SEANCE DU 1ER FEVRIER 2001
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Monsieur le ministre délégué à la ville, notre pays compte actuellement un
million de personnes dépendantes âgées de soixante ans et plus, et ce nombre
augmentera fortement dans les prochaines années. Apporter une réponse
satisfaisante aux besoins exprimés par les personnes âgées dépendantes et par
leur famille constitue donc un défi majeur lancé à notre société tout entière,
au Gouvernement comme aux collectivités territoriales.
Aujourd'hui, seules cent trente mille personnes bénéficient de la prestation
spécifique dépendance. C'est trop peu. Dans nos départements, et conjointement
avec les associations, nous avons tiré les enseignements de la mise en place de
cette prestation.
Issue d'une proposition de loi émanant de la majorité sénatoriale, que nous
n'avions pas soutenue, la prestation spécifique dépendance, mauvaise au départ,
est mauvaise à l'arrivée.
Les inégalités que les parlementaires de gauche craignaient alors et n'ont
cessé de dénoncer depuis sont maintenant flagrantes. Les différences de
montants constatées entre les départements sont importantes, puisqu'elles vont
de un à quatre en établissement et du simple au double pour les personnes
vivant à domicile.
M. Hilaire Flandre.
Avec vous, c'était rien !
Mme Dinah Derycke.
Par ailleurs, cette prestation n'est pas suffisamment étendue et ne prend pas
en compte certaines dépendances, comme la cécité ou la malvoyance.
Un certain nombre de dysfonctionnements existent également. Ainsi, lorsqu'une
personne âgée vivant à son domicile est hospitalisée, la prestation est
suspendue. La personne âgée n'a donc d'autre solution que de procéder au
licenciement de son aide-ménagère et d'en acquitter personnellement et
financièrement les charges. Pourtant, à la sortie de l'hôpital, elle devra
réembaucher du personnel. Convenez que la situation n'est satisfaisante ni pour
les personnes âgées, ni pour les salariés qui les accompagnent.
En outre, le montant de la prestation est généralement très insuffisant au
regard des besoins. Certes, la solidarité familiale pallie souvent les carences
du système, mais de nombreuses familles aux revenus modestes sont en
difficulté.
Bref, le système est dissuasif, discriminatoire et insuffisant.
Une réforme est nécessaire. Elle soit s'inscrire dans la cadre de la
décentralisation voulue par le Premier ministre.
M. le président.
Veuillez conclure, madame le sénateur.
Mme Dinah Derycke.
J'en viens à ma question. Le Gouvernement a réagi en demandant deux rapports,
l'un à Mme Paulette Guinchard-Kunstler, l'autre à M. Jean-Pierre Sueur. Mme la
ministre de l'emploi et de la solidarité a annoncé le dépôt d'un projet de loi
qui reposerait sur trois principes : la création d'un droit reconnu aux
personnes en fonction de leurs revenus et de leur niveau de dépendance, une
égalité de droit sur tout le territoire et l'ouverture d'une aide à toutes les
personnes âgées qui en ont besoin.
Qu'en est-il exactement aujourd'hui, monsieur le ministre ? Dans quels délais
cette réforme, qui répond à une préoccupation très forte de nos concitoyens,
sera-t-elle concrétisée ?
(Applaudissements sur les travées socialistes,
ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué à la ville.
Madame, vous l'avez rappelé, la dépendance
des personnes âgées est devenue un enjeu de société de première importance.
Toutes les familles françaises sont ou seront confrontées à la nécessité de
trouver une prise en charge adaptée pour ceux des leurs qui, atteints par
l'âge, ont besoin d'être aidés à des degrés divers dans les actes de la vie
quotidienne.
Conscient de cette attente de nos concitoyens, le Gouvernement a décidé
d'apporter aux problèmes que rencontrent actuellement les personnes âgées et
leur famille toutes les réponses nécessaires. Cette réponse, le gouvernement
précédent avait prétendu la donner en créant la prestation spécifique
dépendance par la loi du 24 janvier 1997, que vous avez rappelée. Mais, comme
vous l'avez dit, la PSD est aujourd'hui un échec, même si elle comporte
quelques points positifs, comme l'idée d'un plan d'aide globale et d'une grille
d'évaluation de la dépendance.
Perçue par un nombre insuffisant de personnes âgées, inégalitaire, puisque
très variable d'un département à l'autre, elle doit être aujourd'hui
complètement modifiée. C'est donc une vraie rupture que nous entendons
réaliser. Un droit objectif sera reconnu aux personnes âgées en fonction de
leur degré de dépendance et de leur revenu. Ce droit sera identique sur tout le
territoire à situation comparable. Il sera étendu à toutes les personnes âgées
qui ont besoin d'être aidées.
M. Henri de Raincourt.
Qui va payer ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Enfin, ce droit sera mis en oeuvre dans le cadre d'une
gestion de proximité afin de personnaliser les modalités de l'aide apportée à
la personne âgée en fonction de ses besoins particuliers. Il nous faut offrir
une prestation sur mesure.
Au-delà de ces questions de principe, il faudra aussi aborder des problèmes
plus ponctuels tels que ceux que vous évoquez : le traitement de la prestation
autonomie durant les périodes d'hospitalisation ou les aides fiscales,
notamment.
Le débat parlementaire permettra d'avancer sur ces questions, le Gouvernement
a en effet pour objectif de rendre effective cette nouvelle prestation
autonomie dès le 1er janvier 2002. Dès que le calendrier du Sénat le permettra
(Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants)
, nous aurons l'occasion d'examiner ensemble ce texte de loi.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur celles
du groupe communiste républicain et citoyen.)
AVENIR DES RETRAITES