de cause soumis au taux normal de TVA.
Si nous sommes bien d'accord sur la lecture de ces amendements - et c'est ainsi, me semble-t-il, qu'ils doivent être compris - le Gouvernement y est favorable.
Quant à l'amendement n° 70 rectifié, défendu par M. Oudin, il vise à étendre le taux réduit de TVA aux travaux qui seraient réalisés non seulement par les exploitants agricoles mais également par toute autre personne physique ou morale. Il s'agirait d'élargir l'application de cette mesure aux particuliers, et cela n'est pas conforme au droit communautaire, puisqu'une telle disposition n'est pas prévue par l'annexe H de la sixième directive. De plus, cette analyse a été confirmée par la Commission européenne.
J'en profite néanmoins pour rappeler que le Gouvernement a annoncé, le 7 mars dernier, que, à titre exceptionnel, les travaux d'abattage, de tronçonnage, d'élagage et d'enlèvement des arbres situés aux abords directs des locaux à usage d'habitation seront soumis au taux réduit de TVA. J'ai conscience que c'est un champ un peu différent, mais cela vient tout de même compléter utilement la mesure telle qu'elle avait été annoncée précédemment.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 70 rectifié.
M. le président. Monsieur Oudin, l'amendement n° 70 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin. S'agissant des exploitants agricoles, je veux bien admettre le point de vue développé.
En revanche, j'ai noté que la différence essentielle entre les trois amendements était la suivante : l'amendement n° 70 rectifié, que j'ai défendu, concerne les chemins forestiers, alors que les amendements n°s 2 et 23 rectifié visent les sentiers forestiers. Quelle est la différence fondamentale entre un chemin et un sentier ? S'agissant d'exploitations forestières, il convient de pouvoir faire circuler des engins tirant des troncs d'arbres.
Peut-on faire passer des troncs d'arbres sur un sentier ? J'en doute, car un sentier est plus petit qu'un chemin. Bref, il va y avoir là une source de contentieux entre les contrôleurs des impôts et les exploitants forestiers qui n'est pas près de s'éteindre !
Mais madame le secrétaire d'Etat, sensible à vos arguments et, plus encore, à ceux de M. le rapporteur général, je me rallie à l'amendement n° 2 de la commission et je retire donc l'amendement n° 70 rectifié, en me demandant tout de même jusqu'où vont les secrets de la linguistique ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 70 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence l'amendement n° 23 rectifié n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 3



M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 89, MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le b) du 2° de l'article 278 bis du code général des impôts est supprimé.
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 71 rectifié, MM. Oudin, Braun, de Broissia, Cazalet, Chaumont, Courtois, Delong, Fournier, Joyandet, Marest, Murat, Neuwirth, Ostermann, Trégouët, Valade et Cornu proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le b) du 2° de l'article 278 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« b) des chocolats et de tous produits composés ou contenant du chocolat ou du cacao. Toutefois, le chocolat, le chocolat de ménage et le chocolat de ménage au lait, fabriqués à partir des seules graisses tirées des fèves de cacaoyer, sans adjonction de matière grasse végétale, les fèves de cacao et le beurre de cacao sont admis au taux réduit ».
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 27 rectifié, MM. Grignon, Huriet, Herment, Badré, Hoeffel, Lorrain et Barraux proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La seconde phrase du b) du 2° de l'article 278 bis du code général des impôts est complétée par les mots : "quel que soit leur mode de présentation". »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant de l'application du I ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Trucy, pour défendre l'amendement n° 89.
M. François Trucy. Les produits chocolatés sont taxés soit au taux normal, soit au taux réduit selon les cas. Ainsi, ce dernier s'applique au chocolat de ménage, au chocolat de ménage au lait, aux fèves de cacao et au beurre de cacao.
Il semble plus logique que tous les chocolats soient soumis au taux réduit, parce qu'ils constituent tous des produits d'alimentation courante. La sixième directive européenne et l'annexe H ne s'y opposent pas. En outre, la France souffre d'une distorsion de concurrence par rapport à ses voisins européens, dont la plupart taxent le chocolat à 7 %.
M. le président. La parole est à M. Oudin, pour défendre l'amendement n° 71 rectifié.
M. Jacques Oudin. La bataille du chocolat n'est pas près de s'arrêter ! Nous le savons, et nous en débattons depuis longtemps dans cet hémicycle.
Cet amendement tend à nouveau à modifier le régime de la TVA applicable au chocolat. Ainsi continueront à être soumis au taux normal les chocolats et les produits composés contenant du chocolat ou du cacao. Par exception à ce principe, seront taxés au taux réduit de la TVA les chocolats fabriqués à partir des seules graisses tirées des fèves de cacaoyer, sans adjonction de matière grasse. Il s'agit de réduire la TVA applicable au chocolat de qualité et de taxer plus lourdement les chocolats contenant des matières grasses. De même, le taux réduit sera appliqué aux fèves de cacao et au beurre de cacao.
Tous les amateurs de chocolat approuveront cet amendement, je suppose.
M. le président. L'amendement n° 27 rectifié est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 89 et 71 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit là d'une question bien connue, à savoir l'application du taux réduit de TVA au chocolat.
Ce sujet a donné lieu à différentes études de la commission des finances, notamment, voilà déjà un certain nombre d'années, sur l'initiative de notre ancien collègue sénateur de la Côte-d'Or, Bernard Barbier.
La commission des finances continue à approuver le principe d'une baisse de la TVA applicable à ces produits.
Elle souhaiterait néanmoins qu'un seul amendement reste en discussion, en l'occurrence l'amendement n° 89, et que ce dernier, compte tenu du coût budgétaire, soit rectifié afin de viser à insérer un article additionnel après l'article 15, c'est-à-dire dans la deuxième partie de ce projet de loi de finances rectificative. Dans ces conditions, la commission émettrait alors un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. En ce qui concerne l'amendement n° 89, nous n'avons pas le sentiment que la situation actuelle pose de délicats problèmes de distorsion de concurrence.
Par ailleurs, cet amendement entraînerait une perte de recettes élevée, puisqu'elle atteindrait 2 milliards de francs ; pour cette raison, le Gouvernement n'y est pas favorable.
S'agissant de l'amendement n° 71 rectifié, nous considérons que la discussion est prématurée dans la mesure où, comme l'a dit M. le rapporteur général, un projet de directive européenne est en préparation et devrait permettre, sous certaines conditions, l'adjonction de matières grasses végétales aux produits chocolatés.
Dans ces conditions, nous préférerions que l'amendement soit retiré.
M. le président. Monsieur Oudin, acceptez-vous de vous rallier à l'amendement n° 89 ?
M. Jacques Oudin. Tout à fait, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 71 rectifié est retiré.
Monsieur Trucy, acceptez-vous la rectification suggérée par M. le rapporteur général ?
M. François Trucy. Je l'accepte, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 89 rectifié sera donc appelé après l'article 15.
Toujours après l'article 3, je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 24, MM. Huriet, Faure, Badré, Hoeffel, Lorrain, Grignon, Richert, Amoudry, Hérisson, Arnaud, Barraux, Dériot, Jarlier et Huchon proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du 3° bis de l'article 278 bis du code général des impôts, après les mots : "produits suivants", les mots : "à usage domestique" sont supprimés. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 72 rectifié, MM. François, Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Darcos, Delong, Fournier, Gaillard, Ginésy, Joyandet, Murat, Neuwirth, Ostermann, de Richemont, Trégouët, Valade et Cornu proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le 3° bis de l'article 278 bis du code général des impôts, les mots : "à usage domestique" sont supprimés. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 24 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Oudin, pour défendre l'amendement n° 72 rectifié.
M. Jacques Oudin. Une instruction en date du 31 mars 1998 a précisé que le taux réduit s'appliquait au bois utilisé pour le chauffage des locaux à usage principal d'habitation, des locaux qui servent à l'hébergement ou à l'accueil des personnes, même à titre temporaire - hôtels, maisons de retraite, hôpitaux -, et des locaux à usage collectif tels que bâtiments publics, établissements d'enseignement ou piscines.
Le maintien dans le texte législatif des termes « à usage domestique » risque, d'une part, de pérenniser la difficulté d'interprétation que posent ces termes ; d'autre part, il faut souligner que la Commission européenne vient de préciser à la France qu'elle peut étendre le taux réduit de TVA aux livraisons de bois de chauffage à usage non domestique.
Favoriser le développement de l'utilisation du bois de chauffage se justifie particulièrement. En effet, c'est une énergie renouvelable, et son utilisation contribue à la lutte contre l'effet de serre dans le cadre du programme arrêté par le Gouvernement. En outre, il serait ainsi possible d'élargir les débouchés pour le volume considérable d'arbres abattus par l'ouragan des 26 et 27 décembre 1999.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général.
La commission est favorable à l'orientation ainsi décrite. Toutefois, la mesure proposée n'est pas compatible, dans l'état actuel des choses, avec la législation communautaire, qui prévoit que le taux réduit de TVA ne peut s'appliquer au bois de chauffage que lorsqu'il en est fait une utilisation domestique.
L'instruction fiscale du 31 mars 1998 à laquelle il a été fait allusion a défini de façon aussi extensive que possible cette notion d'« usage domestique ».
Sur le fond, bien entendu, nous partageons le souci de M. Oudin : il faut développer toutes les formes d'utilisation du bois de chauffage, aussi bien pour des raisons sociales que pour des raisons de préservation de l'environnement, et la commission a déjà soutenu de telles demandes.
Elle souhaiterait cependant que le Gouvernement s'exprime sur l'évolution de la législation communautaire à cet égard. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet, madame le secrétaire d'Etat ? Permettez-moi de vous interroger avant d'exprimer l'avis de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Nous partageons le point de vue exposé par M. le rapporteur général à l'instant et nous sommes disposés à faire les efforts qui conviennent, notamment dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne.
Pour l'instant, force est de constater que nous ne sommes pas en capacité de légiférer dans le sens qui nous est demandé. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Compte tenu des intentions positives qui ont été exprimées par Mme le secrétaire d'Etat, je sollicite nos collègues pour qu'ils veuillent bien, à ce stade, retirer cet amendement, car il ne peut pas être voté en l'état.
Il faut espérer qu'il pourra l'être d'ici à quelques mois !
M. le président. Monsieur Oudin, compte tenu de l'appel de M. le rapporteur général, maintenez-vous votre amendement ?
M. Jacques Oudin. J'ai bien entendu cet appel, monsieur le président, et je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 72 rectifié est retiré.
Par amendement n° 83, MM. Huriet, Richert, Lorrain, Fréville, Machet, Nogrix et Badré proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Avant le dernier alinéa de l'article 278 quinquies du code général des impôts, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« c) Les protections utilisées par les stomisés ou incontinents. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Notre collègue questeur et professeur de médecine Claude Huriet a attiré notre attention sur ce qui semble être un oubli de notre législation. C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement, qui vise à étendre le champ d'application du taux réduit de TVA à certains matériels utilisés par les personnes stomisées ou incontinentes.
Il est vrai que la réduction du taux de TVA sur ces protections coûterait environ 200 millions de francs. Il n'est cependant pas inutile de remarquer que la plupart des pays de l'Union européenne appliquent un taux de TVA inférieur sur les produits concernés.
Cette mesure favoriserait le maintien à domicile de nombreuses personnes et elle permettrait, d'une part, un certain confort de vie et, d'autre part, l'économie de certains soins en cas de mauvais suivi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission souligne le bien-fondé de cette démarche, qui met l'accent sur des situations extrêmement douloureuses et difficiles tant du point de vue personnel que du point de vue social. Malheureusement, la législation communautaire, au titre de l'annexe H, n'autorise l'application du taux réduit de la TVA qu'aux équipements et matériels destinés aux handicapés.
Peut-on appliquer cette notion d'« équipements et matériels destinés aux handicapés » aux personnes incontinentes dont il a été fait état ?
J'avoue par ailleurs être surpris, madame le secrétaire d'Etat, par l'estimation qui m'a été communiquée par vos services : j'ai vraiment de la peine à croire que cette mesure puisse entraîner un coût de l'ordre de 1 milliard de francs ! J'ai l'impression que l'on nous a répondu de manière un peu extensive...
Sur le fond, nous souhaitons que l'on puisse favoriser le maintien à domicile de personnes fragilisées, et nous espérons que nous pourrons réellement aboutir sur ce dossier. Je souligne d'ailleurs que nous avons déjà pris des positions de cette nature pour les appareillages s'adressant aux diabétiques et pour diverses catégories de handicapés.
Par conséquent, madame le secrétaire d'Etat, je souhaiterais connaître votre avis, tant en ce qui concerne le coût de la mesure que le fond.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Malgré tout l'intérêt que présente cette proposition, elle ne paraît pas pouvoir être retenue dans l'immédiat, parce qu'il nous semble difficile de la limiter aux personnes âgées, donc au adultes, alors même que la question de son extension aux jeunes enfants se posera immanquablement.
Par conséquent - et cela me permet de répondre à la seconde question, qui avait trait au coût de la mesure, telle qu'il résulte de l'amendement, son coût s'élèverait à 450 millions de francs, et non pas 1 milliard de francs ; mais, si la mesure devait être étendue aux jeunes enfants et à l'ensemble des protections - ce qui nous paraît incontournable dès lors que l'on s'engage dans cette voie - ce coût serait alors de 1,5 milliard de francs, d'où le moyen terme de 1 milliard de francs qui a été retenu par mes services.
Pour cette raison, nous souhaitons le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis assez surpris, parce que j'aurais tendance à penser que c'est un problème de négociation au sein de l'Union européenne et que nos collègues des autres pays européens sont tout à fait en mesure, me semble-t-il, de comprendre les difficultés dont il s'agit. En effet, chacun les connaît dans son propre pays.
Il me semble donc que l'on pourrait défendre à bon droit l'interprétation selon laquelle les personnes stomisées ou incontinentes doivent être considérées comme des personnes handicapées.
Je crois que, dans un premier temps, c'est une interprétation que le Parlement français est en mesure de faire, sous sa responsabilité de législateur. Si cela pose problème, que ce problème soit alors traité dans les instances communautaires et que l'on apporte les précisions nécessaires !
La commission, qui n'a pas été convaincue par votre réponse, madame le secrétaire d'Etat - réponse que j'ai trouvée, pour ma part, pardonnez-moi de vous le dire, un peu administrative s'agissant de ce type de question -, est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 83.
M. Denis Badré. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Etant l'auteur du rapport Peut-on baisser le taux de TVA , au nom de la commission des finances, je confirme qu'à mon sens cette mesure est euro-compatible : elle est à la limite, mais en deçà de la limite, et non pas au-delà.
Je voterai donc sans réserve cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 83, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 3.
J'informe le Sénat que la commission des finances m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.

6

COMMUNICATION RELATIVE
À DES COMMISSIONS MIXTES PARITAIRES

M. le président. J'informe le Sénat que les commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la prestation compensatoire en matière de divorce et du projet de loi relatif au référé devant les juridictions administratives sont parvenues à l'adoption d'un texte commun.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean Faure)PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

7

LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE
POUR 2000

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale.
Nous avons commencé, l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 3.

Articles additionnels après l'article 3 (suite)



M. le président.
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune
Par amendement n° 25, MM. Hérisson, Amoudry, Arnaud, Huchon, Louis Mercier et Fréville proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :

« « a quater) La fourniture de repas à consommer sur place. »
« « II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 73 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Dubrulé, Fournier, Joyandet, Murat, Neuwirth, Ostermann, de Richemont, Trégouët, Valade et Cornu proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :

