SEANCE DU 10 OCTOBRE 2001


M. le président. « Art. 13. - I. - Dans la section 2 du chapitre II du titre préliminaire du livre III du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article L. 302-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 302-9-1 . - Lorsque, dans les communes soumises au prélèvement défini à l'article L. 302-7, au terme de la période triennale échue, les engagements figurant dans le programme local de l'habitat n'ont pas été tenus ou, à défaut de programme local de l'habitat, le nombre de logements locatifs sociaux à réaliser en application du dernier alinéa de l'article L. 302-8 n'a pas été atteint, le préfet informe le maire de la commune de son intention d'engager la procédure de constat de carence. Il lui précise les faits qui motivent l'engagement de la procédure et l'invite à présenter ses observations dans un délai au plus de deux mois.
« En tenant compte de l'importance de l'écart entre les objectifs et les réalisations constatées au cours de la période triennale échue, des difficultés rencontrées le cas échéant par la commune et des projets de logements sociaux en cours de réalisation, le préfet peut, par un arrêté motivé pris après avis du conseil départemental de l'habitat, prononcer la carence de la commune. Par le même arrêté, il fixe, pour une durée maximale de trois ans à compter du 1er janvier de l'année suivant sa signature, la majoration du prélèvement défini à l'article L. 302-7. Le taux de la majoration est égal au plus au rapport entre le nombre des logements sociaux non réalisés et l'objectif total de logements fixé dans le programme local de l'habitat ou déterminé par application du dernier alinéa de l'article L. 302-8. Le prélèvement majoré ne peut excéder 5 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune figurant dans le compte administratif établi au titre de l'antépénultième exercice.
« L'arrêté préfectoral peut faire l'objet d'un recours de pleine juridiction.
« Lorsqu'il a constaté la carence d'une commune en application du présent article, le préfet peut conclure une convention avec un organisme en vue de la construction ou l'acquisition des logements sociaux nécessaires à la réalisation des objectifs fixés dans le programme local de l'habitat ou déterminés en application du premier alinéa de l'article L. 302-8.
« La commune contribue au financement de l'opération pour un montant égal à la subvention foncière versée par l'Etat dans le cadre de la convention, sans que cette contribution puisse excéder la limite de 13 000 euros par logement construit ou acquis en Ile-de-France et 5 000 euros par logement sur le reste du territoire. »
« II. - Le code de l'urbanisme est ainsi modifié :
« 1° Le f de l'article L. 213-1 est ainsi rédigé :
« f) Pendant la durée d'application d'un arrêté préfectoral pris sur le fondement de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, l'aliénation d'un immeuble ou d'un terrain destiné à être affecté à une opération ayant fait l'objet de la convention prévue au même article ;
« 2° L'article L. 421-2-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pendant la durée d'application d'un arrêté préfectoral pris sur le fondement de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, les autorisations ou les actes relatifs à l'utilisation et à l'occupation du sol concernant les opérations ayant fait l'objet de la convention prévue au même article sont délivrés ou établis au nom de l'Etat par le préfet, après avis du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 38 est présenté par M. Marini, au nom de la commission.
L'amendement n° 44 est présenté par MM. Lassourd, Braye et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
Ces amendements sont ainsi libellés :
« Rédiger comme suit cet article :
« La section 2 du chapitre II du titre préliminaire du livre III du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigée :
« Section 2. - Dispositions particulières à certaines agglomérations
« Art. L. 302-5. - Les dispositions de la présente section sont applicables aux communes dont la population est au moins égale à 3 500 habitants qui :
« - sont membres d'une communauté urbaine, d'une communauté d'agglomération ou d'une communauté de communes de plus de 50 000 habitants, comprenant au moins une commune centre de plus de 15 000 habitants, compétentes en matière de programme local de l'habitat dans le périmètre duquel le nombre de logements à vocation sociale représente, au 1er janvier de la pénultième année, moins de 20 % des résidences principales ;
« - ou, à défaut, font partie, au sens du recensement général de la population, d'une agglomération de plus de 50 000 habitants, comprenant au moins une commune de plus de 15 000 habitants, et dans lesquelles le nombre de logements à vocation sociale représente, au 1er janvier de la pénultième année, moins de 20 % des résidences principales ;
« Les dispositions ci-dessus ne sont pas applicables lorsque le nombre d'habitants de la communauté ou de l'agglomération a diminué entre les deux derniers recensements de la population.
