SEANCE DU 9 JANVIER 2002
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Dépôts de rapports du Gouvernement
(p.
1
).
3.
Démocratie de proximité.
- Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p.
2
).
Discussion générale
(suite)
: MM. Philippe Darniche, Jean Puech, André
Vallet, Jacques Legendre, Michel Thiollière, Mme Marie-France Beaufils, MM.
Marcel Debarge, Jean-Claude Carle, Aymeri de Montesquiou, Jean-Paul Alduy,
Gérard Le Cam, Jean-Pierre Sueur, Bernard Joly, Alain Vasselle, Yves Détraigne,
Bruno Sido, Jean-Paul Virapoullé, André Lardeux.
Clôture de la discussion générale.
Suspension et reprise de la séance (p. 3 )
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur.
Articles additionnels avant l'article 1er (p. 4 )
Amendement n° 465 de Mme Josiane Mathon. - Mme Josiane Mathon, MM. Daniel
Hoeffel, rapporteur de la commission des lois ; le ministre. - Rejet.
Amendement n° 466 de Mme Marie-France Beaufils. - MM. Gérard Le Cam, le
rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 420 rectifié de Mme Nicole Borvo. - MM. Robert Bret, le
rapporteur, le ministre, Michel Charasse, Michel Caldaguès, Pierre Mauroy,
Jean-Claude Peyronnet, Mme Nicole Borvo. - Rejet par scrutin public
Intitulé du titre Ier (avant l'article 1er) (p. 5 )
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.
Intitulé du chapitre Ier (avant l'article 1er) (p. 6 )
Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.
Article 1er (p. 7 )
MM. André Lardeux, Jean-Claude Peyronnet.
Amendements n°s 401 de M. Jean Arthuis, 3 de la commission, 424 de Mme Josiane
Mathon, 4 de la commission et sous-amendements n°s 525 de M. Jean-Claude
Gaudin, 266 rectifié de M. Jacques Legendre, 354 rectifié de M. Philippe Leroy,
331 rectifié de M. Alain Gournac, 270 rectifié
bis
, 272 rectifié de M.
André Lardeux et 672 de M. Jean-Claude Peyronnet ; amendements n°s 370 du
Gouvernement, 421 de Mme Josiane Mathon, 360 de M. Jean-Claude Peyronnet, 361
de Mme Marie-Christine Blandin, 667 à 669 de M. Michel Charasse et 422 de Mme
Marie-France Beaufils. - MM. Yves Détraigne, le rapporteur, Mme Josiane Mathon,
MM. François Trucy, Patrick Lassourd, André Lardeux, Jean-Claude Peyronnet, le
ministre, Michel Charasse, Robert Bret. - Retrait des amendements n°s 401, 422
et des sous-amendements n°s 525, 266 rectifié, 354 rectifié, 272 rectifié, 672
et 270 rectifié
bis
; rejet de l'amendement n° 424 ; adoption de
l'amendement n° 3 ; adoption du sous-amendement n° 331 rectifié et de
l'amendement n° 4 modifié, les autres amendements devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.
4.
Dépôts de projets de loi
(p.
8
).
5.
Texte soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
9
).
6.
Dépôt d'un rapport
(p.
10
).
7.
Ordre du jour
(p.
11
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
DÉPÔTS DE RAPPORTS DU GOUVERNEMENT
M. le président.
M. le président a reçu de M. le Premier ministre :
- le rapport au Parlement relatif aux ponts détruits par faits de guerre et
non encore reconstruits en ouvrages définitifs et à l'exécution du chapitre
67-50, établi en application de l'article 127 de la loi de finances pour 2001
;
- le rapport sur le service public des télécommunications, établi en
application de l'article L. 35-7 du code des postes et télécommunications.
Acte est donné du dépôt de ces rapports.
3
DÉMOCRATIE DE PROXIMITÉ
Suite de la discussion d'un projet de loi
déclaré d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 415,
2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence,
relatif à la démocratie de proximité. [Rapport n° 156 (2001-2002) et avis n°s
161, 153 et 155 (2001-2002).]
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche.
Le gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le secrétaire d'Etat, est
devenu un spécialiste de la présentation de textes « fourre-tout » ; la loi
relative à la solidarité et au renouvellement urbains en était un magnifique
exemple.
A cet égard, le projet de loi que nous examinons ne manque pas de sel : il
traite à la fois de la démocratie locale, du statut de l'élu, de la
décentralisation et des services d'incendie et de secours, autant de sujets
suffisamment importants pour mériter chacun de faire l'objet d'un texte
spécifique. Mais, décidément, le Gouvernement semble aimer les mélanges, qui
lui permettent sans doute de rendre moins identifiables les sujets abordés.
Personne ici ne nie la pertinence de l'intercommunalité, sa nouvelle
dimension, prenant en compte les problématiques globales de communes souvent
différentes - urbaines, périurbaines et rurales. Je préside l'une de ces
structures, dont je suis un adepte fervent et qui sont un élément indispensable
de la réflexion liée aux territoires élargis, dans le respect, à mon avis
essentiel, de chacune des communes constituant la structure intercommunale.
Sur le texte qui nous est soumis, j'émettrai deux remarques, à mes yeux
fondamentales.
Première remarque, l'élection au suffrage universel direct des représentants
intercommunaux doit être rejetée, car elle entraînerait un affaiblissement
inéluctable des communes, voire, à terme, leur mort.
M. Gérard Braun.
Absolument !
M. Jacques Legendre.
C'est évident !
M. Philippe Darniche.
Tout le monde ici peut imaginer les dégâts que provoquerait l'élection, au
sein des structures intercommunales, de représentants s'opposant à la majorité
municipale.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'élu le plus respecté
dans notre pays est élu au second degré, comme nous sénateurs : c'est le maire.
Il est respecté au-delà des clivages politiques, il est l'élu le plus proche
des citoyens, c'est lui qui incarne, avec son conseil municipal, la proximité.
Par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat, la démocratie de proximité est
en place depuis deux siècles et c'est elle que, aujourd'hui, vous voulez
remettre en cause.
Qui peut, mieux que le maire et les membres du conseil municipal, légitimés
par le suffrage universel de proximité, représenter les citoyens dans des
structures issues des communes ? Le Gouvernement fait un contresens grave en
remettant en cause cet équilibre.
M. Alain Gournac.
Très grave !
M. Philippe Darniche.
Par ailleurs, le flou qui entoure encore l'intercommunalité aux yeux des
citoyens ne doit pas être renforcé par une telle modification.
Faites confiance aux maires pour faire progresser l'intercommunalité !
M. Alain Gournac.
Oh oui !
M. Philippe Darniche.
Non seulement le projet de loi condamne à mort les communes à court terme,
mais il met aussi en grave péril une intercommunalité qui est en phase de
construction dans notre pays.
M. Alain Gournac.
Absolument !
M. Philippe Darniche.
Ma seconde remarque vise la volonté toujours plus exacerbée de M. le ministre
de l'intérieur de tout encadrer.
A cet égard, je suis trop attaché à la liberté pour accepter les
réglementations de conseils de quartier. Pourquoi vouloir toujours tout
réglementer, tout institutionnaliser, tout encadrer ? Monsieur le secrétaire
d'Etat, faites confiance à la créativité du monde associatif pour parer aux
excès de notre société. Croyez aux contre-pouvoirs que celui-ci peut
judicieusement mettre en place auprès de nos institutions politiques
locales.
Cette tendance se rapproche parfois d'un collectivisme rampant que nous ne
saurions accepter. Trop de démocratie tue la démocratie, trop de réglementation
tue la loi.
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Philippe Darniche.
Si l'intercommunalité repose avant tout sur les principes de liberté, de
solidarité et de subsidiarité, le renforcement de la démocratie intercommunale
ne peut s'opérer que dans le resserrement des liens noués, sur le terrain,
entre les communes et les communautés. A mes yeux, il revient donc en priorité
aux élus intercommunaux eux-mêmes d'éclairer et d'orienter ce débat, les
pouvoirs publics devant être à leur écoute. Or, vous faites l'inverse.
Pour autant, je n'oublie pas les points positifs de ce texte. En particulier,
je dis « oui » au remboursement des frais de déplacement et de garde d'enfants
des élus, je dis « oui » à la nécessaire revalorisation de leurs indemnités de
fonction, de leur congé de formation et de leurs droits sociaux, je dis « oui
», enfin, à l'accès pour tous aux fonctions électives locales et à une
meilleure articulation entre exercice d'un mandat local et activité
professionnelle.
Toutefois, je mets en garde tous ceux qui, par des dispositifs législatifs et
réglementaires, affaibliraient les communes de France, qui sont et doivent
rester, pour nos concitoyens, l'échelon de base et la cellule de vie par
excellence de notre démocratie locale.
(Applaudissements sur les travées du
RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. le président.
Mes chers collègues, je vous rappelle que chaque groupe dispose d'un temps de
parole limité. Par conséquent, si certains intervenants dépassent le temps qui
leur est imparti, les derniers orateurs inscrits de leur groupe ne pourront pas
intervenir !
La parole est à M. Puech.
M. Jean Puech.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous allons célébrer le vingtième anniversaire des lois de décentralisation.
C'est le moment que M. le ministre de l'intérieur a choisi pour nous présenter,
au nom du Gouvernement, le quarante-troisième projet de loi touchant aux
fondements mêmes de l'organisation territoriale depuis les textes fondateurs de
1982 et de 1983.
L'intitulé de ce texte : « Projet de loi relatif à la démocratie de proximité
», dénote une grande ambition, puisqu'il s'agit d'affirmer le rôle et la place
de la démocratie locale dans l'approfondissement de la démocratie en France.
Parallèlement, le Gouvernement se réserve le monopole de la célébration du
vingtième anniversaire des lois de décentralisation. Peut-être l'ignorez-vous,
mes chers collègues, mais, le 12 décembre dernier, M. le ministre de
l'intérieur a invité les trois présidents d'association d'élus à découvrir,
presque toutes affaires cessantes, au milieu d'un parterre de hauts
fonctionnaires chevronnés, le programme, déjà arrêté, des manifestations qui se
dérouleront en mars prochain.
