SEANCE DU 11 OCTOBRE 2001
M. le président.
Notre nouveau collègue, M. Longuet prend ici la parole pour la première fois.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR
et de l'Union centriste.)
Il est connu et apprécié de la Haute Assemblée où nous l'avons accueilli à
maintes reprises lorsqu'il était ministre.
M. Gérard Longuet.
Ma question, d'une actualité brûlante, s'adresse à M. le ministre délégué
chargé des affaires européennes et porte sur le refus du projet de fusion de
deux entreprises françaises d'électricité, Legrand et Schneider, par la
Commission européenne.
Le Gouvernement a-t-il l'intention de prendre trois initiatives politiques
fortes pour mettre fin à une situation incohérente ?
D'abord, il est incohérent que les positions dominantes soient évaluées sur
les marchés nationaux et non pas sur le marché européen. Or le marché unique
existe et il convient d'en tirer les conséquences.
Ensuite, il convient de faire en sorte que l'instruction des grandes fusions
industrielles soit assurée parallèlement par la DG 4 et par les directions en
charge de l'économie et de l'industrie.
Le libéral que je suis le dit avec conviction, l'Europe ne peut pas se borner
à une politique de la concurrence et ne pas avoir de projets industriels.
Autrement, l'aéronautique civile européenne, par exemple, n'aurait jamais
existé. Il convient donc que les fusions soient examinées de pair, sous l'angle
de la concurrence et des projets européens.
Enfin, il importe de mettre en conformité les exigences européennes et le
droit intérieur français. Le Gouvernement ne doit-il pas faire en sorte qu'en
bourse les offres publiques soient assorties de conditions telles que les
actionnaires, notamment les plus petits, ne soient pas lésés par des annonces
et des engagements démentis plusieurs mois après, dans des conditions qui
peuvent, en effet, faire craindre pour la validité de leurs placements
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici,
ministre délégué chargé des affaires européennes.
Monsieur le sénateur,
la Commission européenne a en effet rendu hier un avis négatif sur le projet de
fusion entre Schneider-Legrand. Elle a agi, vous l'avez dit, dans le cadre de
la compétence exclusive qui lui a été attribuée en matière de concurrence par
le traité de Rome.
Le Gouvernement, en particulier le ministre de l'économie et des finances et
le secrétaire d'Etat à l'industrie, qui avait, à de nombreuses reprises,
sensibilisé la Commission à l'importance de cette affaire, ne peut maintenant
que prendre acte de l'avis rendu.
Je rappelle que cette fusion avait pour objet la création d'un « champion »
européen de taille mondiale dans l'une de nos filières européennes d'excellence
: le matériel électrique de basse tension. Cette opération était nécessaire
pour affronter la concurrence, américaine et japonaise, ainsi que pour
consolider l'emploi et de renforcer notre attractivité industrielle. Telle est
la préoccupation fondamentale des élus des régions concernées. Je le sais bien
pour m'être entretenu de façon approfondie, voilà quelques semaines, notamment
avec les parlementaires du Limousin.
Le Gouvernement sera très attentif aux conséquences de cette décision, en
particulier sur le plan social et industriel. Les entreprises devront notamment
assurer la concertation nécessaire avec les représentants des salariés. Au
demeurant, je note que la Commission est prête à examiner avec
Schneider-Legrand « les modalités appropriées pour reconstituer les conditions
de concurrence effective ».
Le Gouvernement souhaite en tout cas que les entreprises bénéficient d'une
souplesse de calendrier suffisante pour pouvoir élaborer les solutions
industrielles satisfaisantes. Pour nous, cela est clair et je veux le dire ici,
le dossier n'est pas clos.
Il nous faudra naturellement tirer les enseignements de cette décision sur le
plan national comme sur le plan communautaire. Croyez que j'ai bien écouté ce
que vous avez dit ici. Il faudra sans doute un peu de temps pour instruire tout
cela, mais je voudrais vous donner deux éléments.
D'abord, il faudra réfléchir, en particulier, à l'articulation entre notre
droit boursier et les procédures de concurrence. Il y a là, manifestement, des
harmonisations, des cohérences à rétablir.
Par ailleurs, sans doute faudrait-il apprécier ce type d'opération
indépendamment de la nationalité des entreprises considérées, à l'échelle de
l'ensemble du marché européen, et non sur la base d'une analyse par pays qui ne
correspond plus, effectivement, aux réalités économiques d'aujourd'hui.
Voilà les éléments que je pouvais vous fournir aujourd'hui. Mais cela implique
bien sûr des réflexions plus approfondies.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
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