« a quater) La fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 92, MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« a quater) La fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-desus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 26, M. Hérisson, Mme Bocandé, MM. Baudot, Huriet, Amoudry, Arnaud, Huchon, Louis Mercier, Moinard, Marquès, Nogrix, Lorrain, Richert, Souplet et Fréville proposent d'insérer, après l'article 3 un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 281 quinquies du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 281 quinquies. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 14 % pour la fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 91, MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 281 nonies, il est inséré, dans le code général des impôts, un article ainsi rédigé :
« Art. ... - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 14 % en ce qui concerne la vente à consommer sur place dans le secteur de la restauration. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° 25.
M. Yves Fréville. Cet amendement traite d'un problème que nous connaissons bien, celui de l'alignement du taux de TVA appliqué aux restaurants traditionnels, soit 19,6 %, sur celui qui prévaut pour la fourniture de repas à emporter, soit 5,5 %.
Plusieurs de nos collègues ont fait remarquer hier, lors du débat d'orientation budgétaire, que nous avions à ce sujet un véritable contentieux avec le Gouvernement, quel qu'il soit, d'ailleurs, puisque c'est un problème récurrent depuis quelques années.
Il est tout à fait regrettable que, au moment où des marges de manoeuvre assez importantes se dégagent, l'on ne puisse pas supprimer cette cause d'injustice et faire en sorte que les restaurants traditionnels puissent bénéficier d'un taux de TVA identique à celui qui est appliqué à la fourniture de repas à emporter.
D'où cette proposition, qui est tout à fait dans la ligne du rapport Salustro, déposé voilà déjà quelques années.
M. le président. La parole est à M. Oudin, pour présenter l'amendement n° 73 rectifié.
M. Jacques Oudin. Avant le dîner, nous avons parlé du chocolat ; maintenant, nous reparlons de la restauration. C'est un vieux contentieux - M. Fréville l'a dit - qui nous oppose au Gouvernement depuis longtemps.
Est-il vraiment raisonnable, à un moment où l'évolution de notre société pousse de plus en plus de nos concitoyons, hommes et femmes, à travailler, et donc à se nourrir à l'extérieur de leur foyer, à un moment où, partant, toute l'évolution de notre société tend vers le développement de la restauration, qu'elle soit traditionnelle ou collective, d'établir une distinction aussi absurde entre la vente de repas à emporter et la vente de repas à consommer sur place ?
Cela crée des inégalités ou des iniquités que nous dénonçons dans cette assemblée depuis longtemps, mais semble-t-il, de façon vaine.
Il est vrai que le Gouvernement a opté pour une réduction généralisée de la TVA, alors que, dans la dernière loi de finances il avait décidé, ce qui était plus sage, une réduction ciblée dans certains domaines, en l'occurrence ceux des travaux immobiliers et de la restauration immobilière.
Nous pensons qu'il aurait été plus judicieux, aujourd'hui, de traiter ce dossier, car ce secteur d'activité de la restauration est pour nous d'une importance considérable. La France est en effet l'une des premières nations en Europe, voire dans le monde, sur le plan de la gastronomie. Et c'est cette gastronomie-là que vous taxez à 20 %, madame le secrétaire d'Etat !
La France est l'une des premières destinations touristiques au monde. Quand on vient faire du tourisme dans un pays - c'est comme ça ! - on consomme, on se nourrit, on va notamment au restaurant. Vous avez beau faire de la publicité, la meilleure contre-publicité, c'est la taxation de nos restaurants à 19,6 %, alors que, chez tous nos voisins, le taux maximal est de 14 %.
Enfin, au moment où vous développez une politique élargie de simplification administrative, avez-vous imaginé ce qu'est la gestion ou la comptabilité d'une entreprise de restauration dont une partie des repas est à emporter et dont l'autre est livrée quasiment à la même clientèle qui s'assoit à une table pour déjeuner ou pour dîner ? C'est d'une absurdité confondante. Et pourtant, nous n'arrivons pas à faire passer le message !
Je m'associe donc à mon collègue Yves Fréville et à tous ceux qui ont cosigné ces amendements pour demander au Gouvernement de revenir à un peu plus de raison.
Peut-être me direz-vous que cela coûterait trop cher. Mais à voir les autres dépenses qui ont défilé dans le budget, les diverses taxes qui ont frappé la nation, à commencer par la TGAP pour financer les 35 heures - 60 milliards de francs, excusez du peu ! - j'estime que traiter plus équitablement notre restauration traditionnelle eût été une bonne mesure.
M. le président. La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 92.
M. Jean-Claude Carle. Cet amendement a le même objet que ceux qui viennent d'être exposés.
Il vise à réduire le taux de TVA à 5,5 % dans un secteur important de notre économie dont le développement conditionne l'emploi durable. D'autre part, la mesure permettrait de limiter les distorsions entre les différentes formes de restauration.
M. le président. La parole est à M. Hérisson, pour présenter l'amendement n° 26.
M. Pierre Hérisson. Il est proposé la création d'un second taux réduit de TVA fixé à 14 %, applicable à la restauration traditionnelle. Le taux réduit continuerait de s'appliquer à la restauration collective et à la restauration rapide.
Cette solution permettrait, d'une part, d'atténuer les distorsions fiscales existantes, d'autre part, de relancer l'emploi dans un secteur porteur du point de vue économique.
M. le président. La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 91.
M. Jean-Claude Carle. Cet amendement de repli a le même objet que celui que vient d'évoquer M. Hérisson, c'est-à-dire créer une étape intermédiaire pour cette année.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 25, 73 rectifié, 92, 26 et 91 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, nous avons déjà fait part de la volonté du Sénat de voir cette question évoluer. Il semble à la commission particulièrement important et opportun de réitérer ce débat car le secteur de la restauration, en plus de toutes les caractéristiques qui ont été exposées par les différents orateurs, a l'aspect particulier de créer des emplois, souvent peu qualifiés, de manière substantielle. Il est donc clair que, s'agissant de services à forte densité de main-d'oeuvre, toute mesure fiscale améliorant les conditions d'exploitation créerait beaucoup d'emplois. Toutes les études le montrent.
Or nous savons bien que le Gouvernement, lorsqu'il a élaboré les mesures fiscales figurant dans le projet de loi de finances pour 2000, a sans doute beaucoup hésité entre deux secteurs, celui du bâtiment et celui de la restauration. Pour des raisons budgétaires, il ne pouvait sans doute opter pour les deux en même temps. Lors de négociations européennes, il a donc obtenu la modification de la fameuse liste de manière à y incorporer les professions du bâtiment ; de ce fait, il a renoncé à défendre l'adjonction à la liste du secteur de la restauration.
Cette question doit être à nouveau posée. Il est important qu'elle le soit. La commission des finances est favorable à une avancée en faveur du secteur de la restauration. Elle souhaite d'abord entendre le Gouvernement de sorte que Mme Parly puisse nous dire si les choses sont susceptibles d'évoluer sur le plan franco-français mais, surtout, sur le plan franco-européen. Dans le cadre des possibilités qui seront peut-être ouvertes par la présidence française, est-il concevable que cette question évolue ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 25, 73 rectifié, 92, 26 et 91 ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Comme M. le rapporteur général vient de l'indiquer, nous avons fait, à l'échelon européen, un choix qui, comme la suite l'a démontré, était judicieux. S'agissant du secteur de la restauration collective, nous ne sommes pas dans une situation dérogatoire par rapport à la plupart des Etats membres, puisqu'une dizaine d'entre eux appliquent le même taux que nous en matière de restauration.
Par ailleurs, il me semble que, désormais, nos partenaires européens, notamment l'Allemagne, sont vent debout contre une mesure de ce type. Je crois qu'il faut en tenir compte et cesser de dire que nous sommes les seuls à ne pas vouloir défendre une mesure de baisse de la TVA dans le domaine de la restauration.
Enfin, il est des arguments de fond que vous connaissez bien et qui sont les suivants : il n'y a pas de distorsion de concurrence au sein du secteur de la restauration. Selon qu'il s'agit de vente à emporter ou de produits à consommer sur place, c'est une méthode de taxation différente qui est appliquée pour une raison très simple : lorsqu'il s'agit de vente à emporter, on considère qu'une prestation de base est seule en cause, alors que lorsque le client consomme sur place, on considère qu'il y a une pluralité de services, ce qui justifie l'application du taux normal de TVA.
Sur le plan du droit, le fait que la sixième directive n'ait pas été modifiée par la nouvelle directive relative aux services à forte intensité de main-d'oeuvre fait que, juridiquement, nous sommes dans l'impossibilité d'abaisser au taux réduit la TVA sur les prestations de restauration. Si l'on se replace un seul instant sur le terrain de la distorsion de concurrence, on constate que la restauration rapide est elle-même soumise au double taux.
Lorsque vous allez dans un établissement dont je ne citerai pas le nom et qui ne propose pas des produits typiques de la restauration française, vous pouvez consommer sur place, auquel cas on vous applique le taux normal, ou bien vous pouvez emporter, auquel cas on vous applique le taux réduit.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est simple !
M. Jacques Oudin. C'est absurde !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Ce n'est pas très simple, mais ce n'est pas la seule profession qui connaisse cette méthode de double comptabilisation en fonction des prestations ! Je ne citerai pas toutes les professions qui sont dans le même cas.
J'observe par ailleurs que, malgré l'application du taux normal de TVA, la restauration est un secteur en forte progression, puisque le chiffre d'affaires de la restauration commerciale a progressé de 7 % en 1999.
J'ajoute que la restauration bénéficie, comme tous les autres secteurs, de la baisse de un point du taux normal de TVA dont nous discutons ce soir.
Enfin, je ne suis pas certaine que, parmi les différents secteurs d'activités, la restauration soit le secteur qui répercute le mieux cette réduction du taux de la TVA. Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons qu'être défavorables à des amendements de ce type.
M. le président. Quel est désormais l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis extrêmment déçu par la réponse que nous venons d'entendre.
M. Charles Revet. Vous n'êtes pas le seul !
M. Jean-Claude Carle. Tout le monde est déçu !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis extrêmement déçu, parce que j'espérais, de la part du Gouvernement au moins le témoignage d'une volonté de faire évoluer les choses. Or nous voyons bien que la position du Gouvernement consiste à ne pas évoluer du tout sur ce sujet, malgré tous les arguments qui ont été exprimés.
Madame le secrétaire d'Etat, il s'agit non pas de restauration collective ni de restauration rapide, mais de la restauration traditionnelle.
M. Charles Revet. Bien sûr !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d'un élément important pour l'attractivité de notre pays, pour notre mode de vie, pour le maintien et le développement d'un élément de notre identité à laquelle nous sommes tous attachés à l'époque de mondialisation, et je ne ferai allusion à aucun mouvement d'opinion.
Il serait donc important d'adresser un signal fort en faveur de la restauration traditionnelle dans notre pays.
Quoi qu'il en soit, mes chers collègues, la commission des finances propose aux auteurs des amendements de bien vouloir accepter de se rallier au premier de la liste. Mais, afin d'adresser aux professionnels de ce secteur un signal fort, il conviendrait de le modifier pour qu'il soit mis aux voix après l'article d'équilibre. Il s'agirait donc de l'amendement n° 25 rectifié tendant à insérer un article additionnel après l'article 15.
Je demande par ailleurs aux auteurs des amendements n°s 26 et 91 de bien vouloir les retirer. Ainsi, nous montrerions bien aux professionnels de la restauration que les sénateurs veulent faire bouger les choses.
Nous ne savons pas dans quel délai un résultat pourra être acquis, mais nous ne perdons pas de vue ce problème, nous le considérons comme très important, tant pour notre mode de vie que pour l'emploi dans notre pays.
M. le président. Monsieur Fréville, acceptez-vous la suggestion de M. le rapporteur général ?
M. Yves Fréville. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 25 rectifié sera donc appelé après l'article 15.
Monsieur Oudin, l'amendement n° 73 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin. Madame la secrétaire d'Etat, j'admire le talent dont vous avez fait preuve pour défendre une position aussi intenable que celle que vous avez défendue. Aucun de vos arguments ne pouvait sérieusement être accepté : quinze points de différence, même après la baisse d'un point, cela n'a aucune raison d'être.
Cela dit, je me rallie à la proposition de M. le rapporteur général.
J'irai même plus loin : au nom de mes collègues cosignataires, je retire l'amendement n° 73 rectifié au profit de l'amendement n° 25 rectifié de M. Hérisson, qui prévoit un taux ce 14 %. En effet, je crois qu'il sera plus facile de réaliser cette évolution en deux étapes plutôt qu'en une.
Si le Gouvernement persiste à refuser d'abaisser à 14 % le taux de la TVA pour cette activité, c'est vraiment qu'il n'a pas le souci de développer un secteur qui est pourtant essentiel pour notre économie nationale.
M. le président. L'amendement n° 73 rectifié est retiré.
Monsieur Carle, les amendements n° 92 et 91 sont-ils maintenus ?
M. Jean-Claude Carle. Je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements n°s 92 et 91 sont donc retirés.
Monsieur Hérisson, l'amendement n° 26 est-il maintenu ?
M. Pierre Hérisson. Non, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 26 est retiré.
Par amendement n° 56, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« ...) Les abonnements relatifs aux livraisons d'énergie calorifique distribuée par réseaux publics, alimentés par la géothermie et la cogénération. »
« II. - Le taux de prélèvement libératoire prévu à l'article 200 a du code général des impôts est relevé à due concurrence des pertes de recettes dues aux dispositions du I. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Nous avions déjà déposé cet amendement lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2000.
A cette occasion, on sait que deux arguments essentiels avaient été opposés à notre proposition.
Le premier argument tenait à son coût budgétaire, qui se situerait aux alentours de 100 millions de francs.
Cela semble bien modique quand on examine les conditions générales de l'équilibre des comptes budgétaires et, en regard, l'importance des plus-values de recettes engendrées par la croissance.
Le second argument que l'on nous opposera peut-être encore, à défaut de désaccord sur le fond, est celui, bien connu désormais, de l'euro-compatibilité de la mesure.
On me permettra donc de souligner encore une fois le bien-fondé de la disposition que nous préconisons.
La réduction du taux de la taxe sur la valeur ajoutée sur les abonnements aux réseaux de chaleur a pour objet essentiel de favoriser la réduction concomitante du niveau des charges de chauffage acquittées par les particuliers raccordés à ces réseaux. En effet, l'abonnement au réseau continue de représenter une part importante et parfois majoritaire du coût du chauffage dans les ensembles raccordés aux réseaux de chaleur. Une réduction du taux de TVA peut donc engendrer une réduction d'environ 7 % à 10 % de la facture acquittée.
C'est sous le bénéfice de ces observations essentielles que nous vous invitons de nouveau, mes chers collègues, à adopter cet amendement de simple bon sens qui présente de surcroît l'avantage d'encourager une utilisation rationnelle de l'énergie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini rapporteur général. Une instruction fiscale du 31 mars 1998 a confirmé que les réseaux de chaleur ne pouvaient pas, en l'état actuel des choses, bénéficier du taux réduit, et ce, en application du droit communautaire.
Sur le fond, la commission des finances partage le souci de développer les réseaux de chaleur, bien entendu, pour des raisons tant d'ordre social que d'ordre environnemental.
Nous avons déjà soutenu cette demande, et nous encourageons le Gouvernement à faire évoluer la législation communautaire sur ce point. Cela étant, nous souhaiterions entendre le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je ne suis pas en désaccord avec les auteurs de l'amendement qui vient d'être défendu.
Mais, contrairement aux founitures de gaz et d'électricité, la distribution d'énergie calorifique sur les réseaux de chaleur ne figure pas sur la liste autorisée par la Commission européenne.
Le Gouvernement a demandé à la Commission, par lettre, de bien vouloir l'intégrer, mais la Commission lui a répondu que cela n'était pas possible actuellement. Dans la situation où nous sommes, sauf à enfreindre le droit communautaire, nous ne pouvons donc pas envisager d'appliquer le taux réduit à ce type de livraison d'énergie.
Je vous confirme cependant que nous ferons nos meilleurs efforts pour obtenir de la Commission, notamment lors de la présidence française, l'extension du taux réduit de TVA à ce type de prestations.
M. Michel Moreigne. Très bien !
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini rapporteur général. Compte tenu de l'engagement du Gouvernement de faire ses « meilleurs efforts », peut-être nos collègues vont-ils faire confiance au Gouvernement et retirer leur amendement.
M. le président. L'amendement n° 56 est-il maintenu, monsieur Foucaud ?
M. Thierry Foucaud. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 56 est retiré.
Par amendement n° 74 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Fournier, Joyandet, Murat, Neuwirth, Ostermann, de Richemont, Trégouët, Valade et Cornu proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété, in fine, par un alinéa ainsi rédigé :
« i) Le droit d'utilisation d'installations sportives ».
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Cet amendement vise à favoriser l'accès des jeunes aux installations sportives et à la pratique du sport, qui est un puissant facteur d'intégration, en appliquant le taux réduit de TVA aux droits d'utilisation d'équipements sportifs, et cela quel que soit leur système de gestion.
Cette proposition ne posant par ailleurs aucun problème d'incompatibilité avec nos engagements européens, je souhaite donc qu'elle recueille l'avis favorable de la commission et du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est favorable à cet amendement, d'autant qu'il est compatible avec la législation communautaire.
En outre, sauf erreur de ma part, à l'occasion de la préparation du projet de loi de finances pour 2000, Mme Marie-George Buffet nous avait indiqué qu'elle y était favorable.
Il faut donc voter cette mesure, dont le coût, s'il est certes difficile à chiffrer, est sans doute inférieur à 500 millions de francs et se situe probablement autour de 300 millions de francs.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, dans la mesure où la plupart des activités sportives sont exercées dans un cadre associatif et donc exonérées de TVA.
En outre, appliquer un tel dispositif favoriserait les organismes à but lucratif, ce qui n'est pas notre intention.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les professionnels apprécieront !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 74 rectifié.
M. Jacques Oudin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Madame le secrétaire d'Etat, j'ai bien noté, malheureusement, que vous faisiez une distinction entre les systèmes de gestion, bien que j'aie pris la précaution, en présentant l'amendement, de bien préciser « quel que soit leur système de gestion ».
Il est vrai que les installations sportives gérées par des associations ou des communes ne sont pas assujetties à la TVA ; mais il suffit qu'elles soient concédées ou que leur mode de gestion change pour qu'elles le deviennent !
La pratique sportive - on en revient au débat que nous avons eu à propos de la restauration - va donc être l'objet d'une discrimination uniquement en fonction du mode de gestion, et non dans la volonté affichée du développement de la pratique sportive elle-même.
Nous retrouvons ce genre de discrimination pour des piscines, pour des tennis et - pourquoi pas ? - pour des clubs hippiques, etc. Pardonnez-moi, madame le secrétaire d'Etat, mais je trouve que vous prenez une position qui n'est en faveur ni de la jeunesse, ni des sportifs, ni de l'équité de nos concitoyens face au développement de la pratique sportive !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 74 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 3.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 81 rectifié est présenté par MM. Girod et Bimbenet.
L'amendement n° 97 rectifié est déposé par M. du Luart et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... - Les remboursements et les rémunérations versés par les communes ou leurs groupements aux prestataires au titre des dépenses occasionnées par la prise en charge, en lieu et place des propriétaires riverains, du balayage des voies livrées à la circulation publique visées à l'article L. 2331-3 a 3° du code général des collectivités territoriales, à l'article 1528 du présent code et 317 de l'annexe II du présent code. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par le relèvement à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Bimbenet, pour défendre l'amendement n° 81 rectifé.
M. Jacques Bimbenet. Le taux de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à la distribution de l'eau, à l'assainissement, aux transports urbains, à la collecte, au tri et au traitement des déchets est en France de 5,5 %.
Le taux applicable aux opérations de nettoiement des voies publiques reste fixé à 19,6 %.
Pourtant, une directive européenne n° 92-77 du 19 octobre 1992 avait inscrit, dans la liste des services pouvant bénéficier du taux réduit de TVA, les services fournis dans le cadre du nettoyage des voies publiques.
Cette mesure permettrait de réduire de 15 % la facture des collectivités locales sur ces opérations, diminuerait de 15 % le coût réel des emplois concernés dans les entreprises de nettoiement, encouragerait le développement de ces emplois faiblement qualifiés et permettrait d'offrir des débouchés aux chômeurs les plus difficiles à insérer sur le marché de l'emploi.
M. le président. La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 97 rectifié.
M. Jean-Claude Carle. Je n'ai rien à ajouter à ce qui vient d'être excellemment développé par notre collègue M. Bimbenet.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, convaincue par les arguments qui ont été développés, est favorable à cette mesure qui, se répercutant sur les budgets des collectivités territoriales, permettra à ces dernières de mieux assumer leurs missions et participera de leurs efforts de gestion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
D'abord, il s'agit d'une possibilité et non d'une obligation qui est proposée dans la directive.
De plus, cette disposition ne bénéficierait qu'aux collectivités qui ont recours à la sous-traitance et qui donc passent par l'intermédiaire d'une entreprise privée. A l'inverse, elles défavoriserait celles qui assurent elles-mêmes le service.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 81 rectifié et 97 rectifié, acceptés par la commission et repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 3.
Par amendement n° 84, M. Nogrix propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 2° du 2 de l'article 298 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cependant, par exception aux dispositions prévues par ces articles, n'est pas comprise dans la valeur imposable au titre de la taxe sur la valeur ajoutée le montant de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Avec l'envolée du prix du pétrole et une fiscalité particulièrement lourde, la facture de carburant de chaque français s'est alourdie, en un an, de 1 000 francs en moyenne. Depuis le mois de janvier 1999, le prix de l'essence a augmenté de plus de 25 %.
La hausse du prix du pétrole n'explique pas tout, en effet, puisque, comme chacun le sait, pour chaque litre de carburant vendu, près de 80 % du prix va directement dans les caisses de l'Etat.
La voiture est ainsi taxée comme si elle constituait encore de nos jours un bien de luxe. Madame le secrétaire d'Etat, ce n'est pourtant plus le cas. La voiture représente un bien de consommation indispensable à tous les travailleurs français, quel que soit leur niveau de revenu.
Eminemment antisociale, la taxation de l'essence doit absolument être revue à la baisse : c'est en tout cas - vous le savez - le souhait exprimé par les Français dans un récent sondage.
Parmi les réformes envisageables figure la suppression de la TVA perçue sur la taxe intérieure sur les produits pétroliers, qui constitue une taxe sur une taxe. Cette suppression réduirait le prix des carburants, selon les produits, de 50 à 80 centimes par litre - c'est ce que réclament, je le répète, tous les Français - alors qu'avec la baisse de la TVA de 1 %, gadget fiscal que vous nous proposez, le sans plomb coûte 6 centimes de moins seulement.
Par le présent amendement, nous voulons permettre aux Français de se rendre sur leur lieu de travail en payant un peu moins de taxes.
M. Charles Revet. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Notre collègue M. Nogrix a mis l'accent sur un réel problème. Il est vrai que payer l'impôt sur l'impôt, la TVA sur une autre taxe, - en l'occurrence la TIPP - peu apparaître paradoxal.
En fait, si la France n'est pas la seule à connaître une telle situation, cela ne rend pas les choses plus faciles à expliquer à l'opinion publique ! C'est bien l'article 11 A de la sixième directive TVA de 1977 qui prévoit que les impôts payés, à l'exception de la TVA elle-même, sont compris dans la base d'imposition à la TVA.
La question posée par M. Nogrix s'explique si l'on tient compte de l'effet d'amplification joué par la TVA, notamment en 1999, puisque la croissance s'est répercutée sur la TIPP, mais aussi sur la TVA, et qu'au bout du compte ce sont les usagers, donc les consommateurs de produits pétroliers, qui ont payé davantage.
Lorsque j'affirmais, dans la discussion générale, que plus de 70 % de l'augmentation de la richesse nationale avait été consacrée, en 1999, au paiement des prélèvements obligatoires, cet élément précis que nous évoquons a joué un rôle non négligeable d'amplification fiscale des résultats de la croissance.
Dans l'état actuel du droit européen, nous ne pouvons pas, sur le strict plan juridique du respect de nos engagements internationaux, suivre M. Nogrix, mais le problème qu'il pose devrait, me semble-t-il, se traduire par une véritable réflexion sur le niveau de la fiscalité pétrolière, et sans doute faudrait-il que - par le biais d'une remise à plat des divers éléments de la politique fiscale que nous pourrions appeler de nos voeux - cette question soit traitée en toute clarté.
La commission des finances avait souhaité, lors de la discussion du budget 2000, mettre l'accent sur ce que nous avions appelé la « fiscalité implicite », c'est-à-dire les augmentations automatiques de fiscalité résultant du jeu des règles existantes telles que les seuils qu'on ne relève pas, et, comme ici, le rendement de l'impôt qui s'accroît, qui fait en quelque sorte « boule de neige », en fonction des données de la conjoncture.
Mon cher collègue, je crois que vous avez raison de poser cette question qui, pour l'opinion publique, est une question particulièrement sensible. La commission est par avance intéressée par les éléments de réponse que le Gouvernement pourra nous livrer, mais, dans l'état actuel des choses, nous serons tenus, par le droit, de vous demander tout à l'heure de retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Nous comprenons fort bien l'objectif fixé. Nous pensons toutefois que le moyen est inopérant. C'est la raison pour laquelle Laurent Fabius vous a indiqué qu'il souhaitait rencontrer l'ensemble des pétroliers, et il le fera dès vendredi, parce que le problème se situe bien là.
Le rapporteur général a fort bien rappelé les raisons pour lesquelles le moyen était inopérant. Nous sommes obligés, surtout à la veille de prendre la présidence du Conseil de l'Union européenne, de respecter la législation communautaire en la matière, selon laquelle tous les impôts, y compris la TIPP, doivent entrer dans l'assiette de taxation à la TVA. C'est une obligation qui s'impose à nous.
Selon vous, la mesure de baisse d'un point de TVA dont nous discutons ce soir est un gadget fiscal. Je suis un peu surprise par cette terminologie. C'est un gadget de 30 milliards de francs en année pleine alors que la mesure que vous nous proposez vaut 33 milliards de francs. Gadget pour gadget, je ne sais pas, en l'occurrence, lequel est le plus efficace.
Enfin, je rappelle que la baisse d'un point de la TVA a eu un effet de baisse sur les prix à la pompe, comme cela s'est constaté en avril, même si d'autres effets que nous connaissons bien peuvent malheureusement jouer dans l'autre sens.
M. le président. Monsieur Nogrix, cédez-vous à l'invitation de M. le rapporteur général ?
M. Philippe Nogrix. Comment pourrais-je faire autrement devant tant de bons raisonnements ? Ce qui m'ennuie, c'est que le Français qui travaille, lui, les comprendra d'autant moins qu'il doit, pour faire le plein, payer de 400 francs à 500 francs ! Et que dire des transporteurs routiers qui subissent la concurrence des transporteurs étrangers, pourtant européens ? Ces derniers payent le gasoil 3 francs ou 3,10 francs et passent la frontière avec des réservoirs qui, de 200 litres au départ, sont maintenant de 800 litres ! De plus, ils traversent l'Europe avec du pétrole portugais, qui est beaucoup moins cher.
Il est dommage que, pour des raisons de droit que personne ne comprendra, en dehors des spécialistes qui sont réunis ici ce soir, le Français soit obligé de continuer à payer l'essence au prix auquel il la paye !
Je retire néanmoins l'amendement n° 84.
M. le président. L'amendement n° 84 est retiré.

Article 3 bis



M. le président.
« Art. 3 bis . - Au III de l'article 42 de la loi de finances rectificative pour 1996 (n° 96-1182 du 30 décembre 1996), les mots : "du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "à compter du 1er janvier 1997". » - (Adopté.)