(M. Gournac s'esclaffe.)
L'Etat a tout organisé, sans imaginer le moins du monde que les élus
territoriaux puissent avoir, s'agissant de cette commémoration, un autre point
de vue ou, tout simplement, leur point de vue.
M. Alain Gournac.
Aucun respect !
M. Jean Puech.
Nous sommes associés, tardivement, à un événement qu'il faut sans doute
saluer, mais qui est conçu par l'Etat et pour l'Etat. Quel symbole ! Et je ne
suis pas là pour polémiquer !
Cela illustre, en tout cas à mes yeux, une dérive constante. En effet, de
projet de loi en projet de loi, l'esprit des lois de décentralisation s'est
dilué, s'est perdu. Au fil des ans, l'Etat a repris des deux mains l'essentiel
des transferts auxquels il avait consenti en faveur des collectivités
territoriales. Aujourd'hui, les élus locaux ne sont pas considérés comme les
acteurs essentiels, comme les acteurs centraux de la décentralisation. L'Etat
craindrait-il l'instauration d'un nouvel équilibre des pouvoirs, qu'il est
urgent de définir pour notre pays et qui se trouve au coeur de la
décentralisation ?
Ainsi, dans cette logique, le projet de loi que l'on nous présente, en fin de
législature, après cinq années de gouvernement, ignore cet enjeu fondamental de
l'équilibre des pouvoirs en France. D'ailleurs, tous les thèmes importants ont
souvent été traités par d'autres départements ministériels, parfois même sans
que le ministère de l'intérieur soit associé à la démarche. Quelle que soit la
bonne volonté de M. Vaillant, ce qui fait le fond de ce texte échappe donc au
ministre de l'intérieur. Comme cela a déjà été souligné par des orateurs qui
sont intervenus avant moi à cette tribune, il s'agit en quelque sorte d'un
projet de loi portant diverses dispositions relatives à la gestion des
collectivités locales...
Pourtant, ce projet de loi arrive après les travaux de la mission Mauroy. Il
était censé être, pour partie au moins, l'aboutissement de cette concertation.
Mais les travaux de cette mission, cela a été observé de manière unanime, ont
été contredits par des décisions gouvernementales touchant la fiscalité des
collectivités, l'organisation du territoire à travers la loi Voynet et,
surtout, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, la loi
SRU. La réforme de l'Etat, qui est tout de même, je le répète, l'élément
essentiel dans la cohérence d'une nouvelle étape de la décentralisation, n'a
pas été abordée, n'est toujours pas abordée. Or, vous le savez bien, on ne peut
aborder sérieusement une étape décisive de la décentralisation sans traiter
sérieusement de la réforme de l'Etat.
Personnellement, j'ai eu du plaisir à participer à la commission présidée par
notre éminent collègue Pierre Mauroy jusqu'au jour où il est apparu que ce
travail était contredit dans les faits. Nous débattions, nous travaillions et
le train du centralisme n'en gardait pas moins sa vitesse de croisière...
Reconnaissons-le, il ne vous restait plus alors une grande marge de manoeuvre.
Vous avez tout de même essayé de l'utiliser.
Vous aviez la possibilité d'apporter une réponse - même partielle - aux
préoccupations légitimes des élus quant aux conditions mêmes d'exercice de leur
mandat. Vous l'avez fait. Nous allons oeuvrer au cours de ce débat pour
améliorer le texte sur ce point.
Nous attendions de vous des avancées en matière de compétences. Nous
souhaitions que vous puissiez imposer la décision politique au refus quasi
absolu de certaines administrations centrales de céder une once de pouvoir.
Vous y avez renoncé dès le départ. Vous vous en êtes tenu à quelques gestes
symboliques à l'Assemblée nationale en direction des régions. Vous avez procédé
de la même manière, pour l'instant verbalement, vis-à-vis des départements.
Mais il vous sera difficile d'aller plus loin alors qu'il ne faut surtout rien
modifier, par exemple, du statut des personnels en cette période ! L'essentiel
en ce domaine s'est déroulé ailleurs aussi bien pour l'application des 35
heures que pour les avantages accordés aux personnels des services
départementaux d'incendie et de secours, les SDIS, l'élaboration de
l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, le projet de loi sur l'eau, la
régionalisation ferroviaire, l'avant-projet de loi sur la sécurité civile qui
ne verra pas le jour, et j'en passe.
Dans ce contexte extrêmement difficile, toutes les associations d'élus ont
cependant travaillé pour tenter de faire prendre en compte la réalité de la
décentralisation à la française et sa spécificité dans le paysage européen.
Depuis vingt ans, les élus de terrain s'investissent sans arrière-pensée dans
la décentralisation.
Mais l'Etat veillait et veille toujours. Il s'est acharné à brider l'autonomie
émergeante des collectivités territoriales et à les transformer en simples
délégataires de gestion ! L'Etat a ainsi confisqué la réforme de Gaston
Defferre.
Pourtant, nous voulons croire que rien n'est encore tout à fait perdu. Les
travaux de la mission Mauroy n'ont pas été inutiles, même s'ils sont restés
partiels.
Les associations d'élus ont pu faire valoir bon nombre d'orientations. C'est
le cas de l'Assemblée des départements de France, que j'ai l'honneur de
présider.
Nos propositions sont équilibrées. Surtout, elles me paraissent conformes à
l'esprit qui a présidé à la conception des lois de 1982-1983. Elles permettent
d'éviter à la fois les tentations d'un véritable fédéralisme et d'une
recentralisation administrative dont on voit les effets pervers. Elles s'en
tiennent à l'essentiel de ce qui est la base de toute réflexion politique sur
l'avenir de la démocratie locale : la conscience que le suffrage universel
fondé sur le scrutin uninominal est le garant de la liberté, de la proximité et
de la responsabilité.
Le Sénat sait tout cela. Il a été et il reste sur tous les fronts pour
promouvoir et défendre les acquis de la décentralisation. Aussi, j'ai plaisir à
rendre hommage aux présidents et aux rapporteurs des commissions concernées,
qui ont fait un travail remarquable à partir d'un texte difficile.
Des améliorations substantielles ont été apportées au texte qui nous arrive de
l'Assemblée nationale. Je souhaite vivement, monsieur le secrétaire d'Etat, que
le Gouvernement les prenne définitivement à son compte.
Je me contenterai de resituer quelques amendements.
Tout d'abord, il convient de clarifier enfin la ligne de partage entre les
notions de démocratie représentative et de démocratie participative. Les deux
ont leur place, mais il faut que chacune soit à sa place.
Conseils de quartier, conseils de pays, le danger de l'éloignement des centres
de prise de décision commencerait à être compris. Tant mieux si c'est le cas.
Néanmoins, dans la conception et la traduction législative de ces dispositions,
l'Etat entretient la confusion.
Aussi, je souhaite que le rôle et la composition de ces instances soient
clairement définis. Les élus territoriaux et, bien entendu, ceux des
départements doivent pouvoir y siéger aux côtés des élus municipaux vu les
compétences partagées, sans ambiguïté à l'égard des partenaires associatifs ou
socioprofessionnels.
Ensuite, je souhaite une démocratie locale apaisée. C'est un impératif pour
que la France puisse faire vivre une démocratie sereine. Pour réussir sur ce
point, il faut qu'un certain nombre de dispositions concernant le
fonctionnement des institutions voient le jour. Il est important, par exemple,
d'harmoniser le statut des élus territoriaux des trois niveaux de
collectivités. Vous comprendrez que j'insiste, au nom de tous mes collègues
conseillers généraux, pour que leurs droits soient définis en parfaite équité
avec ceux de leurs collègues municipaux en ce qui concerne tant leurs régimes
indemnitaires que la formation ou à certaines modalités d'accès à la
retraite.
Dans le même esprit, il convient aujourd'hui de confirmer le changement de
dénomination des conseils généraux en conseils départementaux et de conseiller
général en conseiller départemental. C'est une demande unanime des
départements. L'Assemblée nationale a suivi en comprenant qu'il s'agissait tout
simplement de répondre à un souci de cohérence et de modernité.
En outre, je souhaite vivement que ce texte ne soit pas une occasion
d'introduire la tutelle déguisée d'une collectivité territoriale sur une
autre.
M. Alain Gournac
Eh oui !
M. Jean Puech
C'est contraire aux lois de décentralisation. Tout élu, dans cette enceinte,
sait par expérience que les interventions économiques des régions, des
départements et des communes constituent une compétence partagée. Les effets de
cette action de partenariat sont complémentaires. Le texte de M. Zucarelli,
chargé de la décentralisation, avait recueilli notre accord, après une très
large concertation. Je propose qu'il soit repris.
Enfin, je voudrais dire que les collectivités territoriales et les
départements sont prêts à assumer directement un certain nombre de compétences.
Je pense aux routes nationales, actuellement délaissées, qui ne reçoivent
pratiquement plus de crédits, même pas pour leur entretien. Je pense également
à la santé scolaire, aux ports de commerce, au patrimoine culturel et aux SDIS.
Il faut aller jusqu'au bout de la logique. Je souhaite que ces nouvelles
missions soient inscrites dans la loi.
Je dirai quelques mots concernant les SDIS, pour vous demander, monsieur le
secrétaire d'Etat, comme je l'ai déjà fait, d'avoir le courage de trancher
enfin la question des responsabilités.
Nos rapporteurs formulent, à mes yeux, des propositions qui vont dans le bon
sens. Le département est clairement situé comme chef de file en ce domaine sur
le plan de la responsabilité politique, financière et administrative. Cela se
traduit par une majorité claire de ses représentants au conseil
d'administration, par un accord conjoint sur la désignation du directeur et par
un financement en grande partie à la charge du département.
