SEANCE DU 16 JANVIER 2001
M. le président.
La parole est à M. Demerliat, auteur de la question n° 951, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Jean-Pierre Demerliat.
Je voudrais, monsieur le ministre, attirer votre attention sur la desserte
ferroviaire Bordeaux-Lyon. La fréquentation de cette ligne est en diminution
constante, et cela est bien compréhensible : le trajet dure trop longtemps et
les arrêts sont trop nombreux : un tous les 30 kilomètres environ. Il faut
entre sept heures et demie et neuf heures pour parcourir, dans de très
mauvaises conditions de confort, les 639 kilomètres qui séparent Bordeaux de
Lyon. Il serait plus avantageux pour les voyageurs pressés de passer par
Paris.
Depuis Limoges, il faut souvent trois heures pour rallier Bordeaux et près de
quatre heures pour rejoindre Clermont-Ferrand. Le parcours ne comporte pas
moins de quatre rebroussements - Périgueux en Dordogne, Saint-Sulpice-Laurière
en Haute-Vienne, Gannat et Saint-Germain-des-Fossés dans l'Allier - qui font
perdre chacun vingt minutes. La vitesse commerciale est ainsi ramenée à 86
kilomètres à l'heure. La vitesse de pointe, quant à elle, plafonne à 100
kilomètres à l'heure et sur seulement 20 % du trajet. Le matériel est obsolète
; d'ailleurs, une des motrices utilisées aujourd'hui est déjà exposée au musée
du chemin de fer de Mulhouse !
(Sourires.)
Cette situation est d'autant plus préoccupante que l'autoroute Bordeaux -
Clermont-Ferrand ne sera pas mise en service avant 2015 et que les liaisons
aériennes sont insuffisantes et surtout très onéreuses. La majorité des
voyageurs ne peut donc emprunter d'autres moyens de transport que le train.
La situation est grave, car cette ligne est un facteur de cohésion
territoriale fondamental pour l'avenir des régions concernées et surtout du
Limousin. Cette liaison ferroviaire est vitale pour Guéret et très importante
pour Limoges, qui est le socle d'une offre de transport connectée aux
radiales.
Limoges est une étoile ferroviaire importante où les correspondances sont
nombreuses, et le site de sa gare est aujourd'hui un modèle d'intermodalité
avec la mise en service du centre intermodal d'échanges de Limoges.
Monsieur le ministre, voilà où nous en sommes aujourd'hui. Que faudrait-il
faire pour rendre cette ligne attractive, compétitive, en un mot utile ?
Tout d'abord, il faudrait supprimer les rebroussements ; ensuite, il serait
nécessaire de favoriser les liaisons ville à ville qui correspondent aux
données socio-économiques et aux souhaits de la clientèle. En outre, bien
évidemment, il est important que les usagers bénéficient de bien meilleures
conditions de confort : beaucoup d'entre eux souhaiteraient pouvoir mettre à
profit la durée de leur trajet pour travailler ; or, il leur est impossible
d'écrire et même de lire dans les conditions actuelles.
Enfin, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous me rassuriez quant au
projet de modification du tracé que l'on prête à vos services. La ligne
Bordeaux-Lyon doit continuer à passer par Limoges, y compris et surtout pour le
fret, car la gare de triage du Puy Imbert, à Limoges, est la mieux outillée
pour gérer ce genre de trafic.
Monsieur le ministre, les usagers mais aussi les responsables
socio-économiques, les élus du Limousin sont inquiets, et j'attends bien
évidemment de vous que vous apaisiez leurs craintes.
M. René-Pierre Signé.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, le Gouvernement impulse depuis le mois de juin 1997 - et nous allons
encore renforcer cette volonté en favorisant le ferroutage - une politique des
transports qui consiste, en quelque sorte, à rééquilibrer la place des
différents modes de transport en privilégiant à la fois le transport collectif,
pour les voyageurs, mais aussi le transport par rail et par voie d'eau, pour
les marchandises, et ce afin de faire jouer la complémentarité, d'utiliser au
mieux les atouts de chaque mode de transport, notamment du point de vue
économique, de l'environnement et aussi, pour une part, de l'aménagement du
territoire.
