SEANCE DU 7 DECEMBRE 2001
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat,
mes chers collègues, Mme Odette Terrade, qui souhaitait intervenir sur le titre
IV, m'a demandé de la suppléer, ce que je fais, vous le constatez, avec un très
grand esprit de solidarité.
D'un montant modeste de 115 millions de francs, le budget consacré aux droits
des femmes augmente de 7,28 % par rapport à celui de 2001.
Particulièrement sensible aux droits des femmes, notre groupe se félicite de
ce choix politique, qui doit permettre, nous y serons vigilants, de poursuivre
les actions engagées, comme le renforcement des permanences locales d'accueil,
d'écoute, d'orientation et d'accompagnement des femmes victimes de violences ou
le financement de mesures visant à favoriser l'égalité professionnelle entre
les femmes et les hommes, prévues par la loi du 9 mai 2001.
En revanche, nous sommes préoccupés - mais, là, ma question s'adresse
davantage à M. le ministre de l'économie et des finances - par l'annulation de
5 millions de francs sur des crédits d'intervention du service des droits des
femmes, dans le projet de loi de finances rectificative pour 2001.
Les inquiétudes que je vous exprime sont d'autant plus vives qu'une grande
part de ces crédits correspond à des aides financières en faveur d'associations
partenaires de votre ministère et du secrétariat d'Etat aux droits des
femmes.
Or ces mêmes associations, dont le travail de terrain est largement reconnu,
sont de plus en plus sollicitées tant dans le cadre des relations partenariales
que le secrétariat d'Etat aux droits des femmes et à la formation
professionnelle entretient avec elles que par nos concitoyennes et nos
concitoyens.
Une telle réduction de crédits va forcément compromettre les initiatives qui
ont été prises. Vous reconnaîtrez avec moi qu'en cette année où l'on fête le
centenaire de la loi de 1901, ce n'est pas un signe encourageant pour les
associations qui oeuvrent quotidiennement pour l'information, l'écoute et
l'orientation des femmes ainsi que pour le développement de leurs droits.
Si les droits des femmes concernent tous les ministères, nous savons cependant
à quel point le secrétariat d'Etat aux droits des femmes joue un rôle
fondamental d'impulsion d'une politique volontariste et innovante en faveur des
femmes.
Qu'il s'agisse de la précarité de l'emploi, des conditions de travail, du
temps partiel non choisi, des contrats de travail à durée déterminée, de la
réduction des écarts de salaires à travail identique, de la reconnaissance des
acquis professionnels et de leur validation ou de la lutte contre les violences
envers les femmes, toutes ces situations doivent trouver des réponses efficaces
et des moyens d'impulsion à la hauteur des ambitions affichées.
Par ailleurs, concernant la loi de juillet 2001 sur l'IVG et la contraception,
monsieur le ministre, nous sommes impatients de voir publiés les décrets sur
l'information et de connaître les moyens que le Gouvernement compte mettre en
place pour favoriser son application rapide. En effet, vous le savez,
aujourd'hui encore, de nombreux médecins continuent d'ignorer la loi et de trop
nombreuses femmes sont toujours contraintes de se rendre à l'étranger faute
d'obtenir un rendez-vous dans les délais.
Quels moyens sont envisagés, notamment pour les hôpitaux, alors que seuls
quatre établissements publics sur douze mettent en pratique l'allongement du
délai d'IVG à douze semaines en Ile-de-France ?
Il convient de se soucier de la responsabilité du secteur public, notamment en
région parisienne, et sur le sens que nous entendons donner à la véritable
mission de service public que constitue l'accès à l'IVG.
S'agissant de la contraception, quels moyens budgétaires seront affectés pour
les campagnes publiques d'information, pour garantir l'efficacité des séquences
d'éducation à la sexualité tout au long de la scolarité des jeunes, pour
augmenter le nombre d'infirmières scolaires - dont le rôle, entre autres, en
terme d'information, de conseils et de soutien des adolescents est primordial -
et pour procéder au remboursement des contraceptifs ? A ce sujet, je vous
rappelle que le stérilet reste encore très partiellement remboursé, ce qui,
nous le savons, pénalise les femmes les plus démunies.