Il y a débat entre nous sur les modalités de mise en oeuvre de ces principes,
notamment au regard des compensations financières. C'est normal !
Les communes sont des acteurs de premier rang pour la sécurité. Les charges
financières sont aujourd'hui considérables, et elles le seront plus encore
demain. Ces considérations peuvent amener les uns et les autres à des positions
contradictoires. Il faut pourtant décider. J'espère que le Sénat, dans sa
sagesse, saura le faire.
Toujours en ce qui concerne les SDIS, je ne souhaite pas que soient retenues
les éventuelles dispositions contenues dans le projet de loi sur la sécurité
civile, qui ne nous est pas soumis aujourd'hui. En effet, créer une sorte de
mutualisation des SDIS imposée automatiquement par l'Etat ruinerait les efforts
accomplis pour clarifier une situation déjà passablement confuse. Monsieur le
secrétaire d'Etat, rassurez-nous sur ce point.
Ma conclusion ne vous surprendra pas. Je l'ai exprimée maintes fois et encore
tout récemment lors du dernier congrès de l'Assemblée des départements de
France. Elle est partagée par le Sénat et, en premier lieu, avec force et
constance, par son président.
La décentralisation a vingt ans. Alors qu'elle devrait aujourd'hui exprimer
totalement sa majorité, force est de constater qu'elle piétine, quand elle ne
recule pas au gré des gouvernements et selon l'humeur des hauts fonctionnaires
de l'administration centrale.
Pendant ce temps, nos concitoyens réclament plus d'attention. Ils veulent être
écoutés, être entendus, ils souhaitent participer au débat sur les sujets qui
concernent leur vie quotidienne. Ne manquons pas cette chance !
Pour éviter que la décentralisation ne soit, demain, à ranger au rayon des
bons souvenirs, il faut la graver dans le marbre de la Constitution. C'est le
seul moyen de l'inscrire sur le long terme dans nos principes démocratiques.
C'est l'unique façon de provoquer durablement un nouvel équilibre des pouvoirs
en France. Les Français l'appellent de leurs voeux. Ils souhaitent non pas
moins d'Etat mais mieux d'Etat, et des collectivités territoriales pleinement
responsables.
Aussi, il serait très utile, dans le débat qui s'ouvre, que le Gouvernement
nous dise son sentiment sur cette orientation. Le paysage de nos institutions
en découle. Le pays et ses élus ont besoin de savoir.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Mes chers collègues, je vous invite à être solidaires : si un orateur utilise
quasiment tout le temps de parole qui est imparti à son groupe, il ne restera
pratiquement plus rien pour celui qui est inscrit en queue de peloton !
M. Dominique Braye.
Il faut être tolérant, monsieur le président !
M. le président.
Le débat a été organisé par la conférence des présidents. Il convient de ne
pas déraper !
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Vallet.
M. André Vallet.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
commission Mauroy a présenté, voilà quelque temps, des propositions qui avaient
une certaine cohérence. Sur de nombreux points, elle avait réussi à obtenir
l'accord des diverses sensibilités politiques de notre pays. Or nous ne
retrouvons pas ces propositions ici. Je croyais que, hier, notre collègue M.
Pierre Mauroy allait s'insurger contre une telle situation. En effet, le moins
que l'on puisse dire, c'est que l'on ne retrouve pas dans le texte qui nous est
présenté l'excellent travail qui a été réalisé voilà quelques mois.
M. Vaillant a déclaré qu'il s'agissait d'un premier volet et qu'il y en aurait
d'autres ; mais le temps risque de manquer au Gouvernement ! Ce dernier, comme
l'a dit hier Mme Mathon, a choisi la méthode de l'« effilochage », à savoir un
peu aujourd'hui et peut-être un peu plus demain.
Ce texte comporte un certain nombre de propositions qui - c'est le moins que
l'on puisse dire - n'ont pas de lien entre elles : en réalité, ce projet de loi
fait illusion, mais manque cruellement - cela a été dit plusieurs fois -
d'ambition.
En effet, une vraie décentralisation soulève des problèmes d'aménagement du
territoire, de développement économique de nos régions, de formation
professionnelle, d'enseignement, de sécurité, autant de problèmes qui
n'apparaissent pas dans ce projet de loi.
Je voudrais m'arrêter sur trois points.
Le premier, qui a été largement évoqué, concerne les conseils de quartier. Je
m'étonne que l'on « découvre » les conseils de quartier ! Ils existent dans de
très nombreuses communes, et je ne comprends toujours pas pourquoi on veut les
rendre obligatoires et les institutionnaliser. Qui siégera dans ces conseils ?
Vraisemblablement tous les recalés du suffrage universel, qui trouveront là une
possibilité de s'exprimer quand le suffrage universel ne leur aura pas permis
de le faire quelques mois avant !
(Applaudissements sur les travées du RDSE,
de l'Union centriste et du RPR.)
Pourquoi leur donner une légitimité ?
Pourquoi demander aux conseils de quartier un avis sur tous les problèmes des
quartiers ? Le maire a une vue d'ensemble de sa ville. C'est lui qui assure
l'équilibre de quartier à quartier. Si un avis est demandé aux divers conseils
de quartier s'agissant, par exemple, de l'implantation, nécessaire parfois,
d'une usine de déchets, il sera obligatoirement négatif ; par conséquent, si le
maire suit les avis de chaque conseil, où pourra-t-il implanter l'usine ?
Le deuxième point concerne l'élection au suffrage universel des délégués
communautaires.
Ce projet me semble tout à fait incohérent et lourd de conséquences, car, peu
à peu, c'est vers la disparition de nos communes que nous nous dirigerons si
nous allons trop loin en ce domaine.
M. le rapporteur a dit hier le rôle irremplaçable des communes dans l'édifice
institutionnel de notre pays. Je me permettrai, monsieur le rapporteur, de
parler, quant à moi, d'édifice « républicain ». La République a été faite par
les communes, et la véritable démocratie de proximité, c'est dans les communes
qu'elle se pratique ! Que seront nos communes, demain, si une grande partie du
pouvoir se déplace ailleurs ?
En outre, il pourrait se produire un phénomène pour le moins inquiétant, à
savoir qu'une personne, candidate à des élections municipales, battue dans sa
commune, se présentant également à la communauté, se trouve élue par les autres
communes - pour diverses raisons, éventuellement politiques -, et on aura alors
l'extrême surprise de voir celui qui a été battu exercer le plus de
responsabilités dans la commune qui n'a pas voulu de lui !
J'en viens enfin au troisième point qui me préoccupe : le droit des élus
minoritaires. L'opposition, dans toutes les communes, trouve toujours le moyen
de se faire entendre. La vie démocratique, très riche à l'échelon communal,
permet à l'opposition de s'exprimer à travers le conseil municipal bien sûr,
mais aussi dans la presse, les publications et les réunions.
En réalité, tout dépend du maire. C'est à lui d'instaurer le débat
démocratique, et les maires habiles ont toujours su le faire dans leurs
communes. Un bon maire y parvient sans que la loi le lui impose. Je pourrais
même ajouter, non sans quelque perfidie, que les oppositions municipales sont
souvent mieux traitées dans ce pays que ne l'ont été depuis cinq ans les
oppositions au gouvernement auquel vous appartenez !
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
Ce texte, en réalité, est conjoncturel, dérisoire et, hélas ! contraignant.
C'est parce que vous n'avez pas une vision forte, une vision d'ensemble de la
décentralisation qu'il n'est pas possible d'accepter ce texte. Et c'est
pourquoi la majorité du groupe du RDSE n'est pas d'accord avec vos
propositions, monsieur le ministre.
(Applaudissements sur les travées du
RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Legendre.
M. Jacques Legendre.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour
parvenir à un texte utile et équilibré en matière de démocratie locale, il faut
avoir la sagesse de procéder à de nombreuses consultations, d'écouter les
associations d'élus et de laisser les assemblées parlementaires - le Sénat, en
particulier - jouer pleinement leur rôle. L'avez-vous vraiment fait, monsieur
le ministre ? C'est ainsi qu'a été préparée la loi de 1992 ou la loi de 1999
sur l'intercommunalité, et c'est l'une des raisons essentielles de leur
succès.
Le parlementaire d'opposition que je suis n'a eu aucune difficulté à
reconnaître l'intérêt de ces textes et a tenu, en sa qualité de rapporteur
général de la commission de coopération intercommunale du département du Nord
et de président de la première communauté de villes créée en France dès 1992 et
devenue facilement communauté d'agglomérations en 1999, à les mettre en
pratique.
Vous l'avez compris, monsieur le ministre, je suis un partisan résolu de
l'intercommunalité. Mais encore faut-il savoir pourquoi nous devons souhaiter
le succès de l'intercommunalité.
Je suis partisan de l'intercommunalité parce que c'est à mon avis une chance
pour la France que d'avoir 36 000 communes, c'est-à-dire un maillage fin du
territoire national et, partout, à proximité de chacun, un groupe d'hommes et
de femmes élus par leurs concitoyens pour gérer leur commune, petite ou grande,
dont l'histoire explique le territoire et qui plonge ses racines dans le
passé.
Il est bien évident que nombre de ces communes, trop peu peuplées, ne peuvent
pas répondre à toutes les nécessités de la vie moderne, à toutes les attentes
de nos concitoyens. Il leur faut donc s'associer à d'autres pour pouvoir faire
face ensemble aux nécessités nouvelles. Les communes consentent alors une
délégation de pouvoirs, de compétences : c'est démocratique ; c'est nécessaire.
Grâce à l'intercommunalité, les communes retrouvent ainsi leur efficacité, le
maire restant bien, pour ses concitoyens, le premier responsable de sa commune,
le premier magistrat.
Mais n'y aurait-il pas maintenant un certain emballement de l'intercommunalité
? On aurait pu croire que le mauvais procès fait au trop grand nombre de nos
communes - 36 000 - était maintenant dépassé dans la mesure où
l'intercommunalité permettait de concilier le nombre et la pertinence.
