SEANCE DU 4 DECEMBRE 2000
M. le président.
« Art. 55. - I. - Après l'article L. 5211-5 du code de la santé publique, il
est inséré un article L. 5211-5-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 5211-5-1
. - Toute demande d'inscription d'un dispositif
médical à usage individuel sur la liste prévue à l'article L. 165-1 du code de
la sécurité sociale est accompagnée du versement d'une redevance dont le barème
est fixé par décret dans la limite de 30 000 F.
« Son montant est versé à l'Agence française de sécurité sanitaire des
produits de santé.
« Cette redevance est recouvrée selon les modalités prévues pour le
recouvrement des créances des établissements publics administratifs de l'Etat.
»
« II. - 1. Après l'article L. 1414-12 du code de la santé publique, il est
inséré un article L. 1414-12-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 1414-12-1
. - Il est institué une contribution financière due
par les établissements de santé à l'occasion de la procédure d'accréditation
prévue par les articles L. 6113-3 et L. 6113-4. Cette contribution est versée à
l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé.
« Son montant est fixé par décret, après avis du conseil d'administration de
l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé. Il est fonction du
nombre, déterminé au 31 décembre de l'année qui précède la visite
d'accréditation, de lits et de places de l'établissement autorisés en
application de l'article L. 6122-1, ainsi que du nombre de sites concernés par
la procédure d'accréditation. Il ne peut être inférieur à 15 000 F, ni
supérieur à 350 000 F.
« Cette contribution est exigible dès la notification de la date de la visite
d'accréditation. Elle est recouvrée selon les modalités prévues pour le
recouvrement des créances des établissements publics administratifs de l'Etat.
»
« 2. Les établissements de santé pour lesquels la visite d'accréditation est
intervenue au cours de l'année 2000 acquittent la contribution financière
définie par l'article L. 1414-12-1 du code de la santé publique selon les
modalités prévues par cet article. »
Par amendement n° II-20, M. Oudin, au nom de la commission des finances,
propose :
I. - Dans le premier alinéa du texte présenté par le I de cet article pour
l'article L. 5211-5-1 du code de la santé publique, de remplacer les mots : «
d'une redevance » par les mots : « d'une taxe ».
II. - En conséquence, au début du troisième alinéa du texte proposé par le I
de l'article 55 pour l'article L. 5211-5-1 du code de la santé publique, de
remplacer les mots : « Cette redevance » par les mots : « Cette taxe ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Oudin,
rapporteur spécial.
Cet amendement pourrait être qualifié de
rédactionnel, mais il touche en réalité un problème de fond.
Au I de l'article 55, il est proposé de doter l'Agence française de sécurité
sanitaire des produits de santé d'une nouvelle ressource affectée. Il s'agit
d'un droit variant de 0 franc à 30 000 francs, auquel seraient soumis les
fabricants de dispositifs médicaux déposant un dossier pour l'inscription de
leur produit sur la liste permettant un accès au remboursement par l'assurance
maladie.
Si ce droit figure dans la loi de finances, c'est parce qu'il s'agit d'une
imposition de toute nature. Le projet fait état d'une redevance. Nous voulons
éviter la confusion, car ce n'en est pas une. Madame la ministre, une redevance
étant par définition - c'est l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 -
instaurée par décret en Conseil d'Etat. il s'agit, en réalité, d'une taxe.
Qualifions-la comme telle !
C'est donc un amendement de vérité que vous propose la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement s'en remet à la
sagesse du Sénat sur cet amendement rédactionnel.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-20, pour lequel le Gouvernement s'en remet
à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité.
Par amendement n° II-21, M. Oudin, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer le II de l'article 55.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Oudin,
rapporteur spécial
La commission des finances vous propose de supprimer
le paragraphe II de l'article 55, qui vise à créer une nouvelle taxe au profit
de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, et ce pour deux
raisons.
La première a trait à l'utilisation qui pourrait être faite de cette taxe.