De même, est annoncée depuis longtemps la prise en charge d'une pilule
générique dite de troisième génération ; or, aujourd'hui, le remboursement de
cette pilule, utilisée par 1 600 000 femmes, serait remis en cause au motif
qu'elle serait dangereuse pour la santé. Dès lors - je vous pose la question,
monsieur le ministre - pourquoi reste-t-elle sur le marché ?
La mise en place d'une véritable politique de développement de la
contraception, notamment envers les jeunes générations, reste un défi à
relever.
A l'occasion de l'examen de ces crédits, nous avons souhaité rappeler ces
enjeux importants car ils sont au coeur des progrès de notre société.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
.
M. le président.
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'exécution
de ce budget demeure étroitement liée au contexte économique et social
général.
Sur certains points - les volets politiques de santé publique, la lutte contre
les exclusions, par exemple - nous sommes en présence d'un budget globalement
positif.
Bien que le chemin reste encore long pour privilégier la prévention et pour
développer en France une démarche d'éducation à la santé, il convient de noter
que, cette année, un effort particulier est accompli par l'Etat pour les
programmes de santé publique, singulièrement en ce qui concerne le dépistage
des cancers du sein, du côlon, de l'utérus. Reste à savoir si, dans les faits,
ces ambitions trouveront concrètement à se réaliser.
A juste titre, monsieur le ministre, vous considérez que l'« on ne peut
distinguer la prévention du reste, l'appareillage ou la prise en charge,
notamment ».
Qu'entendez-vous faire pour combler les retards de notre pays en matière
d'imagerie médicale et, par conséquent, pour assurer une couverture égale de
l'ensemble du territoire ?
Un effort particulier est accompli en direction des CHRS, et notamment des
centres destinés aux réfugiés, ce qui apporte un premier élément de réponse aux
attentes fortes des associations qui, depuis cet été, alertent les pouvoirs
publics sur leurs difficultés.
D'autres points méritent d'être soulignés, même si les décisions prises nous
semblent moins positives.
Les quatre chapitres budgétaires que sont le RMI, la CMU, l'AAH et l'API
connaissent ainsi des fortunes différentes.
Concernant plus particulièrement le tassement, prévu initialement, des crédits
du RMI et la réduction de 100 millions de francs supplémentaires votée par
l'Assemblée nationale, nous entendons l'argumentation avancée.
Effectivement, le nombre d'allocataires potentiels semble en diminution.
Toutefois, en 2002, les conditions économiques seront différentes. De plus, le
Gouvernement a décidé d'aligner l'allocation des départements d'outre-mer sur
celle de la métropole et d'augmenter d'un trimestre les possibilités du cumul
entre le RMI et un emploi.
Concernant, enfin, le volet « offre de soins », dont les dépenses diminuent
sensiblement, je retiens tout de même que ce budget traduit les engagements du
Gouvernement. L'accent est mis sur la formation des personnels de santé et les
quotas d'étudiants infirmiers sont revus à la hausse.
Si, effectivement, le nombre de bourses est en augmentation, il n'en demeure
pas moins que toutes les aides-soignantes ayant passé le concours d'infirmière
ne se verront pas attribuer une bourse.
Enfin, s'agissant du fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux
le FIMHO, cette année, la ligne qui y est consacrée enregistre une diminution
de 300 millions de francs de crédits, alors que les projets et les demandes
sont supérieurs aux possibilités de fonctionnement.
Bien qu'appréciant l'effort consenti par le Gouvernement en direction des
hôpitaux - qui sont nombreux à attendre les fonds nécessaires aux
restructurations souvent imposées et à la réhabilitation des locaux -,
j'émettrai quelques réserves concernant le montant exact des crédits débloqués
et la répartition des aides.