Article 4



M. le président.
« Art. 4. - A. - Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 1137 ainsi rédigé :
« Art. 1137. - Les acquisitions de propriétés en nature de bois et forêts et de terrains nus non frappés d'interdiction de boisement, constatées par un acte authentique signé avant le 1er janvier 2003, sont exonérées de toute perception au profit du Trésor si l'acquéreur prend l'engagement dans l'acte de l'acquisition de reboiser les terrains nus dans un délai de cinq ans et de présenter dans le même délai une des garanties de bonne gestion prévues aux septième à dixième alinéas de l'article L. 101 du code forestier.
« Lorsque, postérieurement à la signature de l'acte, une disposition législative ou réglementaire ou une décision administrative édicte une interdiction de boisement, l'acquéreur est délié de son engagement. »
« B. - Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 1840 G decies ainsi rédigé :
« Art. 1840 G decies. - I. - En cas de manquement à l'un des engagements pris dans les conditions prévues à l'article 1137, l'acquéreur est tenu d'acquitter l'imposition dont il avait été exonéré et, en outre, un droit supplémentaire de 1 %. »
« II. - Les infractions visées au I sont constatées par des procès-verbaux dressés par les agents du service départemental de l'agriculture. »
« C. - Les pertes de recettes résultant pour les départements de l'application du A sont compensées par une majoration à due concurrence du prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale.
« Pour chaque département concerné, la compensation est égale, au titre d'une année, au montant des droits déterminés en appliquant aux bases relatives aux acquisitions, constatées par acte authentique signé à compter de la date de publication de la présente loi et exonérées au titre de l'année considérée en application de l'article 1137 du code général des impôts, le taux en vigueur dans le département à la date de publication de la présente loi.
« La compensation est versée aux départements l'année suivant celle de la naissance des droits à compensation. »
« D. - La perte de recettes résultant de l'application du A pour les communes visées à l'article 1584 du code général des impôts et les fonds de péréquation départementaux visés à l'article 1595 bis, du même code est compensée par une majoration à due concurrence du prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale.
« Pour chaque commune ou fonds bénéficiaire, la compensation est égale, au titre d'une année, au produit résultant de l'application du taux de la taxe additionnelle visée aux articles 1584 ou 1595 bis précités aux bases relatives aux acquisitions, constatées par acte authentique signé à compter de la date de publication de la présente loi et exonérées au titre de l'année considérée en application de l'article 1137 du code général des impôts.
« La compensation est versée aux communes et fonds bénéficiaires l'année suivante celle de la naissance des droits à compensation. »
Sur cet article, je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 75 rectifié bis, MM. François, Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Darcos, Delong, Fournier, Gaillard, Ginésy, Joyandet, Murat, Neuwirth, Ostermann, de Richemont, Trégouët, Valade, Cornu et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent :
« I. - De rédiger ainsi le premier alinéa du texte présenté par le A de cet article pour l'article 1137 du code général des impôts :
« Les acquisitions à titre onéreux ou à titre gratuit de propriétés en nature de bois et forêts et de terrains nus non frappés d'interdiction de boisement, ainsi que de parts de groupement forestier représentatives des biens précités, constatées par un acte authentique signé avant le 1er janvier 2005, sont exonérées de toute perception au profit du Trésor si l'acquéreur prend l'engagement dans l'acte d'acquisition de reboiser les terrains nus dans un délai de cinq ans et de présenter dans le même délai une des garanties de bonne gestion prévues aux septième à dixième alinéas de l'article L. 101 du code forestier. En ce qui concerne les parts de groupement forestier, l'exonération est en outre conditionnée par le respect du b et du c du 3° du 1 de l'article 793 du présent code.
« II. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du I ci-dessus, de compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
« ... La perte de recettes résultant pour les communes et les départements de l'application des modifications des conditions d'exonération visées à l'article 1137 du code général des impôts est compensée par une majoration à due concurrence du prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonération relative à la fiscalité locale.
« La perte de recettes résultant pour l'Etat du paragraphe ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 28 rectifié, MM. Huriet, Faure, Badré, Hoeffel, Lorrain, Grignon, Richert, Bécot, Dulait et Barraux proposent :
« A. - Dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 4 pour l'article 1137 du code général des impôts, après les mots : « les acquisitions », d'insérer les mots : « à titre onéreux ou à titre gratuit » ;
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter l'article 4 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... La perte de recettes pour les collectivités publiques résultant de l'extension de l'exonération de droits à l'ensemble des acquisitions de parcelles boisées est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 29 rectifié, MM. Huriet, Faure, Badré, Hoeffel. Lorrain, Grignon, Richert, Bécot, Dulait et Barraux proposent :
« A. - Dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 4 pour l'article 1137 du code général des impôts, après les mots : « non frappés d'interdiction de boisement », d'insérer les mots : « ainsi que de parts de groupement forestier représentatives des biens précités » ;
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes pour les collectivités publiques résultant de l'extension de l'exonération de droits au profit des acquisitions de parts de groupement forestier est compensée à due concurrence par le création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 3, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
« I. - Dans le premier alinéa du texte présenté par le A de l'article 4 pour l'article 1137 du code général des impôts, de remplacer les mots : « avant le 1er janvier 2003, » par les mots : « avant le 1er janvier 2005, ».
« II. - Pour compenser la perte de recttes résultant du I ci-dessus, de compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
« E. - La perte de recettes résultant pour les communes et les départements de la prolongation de deux ans du dispositif d'exonération est compensée par une majoration à due concurrence du prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale.
« F. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du E ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 31 rectifié, MM. Huriet, Faure, Badré, Hoeffel, Lorrain, Grignon, Richert, Bécot, Dulait et Barraux proposent :
A. - Dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 4 pour l'article 1137 du code général des impôts, de remplacer la date : « 1er janvier 2003 » par la date : « 1er janvier 2005 ».
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du report au 1er janvier 2005 de l'exonération de droits relatifs aux acquisitions de bois et forêts sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 30 rectifié, MM. Huriet, Faure, Badré, Hoeffel, Lorrain, Grignon, Richert, Bécot, Dulait et Barraux proposent de compléter le second alinéa du texte présenté par l'article 4 pour l'article 1137 du code général des impôts par une phrase ainsi rédigée :
« « En ce qui concerne les parts de groupement forestier, l'exonération est en outre conditionnée par le respect du b et du c du 3° du 1 de l'article 793 du présent code. »
La parole est à M. Cornu, pour défendre l'amendement n° 75 rectifié bis .
M. Gérard Cornu. Les parcelles très sinistrées par les ouragans de décembre 1999 resteront improductives pendant une période d'au moins trente ans. Ces parcelles ne procureront donc pas aux héritiers ou donataires qui les recevront les revenus nécessaires pour couvrir les frais de gestion et de remise en valeur qu'ils devront engager.
De nombreux héritiers ou légataires, qui auront supporté les frais occasionnés par la mutation, ne disposeront pas, ensuite, de financement nécessaire pour l'exercice de la gestion et la remise en valeur des parcelles très sinistrées, alors que la gestion durable de la forêt l'exige.
Afin de permettre la régénération des parcelles forestières dans des conditions financièrement suppportables pour les héritiers, donataires ou légataires, il est nécessaire de réduire la charge fiscale que représentent pour eux les mutations à titre gratuit.
La date du 1er janvier 2003 est manifestement trop rapprochée pour permettre la restructuration des parcelles sinistrées lors de la tornade de décembre 1999. Cette date ne laisse pas non plus le temps nécessaire à l'organisation d'une mutation à titre gratuit au sein d'une famille ou d'un groupement forestier dont la propriété forestière a été sinistrée par la tornade.
En effet, les sylviculteurs sinistrés ainsi que les organismes de la forêt privée et l'administration forestière ont d'évidentes préoccupations de court terme liées à l'urgence, pour l'exploitation, le stockage des bois et la reconstitution des peuplements.
Cela justifie amplement la prolongation du délai jusqu'au 1er janvier 2005.
M. le président. La parole est à M. Dulait, pour présenter les amendements n°s 28 rectifié et 29 rectifié.
M. André Dulait. L'amendement n° 28 rectifié concerne également les parcelles très sisnitrées par les ouragans de décembre 1999, qui resteront improductives pendant une période d'au moins trente ans et ne procureront donc pas aux héritiers ou donataires qui les recevront les revenus nécessaires pour couvrir les frais de gestion et de remise en valeur qu'ils devront engager.
De nombreux héritiers ou léghataires qui auront supporté les frais occasionnés par la mutation ne disposeront pas, ensuite, du financement nécessaire pour la gestion et la remise en valeur de ces parcelles, alors que la gestion durable de la forêt l'exige.
Afin de permettre la régénération des parcelles forestières dans des conditions financièrement supportables pour les héritiers, donataires ou légataires, il est nécessaire de réduire la charge fiscale que représentent pour eux les droits de mutation à titre gratuit.
L'amendement n° 29 rectifié vise la perte de recettes pour les collectivités publiques résultant de l'extension de l'exonération des droits au profit des acquisitions de parts de groupement forestier. Il est proposé de la compenser à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° 3.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le retire, monsieur le président, et j'expliquerai pourquoi en donnant l'avis de la commission sur les autres amendements.
M. le président. L'amendement n° 3 est retiré.
La parole est à M. Dulait, pour défendre les amendements n°s 31 rectifié et 30 rectifié.
M. André Dulait. S'agissant de l'amendement n° 31 rectifié, la date du 1er janvier 2003 est manifestement trop proche pour permettre la restructuration des parcelles sinistrées lors de la tempête que nous évoquions à l'instant. Cette date du 1er janvier 2003 ne laisse pas non plus le temps nécessaire à l'organisation d'une mutation à titre gratuit au sein d'une famille ou d'un groupement forestier dont la propriété forestière a été sinistrée par la tornade.
En effet, les sylviculteurs sinistrés ainsi que les organismes de la forêt privée et l'administration forestière ont des préoccupations de court terme, liées à l'urgence pour l'exploitation, le stockage des bois et la reconstitution des peuplements, ce qui justifie amplement le report du délai au 1er janvier 2005.
Quant à l'amendement n° 30 rectifié, il se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 75 rectifié bis, 28 rectifié, 29 rectifié, 31 rectifié et 30 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tous ces amendements sont excellents, mais il en est un qui est encore meilleur que les autres parce qu'il dit tout, et c'est l'amendement n° 75 rectifié bis.
Ces différents amendements visent en fait trois objectifs.
Il s'agit, en premier lieu, d'inclure les mutations à titre gratuit dans le dispositif d'exonération temporaire des droits sur les acquisitions de propriétés en nature de bois et forêts et de terrains nus destinés à être reboisés. Cela paraît parfaitement légitime, car les donataires ne bénéficient actuellement que d'une exonération partielle.
Il s'agit, en deuxième lieu, d'étendre ce dispositif aux acquisitions de parts de groupements forestiers représentatifs de propriétés en nature de bois et forêts et de terrains nus non frappés d'interdiction de boisement.
Il s'agit, en troisième lieu, de prolonger de deux ans l'appication de ce dispositif.
Je confirme donc l'avis favorable de la commission sur l'amendement n° 75 rectifié bis et j'invite les auteurs des autres amendements à s'y rallier.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je partage l'avis de M. le rapporteur général au moins sur un point : effectivement, l'amendement n° 75 rectifié bis dit tout ! (Sourires.) De là à considérer que c'est le meilleur... (Nouveaux sourires.)
En ce qui concerne l'élargissement aux acquisitions à titre gratuit, il me semble que les dispositions actuelles du code général des impôts répondent à la préoccupation qui a été exprimée en prévoyant une dispense du paiement des droits à concurrence des trois quarts, ce qui est certe partiel, mais tout de même très généreux.
S'agissant de l'extension proposée en faveur des parts de groupements forestiers, l'exonération prévue repose sur l'état physique actuel des parcelles destinées à être reboisées et est indépendante de la qualité de l'acquéreur.
Enfin, pour ce qui est de l'allongement de la durée d'application du dispositif, je dirai qu'un dispositif temporaire est, par nature, destiné à être incitatif. Par conséquent, en allonger la durée d'application revient à en réduire le caractère incitatif. Compte tenu des délais qui sont nécessaires pour permettre le reboisement des forêts, il me paraît important d'inciter fortement les personnes qui le souhaitent à participer à la reconstitution du domaine forestier.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l'ensemble de ces amendements, y compris à l'amendement n° 75 rectifié bis , qui résume effectivement tous les autres.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 75 rectifié bis , accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 28 rectifié, 29 rectifié, 31 rectifié et 30 rectifié n'ont plus d'objet.
Par amendement n° 4, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de compléter le I du texte présenté par le B de l'article 4 pour l'article 1840 G decies du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« Les manquements aux garanties ou à l'engagement prévus au présent article ne pourront être retenus contre le propriétaire lorsque ces manquements résultent d'éléments qui ne sont pas de son fait. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 4 ne contient aucune disposition permettant de garantir les droits de l'acquéreur en cas de manquement à l'engagement prévu au paragraphe A et qui ne résulterait pas du fait de l'acquéreur. Or cette disposition, même si elle figure déjà dans le code forestier, mérite d'être explicitée dans le présent article, afin de protéger de manière certaine les intérêts et les droits des acquéreurs bénéficiant de cette mesure d'exonération temporaire.
C'est en fait, madame le secrétaire d'Etat, un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Nous comprenons tout à fait la motivation de cet amendement, et nous y souscrivons sur le fond. Simplement, la disposition proposée figure d'ores et déjà dans le code forestier, et elle est reprise dans le projet de loi d'orientation sur la forêt.
Par ailleurs, dès lors que les engagements qui sont pris par les acquéreurs sont les garanties de bonne gestion prévues par le code forestier et que leur contrôle relève de la compétence du service départemental de l'agriculture, je pense que c'est bien dans le code forestier que cette disposition doit figurer.
Dans ces conditions, l'amendement me paraît redondant, et j'émets un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 4



