SEANCE DU 28 MARS 2001
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Candidatures à une commission mixte paritaire
(p.
1
).
Suspension et reprise de la séance (p. 2 )
3. Interruption volontaire de grossesse et contraception. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 3 ).
Article additionnel avant le titre I{er (p. 4 )
Amendement n° 1 de la commission et sous-amendement n° 57 de M. Jean-Claude Carle ; amendement n° 43 de Mme Claire-Lise Campion. - MM. Francis Giraud, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Jean-Claude Carle, Mme Claire-Lise Campion, MM. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé ; Lucien Neuwirth, Serge Lagauche, Patrick Lassourd. - Retrait du sous-amendement n° 57 ; adoption de l'amendement n° 1 insérant un article additionnel, l'amendement n° 43 devenant sans objet.
Division et article additionnels avant le titre I{er (p. 5 )
Amendements n°s 56 et 55 de M. Jean-Claude Carle. - MM. Jean-Claude Carle, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 55, l'amendement n° 56 devenant sans objet.
Article 1{er (p. 6 )
MM. Lucien Neuwirth, Jean-Pierre Fourcade.
Amendements identiques n°s 2 de la commission et 58 de M. Jean-Claude Carle
; amendement n° 23 de M. Lucien Neuwirth. - MM. le rapporteur, Jean-Claude
Carle, le ministre délégué, Mmes Hélène Luc, Marie-Madeleine Dieulangard, MM.
Claude Huriet, Charles Descours, Serge Lagauche. - Adoption des amendements
n°s 2 et 58 supprimant l'article, l'amendement n° 23 devenant sans
objet.
Article additionnel avant l'article 2 (p. 7 )
Amendement n° 44 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Article 2 (p. 8 )
MM. Lucien Neuwirth, Jean-Guy Branger.
Amendements identiques n°s 3 de la commission et 59 de M. Jean-Claude Carle
; amendements n°s 27 de M. Lucien Neuwirth et 45 de Mme Claire-Lise Campion.
- MM. le rapporteur, Jean-Claude Carle, Lucien Neuwirth, Mme Gisèle Printz, MM.
le ministre délégué, Serge Lagauche, Jean-Pierre Fourcade, Michel Caldaguès,
Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales ; Jean
Chérioux. - Retrait de l'amendement n° 45 ; adoption des amendements n°s
3 et 59 supprimant l'article, l'amendement n° 27 devenant sans objet.
4. Nomination de membres
d'une commission mixte paritaire
(p.
9
).
5.
Interruption volontaire de grossesse et contraception.
- Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
(p.
10
).
Article additionnel avant l'article 3 (p. 11 )
Amendement n° 81 de M. Serge Lagauche. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.
Article 3. - Adoption (p.
12
)
Article additionnel après l'article 3 (p.
13
)
Amendement n° 80 de M. Bernard Seillier. - MM. Bernard Seillier, le rapporteur, Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle ; MM. Serge Lagauche, Patrick Lassourd. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 3 bis (p. 14 )
Amendements n°s 4 de la commission et 60 de M. Jean-Claude Carle. - MM. le rapporteur, Jean-Claude Carle, Mme le secrétaire d'Etat, MM. le président de la commission, JeanChérioux, Mme Claire-Lise Campion, MM. Claude Huriet, Guy Fischer, Hilaire Flandre, Serge Lagauche, Patrick Lassourd. - Adoption de l'amendement n° 4 supprimant l'article, l'amendement n° 60 devenant sans objet.
Article 4 (p. 15 )
Mme Odette Terrade.
Amendements n°s 5 de la commission et 42 du Gouvernement. - MM. le
rapporteur, le ministre délégué, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Jean
Chérioux, Jean-Louis Lorrain. - Adoption de l'amendement n° 5 rédigeant
l'article, l'amendement n° 42 devenant sans objet.
Article 5 (p. 16 )
Amendements n°s 6 de la commission, 61 de M. Jean-Claude Carle, 46 de Mme Claire-Lise Campion et 64 de Mme Odette Terrade. - MM. le rapporteur, Jean-Claude Carle, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, le ministre délégué, Jean-Louis Lorrain. - Adoption de l'amendement n° 6 supprimant l'article, les amendements n°s 61, 46 et 64 devenant sans objet.
Article 6 (p. 17 )
M. Jean-Guy Branger.
Amendements n°s 82 de M. Serge Lagauche, 7 à 10 de la commission et 41
rectifié de M. Jean Chérioux. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, Jean
Chérioux, le ministre délégué, le président de la commission, Claude Huriet,
Jean-Guy Branger. - Retrait de l'amendement n° 82 ; adoption des amendements
n°s 7 à 10 et 41 rectifié.
Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué.
- Adoption.
MM. Claude Huriet, Philippe Richert.
Adoption, par scrutin public, de l'article modifié.
Article 7 (p. 18 )
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Amendement n° 47 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM.
le rapporteur, le ministre délégué, le président de la commission. -
Retrait.
Adoption de l'article.
Article 7
bis.
- Adoption (p.
19
)
Article additionnel après l'article 7
bis
(p.
20
)
Amendement n° 83 de M. Serge Lagauche. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.
Article 8. - Adoption (p.
21
)
Article 8
bis
(p.
22
)
Amendements n°s 30 du Gouvernement, 65 de Mme Odette Terrade, 12 et 13
rectifié de la commission. - MM. le ministre délégué, Roland Muzeau, le
rapporteur, Mme Claire-Lise Campion, MM. Patrick Lassourd, le président de la
commission, Claude Huriet. - Rejet des amendements n°s 30 et 65 ; adoption
des amendements n°s 12 et 13 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Article 9. - Adoption (p.
23
)
Article additionnel après l'article 9 (p.
24
)
Amendement n° 26 de M. Claude Huriet. - MM. Claude Huriet, le rapporteur, le ministre délégué, le président de la commission, Bernard Seillier, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jean Chérioux, Patrick Lassourd. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 10. - Adoption (p.
25
)
Article 11 (p.
26
)
Amendement n° 14 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 11 bis (p. 27 )
Amendements n°s 15 de la commission, 48 de Mme Claire-Lise Campion et 66 de Mme Odette Terrade. - M. le rapporteur, Mmes Claire-Lise Campion, Danielle Bidard-Reydet, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement n° 15 supprimant l'article, les amendements n°s 48 et 66 devenant sans objet.
Article 12 (p. 28 )
Amendement n° 16 de la commission et sous-amendement n° 40 rectifié de M. Jean Chérioux. - MM. le rapporteur, Jean Chérioux, le ministre délégué. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié rédigeant l'article.
Suspension et reprise de la séance (p. 29 )
M. le président.
Article 12
bis.
- Adoption (p.
30
)
Article additionnel après l'article 12
bis
(p.
31
)
Amendement n° 49 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.
Article 13 (p. 32 )
Amendements n°s 31 du Gouvernement et 84 de la commission. - MM. le ministre
délégué, le rapporteur. - Rejet de l'amendement n° 31 ; adoption de
l'amendement n° 84.
Amendements n°s 32 et 33 du Gouvernement. - Devenus sans objet.
Amendement n° 85 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué.
- Adoption.
Amendement n° 34 du Gouvernement. - Devenu sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 14 (p. 33 )
Amendements n°s 35 du Gouvernement, 86, 87 de la commission, 72 et 73 de M.
Gaston Flosse. - MM. le ministre délégué, le rapporteur, Lucien Lanier, Claude
Huriet, Jean Chérioux, Lucien Neuwirth, Mme Danielle Bidard-Reydet. - Rejet de
l'amendement n° 35 ; retrait de l'amendement n° 73 ; adoption des
amendements n°s 86, 72 et 87.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 14 (p. 34 )
Amendement n° 63 rectifié de M. Jean-Claude Carle, repris par la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 15. - Adoption (p.
35
)
Article 16 (p.
36
)
Mme Hélène Luc.
Amendement n° 17 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué,
le président de la commission, Lucien Neuwirth. - Adoption de l'amendement
supprimant l'article.
Article 16 bis (p. 37 )
M. Jean-Guy Branger.
Amendement n° 18 de la commission et sous-amendements n°s 29 de M.
Jean-Guy Branger, 25 de M. Lucien Neuwirth, 75, 76 rectifié
bis
de M.
Bernard Seillier et 50 de Mme Claire-Lise Campion ; amendement n° 67 de Mme
Odette Terrade. - MM. le rapporteur, Jean-Guy Branger, Lucien Neuwirth, Bernard
Seillier, Mmes Claire-Lise Campion, Hélène Luc, le secrétaire d'Etat, M. le
ministre délégué. - Retrait des sous-amendements n°s 75, 29 et 50 ; adoption
des sous-amendements n°s 25, 76 rectifié
bis
et de l'amendement n°
18 modifié, l'amendement n° 67 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 16 bis (p. 38 )
Amendements n°s 51 de Mme Claire-Lise Campion et 68 de Mme Odette Terrade. -
Mmes Marie-MadeleineDieulangard, Odette Terrade, MM. le rapporteur, le ministre
délégué. - Retrait de l'amendement n° 51 ; adoption de l'amendement n° 68
insérant un article additionnel.
Amendement n° 69 de Mme Odette Terrade. - Mme Danielle Bidard-Reydet, M. le
rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Article 17 (p. 39 )
Amendements n°s 19 de la commission, 70 de Mme Odette Terrade, 37 rectifié
et 36 du Gouvernement. - M. le rapporteur, Mme Odette Terrade, M. le ministre
délégué. - Adoption de l'amendement n° 19, les amendements n°s 70, 37
rectifié et 36 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 17
ou après l'article 20 (p.
40
)
Amendements n°s 28 rectifié de M. Lucien Neuwirth, repris par la commission, et 54 de Mme Claire-Lise Campion. - M. le rapporteur, Mme Claire-Lise Campion, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement n° 28 rectifié insérant un article additionnel après l'article 17, l'amendement n° 54 devenant sans objet.
Article 18 (p. 41 )
Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 19 (p. 42 )
Amendements n°s 77 de M. Bernard Seillier, 21 de la commission et
sous-amendements n°s 78 de M. Bernard Seillier et 53 rectifié de Mme
Claire-Lise Campion ; amendements n°s 52 rectifié de Mme Claire-Lise Campion
et 71 de Mme Odette Terrade. - MM. Bernard Seillier, le rapporteur, Mmes
Marie-Madeleine Dieulangard, Claire-Lise Campion, Odette Terrade, M. le
ministre délégué. - Retrait de l'amendement n° 77 ; adoption des
sous-amendements n°s 78, 53 rectifié et de l'amendement n° 21 modifié,
les amendements n°s 52 rectifié et 71 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 20 (p. 43 )
Amendements identiques n°s 74 de Mme Claire-Lise Campion et 79 de M. Bernard
Seillier ; amendement n° 22 de la commission. - Mme Marie-Madeleine
Dieulangard, MM. Bernard Seillier, le rapporteur, le ministre délégué, Mme
Odette Terrade. - Rejet des amendements n°s 74 et 79 ; adoption de
l'amendement n° 22.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 20 (p. 44 )
Amendements n°s 38 et 39 du Gouvernement. - MM. le ministre délégué, le rapporteur. - Rejet des deux amendements.
Vote sur l'ensemble (p. 45 )
M. Jacques Machet, Mme Claire-Lise Campion, M. Roland Muzeau, Mme Anne
Heinis.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.
6. Nomination de membres
d'une commission mixte paritaire
(p.
46
).
7.
Dépôt d'un projet de loi
(p.
47
).
8.
Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
48
).
9.
Dépôt de rapports
(p.
49
).
10.
Dépôt d'un rapport d'information
(p.
50
).
11.
Ordre du jour
(p.
51
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
CANDIDATURES À UNE COMMISSION
MIXTE PARITAIRE
M. le président.
J'informe le Sénat que la commission des lois m'a fait connaître qu'elle a
procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à la commission mixte
paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en
discussion de la proposition de loi organique modifiant la date d'expiration
des pouvoirs de l'Assemblée nationale.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission
mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.
Mes chers collègues, dans l'attente de l'arrivée d'un représentant du
Gouvernement, nous allons interrompre nos travaux.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinq, est reprise à quinze heures
quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
3
INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE ET CONTRACEPTION
Suite de la discussion d'un projet de loi
déclaré d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 120,
2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence,
relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception.
[Rapport n° 210 (2000-2001) et rapport d'information n° 200 (2000-2001).]
Je rappelle que la discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion des articles.
Article additionnel avant le titre Ier
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 1, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose
d'insérer, avant le titre Ier, un article additionnel ainsi rédigé :
« La réduction du nombre des interruptions volontaires de grossesse est une
priorité de santé publique. A cette fin, le Gouvernement mettra en oeuvre les
moyens nécessaires à la conduite d'une véritable politique d'éducation à la
sexualité et d'information sur la contraception. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 57, présenté par M. Carle,
et tendant à rédiger ainsi la seconde phrase du texte proposé par l'amendement
n° 1 : « A cette fin, sont mis en oeuvre les moyens nécessaires à la conduite
d'une véritable politique d'éducation à la sexualité, d'information sur la
contraception, et d'accompagnement respectant le libre choix des femmes
enceintes que leur état place en situation de détresse. »
Par amendement n° 43, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant le titre Ier, un article
additionnel ainsi rédigé :
« L'éducation à la sexualité et l'information sur la contraception sont une
priorité de santé publique.
« Le Gouvernement mettra en oeuvre les moyens nécessaires à la conduite d'une
véritable politique dans ce domaine, notamment par la mise en place de
programmes adaptés au sein de l'éducation nationale. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 1.
M. Francis Giraud,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est un amendement de principe.
Lors de la discussion générale, j'ai exprimé le regret que ce projet de loi
relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception traite
en premier lieu - c'est l'objet du titre Ier - de l'IVG et qu'il relègue en fin
de texte, dans le titre II, le volet qui a trait à la contraception.
La commission considère, en toute logique, que l'accent devrait d'abord être
mis sur la contraception, dont l'échec éventuel conduit à l'IVG.
M. Lucien Neuwirth.
C'est une évidence !
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Elle estime, pour sa part, que la persistance d'un nombre
élevé d'IVG résulte des carences des politiques menées depuis trente ans en
faveur de l'éducation à la sexualité et de l'information sur la
contraception.
M. Lucien Neuwirth.
Très juste !
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Si la contraception est aujourd'hui largement répandue dans
notre pays, elle n'est pas suffisamment maîtrisée. La méconnaissance des
mécanismes élémentaires de la transmission de la vie reste encore grande, en
particulier chez les jeunes.
Dans ces conditions, la commission estime qu'il est de la responsabilité du
Gouvernement de définir une politique ambitieuse d'éducation responsable à la
sexualité et d'information sur la contraception, qui mobilise autant le corps
enseignant que le corps médical et ouvre le dialogue au sein des familles.
Elle propose, par conséquent, de rappeler solennellement que la réduction du
nombre des interruptions volontaires de grossesse doit constituer une priorité
de santé publique et que le Gouvernement doit mettre en oeuvre les moyens
nécessaires à la conduite d'une véritable politique d'éducation à la sexualité
et d'information sur la contraception.
M. Lucien Neuwirth.
C'est parfait !
M. le président.
La parole est à M. Carle, pour présenter le sous-amendement n° 57.
M. Jean-Claude Carle.
S'il convient d'éduquer à la sexualité et d'informer sur la contraception, il
faut aussi prévoir un accompagnement des femmes enceintes respectant leur libre
choix de recourir ou non à l'avortement.
Mon sous-amendement vise à compléter l'amendement de la commission en ce
sens.
M. le président.
La parole est à Mme Campion, pour présenter l'amendement n° 43.
Mme Claire-Lise Campion.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'il est un
point sur lequel nous semblons tous nous accorder, c'est bien la nécessité
d'améliorer notre politique en matière de contraception et d'éducation à la
sexualité.
Cependant, nous n'avons pas la même conception de ce qui doit être une
priorité de santé publique.
La commission estime que c'est la réduction du nombre des interruptions
volontaires de grossesse qui est une priorité de santé publique. Nous
considérons, nous, que ce sont l'éducation à la sexualité et l'information à la
contraception qui sont, par essence, une priorité de santé publique et qui
doivent donc constituer la base de toute politique en la matière, politique qui
ne doit pas se limiter à la réduction du nombre des interruptions volontaires
de grossesse, qui se doit d'être beaucoup plus large.
En effet, nous estimons que le nombre d'interruptions de grossesse est une
conséquence, parmi d'autres, du défaut d'information sur la contraception et la
sexualité, qu'elle n'est malheureusement pas la seule.
Il existe - nous le savons bien - d'autres incidences tout aussi dramatiques,
sinon plus, qui en découlent directement.
Je pourrais, pour vous en convaincre, mes chers collègues, me contenter de
vous signaler, à titre d'exemples, la propagation des maladies sexuellement
transmissibles, les MST, ou la triste réalité des abus sexuels.
Refuser ces réalités, lutter contre, nécessite la divulgation d'une
information qui soit adéquate et accessible à tous, et ce dès le plus jeune
âge.
Seules l'information et l'éducation sont aptes à permettre la connaissance et
le respect de son corps et de celui de l'autre, en même temps qu'une
appropriation de la contraception.
Cela suppose que l'on mène des politiques innovantes et continues associant en
toute logique l'éducation nationale mais aussi la société dans son ensemble,
afin de donner les moyens aux femmes, aux couples, aux enfants, de se prémunir
et de se protéger.
Il apparaît dès lors évident qu'on ne peut se contenter d'ériger en priorité
de santé publique la réduction des interruptions volontaires de grossesse, car
cette priorité, c'est bien l'accès à la contraception et l'information sur la
sexualité.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 57 et sur
l'amendement n° 43 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission demande à l'auteur du sous-amendement n° 57 de
bien vouloir le retirer, car elle a choisi de mettre l'accent sur l'information
et la prévention des grossesses non désirées.
Quant à l'amendement n° 43, qui va dans le même sens que celui de la
commission, il deviendra sans objet si ce dernier est adopté.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Mais le nôtre est meilleur !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1, le sous-amendement n°
57 et l'amendement n° 43 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement - je l'ai dit hier, je le répéterai
sans doute plusieurs fois aujourd'hui - partage les préoccupations de tous les
sénateurs, et la vôtre, madame Campion, qui sont ici exprimées. Cela étant, il
ne me paraît pas bon d'inscrire à cet endroit, dans la loi, l'une de ces
grandes déclarations dont je me méfie terriblement.
On dit qu'on veut en faire une priorité de santé publique. Mais voilà dix ans
qu'on dit vouloir le faire et, hier, nous avons constaté que tous les
gouvernements successifs et additionnés n'en avaient pas fait assez !
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Exactement !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Par ailleurs, je relève que l'Assemblée nationale a
introduit dans le projet un article 16
bis
relatif à l'information et à
l'éducation à la sexualité.
J'ai dit, hier, qu'ayant présenté dans ses grandes lignes le projet de santé
publique, j'allais oeuvrer. Mais notre échec, c'est celui de la société
française, qui n'a pas su, toutes composantes confondues, faire de l'éducation
à la sexualité non pas une priorité mais un succès. Nous n'en avons pas fait
assez. Il faut y remédier.
M. le président.
Le sous-amendement est-il maintenu, monsieur Carle ?
M. Jean-Claude Carle.
Compte tenu des explications de M. le rapporteur, je le retire, monsieur le
président.
M. le président.
Le sous-amendement n° 57 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Lucien Neuwirth.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth.
Monsieur le ministre, si les choses vont sans dire, elles vont encore mieux en
le disant. C'est la raison pour laquelle je voterai cet amendement.
M. Serge Lagauche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
Je fais mienne la position de principe de M. Neuwirth, mais, dans ma bouche,
cela vaut, bien sûr, pour l'amendement n° 43.
Par ailleurs, je suis très satisfait que la commission se soit opposée au
sous-amendement de M. Carle, dont le libellé laisse bien augurer des
amendements suivants de M. Carle !
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Je voterai l'amendement de la commission.
M. le ministre dit que la responsabilité est collective, qu'elle est celle de
tous les gouvernements qui se sont succédé, quelle que soit leur couleur
politique, voire de la société.
J'en suis tout à fait d'accord. Raison de plus, après ce constat d'échec, pour
inscrire cette déclaration de principe, c'est vrai, au fronton de la loi. Elle
donne tout son sens au projet, et je ne comprends donc pas qu'on puisse s'y
opposer.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
Mme Odette Terrade.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Le groupe socialiste s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, avant le titre Ier, et l'amendement n° 43 devient sans objet.
Division et article additionnels avant le titre Ier
M. le président.
Par amendement n° 56, M. Carle propose d'ajouter, avant le titre Ier, une
division additionnelle ainsi rédigée :
« Titre...
« De l'éducation sexuelle dans les établissements scolaires. »
Par amendement n° 55, M. Carle propose d'ajouter, avant le titre Ier, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Un enseignement obligatoire d'éducation sexuelle est dispensé au collège et
au lycée par un intervenant extérieur.
« Un décret précise les modalités d'application de cet article. »
Monsieur Carle, il m'apparaît qu'il convient d'examiner d'abord l'amendement
n° 55.
M. Jean-Claude Carle.
En effet, monsieur le président.
M. le président.
Vous avez la parole pour le défendre.
M. Jean-Claude Carle.
Chacun le reconnaît, l'avortement est l'aboutissement d'une situation
d'échec.
La solution passe par une politique d'information, et notamment d'éducation,
éducation qui relève, certes, de la responsabilité de la famille, mais aussi de
celle de l'école.
Malheureusement, aujourd'hui, les cours d'éducation sexuelle se déroulent dans
des conditions qui ne sont sans doute pas les plus favorables. L'élève qui
souhaite poser des questions n'osera peut-être pas le faire devant ses
camarades, au sein de la classe. Cela explique sans doute que les cours
d'éducation sexuelle ne soient guère formateurs et ne jouent donc pas le rôle
qui leur est assigné.
L'objet de cet amendement est donc d'instaurer dans les programmes des cours
d'éducation sexuelle, au même titre que les autres matières, mais avec une
méthode et une déclinaison quelque peu différentes.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud
, rapporteur.
La commission est tout à fait favorable, sur le principe, à
l'amendement n° 55. Elle constate toutefois qu'il est satisfait par son
amendement n° 18 à l'article 16
bis.
Aussi demande-t-elle à son auteur
de bien vouloir le retirer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Il est identique à celui de la commission.
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, monsieur Carle ?
M. Jean-Claude Carle.
Compte tenu des explications de M. le rapporteur, je le retire, monsieur le
président.
M. le président.
L'amendement n° 55 est retiré, et l'amendement n° 56 n'a donc plus d'objet.
TITRE Ier
INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - L'intitulé du chapitre II du titre 1er du livre II de la
deuxième partie du code de la santé publique est ainsi rédigé : "Interruption
pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse". »
Sur l'article, la parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth.
En fait, monsieur le président, mes chers collègues, je souhaite présenter mon
amendement rédactionnel n° 23, qui traduit ma volonté d'être fidèle à la loi
Veil.
L'intitulé du chapitre II du projet de loi est ainsi libellé : « Interruption
pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse. » L'intitulé prévu
par la loi Veil, apportait une précision : « en cas de situation de détresse ».
Mon amendement vise à ajouter ces mots.
M. le président.
Je considère que vous avez défendu par avance votre amendement, monsieur
Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth.
Tout à fait !
M. le président.
Sur l'article, la parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de
ce texte me laisse perplexe.
J'étais membre du Gouvernement lorsque Mme Veil a déposé le projet de loi
relatif à l'IVG et à la contraception. Il a fait l'objet de très longs débats,
et je l'ai soutenu. J'estimais en effet qu'au xxe siècle on ne pouvait pas
laisser se perpétuer un système d'avortement aboutissant à tant de détresse et
de morts, dans des conditions souvent scandaleuses.
Le texte qui a été adopté par le Parlement à l'époque comportait deux éléments
: l'IVG, dans un certain délai, en cas de situation de détresse et l'IVG pour
motif thérapeutique.
Par ailleurs, l'IVG était entourée d'un certain nombre de précautions :
entretiens préalables, accueil et conseils, qui s'adressaient en particulier
aux mineures, car c'est un problème qui intéresse aussi bien les mineures que
les majeures. Cet encadrement constituait en quelque sorte la contrepartie de
la possibilité de pratiquer une IVG.
A la lecture du projet de loi actuellement en discussion, je me demande ce qui
a motivé le Gouvernement. Veut-il céder à la mode et aller de plus en plus loin
pour satisfaire ceux qui se désintéressent complètement de la famille, des
enfants, de la démographie, et ne se préoccupent que de la jouissance immédiate
? Veut-il réagir parce qu'il n'a pas pu réunir les moyens de mettre en place,
dans tous nos établissements hospitaliers, des centres d'IVG qui fonctionnent
correctement, afin qu'un certain nombre de jeunes femmes ou de mineures
puissent trouver, quand il le faut, la possibilité de recourir à l'avortement
?
Tant que nous n'aurons pas mis en place dans l'ensemble de la chaîne
hospitalière - Dieu sait si notre pays compte suffisamment d'hôpitaux, de
cliniques et de centres de santé ! - un mécanisme qui permette effectivement de
s'assurer qu'une IVG peut être pratiquée avant la dixième semaine, je ne crois
pas que le fait d'augmenter de par la loi le délai de dix à douze semaines
apporte la moindre solution.
Je considère donc que ce texte est beaucoup plus un texte de circonstance et
de mode qu'un texte de fond et je me rallierai aux amendements proposés par la
commission des affaires sociales.
(Applaudissements sur les travées du RDSE,
de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 2 est présenté par M. Francis Giraud, au nom de la
commission.
L'amendement n° 58 est déposé par M. Carle.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 23, M. Neuwirth propose de compléter
in fine
cet
article par les mots : « en cas de situation de détresse ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 2.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'article 1er modifie l'intitulé du chapitre II du titre Ier
du livre II du code de la santé publique afin de tenir compte de l'allongement
de deux semaines du délai légal de l'IVG. Par coordination avec la position
proposée à l'article 2 - mais je reviendrai sur le fond - et dans la mesure où
la commission vous propose de refuser l'allongement de ce délai, l'amendement
n° 2 vise à rétablir l'intitulé du chapitre dans sa version antérieure au
projet de loi.
M. le président.
La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 58.
M. Jean-Claude Carle.
Cet amendement a le même objet que l'amendement n° 2 de la commission et vise
donc à supprimer l'article 1er. Ayant déjà eu l'occasion d'exprimer mon
opposition au passage de dix à douze semaines du délai légal de l'IVG, je n'y
reviendrai pas.
M. le président.
L'amendement n° 23 a déjà été défendu par son auteur.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Si l'amendement n° 2 était adopté, l'amendement n° 23
n'aurait plus d'objet puisque la commission propose de supprimer l'article
1er.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 2 et 58
ainsi que sur l'amendement n° 23 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
S'agissant de l'amendement n° 23, bien que je sois
d'habitude d'accord avec M. Neuwirth, il ne me semble pas nécessaire, dans la
mesure où nous ne sommes plus en 1975, de stigmatiser les femmes en précisant «
en cas de détresse ». Il convient au contraire de considérer qu'elles sont
responsables d'elles-mêmes et que, lorsqu'elles demandent une IVG, leur
situation est déjà suffisamment difficile pour ne pas la souligner.
Je regrette de devoir vous dire cela parce que je sais que tel n'est pas votre
intention. Néanmoins, le Gouvernement demande le rejet de l'amendement n°
23.
Par ailleurs, l'objet même du projet de loi étant d'allonger le délai légal du
recours à l'IVG, nous demandons le rejet de l'amendement n° 2, déposé par la
commission.
Je profite de cette intervention pour apporter une précision à M. Fourcade.
Nous avons eu ce débat hier pendant de longues heures : hélas, il est
nécessaire de proposer par le biais d'une loi de porter le délai de l'IVG de
dix semaines à douze semaines.
Un sénateur du RPR.
Et il faut des moyens !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Les moyens, nous nous efforcerons de les trouver, cette
question ne constitue pas une raison pour rejeter le principe de l'allongement
du délai.
Un refus de cette mesure relève d'un état d'esprit. Beaucoup de médecins ne
veulent pas pratiquer d'IVG, ils font jouer la clause de conscience, ce que je
comprends bien. Mais si les moyens ne sont pas donnés, c'est que, souvent, les
médecins considèrent, hélas, l'IVG comme une discipline secondaire.
Comme vous, je suis partisan de réduire au maximum le nombre d'avortements,
comme chez nos voisins européens. Mais, pour cela, il faudrait pratiquer une
politique différente, d'un point de vue général et pas seulement en matière de
santé, monsieur Fourcade.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 2 et 58.
Mme Hélène Luc.
Je demande la parole contre ces amendements.
M. le président.
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après mes
amis OdetteTerrade et Guy Fischer, après Elisabeth Guigou et Bernard Kouchner,
qui l'ont fort bien exprimé, je veux redire que, par le biais de cet amendement
n° 2 et de ceux qui suivent, la commission des affaires sociales entend
procéder à une réécriture complète de ce projet de loi.
Le ton est donné dès le début, puisque cet amendement n'a pour seul objet que
de s'opposer à l'allongement du délai légal pour une IVG de dix semaines à
douze semaines de grossesse, allongement qui constitue une mesure phare de ce
projet de loi.
Pour moi, comme je l'ai dit avec insistance au nom de mon groupe lors de la
prorogation de la loi Veil en 1979, grâce, d'ailleurs, à l'appui des
parlementaires de gauche, l'IVG doit rester un dernier recours. Ce n'est pas un
acte banal et anodin. C'est pourquoi il faut développer de manière
significative, et sans commune mesure avec ce qui a été fait jusqu'à
maintenant, la contraception.
Il faut bien reconnaître que la pratique d'une IVG est un échec pour notre
société, pour nous tous, ainsi que vous venez de le dire, monsieur le ministre.
Il n'en demeure pas moins que nous ne pouvons que nous opposer de la manière la
plus ferme à ce contre-projet élaboré par certains de nos collègues de la
majorité sénatoriale, qui ont du mal à cacher leur opposition idéologique à une
quelconque évolution de la législation lorsque l'on aborde la question du droit
des femmes à disposer librement de leur corps.
Lorsque, hier soir, nous sommes allés avec OdetteTerrade et Guy Fischer à la
rencontre des femmes qui manifestaient devant le Sénat avec leurs associations
- elles sont d'ailleurs présentes dans les tribunes aujourd'hui - la CADAC, le
planning familial, Ras-le-front, Femmes solidaires, Mix-cité, les Femmes
turques, le collectif Femmes libres, toutes ont tenu à ce que nous vous disions
qu'en fait vous vous opposez aux droits des femmes à disposer librement de leur
corps au moment même où la parité entre en application dans les conseils
municipaux des villes.
Prenant le prétexte d'une augmentation des risques médicaux liée à une
intervention plus tardive, nos collègues refusent l'allongement du délai et
préféreraient qu'au-delà de dix semaines une femme souhaitant avorter ne puisse
le faire qu'après avoir été entendue par une commission.
Nous sommes tout autant soucieux que vous de la santé des femmes, mes chers
collègues, et je veux redire ici qu'après avoir entendu toutes les personnes
qualifiées, l'allongement de deux semaines ne pose pas de problèmes pour la
santé des femmes.
Nous ne partageons donc pas votre opposition à la nouvelle législation, car
l'idée qui se profile est que les femmes ne seraient pas aptes à décider par
elles-mêmes de la maîtrise de leur fécondité et qu'elles auraient forcément
besoin d'avoir recours à l'avis et à l'autorisation d'un panel de
professionnels pour disposer de leur corps.
Nous tenons à réaffirmer ici que la décision de subir une interruption
volontaire de grossesse - qui n'est pas une chose facile, et il ne faut pas
culpabiliser les femmes - appartient à la femme, à elle seule et à son
couple.
C'était d'ailleurs l'esprit de la loi Veil, qui remettait la décision
d'avorter entre les mains de la femme et du couple, et non des médecins.
Je tiens d'ailleurs à réaffirmer ici la capacité de choisir en toute
connaissance de cause qui caractérise les femmes autant que les hommes.
De la même façon, nous désapprouvons la position de la commission des affaires
sociales visant à maintenir le caractère obligatoire de l'entretien préalable à
une IVG. Mais nous aurons l'occasion de revenir sur ce point dans la suite du
débat.
Nous estimons fort regrettable l'attitude de la commission des affaires
sociales alors que, durant la discussion relative à la contraception d'urgence,
elle avait adopté une attitude constructive, que je tiens à souligner.
M. Neuwirth, je veux vous dire que le manque de moyens dans les hôpitaux ne
peut servir de prétexte pour refuser le délai de deux semaines
supplémentaires.
L'allongement du délai de deux semaines est, à court terme, la solution la
plus acceptable car, pour diminuer le nombre des avortements, il ne sert à rien
de les rendre plus difficiles réglementairement. Une femme qui désire avorter
le fait et le fera toujours, parfois en partant à l'étranger, parfois au risque
de sa vie. Il s'agit donc de diminuer le nombre de grossesses non désirées - 3
000 adolescentes dans notre pays ont un enfant sans l'avoir désiré - en
privilégiant la contraception, mais en offrant aussi la possibilité aux femmes,
en dernier recours, d'avorter, même tardivement, en toute connaissance, en
toute liberté et en toute sécurité, en donnant aussi la reconnaissance et les
moyens aux médecins qui pratiquent ces avortements.
Le texte issue des travaux de la commission des affaires sociales ne
correspond pas du tout à notre vision de l'évolution souhaitable du droit à
l'interruption volontaire de grossesse. Aussi, nous nous opposerons à
l'ensemble des amendements de nos collègues.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Vous êtes opposés à l'extension du délai de dix à douze semaines. En fait,
soyons clairs : sous prétexte que cette mesure ne règle pas tous les cas, vous
ne souhaitez pas éviter à deux, trois ou quatre milliers de femmes des moments
inutilement douloureux.
Si nous souhaitons, quant à nous, que ce délai soit allongé, c'est parce que
nous considérons notamment que, pour les femmes qui subissent une IVG avant la
fin du délai légal de dix semaines, les démarches se font dans la bousculade et
dans l'urgence. Qui subit cela ? Les femmes d'abord, les médecins ensuite.
Restent les problèmes techniques sur lesquels se cristallisent un certain
nombre de réserves, au moins publiquement, de la part de plusieurs médecins. On
sait que c'est un peu plus compliqué, un peu moins facile. Après dix semaines,
l'IVG nécessite une surveillance plus longue et une autre méthode, sans doute
une autre préparation, surtout pour les plus jeunes filles.
N'oublions pas que l'on dénombre des grossesses non désirées chez de très
jeunes filles, qui, vous l'avez d'ailleurs souligné, ne comprennent pas
toujours très bien ce qui leur arrive. Cela veut dire que l'éducation à
l'école, dans la famille, au lycée ne se fait pas. C'est grave ! C'est un
problème de santé. C'est un problème politique. Sur ce point, du moins, nous
sommes d'accord dans cet hémicycle !
Le texte s'adresse aussi à ces jeunes filles. Souvent, elles sont désemparées
et commencent avec retard les démarches pour l'IVG.
Le Comité national consultatif d'éthique récuse la thèse de l'eugénisme, dont
le risque est évoqué contre le passage de dix à douze semaines.
Vous n'êtes pas dans une démarche de reconnaissance d'un droit pour la femme.
A l'Assemblée nationale, notre collègue Marie-Thérèse Boisseau l'a dit
clairement : « C'est une demande antinaturelle qui ne correspond pas à un
droit, elle représente une réponse à une triste réalité. » Pourquoi les femmes
auraient-elles moins le sens de l'éthique que les hommes, que vous, messieurs
?
M. Hilaire Flandre.
Personne n'a jamais dit ça !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Elles n'avortent pas à cause d'un désir d'enfant parfait. Et même si une ou
deux le faisaient, on ne fait pas la loi pour un ou deux cas !
A dix semaines, on connaît déjà le sexe. Demain, avant dix semaines, on
décèlera des anomalies petites et/ou lourdes. Faudra-t-il alors réduire les
délais ? Ceux qui craignent de telles réactions chez les femmes ont-ils accès à
leur psychologie lorsqu'elles découvrent des anomalies chez leur foetus ? Il
s'agit d'imputations d'intention qui n'ont aucune valeur !
Les femmes sont en droit de protester quand on leur refuse le droit de
délibérer, de réfléchir et de prendre des décisions dont les raisons seront
jugées à l'échelle de toute leur vie et devant leur conscience.
Le pari de la démocratie moderne est de considérer que les capacités de
raisonnement et d'évaluation se développent lorsqu'on leur donne l'occasion de
s'exercer et qu'une assez grande diversité de points de vue est garantie. Cela
représente un idéal. Si l'on y souscrit, on peut être favorable à la
libéralisation de la loi actuelle sur l'avortement.
(Applaudissements sur
les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Monsieur le ministre, je pense que, contrairement à votre collègue, vous
accordez quelque crédibilité au document que je vous ai remis cette nuit. Il
fait apparaître des solutions et des attitudes qui, certes, sont contrastées,
mais qui devraient éclairer davantage le débat qui s'ouvre maintenant.
Nous ne prétendons pas, mes chers collègues, que l'allongement de la durée
légale d'interruption volontaire de grossesse réglera tout. Notre crainte est
non seulement qu'il ne réglera rien, mais qu'il aggravera peut-être même la
situation actuelle. Je vais m'en expliquer une nouvelle fois.
M. Raymond Courrière.
Ah non !
M. Claude Huriet.
Vous avez dit à l'instant, monsieur le ministre, qu'il appartiendrait au
Gouvernement de mettre en place les moyens nécessaires pour que les
interruptions tardives de grossesse puissent intervenir dans des conditions de
nature à satisfaire à ces besoins que nous ne contestons pas et qui
correspondent à des situations médicales et psychologiques souvent
dramatiques.
Le Gouvernement mettra donc, avez-vous dit, en place les moyens nécessaires.
Mais, monsieur le ministre, les moyens nécessaires, ce ne sont pas seulement
les moyens techniques, le plateau chirurgical, ce sont aussi les moyens
humains.
Or ces derniers sont d'ores et déjà insuffisants et chacun, quel que soit son
point de vue sur la suite du débat, est d'accord pour reconnaître qu'ils se
ressentent de la baisse de motivation des intervenants actuels par rapport aux
militants de la première heure en faveur des interruptions volontaires de
grossesse.
Ce n'est pas d'un coup de baguette magique que le Gouvernement pourra inverser
cette tendance démographique, d'ailleurs gravement préoccupante.
Il apparaît à l'évidence, mes chers collègues, que, pour pratiquer des
interrutions tardives, les compétences médicales et techniques ne s'improvisent
pas. On aura besoin de plus de gynécologues consentant à pratiquer ces gestes
chirurgicaux. On aura besoin de plus d'anesthésistes. Or ces besoins, vous le
savez bien, monsieur le ministre, ne pourront pas être immédiatement
satisfaits, ce qui signifie que si la loi, comme on peut le redouter, prolonge
le délai légal de deux semaines, pendant une période dont personne ne peut
préjuger la durée, la situation sera pire puisque des femmes, désormais
autorisées par la loi à recourir à des interruptions volontaires tardives,
constateront à leur grand regret, et au nôtre, que les moyens suffisants n'ont
pas été mis en place.
Nous courons aussi le risque, ce que mon questionnaire illustre maintes fois,
de démotiver les équipes actuelles qui, souvent, peinent à exercer cette tâche
difficile, ingrate et humainement parfois nécessaire qu'est l'interruption
volontaire de grossesse dans les conditions législatives légales actuelles.
Voilà les raisons pour lesquelles nous voterons l'amendement n° 2 de la
commission des affaires sociales.
M. Raymond Courrière.
Eh voilà ! Cela s'appelle un prétexte !
M. Charles Descours.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers confrères,...
Un sénateur socialiste.
Collègues !
M. Charles Descours.
Non ! Chers confrères !
M. Lucien Neuwirth.
Nous parlons aux médecins.
M. Charles Descours.
... s'il y a quelque chose que la médecine m'a appris, comme à Claude Huriet,
à Bernard Kouchner ou à Francis Giraud, c'est de ne pas porter de jugement sur
les personnes qui se présentent à nous. Quand nous voyons arriver un malade,
nous ne jugeons pas ce qu'il a fait. Nous sommes face à quelqu'un qui est en
détresse, qui a des difficultés de santé, psychiques, mentales ou organiques,
et nous essayons de le soulager. Dans ce débat, qui est un débat de société, je
voudrais que nous adoptions, comme ce fut le cas lorsque nous avons élaboré les
lois relatives à la bioéthique, le même point de vue. Certes, nous sommes de
droite ou de gauche, mais c'est l'écume des jours, comme aurait dit Boris Vian
!
Des hommes et des femmes sont confrontés au problème de la procréation comme
ils le sont depuis quelques centaines de milliers d'années. Ce n'est donc pas
par une loi ou une modification de la loi que nous allons régler ces problèmes,
qui sont des problèmes existentiels beaucoup plus importants que les partis
politiques auxquels nous appartenons ! Nous nous efforçons, les uns et les
autres, de réfléchir à la façon de répondre aux questions des femmes qui, dans
le cas d'une grossesse non désirée, se présentent à des médecins.
Je voudrais rappeler, pour qu'il n'y ait pas d'anathème, que la loi Veil a été
discutée puis réexaminée sous des gouvernements de droite. Merci donc à nos
collègues de gauche de ne pas nous donner de leçons !
M. Raymond Courrière.
Cela vous a été imposé !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Grâce à l'appui de la gauche !
M. Charles Descours.
Attendez ! Le Premier ministre, le ministre de la santé étaient de droite !
Dans quelques années, on nous expliquera que c'est nous qui avons fait les 35
heures !
(Rires.)
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Cela ne m'étonnerait pas !
M. Charles Descours.
Ecoutez, il y avait un Président de la République, qui était M. Giscard
d'Estaing, un Premier ministre, qui était Jacques Chirac, puis Raymond Barre,
un ministre de la santé, qui était Mme Veil puisJacques Barrot !
Mme Hélène Luc.
Eh oui, c'est vrai ! Mais votre majorité n'a pas voté à l'unanimité ! Vous ne
voulez pas l'entendre dire ; c'est pourtant vrai !
M. Charles Descours.
Permettez-moi de souligner qu'il s'agit d'hommes et de femmes qui étaient de
droite à l'époque, et qui le sont toujours ! Par conséquent, arrêtez de nous
donner des leçons !
(Applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
Aujourd'hui, que constatons-nous ? Plus de 200 000 interruptions volontaires
de grossesse ! Nous en sommes tous d'accord.
Nous avons un échec collectif à assumer. Je vous rappelle en effet que, depuis
1981, chers collègues, vous avez été au pouvoir plus souvent que nous ; vous
avez donc au moins autant de responsabilités que nous en la matière. Si nous
enregistrons aujourd'hui 214 000 IVG, c'est autant la faute de la gauche que de
la droite.
Mme Hélène Luc.
Tout le monde a sa responsabilité !
M. Charles Descours.
Je veux bien que les médecins, dont je suis, portent une responsabilité
particulière et que le corps médical n'ait pas fait ce qu'il fallait pour
prendre en charge ce problème, pour des raisons diverses et variées, notamment
dans les hôpitaux, et j'y étais.
Quant à l'éducation nationale, cela a été l'un de ses multiples échecs, et il
n'est pas la peine d'en rajouter. Probablement, nous en sommes tous
coupables,...
Mme Hélène Luc.
Absolument !
M. Charles Descours.
... notre société est coupable.
Pourquoi avons-nous échoué, en France, là où d'autres pays ont réussi ? Le
fait est là. Arrêtons donc au moins de nous jeter des statistiques à la tête
comme si nous n'étions pas tous coupables dans cette affaire !
Moi, je crois que ce qu'a dit notre collègue Claude Huriet est absolument
capital. Nous nous sommes efforcés, notamment notre rapporteur, le professeur
Francis Giraud, et beaucoup d'intervenants dans la discussion générale hier,
d'éviter de déraper sur le terrain idéologique. Oui, aujourd'hui, nous
constatons un échec de l'IVG et de la contraception. Bien sûr, des mesures
ponctuelles pourraient être prises pour améliorer la situation, notamment pour
que les contraceptifs soient remboursés convenablement et que les pilules
mini-dosées ne soient pas moins remboursées que les pilules maxi-dosées, sauf à
créer un véritable déni de soins pour les femmes qui recourent à ces moyens
contraceptifs. Mais, comme le révèle l'enquête de Claude Huriet, des personnes
qui ont été des militants de l'IVG entre 1968 et 1970, et qui aujourd'hui
approchent de l'âge de la retraite sont inquiètes, nous l'avons tous constaté
dans nos départements, à l'idée de devoir prendre en charge, avec les moyens
médicaux qui sont les leurs, des interruptions volontaires de grossesse à dix
semaines parce que, techniquement, l'acte est non seulement plus compliqué,
mais aussi plus risqué.
Comment faut-il évaluer les risques supplémentaires ? Sont-ils importants ou
faibles ? Chacun dira ce qu'il voudra à ce sujet, mais ce n'est pas rationnel.
L'Académie nationale de médecine, dans son avis que je rappelais hier à la
tribune, a insisté sur ces risques supplémentaires qui nécessitent un
environnement particulier dont les centres d'orthogénie ne disposent pas
toujours compte tenu des moyens qui leurs sont offerts.
Dans l'état actuel des choses, je pense sincèrement qu'il est maladroit de
qualifier ce projet de loi d'abord d'interruption volontaire de grossesse puis
de contraception. L'habileté, en tout cas le bon ordre des choses, aurait été
d'inverser ces termes. Je suivrai donc M. le rapporteur et la majorité de mon
groupe, mais il ne s'agit pas pour nous de remettre en cause la loi Veil.
M. Raymond Courrière.
Arrêtez vos arguties !
M. Charles Descours.
Francis Giraud l'a bien dit hier : la loi Veil, c'est la loi. Il ne s'agit pas
de la remettre en cause.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Vous ne pourriez pas le faire, même si vous le vouliez !
M. Raymond Courrière.
Heureusement !
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur Descours.
M. Charles Descours.
J'attends que cessent les interruptions.
M. le président.
Vos collègues n'ont pas à vous interrompre.
M. Charles Descours.
C'est pourtant bien le cas !
Il est facile de faire de l'idéologie ! Je rappelle que les militantes de
cette grande cause dont on parle ont, pour la plupart, accès au savoir et à la
contraception. Mais nous avons tous connu, dans notre pratique médicale, des
femmes qui ont subi trois ou quatre IVG parce qu'elles n'avaient pas eu une
information correcte sur la contraception. Qu'un médecin qui siège dans cet
hémicycle, sur quelque banc que ce soit, m'explique qu'il n'a jamais vu de
femmes subir trois ou quatre IVG parce qu'elles n'avaient pas été prises en
charge correctement !
Aussi, lorsque j'entends dire qu'il faut abandonner l'entretien préalable sous
je ne sais quel prétexte idéologique, je réponds que c'est un luxe de femmes
qui savent, mais qu'il y a des milliers de femmes qui ne savent pas, or c'est à
elles aussi qu'il faut penser !
(Très bien ! et applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
M. Raymond Courrière.
C'est le Moyen Age !
M. Serge Lagauche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
Je voudrais rappeler à M. Descours que si l'on trouvait, à l'époque de
l'examen de la loi Veil, de nombreux militants progressistes dans les rues, on
comptait aussi beaucoup de gens de droite opposés à ce texte ! Si la discussion
avait lieu aujourd'hui, je ne sais pas si M. Carle, ou M. Chérioux feraient
partie de ceux qui l'adopteraient avec enthousiasme.
M. Raymond Courrière.
Bravo !
M. Charles Descours.
Ce sont des procès d'intention !
M. Jean Chérioux.
Mais qu'est-ce que cela veut dire ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Monsieur le président, mesdames, messieurs, je voudrais
répondre à Mme Luc et à Mme Dieulangard et, si vous me le permettez, revenir
strictement au texte qui nous est soumis.
