SEANCE DU 5 AVRIL 2001
M. le président.
La parole est à M. Le Grand.
M. Jean-François Le Grand.
Nombre de nos concitoyens s'interrogent sur les derniers événements
politico-judiciaires qui viennent de se dérouler à Cherbourg, sur l'initiative
de Greenpeace, à propos du combustible australien, alors même que Greenpeace a
perdu son procès puisque la COGEMA, selon les termes de la cour d'appel de
Caen, « disposait au moment de l'arrivée du navire des autorisations
réglementaires et administratives nécessaires pour importer et entreposer en
France cette matière nucléaire ».
Aujourd'hui, la justice a donné raison au droit. S'il subsiste quelques
insuffisances d'ordre réglementaire, elles ne sont ni le fait de l'entreprise
ni le fait de la loi mais bel et bien le fait du Gouvernement lui-même : il
manque à l'application de la loi des décrets qui n'ont pas encore été publiés
par les ministres concernés.
J'exprimerai, à cet égard, un constat et une inquiétude.
Sur le site de La Hague, les deux nouvelles unités UP2 800 et UP3 ont fait, il
y a un an, l'objet d'une enquête publique, et les cinq commissaires enquêteurs
ont émis un avis favorable. Or le Gouvernement, en particulier le ministère de
l'environnement et de l'aménagement du territoire, n'a toujours pas fait
paraître les décrets, mais vous n'êtes pas vous-même, monsieur le secrétaire
d'Etat à l'industrie, directement en cause.
Voilà pour le constat. J'en viens à mon inquiétude.
Un transfert de certaines activités de l'usine de Cadarache à l'usine de
Marcoule-Melox est envisagé ; espérons que les ministres concernés n'agiront
pas de la même manière en freinant les procédures !
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous sommes très nombreux, sur toutes les
travées de cette assemblée, à penser que, de la part de Mme la ministre de
l'environnement et de l'aménagement du territoire, une absence de décision...
équivaut à une décision !
Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, le conflit qui oppose certains ministres
entre eux quant au maintien de l'indépendance énergétique de la France - via,
entre autres, la filière nucléaire - va-t-il devenir cacophonie et aboutir à
déstructurer l'économie française ?
Qui, au Gouvernement, va décider enfin de cette politique énergétique ? Mme la
ministre de l'environnement ou M. le Premier ministre ? La composante verte ou
la composante rouge-rose ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, le retraitement à lui seul représente environ
10 000 emplois, soit beaucoup plus que Danone et Marks & Spencer ne vont en
supprimer. Qui, au Gouvernement, va décider de rassurer ces 10 000 personnes
qui en ont assez de voir s'ériger jour après jour une forme de pensée qui, pour
être verte, n'en serait pas moins d'abord et avant tout une nouvelle forme de
totalitarisme et de sectarisme ?
(Très bien ! et vifs applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean Chérioux.
Tout à fait !
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
La politique énergétique du pays est
une.
(Exclamations sur les travées du RPR.)
Elle est arbitrée par M. le
Premier ministre. Elle a été clairement et nettement définie, au tout début de
1998, c'est-à-dire peu de temps après l'entrée en fonction de l'actuel
gouvernement.
Elle est encore plus unitaire que je ne saurais le dire parce que les
questions relatives à la sûreté nucléaire, dont je partage la responsabilité
avec ma collègue Dominique Voynet,...
M. Henri de Raincourt.
Bon courage !
M. Christian Pierret
secrétaire d'Etat.
... ne sont pas dissociables des choix d'ensemble de
la politique énergétique, qui repose à la fois sur le développement des
énergies nouvelles et renouvelables et sur le môle nucléaire comme pôle
essentiel de production d'électricité. Vous êtes d'ailleurs, monsieur le
sénateur, un trop fin connaisseur de cette problématique pour ignorer que la
sûreté nucléaire et la transparence en la matière ne souffrent ni compromis ni
compromission. Dès lors que la sûreté et la transparence ne sont pas en cause,
les choix industriels des entreprises concernées, comme la COGEMA, sont
soutenus par le Gouvernement dans l'intérêt de la France et des Français :
création d'emplois, création de richesses sur notre territoire et, surtout,
valorisation économique de la formidable recherche technologique menée
notamment par le Commissariat à l'énergie atomique.
M. Alain Gournac.
Merci de Gaulle !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
En ce qui concerne l'usine de La Hague, la volonté des
pouvoirs publics est, là aussi, claire. Elle vise à la modernisation du cadre
de fonctionnement de l'usine. Cela a conduit à la mise à l'enquête, l'an
dernier, de nouvelles autorisations, assorties d'une nécessaire réduction des
rejets. Cette enquête ayant conclu favorablement, les ministres compétents -
dont votre serviteur - doivent désormais se prononcer sur les textes
correspondants et les signer.
En ce qui concerne la production de combustible mox à Cadarache, qui est une
remarquable installation, nous adopterons la même démarche déterminée,
volontaire et responsable
(M. Le Grand applaudit),
qui consiste à examiner les questions de sûreté
et à imaginer les meilleures solutions possibles quant aux conséquences
industrielles et sociales que leur mise en oeuvre emporte.
Je vous rassure : il n'y a qu'une politique énergétique, elle est
définitivement fixée et elle place, de surcroît, la France parmi les meilleurs
pays au monde en matière de gaz à effet de serre. La France est en effet, de
tous les pays industriels développés, celui qui émet le moins de gaz à effet de
serre.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur de nombreuses travées du RPR,
des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du RDSE.)
MM. Alain Gournac, Philippe François et plusieurs autres sénateurs du RPR.
Merci de Gaulle !
M. le président.
C'est sur cette belle unanimité que nous en terminons avec les questions
d'actualité au Gouvernement.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures cinq.)