SEANCE DU 10 MAI 2001


M. le président. La parole est à M. Leclerc. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Dominique Leclerc. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
M. Henri de Raincourt. Il n'est pas là !
M. Dominique Leclerc. Les ambiguïtés, les contradictions et l'immobilisme du Gouvernement fragilisent, une nouvelle fois, la position française sur le plan énergétique au sein de l'Union européenne.
En effet, la Commission européenne ne vient-elle pas de saisir la Cour européenne de justice en raison du retard pris par notre pays pour libéraliser le marché du gaz ?
Alors qu'hier, déjà, votre « a priori idéologique » conduisait à transposer a minima la directive européenne sur l'électricité avec plus d'un an de retard, aujourd'hui, ce même a priori risque de mener la France dans l'impasse.
Non seulement vous n'avez pas respecté l'échéance du 10 août 2000, contraignant d'ailleurs l'entreprise publique Gaz de France à des acrobaties juridiques pour faire face à une concurrence qui existe déjà en dehors de nos frontières, mais, pis encore, pour plaire à une partie de votre majorité, vous retirez purement et simplement le projet de loi de transposition de l'ordre du jour du Parlement.
Or, la France ne peut continuer à faire cavalier seul...
M. Emmanuel Hamel. Pourquoi pas ?
M. Dominique Leclerc. ... dans un marché mondial énergétique en pleine ébullition et marqué par de fortes évolutions structurelles et commerciales chez les acteurs du secteur, qui rendent indispensables les fusions-acquisitions et, éventuellement, les extensions d'activités.
Ne voyez pas dans mes propos la défense d'un modèle anglo-saxon en la matière. A cet égard, les pays de l'Union européenne, et singulièrement la France, peuvent parfaitement trouver l'équilibre qui leur convient. L'analyse des causes de la crise énergétique que connaît aujourd'hui la Californie, utile contre-exemple de dérégulation ratée, est instructive.
Mais ne nous y trompons pas : les situations américaine et européenne n'ont que peu en commun. Aussi serait-il absurde de s'abriter derrière l'alibi californien pour maintenir le statu quo chez nous.
Face à cet ultimatum européen, le Gouvernement va-t-il encore privilégier les calculs politiciens en vue des prochaines échéances électorales ou bien proposera-t-il enfin un cadre juridique permettant la libéralisation du marché gazier français ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste. - M. Jean-Pierre Fourcade applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, nous devons en effet veiller à ce que la transposition en droit français des textes européens soit la plus rapide possible.
M. Jean-Jacques Hyest. Il faut légiférer par ordonnances ! (Sourires.)
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Toutefois, l'agenda du Parlement jusqu'au 30 juin prochain n'a pas permis d'inscrire ce projet de loi de transposition de la directive européenne. (Exclamations et protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Vous avez néanmoins satisfaction puisque, vous le savez sans doute, plusieurs dispositions décisives, à la fois obligatoires et suffisamment précises, de la directive - que j'ai d'ailleurs négociée moi-même en 1997 - sont de fait d'ores et déjà directement appliquées et par Gaz de France, entreprise publique, et par les deux entreprises privées, CFM et GSO, qui transportent et distribuent du gaz. Le marché est donc de fait ouvert en France, conformément aux grandes orientations de la directive.
L'important - c'est la réponse à la deuxième partie de votre question - est de doter GDF, cette grande entreprise publique qui va rester publique, de tous les moyens propres à assurer son développement et d'abord de la capacité financière et technique nécessaire pour être présente dans l'amont du secteur gazier. L'entreprise Gaz de France produit aujourd'hui 4 % du gaz qu'elle distribue ; il faut s'orienter vers une proportion de 20 à 25 % demain pour renforcer sa présence dans l'amont.
Un investissement de plusieurs dizaines de milliards de francs est prévu au cours des prochaines années pour que l'entreprise reste parmi les premiers gaziers européens. Elle se situe à l'heure actuelle au quatrième ou cinquième rang. Elle doit maintenir, voire améliorer cette position par l'investissement, en France et dans d'autres pays européens.
Il faut également garantir le statut des personnels de GDF, comme nous l'avons fait pour les personnels d'EDF avec la loi du 10 février 2000.
Il faut enfin garantir le service public tant dans l'esprit que dans la pratique, notamment l'orientation de cette grande entreprise publique au service des plus défavorisés.
Nous veillons tout à la fois à l'avenir industriel de Gaz de France, à la préservation et au développement, en faveur des plus modestes de nos concitoyens, des activités de cette grande entreprise et à la capacité de celle-ci à s'établir, en Europe et dans le monde, comme une grande entreprise gazière internationale. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Charles Descours. L'Europe n'a pas compris !

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