L'article 2 de ce projet de la loi vise à allonger de dix à douze semaines le
délai légal pour pratiquer une interruption volontaire de grossesse. Je me dois
de rappeler que, pour justifier cette mesure, le Gouvernement invoque le
problème, réel, des femmes qui partent pour l'étranger.
Mme Odette Terrade.
Elles sont 5 000 chaque année !
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Si cette proposition est susceptible de diminuer de moitié le
nombre de ces femmes, elle ne résout en rien le sort de celles qui ont d'ores
et déjà dépassé le stade de douze semaines !
Quand on propose une mesure, autant qu'elle soit efficace et qu'elle s'adresse
à tous !
M. Jean Clouet.
Très bien!
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Je soulignerai un second point.
La médecine et, j'allais dire, la physiologie, le développement de la vie
depuis la conception jusqu'à la mort ne sont soumis à l'heure actuelle ni aux
modes, ni aux idéologies, ni aux majorités politiques...
Mme Hélène Luc.
Vous en faites, vous, de l'idéologie !
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Dire qu'il y a une différence formelle entre un délai de dix
semaines et un délai de douze semaines relève du domaine de l'anatomie, de
l'embryologie mais non de la philosophie ou de la morale.
La commission des affaires sociales quant à elle, avec bon sens, fondant sa
position sur le souci de protéger la santé des femmes, s'oppose au dépassement
de délai de deux semaines qui est proposé.
Premièrement, ce dépassement ne réglera pas la situation des femmes qui auront
dépassé ce délai supplémentaire.
Deuxièmement, les conditions changeant, les conséquences seront bien
évidemment modifiées : les risques seront accrus. Bien entendu, sur ce point,
chacun donne son opinion, maximaliste ou minimaliste. Nous avons tout de même
entendu en commission des personnes, y compris des médecins, je dois le dire,
nous déclarer qu'il n'y avait aucune différence entre les deux délais ! C'est
vraiment nier la réalité des choses.
Notre position se veut raisonnable et présente l'avantage - nous le verrons
tout à l'heure - de se préoccuper, certes dans des conditions qui ne peuvent
recueillir l'assentiment général, de toutes les femmes qui auront dépassé le
délai de dix semaines.
Pour l'ensemble de ces raisons d'ordre essentiellement médical et de bon sens,
nous persistons dans notre position et nous proposons au Sénat de supprimer
l'article 1er.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, tout se joue dans ce choix entre dix semaines ou douze.
Je le répète, et M. Blanc l'a dit hier lui-même avec beaucoup de simplicité et
de force : y a-t-il un problème moral à allonger le délai de l'interruption
volontaire de grossesse de dix à douze semaines ? Non.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Non.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Hier soir, nous étions tous d'accord sur un point : il
n'y en a pas.
Plusieurs sénateurs du RPR.
C'est évident !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Y a-t-il un problème médical à allonger ce délai de dix
à douze semaines ? Non, il n'y en a pas.
Y a-t-il un problème technique ?
M. Claude Huriet.
Oui !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Oui, monsieur Huriet, il y en a un, et j'ai lu avec
attention les documents que vous m'avez remis. J'y reviendrai lorsque j'aurai
terminé la première partie de mon exposé.
Lorsque le Sénat aura voté le retour à dix semaines, nous accepterons bien sûr
de débattre des propositions de la commission mais tout sera dit ; la messe
sera dite, si vous me permettez cette expression !
Vous avez fait référence à la loi Veil, messieurs. J'ai parlé récemment avec
Simone Veil, qui m'a déclaré qu'en 1975 le débat était le même, entre des
personnes de progrès et des partisans de l'immobilisme.
Certes, en l'occurrence, ce progrès ne fait plaisir à personne, et ne croyez
pas que nous pensions trouver une solution au malheur des femmes isolées ou au
problème plus général de l'éducation sexuelle ou de la contraception en
allongeant le délai autorisé pour l'interruption volontaire de grossesse. Ce
n'est pas notre propos.
En fait, nous sommes obligés d'agir à cause de la situation de certaines
femmes qu'il faut aider et ne pas pousser à aller en Hollande ou en
Angleterre.
Certes, il faut continuer à essayer de réduire - nous sommes tout à fait
d'accord sur ce point - le nombre des avortements, qui est excessif dans notre
pays - 220 000 - on ne comprend pas pourquoi !
Quoi qu'il en soit, voter ou non l'article 1er, c'est soit essayer d'avancer,
soit rester stationnaire - je n'ai pas dit reculer.
Monsieur Huriet, j'en viens à ce que vous proposez.
Certes, entre dix et douze semaines, il y a des différences techniques, dont
il faut tenir compte. Mais, à l'appui de votre thèse, ne retenez pas
l'argument, mauvais aux yeux du Gouvernement, que nous allons accabler un
système qui ne fonctionne déjà pas bien.
Il n'y aurait pas assez de volontaires... Mais qui sont ces volontaires ? Des
médecins de ville, des militants, ceux qui justement depuis le début
accompagnent les progrès, car ce ne sont pas les médecins qui ont « pignon sur
hôpital » qui se consacrent à ces activités que l'on néglige un peu.
Considérez les chiffres que nous avons donnés : 5 000 avortements ; cela fait
treize avortements par jour, c'est-à-dire 90 par semaine, dont il faut tenir
compte en termes de précautions supplémentaires. Ces avortements seront
pratiqués entre la dixième et la douzième semaine de grossesse, avec les
précautions médicales et chirurgicales nécessaires. Répartis sur les 95
départements, cela fait un avortement par département dont la gravité
éventuelle devra être prise en compte !
Croyez-vous vraiment qu'avec le système existant, qui n'est pas parfait, j'en
conviens - il est même mauvais - on ne puisse pas assumer cette charge ? Si
l'on avait réagi comme vous, au moment du vote de la loi Veil, que serait-il
arrivé ? Vous en parlez beaucoup de cette loi, or - et là je m'adresse à
Charles Descours en toute amitié - si l'on se remémore un peu les débats de
1975, on se rappelle qu'il y avait bien sûr une majorité dans la majorité pour
soutenir Simone Veil, mais je me souviens aussi de cette fameuse photo de Mme
Veil, accablée par les sarcasmes, voire les insultes. En tout cas, il n'y a pas
eu de conflit à l'intérieur de la gauche, qui, elle, a voté massivement. Oui,
c'était déjà un débat de société, entre le conformisme et le progrès.
Souvenons-nous en !
En tout cas, monsieur Huriet, à ce moment-là, en 1975, aucun moyen n'était
disponible ; il a fallu tout inventer et cela ne vous a pas empêché, vous-même,
de voter cette loi.
Aujourd'hui, il faut développer les moyens existants et ne pas, sous le
prétexte qu'ils sont insuffisants techniquement, refuser un progrès. Si l'on
raisonnait ainsi, on ne ferait plus jamais rien : il faudrait attendre d'avoir
construit un système destiné à l'application d'une loi pour faire voter cette
dernière !
Je le répète, il s'agit d'un débat entre le progrès et le conformisme.
M. Claude Huriet.
La prudence !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
S'il s'agissait de prudence, je pourrais partager ce
sentiment ; le conformisme, lui, je ne peux l'approuver.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Principe de précaution
!
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 2 et 58, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme Hélène Luc.
Il n'y a pas beaucoup de femmes à droite !
M. Claude Huriet.
Cela viendra !
M. Raymond Courrière.
Obscurantisme !
M. Jean Chérioux.
Réflexion injuste !
M. le président.
En conséquence, l'article 1er est supprimé et l'amendement n° 23 n'a plus
d'objet.
Article additionnel avant l'article 2
M. le président.
Par amendement n° 44, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposant d'insérer, avant l'article 2, un article
additionnel ainsi rédigé :
« La première phrase de l'article L. 2212-1 du même code est ainsi rédigée :
"La femme enceinte peut demander à un médecin l'interruption de sa grossesse".
»
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion.
Cet amendement s'inscrit parfaitement dans la logique du projet de loi, qui
vise notamment à rénover la loi de 1975 sur l'interruption volontaire de
grossesse. Il est en cohérence avec la volonté affirmée de reconnaître
l'interruption volontaire de grossesse comme un droit de toutes les femmes. Ce
droit, si nous voulons le confirmer aujourd'hui, ne peut plus être conditionné
à une situation de détresse.
Rappelons que déjà, en 1975, Mme Simone Veil avait pris soin de préciser que
seule la femme était apte à apprécier sa détresse.
Si la notion, imprégnée de précepte moral, avait été alors inscrite dans la
loi pour permettre son adoption, elle ne peut plus être acceptable
aujourd'hui.
En effet, les raisons qui incitent une femme à interrompre sa grossesse lui
appartiennent. Cette décision personnelle relève de son droit propre et le plus
intime, sans que l'on puisse lui demander de fournir des explications. Nul ne
peut se poser en juge ni s'arroger le droit de lui rappeler ce qui devrait
légitimer sa décision.
En conséquence, toute référence à une situation de détrese en tant que
justification d'une IVG se devait d'être supprimée.
L'Assemblée nationale y a procédé en rétablissant l'intitulé du chapitre tel
qu'il est issu de la loi de 1975 et en supprimant le rappel fait par le médecin
de la « limitation de l'IVG au cas où la femme enceinte se trouve placée par
son état dans une situation de détresse ».
Par cet amendement, il ne s'agit donc que de compléter un travail initié en
apportant une correction matérielle à ce qui n'est qu'un oubli.
Le groupe socialiste du Sénat, au nom de la reconnaissance d'un droit effectif
des femmes dans ce domaine, vous demande de l'adopter.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement,
qui tend à supprimer la notion de situation de détresse prévue par la loi
Veil.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, je l'ai
déjà dit tout à l'heure.
M. Raymond Courrière.
Au nom de la liberté.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, repoussé par la commission et accepté par
le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - Dans la deuxième phrase de l'article L. 2212-1 du même code, les
mots : "avant la fin de la dixième semaine de grossesse" sont remplacés par les
mots : "avant la fin de la douzième semaine de grossesse". »
Sur l'article, la parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers colègues, pour ma part,
j'avais choisi une autre voie qui est traduite dans mon amendement n° 27.
En effet, tout au long des travaux préparatoires à l'élaboration de la loi
Veil auxquels j'ai participé, il a été considéré que tous les moyens de soutien
psychologiques, sociaux et médicaux qui seraient mis en place dès la
promulgation de la loi permettraient d'accueillir avec compassion et chaleur
les femmes enceintes dans la détresse, qui éprouvent bien souvent une grande
solitude.
Or nous savons qu'actuellement un certain nombre de femmes ne parviennent pas,
dans les délais qu'elles voudraient respecter, à obtenir rendez-vous et
intervention.
Ces femmes ne sont donc pas coupables mais victimes, le dépassement du délai
étant dû principalement aux dysfonctionnements reconnus des services de l'Etat,
tant en ce qui concerne l'application de la loi de 1976 sur la contraception,
sur l'éducation, sur l'information qui est restée pratiquement lettre morte,
qu'en ce qui concerne l'application de la loi Veil.
La loi Veil prévoyait son propre réexamen dans un délai de cinq ans. Un
amendement prévoyait lui, un délai de trois ans pour que toutes les structures
d'accueil nécessaires soient enfin mises en place pour répondre aux
demandes.
C'est la raison pour laquelle, dans mon amendement n° 27, je propose que le
délai autorisé pour pratiquer l'IVG soit porté à douze semaines de grossesse à
titre transitoire, pendant une période de trois ans à compter de la date de
promulgation de la loi que nous sommes en train d'élaborer aujourd'hui.
M. le président.
La parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le principe
de l'interruption volontaire de grossesse est aujourd'hui acquis ; nous n'y
reviendrons pas.
M. Claude Estier.
Tout de même !
M. Jean-Guy Branger.
J'ai été un ardent défenseur de la loi Veil, par conséquent, je suis très à
l'aise pour en parler.
A ce jour, je pose la question de l'allongement légal du délai permettant de
pratiquer l'avortement.
Dans l'article 2 du projet de loi, le Gouvernement a prévu de prolonger ce
délai afin que les femmes puissent demander une IVG jusqu'à douze semaines de
grossesse au lieu de dix actuellement.
Est-ce un moyen de résoudre le cas des 5 000 femmes - en fait c'est de cela
qu'il s'agit - devant se rendre à l'étranger, dans des pays où la législation
est plus souple pour y subir une IVG qui serait devenue illégale en France ?
Certes, allonger le délai permettra d'éviter au moins une partie de ces
voyages forcés, qui ne font qu'ajouter au coût moral et financier de l'IVG.
Cependant, comme notre rapporteur l'a dit tout à l'heure, cet allongement ne
concernera que 3 000 femmes.
M. Raymond Courrière.
Ce n'est déjà pas mal !
M. Jean-Guy Branger.
C'est pourquoi il me semble que le principal aspect du projet du Gouvernement
n'apporte qu'une solution partielle, et non une véritable réponse, à la
détresse des femmes. Elle ne permettra pas de mettre un véritable terme à leur
souffrance.
Tout à l'heure, quelqu'un a parlé d'éthique des femmes, de droit des femmes...
Je dirai à nos collègues femmes que nous, les hommes, sommes aussi concernés
affectivement et en conscience.
Monsieur le ministre, nous avons siégé longtemps ensemble à l'Assemblée
nationale et vous connaissez parfaitement mon point de vue. Moi, je revendique
le droit de dire que les hommes sont autant concernés. Bien sûr, nous sommes
profondément attachés aux droits des femmes, et celles-ci ont le droit de
choisir, elles ont leur éthique. D'ailleurs, la femme, c'est plus grand que
l'homme ! C'est vrai !
Mme Hélène Luc.
Si, c'est vrai, il faut la laisser choisir !
M. Jean-Guy Branger.
Cela étant, nous sommes à même de partager, à la fois sur un plan affectif et
du point de vue de l'éthique, les préoccupations des femmes. Cela, je tenais à
le dire ici en cet instant.
Le Gouvernement nous propose d'aider certaines femmes, mais son texte ne
s'attaque pas au problème de fond, et celui-ci reviendra de manière récurrente
devant nos assemblées.
J'ai entendu ce que vous avez répondu tout à l'heure à M. Huriet, monsieur le
ministre. A votre place, je dirais certainement la même chose, j'en conviens.
Mais convenez qu'à la mienne vous tiendriez exactement les mêmes propos que
ceux que je tiens en cet instant.
Il ne fait pas de doute que, dans quelques années, la question d'un
allongement de deux semaines supplémentaires - voire plus - se posera à
nouveau, et cela selon l'avis même des médecins.
(Protestations sur les
travées socialistes.)
Mais si, mes chers collègues ! Je sais bien que ce n'est pas facile à
accepter, mais c'est la vérité ! En fin de compte, rien, ou presque, n'aura été
fait pour réduire le nombre colossal d'avortements pratiqués chaque année en
France.
Pourquoi adopter une disposition qui ne révèle qu'une fuite en avant, comme
l'a souligné très justement Francis Giraud, notre excellent rapporteur ?
Donnons donc plutôt de réels moyens pour que le dispositif mis en place par la
loi Veil soit enfin appliqué ! Sur ce point, nous sommes tous responsables. Je
ne critique pas tel gouvernement plutôt que tel autre : tous les gouvernements
ont échoué dans l'application de la loi Veil.
La plupart des praticiens entendus par la commission ont mis l'accent sur ce
manque évident de moyens, à la fois en matière de structures d'accueil,
d'équipement et de personnels pratiquant les IVG.
C'est ainsi qu'un certain nombre d'IVG tardives résultent des difficultés que
connaissent divers centres d'orthogénie pour accueillir et prendre en charge
rapidement les femmes concernées.
Un autre point est également à souligner. Les médecins s'accordent à dire que
la nature de l'intervention change au-delà de dix semaines. Des aménagements
techniques et une formation adaptée des personnels médicaux et non médicaux
seront donc nécessaires. Mais surtout, l'acte chirurgical deviendra moralement
plus éprouvant pour le praticien. Il ne sera pas étonnant, dès lors, de
constater une désaffection des jeunes médecins - on l'observe dès à présent
monsieur le ministre, vous le savez - pour cette activité déjà peu valorisante,
parfois même méprisée, alors qu'elle est pourtant nécessaire pour que la loi
soit appliquée.
Que faire si des médecins qui pratiquent aujourd'hui des IVG mettent en avant,
demain, la clause de conscience pour refuser d'intervenir sur des grossesses de
douze semaines ? Une pénurie de praticiens pourrait créer des difficultés
supplémentaires, voire - et je ne le souhaite absolument pas ! - être à
l'origine d'avortements tardifs.
M. Raymond Courrière.
Comment font-ils, alors, dans les autres pays ?
M. Jean-Guy Branger.
Plutôt que de demander aux parlementaires d'adopter ce nouveau délai, il
appartient au Gouvernement et aux pouvoirs publics d'une manière générale de
renforcer les moyens mis en oeuvre par la loi Veil, afin qu'elle puisse être
appliquée dans toute - je dis bien toute - sa dimension.
M. le président.
Je suis saisi de quatre amendements pouvant faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par M. Francis Giraud, au nom de la
commission.
L'amendement n° 59 est présenté par M. Carle.
Tous deux tendent à supprimer l'article 2.
Par amendement n° 27, M. Neuwirth propose de rédiger comme suit l'article 2
:
« L'article L 2212-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2212-1. -
La femme enceinte que son état placerait dans une
situation de détresse peut demander à un médecin l'interruption de sa
grossesse, qui ne peut être pratiquée qu'avant la fin de la dixième semaine de
grossesse. Le délai pourra être porté à douze semaines de grossesse, à titre
transitoire, pendant une période de trois ans à compter de la date de
promulgation de la loi n° du relative à l'interruption volontaire de
grossesse et à la contraception et de la mise en oeuvre complète des articles
L. 2214-2 et L. 2311-3 du présent code. Entre la dixième et la douzième
semaine, l'interruption de grossesse ne peut intervenir que dans les services
pratiquant des actes de chirurgie gynécologique. »
Par amendement n° 45, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent :
A. - De compléter l'article 2 par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Le même article est complété par un second alinéa ainsi rédigé :
« L'interruption volontaire d'une grossesse peut être pratiquée au-delà de
douze semaines si la femme enceinte en a, pendant le délai légal, déjà formulé
la demande auprès du personnel d'un établissement médical, social ou
d'information et d'éducation familiale. »
B. - En conséquence, de faire précéder cet article de la mention : « I. ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Nous nous sommes largement exprimés sur cet article dans le
rapport de la commission des affaires sociales et dans la discussion générale.
Je n'y reviens donc pas.
Je me permettrai toutefois d'interroger M. le ministre : quelle signification
donne-t-il à l'association qu'il a faite entre l'interruption volontaire de
grossesse et la notion de progrès ? Si dans son esprit, l'IVG correspond à un
progrès, dans le mien, elle correspond plutôt à la nécessité de secourir les
femmes en détresse. Autrement dit, si, pour le Gouvernement, l'allongement ne
pose pas en soi de problème, pourquoi n'a-t-il pas d'emblée proposé quatorze
semaines pour traiter, au moins, les cas de légitime détresse des femmes qui
dépassent les délais ?
Pour sa part, la commission des affaires sociales, confrontée à un problème, a
essayé de le traiter en termes de santé, de santé publique et surtout de santé
de chaque femme concernée. Voilà pourquoi nous proposons de supprimer l'article
2.
M. le président.
La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 59.
M. Jean-Claude Carle.
J'ai eu l'occasion de développer mon argumentation lors de la discussion
générale.
Cependant, je souhaite répondre à M. Lagauche, qui, d'une certaine manière,
m'a mis en cause.
Certes, en 1975, je n'étais pas parlementaire ; mais, si je l'avais été,
j'aurais voté la loi Veil. C'est pourquoi, aujourd'hui, je souhaite, comme M.
le rapporteur, qu'elle soit appliquée dans toute sa dimension, ainsi que l'a
dit M. Branger.
Notre position s'appuie sur des convictions profondes, que nous manifestons
dans un combat permanent visant à concilier l'éthique et la prise en compte de
la réalité.
L'éthique veut que toutes les femmes soient égales devant la vie et le droit
de la donner ou non.
La réalité, c'est que, en fonction des origines sociales, culturelles ou
ethniques, ce droit est très souvent bafoué.
Voilà le fondement de mes convictions, et peu m'importe d'être traité de
progressiste ou de conformiste !
M. le président.
La parole est à M. Neuwirth, pour défendre l'amendement n° 27.
M. Lucien Neuwirth.
Je l'ai pratiquement défendu tout à l'heure en intervenant sur l'article.
Je propose que le délai puisse être porté à douze semaines de grossesse à
titre transitoire pendant une période de trois ans à compter de la promulgation
de la loi, étant entendu que, entre la dixième et la douzième semaine,
l'interruption de grossesse ne peut intervenir que dans les services pratiquant
des actes de chirurgie gynécologiques, tant il est vrai que, à partir de la
dixième semaine, l'acte médical change de nature, car l'on passe de l'état
embryonnaire à l'état foetal.
M. le président.
La parole est à Mme Printz, pour défendre l'amendement n° 45.
Mme Gisèle Printz.
En exposant cet amendement, je pense à ce que peuvent vivre dans leur tête,
dans leur corps et dans leur vie quotidienne certaines femmes lorsqu'elles se
dirigent vers une interruption volontaire de grossesse.
Que ceux qui pensent - et ils le disent parfois - qu'il est aisé d'avorter,
allant jusqu'à insinuer qu'une femme pourrait abuser de ce droit, prenne la
peine, au moins une fois dans leur vie, d'être les témoins silencieux de ce que
représente cette démarche.
S'engager dans cette voie pour une femme relève, dans nombre de cas, d'un
véritable parcours du combattant, où il faut surmontr les obstacles les uns
après les autres et surtout aller vite, car les délais courent. Dans ce
parcours, la prise de décision et la demande ne constituent que les toutes
premières étapes.
Bien évidemment, plus une femme est fragilisée ou dans une situation
socialement défavorisée, plus les difficultés à affronter seront lourdes. Car
il existe toute une série d'interrogations et de conditions matérielles qui
peuvent rendre malaisé l'accomplissement des démarches obligatoires dans les
délais prévus par la loi : où se diriger ? Où se renseigner ? Comment se
déplacer ? Comment se libérer de son travail pour se rendre aux consultations ?
Comment s'organiser pour que ses enfants soient gardés pendant l'intervention
?
A ces difficultés s'ajoutent les carences et les dysfonctionnements du service
public hospitalier : longue attente pour obtenir un rendez-vous, périodes
critique de saturation des services...
Pour toutes ces raisons, et pour éviter que des femmes ne soient les victimes
d'éléments matériels qui les conduiraient à dépasser le délai légal, nous
proposons, par cet amendement, qu'elles soient prises en charge dès lors
qu'elles en auront fait la demande pendant ce délai.
Nous avons bien conscience que le texte présenté par le Gouvernement
apporterait, s'il était convenablement appliqué, des améliorations remarquables
tant au regard de la contraception qu'à celui de l'amélioration de l'accès à
l'IVG. Cependant, lorsqu'on entend ce qui se dit sur ces travées et lorsqu'on
sait les réticences et les blocages qui persistent, on ne peut s'empêcher
d'éprouver quelques appréhensions.
Pour cette raison, nous demandons au Gouvernement qu'il nous rassure sur les
points que nous avons évoqués et sur la bonne mise en oeuvre du projet de
loi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 59, 27 et 45 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission est évidemment favorable à l'amendement n°
59.
En ce qui concerne l'amendement n° 27, la commission proposant de supprimer
l'article, ce qui revient à maintenir le délai légal à dix semaines, si elle
est suivie par le Sénat, cet amendement n'aura plus d'objet.
S'agissant de l'amendement n° 45, nous souhaitons entendre l'avis du
Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 3 et 59
ainsi que sur les amendements n°s 27 et 45 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Sur les amendements n°s 3 et 59, je crois que tout a
été dit. La messe est dite !
(Sourires.)
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Nous en sommes aux vêpres !
(Nouveaux
sourires.)
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Plus sérieusement, je voudrais répondre à M. le
rapporteur à propos du progrès.
Je me suis mal exprimé. Je pense que l'on peut effectivement considérer comme
un progrès social, mais un progrès en quelque sorte malencontreux, le fait
d'étendre - temporairement, je l'espère - de dix à douze semaines le délai
légal pour pratiquer une IVG. Ce n'est évidemment pas un progrès au sens plein
du terme. Le progrès véritable, ce serait une utilisation plus large de la
contraception dans notre pays. Ce serait surtout que les femmes n'aient plus à
recourir à une intervention qui est très pénible pour elles, mais aussi pour
ceux qui la pratiquent, et j'en sais quelque chose, je vous l'ai dit hier
soir.
M. Jean-Guy Branger.
Très juste !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Cependant, il n'est pas de la seule responsabilité des
femmes que ce « progrès » disparaisse. Où sont les hommes dans cette affaire ?
Quelle est leur responsabilité dans la grossesse ?
Mmes Hélène Luc et Odette Terrade.
Exactement !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Que se passe-t-il lorsqu'ils s'en lavent les mains et
qu'ils laissent ces femmes, souvent issues de familles en difficulté, se
débrouiller dans la solitude la plus effrayante, avec au mieux, de temps en
temps, une amie et aussi, bientôt peut-être, ce fameux adulte pour les aider
?
(Mme Printz applaudit.)
Non, ce n'est pas un progrès ! C'est une nécessité en quelque sorte morale,
sociale, mais que ce « progrès » disparaisse, et j'en serai le premier
satisfait, tout comme vous. Je m'étais donc mal fait comprendre.
Le progrès ne sera pas de prolonger le délai jusqu'à vingt-deux semaines,
comme c'est le cas en Hollande ; mais il est vrai, répétons-le, que la
politique de contraception est un succès dans ce pays.
Je suis d'accord avec votre amendement n° 27, monsieur Neuwirth. Je vous le
dis sincèrement, bien que j'en sois un peu gêné, car, théoriquement, je devrais
dire le contraire !
(Sourires.)
Simplement, à la dernière phrase de l'amendement : « Entre la
dixième et la douzième semaine, l'interruption de grossesse ne peut intervenir
que dans les services pratiquant des actes de chirurgie gynécologique »,
j'avais envie d'ajouter : « à proximité », en prévision d'incidents possibles.
Mais ce serait encore une manière d'édulcorer votre texte ! Il est nécessaire,
compte tenu des difficultés qui peuvent intervenir entre la dixième et la
douzième semaine, de donner véritablement à ces femmes, au moins, toutes les
garanties de sécurité.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, en réponse à Claude Huriet, il doit être
possible de trouver suffisamment de services comptant la chirurgie
gynécologique au nombre de leurs spécialités pour assurer un avortement de ce
type par semaine et par département - répartition géographique bien sûr très
théorique !
Personnellement, je recommande donc la sagesse dans l'appréciation de
l'amendement n° 27.
En revanche, l'amendement n° 45, présenté par Mme Printz, me gêne beaucoup.
Certes, je comprends très bien ce que vous voulez dire, madame le sénateur. Si
la femme, consciente de l'ensemble du problème, a fait cette démarche dans un
délai raisonnable, peut-être même avant dix semaines, alors, effectivement,
pourquoi la pénaliser ? Mais il faudrait insister avec force auprès des centres
orthogéniques pour que ce type de cas soient traités dans les temps. Le risque
de dérive pourrait en effet être terrible : aujourd'hui, on dira douze
semaines, demain quatorze, puis seize ou vingt... On risquerait d'aboutir à une
situation qui serait contraire à ce que souhaite le Gouvernement.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
C'est ce que nous nous tuons à dire !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Pardonnez-moi, madame Printz, mais je demande le rejet
de l'amendement n° 45.
M. le président.
L'amendement n° 45 est-il maintenu, madame Printz ?
Mme Gisèle Printz.
Compte tenu des éléments que nous a apportés M. le ministre, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 45 est retiré.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 3 et 59.
M. Serge Lagauche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
M. le ministre a évoqué les difficultés qui se posent lorsqu'on veut allonger
le délai de dix à douze semaines ; il a également abordé le problème des
hommes, qui ne prennent pas suffisamment leurs responsabilités, celui de
l'attitude de l'Etat, qui, depuis tant d'années, ne consacre pas suffisamment
de moyens à la contraception et ne propose pas d'accueil adapté aux femmes qui
souhaitent subir une interruption volontaire de grossesse.
M. Carle et M. le rapporteur ont insisté sur une autre difficulté : pourquoi
faire passer le délai légal de dix à douze semaines alors que certaines femmes
continueront de se rendre à l'étranger pour y subir une IVG ? Ce n'est pas
juste.
Pour ma part, je vous proposerai une solution - dont les modalités
d'application restent à déterminer - pour sortir du débat stérile sur les
délais légaux et réfléchir à une différenciation des structures en fonction des
différents délais médicaux, afin d'adapter celles-ci à la technique médicale
utilisée. Cette logique a commencé d'être introduite dans le texte par la
mesure prévoyant dans un futur proche la délivrance du RU 486 en
ambulatoire.
Jusqu'à dix semaines de grossesse - j'en reste à dix semaines, puisque l'on a
des craintes entre la dixième et la douzième semaine -, les IVG seront
pratiquées dans tous les établissements qui les assurent déjà. Au-delà, elles
seront effectuées dans des établissements spécialisés, techniquement adaptés,
volontaires et limités en nombre, par des équipes pluridisciplinaires formées à
cette pratique et également volontaires. Je rejoins là les objectifs formulés
par le Gouvernement. L'habilitation à cette pratique d'un centre d'orthogénie
par grande région permettrait de répondre à la demande de toutes les femmes
hors délais.
Ainsi, les structures répondant à la demande seraient différenciées en
fonction des divers délais médicaux. Le cadre serait donc le suivant : l'IVG
serait pratiquée en ambulatoire par délivrance du RU 486 avant cinq semaines de
grossesse ; l'hospitalisation se ferait dans tout établissement qui pratique
des IVG entre six et dix ou douze semaines de grossesse ; enfin,
l'hospitalisation aurait lieu dans un établissement spécialisé au-delà de dix
ou douze semaines.
L'avortement est un droit pour les femmes : il doit donc être accessible à
toutes celles qui en ont besoin. L'objectif est bien de ne plus laisser sur le
bord du chemin les plus fragiles d'entre elles, qui, pour des raisons diverses,
sont amenées à dépasser le délai légal, qu'il soit fixé à dix ou à douze
semaines de grossesse. Il est inadmissible que l'on continue, y compris après
le vote du présent projet de loi, à les envoyer à l'étranger en toute
hypocrisie et en fermant les yeux sur leurs difficultés ou leur détresse.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Le débat qui s'est instauré depuis une heure et demie est tout à fait
instructif. Tout comme le rapporteur de la commission des affaires sociales,
j'ai été choqué par le terme de « progrès » utilisé par M. le ministre délégué
à la santé, car, vraiment, ce n'est pas un progrès !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Mais je m'en suis expliqué !
M. Jean-Pierre Fourcade.
Alors que le Gouvernement reconnaît lui-même, comme vous venez de le dire,
monsieur le ministre, que l'allongement du délai de dix à douze semaines ne
règle pas nombre de problèmes et n'apporte que des solutions partielles, tout
en augmentant la gravité médicale de l'acte d'IVG, je me demande pourquoi le
projet de loi qui nous a été soumis n'a pas opté pour une autre voie qui aurait
consisté à élargir ce qui avait déjà été fait dans le cadre de la loi Veil pour
l'interruption de grossesse pratiquée pour motif thérapeutique. On s'est
contenté d'en changer la dénomination et de la qualifier de « médicale ».
La commission a déposé un excellent amendement qui vise à ajouter aux motifs
de l'interruption pour raison médicale la poursuite de la grossesse qui met en
péril la santé de la femme, y compris « la santé psychique, appréciée notamment
au regard de risques avérés de suicide ou d'un état de détresse consécutif à un
viol ou à un inceste ». Ce sont là les cas concrets que nous voyons, nous, les
maires, à notre propre consultation - qui n'est pas médicale ! Ce sont les
sujets et les problèmes que nous abordons.
Plutôt que d'allonger le délai de deux semaines pour toutes les femmes, avec
les risques qui en découlent, il aurait mieux valu travailler sur
l'élargissement du champ d'application de l'article 8
bis
et sur la
possibilité de pratiquer plus d'avortements.
En effet, monsieur le ministre, vous nous présentez un dispositif, que vous
défendez avec le talent que l'on vous reconnaît, mais il s'agit d'un texte que
vous avez repris « au vol » !
M. Hilaire Flandre.
Ce n'est pas son enfant !
M. Jean-Pierre Fourcade.
Et son grand défaut, c'est que, avec l'allongement du délai légal, avec la
supression de toutes les formalités accessoires, il s'apparente à la
transformation de l'IVG en mode normal de contraception.
Mme Hélène Luc.
Absolument pas !
M. Jean-Pierre Fourcade.
C'est cela qui est insupportable, c'est cela qui ne peut être considéré comme
un progrès, qui est au contraire une déviation !
Si vous aviez davantage travaillé l'idée de l'élargissement de l'avortement
pour motif médical, vous auriez trouvé beaucoup plus facilement un consensus
sur l'ensemble des travées.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
Mme Odette Terrade.
Ce sont la commission et le pouvoir médical qui décident !
M. Michel Caldaguès.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès.
L'observation que je vais faire est sans doute superfétatoire pour expliquer
mon vote, car j'avais déjà bien d'autres raisons de voter l'amendement de la
commission, mais elle me paraît nécessaire.
Je commencerai, à l'instar de quelques-uns de nos collègues - puisque, sur les
bancs de la gauche, il y a parfois des procès en obscurantisme !...
M. Raymond Courrière.
Ah oui ! Et on le maintient !
M. Michel Caldaguès.
... par préciser que, si je n'ai pas voté la loi Veil - je n'étais pas
parlementaire à l'époque - j'ai néanmoins voté moi aussi, ici même, sa
pérennisation.
M. Raymond Courrière.
Quel exploit !
M. Michel Caldaguès.
Je veux ajouter ceci : quand on a écouté le rapporteur, notre ami Francis
Giraud, décrire hier dans des termes médicaux aussi précis que possible dans un
pareil débat, mais aussi en homme sensible, la différence entre dix semaines et
douze semaines de grossesse, comment ne pas être choqué d'entendre le ministre
délégué à la santé qualifier cette même différence de « technique » ! J'ai cru
qu'il avait fait un lapsus. Mais pas du tout, il l'a répété !
Monsieur le ministre, je dois vous dire que ce propos m'a particulièrement
choqué.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je ne comprends pas pourquoi.
M. Raymond Courrière.
Ils ont l'âme et le coeur sensibles !
M. Michel Caldaguès.
L'idée que je me fais du ministre délégué à la santé n'est pas celle d'un
simple mécanicien du corps, elle est celle d'un homme qui doit aussi se situer
au niveau de la morale.
M. Raymond Courrière.
Il faut les ménager, ils sont sensibles !
M. Michel Caldaguès.
Or, il devrait le faire ici, si l'on songe qu'un débat comme celui que nous
menons, quel que soit le sens de notre vote, devrait nous toucher au plus
profond de notre sens moral et de notre sensibilité.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Raymond Courrière.
Tout cela, c'est pour noyer le poisson !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Permettez-moi, monsieur Caldaguès, de ne pas être
d'accord avec vous...
M. Michel Caldaguès.
Je l'espère bien !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
... et de vous le dire avec force.
J'ai fait référence à un débat auquel vous n'avez sans doute pas assisté. Si
vous l'avez fait, corrigez-moi.
Les paroles que je citais étaient celles qu'a prononcées hier soir l'un de vos
collègues, médecin lui-même, M. Paul Blanc. Alors, s'il vous plaît, pour les
reproches que vous avez à faire, adressez-vous à lui, et non pas à moi!
M. Michel Caldaguès.
Vous avez repris ses propos à votre compte !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Non, monsieur ! Je les ai cités parce que je suis
d'accord avec lui, mais il s'agissait d'une citation exacte : « Y a-t-il un
problème moral ? Non ! Y a-t-il un problème médical ? Non ! Y a-t-il un
problème technique ? Oui ! », a dit ce médecin sur vos travées.
Je vous dirai pourquoi c'est vrai - et pas d'accusation d'indignité morale,
s'il vous plaît, ce n'est pas mon genre. J'ai dit suffisamment à quel point il
me déplaisait, en effet, d'avoir ainsi à « progresser » - et, monsieur
Fourcade, je me suis expliqué sur le mot « progrès ».
M. Michel Caldaguès.
On relira le procès-verbal !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Peut-être me suis-je mal fait comprendre. Mais, pour
moi, c'est un progrès nécessaire du point de vue social ; sinon, que faire de
ces femmes ? Ne me mettez pas en colère !
Mme Odette Terrade.
Eh oui !
M. Guy Fischer.
Ce sont 5 000 femmes !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Dans toutes vos propositions, qu'est-il prévu pour ces
5 000 femmes ?
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
Qu'en fait-on ? Où les envoie-t-on
?
C'est très joli d'appliquer les lois. Mais il faut savoir les modifier quand
elles ne sont plus adaptées ; il faut savoir revenir un peu en arrière, ou
aller de l'avant, je ne sais pas, et prendre en charge ces femmes !
M. Guy Fischer.
Ce n'est plus du surplace ! Là, nous reculons d'un quart de siècle !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le mot « technique », monsieur, n'est pas péjoratif
dans ma bouche. En aucun cas ! Il vous a peut-être choqué parce que vous n'avez
pas compris en quel sens je l'entendais, mais il n'était pas péjoratif.
M. Michel Caldaguès.
Je ne suis pas le seul à avoir été choqué !
Mme Hélène Luc.
C'est tout le projet qui vous choque, nous sommes bien d'accord !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Eh bien, monsieur, vous êtes choqué, et moi, j'insiste
: ce n'est pas choquant.
M. Michel Caldaguès.
Cela ne se résume pas à de la technique !
M. Raymond Courrière.
C'est de l'obscurantisme !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Non, monsieur ! Ce n'est pas choquant, et je vais vous
dire pourquoi : justement, nous entourons cet allongement du délai - et je
viens de tomber d'accord avec M. Neuwirth qu'il fallait le faire - des
précautions nécessaires sur le plan médical, en termes d'anesthésie et de
chirurgie éventuelle. Ce n'est pas choquant ! Il s'agit, en effet, d'un
problème technique qu'il faut résoudre et non pas d'un problème moral pour les
médecins, qui peuvent toujours faire jouer la clause de conscience.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. Raymond Courrière.
Très bien ! Continuez, ne vous laissez pas impressionner !
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Mon propos sera très bref ; je ne reprendrai
pas la discussion.
Je relèverai simplement, monsieur le ministre, votre non-réponse, à l'instant,
à la demande formulée par Mmes Campion et Dieulangard, qui s'exprimaient au nom
du groupe socialiste, à propos de l'amendement n° 45, sur ce problème de
l'interruption volontaire de grossesse.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Cet amendement a été retiré !
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Il l'a été après la réponse ou, plutôt, la
non-réponse de M. le ministre !
M. Raymond Courrière.
Mais, si elles sont satisfaites de cette réponse ?
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Cette non-réponse est un terrible aveu : le
texte tel qu'il nous vient de l'Assemblée nationale conduit à une impasse.
(Protestations sur les travées socialistes.)
Et c'est parce que nous
avons eu conscience de cette impasse que nous avons cherché le moyen d'en
sortir.
Je le répète, la proposition formulée par la commission des affaires sociales
est meilleure, même si elle n'est pas parfaite. Notre amendement peut
certainement faire l'objet de critiques, mais il a au moins l'avantage d'éviter
l'impasse où mène le texte dans son état actuel.
(M. Jean-Louis Lorrain
applaudit.)
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je ne voterai pas cet amendement. Mais je tiens à dire, monsieur le ministre,
que vous vous êtes laissé emporter, ce qui est rare chez vous, et que vous avez
prononcé des paroles que vous regrettez certainement.
Vous prétendez que la commission des affaires sociales ne répond pas au
problème des 5 000 femmes contraintes, chaque année, de se rendre à l'étranger
pour subir une IVG.
Ce n'est pas vrai : il existe une solution médicale, et vous semblez
l'oublier. Ce n'est pas parce que nous refusons l'IVG telle que vous
l'envisagez et que nous proposons une autre solution que nous rejetons ces
personnes dans les ténèbres extérieures ! C'est pourtant ce que vous avez
laissé entendre.
Par honnêteté vis-à-vis de notre rapporteur, il était nécessaire que je le
souligne.
M. Claude Huriet.
Exact !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 3 et 59, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 2 est supprimé et l'amendement n° 27 n'a plus
d'objet.
Mme Hélène Luc.
La commission des affaires sociales, qui avait montré un visage un peu
progressiste, vient de faire un progrès à reculons ! C'est très grave !
4
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept
membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un
texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi
organique modifiant la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée
nationale.
La liste des candidats établie par la commission des lois a été affichée
conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jacques Larché, Christian Bonnet, Patrice Gélard, Pierre
Fauchon, Paul Girod, Simon Sutour et Mme Nicole Borvo.
Suppléants : MM. Robert Badinter, Jean-Pierre Bel, Guy-Pierre Cabanel,
Jean-Patrick Courtois, Jean-Jacques Hyest, Lucien Lanier et Henri de
Richemont.
5
interruption volontaire de grossesse
et contraception
Suite de la discussion et adoption
d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président.
Dans la discussion du projet de loi relatif à l'interruption volontaire de
grossesse et à la contraception, nous en sommes parvenus à un amendement
tendant à insérer un article additionnel avant l'article 3.
Article additionnel avant l'article 3
M. le président.
Par amendement n° 81, M. Lagauche, Mme Pourtaud, MM. Lagorsse et Bellanger
proposent d'insérer, avant l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé
:
« La seconde phrase de l'article L. 2212-1 du code de la santé publique est
complétée
in fine
par les mots : " dans tout établissement où sont
effectuées des interruptions volontaires de grossesse ". »
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
Il s'agit de poursuivre la logique de différenciation des structures en
fonction des techniques médicales, introduite dans le texte à travers l'article
prévoyant des IVG en médecine ambulatoire par une délivrance du RU 486.
Cet amendement précise le type d'établissements dans lesquels ont lieu les
IVG, à savoir dans tous établissemens où sont actuellement effectuées des
interruptions volontaires de grossesse si l'IVG est pratiquée avant la fin de
la douzième semaine de grossesse, afin de permettre au-delà de ce délai la
pratique de l'IVG dans des établissements spécialisés.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Pour comprendre cet amendement, il faut se référer à
l'amendement n° 83, qui vise à insérer un article additionnel après l'article 7
bis.
En l'occurrence, la commission émet un avis très défavorable car
l'adoption de cet amendement reviendrait à reconnaître le droit à l'avortement
sans limite de délai.
M. Serge Lagauche.
Oh là là !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Chaque fois que j'exprime mon embarras, on me rabroue.
Mieux vaut ne pas être honnête !
(Sourires.)
M. Raymond Courrière.
Ils ont le coeur sensible !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Cet amendement ressemble beaucoup au choix des
établissements tel qu'il a été proposé par M. Neuwirth. Toutefois, un point me
choque : cela signifie-t-il que l'IVG sera pratiqué au-delà des douze semaines
?
M. Hilaire Flandre.
Oui, c'est clair !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Si vous me confirmez que tel sera bien le cas, monsieur
Lagauche, je ne peux que demander au Sénat de rejeter cet amendement.
M. Hilaire Flandre.
C'est écrit en toutes lettres !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 81.
M. Serge Lagauche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
Il ne s'agit pas de permettre la pratique de l'IVG au-delà du délai de douze
semaines. Cet amendement vise simplement à introduire une distinction entre
établissements afin que l'IVG, qui sera pratiquée au-delà de ce délai ait lieu
dans des établissements spécialisés. D'où la précision que nous proposons.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 81, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - Le deuxième alinéa de l'article L. 2212-2 du même code est
complété par les mots : "ou, dans le cadre d'une convention conclue entre le
praticien et un tel établissement, dans des conditions fixées par décret en
Conseil d'Etat". »
- (Adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président.
Par amendement n° 80, M. Seillier propose d'insérer, après l'article 3, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Après le cinquième alinéa (4°) de l'article L. 222-5 du code de l'action
sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans chaque département, il est créé, à l'initiative du service d'aide
sociale à l'enfance du conseil général, un répertoire départemental des aides
économiques, des lieux d'accueil et d'hébergement, des associations et
organismes susceptibles d'apporter une aide morale ou matérielle aux femmes
enceintes en difficulté. Il doit être disponible dans tous les établissements
dans lesquels sont pratiquées les interruptions volontaires de grossesse, dans
les centres de consultation ou de conseil familial, dans les centres de
planification ou d'éducation familiale et dans les mairies. »
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier.
En supprimant l'article 3
bis,
la commission rétablit les dispositions
actuellement en vigueur concernant le dossier-guide, qui ont été introduites
par la loi de 1975. Néanmoins, s'agissant des responsabilités du conseil
général en matière d'aide sociale, il n'est pas tenu compte de l'évolution de
la législation qui résulte de la loi du 6 janvier 1986. Cette loi « adaptant la
législation sanitaire et sociale aux transferts de compétences en matière
d'aide sociale et de santé » comporte une sous-section III intitulée «
Entretien et hébergement des mineurs et des mères isolées avec leurs enfants »,
dont l'article 46, qui dispose que « sont pris en charge par le service d'aide
sociale à l'enfance sur décision du président du conseil général » comprend un
alinéa 4° ainsi rédigé : « ... Les femmes enceintes et les mères isolées avec
leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d'un soutien matériel et
psychologique. »
Mon amendement permet de préciser la responsabilité d'information en
complément du dossier-guide dans les départements, ce qui est désormais à la
charge du président du conseil général, dans le cadre de l'aide sociale à
l'enfance.
La rédaction qui pourrait être votée par le Sénat sur proposition de la
commission ne vise, comme cela est précisé à la fin de l'article, que les
responsabilités des directions départementales des affaires sanitaires et
sociales. Je signale au passage que l'article modifié par l'Assemblée nationale
vise, lui aussi, dans son dernier alinéa les responsabilités des DDASS, et non
pas des présidents de conseil général. C'est pourquoi il me paraît nécessaire
de compléter cet article par un alinéa visant les responsabilités du service
d'aide sociale à l'enfance du conseil général.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Cet amendement prévoit des informations sur les droits et les
aides dont peut bénéficier la femme enceinte, tels qu'ils sont prévus dans la
loi Veil. Aussi, la commission émet un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle.
Le Gouvernement ne peut accepter cet amendement.
La femme doit recevoir, dès la première visite effectuée en vue d'une IVG,
l'ensemble des informations susceptibles de l'aider dans les choix qu'il lui
appartient d'effectuer, qu'il s'agisse de la décision quant au devenir de la
grossesse, du choix de la méthode d'interruption de la grossesse la plus
appropriée à sa situation sur les plans médical et psychologique, ou du choix
des organismes et des structures nécessaires à la réalisation de ses démarches,
à savoir la possibilité d'entretien préalable à l'IVG et la pratique de
l'intervention.
Le contenu actuel du dossier-guide paraît devoir être simplifié. Remis par le
médecin à un stade précoce de la procédure - dès la première visite - son
contenu doit être clarifié. Afin de faciliter l'accès de la femme à l'IVG, il
doit apporter toutes informations sur les dispositions législatives en vigueur
et sur les adresses utiles pour l'aboutissement de ses démarches.
Afin de permettre à la femme de prendre sa décision en toute connaissance de
cause, le dossier-guide sera complété par un document l'informant de ses droits
et des aides susceptibles de lui être attribuées si elle décide de poursuivre
sa grossesse.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 80.
M. Bernard Seillier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier.
Mme la secrétaire d'Etat semble ne pas avoir compris mon intervention. Je ne
vois pas comment le dossier-guide établi par l'Etat pourrait préciser les aides
et les règlements propres au conseil général, dans chaque département.
M. Hilaire Flandre.
Elle veut interdire aux départements de parler !
M. Jean Chérioux.
Il s'agit d'une position anti-décentralisation !