Et voilà que ce texte, sous l'étiquette
a priori
attrayante de la «
démocratie de proximité », rouvre le débat en décidant que les conseils
communautaires devront à l'avenir être élus au suffrage universel direct. Ce
n'est pas une réforme anodine ; ce n'est pas une réforme mineure !
Quand les communes délèguent des compétences, elles continuent, à travers
leurs représentants au conseil communautaire, à en contrôler la mise en oeuvre.
Si le conseil communautaire est élu au suffrage universel direct, comme le
conseil municipal, il y gagne une légitimité directe ; il est en droit de
l'assumer sans tenir compte de la position des conseils municipaux. Nous
passons alors de l'intercommunalité à la supracommunalité !
Réduits à la portion congrue, les conseils municipaux en seront rapidement
réduits à n'être plus que des conseils de quartier élus - c'est tout de même
une différence importante ! -, et l'intercommunalité, beaucoup plus vaste,
beaucoup plus peuplée et parfois beaucoup plus éloignée psychologiquement et
géographiquement des citoyens sera devenue une nouvelle commune.
Comment pouvez-vous concilier dans le même texte, monsieur le ministre, une
telle évolution et votre préoccupation de la proximité érigée en valeur
essentielle de la démocratie ?
Monsieur le ministre, votre texte est porteur, sur ce point, d'une
contradiction qui le condamne.
Mais est-ce bien une contradiction ?
En demandant l'urgence, c'est-à-dire en refusant à la représentation
nationale, en particulier au Sénat, le temps nécessaire à un examen complet des
conséquences de ce texte, ne voudriez-vous pas gommer, cacher ce qui se dessine
en fait : la disparition programmée des communes au profit de nouveaux
territoires communaux beaucoup plus vastes nécessitant, en effet, la mise en
place, par exemple, de comités de quartier ?
Je n'ai rien contre les comités de quartier. Maire pendant quinze ans, j'ai
pratiqué, comme beaucoup d'entre nous, les réunions de quartier afin de
dialoguer, de débattre avec un public aussi large que possible, avec l'ensemble
de la population et avec les associations. Mais, pour l'essentiel, un comité de
quartier est constitué de personnes nommées. Ce peut donc être un outil
efficace de dialogue, mais parfois aussi - il faut bien le dire - l'instrument
d'un quadrillage politique rien moins que démocratique.
Au comité de quartier, je préférerai toujours la commune, élue, démocratique,
avec son maire, premier magistrat, autorité de proximité en qui la population
se reconnaît et en qui elle a confiance.
Bien sûr, il est aussi nécessaire de concevoir une intercommunalité de projets
qui soit autre chose que l'addition des exigences des beffrois. Faites-nous
confiance, monsieur le ministre, pour atteindre cette hauteur de vue ; c'est un
président de communauté d'agglomération qui vous le dit. Je me sens
parfaitement capable, avec mon conseil communautaire composé de représentants
désignés par les conseils municipaux, de concevoir des projets territoriaux
ambitieux, et je n'ai pas pour cela besoin de devenir un super-maire.
Notre collègue M. Mauroy a défendu hier votre projet : si j'avais encore un
doute sur le fait que l'intention cachée de ce texte était de programmer la
disparition des petites communes, je ne l'aurais plus, après avoir entendu
Pierre Mauroy ! Hier soir, très franchement, monsieur le ministre, M. Mauroy a
passé les petites communes par profits et pertes !
Ses arguments m'étonnent. Elus du Nord, nous sommes tous deux à même de suivre
ce qui s'est passée en Belgique : il est exact que les Belges, comme les
Allemands, ont regroupé leurs communes ; mais, précisément, ils sont nombreux,
maintenant, à le regretter. Très clairement, leur réforme s'est faite au profit
des agglomérations centres et a souvent laissé en situation de déshérence les
périphéries des nouvelles communes.
M. Dominique Braye.
Très bien !
M. Jacques Legendre.
Est-ce ce que vous recherchez en parlant de proximité ?
M. Mauroy nous a bien sûr parlé de démocratie et de République. Mais il est
devenu un spécialiste de la fusion de communes, éventuellement contre le
sentiment de la population, et sans jamais lui demander son avis. Il y a deux
ans, le Sénat avait adopté, sur ma proposition, un amendement prévoyant qu'en
cas de fusion le conseil municipal de la commune concernée avait l'obligation
de consulter la population par référendum. Notre collègue avait combattu cet
amendement que ses amis de l'Assemblée nationale ont évidemment enterré.
Refuser de donner la parole à la population sur un sujet aussi essentiel que
le maintien même d'une commune, est-ce cela la démocratie, notamment la
démocratie de proximité ?
M. Dominique Braye.
Très bien !
M. Jacques Legendre.
Je comprends que l'on préfère aux conseils municipaux élus des comités de
quartier choisis.
Mes chers collègues, il est temps de rappeler aujourd'hui notre attachement à
quelques principes : nous sommes pour la participation des citoyens -
permettez-moi de dire que c'est une notion chère à tous les gaullistes -, nous
croyons que la démocratie s'exprime fondamentalement à travers ses élus et nous
réaffirmons, comme l'Association des maires de France le formule si
explicitement dans sa carte de voeux, que la France a besoin de tous ses
maires.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Thiollière.
M. Michel Thiollière.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour que la
loi atteigne l'objectif affiché : approfondir la démocratie locale, il faut
partir de questions simples. Que veut le citoyen ? Que veut l'élu ?
Prenons un exemple concret : tous les élus locaux en connaissent de
semblables.
Le maire invite à une réunion, dans sa commune ; je vous assure que,
contrairement à ce que l'on peut supposer en lisant le projet de loi, cela se
fait déjà : des élus ont déjà rencontré des citoyens, des élus ont même déjà
rencontré des électeurs ! Au cours de cette réunion, donc, les habitants
interpellent le maire de la sorte : « Que faites-vous, monsieur le maire, pour
la sécurité ? Monsieur le maire, peut-on trouver un emploi à mes enfants ? Il
faudrait ouvrir une classe à la rentrée. Il faudrait un bureau de poste. Quand
va-t-on prolonger la ligne de bus jusque chez nous ? » Autant de questions de
proximité, débattues démocratiquement : c'est la réalité quotidienne de la
démocratie de proximité.
A chacune d'entre elles, le maire devrait répondre : « Ce n'est pas à moi
qu'il faut s'adresser », parce que, effectivement, les réponses ne relèvent pas
de sa compétence légale. Or, chaque fois, le maire voudrait répondre : « Je
vais faire quelque chose. »
C'est d'ailleurs ce qu'il fait, on le sait bien, mais en pensant à toutes les
entraves, à toutes les difficultés qu'il va rencontrer pour résoudre ces
problèmes qui ne sont pas de sa compétence.
L'habitant, lui, voudrait un élu vraiment responsable et des collectivités aux
compétences claires, parce que, dans son esprit, son élu est responsable. Et,
en démocratie, c'est toujours le citoyen qui a raison : il faut donc
l'écouter.
L'élu et le citoyen doivent se retrouver autour d'un nouveau contrat
républicain simple et confiant. La République doit se reconstruire autour de ce
contrat.
Parions qu'au-delà des mesures techniques prévues au titre II du projet de
loi, qui vont dans le bons sens, ce texte ne permettra ni d'intéresser
davantage le citoyen à la vie locale, ni de rendre l'élu plus responsable et
donc plus légitime, ni de mieux définir les missions de nos collectivités
territoriales.
Permettez-moi de penser qu'à l'ère d'Internet, de
Star Academy
et du
fait de l'empilement des procédures déjà existantes, il faudra plus que des
mesures ponctuelles : il faudra une vraie réforme de la démocratie locale.
Cette réforme doit placer le citoyen et la commune au coeur de la démocratie
de proximité, parce que la République est faite pour le citoyen, parce que la
commune est le repère incontesté de la République.
Il faut donc renoncer à tout ce qui peut handicaper encore plus le maire dans
son travail.
Ainsi, il convient de renoncer aux freins qui empêchent ou ralentissent la
réalisation du projet sur lequel le maire a été élu. On ne peut plus en effet
considérer que le temps des élections est une parenthèse dans la vie
démocratique, que le projet du maire élu doit être à nouveau contesté et sa
mise en oeuvre corsetée dès le lendemain des élections. C'est en agissant ainsi
que l'on affaiblit gravement la démocratie. De ce point de vue, le projet de
loi est inquiétant.
Il faut aussi renoncer à la mise en place de contre-pouvoirs au maire à
l'échelon intercommunal. Il faut éviter à tout prix l'organisation perverse de
conflits fratricides entre la commune et son intercommunalité. Celle-ci doit
aider la commune. Elle doit être une fédération de communes qui se rassemblent
librement pour travailler à des projets partagés. Mais le maire reste
l'indispensable trait d'union entre le citoyen et la communauté.
De ce point de vue, l'élection au suffrage universel des intercommunalités
doit respecter le maire et la commune. Fondre la commune dans
l'intercommunalité, nier le rôle prééminent du maire, c'est éloigner le citoyen
des décisions, c'est aller contre l'objet recherché par ce projet de loi.
La réforme nécessaire doit, au contraire, donner plus de libertés au maire et
lui faire confiance, afin d'accroître l'efficacité, la légitimité, pour
répondre efficacement aux vraies questions de nos concitoyens.
Exigeons du maire des résultats mais donnons-lui les moyens d'avancer parce
que lui seul - c'est l'un des rares à être dans ce cas dans notre République -
est responsable, tous les jours, devant ses concitoyens. Faisons donc en sorte
que l'Etat moderne aide le maire au lieu d'entraver souvent sa démarche !
Demandons, bien sûr, au maire de travailler avec ses concitoyens, mais
laissons-lui la liberté d'organiser cette discussion comme il l'entend parce
que lui seul sera responsable, à la fin de son mandat, de ses actes et de sa
méthode.