M. le président.
Je suis sais de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 32 rectifié, MM. Huriet, Faure, Badré, Hoeffel, Lorrain, Grignon, Richert, Bécot, Dulait et Barraux proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Pour le calcul de l'impôt sur le revenu, par dérogation au 1° de l'article 156 du code général des impôts, les propriétaires de parcelles en nature de bois et forêts sinistrées par les ouragans de décembre 1999 où le volume des bois cassés ou renversés est supérieur à 70 % du volume existant sur pied précédemment peuvent déduire de leur revenu global de l'année 2000 et des neufs années suivantes, en compensation du trop versé d'impôts au cours des années précédentes, une somme forfaitaire égale au revenu cadastral au 31 décembre 1998 des parcelles considérées, multiplié par le nombre d'années suivantes :
« - 10 ans pour les peupliers ;
« - 20 ans pour les résineux ;
« - 35 ans pour les feuillus autres que les peupliers.
« Lorsque le volume des bois cassés ou renversés est compris entre 30 % et 70 %, cette somme forfaitaire à déduire est réduite de moitié.
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 76 rectifié, MM. François, Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Darcos, Delong, Fournier, Gaillard, Ginésy, Joyandet, Murat, Neuwirth, Ostermann, de Richemont, Trégouët, Valade et Cornu proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Pour le calcul de l'impôt sur le revenu, par dérogation au 1° de l'article 156 du code général des impôts, les propriétaires de parcelles en nature de bois et forêts sinistrés par les intempéries des mois de novembre et décembre 1999, où le volume de bois cassés ou renversés est supérieur à 70 % du volume existant sur pied précédemment, peuvent déduire de leur revenu global de l'année 2000 et des neuf années suivantes, en compensation du trop payé d'impôts au cours des années précédentes, une somme forfaitaire égale au revenu cadastral au 31 décembre 1998 des parcelles considérées, multiplié par le nombre d'années suivantes : dix années pour les peupliers, vingt années pour les résineux et trente-cinq années pour les autres feuillus. Lorsque le volume de bois cassés ou renversés est compris entre 30 % et 70 %, cette somme forfaitaire est réduite de moitié. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 32, rectifié, est-il soutenu ?...
La parole est à M. Oudin, pour défendre l'amendement n° 76 rectifié.
M. Jacques Oudin. Dans le cycle de production d'une parcelle boisée, qui va de vingt-cinq ans pour les peupliers à cent cinquante ans pour les chênes, seuls 50 % de la production de bois de l'ensemble du cycle sont prélevés par les éclaircies. Les 50 % restant sont récoltés à la fin du cycle, lors de la coupe définitive, et, s'agissant de bois sélectionnés pour leur qualité et leur dimension optimale, ils représentent 75 % du revenu de l'ensemble du cycle.
Le revenu cadastral forestier forfaitaire, base de l'impôt sur le revenu et de l'impôt foncier, est calculé comme le revenu moyen annuel de l'ensemble du cycle. Ainsi, les propriétaires forestiers paient durant des décennies, avant la coupe définitive, des impôts basés sur un revenu qu'ils ne percevront effectivement, pour l'essentiel, qu'à la coupe définitive. Lorsqu'il s'agit de chênes, par exemple, ce sont plusieurs générations de contribuables qui sont concernés !
Les chablis de 1999 font que les propriétaires forestiers sinistrés ne percevront jamais les revenus escomptés de l'exploitation définitive de peuplements qui représentaient l'essentiel du revenu de dizaines d'années, sur lequel ils ont été imposés par avance.
L'équité fiscale exige que leur soit restitué le montant des impôts trop versé pour leurs parcelles sinistrées. A ce titre, il est proposé de procéder par déduction sur le revenu global des années ultérieures. Le montant à déduire, pour les parcelles sinistrées à plus de 70 %, est évalué forfaitairement aux deux tiers du revenu cadastral normal déclaré durant quinze ans pour les peupliers, trente ans pour les résineux et cinquante ans pour les autres feuillus. Cela revient à déduire dix fois le revenu cadastral pour les peupliers, vingt fois pour les résineux et trente-cinq fois pour les autres feuillus.
Ces explications, peut-être un peu longues, montrent au moins qu'il est nécessaire de faire quelque chose pour ces exploitants forestiers.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de rembourser aux producteurs forestiers les impôts sur le revenu qu'ils ont versés par avance à l'Etat, et à tort puisque ces impôts étaient attachés à des revenus qui, finalement, ont été très fortement réduits, voire supprimés par les effets des tempêtes.
Il est proposé de procéder par déduction sur le revenu global des années ultérieures. Le montant à déduire pour les parcelles sinistrées à plus de 70 % serait évalué forfaitairement aux deux tiers du revenu cadastral déclaré durant dix ans pour les peupliers, vingt ans pour les résineux et trente-cinq ans pour les autres feuillus.
Madame la secrétaire d'Etat, nous vous demandons de faire un bon geste pour les exploitants forestiers. Quand on voyage dans certaines régions françaises aujourd'hui, on est vraiment catastrophé par les dégâts considérables qui ont été causés par les tempêtes. Des exploitations entières ont été rayées de la carte. C'est une mesure de justice fiscale.
Je crois savoir qu'il n'est pas exclu que, par voie d'instruction administrative, un dispositif de même nature soit adopté. Mais, madame la secrétaire d'Etat, vous ne nous en voudrez pas de préférer la loi à l'instruction administrative.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. M. le rapporteur général a tout à fait raison de rappeler que l'état de nos forêts est, c'est le cas de le dire, tout à fait sinistre. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a pris d'importantes mesures pour tenter de remédier à la situation actuelle. Je n'y reviendrai pas longuement, vous les connaissez. Je citerai simplement un chiffre : une enveloppe de 6 milliards de francs d'aides a été affectée sur dix années à la reconstitution de la forêt, indépendamment d'aides fiscales importantes.
Pour aller droit au but et répondre au problème qui est posé par M. Oudin, je dirai qu'effectivement une instruction administrative est en cours de préparation ; elle devrait permettre aux propriétaires forestiers qui ont été sinistrés lors des tempêtes de 1999 de déduire de leur bénéfice forfaitaire forestier les charges exceptionnelles qu'ils auront effectivement suportées, c'est-à-dire celles qui ne sont pas couvertes par une indemnité ou par une subvention.
Il s'agit là d'une mesure importante qui a été décidée pour les raisons évidentes rappelées tout à l'heure, c'est-à-dire l'ampleur des dégâts causés par les tempêtes de décembre dernier.
En outre, si le bénéfice n'était pas suffisant pour permettre la déduction de l'intégralité du montant de ces charges, l'excédent serait déductible des bénéfices forestiers sur les neuf années suivantes.
Il s'agit, comme vous pouvez le constater, d'un dispositif important qui s'ajoute donc aux mesures d'aide que je viens de rappeler très brièvement.
Il n'est pas envisageable d'aller au-delà en autorisant une imputation sur le revenu global d'une somme forfaitaire et représentative de la restitution du forfait forestier précédemment imposé au titre des parcelles sinistrées. En effet, il s'agirait non plus d'une mesure de reconstitution des forêts particulièrement touchées par les intempéries, mais clairement d'un dispositif de défiscalisation par le biais d'une imputation sur le revenu global qui bénéficierait prioritairement aux contribuables les plus fortunés. Tel n'est pas notre objectif.
Enfin, je vois mal comment on pourrait parler de trop-perçu sur le passé. Il n'y a pas lieu, en effet, de remettre en cause indirectement les impositions forfaitaires antérieures qui sont représentatives des ventes de bois déjà intervenues.
J'ajoute que le forfait forestier, qui est calculé sur la base très favorable du revenu cadastral, sera réduit, à partir de l'année 2000, à hauteur du dégrèvement de taxe foncière qui a été obtenu en raison de ce sinistre.
A la lumière de toutes ces explications, je souhaite le retrait de cet amendement.
M. Jacques Oudin. Oh !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 76 rectifié.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Madame le secrétaire d'Etat, je ne comprends pas cette position. Au fond, on pourrait imaginer que des instructions administratives puissent répondre aux problèmes posés encore que, sur ce sujet, on ne peut pas dire, comme vous l'avez prétendu tout à l'heure, que la pratique administrative ait fait preuve de célérité dans cette affaire de tempêtes...
M. Charles Revet. C'est le moins qu'on puisse dire !
M. Jean-Pierre Raffarin... notamment en matière de sylviculture. Le préfet de la Charente-Maritime lui-même, récemment, dans une déclaration à la presse, reconnaissait qu'il n'avait pas pu dépenser plus de 36 % des dotations prévues par le plan d'urgence pour son propre département, et ce en cinq mois : 36 % de consommation de crédits pour des mesures d'urgence face à une population sinistrée !
Votre intervention, madame le secrétaire d'Etat, fait référence à des difficultés passagères. Vous voyez bien que, en la circonstance, tel n'est pas le cas : il s'agit d'entreprises qui sont complètement à restructurer et dont une grande partie n'a plus d'avenir. Regardons les choses en face ! Compte tenu des problèmes que pose, notamment, le morcellement de la propriété dans un grand quart sud-ouest de la France, nous voyons bien qu'il s'agit d'activités dont la pérennité est entièrement remise en cause. Cet amendement, s'il était adopté, permettrait au moins aux professionnels sinistrés de retrouver un peu de confiance dans l'avenir.
Même les rares professionnels qui ont accumulé quelques bénéfices au cours des trois dernières années ont désormais des besoins d'investissement considérables pour assurer la pérennité de leur entreprise. Il faut vraiment faire un geste par la loi. Grâce à cet amendement, c'est possible ! (Très bien ! sur les travées des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 76 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 4.
Par amendement n° 33 rectifié, MM. Huriet, Faure, Badré, Hoeffel, Lorrain, Grignon, Richert, Bécot, Dulait, Arnaud, Nogrix, Souplet, Franchis, Huchon, Bohl, Moinard, Jarlier, Vecten, Amoudry, Hérisson, Deneux, Branger, Hyest, Machet et Barraux proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - 1° Un arrêté conjoint du ministre chargé des forêts et du ministre chargé des finances fixe par région le barème déterminant forfaitairement à l'hectare la valeur des charges exceptionnelles d'exploitation des bois et des pertes de récolte supportées par les propriétaires de parcelles en nature de bois et forêts sinistrées par les ouragans de décembre 1999, lorsque le volume des bois cassés ou renversés est supérieur à 30 % du volume de bois existant sur pied précédemment.
« Pour le calcul de l'impôt sur le revenu des producteurs forestiers concernés, par dérogation au 1° de I de l'article 156 du code général des impôts, le déficit correspondant à la valeur forfaitaire des charges exceptionnelles et pertes de récoltes ainsi fixées est déductible du revenu global de l'année 2000 et des neufs années suivantes.
« 2° Un décret détermine les modalités selon lesquelles les personnes non imposables ou dont l'impôt sur le revenu est inférieur à un seuil qu'il fixe, ont droit au versement par l'Etat d'une aide exceptionnelle d'une valeur équivalente à la déduction fiscale prévue à l'alinéa ci-dessus et à laquelle elle se substitue.
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Cet amendement traite du sujet dont nous venons de discuter longuement. J'ai voté l'amendement précédent. Celui-ci présente l'avantage d'être beaucoup plus précis, tout d'abord dans sa rédaction. Il vise, en effet, un certain nombre de points qui tendent à rejoindre les propos tenus tout à l'heure par M. le rapporteur général, à savoir que nous préférons que la loi traite du problème.
Sans entrer dans le détail, cet amendement permettrait, tant pour la déduction fiscale que pour le calcul des charges exceptionnelles déductibles, ainsi que des conditions de mise en oeuvre, en fonction des régions et de la pratique en matière d'exploitation, de répartir plus justement les aides et les avantages susceptibles d'être accordés à la suite des tempêtes de décembre 1999.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement rejoint les voeux formulés par la commission, notamment dans le communiqué de presse qui a été diffusé le 11 janvier dernier sous les signatures du président Alain Lambert et de moi-même. Nous avions alors souhaité la mise en place d'un mécanisme de déduction du revenu forestier des charges exceptionnelles entraînées par les tempêtes. L'intention des auteurs de cet amendement rejoint tout à fait les objectifs que nous cherchions à atteindre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet le même avis que pour l'amendement n° 32 rectifié.
Je souhaite, par ailleurs, répondre très brièvement à M. Raffarin.
Monsieur le sénateur, nous n'avons pas l'intention, face à un problème que nous estimons à sa juste mesure, me semble-t-il, compte tenu des aides qui ont été mobilisées pour ce secteur, de mettre en place un dispositif général de défiscalisation. Nous partageons totalement vos objectifs, mais nous divergeons sur les moyens de résoudre le problème ainsi posé.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Le Gouvernement pourrait-il nous donner une idée de la consommation des crédits qui ont été prévus pour faire face aux dommages des tempêtes ?
M. Charles Revet. C'est une bonne question !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. La question que vous posez, monsieur le président, est complexe car différents types d'aides ont été distribuées. Par conséquent, le niveau de consommation n'est pas le même selon qu'il s'agit des aides aux collectivités locales, des aides aux entreprises ou des aides aux professionnels forestiers.
En ce qui concerne ces derniers, il est vrai que le Gouvernement s'est heurté à une difficulté spécifique, à savoir l'absence d'organisation de ce secteur économique. Cela n'a pas facilité les choses. C'est aussi l'une des raisons pour lesquelles le Gouvernement va présenter, dans les jours à venir, un projet de loi sur ce point.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Le pays n'a plus besoin de loi ; il a besoin d'efficacité !
M. Jean-Claude Carle. Exactement !
M. Charles Revet. Et pourtant, on fait tout le contraire !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Nous savons que la réponse à la question simple et courte que je vous ai posée n'est pas facile, madame le secrétaire d'Etat, mais cela doit être votre préoccupation.
Comment soutenir à longueur de journaux télévisés et d'articles de presse que l'on fait tout pour essayer de résoudre les problèmes rencontrés par nos compatriotes à la suite des tempêtes, alors que cela ne se traduit par rien sur le terrain ? Les Français ne croient plus ce qui leur est dit parce que, précisément, la volonté de l'exécutif et du législatif n'est pas à mettre en cause, mais l'efficacité des décisions prises est nulle.
Progressons sur ce sujet ! N'essayons pas de voir dans toutes les propositions faites par le Parlement des recherches de combinaison fiscale visant à je ne sais quoi. Il s'agit de faire en sorte que les problèmes rencontrés sur le terrain soient résolus. Or, dans ce domaine, madame le secrétaire d'Etat, si vous ne pouvez répondre ce soir à la question que je vous ai posée, je suis sûr que le Sénat appréciera que vous nous donniez cette réponse demain. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 33 resctifié.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Cet amendement va exactement dans le sens de ce qui vient d'être brièvement précisé par M. le président de la commission des finances.
Nous avons besoin d'efficacité ! Il est quand même difficile, madame le secrétaire d'Etat, d'accepter de laisser dire dans cet hémicycle que la profession est mal organisée, ce qui serait la cause à la fois du manque de lisibilité et du défaut de consommation des crédits.
Je crois que dans ce débat relatif aux aides au secteur forestier, comme c'était le cas pour la réduction des taux de TVA, le discours est différent, voire contradictoire, en fonction des opportunités.
Quand on voit la détermination avec laquelle a été menée la médiatisation de la réduction du taux de TVA portant sur les activités de la rénovation du bâtiment, force est de constater que le Gouvernement a bien su trouver une solution pour y parvenir.
Pour en revenir brièvement à la réduction du taux de TVA sur la restauration, que vont penser, à la prochaine rentrée scolaire, les parents d'élèves qui, compte tenu de l'action - légitime - engagée par les professionnels de la restauration traditionnelle, vont se retrouver avec un taux de TVA à 19,6 % pour la restauration scolaire et universitaire ?
On ne peut pas, dans une assemblée comme la nôtre ou à l'Assemblée nationale, en fonction des opportunités, entendre des discours qui sont parfaitement contradictoires dès lors que Bercy a fixé des directives que personne n'accepte d'assouplir. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.) M. Charles Revet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Revet.
M. Charles Revet. Je souscris, bien entendu, à ce qui a été dit par M. le président Alain Lambert. Nos concitoyens en ont - passez-moi l'expression - « ras le bol » des discours. Ce qu'ils veulent, c'est de l'action !
Permettez-moi d'appliquer ces propos à la situation que nous venons de vivre en Seine-Maritime au travers des inondations : deux morts, des centaines de maisons sinistrées. Alors que le conseil général vote dans une séance exceptionnelle des crédits spéciaux et dépose des dossiers pour une réalisation rapide, les lourdeurs des mécanismes font qu'en dépit des crédits dont nous disposons, en dépit de l'attente exacerbée de nos concitoyens, il faudra attendre un ou deux ans avant de pouvoir commencer les travaux. Dans trois mois, peut-être pleuvra-t-il autant et des personnes seront-elles sinistrées.
Comment voulez-vous que nos concitoyens comprennent de telles absurdités ? Il serait temps de songer à un peu plus de réalisme et de bon sens, et de prendre les dispositions permettant d'agir rapidement.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Mon intervention s'inscrit dans le prolongement des propos de M. Lambert. M. le Premier ministre avait évoqué un grand audit de l'action publique face à la tempête. Il serait effectivement très important que nos puissions disposer de l'ensemble des informations relatives aux procédures de l'action publique et à leur résultat s'agissant de la lutte contre les effets de la tempête.
J'ai vu un certain nombre d'exemples, y compris des exemples qui ont bien fonctionné. C'est vrai, madame la secrétaire d'Etat, quelques professions très bien organisées, comme l'ostréiculture, ont pu répondre relativement bien aux problèmes posés. Je dis « relativement bien » car ce n'est jamais totalement satisfaisant.
En revanche, s'agissant du secteur forestier, les mesures proposées ne sont pas adaptées aux problèmes, et cela ne fonctionne pas. Il faut reprendre la question.
Cela étant dit, je voudrais revenir sur ce qu'a dit M. Lambert pour appeler à une nouvelle gouvernance. je prendrai un exemple caricatural, alors que tout était bien parti : il s'agit de la pêche et du port de La Rochelle. Assez vite, le Gouvernement a évalué l'étendue des dégâts et a décidé qu'il fallait 12 millions de francs pour les bateaux qui avaient été sinistrés. C'est en effet à peu près la somme qui était nécessaire. Il s'agit donc d'une bonne décision. Ces crédits sont envoyés en quatre ou cinq semaines à la préfecture. Le préfet peut donc les engager, mais ils sont accompagnés d'une circulaire qui définit une condition d'affectation. Or, à La Rochelle pas un bateau ne correspond aux critères de la circulaire ! C'est pourquoi en cinq mois, sur les 12 millions de francs, seuls 800 000 francs ont été consommés.
Voilà le type de mauvaise gouvernance dans laquelle nous sommes et dont il faut changer les mécanismes. C'est une question non pas d'argent ou de loi mais d'efficacité ! A cet égard, je rejoins les propos de M. le président de la commission des finances. (Très bien ! sur plusieurs travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 4.
Par amendement n° 90, M. Pintat et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 200 quater, il est inséré dans le code général des impôts un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu de 50 %, au titre de la remise en état des parcs et jardins ainsi que des vergers ne générant aucun revenu agricole, les dépenses :
« - effectuées dans l'un des soixante-neuf départements cités en annexe de l'arrêté du 29 décembre 1999 portant constatation de l'état de catastrophe naturelle,
« - n'ayant fait l'objet d'aucun remboursement au titre d'un contrat d'assurance, ni d'aucune aide publique au titre des mesures gouvernementales prises pour les victimes des intempéries pendant l'année 2000,
« - effectivement supportées par les propriétaires privés pour leur résidence principale ou secondaire, et dûment justifiées par la présentation de factures d'achat de biens ou de prestations de service.
« Les dépenses de remise en état qui obéissent à ces trois conditions sont retenues dans la limite d'un plafond de 100 000 F. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Pintat.
M. Xavier Pintat. Les 26 et 28 décembre dernier, comme cela a été dit et rappelé à de nombreuses reprises, notre pays affrontait les tempêtes les plus dévastatrices qu'il ait jamais connues. En effet, soixante-neuf départements ont été déclarés en état de catastrophe naturelle et les pertes furent très lourdes pour les particuliers. Il faut rappeler qu'un grand nombre de dommages n'ont pas été couverts par les compagnies d'assurance dans le cadre de la garantie « tempête ». C'est le cas des dégâts causés aux jardins, aux parcs et aux vergers non agricoles, clôtures incluses.
La conséquence en est tristement visible. Nos concitoyens sont démoralisés et retardent les travaux de remise en état. Nos paysages sont profondément affectés. Nous pouvons aussi citer les problèmes de sécurité des lieux contre les risques d'incendie, les risques sanitaires, voire certains risques écologiques.
Aussi, par cet amendement, est-il proposé d'encourager, sans attendre, les propriétaires privés à engager des travaux par le biais d'une réduction fiscale sur l'impôt sur le revenu, parfaitement lisible, parfaitement ciblée et limitée à la seule année 2000, car il est très urgent de réagir. Je crois en effet essentiel de leur adresser un signal fort, car n'oublions pas que l'entretien des espaces extérieurs privés a un effet direct sur la qualité paysagère de notre pays. C'est un paramètre déterminant de l'activité touristique de nos territoires. Un de nos collègues a rappelé tout à l'heure que la France est effectivement l'une des premières destinations touristiques.
Tel est l'objet de cet amendement. Madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à circonstances exceptionnelles, il faut des mesures exceptionnelles !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ? M. Philippe Marini, rapporteur général. J'exprimerai deux considérations : l'une générale, l'autre concernant plus particulièrement le présent amendement.
Sur le plan général, nous sollicitons, madame le secrétaire d'Etat, des mesures d'incitation fiscale qui sont simples, qu'il s'agisse des deux amendements qui viennent d'être adoptés comme de celui-ci. Ces dispositions ne nécessitent aucun formalisme administratif particulier. En effet, il s'agit, pour des détenteurs de biens qui ont été victimes des effets des tempêtes, d'en traduire, dans des conditions précises, les conséquences dans leur situation fiscale individuelle.
Or, vous préférez l'aide publique, la subvention, avez-vous dit. Certes, la subvention est utile et nécessaire, mais ce n'est pas tout. Plusieurs de nos collègues, notamment MM. Revet et Raffarin, ont fait état des obstacles administratifs auxquels on se heurte. En effet, les dispositifs de subvention sont extrêmement lourds à manier. Toutes les étapes de la procédure administrative n'ont pas nécessairement reçu les bonnes instructions. De plus, aujourd'hui, nous sommes dans une période où l'on essaie, à tous les niveaux, de couvrir sa responsabilité, où l'on prend le minimum d'initiatives par rapport aux textes. S'agissant des circonstances que rappelait notre collègue M. Revet, pour réagir face à une situation d'urgence, il faut prendre des mesures d'urgence, et cela veut dire, en effet, prendre aussi quelques libertés par rapport à des réglementations, par rapport aux règles d'attribution de marchés, de travaux ou de prestations de services.
M. Charles Revet. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Bien entendu, compte tenu du climat que l'on connaît, il n'y a pas aujourd'hui beaucoup de volontaires dans les préfectures pour prendre des libertés avec les règles. C'est bien à cela que nous nous heurtons, et c'est cela qui vient faire obstacle à la distribution des aides attribuées par le Gouvernement et qui explique sans doute les taux de consommation, certainement beaucoup plus faibles que ce qui était prévu, des crédits publics.
Ce que nous proposons, c'est de compléter ces mesures par des dispositifs d'incitation fiscale. Or, je sens bien en vous écoutant, madame le secrétaire d'Etat, que nos philosophies diffèrent. En effet, vous nous dites que vous ne voulez pas d'optimisation fiscale, que vous ne voulez pas rendre service à des gens qui, peut-être touchés par les tempêtes, monteront des dossiers afin de payer moins d'impôts et d'améliorer leur situation fiscale globale ou personnelle.
Pour notre part, nous avons tendance à ne pas raisonner de cette manière, à considérer qu'il faut être empirique et voir la réalité des choses. Il faut, à notre sens, essayer de résoudre les problèmes rencontrés sur le terrain et ne pas accepter de voir des paysages endommagés pendant trop longtemps et des règles de sécurité mises à mal dans des espaces naturels que l'on ne pourra rétablir dans leur état initial.
Le dispositif que nous propose notre collègue M. Pintat me semble aller dans ce sens.
Toutefois, je lui demanderai, c'est la seconde considération que je voulais formuler, de bien vouloir rectifier son amendement sur un point. Au début du troisième alinéa du texte proposé, on lirait non plus : « n'ayant fait l'objet d'aucun remboursement au titre d'un contrat d'assurance, ni d'aucune aide publique », mais : « non susceptibles de bénéficier d'un remboursement au titre d'un contrat d'assurance, ni d'aucune aide publique ». Ainsi, il sera bien clair qu'il n'y avait pas de contrat d'assurance, que l'on ne pouvait pas se faire assurer et que l'on ne pouvait pas bénéficier d'une aide publique.
Sous réserve de cette rectification, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Monsieur Pintat, que pensez-vous de la suggestion de M. le rapporteur général ?
M. Xavier Pintat. J'y souscris, et je rectifie donc ainsi l'amendement.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 90 rectifié, présenté par M. Pintat et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, et tendant à insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 200 quater, il est inséré dans le code général des impôts un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu de 50 %, au titre de la remise en état des parcs et jardins ainsi que des vergers ne générant aucun revenu agricole, les dépenses :
« - effectuées dans l'un des soixante-neuf départements cités en annexe de l'arrêté du 29 décembre 1999 portant constatation de l'état de catastrophe naturelle ;
« - non susceptibles de bénéficier d'un remboursement au titre d'un contrat d'assurance, ni d'aucune aide publique au titre des mesures gouvernementales prises pour les victimes des intempéries pendant l'année 2000 ;
« - effectivement supportées par les propriétaires privés pour leur résidence principale ou secondaire, et dûment justifiées par la présentation de factures d'achat de biens ou de prestations de service.
« Les dépenses de remise en état qui obéissent à ces trois conditions sont retenues dans la limite d'un plafond de 100 000 francs. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, je comprends très bien la préoccupation que vous avez exprimée. Toutefois, cet amendement, en dépit de la sympathie que l'on peut éprouver à son égard, pose un certain nombre de difficultés majeures.
Tout d'abord, il n'est pas matériellement possible de s'assurer de la réalité du lien de causalité entre les intempéries qui ont eu lieu à la fin de l'année 1999 et les dégâts qui appelleraient les travaux qui seraient éligibles à la réduction d'impôt. (Protestations sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Patrick Lassourd. C'est un peu fort !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Or, les parcs, les jardins et les vergers nécessitent un entretien continu.
Ensuite, apprécier l'éligibilité des dépenses suppose, de la part du contribuable, de fournir un certain nombre de justificatifs pour vérifier que l'avantage fiscal dont le bénéfice est demandé ne correspond pas à des dépenses couvertes par un contrat d'assurance ou par une aide publique. Par conséquent, les services des impôts seront exposés à la difficulté de s'assurer que ces conditions sont remplies.
Enfin, cette disposition, qui vise à attribuer un avantage fiscal supplémentaire pour lequel le plafond de dépenses retenu est élevé en raison de l'importance des dépenses engagées, constituerait un précédent fâcheux et risquerait de générer des demandes d'extension à d'autres dépenses engagées du fait de la tempête et qui ne sont pas entièrement couvertes par les assurances.
Pour toutes ces raisons, je ne peux, et je le regrette, accepter cet amendement.
M. Patrick Lassourd. C'est Kafka !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 90 rectifié.
M. Philippe Nogrix. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Je ne peux pas ne pas expliquer mon vote. Je suivrai la commission car, vraiment, les arguments que j'entends ne sont pas recevables.
M. Gérard Cornu. Les bras nous en tombent !
M. Philippe Nogrix. Quelle est donc cette technocratie qui régit tout, qui ne reconnaît même pas le lien entre une tempête et les effets qu'elle cause, et qui estime, pour cette raison, ne pas pouvoir envoyer les inspecteurs des impôts vérifier le bien-fondé de telle ou telle déduction. Mais où est donc le pacte citoyen ?
M. Michel Souplet. C'est de la suspicion !
M. Philippe Nogrix. Quelle est cette suspicion permanente du citoyen selon laquelle il voudrait tirer des avantages fiscaux d'une tempête ? Je suis atterré que de telles explications soient données à des parlementaires sur des sujets qui ont fait tant de dégâts, qui ont causé tant de peine dans nos provinces. Je ne comprends vraiment pas comment on peut s'opposer à un tel amendement avec les arguments qui viennent d'être développés. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur plusieurs travées des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 90 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. Pierre Hérisson. Il n'y a pas eu un seul vote contre !
M. Patrick Lassourd. Ce n'est pas glorieux pour le Gouvernement !
M. Gérard Braun. Qu'il se décentralise dans les Vosges pendant une semaine et il verra le problème !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 4.
Par amendement n° 93, MM. Bourdin, Emorine, Pépin et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les entreprises de sciage et de première transformation du bois peuvent constituer une provision pour investissements dans les conditions suivantes :
« - la provision peut être constituée à hauteur de 70 % du bénéfice fiscal pour les entreprises redevables de l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;
« - le montant maximum de la provision est fixé à 70 millions de francs ;
« - la provision doit être consacrée dans les cinq ans de sa constitution à un investissement matériel ou organisationnel nécessaire à la production ou à la valorisation de celle-ci. A défaut, elle est réintégrée par tranches annuelles dans les résultats de l'entreprise au terme de cinq ans. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle. Le secteur de l'exploitation forestière et de la scierie, indispensable pour la valorisation des produits forestiers, a été durement éprouvé par les tempêtes de décembre 1999 qui ont abattu plus de 130 millions de mètres cubes de bois.
Cette catastrophe va bouleverser la situation des entreprises de sciage, qui devront, dans les années à venir, relever le défi de la modernisation pour développer leur offre de produits et faire face à l'augmentation future des prix de la matière première.
Il convient donc de s'assurer du dynamisme de ce secteur industriel, indispensable à la chaîne de transformation du bois, et de conserver en France le maximum de la valeur ajoutée possible apportée par ces industries.
Les entreprises ont besoin de s'engager très rapidement dans des programmes d'investissements pour développer un outil dont l'efficacité doit pallier la hausse de la matière première, qui retrouvera des cours très fermes dans un proche avenir, tout au moins on peut le penser.
Les scieries sont au centre de la valorisation de la filière du bois : les grumes de bois d'oeuvre qu'elles utilisent représentent 85 % de la valeur des produits forestiers, les produits connexes qu'elles génèrent - plaquettes, sciures, écorce - sont la matière première essentielle des industries de trituration - papier, panneaux de fibre - ou de l'utilisation énergétique collective ou industrielle. Le développement de la filière passe donc par celui des scieries.
Le besoin d'investissement en scierie est très lourd au regard des chiffres d'affaires développés. Il s'agit de l'investissement en capacité dans les zones de disponibilité de la ressource, avec le renouvellement d'outils plus performants. Il s'agit aussi de la valorisation, avec le séchage, les prédébits et les bois massifs reconstitués, qui conditionnent une véritable offre industrialisée de sciages.
Le financement des scieries est rendu difficile par la structure familiale des entreprises et par la faiblesse des fonds propres, par la nécessité de conserver à la fois des stocks importants pour la sécurité de l'approvisionnement à l'amont, des stocks intermédiaires ou des encours de fabrication, des stocks disponibles en produits finis, par la dépendance bancaire, par la disparition des mécanismes fiscaux comme la provision pour la fluctuation des cours dont l'effet sur cette catégorie d'industrie a été sous-estimé.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission comprend bien et approuve les objectifs fixés par les auteurs de l'amendement. Cela dit, elle n'a pas été en mesure, dans le peu de temps qui lui a été imparti, d'expertiser techniquement cette question visant une branche d'activité bien spécifique.
Il existe sans doute déjà différentes mesures dans le droit commun fiscal, et j'avoue ne pas avoir bien saisi à quel raisonnement ou à quel calcul correspondent les montants qui sont indiqués, tels le plafond de 70 millions de francs et le taux de 70 % du bénéfice fiscal pour la provision.
La commission souhaiterait en tout état de cause, avant d'exprimer un avis, entendre le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement partage les réserves que vient d'exprimer M. le rapporteur général. Contraire aux règles comptables en vigueur en matière de provision, cette mesure qui nécessiterait un dispositif d'encadrement technique qui serait source de complexité sur le plan fiscal et en contradiction avec la politique de simplification actuellement menée par le Gouvernement.
Elle aurait, de plus, le caractère d'une aide d'Etat et devrait donc, préalablement à son adoption, être soumise à la Commission européenne, qui est seule habilitée à apprécier sa compatibilité avec le traité.
Ces entreprises, par ailleurs, peuvent utilement recourir à des provisions existantes, notamment pour hausse des prix, provisions qui leur permettent de faire face aux variations prévisibles des matières premières dans les prochaines années.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 93.
M. le président. Quel est, en définitive, l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Compte tenu des propos tenus par Mme le secrétaire d'Etat, et notamment de l'argument tenant aux aides d'Etat, processus lourd et difficile à manier - il suppose, vous le savez, une information préalable de la Commission et des décisions de celle-ci sur la base d'une instruction complexe - j'invite les auteurs de cet amendement à le retirer pour l'instant. Et peut-être sera-t-il possible, d'ici à l'examen d'un prochain texte, éventuellement d'ici à la discussion du projet de loi de finances, de réfléchir à des mesures ciblées sur le secteur de la transformation du bois répondant de façon plus simple aux objectifs des auteurs de l'amendement.
M. le président. Monsieur Carle, l'amendement n° 93 est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Carle. J'accepte la proposition de M. le rapporteur général, et je retire cet amendement, non pas pour ne pas affronter les foudres de Bruxelles - une fois de plus, nous aurions pu les braver ; ce n'eût pas été très grave - mais parce que ces mesures sont extrêmement complexes, et que je souhaiterais, de la part du Gouvernement, l'engagement d'étudier la situation de ce secteur important de la transformation du bois.
En effet, ce secteur est confronté à une concurrence difficile, notamment par rapport aux pays du Nord, la Finlande en particulier, et aux pays de l'Est. Tout un plan de notre économie rurale est concerné : ces entreprises sont en effet souvent situées en milieu rural, et la scierie est fréquemment l'une des rares entreprises, voire la seule, dans ces communes.
M. le président. L'amendement n° 93 est retiré.

