SEANCE DU 11 DECEMBRE 2000
M. le président.
« Art. 48
sexies
. - Le II de l'article L. 5211-30 du code général des
collectivités territoriales est ainsi modifié :
« 1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, pour les communautés de communes visées au I de l'article 1609
quinquies
C du code général des impôts, la majoration mentionnée à
l'alinéa précédent est pondérée par le rapport entre le taux moyen national et
le taux appliqué dans la communauté de communes en 1998. De même, pour les
communautés de communes visées au II de l'article précité, ladite majoration
est pondérée par le rapport entre le taux moyen national et le taux appliqué
dans la communauté de communes en 1998 au titre des bases hors zone d'activités
économiques. » ;
« 2° Au début du deuxième alinéa, le mot : "Toutefois" est remplacé par les
mots : "Par dérogation également". »
Par amendement n° II-65, M. Marini, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Madame le secrétaire d'Etat, la commission estime
qu'il est nécessaire de proposer au Sénat la suppression de l'article 48
sexies.
Tel qu'il nous est parvenu, cet article a pour objet de neutraliser un effet
pervers de la prise en compte de la compensation de la réforme de la taxe
professionnelle dans le calcul du potientiel fiscal. L'intégration de cette
compensation dans le calcul du potentiel fiscal était elle-même, il faut le
rappeler, destinée à neutraliser les effets sur le potentiel fiscal de la
disparition progressive des bases « salaires » de la taxe professionnelle.
Il s'agit donc en quelque sorte de neutraliser les effets pervers de cette
neutralisation !
Ce souci de neutralité est louable. En effet, le potentiel fiscal est au coeur
des mécanismes de répartition des dotations de l'Etat aux collectivités
locales. Toute modification de sa définition concerne de proche en proche
nombre de dotations, soit pour l'éligibilité à ces dotations, soit pour le
montant des attributions.
Ces dotations, ce sont la dotation d'intercommunalité, la dotation de
solidarité urbaine, la dotation de solidarité rurale, la dotation de
péréquation des départements, la dotation de fonctionnement minimale des
départements, le fonds national de péréquation, la dotation de développement
rural, la dotation de compensation de la taxe professionnelle, le fonds de
solidarité de la région Ile-de-France, la dotation élu local, la dotation
globale d'équipement et le fonds de compensation des déséquilibres régionaux...
et j'espère n'avoir rien oublié !
Lorsque l'on modifie la définition du potentiel fiscal, il y a évidemment des
gagnants et des perdants puisqu'il s'agit d'un exercice de répartition d'une
enveloppe inchangée. Il est donc important que les modifications de la
définition du potentiel fiscal soient neutres et qu'elles n'aboutissent pas à
des transferts de richesse ni à habiller Pierre en déshabillant Paul !
En l'espèce, le droit actuel, qui prévoit la prise en compte de la
compensation de la réforme de la taxe professionnelle dans le potentiel fiscal,
provoque deux effets.
En premier lieu, il avantage les collectivités et structures intercommunales
dont les taux de taxe professionnelle étaient inférieurs au taux moyen national
puisque leur potentiel fiscal baisse.
En second lieu, il désavantage les collectivités et structures intercommunales
dont les taux de taxe professionnelle étaient supérieurs au taux moyen national
puisque leur potentiel fiscal augmente.
Ces effets sont constatés dans toutes les collectivités et catégories de
structures intercommunales à fiscalité propre, mais ils sont particulièrement
marqués dans les EPCI à fiscalité additionnelle car la dispersion de leurs taux
est particulièrement importante. Qui plus est, les groupements dont les taux
sont les plus élevés sont très souvent les plus intégrés. Les groupements
augmentent leurs taux pour financer les compétences transférées, les communes
réduisant corrélativement les leurs.
Le droit actuel pénalise donc les communautés de communes à fiscalité
additionnelle les plus intégrées.
C'est ce constat qui a conduit l'Assemblée nationale à adopter un dispositif
limité à ces seules communautés de communes à fiscalité additionnelle.
En lui-même, le dispositif de l'Assemblée nationale est intéressant : il
s'agit, au lieu de prendre en compte la compensation de la réforme de la taxe
professionnelle, d'appliquer aux anciennes bases « salaires » le taux moyen
national.
Cependant, la commission a estimé qu'il était préférable de conserver un mode
de calcul du potentiel fiscal harmonisé pour toutes les catégories
d'établissements publics de coopération intercommunale.