C'est pour des raisons bien différentes de celles de la majorité sénatoriale,
qui estime que ce budget est lourd de menaces pour l'avenir, qui craint que la
politique suivie par le Gouvernement dans le secteur hospitalier n'aboutisse à
amplifier le risque d'une explosion des dépenses, que le groupe communiste
républicain et citoyen s'abstiendra sur ce budget.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le ministre, l'Institut de veille sanitaire voit ses crédits diminuer
de 228 673 euros. Or cet institut est chargé, d'une part, d'observer et de
surveiller l'état de santé de la population pour l'ensemble des risques
susceptibles de l'affecter et, d'autre part, d'alerter les pouvoirs publics en
cas de menace pour la santé publique. Il abrite en son sein l'unité de la santé
au travail, qui est plus spécialisée dans la surveillance des risques
professionnels.
Cette unité a-t-elle vraiment les moyens d'assurer sa mission ? Etant donné
tous les risques nouveaux qui apparaissent, j'en doute fortement, et je
souhaite que vous nous donniez les raisons de cette baisse des crédits de
l'Institut de veille sanitaire, car nous pensons - et nous ne sommes pas les
seuls - qu'ils auraient dû, au contraire, être revus à la hausse.
S'agissant, en amont, de la prévention des risques professionnels, je
souhaite, monsieur le ministre, attirer votre attention sur les modalité de
formation des étudiants en médecine en matière de santé au travail.
Quels enseignements peut-on tirer des programmes de faculté de médecine
s'agissant de la médecine du travail ? Tout simplement que l'étude des risques
professionnels constitue - à moins, bien sûr, d'effectuer une spécialisation en
médecine du travail - un parent pauvre des études médicales. Le programme de
cours d'une faculté de médecine de province que je connais bien - qui
s'apparente d'ailleurs à celui de la plupart des autres facultés de médecine
françaises - l'illustre clairement : une vingtaine d'heures de cours, tout au
plus, sont dispensées sur les questions de santé au travail. De plus, elles
n'interviennent que durant la seule sixième année de médecine, avec un contenu
certes varié et pertinent, mais forcément superficiel et trop rapide.
Que dire d'un cours de deux heures qui ambitionne de couvrir toute la question
des cancers professionnels ? Pourtant, une sensibilisation plus précise des
futurs médecins généralistes, notamment, à la santé au travail permettrait des
dépistages plus précoces, des soins plus ciblés et des actions de préventions
plus efficaces.
La dernière observation que je souhaiterais formuler à l'occasion du vote des
crédits de la santé et de la solidarité, se résumera à une question : pourquoi,
dans les plans de lutte contre les cancers, les cancers professionnels sont-ils
totalement ignorés, au point de n'être jamais cités ? Or ces cancers sont le
révélateur le plus caractéristique du déni ordinaire des droits les plus
fondamentaux que sont le droit à la vie et le droit à la retraite.
Le droit à la dignité est aux antipodes des campagnes de culpabilisation
développées actuellement, qui visent à rendre l'individu seul responsable de la
maladie qui le tue.
Vous le savez, monsieur le ministre, les cancers professionnels ont un coût
humain et économique extraordinairement lourd pour les victimes, mais aussi
pour la collectivité. La prévention est un choix politique qui s'oppose à une
raison économique à trop courte vue.
Je vous demande donc, monsieur le ministre de la santé, d'user de tout votre
pouvoir pour que ces questions fassent l'objet d'un plan gouvernemental
prioritaire dans le cadre des programmes de santé publique.
M. le président.
L'amendement n° II-121, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Réduire les crédits figurant au titre IV de 3 840 000 euros. »
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Cet amendement n'a plus d'objet.
M. le président.
C'est exact !
L'amendement n° II-121 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
ÉTAT C
M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 16 158 000 euros ;