Article 5



M. le président.
« Art. 5. - I. - Le tableau de l'article 575 A du code général des impôts est ainsi rédigé :


GROUPES DE PRODUITS


TAUX NORMAL
Cigarettes 58,99
Cigares 29,55
Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes 51,69
Autres tabacs à fumer 47,43
Tabacs à priser 40,89
Tabacs à mâcher 28,16

« II. - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 1er avril 2000. »
Par amendement n° 34, MM. Borotra et Badré proposent de rédiger ainsi cet article :
« I. - Le 3° de l'article 570 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Cette remise est majorée de 0,69 % à compter du 1er avril 2000 ;". »
« II. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par le relèvement des taux de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
« III. - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Article additionnel après l'article 5



M. le président.
Par amendement n° 80, MM. Delfau, Baylet et Collin proposent d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 614 A du code général des impôts, les mots : "hors de France" et les mots : "en France" sont supprimés.
« II. - Les dispositions du I entrent en vigueur à compter de la date de publication de la présente loi. »
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Cet amendement, de nature technique, est néanmoins important et attendu par les professionnels viticoles de Languedoc-Roussillon, mais aussi d'autres régions.
La loi de finances rectificative pour 1999, notamment l'article 18, a réformé et modernisé le régime intérieur français des contributions indirectes sur les alcools et les boissons alcooliques.
Ce texte, en vue de simplifier et d'alléger les contraintes de gestion des opérateurs, a supprimé la totalité des divers titres de mouvements nationaux pour les remplacer par deux types de documents déjà utilisés par les opérateurs pour leurs opérations avec un autre Etat membre de la communauté, à savoir le document administratif d'accompagnement et le document simplifié d'accompagnement.
Afin de favoriser le contrôle des opérations de circulation des alcools et des boissons alcooliques, il est nécessaire que les nouveaux documents de transport puissent, comme les opérateurs le pratiquaient déjà avec les anciens titres de mouvement, faire l'objet d'une validation pour les échanges nationaux.
L'article 614 A du code général des impôts prévoit que le document d'accompagnement doit être validé avant l'expédition des produits hors de France et lors de leur réception en France. Il ne traite que des échanges intracommunautaires. Dans la mesure où l'usage du document administratif d'accompagnement et du document simplifié d'accompagnement est généralisé aux échanges nationaux, il apparaît nécessaire d'étendre l'obligation de validation à ces échanges.
La présente mesure de coordination permettrait donc de compléter utilement le dispositif de simplification adopté dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 1999.
En résumé, et pour donner un peu de substance à ces considérations très techniques, il est essentiel que le vide juridique consécutif à la réforme des contributions indirectes soit comblé dans les meilleurs délais afin que les opérateurs ne puissent établir des documents non validés, engendrant ainsi des risques de fraude importants et ôtant toute base juridique à l'administration des douanes pour effectuer des contrôles et sanctionner.
Je précise que cette demande est soutenue par la profession organisée, tout particulièrement par les structures de la coopération viticole.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, qui me semble puiser à bonne source, vise à réparer un oubli du Gouvernement. En effet, il est nécessaire de supprimer certaines dispositions de l'article 614 A du code général des impôts.
Cet oubli, qui est déjà ancien, a pour conséquence que les dépositaires d'alcool ne sont pas obligés de faire valider leur nouveau titre de circulation pour les produits circulant en France. Non seulement cela altère la fiabilité du contrôle, mais cela gêne aussi les dépositaires, car le titre de circulation vaut titre de reconnaissance d'appellation d'origine contrôlée.
Il s'agit donc de supprimer le cas particulier de la circulation à l'étranger, qui a subsisté par erreur, et d'aligner l'ensemble du dispositif sur un mécanisme unique et cohérent.
Aussi convient-il de saluer l'initiative de nos collègues et d'appeler le Sénat à voter cette mesure technique, qui doit être favorable à la profession des dépositaires d'alcool.
M. Gérard Delfau. Merci, monsieur le rapporteur général.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis favorable, pour toutes les bonnes raisons qui ont été exposées.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 5.

Article 5 bis



M. le président.
« Art. 5 bis . - I. - L'article 810 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les autres dispositions figurant dans les actes et déclarations ainsi que leurs annexes établis à l'occasion de la constitution de sociétés dont les apports sont exonérés en application du premier alinéa sont dispensées du droit fixe prévu à l'article 680.
« II. - Dans le 14° du 3 de l'article 902 du code général des impôts, après les mots : "minutes, originaux et expéditions", sont insérés les mots : "ainsi que leurs annexes".
« III. - Les dispositions des I et II s'appliquent aux actes et conventions passés à compter de la date de publication de la présente loi. » - (Adopté.)

