SEANCE DU 31 OCTOBRE 2001


M. le président. « Art. 2. - L'action sociale et médico-sociale est conduite dans le respect de l'égale dignité de tous les êtres humains avec l'objectif de répondre de façon adaptée aux besoins de chacun d'entre eux et en leur garantissant un accès équitable sur l'ensemble du territoire. »
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau. La volonté de préciser, dans ce projet de loi, que la promotion de l'action sociale et médico-sociale s'élabore dans un cadre interministériel ne peut que nous satisfaire.
Si l'on peut, de même, se féliciter que l'article 2 du projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale garantisse « un accès équitable sur l'ensemble du territoire » dans les réponses apportées aux besoins de chacune des personnes accueillies dans les établissements et services relevant de ce secteur, il me semble nécessaire, madame la secrétaire d'Etat, de revenir quelques instants sur cette disposition afin qu'elle ne reste pas virtuelle.
Comme vous le savez, mes chers collègues, loin d'être harmonieux et de permettre un égal accès sur tout le territoire national, le système d'aide et d'accueil des personnes handicapées montre de fortes disparités régionales. Ainsi, les dotations mentionnées à l'article 35 (3°) varient d'une région à l'autre, ce qui fait que les équipements et l'offre de service sont d'envergure différente selon un injuste critère géographique.
Je tiens donc à attirer l'attention sur les conséquences concrètes de ces disparités, qui touchent à la fois l'emploi, la cohésion sociale, le respect des droits fondamentaux des personnes accueillies dans les établissements et services de ce secteur.
En Ile-de-France, par exemple, l'avenir du secteur médico-social paraît pour le moins inquiétant ; les chiffres fournis, notamment par l'union régionale interfédérale des oeuvres privées sanitaires et sociales, l'URIOPSS, démentent avec force la réputation de cette région considérée comme moins défavorisée en matière d'accueil des personnes handicapées.
Ainsi, les capacités d'accueil de cette région en psychiatrie générale, fixées à 1,34 lit installé pour 1 000 habitants, se situent nettement en dessous du taux d'équipement de la France métropolitaine, qui s'établit à 1,62 lit pour 1 000 habitants, lui-même inférieur aux besoins réels, vous ne l'ignorez pas.
De même, l'idée de surdotation de l'Ile-de-France est également battue en brèche par le taux global d'équipement autorisé concernant les structures d'hébergement pour personnes âgées : il est en effet de 160 places pour 1 000 personnes âgées de plus de 75 ans contre une moyenne nationale de 175.
S'agissant encore des services de soins infirmiers à domicile, dont le rôle est essentiel auprès des personnes handicapées, leur permettant notamment un maintien de la vie à domicile, il est à noter que le taux d'équipement de l'Ile-de-France, de 13,13 places pour 1 000 habitants de 75 ans et plus, se situe en dessous de la moyenne nationale situé à 14,62 et que le Val-d'Oise - avec un taux de 12,1 - ou encore l'Essonne - avec un taux de 12,49 - se situent en dessous même du taux d'équipement régional. Il en résulte une grave pénurie, source d'importantes difficultés pour les personnes qui devraient bénéficier de ces services comme pour les personnels concernés.
Un rééquilibrage interrégional - par le haut, bien sûr - est également nécessaire afin de permettre aux personnes le plus lourdement handicapées de bénéficier d'une prise en charge adaptée, la demande de placement en établissement spécialisé restant forte, en Ile-de-France tout particulièrement, mais aussi dans d'autres régions. Considérée comme une région riche, l'Ile-de-France est l'une des plus démunies quant au nombre de places offertes aux enfants et adultes handicapés. Cela justifie encore plus l'idée d'une péréquation qui tendrait à rééquilibrer ce secteur.
De même, que dire de ces milliers d'enfants handicapés qui, ne trouvant pas de place dans des établissements d'éducation et de soins d'Ile-de-France, se voient contraints, chaque semaine, de se rendre en Belgique pour bénéficier d'un accueil, alors qu'ils y ont légitimement et légalement droit dans leur région ? Que se passera-t-il, madame la secrétaire d'Etat, lorsque la Belgique devra réserver toutes les places des ses établissements à la satisfaction des besoins de sa propre population ?
Notre pays est-il digne et responsable lorsqu'il envoie une partie de ses enfants handicapés de l'autre côté de ses frontières ? Je ne le crois vraiment pas !
Je suis également convaincu que, sans une augmentation des moyens dévolus au secteur social et médico-social, aucune amélioration concrète ne pourra être enregistrée dans ce domaine.
Ce principe d'accès équitable doit donc désormais guider l'action menée dans le secteur social et médico-social. A cet égard, madame la secrétaire d'Etat, de nombreuses mesures s'imposent, et je vous demande de bien vouloir expliciter le contenu que vous donnerez à cet article 2, afin qu'il ne reste pas lettre morte.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article additionnel avant l'article 3