La réforme nécessaire doit aussi clarifier les missions des collectivités.
Puisque la commune, c'est la démocratie de proximité, redonnons-lui une
légitimité ! Mais définissons aussi clairement les missions des uns et des
autres en exigeant d'eux la même transparence, la même disponibilité et la même
relation au citoyen que celle qu'assume le maire dans sa commune, que ce soit à
l'échelon des intercommunalités, à celui des départements, à celui des régions
ou à celui de l'Etat.
Cela est possible en généralisant la notion de chef de file, qui identifie les
responsabilités et permet au citoyen de s'y retrouver.
Reconnaissons que la loi va dans le bon sens pour les services départementaux
d'incendie et de secours, par exemple. Mais il reste tant à faire pour que nos
concitoyens sachent qui fait quoi et qui est responsable de quoi !
Si le projet de loi amorce quelques pistes, il ne va jamais au fond de la
réflexion nécessaire pour construire une démocratie moderne. Il n'a pas la
force d'une réforme. Il devra donc être amendé pour éviter que la démocratie
locale ne soit encore plus inefficace et plus confuse. Je salue à cet égard le
travail accompli par la commission des lois et son rapporteur, M. Hoeffel.
Mais il manque, monsieur le ministre, l'essentiel : il manque la confiance que
l'Etat républicain doit accorder aux élus locaux ainsi que la liberté donnée
aux citoyens et aux élus locaux pour organiser, enfin, sur le terrain un
nouveau contrat républicain.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la vitalité
de notre démocratie est au coeur du projet de loi dont nous débattons depuis
hier. Elle sera d'autant plus renforcée que nous aurons su, au travers de nos
discussions et des apports effectués au texte issu de la première lecture de
l'Assemblée nationale, accompagner les évolutions, déjà bien souvent engagées,
du fonctionnement même des organes délibérants des collectivités locales.
Qu'on le veuille ou non, notre pays est, dans l'Europe actuelle, un cas tout à
fait original, lié à l'histoire même de la construction de la nation française
et caractérisé notamment par une vitalité démocratique exceptionnelle, traduite
dans notre paysage communal.
Les communes de notre pays sont incontestablement des foyers vivants de
démocratie, foyers que nous nous devons d'entretenir et, au besoin, d'adapter
aux évolutions mêmes de la société que nous construisons ensemble.
La vitalité de nos institutions communales, c'est d'abord et avant tout la
présence dans nos assemblées de plus de cinq cent mille élus locaux - dont un
nombre croissant de femmes - qui, dans leur grande majorité, exercent avec le
plus total dévouement leur mandat au profit de la collectivité.
Pour nombre d'entre eux, l'exercice d'un mandat demeure essentiellement et
sans contrepartie une simple contribution à l'intérêt général et au bien
commun.
Nombreux sont en effet ceux qui consacrent leur temps libre à participer aux
différentes réunions de leur assemblée locale, aux rencontres avec la
population, aux relations, souvent de plus en plus complexes, avec les
administrations publiques ou les prestataires de services locaux.
Les années qui viennent de s'écouler ont été marquées par un développement
permanent de la technicité des questions posées aux élus locaux dans la gestion
quotidienne des affaires de la cité, et il serait sans doute trop long de citer
l'ensemble des textes de loi qui ont marqué ce processus.
Qu'il s'agisse des lois sur la coopération intercommunale, de celles qui
visent à modifier les règles de la comptabilité communale, de celles qui
portent sur la réforme des services d'incendie et de secours, des lois
relatives à l'action sociale, de la réforme de la dotation globale de
fonctionnement, des lois d'orientation sur l'aménagement du territoire, de la
loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains ou encore des
dispositions ayant trait aux questions d'environnement qui ont jalonné
l'activité législative des dernières années, le constat est clair.
Les enjeux de la gestion locale ont gagné en complexité, les décisions prises
par les élus locaux doivent dont l'être en parfaite connaissance cause.
Les conditions d'exercice des mandats locaux sont aujourd'hui des facteurs
essentiels pour que vivent, dans l'intérêt de tous, les dispositions
législatives que je viens brièvement de rappeler ici.
La mise en oeuvre, dans le cadre du présent projet de loi, de nouvelles
avancées en ce domaine est sans nul doute l'un des moyens de prolonger encore
la décentralisation telle qu'elle avait été conçue, voilà près de vingt ans
désormais.
Nous pensons donc que cette question centrale doit être examinée avec toute
l'attention requise.
Nous apprécions positivement certaines des orientations retenues par
l'Assemblée nationale en première lecture.
Il en est ainsi des mesures relatives à l'accroissement des possibilités de
formation des élus locaux, à la réévaluation des crédits d'heures de
disponibilité dans l'exercice des fonctions des élus salariés et des mesures
relatives à la prise en charge des frais de garde d'enfants, pour ne citer que
quelques-unes d'entre elles.
Dans un certain sens, il était grand temps que de telles mesures soient
proposées et inscrites dans la loi, afin que l'exercice d'un mandat local ne
soit pas tout à fait incompatible avec une vie de famille et une activité
professionnelle.
Dans un autre ordre d'idées, nous appréhendons positivement les mesures qui
sont préconisées en matière de réinsertion professionnelle des élus locaux, de
même que la reconnaissance de l'expérience acquise au cours de ces mandats.
Cette reconnaissance peut permettre à un salarié de se réinsérer
professionnellement après un mandat électif. Elle crée les conditions de nature
à permettre aux élus de bénéficier des évolutions de notre droit du travail
inscrites dans la loi de modernisation sociale.
Le dévouement de certains élus locaux ne peut et ne doit en aucun cas, à notre
sens, constituer un frein à leur évolution professionnelle ; cela est
indispensable si l'on souhaite que les salariés exercent en plus grand nombre
des fonctions électives.
Rien ne doit donc être fait pour limiter ou freiner cette indispensable
évolution, seule capable de faire en sorte que nos assemblées élues soient plus
représentatives des populations des communes, des départements ou des
régions.
Nous ne partageons donc pas l'avis de la commission des lois quand elle laisse
entendre que le projet de loi créerait une nouvelle catégorie de salariés
protégés ou encore pousserait à une forme de professionnalisation de la
fonction d'élu local.
Se limiter dans cette perspective serait tourner le dos aux indispensables
évolutions qui touchent à la diversification sociale de nos élus ou encore à la
mise en place de la parité.
Nous proposerons donc, dans le cadre de la discussion des articles, un certain
nombre d'amendements tendant à spécifier les conditions d'exercice du droit à
la formation, à préciser les conditions de récupération des frais et des
dépenses engagés dans le cadre des actions de formation ou dans l'exercice de
missions confiées aux élus par l'assemblée délibérante de rattachement, ou
encore à améliorer les conditions de prise en charge des frais de garde
d'enfants.
Par ailleurs, il apparaît que la vitalité de notre démocratie, singulièrement
de notre démocratie de proximité, exige qu'un regard particulier soit porté sur
la question de l'exercice des responsabilités confiées par les associations à
leurs mandants.
Nombreux sont les lieux qui, de par la loi, constituent des lieux d'échange
démocratique, notamment entre élus locaux et représentants d'associations, au
sens de la loi du 1er juillet 1901.
Là encore, créer un véritable droit de participation à la vie démocratique
s'avère indispensable afin de donner un contenu vivant et renforcé à la
confrontation des idées, à l'élargissement du recrutement du milieu
associatif.
C'est dans cet esprit que nous présenterons également des propositions
destinées à favoriser l'émergence de ce droit à la participation à la vie
démocratique.
Au terme de cette intervention, je serais tentée, au nom de mon groupe, de
souligner que le présent projet de loi peut donner un sens plus concret encore
à la vie démocratique dans notre pays.
Vous connaissez notre volonté de donner aux élus des moyens d'assurer leurs
mandats ; nos différentes propositions de loi en témoignent.
La vie de la cité appelle une certaine forme d'audace et d'innovation. Elle se
vit déjà : de nombreuses expériences sont engagées dans des communes. Nous
espérons que la discussion de ce projet de loi et son amélioration pourront
contribuer au développement d'initiatives de nature à élargir la participation
des habitants à l'élaboration des choix qui les concernent, tout en donnant aux
élus les moyens de s'y consacrer. (
Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées
socialistes.
)
M. le président.
La parole est à M. Debarge.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. Marcel Debarge.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
démocratie de proximité, dont nous traitons aujourd'hui, est l'une des
conséquences importantes de la décentralisation, entreprise lancée il y a une
vingtaine d'années. Le Sénat, par sa nature et par son rôle, est au premier
chef concerné par le sujet, et l'on voit là - je vous rejoindrai sur ce point,
monsieur le rapporteur - une des nécessités du bicamérisme parlementaire.
Cette décentralisation s'est révélée au fil des ans indispensable à la réalité
politique de la démocratie.
La décentralisation, il convient de le rappeler - non pas par gloriole mais
tout simplement parce qu'il s'agit de faits -, fut voulue par le Président de
la République de l'époque, François Mitterrand, puis présentée et adoptée par
le Parlement sur l'initiative du Premier ministre Pierre Mauroy et du ministre
de l'intérieur Gaston Defferre.
Cette décentralisation a permis d'améliorer le fonctionnement démocratique de
notre pays. Elle doit néanmoins progresser.
Qu'il me soit permis, sans polémique excessive, de me féliciter d'avoir vu la
tiédeur décentralisatrice de certains se muer en chaude approbation quelques
années plus tard, au point qu'un doute a pu naître quant à la formation
politique qui avait pris l'initiative de promouvoir la décentralisation. Or, si
cette initiative n'avait pas été prise en son temps, nous n'aurions pas,
aujourd'hui, ce débat.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées
socialistes.)
Qu'il me soit également permis, concernant le fonctionnement démocratique de
nos municipalités, de rappeler les dispositions prises sur l'initiative des
mêmes gouvernants pour permettre, dans les villes moyennes et grandes, par le
biais d'un aménagement du mode de scrutin, aux minorités d'être représentées au
sein du conseil municipal.
(Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
Cela étant, les droits de l'opposition au sein des assemblées locales doivent
être renforcés.
De même, les conseils de quartier doivent se développer pour permettre un
exercice plus vivant de la démocratie. Ces conseils ne pouvant se substituer à
la responsabilité des élus du suffrage universel, ils devront se montrer
participatifs et créatifs, et non pas exclusivement revendicatifs.
Des avancées sont déjà intervenues également quant à une meilleure répartition
de la fiscalité locale entre collectivités. Les efforts à cet égard doivent
être poursuivis dans le sens d'une plus grande justice et d'une péréquation
adaptée, tenant compte de la réalité des différentes collectivités.
Des efforts, enfin, doivent être accomplis concernant le non-cumul des
mandats, pour compléter les mesures qui ont déjà été prises en la matière, sous
réserve de quelques aménagements.
Vouloir la participation des citoyennes et des citoyens à la vie démocratique
locale, c'est aussi encourager la vie associative. Cela, sans que soit remise
en cause la responsabilité des élus du suffrage universel, demandera, à terme,
une reconnaissance de l'élu associatif.
Vouloir une démocratie locale vivante, c'est également, après une concertation
et la définition des conditions nécessaires, permettre aux résidents étrangers
non-ressortissants de la Communauté européenne de participer aux élections
locales.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
La démocratie de proximité a, en outre, des implications quant à la
solidarité au sein de nos collectivités : elle apporte un peu plus de
convivialité et, sans tomber dans l'angélisme, disons qu'elle n'est pas sans
avoir des répercussions sur les questions de sécurité.
Je suis, depuis un certain nombre d'années déjà, l'élu d'un département que
d'aucuns considèrent comme difficile, et j'en profite pour rappeler le rôle
éminent de la région, certes, mais aussi du département. J'y ai même exercé des
responsabilités de maire. Ce département, comme d'autres, est le théâtre de
réalisations humaines, économiques, culturelles et sociales remarquables, y
compris pour ce qui relève des communes.
Il serait bon que, dans ce cas comme dans d'autres, le côté positif apparaisse
: après tout, cela fait aussi partie de l'information, base essentielle du
fonctionnement de la démocratie, donc de la démocratie de proximité.
Il serait juste, sans qu'il soit question de porter atteinte à la liberté de
l'information, qu'entre des images de voitures brûlées se glisse de temps en
temps l'image de ce qui se fait de bon dans nos collectivités. Les élus que
nous sommes, toutes tendances confondues, n'agissent-ils pas tous dans le sens
d'une plus grande convivialité ?
Dans une démocratie de proximité, l'élu local voit son rôle renforcé, ses
responsabilités accrues.
L'évolution de notre société fait que l'élu local doit s'intéresser au social,
à l'urbanisme, à l'environnement, à l'information, à la sécurité, au droit, y
compris pour lui-même. Il est, nous le savons, l'élu de proximité par
excellence, parfois le confident, souvent le conseiller, l'interlocuteur le
plus sollicité parce que le plus abordable.
Bref, dans ce pêle-mêle humain et collectif, il est le maillon fort de la
démocratie de proximité.
Tout cela nous a amenés, au fil des ans, à passer d'une conception de l'« élu
notable » - ce qui n'enlève rien aux responsabilités qu'il assumait - à une
conception de l'élu responsable, se rapprochant par certains côtés d'un chef
d'entreprise dont les mandants seraient les électeurs, par le biais du suffrage
universel auquel nous tenons tous.
Le projet que vous nous présentez, monsieur le ministre, s'inscrit dans le
prolongement de différentes mesures législatives prises précédemment. Il prend
en compte des réalités entrées dans la vie courante, que cela concerne les
structures régionales, l'intercommunalité, la mise en évidence du rôle des
conseils généraux, qui deviendront peut-être demain conseils départementaux.
Quant aux dispositions que vous proposez concernant les élus, nous constatons
des réformes importantes et positives intéressant la formation des élus,
l'augmentation de leurs crédits d'heures et de meilleures conditions quant à
leur réinsertion dans la vie professionnelle, la création d'une allocation de
fin de mandat, le renforcement de la protection sociale des élus, le
renforcement du rôle et des responsabilités des conseillers municipaux.
Enfin, les indemnités qui n'ont pas été revalorisées devront l'être pour
certaines responsabilités et le remboursement de frais comme ceux de garde
d'enfants sont prévus.
Un tel projet marque une évolution importante, la plus importante depuis très
longtemps, même si des progrès étaient intervenus au cours des dernières
années.
Le débat qui va s'instaurer doit permettre, je n'en doute pas, des
améliorations. C'est dans cet esprit que le groupe socialiste, notamment, a
déposé un certain nombre d'amendements.
C'est également dans cet esprit constructif que le groupe socialiste entend
participer à cette discussion en soutenant le texte présenté par le
Gouvernement et en ayant le souci de permettre une meilleure pratique de la
démocratie dans notre pays.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur quelques travées
du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean-Pierre Raffarin.
C'est courageux !
M. Marcel Debarge.
Du courage, je n'en manque pas !
M. le président.
La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à ce stade
déjà avancé de la discussion générale, je n'ajouterai rien au long cortège de
critiques que n'a pas manqué de susciter ce projet de loi sur la démocratie de
proximité, votre projet de loi, monsieur le ministre.
Que vous défendiez un texte fourre-tout n'est pas nouveau. Que vous décrétiez
qu'il doit être discuté en urgence et priviez le Sénat d'un débat approfondi ne
l'est pas non plus. Depuis quatre ans, le Gouvernement nous a malheureusement
habitués à légiférer dans l'à-peu-près et dans l'urgence.
M. Didier Boulaud.
Lui n'utilise pas le 49-3 !
M. Jean-Claude Carle.
Ce qui est préoccupant, en revanche, c'est que, sur un sujet aussi essentiel
que l'avenir de la démocratie, vous présentiez un texte dont l'intitulé, par
lui-même, résume toutes les ambiguïtés : la « démocratie de proximité », tout
le monde en parle mais personne ne sait ce qu'elle signifie.
S'il s'agissait de débattre et de voter une loi consacrant le passage d'une
démocratie représentative à une démocratie participative, nous aurions compris.
En soi, la question mérite un débat. Mais tel n'est pas le cas avec votre
texte.
Quand votre gouvernement décide, sans concertation préalable, de fermer le
site de Superphénix, laissant toute une région et sa population dans le
désarroi, êtes-vous le mieux placé pour parler de « proximité » ?
Quand votre gouvernement décide, au mépris des riverains concernés, de
construire un troisième aéroport parisien alors qu'existent d'autres
possibilités, êtes-vous le mieux placé pour parler de « proximité » ?
Quand votre gouvernement recentralise à tour de bras, prive les collectivités
locales de la capacité de lever l'impôt et les étrangle financièrement dans des
contrats de plan qui n'ont de contractuel que le nom, êtes-vous le mieux placé
pour parler de « proximité » ?
Vous laissez croire aux citoyens qu'ils seront mieux informés et mieux
associés, alors que, à l'évidence, vous agissez en sens contraire. Tout le
malentendu est là : faites ce que je dis, pas ce que je fais !
Quand vous proposez l'élection des délégués intercommunaux au suffrage
universel direct, vous faites sans doute plaisir à quelques techniciens en mal
de réforme, mais vous ne servez pas la démocratie.
Les élus locaux vous parlent de besoins, vous leur répondez avec des
structures. Au lieu de rapprocher le pouvoir des citoyens, vous risquez de les
en éloigner.
C'est la commune, cellule de base de notre société, creuset de la République,
que vous remettez en cause.
C'est le lien historique, je dirai même affectif, entre des territoires et des
populations que vous rompez, ce lien qui fonde nos racines et façonne
l'histoire de notre pays.
C'est à la légitimité des maires et des élus municipaux que vous portez
atteinte, à celle de femmes et d'hommes responsables qui ont reçu la confiance
de leurs administrés, pour faire vivre ce cercle d'appartenance qu'est la
commune.
Non seulement le contenu de votre projet de loi ne correspond pas à son objet,
mais encore votre gouvernement ne répond pas aux vraies questions : dans quelle
démocratie voulons-nous vivre ? Sommes-nous encore dans une démocratie
représentative ? Comment la décentralisation peut-elle servir la démocratie
?
Naturellement, je n'ai pas le temps de développer tous ces thèmes. Retenons
simplement que quand nous parlons de proximité, de gouvernance et de
citoyenneté, nous exprimons la même préoccupation, la même idée : il ne suffit
pas de voter ni de payer ses impôts pour être un citoyen à part entière.
Aujourd'hui, les Français attendent plus.
Pour répondre à leur attente, il faut inverser le sens de la démocratie et la
remettre à l'endroit.
Remettre la démocratie à l'endroit, c'est d'abord rétablir une démocratie
représentative.
Nous ne pouvons pas nous satisfaire d'un Parlement où plus de 50 % de députés
et plus de 30 % de sénateurs sont issus de la fonction publique. L'enjeu, c'est
l'égal accès de tout citoyen à la vie publique, quelle que soit son origine
sociale ou professionnelle, et il ne s'agit pas seulement de la parité
homme-femme.
Comme l'a d'ailleurs très bien écrit Jacques Attali, exemple vivant de la «
méritocratie » à la française, « il n'y aura de véritable démocratie que le
jour où un pauvre - et pas seulement un ancien pauvre ou un fils de pauvre -,
le jour où un salarié - et pas seulement un syndicaliste - pourra devenir
ministre ou président de la République ».
Oui, il n'y aura de véritable démocratie que le jour où fonctionnaires et
salariés du privé seront logés à la même enseigne en ce qui concerne l'exercice
d'un mandat électif et le déroulement d'une carrière professionnelle.
Remettre la démocratie à l'endroit, c'est passer d'une démocratie d'opinion à
une démocratie de l'action.