Article 6



M. le président.
« Art. 6. - I. - 1. Le code général des impôts est ainsi modifié :
« a) Au premier alinéa de l'article 1599 bis, les mots : ", la taxe d'habitation" sont supprimés ;
« b) Au deuxième alinéa du I et au premier alinéa du II de l'article 1599 quinquies, les mots : ", à la taxe d'habitation" sont supprimés ;
« c) L'article 1599 quater est abrogé.
« 2. a) A compter de 2001, il est institué une dotation budgétaire afin de compenser la perte de recettes résultant du 1.
« Cette compensation est égale au produit des rôles généraux de taxe d'habitation ou de taxe spéciale d'équipement additionnelle à la taxe d'habitation émis au profit de chaque région et de la collectivité territoriale de Corse en 2000 revalorisé en fonction du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement.
« A compter de 2002, le montant de cette compensation évolue chaque année, comme la dotation globale de fonctionnement.
« b) Au II de l'article 21 de la loi de finances pour 1992 (n° 91-1322 du 30 décembre 1991), il est inséré, après le deuxième alinéa, un alinéa ainsi rédigé :
« En 2002, la compensation des exonérations visées au a du I versée au profit de chaque région et de la collectivité territoriale de Corse est égale à la compensation de l'année 2001 revalorisée en fonction du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement. A compter de 2003, le montant de cette compensation évolue chaque année comme la dotation globale de fonctionnement. »
« 3. Pour les impositions établies au titre de l'année 2000, il est accordé aux contribuables autres que ceux visés à l'article 1414 du code général des impôts un dégrèvement d'office de la totalité de la cotisation de taxe d'habitation ou de taxe spéciale additionnelle à la taxe d'habitation perçues au profit des régions ou de la collectivité territoriale de Corse.
« II. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. Au I de l'article 1636 B sexies , sont supprimés :
« a) Dans la première phrase du premier alinéa du 1, les mots : "les conseils régionaux autres que celui de la région d'Ile-de-France" ;
« b) Au premier alinéa du 2, les mots : ", les régions".
« 2. Après l'article 1636 B sexies, il est inséré un article 1636 B sexies A ainsi rédigé :
« Art. 1636 B sexies A. - I. - Sous réserve des dispositions du VI de l'article 1636 B septies, les conseils régionaux autres que celui de la région d'Ile-de-France votent chaque année les taux des taxes foncières et de la taxe professionnelle. Ils peuvent :
« a) Soit faire varier dans une même proportion les taux des trois taxes appliqués l'année précédente ;
« b) Soit faire varier librement entre eux les taux des trois taxes. Dans ce cas, le taux de taxe professionnelle :
« - ne peut, par rapport à l'année précédente, être augmenté dans une proportion supérieure à l'augmentation du taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties,
« - ou doit être diminué, par rapport à l'année précédente, dans une proportion au moins égale à la diminution du taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties. »
« Jusqu'à la prochaine révision, le taux de la taxe foncière sur les propriétés non bâties ne peut augmenter plus ou diminuer moins que le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties.
« II. - Toutefois, le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties peut être diminué jusqu'au niveau du taux moyen national de la taxe constaté l'année précédente pour les régions ou, s'il est plus élevé, jusqu'au niveau du taux de la taxe professionnelle de la région concernée sans que cette diminution soit prise en compte pour l'application, à la baisse, des dispositions du b du I.
« Lorsque, au titre d'une année, il est fait application des dispositions du premier alinéa, la variation en hausse du taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties à prendre en compte, pour l'application du I, pour la détermination du taux de la taxe professionnelle ou du taux de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, est réduite de moitié pendant les trois années suivantes.
« Lorsque, au titre d'une année, le taux de la taxe professionnelle ou le taux de la taxe foncière sur les propriétés non bâties a été augmenté dans ces conditions, il ne peut pas être fait application du premier alinéa pendant les trois années suivantes. »
« 3. Au premier alinéa du II de l'article 1599 quinquies, les mots : "aux 1 et 2 du I de l'article 1636 B sexies " sont remplacés par les mots : "à l'article 1636 B sexies A". »
« III. - L'article 1414 A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 1414 A. - I. - Les contribuables autres que ceux mentionnés à l'article 1414, dont le montant des revenus de l'année précédente n'excède pas la limite prévue au II de l'article 1417 sont dégrevés d'office de la taxe d'habitation afférente à leur habitation principale pour la fraction de leur cotisation qui excède 4,3 % de leur revenu au sens du IV de l'article 1417 diminué d'un abattement fixé à :
« a) 22 500 francs pour la première part de quotient familial, majoré de 6 500 francs pour les quatre premières demi-parts et de 11 500 francs pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la cinquième, en France métropolitaine ;
« b) 27 000 francs pour la première part de quotient familial, majoré de 6 500 francs pour les deux premières demi-parts et de 11 500 francs pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième, dans les départements de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Réunion ;
« c) 30 000 francs pour la première part de quotient familial, majoré de 5 000 francs pour les deux premières demi-parts et de 12 000 francs pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième, dans le département de la Guyane.
« Ces montants d'abattements sont, chaque année, indexés comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu. »
« II. - 1. Pour l'application du I :
« a) Le revenu s'entend du revenu du foyer fiscal du contribuable au nom duquel la taxe est établie ;
« b) Lorsque la taxe d'habitation est établie au nom de plusieurs personnes appartenant à des foyers fiscaux distincts, le revenu s'entend de la somme des revenus de chacun des foyers fiscaux de ces personnes ;
« c) Lorsque les personnes mentionnées aux a et b cohabitent avec des personnes qui ne font pas partie de leur foyer fiscal et pour lesquelles la résidence constitue leur habitation principale, le revenu s'entend de la somme des revenus de chacun des foyers fiscaux des personnes au nom desquelles l'imposition est établie ainsi que des revenus de chacun des foyers fiscaux des cohabitants dont les revenus, au sens du IV de l'article 1417, excèdent la limite prévue au I du même article ;
« d) L'abattement est déterminé en tenant compte de la somme des parts retenues pour l'établissement de l'impôt sur le revenu de chacun des foyers fiscaux dont le revenu est retenu pour le calcul du dégrèvement.
« 2. Pour les impositions établies au titre de 2000 à 2004, le montant du dégrèvement calculé dans les conditions fixées au I ne peut être inférieur au montant du dégrèvement qui aurait été accordé conformément aux dispositions de l'article 1414 C dans sa rédaction en vigueur au titre de 2000 avant la publication de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° du ) ; toutefois, pour les impositions établies à compter de 2001, le pourcentage de 50 % mentionné à ce même article est réduit de dix points chaque année. »
« III. - A compter de 2001, le montant du dégrèvement prévu au I est réduit d'un montant égal au produit de la base nette imposable au profit des collectivités locales et de leurs établissement publics de coopération intercommunale par la différence entre le taux global de taxe d'habitation constaté dans la commune au titre de l'année d'imposition et ce même taux global constaté en 2000.
« Pour l'application du premier alinéa :
« a) Lorsque les bases nettes imposables au profit de la commune, de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et du département sont différentes, la base la moins élevée est retenue ;
« b) Le taux global de taxe d'habitation comprend le taux des taxes spéciales d'équipement additionnelles à la taxe d'habitation ;
« c) La réduction n'est pas applicable si elle est inférieure à 100 francs. »
« IV. - L'article 1417 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. Les I, II et III sont ainsi rédigés :
« I. - Pour les impositions établies au titre de 2000, les dispositions de l'article 1391, du 3 du II et III de l'article 1411, des 2° et 3° du I de l'article 1414 sont applicables aux contribuables dont le montant des revenus de 1999 n'excède pas la somme de 44 110 francs, pour la première part de quotient familial, majorée de 11 790 francs pour chaque demi-part supplémentaire, retenues pour le calcul de l'impôt sur le revenu au titre de 1999. Pour la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion, les montants des revenus sont fixés à 52 200 francs, pour la première part, majorée de 12 470 francs pour la première demi-part et 11 790 francs pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Pour la Guyane, ces montants sont fixés respectivement à 54 570 francs, 15 020 francs et 11 790 francs. »
« II. - Pour les impositions établies au titre de 2000, les dispositions de l'article 1414 A sont applicables aux contribuables dont le montant des revenus de 1999 n'excède pas la somme de 103 710 francs, pour la première part de quotient familial, majorée de 24 230 francs pour la première demi-part et 19 070 francs à compter de la deuxième demi-part supplémentaire, retenues pour le calcul de l'impôt sur le revenu au titre de 1999. Pour la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion, les montants des revenus sont fixés à 125 350 francs, pour la première part, majorée de 26 600 francs pour la première demi-part, 25 350 francs pour la deuxième demi-part et 19 070 francs pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième. Pour la Guyane, ces montants sont fixés à 137 370 francs pour la première part, majorée de 26 600 francs pour chacune des deux premières demi-parts, 22 660 francs pour la troisième demi-part et 19 070 francs pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la quatrième. »
« III - Les dispositions des I et II s'appliquent dans les mêmes conditions aux impositions établies au titre de 2001 et des années suivantes. Toutefois, chaque année, les montants de revenus sont indexés comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu. »
« 2. Le I bis et le IV sont abrogés.
« 3. Dans le V, qui devient le IV, la dernière phrase du 1° et le 2° sont supprimés.
« V. - 1. Les articles 1414 bis, 1414 B et 1414 C du code général des impôts sont abrogés.
« 2. A l'article 1413 bis du code général des impôts, les mots : "et des articles 1414 bis, 1414 A, 1414 B, 1414 C" sont remplacés par les mots : "et de l'article 1414 A".
« 3. Le premier alinéa du 3, du I de l'article 1641 du code général des impôts est ainsi modifié :
« a) Dans la première phrase, les mots : "l'article 1414 C" sont remplacés par les mots : "l'article 1414 A" » ;
« b) La deuxième phrase est ainsi rédigée :
« Les redevables visés aux articles 1414 et 1414 A en sont toutefois exonérés pour leur habitation principale. »
« 4. Au deuxième alinéa de l'article L. 173 du livre des procédures fiscales, les mots : "d'un dégrèvement ou d'une exonération en application des articles 1391, 1414, 1414 bis, 1414 A, 1414 B et 1414 C" sont remplacés par les mots : "d'une exonération, d'un dégrèvement ou d'un abattement en application des articles 1391, 1414, 1414 A et du 3 du II de l'article 1411".
« 5. Le troisième alinéa du III de l'article 9 de la loi de finances pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre 1992) est complété par les mots : ", majoré de la compensation prévue à l'article 6 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° du ) et de la compensation prévue au I du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) qui leur ont été versées la même année".
« 6. Le I de l'article 54 de la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993) est ainsi modifié :
« a) Au premier alinéa, les mots : "le produit des rôles généraux de taxe professionnelle émis au profit de la collectivité locale ou du groupement de communes" sont remplacés par les mots : "le produit des rôles généraux de taxe professionnelle émis au profit de la collectivité locale ou du groupement de communes, majoré du montant de la compensation prévue au I du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998)" ;
« b) Au troisième alinéa, les mots : "les produits des rôles généraux de taxe professionnelle émis au profit des collectivités locales, de leurs groupements et des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle" sont remplacés par les mots : "les produits des rôles généraux de taxe professionnelle émis au profit des collectivités locales, de leurs groupements et des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, majorés du montant de la compensation prévue au I du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998), qui leur a été versée ;
« c) Le quatrième alinéa est complété par les mots : ", majoré du montant de la compensation prévue à l'article 6 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° du ) et du montant de la compensation prévue au I du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998), qui leur ont été versées cette même année".
« 7. Au dernier alinéa du IV bis de l'article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986), après les mots : "en application des IV et IV bis du présent article", sont insérés les mots : ", du I du D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998), de l'article 6 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° du )".
« 8. a) Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
« 1° Au 1° du a de l'article L. 4331-2 et au premier alinéa de l'article L. 4332-7, les mots : ", la taxe d'habitation" sont supprimés ;
« 2° A l'article L. 4332-8 :
« - au premier alinéa, le mot : "quatre" est remplacé par le mot : "trois" et, après les mots : "ou réductions de bases de fiscalité directe", sont insérés les mots : "et de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation" ;
« - au troisième alinéa, après les mots : "les bases de fiscalité de chacune des taxes concernées", sont insérés les mots : "et de la taxe d'habitation" et, après les mots : "la mise en oeuvre de la mesure d'exonération ou de réduction des bases", sont insérés les mots : "et de suppression de la part régionale de la taxe d'habitation" ;
« - au quatrième alinéa, après les mots : "chacune de ces taxes", sont insérés les mots : "et celui de la taxe d'habitation" et, après les mots : "la mise en oeuvre de la mesure d'exonération ou de réduction des bases", sont insérés les mots : "et de suppression de la part régionale de la taxe d'habitation" ;
« 3° A l'article L. 4332-9, le mot : "quatre" est remplacé par le mot : "trois".
« b) Pour le calcul des fonds de correction des déséquilibres régionaux en 2001 et en 2002, le potentiel fiscal prévu à l'article L. 4332-8 du code général des collectivités territoriales tient compte des bases afférentes à la taxe d'habitation de la pénultième année.
« 9. Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« a) Aux 1° et 2° du III de l'article L. 136-2 et au III de l'article L. 136-8, les mots : "au V de l'article 1417" et les mots : "des I et IV du même article" sont remplacés respectivement par les mots : "au IV de l'article 1417" et les mots : "des I et III du même article" ;
« b) Au deuxième alinéa de l'article L. 380-2, les mots : "au 1° du V de l'article 1417" sont remplacés par les mots : "au IV de l'article 1417".
« VI. - 1. Les dispositions du 1 du I ainsi que du II sont applicables à compter des impositions établies au titre de 2001.
« 2. Les dispositions des III, IV ainsi que des 1 et 3 du V sont applicables à compter des impositions établies au titre de 2000.
« 3. Les dispositions des 5, 6, 7 et du 1° du a du 8 du V sont applicables à compter de 2001. »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'ai souhaité intervenir au nom de la commission sur cet article, car il me semble utile de placer ce dernier dans une perspective plus générale, qui est celle hélas ! du mouvement de suppression progressive des impôts locaux auquel nous assistons depuis deux ans et demi, mouvement dont les conséquences sont particulièrement inquiétantes à la fois pour l'autonomie fiscale des collectivités territoriales mais aussi - c'est un point qui a été insuffisamment souligé jusqu'ici, à mon avis - pour le budget de l'Etat lui-même.
M. Patrick Lassourd. Tout à fait !
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'aborderai tout d'abord la question de l'autonomie fiscale des collectivités.
Sans doute nous direz-vous, madame le secrétaire d'Etat, que la suppression de la taxe d'habitation des régions ne remet pas en cause l'autonomie de ces dernières. Sans doute nous direz-vous aussi qu'il s'agit, avec cette part régionale, de 5,8 milliards de francs, soit moins de 15 % des recettes fiscales des régions qui s'élèvent à près de 45 milliards de francs. Soit !
Encore faut-il rappeler que cette suppression intervient après celle des droits de mutation perçus par les régions, qui fut enregistrée en 1999. Ce furent 5 milliards de francs transformés en dotations budgétaires, indexés sur la dotation globale de fonctionnement.
Dès lors, on voit qu'il s'agit plutôt de 11 milliards de francs sur 45 milliards de francs, ce qui, sur deux exercices, commence à représenter - vous me l'accorderez - une proportion tout à fait significative.
Je ne souhaite pas entrer dans une polémique sur le mode d'indexation des compensations. Vous nous direz, madame le secrétaire d'Etat - fonction oblige - que cette indexation est favorable, et je vous répondrai que non, avec d'excellentes raisons et d'excellentes analyses à l'appui. Mais ce qui est en cause, c'est davantage - et cela me paraît plus essentiel - l'idée qu'ici, au Grand conseil des communes de France, qui est aussi le Grand conseil des régions et des départements de France, nous nous faisons de la décentralisation.
Vous pensez - du moins les propos tenus au nom du Gouvernement le laissent-ils croire - que la liberté de dépenser est la liberté locale. Nous considérons, pour notre part, que nos électeurs doivent nous juger sur tous nos choix, y compris et au premier chef sur nos choix fiscaux.
M. Yves Fréville. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous sommes bien placés, au Parlement, pour savoir que le fondement même de la démocratie représentative, que ce soit à l'échelon local ou à l'échelon national, peut-être demain à l'échelon européen d'ailleurs, c'est le consentement à l'impôt. Et, observant les pays qui nous entourent, nous constatons qu'en Italie, en Espagne, les collectivités locales ont une capacité de plus en plus grande de décider, en votant des taux, de l'évolution de leurs ressources. C'est véritablement cela, la libre administration dans une économie moderne. La libre administration, c'est la capacité, la souplesse d'ajuster ses ressources à ses besoins !
Il y va de la crédibilité des gestionnaires locaux ! Pourquoi les élire s'ils ne sont pas en mesure, par leurs choix, de faire prévaloir les valeurs et les méthodes auxquelles ils adhèrent ?
Pourquoi croyez-vous par ailleurs, madame le secrétaire d'Etat, que les collectivités françaises sont dans l'ensemble si bien notées par les agences de notation financière ? Tout simplement parce qu'il y a la fiscalité locale et la responsabilité que cela suppose de la part des décideurs locaux !
Vous allez sans doute nous parler tout à l'heure, je l'imagine, de l'exemple allemand (Mme le secrétaire d'Etat sourit) , et vous allez nous dire que des dotations budgétaires sont capables de procurer aux collectivités des ressources proportionnées à leurs besoins.
Si nous ne contestons pas la référence allemande, nous estimons cependant que cet exemple n'est pas cité à bon escient. En effet, lorsque l'on en parle comme le ministre des finances ou d'autres membres du Gouvernement l'ont déjà fait, cela revient pour nous à oublier que la Constitution allemande organise dans un Etat fédéral le partage du produit des impôts d'Etat...
M. Jean-Pierre Raffarin. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... entre le niveau fédéral et les Lander, qui sont des Etats fédérés et non pas des collectivités décentralisées comme en France. Il ne faut pas oublier notre tradition française !
A cet égard, je rappelle que, voilà un peu plus d'un an, l'un de nos éminents collègues, Pierre Mauroy, évoquait ici même, à la tribune du Sénat, une tradition quasi mécanique de la centralisation dans notre pays. Il avait raison ! Regardez comment se déroulent tout simplement nos discussions budgétaires : l'Etat « serre les boulons » comme il le peut, puis, magnanime, en cours de discussion, « lâche » quelques rallonges - beaucoup à l'Assemblée nationale, très peu au Sénat par les temps qui courent - au bénéfice des collectivités locales.
C'est ainsi que, chaque année, on examine les finances locales dans les assemblées parlementaires ! Jamais l'exercice ne revient à prendre en compte de manière réaliste les besoins des collectivités et, en quelque sorte, à se mettre à la place des gestionnaires locaux que nous sommes ; jamais le Gouvernement ne met en regard l'évolution de ses concours financiers avec celle des charges qui incombent aux collectivités territoriales.
Le sentiment de nombreux sénateurs, madame le secrétaire d'Etat, c'est que, dans l'administration d'Etat - que vous le vouliez ou non, mais c'est une réalité quasi sociologique - l'autonomie locale est plus perçue comme une contrainte dont il faut s'accommoder que comme une chance pour notre pays.
Les gestionnaires locaux, loin d'être félicités alors qu'ils devraient l'être pour l'excédent budgétaire qu'ils accumulent chaque année et qui permet à l'Etat de réduire moins qu'il le devrait son déficit à lui, sont considérés, dans le prêt-à-penser de l'administration, comme d'incorrigibles dépensiers dont les dérapages peuvent mettre en péril le respect par la France de ses engagements en matière d'évolution des dépenses publiques.
Pour éviter le dérapage des dépenses locales, il est un excellent moyen, nous le savons tous, c'est de maîtriser le robinet des recettes ; et l'Etat, en ce qui le concerne, utilise, vous le savez, la variable d'ajustement qu'est la dotation de compensation de la taxe professionnelle.
Mais la véritable régulation des recettes, et donc des dépenses, ce sont les décisions que les assemblées locales prennent au moment de voter l'impôt, au moment de voter les taux.
Depuis 1999, les impôts locaux sont particulièrement remis en cause. Ils sont remplacés par des dotations qui évoluent en fonction d'indexations prévues par la loi, ils sont remplacés par une mécanique administrative susceptible d'être changée par chaque loi de finances.
La croissance du montant de ces dotations de compensation est rapide ; elle est inquiétante. Je ne crois pas que la dynamique des dépenses locales soit de nature à faire déraper la dépense publique dans notre pays, mais je m'inquiète - et c'est le second aspect de mon propos - de voir le montant des dépenses incompressibles de l'Etat gonfler chaque année.
Les dotations qui remplacent les impôts locaux, ce sont des dépenses fatales pour demain et après-demain ! Même si les gestionnaires locaux les considéreront toujours comme insuffisantes, du point de vue de l'Etat, ce seront des rubriques qu'il faudra inscrire, quelle que soit la conjoncture et quelles que soient les recettes.
Il est quand même stupéfiant, madame le secrétaire d'Etat, de constater que, dans la loi de finances pour 2000, le Gouvernement a refusé 250 millions de francs - seulement ! - au Sénat pour réaliser en deux ans au lieu de trois la prise en compte des résultats du recensement pour la répartition de la dotation globale de fonctionnement, mais que, dans le même temps, le montant des compensations était supérieur, pour 2000, de 14 milliards de francs à celui des compensations versées en 1999 et de 31 milliards de francs à celui des compensations versées en 1998 ! Ainsi, 30 milliards de francs de dépenses nouvelles, n'est-ce pas, pour l'avenir une cause importante de rigidification de la dépense publique ?
Aujourd'hui, avec la belle croissance, tout est anesthésié. Mais demain ou après-demain, comment fera-t-on pour payer la note ? Voilà comment l'Etat réduit tout seul, au moment où il bénéficie d'une croissance exceptionnelle, les marges de manoeuvre procurées par cette croissance.
Pour quel résultat tout ce gâchis ? Pour accroître les ressources des collectivités locales ? Pas du tout ! Pour remplacer une ressource fiscale locale par une autre ressource, une ressource budgétaire.
Les contribuables le remarquent-ils ? Pas forcément, puisque, dans le même temps, le taux des prélèvements obligatoires atteint des sommets et que, par ailleurs, il existe tout un système, fort utile mais complexe, de dégrèvements.
L'Etat n'est pas satisfait, parce que les collectivités locales, croit-il, lui coûtent trop cher ; les collectivités locales ne sont pas satisfaites, puisqu'elles déplorent à juste titre la réduction de leur autonomie fiscale et les suppressions d'impôts mal compensées ; quant aux contribuables, ils ne remarqueront même pas, compte tenu du jeu des dégrèvements, ou ils remarqueront si peu que leurs impôts baissent...
Au total, avec ce système et avec ces méthodes, personne n'est content ; pourtant, on continue, et on nous propose ici d'aller un peu plus loin avec la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation.
Madame le secrétaire d'Etat, il n'est pas possible de vous suivre dans cette voie ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet article 6 préconise un dispositif à plusieurs niveaux pour alléger le poids relatif de la taxe d'habitation dans le revenu des ménages.
Les mesures mises en oeuvre sont d'une double nature.
La première mesure consiste en la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation.
De ce point de vue, nous sommes relativement circonspects quant à la portée du choix opéré, puisqu'il tend, en fait, à renforcer les risques de spécialisation de la fiscalité locale et à attribuer telle ou telle ressource fiscale à tel ou tel niveau de collectivité, et donc de compétence.
Cela conduit, en particulier, à accroître encore la part des ressources des collectivités locales - et singulièrement des régions - attribuée sous forme de dotations budgétaires, dotations dont un passé récent a d'ailleurs montré qu'elles souffraient d'une divergence croissante et mécanique avec la matière fiscale à laquelle elles s'étaient substituées. Nous avons d'ailleurs déposé un amendement sur cette question.
Avant de passer au second étage du dispositif, qu'il me soit permis de dire à M. le rapporteur général qu'il était un peu moins loquace sur l'autonomie communale et sur l'exception française que constituent les collectivités locales au moment de l'élaboration de la loi sur les établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, qui, d'une certaine façon, retire un peu de leur autonomie à ces collectivités !
Mais j'en viens au second étage du dispositif mis en oeuvre dans le cadre de l'article 6, c'est-à-dire à la refonte assez profonde des différents mécanismes d'allégement et d'exonération de la taxe d'habitation dans le sens d'une unification des modalités de calcul de l'allégement.
Nous ne vous cacherons pas que nous partageons assez largement les finalités de ce dispositif, qui offre l'avantage, sans remettre en question l'équilibre général de ce qui a été défini au fil des dernières lois de finances, de lisser l'existant et de le rendre plus directement opérationnel en évitant au maximum les effets de seuil pour le moins discutables qui survenaient précédemment.
Nous avons, de longue date, indiqué que le revenu imposable devait servir de paramètre essentiel dans la fixation du montant de la taxe d'habitation payée par les contribuables, d'autant que l'impôt local est souvent le seul impôt direct acquitté, dans l'année, par le contribuable.
Loin de nous l'idée d'en faire la base d'imposition, mais plus proche de nous l'idée d'en faire un correctif.
Nous apprécions également que l'on ait enfin intégré que, pour une part, les impôts locaux, de par leur nature assez profondément injuste, constituent un véritable frein à la croissance, en ce sens qu'ils consomment une part importante des disponibilités des ménages les plus modestes quand vient le moment de s'en acquitter.
Pour autant, madame la secrétaire d'Etat, demeurent un certain nombre de questions : qu'en est-il de la réforme des valeurs locatives, prévue depuis 1990 mais toujours pas appliquée ?
De la même manière, qu'en est-il de la réforme de la fiscalité directe locale ? Devons-nous prolonger un simple mouvement de substitution de dotations budgétaires à des recettes fiscales, comme cela s'est déjà vu, ou repenser plus complètement les choses, notamment en matière de taxe professionnelle, où se pose de manière récurrente la question de la base d'imposition, et notamment de la prise en compte des actifs financiers ?
Telles sont les quelques observations que nous comptions présenter à l'occasion de l'examen de cet article 6.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Madame le secrétaire d'Etat, je voudrais vous faire part de l'extrême déception des élus locaux face à la décision que vous avez prise : déception quant à la forme, déception quant au fond.
Sur la forme, d'abord, car il n'y a eu aucune concertation. Quel respect pour la démocratie locale ! Quel respect pour les élus régionaux que de les informer d'une distribution de cagnotte sur TF 1, au journal de vingt heures, où il leur est annoncé que la part régionale de la taxe d'habitation est supprimée !
On nous explique d'ailleurs que, comme il y a plus de départements, il vaut mieux s'attaquer aux régions pour rendre la décision plus aisée, et on le fait dans le secret, dans l'opacité devrais-je plutôt dire : en effet, tous n'étaient pas dans l'ignorance de ce qui allait être décidé, certains ont profité de l'information...
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un délit d'initiés ! (Sourires.)
M. Jean-Pierre Raffarin. ... et on a vu un certain nombre d'acteurs territoriaux qui, ne parvenant pas à boucler leur contrat de plan, ont subitement conclu des accords grâce à une augmentation du poids de la fiscalité régionale. Eux, ils savaient que ce serait ensuite compensé !
Alors que, dans les années précédentes, tout cela était maîtrisé, on a vu soudain des régions voter des taux dépassant les normes habituelles, et cela simplement parce qu'il y avait des dessous de table : « Tu augmentes et, sous la table, je te renverrai l'enveloppe pour compenser cette augmentation. »
M. Charles Revet. C'est scandaleux !
M. Jean-Pierre Raffarin. Mais dans quelle République sommes-nous ?
M. Patrick Lassourd. Une République bananière !
M. Jean-Pierre Raffarin. Comment peut-on accepter une telle pratique de la coopération entre l'Etat central et les territoires ? Si l'Etat veut être respecté, il doit être respectable !
Comment, pour s'en tenir à la forme, accepter une telle décision alors que, des mois et des mois durant, nous avons négocié, territoires et Etat, des contrats de plan, qu'on nous a demandé des projets régionaux, que nous avons mis en place des concertations, que les préfets, les directeurs d'administration locale ont essayé de comprendre comment allaient s'organiser les contrats d'agglomération, les contrats de pays, les schémas de services ? Bref, alors que, souvent, dans les régions, nous connaissons des difficultés politiques majeures, nous sommes arrivés à bâtir partout des contrats, à définir des investissements importants pour la période 2000-2006, à mobiliser des ressources, à établir des plans de financement, à envisager quelquefois des augmentations fiscales, à bâtir des projets, à prévoir leur financement.
Alors, l'Etat, agissant secrètement, fait semblant d'être d'accord sur toutes ces pratiques ; de région en région, il signe les contrats de plan, il signe les dépenses. Et une fois que tout est signé, M. le Premier ministre vient dire à la télévision que tel est bien le cas, mais que, dorénavant, les ressources des régions vont être maîtrisées, que l'on va changer la donne.
Naturellement, derrière tout cela, il y a plusieurs mensonges. D'abord, on dit aux citoyens qu'il y a suppression de l'impôt alors qu'au fond il y a transfert d'impôt. Ensuite, on dit aux régions qu'il y aura pour elles compensation, mais toutes les statistiques montrent que, sur la période des dix ans à venir, elles perdront près de 2 milliards de francs, 1,5 milliard de francs dans l'hypothèse la plus modeste, par rapport à la contractualisation 2000-2006, ce qui représente un vrai déficit. Autrement dit, on annonce une compensation et il n'y aura qu'une partie de compensation. C'est vraiment inacceptable dans la forme.
Sur le fond, sommes-nous encore des collectivités de libre administration ? Pouvons-nous considérer que nous avons une maîtrise tant de nos ressources que de nos dépenses, d'ailleurs, dans la mesure où, de plus en plus, l'Etat à la fois maîtrise les conditions de la ressource et définit les conditions de la dépense ?
M. Charles Revet. Exactement !
M. Jean-Pierre Raffarin. Il suffit de voir comment est gérée la décentralisation de la formation professionnelle : de plus en plus, l'Etat cherche à faire en sorte que les dépenses engagées par les régions viennent, sur leurs propres lignes, accompagner ses propres politiques ; autrement dit, il cadre notre dépense. Et voilà que maintenant, il veut cadrer aussi nos recettes !
Quand j'ai été élu pour la première fois président de conseil régional, cette dotation de l'Etat pesait à peine 40 % dans le budget régional. Aujourd'hui, elle représente plus de 60 %. Nous devenons des quasi-préfets. Nous gérons des dotations et nous gérons des circulaires. Il ne nous manque plus que les casquettes, mais nous sommes prêts à les porter, s'il nous faut assumer jusqu'au bout ce destin, qui est de servir la cause non pas de la décentralisation mais d'une certaine déconcentration !
Tout cela est profondément regrettable.
J'ajoute que cette démarche brutale intervient dans une période où, parallèlement, on pratique la plus sournoise des recentralisations, celle qui consiste à assécher les territoires.
La réforme ferroviaire de M. Gayssot, si elle reste où elle en est aujourd'hui, consiste à transférer aux régions le déficit des TER pour garder au niveau national les bénéfices du TGV. C'est la pire des recentralisations : d'un côté, on nous transfère des charges importantes ; de l'autre, on s'en prend à nos ressources.
Madame le secrétaire d'Etat, cette situation est à proprement parler inacceptable, non pas pour nous, non pas pour les quelques élus que nous sommes, mais parce que la France - vous vous en rendez bien compte ! - a besoin, aujourd'hui, de la solution régionale, parce qu'elle a besoin de la décentralisation pour régler les problèmes, pour mener à bien les réformes, notamment lorsque sont en cause des mammouths incapables de se bouger.
On voit bien, aujourd'hui, que sans les régions, sans les expérimentations, on n'arrive à rien. Vous êtes bien placée pour le savoir, madame le secrétaire d'Etat, vous qui avez accompagné M. Sautter dans la triste période où le mammouth des finances a montré son impuissance.
Pourquoi la SNCF, mammouth parmi les mammouths, a-t-elle pu accepter la régionalisation ? Parce qu'il y a eu des expérimentations et que la CGT d'en bas a convaincu la CGT d'en haut, que les directeurs administratifs d'en bas ont convaincu les directeurs administratifs d'en haut, que les élus d'en bas ont convaincu les élus d'en haut et qu'ainsi, petit à petit, la réforme est montée en puissance.
Aujourd'hui, on a besoin de la solution régionale pour donner à notre pays cette efficacité dont nous parlions tout à l'heure, Mais comment assumer cette solution régionale quand on prive la région de la ressource et de la responsabilité ? C'est grave ! (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Comment pourrais-je ne pas m'exprimer sur cette question, à laquelle, je le sais, les élus de la Haute Assemblée attachent une si grande importance, notamment M. Raffarin, qui a eu l'occasion d'exprimer très récemment ses préoccupations à ce sujet à M. Fabius ?
M. le rapporteur général a développé un certain nombre d'arguments et a eu, de plus, l'amabilité d'anticiper sur tous ceux que je pourrais moi-même développer.
S'agissant de l'autonomie fiscale des collectivités locales, il est clair que nous ne partageons pas la même conception. Je dirai simplement que l'on peut soutenir que la libre administration des collectivités locales s'entend essentiellement de la liberté d'emploi des ressources, le législateur devant veiller à ce qu'elles soient suffisantes en quantité pour permettre aux collectivités d'exercer les compétences qui leur sont dévolues.
Au-delà du débat de fond, que je ne trancherai pas - la commission présidée par M. Pierre Mauroy doit actuellement le poursuivre - j'observerai simplement que, en matière de suppression de la part salariale de la taxe professionnelle, le Conseil constitutionnel a bien voulu considérer que cette mesure n'avait pour effet ni de diminuer les ressources globales des collectivités locales ni de restreindre leurs ressources fiscales au point d'entraver leur libre administration.
Vous avez eu l'amabilité de rappeler, monsieur le rapporteur général, que la taxe d'habitation ne représentait que 7,2 % du total des ressources des régions, hors emprunt. Par conséquent, les régions disposeront encore d'une grande marge de manoeuvre fiscale, et ce en dépit de l'autre réforme qui peut « porter atteinte » à leurs ressources, et que j'ai citée tout à l'heure, à savoir la suppression de la part salariale de l'assiette de la taxe professionnelle.
Vous avez également fait allusion au cas allemand. L'autonomie fiscale de nos régions restera largement supérieure à celle des collectivités locales de la plupart des Etats de l'Union, y compris des Etats à forte décentralisation, comme celui que vous avez cité, puisque les recettes fiscales propres des Länder ne représentent pas plus de 20 % de leur budget total.
Sur l'indexation de la compensation, sujet que M. Raffarin a également abordé, je ferai deux remarques.
Tout d'abord, si l'on compare l'évolution moyenne des bases de la taxe d'habitation au cours des dix dernières années et l'évolution de la DGF, on constate que, pour quinze régions métropolitaines sur vingt-deux, l'évolution moyenne des bases a été inférieure à celle de la DGF. Cela signifie que le dispositif que le Gouvernement propose au titre de la compensation n'est pas défavorable à la majorité des régions, qu'il ne l'est peut-être qu'à celles qui, en effet, bénéficient d'un potentiel fiscal supérieur à la moyenne nationale.
Mais cela nous renvoie alors à un autre débat, tout aussi important, qui est celui de la péréquation : la libre administration des collectivités locales poussée jusqu'à son terme signifie-t-elle que chacun garde ses ressources et refuse de « péréquer » en faveur des régions les plus pauvres ? C'est un débat que je ne me permettrai pas de clore ce soir compte tenu des réflexions qui sont en cours.
M. Jean-Pierre Raffarin. C'est le rôle du contrat de plan.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Il a également été dit qu'il serait très dommageable de remplacer la fiscalité locale par des dotations à caractère budgétaire, que cela contribuerait à rigidifier considérablement les dépenses de l'Etat.
La question est de savoir si l'on préfère alléger l'impôt ou non. Et, quand l'impôt est local, chacun voudra bien convenir ici qu'il faut le compenser !
Je me permets d'ailleurs d'appeler l'attention sur une disposition qui figure dans le mécanisme proposé par le Gouvernement et qui rejoint l'avertissement que vous venez de lui lancer quant à un système de limitation des dégrèvements si les taux de la taxe augmentent de manière excessive.
Vous avez enfin indiqué, monsieur le rapporteur général, qu'au fond la réforme proposée n'était bonne ni pour l'Etat, ni pour les collectivités locales, ni - si j'ai bien compris - pour les contribuables.
S'agissant des contribuables, je crois que la réponse, qui est très simple, se passe de tout commentaire : le dispositif proposé va totalement exonérer de taxe d'habitation un million de contribuables.
J'ai bien entendu les observations de M. Foucaud, notamment son observation générale, qui va dans le sens des propositions du Gouvernement, bien qu'assortie d'un certain nombre de réserves. Ces réserves, je les ai bien notées.
En matière de fiscalité locale, il est toujours tentant, mais quelque peu imprudent, de parler de « la Réforme ». En effet, dans ce domaine, nous avons bien vu - nous avons eu l'occasion d'y faire allusion tout à l'heure - la difficulté qu'il peut y avoir à se lancer dans un dispositif de révision générale des valeurs locatives, par exemple. Nous avons expérimenté aussi, voilà quelques années, l'introduction du revenu dans le calcul de la part départementale de la taxe d'habitation ; cela n'a pas fonctionné.
Donc, le Gouvernement s'est résolument engagé dans une démarche pragmatique, peut-être modeste, mais qui a pour conséquence, pour nombre de contribuables, de réduire significativement le poids de la taxe d'habitation, voire de les en exonérer totalement, et ce avec un impact budgétaire malgré tout important puisqu'il s'agit de 11 milliards de francs.
M. Raffarin a souligné que la procédure utilisée par le Gouvernement était peu respectueuse des droits à la concertation. Je dois dire - j'étais avec M. Jean-Pierre Chevènement, ce jour-là - que nous avons eu l'occasion de nous excuser auprès de la commission Mauroy du caractère un peu rapide des propositions qui étaient faites, alors même que le Gouvernement avait décidé d'engager une concertation sur ce sujet très important que constitue la décentralisation.
C'est ainsi : le collectif budgétaire se présentait, pour des raisons sur lesquelles nous nous sommes longuement expliqués au cours de ces dernières heures.
Pour autant, nous n'épuisons pas le sujet de la réforme de la fiscalité locale. Je suis même sûre que le Gouvernement se penchera avec beaucoup d'intérêt sur les conclusions de la commission Mauroy.
