SEANCE DU 21 NOVEMBRE 2001
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Mahéas pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
permettez-moi de développer quelques explications de vote qui auraient
d'ailleurs pu tout aussi bien trouver leur place dans la discussion
générale.
Au moment où les chambres régionales des comptes atteignent l'âge de la
majorité, il convenait de prendre en considération l'évolution des procédures
et la constante montée en puissance de leur rôle. En effet, les tâches n'ont
cessé de croître, sur les plans tant quantitatif que qualitatif, et leurs
contrôles s'effectuent sur des sommes tout à fait considérables.
Impartiales et indépendantes, ces juridictions financières participent de la
transparence qu'une démocratie est en droit d'exiger quant à l'utilisation de
ses deniers publics. Dès lors, la place qui leur est octroyée constitue un
aspect non négligeable du débat sur la modernisation de l'Etat.
C'est pourquoi l'ambition inititale de ce projet de loi était de traduire sur
le plan statutaire l'évolution des procédures ainsi que l'accroissement du rôle
des chambres régionales des comptes, dans l'esprit de la réforme du statut des
conseillers des tribunaux administratifs. Son objectif essentiel est de
revaloriser la carrière des magistrats en assurant la pérennité d'un
recrutement de qualité, en améliorant le déroulement de carrière et en
renforçant le lien entre le corps des conseillers des chambres régionales des
comptes et celui des magistrats de la Cour.
S'agissant de ces questions statutaires, les bases d'un consensus ont
rapidement été trouvées sur l'essentiel, y compris la mobilité géographique,
laquelle conditionnera désormais l'avancement.
Au cours de la navette parlementaire, l'économie générale de ce projet de loi
a été profondément modifiée. En effet, deux volets supplémentaires sont venus
s'ajouter, l'un concernant l'examen de la gestion devant les chambres
régionales des comptes en matière de contrôle de gestion, l'autre aménageant le
régime de la gestion de fait, notamment ses conséquences en termes
d'inéligi-bilité.
Sur ces deux volets, la commission mixte paritaire, réunie la semaine passée,
est parvenue à un accord qui me paraît un juste équilibre, en renforçant la
sécurité juridique des actes des collectivités territoriales, sans pour autant
remettre en cause les attributions des chambres régionales des comptes
concernant le contrôle de la gestion publique locale.
Parmi ces mesures, je pense particulièrement aux précisions apportées quant à
la définition de l'examen de gestion ; à l'amélioration des règles de
publication des observations définitives et au renforcement du principe du
contradictoire ; à la réduction du délai de prescription pour gestion de fait à
dix ans ; à la suppression du caractère automatique de l'inéligibilité
découlant d'une situation de gestion de fait, afin de réserver les sanctions
pénales à la justice pénale - une sanction est néanmoins prévue : la suspension
de la qualité d'ordonnateur de l'élu concerné jusqu'à ce qu'il ait reçu quitus
de sa gestion ; à l'interdiction de publier ou de communiquer les rapports
d'observation dans les trois mois précédant le renouvellement de l'assemblée
délibérante de la collectivité territoriale concernée, traduisant par là même
une pratique déjà courante.
A l'issue de cette longue navette parlementaire, nous ne pouvons que nous
réjouir de la qualité des échanges entre nos deux assemblées, échanges qui ont
permis de faire aboutir cette réforme statutaire attendue depuis fort longtemps
par les magistrats des chambres régionales des comptes et de prendre en
considération les observations légitimes de nombreux élus en ce qui concerne
notamment le contrôle de gestion des chambres régionales des comptes.
Je tiens également à souligner l'esprit d'ouverture du Gouvernement.
En conséquence, le groupe socialiste votera le texte issu des travaux de la
commission mixte paritaire.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin.
Nous arrivons aujourd'hui au terme d'un long processus d'élaboration d'un
projet de loi qui, finalement, devrait être voté à l'unanimité par notre
assemblée. C'est tout à l'honneur de la commission des lois, et je rends
hommage à son président, à son rapporteur et à tous ceux qui ont travaillé à ce
texte.
Je me souviens des propos très virulents que nous avions entendus au début de
l'examen de ce texte ; il s'agissait alors d'une proposition de loi de deux de
nos collègues, qui avait eu le mérite d'ouvrir le débat.
Certes, nul n'ignore que le statut des magistrats des chambres régionales des
comptes devait être revalorisé pour le mettre à niveau avec celui des membres
des tribunaux administratifs. Il n'en demeure pas moins que l'on ne pouvait pas
considérer uniquement cet aspect des choses ; c'était beaucoup trop
réducteur.
Lorsque le Sénat a décidé la création d'un groupe de travail, que présidait
Jean-Paul Amoudry et dont j'ai eu l'honneur d'être le rapporteur, on nous a
accusés de pensées sombres et néfastes à l'encontre du contrôle des
collectivités locales. Loin de nous cette idée ! Nous savons que, en
démocratie, comme l'a dit excellemment notre collègue porte-parole du groupe
socialiste, la clarté des comptes est la règle de base. C'est la raison pour
laquelle les deux assemblées ont voté, à la quasi-unanimité, la réforme de la
loi organique, qui a été promulguée le 1er août 2001, qui engage une immense
révolution dans l'administration pour plus de clarté sur le budget.