Les mécanismes de calcul de la DGF sont déjà - on en conviendra - très
compliqués. Il serait regrettable que le mode de calcul du potentiel fiscal,
qui doit servir simplement à mesurer la richesse, puisse un jour interférer
dans les choix des élus en matière de coopération intercommunale.
La commission des finances n'a, par ailleurs, pas souhaité étendre le
dispositif de l'article 48
sexies
car, avant de « toucher » au potentiel
fiscal, il est indispensable de disposer de simulations.
C'est en vertu de ces analyses que la commission vous propose, dans un premier
temps, de supprimer cet article, sans pour autant, bien sûr, condamner le
dispositif qu'il propose, et, dans un second temps, de donner un avis favorable
à l'amendement que va nous présenter notre collègue M. Fréville, qui demande au
Gouvernement un rapport avant le 1er juin. Ce document devra contenir des
simulations de l'effet de divers modes de calcul du potentiel fiscal. De cette
façon, nous serons prêts pour réformer le potentiel fiscal dans la loi de
finances pour 2002.
Cette démarche nous a semblé, mes chers collègues, être suffisamment
expérimentale pour permettre de faire éventuellement évoluer les choses dans
l'avenir sans créer de nouveaux effets pervers et sans transformer la notion de
potentiel fiscal en lui faisant jouer une fonction qui n'est pas cohérente avec
sa nature.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, l'Assemblée nationale a
introduit un dispositif correctif au mode de calcul du potentiel fiscal des
communautés de communes à fiscalité additionnelle pour corriger un effet
inopportun du dispositif prévu par la loi du 28 décembre 1999. Cette loi permet
en effet de majorer le potentiel fiscal de l'ensemble des collectivités locales
comme des établissements publics de coopération intercommunale du montant de la
compensation perçue au titre de la suppression progressive de la part salaires
des bases de la taxe professionnelle.
Il est apparu que, dans un certain nombre de cas, en particulier le cas des
communautés de communes à quatre taxes, cette majoration du potentiel fiscal
concernait les EPCI les plus intégrés fiscalement.
L'Assemblée nationale a donc décidé d'aménager le dispositif dans ce cas
particulier. Le présent amendement vise à revenir sur cette correction.
La disposition qui avait été introduite par l'Assemblée nationale a en effet
un champ limité à certains établissements publics de coopération intercommunale
pour lesquels une telle mesure, vous l'avez dit, monsieur le rapporteur
général, peut se comprendre compte tenu de la corrélation qui existe entre leur
taux de taxe professionnelle et leur niveau d'intégration fiscale. Mais cette
disposition présente un certain nombre de risques dans la mesure où elle
pourrait être étendue à d'autres catégories de collectivités locales pour
lesquelles une modification des règles actuelles ne serait pas justifiée.
Au demeurant, les évolutions éventuelles du mode de calcul du potentiel fiscal
me paraissent pouvoir être étudiées dans le cadre du rapport que le
Gouvernement doit présenter au Parlement avant la fin de 2001 sur la réforme
des finances locales. Il me semble préférable d'attendre que ce travail soit
mené à bien avant de corriger ce dispositif, dont on mesure bien les
imperfections. Mais est-on sûr que le correctif que vous souhaitez y apporter
le rendra meilleur ?
En conséquence, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-65.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Je souscris en tout point à l'argumentation de M. le rapporteur général.
Par son amendement, M. Bonrepaux a voulu résoudre un vrai problème, problème
qui a également été posé en première partie par M. Valade pour les communautés
urbaines. Mais c'est un problème général, qui ne se limite pas à telle ou telle
catégorie, à une catégorie d'EPCI ou aux seules communes. Il me paraît en effet
souhaitable de conserver la même définition du potentiel fiscal pour tous et de
ne pas réserver un sort particulier aux communautés de communes à fiscalité
additionnelle, quitte, après simulation, à proposer une autre solution.
La suggestion de M. le rapporteur général me paraît donc empreinte de
sagesse.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Comme toujours !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-65, pour lequel le Gouvernement s'en remet
à la sagesse du Sénat.
M. Michel Charasse.
Le groupe socialiste s'abstient.
M. Thierry Foucaud.
Le groupe communiste républicain et citoyen également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 48
sexies
est supprimé.
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