« Ces dispositions ne s'appliqueront pas aux communes dont le nombre de logements locatifs sociaux, tels que définis aux articles L. 322-17 et L. 322-18 du code de l'urbanisme, représentait, au 31 décembre 1995, 20 % et plus des résidences principales, au sens de l'article 1411 du code général des impôts.
« Les communes faisant partie d'un parc naturel régional sont exclues de l'application des dispositions de la présente section.
« Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux communes dont plus de la moitié du territoire urbanisé est soumise à une inconstructibilité résultant d'une zone A, B ou C, d'un plan d'exposition au bruit approuvé en application de l'article L. 147-1 du code de l'urbanisme, ou d'une servitude de protection instituée en application des articles 7-1 à 7-4 de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement.
« Les logements à vocation sociale retenus pour l'application du présent article sont :
« 1° Les logements locatifs appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré, à l'exception, en métropole, de ceux construits, acquis ou améliorés à compter du 5 janvier 1977 et ne faisant pas l'objet d'une convention définie à l'article L. 351-2 ;
« 2° Les logements conventionnés dans les conditions définies à l'article L. 351-2, appartenant aux sociétés d'économie mixte et aux autres bailleurs définis au quatrième alinéa de l'article 41 ter de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière ;
« 3° Les logements en accession sociale à la propriété pendant les dix années suivant la date de leur acquisition, notamment ceux ayant bénéficié d'un prêt à l'accession à la propriété, ou, dans le cadre d'un prêt à taux zéro, d'un différé de remboursement de 100 % et de 75 % ;
« 4° Les logements financés par un prêt locatif intermédiaire lorsqu'ils sont inclus dans un programme collectif de construction de logements locatifs sociaux conventionnés, ou lorsqu'ils sont réalisés dans une commune où la charge foncière au mètre carré dépasse un certain montant pour les communes visées par la loi n° 82-1169 du 31 décembre 1982 relative à l'organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon et des établissements publics de coopération intercommunale, le pourcentage des logements financés par un programme locatif intermédiaire ne peut dépasser 30 % des objectifs définis par le programme local de l'habitat visé à l'article L. 302-1 ;
« 5° Les logements construits par des personnes morales de droit privé et financés par des prêts du Crédit foncier de France ;
« 6° Les logements appartenant aux sociétés d'économie mixte des départements d'outre-mer, les logements appartenant à l'Entreprise minière et chimique et aux sociétés à participation majoritaire de l'Entreprise minière et chimique, les logements appartenant aux houillères de bassin, aux sociétés à participation majoritaire des houillères de bassin, ainsi qu'aux sociétés à participation majoritaire des Charbonnages de France et à l'établissement public de gestion immobilière du Nord - Pas-de-Calais ;
« 7° Les logements locatifs sociaux appartenant à d'autres bailleurs et faisant l'objet d'une convention conclue avec l'Etat, en application de l'article L. 351-2, pour être mis à la disposition des personnes défavorisées mentionnées à l'article 1er de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement ;
« 8° Les logements améliorés avec le concours financier de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat et faisant l'objet d'une convention conclue avec l'Etat, en application de l'article L. 351-2 et publiée au fichier immobilier, ou inscrite au livre foncier ;
« 9° Les logements-foyers hébergeant à titre principal des personnes handicapées ou des personnes âgées, les logements-foyers dénommés "résidences sociales", les logements-foyers hébergeant à titre principal des jeunes travailleurs ou des travailleurs migrants, les places des centres d'hébergement et de réinsertion sociale visées à l'article 185 du code de la famille et de l'aide sociale ;
« 10° Les logement soumis à la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires occupants de locaux d'habitation ou à usage professionnel, et instituant des allocations de logement, dont les locataires sont exonérés partiellement ou totalement de la taxe d'habitation. »
« Les logements locatifs sociaux, visés au présent article, construits ou acquis et améliorés à l'aide de prêt locatif aidé très social ou d'intégration sont assortis d'un coefficient de majoration de 2 pour le calcul du nombre total de logements locatifs sociaux, en application du premier alinéa.
« Les résidences principales retenues pour l'application du présent article sont celles qui figurent au rôle établi pour la perception de la taxe d'habitation.