L'ANAES est chargée de l'accréditation des établissements de santé publics et
privés, des réseaux de soins et des groupements de coopération sanitaire, soit
près de 4 000 établissements. Théoriquement, elle devrait, d'ici à quatre mois,
avoir engagé l'accréditation des établissements de santé, accréditation que
nous appelons tous de nos voeux depuis des années. Pour ce faire, l'Agence a
reçu des dotations correspondant à une activité en année pleine, soit
l'accréditation de plus de 400 établissements par an. Mais la réalité est bien
moins reluisante !
En effet, seuls neuf établissements ont été accrédités en 1999, et
soixante-cinq en 2000. Comme chacun peut le constater, on est donc loin du
compte, alors que les ressources ont été transférées.
Il semble donc à la commission des finances que l'ANAES a dans ses caisses des
réserves suffisantes et qu'elle n'a pas besoin de bénéficier du produit d'une
taxe supplémentaire.
La seconde raison pour laquelle la commission des finances souhaite supprimer
le paragraphe II de l'article 55 a trait à la nature de la taxe proposée. Cette
dernière serait acquittée par les hôpitaux eux-mêmes, donc par la sécurité
sociale, par le biais de la dotation globale hospitalière. Or, l'Etat tirant
argument de la création de cette taxe pour réduire la subvention de
fonctionnement qu'il verse à l'ANAES, il nous est donc proposé, en réalité, de
transférer une charge de l'Etat vers l'assurance maladie.
Ce sont les deux raisons pour lesquelles je propose au Sénat de supprimer
cette taxe.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis surprise par cet
amendement, qui n'est que la traduction, quelques années après, de la volonté
exprimée lors de la rédaction des ordonnances de 1996 que vous avez votées et
soutenues.
Je me permets de vous rappeler qu'en vertu de l'article L. 1414-2 du code de
la santé publique, parmi les différentes ressources dont peut bénéficier
l'ANAES, figure expressément la possibilité de mettre en place soit une
redevance pour services rendus, soit des taxes à son profit. C'est exactement
ce que vous propose le Gouvernement aujourd'hui !
Effectivement, M. Oudin, ce sont les établissements hospitaliers qui
assumeront cette contribution, mais ce sont également eux qui doivent être
accrédités. De fait, cette contribution a donné lieu à de nombreux échanges
entre les différentes représentations professionnelles des établissements de
santé. Le principe de sa mise en oeuvre est soutenu par les fédérations de
l'hospitalisation publique et privée et a fait l'objet d'un vote favorable du
conseil d'administration de l'Agence, le 17 décembre 1999.
Cette contribution est destinée à couvrir les charges directes de
l'accréditation, c'est-à-dire les dépenses liées aux visites d'accréditation -
déplacements et indemnisation des experts visiteurs - et au fonctionnement du
collège de l'accrédition.
Voilà pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-21.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Je comprends fort bien l'argumentation qui vient d'être développée par M. le
rapporteur spécial. Autant je ne peux pas admettre qu'une réduction de la
dotation de l'Etat soit le corollaire d'une augmentation des redevances, autant
je suis amené à défendre devant mes collègues l'importance et la réputation que
s'est acquise, depuis quelques années, l'Agence nationale d'accréditation et
d'évaluation en santé.
Cet organisme relativement jeune, qui a succédé à une agence dont les moyens
et les missions étaient beaucoup plus réduits, a connu ces dernières années une
mutation qui est tout à l'honneur de cette institution et de ceux qui la
dirigent. Et s'il est vrai que ses mécanismes de financement peuvent sembler
discutables, ce n'est pas le meilleur moment pour mettre en cause les
ressources dont l'ANAES doit désormais bénéficier. En effet, cela risquerait de
casser la dynamique à un moment où les établissements hospitaliers ont procédé,
même si beaucoup ont eu quelque peine à le faire, à cette révolution culturelle
qu'appelle l'acceptation de la procédure même de l'accréditation.