M. Serge Lagauche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
S'agissant du fond, il s'agit tout de même d'introduire, par cette
disposition, les groupes anti-IVG, dont la propagande est, comme nous l'avons
fréquemment constaté, contraire aux objectifs du Gouvernement.
M. Bernard Seillier.
C'est un procès d'intention !
M. Serge Lagauche.
C'est une réalité que nous avons vécue !
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Vous méprisez les conseils généraux !
M. Serge Lagauche.
Cela vaut n'importe où, pas seulement dans les conseils généraux.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
C'est sur l'initiative du conseil général !
Que raconte-il ?
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Je voterai cet amendement. Souvenez-vous de la discussion générale que nous
avons eue hier et qui s'est prolongée jusqu'à environ une heure ce matin : tous
les orateurs, quels qu'ils soient, ont dénoncé le manque d'information, d'une
façon générale, à l'égard tant des jeunes dans les établissements scolaires que
des femmes, qu'elles soient jeunes ou plus âgées. En l'occurrence, ce qui est
proposé, c'est non pas la présence de quelqu'un dans un établissement, mais un
document dans lequel sont recensées toutes les aides dont peuvent bénéficier
les femmes de façon qu'elles puissent prendre leur décision en toute
connaissance de cause. Hier, nombreux ont été les orateurs qui ont dit que le
libre arbitre ne peut s'exercer qu'avec une information complète. Sans
information, il ne peut y avoir de libre arbitre. Il est donc invraisemblable
de refuser une telle proposition.
M. Hilaire Flandre.
C'est de l'obscurantisme !
M. Jean Chérioux.
Ce n'est pas croyable !
M. Patrick Lassourd.
C'est une position idéologique à l'état pur !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 3.
Article 3 bis
M. le président.
« Art. 3
bis.
- L'article L. 2212-3 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2212-3
. - Le médecin sollicité par une femme en vue de
l'interruption de sa grossesse doit, dès la première visite, informer celle-ci
des méthodes médicales et chirurgicales d'interruption de grossesse et des
risques et des effets secondaires potentiels.
« Il doit lui remettre un dossier-guide, mis à jour au moins une fois par an,
comportant notamment le rappel des dispositions des articles L. 2212-1 et L.
2212-2, la liste et les adresses des organismes mentionnés à l'article L.
2212-4 et des établissements où sont effectuées des interruptions volontaires
de la grossesse.
« Les directions départementales des affaires sanitaires et sociales assurent
la réalisation et la diffusion des dossiers-guides destinés aux médecins. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 4, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
Par amendement n° 60, M. Carle propose de rédiger ainsi le texte présenté par
l'article 3
bis
pour l'article L. 2212-3 du code de la santé publique
:
«
Art. L. 2212-3
. - Le médecin sollicité par une femme en vue de
l'interruption de sa grossesse doit, dès la première visite :
« 1° Informer celle-ci des risques médicaux qu'elle encourt pour elle-même et
pour ses maternités futures, et de la gravité biologique de l'intervention
qu'elle sollicite ;
« 2° Expliquer et commenter les éléments du dossier-guide qu'il lui remet, qui
est mis à jour au moins une fois par an, et qui comporte notamment :
«
a)
Le rappel des dispositions de l'article L. 2211-1 ainsi que des
dispositions de l'article L. 2212-1 qui limite l'interruption de la grossesse
au cas où la femme enceinte se trouve placée par son état dans une situation de
détresse ;
«
b)
L'énumération des droits, aides et avantages garantis par la loi
aux familles, aux mères, célibataires ou non, et à leurs enfants, ainsi que des
possibilités offertes par l'adoption d'un enfant à naître ;
«
c)
Le rappel, lorsqu'il s'agit d'une mineure non émancipée désirant
garder son enfant, qu'elle bénéficie des aides existantes pour les femmes
enceintes en difficulté et les mères isolées, dans des conditions définies par
décret ;
«
d)
La liste et les adresses des organismes mentionnés à l'article L.
2212-4, des lieux d'accueil et d'hébergement ainsi que des associations et
organismes d'accompagnement des femmes enceintes en difficulté afin de les
aider à mener leur grossesse à terme puis après la naissance de l'enfant ;
«
e)
La liste et les adresses des établissements où sont effectuées des
interruptions volontaires de la grossesse ;
«
f)
Les méthodes de contraception qu'elle peut utiliser et les moyens
d'y recourir ;
« 3° Lui remettre le répertoire départemental des aides économiques, des lieux
d'accueil et d'hébergement, des associations et organismes dédiés à
l'accompagnement des femmes enceintes en difficulté.
« Dans chaque département, il est créé à l'initiative du service d'aide
sociale du conseil général, un répertoire départemental des aides économiques,
des lieux d'accueil et d'hébergement, des associations et organismes dédiés à
l'accompagnement des grossesses difficiles. Il doit être disponbile dans tous
les établissements dans lesquels sont pratiqués les interruptions volontaires
de grossesse, dans les centres de consultation ou de conseil familial et dans
les centres de planification ou d'éducation familiale.
« Un arrêté précise dans quelles conditions les directions départementales des
affaires sanitaires et sociales assurent la réalisation et la diffusion des
dossiers-guides destinés à être remis et expliqués aux femmes par les médecins.
»
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'article 3
bis
vise à supprimer, dans le contenu du
dossier-guide qui doit être remis à la femme lors de la première consultation
médicale pré-IVG, l'énumération des droits et des avantages garantis par la loi
aux familles, aux mères et à leurs enfants ainsi que les possibilités offertes
par l'adoption d'un enfant et la liste des organismes susceptibles de lui
apporter une aide morale ou matérielle.
La commission estime, pour sa part, que les éléments du dossier-guide que
l'Assemblée nationale a souhaité supprimer peuvent s'avérer extrêmement utiles
pour certaines femmes, notamment pour celles qui sont encore indécises.
Contrairement à ce que semble croire l'Assemblée nationale, ces éléments ont
pour vocation non pas de dissuader la femme de recourir à l'IVG, mais
simplement de s'assurer qu'elle prend sa décision en toute connaissance de
cause et en disposant de l'information la plus complète possible.
Pour ces raisons, la commission propose de revenir au texte de la loi de 1975,
qui constituait une position équilibrée, et donc de supprimer l'article 3
bis
.
M. le président.
La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 60.
M. Jean-Claude Carle.
Cet amendement vise à améliorer l'information de la femme enceinte pour
qu'elle puisse faire un choix libre et éclairé.
Le médecin doit expliquer et commenter le dossier-guide qui est remis à la
femme. Toutes les femmes n'ont pas nécessairement la capacité de lire ou de
comprendre le contenu de ce dossier-guide. C'est pourquoi il convient de les
accompagner.
Il faut, enfin, insérer dans le dossier-guide une information sur les méthodes
de contraception que la femme pourra utiliser par la suite, le but étant
d'éviter qu'une femme qui a déjà eu recours à l'avortement ne se retrouve dans
la même situation.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 60 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission préfère s'en tenir à sa proposition, afin de
garder les éléments du dossier-guide tels que la loi Veil les avait prévus.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 4 et 60 ?
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Par cohérence avec ce que j'ai dit précédemment, le
Gouvernement soutient l'article 3
bis.
Il ne peut donc accepter ni la
suppression de cet article, ni sa réécriture.
M. Hilaire Flandre.
Vous êtes prisonnière de votre majorité !
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Madame le secrétaire d'Etat, vous avez parlé
de cohérence avec ce que vous avez dit tout à l'heure. Si j'ai bien compris, le
dossier-guide serait complété par un document qui apportera des renseignements
sur les aides dont la femme enceinte peut bénéficier. Pourquoi supprimer ces
renseignements du dossier-guide pour les remettre aussitôt dans un document
complémentaire ?
M. Hilaire Flandre.
C'est pour faire plaisir aux députés !
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Je répondrai d'un mot.
M. Hilaire Flandre.
Il n'y a pas de réponse !
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement voté par l'Assemblée nationale vise à
dissocier le dossier-guide, qui concerne les droits entourant l'IVG, et le
complément apporté dans un autre document, visant des droits propres.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
On reprend ce qui est supprimé !
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
C'est tout de même une approche que nous avons
soutenue, et je m'en suis d'ailleurs expliquée tout à l'heure.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Nous voulions vous entendre le dire !
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit donc non pas d'apporter moins de
renseignements, mais de clarifier et de simplifier le dossier-guide tel qu'il
se présente actuellement, et d'apporter un autre document en complément.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Si j'ai bien compris la position de Mme le secrétaire d'Etat, elle souhaite
faire figurer dans un document complémentaire les éléments qui ont été
supprimés à l'article 3
bis.
Il y aurait donc un décalage dans le temps
entre le moment où l'on remettrait le dossier-guide et celui où l'on donnerait
ce document complémentaire.
(Mme le secrétaire d'Etat fait un signe de
dénégation.)
Alors, je n'ai pas compris !
Je ne vois pas pourquoi on refuserait de fournir des éléments d'information
essentiels, notamment ceux auxquels a fait allusion tout à l'heure M. le
rapporteur. Ils constituent le moyen, pour la collectivité, de montrer sa
sollicitude à l'égard de la personne en difficulté et ce qu'elle peut lui
apporter pour essayer, dans le domaine qui est le sien, de répondre à son souci
et d'éviter peut-être qu'elle ne soit angoissée, prise de panique et contrainte
à faire un choix qu'elle regretterait par la suite. Refuser cela - je l'ai dit
à la tribune lors de la discussion générale - c'est de la non-assistance à
personne en danger !
(Protestations sur les travées socialistes et sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
La collectivité a des moyens pour essayer, précisément, de répondre aux
problèmes des femmes en difficulté. Si l'on ne porte pas à la connaissance de
l'intéressée l'existence de ces moyens, on laisse la femme dans sa triste et
pénible situation.
(Exclamations sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen.)
Mme Claire-Lise Campion.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion.
Nous nous opposons à la suppression de cet article 3
bis.
M. Hilaire Flandre.
Bien sûr !
Mme Claire-Lise Campion.
L'amélioration apportée et votée par l'Assemblée nationale a un double
objectif.
Il s'agit, d'une part, de permettre que la femme obtienne, lors de l'entretien
préalable, une information objective, claire, impartiale...
M. Hilaire Flandre.
Vous ne manquez pas de culot !
Mme Claire-Lise Campion.
... ne devant susciter aucune pression à but dissuasif de quelque ordre que ce
soit.
Il s'agit, d'autre part, comme l'a dit Mme le secrétaire d'Etat, de la volonté
de vider le dossier-guide de tout élément susceptible de culpabiliser la
femme,...
M. Hilaire Flandre.
Tu parles !
Mme Claire-Lise Campion.
... ce document ne devant contenir que des informations relatives à l'IVG, au
cadre législatif, aux établissements et organismes habilités à accompagner et à
aider les femmes, si elles en ressentent la nécessité.
N'oublions pas que tant l'entretien préalable que le dossier-guide ont été
instaurés en 1975 afin de dissuader la femme d'avorter...
M. Hilaire Flandre.
C'est complètement ridicule !
Mme Claire-Lise Campion.
... « en vue notamment de lui permettre de garder l'enfant ».
M. Jean-Louis Lorrain.
C'est faux !
Mme Claire-Lise Campion.
Il serait regrettable d'opérer un retour en arrière qui, une fois de plus,
déjugerait les femmes.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Je n'ai pas bien compris, dans la deuxième réponse de Mme le secrétaire
d'Etat, comment on pouvait satisfaire au désir de simplifier un document en
formulant des propositions dans deux documents distincts. Sur ce point, j'avoue
que votre réponse, madame le secrétaire d'Etat, manque quelque peu de
clarté.
Je souhaite également vous signaler, chers collègues, vous qui, voilà quelque
temps, vous êtes prévalus d'avoir voté, en 1975, la loi Veil, que vous êtes peu
à peu amenés à la remettre profondément en cause. Si nous suivions vos
propositions, les fondements mêmes de la loi Veil seraient insidieusement
détruits,...
M. Raymond Courrière.
Améliorés !
M. Claude Huriet.
... notamment au travers du refus de faire désormais référence aux situations
de détresse. C'est pourtant l'un des éléments essentiels qui avait déterminé
une majorité à voter la loi de 1975. Vous supprimez cette référence à l'état de
détresse des femmes, vous supprimez des mesures importantes et positives qui
constituent non pas une sorte de menace de sanction, mais une information
proposée aux femmes.
M. Raymond Courrière.
Vous revenez en arrière !
M. Claude Huriet.
Je voudrais que vous vous exprimiez clairement sur le fait de savoir si, en
privilégiant l'intérêt de la femme et son droit à l'avortement, vous ne faites
pas totalement l'impasse sur l'enfant à naître. Autrement dit, au travers du
refus d'inscrire dans le document des éléments d'information, aussi neutres que
possible, vous remettez en cause la possibilité de donner à la femme des
éclaircissements sur les possibilités qu'elle a de garder l'enfant, si elle le
souhaite, et non pas de se sentir contrainte à l'interruption volontaire de
grossesse pour des raisons sociales ou matérielles.
(Exclamations sur les travées socialistes.)
C'est l'objet même du
document d'information que vous remettez en cause,...
M. Raymond Courrière.
C'est son enfant !
M. Claude Huriet.
... comme vous remettez en cause, bien sûr - et nous en parlerons tout à
l'heure - le caractère obligatoire de l'entretien préalable.
Vous supprimiez la référence à l'état de détresse, vous contestez le contenu
du livret d'information, aussi objectif soit-il, et vous supprimez aussi le
caractère obligatoire de l'entretien préalable. Mes chers collègues, vous qui
avez voté, en 1975, la loi Veil, vous serez incapables, à l'issue du débat, de
reconnaître le texte sur lequel vous vous étiez alors prononcés.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. Raymond Courrière.
Il faut tout de même un peu l'améliorer !
M. Hilaire Flandre.
Drôle d'amélioration !
M. Claude Huriet.
Il fallait y penser, depuis vingt-cinq ans.
M. Patrick Lassourd.
Qu'avez-vous amélioré ?
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Cette discussion, qui intervient après la suppression de l'article 2, montre
bien que nous sommes au coeur d'un débat qui, malheureusement, nous divise.
Il semblerait, et Claude Huriet vient d'y faire allusion, que la loi Veil,
adoptée en 1975, soit désormais irréversible et que l'on ne puisse pas admettre
que des modifications de comportement et de modes de pensée soient intervenues
dans le quart de siècle qui vient de s'écouler,...
Mme Hélène Luc.
Exactement !
M. Guy Fischer.
... modifications qui justifient le débat que nous avons aujourd'hui.
Nous nous opposons d'une manière très claire à la suppression de l'article 3
bis.
En effet, s'agissant des 320 000 femmes qui, chaque année, décident
de recourir à l'interruption volontaire de grossesse, nous sommes convaincus
que, la plupart du temps, leur décision est déjà irrévocable.
Mme Hélène Luc.
Absolument, et vous le savez bien !
M. Guy Fischer.
La question qui se pose aujourd'hui est de savoir quel type d'information vous
voulez donner. S'agit-il de culpabiliser la femme ?
M. Jean Chérioux.
Il s'agit de l'aider, pas de la culpabiliser !
M. Guy Fischer.
Nous devons dépasser cela ! Au travers de l'information - je vais vous faire
un procès d'intention - vous voulez, d'une manière ou d'une autre, faire
pression sur la femme pour la dissuader d'avorter...
M. Jean Chérioux.
Et vous, vous voulez la pousser à avorter ! Vous trouvez que c'est mieux ?
M. Patrick Lassourd.
Il faut leur permettre d'exercer leur libre arbitre !
M. Guy Fischer.
On ne peut pas, aujourd'hui, contraindre les femmes qui connaisssent des
difficultés à poursuivre leur grossesse. Cela risque de les conduire à
abandonner leur enfant. Pour notre part, nous prenons nos responsabilités et
nous voterons cet article 3
bis. (Applaudissements sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. Hilaire Flandre.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Flandre.
M. Hilaire Flandre.
Je crois que personne, dans cet hémicycle, ne peut considérer l'interruption
de grossesse, fût-elle volontaire, comme étant un progrès. C'est le constat
d'un échec de l'éducation sexuelle et de la contraception.
(M. Raymond
Courrière s'exclame.)
M. Hilaire Flandre.
C'est un drame, surtout pour les femmes qui doivent le vivre.
Mme Nicole Borvo.
Vous ne pouvez pas le savoir, vous n'êtes pas une femme !
M. Hilaire Flandre.
Bien sûr, je ne suis pas une femme !
M. Raymond Courrière.
Alors, ne jugez pas à leur place !
M. Hilaire Flandre.
Cela étant dit, on ne peut passer sous silence la situation de détresse dans
laquelle se trouvent un certain nombre de femmes. La loi Veil a représenté un
moyen de mettre fin à cette détresse.
Aujourd'hui, on nous suggère de prolonger le délai légal de l'IVG et de
limiter l'information aux femmes aux seuls aspects spécifiques de
l'intervention. Il ne leur sera pas donné communication de l'ensemble des
éléments qui leur permettraient de prendre leur décision en toute connaissance
de cause.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Qu'est-ce qui vous permet de dire cela ?
M. Hilaire Flandre.
C'est tout simplement le contenu de vos amendements, madame !
On se range en effet - et cela va faire plaisir à certains de nos collègues -
en deux camps : ceux qui considèrent que la vie commence dès la conception et
ceux qui estiment que, tant que l'enfant n'est pas né, il est tout simplement
un objet.
(Protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
Je n'avais pas l'intention d'intervenir dans ce débat, mais dans une société
où l'on se soucie plus de la vie des oiseaux, de la disparition d'un certain
nombre de mammifères, des animaux en détresse, que de la vie des enfants, on
commet un crime contre son propre avenir.
(Exclamations sur les travées
socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
Mme Nicole Borvo.
Comment pouvez-vous dire cela !
M. Hilaire Flandre.
J'ajouterai que si la loi, telle que vous la voulez, avait existé à l'époque
où vous-mêmes avez été conçus, certains d'entre vous ne seraient peut-être même
pas là pour discuter.
(Rires et exclamations sur les mêmes travées.)
Mme Nicole Borvo.
Vous non plus !
Mme Hélène Luc.
Je peux vous dire que, par rapport à 1975, il n'y a pas beaucoup de progrès
dans cette assemblée !
M. Serge Lagauche.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
On revient toujours à la loi Veil. Vous l'avez dit vous-mêmes, la loi Veil a
été votée dans un cadre de majorité conservatrice, ou de droite, si vous
préférez. Vous avez eu un apport de voix parce qu'à gauche on a pensé qu'il
fallait progresser. Sans cet appui, cette loi n'aurait pas été adoptée.
Aujourd'hui, la majorité à l'Assemblée nationale est de gauche et,
effectivement, cela vous contrarie. Mais la liberté de la femme doit progresser
!
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Ce qui vous contrarie, c'est que la majorité
du Sénat ne soit pas de gauche !
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Le débat à cet instant me paraît assez curieux car, à mon sens, il ne
correspond pas du tout à ce que nous avons dit hier soir. Pardonnez-moi de le
répéter, mais hier, dans la discussion générale, nous avons assisté à des
interventions très mesurées, où chacun s'est exprimé en conscience. Il me
souvient que nous avons beaucoup parlé de la souffrance des femmes, même s'il
ne faut pas exagérer, car il y a sans doute des situations où cela ne se passe
pas trop mal. Nous avons également beaucoup parlé de l'information et de
l'exercice du libre arbitre.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Effectivement !
M. Patrick Lassourd.
Le libre arbitre ne peut s'exercer qu'avec une information complète des gens.
Comment voulez-vous qu'une femme qui se trouve dans une situation difficile -
je pense notamment à l'adolescente dont la famille, culturellement, ne peut pas
accepter la situation, et qui est sans doute un peu déprimée - puisse exercer
son libre arbitre si nous ne participons pas à l'information dont elle a besoin
pour l'exercer ?
Je ne comprends pas cette opposition systématique sur un point qui me paraît
fondamental. C'est la première observation que je voulais faire.
J'en viens à la seconde observation, puisque l'on évoque, à ce point de notre
débat, des principes généraux. Monsieur le ministre, hier, dans mon
intervention, j'ai évoqué la nécessité de créer un statut juridique de
l'embryon. Les lois relatives à la bioéthique vont devoir être révisées,
notamment en raison des problèmes que pose actuellement le clonage. Il faudra
probablement légiférer « à froid », avant l'examen des lois sur la bioéthique,
sur la création d'un statut juridique de l'embryon. En effet, tout le monde
parle du droit des femmes à donner ou non la vie, mais personne ne défend
actuellement l'embryon, son droit de naître et d'exister. J'aimerais bien,
monsieur le ministre - vous ne vous êtes pas exprimé sur ce point hier - vous
entendre sur ce sujet.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 3
bis
est supprimé et l'amendement n° 60 n'a
plus d'objet.
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - Les deux premiers alinéas de l'article L. 2212-4 du même code sont
ainsi rédigés :
« Il est systématiquement proposé, avant et après l'interruption volontaire de
grossesse, à la femme majeure une consultation avec une personne ayant
satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal ou toute autre
personne qualifiée dans un établissement d'information, de consultation ou de
conseil familial, un centre de planification ou d'éducation familiale, un
service social ou un autre organisme agréé. Cette consultation comporte un
entretien particulier au cours duquel une assistance ou des conseils appropriés
à la situation de l'intéressée lui sont apportés.
« Pour la femme mineure non émancipée, cette consultation est obligatoire et
l'organisme concerné doit lui délivrer une attestation de consultation. Si elle
exprime le désir de garder le secret à l'égard des titulaires de l'autorité
parentale, ou de son représentant légal, elle doit être conseillée sur le choix
de la personne majeure mentionnée à l'article L. 2212-7 susceptible de
l'accompagner dans sa démarche. »
Sur l'article, la parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Le texte proposé par cet article donne à l'entretien préalable à
l'interruption volontaire de grossesse un caractère nouveau et, de mon point de
vue, renforcé.
En supprimant le caractère obligatoire de cet entretien social, le projet de
loi participe d'une logique de responsabilisation des femmes et affirme
clairement que la décision d'interrompre leur grossesse leur appartient.
Il était en effet indispensable de passer d'un principe de contrainte à un
principe de liberté, car toutes les femmes ayant décidé d'interrompre leur
grossesse ne souhaitent pas obligatoirement une assistance, et, fort
heureusement, elles sont nombreuses à pouvoir librement décider et assumer
leurs actes.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Cet entretien est vécu par les femmes comme une
remise en cause de leur décision, comme une contrainte, comme une obligation de
se justifier, voire comme un passage devant un jury qui ne serait chargé que de
les culpabiliser.
Certaines femmes le vivent également comme une expérience infantilisante ;
d'autres encore racontent les pressions qu'elles ont subies pour les dissuader
d'interrompre leur grossesse.
Enfin, il n'est pas rare de constater que cette démarche contribue à allonger
la procédure, au risque de dépasser le délai légal de recours à l'IVG.
Cet entretien peut, bien évidemment, s'avérer utile pour les femmes en demande
d'écoute et de parole. Il doit alors constituer un véritable soutien. Dans ce
cas, c'est aux structures qu'il incombe de proposer des lieux, des horaires et
des personnels compétents et qualifiés pour recevoir les demandes et
accompagner les patientes.
De nombreuses conseillères conjugales m'ont raconté qu'elles commençaient,
lors de cet entretien, par signer le formulaire permettant à la femme
d'interrompre sa grossesse et que, ayant ainsi remis à la patiente
l'attestation d'entretien, la parole, alors, se libérait et l'accompagnement
psychologique pouvait débuter et être efficace.
Car c'est bien le caractère « obligatoire » de l'entretien préalable qui est
vécu par les femmes comme une remise en cause de leur décision, une obligation
de se procurer une autorisation.
Sur ce point, nous apprécions que le projet de loi propose une évolution.
Comme Mme la ministre l'a rappelé hier soir, il n'est pas question de supprimer
tout entretien avec une conseillère conjugale ou une personne qualifiée.
L'article 4 précise même : « Il est systématiquement proposé, avant et après
l'interruption de grossesse, à la femme majeure une consultation avec une
personne ayant satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal...
»
Pour la femme mineure ou non émancipée, cette consultation reste obligatoire
et, si elle choisit de garder le secret à l'égard de ses parents, elle doit
être conseillée sur le choix de la personne susceptible de l'accompagner dans
sa démarche.
Loin d'avoir un caractère dissuasif ou répressif, cet entretien singulier doit
devenir un moment privilégié d'écoute, de parole et d'information, car l'intime
ne peut se dire que dans la confiance.
Dorénavant, les centres d'IVG auront l'obligation de proposer un entretien
avant et après l'intervention aux femmes majeures. Ce moment de parole,
d'écoute et d'information pourra alors pleinement jouer son rôle et permettre,
dans certains cas, de déceler les difficultés ou les violences auxquelles
certaines femmes sont confrontées.
Cependant, je souhaite, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, que
vous nous donniez des assurances sur les moyens qui seront accordés à
l'organisation de ces entretiens.
Je me permets de relayer ici l'inquiétude des conseillères conjugales, qui
font, par ailleurs, un travail remarquable, car il ne faudrait pas saisir le
prétexte de la suppression du caractère obligatoire pour les femmes de cette
consultation pour diminuer les crédits affectés aux structures chargées de
mettre en oeuvre l'IVG et remettre en cause le statut et le nombre de
conseillères.
En effet, la question de la formation et du statut des conseillères
conjugales, dont l'effectif doit s'accroître et le rôle se préciser, reste
posée. Il s'agit, bien évidemment, plus globalement, du problème des moyens,
sur les plans tant humain que matériel, que l'on entend donner aux centres
d'IVG.
En effet, je suis d'accord avec Mme la ministre de l'emploi et de la
solidarité lorsqu'elle déclare que la pratique des IVG fait partie des missions
de service public. Le rôle de l'Etat est donc majeur, il convient de le
développer pour que plus de crédits soient affectés à ce secteur et que
l'hôpital public joue tout son rôle.
Or, malgré l'enveloppe de 12 millions de francs allouée l'an dernier et celle
de 15 millions de francs prévue pour 2001, de sérieux problèmes, liés aux
menaces qui pèsent sur les centres d'IVG et au prochain départ en retraite de
nombreux médecins acquis à la nécessité de rendre effectif le droit à l'IVG,
vont se poser.
Nous sommes donc favorables à la rédaction de cet article, tout en étant
vigilants au soutien qu'apporteront les pouvoirs publics aux conseillères
familiales et conjugales.
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 5, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit l'article 4 :
« L'article L. 2212-4 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé
:
« Après l'interruption de grossesse, une deuxième consultation, ayant
notamment pour but l'information sur la contraception, est systématiquement
proposée. »
Par amendement n° 42, le Gouvernement propose de rédiger ainsi le texte
présenté par l'article 4 pour les deux premiers alinéas de l'article L. 2212-4
du code de la santé publique :
« Il est systématiquement proposé, avant et après l'interruption volontaire de
grossesse, à la femme majeure une consultation sociale avec une personne ayant
satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal ou toute autre
personne qualifiée dans un établissement d'information, de consultation ou de
conseil familial, un centre de planification ou d'éducation familiale, un
service social ou un autre organisme agréé. Cette consultation comporte un
entretien particulier au cours duquel une assistance ou des conseils appropriés
à la situation de l'intéressée lui sont apportés.
« Pour la femme mineure non émancipée, la consultation sociale préalable à
l'intervention est obligatoire et l'organisme concerné doit lui délivrer une
attestation d'entretien. Si elle exprime le désir de garder le secret à l'égard
des titulaires de l'autorité parentale, ou de son représentant légal, elle doit
être conseillée sur le choix de la personne majeure mentionnée à l'article L.
2212-7 susceptible de l'accompagner dans sa démarche. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 5.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'article 4 supprime le caractère obligatoire de la
consultation sociale préalable à l'IVG.
A l'évidence, cette disposition, au caractère très idéologique, est inspirée
par le même état d'esprit que celui qui a conduit à l'adoption de l'article 3
bis
: il s'agit de tout faire pour supprimer les procédures
d'information et de dialogue qui auraient pu conduire certaines femmes à
changer d'avis et à renoncer à une IVG.
On notera d'ailleurs que cette disposition, comme celle qui est prévue à
l'article 3
bis
et qui modifie le contenu du dossier-guide, ne figurait
pas, monsieur le ministre, dans le texte du Gouvernement, c'est-à-dire dans le
projet de loi initial.
Pour la commission, cet entretien social est fondamentalement utile ; il est
un temps de dialogue indispensable. Il est aujourd'hui l'occasion pour la femme
d'exposer ses difficultés personnelles, conjugales, familiales, d'être informée
sur les aides et soutiens dont elle peut bénéficier, de parler de la
contraception, de préparer ainsi l'avenir.
Contrairement à ce que semblent croire les députés, ce n'est pas parce qu'un
entretien est « obligatoire » qu'il est nécessairement dissuasif ou
culpabilisant pour la femme. La commission se demande en quoi cet entretien
serait préjudiciable. La femme serait-elle moins libre parce que mieux informée
? L'Assemblée nationale craint-elle que certaines femmes ne renoncent à leur
décision d'IVG à la suite de cet entretien ?
Rendre cet entretien facultatif aboutira à ce que bon nombre de femmes n'en
bénéficient pas, mais, hélas ! surtout celles pour lesquelles il aurait pu être
le plus utile.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission souhaite maintenir le caractère
obligatoire de l'entretien social préalable à l'IVG. Elle approuve, par
ailleurs, l'idée de proposer systématiquement une consultation après l'IVG.
Elle propose, par conséquent, d'adopter un amendement tendant à maintenir,
pour toutes les femmes, le caractère obligatoire de l'entretien social
préalable à l'IVG et à prévoir qu'une deuxième consultation, ayant notamment
pour objet l'information sur la contraception, est systématiquement proposée
après l'interruption de grossesse.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 42 et donner
l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 5.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
L'amendement n° 42 vise à améliorer la rédaction de
l'article 4.
Au cours du débat parlementaire, les députés ont souhaité modifier l'ensemble
du dispositif concernant les consultations sociales. La nouvelle rédaction de
l'article 4 précisera donc la nature des consultations visées, afin d'éviter
toute confusion entre consultations sociales et consultations médicales.
S'agissant des mineures, l'article 4 prévoit le maintien du caractère
obligatoire de l'entretien préalable et l'article 6 introduit la proposition
d'une deuxième consultation après l'intervention. Le nouveau texte de l'article
4 précise cette distinction.
S'agissant de l'amendement n° 5, j'ai été convaincu - pour autant que je
puisse encore l'être puisque je suis d'accord avec le texte du projet - par les
propos de Mme Terrade.
Certes, ceux qui, volontairement, parce qu'ils l'ont choisi, sont en mesure de
délivrer une consultation médicale à une femme qui a l'intention d'avorter ne
sont pas répressifs par essence, monsieur le rapporteur. Mais tous les
psychiatres - j'espère qu'il y en a ici - le savent : il faut choisir son
conseil, car, si l'on ne participe pas de plein gré à la cure, à la thérapie ou
à la prise en charge - veuillez me pardonner, mais c'est l'abc de la médecine !
- il y a un début de contrainte.
Je n'étais pas tellement favorable, lorsque nous avons parlé de ce texte pour
la première fois, à la suppression de l'entretien, car je crois qu'il est
nécessaire. Mais je le crois d'autant plus nécessaire qu'il sera proposé, et il
est vrai que la manière de proposer - en cela, vous avez raison, madame Terrade
- est essentielle si l'on veut obtenir le résultat souhaité ; sinon,
l'entretien sera subi comme un sermon et, d'avance, ce sera pénible.
Il est vrai qu'il y a là une ambiguïté, mais la formule « systématiquement
proposé », comme en bien d'autres domaines de la médecine, me paraît être la
meilleure. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s'oppose à
l'amendement n° 5.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 42 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Cet amendement ne s'inscrit pas dans la même philosophie que
celui de la commission. Par conséquent, nous ne pouvons l'accepter.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
La majorité de la commission s'oppose à la suppression du caractère
obligatoire de l'entretien qui précède l'IVG.
Cette obligation pose d'abord un problème de principe. En 1975, il s'agissait
- chacun le sait - d'une concession faite aux opposants à l'avortement, qui
pouvaient croire qu'ils auraient ainsi à leur disposition l'occasion de
dissuader les femmes.
Or, les femmes font leur choix en conscience. L'IVG est pour elles un droit
qu'elles peuvent utiliser quand bon leur semble au cours de leur vie. Aussi
est-il absurde de penser que l'on peut aller contre leur autonomie et leur
libre arbitre.
Dès lors, pourquoi maintenir cette obligation, qui est ressentie comme un
signal que la société envoie à la femme pour lui signifier qu'on ne lui fait
pas
a priori
confiance, alors qu'il s'agit de la maîtrise de sa
procréation ?
Maintenir cette obligation, c'est laisser entendre que la femme ne fait pas
bon usage de sa liberté. C'est un jugement inacceptable, c'est une atteinte au
principe de liberté. Le Gouvernement a eu raison de vouloir supprimer cette
obligation. Nous nous opposons au retour en arrière.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Ce n'était pas dans le texte du Gouvernement
!
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Nous nous y opposons d'autant plus que cela ne permettra pas d'atteindre
l'objectif prétendument visé, qui est d'aider la femme, et auquel, par
principe, personne ne peut être opposé.
En effet, si les femmes qui ne souhaitent pas bénéficier de cet entretien
peuvent ne plus y aller, les professionnels pourront mieux se consacrer à
celles qui y viennent parce qu'elles en ressentent le besoin ; ces dernières
auront en face d'elles des intervenants plus disponibles et plus motivés qui
pourront mettre plus efficacement en oeuvre les démarches décrites dans
l'amendement et qui correspondent effectivement à ce que propose « un
professionnel ayant satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal
ou toute autre personne qualifiée dans un établissement d'information, de
consultation et de conseil familial, un centre de planification ou d'éducation
familiale, un service social ou tout autre organisme agréé ».
Nous considérons que c'est faciliter la tâche des professionnels que de les
mettre en situation d'assurer des entretiens qui auront été proposés et non
imposés.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Tout le débat porte, en fait, sur la situation réelle dans laquelle se trouve
la femme qui est confrontée à l'IVG.
S'il s'agit de femmes pour qui cela ne pose aucun problème, on pourrait
peut-être vous suivre, madame Dieulangard.
Mais je crois me souvenir que la loi avait précisément pour objet de venir en
aide à celles pour qui c'est un véritable problème, voire un problème
déchirant, qui sont en situation de détresse. Et ne venez pas nous dire que
c'est de gaieté de coeur qu'une femme renonce à la maternité !
Et pourquoi une femme est-elle amenée à renoncer à cette maternité ? Parce
qu'elle se trouve dans une situation déterminée, qui fait que, bien souvent,
elle n'est pas en état de choisir librement. Elle est souvent paniquée, elle ne
sait plus à quel saint se vouer.
Vous dites qu'on lui proposera un entretien. Mais, croyez-vous qu'elle sera
vraiment libre de décider si elle demande cet entretien ou non ? Sûrement pas.
Elle sera incapable de faire un vrai choix !
Pour employer une image, l'entretien obligatoire c'est un gilet de sauvetage,
et vous, vous demandez la suppression du règlement qui impose le port de ce
gilet dans les canots de sauvetage ! Ce n'est pas quand on est en train de se
noyer que l'on part à la recherche d'un gilet ! Si le gilet sauve beaucoup de
vies, c'est précisément parce qu'il est obligatoire de le mettre dès que l'on
monte dans un canot.
Voilà l'important ! Ce n'est pas contre la femme concernée que nous voulons
agir ; nous voulons qu'à un moment où elle est en difficulté, où elle ne sait
plus à quoi se raccrocher, elle ait la possibilité d'être bien informée et de
prendre, en tout connaissance de cause, sa décision.
La liberté, il faut pouvoir être en l'état de l'exercer ! Or, trois fois sur
quatre, vous le savez très bien, il s'agit de femmes qui ne sont plus en état
d'être libres intellectuellement. Elles sont en difficulté, en situation de
panique. Or, quand on est en situation de panique, on fait toujours le mauvais
choix !
M. Jean-Louis Lorrain.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Je crois effectivement, comme notre collègue le disait tout à l'heure, que si
la discussion générale, hier, était empreinte d'une grande sérénité, nous
entendons aujourd'hui des propos qui me paraissent choquants.
On met en doute les qualités des conseillères conjugales, qui font souvent
preuve d'abnégation. Ce ne sont pas du tout des dames-patronesses, elles sont
très bien formées. On met en doute leur comportement, mais on est prêt à leur
faire jouer un rôle dans un cadre bien défini, bien sûr.
Je peux vous dire qu'elles entretiennent souvent des rapports d'empathie avec
les personnes qu'elles reçoivent et qu'elles ne sont pas du tout dissuasives.
Dès lors, quand j'entends dire que leur objectif, c'est de retarder l'IVG, je
trouve cela parfaitement scandaleux. Celles qui se livreraient à ce type de
pratiques seraient d'ailleurs vite dénoncées.
Monsieur le ministre, en tant que médecin et président du conseil
d'administration d'un hôpital psychiatrique depuis plus de vingt ans, je peux
par ailleurs vous assurer que, lorsque nous disons à un malade ou à une
personne qui passe un moment difficile, d'aller voir un psychologue clinicien
ou un psychiatre, chaque fois elle refuse en disant : « Mais pour qui me
prenez-vous ? Croyez-vous que j'ai besoin de cela ? » Ce n'est qu'après avoir
instauré des relations de confiance que l'on peut l'amener à engager une
thérapie.
J'ajoute que, en l'occurrence, il s'agit non pas d'un état pathologique, mais
d'une situation de détresse.
Je suis surpris que la valeur du travail social ne soit pas reconnue. Le
travail social doit être pris en considération ; il ne vise pas à imposer des
contraintes légales.
Je suis d'autant plus étonné par cette attitude que, au quotidien, nous
subissons bien des contraintes. Nous révoltons-nous contre le code de la
route... contre les vaccinations que l'on nous impose... ? Je ne crois pas !
Mme Terrade place la liberté au-dessus de tout. C'est son choix. Mais quand
l'exercice de la liberté devient destructeur, nous n'en tirons pas les mêmes
conséquences. Nous n'avons vraiment pas les mêmes valeurs !
Mme Odette Terrade.
On n'a pas les mêmes valeurs, c'est sûr !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé et l'amendement n° 42 n'a plus
d'objet.
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - A l'article L. 2212-5 du même code, les mots : "sauf au cas où le
terme des dix semaines risquerait d'être dépassé, le médecin étant seul juge de
l'opportunité de sa décision" sont remplacés par les mots : "sauf dans le cas
où le terme des douze semaines risquerait d'être dépassé". »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 6, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
Par amendement n° 61, M. Carle propose, dans l'article 5, de remplacer les
mots : « le terme des douze semaines » par les mots : « le terme des dix
semaines ».
Par amendement n° 46, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de compléter l'article 5 par les mots : « ou
si la technique proposée le rend nécessaire ».
Par amendement n° 64, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 5 par
les mots : « ou si la technique recherchée le rend nécessaire ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Par coordination avec l'amendement n° 3 proposé à l'article
2, il s'agit de supprimer la référence au délai de douze semaines de grossesse
introduite par l'article 5 à l'article L. 2212-5 du code de la santé
publique.
M. le président.
La parole est à M. Carle, pour présenter l'amendement n° 61.
M. Jean-Claude Carle.
Il est défendu, monsieur le président.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 46.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Il est certes important de laisser aux femmes un délai de réflexion avant
qu'elles ne rendent leur décision définitive, mais il est essentiel qu'elles
soient informées des techniques d'interruption volontaire de grossesse dont
elles disposent et de leur laisser le choix.
Trop souvent encore, ce choix leur est dénié ou imposé, et cela n'est plus
concevable.
Rappelons que la technique médicamenteuse peut être utilisée jusqu'à cinq
semaines, soit plus tôt que la méthode par aspiration. Il apparaît alors
nécessaire de favoriser son emploi à chaque fois que cela est encore possible,
afin de respecter la préférence de la femme lorsqu'elle l'a exprimée en ce
sens.
Il va donc de soi que la semaine de réflexion doit être réduite, aussi bien
lorsque le délai légal risquerait d'être dépassé que lorsque l'utilisation de
la pilule RU 486 le rend nécessaire.
Je voudrais, pour conclure, préciser que le groupe socialiste du Sénat serait
extrêmement étonné si cette mesure venait à être rejeté par la majorité
sénatoriale.
En effet, en privilégiant une méthode moins « invasive », cet amendement va
dans le sens de ce que vous semblez, depuis le début de ce débat, prôner, à
savoir la priorité accordée aux raisons de santé pour justifier le refus que
vous opposez à nombre de nouvelles dispositions.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 64.
M. Guy Fischer.
L'article 5 prend en compte l'allongement à douze semaines de grossesse du
délai légal pour pratiquer une IVG et modifie en conséquence l'article L.
2212-5 du code de la santé publique, qui prévoit jusqu'à présent que,
lorsqu'une femme désire avorter, le médecin doit lui demander une confirmation
écrite qu'il ne peut accepter qu'au terme d'un délai d'une semaine suivant la
demande de la femme, sauf dans le cas où le délai légal risquerait d'être
dépassé.
Avec notre amendement, nous vous proposons d'étendre la possibilité, pour le
médecin, de s'affranchir de ce délai d'une semaine au cas où le strict respect
de ce laps de temps entraînerait la nécessité de recourir à une méthode
chirurgicale pour pratiquer l'IVG au lieu d'une méthode médicamenteuse.
Comme vous le savez, de nombreuses femmes se trouvent hors des délais légaux
car, souvent, les structures chargées de pratiquer les IVG ne peuvent les
accueillir à temps, faute de moyens et de personnels.
Or, les méthodes médicamenteuses, qui sont parfaitement adaptées en deçà de
cinq semaines de grossesse et susceptibles d'être mises en oeuvre dans le cadre
de la médecine ambulatoire, permettraient aux centres d'IVG de mieux
fonctionner et de pouvoir accueillir toutes les femmes dans les délais.
Il convient donc, à notre sens, de faciliter et de promouvoir leur utilisation
la plus large possible.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 61, 46 et 64 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'amendement n° 61 est satisfait par l'amendement de
suppression de l'article, présenté par la commission.
Quant aux amendements n°s 46 et 64, ils deviendront sans objet si cet
amendement n° 6 est adopté.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 6, 61, 46 et 64 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement demande que les amendements n°s 6 et 61
soient rejetés.
En revanche, le Gouvernement est en accord avec les amendements n°s 46 et
64.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Jean-Louis Lorrain.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Mes chers collègues, je souhaite porter à votre connaissance un certain nombre
d'informations à propos de la pilule RU 486.
Il est de pratique courante, dans certains établissements, d'utiliser le RU
486 jusqu'à la dixième semaine, accompagné d'un complément médicamenteux
intravaginal. Cette technique permet, dans des conditions correctes, de
pratiquer des avortements médicamentaux. Elle pourrait être généralisée, à
condition de bien en maîtriser la technique.
Les commentaires pseudo techniques que nous venons d'entendre sont donc dénués
de fondement.
Cette méthode ne nécessite ni intervention chirurgicale ni anesthésie. Elle
mériterait d'être promue. Les centres de planification doivent en être
informés.
Certains s'efforcent de promouvoir la pratique ambulatoire de cette forme
d'auto-avortement, à condition, bien sûr, disent-ils, de prendre quelques
précautions et d'assurer une surveillance grâce à un contact direct avec les
centres. Il faut toutefois savoir que l'utilisation du RU 486 est très
douloureuse et qu'elle peut provoquer des hémorragies. Il faut être inconscient
pour ne pas en tenir compte.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 5 est supprimé et les amendements n°s 61, 46 et 64
n'ont plus d'objet.
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - L'article L. 2212-7 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2212-7
. - Si la femme est mineure non émancipée, le
consentement de l'un des titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant,
du représentant légal est recueilli. Ce consentement est joint à la demande
qu'elle présente au médecin en dehors de la présence de toute autre
personne.
« Si la femme mineure non émancipée désire garder le secret, le médecin doit
s'efforcer, dans son intérêt, d'obtenir son consentement pour que le ou les
titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, le représentant légal
soient consultés ou doit vérifier que cette démarche a été faite lors de
l'entretien mentionné à l'article L. 2212-4.
« Si la mineure ne veut pas effectuer cette démarche, ou si le consentement
n'est pas obtenu, l'interruption de grossesse ainsi que les soins qui lui sont
liés peuvent être pratiqués à la demande de l'intéressée, présentée dans les
conditions prévues au premier alinéa. Dans ce cas, la mineure se fait
accompagner dans sa démarche par la personne majeure de son choix.
« Après l'intervention, une deuxième consultation, ayant notamment pour but
une nouvelle information sur la contraception, sera obligatoirement proposée
aux mineures. »
Sur l'article, la parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger.
Quoi de plus dramatique pour une jeune fille que de débuter sa vie sexuelle
par une IVG ? C'est malheureusement le cas de 7 000 d'entre elles chaque
année.
La question de l'IVG des adolescentes est évidemment encore plus délicate que
celle des majeures. Lorsqu'une femme mineure célibataire souhaite avorter, la
loi requiert le consentement de l'une des personnes qui exerce l'autorité
parentale ou, le cas échéant, du représentant légal. Or, nous savons tous que
la sexualité est un sujet plus ou moins tabou dans nos sociétés, notamment,
hélas, au sein de la cellule familiale, particulièrement dans certains milieux
défavorisés.
Obtenir le consentement de l'un de ses parents est bien souvent une démarche
difficile pour la jeune fille. Ce n'est pas une démarche impossible. Et
l'autorisation parentale est, à mon sens, souhaitable car elle implique un
dialogue intrafamilial qui, peut-être, n'existait pas auparavant.
Néanmoins, il existe des situations où la jeune fille se trouve dans une
impasse. La législation actuelle, en exigeant l'accord d'un des deux parents,
présuppose que le soutien familial est acquis. Or, dans certains cas, il n'en
est rien. Pour des raisons culturelles, religieuses, voire de violences
familiales, la jeune fille ne peut déclencher un dialogue avec ses parents et
encore moins obtenir leur consentement.
En conséquence, de nombreux médecins passent outre cette autorisation
parentale, se contentant d'un accord à l'authenticité douteuse. Je peux bien
sûr comprendre que des médecins agissent de la sorte, afin de répondre à la
grande détresse de ces adolescentes. Toutefois, ces professionnels prennent de
gros risques et engagent leur responsabilité.
Dans l'article 6 du projet de loi, le Gouvernement propose alors un
aménagement de la règle de l'autorisation parentale en permettant à la jeune
fille qui ne peut faire autrement que conserver le secret de se faire
accompagner par un adulte « référent ». Reste à définir le statut de cet
adulte. Comment ce dernier pourra-t-il se substituer à l'autorité parentale ?
Qui voudra assumer un tel accompagnement sans savoir ce qu'il engendre
juridiquement ?
Le Gouvernement semble mettre de côté ce « détail » qui revêt pourtant une
importance fondamentale et, de cette façon, il propose une solution qui n'est
pas tenable juridiquement. Je pense évidemment que nous devons nous préoccuper
de ces situations particulières, mais il faut le faire en imaginant un solide
dispositif dans lequel les devoirs de chacun seront clairement déterminés.
L'article 6 du projet de loi prévoit, outre l'aménagement de l'obligation de
l'autorisation parentale, qu'une deuxième consultation soit obligatoirement
proposée à la jeune fille après l'intervention, afin d'éviter, à l'avenir, une
autre IVG. Pour ma part, je recommanderai vivement que cette consultation ne
soit pas juste « obligatoirement proposée », mais obligatoire tout court.
En faisant un tant soit peu preuve d'empathie, sommes-nous capables d'imaginer
le choc psychologique et physique que connaît une adolescente venant de vivre
une IVG ?
Je ne pense pas qu'une deuxième consultation médicale soit suffisante. Elle
est néanmoins nécessaire, mais un accompagnement digne de ce nom mériterait un
suivi approfondi sur une durée relativement longue, que j'estime être de
l'ordre d'un an.