« En cas d'aliénation, par les organismes propriétaires ou bailleurs, de tout ou partie des logements sociaux existants ou à venir, intervenue dans les cinq années précédant la publication de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ou à intervenir, en vue d'une mutation en accession à la propriété au bénéfice d'acquéreurs personnes morales ou physiques, conduisant à la sortie du patrimoine du secteur d'habitations à loyer modéré, la commune ou le groupement considéré conservera le bénéfice desdits logements dans le calcul du taux de 20 %.
« Art. L. 302-6. - Dans les communes visées à l'article L. 302-5, les personnes morales, propriétaires de logements sociaux au sens de l'article L. 302-5, sont tenues de fournir chaque année avant le 1er juin, au représentant de l'Etat dans le département, un inventaire par commune des logements sociaux dont elles sont propriétaires au 1er janvier de l'année en cours.
« Le défaut de production de l'inventaire mentionné ci-dessus, ou la production d'un inventaire manifestement erroné donne lieu à l'application d'une amende de 10 000 F recouvrée comme en matière de taxe sur les salaires.
« Le représentant de l'Etat dans le département communique chaque année à chaque commune visée ci-dessus, avant le 1er septembre, les inventaires la concernant assortis du nombre de logements sociaux décomptés en application de l'article L. 302-5 sur son territoire au 1er janvier de l'année en cours. La commune dispose de deux mois pour présenter ses observations.
« Après examen de ces observations, le représentant de l'Etat dans le département notifie avant le 31 décembre le nombre de logements sociaux retenus pour l'application de l'article L. 302-5.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe le contenu de l'inventaire visé au premier alinéa, permettant notamment de localiser les logements sociaux décomptés.
« Art. L. 302-7. - En fonction des orientations arrêtées par le schéma de cohérence territoriale, par le plan d'occupation des sols et par le programme local de l'habitat, la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre compétent en matière de programme local de l'habitat fixe, après avis du conseil départemental de l'habitat, un objectif de réalisation de logements sociaux sur le territoire de la commune ou des communes membres en vue d'accroître la part de ces logements par rapport au nombre de résidences principales. La commune ou l'établissement public de coopération intercommunale passe à cet effet un contrat d'objectifs avec l'Etat qui définit le montant des engagements financiers de ce dernier. L'objectif de réalisation de logements sociaux ne peut être inférieur au nombre de logements sociaux dont la réalisation est nécessaire pour atteindre 20 % des résidences principales dans les communes visées à l'article L. 302-5. Il ne peut prévoir, sans l'accord des communes concernées, la constructrion de logements sociaux supplémentaires dans les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre comptant sur le territoire au moins 20 % de logements sociaux au sens de l'article L. 302-5.
« Le contrat d'objectifs mentionné à l'alinéa précédent précise l'échéancier et les conditions de réalisation de logements sociaux, soit par des constructions neuves, soit par l'acquisition de bâtiments existants, par période triennale. Il définit les conditions de revalorisation de l'habitat locatif social existant.
« L'accroissement net du nombre de logements sociaux prévu pour chaque période triennale ne peut être inférieur à 15 % de la différence entre le nombre de logements sociaux correspondant à l'objectif fixé à l'article L. 302-5 et le nombre de logements sociaux sur le territoire de la commune. Toutefois, cet accroissement net peut être plafonné à 25 % des constructions neuves de logements prévues au cours de la période triennale. Ces chiffres sont réévalués à l'issue de chaque période triennale.
« Sous réserve des disponibilités foncières sur le ou les territoires concernés, le contrat d'objectifs prévoit, à peine de nullité, dans les conditions prévues à l'article L. 302-8, les pénalités de retard dues par l'établissement public de coopération intercommunale lorsqu'il a compétence ou par la commune qui n'a pas respecté les obligations mises à sa charge. Lorsque les pénalités de retard sont dues par une commune, elles sont versées suivant les modalités prévues à l'article L. 302-7. Lorsqu'elles sont dues par l'établissement public de coopération intercommunale, elles sont versées au fonds d'aménagement urbain.
« Art. L. 302-8. - A compter du 1er janvier 2002, une contribution est versée par les communes visées à l'article L. 302-5, à l'exception de celles qui bénéficient de la dotation de solidarité urbaine prévue par l'article L. 2334-15 du code général des collectivités territoriales, ou de la première fraction de la dotation de solidarité rurale prévue à l'article L. 2334-21 du même code, lorsque le nombre de logements sociaux y excède 15 % des résidences principales.