J'ignore l'état de la trésorerie de cette agence et je suis donc bien
incapable de répondre à l'argument de M. le rapporteur spécial, mais la montée
en puissance de cet organisme et l'augmentation progressive du nombre
d'auditeurs chargés de cette démarche difficile qu'est l'accréditation
m'incitent à souhaiter que cet amendement soit retiré.
A vrai dire, je ne me fais guère d'illusions, mais j'espère que mon plaidoyer
sera suffisamment convaincant pour au moins affirmer l'importance que l'on doit
reconnaître à l'ANAES et, par là même, lui accorder les moyens d'assurer ses
missions.
En outre, s'il est exact que les prévisions, sans doute trop ambitieuses
d'accréditation des établissements hospitaliers ont connu un retard
considérable, il faut savoir que, d'autres missions ayant été dévolues à
l'ANAES - je pense à l'étude de la nomenclature des actes qui, à l'évidence, ne
fait pas partie des premiers objectifs -, le programme de cette agence a donc
été surchargé pendant un temps qui n'est peut-être pas révolu. En tout cas,
cela peut expliquer, tout au moins en partie, le retard souligné, à juste
titre, par M. le rapporteur spécial.
Enfin - je reviens sur mon premier argument, auquel j'attache beaucoup
d'importance -, la nécessité d'une évaluation et d'une accréditation pour tout
ce qui touche à la santé a constitué une révolution culturelle, qui était
certes nécessaire mais qui a longtemps, trop longtemps peut-être, suscité
l'incompréhension, voire la méfiance des acteurs de santé, qui n'étaient pas
préparés à une telle démarche.
M. Jacques Oudin,
rapporteur spécial.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jacques Oudin,
rapporteur spécial.
Soyons clair. Mme le ministre a rappelé l'ordonnance
du 24 avril 1996, qui a créé l'ANAES et que certains d'entre nous avaient
soutenue. Nous sommes favorables à cette institution, qui était nécessaire.
L'accréditation présentera des avantages considérables à l'avenir quand tous
les établissements auront fait la démarche pour y accéder. Par ailleurs, nous
ne verrons que des avantages au fait que les établissements participent au
financement sous cette forme.
Mais vous remarquerez que Mme le ministre n'a pas contesté les chiffres que
j'ai cités, à savoir neuf établissements accrédités en 1999 et soixante-cinq en
2000. Le retard pris laisse donc bien à l'ANAES des possibilités financières
qui lui permettront de fonctionner dans les prochains mois sans aucune
inquiétude !
En vérité, on nous demande, d'un côté, de créer une taxe et, de l'autre, de
réduire la dotation de l'Etat. Notre amendement de suppression du paragraphe II
de l'article 55 est un appel au Gouvernement. Nous voulons en effet savoir,
madame le ministre, ce que vous souhaitez vraiment faire avec l'ANAES, dans
quelles conditions, selon quelle politique et quelle dynamique. Si cette agence
a un rôle considérable à jouer, nous pensons que, telles qu'elles nous sont
présentées aujourd'hui, les choses ne sont pas satisfaisantes.
Nous pourrons parfaitement revoir le problème dans quelques mois, car l'ANAES
a encore les moyens de fonctionner. Mais nous appelons de nos voeux un bilan au
fond sur son fonctionnement et sur son développement.
C'est pourquoi la commission des finances réitère sa demande de rejet de cette
contribution.
M. Bernard Cazeau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau.
En ce qui nous concerne, nous sommes contre l'amendement présenté par M. le
rapporteur spécial et nous comprenons très bien les raisons exposées par Mme le
ministre.
Nous sommes favorables à l'attribution de ressources propres à ces agences et
à l'indépendance que cela leur conférera.
Au demeurant, nous souhaiterions que les procédures d'accréditation
s'accélèrent car, même si cette agence nouvelle soulève des problèmes de mise
en oeuvre, il est temps de passer à la vitesse supérieure.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-21, repoussé par le Gouvernement.
M. Claude Huriet.
Je m'abstiens.
M. Jacques Machet.
Je m'abstiens également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 55, modifié.
(L'article 55 est adopté.)
Article additionnel après l'article 55