Durant une année environ, la mineure rencontrerait à plusieurs reprises une
conseillère familiale qui l'accompagnerait psychologiquement dans cette période
difficile. Un tel suivi donnerait sans doute aux adolescentes les armes
nécessaires pour surmonter le choc psychologique, du moins à celles qui sont
les plus fragiles.
M. le président.
Sur l'article 6, je suis d'abord saisi de six amendements qui peuvent faire
l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 82, M. Lagauche, Mme Pourtaud, MM. Lagorsse et Bellanger
proposent de rédiger comme suit les premier, deuxième et troisième alinéas du
texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé
publique :
« La femme mineure enceinte est considérée comme capable pour toutes les
décisions concernant sa contraception ou l'interruption volontaire de
grossesse. Si elle prend la décision d'interrompre sa grossesse, elle présente
sa demande à un médecin en dehors de la présence de toute autre personne.
« Si la femme mineure désire garder le secret, le médecin doit s'efforcer,
dans son intérêt, d'obtenir son consentement pour que le ou les titulaires de
l'autorité parentale ou, le cas échéant, le représentant légal soient informés
ou doit vérifier que cette démarche a été faite lors de l'entretien mentionné à
l'article L. 2212-4.
« Si la mineure ne veut pas effectuer cette démarché, l'interruption de
grossesse ainsi que les soins qui lui sont liés peuvent être pratiqués à la
demande de l'intéressée, présentée dans les conditions prévues au premier
alinéa. Dans ce cas, la mineure se fait accompagner dans sa démarche par la
personne majeure de son choix. »
Les quatre amendements suivants sont présentés par M. Giraud, au nom de la
commission.
L'amendement n° 7 tend, dans le deuxième alinéa du texte présenté par
l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique, à remplacer
les mots : « dans son intérêt » par les mots : « dans l'intérêt de celle-ci
».
L'amendement n° 8 vise, à la fin du deuxième alinéa du texte présenté par
l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique, à supprimer
les mots : « ou doit vérifier que cette démarche a été faite lors de
l'entretien mentionné à l'article L. 2212-4 ».
L'amendement n° 9 a pour objet, dans la première phrase de l'avant-dernier
alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la
santé publique, après les mots : « l'interruption de grossesse ainsi que les »,
d'insérer les mots : « actes médicaux et ».
L'amendement n° 10 tend, dans la seconde phrase de l'avant-dernier alinéa du
texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé
publique, à remplacer le mot : « accompagner » par le mot : « assister ».
Par amendement n° 41, M. Chérioux propose, à la fin de la seconde phrase du
troisième alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du
code de la santé publique, de remplacer les mots : « par la personne majeure de
son choix » par les mots : « par un membre majeur de sa famille ou une personne
qualifiée, qu'elle choisit dans des conditions fixées par décret. »
La parole est à M. Lagauche, pour présenter l'amendement n° 82.
M. Serge Lagauche.
La loi Veil ne prévoyait pas la possibilité de pallier l'absence de
consentement parental, faisant ainsi du droit parental une sorte de droit
absolu et aboutissant aux situations de blocage que l'on connaît et qui donnent
lieu actuellement à des solutions extralégales, pour ne pas dire illégales.
On peut estimer suffisant de créer une exception au principe de l'autorité
parentale. Mais c'est oublier que les mineures peuvent déjà accomplir seules
certains actes : accoucher sous X, abandonner ou reconnaître leur enfant. Dans
ces trois cas, elles sont considérées comme capables.
Je ne vois pas en vertu de quelle logique notre droit leur accorde une
autonomie en cas de poursuite de leur grossesse, mais pas dans le cas d'une
interruption volontaire de grossesse. C'est pourquoi nous pouvons estimer que
la jeune fille, à partir du moment où elle est enceinte, doit être considérée
comme capable pour tout acte concernant l'interruption de grossesse et la
contraception.
Le fait de considérer la jeune fille comme capable amène à réfléchir, dans ce
nouveau cadre, au rôle des parents et, plus largement, des adultes. Bien sûr,
le mieux serait que les parents soient informés. En même temps, les adolescents
ne demandent pas la permission à leurs parents pour avoir des relations
sexuelles. Cela relève de l'intime et les obliger à reconnaître leur sexualité
devant leurs parents peut être une violence symbolique très forte.
Néanmoins, nous ne pouvons pas laisser ces jeunes filles livrées à
elles-mêmes. Je propose donc de garder l'obligation, pour la mineure, de se
faire accompagner, pour faire pratiquer une IVG, par la personne de son choix.
Rien n'empêche, évidemment, que la jeune fille choisisse l'un de ses parents,
mais l'important est qu'elle puisse choisir une personne en qui elle a toute
confiance.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 7, 8, 9
et 10.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'amendement n° 7 est rédactionnel.
L'amendement n° 8 est un amendement de coordination avec celui de la
commission qui a été adopté à l'article 4.
Votre commission n'est, en effet, pas favorable à ce que se multiplient des
démarches parallèles de vérification du consentement parental : il revient au
seul médecin, qui a
in fine
la responsabilité médicale de l'acte, de
s'efforcer de convaincre la mineure d'obtenir le consentement parental.
L'amendement n° 9 vise à préciser que les actes médicaux, notamment
anesthésiques, liés à l'interruption de grossesse sont également pratiqués à la
demande de la mineure. Ainsi, le médecin pratiquant une anesthésie sur une
mineure ne saurait voir sa responsabilité engagée du fait de l'absence de
consentement parental.
Enfin, l'amendement n° 10 traite, au fond, du problème de l'autorisation
parentale. En effet, si, dans le projet de loi, il est réaffirmé que
l'autorisation parentale reste la règle en matière d'interruption volontaire de
grossesse des mineures, la possibilité de dérogation à ce principe est
cependant ouverte. Si la jeune fille persiste dans son souhait de garder le
secret ou si, malgré son souhait, elle ne peut obtenir le consentement de ses
parents, elle pourra finalement prendre seule la décision de demander une IVG.
Elle choisira alors une personne majeure pour l'accompagner dans sa
démarche.
Chacun comprendra que cette disposition législative est symboliquement lourde
et que ses conséquences juridiques sont graves. Après avoir longuement
réfléchi, la commission vous propose cependant d'en accepter le principe.
En effet, si, dans la très grande majorité des cas, la mineure obtient
l'accord de l'un de ses deux parents, il est des situations où le consentement
parental paraît impossible à obtenir soit pour des raisons culturelles, soit
pour des raisons simplement matérielles. Il est des cas où la simple annonce
d'une grossesse mettrait en danger la vie de la jeune fille. Le recours au juge
des enfants paraît alors inadapté.
Il est apparu dans ces conditions à votre commission qu'une modification du
cadre légal régissant la situation particulière des mineures était souhaitable.
Il est important que ces dernières ne soient plus, comme c'est le cas
actuellement, dépendantes de la position des professionnels de santé auxquels
elles s'adressent et de l'interprétation que font ces derniers des dispositions
légales. De même, il est nécessaire que ces professionnels, confrontés à des
situations humaines difficiles, puissent répondre aux besoins de ces mineures
tout en ayant une connaissance précise des conditions de leur intervention et
des cas dans lesquels ils peuvent engager leur responsabilité.
Si la commission propose d'accepter la dérogation au principe de l'autorité
parentale, elle souhaite néanmoins entourer cette possibilité d'un certain
nombre de garanties : il n'est pas envisageable, en effet, que la mineure
puisse être livrée à elle-même ou qu'elle soit, comme il est préconisé dans le
projet de loi, simplement « accompagnée » par une personne de son choix qui
pourrait être n'importe qui.
Elle propose par conséquent que cette personne ne se limite pas à accompagner
cette mineure, concept qui n'a aucune signification juridique, mais l'assiste,
par référence aux dispositions du code civil qui prévoient, dans certaines
situations, l'assistance d'un mineur par une personne adulte. Cette
modification terminologique a naturellement des conséquences juridiques
puisqu'elle suppose l'exercice d'une responsabilité à l'égard de la mineure. La
responsabilité de la personne référente ne pourrait cependant pas être mise en
cause par les parents de la mineure puisque la loi lui confie cette mission.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux, pour présenter l'amendement n° 41.
M. Jean Chérioux.
L'objectif de cet amendement est de suivre la logique de la commission et de
prévoir que la personne mineure soit non pas « accompagnée », mais « assistée
».
Il me semble souhaitable de réintroduire dans le dispositif la famille, qui
peut jouer un rôle. Il fallait, je le sais bien, éviter que les parents ne
bloquent l'affaire mais, dans les faits, il y a toujours un membre de la
famille qui se montre compréhensif, à l'image, dans
La fille du
puisatier
, de cette bonne tante qui soutient sa nièce contre la volonté du
père.
(Sourires.)
Pourquoi ne pas faire référence au choix - ce n'est
pas une obligation - d'un membre de la famille ?
Si la personne chargée d'assister la mineure n'appartient pas à la famille,
elle doit être une personne qualifiée - une conseillère conjugale, une
assistante sociale, une psychologue - choisie dans des conditions fixées par
décret. En effet, il ne faudrait pas que la personne choisie par la mineure,
laquelle peut être extrêmement jeune, ait intérêt à ce que l'IVG soit
pratiquée. Le père du futur enfant, par exemple, peut-il être le meilleur
assistant ? Il faut donc une garantie que la personne choisie sera une personne
d'expérience susceptible d'assister la mineure dans cette démarche
difficile.
Je souhaite rectifier mon amendement pour ajouter une virgule après les mots :
« un membre majeur de sa famille » et supprimer celle qui figure après les mots
: « une personne qualifiée ». Ainsi, « les conditions fixées par décret »
s'appliquent à la personne qualifiée et non pas également aux membres de la
famille !
M. le président.
Voilà une virgule libératrice !
(Sourires.)
M. Guy Fischer.
C'est vous qui l'affirmez !
M. le président.
Non, c'est la grammaire !
Je suis donc saisi d'un amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Chérioux et
visant, à la fin de la seconde phrase du troisième alinéa du texte proposé par
l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique, à remplacer
les mots : « par la personne majeure de son choix » par les mots : « par un
membre majeur de sa famille, ou une personne qualifiée qu'elle choisit dans des
conditions fixées par décret ».
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 82 et 41 rectifié
?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission est défavorable à l'amendement n° 82. En effet,
si elle a accepté une dérogation exceptionnelle au principe de l'autorité
parentale, elle ne peut approuver cet amendement qui va beaucoup plus loin,
puisqu'il supprime toute référence à l'autorité parentale.
Elle est en revanche également favorable à l'amendement n° 41 rectifié, la
virgule ayant été déplacée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 82,
car il n'entend pas déroger, pour le recours à l'IVG des mineures, au principe
de l'autorisation parentale qui demeure. Il a aménagé ce principe dans le texte
pour tenir compte de situations particulières, lesquelles doivent demeurer des
exceptions, et permettre ainsi à des mineures qui désirent garder le secret
d'avoir recours à l'IVG accompagnées d'un adulte choisi par elles.
La solution différente qui a été retenue pour la contraception dans le projet
de loi va dans le sens préconisé par M. Lagauche. En effet, l'insertion d'un
premier alinéa dans l'article L. 5134-1 du code de la santé publique affirme le
droit d'accès à la contraception pour des personnes mineures désirant garder le
secret. Cette disposition doit permettre de prévenir des grossesses non
désirées et la situation de particulière difficulté qui les accompagne.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 7. En revanche, il désapprouve
l'amendement n° 8. Il est en accord avec l'amendement n° 9, mais en désaccord
avec l'amendement n° 10 et il a le regret de désapprouver l'amendement n° 41 de
M. Chérioux.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 82.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Une partie de la réflexion qui accompagne
l'amendement n° 82 est loin d'être négligeable. Elle marque - je l'ai dit dans
mon intervention hier - qu'il existe une certaine incohérence en ce qui
concerne la notion de majorité ou de minorité.
Par exemple, le détournement de mineurs n'existe qu'au-dessous de quinze ans.
A quinze ans - et même avant - une fille est en mesure de prendre un certain
nombre de décisions concernant une grossesse - par exemple l'accouchement sous
X - mais elle n'est plus considérée comme mineure dans le cas d'une agression
sexuelle.
On la considère comme une femme pouvant se défendre. J'en ai touché quelques
mots hier à Mme Guigou, qui m'a répondu que la Chancellerie était consciente du
problème.
Bien sûr, je ne vais pas pour autant voter l'amendement. J'y reste opposé.
Mais je conviens qu'il pose un problème, problème qu'a d'ailleurs également
soulevé hier Mme Pourtaud. Je crois qu'il faudra le régler dans un avenir
proche.
M. le président.
L'amendement n° 82 est-il maintenu ?
M. Serge Lagauche.
Je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 82 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Cette série d'amendements fait intervenir des enjeux considérables qui, à
l'évidence, ne remédient pas totalement aux imperfections du texte initial.
Je m'explique : nous sommes tout à fait conscients que l'assouplissement
envisagé de l'obligation de soumettre à l'accord parental toute pratique de
l'IVG sur une mineure se réfère à des situations souvent graves et d'autant
plus dramatiques pour la jeune fille qu'elle sait - ou qu'elle pense - ne pas
pouvoir compter sur le soutien et la compréhension de ses parents.
Mais se posent à mon sens deux questions qui ne sont pas bien résolues à
l'heure actuelle.
La première concerne « la personne majeure de son choix ». En effet, comme M.
Chérioux l'a indiqué à l'instant, en l'absence d'un minimum de garanties, la
personne « choisie » par la jeune fille pourra être le père de l'enfant. Dans
ce cas, son consentement sera acquis, d'autant qu'il arrive que ce soit lui qui
pousse la jeune fille à se faire avorter.
Ma deuxième interrogation porte sur la responsabilité.
J'ai cru comprendre des propos de M. le rapporteur que les dispositions que
nous nous apprêtons à adopter levaient les problèmes de responsabilité du
médecin, et, en particulier, de l'anesthésiste. J'aimerais avoir confirmation
de ce point, car les considérations juridiques qui viennent d'être développées
à l'instant montrent que la situation ne peut pas être résolue avec certitude
par les amendements que nous allons adopter.
Une troisième interrogation, plus inattendue, procède des entretiens que j'ai
eus avec les intervenants d'IVG à Nancy. Ils ont fait observer que la
possibilité donnée à la jeune fille mineure de se passer de l'autorité
parentale faisait abstraction de l'obligation de fréquentation scolaire.
En effet, en période scolaire, un élève qui manque la classe pendant une
demi-journée doit faire l'objet, par le chef d'établissement, d'un signalement
immédiat à la famille.
Avez-vous songé aux conséquences de cette notification, monsieur le ministre,
mes chers collègues, surtout si, par malheur supplémentaire, l'interruption
volontaire de la grossesse étant tardive, elle devait s'opérer dans les
conditions sur lesquelles nous sommes d'accord - minimum de précautions,
impliquant un repos justifié après un acte particulièrement traumatisant ?
Qu'adviendra-t-il alors des nouvelles dispositions de la loi ? Par le
signalement scolaire, sur lequel nous ne devons pas transiger, la famille sera
immédiatement alertée du fait que la jeune fille, qui se croyait à l'abri des
foudres de ses parents, a été absente.
Je ne sais pas si l'on pourra m'apporter une réponse, mais je n'aurais pas été
honnête avec moi-même si je n'avais pas évoqué ces questions cruciales.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 10.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Certaines mineures ne peuvent pas ou ne veulent pas solliciter l'autorisation
parentale - notamment parce qu'elles savent ne pas pouvoir l'obtenir - ou,
l'ayant sollicitée, ne l'obtiennent pas.
Il s'agit souvent de jeunes filles en difficulté, appartenant à des familles
d'origine étrangère ou mal intégrées, ou encore à des familles au sein
desquelles le sujet n'est pas abordé parcer qu'il gêne.
Pour régler ce problème, il était prévu que les mineures se fassent
accompagner par une personne majeure de leur choix.
Vous voulez, monsieur le rapporteur, remplacer la notion d'accompagnement par
celle d'assistance. C'est très différent, juridiquement et sur le fond.
Juridiquement, qui prendra le risque lié à l'assistance ? Personne, sinon les
parents, et nous en renvenons à la situation de départ, dans un contexte où le
consentement parental n'est pas accessible pour la jeune fille.
Sur le fond, cette modification pénaliserait doublement les mineures qui sont
déjà très défavorisées. Elle accroîtrait les inégalités - ce qui est grave -,
alors qu'en fait vous reconnaissez le principe de dérogation par rapport à un
consentement parental impossible à obtenir.
Quant à nous, nous préférons résoudre complètement, avec cohérence, le
problème soulevé.
M. Jean-Guy Branger.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger.
Comme je l'ai dit tout à l'heure et ainsi que viennent de l'évoquer M. Huriet
et Mme Dieulangard, il fait établir la responsabilité juridique.
Si l'intervention tourne mal, à qui incombe la responsabilité ? Le médecin ?
Je voudrais que l'on me réponde sur ce point, car il faut absolument que nous
soyons très concrets dans un domaine aussi grave.
Si une jeune fille de quatorze ou quinze ans veut se faire avorter, en dehors
de toute cellule familiale sans le consentement de son père ou de sa mère, ou
sans qu'ils le sachent quel adulte va juridiquement porter la responsabilité
?
On dit : elle va aller voir le médecin. Mais quelle est la situation juridique
de ce dernier ? Je veux le savoir. Quand on légifère, il faut bien définir les
responsabilités.
On me répondra : ce sera fait par décret. Je ne suis pas d'accord : c'est à
une assemblée politique de dire à qui appartient la responsabilité dans un
domaine comme celui-là. Certes, je suis passionné, mais c'est que la question
est grave !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je vais essayer de répondre.
M. Hilaire Flandre.
Ça va être difficile !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
La véhémence de M. Branger ne me choque pas. Au
contraire, elle me plaît.
M. Jean-Guy Branger.
J'espère bien !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je pense qu'il y a deux responsabilités à
distinguer.
Il existe tout d'abord celle des praticiens face à l'acte à pratiquer
éventuellement sur une mineure qui serait accompagnée d'un adulte. Cette
responsabilité des praticiens et des établissements est la même que d'habitude.
Puisque la loi prévoit que le médecin peut pratiquer l'intervention si la
mineure décide de recourir à l'IVG sans l'autorisation de ses parents, dès
lors, nous tombons dans le domaine de responsabilité habituelle des
établissements de santé publics ou privés, avec la notion de faute détachable
ou non du service.
J'ai compris aussi que vous vous interrogiez, monsieur le sénateur, sur la
responsabilité de la personne majeure accompagnant la mineure. Là, le problème
est plus difficile.
Voilà ce que je peux répondre : cet article institue une dérogation au
principe de l'autorisation parentale si les parents ne peuvent pas être
consultés, s'ils ne souhaitent pas participer au processus, ou s'ils sont
opposés à l'IVG.
Dans ce cas, il est prévu que l'IVG pourra être réalisée à la seule demande
de la mineure non émancipée. Celle-ci se fera accompagner dans sa démarche par
la personne majeure de son choix.
Le principe est qu'aucune responsabilité civile ou pénale de la personne ainsi
désignée ne saurait être engagée par la mineure ou les titulaires de l'autorité
parentale pour des faits se rattachant à sa mission ; c'est une mission
d'accompagnement consentie par la loi.
Premièrement, la responsabilité ne peut être recherchée en raison de la
désignation de l'accompagnant. La mineure dispose, en effet, au regard des
textes, d'une liberté totale de choix, qu'elle exerce après avoir été
conseillée lors de la consultation préalable à l'IVG.
Permettez-moi de revenir un peu sur ce point.
Quelle que soit l'attitude que l'on peut avoir au regard d'une consultation
proposée de façon systématique, ce que disait hier Elisabeth Guigou est tout à
fait fondamental : le médecin reçoit la jeune fille en consultation ; de ce
fait il a une responsabilité essentielle : c'est lui qui aura le vrai, et
peut-être le seul contact avec cette mineure. Il y est habitué car c'est un
professionnel de ces pratiques et il pourra demander lui-même à la mineure de
désigner quelqu'un.
Deuxièment, la responsabilité civile ou pénale de la personne ne saurait de
même être engagée du fait même de sa mission, qui constitue une obligation
légale s'imposant à elle du fait de sa désignation par la mineure et de son
acceptation. Elle peut refuser mais, si elle l'accepte, sa mission devient une
obligation légale.
Troisièmement, aucune faute ne peut lui être reprochée s'agissant du
consentement de la mineure à l'IVG ou de la décision qui sera prise d'y
procéder. Le consentement à l'IVG appartient à la seule mineure. L'entretien
avec le médecin se déroule en dehors de la présence de toute autre personne.
C'est pourquoi j'attachais tant d'importance, vous le comprenez, à cet
entretien avec le médecin, qui retrouve un rôle absolument essentiel.
Loin de nous l'idée dans cette proposition de diminuer le rôle du médecin et
de ce dialogue ou colloque singulier qui va pouvoir se dérouler.
Au terme de l'article 6 du projet, la mission de la personne désignée par la
mineure ne débute qu'à partir du moment où celle-ci a notifié au médecin sa
volonté de procéder à l'IVG sans en référer à l'un ou l'autre de ses parents ou
malgré un refus de ses parents.
Cette analyse résulte de l'expression : « dans ce cas figurant à l'alinéa 3 »,
qui fait clairement du consentement à l'IVG exprimé par la mineure devant le
médecin un préalable au choix et à l'intervention de cette personne. C'est
lorsqu'elle aura clairement signifié sa volonté devant le médecin, bien que sa
venue devant le médecin témoigne déjà d'une certaine façon de sa volonté, que
le rôle de la personne qu'elle désignera sera considéré comme débutant.
Quatrièmement, la personne choisie par la mineure n'intervient pas davantage
dans l'organisation de l'acte médical lui-même, ni le choix du lieu ni le choix
du médecin. En cas de problème lors de l'intervention, les principes de la
responsabilité médicale que j'ai rappelés tout à l'heure trouveront à
s'appliquer.
En conclusion, le rôle de la personne désignée par la mineure, tel que défini
par le projet que nous vous présentons, est circonscrit à une mission
d'accompagnement psychologique, de soutien chaleureux, amical, amoureux - que
sais-je - à la mineure dans la décision de pratiquer l'IVG et dans la démarche
qui fait suite à cette décision.
En aucun cas, la personne désignée ne se substitue - c'est le point essentiel
- aux titulaires de l'autorité parentale dans le pouvoir d'autoriser un acte
médical.
Je vais vous épargner les cas dans lesquels la responsabilité de la personne
désignée par la mineure pourrait être engagée. Je vous dirai simplement que
deux situations doivent être distinguées : soit les modalités d'exécution de sa
mission sont critiquées ; soit la faute reprochée à la personne est détachable
de sa misson légale. Je n'entrerai pas dans le détail.
Voilà ce que je pouvais vous répondre le plus clairement possible, monsieur le
sénateur.
M. Jean-Guy Branger.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Vous avez fait le
maximum pour me convaincre mais je ne vous cacherai pas que, malgré vos
explications très précises, selon moi, vous n'avez pas résolu le problème. Si
un drame survient à l'issue d'une intervention pratiquée sur une mineure, je
puis vous assurer qu'il s'ensuivra un contentieux qui sera nécessairement
terrible, et je crains fort que, hélas ! l'avenir ne me donne pas tort.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par
assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 11, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
supprimer le dernier alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L.
2212-7 du code de la santé publique.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
C'est un amendement de coordination avec l'amendement proposé
par la commission à l'article 4. Il s'agit de supprimer ici la référence à une
deuxième consultation, intervenant après l'IVG, dans la mesure où nous avons
prévu cette consultation à l'article 4.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
J'ai déjà, fort impoliment, indiqué que je demandais le
rejet de cet amendement. Je persiste, bien entendu, dans cette position ; c'est
la moindre des politesses...
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'article 6.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Les hésitations dont j'ai fait part tout à l'heure à l'occasion de la
discussion des amendements n'ont pas été levées, à l'évidence, par les
interventions du rapporteur et du ministre. Aussi ai-je décidé de m'abstenir
sur l'ensemble de l'article 6.
Devant une situation aussi difficile, aux enjeux aussi considérables, nous
devons estimer en conscience les risques et les bénéfices.
Les risques me paraissent très grands non seulement en ce qui concerne la
jeune fille mineure, mais aussi s'agissant des questions de responsabilité, qui
ne sont pas résolues.
Quant aux bénéfices que l'on peut attendre de ces dispositions, la référence
que j'ai faite à la nécessité de la déclaration en cas d'absentéisme scolaire
montre que, à mes yeux, tout au moins en période scolaire, ils seront
probablement nuls. Peut-être même ces dispositions se révéleront être
préjudiciables à la jeune fille.
M. Philippe Richert.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert.
Je n'ai pas voté l'amendement concernant la personne qui accompagne la mineure
et c'est pourquoi je m'abstiendrai sur l'ensemble de l'article 6. Je pense en
effet que nous n'avons pas réussi à trouver une véritable solution.
Très franchement, demander à n'importe quel adulte d'accompagner la mineure,
comme le prévoit le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale, ne me paraît
pas satisfaisant. Bien sûr, la mineure peut trouver quelqu'un qui
l'accompagnera sans qu'il y ait d'engagement de sa part. Cependant, à
l'inverse, il me paraît pas possible de demander à quelqu'un de s'engager à
supporter les conséquences d'un tel acte.
En vérité, aujourd'hui, je n'ai pas de solution à proposer. Je pense,
d'ailleurs, que certaines mineures sont même capables de décider seules.
A mon avis, il est beaucoup plus important d'entourer ces mineures d'un groupe
de conseils susceptibles de les soutenir psychologiquement que de les soutenir
physiquement chez le médecin pour lui dire s'il peut ou non pratiquer
l'avortement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 314 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 211 |
Contre | 103 |
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - L'article L. 2212-8 du même code est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Un médecin n'est jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de
grossesse mais il doit informer, sans délai, l'intéressée de son refus et lui
communiquer immédiatement le nom de praticiens susceptibles de réaliser cette
intervention selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2. » ;
« 2° Les deux derniers alinéas sont supprimés. »
Sur l'article, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Au-delà de l'impérieuse nécessité d'impulser une véritable politique
d'information et d'éducation à la sexualité et à la contraception, nous devons
également nous attacher à permettre aux femmes optant pour une interruption
volontaire de grossesse de la subir dans les meilleures conditions
possibles.
A cet égard, il est capital de rappeler avec force la nécessité, à la fois, de
laisser à un médecin la faculté de faire jouer la clause de conscience
lorsqu'il refuse de pratiquer une IVG, et de faire en sorte que l'invocation de
cette clause ne fasse jamais obstacle à l'application de la loi. Tout comme
nous devons respecter le choix du praticien de se soustraire à l'exercice de
cet acte, le médecin doit respecter le choix de la femme d'avoir recours à
cette intervention.
Or, à l'heure actuelle, l'article L. 2212-8 du code de la santé publique
prévoit qu'un chef de service peut refuser d'organiser cet acte dans son
service en invoquant la clause de conscience. L'article 7 du présent projet de
loi vise à supprimer les deux derniers alinéas de l'article L. 2212-8,
obligeant ainsi tout chef de service d'un hôpital public à assumer
l'organisation de la pratique de l'IVG, si cela a été décidé par le conseil
d'administration.
Cet article ajoute par ailleurs à l'obligation, pour le médecin, d'informer la
femme désirant interrompre sa grossesse de son refus de pratiquer l'IVG, celle
de communiquer à l'intéressée le nom de praticiens susceptibles de réaliser
l'acte.
Ces dispositions me paraissent tout à fait justifiées en ce qu'elles tendent à
réaffirmer le caractère de véritable mission de service public que constitue
l'accès à l'IVG, sur les plans tant qualitatif que quantitatif. L'IVG doit être
accessible à toutes les femmes, à n'importe quelle période, dans n'importe
quelle région du territoire français.
Je le réaffirme hautement, la notion de service public implique un élément
essentiel : la continuité. La continuité du service public est, vous le savez,
madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, un devoir impératif de l'Etat
et, pour les citoyens, un droit imprescriptible. Cette continuité est d'autant
plus indispensable en ce qui concerne l'IVG, il s'agit de situations d'urgence
et de profonde détresse.
Or, ce qui est au premier chef en cause dans la continuité de ce service
public, ce sont les critères et le mode de recrutement des médecins qui le
mettent en oeuvre. Supprimer la faculté pour un chef de service de faire
barrage à toute possibilité d'IVG dans son service est nécessaire ; mais je
crois tout aussi nécessaire d'inciter très vivement les hôpitaux publics comme
les structures privées à recruter des médecins ne refusant pas
a priori
de pratiquer des IVG. Une unité, un service, un centre d'IVG ne peuvent
fonctionner - et tous les praticiens concernés le reconnaissent très volontiers
- qu'avec des personnels animés de la volonté d'y assurer un service et des
prestations de qualité. Si l'on ne peut imposer à un médecin, chef de service
ou non, la pratique de l'interruption volontaire de grossesse, il faut au moins
veiller à ce qu'un nombre suffisant de praticiens acceptent, dans chaque centre
d'IVG, de pratiquer cet acte.
Mon propos est d'autant plus pertinent que la situation actuelle révèle
précisément, sur ce point comme sur d'autres, des disparités, tout à fait
inadmissibles entre les différents services accueillant des femmes ayant choisi
d'interrompre une grossesse, notamment selon la localisation de ces
services.
Auditionné le 9 jenvier 2001 par la délégation aux droits des femmes, le Dr.
Daniel Prévost, praticien hospitalier au centre d'orthogénie de Roubaix, s'est
élevé, comme d'ailleurs nombre de ses collègues, contre les profondes
inégalités qui existent entre les centres d'IVG selon leur région
d'implantation, mais aussi selon leur régime juridique.
En période de vacances - et plus encore en période estivale - et dans
certaines régions plus que dans d'autres, le recours à l'IVG peut se
transformer en véritable parcours du combattant. Le rapport du Pr Nisand, remis
à Mme Martine Aubry au mois de mars 1999, pointe d'ailleurs très clairement la
fermeture, l'été, de certaines structures accueillant les femmes souhaitant une
interruption volontaire de grossesse. Nul n'ignore qu'un tel état de fait
entraîne précisément des grossesses non désirées, des dépassements des délais
légaux, des départs à l'étranger, c'est-à-dire de véritables drames !
Bien entendu, je n'ignore pas que, l'an dernier, un abondement budgétaire
supplémentaire de 12 millions de francs à permis des recrutements
supplémentaires de personnels médicaux, avec, notamment, un accroissement des
vacations médicales. Porté à 15 millions de francs pour 2001, cet effort est
louable, mais insuffisant. Il doit être poursuivi et accru car, vous ne
l'ignorez pas, de nombreux centres d'IVG demeurent en difficulté faute de
moyens suffisants en personnels.
Par ailleurs, je regrette l'absence, dans le projet de loi, de toute mention
concernant les moyens en appareils médicaux que l'allongement des délais de
l'IVGn certes bienvenu, nécessite. Le Pr Michel Tournaire, chef du service de
gynécologie obstétrique à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul et président du
groupe de travail de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en
santé, l'ANAES, sur l'IVG - vous le savez, madame la secrétaire d'Etat - de
même que le Dr Clara Pélissier, présidente de la société française de
gynécologie, ont souligné, avec d'autres, que les techniques d'IVG pouvaient
être différentes selon l'état d'avancement de la grossesse et que la fixation
du délai à douze semaines de grossesse devrait nécessairement s'accompagner
d'un aménagement technique de la plupart des centres d'IVG et d'une formation
adpatée de leurs personnels médicaux et non médicaux.
J'espère vivement, madame la secrétaire d'Etat, monsieur le ministre, qu'un
effort financier réel sera engagé par l'Etat pour que soient appliquées ces
nouvelles dispositions. Elles permettront à plusieurs milliers de femmes de ne
pas partir à l'étranger pour interrompre une grossesse non désirée.
La clé fixant le tarif d'une IVG - actuellement K 30 - devra également être
modifiée, du fait de la nature des IVG réalisés entre dix et douze semaines.
Sans augmentation de la clé, c'est évident, le nombre de médecins acceptant de
pratiquer des IVG sera réduit à la portion congrue. Emergera alors à coup sûr,
dans chaque centre, une politique restrictive de quotas d'IVG.
Cette idée de déterminer un nombre maximum d'IVG afin de ne pas dépasser les
budgets menace les droits de celles que le projet de loi se donne justement
pour objectif d'aider. Ne laissons pas les suites financières données à cette
loi devenir un piège et déboucher sur un contresens !
Enfin - et ce sera le dernier point de mon intervention - je tiens à souligner
que, si les moyens du service public de l'IVG sont, notamment de l'avis des
praticiens concernés eux-mêmes, très insuffisants, on observe également une
crise nette de l'engagement médical au service des interruptions volontaires de
grossesse.
Activité éprouvante n'offrant guère de motifs de satisfaction et relativement
méprisée par une partie du corps médical, l'IVG fait l'objet de rémunérations
on ne peut moins attractives : de 200 à 400 francs, par exemple, par
demi-journée de présence dans le service pour les praticiens contractuels !
Les générations de médecins militants qui ont combattu pour la loi Veil ne
sont pas remplacées par des praticiens plus jeunes, que rien n'attire dans
cette activité.
Un phénomène de démographie médicale, en chute libre, se fait donc jour dans
cette branche, menaçant gravement la continuité et la qualité du service public
de l'IVG et affectant durement la réalité du droit des femmes à l'interruption
volontaire de grossesse.
Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, le projet de loi répond à
une situation pour laquelle une solution doit être trouvée : 7 000 femmes sont
obligées d'aller hors de France, dans un autre pays européen, pour interrompre
une grossesse. Cela n'est plus tolérable !
M. le président.
Veuillez conclure, je vous prie, madame Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
J'en termine, monsieur le président !
Il est donc indispensable que des moyens financiers et en personnels soient
alloués à nos centres hospitaliers pour que les femmes, toutes celles qui le
souhaitent, puissent exercer leur liberté de choisir l'interruption volontaire
de grossesse, avec toutes les garanties médicales auxquelles elles ont droit,
et de le faire le plus tôt possible, dès les premières semaines de la grossesse
et, en tous les cas, dès qu'elles le désirent.
M. le président.
Par amendement n° 47, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de remplacer le dernier alinéa (2°) de
l'article 7 par deux alinéas ainsi rédigés :
« 2° Les deux derniers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les établissements hospitaliers appartenant aux catégories mentionnées
à l'alinéa précédent, chaque fois que le nombre d'interruptions de grossesse et
le volume de l'activité orthogénique le nécessitent, le responsable du service
organise en son sein une unité fonctionnelle. Celle-ci doit comprendre à la
fois une activité de planification de contraception et d'interruptions
volontaires de grossesse. »
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion.
Cet amendement vise à assurer l'existence d'unités fonctionnelles et à mieux
les identifier.
En effet, il apparaît clairement que, lorsqu'elles existent, ces structures
sont celles qui fonctionnent le mieux et réalisent dans de bonnes conditions un
nombre d'IVG répondant à la demande.
En effet, les huit cent unités fonctionnelles réparties sur notre territoire
jouent, du fait de leur organisation et de leur statut, un rôle extrêmement
important.
Rappelons qu'elles sont composées d'équipes plus soudées et plus à l'écoute,
car ce sont des personnes volontaires. Rappelons encore qu'elles sont les
protagonistes du développement de techniques nouvelles, comme la méthode
médicamenteuse, par exemple. Soulignons enfin que ce mode de fonctionnement
permet de ne pas mélanger au sein du même service les femmes qui viennent pour
une interruption de grossesse et celles qui viennent pour un accouchement.
Pour toutes ces raisons, je voudrais, madame la secrétaire d'Etat, monsieur le
ministre, qu'on ne les oublie pas et que le Gouvernement nous assure qu'elles
disposeront des moyens nécessaires pour continuer le travail remarquable
qu'elles font.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission souhaiterait entendre d'abord l'avis du
Gouvernement.
M. le président.
Quel est, dans ces conditions, l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je me sens extrêmement important.
(Sourires.)
M. le président.
Mais vous l'êtes !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
M. le président est trop bon !
(Nouveaux
sourires.)
Je ne commencerai pas par la réponse. Mais, de vous à moi, madame, je
voudrais, moi aussi, pouvoir disposer de l'argent dont j'ai besoin, notamment
pour transformer en profondeur notre système de soins !
La difficulté, c'est que, dans notre système, il y a, d'un côté, la dépense
et, de l'autre, l'argent, qui vient d'ailleurs.
Mme Hélène Luc.
C'est parce que nous voulons vous aider !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je vous demande de continuer, car je ne suis pas au
bout de mes peines !
Si j'avais l'argent, je vous le donnerais tout de suite ! Seulement, voilà :
l'argent est celui des Français, il circule dans un autre système, il est
bloqué dans une enveloppe fermée tous les ans, etc. C'était là un aparté.
J'en viens maintenant à la réponse officielle.
Dans les établissements de pensée publique... Quel lapsus, car je voudrais
précisément un établissement de pensée publique pour la santé publique !
Dans les établissements publics de santé, voulais-je dire, qui sont tenus
d'assurer une activité d'IVG, le conseil d'administration doit organiser cette
activité, comme toute autre activité médicale, conformément aux dispositions du
5e alinéa de l'article L. 6143-1 et des articles L. 6146-1 à L. 6146-8 du code
de la santé publique qui fixent l'organisation médicale de droit commun des
établissements publics de santé, laquelle est nécessairement constituée en
unités fonctionnelles, services ou départements, voire en structures libres.
L'organisation proposée, qui regroupe activités d'orthogénie et activités
d'IVG, est logique. Mais, en tout état de cause, il appartient au chef de
service ou de département d'assurer la conduite générale du service ou du
département et d'organiser son fonctionnement technique, dans le respect de la
responsabilité médicale de chaque praticien et des missions dévolues à chaque
unité fonctionnelle par le projet de service ou de département, comme le
précise l'article L. 6146-5 du code de la santé publique.
Pour ce qui est de l'activité d'orthogénie elle-même, elle est assurée par les
organismes de planification, d'éducation et de conseil familial. Les
établissements publics de santé qui assurent les IVG doivent obligatoirement
comporter un centre d'éducation familiale ou de planification agréé, aux termes
de l'article 2 du décret n° 88-59 du 18 janvier 1988 pris en application des
articles L. 2212-8 et L. 2212-9 du code de la santé publique.
Afin d'améliorer l'organisation de l'activité des centres d'orthogénie, des
crédits d'un montant total de 12 millions de francs, destinés à créer des
postes de praticiens dans les établissements publics, ont été accordés à
l'ensemble des régions en fin d'année 1999. Cet effort sera poursuivi à hauteur
de 15 millions de francs en 2001. Je note au passage que lesdits praticiens
sont horriblement mal payés et qu'ils ont vraiment du mérite à continuer
d'exercer !
Permettez-moi de rappeler que le budget total alloué cette année à l'ensemble
du dispositif de soins et de santé publique dans notre pays est de 900
milliards de francs ; vous pouvez, à cet égard, vous reporter à l'excellent
document sur la santé publique que j'ai publié hier. Là, nous en sommes à 15
millions de francs. Vous voyez l'effort...
De surcroît, un groupe national d'accompagnement et d'appui des centres d'IVG
sera mis en place dès la publication de la loi. Composé de responsables
hospitaliers, de médecins, d'infirmières et de personnalités qualifiées, il
sera chargé de proposer les mesures nécessaires à l'amélioration de
l'organisation des activités d'IVG.
J'ai donc le regret, madame, de devoir être contre votre amendement, mais, aux
termes de la loi, il ne peut en être autrement.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Très bien !
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
La commission a souhaité que M. le ministre
donne son avis avant qu'elle n'indique le sien, mais elle aurait pu exprimer
celui-ci dans les mêmes termes.
Les unités fonctionnelles peuvent figurer dans les projets que font les chefs
de service. Ensuite se déroule une discussion avec les agences régionales de
l'hospitalisation, qui disposent éventuellement, dans le cadre de la dotation
régionale, d'un certain nombre de crédits supplémentaires - vous avez dit tout
à l'heure, monsieur le ministre, que ces 12 millions de francs étaient répartis
au niveau régional.
Dès lors, cette question n'est pas du ressort de la loi.
M. le président.
Madame Campion, l'amendement n° 47 est-il maintenu ?
Mme Claire-Lise Campion.
Non. Nous le retirons, et nous remercions M. le ministre de ses
explications.
M. le président.
L'amendement n° 47 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Article 7 bis
M. le président.
« Art. 7
bis.
- I. - L'article L. 2322-4 du même code est abrogé.
« II. - L'article L. 2322-1 du même code est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Un décret fixe les installations autorisées dont les établissements de santé
privés sont tenus de disposer lorsqu'ils souhaitent pratiquer des interruptions
volontaires de grossesse. »
- (Adopté.)
Article additionnel après l'article 7 bis
M. le président.
Par amendement n° 83, M. Lagauche, Mme Pourtaud, MM. Lagorsse et Bellanger
proposent d'insérer, après l'article 7
bis
, un article additionnel ainsi
rédigé :
« Après le chapitre II du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code
de la santé publique, est inséré un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre... Interruption volontaire de grossesse pratiquée après la douzième
semaine de grossesse.
« Article L... . - Au-delà de la douzième semaine de grossesse, l'interruption
volontaire de grossesse est autorisée uniquement dans des établissements
d'hospitalisation habilités et répartis sur l'ensemble du territoire en
fonction des besoins.
« Les conditions de fonctionnement, la répartition et le nombre de ces
établissements sont fixés par un décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche.
Je suppose que cet amendement n'a plus d'objet, dans la mesure où il vise les
IVG pratiquées au-delà de douze semaines de grossesse.
Cela étant, mon principal souci est que chaque femme qui en exprime le besoin
puisse recourir à l'IVG. Que certaines d'entre elles soient obligées de se
rendre à l'étranger pour le faire m'est tout simplement intolérable, et je ne
suis pas seul à penser ainsi dans cet hémicycle. Il nous faut donc apporter une
solution à toutes les femmes qui, pour des raisons complexes et multiples, ont
dépassé le délai de douze semaines. C'est une question de justice sociale.
Comme j'avais demandé tout à l'heure que les établissements déjà existants
procèdent aux IVG pratiquées avant douze semaines, je propose maintenant que
des établissements spécialisés, implantés dans chaque région et dotés des
moyens permettant de faire face aux besoins, soient créés pour les IVG
pratiquées au-delà de douze semaines.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'avis de la commission est très défavorable. Il n'y aurait
plus aucune limite et cela reviendrait à instaurer le droit à l'avortement sans
délais, après la douzième semaine ou plus tard.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
J'ai déjà dit qu'il n'était pas dans les intentions du
Gouvernement d'aller au-delà de la douzième semaine. Je suis donc défavorable à
cet amendement.
M. le président.
Monsieur Lagauche, maintenez-vous cet amendement ?
M. Serge Lagauche.
Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président.
L'amendement n° 83 est retiré.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Merci, monsieur Lagauche !
Article 8
M. le président.
« Art. 8. - L'intitulé du chapitre III du titre Ier du livre II de la deuxième
partie du même code est ainsi rédigé : "Interruption de grossesse pratiquée
pour motif médical". »
- (Adopté.)
Article 8 bis
M. le président.
« Art. 8
bis
. - L'article L. 2213-1 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2213-1
. - L'interruption volontaire d'une grossesse peut, à
toute époque, être pratiquée si la poursuite de la grossesse met en péril grave
la santé de la femme ou s'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître
soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme
incurable au moment du diagnostic. Cette décision ne peut être prise qu'après
que la réalité de l'une ou l'autre de ces situations a été appréciée par une
commission pluridisciplinaire.
« Cette commission comprend au moins trois personnes qui sont une personne
qualifiée, un médecin choisi par la femme concernée et un médecin responsable
de service de gynécologie obstétrique. Lorsque l'interruption de grossesse est
envisagée au motif qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître
soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme
incurable au moment du diagnostic prénatal, le deuxième médecin exerce son
activité dans un centre de diagnostic prénatal pluridisciplinaire. Un décret en
Conseil d'Etat précise la composition et les modalités de fonctionnement de
cette commission.
« La femme concernée ou le couple peut, à sa demande, être entendu par la
commission. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 30, le Gouvernement propose de rédiger comme suit cet
article :
« L'article L. 2213-1 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2213-1. -
L'interruption volontaire de grossesse peut, à
toute époque, être pratiquée si deux médecins d'une équipe pluridisciplinaire
attestent après concertation que la poursuite de la grossesse met en péril
grave la santé de la femme ou qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à
naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme
incurable au moment du diagnostic. L'avis de la commission peut être sollicité
par un médecin ou par la femme.
« Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif que la poursuite
de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, la commission de
concertation pluridisciplinaire comprend un médecin choisi par l'intéressée, un
médecin spécialiste qualifié en gynécologie obstétrique et un médecin
spécialiste qualifié pour traiter du problème de santé spécifique de la femme.
Ce dernier, ainsi que le médecin spécialiste qualifié en gynécologie
obstétrique doivent exercer leur activité dans un établissement public de santé
ou dans un établissement de santé privé satisfaisant aux conditions de
l'article L. 2322-1.
« Si l'interruption de grossesse est envisagée au motif qu'il existe une forte
probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une
particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic, la
concertation pluridisciplinaire est menée au sein d'un centre de diagnostic
prénatal mentionné à l'article L. 2131-1 du présent code en présence d'un
médecin choisi par la femme.
« La femme concernée ou le couple peut, à sa demande, être entendu par la
commission ou l'un de ses membres. »
Par amendement n° 65, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la première phrase du
premier alinéa du texte présenté par l'article 8
bis
pour l'article L.
2213-1 du code de la santé publique, après les mots : « met en péril grave la
santé », d'insérer les mots : « , prise au sens d'un état de bien-être
physique, mental et social, ».
Par amendement n° 12, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose dans
la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 8
bis
pour l'article L. 2213 du code de la santé publique, après les mots
: « la santé de la femme », d'insérer les mots : « , y compris sa santé
psychique, appréciée notamment au regard de risques avérés de suicide ou d'un
état de détresse consécutif à un viol ou un inceste, ».
Par amendement n° 13, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose,
après les mots : « qui sont », de rédiger comme suit la fin de la première
phrase du deuxième alinéa du texte présenté par l'article 8
bis
pour
l'article L. 2213-1 du code de la santé publique : « un médecin choisi par la
femme concernée, un médecin gynécologue-obstétricien et une personne qualifiée
n'appartenant pas au corps médical ».
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 30.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le souci de mettre en oeuvre une procédure de
concertation collégiale préalablement à la réalisation des interruptions
médicales de grossesse envisagées au motif que la poursuite de la grossesse met
en péril grave la santé de la femme ou qu'il existe une forte probabilité que
l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité
reconnue comme incurable au moment du diagnostic apparaît légitime ; il est
partagé par les professionnels confrontés à ces situations difficiles.
Dans le cadre des dispositifs à mettre en place pour répondre à cet objectif,
il convient de s'assurer de la qualité de la concertation menée, d'une part,
entre les experts concernés par le problème médical de la femme ou du foetus
et, d'autre part, avec la femme, ou le couple touché par un problème majeur de
la grossesse.
Le motif médical étant le fait justificatif prévu par la loi pour les
interruptions de grossesse de cette nature, il convient de confier son
appréciation à des praticiens dans le cadre d'une concertation
pluridisciplinaire.
En ce qui concerne les interruptions médicales de grossesse, les IMG, pour
anomalie du foetus, il est nécessaire d'inscrire clairement la concertation
préalable dans le cadre des centres de diagnostic prénatal pluridisciplinaires,
dont les professionnels s'accordent à reconnaître la réelle compétence
d'expertise et l'aide véritable qu'ils apportent aux praticiens et aux femmes
dans les indications d'interruptions médicales de grossesse.
S'agissant des interventions liées à un problème de santé de la femme, il
convient de créer une instance de concertation pluridisciplinaire composée de
médecins dont les qualités permettent de procéder à l'expertise de la
pathologie touchant la femme.