J'ajoute, pour ceux qui auraient un doute, que, si le Gouvernement n'était pas favorable à la décentralisation et souhaitait prendre des mesures allant à son encontre, il n'aurait pas pris, précisément, l'initiative de réunir cette commission pour apporter à la décentralisation le second souffle qui lui est nécessaire.
Le dernier point évoqué par M. Raffarin concerne ce qu'il a, me semble-t-il, appelé les « délits d'initié », c'est-à-dire les augmentations de taux qui ont pu être opérées par certaines régions au moment de l'annonce du nouveau dispositif dont il est question ce soir.
En général, ce qui est dénoncé, ce sont les évolutions qui ont été décidées par les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Nord - Pas-de-Calais. En réalité, il s'agit de mesures qui ont été décidées postérieurement à la révélation publique du dispositif gouvernemental. Je pense donc que la qualification de délit d'initié n'est pas tout à fait adéquate.
En revanche, si l'on doit parler de délit d'initié, je note que la région Lorraine, elle, a voté une hausse de plus de 15 % de ses taux le 23 février dernier, soit de manière anticipée par rapport à l'annonce du dispositif gouvernemental.
Au-delà de ces aspects quelque peu polémiques, il faut bien voir que ces ajustements du niveau des taux tiennent en partie à l'importance des engagements qui ont été pris dans les contrats de plan par ces régions, qui sont effectivement celles dont les engagements ont le plus fortement progressé.
M. le président. Sur l'article 6, je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 5, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De rédiger ainsi le I de l'article 6 :
« I. - Le II de l'article 1641 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« II. - Pour frais d'assiette et de recouvrement, l'Etat perçoit 5,4 % du montant des taxes visées au I, à l'exception de la taxe d'habitation due pour les locaux meublés non affectés à l'habitation principale. Ce taux est réduit à 2,1 % pour la taxe foncière sur les propriétés bâties et pour la taxe foncière sur les propriétés non bâties et à 4,4 % pour les autres impositions perçues au profit des collectivités locales et de leurs groupements. »
B. - En conséquence, de supprimer le II ; le 5, le 6, le 7 et le 8 du V ; et le 1 et le 3 du VI de cet article.
C. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I. ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« VII. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la réduction des frais d'assiette et de recouvrement perçus par l'Etat est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 35, M. Fréville propose de rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - 1. A compter de 2001 ou, si elle est postérieure, de l'année de mise en application de la loi n° 90-669 du 30 juillet 1990 relative à la révision générale des évaluations des immeubles retenus pour la détermination des bases des impôts directs locaux, il est institué une dotation budgétaire afin de compenser la perte de recettes résultant pour les collectivités locales du mode d'évaluation des valeurs cadastrales des immeubles d'habitation appartenant au deuxième groupe visé au troisième alinéa du I de l'article 3 de la loi précitée.
« Cette perte de recettes est égale au produit par le taux de taxe d'habitation voté par chaque collectivité locale en 2000 ou l'année précédant la mise en application de la loi précitée, de la différence, si elle est positive, entre le montant avant révision des bases nettes de taxe d'habitation des logements visés au troisième alinéa du I de l'article 3 de la loi précitée et le montant après révision des bases nettes de ces mêmes logements pondéré par le rapport entre les bases nettes avant et après révision des autres locaux assujettis à la taxe d'habitation.
« 2. A compter de 2002 ou de l'année suivant l'année de mise en application de la loi précitée, le montant de la compensation évolue comme la dotation globale de fonctionnement.
« 3. Le Gouvernement présentera avant le 1er octobre 2000 un rapport proposant les adaptations qu'il serait utile d'apporter au dispositif précédent. »
Par amendement n° 98 rectifié bis, présenté par MM. Raffarin, de Rohan et Humbert proposent :
A. - De rédiger comme suit le 1 du I de cet article :
« 1. Le code général des impôts est ainsi modifié :
« a) Après l'article 1414 C, il est inséré dans le code général des impôts un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Pour les impositions établies au titre de l'année 2000 et des années suivantes, il est accordé aux contribuables un dégrèvement d'office de la totalité de la cotisation de taxe d'habitation perçue au propfit des régions. »
« b) Le 1 du I de l'article 1336 B sexies du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... - Soit, pour les régions, faire varier le taux de taxe d'habitation dans la même proportion que l'augmentation du taux moyen de la taxe professionnelle et des taxes foncières, pondéré par l'importance relative des bases de ces trois taxes pour l'année d'imposition, sans toutefois pouvoir excéder l'augmentation du PIB en volume constatée l'année précédente. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant pour l'Etat du dégrèvement de la part régionale de la taxe d'habitation est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnées aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 36, M. Fréville propose, dans le deuxième alinéa du a) du 2 du I de cet article, de remplacer l'année : « 2000 », par les mots : « 1999, majorée de 1 % ».
Par amendement n° 58 rectifié, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A - De rédiger comme suit le second alinéa du b du 2 du I de cet article :
« A compter de 2002, la compensation des exonérations visées au a du I versée au profit de chaque région et de la collectivité territoriale de Corse est égale à la compensation de l'année 2001 revalorisée en fonction de l'évolution constatée de la cotisation moyenne des taxes par article d'imposition. »
B. - Afin de compenser les pertes de ressources résultant du A, de compléter, in fine, cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence des pertes résultant pour l'Etat du mode de calcul de la compensation des exonérations de taxe d'habitation mentionné au II de l'article 21 de la loi de finances pour 1992 (n° 91-1322 du 30 décembre 1991). »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il convient de rappeler tout d'abord qu'à l'article 6 le Gouvernement propose une bonne chose et une mauvaise chose. La bonne chose, c'est la baisse d'impôt, qui profite notamment aux ménages les plus défavorisés, et ce grâce à la simplification et à l'approfondissement des mécanismes de dégrèvements de la taxe d'habitation. La mauvaise chose, nous en avons longuement parlé, c'est une nouvelle suppression d'impôt local, la part régionale de la taxe d'habitation.
La commission des finances propose donc au Sénat de maintenir la bonne chose, c'est-à-dire la baisse d'impôt. Le surplus des recettes fiscales perçu par l'Etat grâce à la croissance doit être distribué en partie aux contribuables. Compte tenu du niveau trop élevé de la pression fiscale dans notre pays, nous estimons que la redistribution est insuffisante.
En revanche, on ne peut à l'évidence aller plus loin en ce qui concerne la réduction de l'autonomie financière des collectivités territoriales. Il convient à cet égard de se demander, quelles que soient les décisions passées du Conseil constitutionnel, si la tendance qui se développe ne va pas aller jusqu'à la remise en cause du principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales.
Au-delà d'une certaine limite, c'est d'un changement de nature qu'il s'agira. L'expérience qu'a relatée M. Jean-Pierre Raffarin en Poitou-Charentes est extrêmement intéressante à ce titre. Il a rappelé le taux des dotations de l'Etat lorsqu'il a pris la présidence de cette région et précisé qu'il est aujourd'hui de 60 %. Gère-t-il toujours la même collectivité dans le cadre des mêmes règles du jeu à l'égard de l'Etat ? Il est permis de se poser la question.
Passé un certain seuil, c'est bien d'un changement de nature des responsabilités que nous exerçons qu'il s'agit.
En vertu de ces éléments, la commission des finances propose au Sénat un dispositif en trois points.
En premier lieu, il vise à conserver la refonte et l'approfondissement des dégrèvements proposés, qui permettent de simplifier le dispositif actuel et de limiter les effets de seuil.
En deuxième lieu, il tend à maintenir la part régionale de la taxe d'habitation.
En troisième lieu, il vise à alléger la pression fiscale, en réduisant les frais d'assiette et de recouvrement perçus par l'Etat sur les impôts des ménages, c'est-à-dire la taxe d'habitation et, pour une part, la taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties.
Dans le système que vous nous proposez, madame le secrétaire d'Etat, la réforme se traduit par un allégement de 11 milliards de francs de la pression fiscale et par une réduction regrettable de l'autonomie des collectivités territoriales.
Dans le dispositif que nous proposons, la capacité des régions à mobiliser leurs ressources propres est préservée, et la diminution d'impôts pour les contribuables s'élève toujours à 11 milliards de francs, montant qui se décompose en 6,2 milliards de francs résultant de l'aménagement du système des dégrèvements - nous n'y touchons pas - en 3,2 milliards de francs de suppression des frais d'assiette et de recouvrement de la taxe d'habitation et en 2,4 milliards de francs d'allégement des frais d'assiette et de recouvrement des taxes foncières, cette rubrique passant de 4,4 % à 2,1 %, un élément technique de 0,8 milliard de francs s'y ajoutant au titre de l'incidence de la suppression des frais d'assiette et de recouvrement de la taxe d'habitation sur les dégrèvements de taxe d'habitation.
Tel est, mes chers collègues, le dispositif que vous propose la commission des finances, qui, je le répète, entraîne le même effet pour les contribuables, pour ceux qui acquittent la taxe d'habitation, mais aussi pour les classes moyennes, les redevables de la taxe foncière.
Par ailleurs, nous estimons devoir préserver totalement l'autonomie de nos régions de sorte qu'elles puissent faire face à leurs responsabilités et qu'elles exercent leurs missions.
M. Gérard Cornu. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Fréville, pour présenter l'amendement n° 35.
M. Yves Fréville. Je voudrais dire tout d'abord que je suis parfaitement d'accord, sur le fond, avec la position qui vient d'être exprimée et par notre collègue M. Raffarin et par M. le rapporteur général. Je me rallie donc à la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation proposée par le Gouvernement. Je pense simplement qu'à long terme des améliorations du système proposé seraient peut-être souhaitables.
Le Gouvernement veut supprimer un impôt local et le faire « rembourser », si je puis dire, par les contribuables nationaux. Très bien ! Mais cet impôt local est levé et les régions avaient tout à fait le droit de le faire - à des taux très différents. Ainsi le taux est de 5 % pour le Nord, mais de la moitié pour la Bourgogne ! Sur le champ, c'est acceptable. Mais comment voulez-vous, mes chers collègues, que les contribuables nationaux continuent dans cette voie : ils vont se demander pourquoi ils payeraient deux fois plus pour le Nord que pour la Bourgogne.
Il est certain que le système de remboursement a vitam aeternam...
M. Patrick Lassourd. Ne tiendra pas la route !
M. Yves Fréville. ... ne tiendra jamais la route.
D'ailleurs, nous avons le précédent de la DCTP, la dotation de compensation de la taxe professionnelle. Après la réduction de 16 % de la taxe professionnelle, on a organisé la péréquation sur les remboursements !
Ce système est donc intenable à long terme. En revanche, j'admets que, à court terme, la suppression des frais d'assiette et de recouvrement préconisée par la commission des finances est la seule solution plausible.
Cela a toutefois des conséquences. Je mets les pieds dans le plat ! (Sourires.) Ces frais d'assiette et de recouvrement permettent en effet de couvrir en partie les frais de personnels et de matériel du ministère des finances ! C'est un problème d'organisation du ministère des finances qu'il est peut-être bon de soulever.
A long terme, il faudra trouver une autre solution. On ne peut pas continuer à défendre une fiscalité locale reposant sur des bases vieilles de trente ou de quarante ans - et inacceptables, au fond, pour la plupart de nos concitoyens. Il faudra moderniser les bases.
Quoi qu'il en soit, avec cet amendement, je propose simplement que le Gouvernement présente un rapport sur les adaptations qu'il serait utile d'apporter au dispositif, et rien de plus.
Puisque le problème réside fondamentalement dans la modification de l'évaluation des valeurs locatives dans les HLM, que le Gouvernement « recycle » les dotations qu'il est prêt à verser pour compenser cette opération de baisse de la taxe d'habitation en faveur des communes qui ont des logements HLM. Ainsi, la difficulté majeure sur la révision des bases disparaîtra.
Je pense d'ailleurs que cet amendement est tout à fait acceptable par la majorité plurielle et par le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Raffarin, pour défendre l'amendement n° 98 rectifié bis.
M. Jean-Pierre Raffarin. Ce débat est très important puisqu'il est nécessaire de repenser globalement la fiscalité locale. Or, je ne crois pas, madame la secrétaire d'Etat, que la commission Mauroy sera en mesure de présenter des propositions techniques allant au-delà de quelques grands principes généraux. Ses méthodes de travail et sa composition ne permettent pas de penser que c'est le véritable laboratoire de la décentralisation.
Si l'on veut vraiment travailler sur le problème des finances locales, qu'on mobilise la Haute Assemblée. Nous pourrons faire un certain nombre de propositions.
La commission Mauroy est au travail depuis plusieurs mois. Elle s'est attaquée au mode de scrutin cantonal, mais elle n'a pas débouché sur un consensus.
Les membres de cette commission, parce qu'ils représentent tous des associations, défendent les associations qu'ils représentent. Pour aboutir à un consensus, il faudrait un miracle qui nous viendrait de la métropole lilloise !
Pour le moment, rien ne laisse penser qu'il en sortira une nouvelle organisation des finances locales !
Avec le président de Rohan et M. Humbert nous proposons un dégrèvement de la taxe d'habitation.
Loin de moi l'idée de dire que la taxe d'habitation est aujourd'hui un impôt performant que nous tenons vraiment à conserver. En effet, tant que ses bases n'auront pas été revues, cet impôt sera archaïque.
Nous proposons donc, d'abord, le dégrèvement et, ensuite, la pondération, le désencadrement des taux de manière à tenir compte des disparités de ressources entre les régions, notamment sur la taxe professionnelle.
Le maintien de notre capacité fiscale nous paraît être le moyen le plus adapté pour que nous conservions une part de libre administration de nos collectivités, pour que nous puissions garder notre dynamique territoriale.
M. le président. La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° 36.
M. Yves Fréville. Cet amendement, je souhaite ne pas avoir à le voter parce que j'espère que l'amendement précédent sera adopté.
Il s'agit en effet d'un amendement de repli, qui vise à tenir compte du fameux « délit d'initié » commis par les quatre régions.
Madame le secrétaire d'Etat, il n'y a pas lieu de faire de distinction entre les régions qui ont pris la décision d'augmenter le taux de la taxe d'habitation avant ou après l'annonce en conseil des ministres de la mesure provisoire de suppression de la part régionale. Il serait donc sage, pour éviter toute difficulté, de retenir, pour le calcul des compensations, le taux de l'an passé.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° 58 rectifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'allégement de la taxe d'habitation qui est payée par les contribuables locaux pose naturellement la question de la compensation, pour les collectivités locales, de la moins-value fiscale qui en découle.
Sur cette pratique de substitution, notre expérience nous amène à nous interroger sur le choix opéré dans le projet de loi quant aux modalités.
Nous savons tous ainsi qu'il existe un décalage sensible entre le montant de taxe professionnelle économisé par les entreprises au titre de l'allégement transitoire de 16 % qui avait été voté en 1986 et le montant de la dotation de compensation destinée à en neutraliser l'effet.
Sans même revenir sur le fait que cette pauvre dotation de compensation de la taxe professionnelle est aujourd'hui devenue une simple variable d'ajustement des concours de l'Etat aux collectivités locales, il y a « belle lurette » que la compensation n'a plus rien à voir avec l'allégement.
Selon nos estimations, le décalage est en effet d'environ 20 milliards de francs au détriment des collectivités locales...
Cela tient évidemment en grande partie aux règles de progression qui ont pu être adoptées pour ces différentes compensations, règles en général beaucoup moins dynamiques que ne peut l'être la matière fiscale.
Nous avons donc quelque crainte que le phénomène ne se reproduise, au fil du temps, avec la compensation de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation, que nous ne pouvons associer décemment à la seule progression de la dotation globale de fonctionnement.
Si l'on observe, d'une part, l'évolution comparée de la dotation globale de fonctionnement ces dernières années et, d'autre part, l'évolution de l'imposition moyenne par article d'imposition, on constate une très sensible différence, au bénéfice ou au profit - je ne sais quelle est la bonne formule - de la dynamique de la recette fiscale.
Nous souhaitons donc que la compensation soit, dans les années à venir, liée plus directement à l'évolution des recettes fiscales, évolution qui résulterait de l'addition des décisions prises tant par les communes que par les départements ou par les établissements publics de coopération intercommunale en matière d'imposition locale.
Je le répète : il s'agit, pour nous, d'éviter l'effet de ciseau que nous avons régulièrement pu observer par le passé.
Au terme de cette intervention, on peut se demander quelle serait la portée de la mesure préconisée.
A ce stade, on ne peut oublier ici les compétences spécifiques des régions en bien des domaines essentiels, la construction du parc des lycées, la question de l'apprentissage et de la formation continue, le développement des grandes infrastructures, le développement culturel, notamment.
Notre objectif est aussi de permettre aux régions de n'avoir à solliciter ni la fiscalité, ni l'emprunt pour combler une éventuelle perte de recettes fiscales qui résulterait d'une compensation imparfaite.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 35, 98 rectifié bis , 36 et 58 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission partage bien évidemment les analyses des auteurs de ces amendements. Comme le soulignait notre collègue M. Yves Fréville, il est clair qu'il ne sera pas possible de faire l'économie d'une nouvelle conception de la fiscalité locale. Il faudra bien trouver, pour le long terme, des solutions qui ne déconnectent pas la collectivité qui décide de ses ressources fiscales et les éléments de l'assiette. Si nous voulons donner un sens à l'autonomie, la fiscalité locale, dont les taux sont décidés par les assemblées élues, doit reposer sur des assiettes directement liées à la circonscription territoriale considérée. Les solutions qu'il faudra trouver pour le long terme devront, me semble-t-il, respecter ce principe : ne pas rompre le lien à la fois économique et de responsabilité entre l'assiette fiscale et les décisions des assemblées territoriales.
S'agissant de l'amendement n° 98 rectifié bis, la commission partage les objectifs que ses auteurs cherchent à atteindre. Elle estime que le dispositif de son propre amendement répond aux préoccupations qui ont été exprimées et elle voudrait insister sur le fait qu'elle propose au Sénat une baisse de l'impôt local répercutée sur le contribuable à hauteur de onze milliards de francs, ce qui est identique à ce que nous suggère le Gouvernement.
Nous estimons aussi - et M. Fréville voulait bien le reconnaître, au moins pour le court terme - que la suppression, pour la taxe d'habitation et dans une large mesure pour la taxe foncière, des frais d'assiette et de recouvrement est une disposition utile, nécessaire et qui, par ailleurs - M. Fréville l'a très bien dit - va contribuer à la réforme de l'Etat, c'est-à-dire à la nécessaire adaptation des moyens des administrations financières en fonction de leur mission. Ce n'est sans doute pas la moindre des vertus de cette proposition que nous formulons.
Nous partageons bien volontiers la philosophie générale de l'amendement n° 58 rectifié du groupe communiste républicain et citoyen, même si le dispositif doit sans doute être affiné. Les compensations d'exonération de fiscalité locale doivent, autant que possible, évoluer en fonction des bases réelles des impôts et non d'indices abstraits, déconnectés des réalités économiques nationale et locale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. S'agissant tout d'abord de l'amendement n° 5 de la commission, je dois dire que, du point de vue de son économie générale, la mécanique est parfaite, mais nous ne partageons pas, comme j'ai eu l'occasion de commencer à le lui dire, la philosophie d'ensemble, dans la mesure où cet amendement compense en quelque sorte le manque à gagner - vu du côté du contribuable évidemment - lié au rétablissement de la part régionale par une diminution des frais d'assiette et de recouvrement.
Les frais d'assiette et de recouvrement ont une utilité. Ils sont la contrepartie des dépenses que l'Etat supporte pour établir et recouvrer l'impôt, ainsi que pour financer partiellement les dégrèvements opérés au profit des contribuables de condition modeste notamment.
En ce qui concerne l'établissement de l'impôt, tout cela a un coût. Pour la seule taxe d'habitation, cela représentait trois milliards de francs en 1997. Quant à la prise en charge des dégrèvements, celle-ci est importante, car ils se sont élevés à 11,8 milliards de francs en 1998 pour l'Etat, soit une progression de plus de 60 % en six ans, alors que, sur la même période, les recettes perçues par l'Etat en contrepartie n'ont augmenté que de 24 %, si je puis dire.
L'autre aspect du dispositif proposé dans l'amendement n° 5 conduit non pas à concentrer les 11 milliards d'allégement de la pression fiscale sur les redevables de la taxe d'habitation, mais à les disperser entre, d'un côté, des redevables de la taxe d'habitation et, de l'autre, des redevables particuliers et des entreprises assujettis à la taxe foncière.
Cela ne correspond donc pas à l'esprit qui nous animait lorsque nous avons conçu ce dispositif, lequel a vocation à alléger de manière générale la taxe d'habitation pour l'ensemble des Français à travers la suppression de la part régionale et à concentrer les allégements supplémentaires sur les contribuables aux revenus les plus modestes.
L'amendement n° 35 nous renvoie à la question que nous avions évoquée, à savoir les modalités d'intégration de la révision, dont M. Fréville a rappelé combien c'était difficile.
Il a également évoqué la question particulière des logements d'HLM soulevée en 1996 par le Comité des finances locales, lequel s'était effectivement prononcé en faveur de l'abandon de la distinction entre les locaux d'habitation appartenant aux organismes d'HLM et les autres. Il préconisait plutôt une classification unique de tous les locaux d'habitation. On voit bien que, même si tel était le cas, les transferts de charges entre contribuables consécutifs à la révision ne se limiteraient pas aux seuls effets de la tarification spécifique des logements sociaux. C'est pourquoi, compte tenu de toutes ces difficultés, le Gouvernement a choisi d'agir immédiatement et de faire porter tous ses efforts sur la taxe d'habitation pour améliorer, notamment, le sort de ceux de nos concitoyens qui sont dans les situations les plus délicates.
Le principe de l'amendement n° 98 rectifié bis me paraît, je dois le dire, contestable. En effet, en remplaçant la suppression de la part régionale par un dispositif de dégrèvement, il conduirait en réalité, à faire prendre en charge par l'Etat l'augmentation des taux qui sont décidés par les collectivités locales. Bien entendu, vous proposez un dispositif d'encadrement du taux de cette taxe d'habitation, dispositif qui s'ajoute lui-même à des mesures d'encadrement du taux de la taxe professionnelle et du taux de la taxe foncière, ce qui conduit à compliquer considérablement les modalités de fixation des taux. Pour ces raisons, nous ne sommes donc pas favorables à cet amendement.
Je ne reviens pas sur les éléments que j'ai développés tout à l'heure et qui sont relatifs au caractère juste de la compensation proposée par le Gouvernement.
L'amendement n° 36, qui est, si ma mémoire est bonne, un amendement de repli, vise à calculer la compensation à partir des taux de 1999 majorés de 1 %.
Cette proposition ne me paraît pas pertinente puisque, sur vingt-six régions, vingt n'ont pas augmenté leurs taux entre 1999 et 2000. Vous avez parlé, tout à l'heure, des régions qui, à l'inverse, avaient commis des délits d'initié. Encore une fois, ce n'est pas une expression que le Gouvernement reprend à son compte, mais je ne vois pas pourquoi, pour les régions qui n'ont pas augmenté leurs taux entre 1999 et 2000, l'Etat aurait à compenser une majoration de taux qu'elles n'ont pas opérée. Pour cette raison, nous ne sommes pas non plus favorables à cet amendement.
Enfin, l'amendement n° 58 rectifié porte également sur les modalités de compensation. Plutôt que de calculer une indexation conforme à la DGF, cet amendement vise à caler cette indexation sur la cotisation moyenne des taxes.
Cette proposition ne permet pas de savoir quelles seraient les cotisations prises en compte, pour quelles taxes et pour quels niveaux de collectivités locales.
Par ailleurs, elle pose un problème de visibilité. En effet, nous n'aurions pas de visibilité suffisante sur l'évolution de la compensation, puisque cela reviendrait, là encore, à faire supporter au contribuable national les décisions prises par les collectivités locales.
J'ai bien entendu aussi l'argument qui a été développé sur l'évolution de la dotation de compensation de la taxe professionelle qui, dans le cadre d'une mécanique inventée, si je puis dire, sous un Gouvernement précédent, joue le rôle de variable d'ajustement, puisque c'est le terme qu'on lui a accolé. Je voudrais simplement faire remarquer que la baisse de la DCTP, lorsqu'elle est opérée, se produit davantage au détriment des collectivités « riches » que des collectivités « pauvres ». Cet argument mérite, nous semble-t-il, d'être pris en compte.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. A ce moment de notre discussion, madame la secrétaire d'Etat, je voudrais d'abord saluer votre flegme et la courtoisie inlassable - vous me direz que c'est normal, mais cela mérite néanmoins d'être dit - avec laquelle vous répondez aux questions, sans faire remarquer, comme je vais le faire moi-même, à quel point la majorité du Sénat est saisie de dédoublement !
Alors qu'au cours de la longue journée d'hier nous avons entendu nos collègues de la majorité répéter inlassablement la litanie du remboursement, du désendettement, de la réduction de la dépense, ce soir, amendement après amendement, ces mêmes collègues ne veulent que dépenses supplémentaires...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Lesquelles ?
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Pas du tout !
Plusieurs sénateurs du RPR et des Républicains et Indépendants. Lesquelles ! Lesquelles !
M. Gérard Delfau. Ce soir, ce ne sont que dépenses supplémentaires par défiscalisation...
M. Patrick Lassourd. Vous n'avez rien compris !
M. Gérard Delfau. ... que, jusqu'à l'article 6 en tout cas, vous n'avez cessé, chers collègues, de demander.
Chacune de ces demandes était légitime, sans doute. Mais où est la cohérence ? N'en déplaise à nos collègues de la majorité sénatoriale, cela méritait quand même d'être dit au moins une fois.
M. Patrick Lassourd. Cela figurera dans les annales !
M. Gérard Delfau. Mais j'espère bien ! D'ailleurs tout ce que nous disons figure au Journal officiel !
M. Patrick Lassourd. Mais là, c'est un monument d'inepties !
M. Gérard Delfau. J'ai moi-même dit hier, comme bien d'autres, à quel point j'étais en désaccord avec la méthode qui consiste à remplacer un prélèvement fiscal local par une dotation de compensation. J'ai même ajouté que deux mesures de ce type avaient été prises en à peine deux ans. Or c'est dans la répétition - j'ai même employé le mot de « récidive » - que réside à mon sens le danger.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !
M. Gérard Delfau. La libre administration des communes, ou l'autonomie des collectivités territoriales, suppose effectivement, selon la tradition établie dans notre pays depuis le xiie siècle - et non pas seulement depuis une date récente -, que les élus aient la possibilité de fixer le taux de prélèvement, la contrepartie de cette faculté étant la responsabilité devant les citoyens.
Néanmoins, monsieur le rapporteur général, je ne voterai pas votre amendement. Je vais vous dire pourquoi.
D'abord, je me suis rendu compte, en écoutant Mme la secrétaire d'Etat, que de la mesure très ciblée sur la taxe d'habitation que le Gouvernement nous propose vous faisiez une mesure qui allait profiter non seulement aux ménages mais aussi aux entreprises. Vous changez donc la nature de la mesure, ce qui n'a jamais été dit dans votre explication. Pour moi, il y a là un élément de désaccord, même s'il m'arrive, par ailleurs, de soutenir des exonérations fiscales pour les entreprises, notamment pour les très petites entreprises.
Ensuite, je considère - et, de ce point de vue, je suis beaucoup plus en accord avec mon collègue M. Fréville - que ce n'est pas ce soir que nous pouvons entreprendre la nécessaire refonte de la fiscalité locale.
En revanche, madame la secrétaire d'Etat, qu'il s'agisse de la péréquation de la taxe professionnelle - et non pas seulement de la péréquation « intracommunautaire » - ou de la réforme de la taxe d'habitation, il est effectivement nécessaire non seulement que la commission présidée par notre éminent collègue Pierre Mauroy aboutisse à des conclusions, mais aussi et surtout que le Gouvernement nous fasse très rapidement des propositions. Mais j'ai cru comprendre que c'était le sens des propos qu'a tenus hier M. le ministre de l'économie sur ce sujet.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Il me sembre que l'amendement n° 98 rectifié bis, que je vais retirer, présentait par rapport à l'amendement n° 5 un certain nombre d'avantages.
Il permettait notamment de marier l'allégement fiscal et la logique du dégrèvement tout en maintenant une responsabilité de la collectivité territoriale quant au choix des taux, mais avec un encadrement de ceux-ci. A cet égard, madame la secrétaire d'Etat, il n'y avait d'ailleurs pas de crainte à avoir puisque nous avions plafonné l'évolution du taux sur celle du PIB, ce qui limitait tout risque de débordement majeur.
J'ajoute que notre amendement avait reçu le soutien de membres de l'opposition de cette assemblée, notamment de présidents de conseil régional. On pouvait donc nourrir quelque espoir de voir l'Assemblée nationale le voter. Je ne sais pas si M. le rapporteur général a obtenu des assurances quelconques à cet égard quant à l'amendement n° 5, auquel je me rallie néanmoins.
M. le président. L'amendement n° 98 rectifié bis est retiré.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. L'amendement de la commission des finances m'apparaît, parmi les différents amendements qui nous sont présentés, comme le plus pertinent, le mieux adapté à la situation et à la volonté d'alléger le poids de l'impôt pour l'ensemble des contribuables, sans viser une catégorie en particulier.
Madame le secrétaire d'Etat, j'ai encore en mémoire une rencontre au siège de l'association des maires de France, avec M. Sautter et vous-même, réunion au cours de laquelle ont été esquissées les réformes qu'envisageait alors le Gouvernement concernant l'allégement de l'impôt.
J'ai le souvenir qu'une majorité de maires, toutes sensibilités politiques confondues, avait plaidé pour un aménagement de l'impôt de même nature que celui qui est présenté par notre rapporteur. Or M. Sautter, alors ministre des finances, ne leur avait pas opposé une fin de non-recevoir, considérant que c'était effectivement une des solutions qui pouvaient être étudiées par le Gouvernement.
C'est sans doute le débat qui s'est développé au sein de la majorité plurielle qui a amené le Gouvernement à retenir la solution qui nous est, en définitive, présentée dans ce projet de loi.
Ainsi que M. Raffarin l'a souligné très justement, l'expérience que nous avons des allégements d'impôts consentis par l'Etat - et cela pour toutes les collectivités territoriales, sous tous les gouvernements - nous montre que les compensations n'ont jamais été au rendez-vous.
Si vous voulez effectivement procéder à un allégement de l'impôt, madame le secrétaire d'Etat, la meilleure solution est celle que propose M. le rapporteur général.
En fait, ce que vous proposez, vous, c'est de compenser par l'octroi d'une dotation budgétaire aux collectivités territoriales, mais vous n'engagez pas au fond la réforme des finances locales qui est réclamée depuis longtemps. Il est vrai qu'une telle réforme n'est pas facile et c'est bien pour cette raison que ce chantier n'a été engagé par aucun gouvernement, qu'aucune initiative n'a été prise en ce sens. C'est un château de cartes : enlevez une carte et tout le château s'effondre !
Sans doute, d'ailleurs, la réforme de l'ancienne patente a-t-elle refroidi certaines ardeurs réformatrices concernant les impôts locaux.
A ce sujet, je veux attirer l'attention sur une dérive très grave.
Dans les pourcentages qui sont prélevés par l'Etat en contrepartie des opérations de recouvrement de l'impôt et au titre de la compensation de mesures décidées au bénéfice d'un certain nombre de contribuables, il y a une part - environ 2 % - qui concerne la réforme des bases des valeurs locatives, en prévision précisément de la mise en place de cette réforme qu'a évoquée tout à l'heure M. Fréville. Ainsi l'Etat continue, d'une manière éhontée, à procéder à un prélèvement qui n'est plus justifié aujourd'hui.
La proposition de M. Marini me paraît donc tout à fait adaptée à la situation actuelle. Elle permet de toucher les deux tiers ou les trois quarts des contribuables que vous voulez viser, madame le secrétaire d'Etat, c'est-à-dire les moins aisés, qui acquittent la taxe d'habitation et qui, parfois, paient également une partie du foncier bâti.
Car, ne l'oubliez pas, madame le secrétaire d'Etat, il y a des familles qui sont propriétaires de leur logement mais qui ont un niveau social tout à fait comparable à celles que vous voulez viser à travers votre mesure concernant la taxe d'habitation.
Pour terminer, je soulignerai qu'il me paraît tout à fait naturel qu'une autre catégorie de contribuables, celle des entreprises, soit également visée parce qu'elle supporte, elle aussi, un poids trop important de l'impôt.
J'espère donc que la raison l'emportera, non seulement ici mais également au-delà de cette assemblée, et que la disposition proposée par le rapporteur général sera définitivement adoptée par le Parlement.
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Je serai très bref, monsieur le président.
Premièrement, je retire mes amendements, qui étaient des amendements en quelque sorte à long terme, en souhaitant évidemment que, d'une certaine manière, la commission des finances reprenne l'idée d'une étude rapide sur la révision des bases et sur le problème des HLM. C'est une nécessité absolue. Sinon, nous n'aurons plus de fiscalité locale indépendante : l'Etat dira que tout cela est très coûteux et l'on trouvera tous les indicateurs démontrant que la gestion de la taxe d'habitation et de la taxe foncière coûte effectivement très cher. Quand on aura supprimé ce type d'impôt, l'autonomie des collectivités locales aura bel et bien disparu !
Deuxièmement, pourquoi faire compliqué lorsqu'on peut faire simple ? L'Etat prélève une partie de la taxe d'habitation pour son compte. Dès lors, pourquoi aller demander aux régions, aux départements ou aux communes de supprimer leur part ? Si l'Etat veut réduire la taxe d'habitation, qu'il supprime la part d'Etat !
Troisièmement, j'ai été sensible, sur un point, au raisonnement du Gouvernement, qui veut abaisser la taxe d'habitation sur les ménages. Effectivement, la taxe foncière sur les propriétés bâties pèse pour partie sur les locaux d'habitation, pour partie sur les locaux industriels et commerciaux.
Dès lors, je me permets de suggérer à la commission des finances de rectifier son amendement. Il suffirait, après les mots : « pour la taxe foncière sur les propriétés bâties », d'ajouter les mots : « sur les locaux d'habitation ». Cela permettrait d'aller dans le sens souhaité par le Gouvernement puisque la baisse profiterait effectivement aux ménages.
M. le président. Les amendements n°s 35 et 36 sont retirés.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur Delfau, à l'intention des quelques électeurs qui suivent encore nos travaux à cette heure, je tiens à dire que vous n'avez pas fait montre d'un empressement très vif à voter contre les réductions de taux de TVA qui ont été proposées tout au long de la soirée.
Je voudrais dire aussi que nous avons quelques difficultés à admettre la contradiction entre les arguments avancés lors de la discussion générale et ceux qui ont été présentés à l'appui des amendements successifs.
Nous souscrivons à la baisse des impôts, mais nous avons du mal à comprendre qu'il faille prendre dans le portefeuille du voisin pour permettre les réductions d'impôt. Mme Beaudeau a, tout à l'heure, très bien expliqué quelles inquiétudes on pouvait nourrir en ce qui concerne la compensation.
Comme l'a souligné M. Vasselle, le Sénat a le devoir de veiller à la fois à la justesse et à la justice des compensations versées aux collectivités locales. Or nous constatons à cet égard des déficits importants, en même temps qu'une atteinte à l'indépendance des collectivités locales.
Je ne rappellerai pas ici le principe de libre administration des collectivités locales et territoriales, mais nous assistons à un phénomène qui devient maintenant habituel : les collectivités locales et territoriales sont dépendantes du bon vouloir de l'Etat au moment de la loi de finances et dans les discussions avec le comité des finances locales quant à l'attribution et à la répartition des dotations de l'Etat en matière de recettes fiscales.
Il n'est pas raisonnable de donner d'une main en prenant de l'autre dans la caisse des collectivités territoriales. Nous ne pouvons pas admettre ce principe. Il faudra, au travers de la refonte des bases, redonner aux collectivités locales ce qu'elles perdent peu à peu depuis maintenant un certain nombre d'années, c'est-à-dire leur indépendance en matière de levée de l'impôt et de recettes fiscales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Il faut avoir des idées simples ! Le Gouvernement annonce des baisses d'impôts. Qu'il baisse les siens (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants) et non ceux des autres collectivités ! S'il désavoue le vote du Sénat, cela signifiera qu'il ne veut pas baisser ses propres impôts. J'aimerais savoir ce que cache la baisse des impôts des autres.
Quant à vous, monsieur Delfau, qui n'allez pas voter cet amendement et qui reprochez au Gouvernement sa récidive, vous l'encouragez ainsi à continuer de décider de la baisse des impôts des autres.
Ce soir, le Sénat prendra ses responsabilités. Il laissera au Gouvernement le soin de baisser les impôts de l'Etat, parce que ce sont les impôts dont il est responsable devant les Français. Il peut les baisser puisqu'il continuerait, si nous le laissions faire, à prélever le même montant d'impôt après avoir supprimé les nôtres. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je formulerai deux brèves observations après l'intervention de M. Lambert.
Tout d'abord, l'Etat baisse ses propres impôts puisque, sur les 40 milliards de francs dont il est question ce soir, 29 milliards de francs concernent la fiscalité de l'Etat.
Ensuite, si le Gouvernement a proposé de réduire la taxe d'habitation, c'est en réponse à une demande du Parlement qui avait été unanimement exprimée, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Nous avions pris un engagement et nous l'avons tenu !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Baissez votre part !
M. Pierre Hérisson. Donnez l'exemple !
M. le président. Monsieur le rapporteur général, acceptez-vous la suggestion de M. Fréville de rectifier votre amendement en insérant après les mots « sur les propriétés bâties » les mots « sur les locaux d'habitation » ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, je comprends l'objectif recherché, mais ce point est techniquement complexe. Je pense que, d'ici à la commission mixte paritaire, nous pourrons, le cas échéant, améliorer encore notre texte.
Si nous faisons dans l'instant ce qui est proposé, nous n'arriverons plus à 11 milliards de francs, c'est-à-dire au montant des baisses d'impôt promises aux contribuables. Nous voulons absolument tenir cette promesse. Si notre collègue M. Fréville le veut bien, votons l'amendement n° 5 tel qu'il est et, d'ici à la commission mixte paritaire, reprenons ce point pour une éventuelle rectification de détail.
Espérons, chemin faisant, que le vote du Sénat sera suffisamment massif pour que notre position en commission mixte paritaire sur ce sujet soit soutenue comme elle le mérite.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 58 rectifié n'a plus d'objet.
La suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative est renvoyée à la prochaine séance.