Mais, entre les intentions et la réalité, il y a parfois un fossé. Demain,
nous abordons l'examen du projet de loi de finances pour 2002. Nous verrons
alors que, quelques mois après le vote de cette réforme, il y a parfois un
monde entre le souci de clarté et de transparence qui est affiché dans cette
loi organique et la réalité des faits.
S'agissant du contrôle des comptes, globalement, les collectivités locales
sont bien gérées ; elles ne connaissent pas de déficit. D'ailleurs,
l'autofinancement, en termes de comptabilité nationale, des collectivités
locales est positif ; il atténue légèrement le déficit du budget de l'Etat.
Evidemment, s'il est un contrôle à améliorer, dès lors, c'est celui des comptes
de l'Etat. Mais, aujourd'hui, il s'agit des comptes des collectivités
locales.
Avec ce texte, c'est un pas significatif qui sera fait. En effet, en allégeant
la charge des chambres régionales des comptes sur des comptes annexes qui n'ont
pas un intérêt extraordinaire, nous leur permettrons peut-être de mieux traiter
un certain nombre de problèmes importants rencontrés par des collectivités
territoriales. C'est une bonne chose ! C'est la raison pour laquelle il ne
devrait plus y avoir de polémique sur les travées de cette assemblée.
Cela renforce notre conviction que, lorsqu'un texte est important, il est
préférable de ne pas le déclarer en urgence et de faire jouer la navette
jusqu'au bout de sa logique, ce qui permet d'en améliorer toutes les
dispositions.
Aujourd'hui, nous avons la démonstration parfaite, d'une part, de notre souci
de clarifier la gestion locale, d'autre part, du rôle constructif que peut
jouer une navette entre deux assemblées pour des textes d'intérêt général.
Je me réjouis de cette avancée. Je regrette les polémiques que ce texte a pu
susciter, car, en ce qui nous concerne, l'intention était louable. Mais,
aujourd'hui, c'est plutôt un sentiment de satisfaction qui nous anime, et je
peux donc dire que le groupe du Rassemblement pour la République votera ce
texte dans la version qui a été adoptée par la commission mixte paritaire.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union
centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
me devais d'intervenir à ce stade du débat, ne serait-ce que parce que j'étais,
avec mon collègue Jean-Patrick Courtois, à la base de cette polémique qui a vu
le jour sur les chambres régionales des comptes.
Dans un régime comme le nôtre, dans une République, dans un état de droit, il
importe que, régulièrement, le Parlement fasse le point sur les institutions
qu'il a créées. Il convient que, tous les vingt ans, un bilan soit dressé :
l'institution fonctionne-t-elle correctement, donne-t-elle les résultats
attendus, ou bien faut-il apporter quelques modifications à ce qui avait été
prévu au départ ?
Tel était l'objet de la proposition de loi que nous avions déposée.
Rappelez-vous le tollé qu'elle avait suscité, à l'époque, dans la presse et
auprès du premier président de la Cour des comptes ! Nous avions pu calmer
rapidement le jeu grâce à la création d'une commission spéciale présidée par
Jean-Paul Amoudry et dont Jacques Oudin était le rapporteur.
Nous étions tous convaincus qu'il fallait améliorer le statut des magistrats
des chambres régionales des comptes, qui comportait une anomalie par rapport à
celui de leurs homologues des tribunaux administratifs et des cours
administratives d'appel. Mais nous étions également convaincus qu'il convenait
d'améliorer les droits de la défense, d'améliorer la procédure contradictoire,
d'éviter qu'il n'y ait des dérapages, voulus ou inconscients, et de faire en
sorte que les chambres régionales des comptes deviennent vraiment cette
institution inséparable de la décentralisation et nécessaire au bon
fonctionnement des collectivités locales.
Je me félicite que, grâce au talent de notre rapporteur, nous ayons pu
élaborer un texte raisonnable au Sénat et que cela ait été reconnu par nos
homologues de l'Assemblée nationale. Je me félicite aussi que nous ayons su
faire, les uns et les autres, les concessions nécessaires.
Je regrette un peu la disparition du recours pour excès de pouvoir, mais je
l'accepte volontiers, dans cet esprit de conciliation et d'entente qui a animé
nos travaux au cours des lectures successives.
En conclusion, grâce à la navette et à l'aboutissement de la commission mixte
paritaire, les chambres régionales des comptes seront désormais une institution
incontestable, qui fera intégralement partie de notre paysage de la
décentralisation.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union
centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix
l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte proposé par la
commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Je constate que le texte a été adopté à l'unanimité.
(Applaudissements.)
Mes chers collègues, avant d'aborder le point suivant de l'ordre du jour, nous
allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures quarante, est reprise à quinze heures
cinquante.)