En matière ferroviaire, l'extension du réseau à grande vitesse ne se fait plus
au détriment de l'entretien, de la régénération des lignes classiques ou de
l'emploi à la SNCF. C'est là une nouveauté qui marque les choix du gouvernement
actuel. Les résultats obtenus désormais sont très encourageants, puisque la
SNCF regagne progressivement le terrain perdu en matière de transport de
voyageurs et de fret, et même de résultats financiers et d'emplois.
Par ces caractéristiques et les bassins d'activité qu'elle relie et irrigue,
la ligne reliant Bordeaux à Lyon par Limoges, Montluçon et Roanne présente
effectivement un potentiel tout à fait intéressant, qu'il convient à mon avis
de valoriser.
Je vous rappelle d'ailleurs à cet égard qu'en 1998, à Limoges, j'avais annoncé
la participation de l'Etat au financement d'une étude sur l'amélioration de la
desserte de cet axe et de l'axe Sud passant par Brives et Clermont-Ferrand.
Confiée à un cabinet privé, cette étude, sous maîtrise d'ouvrage du conseil
régional du Limousin, est en cours de réalisation. Elle s'appuie sur une
approche segmentée, avec le triple objectif d'améliorer la qualité de service
de la liaison de bout en bout - vous avez souligné que le besoin est réel, et
je suis de votre avis -, de mieux satisfaire la demande « moyenne distance » et
de mieux coordonner la desserte par rapport aux services régionaux de
voyageurs.
D'ores et déjà, les contrats de plan signés par l'Etat et les régions Auvergne
et Rhônes-Alpes, région également impliquée dans cette opération, prévoient la
résorption du rebroussement de Saint-Germain-des-Fossés, qui devrait coûter
environ 70 millions de francs pour un gain de temps de vingt minutes. Si mes
informations sont exactes, la résorption du rebroussement de
Saint-Sulpice-Laurière, qui, elle, n'a pas été inscrite au contrat de plan
Etat-région Limousin, coûterait 20 millions de francs pour le même gain de
temps. Et si, comme vous avez eu raison de le souligner, on supprimait les
quatre rebroussements, c'est près d'une heure et demie qui serait ainsi gagnée.
C'est substantiel !
De son côté, la SNCF étudie différentes solutions techniques pour le matériel.
Elle fera des propositions en fonction des conclusions de l'étude que j'ai
évoquée.
Actuellement, dans sa phase finale, cette étude vise à élaborer des scénarios,
une fois toutes les potentialités de trafic analysées, le recensement des
besoins de déplacement et les coûts d'exploitation des services établis, l'état
de l'infrastructure et du matériel identifié. L'Etat, la SNCF, RFF et les
régions concernées devront ensuite examiner ensemble ces scénarios et décider
des mesures à prendre pour rétablir un niveau de service adapté aux besoins et
aux différents impératifs de chacun des partenaires, mais aussi propice au
développement de l'activité ferroviaire, dans l'intérêt même et du trafic de
voyageurs et du transport de marchandises.
M. Jean-Pierre Demerliat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat.
Monsieur le ministre, je vous remercie des précisions que vous avez bien voulu
m'apporter.
Le Gouvernement a raison de privilégier le transport collectif par rapport au
transport individuel, et notamment le rail, moyen de transport confortable,
rapide et en tout état de cause adapté au mode de vie actuel des Français.
Si, dans un temps rapproché, on pouvait proposer aux voyageurs une offre
correspondant à leur demande, à leurs besoins, à ce qu'ils sont en droit
d'attendre à l'aube de ce xxie siècle, nul doute - toutes les études le
démontrent - que la fréquentation pourrait très vite doubler.
De même, s'agissant du fret, une adéquation de l'offre à la demande inciterait
ceux qui ont des marchandises à faire transiter à travers le Massif central à
utiliser beaucoup plus la voie ferrée, en particulier le ferroutage, au
détriment du transport par route, générateur d'accidents et qui coûte fort cher
à la collectivité.
Monsieur le ministre, les habitants de l'ouest du Massif central, en
particulier du Limousin, puisque je crois savoir que c'est surtout à l'est du
Massif central que l'on va apporter les premières améliorations, comptent sur
vous et comptent sur le Gouvernement.
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