SEANCE DU 7 DECEMBRE 2000
M. le président.
La parole est à M. Hethener.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Alain Hethener.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le ministre, lors du dernier conseil « agriculture », les Quinze se
sont ralliés, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir, à la proposition de
décision de la Commission européenne visant à interdire, pour au moins six
mois, l'utilisation des farines carnées pour l'alimentation de tous les animaux
d'élevage, donnant ainsi pleinement raison au Président de la République.
(Protestations sur les travées du groupe socialiste.- Applaudissements sur les
travées du RPR.)
Je sais que certains d'entre vous n'aiment pas entendre
cela, mes chers collègues, mais il me plaît tellement de le répéter !
Si l'absence de certitudes commandait incontestablement de prendre cette
décision, se pose toujours la question de la substitution des protéines
végétales aux protéines animales.
En effet, pour renoncer à l'utilisation des farines de viande dans l'Union
européenne, il faudrait accroître de 30 %, soit de 2 millions d'hectares, les
surfaces actuellement consacrées aux oléagineux et aux protéagineux, qui
couvrent 6,5 millions d'hectares.
Cet objectif ne pourra bien évidemment être atteint que grâce à des mesures
d'accompagnement prises au titre de la politique agricole commune.
S'agissant du dépistage de l'ESB, le Conseil a suivi la proposition de la
Commission européenne d'exclure de la chaîne alimentaire, les animaux non
testés, âgés de plus de trente mois.
Si cette dernière mesure représente également, nous n'en doutons pas, un réel
progrès, son efficacité sera directement liée aux modalités de sa mise en
oeuvre, particulièrement au nombre de tests et de laboratoires disponibles, au
choix des plans de tests, au recrutement et à la formation des vétérinaires ou
encore à l'harmonisation des contrôles.
Monsieur le ministre, je ne suis pas sénateur depuis très longtemps, mais mon
expérience d'élu local me permet de savoir que les sénateurs ne sont pas des «
baratineurs » et que, quand ils retournent dans leurs départements, ils aiment
pouvoir répondre d'une manière précise aux questions qui leur sont posées.
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Alain Hethener.
Pouvez-vous donc nous éclairer sur ces questions particulièrement importantes,
auxquelles il faut apporter des réponses si l'on souhaite rassurer les
consommateurs et, par là même, relancer la consommation de viande bovine ?
(Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
S'agissant des protéines
végétales, monsieur le sénateur, il est vrai que l'interdiction des farines
animales accroîtra les besoins communautaires.
De ce point de vue, je voudrais mettre trois points en exergue.
Premièrement, je ne crois pas que nous soyons contraints par les engagements
pris à
Blair House
, puisque ceux-ci sont en voie de devenir caducs. En
effet, les engagements d'autolimitation de production de protéines végétales
que nous avions pris étaient en quelque sorte la contrepartie d'une surprime
accordée aux productions végétales. A partir du moment où nous avons décidé en
1998, à Berlin - ce qui était contestable et que j'ai contesté, mais le
processus est maintenant en cours - de supprimer ces surprimes aux
oléoprotéagineux, nous sommes libérés de fait des accords de
Blair
House
.
Par conséquent, nous ne serons plus tenus de limiter notre production de
protéines végétales, et je suis très heureux de constater que la Commission
partage cet avis.
Deuxièmement, dans le cadre des décisions arrêtées lundi à Bruxelles, des
engagements ont été pris à notre demande par la Commission européenne de
présenter un bilan des productions d'oléoprotéagineux en Europe et de faire des
propositions.
Troisièmement, rien ne nous empêche, pour ce qui nous concerne, de développer
en France la production d'oléoprotéagineux. Nous avons d'ailleurs pris l'année
dernière des mesures pour encourager la production de tournesol ou la
production de soja de pays. Nous allons renouveler ces expériences pour les
faire monter en régime en 2001, le Premier ministre m'en a donné les moyens.
Quant à la montée en puissance du programme de tests, il tiendra compte de
l'évaluation du risque faite par l'AFSSA sur la base des 15 000 premiers tests.
Nous avons en effet besoin de savoir quelles sont les régions les plus
touchées, quelle catégorie de bovins, à quel âge, etc. pour adapter au mieux
notre dispositif d'abattage ou de tests systématiques. Nous aurons la réponse
lundi prochain.
Evidemment, je suis entièrement d'accord avec vous pour dire que passer de 48
000 tests à plusieurs centaines de milliers, sans doute un million, voire plus,
nous obligera à fournir un gros effort.
Treize laboratoires sont actuellement agréés, et il faudra au moins doubler ce
chiffre. Nous y reviendrons tout à l'heure, lorsque nous reprendrons la
discussion budgétaire. Il faudra bien entendu recruter des vétérinaires
inspecteurs. Le Premier ministre, dans le plan qu'il a lui-même annoncé, a
prévu la création de 300 postes en deux ans de vétérinaire inspecteur pour
accompagner ce mouvement. En tout cas, nous aurons ce soir, par voie
d'amendement au budget, de quoi enclencher ce mouvement de recrutement.
Nous serons donc effectivement confrontés à des problèmes matériels
considérables mais nous sommes en train de nous donner les moyens d'y faire
face.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Je vais suspendre la séance pour quelques instants.
Nous reprendrons ensuite l'examen des crédits de l'agriculture au sein du
projet de loi de finances pour 2001.
Je vous rappelle qu'il reste dix orateurs et la réponse du ministre à
entendre. Par ailleurs, six amendements sont à examiner.
Puis, nous passerons à la discussion du budget annexe des prestations sociales
agricoles et du budget de la défense.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures dix.)