Le dispositif proposé prévoit dans toutes les situations la réunion d'une
instance de concertation unique compte tenu de la nécessité d'aboutir à une
décision rapide. La procédure doit en effet tenir compte de la difficulté de
l'épreuve que représente, pour la femme concernée, cette période
d'expertise.
Par ailleurs, l'introduction d'un médecin choisi par la femme renforce le
droit de celle-ci à être entendue dans le cadre de la procédure. Cette
disposition est susceptible de faciliter la concertation entre l'instance
d'expertise et l'intéressée, ainsi que l'information de cette dernière.
M. le président.
La parole est à M. Muzeau, pour défendre l'amendement n° 65.
M. Roland Muzeau.
Le texte de cet article 8
bis
, qui traite de l'interruption de
grossesse pour motif médical, expose les modifications résultant de la
requalification de l'interruption thérapeutique de grossesse en interruption
médicale de grossesse. Ces modifications ne sont pas seulement d'ordre
sémantique puisque les nouvelles dispositions renforcent le caractère collégial
de la prise de décision et prévoient que la femme ou le couple concerné pourra
être entendu, à sa demande, par une commission pluridisplinaire mise en place
dans le cadre de cette évolution des textes en vigueur à ce jour.
Certes, le terme « médical » autorise une prise en compte plus large et une
appréciation plus ouverte de l'état de santé de la femme confrontée à une
interruption de grossesse que le qualificatif « thérapeutique ».
Cela étant dit, nous pensons qu'il convient de préciser le terme « santé »
afin de mieux prendre en considération la globalité de cette notion qui
recouvre plusieurs aspects.
C'est pourquoi nous proposons de compléter le texte en y incluant les
prescriptions de l'Organisation mondiale de la santé, qui définit la santé
comme « un état de bien-être physique, mental et social ».
Selon nous, cette précision permettra de mieux répondre à certaines situations
difficiles. Aussi nous vous demandons, mes chers collègues, d'adopter notre
amendement.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 12 et 13
et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 30 et 65.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'amendement n° 12 témoigne du fait que la commission
approuve la réforme de la procédure de l'IMG proposée par l'Assemblée
nationale.
Cette nouvelle procédure présente l'avantage d'être véritablement collégiale,
puisque la commission comprend au moins trois membres. En outre, la composition
de cette commission est pluridisciplinaire, et non plus exclusivement médicale.
La présence d'une personne qualifiée, qui pourrait être une conseillère
conjugale, une psychologue ou une assistante sociale, permettra sans doute une
plus grande diversité d'approche.
Votre commission propose donc d'adapter cet article en le complétant. En
effet, si elle vous demande de rejeter l'allongement du délai légal de l'IVG,
elle estime néanmoins indispensable d'apporter une réponse à la détresse des
femmes qui dépassent le délai légal. Elle propose, par conséquent, que ces
situations puissent être prises en charge dans le cadre de la procédure de
l'interruption médicale de grossesse telle qu'elle est réformée par le présent
article. Cet amendement vise à compléter le texte proposé afin d'ajouter que la
référence à la santé de la femme inclut sa santé psychique. Cette précision
permettrait la prise en charge des situations les plus douloureuses, qui
constituent souvent l'essentiel des cas de dépassement de délai.
En ce qui concerne l'amendement n° 30 nous avons éprouvé quelque difficulté
pour comprendre la procédure proposée. Il n'y a rien à redire s'agissant des
dispositions qui étaient déjà prévues par la loi Veil, à savoir les anomalies
mettant gravement en cause la santé de la femme ou le foetus. En revanche, pour
ce qui est des interventions liées à un problème de santé de la femme, notre
rédaction, tout en maintenant bien sûr la primauté de la médecine - cela ne
vous étonnera pas de la part du rapporteur - prévoit, au sein de cette
commission, la présence d'une personne qualifiée. Ainsi, cette commission ne
serait plus strictement médicale. C'est pourquoi nous sommes défavorables à
l'amendement n° 30.
Quant à l'amendement n° 65, qui vise à préciser, en reprenant la définition de
l'Organisation mondiale de la santé, que la santé est un bien-être physique,
mental et social, il ne nous paraît pas très adapté à la situation. En tout
cas, il est incompatible avec la position de la commission, la définition
proposée étant trop large. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 65, 12 et 13 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
S'agissant de l'amendement n° 65, l'élargissement des
indications d'intervention médicale à la détresse psychosociale est, selon
nous, contraire à l'esprit de la loi de 1975. Aussi, nous sommes défavorables à
cette disposition.
Nous sommes également défavorables aux amendements n°s 12 et 13. Le souci de
mettre en oeuvre une nouvelle procédure de concertation collégiale
préalablement à la réalisation des IMG envisagées au motif que la poursuite de
la grossesse met en péril la santé de la femme paraît légitime et partagé par
les professionnels. En ce qui concerne les IMG envisagées en raison d'une
anomalie embryonnaire ou foetale, il convient d'inscrire clairement l'expertise
médicale dans le cadre du fonctionnement des centre multidisciplinaires.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par la commission.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 65.
M. Roland Muzeau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Les explications de M. le ministre sont certes intéressantes, mais elles ne
correspondent pas à l'appréciation que nous portons sur le terme « médical ».
Il convient de retenir la définition donnée par l'Organisation mondiale de la
santé. C'est pourquoi nous maintenons notre amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 65, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 12.
Mme Claire-Lise Campion.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion.
Vous nous proposez, par cet amendement, d'élargir le champ de l'interruption
médicale de grossesse.
Si
a priori
on ne peut que souscrire à l'ouverture supplémentaire de
l'IMG à la santé psychique de la femme, votre amendement vise en fait à
réintroduire au-delà du délai de dix semaines l'obligation pour les femmes de
justifier leur demande devant une commission.
Selon nous, ce subterfuge vise à culpabiliser une fois encore la femme et
semble attentatoire à sa dignité.
Il s'agit bien d'un subterfuge car vous omettez par ailleurs d'indiquer ce
qu'il adviendra des femmes entendues par la commission qui se verront refuser
une interruption médicale de grossesse et qui se retrouveront dans le désarroi
le plus total, avec, n'en doutons pas, le sentiment d'avoir été trompées.
Quelle solution leur proposerez-vous alors ?
Nous ne voterons pas cet amendement.
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Je souhaiterais obtenir une précision de la part de la commission. La
formulation qu'elle propose est-elle restrictive ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Non !
M. Patrick Lassourd.
C'est bien ce qui m'avait semblé en vous entendant exposer l'amendement. Vous
parliez bien de santé psychique, sans autre précision. Par conséquent, la suite
de la rédaction qui nous est proposée figure donc à titre d'illustation.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
En effet !
M. Patrick Lassourd.
Cependant, certains juristes ne considéreront-ils pas cette rédaction de
manière restrictive ? Je me demande si, à leurs yeux, la mise en péril de la
santé psychique de la femme, ce ne seront pas uniquement les risques avérés de
suicide ou l'état de détresse consécutif à un viol ou un inceste.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Compte tenu de la présence de l'adverbe «
notamment », qu'il n'est d'ailleurs pas bon de faire figurer dans un texte
législatif, il s'agit simplement d'exemples. Ce sont les exemples les plus
marquants, mais aucune autre situation n'est écartée.
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Il était important que cette précision soit apportée et qu'elle figure dans le
compte rendu des débats. En effet, ce texte aurait pu être interprété d'une
manière différente. En tout cas, au vu des explications de M. le président de
la commission, je suis favorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 13.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Comme je l'ai précisé ce matin en commission, je ne peux voter cet amendement.
Nous sommes dans le cadre de la procédure d'interruption médicale de grossesse.
Aussi, je ne vois pas les raisons pour lesquelles il conviendrait d'introduire
dans cette commission « une personne qualifiée n'appartenant pas au corps
médical ». Si la formulation précisait qu'il s'agit d'« une personne
appartenant à une profession de santé autre qu'une profession médicale »,
peut-être y aurais-je souscrit. En l'occurrence, c'est la porte ouverte à des
personnes qui n'ont pas à connaître des situations médicales et qui ne sont pas
tenues au respect du secret médical. Si M. le rapporteur pouvait citer un
exemple de personnes qualifiées auxquelles il a songé, peut-être serai-je amené
à voter ce texte. Par cette référence à un tiers n'exerçant pas une profession
de santé, n'étant pas médecin, on risque d'introduire une dimension allant
au-delà des intentions du rapporteur.
M. Lucien Neuwirth.
Cela peut être un psychologue !
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La remarque de M. Claude Huriet est justifiée. L'introduction
de la référence à une personne qualifiée visait à ne pas médicaliser à outrance
la commission pluridisciplinaire. La présence de deux médecins paraissait
suffisante. Vous avez raison, la troisième personne doit aussi être tenue au
secret médical. Une assistante sociale, par exemple, n'a pas à divulguer
partout les propos qui sont tenus devant elle.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Cela lui est même interdit !
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Même si on n'est pas médecin, on peut être tenu au secret.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Monsieur le président, je rectifie
l'amendement n° 13, en introduisant, après les mots : « n'appartenant pas au
corps médical », les mots : « mais tenue au secret professionnel ».
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 13 rectifié, et tendant, après les mots
: « qui sont », à rédiger comme suit la fin de la première phrase du deuxième
alinéa du texte proposé par l'article 8
bis
pour l'article L. 2213-1 du
code de la santé publique : « un médecin choisi par la femme concernée, un
médecin gynécologue-obstétricien et une personne qualifiée n'appartenant pas au
corps médical mais tenue au secret professionnel ».
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8
bis
, modifié.
(L'article 8
bis
est adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - A l'article L. 2213-2 du même code, les mots : "pour motif
thérapeutique" sont remplacés par les mots : "pour motif médical". »
Par amendement n° 62, M. Carle propose de compléter cet article par les mots :
« et les mots : "interruption volontaire de la grossesse" par les mots :
"interruption de la grossesse". »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)
Article additionnel après l'article 9
M. le président.
Par amendement n° 26, M. Huriet propose d'insérer, après l'article 9, un
article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 16 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Nul n'est recevable à demander une indemnisation du seul fait de sa
naissance. »
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Pour la première fois en France, la Cour de cassation s'est déclarée, le 17
novembre dernier, dans l'arrêt « Perruche », favorable à l'indemnisation d'un
enfant pour le fait d'être né handicapé. La rubéole de la mère de cet enfant
n'ayant pas été diagnostiquée en raison d'une erreur médicale, il n'avait pu
être procédé à une interruption de grossesse, selon la volonté des parents.
Cette décision a suscité une émotion très légitime dans l'opinion publique et
particulièrement chez les parents d'enfants handicapés. Elle revient, en effet,
à considérer que la vie humaine est susceptible de constituer, en elle-même, un
préjudice et que l'on peut indemniser un enfant pour le préjudice d'être né. On
pourrait dès lors en déduire que certaines vies ne valent pas la peine d'être
vécues et que la mort peut être parfois préférable à une vie handicapée.
Les conséquences d'une telle décision, notamment si elle venait à être
confirmée par la Cour de cassation, actuellement saisie de trois affaires
comparables, sont graves et appellent, à l'évidence, une réponse forte du
législateur. Il revient par conséquent au Parlement de réaffirmer la primauté
de la vie et l'égalité de toutes les vies en inscrivant dans le code civil que
nul n'est recevable à demander une indemnité du seul fait de sa naissance.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Cet amendement fait suite à un amendement soutenu par
M. Mattéi, lors de la discussion à l'Assemblée nationale du projet de loi de
modernisation sociale. Comme Elisabeth Guigou a eu l'occasion de le dire à
l'Assemblée nationale, la Cour de cassation, dans sa décision du 17 novembre
2000, a estimé que l'enfant pouvait obtenir réparation sur le terrain délictuel
du préjudice résultant de son handicap et causé directement par les fautes
commises dans l'exécution du contrat entre sa mère et le médecin. En l'espèce,
il était incontestable qu'il y ait eu faute.
Pour la Cour de cassation, le préjudice de l'enfant est de même nature que
celui que l'on a reconnu aux parents, celui qui résulte du handicap. La Cour de
cassation n'a en aucun cas évoqué la question du préjudice lié à la naissance.
Mais, de fait...
Cependant, il est évident que cet arrêt a soulevé des craintes, celles qui ont
été suscitées par les interprétations qui pourraient être données à cette
décision. Les enfants se retourneront-ils contre leurs parents ? Les risques de
judiciarisation contre les médecins à toute occasion et les dérives eugéniques
apparaissent manifestes.
Nous avons appelé à traiter ces questions avec sérieux, sérénité et dignité,
en ne légiférant pas dans l'urgence. Tout le monde ici partage ce sentiment, me
semble-t-il.
Il est effectivement important de recenser toutes les questions et de
recueillir tous les avis. Depuis, d'ailleurs, d'autres questions ont été
soulevées. Je pense notamment aux professionnels de l'échographie foetale, qui
ont exprimé leur inquiétude, le 6 mars dernier, sur un possible amalgame entre
échographie pratique de dépistage et examen diagnostique, ce qui était
d'ailleurs une façon de dissimuler de vraies anxiétés.
De même, aux critiques qui se sont multipliées après cette décision, ont
succédé dans les revues juridiques des commentaires favorables à cet arrêt :
Patrice Jourdain, professeur à Paris-V, et Frédérique Dreifus-Netter,
professeur à Paris-V, dans
Médecine et droit
de janvier-février 2001, se
sont exprimés dans ce sens.
Il convient d'ajouter également, come vous l'indiquez, que la Cour de
cassation statue aujourd'hui même sur trois affaires traitant de sujets
proches. Nous sommes donc dans un embarras profond et le Gouvernement ne
souhaite pas prendre partie à ce niveau, d'autant que la Cour de cassation
rendra sa décision, si je ne m'abuse, la semaine prochaine.
Et puis, comme Mme Guigou s'y était engagée à l'Assemblée nationale, elle a
saisi le comité consultatif national d'éthique, qui rendra son avis le 15 mai
prochain.
Telles sont les raisons qui me poussent à vous demander de ne pas maintenir
cet amendement pour le moment, monsieur le sénateur, et d'attendre au moins cet
avis, ainsi que celui de la Cour de cassation.
Je comprends votre inquiétude et je la partage. Cet arrêt m'a conduit, comme
vous tous, à m'interroger. Il nous place, en effet, dans une situation très
difficile, les médecins en particulier. Plus les méthodes d'investigation
modernes se feront précises et plus nous aurons des problèmes. Mais je crois
plus judicieux - je m'en remets donc à votre sagesse - d'attendre avant de
prendre position sur ce sujet.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Monsieur le président, la question est si grave et si complexe que je souhaite
intervenir de nouveau et apporter d'abord une précision en ce qui concerne le
calendrier, monsieur le ministre.
Il est vrai que la Cour de cassation a été saisie de trois dossiers assez
comparables à l'affaire « Perruche ». Mais, contrairement à l'information que
vous avez - et que j'avais moi-même jusqu'à ce matin - la chambre sociale de la
Cour de cassation a décidé de surseoir à statuer en renvoyant à la Cour de
cassation siégeant en session plénière ces trois dossiers, la décision devant
intervenir à une date que j'ignore.
Cela pose problème au législateur : au fond, la Cour de cassation, dont je ne
connais pas les motivations eu égard à cette procédure nouvelle et au
calendrier incertain, attend-elle une réponse de la loi, ou bien d'autres
raisons l'ont-elle poussée à surseoir ?
En ce qui concerne la saisine du Comité consultatif national d'éthique, dont
Mme Guigou avait fait état lors de la discussion à l'Assemblée nationale,
celle-ci est intervenue voilà huit jours seulement. Mais j'ai cru comprendre
que la démarche de Mme la ministre consistait à interroger le Comité
consultatif national d'éthique pour savoir s'il lui paraissait opportun que le
législateur intervienne. Si telle est bien sa pensée, bien qu'appartenant à ce
comité, je ne peux pas la suivre. Il revient en effet au législateur, et à lui
seul, de décider s'il y a matière à légiférer ou non ! Il y a donc là des
ambiguïtés qu'il convient de lever.
Monsieur le ministre, si le législateur ne se prononce pas maintenant en toute
sérénité, mais dans l'urgence, comme l'y oblige la procédure retenue par le
Gouvernement pour ce texte, nous risquons de voir la Cour de cassation créer
une jurisprudence qui s'inspire de l'arrêt « Perruche ». Dans un tel cas, si le
législateur décide d'intervenir, peut-être sera-t-il trop tard !
C'est la raison pour laquelle je défends avec vigueur l'amendement que je
viens de présenter.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Ce problème nous a été soumis aujourd'hui.
Evidemment, on a toujours une certaine réticence à vouloir dire le droit sans
avoir connaissance de tous les éléments. Mais, comme l'a indiqué Claude Huriet,
il y a eu l'arrêt « Perruche », qui, s'il n'est pas discutable, est tout au
moins discuté, car il n'a pas de véritable fondement juridique. Les choses
paraissent maintenant s'accélérer, cet arrêt suscitant sans doute un phénomène
d'imitation chez les justiciables.
C'est le problème de la poule et de l'oeuf : la loi doit-elle suivre la
jurisprudence ou bien la jurisprudence doit-elle suivre la loi ? Comme vient de
le rappeler M. Huriet, le rôle du législateur est d'intervenir pour faire la
loi.
En l'occurrence, on sait bien que, si cet amendement était adopté, comme je le
souhaite personnellement, il ne modifierait pas pour autant la loi : il faut
que ces mesures soient reprises par l'Assemblée nationale, qu'aucun recours ne
soit déposé, que la loi soit promulguée... Bref, l'adoption de cet amendement
n'aurait pas d'effet immédiat sur les dispositions en vigueur. Mais cela
pourrait nous donner l'occasion de montrer que notre assemblée, notamment sur
le plan du droit de haut niveau, est très entendue et respectée. Peut-être ce
signal est-il attendu par les personnes de très grande compétence de la Cour de
cassation qui cherchent à s'orienter dans un débat qui est complexe à la fois
pour nous, pour la Cour de cassation et pour le Gouvernement. Ce signal, nous
avons le droit et peut-être aussi le devoir de le donner. Nous verrons ce qu'il
en résultera.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je souhaite intervenir, car ce sujet m'intéresse
puissamment. Mais je ne reviendrai pas sur mon conseil de sagesse et
d'attente.
Cela étant, je comprends bien, à la suite des explications que M. Huriet vient
de donner, la motivation qui sous-tend cet amendement : il nous faut nous
prononcer à cet égard dans les plus brefs délais. Et puis, la saisine du Comité
consultatif national d'éthique ne sera peut-être pas suffisante.
Je crois quand même que, sur un problème aussi important, vous venez de le
dire, si nous commençons comme cela, d'abord, la pratique médicale, dont la
majorité des habitants de ce pays bénéficient quand même, va devenir
extrêmement difficile.
Par ailleurs, encore une fois, la phrase que vous proposez d'insérer dans le
code civil m'interpelle personnellement, gravement, si je puis me permettre
cette expression : « Nul n'est recevable à demander une indemnisation du seul
fait de sa naissance. » En effet, si cela est vrai, où va-t-on ?
Je suis donc très embarrassé. Je vais vous donner lecture d'un extrait de la
lettre qu'Elisabeth Guigou a adressée à Didier Sicard.
« Est-il nécessaire d'encadrer, par les voies les mieux appropriées, les
bonnes pratiques médicales qui devraient présider tant en diagnostic prénatal
ou pré-implantatoire que, le cas échéant, aux conditions de réanimation
néonatale, de manière à préciser la portée en ces domaines des obligations
imposées aux professionnels de santé et à en circonscrire, par voie de
conséquence, les faits de nature à engager leur responsabilité ? »
La formulation est complexe, mais je la comprends ! Ce n'est pas seulement la
question : la portée de la phrase que vous proposez est beaucoup plus large, et
c'est la raison pour laquelle celle-ci est très forte. Bien sûr, il y a, je le
comprends bien, les obligations professionnelles de bonne pratique - on les
connaît depuis longtemps - et il y a aussi les difficultés de diagnostic. Tout
cela existe ! Et puis, il y a cette interrogation majeure.
Alors, pardonnez-moi, mais je reste sur ma position et je vous demande de
surseoir à une prise de position sur ce sujet. Votre amendement marquera
profondément les esprits, monsieur Huriet, et cela, je l'admets.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 26.
M. Bernard Seillier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier.
Je voterai sans aucune hésitation cet amendement parce que, comme beaucoup
d'autres certainement, j'ai été stupéfait d'apprendre la décision de la Cour de
cassation.
Le principe qui est affirmé par notre collègue Claude Huriet dans cet
amendement se situe au-delà du droit : il est « métajuridique ».
Il est même étonnant que l'on soit obligé de le rappeler aujourd'hui dans un
texte de loi : il devrait s'imposer au législateur comme à tous les juristes,
sans que l'on ait à en débattre ou même à le préciser dans la loi. Il est
triste que nous en soyons là. C'est aussi la raison pour laquelle, sans aucune
hésitation, je le répète, je voterai cet amendement.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
M. Huriet a soulevé un problème fort complexe qui, tant sur le plan humain que
sur celui du respect de la vie ou de la bioéthique mérite, me semble-t-il, un
très large débat permettant d'évoquer tous ses aspects. Avec le talent qu'on
lui connaît, il a argumenté de façon convaincante sur l'attitude de la Cour de
cassation et la responsabilité du législateur.
C'est vrai, le législateur a des droits et des devoirs auxquels il ne peut se
dérober. Mais c'est précisément parce qu'il a des droits et des devoirs qu'il
doit prendre le temps d'une réflexion sereine.
Or, il serait, à mon avis, préjudiciable à la sérénité de nos débats, le cas
souvent mise en avant, de prendre une position aussi rapide à la faveur d'un
texte qui ne traite pas à proprement parler du sujet. La sagesse commande que
nous prenions le temps de la réflexion.
M. le rapporteur a dit qu'il fallait donner un signal. C'est une notion
intéressante. Mais la discussion qui vient de s'instaurer ne peut-elle pas être
considérée comme un signal qui nous permettra de revenir sur ce problème à
l'occasion de la discussion d'un autre texte ?
Voilà pourquoi je suis le Gouvernement lorsqu'il demande aux collègues qui
sont convaincus de la justesse de leur position de surseoir à leur décision.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je dois avouer que, comme notre collègue Bernard Sellier, j'ai été scandalisé
par la décision de la Cour de cassation. Que l'on puisse demander une indemnité
à un praticien parce qu'il vous a en quelque sorte sauvé la vie est
extravagant.
Je sais bien que le sujet mérite réflexion. Mais il ne faudrait pas inverser
les rôles : c'est le législateur qui a fait la loi, pas la Cour de cassation.
Et si la Cour est amenée à surseoir à statuer, peut-être est-ce aussi parce
qu'elle voudrait savoir quelle est la position du législateur. Il est donc du
devoir du Sénat de donner un signal.
M. le ministre prétend que c'est quelque peu prématuré. Mme Bidard-Reydet,
quant à elle, estime que la tenue même de notre débat constitue un signal. On
aurait peut-être pu considérer qu'il n'était pas nécessaire de voter
l'amendement aujourd'hui s'il n'y avait pas eu déclaration d'urgence. Mais,
comme il n'y aura pas de navette, si nous ne l'adoptons pas aujourd'hui, nous
n'aurons plus la possibilité de le réintroduire dans le texte ultérieurement.
Notre devoir est donc de le voter.
Si le Gouvernement considère que notre signal ne lui convient pas, il lui
appartiendra de prendre ses responsabilités, car il a toujours le droit
d'amender. Ce faisant, il prendra ses responsabilités ; nous, nous prenons les
nôtres.
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Je suis favorable à l'adoption de cet amendement, dit « Perruche », qui
soulève, c'est vrai, des problèmes considérables.
Trois autres affaires sont en instance, qui peuvent donner lieu à des dérives
extraordinaires, où l'on verra éventuellement un enfant reprocher au médecin un
Q.I. notoirement inférieur à la normale. Pourquoi pas ?
Pour une fois que les juges demandent au législateur de se prononcer - c'est
du moins ce que l'on peut lire entre les lignes ! - pour éviter d'avoir à créer
une jurisprudence pouvant donner lieu à quelques errements, il ne faut pas les
décevoir, et donc leur envoyer un signal extrêmement fort en légiférant très
vite sur le sujet.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
Mme Odette Terrade.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 9.
Article 10
M. le président.
« Art. 10. - I. - L'article L. 5135-1 du même code est ainsi modifié :
« 1° Les trois premiers alinéas sont supprimés ;
« 2° Au dernier alinéa, les mots : "lesdits appareils" sont remplacés par les
mots : "des dispositifs médicaux utilisables pour une interruption volontaire
de grossesse" et les mots : "comme commerçants patentés" sont supprimés.
« II. - L'article L. 5435-1 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 5435-1
. - La vente, par les fabricants et négociants en
appareils gynécologiques, de dispositifs médicaux utilisables pour une
interruption volontaire de grossesse à des personnes n'appartenant pas au corps
médical ou ne faisant pas elles-mêmes profession de vendre ces dispositifs est
punie de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende.
« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables des
infractions, définies au présent article, dans les conditions prévues à
l'article 121-2 du code pénal. Elles encourent la peine d'amende suivant les
modalités prévues à l'article 131-38 du code pénal.
« Les personnes physiques et les personnes morales encourent également les
peines suivantes :
« 1° La confiscation des dispositifs médicaux saisis ;
« 2° L'interdiction d'exercer la profession ou l'activité à l'occasion de
laquelle le délit a été commis, pour une durée qui ne peut excéder cinq ans.
»
- (Adopté.)
Article 11
M. le président.
« Art. 11. - I. - L'article 223-11 du code pénal est abrogé.
« II. - L'article L. 2222-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2222-2
. - L'interruption de la grossesse d'autrui est punie
de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende lorsqu'elle est
pratiquée, en connaissance de cause, dans l'une des circonstances suivantes
:
« 1° Après l'expiration du délai dans lequel elle est autorisée par la loi,
sauf si elle est pratiquée pour un motif médical ;
« 2° Par une personne n'ayant pas la qualité de médecin ;
« 3° Dans un lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un
établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par
la loi, ou en dehors du cadre d'une convention conclue selon les modalités
prévues à l'article L. 2212-2.
« Cette infraction est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 francs
d'amende si le coupable la pratique habituellement.
« La tentative des délits prévus au présent article est punie des mêmes
peines. »
Par amendement n° 14, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit cet article :
« L'article 223-11 du code pénal est ainsi modifié :
«
a)
Au 1°, les mots : "pour un motif thérapeutique" sont remplacés par
les mots : "pour un motif médical" ;
«
b)
Le 3° est complété par les mots : ", ou en dehors du cadre d'une
convention conclue selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2 du code de
la santé publique". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement transférant dans
le code de la santé publique les dispositions prévues à l'article 223-11 du
code pénal. La commission comprend mal l'intérêt de ce jeu de passe-passe
législatif, qui ne modifie rien sur le fond puisque les peines et amendes
applicables resteront les mêmes, qu'elles figurent dans le code pénal ou dans
le code de la santé publique. Elle constate d'ailleurs que la Gouvernement a
partagé, en séance publique, cette perplexité.
Elle remarque, en outre, que l'Assemblée nationale a choisi de distinguer,
selon des critères qui apparaissent pour le moins aléatoires, l'article qui
devait subsister dans le code pénal et ceux qu'il convenait de transférer dans
le code de la santé publique. Désormais, les peines applicables à
l'interruption illégale de grossesse figureraient, pour certaines, dans le code
pénal et, pour d'autres, dans le code de la santé publique. L'accès de nos
concitoyens au droit, gage de sa bonne compréhension, serait rendu encore plus
malaisé.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission propose d'adopter un amendement
tendant à revenir au texte initial du projet de loi et donc à maintenir dans le
code pénal les dispositions qui y figuraient.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement
qui vise à rétablir le texte initial du Gouvernement
(Sourires)
et à
maintenir dans le code pénal des infractions aux dispositions qui encadrent les
interruptions de grossesse.
Le transfert dans le code de la santé publique des dispositions de l'article
223-11 du code pénal relève d'une initiative de l'Assemblée nationale, et nous
estimons plus cohérent, comme l'Assemblée nationale, que toutes les
dispositions pénales relatives à l'IVG, à l'exception des IVG pratiquées sans
le consentement de la femme, bien entendu, soient regroupées dans le code de la
santé publique.
Cela nous paraît plus cohérent ; cela ne change en rien la nature des
sanctions pénalisant la pratique de l'interruption volontaire de grossesse dans
des conditions illégales et cela offre les mêmes garanties en ce qui concerne
la protection de la santé de la femme.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 11 est ainsi rédigé.
Article 11 bis
M. le président.
« Art. 11
bis.
- I. - L'article 223-12 du code pénal est abrogé.
« II. - Après l'article L. 2222-3 du code de la santé publique, il est inséré
un article L. 2222-4 ainsi rédigé :
«
Art. L. 2222-4
. - Le fait de fournir à la femme les moyens matériels
de pratiquer une interruption de grossesse sur elle-même est puni de trois ans
d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende. Ces peines sont portées à cinq
ans d'emprisonnement et à 500 000 francs d'amende si l'infraction est commise
de manière habituelle. En aucun cas, la femme ne peut être considérée comme
complice de cet acte. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 15, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
Par amendement n° 48, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent, dans la première phrase du texte présenté
par le II de l'article 11
bis
pour l'article L. 2222-4 du code de la
santé publique, après les mots : « les moyens matériels », d'insérer les mots :
« , à l'exception des médicaments prescrits par un médecin dans le cadre d'une
interruption volontaire de grossesse, lui permettant ».
Par amendement n° 66, Mme Terrade, MM Fischer, Muzeau et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans la première phrase du texte
présenté par le II de l'article 11
bis
pour l'article L. 2222-4 du code
de la santé publique, après les mots : « moyens matériels », d'insérer les mots
: « , à l'exception des remèdes et subtances prescrits par un médecin dans le
cadre d'une convention conclue selon les modalités définies à l'article L.
2212-2 du code de la santé publique en vue d'une interruption volontaire de
grossesse médicamenteuse, »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 15.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'article 11
bis
, adopté par l'Assemblée nationale en
première lecture, transfère dans le code de la santé publique les dispositions
de l'article 223-12 du code pénal relatives au fait de fournir à une femme les
moyens matériels de pratiquer une interruption de grossesse sur elle-même.
Pour les raisons que j'ai évoquées à l'article précédent, la commission
s'oppose au transfert de ces dispositions du code pénal vers le code de la
santé publique.
D'où cet amendement, qui tend à réintroduire les dispositions de l'article
223-12 dans le code pénal.
M. le président.
La parole est à Mme Campion, pour présenter l'amendement n° 48.
Mme Claire-Lise Campion.
Notre amendement visait à apporter une précision, à notre sens, plus que
nécessaire - je dis « visait », car, la commission proposant de supprimer
l'article, il n'aura bientôt plus d'objet.
Je veux tout de même l'exposer, car l'intention du législateur s'agissant d'un
article qui prévoit des sanctions au fait de fournir aux femmes les moyens
matériels de s'auto-avorter doit clairement apparaître dans les débats, faute
de pouvoir, dans cette assemblée, traduire par une inscription dans la loi.
Nous voulions éviter qu'une rédaction insuffisamment précise ne puisse
susciter des difficultés dans la délivrance de la méthode médicamenteuse en
médecine ambulatoire.
En complétant l'article, nous entendions prémunir le personnel amené à
distribuer le RU 486 d'actions en justice que certaines associations
bien-pensantes se feraient un honneur d'engager.
En rétablissant dans le code pénal toutes les sanctions relatives à
l'interruption de grossesse illégale que l'Assemblée nationale avait
introduites dans le code de la santé publique, vous nous empêchez, chers
collègues de la majorité sénatoriale, de concrétiser notre objectif, qui
devrait pourtant être aussi le vôtre.
Mais vous ne vous arrêtez pas là puisque vous supprimez également une
disposition importante pour les femmes, qui consistait à spécifier qu'en aucun
cas elles ne sauraient être considérées comme complices de l'acte, le seul
coupable ne pouvant être que celui qui leur fournit les moyens de pratiquer une
IVG sur elles-mêmes.
En conclusion, j'exprime le regret que cet amendement ne soit, sans doute,
même pas mis aux voix.
M. le président.
La parole est à Mme Bidard-Reydet, pour défendre l'amendement n° 66.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Notre amendement a pour objet de lever une ambiguïté de la rédaction du texte
qui risque d'entraîner des poursuites contre des médecins pratiquant une IVG
dans le cadre d'une méthode médicamenteuse.
En effet, le texte condamne « le fait de fournir à la femme les moyens
matériels de pratiquer une interruption volontaire de grossesse sur elle-même
». Or, dans le cas de l'IVG médicamenteuse réalisée en médecine ambulatoire, le
médecin fournit un produit abortif à la femme concernée.
A notre avis, le praticien est donc susceptible d'être attaqué par des
associations anti-IVG, qui pourraient utiliser cette ambiguïté du texte, alors
que le médecin exerce dans le cadre d'une convention conclue selon les
modalités définies par l'article L. 2212-2 du code de la santé publique.
C'est pour empêcher cette éventualité que nous proposons de préciser la
rédaction du texte.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 48 et 66 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Ces amendements deviendront sans objet si celui de la
commission est adopté.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 15, 48 et 66 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n°
15 puisque, sensible aux arguments avancés par l'Assemblée nationale, il a
accepté ses propositions pour les raisons qui l'ont conduit à rejeter
l'amendement n° 14.
En revanche, il est favorable à l'amendement n° 48, qui vise à éviter que la
rédaction actuelle ne puisse engendrer des difficultés dans la délivrance du RU
486, un amendement qu'il préfère à l'amendement n° 66.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 11
bis
est supprimé et les amendements n°s 48
et 66 n'ont plus d'objet.
Article 12
M. le président.
« Art. 12. - Sont abrogés :
« - le chapitre Ier du titre II du livre II de la deuxième partie du code de
la santé publique ;
« - les articles 84 à 86 et l'article 89 du décret du 29 juillet 1939 relatif
à la famille et à la natalité françaises. »
Par amendement n° 16, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit cet article :
« I. - Le chapitre Ier du titre II du livre II de la deuxième partie du code
de la santé publique est ainsi rédigé :
« Chapitre Ier
« Protection de la femme enceinte
«
Art. L. 2221-1
. - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 200 000
francs d'amende le fait de contraindre ou de tenter de contraindre une femme à
une interruption de grossesse en exerçant sur elle des pressions morales et
psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation. »
« II. - Les articles 84 à 86 et l'article 89 du décret-loi du 29 juillet 1939
relatif à la famille et à la natalité française sont abrogés. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 40 rectifié, présenté par
M. Chérioux, et tendant à compléter le I du texte proposé par l'amendement n°
16 par un alinéa ainsi rédigé
«
Art. L. 2221-2
. - La propagande, directe ou indirecte, par un moyen
quelconque, concernant soit les établissements dans lesquels sont pratiquées
les interruptions de grossesse, soit les médicaments, produits et objets ou
méthodes destinés à procurer ou présentés comme de nature à procurer une
interruption de grossesse, sauf dans les publications réservées aux médecins et
aux pharmaciens, est punie de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs
d'amende. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 16.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Votre commission accepte l'abrogation de l'article L. 2221-1
du code de la santé publique dans sa rédaction actuelle. Elle considère en
effet que le maintien de ces dispositions, qui n'ont d'ailleurs jamais été
appliquées, ne se justifie plus. Cet article était en outre susceptible de
constituer un obstacle juridique aux actions d'information en direction des
femmes souhaitant accéder à l'IVG.
Pour autant, la suppression des sanctions pour l'incitation à l'IVG ne doit
pas avoir pour effet de priver la femme enceinte de toute protection contre les
personnes qui souhaiteraient la contraindre à l'IVG.
Votre commission vous propose donc d'adopter un amendement comportant une
nouvelle rédaction de l'article L. 2221-1 du code de la santé publique afin de
protéger la femme enceinte contre toute forme de pression destinée à la
contraindre à une interruption de grossesse.
L'amendement prévoit que serait puni de deux ans d'emprisonnement et de 200
000 francs d'amende le fait de contraindre ou de tenter de contraindre une
femme à une interruption de grossesse en exerçant sur elle des pressions
morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation.
La rédaction est directement inspirée de celle qui est prévue par l'article 12
bis
ci-après pour le délit d'entrave à la pratique légale des
interruptions de grossesse.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux, pour défendre le sous-amendement n° 40
rectifié.
M. Jean Chérioux.
Je comprends le point de vue de M. le rapporteur, c'est la raison pour
laquelle je me contente de présenter un sous-amendement visant à compléter
l'amendement de la commission. Ce complément tend à reprendre une partie des
dispositions supprimées.
Il est vrai que cet article institué par la loi Veil n'a pas été appliqué. On
n'a pas eu beaucoup l'occasion de l'appliquer, mais il avait un caractère
dissuasif.
Je crains que la suppression ne produise un appel d'air. Je crains que ne
fleurisse, notamment dans les médias, qui sont toujours friands de ces
questions, la propagande en faveur de certains produits et de certaines
méthodes.
J'ai restreint l'objet de mon sous-amendement initial à la demande de la
commission. Il porte désormais sur la propagande seulement et non plus sur la
propagande et la publicité.
Ce sous-amendement répond à un souci de précaution. Si les dispositions
actuelles sont purement et simplement supprimées, il y aura des problèmes. Vous
connaissez le goût du sensationnel des médias ! Je suis persuadé que si, par
malheur, ce texte n'était pas voté, nous connaîtrions des difficultés. Je
prends rendez-vous, monsieur le Ministre.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission est favorable au sous-amendement n° 40
rectifié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué à la santé.
Le Gouvernement partage bien sûr la
préoccupation de M. Giraud et de la commission des affaires sociales de
protéger la femme enceinte d'une interruption de grossesse pratiquée sous la
contrainte. L'amendement n° 16 n'est cependant pas nécessaire, puisque cette
protection est déjà prévue dans le code pénal à l'article 223-10 qui réprime
l'IVG réalisée sans le consentement de la femme.
J'ajoute, monsieur le rapporteur, que les mesures que vous proposez sont
largement en deçà de celles qui sont prévues dans le code pénal. L'article
223-10 du code pénal prévoit en effet cinq ans d'emprisonnement et 500 000
francs d'amendes contre deux ans d'emprisonnement et 200 000 francs d'amendes
dans l'amendement.
Par ailleurs, malgré la précision qu'il apporte, le Gouvernement s'oppose
également au sous-amendement n° 40 rectifié de M. Chérioux.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Monsieur le ministre, vous avez évoqué le problème de
l'interruption qui serait faite sous la contrainte. Or, dans l'amendement dont
nous discutons, il ne s'agit pas exactement de cela : notre texte vise en effet
les pressions psychologiques sans qu'elles aillent jusqu'à l'acte. En d'autres
termes, vous dites que l'acte qui serait réalisé illégalement est condamnable -
ce qui est évident - alors que nous, nous disons que ce sont les pressions
exercées avant ou en dehors de l'acte et même si la personne ne subit
finalement pas l'IVG qui sont répréhensibles.
En clair, ce dont nous voulons parler, c'est non pas de l'acte réalisé, mais,
par exemple, de l'employeur qui fait pression sur une employée en lui disant
d'avorter.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 40 rectifié, accepté par la commission
et repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 16, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 12 est ainsi rédigé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et
une heures quarante-cinq.)
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée
nationale, après déclaration d'urgence, relatif à l'interruption volontaire de
grossesse et à la contraception.
J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales m'a fait connaître
qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle
présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte
paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en
discussion sur le projet de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai
réglementaire.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 12
bis.
Article 12 bis
M. le président.
« Art. 12
bis
. - L'article L. 2223-2 du code de la santé publique est
ainsi rédigé :
«
Art. L. 2223-2
. - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 200
000 francs d'amende le fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher une interruption
de grossesse ou les actes préalables prévus par les articles L. 2212-3 à L.
2212-8 :
« - soit en perturbant de quelque manière que ce soit l'accès aux
établissements mentionnés à l'article L. 2212-2, la libre circulation des
personnes à l'intérieur de ces établissements ou les conditions de travail des
personnels médicaux et non médicaux ;
« - soit en exerçant des pressions morales et psychologiques, des menaces ou
tout acte d'intimidation à l'encontre des personnels médicaux et non médicaux
travaillant dans ces établissements, des femmes venues y subir une interruption
volontaire de grossesse ou de l'entourage de ces dernières. » -
(Adopté.)
Article additionnel après l'article 12 bis
M. le président.
Par amendement n° 49, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 12
bis,
un
article additionnel.
« Après l'article L. 2223-2 du code de la santé publique, il est inséré un
article ainsi rédigé :
«
Art. L. ... -
Les responsables d'établissements de santé sont tenus
de signaler au procureur de la République les actions ou démonstrations
anti-avortement commises aux abords ou à l'intérieur de leur établissement.
»
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion.
Malgré la loi Neiertz sur le délit d'entrave, la majorité des actions menées
par les commandos anti-IVG ne sont pas sanctionnées faute de plaintes.
Devant ce constat, il nous semble indispensable que la loi soit respectée et
donc de permettre les poursuites, car il est inadmissible de laisser impunies
des agressions physiques ou morales sur des femmes se rendant dans un
établissement pour une interruption volontaire de grossesse.
Nous considérons par conséquent que les responsables d'établissement doivent
être tenus de signaler au procureur de la République les entraves à l'IVG, de
la même manière qu'ils sont tenus de signaler tout risque au sein de leur
hôpital, que ce soit un risque d'infection ou un danger pour la santé
publique.
Pour ces raisons, je vous demande, mes chers collègues, d'adopter cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Nous ne sommes pas favorables à cet amendement.
Je rappelle que la commission a accepté le durcissement des sanctions du délit
d'entrave à l'IVG.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Laissez-moi d'abord saluer une dame qui a pris place à
droite au milieu des hommes qui, jusqu'alors, étaient, plus que majoritaires,
unanimes d'une certaine façon !
(Sourires.)
Merci, madame, d'être là.
M. Jean Chérioux.
Quel favoritisme !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Pas mal, mon coup !
(Rires.)
M. le président.
Il s'agit, monsieur le ministre, de Mme Olin, pour laquelle nous avons la plus
grande considération.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
M. le président s'associe à moi. Merci, monsieur le
président.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Nous aurions, nous aussi, aimé être félicitées.
(Sourires).
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Oui, mais vous, vous étiez déjà là tout à l'heure. Je
vous félicite en permanence !
(Nouveaux sourires.)
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Ah bon !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Il y avait absence de dames à ma droite.
S'agissant de l'amendement n° 49, j'en comprends tout à fait l'esprit, et je
comprends aussi que l'on stigmatise de façon précise les contrevenants,
d'autant que le code de procédure pénale prévoit déjà ce type de
signalement.
Je comprends donc très bien l'intention. Mais je crois que cette disposition
est quelque peu redondante.
Permettez-moi, pour vous convaincre, de relire le second alinéa de l'article
40 du code de procédure pénale : « Toute autorité constituée, tout officier
public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la
connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au
procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les
renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Très bien !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 49.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
En théorie, effectivement, les directeurs et les responsables de centres
hospitaliers sont tenus de signaler, quand il s'en produit, tout délit
d'entrave, mais, en pratique, on sait bien que cela ne se fait pas et que, de
ce fait, les procureurs de la République sont bien embarrassés pour déclencher
des procédures.
Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous peut-être, quand nous aurons retiré
cet amendement, ce que nous ferons volontiers, vous engager, par exemple, à
adresser une circulaire à l'ensemble des directeurs d'établissement pour leur
rappeler qu'ils sont tenus de signaler tout délit d'entrave au procureur de la
République ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Aux abords des établissements, dans la rue, il me
semble difficile que le directeur de l'hôpital agisse. Je pense que c'est à
l'intérieur des établissements que la procédure doit être immédiatement
déclenchée, comme je viens de le rappeler.
Cela dit, je suis tout à fait d'accord, et je m'y engage si vous le souhaitez,
pour envoyer une circulaire aux directeurs d'établissement afin de leur
demander qu'ils se prémunissent, qu'ils préviennent et qu'ils emploient la
force publique en cas de manifestations, en particulier dans les endroits où
les femmes se rendent pour faire pratiquer une IVG. Mais je crois vraiment qu'à
l'extérieur c'est difficile et que cela relève de la force publique en
général.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Nous retirons l'amendement.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je vous en remercie.
M. le président.
L'amendement n° 49 est retiré.
Article 13
M. le président.
« Art. 13. - I. - Le premier alinéa de l'article L. 2412-1 du même code est
ainsi rédigé :
« Le titre Ier du livre II de la présente partie, à l'exception du quatrième
alinéa de l'article L. 2212-8, est applicable dans la collectivité territoriale
de Mayotte, sous réserve des adaptations prévues à l'article L. 2412-2.
L'article L. 2222-2 est également applicable. »
« II. - L'article L. 2412-2 du même code est abrogé.
« III. - L'article L. 2412-3 du même code devient l'article L. 2412-2.
« IV. - L'article 723-2 du code pénal est abrogé.
« V. - Les articles 10 et 12 de la présente loi sont applicables à la
collectivité territoriale de Mayotte. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 31, le Gouvernement propose, à la fin du texte présenté par
le I de cet article pour le premier alinéa de l'article L. 2412-1 du code de la
santé publique, de supprimer les dispositions : « , sous réserve des
adaptations prévues à l'article L. 2412-2. L'article L. 2222-2 est également
applicable ».
Par amendement n° 84, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
supprimer la dernière phrase du texte présenté par le I de l'article 13 pour le
premier alinéa de l'article L. 2412-1 du code de la santé publique.
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 31.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le présent amendement a pour objet de réaliser
complètement l'extension à la collectivité territoriale de Mayotte des
dispositions du présent projet de loi relatives à l'interruption volontaire de
grossesse. Ainsi, l'ensemble des dispositions des articles 1er à 12
bis
du projet de loi trouvera effet à Mayotte dans une rédaction identique à
celle qui est prévue pour la métropole.
Le I de l'article modifié par le présent amendement rend applicable à Mayotte
l'ensemble des modifications introduites par le présent projet de loi dans le
titre Ier du livre II de la partie II du code de la santé publique.
En conséquence, les II, III et IV de l'article modifié par le présent
amendement abrogent les articles d'adaptation devenus inutiles et réorganisent
la codification des dispositions intéressant les sanctions pénales de la partie
II du code de la santé publique applicables à Mayotte.
Le V de l'article modifié par le présent amendement étend à Mayotte les
modifications opérées par le projet de loi sur les articles du code pénal ou
sur d'autres articles du code de la santé publique non visés au I du présent
article.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 84 et pour
donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 31.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Faute de mesurer les conséquences de l'amendement n° 31 du
Gouvernement, déposé tardivement, et d'avoir pu recueillir l'avis du sénateur
de Mayotte sur ces dispositions, la commission a émis un avis défavorable.
Son amendement n° 84 est un amendement de coordiation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 84 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, repoussé par la commission.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Le groupe socialiste s'abstient.
Mme Odette Terrade.
Le groupe communiste républicain et citoyen également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements présentés par le Gouvernement.
L'amendement n° 32 vise à rédiger comme suit le II de l'article 13 :
« II. - Les articles L. 2412-2, L. 2412-3 et L. 2414-2 du même code sont
abrogés. »
L'amendement n° 33 tend à rédiger ainsi le III de l'article 13 :
« III. - A l'article L. 2414-1, les mots : "aux articles L. 2414-2 à L.
2414-9" sont remplacés par les mots : "aux articles L. 2414-2 à L. 2414-8".
« Les articles L. 2414-3 à L.2414-9 deviennent respectivement les articles L.
2414-2 à L. 2414-8. »
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Ces amendements tombent, par suite du rejet de
l'amendement n° 31.
M. le président.
Les amendements n°s 32 et 33 n'ont plus d'objet.