Tant que nous n'aurons pas reconnu le principe de subsidiarité dans nos
institutions, il n'y aura pas de libre administration des collectivités
locales.
La subsidiarité, ce n'est ni l'Etat zéro ni l'Etat Zorro. C'est un Etat qui se
recentre sur ses grandes missions et n'intervient dans les affaires locales que
lorsque cela est nécessaire. Ce sont la commune, la famille, l'association,
l'entreprise qui règlent, par leurs décisions, les problèmes au plus près des
réalités. C'est la liberté laissée aux collectivités locales d'expérimenter les
solutions les mieux appropriées à leurs besoins spécifiques. C'est rapprocher
autant que nécessaire la décision de l'action pour une meilleure efficience et
un meilleur suivi des investissements.
Remettre la démocratie à l'endroit, c'est évoluer vers une France mieux
gouvernée et moins administrée.
Or, là aussi, vous le savez bien, il ne saurait y avoir de décentralisation
sans une nouvelle répartition des rôles et des moyens entre le pouvoir d'Etat
et le pouvoir local.
Dans votre texte, monsieur le ministre, il n'est question que des
collectivités locales. Jamais vous ne parlez de la réforme de l'Etat. Jamais
vous ne parlez des 125 lois et des 175 décrets qui régissent le quotidien des
élus locaux, soumis en permanence au risque de contentieux et toujours
dépendants du bon vouloir des technocrates.
En témoigne le système complexe que vous voulez instaurer avec le SDIS, alors
que, selon le principe : « Qui paie commande », c'est aux départements de
décider, comme l'a très bien rappelé hier le président Henri de Raincourt.
Remettre la démocratie à l'endroit, c'est enfin passer à une démocratie qui
conjugue unité de la nation et diversité de ses populations et de ses
territoires. C'est engager la décentralisation à partir de ce qui unit et non
pas de ce qui divise.
Qu'on arrête de nous faire croire que le projet de loi sur la Corse marquait
une première étape dans un grand mouvement de décentralisation ! Vous avez
choisi une réforme qui divise les élus locaux et la population. Nous
souhaitons, au contraire, une véritable loi de décentralisation qui rassemble
élus et citoyens dans un même élan.
Certes, des mesures positives sont inscrites dans votre projet, monsieur le
ministre. Elles visent notamment à améliorer les conditions matérielles et
morales d'exercice des mandats locaux.
Je me réjouis ainsi que soit retenu l'amendement que j'avais déposé en
novembre 2000 et en février 2001 tendant à fixer les indemnités des adjoints et
des élus municipaux par référence à celles qui sont prévues pour les maires. A
l'époque, le Gouvernement avait refusé une telle disposition, lui opposant
l'article 40 de la Constitution. Aujourd'hui, vous l'acceptez, et je m'en
réjouis.
Toutefois, ces mesures sont loin d'être suffisantes pour soigner les maux qui
rongent notre démocratie : le corporatisme et le centralisme.
Le remède à ces deux maux passe par l'expérimentation et le partenariat tels
que je viens de les décrire. Or, manifestement, monsieur le ministre, nous n'en
avons pas la même conception. Vous privilégiez la contrainte par la
réglementation, nous préférons l'incitation par la contractualisation. Vous
privilégiez la décentralisation, mais jamais les collectivités locales n'ont
été aussi dépendantes de l'Etat. Vous prônez la proximité, mais vous vous
apprêtez à anéantir le symbole même de cette proximité que sont les
communes.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, comme mon groupe, je voterai contre ce
projet de loi.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de
loi relatif à la démocratie de proximité rassemble des mesures éparses, bien
que souvent essentielles, notamment concernant les SDIS. Il est peu aisé d'en
saisir la cohérence, car il semble préparé à la hâte et présente toutes les
apparences d'un projet fourre-tout.
En proposant de nouveaux transferts de compétences aux régions, le
Gouvernement a-t-il souhaité marquer une nouvelle étape de la décentralisation
? Alors pourquoi faire preuve d'une telle pudeur dans les mots et ne pas
annoncer la finalité de ce projet de loi ?
Dans ce texte pléthorique - et dont il faut regretter l'examen en urgence -,
je souhaite attirer tout particulièrement votre attention sur une disposition
dont l'importance est inversement proportionnelle à la part qu'elle prend dans
ce texte : le principe de l'élection au suffrage universel direct des
représentants dans les établissements publics de coopération intercommunale à
fiscalité propre. Ce principe ne figurait pas dans le texte initial du
Gouvernement, il surgit à la faveur d'un amendement.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner la raison pour laquelle le
Gouvernement n'a pas souhaité intégrer dans son projet initial cette
proposition de la commission Mauroy, puis y a donné un simple avis de sagesse
lors du débat à l'Assemblée nationale ? Ces deux attitudes indiquent pour le
moins que le Gouvernement nourrit des réticences, voire des craintes par
rapport à cette disposition que sa majorité a pourtant votée.
Cette mesure me paraît dangereuse, précipitée, paradoxale, et surtout marquée
du sceau de l'équivoque : qui osera dire aux maires que cette mesure ne
conduira pas à la remise en cause des communes, et singulièrement de nos
petites communes rurales ?
Je déplore, tout d'abord, la précipitation : la loi relative au renforcement
et à la simplification de la coopération intercommunale ne remonte qu'au 12
juillet 1999. Avec près de 2 000 établissements publics de coopération
intercommunale au 1er janvier 2001, le développement de l'intercommunalité est
une réussite. Cependant, il est bien évident que, sur le terrain, les esprits
doivent s'habituer au passage d'une intercommunalité de gestion à une
intercommunalité de projet.
Le fonctionnement des conseils communautaires n'a pas encore atteint sa
vitesse de croisière. Des questions pratiques demeurent quant aux périmètres,
aux conditions de création, d'entrée et de sortie, aux compétences déléguées.
Je pense, en particulier, au transfert de la compétence en matière de voirie
dans les zones rurales.
Il faut également encore expliquer les conséquences du choix de la taxe
professionnelle unique, aux élus comme aux citoyens. Au moment où se tissent
ces nouvelles relations entre les communes, il est tout à fait inopportun de
modifier le mode de désignation des conseillers communautaires : ne contrarions
pas la dynamique en cours, ne la freinons pas, n'en effrayons pas les
acteurs.
A la précipitation vient s'ajouter le paradoxe : avec l'article 7
ter
de ce projet de loi, on nous propose de légiférer sur un point qui ne pose pas
problème et qui n'est contesté par personne. En quoi la légitimité des élus au
suffrage universel indirect est-elle remise en cause par les citoyens ?
Le passage au suffrage universel direct ne résout en rien les véritables
difficultés. Seul un travail d'information et de communication, conduit de
manière régulière, permettra aux citoyens d'identifier les fonctions et les
responsabilités de chacun, de savoir qui fait quoi.
J'ai bien lu que les maires semblaient partagés sur la question, mais
rappelons que la quasi-totalité des membres de la commission des communes
rurales de l'Association des maires de France était contre un changement de
mode de scrutin. Comme d'autres collègues dans leur circonscription, dans mon
département du Gers, et en tant que président de l'association des maires, j'ai
également recueilli des réactions tout aussi opposées, toutes tendances
confondues.
Le mode d'élection actuel confirme le rôle clé de l'échelle communale. Que
chaque commune élise en son sein son ou ses représentants marque bien la
réalité de la commune, source de la légitimité des conseillers communautaires.
Pour les communes ayant plusieurs représentants au conseil communautaire, le
mode de désignation actuel possède même l'avantage de permettre à une commune
de déléguer un membre de son opposition : qu'y a-t-il de plus démocratique ?
Se pose, enfin, la question de la finalité de ces mesures. Les plus petites
communes ont déjà le sentiment que, quoique représentées au conseil
communautaire, elles pèsent peu dans les décisions. Elles savent que
l'impulsion majeure est souvent donnée par la commune-centre. La modification
du scrutin ne résoudra pas la difficulté du poids relatif des communes dans une
communauté !
La commission saisie au fond a peut-être limité les risques de dérapage en
recadrant l'élection des conseillers communautaires au niveau de chacune des
communes, mais le projet conteste bien évidemment la légitimité des conseillers
municipaux.
Des questions demeurent, notamment celle d'un mode de scrutin adapté aux
communes de moins de 3 500 habitants. Avec le panachage, comment s'assurer que
les candidats au conseil communautaire seront bien membres du conseil municipal
? Comment se déroulera l'élection des conseillers communautaires lorsqu'une
nouvelle commune choisira de rejoindre une communauté de communes ?
Comment peut-on, d'un côté, louer le rôle des maires, vecteurs de la
démocratie de proximité, artisans au quotidien du lien social, reconnaître que
les communes sont l'échelon de pouvoir que les citoyens ressentent comme le
plus proche, et, de l'autre, mettre en oeuvre des dispositions de nature à les
remettre en cause ?
Soyons clairs : si, en dépit des discours rassurants et consensuels,
l'objectif final est de créer des entités à une échelle supérieure, que cela
soit clairement exprimé ! N'optons pas pour une méthode équivoque et finalement
peu respecteuse de ceux qui sont les premiers serviteurs de la démocratie de
proximité.
Mes chers collègues, ce texte présente certains points positifs. Néanmoins,
rationnellement - et par conviction, car je ressens profondément l'aspect
affectif de l'entité communale - je ne peux approuver une disposition dont on
sous-estime les conséquences pour les zones rurales. Je la considère comme un
désaveu pour les maires des petites communes, alors même qu'ils constituent le
socle de la République.
Solidaire d'une grande majorité de mes collègues maires ruraux, toutes
philosophies confondues, et voulant exprimer non seulement leurs inquiétudes
mais aussi leur désapprobation, je ne peux voter ce texte.
(Applaudissements
sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Alduy.