« Cette contribution est égale à 1 000 F multipliés par la différence entre 20 % des résidences principales au sens du I de l'article 1411 du code général des impôts et le nombre de logements sociaux existant dans le périmètre de l'établissement public de coopération intercommunale ou dans la commune en application de l'article L. 302-5. Cette contribution ne peut excéder 5 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune constatées dans le compte administratif afférent au pénultième exercice au titre des acquisitions immobilières réalisées par celle-ci dans le cadre de l'exercice de son droit de préemption ayant pour objet la réalisation de logements locatifs sociaux. Le montant de la contribution est pondéré en fonction du potentiel fiscal. Cette pondération s'effectue de la manière suivante : la contribution est égale à 800 F pour toutes les communes dont le potentiel fiscal par habitant défini à l'article L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales est inférieur à 500 F l'année de la promulgation de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 précitée. La contribution n'est pas due lorsqu'elle est inférieure à 50 000 F.
« La contribution est diminuée du montant des dépenses exposées ou provisionnées par la commune pendant le pénultième exercice, au titre des subventions foncières mentionnées à l'article L. 2254-1 du code général des collectivités territoriales, des travaux de viabilisation des terrains mis par la suite à disposition pour la réalisation de logements sociaux, des participations à la réhabilitation de logements sociaux et des moins-values correspondant à la différence entre le prix de cession de terrains et de biens immobiliers donnant lieu à la réalisation effective de logements sociaux et leur valeur vénale estimée par le service des domaines.
« La contribution est également diminuée du montant des dépenses exposées ou provisionnées par la commune, pendant le pénultième exercice, au titre des subventions ou des efforts financiers effectués en faveur des programmes d'accession sociale à la propriété.
« Lorsque la commune est membre d'une communauté urbaine, d'une communauté d'agglomération ou d'une communauté de communes compétente pour effectuer des réserves foncières en vue de la réalisation de logements sociaux et dotée d'un programme local de l'habitat, la contribution est versée à la communauté. Elle est utilisée pour financer soit des acquisitions foncières et immobilières en vue de la réalisation de logements sociaux, soit des opérations de renouvellement et de requalification urbains.
« A défaut, elle est versée sur un compte foncier bloqué pendant vingt ans, à la perception municipale, en vue d'être utilisée ultérieurement par la commune pour financer des opérations de construction de logements sociaux. Le surplus des dépenses engagées par les communes, par rapport au montant de la contribution, est reporté l'année suivante pour le calcul de la contribution.
« Art. L. 302-9. - La collectivité ou l'établissement public de coopération intercommunale ayant approuvé le programme local de l'habitat établit, au terme de chaque période triennale, un bilan d'exécution du contrat d'objectifs portant en particulier sur le respect des engagements en matière de mixité sociale. Celui-ci est communiqué au conseil départemental de l'habitat, qui examine la cohérence générale de l'offre de logements sur le territoire départemental et sa répartition sur l'ensemble des zones d'habitat urbain, périurbain et rural. Lorsque les engagements figurant dans le contrat d'objectifs prévu à l'article L. 302-6 n'ont pas été tenus, des pénalités de retard sont applicables. Elles s'élèvent à 15 % du montant de la contribution mentionnée à l'article L. 302-7 la première année, à 30 % la deuxième année et à 50 % la troisième année. Ces pénalités ne peuvent excéder 5 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune constatées dans le compte administratif afférent au pénultième exercice.
« Art. L. 302-9-1. - Un décret en Conseil d'Etat détermine, en tant que de besoin, les conditions d'application du présent chapitre, notamment celles nécessitées par la situation particulière des départements d'outre-mer. »
La parole et à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° 38.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit de revenir à notre texte de première lecture et de reprendre le dispositif que je qualifierai de dispositif « Althapé ».
M. le président. La parole est à M. Lassourd, pour défendre l'amendement n° 44.
M. Patrick Lassourd. Avec cette proposition, nous prenons en compte l'intercommunalité, ce qui n'était pas le cas avec la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
Nous souhaitons que le seuil de 20 % soit apprécié au niveau intercommunal, notamment lorsque la structure intercommunale a la compétence en matière d'habitat et de programme locatif.