Par amendement n° 85, M. F. Giraud, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit le IV de l'article 13 :
« IV. - L'article 723-2 du code pénal est ainsi rédigé :
«
Art. 723-2. -
Le 3° de l'article 223-11 est rédigé comme suit :
« 3° Dans un lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un
établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par
la réglementation applicable localement, ou en dehors du cadre d'une convention
conclue en application de l'article L. 2212-2 du code de la santé publique.
»
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Rejet.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 85, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 34, le Gouvernement propose, dans le V de l'article 13, de
remplacer les mots : « 10 et 12 » par les mots : « 1er à 12
bis
».
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Cet amendement tombe également, par suite du rejet de
l'amendement n° 31.
M. le président.
L'amendement n° 34 n'a plus d'objet.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
Article 14
M. le président.
« Art. 14. - I. - Les dispositions des articles L. 2212-1, L. 2212-7 et L.
2222-2 du code de la santé publique sont applicables dans les territoires
d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
« II. - L'article 713-2 du code pénal est abrogé. »
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 35, le Gouvernement propose de rédiger comme suit cet
article :
« I. - Les articles 223-11, 223-12 et 713-2 du code pénal sont abrogés dans
les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
« II. - Les articles L. 2222-2, L. 2222-4 et L. 2223-2 du code de la santé
publique sont applicables dans le territoire des îles Wallis et Futuna, en
Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
« III. - A. - Le chapitre II du titre II du livre IV de la partie II du code
de la santé publique devient chapitre III. Les articles L. 2422-1 à L. 2422-9
deviennent les articles L. 2423-1 à L. 2423-9.
« B. - Le chapitre II du titre II du livre IV de la partie II du même code est
ainsi rédigé :
« Chapitre II - Interruption volontaire de grossesse.
«
Art. L. 2422-1. -
Les dispositions des articles L. 2212-1, L. 2212-7
et L. 2212-8 alinéa premier sont applicables dans le territoire des îles Wallis
et Futuna. Pour l'application du premier alinéa de l'article L. 2212-8, les
mots : "selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2" ne s'appliquent
pas.
« C. - L'article L. 2423-2 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2423-2. -
Pour leur application dans le territoire des îles
Wallis et Futuna.
« I. - Le 3° de l'article L. 2222-2 est ainsi rédigé :
« 3° Dans un lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un
établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par
la réglementation applicable localement. »
« II. - Aux articles L. 2223-1 et L. 2223-2, les mots : "par les articles L.
2212-3 à L. 2212-8" sont remplacés par les mots : "par les dispositions
législatives ou réglementaires applicables localement".
« III. - A l'article L. 2223-2, les mots : "mentionnés à l'article L. 2212-2"
sont remplacés par les mots : "de santé, publics ou privés, autorisés à
pratiquer des interruptions volontaires de grossesse par la réglementation
applicable localement".
« IV. - A. - Le chapitre 1er du titre III du livre IV de la partie II du code
de la santé publique devient chapitre II. Les articles L. 2431-1 à L. 2431-8
deviennent les articles L. 2432-1 à L. 2432-8.
« B. - Le chapitre 1er du titre III du livre IV de la partie II du code de la
santé publique est ainsi rédigé :
« Chapitre 1er - Interruption volontaire de grossesse.
«
Art. L. 2431-1. -
Les dispositions des articles L. 2212-1, L. 2212-7
et L. 2212-8 alinéa premier sont applicables dans le territoire des terres
Australes et Antarctiques françaises. Pour l'application du premier alinéa de
l'article L. 2212-8, les mots : "selon les modalités prévues à l'article L.
2212-2" ne s'appliquent pas.
« C. - L'article L. 2432-1 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2432-1. -
Les articles L. 2222-2, L. 2222-4, L. 2223-1 et L.
2223-2 sont applicables dans le territoire des terres Australes et Antarctiques
françaises. Pour leur application dans le territoire des terres Australes et
Antarctiques françaises : »
« I. - Le 3° de l'article L. 2222-2 est rédigé »
« 3° Dans les lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un
établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par
la réglementation applicable localement. »
« II. - Aux articles L. 2223-1 et L. 2223-2, les mots : "par les articles
L.2212-3 à L. 2212-8" sont remplacés par les mots : "par les dispositions
législatives ou réglementaires applicables localement". »
« III. - A l'article L. 2223-2, les mots : "mentionnés à l'article L. 2212-2"
sont remplacés par les mots : "de santé, publics ou privés, autorisés à
pratiquer des interruptions volontaires de grossesse par la réglementation
applicable localement". »
« V. - A. - Le chapitre 1er du titre IV du livre IV de la partie II du code de
la santé publique devient chapitre II. Les articles L. 2441-1 à L. 2441-9
deviennent les articles L. 2442-1 à L. 2442-9.
« B. - Le chapitre 1er du titre IV du livre IV de la partie II du code de la
santé publique est ainsi rédigé :
« Chapitre 1er - Interruption volontaire de grossesse.
«
Art. L. 2441-1. -
Les dispositions des articles L. 2212-1, L. 2212-7
et L. 2212-8 alinéa premier sont applicables en Nouvelle-Calédonie et en
Polynésie française. Pour l'application du premier alinéa de l'article L.
2212-8, les mots : "selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2" ne
s'appliquent pas.
« C. - L'article L. 2442-2 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2442-2. -
Pour leur application en Nouvelle-Calédonie et en
Polynésie française :
« I. - Le 3° de l'article L. 2222-2 est ainsi rédigé :
« 3° Dans un lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un
établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par
la réglementation applicable localement. »
« II. - Aux articles L. 2223-1 et L. 2223-2, les mots : "par les articles L.
2212-3 à L. 2212-8" sont remplacés par les mots : "par les dispositions
législatives ou réglementaires applicables localement". »
« III. - A l'article L. 2223-2, les mots : "mentionnés à l'article L. 2212-2"
sont remplacés par les mots : "de santé, publics ou privés, autorisés à
pratiquer des interruptions volontaires de grossesse par la réglementation
applicable localement". »
Par amendement n° 86 M. F. Giraud, au nom de la commission, propose, dans le I
de l'article 14, de remplacer les références : « , L. 2212-7 et L. 2222-2 » par
la référence : « et L. 2212-7 ».
Les deux amendements suivants sont présentés par MM. Flosse, Laufoaulu et
Lanier.
L'amendement n° 72 tend, dans le I de l'article 14, à supprimer les mots : «
dans les territoires d'outre-mer et ».
L'amendement n° 73 vise à supprimer le II de l'article 14.
Par amendement n° 87, présenté par M. F. Giraud, au nom de la commission,
propose de rédiger comme suit le II de l'article 14.
« II. - A la fin du I de l'article 713-2 du code pénal, le mot :
"thérapeutique" est remplacé par le mot : "médical". »
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 85.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Il s'agit ici non plus de Mayotte, mais de la
Nouvelle-Calédonie, de Wallis-et-Futuna et de la Polynésie française.
Le présent amendement a pour objet de réaliser l'extension aux territoires
d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie des articles du présent projet de loi
relatifs à l'interruption volontaire de grossesse relevant de la compétence de
l'Etat, dans le respect des dispositions des lois statutaires régissant la
Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française.
Cette nouvelle rédaction a pour effet de rendre applicables aux territoires
d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie les dispositions des articles L. 2212-1,
L. 2212-7, L. 2212-8, alinéa premier, L. 2222-2, L. 2222-4 et L. 2223-2 du code
de la santé publique. Les articles L. 2222-2, L. 2223-1 et L. 2223-2 sont
adaptés pour tenir compte de l'organisation particulière des territoires
d'outre-mer et de la Nouvelle-Calédonie.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 86.
M. Francis Giraud.
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
La parole est à M. Lanier, pour présenter les amendements n° 72 et 73.
M. Lucien Lanier.
L'amendement n° 72 a pour objet d'écarter les territoires d'outre-mer,
c'est-à-dire Wallis-et-Futuna et la Polynésie française, de l'application de
certaines dispositions de l'article 14. En effet, la loi Veil dans son ensemble
n'est pas applicable aux territoires d'outre-mer.
Sont cependant applicables, sous réserve de quelques adaptations, les
dispositions du code pénal réprimant l'IVG pratiqué illégalement, c'est-à-dire
: l'article 223-10, qui sanctionne l'avortement pratiqué sans le consentement
de l'intéressée ; l'article 223-11, qui sanctionne l'IVG pratiquée après
l'expiration du délai prévu par la loi, par une personne n'ayant pas la qualité
de médecin ou dans des établissements ne satisfaisant pas aux conditions
prévues par la loi.
En conséquence, l'IVG n'est pas illégale en Polynésie française, non plus qu'à
Wallis-et-Futuna, sous réserve d'être pratiquée par un médecin, dans la limite
de dix semaines, avec le consentement de l'intéressée.
L'extension de l'article 14 à l'outre-mer, telle que prévue par le projet de
loi, soulève de réelles difficultés juridiques.
En effet, si l'on considère que l'IVG est une question de santé publique et
que l'organisation médicale de l'accès à l'avortement relève du domaine de la
santé publique, la loi organique du 12 avril 1996 portant statut de la
Polynésie française, dont nous avons largement débattu dans cette enceinte,
exclut la compétence de l'Etat en matière de santé publique, matière qui relève
a contrario
de la compétence de l'Assemblée de la Polynésie française et
des autorités polynésiennes.
Or, le projet de loi énonce dans son exposé des motifs que le principe de
l'IVG relève esentiellement du droit des personnes, donc de la compétence de
l'Etat.
Le Conseil constitutionnel devra sans aucun doute trancher s'il est saisi d'un
recours, et ce d'autant que la validité juridique de la procédure peut être
mise en cause. En effet, l'Assemblée territoriale de la Polynésie française a
été saisie de textes différents du projet dont nous discutons, qui lui-même a
été déposé avant la fin du délai imparti à l'Assemblée de la Polynésie
française pour sa réponse.
Nous ne pouvons pas à la fois donner d'une main et retirer de l'autre. A
partir du moment où nous avons donné un nouveau statut à la Polynésie
française, il faut le respecter et respecter les pouvoirs de l'Assemblée
territoriale comme les pouvoirs des autorités polynésiennes.
Il convient de considérer en outre que la situation de la famille en
Polynésie, cellule initiale et fondement de la société locale, n'est pas la
même qu'en métropole. On ne peut pas parler de la famille dans les Marquises
comme on en parle dans le Loiret ! Il s'agit d'un fait psychologique majeur,
dont il faut absolument tenir compte.
Pour l'ensemble de ces raisons, l'application sans nuance de l'article 14 à
l'outre-mer paraît pour le moins prématurée.
J'en viens à l'amendement n° 73.
Il convient de maintenir l'article L. 713-2 du code pénal, qui adapte aux
territoires d'outre-mer les dispositions de l'article L. 223-11 du code pénal,
en prévoyant, notamment, la référence aux réglementations locales pour
l'agrément des établissements d'hospitalisation publics ou privés.
En effet, en abrogeant les dispositions figurant dans le code pénal,
l'Assemblée nationale n'a pas procédé aux extensions et aux coordinations en
découlant.
Il en résulte certaines incohérences juridiques auxquelles il convient de
remédier.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 87 et pour
donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 35, 72 et 73.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'amendement n° 87 est un amendement de coordination.
La commission est défavorable à l'amendement n° 35. Elle s'en remet à la
sagesse du Sénat sur l'amendement n° 72. Elle demande le retrait de
l'amendement n° 73, qui est satisfait par l'amendement n° 86.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 86, 72, 73 et 87 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur
l'amendement n° 86.
Il est défavorable aux amendements n°s 72 et 73 car il lui semble préférable
de conserver la compétence de l'Etat en matière de santé dans les territoires
d'outre-mer.
Il s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 87.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par la commission.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 86, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 72.
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Je ne suis pas certain d'avoir compris les explications données à l'instant
par notre collègue. Il s'agit, apparemment, de considérations de nature
juridique et non de considérations portant sur le fond. Si tel est bien le cas,
je voterai contre l'amendement.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Très bien !
M. Lucien Lanier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lanier.
M. Lucien Lanier.
Je ne me suis certainement pas bien exprimé car je n'ai pas été tout à fait
compris.
Il existe un problème juridique grave. En effet, nous ne pouvons pas à la fois
prétendre donner aux territoires d'outre-mer la liberté à laquelle ils ont
droit, vers laquelle ils s'acheminent lentement, et, en même temps, la leur
refuser lors du vote d'une loi spécifique.
Le présent refus est grave car la conception de la famille en Polynésie
française n'est pas du tout identique à celle que nous avons en métropole.
Je ne suis pas hostile à ce que nous nous acheminions vers une application
ultérieure de ce dispositif. Mais la précipitation dont vous faites preuve,
monsieur le ministre, risque de vous faire commettre une erreur fondamentale.
Vous allez appliquer un système qui risque de désorganiser la famille
polynésienne. Vous savez très bien comment elle se comporte. Vous connaissez
vous-même la Polynésie française.
Mon cher collègue Huriet, cet amendement ne présente pas le moindre caractère
politique ; il est exempt de toute arrière-pensée politique. Il vise simplement
à ménager du temps au temps pour l'application de dispositions nouvelles dans
les territoires d'outre-mer.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je suis très étonné de la réaction du Gouvernement à l'égard de ces
amendements.
Monsieur le ministre, nous avons donné un statut évolutif à la Polynésie
française et à la Nouvelle-Calédonie. Et nous reviendrions sur ce que nous
avons fait ! Ce n'est pas admissible juridiquement.
Il y a, dans ces territoires d'outre-mer, une forme de vie sociale, de vie
familiale, différente de la nôtre. En votant ce texte, nous leur imposerions
notre mode de vie et nos coutumes. Ce serait - je le dis comme je le pense -
une forme de colonialisme totalement inadmissible !
M. Lucien Neuwirth.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth.
Monsieur le ministre, je resterai sur le plan strictement juridique.
Il ne me semble pas souhaitable que nous votions une loi qui, par la suite,
risque d'être remise en question devant les juridictions internationales.
La loi organique portant statut de la Polynésie française que nous avons votée
en 1996 a ôté de la compétence de l'Etat un certain nombre de domaines, dont
celui de la santé publique. A partir de là, je ne vois pas comment on pourrait
les rendre à sa compétence sans accord de la Polynésie elle-même.
Nous avons longuement discuté de la loi du 12 avril 1996. Certains de nos
collègues, qui siégeaient d'ailleurs non loin de moi, n'étaient pas du tout
d'accord pour exclure dans certains domaines la compétence de l'Etat. Mais, à
partir du moment où l'on a franchi le pas, où, dans un mouvement généreux, ou a
engagé l'évolution d'un territoire, il me semble difficile de revenir en
arrière.
M. Jean Chérioux.
Donner et retenir ne vaut !
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Je suis un peu étonnée de la tournure que prend le débat sur cet
amendement.
En effet, d'une part, on nous dit que l'IVG relève du droit des personnes, ce
qui me paraît juste, et que l'évolution de la Polynésie appartient aux
Polynésiens, ce qui me paraît tout aussi juste. Mais, d'autre part, on nous
donne à penser que la femme polynésienne n'aurait pas les mêmes problèmes que
la femme française. Je crois malheureusement qu'il y a une stricte égalité
entre l'une et l'autre devant un certain nombre de difficultés.
Je suis opposée à l'amendement n° 72 parce que nous souhaitons une égalité de
traitement des femmes polynésiennes et des femmes françaises. Que la Polynésie
prenne ensuite, quand elle aura cheminé vers un statut plus élaboré, ses
propres dispositions, c'est son problème ! Mais, aujourd'hui, ne faisons pas de
distinction entre les femmes françaises et les femmes polynésiennes !
M. Lucien Neuwirth.
De toute façon, nous n'en avons pas le droit !
M. Jean Chérioux.
C'est du néocolonialisme !
M. Claude Huriet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
C'est la référence au néocolonialisme que nous venons d'entendre qui me
conduit à intervenir de nouveau, et je vous remercie, monsieur le président, de
m'autoriser à le faire.
La notion de néocolonialisme, mes chers collègues, aurait dû inciter les
auteurs de l'amendement à traiter de la même façon la Polynésie et la
Nouvelle-Calédonie, dans la mesure où leurs considérants sont susceptibles de
s'appliquer de la même manière à la Nouvelle-Calédonie. Or l'amendement n° 72
n'inclut pas la Nouvelle-Calédonie dans le champ de la suppression proposée.
Cela m'amène à m'interroger sur la validité des motifs juridiques qui ont été
mis en avant par les auteurs de l'amendement et me conforte dans ma décision de
voter contre l'amendement.
M. Lucien Lanier.
Les deux assemblées territoriales polynésiennes ont donné un avis
défavorable.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Exactement ! Et la Nouvelle-Calédonie a émis un avis
favorable.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 72, repoussé par le Gouvernement et pour
lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 73 est-il maintenu ?
M. Lucien Lanier.
Il est retiré, monsieur le président, car il est satisfait.
M. le président.
L'amendement n° 73 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 87, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14, modifié.
(L'article 14 est adopté.)
Article additionnel après l'article 14
M. le président.
Par amendement n° 63, M. Carle propose d'insérer, après l'article 14, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Dans un délai d'un an à compter de la publication de la présente loi, le
Gouvernement dépose, sur le bureau des assemblées, un rapport présentant les
actions conduites par l'Etat, les départements et les organismes de sécurité
sociale en matière d'information et de prévention relatives à la sexualité et à
la contraception.
« Il étudie les possibilités juridiques et financières d'harmoniser les
compétences de l'Etat, des départements et des organismes précités, notamment
en matière de protection maternelle et infantile, de santé scolaire et
d'éducation sexuelle afin de proposer aux jeunes une information permanente.
»
Cet amendement est-il soutenu ? ...
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Je le reprends, monsieur le président !
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° 63 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur, pour le présenter.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement,
et cela pour deux raisons.
Tout d'abord, le code de la santé publique contient déjà, depuis 1975 et 1979,
toutes les dispositions nécessaires à un suivi par le Parlement des questions
liées à l'avortement et à la contraception.
Ainsi est prévue la publication annuelle d'un rapport présentant la manière
dont sont mises en oeuvre les dispositions relatives à l'interruption
volontaire de grossesse.
Par ailleurs, une délégation parlementaire, composée de quinze députés et de
dix sénateurs, est chargée d'informer les assemblées de l'application des
dispositions législatives relatives à l'interruption volontaire de grossesse
ainsi qu'à la contraception. Bien entendu, le Gouvernement est prêt à
travailler avec cette délégation.
S'agissant du deuxième alinéa, je précise que l'Etat a récemment fait établir
par l'inspection générale des affaires sociales un rapport sur la répartition
des compétences entre les départements et l'Etat, ainsi qu'un rapport sur le
service de santé scolaire, rédigé conjointement par l'IGAS et par l'inspection
générale de l'administration de l'éducation nationale.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Monsieur le ministre, vous venez de faire état d'un rapport
annuel ; or il semble que ce rapport n'ait pas été publié depuis 1992...
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
C'est peut-être vrai, monsieur le rapporteur, mais où
sont les dix sénateurs ?
(Sourires.)
M. Jean Chérioux.
Egalité !
(Nouveaux sourires.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 63 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 14.
Article 15
M. le président.
« Art. 15. - Le chapitre II du titre III du livre Ier du code de la sécurité
sociale est ainsi modifié :
« 1° L'intitulé du chapitre est ainsi rédigé : "Prise en charge par l'Etat des
dépenses exposées au titre de l'interruption volontaire de grossesse" ;
« 2° L'article L. 132-1 est ainsi modifié :
«
a)
Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'intégralité des dépenses exposées à l'occasion des interruptions
volontaires de grossesse pratiquées dans les conditions prévues au troisième
alinéa de l'article L. 2212-7 du code de la santé publique est prise en charge
par l'Etat. » ;
«
b)
Le dernier alinéa est complété par les mots : ", et notamment les
conditions permettant, pour les personnes visées à l'alinéa précédent, de
respecter l'anonymat dans les procédures de prise en charge". » -
(Adopté.)
TITRE II
CONTRACEPTION
Article 16
M. le président.
« Art. 16. - A la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2311-4 du
code de la santé publique, les mots : "sur prescription médicale" sont
supprimés. »
Sur l'article, la parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Nous sommes convaincus que l'amélioration des résultats en matière de
contraception et d'IVG passe nécessairement par la mise en place d'une
éducation à la sexualité plus ample et plus pertinente qu'elle ne l'a été
jusqu'à maintenant.
Vous le savez tous, ces dernières années, alors que la priorité était donnée à
la lutte contre le sida, les campagnes d'information ont surtout porté sur la
prévention de cette maladie - et c'était absolument nécessaire - mais elles
ont, de ce fait, quelque peu éclipsé les campagnes sur la contraception. Cela
contribue sans doute à expliquer qu'on assiste aujourd'hui à une augmentation
du nombre des grossesses non désirées chez les mineures, grossesses qui
aboutissent deux fois sur trois à un avortement. Joëlle Kauffmann a souvent
attiré notre attention sur les drames qui lui étaient racontés dans son
cabinet.
Il faut développer considérablement la contraception, et l'action à
entreprendre à cet égard est sans commune mesure avec ce qui a été fait jusqu'à
présent. Tous les moyens doivent être mobilisés, à commencer par l'école.
Les raisons de l'évolution constatée sont multiples. Outre la méconnaissance
par les jeunes de leur corps, celle de la contraception est souvent mise en
avant.
Savez-vous, par exemple, que l'information sexuelle, qui a officiellement fait
son entrée dans les programmes d'enseignement en 1973, se limite toujours à une
heure en classe de biologie au collège ? Savez-vous aussi que 60 % des filles
n'utilisent aucune contraception lors de leur premier rapport sexuel ?
Il nous faut donc d'urgence entreprendre des actions d'une tout autre ampleur.
Certes, le texte présente des avancées à cet égard, mais nous pensons qu'il
faut aller plus loin.
On constate, en effet, que ce sont les pays qui ont le plus accordé de place à
l'éducation à la sexualité - je pense en particulier aux Pays-Bas - qui ont les
taux d'IVG les plus bas. Cette éducation permet de responsabiliser les jeunes,
filles et garçons, sur leur sexualité.
Nous vous proposons donc de mettre en place une éducation sexuelle dès l'école
primaire, le message étant évidemment adapté aux différents âges, et
d'augmenter le nombre de séances consacrées à ce thème au cours de l'année
scolaire.
Dans les collèges, notamment, la maturité sexuelle des élèves est très
hétérogène et l'évolution de leur rapport à la sexualité, très rapide. Par
conséquent, certains élèves peuvent ne pas se sentir concernés par une séance
d'éducation à la sexualité mais ressentir un besoin d'information deux ou trois
mois plus tard. C'est pourquoi, dans mon département, le Val-de-Marne, le
conseil général a mis en place la quinzaine « santé jeunes ». En cette année
2001, qui est l'an I de la parité, la quinzaine a été organisée sur le thème :
« Les jeunes filles et la contraception ».
Pour avoir participé, en tant que conseillère générale de Choisy-le-Roi, à une
discussion avec plus de 300 collégiens et lycéens, je peux vous dire qu'ils se
sentent très concernés et qu'ils parlent très librement.
J'ajoute, monsieur le ministre, que le préservatif féminin n'a trouvé aucune
place dans la campagne télévisée. Se pose d'ailleurs un problème de prix, car
il coûte neuf francs. En tout cas, pour les jeunes filles, ce préservatif
féminin représente une liberté supplémentaire qu'elles ont à conquérir.
Parler aux jeunes de sexualité et de contraception plus régulièrement au cours
de l'année scolaire nous paraît de nature à mieux répondre à la situation. Cela
concerne non seulement l'école, mais aussi les centres de loisirs, les centres
de vacances, les maisons des jeunes et de la culture.
Nous défendrons tout à l'heure des amendements en ce sens.
M. le président.
Par amendement n° 17, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
supprimer l'article 16.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'article 16 supprime l'obligation de prescription médicale
pour la délivrance de contraceptifs dans les centres de planification
familiale, en application des nouvelles règles de prescription des
contraceptifs proposées à l'article 17.
Par coordination avec un amendement que nous avons déposé à l'article 17, le
présent amendement rétablit l'obligation d'une prescription médicale pour la
délivrance de contraceptifs hormonaux.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet
amendement.
Après tant d'années de pratique, parfois extrêmement longue pour certaines
femmes, si nous voulons que, dans ce pays, la contraception se développe - et
tel est bien notre souhait - il nous paraît nécessaire de lever l'obligation de
prescription pour des produits qui sont, certes, des produits hormonaux, mais
qui sont de plus en plus finement dosés, afin qu'ils soient délivrés sans
ordonnance. Je crois que ce serait un progrès au regard de la liberté des
femmes.
Je comprends que la question de la première prescription puisse être posée. Il
est vrai que la première prescription et le contact avec un médecin seraient
très bénéfiques. Mais, pour la suite, je pense que nous devrions supprimer
l'obligation de prescription, conformément à ce qui est en usage dans beaucoup
d'autres pays.
Voilà pourquoi je considère que le texte qui avait été présenté à l'Assemblée
nationale constitue un progrès et je m'oppose à cet amendement.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
C'est sur cette question de la première
prescription que je veux intervenir.
Qui d'entre nous accepterait que sa fille ou sa petite-fille puisse s'engager
dans une contraception nécessairement régulière et absorber tous les mois ces
pilules sans aucun bilan ou examen médical initial ?
Les problèmes hormonaux ne sont pas toujours apparents, et la prise de pilules
contraceptives, même faiblement dosées, peut conduire à des déséquilibres
graves. Il existe en médecine des phénomènes de sommation qui, peu à peu,
provoquent des cumuls.
Vous me permettrez une comparaison. Nous appliquons le principe de précaution
pour éviter que nos enfants ne mangent une tranche de foie de veau américain
qui a peut-être reçu des hormones,...
M. Jean Chérioux.
Peut-être !
M. Jean Delaneau,
président de la commission,
et nous laisserions notre fille ou notre
petite-fille se charger en hormones sans autre forme de précaution !
M. Jean Chérioux.
Incroyable !
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
On marche sur la tête !
Si nous avons déposé cet amendement de suppression, monsieur le ministre, ce
n'est pas pour que toutes les prises de contraceptifs dépendent d'une
ordonnance médicale. Nous voulons créer un vide dans lequel vous pourrez placer
au moins la consultation qui permettra la première délivrance de ces
progestatifs ou oestroprogestatifs.
M. Jean Chérioux.
Très bien !
M. Lucien Neuwirth.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth.
Nous sommes confrontés, en ce qui concerne la contraception chez les jeunes
filles, à un problème double, car s'ajoute une question de protection et
d'hygiène de vie. Je m'explique.
Je crois infiniment souhaitable que les jeunes filles, à un certain moment de
leur vie, aient une première visite chez un médecin, pour qu'elles apprennent à
connaître leur corps - qu'elles ne connaissent pas toujours - pour qu'elles
apprennent à connaître la pratique contraceptive, mais d'un point de vue
médical, et, surtout, pour qu'elles prennent l'habitude d'aller voir un
gynécologue.
Je vais vous dire pourquoi : pour une question de sécurité, ainsi que je
l'ai, dit dans la discussion générale. Nous connaissons les ravages du cancer
du sein, du cancer du col de l'utérus. Si les jeunes femmes prennent l'habitude
d'aller consulter leur médecin, que ce soit un généraliste ou, mieux encore, un
gynécologue, nous avons la garantie, nous avons la certitude qu'elles seront
suivies et protégées.
Il faudrait donc trouver une formulation qui amène à une première visite, à
une première prise de contact entre la jeune fille et un médecin ou un
gynécologue. Par la suite, elle fera ce qu'elle voudra, mais il y aura eu cette
« prise de conscience » des réalités auxquelles elle sera confrontée toute sa
vie. En même temps, elle aura la certitude d'une protection, d'une sécurité
apportée par la visite devenue habituelle, dont elle déterminera elle-même la
fréquence.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par le Gouvernement.
Mme Odette Terrade.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 16 est supprimé.
Article 16 bis
M. le président.
« Art. 16
bis
. - Le chapitre II du titre Ier du livre III du code de
l'éducation est complété par une section 9 ainsi rédigée :
« Section 9
« L'éducation à la santé et à la sexualité
«
Art. L. 312-16
. - Une information et une éducation à la sexualité
sont dispensées dans les collèges et les lycées à raison d'au moins trois
séances annuelles. Ces séances pourront associer les personnels contribuant à
la mission de santé scolaire et des personnels des établissements mentionnés au
premier alinéa de l'article L. 2212-4 du code de la santé publique ainsi que
d'autres intervenants extérieurs conformément à l'article 9 du décret n° 85-924
du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d'enseignement. »
Sur l'article, la parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, nous arrivons à un point très important de ce projet de
loi.
Vingt-six ans après l'adoption de la loi Veil, nous recensons près de 220 000
interruptions de grossesse chaque année en France, dont 7 000 concernent des
adolescentes. Une grossesse sur cinq se termine par une IVG. Une femme sur
deux, en moyenne, subit une interruption de grossesse dans sa vie.
Ces chiffres, qui sont alarmants puisqu'ils sont similaires à ceux de 1975,
sont révélateurs d'un véritable échec des pouvoirs publics, de nous tous en
réalité, en matière d'information sur la contraception.
Il est invraisemblable que l'Etat, quels qu'aient été les gouvernements, ait
été incapable depuis 1975 de donner en amont les moyens de développer la
communication sur la contraception par le biais d'une véritable éducation
sexuelle. Ces moyens sont pourtant les seuls qui permettent de préserver les
femmes, en particulier les mineures, de l'IVG.
Les pouvoirs publics se doivent de communiquer aux enfants les connaissances
de base sur les mécanismes de transmission de la vie, dans la mesure où la
cellule familiale ne remplit pas toujours ce rôle.
Nous devrions tirer leçon de l'exemple hollandais. Les Pays-Bas ont l'un des
taux les plus faibles d'IVG. Pour parvenir à ce résultat, l'Etat a mis en
oeuvre de longue date une politique de prévention et d'éducation sexuelle
progressive, dès l'enfance. Ainsi, l'éducation à la contraception fait partie
intégrante des programmes pédagogiques, y compris dans le primaire.
C'est à ce moment-là que l'on doit montrer que la contraception est une
absolue nécessité si l'on veut éviter de se retrouver face à cette issue
souvent dramatique qu'est l'IVG. De cette manière, les générations futures
seront en mesure de compléter par le dialogue intrafamilial l'éducation reçue
dans le cadre scolaire.
En France, depuis 1996, des cours d'éducation à la sexualité sont prévus dans
les programmes des classes de quatrième et de troisième, à raison de deux
heures par an. Malheureusement, la réalité est tout autre : à peine plus d'un
tiers des collèges auraient mis en place ces séances.
Pour remédier à cette défaillance collective en matière d'éducation scolaire,
une véritable politique incitative doit voir le jour. Le Conseil d'Etat, dans
une décision du 6 octobre 2000, a d'ailleurs amorcé une prise de conscience en
validant tant les campagnes d'information sur la contraception et la sexualité
dans les établissements scolaires que la mise en place de modules
d'enseignement sur ces thèmes.
L'article 16
bis
du projet de loi a pour objet de mettre en place un
dispositif d'information à la sexualité et à la contraception dans les collèges
et lycées, sans pour autant lui donner des moyens efficaces.
C'est pourquoi je souhaite une mise en place effective des cours d'éducation
sexuelle au collège, de même que leur extension à l'école primaire. Je soutiens
donc avec force et conviction l'amendement déposé par la commission des
affaires sociales, qui vise à étendre ces cours aux écoles et prévoit cinq
séances annuelles au lieu des trois initialement envisagées.
A cet égard, il m'a semblé judicieux de proposer un sous-amendement qui tend à
préciser le nombre d'heures de cours chaque année. Pourquoi, en effet,
resterions-nous dans le flou législatif et le vague réglementaire ? J'estime
qu'au moins dix heures annuelles sont nécessaires pour un enseignement de
qualité et que celui-ci doit être assuré par des personnes extérieures à
l'établissement scolaire, notamment par des conseillères du Planning
familial.
La commission des affaires sociales a également pris une initiative
remarquable en proposant l'organisation d'une réunion annuelle à l'intention
des parents d'élèves. L'implication des parents est en effet fondamentale : par
ce biais, ils auront connaissance du contenu et des modalités de ces séances et
pourront ainsi nouer plus facilement un dialogue à la maison.
L'information sur la contraception passe aussi par des campagnes nationales,
notamment télévisuelles. Je ne peux que déplorer leur nombre insuffisant :
trois campagnes en vingt ans ! Le Gouvernement nous dit être sur le point d'en
lancer une nouvelle. J'aimerais savoir s'il a pris la peine d'y impliquer les
médecins, acteurs essentiels de la contraception.
Je tiens par ailleurs à exprimer ma grande inquiétude quant à la formation
lacunaire des médecins en la matière, question qui n'est pas du tout abordée
dans le projet de loi.
Alors que l'ensemble de la profession médicale souligne qu'il est humainement
impossible de maîtriser une fécondité, qui, dans la vie d'une femme, s'étend
sur une période de trente ans en moyenne sans l'aide de médecins compétents, il
s'avère que la plupart des jeunes médecins ne connaissent que peu de chose en
matière de contraception.
Dans les facultés de médecine, l'enseignement peut ne consacrer que deux
heures à la contraception, selon le
Bulletin
de l'Ordre des médecins de
mai 2000. Comment, dès lors, s'étonner que 90 % des généralistes n'exercent
aucune activité de gynécologie courante, tels la mise en place des moyens
techniques de contraception ou les examens de routine ? Les femmes qui ne
recourent pas régulièrement aux services d'un gynécologue sont alors dans un
état de sous-information évident.
Enfin, je pense nécessaire d'évoquer à ce sujet l'avenir des gynécologues
médicaux. Le déficit de ces professionnels est criant. C'est pourquoi cette
filière doit être restaurée au plus vite, même en tenant compte des
harmonisations européennes. Sans cela, nous irions à l'encontre des besoins
fondamentaux des femmes en matière de santé, plus particulièrement en matière
de contraception.
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 18, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour l'article L. 312-16
du code de l'éducation :
«
Art. L. 312-16. -
Une éducation à la sexualité et une information sur
la contraception sont dispensées dans les écoles, collèges et lycées à raison
d'au moins cinq séances annuelles. Ces séances associent les personnels
contribuant à la mission de santé scolaire et des personnels des établissements
mentionnés au premier alinéa de l'article L. 2212-4 du code de la santé
publique ainsi que d'autres intervenants extérieurs, notamment des médecins
exerçant à titre libéral, conformément à l'article 9 du décret n° 85-924 du 30
août 1985 relatif aux établissements publics locaux d'enseignement. Une réunion
annuelle est organisée à l'intention des parents d'élèves au cours de laquelle
ces derniers sont informés du cadre, du contenu et des modalités de ces
séances. »
Cet amendement est assorti de quatre sous-amendements.
Le sous-amendement n° 29 est présenté par M. Branger.
Il vise à compléter la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 18
pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation par les mots : « représentant
dix heures de cours par an ».
Le sous-amendement n° 25 est présenté par M. Neuwirth.
Il a pour objet de rédiger comme suit la dernière phrase du texte proposé par
l'amendement n° 18 pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation : « Des
réunions associant nécessairement les parents d'élèves seront organisées dans
ces établissements pour définir une action menée conjointement sur
l'information concernant la sexualité et la fécondité. »
Le sous-amendement n° 75 est présenté par M. Seillier.
Il tend à compléter le texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L.
312-16 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée : « En cas de
contestation, les parents peuvent faire appel au Conseil supérieur de
l'éducation affective et sexuelle selon des modalités définies par décret. »
Le sous-amendement n° 50 est présenté par Mmes Campion, Dieulangard et les
membres du groupe socialiste et apparentés.
Il vise à compléter le texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L.
312-16 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre de leur formation continue, les enseignants se verront
proposer des stages destinés à les sensibiliser à une approche pédagogique de
l'éducation sexuelle et de la contraception. »
Par amendement n° 67, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit la
premier phrase du texte présenté par l'article 16
bis
pour l'article L.
312-16 du code de l'éducation : « Une information et une éducation à la
sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison
d'au moins six séances annuelles. »
Par amendement n° 76 rectifié, M. Seillier propose de compléter le texte
présenté par l'article 16
bis
pour l'article L. 312-16 du code de
l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Il est créé un Conseil supérieur de l'éducation sexuelle. Il doit définir le
contenu et les modalités de l'éducation sexuelle, dans son environnement
affectif, et de l'information contraceptive données dans les écoles, les
collèges et les lycées. Sa composition et son fonctionnement sont définis par
décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 18.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Cet article additionnel introduit par l'Assemblée nationale
en première lecture prévoit l'organisation de séances d'information et
d'éducation à la sexualité dans les collèges et lycées. La commission est,
naturellement, favorable à cette initiative.
J'ai eu l'occasion de souligner, lors de la présentation de l'amendement n° 1,
qu'il était de la responsabilité du Gouvernement de définir une politique
ambitieuse d'éducation à la sexualité et d'information sur la contraception qui
mobilise autant le corps enseignant que le corps médical et qui ouvre le
dialogue au sein des familles.
La commission vous propose d'adopter un amendement tendant à augmenter le
nombre minimum de ces séances annuelles, qui passerait de trois à cinq, à les
étendre aux écoles primaires - l'information est d'autant plus utile qu'elle
est délivrée précocement - et à ouvrir ces séances aux médecins libéraux.
En outre, l'amendement prévoit l'organisation d'une réunion annuelle à
l'intention des parents d'élèves, réunion au cours de laquelle ces derniers
seront informés du cadre, du contenu et des modalités de ces séances. Il s'agit
moins d'instaurer un contrôle des parents sur ces séances d'information
destinées à leurs enfants que de leur fournir une information identique, de
sorte que les conditions soient réunies pour que s'ouvre un véritable dialogue
au sein de la famille.
M. le président.
La parole est à M. Branger, pour défendre le sous-amendement n° 29.
M. Jean-Guy Branger.
Je maintiens ce que j'ai dit tout à l'heure : le nombre d'heures consacrées à
l'éducation de notre jeunesse à la sexualité, tant dans le primaire qu'au
collège, est insuffisant, et, je le répète, je pense qu'il ne faut pas laisser
ce point dans un flou artistique, législatif ou réglementaire nous devons donc
fixer un nombre d'heures.
J'ai la chance d'avoir un fils de quinze ans et de pouvoir parler de ces
questions avec lui, et je sais de combien d'heures d'enseignement de la
sexualité il a bénéficié. J'ai également parlé avec des jeunes filles, ses
camarades, et j'ai pu constater que l'on nous critique là-dessus, que l'on dit
: « Mais c'est votre faute ! »
Dès lors, pourquoi rester dans ce flou, dans cette inconsistance ? Je ne veux
pas critiquer l'école, c'est trop facile. Critiquer, c'est simple. Mais nous
sommes là pour légiférer, pour dire ce que nous voulons, pour dire quel
enseignement et quelle formation notre jeunesse doit recevoir. Il faut l'écrire
et ne pas se contenter d'en parler, comme cela, pour faire bien, en restant
inconsistants.
Je souhaite donc que le sous-amendement n° 29 soit voté par la Haute Assemblée
et que le Gouvernement en tienne le plus grand compte.
M. le président.
La parole est à M. Neuwirth, pour défendre le sous-amendement n° 25.
M. Lucien Neuwirth.
J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les définitions qu'a données tout à
l'heure Mme Luc des campagnes nécessaires à l'information et à l'éducation ; je
crois que nous sommes nombreux à pouvoir en reprendre une grande partie.
Contrairement à mon collègue Branger, je ne pense pas que nous soyons les
mieux placés pour déterminer le nombre d'heures nécessaires : il y a des
spécialistes pour cela, et je ne crois pas que nous ayons la qualification pour
apprécier de telles questions.
Je voudrais cependant insister sur un point particulier, qui fait l'objet du
sous-amendement n° 25.
Il est impératif non seulement d'informer, mais d'associer dans le même temps
les parents d'élèves aux démarches entreprises par les établissements
scolaires, afin d'initier - et cela est important ! - une action conjointe en
matière d'éducation et d'information sur la transmission de la vie, sur la
sexualité et sur la fécondité.
En effet, beaucoup de parents, retenus par une sorte de pudeur, éprouvent une
certaine gêne, voire ne se sentent pas compétents pour apporter une telle
information. Pour formaliser les choses et parvenir à une coordination dans les
actions d'information et d'éducation, je crois qu'il faut plus d'une réunion
annuelle commune entre les parents d'élèves et les établissements scolaires.
Dans un autre domaine, lors d'une mission au Japon dans le cadre de la
commission des finances de l'Assemblée nationale, mon collègue Emmanuelli et
moi-même avions été très impressionnés par ce que nous avions vu dans une
maternelle où on apprenait à lire aux enfants de trois ans - et j'aime autant
vous dire que les signes japonais sont autrement plus compliqués que notre
alphabet de vingt-six lettres ! En effet, les mamans disponibles étaient
présentes et lors de leur retour à la maison, elles pouvaient prolonger cet
apprentissage. En matière d'information sur la contraception et d'éducation
sexuelle, ce serait une bonne chose.
Monsieur le ministre - et ce n'est pas vous qui êtes visé puisque vous n'étiez
pas là - pourquoi a-t-on mis sous le boisseau le conseil supérieur d'éducation
sexuelle, qui fonctionnait remarquablement bien ? Y siégeaient les
représentants des syndicats, des représentants des enseignants, l'école des
parents, toutes les associations familiales, y compris les associations
familiales catholiques. Il a rendu de grands services, après le vote de la loi
sur la contraception. J'espère que ses activités n'ont pas été interrompues
définitivement.
Je reviens au sous-amendement n° 25. Je souhaite vivement que ces réunions
associant les parents d'élèves soient organisées dans les établissements pour
définir une action menée conjointement sur l'information concernant la
sexualité et la fécondité, qui sont les deux domaines naturels qui régissent la
transmission de la vie.
M. le président.
La parole est à M. Seillier, pour défendre le sous-amendement n° 75.
M. Bernard Seillier.
Avec ce sous-amendement, j'ai voulu attirer l'attention sur les difficultés
auxquelles nous sommes confrontés, au-delà de la position de principe unanime
sur la nécessité de l'éducation et de l'information ici visées.
Ainsi, l'amendement présenté par M. le rapporteur me satisfait pleinement, si
ce n'est qu'il se termine par une phrase indiquant que les parents « sont
informés du cadre, du contenu et des modalités de ces séances », M. le
rapporteur ayant pris le soin de préciser dans sa présentation qu'il ne
s'agissait pas de donner aux parents la possibilité de contrôler cette
éducation.
Il s'agit là d'une question de fond. Je suis d'accord avec M. le rapporteur
s'il s'agit de ne pas autoriser les parents à contrôler, c'est-à-dire à
définir, dans chaque établissement, le contenu de cette éducation, à condition
toutefois que ce contenu soit précisé pour que des garanties puissent être
données aux parents, dont c'est tout de même une responsabilité fondamentale
!
La responsabilité éducative appartient d'abord aux parents. Pour toutes les
matières scolaires, ils sont obligés de la déléguer car ils sont incompétents.
En revanche, s'agissant de l'éducation sexuelle,
a priori
, ils ne
devraient pas avoir à la déléguer - sauf que nous sommes obligés de constater
qu'il ne l'assument pas toujours correctement. Nous sommes donc face à une
situation qui impose la création d'une institution, d'une autorité supérieure
indépendante et incontestable, ayant pour mission de définir, pour l'ensemble
des établissements, le contenu de cette formation et ses modalités. Cela nous
évitera d'ailleurs de devoir préciser, par des amendements, le nombre d'heures
ou les modalités de fonctionnement de chaque réunion.
Je rejoins les propos de mon collègue Lucien Neuwirth, s'agissant en tout cas
de l'interrogation sur l'existence et le fonctionnement du Conseil supérieur
d'information sexuelle, de régulation des naissances et de l'éducation
familiale. J'avais posé récemment une question sur ce sujet au ministre de
l'éducation nationale. Si ce conseil a rempli, c'est vrai, un rôle très
important, il n'a pas été conçu spécifiquement pour définir un contenu éducatif
dans les programmes des écoles et des lycées, même si cela faisait partie
indirectement de l'un des aspects de sa mission. Mais j'ai pris soin de relire
le texte qui, au sein de la loi de 1973, le créait, ainsi que les différents
textes qui ont suivi. Il est vrai qu'aujourd'hui il est au point mort, à cause
d'ailleurs d'une erreur de codification qui fait qu'il ne peut pas être activé
à l'instant.
Par ce sous-amendement n° 75, je dis, anticipant sur ce que pourrait être
cette autorité supérieure - que j'appelle dans le texte de mon sous-amendement
« conseil supérieur de l'éducation affective et sexuelle » - que les parents
pourront, en cas de contestation sur le contenu de l'éducation donnée à leurs
enfants dans l'établissement scolaire au cours de cette réunion prévue par
l'amendement n° 18 de la commission, non pas agir directement au niveau de
l'établissement pour contrarier l'organisation de cette éducation, mais avoir
une possibilité de contrôle authentique, par la voie de l'appel, sur la
définition même du contenu de cette éducation.
M. le président.
La parole est à Mme Campion, pour défendre le sous-amendement n° 50.
Mme Claire-Lise Campion.
Dans l'optique qui est la nôtre de renforcer l'éducation sexuelle et une
information adaptée et même éclairée de la contraception, il paraît important
de former convenablement les personnes qui ont un rôle prépondérant à jouer
dans ce domaine.
En effet, il apparaît clairement que, face à de tels sujets, les enseignants
se trouvent trop souvent démunis, faute d'une formation pédagogique. De plus,
tous les jours, on constate que des informations inexactes, incompréhensibles,
obsolètes, voire un peu délirantes ou trompeuses, circulent et sont véhiculées
au sein des établissements, et ce n'est pas acceptable.
Comment accepter, en effet, qu'un professeur de sixième explique la puberté à
des jeunes filles en la définissant comme une horloge qui se déclenche dans la
tête ? Comment supporter que la méthode Ogino soit encore présentée comme une
technique de contraception ? Comment concevoir que, lorsque des séances
d'éducation à la sexualité sont mises en place, on sépare les filles des
garçons ? Il convient d'agir, et d'agir vite et concrètement.
Je sais bien que le Gouvernement va nous dire que, bien qu'il soit d'accord
sur le principe de notre sous-amendement, ce dernier relève non pas du domaine
législatif, mais du domaine réglementaire. Nous en convenons, mais il n'en
reste pas moins que l'on ne peut plus admettre certaines pratiques ou
explications hasardeuses sur des sujets aussi importants. Il est grand temps de
prévoir des programmes adaptés, d'organiser des formations pédagogiques et des
sensibilisations à l'éducation à la sexualité et à la contraception à
destination des enseignants.
M. le président.
La parole est à Mme Luc, pour présenter l'amendement n° 67.
Mme Hélène Luc.
Comme nous l'avons dit, avec mes amis Odette Terrade et Guy Fischer, dans la
discussion générale, l'une des qualités majeures du texte réside dans sa prise
en compte globale des questions d'IVG, de contraception et d'éducation
sexuelle.
Nous avons insisté, tout au long du débat, sur le fait que, pour une femme qui
se retrouve enceinte et qui ne le désire pas, l'avortement constitue en
lui-même non pas un moyen de contraception, mais une solution de dernier
recours. Nous ne le dirons jamais assez : l'IVG n'est pas un acte banal ou
anodin. Il ne s'agit pas de l'encourager. Il s'agit, au contraire, de
privilégier la contraception sous toutes ses formes et l'éducation sexuelle,
comme moyen pour les femmes de se libérer de la tyrannie des lois de la nature
et de la reproduction, ainsi que de l'injustice d'une grossesse non désirée.
Afin de réduire le nombre d'avortements et pour permettre aux femmes de
bénéficier de tous les moyens possibles de contraception, il nous semble
indispensable de promouvoir une réelle politique de contraception et
d'éducation sexuelle, et de se donner les moyens de cette politique.
