SEANCE DU 26 AVRIL 2001
M. le président.
Par amendement n° 6, M. Bret, Mmes Borvo, Beaudeau, M. Bécart, Mme
Bidart-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, M. Lefèvre, Mme Luc, MM. Muzeau,
Ralite, Renar, Mme Terrade, M. Vergès, proposent d'insérer, après l'article 11,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 726 du code de procédure pénale, il est inséré un article
726-1 ainsi rédigé :
«
Art. 726-1.
- Sauf en cas d'extrême urgence ou de circonstances
exceptionnelles, tout détenu à l'encontre duquel est engagée une procédure
disciplinaire peut être assisté d'un avocat ou d'un mandataire de son choix
selon des modalités compatibles avec les exigences de sécurité propres à un
établissement pénitentiaire. »
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Dans le prolongement à la fois de l'institution d'un contrôleur général des
prisons et de l'article 11, relatif aux sanctions disciplinaires que nous
venons d'adopter à l'instant, nous vous proposons d'inscrire dans le code pénal
les conséquences de la loi du 12 avril 2000.
Relative, on le sait, à l'accès au droit, cette loi prévoit en effet, dans son
article 24, le droit pour tout administré non seulement à présenter des
observations écrites ou orales. mais également à « se faire assister par un
conseil ou représenter par un mandataire de son choix » sur toute décision
individuelle.
Cet article a recelé des trésors inattendus, que peu avaient envisagés au
moment du vote de la loi : son applicabilité à l'univers pénitentiaire, en
faveur de laquelle le Conseil d'Etat a finalement tranché, mettant fin aux
incertitudes qui pouvaient encore subsister.
C'est ainsi que cette loi qui « invite en douce » les avocats en prison, comme
avaient pu le titrer certains journaux à l'époque, a pu offrir une application
rapide et inédite aux conclusions de notre commission d'enquête parlementaire.
Nous avions en effet souhaité que « tout détenu puisse être assisté d'un
avocat, s'il le demande, lors de son passage devant la commission de discipline
».
Si vous adoptez l'amendement que mes collègues communistes et moi-même vous
proposons, ce principe sera expressément visé dans notre code de procédure
pénale dans le titre relatif à la détention.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Georges Othily,
rapporteur.
Le présent amendement tend à clarifier la situation en
prévoyant directement, dans le code de procédure pénale, le droit à l'avocat au
cours de la procédure disciplinaire. Les seules exceptions seraient l'extrême
urgence et les circonstances exceptionnelles.
La commission des lois est favorable à l'adoption de cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu,
garde des sceaux.
Avisfavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la
proposition de loi, après l'article 11.
Par amendement n° 7, M. Bret, Mmes Borvo, Beaudeau, M. Bécart, Mme
Bidart-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Lefèbvre, Mme Luc, M. Muzeau, M.
Ralite, M. Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent d'insérer, après l'article
11, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 726 du code de procédure pénale, il est inséré un article
726-2 ainsi rédigé :
«
Art. 726-2. -
Sauf en cas d'accord écrit de l'intéressé, le placement
à l'isolement et le tranfèrement d'un détenu sont décidés dans le respect de la
procédure prévue à l'article 726-1.
« Le détenu qui entend contester la décision de placement à l'isolement ou de
transfèrement dont il est l'objet doit, dans un délai de quinze jours à compter
du jour de la notification de la décision, la déférer au directeur régional des
services pénitentiaires préalablement à tout autre recours. Le directeur
régional dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception du recours pour
répondre par décision motivée. L'absence de réponse dans ce délai vaut décision
de rejet. »
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Avec cet amendement, nous choisissons de faire entrer le transfèrement et
l'isolement contraint dans le système des décisions faisant grief.
Qualifiées parfois de sanctions « occultes » ou « déguisées », ces décisions
ne relèvent pourtant pas aujourd'hui du cadre disciplinaire et ne peuvent pas,
à ce titre, faire l'objet d'un recours contentieux.
Telle est la position aujourd'hui de la jurisprudence administrative,
contestable et contestée, tant par la doctrine que par les parlementaires. Je
rappelle que les députés avaient vivement critiqué dans leur rapport d'enquête
l'arbitraire qui en résultait. Ils incitaient en conséquence le législateur à «
aménager les procédures contentieuses adéquates ».
Et pourtant, si on se réfère aux récits - je vous renvoie notamment à ce
collectif de femmes de détenus récemment créé - l'administration pénitentiaire
n'hésite pas à y recourir.
Combien de transferts-sanctions qui conduisent à une rupture des liens
familiaux dont on sait combien ils sont décisifs pour la réinsertion ? Que
penser de ces isolements forcés qui, coupant le détenu du reste de la
détention, conduisent parfois à des troubles mentaux ?
Ces décisions doivent, selon nous, être soumises, par principe, à l'assistance
d'un avocat et au droit au recours, conformément d'ailleurs aux conclusions du
rapport Canivet, qui plaidait pour des droits « concrets et effectifs » que
seul l'accès au droit peut donner.
C'est dans cette perspective, mes chers collègues, que nous vous demandons de
bien vouloir adopter notre amendement, qui a reçu, je le sais, un accueil
favorable en commission des lois.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Georges Othily,
rapporteur.
Je me demande si M. Bret ne met pas la charrue avant les
boeufs...
(Sourires.)
Quoi qu'il en soit, cet amendement tend à prévoir, dans le code de procédure
pénale, que toute décision de mise à l'isolement ou de transfèrement de détenu
doit être prise comme s'il s'agissait d'une décision disciplinaire, sauf
lorsque le détenu a donné son accord écrit.
Nous sommes favorables à cet amendement ; peut-être faudra-t-il revoir la
question du transfèrement au cours de la navette.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu,
garde des sceaux.
Favorable.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois.
Je veux faire une simple remarque
sur la portée de la rédaction de cet amendement. Il n'y a pas de sursis à
exécution. La décision est prise. Le détenu peut la contester, mais la décision
est prise. Il me semble important d'apporter cette précision.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que l'amendement est adopté à l'unanimité.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la
proposition de loi, après l'article 11.
Article 12