Par ailleurs, nous élargissions la définition du logement social et je regrette encore une fois que le Gouvernement ait une vision hémiplégique en la matière. En effet, au-delà du seul secteur locatif, il y a également l'accession sociale à la propriété, pour laquelle les collectivités font de très gros efforts financiers. Il nous semble donc indispensable d'intégrer cette notion dans la définition du logement social, notamment lorsque l'accession est réalisée avec un prêt à taux zéro avec des différés de 100 % ou de 75 %. Cette mesure s'applique à des propriétaires aux revenus très modestes !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 38 et 44 ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat au logement. Comme en première lecture, le Gouvernement ne peut retenir cette proposition.
Permettez-moi de rappeler les raisons de ce refus. Tout d'abord, nous n'acceptons pas que le calcul du pourcentage de logements sociaux soit effectué sur l'ensemble de l'intercommunalité. Cela ne signifie aucunement que nous entendions nier l'intercommunalité puisque, je le rappelle, les pénalités versées par les communes qui n'atteindront pas le seuil de 20 % seront versées aux structures intercommunales. Ces dernières mobiliseront ainsi les moyens financiers complémentaires à l'aide de l'Etat pour la réalisation de logements sociaux.
Le fondement même du seuil de 20 % de logements sociaux procède de la volonté de faire vivre la mixité sociale,...
M. Patrick Lassourd. Nous sommes bien d'accord !
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. ... ce qui, de mon point de vue, est la déclinaison actuelle des valeurs de la République : il faut éviter qu'il y ait des ghettos,...
M. Patrick Lassourd. C'est pourquoi il faut faciliter l'accession !
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. ... ghettos de riches d'un côté, ghettos de pauvres de l'autre.
M. Gérard Cornu. Ça, c'est un langage dépassé !
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. J'y reviendrai, mais vous savez qu'au sein d'une même intercommunalité peuvent coexister des communes où il n'y a absolument aucun logement social et des communes où il n'y a que du logement social !
Puisque nous sommes nombreux dans ce pays à considérer que, pour « casser » les ghettos, il faudra démolir certains grands ensembles,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait !
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. ... ne construisons pas les nouveaux logements sociaux nécessaires aux familles et à notre jeunesse sur les mêmes sites !
M. Patrick Lassourd. Et les PLH ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Au contraire, répartissons-les sur l'ensemble du territoire.
Je vous rappelle que les gouvernements précédents avaient fait, avec la loi d'orientation sur la ville, le choix de l'incitation. Nous préférions toujours inciter les collectivités à construire des logements sociaux, mais force est de constater que, dix ou quinze ans après la loi d'orientation sur la ville, en dépit des incitations, certaines communes n'ont réalisé aucun logement social. Nous avons donc été obligés de fixer dans la loi une contrainte étalée dans la longue durée - à savoir seize ans -, ce qui permet à chacune des communes d'agir.
Par ailleurs, le Gouvernement n'a pas une vision restrictive du logement social. J'ose d'ailleurs espérer que personne dans ce pays n'imagine que l'on pourrait se contenter de 20 % de logements sociaux en additionnant l'accession à la propriété et le locatif !
Si le seuil a été fixé à 20 %, c'est pour tenir compte de l'ensemble des besoins sociaux du pays, qui se portent surtout sur le locatif. Or le secteur locatif social peut être soit public soit privé, puisque les logements conventionnés par l'ANAH pendant la durée du conventionnement sont comptés dans les 20 %. Cela peut être du neuf comme cela peut être de l'ancien, et ce sera de plus en plus, je l'espère, de petites opérations bien insérées dans le tissu urbain.
L'accession sociale à la propriété est une autre grande préoccupation du Gouvernement, mais elle ne procède pas de la même logique. Ainsi, au-delà du prêt à taux zéro, le Gouvernement vient de lancer pour les accédants très modestes des opérations d'accession très sociale, d'un montant de 70 000 francs, afin d'accompagner par une aide à la pierre leur accession à la propriété.
Vous avez bien compris que notre souci est de veiller à ce qu'il y ait un minimum de logements sociaux et de logements locatifs partout, car c'est ce qu'attendent non seulement notre jeunesse, mais aussi que les plus démunis.
De mon point de vue et du point de vue du Gouvernement, il s'agit là de la déclinaison de l'esprit de fraternité, et les récents événements montrent à quel point nous devons éviter à tout prix la ségrégation sur notre territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 38 et 44.