Sur ce plan, le projet de loi présente des avancées indéniables, notamment en
ce qui concerne l'accès des mineurs à la contraception. Ces progrès ont été
largement exposés par mes amis du groupe communiste républicain et citoyen et
par certains autres collègues. Aussi, je n'y reviendrai pas.
Cela étant dit, notre pays - et, par conséquent, le Gouvernement et nous tous
- ne peut faire l'économie d'une réflexion globale sur ses lacunes en matière
de contraception.
En premier lieu, je tiens à souligner l'effort à entreprendre afin
d'impliquer, plus qu'il ne l'est actuellement, le corps médical dans
l'information relative à la contraception et à l'éducation sexuelle.
Une réforme des études de médecine faisant une par plus large à ces questions
dans la formation des médecins est en cours. Par ailleurs, le ministre de
l'éducation nationale a recommandé l'enseignement de l'éducation sexuelle dans
les instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM. Il faudra
faire énormément de choses. Cette réforme ne portera pas ses fruits si les
médecins, en particulier les médecins généralistes, n'y sont pas très
étroitement associés, dans une grande campagne pour relancer la
contraception.
Nous n'allons pas rouvrir aujourd'hui le débat sur la gynécologie médicale,
mais le fait est que les femmes parlent plus volontiers de leur sexualité et de
la contraception à un gynécologue qu'à un médecin généraliste. C'est pourquoi
nous soutenons les revendications des gynécologues.
Il faudra bien aussi trouver une solution à un manque d'intérêt certain des
laboratoires de recherche pour la contraception. Ce problème est rendu plus
aigu encore par l'absence de remboursement qui frappe les pilules les mieux
dosées et les plus efficaces. Certes, la mise sur le marché d'une pilule
générique de troisième génération, prise en charge par la sécurité sociale, est
prévue pour cette année. Quand sera-t-elle commercialisée ? Il semble que ce
soit pour très bientôt.
Il nous faut d'ores et déjà réfléchir à une prise en charge intégrale de la
contraception par la protection sociale.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
C'est hors sujet !
Mme Hélène Luc.
Cette politique ambitieuse de santé publique permettrait, à terme, de diminuer
de façon importante le nombre d'IVG, et, par là même, de réaliser des
économies.
Monsieur le ministre, je terminerai mon intervention en vous posant une
question. Il est nécessaire de relancer la réunion et par conséquent l'activité
du Comité national de pilotage pour la contraception et l'éducation sexuelle.
Pouvez-vous nous informer sur ce qui est prévu dans l'immédiat et, je l'espère,
très rapidement ?
M. Patrick Lassourd.
Assez rapidement !
M. le président.
La parole est à M. Seillier, pour défendre l'amendement n° 76 rectifié.
M. Bernard Seillier.
Il s'agit de prévoir la création du conseil supérieur de l'éducation sexuelle,
que j'ai évoqué quand j'ai présenté le sous-amendements n° 75.
A l'occasion de la présentation de l'amendement n° 76 rectifié, je voudrais
insister sur l'environnement affectif de l'éducation sexuelle. En ce domaine,
il importe, sauf à commettre un erreur qui aboutirait à des échecs, de
concevoir l'éducation à donner comme une véritable éducation, qui ne se limite
pas simplement à l'aspect physiologique et génitale. Nous sommes en effet des
êtres entièrement sexués. La personne elle-même est sexuée. La sexualité
exprime la personne et s'exprime à travers la personne dans sa totalité. C'est
pourquoi il est important de spécialiser un conseil supérieur sur cette
question du contenu de la formation et de l'éducation à donner aux enfants dans
les établissements scolaires, d'une manière indépendante, dans le respect de la
liberté de conscience et de la responsabilité des parents. Cette autorité que
j'appelle « conseil supérieur de l'éducation sexuelle » doit impérativement
dépasser l'aspect purement informatif pour revêtir la dimension d'une véritable
éducation.
Cela nécessite une grande exigence, des personnes compétentes, car n'importe
qui ne peut pas être compétent en ce domaine.
Un des défauts du conseil supérieur d'information sexuelle, de régulation des
naissances et d'éducation familiale, c'était justement d'être un immense forum.
Certains de mes amis y ont participé. Un travail intéressant y a effectivement
été accompli au départ. Mais, par la suite, c'est devenu un lieu où l'on ne
pouvait plus s'entendre et discuter sérieusement. Je crois qu'il faut ramasser
les compétences qui étaient les siennes dans une autorité nationale compétente
en ce domaine, spécialisée pour définir le contenu et les méthodes d'éducation
dans les établissements scolaires.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, la secrétaire d'Etat aux droits des femmes fera entendre sa voix
particulière aux côtés du ministre délégué à la santé, en restant dans le champ
de ses compétences.
Je souhaite répondre à certains d'entre vous, particulièrement sur la
contraception, car cela me semble majeur, comme à chacun d'entre vous.
Savez-vous que, lorsque le Premier ministre m'a confié le secrétariat aux
droits des femmes en décembre 1998, huit mois après avoir accepté d'assumer des
compétences ministérielles en matière de formation professionnelle, j'ai
découvert que le budget dévolu aux droits des femmes était un tout petit budget
de 80 millions de francs ? Néanmoins, ma conviction sur la contraception était
telle que j'ai décidé d'en faire une réelle priorité d'action politique. Nous
avons donc mis en place un comité de pilotage dans lequel siégeaient, bien sûr,
des médecins, des personnalités qualifiées, des représentants du monde
associatif, tous ceux qui pouvaient apporter leur voix et leurs compétences
dans la définition de ce qui devait être une grande campagne nationale.
Sur ce budget global de 80 millions de francs, j'ai consacré 20 millions de
francs à la traduction de cette priorité politique.
Cette campagne s'est déroulée tout au long de l'année 2000, au travers, à la
fois, de spots télévisés, qui coûtent très cher, et de documents d'information
: sur les 12 millions de guides de poche, que nous avons appelés « cartes Z »,
la moitié, soit 6 millions, ont été distribués par l'éducation nationale et
l'autre moitié par l'ensemble des acteurs qui touchent la jeunesse, le sport,
la culture et les missions locales, pour essayer aussi d'atteindre celles et
ceux qui sont les plus éloignés de l'information.
Nous avons demandé - à l'époque, je travaillais auprès de Martine Aubry - à
l'institut BVA de procéder à une évaluation de cette campagne. Le résultat a
été encourageant, mais les conclusions nous ont démontré que nous devions faire
d'une grande campagne nationale d'information sur la contraception un enjeu
annuel parce que, chaque année, une nouvelle classe d'âge s'éveille à la
sexualité.
Mme Hélène Luc.
Tout à fait !
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
On croit que, en 2000, le dialogue familial va de soi.
La militante que j'ai été une partie de ma vie dans le cadre du planning
familial ne pensait pas que, vingt-cinq ans après, ce dialogue serait encore
difficile à instaurer.
Quand je vais dans les lycées ou dans certaines facultés voir comment se
déroule ce dialogue, je prends acte qu'à côté des échanges que, heureusement,
beaucoup de jeunes peuvent avoir avec leur famille, bien d'autres n'ont pas la
chance d'obtenir des informations. La société se doit de suppléer à cette
absence d'informations.
J'ai demandé un arbitrage au Premier ministre pour que soient engagés 20
millions de francs. Il a rendu un avis positif : nous lancerons donc à nouveau,
à partir de l'automne 2001, une grande campagne d'information sur l'ensemble
des moyens de contraception, relayée par des spots télévisés, les radios, la
presse locale, les télévisions régionales et les supports écrits.
Je ne parlerai pas de la contraception d'urgence, ni de bien d'autres sujets
qui relèvent plus directement de la santé.
En ce qui concerne le Conseil supérieur de l'information sexuelle, le CSIS,
quand j'ai pris en charge ce champ de compétence, j'ai, bien sûr, réuni ce
conseil. J'ai constaté qu'il comptait beaucoup de membres, et qu'il était
permis de s'interroger, non pas sur leur qualité, mais sur l'efficacité de
leurs conclusions.
La dernière réunion plénière que j'ai présidée a eu lieu le 31 mai 2000, et
nous avons, ensemble, décidé de restreindre la composition de ce conseil pour
en faire davantage une assemblée consultative et de propositions. Les quatre
groupes de travail qui ont été mis en place fin 1996 m'ont remis leurs rapports
respectivement intitulés :
Violences à caractère sexuel
,
Information,
éducation des jeunes à la sexualité
,
Soutien des parents dans leur tâche
éducative
et
Régulation des naissances
, autour desquels nous avons
débattu en mai dernier.
La prochaine réunion plénière nous permettra de mieux définir encore le rôle
du CSIS puisque ses membres devraient être renouvelés. Pour la petite histoire,
cette année, le CSIS, qui était traditionnellement placé sous la tutelle du
secrétariat d'Etat aux droits des femmes, au travers d'un toilettage du code de
la santé publique, a changé de tutelle. Pendant trois ou quatre mois, il y a eu
une période de flottement, mais je suis certaine qu'après avoir réétudié cette
question, un décret et deux arrêtés seront pris très prochainement afin de
remettre de nouveau le CSIS sous l'autorité de la secrétaire d'Etat aux droits
des femmes.
(Bravo ! et applaudissements sur les travées socialistes et sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 29, 25, 75 et
50, ainsi que sur les amendements n°s 67 et 76 rectifié ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission souhaite que le sous-amendement n° 29 de M.
Branger soit retiré, car la formule des heures de cours ne lui semble pas
forcément la meilleure, d'autant que l'amendement n° 18 de la commission
reprend l'idée qui sous-tend cet amendement avec les cinq séances annuelles.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 25 de M. Neuwirth, la commission émet
un avis favorable.
Pour ce qui est du sous-amendement n° 75 de M. Seillier, la commission
souhaite également qu'il soit retiré, car il semble satisfait par le
sous-amendement n° 25.
S'agissant du sous-amendement n° 50, présenté par Mme Campion, la commission
s'en remet à la sagesse du Sénat.
L'amendement n° 67 est satisfait par l'amendement de la commission.
Enfin, la commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 76 rectifié.
Toutefois, elle suggère à M. Seillier de transformer cet amendement en
sous-amendement à l'amendement n° 18 de la commission.
M. le président.
Monsieur Seillier, acceptez-vous les suggestions de M. le rapporteur de
retirer votre sous-amendement n° 75 et de transformer votre amendement n° 76
rectifié en un sous-amendement à l'amendement n° 18 de la commission ?
M. Bernard Seillier.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Le sous-amendement n° 75 est retiré.
Je suis saisi, par ailleurs, d'un sous-amendement n° 76 rectifié
bis
,
présenté par M. Seillier, tendant à compléter le texte proposé par l'amendement
n° 18 pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation par un alinéa ainsi
rédigé :
« Il est créé un Conseil supérieur de l'éducation sexuelle. Il doit définir le
contenu et les modalités de l'éducation sexuelle, dans son environnement
affectif, et de l'information contraceptive données dans les écoles, les
collèges et les lycées. Sa composition et son fonctionnement sont définis par
décret en Conseil d'Etat. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 18, sur les
sous-amendements n°s 29, 25, 50 et 76 rectifié
bis
, ainsi que sur
l'amendement n° 67 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
S'agissant de la gynécologie médicale, monsieur
Branger, nous avons réformé profondément le diplôme d'études spéciales qui
permettra, en quatre ans, d'accéder à cette spécialité à laquelle nous tenons
autant que vous : nous savons quel rapport entretiennent les femmes avec leur
gynécologue, qui est un peu différent de celui qu'elles ont avec leur médecin
généraliste.
Cela dit, ce n'est pas facile : il faut des enseignants. Mais nous avons
beaucoup travaillé ; Gérard Lévy en particulier suit ce dossier. Je crois que
tout le monde est satisfait. Trois ou quatre ans seront nécessaires pour former
ces gynécologues, qui devront être en nombre suffisant. Mais n'ayez crainte, la
gynécologie médicale - privilège français en Europe, vous le savez, parce que
se posait un vrai problème de spécialité - sera maintenue.
La réforme des études médicales, sur laquelle nous avons beaucoup travaillé
depuis quatre ans, permettra de dispenser quatre heures d'enseignement sur la
sexualité, la contraception, etc., dans le deuxième cycle. Cette disposition
est prévue dans un décret qui est paru en septembre 2000.
Dans le troisième cycle de médecine générale, les édudes s'étaleront sur trois
ans, avec trois mois de stage obligatoire dans un service de consultation
gynécologique et de surveillance de la grossesse.
M. Lucien Neuwirth.
Très bien !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
De plus, six heures seront consacrées à l'enseignement
théorique sur la contraception et la manière de communiquer avec les femmes et
les jeunes filles sur ces questions, au travers d'entretiens dirigés. Je tenais
à apporter cette précision, car elle me paraît importante par rapport à ce qui
nous préoccupe tous.
J'en viens maintenant à l'avis du Gouvernement sur les différents amendements
et sous-amendements.
Sur l'amendement n° 18, je partage entièrement la préoccupation de M. le
rapporteur. Simplement, je crois que l'on ne peut pas imposer par la loi un
nombre de séances. Par conséquent, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 29, il ne me paraît pas non plus
nécessaire d'insister sur ce point, car cela serait très mal pris par
l'éducation nationale. Mais le ministre s'est engagé à réaliser votre souhait,
monsieur Branger.
S'agissant du sous-amendement n° 25 de M. Neuwirth, le Gouvernement s'en remet
à la sagesse du Sénat, pour les mêmes raisons. On ne doit pas imposer
l'information, mais agir localement, avec les parents d'élèves et les
enseignants, pour décider de ce qui convient à chacun des établissements.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 50, le Gouvernement en demande
également le rejet, car il s'agit d'une disposition d'ordre réglementaire.
Quant à l'amendement n° 67, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du
Sénat.
Enfin, pour ce qui est du sous-amendement n° 76 rectifié
bis
, le
Gouvernement y est défavorable. En effet, la loi du 11 juillet 1973 a créé le
Conseil supérieur de l'information sexuelle, dont les missions sont définies à
l'article 3 : il s'agit d'assurer la liaison entre les associations et les
organismes qui contribuent à l'éducation sexuelle, de faire effectuer des
recherches en matière d'information sexuelle, de régulation des naissances,
d'éducation familiale, de formation, et de proposer aux pouvoirs publics les
mesures à prendre en vue de favoriser l'information sur les problèmes
d'éducation sexuelle. Cette instance doit être renouvelée, nous l'avons dit.
L'amendement proposé est donc inutile.
M. le président.
Monsieur Branger, le sous-amendement n° 29 est-il maintenu ?...
M. Jean-Guy Branger.
Je souscris à la démarche de la commission et de M. le ministre, et je retire
mon sous-amendement.
Si j'ai voulu mentionner un nombre d'heures de cours par an, c'est tout
simplement en raison d'une insuffisance notoire. En effet, force est bien de
constater que tout ce qui a été entrepris jusqu'à présent s'est soldé par un
échec. Je l'ai relevé en déposant ce sous-amendement qui, je le sais bien, peut
constituer un trublion dans l'éducation nationale. Mais il faut avoir un
engagement ferme, et je remercie M. le ministre des précisions qu'il a bien
voulu apporter dans sa réponse sur les moyens qu'on va mettre en oeuvre pour
éduquer les jeunes à la contraception.
M. le président.
Le sous-amendement n° 29 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 25, accepté par la commission et pour
lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Maintenez-vous le sous-amendement n° 50, madame Campion ?
Mme Claire-Lise Campion.
Accédant à la demande de M. le ministre, nous allons le retirer, non sans lui
avoir demandé de se rapprocher de son collègue de l'éducation nationale, pour
le convaincre de l'importance qu'il y a à entendre tout ce qui a été dit ce
soir sur ce sujet.
M. le président.
Le sous-amendement n° 50 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 76 rectifié
bis.
M. Bernard Seillier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier.
J'ai bien entendu ce qu'ont dit M. le ministre et Mme le secrétaire d'Etat sur
l'évolution de la composition et des modalités de fonctionnement du conseil
supérieur de l'information sexuelle.
J'ai beaucoup insisté, en présentant le sous-amendement, et j'insiste encore à
l'occasion de cette explication de vote sur l'importance qu'il y a à ne pas
séparer l'éducation, au sens plein, de sa dimension affective, de ne pas
scinder la personnalité. Voilà ce qui doit présider à l'évolution du conseil
supérieur actuel ! Une évolution législative est nécessaire, ne serait-ce qu'au
niveau de la terminologie.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 76 rectifié
bis,
accepté par la
commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 18, pour lequel le Gouvernement
s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 67 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16
bis
ainsi modifié.
(L'article 16
bis
est adopté.)
Articles additionnels après l'article 16 bis
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 51, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 16
bis,
un
article additionnel ainsi rédigé :
« Dans les établissements médico-sociaux accueillant des personnes
handicapées, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales
doit s'assurer que les moyens consacrés à la mise en oeuvre d'un projet adapté
d'éducation sexuelle et d'information à la contraception sont suffisants. »
Par amendement n° 68, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article
16
bis,
un article additionnel ainsi rédigé :
« L'avant-dernier alinéa de l'article L. 6121-6 du code de la santé publique
est complété par une phrase ainsi rédigée : "Une information et une éducation à
la sexualité et à la contraception sont notamment dispensées dans toutes les
structures accueillant des personnes handicapées". »
La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 51.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Un des grands axes de notre politique en faveur des personnes handicapées est
l'amélioration de leur intégration dans la vie ordinaire, et donc la
reconnaissance du fait qu'elles sont des personnes à part entière, qui doivent,
comme l'ensemble des membres de notre population, pouvoir bénéficier des
apports de notre société.
En effet, humainement comme socialement, on ne peut plus admettre que ces
personnes, déjà défavorisées par leur handicap, se retrouvent marginalisées ou
exclues parce que nous ne nous donnons pas les moyens de nous adapter et de
prendre en considération leur situation.
Accueillir ces personnes dans notre quotidien, dans la vie ordinaire, passe
forcément par un accès facilité au savoir et à l'éducation. Des efforts ont
d'ailleurs commencé à être entrepris afin que leur soient ouvertes les portes
de nos écoles.
Mais cela suppose aussi, et surtout, que nous continuions d'approfondir notre
démarche vers des domaines aussi intimes que l'éducation à la sexualité et
l'accès à la contraception.
Il est grand temps de ne plus se voiler la face, de leur reconnaître
ouvertement un droit on ne peut plus naturel à l'amour, à la tendresse, à la
sexualité, à la parentalité.
Il nous faut donc prendre bien soin de vérifier qu'une information adaptée
leur est prodiguée et amorcer la mise en place de projets individualisés allant
dans ce sens.
M. le président.
La parole est à Mme Terrade, pour présenter l'amendement n° 68.
Mme Odette Terrade.
Avec cet amendement, nous anticipons quelque peu sur le débat que nous aurons
à l'article 20 et qui concernera les personnes handicapées mentales.
Notre collègue Marie-Madeleine Dieulangard disait hier soir que les handicapés
mentaux ont droit à une vie sexuelle conforme à la dignité de tout être,
c'est-à-dire qui ne soit ni interdite ni forcée. Nous partageons son point de
vue.
Nous sommes tout particulièrement attachés au droit à la sexualité pour chacun
de nos concitoyens, et donc tout naturellement aussi pour les personnes
handicapées, quel que soit leur handicap.
Dans le même état d'esprit, chacun de nos concitoyens devrait pouvoir avoir
accès à une information relative au fonctionnement du corps humain, à ses
fonctions de reproduction ; chaque jeune devrait bénéficier d'une éducation à
la sexualité.
Pourquoi les jeunes handicapés mentaux qui ne sont pas dans un système
scolaire intégré à l'éducation nationale n'auraient-ils pas les mêmes droits en
la matière que les jeunes collégiens et lycéens de leur âge ?
Il est indispensable qu'une information adaptée au public auquel elle
s'adresse soit dispensée dans toutes les structures d'accueil des personnes
handicapées.
L'article 20 prévoit qu'en cas de stérilisation à visée contraceptive pour une
personne handicapée mentale majeure sous tutelle « une information adaptée à
son degré de compréhension » lui soit donnée. C'est une bonne chose. Toutefois,
dans un souci préventif, il conviendrait que les personnes handicapées mentales
- qualificatifs qui, nous le savons, recouvrent des réalités très différentes
d'une personne à l'autre - soient correctement informées, en amont, des risques
de grossesse liés à la sexualité et informées sur la contraception.
C'est donc, mes chers collègues, pour qu'une information et une éducation à la
sexualité et à la contraception soient dispensées dans toutes les structures
accueillant des personnes handicapées que nous vous invitons à adopter notre
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 51 et 68 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur
l'amendement n° 51, dont la rédaction lui paraît plus précise que celle de
l'amendement n° 68, qui, de toute façon, n'aura plus d'objet si l'amendement n°
51 est adopté.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement a exactement le même avis que la
commission... mais en sens contraire ! En tout cas, sur le fond, ces
amendements sont indispensables.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission se range à l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 51.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je le retire au profit de l'amendement n° 68.
M. le président.
L'amendement n° 51 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 68, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 69, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article
16
bis,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Un service d'accueil téléphonique gratuit est créé par l'Etat. Il
concourt à la mission d'information sur la contraception et la sexualité. Il
répond aux demandes d'information et de conseil.
« Dans chaque département est mis en place, en liaison avec les services de la
caisse primaire d'assurance maladie, un dispositif permettant d'apporter des
informations pratiques aux personnes qui le demandent.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'organisation et de
fonctionnement du dispositif départemental ainsi que les modalités
d'articulation de l'échelon national avec l'échelon départemental.
« II. - Les dépenses résultant du I ci-dessus sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Nous sommes tous convaincus que nous ne réussirons à faire baisser le nombre
d'IVG qu'en délivrant une information sur la sexualité et la contraception la
plus pertinente et la plus large possible.
Le texte qui nous est proposé présente, de ce point de vue, un net progrès
puisqu'il fait référence à des séances d'éducation à la santé et à la sexualité
en milieu scolaire, même si, à notre avis, ce n'est encore là qu'une première
étape.
Afin de mettre toutes les chances du côté de la prévention, nous proposons, au
travers de notre amendement, de créer un service téléphonique gratuit, un
numéro vert en quelque sorte, géré selon un schéma départemental.
Ce numéro vert permettrait de répondre aux interrogations et aux demandes de
conseil émanant des adolescents ou des adultes en matière de sexualité sans
présenter le côte formel et institutionnel des cours d'éducation sexuelle
dispensés dans le cadre scolaire.
Il s'agit, selon nous, d'un moyen supplémentaire d'élargir la source
d'information relative à la sexualité, en mettant à la disposition du public un
service très facilement accessible.
Il faut d'ailleurs rappeler que, dans d'autres domaines, - je pense, en
particulier, à la maltraitance des enfants - la création de numéros verts a
fait la preuve de son efficacité en permettant de libérer la parole. Nous
pensons qu'il peut en être de même pour les questions de sexualité.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Je croyais beaucoup à la nécessité d'une plate-forme
téléphonique nationale, dont la mise en place avait été au coeur de la campagne
de l'année 2000. Or, à ma grande surprise, nous n'avons enregistré que 10 000
appels, alors que nous nous étions équipés pour un nombre beaucoup plus
important.
Prenant acte de cet état de fait, nous avons réfléchi à une autre démarche.
Nous avons pensé qu'il valait mieux régionaliser ces plates-formes
téléphoniques, de façon que, à travers les réseaux « jeunes », les réseaux «
droits des femmes », les réseaux « santé », nous puissions mieux atteindre le
citoyen, la citoyenne, le jeune. En juillet 2000, nous avons donc fermé la
plate-forme nationale et créé les plates-formes régionales.
Mon budget ne permettait pas de faire face au coût de l'ensemble de ces
plates-formes. Aussi, ce sont maintenant les directions régionales des affaires
sanitaires et sociales, les DRASS, qui ont pris la relève.
Je voulais apporter ce témoignage et assurer le Sénat de l'efficacité de la
continuation de leur mise en place. Elisabeth Guigou, avec qui je m'en suis
entretenue voilà quelques jours, est tout à fait favorable à cette
décentralisation et elle a donc décidé de rendre ces dispositions pérennes.
Voilà pourquoi je demande aux auteurs de l'amendement de bien vouloir le
retirer.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
Depuis quand fonctionnent ces plates-formes
régionales ?
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Depuis juillet 2000.
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président.
L'amendement n° 69 est-il maintenu, madame Bidard-Reydet ?
Mme Danielle Bidard-Reydet.
J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'argumentation de Mme le secrétaire
d'Etat en faveur de la mise en place des plates-formes régionales. Nous, nous
préférerions que l'on descende jusqu'à l'échelon départemental, mais, puisque
nous constatons que nous sommes sur la bonne voie, nous retirons
l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 69 est retiré.
Article 17
M. le président.
« Art. 17. - L'article L. 5134-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé
:
«
Art. L. 5134-1
. - I. - Le consentement des titulaires de l'autorité
parentale ou, le cas échéant, du représentant légal n'est pas requis pour la
prescription, la délivrance ou l'administration de contraceptifs aux personnes
mineures.
« II. - Les contraceptifs intra-utérins ne peuvent être délivrés que sur
prescription médicale et uniquement en pharmacie ou dans les centres de
planification ou d'éducation familiale mentionnés à l'article L. 2311-4. Les
sages-femmes sont habilitées à prescrire les diaphragmes, les capes, ainsi que
les contraceptifs locaux. La première pose du diaphragme ou de la cape doit
être faite par un médecin ou une sage-femme.
« L'insertion des contraceptifs intra-utérins ne peut être pratiquée que par
un médecin. Elle est faite, soit au lieu d'exercice du médecin, soit dans un
établissement de santé ou dans un centre de soins agréé. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 19, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose :
A. - De rédiger comme suit le premier alinéa de cet article :
« « I. - Avant le premier alinéa de l'article 5134-1 du code de la santé
publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : ».
B. - En conséquence, de supprimer les troisième et quatrième alinéas de cet
article.
C. - De compléter cet article par un II et un III ainsi rédigés :
« II. - La première phrase du quatrième alinéa du même article est
supprimée.
« III. - Dans l'article 2 de la loi n° 2000-1209 du 13 décembre 2000 relative
à la contraception d'urgence, le mot : "cinquième" est remplacé par le mot :
"dernier". »
Par amendement n° 70, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - De compléter le I du texte présenté par l'article 17 pour l'article L.
5134-1 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette délivrance s'effectue à titre gratuit dans les pharmacies selon des
modalités fixées par décret. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de
compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« Les pertes de recettes résultant de la délivrance à titre gratuit de
contraceptif aux personnes mineures sont compensées à due concurrence par la
création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A
du code général des impôts. »
C. - En conséquence, de faire précéder cet article de la mention : « I. -
».
Les deux amendements suivants sont présentés par le Gouvernement.
L'amendement n° 37 rectifié vise, dans la première phase du premier alinéa du
II du texte proposé par l'article 17 pour l'article L. 5134-1 du code de la
santé publique, après les mots : « intra-utérins » à insérer les mots : « ainsi
que les diaphragmes et les capes ».
L'amendement n° 36 tend :
A. - A compléter le texte proposé par l'article 17 pour l'article L. 5134-1 du
code de la santé publique par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - La délivrance aux mineures des médicaments ayant pour but la
contraception d'urgence et qui ne sont pas soumis à prescription médicale
obligatoire s'effectue à titre gratuit dans les pharmacies selon des conditions
définies par décret.
« Dans les établissements d'enseignement du second degré, si un médecin ou un
centre de planification ou d'éducation familiale n'est pas immédiatement
accessible, les infirmières peuvent, à titre exceptionnel et en application
d'un protocole national déterminé par décret, dans les cas d'urgence et de
détresse caractérisée, administrer aux élèves mineures et majeures une
contraception d'urgence. Elles s'assurent de l'accompagnement psychologique de
l'élève et veillent à la mise en oeuvre d'un suivi médical. »
B. - En conséquence, de compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé
:
« II. - Dans l'article 2 de la loi n° 2000-1209 du 13 décembre 2000 relative à
la contraception d'urgence, les mots : "du cinquième alinéa" sont remplacés par
les mots : "des dispositions". »
C. - En conséquence, de faire précéder cet article de la mention : « I. -
».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 19.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'article 17 tend à supprimer, d'une part, le consentement
parental pour la prescription, la délivrance ou l'administration de
contraceptifs aux mineures et, d'autre part, l'obligation de prescription
médicale pour les contraceptifs hormonaux.
Favorable à tout ce qui peut développer la contraception, qui est le meilleur
garant de la diminution des IVG, la commission s'oppose pourtant à cette
disposition, en particulier en ce qui concerne la première prescription.
En effet, une information sur la contraception mieux développée, mieux
comprise et mieux acceptée permettrait de diminuer sensiblement le nombre des
IVG. Or, la diffusion d'une contraception bien comprise suppose un
accompagnement médical. Comme l'a souligné l'Académie nationale de médecine : «
A condition d'être l'objet d'un suivi médical, la contraception ne comporte que
de très faibles risques pour la santé. »
L'obligation de prescription permet un bilan et un suivi médical de la femme
et un dépistage précoce de certaines pathologies. Le dialogue entre le médecin
et la femme est indispensable pour assurer une bonne compréhension et un bon
usage d'une contraception efficace ; il assure en outre le choix d'une
contraception adaptée à la situation de chaque femme.
Au regard des impératifs de santé publique et quand bien même apparaîtraient
des contraceptifs hormonaux sans danger pour la santé, il paraît nécessaire à
votre commission de maintenir l'obligation de prescription médicale pour ces
contraceptifs.
Je vous propose par conséquent d'adopter un amendement maintenant cette
obligation et rétablissant, sous réserve des coordinations nécessaires, le
texte de la loi du 13 décembre 2000 sur la contraception d'urgence, que le
présent article abroge sans doute involontairement.
M. le président.
La parole est à Mme Terrade, pour présenter l'amendement n° 70.
Mme Odette Terrade.
Nous sommes tous conscients de la nécessité de faciliter l'accès des mineures
à la contraception.
L'absence de celle-ci conduit encore à de trop nombreuses interruptions de
grossesse, qui ne sont, bien entendu, pas la façon idéale de débuter une vie
d'adulte.
Dans cette assemblée, nous avons voté, à l'automne dernier, un amendement
prévoyant la délivrance à titre gratuit de la contraception d'urgence dans les
pharmacies.
La plupart d'entre nous ont approuvé, quelles que soient leurs orientations
politiques, cette mesure allant dans le sens d'un accès plus large des jeunes
filles à la contraception.
De la même façon, nous pensons que la contraception régulière doit pouvoir
être accessible dans les mêmes conditions.
Il serait en effet assez paradoxal que les produits contraceptifs utilisés
dans le cadre d'une contraception régulière soient moins accessibles, notamment
d'un point de vue financier, que la contraception d'urgence.
Notre amendement va dans le sens d'une meilleure diffusion de la
contraception.
Cette mesure préventive permettrait d'éviter, dans certains cas, le recours à
l'interruption volontaire de grossesse, notamment chez les mineures. Aussi, je
vous demande, mes chers collègues, de lui réserver un accueil favorable et de
le voter.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, pour présenter les amendements n°s 37 rectifié
et 36.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
L'amendement n° 37 rectifié a pour objet d'insérer,
après les mots : « intra-utérins », les mots : « ainsi que les diaphragmes et
les capes ».
Les diaphragmes et les capes ne sont ni des contraceptifs intra-utérins,
soumis à prescription médicale obligatoire et dont la délivrance est réservée
aux pharmaciese et aux centres de planification ou d'éducation familiale en
vertu du texte initial adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, ni
des médicaments, auxquels s'appliquent les règles de droit commun des
substances vénéneuses en matière de prescription médicale et du monopole
pharmaceutique en matière de délivrance.
Cet amendement vise à imposer la délivrance sur prescription médicale et en
pharmacie ou dans les centres de planification ou d'éducation familiale des
diaphragmes et capes, ces dispositifs médicaux contraceptifs ne devant être
utilisés que dans des cas particuliers nécessitant l'intervention du
prescripteur et le conseil du pharmacien.
Cela veut donc dire tout simplement qu'il faut vendre et mettre à la
disposition du public ces diaphragmes et ces capes.
Par ailleurs, l'objectif de l'article 17 du projet de loi, dans sa rédaction
proposée par le Gouvernement et adoptée en première lecture par l'Assemblée
nationale, est de faciliter l'accès à la contraception et de clarifier les
règles relatives aux conditions de prescription et de délivrance de l'ensemble
des contraceptifs, et pas seulement des contraceptifs d'urgence, en tenant
compte du droit commun applicable aux médicaments en la matière. Une nouvelle
rédaction de l'article L. 5134-1 du code de la santé publique est prévue à
cette fin.
L'amendement n° 36 a donc pour objet de réinsérer, à la fin de cet article L.
5134-1 nouveau, les dispositions issues de l'article 1er de la loi du 13
décembre 2000 relative à la contraception d'urgence concernant, d'une part, la
gratuité de la délivrance aux mineures des médicaments ayant pour but la
contraception d'urgence et non soumis à prescription médicale obligatoire et,
d'autre part, l'administration de ces médicaments aux élèves par les
infirmières en milieu scolaire. Ces principes ne sont, en effet, pas repris
dans le texte présenté ici. La publication de la loi relative à la
contraception d'urgence ayant été postérieure à l'examen du présent projet de
loi en première lecture à l'Assemblée nationale, la question de la mise en
cohérence des deux textes n'avait pas pu être abordée à ce stade.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 70, 37 rectifié et 36
?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Pour l'amendement n° 70, la commission souhaite entendre
l'avis du Gouvernement.
Quant aux amendements n°s 37 rectifié et 36, ils seraient satisfaits par
l'adoption de l'amendement de la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 19 et 70 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je ne comprends pas l'enjeu de l'amendement n° 19, qui
vise à rétablir une prescription qui n'a jamais été supprimée. Vous imaginez ma
perplexité !
Tout médicament est soumis à une autorisation de mise sur le marché et aux
règles fixées par l'Agence du médicament, que votre serviteur a eu l'honneur de
créer.
Quand un contraceptif contient de la progestérone, il faut une ordonnance. Je
suppose donc que vous faites cette proposition dans l'hypothèse d'une évolution
future. Je m'en remets donc à la sagesse du Sénat.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Pour le NorLévo, on a été obligé de changer la loi
!
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Certes, mais, en l'occurrence, dans le doute, cela ne
me semble pas nécessaire, et je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est désormais l'avis de la commission sur l'amendement n° 70 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Défavorable.
M. Jean Delaneau,
président de la commission.
La commission suit le Gouvernement !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, les amendements n°s 70, 37 rectifié et 36 n'ont plus
d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17, ainsi modifié.
(L'article 17 est adopté.)
Article additionnel après l'article 17 ou après l'article 20
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 28, M. Neuwirth propose d'insérer, après l'article 17, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement présentera chaque année au Parlement, pendant trois ans, un
rapport sur le bilan des actions d'information concernant la contraception et
sur l'évolution des structures nécessaires à l'accueil des femmes demandant une
interruption volontaire de grossesse. »
Par amendement n° 54, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 20, un article
additionnel ainsi rédigé :
« Tous les trois ans, à compter de la promulgation de la présente loi, un
bilan d'évaluation de son application sera présenté au Parlement. »
L'amendement n° 28 est-il soutenu ?...
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission reprend l'amendement n° 28, auquel elle avait
donné un avis favorable.
Toutefois, elle souhaiterait le modifier.
M. Neuwirth l'avait ainsi rédigé : « Le Gouvernement présentera chaque année
au Parlement pendant trois ans,... ». La commission pense qu'il vaut mieux
écrire : « tous les trois ans ».
Je suis donc saisi d'un amendement n° 28 rectifié présenté par M. Francis
Giraud, au nom de la commission, et tendant à insérer, après l'article 17, un
article additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement présentera tous les trois ans au Parlement, un rapport sur
le bilan des actions d'information concernant la contraception et sur
l'évolution des structures nécessaires à l'accueil des femmes demandant une
interruption volontaire de grossesse. »
La parole est à Mme Campion, pour défendre l'amendement n° 54.
Mme Claire-Lise Campion.
Je demande à la Haute Assemblée d'adopter cet amendement n° 54, qui est rédigé
de façon tout aussi complète.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 54 et 28 rectifié.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Personnellement, je préfère le texte de l'amendement n°
54 à celui de l'amendement n° 28 rectifié. Le Gouvernement est donc favorable
au premier et défavorable au second.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
C'est donc l'avis inverse de celui de la commission.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 17, et l'amendement n° 54 n'a plus d'objet.
Article 18
M. le président.
« Art. 18. - L'article L. 5434-2 du même code est ainsi rédigé :
«
Art. L. 5434-2
. - Le fait de délivrer des contraceptifs mentionnés à
l'article L. 5134-1 en infraction aux dispositions du premier alinéa du II
dudit article et du 1° de l'article L. 5134-3 est puni de six mois
d'emprisonnement et de 50 000 francs d'amende. »
Par amendement n° 20, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination avec le
rétablissement de l'obligation de prescription médicale pour les contraceptifs
hormonaux.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement entend maintenir un article de
caractère répressif concernant les infractions aux conditions de délivrance des
contraceptifs intra-utérins, qui sont des dispositifs médicaux et qui ne
relèvent pas du droit commun du médicament, ainsi que je l'ai dit tout à
l'heure. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement de
suppression.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 18 est supprimé.
Article 19
M. le président.
« Art. 19. - Le titre II du livre Ier de la deuxième partie du même code est
complété par un chapitre III ainsi rédigé :
« Chapitre III
« Stérilisation à visée contraceptive
«
Art. L. 2123-1
. - La ligature des trompes ou des canaux déférents ne
peut être pratiquée que si la personne intéressée a exprimé une volonté libre,
motivée et délibérée en considération d'une information claire et complète sur
ses conséquences.
« Cet acte chirurgical ne peut être pratiqué que dans un établissement de
santé et après une consultation auprès d'un médecin.
« Ce médecin doit au cours de la première consultation :
« - informer la personne des risques médicaux qu'elle encourt et des
conséquences de l'intervention ;
« - lui remettre un dossier d'information écrit.
« Il ne peut être procédé à l'intervention qu'à l'issue d'un délai de
réflexion de deux mois après la première consultation médicale et après une
confirmation écrite par la personne concernée de sa volonté de subir une
intervention.
« Un médecin n'est jamais tenu de pratiquer cet acte à visée contraceptive
mais il doit informer l'intéressé de son refus dès la première consultation.
»
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 77, M. Seillier propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 21, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit le texte présenté par l'article 19 pour l'article L. 2123-1
du code de la santé publique :
«
Art. L. 2123-1. -
La ligature des trompes ou des canaux déférents à
visée contraceptive ne peut être pratiquée que sur une personne âgée de trente
ans au moins ou lorsqu'il existe une contre-indication médicale absolue aux
méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre
efficacement.
« Elle ne peut être pratiquée que sur une personne majeure, ayant exprimé sa
volonté libre et délibérée en considération d'une information claire et
complète sur les conséquences et les risques de cette intervention et sur le
caractère généralement définitif de celle-ci.
« Cet acte chirurgical ne peut être pratiqué que dans un établissement de
santé et après une consultation auprès d'un médecin.
« Ce médecin doit au cours de la première consultation :
« - informer la personne des risques médicaux qu'elle encourt, des
conséquences et des risques de l'intervention et du caractère généralement
définitif de celle-ci ;
« - lui remettre un dossier d'information écrit.
« Il ne peut être procédé à l'intervention qu'à l'issue d'un délai de
réflexion de deux mois après la première consultation médicale et après une
confirmation écrite par la personne concernée de sa volonté de subir une
intervention. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 78, présenté par M.
Seillier et tendant à rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par
l'amendement n° 21 pour l'article L. 2123-1 du code de la santé publique :
« La ligature des trompes ou des canaux déférents à visée contraceptive ne
peut être pratiquée que sur une personne âgée de trente-cinq ans au moins, ou à
un âge tel que le produit de cet âge par le nombre d'enfants mis au monde donne
un résultat supérieur à cent, ou lorsqu'il existe une contre-indication
médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de
les mettre en oeuvre efficacement. »
Les deux amendements suivants sont présentés par Mmes Campion, Dieulangard et
les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 52 rectifié vise, dans le deuxième alinéa du texte présenté
par l'article 19 pour l'article L. 2123-1 du code de la santé publique, après
les mots : "ne peut être pratiqué que", à insérer les mots : "sur une personne
majeure et". »
L'amendement n° 53 tend, dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par
l'article 19 pour l'article L. 2123-1 du code de la santé publique, à remplacer
les mots : "deux mois" par les mots : "quatre mois". »
Par amendement n° 71, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - De compléter le texte présenté par l'article 19 pour l'article L. 2123-1
du code de santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« L'intégralité des dépenses liées à cet acte est prise en charge par l'Etat
».
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de
compléter l'article 19 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de la prise en charge par l'Etat de
la stérilisation à visée contraceptive sont compensées à due concurrence par la
création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A
du code général des impôts. »
C. - En conséquence, de faire précéder l'article 19 de la mention : « I. -
».
La parole est à M. Seillier, pour défendre l'amendement n° 77.
M. Bernard Seillier.
Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 19, non pas que ce texte ne
mérite pas d'être considéré avec attention, ou qu'il ne puisse pas être mis au
point ultérieurement, mais parce que, je l'ai dit lors du débat sur la
contraception d'urgence lorsque j'ai évoqué la situation de la France, la
perspective de légiférer pour légaliser la stérilisation ne semble pas à
l'ordre du jour, et, en fin d'année, M. le ministre ne m'a pas démenti.
Pourtant, l'Assemblée nationale, sous la forme d'un amendement, a introduit
dans le texte une disposition légalisant la stérilisation à visée
contraceptive, cela, à mon avis, de manière précipitée, sans qu'aucune étude
complète n'ait été faite sur la situation.
Tous les pays qui se sont déjà engagés dans cette voie, et parfois depuis
longtemps, ont constaté des conséquences importantes sur leur situation
démographique et sur leur taux de fécondité. Nous avons donc besoin, avant de
légiférer dans ce domaine, d'une étude complète sur l'expérience de ces pays.
Une telle étude n'a pas pu nous être fournie à l'occasion du présent travail
législatif. C'est pourquoi je propose de supprimer l'article 19 dans
l'immédiat.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 21.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission reconnaît la nécessité de donner un cadre légal
à la pratique de la stérilisation à visée contraceptive, qui est aujourd'hui
largement pratiquée dans notre pays. On enregistre ainsi chaque année en France
entre 25 000 et 30 000 actes de stérilisation volontaire à but contraceptif
concernant essentiellement des femmes.
Toutefois, si la stérilisation a naturellement une fonction de contraception,
elle ne saurait être présentée comme un moyen de contraception équivalent, par
exemple, à une pilule contraceptive ou à un stérilet. Elles s'en différencie en
effet par son caractère difficilement réversible.
La commission souhaite par conséquent que cette possibilité soit encadrée et
que le cheminement soit le plus accompagné possible, pour que cette décision
lourde soit mûrement réfléchie. Il convient en effet de protéger la santé des
personnes et d'éviter que des excès ne puissent être commis, car il serait
dommageable que la loi autorise, par exemple, une stérilisation sur une femme
âgée de vingt-cinq ans, sans descendance et ne présentant pas de
contre-indication à la contraception.
L'amendement n° 21 de la commission n'autorise la stérilisation à visée
contraceptive que dans deux cas : si la personne est âgée de trente ans au
moins, ou s'il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de
contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre efficacement.
Cette mention vise simplement à protéger les plus jeunes d'une décision qu'ils
pourraient ultérieurement regretter.
M. Jacques Machet.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Seillier, pour présenter le sous-amendement n° 78.
M. Bernard Seillier.
Il s'agit, on l'aura compris, d'un texte de repli par rapport à l'amendement
de suppression n° 77, que j'ai exposé voilà un instant.
Présenté sous la forme d'un sous-amendement à l'amendement de le commission,
il prévoit de porter à trente-cinq ans l'âge minimal pour pouvoir demander une
stérilisation, en se référant à la règle dite des « cents » qui est en usage
dans certains pays et qui consiste à multiplier l'âge par le nombre d'enfants :
dès lors que le produit dépasse cent, la stérilisation est permise. C'est le
cas pour une personne de trente-cinq ans ayant trois enfants.
Compte tenu du fait que la stérilisation a une incidence très significative
sur le taux de fécondité dans tous les pays qui l'ont introduite, les
responsables d'un pays ne peuvent pas, je crois, autoriser la stérilisation,
qui peut légitimement correspondre à un désir individuel, sans apprécier à
l'avance la portée et les conséquences de la décision qu'ils seront amenés à
prendre.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard, pour défendre l'amendement n° 52 rectifié.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Cet amendement d'ordre rédactionnel consiste à transférer à l'article 19
l'interdiction de la sérilisation des mineurs qui avait été posée à l'article
20. Il nous semble en effet plus logique de faire figurer cette interdiction
directement dans le texte qui régit la stérilisation volontaire à visée
contraceptive.
M. le président.
La parole est à Mme Campion, pour défendre l'amendement n° 53.
Mme Claire-Lise Campion.
La légalisation de la stérilisation volontaire à visée contraceptive est une
demande des femmes, mais aussi des hommes, qui était fort attendue par le corps
médical. Voici la chose enfin encadrée et l'on peut s'en féliciter.
Cet amendement est bien modeste, mais nous le pensons important. Il s'agit
d'allonger de deux mois le délai de réflexion prévu avant la prise de décision,
qui a des conséquences définitives ou, du moins, peu réversibles.
Il est important que le délai soit suffisant, certaines situations vécues par
une personne dans une période difficile de sa vie pouvant engendrer des
décisions en rapport avec un moment donné, mais pas forcément confirmées par la
suite.
Voilà pourquoi un délai de quatre mois nous semblerait tout à fait raisonnable
et opportun, et c'est la raison pour laquelle nous vous demandons d'adopter cet
amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Terrade, pour défendre l'amendement n° 71.
Mme Odette Terrade.
Nous approuvons sans réserve l'esprit de cet article qui donne à la
stérilisation volontaire à visée contraceptive le cadre légal qui lui faisait
défaut jusqu'à aujourd'hui.
La stérilisation peut constituer un substitut efficace à des méthodes
contraceptives plus classiques dans le cas où celles-ci sont contre-indiquées
ou mal supportées.
La procédure mise en place nous paraît claire et bien encadrée sur le plan
juridique.
Afin que cette technique ne soit soumise à aucune discrimination financière,
nous pensons qu'il conviendrait que son coût soit pris en charge par la
sécurité sociale. Ainsi, elle ne serait pas réservée aux personnes les plus
aisées.
L'amendement que nous vous demandons de voter s'inscrit donc dans cette
logique et, plus généralement, dans une volonté de voir pris en charge
l'ensemble des méthodes contraceptives. Cela constituerait une avancée
importante et témoignerait d'une politique ambitieuse en matière de santé
publique.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 77, 52 rectifié, 71
et sur le sous-amendement n° 78 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission est favorable au sous-amendement n° 78, mais
elle demande en revanche à M. Seillier de bien vouloir retirer l'amendement n°
77.
M. Bernard Seillier.
Dès lors que le sous-amendement n° 78 bénéficie d'un avis favorable, je retire
l'amendement n° 77.
M. le président.
L'amendement n° 77 est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
L'amendement n° 52 rectifié sera satisfait par l'amendement
n° 21 de la commission.
La commission est favorable à l'amendement n° 53, sous réserve qu'il soit
transformé en sous-amendement à l'amendement n° 21. Enfin, sur l'amendement n°
71, la commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Madame Campion, acceptez-vous de transformer l'amendement n° 53 en
sous-amendement, comme vous le demande la commission ?
Mme Claire-Lise Campion.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 53 rectifié, présenté par Mmes
Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés, et
tendant, dans le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 21 de la
commission pour l'article L. 2123-1 du code de la santé publique, à remplacer
les mots : « deux mois », par les mots : « quatre mois ».