8

DÉPÔT DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant n° 2 à la convention de sécurité sociale du 16 janvier 1985 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 399, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant la ratification de la convention de sécurité sociale entre la République française et la République du Chili.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 400, distribué et renvoyé à la commision des affaires étrangéres, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

9

TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention relative à la coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République française et la République socialiste du Vietnam.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 392, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

10

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de MM. Jacques Legendre et Jean-Pierre Schosteck une proposition de loi tendant à assurer le maintien de la proportionnalité des indemnités de tous les élus municipaux.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 398, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

11

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION DE
L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Avant-projet de budget pour l'exercice 2001, volume 0. Introduction générale.
Ce texte sera imprimé sous le numéro E-1464 (annexe 3) et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil relative à la signature et à la conclusion d'un accord international sous forme de procès-verbal agréé entre la Communauté européenne et le gouvernement de la République de Corée sur le marché mondial de la construction navale.

Ce texte sera imprimé sous le numéro E-1470 et distribué.12

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Joseph Ostermann un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative à la constitution d'une commission de contrôle nationale et décentralisée des fonds publics accordés aux entreprises (n° 379, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 385 et distribué.
J'ai reçu de M. Guy Penne un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Ghana sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 327, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 386 et distribué.
J'ai reçu de M. Louis de Broissia un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de M. Louis de Broissia modifiant la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse (n° 368, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 387 et distribué.
J'ai reçu de M. Paul Girod un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à l'élection des sénateurs (n° 364, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 389 et distribué.
J'ai reçu de M. Christian Bonnet un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi de MM. Jean-Claude Gaudin, Michel Mercier, Emmanuel Hamel, Serge Mathieu, Francis Giraud et André Vallet tendant à permettre aux conseillers d'arrondissement de sièger au conseil d'une communauté urbaine (n° 277, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 390 et distribué.
J'ai reçu de M. Pierre Fauchon un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi modifiée par l'Assemblée nationale, tendant à préciser la définition des délits non intentionnels (n° 308, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 391 et distribué.
J'ai reçu de M. José Balarello un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'outre-mer (n° 342, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 393 et distribué.
J'ai reçu de M. René Garrec, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au référé devant les juridictions administratives.
Le rapport sera imprimé sous le numéro 396 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Louis Hyest, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la prestation compensatoire en matière de divorce.
Le rapport sera imprimé sous le numéro 397 et distribué.

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DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Jean François-Poncet un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan par le groupe de travail sur l'expatriation des jeunes Français.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 388 et distribué.
J'ai reçu de M. Hubert Haenel un rapport d'information fait au nom du Sénat pour l'Union européenne sur l'élaboration d'une charte des droits fondamentaux du l'Union européenne.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 395 et distribué.

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DÉPÔT D'UN AVIS

M. le président. J'ai reçu de M. Victor Reux un avis présenté au nom de la commission des affaires culturelles sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'outre-mer (n° 342, 1999-2000).
L'avis sera imprimé sous le n° 394 et distribué.

15

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 8 juin 2000 :
A neuf heures quarante-cinq :
1. Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2000 (n° 351, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale.
Rapport (n° 371, 1999-2000) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Avis de M. Charles Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
Le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte est expiré.
Scrutin public ordinaire de droit sur l'ensemble de la première partie.
Scrutin public ordinaire de droit sur l'ensemble du projet de loi.
2. Discussion du projet de loi (n° 350, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif du budget de 1998.
Rapport (n° 374, 1999-2000) de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Scrutin public ordinaire de droit sur l'ensemble du projet de loi.
3. Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi (n° 379, 1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative à la constitution d'une commission de contrôle nationale et décentralisée des fonds publics accordés aux entreprises.
Rapport (n° 385, 1999-2000) de M. Joseph Ostermann, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
A quinze heures :
4. Questions d'actualité au Gouvernement.
5. Suite de l'ordre du jour du matin.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'outre-mer (n° 342, 1999-2000).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 13 juin 2000, à douze heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 13 juin 2000, à seize heures.
Proposition de loi de M. Lucien Neuwirth et plusieurs de ses collègues instituant un congé et une allocation favorisant l'exercice de la solidarité familiale en cas de maladie d'un enfant ou de fin de vie d'un proche (n° 348, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 14 juin 2000, à dix-sept heures.
Proposition de loi de M. André Dulait et de plusieurs de ses collègues portant sur l'organisation d'audiences publiques lors de la réalisation de grandes infrastructures (n° 196, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 14 juin 2000, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Jean-Claude Gaudin et de plusieurs de ses collègues tendant à permettre aux conseillers d'arrondissement de siéger au conseil d'une communauté urbaine (n° 390, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 14 juin 2000, à dix-sept heures.
Proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, tendant à préciser la définition des délits non intentionnels (n° 308, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 14 juin 2000, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de M. Louis de Broissia modifiant la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse (n° 387, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 14 juin 2000, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 8 juin 2000, à zéro heure trente-cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
CONSEIL D'ORIENTATION DES RETRAITES

Lors de sa séance du mercredi 7 juin 2000, le Sénat a désigné MM. Joël Bourdin, Claude Domeizel et Alain Vasselle pour siéger au sein du conseil d'orientation des retraites.

NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES

M. Louis de Broissia a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 368 (1999-2000) modifiant la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse, présentée par M. Louis de Broissia, dont la commission des affaires culturelles est saisie au fond.

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES

M. Michel Caldaguès a été nommé rapporteur du projet de loi n° 392 (1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention relative à la coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République française et la République socialiste du Vietnam.
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi constitutionnelle n° 329 (1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale, visant à accorder le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales aux étrangers non ressortissants de l'Union européenne résidant en France, dont la commission des lois est saisie au fond.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


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