M. Bernard Murat. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Murat.
M. Bernard Murat. Madame le secrétaire d'Etat, croyez-vous franchement que le souci du Gouvernement ait été d'éviter, comme vous le dites, la constitution de zones pour riches et de zones pour pauvres ?
Je ne sais pas dans quelle zone vous vivez, madame le secrétaire d'Etat, mais ce n'est pas ainsi qu'il faut aborder ce débat.
Le Gouvernement et les précédents n'ayant pas su régler les problèmes liés à l'insécurité dans certains quartiers, on veut maintenant les déplacer vers les régions et territoires où il n'existe pas d'insécurité !
M. Guy Fischer. Mais non, cela n'a rien à voir !
M. Bernard Murat. J'ajoute, madame le secrétaire d'Etat, que, pour les personnes qui sont, comme vous dites, dans les quartiers défavorisés, se pose aussi un problème majeur : celui de la proximité de l'emploi. Le fait de déplacer des personnes dans des zones ou des communes rurales situées à 20, 30 ou 40 kilomètres de leur lieu de travail ne résout rien !
Il faut être très prudent dans ce domaine-là et, surtout, ne pas se tromper. Cette loi SRU, qui est celle de M. Gayssot, vise en fait à disperser les problèmes d'insécurité suite au constat qu'on ne pouvait, malheureusement, pas les régler. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Il ne faut pas faire de manichéisme sur cette question de l'accession à la propriété.
Je suis élu de la région Bretagne, où le pourcentage d'accédants à la propriété est beaucoup plus élevé que dans le reste de la France.
Dans ce projet de loi, vous demandez aux collectivités de faire des efforts financiers en faveur du locatif social. L'accession à la propriété étant une tradition en Bretagne, ceux de nos collectivités sont extrêmement importants. Il nous semble tout à fait normal d'en tenir compte.
Pour ne pas allonger le débat, je ne relancerai pas la polémique qui nous avait divisés lors de la première lecture de la loi « SRU » qui, je vous le rappelle, madame le secrétaire d'Etat, oblige les collectivités à construire 20 % de logements locatifs sociaux. Quid de la compétence de l'Etat dans l'attribution de moyens financiers pour ce faire ?
J'ai été pendant sept ans président de l'OPAC d'Ille-et-Vilaine. Vous savez fort bien qu'actuellement les équilibres financiers sont tels que la subvention de l'Etat et le prêt de la Caisse des dépôts et consignations sont totalement inappropriés eu égard à la situation du marché. Dans le département d'Ille-et-Vilaine, en l'espace de très peu de temps, les coûts de construction sont en effet passés de 4 200 francs à plus de 6 000 francs le mètre carré ! Les crédits accordés par l'Etat sont insuffisants !
Nous en avons assez des dispositions de lois qui visent à transférer des compétences de l'Etat aux collectivités - régions, départements et communes - sans prévoir le transfert des moyens financiers nécessaires. Mais là, c'est encore plus grave : vous avez conservé à l'Etat une compétence sans consacrer les moyens financiers suffisants. J'en veux pour preuve que moins de la moitié des crédits inscrits dans chaque loi de finances à ce titre sont consommés ! L'Etat n'exerce donc pas sa compétence !
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Monsieur Murat, la sécurité est une grave question qui préoccupe tout le monde. Mais je ne veux pas vous laisser dire que les problèmes de sécurité ne se posent que dans les quartiers en difficulté !
La vérité est que les formes d'urbanisation ajoutées aux problèmes sociaux que l'on a connus dans les années quatre-vingt ont transformé en poches de pauvreté ces quartiers dont je rappelle qu'ils n'ont pas été réalisés par des gouvernements que nous soutenons, qu'ils ont été érigés de manière industrielle et à moindre coût, avec, souvent, très peu d'équipements collectifs. Il est vrai aussi que, dans certains cas, l'inadaptation du cadre de vie ne favorise pas l'intégration de nos concitoyens et peut également constituer un péril pour la sécurité collective.
En tout cas, quelles qu'en soient les causes et les conséquences, une telle situation doit être modifiée ; il en va de l'avenir de la République. J'ai l'intime conviction que la décision que nous prenons aujourd'hui y contribuera de façon déterminante.
