SEANCE DU 20 NOVEMBRE 2001
M. le président.
L'amendement n° 12 rectifié, présenté par MM. Pelletier et Laffitte, est ainsi
libellé :
« Après l'article 3, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le 6°
bis
du 1 de l'article 207 du code général des
impôts, il est inséré un alinéa rédigé comme suit :
« ... ° les établissements publics de coopération culturelle ; »
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I
sont compensées par une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575
et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte.
Il s'agit d'un amendement de caractère un peu fiscal.
Aux termes de la doctrine actuelle, les établissements publics de coopération
culturelle chargés de l'exploitation d'un service public à caractère industriel
et commercial risquent, dans certains cas, d'être soumis à l'impôt sur les
sociétés.
Cet amendement a pour objet de garantir l'exonération d'impôt sur les sociétés
des EPCC, exonération qui paraît opportune eu égard à la finalité d'intérêt
général, et non lucrative, de ces établissements. C'est d'ailleurs le cas pour
toute une série d'autres opérations, menées notamment par un certain nombre de
fondations reconnues d'utilité publique.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Ivan Renar,
rapporteur.
M. Laffitte a précisé que son amendement était « un peu »
fiscal. Cela m'a rappelé cette secrétaire qui m'annonça un jour qu'elle était
enceinte en me disant : « Je suis un peu enceinte ».
(Sourires.)
En fait, cet amendement est très fiscal. Il prévoit d'exonérer de l'impôt sur
les sociétés les établissements publics de coopération culturelle à caractère
industriel et commercial. On peut y être favorable, certes, pour faire plaisir
au Gouvernement, mais aussi pour deux raisons. La première : dans les faits,
peu d'EPCC à caractère industriel et commercial présenteront un bénéfice
imposable. Le Gouvernement peut donc être rassuré à cet égard.
(Sourires.)
La seconde raison me paraît être la plus importante : cet
amendement nous donne l'occasion de poser le problème de la fiscalité des
services publics culturels. Or c'est, je crois, un débat que nous devrons
engager et qui devrait nous conduire à prendre des décisions.
M. Louis de Broissia.
Très bien !
M. Ivan Renar,
rapporteur.
Lors de l'examen du projet de loi relatif aux musées de
France, nous avons adopté un amendement du Gouvernement visant à créer un EPIC
et qui constituait, bien sûr, un cavalier, mais dont nous avions admis la
nécessité. Ici, c'est la même chose. Je suis d'accord pour que nous adoptions
cet amendement, afin que l'article additionnel qu'il prévoit d'insérer dans le
texte témoigne de notre volonté d'aborder ce problème.
Alors que, dans notre pays, on n'imagine pas taxer une école maternelle ou une
école primaire, on peut taxer des structures culturelles qui assument, elles
aussi, un service public d'ordre culturel. Cette fiscalisation pose donc
problème.
C'est pourquoi la commission émet un avis favorable sur cet amendement, pour
témoigner de notre volonté d'avancer sur cette question.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Michel Duffour,
secrétaire d'Etat.
Je ne peux suivre M. le rapporteur ni M. Laffitte. En
effet, vous insérez des débats dans le débat. Certes, il s'agit d'une question
importante, mais vous proposez d'adopter cette disposition aujourd'hui alors
qu'elle n'a aucun lien véritable avec la présente proposition de loi, et en
ayant à l'esprit un autre débat.
Le Gouvernement ne peut donc accepter cet amendement. En effet, les
établissements publics, quelles que soient leurs activités et leur nature
juridique, ne sont assujettis à l'impôt sur les sociétés que s'ils exercent une
activité lucrative, c'est-à-dire dans les mêmes conditions que l'exercerait une
entreprise du secteur concurrentiel.
Votre position aurait pour effet d'exonérer les seuls EPCC qui ne se
différencieraient pas des entreprises dans leurs modalités d'exercice, ce qui
n'est pas acceptable au regard du principe d'égalité devant l'impôt. En effet,
les autres établissements fonctionnant ainsi resteraient assujettis à l'impôt
sur les sociétés.
En outre, l'impôt sur les sociétés frappant les bénéfices, votre proposition
inciterait paradoxalement les établissements visés à accumuler les bénéfices.
Je rappelle, en effet, que deux manières permettent de ne pas payer d'impôt sur
les sociétés : soit l'exonération que vous proposez, soit l'absence de
bénéfices par la diminution, par exemple, des tarifs ou des subventions ou par
l'augmentation des dépenses correspondant à l'objet de l'établissement ; c'est
naturellement plus dans cette voie que nous nous orientons.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la
proposition de loi, après l'article 3.
Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l'objet de la
deuxième lecture.
Vote sur l'ensemble