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 21, sur les
sous-amendements n°s 78 et 53 rectifié, et sur les amendements n°s 52 rectifié
et 71 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n°
71, car la ligature des trompes est un acte chirurgical qui doit, comme tous
les actes chirurgicaux, être remboursé. Nous ne pouvons pas, pour des raisons
que vous imaginez - notamment l'extension à d'autres interventions -, commencer
à faire des différences, même si cette intervention-là est importante dans le
débat qui nous occupe. Cet acte sera donc remboursé.
S'agissant de l'amendement n° 21, le dispositif mis en place en matière
d'accès à la stérilisation à visée contraceptive respecte l'esprit du projet de
loi au sein duquel l'Assemblée nationale a souhaité l'inscrire. Il prend place
parmi les dispositions destinées à rendre la loi cohérente avec l'évolution de
la société et le droit des personnes à maîtriser leur fécondité. La position
retenue par les députés affirme que les personnes ont le droit de prendre des
décisions relatives à leur capacité de procréer, et que ce droit ne contrevient
pas au principe d'inviolabilité du corps lorsqu'il s'exerce dans des conditions
garantissant une prise de décision libre et éclairée.
Les conditions d'accès à la stérilisation comme méthode contraceptive fixées
par l'article 19 du projet de loi permettent d'assurer le respect d'un choix
conscient et assumé en matière de maîtrise de la fécondité.
Des garanties sont apportées par le texte pour l'expression d'une volonté
libre, motivée et délibérée, en considération d'une information claire et
complète sur ses conséquences, notamment le respect d'un délai de réflexion.
Par ailleurs, la possibilité légalement reconnue pour un sujet de demander sa
stérilisation pour un motif uniquement contraceptif peut mettre en difficulté
des praticiens qui, pour des raisons de conscience, estiment devoir ne pas
intervenir. Le texte législatif prévoit donc une clause de conscience assortie
d'une obligation d'adresser le patient à un autre praticien.
La rédaction de l'article met la législation française en harmonie avec celle
de la plupart des pays européens qui ont mis en oeuvre la résolution du comité
des ministres du Conseil de l'Europe, en date, du 14 novembre 1975, qui a été
votée par la France et qui recommande de rendre la stérilisation chirurgicale
accessible en tant que service médical.
Toutefois, afin que cette décision qui est lourde, car quasi irréversible,
sauf dans certains cas, et généralement non urgente, comporte des garanties
renforcées d'être mûrement réfléchie, le Gouvernement est favorable à
l'allongement du délai de réflexion nécessaire préalable à l'intervention aux
quatre mois que vous avez présentés et à ce que l'interdiction pour les
mineures figure dans cet article.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 21.
Je suis défavorable, pour les même raisons, au sous-amendement n° 78.
S'agissant de l'amendement n° 52 rectifié, je suis favorable à la
rectification proposée.
Je suis également favorable au sous-amendement n° 53 rectifié, qui tend à
prolonger de deux à quatre mois le délai de réflexion préalable. Enfin, je suis
défavorable à l'amendement n° 71.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, quel est donc l'avis de la commission sur l'amendement
n° 71 ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 78.
M. Bernard Seillier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier.
J'attire l'attention de mes collègues sur le fait que tous les pays qui sont
entrés - et je ne pense pas que la France évitera de le faire - dans ce que
certains auteurs ont appelé la « deuxième révolution contraceptive » ont vu
tombé leur taux de fécondité, comme le Québec, oùil est descendu à 1,4. Il faut
mesurer l'incidence de cette affaire.
C'est pourquoi, j'ai proposé et je voterai ce sous-amendement, qui a une
incidence démographique assez substantielle.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 78, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 53 rectifié, accepté par la commission
et par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 21, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, les amendements n°s 52 rectifié et 71 n'ont plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 19, modifié.
(L'article 19 est adopté.)
Article 20
M. le président.
« Art. 20. - Après l'article L. 2123-1 du même code, il est inséré un article
L. 2123-2 ainsi rédigé :
«
Art. L. 2123-2
. - La ligature des trompes ou des canaux déférents à
visée contraceptive ne peut être pratiquée sur une personne mineure. Elle ne
peut être pratiquée sur une personne handicapée mentale, majeure sous tutelle,
que lorsqu'il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de
contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre
efficacement.
« Si la personne concernée est apte à exprimer sa volonté et à participer à la
décision, son consentement doit être systématiquement recherché et pris en
compte après que lui a été donnée une information adaptée à son degré de
compréhension.
« L'intervention est subordonnée à une décision du juge des tutelles qui se
prononce après avoir entendu les parents ou le représentant légal de la
personne concernée ainsi que toute personne dont l'audition lui paraît utile et
après avoir recueilli l'avis d'un comité d'experts.
« Ce comité, composé notamment de personnes qualifiées sur le plan médical et
de représentants d'associations de handicapés, apprécie la justification
médicale de l'intervention, ses risques ainsi que les conséquences normalement
prévisibles sur les plans physique et psychologique.
« Un décret en Conseil d'Etat définit les conditions d'application du présent
article. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 74 est présenté par Mmes Campion, Dieulangard et les membres
du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 79 est déposé par M. Seillier.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 22, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour l'article L. 2123-2
du code de la santé publique :
«
Art. L. 2123-2.
- La ligature des trompes ou des canaux déférents à
visée contraceptive ne peut être pratiquée sur une personne majeure sous
tutelle que lorsqu'il existe une contre-indication médicale absolue aux
méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre
efficacement.
« Elle ne peut être pratiquée qu'à la demande des parents ou du représentant
légal de la personne concernée.
« Si la personne concernée est apte à exprimer sa volonté, son consentement
doit être systématiquement recherché. Il ne peut être passé outre à son refus
ou à la révocation de son consentement.
« L'intervention est subordonnée à une décision du juge des tutelles, qui se
prononce après avoir entendu les parents ou le représentant légal de la
personne concernée ainsi que toute personne dont l'audition lui paraît utile,
et après avoir recueilli l'avis d'un comité d'experts.
« Ce comité, composé notamment de personnes qualifiées sur le plan médical et
de représentants d'associations de personnes handicapées, apprécie la
justification médicale de l'intervention, ses risques ainsi que ses
conséquences normalement prévisibles sur les plans physique et
psychologique.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent
article. »
La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 74.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
L'article 20, qui traite d'un sujet particulièrement délicat, a été introduit
dans le texte par l'Assemblée nationale. Il soulève un vrai problème, mais
apporte-t-il de bonnes réponses ? Je le crois, au moins particulièrement, car
il tend à laisser la personne handicapée mentale dans le droit commun et il
légifère sur l'entourage de celle-ci. Il faut en effet veiller aux intérêts de
la personne handicapée mentale. Des améliorations peuvent toujours être
apportées.
En tout cas, ce texte soulève beaucoup d'inquiétudes. Il est primordial de
permettre à toutes celles et à tous ceux qu'il interpelle de se saisir des
termes du débat qu'il pose. Ce débat doit être public et le plus large
possible.
L'immense mérite de l'article 20 est d'ouvrir ce débat, mais il serait dommage
qu'il le referme aussitôt. C'est pourquoi nous souhaitons surseoir à son
examen, notamment parce que d'autres questions apparaissent en filigrane, comme
celle des moyens matériels et juridiques que la société est capable de fournir
à l'entourage de la personne, au sens le plus large du terme, afin que soit
accompagnée la sexualité des personnes handicapées mentales et la potientialité
de la parentalité.
M. le président.
La parole est à M. Seillier, pour présenter l'amendement n° 79.
M. Bernard Seillier.
L'article 20, que je propose de supprimer, encadre la pratique de la
stérilisation à visée contraceptive des personnes incapables majeures.
Il s'agit d'un article additionnel, qui résulte d'un amendement présenté par
le Gouvernement.
Le motif invoqué à l'Assemblée nationale repose sur le fait que des
stérilisations à visée contraceptive sur des personnes handicapées sont déjà
pratiquées aujourd'hui en France sans aucun encadrement ni aucune garantie
éthique. Il a donc été estimé nécessaire de mettre en place un encadrement
permettant de respecter les droits fondamentaux de la personne handicapée.
La commission des affaires sociales du Sénat, compte tenu du fait que cette
pratique existe et se déroule hors de tout cadre légal et réglementaire, a jugé
nécessaire d'élaborer un cadre législatif adapté, qui permette de protéger
efficacement les droits des personnes handicapées concernées. Elle propose,
tout en reprenant la procédure prévue par l'Assemblée nationale, de renforcer
la protection et les garanties dont bénéficient les personnes majeures
incapables.
Cette question demeure toutefois trop grave pour être traitée par la voie d'un
amendement introduit dans un projet de loi de manière précitée et sans qu'elle
ait fait l'objet d'un débat avec les associations représentatives des personnes
handicapées.
La personne handicapée étant un sujet de droit à part entière, elle doit
pouvoir s'exprimer préalablement, soit directement, soit par l'intermédiaire
des associations qui la représentent, sur une question qui met en jeu des
aspects essentiels de son existence. Il est donc indispensable que soit
organisé un débat public préalable à la mise en oeuvre de toute disposition
législative à ce sujet, qui permette de réunir les conditions d'une
confrontation sérieuse autour des enjeux et des risques de dérive qu'elle
engendre.
En effet, la stérilisation à visée contraceptive des personnes incapables
majeures risque de déboucher sur un processus dont on n'a pas exploré la
dynamique propre. Elle peut en effet engendrer dans la société un mouvement
incontrôlé, qui soit à l'opposé de l'objectif recherché. Ce dernier vise à
encadrer des pratiques qui sont rares, mais risque d'aboutir sans le vouloir
expressément à une organisation systématique de la non-fécondité des personnes
handicapées, impossible
a posteriori
à distinguer d'une politique
systématiquement et délibérément eugéniste.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 22.
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Dans ce sujet aussi délicat, il nous a semblé que le débat
public avait été insuffisant et qu'il était difficile de prendre une décision
en l'état.
La commission a fait un travail d'amélioration du texte de l'Assemblée
nationale. Mais, si le Gouvernement acceptait les amendements présentés par Mme
Dieulangard, d'une part, et par M. Seillier, d'autre part, qui visent tous deux
à supprimer l'article, elle retirerait le sien.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 74 et 79 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
En effet, cet article a soulevé l'émotion, et une
discussion s'est instaurée. Je comprends très bien que les avis sur un sujet
aussi délicat soient partagés, et il convient de les présenter avec mesure,
comme c'est le cas ce soir.
Je regrette de ne pouvoir être favorable à l'amendement n° 74, présenté par
Mmes Campion et Dieulangard. Je suis très sensible à leurs préoccupations,
mais, même si le problème de la stérilisation des personnes handicapées
mentales pose des problèmes tant éthiques que juridiques, le Gouvernement pense
que l'article 20 encadre véritablement les conditions dans lesquelles ces
personnes sous tutelle peuvent accéder à la stérilisation à visée contraceptive
; d'ailleurs, la commission a proposé un amendement pour renforcer ces
garanties.
De plus, l'intervention du juge des tutelles qui, seul, peut autoriser cet
acte permet de s'assurer du consentement de la personne ou au contraire de son
refus et de la réalité des conditions d'impossibilité éventuelles.
Cet article, qui reconnaît aux personnes handicapées mentales sous tutelle un
droit à la sexualité, doit s'apprécier au regard de l'amendement déposé par
vous-mêmes, mesdames, auquel le Gouvernement a souscrit et qui traitait de
l'éducation à la sexualité des personnes atteintes de troubles mentaux.
Je sais que le sujet est difficile. Mais, je le répète, j'ai le sentiment - je
ne crois pas me tromper - que l'encadrement envisagé est vraiement très
solide.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, vous avez entendu M. le ministre : que décidez-vous
?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
Monsieur le président, je vais défendre l'amendement n°
22.
L'article 20 traite du douloureux problème de la stérilisation des personnes
handicapées mentales.
A l'évidence, et ce serait une hypocrisie de le nier, cette pratique existe et
se déroule hors de tout cadre légal et réglementaire. C'est la raison pour
laquelle la commission juge nécessaire d'élaborer un cadre législatif adapté
qui permette de protéger efficacement les droits des personnes handicapées
concernées.
Elle vous propose de reprendre la procédure prévue par l'Assemblée nationale
en renforçant cependant la protection et les garanties dont bénéficient les
majeures incapable.
Elle vous propose donc d'adopter un amendement visant : premièrement, à
supprimer la référence à la personne « handicapée mentale », qui ne fait
l'objet d'aucune définition juridique ; deuxièmement, à prévoir que la
stérilisation ne peut être pratiquée qu'à la demande des parents ou du
représentant légal de la personne concernée, le texte adopté par l'Assemblée
nationale ne mentionnant paradoxalement pas qui est à l'origine de la demande
de stérilisation ; troisièmement, à préciser que, si la personne concernée est
apte à exprimer sa volonté, son consentement doit être systématiquement
recherché et qu'il ne peut être passé outre à son refus ou à la révocation de
son consentement.
Cette rédaction vise à offrir aux majeurs sous protection des garanties afin
de s'assurer que leur volonté, s'ils peuvent l'exprimer, soit respectée et que,
à défaut, la décision soit prise en connaissance de cause. Elle est en cela
conforme au principe 22-2 de la recommandation du Conseil de l'Europe du 23
février 1999, qui exige que, lorsque des textes autorisent une intervention
médicale sur un majeur protégé sans bénéfice direct pour celui-ci, une
protection accrue soit prévue pour limiter les risques d'abus et
d'irrégularités.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 22 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je partage avec la commission le souci de renforcer la
protection et les garanties dont doivent bénéficier les majeurs incapables -
pardon pour le mot : « incapable ».
Je me souviens d'avoir pris connaissance avec effroi, dans le rapport que
j'avais demandé moi-même à Mme Strohl, des conditions dans lesquelles les
pratiques de stérilisation se déroulent. Ces conditions ne sont pas acceptables
et je rends hommage aux associations avec lesquelles j'ai beaucoup travaillé
sur ce point.
En tout cas, il me paraît nécessaire de préciser qui peut saisir le juge qui
aura à statuer sur la stérilisation. La limitation aux parents et au
représentant légal de la personne concernée me paraît devoir être retenue.
De même, préciser qu'il ne peut être passé outre au refus ou à la révocation
du consentement exprimé par la personne protégée me semble constituer une
garantie supplémentaire nécessaire.
Ces deux ajouts répondent d'ailleurs également aux préoccupations des
magistrats. L'association des juges d'instance s'est exprimée en ce sens après
le vote du texte par l'Assemblée nationale. Elle a souhaité, au demeurant, que
l'audition de la personne protégée soit explicitement prévue par le texte.
Le Gouvernement est toutefois très réservé quant à la suppression de la notion
de handicap mental. Certes, il ne s'agit pas d'une notion juridique, mais il en
est fait mention dans certains textes de loi, à propos de l'organisation de la
prise en charge des personnes concernées - je pense à la loi de 1975 sur les
institutions médico-sociales - ou lorsqu'il s'agit de définir une incapacité
ouvrant droit aux prestations sociales.
Le Gouvernement attire toutefois votre attention sur le fait que toutes les
personnes majeures placées sous tutelle ne sont pas handicapées mentales et que
toutes les personnes handicapées mentales ne sont pas sous tutelle.
En conséquence, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 74 et 79.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Il doit être bien clair que notre proposition de suppression de l'article 20
ne vise qu'à surseoir à l'examen de cette disposition : elle ne signifie
aucunement que nous ne souhaitons pas voir intervenir une législation sur la
stérilisation des personnes handicapées majeures sous tutelle. Nous pensons
même que cet article 20 prévoit un encadrement intéressant, mais qu'il n'est
pas suffisant.
Il nous semble préférable d'attendre qu'un débat public ait été organisé sur
cette question avant que nous puissions légiférer à son sujet, étant entendu
que vont nous être prochainement proposés des textes qui pourraient tout à fait
accueillir cette législation sur la stérilisation des personnes handicapées
majeures.
M. Bernard Seillier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier.
Ma position est tout à fait parallèle à celle qui vient d'être exposée.
Le sujet est suffisamment grave pour mériter qu'on y réfléchisse de manière
plus approfondie. C'est aussi une question de considération à l'égard des
associations de handicapés et de parents de handicapés. Il est vrai qu'elles ne
sont pas toutes d'accord entre elles. Il reste que nombre d'entre elles n'ont
pas été consultées.
Travaillant actuellement sur d'autres textes à caractère social, notamment le
projet de loi de modernisation sociale, je suis amené à rencontrer des
associations de handicapés ou de parents de handicapés. Plusieurs d'entre elles
m'ont fait part de leur émoi sur cette affaire. C'est pourquoi je pense qu'il
convient de différer l'examen de ce sujet, ce qui nous permettra de procéder à
des consultations complémentaires avant de légiférer.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 74 et 79, repoussés par la
commission et par le Gouvernement.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 22.
M. Bernard Seillier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier.
Le souci d'entendre les parents relève indiscutablement des meilleures
intentions, mais je crains que nous ne soyons une fois de plus amenés à
constater que le mieux est l'ennemi du bien.
D'après ce que l'on peut observer dans les établissements, les parents sont
sans aucun doute ceux qui redoutent le plus la grossesse de leur fille et ils
risquent fort d'être les premiers à demander la stérilisation systématique. La
réalité est ainsi !
C'est pourquoi je pense qu'il faut vraiment réfléchir plus avant, et je ne
peux pas voter cet amendement dans sa forme actuelle.
Mme Odette Terrade.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Nous avons, nous aussi, reçu de nombreux courriers demandant un débat plus
large sur cette question éminemment sensible de la stérilisation à visée
contraceptive des personnes handicapées mentales majeures.
Cela étant, ce texte a le mérite de poser dès aujourd'hui un cadre juridique,
fût-il incomplet et susceptible d'être amélioré. En tout cas, il permet de
combler un vide qui laisse actuellement trop souvent le médecin seul face à
cette lourde responsabilité. Comme nous l'ont dit certains professionnels que
nous avons entendus, ils travaillent en quelque sorte « sans filet ».
C'est pourquoi nous partageons l'avis du Gouvernement.
Nous sommes d'accord sur le fait que cette stérilisation ne puisse être
pratiquée qu'à la demande des parents ou du représentant légal de la personne
concernée et sur le fait que l'on ne puisse passer outre le refus ou la
révocation du consentement de cette dernière.
En revanche, nous sommes réservés quant à l'application de cette mesure aux
personnes majeures sous tutelle. Comme je l'ai déjà dit, l'expression «
handicapé mental » recouvre une très grande diversité d'états. Il nous faudra
veiller à définir de façon plus précise cette notion, afin de rester dans
l'esprit du texte et de ne pas ouvrir la voie à une stérilisation concernant
tous les handicapés.
Nous voterons néanmoins cet amendement, en souhaitant que la rédaction soit
retravaillée, mais en ayant à l'esprit que ce texte a le mérite de poser les
premières bases d'un cadrage juridique.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 20, ainsi modifié.
(L'article 20 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 20
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements présentés par le Gouvernement.
L'amendement n° 38 tend à ajouter, après l'article 20, un article additionnel
ainsi rédigé :
« I. - Les articles 17, 18, 19 et 20 de la présente loi sont applicables dans
la collectivité territoriale de Mayotte.
« II. - A l'article L. 372-1 du code de l'éducation, après la référence : "L.
312-15,", est insérée la référence : "L. 312-16,".
« III. - Le 3° de l'article L. 5511-1 du code de la santé publique est ainsi
rédigé :
« 3° Le titre III, à l'exception du 2° de l'article L. 5134-3. »
« IV. - Les articles L. 5511-12, L. 5511-13 et L. 5514-2 du même code sont
abrogés. L'article L. 5511-14 devient l'article L. 5511-13.
« V. - A l'article L. 5514-1 du même code, les mots : "à l'exception de
l'article L. 5434-2, et" sont supprimés.
« VI. - Il est inséré dans le même code un article L. 5511-12 ainsi rédigé
:
«
Art. L. 5511-12.
- A l'article L. 5134-1, les mots : "mentionnés à
l'article L. 2311-4" ne s'appliquent pas dans la collectivité territoriale de
Mayotte.
« VII. - L'article 1er de la loi n° 2000-1209 du 13 décembre 2000 relative à
la contraception d'urgence est applicable dans la collectivité territoriale de
Mayotte. »
L'amendement n° 39 a pour objet d'ajouter, après l'article 20, un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est inséré au premier alinéa de l'article L. 5521-6 du code de la
santé publique, après les mots : "celles du chapitre II du titre III du livre
Ier", les mots : ", celles du I de l'article L. 5134-1".
« II. - Il est inséré au premier alinéa de l'article L. 5531-1 du code de la
santé publique, après les mots : "du chapitre II du titre III du livre Ier",
les mots : "celles du I de l'article L. 5134-1".
« III. - Il est créé au titre IV du livre V de la partie V du code de la santé
publique un chapitre Ier ainsi rédigé :
« Chapitre Ier. - Produits pharmaceutiques.
«
Art. L. 5541-1.
- Le I de l'article L. 5134-1 est applicable en
Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. »
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
L'amendement n° 38 a pour objet d'étendre les
dispositions des articles 16
bis,
17, 18, 19 et 20 du projet de loi à la
collectivité territoriale de Mayotte.
Quant à l'amendement n° 39, il vise à étendre aux territoires d'outre-mer et à
la Nouvelle-Calédonie les dispositions du I de l'article L. 5134-1 du code de
la santé publique.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud,
rapporteur.
La commission a émis un avis défavorable sur ces deux
amendements.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par la commission.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39, repoussé par la commission.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Machet, pour explication de vote.
M. Jacques Machet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, madame la
secrétaire d'Etat, au terme de cette première lecture, notre Haute Assemblée
peut s'honorer d'avoir adopté des modifications qui conservent l'équilibre et
la logique de la loi Veil de 1975.
Pourtant, il nous faut résoudre un véritable cas de conscience : d'une part,
on ne peut tolérer que l'avortement soit « banalisé » ; d'autre part, il est
impensable de laisser des jeunes filles, qui plus est mineures, en situation de
détresse.
C'est pourquoi, compte tenu de l'enjeu éthique majeur de ce texte, il nous
semble regrettable de devoir l'examiner au lendemain d'une déclaration
d'urgence, quand il eût nécessité une réflexion approfondie.
Par ailleurs, l'expression « IVG et contraception » devrait être inversée
afin de présenter l'IVG comme un échec de la contraception et non comme un
simple moyen d'interrompre sa grossesse.
Aujourd'hui, faute d'une politique d'information efficace et de structures
d'accueil suffisantes, nous sommes au regret de constater que les lois Veil et
Neuwirth n'empêchent pas l'existence de 200 000 avortements par an, dont une
bonne partie, il faut bien l'avouer, ne se fait pas dans une situation de
détresse extrême.
J'ai été, pendant de nombreuses années, personnellement chargé de rapporter
les projets et propositions de loi liés à la famille, cellule de base de notre
société et valeur qui a motivé tout mon parcours politique. C'est dans la
volonté suprême de préserver le statut de la famille que, avec les membres de
l'Union centriste et la commission des affaires sociales, nous avons rectifié
un certain nombre de points.
Premièrement, il est préférable d'améliorer de façon significative les
conditions d'accueil dans les centres d'orthogénie actuels plutôt que de
prolonger le délai d'avortement, car cela ne règle pas le problème des 3 000
femmes qui avortent à l'étranger et qui sont enceintes de plus de douze
semaines.
Deuxièmement, si nous avons accepté l'aménagement de l'autorisation parentale,
c'est uniquement pour remédier aux cas les plus graves, notamment celui des
victimes de viol et d'inceste. Le recours à un adulte référent est inutile pour
les jeunes filles qui peuvent se confier à leur famille, dialoguer avec elle,
sans autre risque que celui d'être aidées ou, au pire, réprimandées. Dans la
majorité de ces cas, le recours à un tiers « court-circuite » le lien de
famille.
Troisièmement, l'entretien préalable doit être maintenu. S'entretenir avec un
médecin, une assistante sociale ou une psychologue est une façon de devenir
responsable de ses actes. Soyons honnêtes : ce n'est pas parler qui est
traumatisant, c'est être enceinte contre son gré.
Quatrièmement, la possibilité d'avorter ne doit pas occulter celle de garder
l'enfant. Ce droit à la vie est menacé lorsqu'on supprime du dossier guide, la
possibilité de poursuivre sa grossesse. Les femmes doivent impérativement
savoir que l'Etat les soutient dans leur démarche, quelle que soit la forme que
celle-ci revêt.
Cinquièmement, enfin, le suivi médical de la contraception semble
indispensable pour la protection de la santé des femmes et pour la prévention
de l'IVG.
A la lumière de ces différentes réflexions, mes collègues du groupe de l'Union
centriste et moi-même allons donc voter le texte amendé par la majorité
sénatoriale.
Je tiens à rendre un hommage tout particulier à notre excellent rapporteur,
Francis Girard, qui a su, avec beaucoup de lucidité, empreinte par moment de
l'espérance si nécessaire à ce débat, proposer à notre Haute Assemblée un texte
susceptible à la fois de préserver les valeurs auxquelles nous sommes attachés
et d'assurer la protection des femmes en détresse.
(Vifs applaudissements
sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion.
A nos yeux, le projet de loi tel qu'il nous a été transmis par l'Assemblée
nationale constitue un texte majeur pour notre société, respectant l'esprit de
la loi Veil et prévoyant une extension du droit des femmes à l'IVG.
C'est un texte très attendu par les femmes et par les associations qui les
représentent, bien sûr, mais aussi par le milieu médical lui-même. D'où notre
regret de constater que la majorité sénatoriale n'a pas entendu ces attentes
fortes et qu'elle a profondément modifié ce texte dans un sens restrictif.
Le seul point d'accord que nous puissions relever concerne l'importance à
accorder à l'éducation à la sexualité.
Nous comptons maintenant sur nos collègues de l'Assemblée nationale pour
rétablir ce texte dans son intégralité.
M. le président.
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, parvenus au terme de nos débats, nous ne pouvons que
constater, avec regret, que l'esprit constructif et novateur du texte issu des
travaux de l'Assemblée nationale a été très largement dénaturé par la majorité
sénatoriale lors de l'examen du projet de loi par la Haute Assemblée.
Nos collègues ont réagi comme si aucun constat social n'avait été dressé,
comme si aucune évolution des mentalités ni aucun progrès médical n'était
intervenu depuis le vote de la loi Veil en 1975. Un quart de siècle plus tard,
les pesanteurs idéologiques sévissent encore.
Nous ne pouvons pas non plus accepter que l'on insinue que l'existence de plus
de 200 000 IVG par an soit l'expression d'un échec de la loi, car celle-ci, il
faut s'en souvenir, a constitué un immense progrès pour la santé publique et
pour les libertés individuelles. Bien entendu, ce n'est pas vraiment une
surprise, puisque, sur tous les points essentiels du texte, la presse avait
relaté avant même la tenue de nos débat le refus de la majorité sénatoriale de
toute amélioration des textes en vigueur.
Ce refus a porté plus particulièrement sur l'allongement du délai légal pour
une IVG, qui avait été porté de dix à douze semaines de grossesse, mais aussi
sur l'aménagement de l'obligation de l'autorisation parentale pour les mineures
demandant une IVG, sur la suppression de l'autorisation parentale pour la
délivrance de la contraception aux mineures, enfin sur la suppression pour les
femmes majeures, du caractère obligatoire, de l'entretien social préalable à
une IVG.
Ainsi, toutes ces avancées ont été combattues par la majorité de la commission
des affaires sociales et par notre assemblée.
Celle-ci, en effet, a préféré élaborer un contre-projet certes cohérent, mais
qui témoigne d'une vision négative de l'évolution du droit des femmes à la
maîtrise de leur fécondité, vision que nous ne partageons pas.
Chaque fois que le projet de loi donnait une plus grande liberté aux femmes et
permettait un plus grand respect de leur choix, la majorité sénatoriale a
répondu par des mesures visant à augmenter les contraintes, voire à dissuader
les femmes de recourir à l'IVG, ou, pis encore, à les culpabiliser.
Les positions de la majorité sénatoriale ne visent qu'à restreindre le libre
arbitre des femmes au profit d'un plus grand pouvoir de décision du milieu
médical et d'une série de contraintes pesant sur leur liberté de décision.
Nos collègues ont eu bien du mal à cacher leurs réticences d'ordre moral à ce
projet de loi, en essayant notamment de s'abriter derrière une prétendue
augmentation des risques médicaux qui découlerait de l'allongement du délai
légal pour l'IVG.
Ce sont deux logiques, deux conceptions radicalement différentes de la
reconnaissance du droit des femmes à maîtriser leur fécondité qui
s'opposent.
Pour notre part, nous avons apporté notre contribution au débat en essayant
d'améliorer le texte sur des points importants tels que le renforcement de
l'éducation et de l'information relatives à la sexualité ou l'exigence d'une
meilleure prise en charge de la contraception par la protection sociale.
Nos amendements allaient dans le sens d'une reconnaissance plus large du droit
des femmes à disposer de leur coprs et à choisir librement le moment de leur
maternité. Ils n'ont malheureusement pas été retenus.
Je ne reviendrai pas sur les divergences qui nous séparent de la majorité
sénatoriale à propos de la nécessaire évolution des lois Neuwirth et Veil.
Il me semble que le Sénat a perdu une bonne occasion de prendre la mesure de
la détresse de trop nombreuses femmes confrontées à une IVG.
Le projet de loi issu des travaux de l'Assemblée nationale présentait de
nombreuses avancées dans la reconnaissance du droit à la contraception et à
l'IVG.
L'avancée sociale introduite par l'allongement de délai légal de deux semaines
représente une prise en compte des difficultés rencontrées par des milliers de
femmes ; M. Kouchner l'a rappelé lors de nos débats quand il a explicité le
sens du mot « progrès ». Cette mesure est nécessaire et permet de répondre
humainement à la détresse de la majorité des 5 000 femmes qui sont, chaque
année, rappelons-le, obligées de se rendre à l'étranger pour une IVG parce que,
pour toute une série de raisons, elles ont dépassé le délai légal en vigueur
dans notre pays.
Le Sénat a refusé de s'inscrire dans cette démarche, préférant, plutôt que
d'opposer des arguments, suspecter le Gouvernement de céder aux pressions
féministes. C'est regrettable.
Je pense en effet qu'il est des moments où, dans l'intérêt des femmes et, plus
largement, dans l'intérêt de la société, il est nécessaire de passer outre les
positions idéologiques qui ont trop largement sous-tendu nombre de propos
entendus sur certaines travées de notre assemblée.
Nous ne pouvons donc pas voter ce texte en l'état, et nous comptons sur nos
collègues députés pour rétablir dans leur intégralité les avancées proposées
par le projet de loi initial, en incorporant les quelques progrès qui ont pu
être obtenus au cours du débat au Sénat. En effet, la commission mixte
paritaire, prévue le 4 avril prochain, ne nous semble pas pouvoir se conclure
par un texte consensuel.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui soulève des
questions délicates et prétend trouver des solutions à des situations humaines
douloureuses.
On ne peut donc que s'insurger contre la déclaration d'urgence faite par le
Gouvernement sur un sujet de société qui aurait nécessité un dialogue riche et
une réflexion nourrie entre les deux assemblées. Cette urgence dont on se sert
beaucoup trop est bien fâcheuse pour l'évolution des débats et leur
approfondissement, surtout sur un tel sujet.
Cette observation faite, je souhaite apporter mon entier soutien au travail
réalisé par notre rapporteur pour amender le texte qui nous est proposé. Il l'a
mené avec l'humanité du médecin et le pragmatisme du sage. Cela a évité
l'impasse dans laquelle nous conduisait le texte adopté par l'Assemblée
nationale.
Pour s'en tenir aux points essentiels, il a parfaitement démontré que
l'allongement du délai légal de l'IVG était une fuite en avant qui ne faisait
que déplacer les frontières de l'échec, échec qui est de plus en plus
douloureux et de plus en plus difficile à assumer au fur et à mesure que le
temps passe et qui, de ce fait, laisse de plus en plus de traces.
Malheureusement, les femmes qui tardent à prendre cette décision douloureuse
risquent d'attendre davantage encore pour le faire, puisque, justement, pour
différentes raisons, elles n'y arrivent pas.
Certes, il est beaucoup plus facile de faire voter un texte par une majorité
toujours soucieuse d'être à l'avant-garde d'une idéologie libertaire
déconnectée des réalités et des contraintes contradictoires de la vie que de
mettre en place concrètement les moyens nécessaires au bon fonctionnement du
service public de l'IVG et d'assurer la politique d'éducation sexuelle et
d'information sur la contraception que nous avons tous réclamée ce soir.
Tous les témoignages concordent pour constater l'insuffisance du nombre de
centres de planification familiale et leur inaccessibilité, pour constater
également la pénurie de médecins, notamment de spécialistes en gynécologie
médicale depuis la disparition de cette formation.
Rien ne sert de voter un nouveau texte si, une fois de plus, les moyens de sa
mise en oeuvre font défaut. C'est bien sûr ce qui nous inquiète.
Le rapporteur observe à juste titre que, au-delà de dix semaines, toute
situation de détresse peut être prise en charge dans le cadre de l'interruption
médicale de grossesse, dont il faudrait sans doute ouvrir davantage les
portes.
Le deuxième point capital réside dans le maintien du caractère obligatoire de
l'entretien social préalable. La relation humaine, non médicale, entre des
conseillers ou des conseillères spécialement formés, un moment d'écoute et de
réflexion, ne peuvent constituer une atteinte à la liberté. La véritable
liberté suppose l'information, alors que la détresse a le plus souvent pour
causes la solitude et l'ignorance.
La solitude n'est pas assez évoquée, alors qu'elle pèse très lourdement dans
les drames, dont elle accentue la douleur. Même si nous disposons d'un moyen
mécanique pour régler le problème, moyen qu'il faut sans doute utiliser dans un
certain nombre de cas, n'oublions pas que, au moins pour certaines personnes,
une telle démarche ne supprime pas la profonde détresse dans laquelle elles se
trouvent.
Ce n'est pas parce que, en quelques endroits, l'entretien a lieu dans de
mauvaises conditions qu'il faut le supprimer. Il vaut mieux accepter le refus
de s'exprimer que manifestent certaines femmes et ne pas laisser s'échapper une
seule chance d'aider à faire un choix et à passer un cap difficile celles qui
en ont le plus besoin ; or, ce sont celles qui le demandent le moins, parce
que, précisément, elles ne savent pas comment faire.
Le troisième point posant un grave problème est celui des conditions dans
lesquelles les mineures peuvent avoir accès à l'IVG.
La dispense d'autorisation parentale est une dérogation lourde de
conséquences. Cependant, la commission en a accepté le principe, puisqu'il
s'avère que cette autorisation est parfois impossible à obtenir.
Dans l'intérêt même des jeunes filles, il est évident que de sérieuses
garanties doivent entourer cette dérogation, notamment le choix et la
responsabilité du « référent ». Comme le rapporteur, j'aurais préféré que ce
soit non pas n'importe qui, mais une personne qualifiée.
Enfin, comme le rapporteur, je déplore que l'Assemblée nationale ait introduit
dans ce texte, par voie d'amendement, un article relatif à la stérilisation à
visée contraceptive. Cet acte, extrêmement grave parce qu'il est irréversible,
méritait un véritable débat, nous en sommes convenus. Il est fâcheux que
celui-ci n'ait pas eu lieu avant. Le cadre légal donné par la commission
constitue un moindre mal. Il permettra de protéger la santé des personnes et
d'éviter que des excès ne puissent être commis.
Aussi, sous le bénéfice de ces quelques observations, après avoir voté les
amendements de la commission, je voterai le texte issu des travaux du Sénat.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste
républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour l'adoption | 215 |
Contre | 102 |
6
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de
constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons
d'adopter.
Il va être procédé immédiatement à la nomination de sept membres titulaires et
de sept membres suppléants de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été
affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean Delaneau, Francis Giraud, Charles Descours, Claude
Huriet, Jean-Louis Lorrain, Mme Claire-Lise Campion et M. Guy Fischer.
Suppléants : MM. Jacques Bimbenet, Paul Blanc, Mme Marie-Madeleine
Dieulangard, MM. Roland Muzeau, Philippe Nogrix, Mmes Nelly Olin et Odette
Terrade.
7
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation
de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement
de la République de Singapour relatif à la coopération de défense et au statut
de leurs forces.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 238, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
8
TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Avant-projet de budget rectificatif et supplémentaire n° 2 au budget 2001,
section II, Conseil.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1652, annexe 2, et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à
l'adaptation des perspectives financières aux conditions d'exécution.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1704 et distribué.
9
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Pierre Fauchon un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur la proposition de résolution (n° 53, 2000-2001)
présentée au nom de la délégation pour l'Union européenne, en application de
l'article 73
bis
du règlement, par M. Hubert Haenel, sur les
propositions de la République fédérale d'Allemagne, d'une part, et du Portugal,
de la France, de la Suède et de la Belgique, d'autre part, relatives à la
création d'Eurojust (n°s E-1479 et E-1509).
Le rapport sera imprimé sous le n° 235 et distribué.
J'ai reçu de M. Philippe Marini un rapport fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence,
portant création d'une prime pour l'emploi (n° 217, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le n° 237 et distribué.
10
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président.
J'ai reçu de M. Philippe Adnot un rapport d'information fait au nom de la
commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de
la nation sur la mission de contrôle qu'il a effectuée à l'Agence de
l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME).
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 236 et distribué.
11
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée à aujourd'hui, jeudi 29 mars 2001 :
A neuf heures quarante-cinq :
1. Discussion des conclusions du rapport (n° 235, 2000-2001) de M. Pierre
Fauchon, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de
législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale
sur la proposition de résolution de M. Hubert Haenel (n° 53, 2000-2001)
présentée au nom de la délégation pour l'Union européenne, en application de
l'article 73
bis
du règlement, sur les propositions de la République
fédérale d'Allemagne, d'une part, et du Portugal, de la France, de la Suède et
de la Belgique, d'autre part, relatives à la création d'Eurojust (E-1479 et
E-1509).
2. Discussion de la question orale européenne avec débat n° QE-12 de M. Pierre
Lefebvre à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur le
doublement du fret ferroviaire d'ici à 2010.
M. Pierre Lefebvre interroge M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement sur l'important objectif que ce dernier a fixé de doubler le fret
ferroviaire d'ici à 2010.
Cet objectif constitue un enjeu crucial de société pour les décennies à
venir.
M. Pierre Lefebvre demande à M. le ministre, pour permettre une évolution
significative des parts de marché entre les différents modes de transport et
pour favoriser ainsi le rééquilibrage entre le rail et la route, si le
Gouvernement envisage un engagement plus fort encore, dans le domaine financier
en particulier.
Cet engagement permettrait de soutenir plus efficacement encore les
entreprises publiques, la SNCF et RFF, qui s'inscrivent dans cet objectif.
Enfin, M. Pierre Lefebvre interroge M. le ministre sur le bilan de sa
présidence européenne du Conseil des ministres des transports et sur les
résultats des négociations dites du « paquet ferroviaire ».
3. Discussion de la question orale européenne avec débat n° QE-10 de M.
Jacques Oudin à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur les objectifs et moyens de la politique de l'Union européenne en matière de
transports.
M. Jacques Oudin interroge M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement sur les objectifs et les moyens de la politique de l'Union
européenne en matière de transports, à partir du triple constat d'une
croissance rapide des besoins, d'une saturation des infrastructures et d'un
retard dans la réalisation des réseaux transeuropéens.
Il lui demande quelles sont les perspectives d'une relance de la
libéralisation et de l'harmonisation dans le secteur des transports, quels sont
les progrès à espérer en matière de sécurité routière et maritime, quel est
l'état de la réflexion communautaire sur la tarification des infrastructures de
transport et sur l'intermodalité et quelles sont les modalités de financement
prévues pour les réseaux transeuropéens de transport.
Il lui demande quels projets français de grandes liaisons routières et
ferroviaires sont inscrits au titre des réseaux transeuropéens de transport et
quelle aide l'Union européenne peut apporter à la France pour les réaliser.
Le débat sur ces deux questions orales européennes s'effectuera selon les
modalités prévues à l'article 83
ter
du règlement.
A quinze heures :
4. Questions d'actualité au Gouvernement.
5. Discussion de la question orale avec débat n° 28 de M. Jacques Valade à M.
le secrétaire d'Etat à l'industrie sur la politique énergétique de la
France.
M. Jacques Valade attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie
sur la nécessité de mener et de développer une politique énergétique cohérente.
En effet, aujourd'hui, du fait de l'accroissement des coûts énergétiques marqué
par la flambée du prix des carburants, du fioul domestique et par la hausse des
tarifs du gaz, la politique énergétique de la France doit permettre aux
entreprises et aux citoyens d'accéder à l'énergie la plus sûre et la plus
compétitive possible.
La politique énergétique de la France reste à définir. Elle doit garantir la
sécurité de l'approvisionnement national, éviter une trop forte dépendance
énergétique de notre pays et respecter les obligations à l'égard de
l'environnement, telles qu'elles ont été définies dans les accords
internationaux à partir de Kyoto.
Dans ce contexte, il lui demande quelle place le Gouvernement envisage
d'accorder aux différents modes de production d'énergie électrique, sans choix
arbitraire ou passionnel, et dans quelle mesure et par quels moyens le
Gouvernement entend oeuvrer pour concilier les objectifs de sûreté et de
compétitivité.
Aucune inscription de parole dans le débat n'est plus recevable.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence,
portant création d'une prime pour l'emploi (n° 217, 2000-2001) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 2 avril 2001, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 2 avril 2001, à seize
heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, d'orientation sur la forêt
(n° 408, 1999-2000) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 2 avril 2001, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 3 avril 2001, à douze
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 29 mars 2001, à zéro heure
quarante-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
MODIFICATIONS AUX LISTES
DES MEMBRES DES GROUPES
GROUPE SOCIALISTE
(74 membres au lieu de 73)
Ajouter le nom de M. Jean-Yves Mano.
SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE
(7 au lieu de 8)
Supprimer le nom de M. Jean-Yves Mano.
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
M. Paul Blanc a été nommé rapporteur du projet de loi n° 214 rectifié
(2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence,
rénovant l'action sociale et médico-sociale.
M. Claude Huriet a été nommé rapporteur de sa proposition de loi n° 221
(2000-2001) relative à l'indemnisation de l'aléa médical et à la responsabilité
médicale.
M. Philippe Marini a été nommé rapporteur de la proposition de loi organique
n° 223 (2000-2001) de M. Jean-Claude Carle limitant le recours aux dispositions
fiscales de portée rétroactive.
M. Alain Lambert a été nommé rapporteur de la proposition de loi organique n°
226 (2000-2001), adoptée par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence
relative aux lois de finances.
DÉLAI LIMITE POUR LE DÉPÔT D'AMENDEMENTS À UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION
EUROPÉENNE
En application de l'article 73
bis,
alinéa 6, du règlement,
la
commission des affaires économiques et du Plan
examinera le
mardi 3
avril 2001,
à
16 h 30,
le rapport de M. Michel Souplet sur la
proposition de résolution n° 84 (2000-2001) de M. Jean Bizet sur la proposition
de règlement du Conseil portant organisation des marchés dans le secteur du
sucre (n° E 1585), ainsi que les éventuels amendements qui seront présentés sur
cette proposition de résolution.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au
lundi 2 avril
2001,
à
12 heures.
Les amendements devront être déposés directement
au secrétariat de la commission.
Il est rappelé que, conformément à l'article 73
bis,
alinéa 6, du
règlement, les amendements dont aucun des auteurs n'appartient à la commission
saisie au fond sont présentés devant celle-ci par leur premier signataire. La
présente publication vaut, à leur égard, convocation à la réunion de la
commission.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Vaccination contre la variole
1046.
- 28 mars 2001. -
M. Martial Taugourdeau
rappelle à
M. le ministre délégué à la santé
qu'en 1980, Madame Simone Veil, ministre de la santé, avait supprimé la
vaccination anti-variolique chez les enfants. Cette décision était intervenue
après plusieurs accidents provoqués par des encéphalites varioliques. On avait
alors jugé que le risque causé par la vaccination était plus grand que le
risque d'être atteint par la maladie. La crise grave créée par l'épizootie de
fièvre aphteuse chez les animaux ne devrait-elle pas nous amener à nous
interroger sur notre attitude face à la variole chez l'homme ? En effet,
certains vétérinaires avaient très tôt prévu, dès 1990, une réapparition de la
fièvre aphteuse, vers 1998-2000, considérant alors qu'il n'y aurait plus
d'animaux vaccinés. La durée de vie d'un animal non vacciné est de cinq à six
ans. Le nombre de sujets non immunisés tend vers zéro assez rapidement et on
arrive au spectacle actuel. De la même manière s'agissant pour l'homme, de la
variole, on peut considérer qu'il y a peu de risques chez les adultes de plus
de vingt-cinq ans qui ont tous été vaccinés. Il lui demande s'il ne pense pas,
en revanche, que d'ici quinze à vingt-cinq ans, s'il existe toujours des foyers
endémiques il existera alors un risque de réapparition de la variole chez
l'homme, maladie qui est malheureusement mortelle dans un cas sur deux ? Par
ailleurs, il avait été indiqué, à l'époque, que quelques centaines de milliers
de doses de vaccins seraient conservées à Genève. Il lui demande de confirmer
que ces stocks existent bien et sont renouvelés.
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 28 mars 2001
SCRUTIN (n° 43)
sur l'article 6 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après
déclaration d'urgence, relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la
contraception (aménagement de l'obligation d'autorisation parentale pour les
mineurs).
Nombre de votants : | 318 |
Nombre de suffrages exprimés : | 314 |
Pour : | 211 |
Contre : | 103 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Contre :
17.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
17.
Contre :
6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard
Delfau, François Fortassin et Jacques Pelletier.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :
Pour :
94, dont M. Gérard Larcher, qui présidait la séance.
Contre :
3. _ MM. Jean Bernard, Emmanuel Hamel et Martial
Taugourdeau.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. Christian Poncelet, président du
Sénat, et Roger Karoutchi.
GROUPE SOCIALISTE (77) :
Contre :
77.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (51) :
Pour :
47.
Abstentions :
4. _ MM. Jean-Guy Branger, Claude Huriet, Marcel Lesbros
et Philippe Richert.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :
Pour :
46.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :
Pour :
7.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Pierre Guichard
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Alain Hethener
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Max Marest
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac
Gérard Larcher, qui présidait la séance
Ont voté contre
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernard
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-MadeleineDieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Jacques Pelletier
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Abstentions
MM. Jean-Guy Branger, Claude Huriet, Marcel Lesbros et Philippe Richert.
N'a pas pris part au vote
M. Roger Karoutchi.
N'a pas pris part au vote
M. Christian Poncelet, président du Sénat.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes
à la liste de scrutin ci-dessus.
SCRUTIN (n° 44)
sur l'ensemble du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après
déclaration d'urgence, relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la
contraception.
Nombre de votants : | 316 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Pour : | 213 |
Contre : | 102 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Contre :
17.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
17.
Contre :
5. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard
Delfau et François Fortassin
Abstention :
1. _ M. Jacques Pelletier.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :
Pour :
93.
Contre :
2. _ MM. Jean Bernard et Martial Taugourdeau.
N'ont pas pris part au vote :
4. _ M. Christian Poncelet, président du
Sénat, et M. Gérard Larcher, qui présidait la séance, MM. Roger Karoutchi et
Paul Natali.
GROUPE SOCIALISTE (77) :
Contre :
77.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (51) :
Pour :
50.
Contre :
1. _ M. Jean Huchon.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :
Pour :
46.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :
Pour :
7.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Pierre Guichard
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Alain Hethener
Daniel Hoeffel
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Max Marest
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac
Ont voté contre
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernard
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Jean Huchon
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Abstention
M. Jacques Pelletier.
N'ont pas pris part au vote
MM. Roger Karoutchi et Paul Natali.
N'ont pas pris part au vote
MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Gérard Larcher, qui présidait
la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 318 |
Nombre des suffrages exprimés : | 318 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 159 |
Pour : | 215 |
Contre : | 103 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.