Monsieur Lassourd, je connais la tradition bretonne. Vous ne me ferez pas dire que la Bretagne n'a pas besoin de logements locatifs sociaux. J'ai signé, en tant que secrétaire d'Etat, l'un des premiers contrats de relance avec M. Méhaignerie, contrat dans lequel le président du conseil général d'Ille-et-Vilaine me demandait des crédits afin de construire des logements locatifs sociaux !
Le besoin en la matière est réel malgré la tradition tout à fait positive que vous évoquiez.
M. Patrick Lassourd. Je ne dis pas le contraire !
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Il est même de plus de 20 % ! La question qui se pose est maintenant celle de leur bonne répartition.
Vous avez mis en cause l'engagement financier du Gouvernement. Mais si, comme vous l'avez indiqué, une partie des crédits budgétaires votés par le Parlement n'ont pas été dépensés, ce n'est pas simplement parce que le Gouvernement ne voulait pas ou ne pouvait pas en raison des obstacles rencontrés ; c'est en particulier parce qu'un certain nombre de maires ne souhaitent pas construire des logements sociaux dans leur commune ! (Approbations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - Protestations sur les travées du RPR.)
M. Patrick Lassourd. Non, madame, pas du tout. C'est parce que, financièrement, c'est impossible à gérer !
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat. Par ailleurs, il est vrai que 310 000 logements étaient construits par an. Aujourd'hui, la situation n'est plus la même que celle que nous avons connue par le passé. Nous avons retrouvé un haut niveau de construction de logements, ce dont je me félicite, car cela a eu un effet important sur les coûts du bâtiment.
Il est vrai aussi qu'il a fallu adapter nos financements à cette évolution des coûts, ce que le Gouvernement a fait en signant une convention avec les organismes collecteurs du 1 %. Les contrats de relance fonctionnent bien, puisque nous réaliserons cette année plus de 50 000 logements sociaux et j'ai bon espoir que le Parlement vote la réalisation d'au moins 55 000 autres l'an prochain.
Nous devons accompagner cette relance et faire en sorte que les logements sociaux soient bien répartis sur le territoire de nos communes.
Je suis convaincue que, une fois retombée la passion liée à ce débat, cette idée sera partagée par la génération qui doit faire vivre au XXIe siècle l'idéal républicain. J'en veux pour preuve le nombre de maires qui construisent des logements sociaux aussi bien à Neuilly que dans les plus beaux quartiers de Paris. J'espère même que cette idée finira par triompher dans toutes les villes de France où l'on s'honore de penser que ce pays peut faire régner l'égalité sur son territoire !
M. Gérard Cornu. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu. Madame le secrétaire d'Etat, je ne peux pas vous laisser dire que les maires ne veulent pas construire des logements sociaux.
Allez sur le terrain ! Le coût de la construction est élevé et les crédits de l'Etat ne sont pas en adéquation. Quant aux appels d'offres, ils sont, pour la plupart, infructueux, vous ne pouvez pas le nier, en raison des coûts. Par ailleurs, les élus locaux veulent construire non plus de grands ensembles - tout le monde est d'accord sur ce point - mais des petits ensembles. Or les pavillons coûtent plus cher, il faut bien l'avoir à l'esprit.
Alors, ne campez pas sur vos positions, qui ne correspondent pas à ce que vivent quotidiennement les élus locaux !
J'en viens à la question de la démolition. Tout le monde est d'accord pour démolir les barres, mais encore faut-il, pour ce faire, que les logements soient vacants, ce qui coûte extrêmement cher. N'épuisez pas financièrement les organismes d'HLM de l'ensemble de la France ! Il ne s'agit pas d'un problème gauche-droite. La volonté des élus locaux est bien de construire des logements sociaux, c'est l'intérêt de tous, mais ils ont besoin de crédits supplémentaires. Cette aide relève de la compétence de l'Etat !
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle qu'un débat approfondi a déjà eu lieu en première lecture. Il me semble, après la discussion qui vient d'avoir lieu, que tous les éléments d'information sont maintenant réunis pour que nous puissions procéder au vote.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 38 et 44, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 13 est ainsi rédigé.
Mes chers collègues, il est près de vingt heures ; il reste quinze amendements à examiner. Pour que nous puissions achever la discussion de ce texte dans un délai raisonnable, je demande à chacun de faire preuve de concision et d'esprit de synthèse. (Assentiment.)

Articles additionnels après l'article 13