M. Jean-Paul Alduy.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, beaucoup de
choses ont déjà été dites au cours de cette discussion générale. Je limiterai
donc mon intervention à un seul axe de réflexion, en prenant appui sur deux
articles de ce projet de loi : l'article 7
ter
et l'article 1er. L'un me
paraît aller dans la bonne direction, encore qu'il suscite débat ; quant à
l'autre, il me paraît carrément inutile, voire dangereux ! Tous deux sont
centrés sur la question essentielle : comment protéger et améliorer cette
formidable invention de l'humanité - à laquelle la France plus que toute autre
nation a participé - qu'est la démocratie de délégation, la démocratie
représentative, la démocratie élective ?
L'article 7
ter
pose le principe de l'élection au suffrage universel
direct des membres des établissements publics de coopération intercommunale à
taxe professionnelle unique. Cette disposition va dans le bon sens. En effet,
les EPCI prennent des décisions de plus en plus importantes dans le domaine des
transports en commun, de la planification, de l'environnement, des grands
équipements sportifs ou culturels, alors que nos concitoyens en ignorent la
composition, ne savent pas qui en sont les membres, et n'en connaissent même
pas, la plupart du temps, le président. En tout état de cause, ils n'ont eu à
aucun moment à débattre des projets collectifs défendus par les équipes qui
ambitionnent de les mettre en oeuvre. Il y a là, incontestablement, un déni de
démocratie.
Encore faut-il bien comprendre, monsieur le ministre, de quoi l'on parle. Ce
qui est en cause, c'est non pas la supracommunalité, mais l'intercommunalité.
Il faut donc à tout prix que les communes - toutes les communes, quelle que
soit leur taille - soient représentées dans ces organismes de coopération
intercommunale et que, comme M. le rapporteur nous le propose, la
circonscription électorale soit la commune, que les membres du conseil de
communauté soient choisis parmi les membres des conseils municipaux. Voilà
comment aller dans le bon sens, celui de l'efficacité, de la lisibilité et de
la cohérence de notre démocratie de représentation, de notre démocratie
élective.
En revanche, je considère que l'article 1er est complètement inutile, voire
dangereux. On va définir des quartiers, mais on ne sait pas très bien comment,
puisque les critères de définition ne sont pas arrêtés. On va créer des
conseils, des petites assemblées qui, on l'a dit tout à l'heure, risquent de
devenir le lieu de recyclage des déçus ou des battus du suffrage universel et
de membres d'associations dont l'agressivité est inversement proportionnelle à
la représentativité. De surcroît, les contours de leurs domaines de compétences
sont totalement flous. On va ainsi à contre-courant de la décentralisation,
d'une décentralisation qui donne précisément aux maires, aux élus de terrain,
la capacité de décider eux-mêmes des formes de débat, des formes
d'interpellation, des formes de participation des citoyens à la décision
municipale. J'y vois là tous les relents d'un jacobinisme qui veut que, de
Dunkerque à Perpignan, on ait le même cadre, le même dispositif.
Que l'on mette en réseau toutes les expériences, que l'on produise des bilans
de ces expériences, que l'on définisse des chartes de la concertation locale,
je l'accepte. Mais il me paraît totalement inutile de légiférer : nous sommes à
contre-courant, à contretemps, et même à « contre-société ». Car il nous faut
aujourd'hui fabriquer du lien, de la fraternité, de l'ouverture aux autres,
alors que l'on nous propose ici d'aller dans le sens de la fragmentation de la
société, renforçant finalement ainsi la ségrégation sociale dans nos cités. Il
y a dans cette démarche, je le répète, quelque chose qui me paraît totalement
dangereux et inutile.
Il faut clarifier le système de décision, renforcer l'information de nos
concitoyens, inventer les médiations nécessaires, revivifier la concertation,
mais il faut légiférer
a minima
et faire confiance aux maires
a
maxima.
Monsieur le ministre, ma conclusion sera simple. Les dernières élections
municipales ont démontré la vitalité de la démocratie municipale. Il suffit,
pour s'en rendre compte, de constater l'ampleur des alternances de tous bords
qu'elles ont provoquées. Alors, de grâce ! légiférons le moins possible, ne
légiférons que là où c'est vraiment indispensable, et faisons confiance à la
démocratie française pour qu'elle conserve, avec ses élus de terrain, sa
vitalité, pour qu'elle sache innover et s'adapter à l'exigence de nos
concitoyens !
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR
et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi relatif à la démocratie de proximité part d'une idée généreuse et fondée
puisqu'il s'agit de rapprocher le citoyen du politique, de l'associer
pleinement, en amont des décisions des élus, de combattre le désintérêt, voire
la défiance envers la chose publique.
Le taux d'abstention, qui est passé de 30,6 % en 1995 à 38,7 % lors des
dernières élections municipales, témoigne de ce malaise. Il doit nous amener à
débattre des causes de cette abstention, mais aussi de notre responsabilité
d'élus en tant qu'animateurs et acteurs de la vie publique locale, tout
particulièrement parce que les élections municipales sont la consultation pour
laquelle la proximité est la plus grande entre l'administré et l'élu.
Après la mise en oeuvre de la loi d'orientation pour l'aménagement et le
développement durable du territoire et de la loi relative au renforcement et à
la simplification de la coopération intercommunale, ainsi que de la loi
relative à la solidarité et au renouvellement urbains, ce texte vient compléter
une partie du puzzle de l'organisation de l'administration locale française
sans que, pour autant, nous puissions en avoir déjà une vue d'ensemble claire :
je pense notamment au futur mode d'élection des conseils départementaux, à
l'inconnue qui pèse sur le mode d'élection directe des conseillers
communautaires, à l'évolution et à la réforme nécessaire de la fiscalité
locale, au devenir des communes et à leurs compétences, elles qui sont le
premier maillon de la proximité, de la démocratie participative qui nous occupe
dans ce débat.
C'est d'ailleurs autour des questions liées à l'intercommunalité que je
souhaite développer mon propos, dans la mesure où ce projet de loi y apporte
une touche plus importante qu'il n'y paraît.
L'article 7
ter
nouveau, introduit par l'Assemblée nationale sur
proposition de sa commission des lois et sur lequel le Gouvernement s'en est
remis à la sagesse des députés, prévoit d'élire au suffrage universel direct
les membres des organes délibérants des EPCI à fiscalité propre le même jour
que les conseils municipaux, et garantit la représentation de chaque commune
par au moins un siège. Soit ! Nous ne sommes pas opposés par principe à
l'élection au suffrage universel des conseillers communautaires. Mais cet
article 7
ter
soulève trop de questions auxquelles il faut répondre, il
est trop important pour que nous signions un chèque en blanc. En effet,
monsieur le ministre, pensez-vous que les élus communautaires puissent être
majoritairement des non-élus municipaux ?
Chacun mesure l'importance qu'il y a à être à la fois un élu local et
communautaire si l'on veut que soient respectés au mieux les intérêts de
chacun, tout particulièrement ceux des communes, qui sont souvent mis à mal. Je
n'ose imaginer une communauté urbaine, d'agglomération ou de communes, dirigée
par une équipe indépendante dépourvue d'élus municipaux !
Quoi qu'il en soit, compte tenu des difficultés liées aux deux modes de
scrutin municipal, aux deux tours souvent nécessaires pour connaître les élus,
il conviendra de privilégier l'élection au niveau communautaire d'élus
municipaux et la représentation de tous les courants ayant obtenu un score
respectable, de l'ordre de 5 %.
Avec des modalités de scrutin imprudentes, c'est la question de l'existence
même des communes qui sera posée. Or, au même moment, à travers le pays, les
élus de tous bords portent un grand intérêt aux communes. C'est ce que
j'entends dire sur le terrain, et j'ose espérer que le discours sera le même en
séance.
L'attachement que portent les administrés à leur commune, à leurs élus
municipaux, témoigne également très fortement de cette réalité.
Pourtant, les mécanismes financiers qui lient les communes et les communautés
de communes ne traduisent pas cette volonté. A titre d'exemple, la
non-indexation de l'attribution de compensation mène à terme les communes à
l'asphyxie financière. Par ailleurs, le caractère aléatoire de la dotation de
solidarité communautaire ne garantit rien. Celle-ci relève en effet de la
volonté de la majorité communautaire, qui, au lieu de reverser aux communes,
préférera généralement mener à terme ses propres projets.
Si, demain, nous voulons donner vie à nos communes, il conviendra d'affecter
les moyens financiers nécessaires et de redéfinir les compétences de chaque
niveau administratif.
Le coefficient d'intégration fiscale, le CIF, constitue, par ailleurs, une
machine à vider les communes de leurs compétences moyennant des dotations
supplémentaires au plan communautaire. Ses mécanismes de mise en oeuvre
bloquent les initiatives municipales et orientent les décisions en faveur du
niveau communautaire. L'effet d'aubaine du CIF est d'ailleurs souvent
contourné. C'est plus un outil d'affichage pour percevoir toujours plus. Il me
semble urgent d'en réviser les principes, voire de l'abolir.
L'avenir des communes réside également dans la redéfinition de leurs
compétences incompressibles et dans la possibilité de partager des compétences
avec l'échelon communautaire.
C'est dans un tel cadre de compétences et de moyens que pourra s'épanouir au
mieux le souhait de nos concitoyens d'être près de leurs élus, de contribuer
aux décisions, d'être utiles à la société dans laquelle ils vivent.
Il paraît en effet contradictoire de vouloir rapprocher les citoyens des lieux
de décison et, simultanément, de les éloigner des pôles de décision disposant
des compétences essentielles.
J'en reviens aux transferts de compétences et aux moyens financiers. Mission
d'information et d'évaluation sur les pertes de revenus subies par les
conseillers municipaux, fonds de financement de l'allocation de fin de mandat,
formation des élus, frais de garde d'enfants, frais de transport... autant de
dispositions de ce projet de loi, certes positives, mais uniquement à la charge
des budgets des collectivités territoriales et qui viennent s'ajouter aux
sommes que les communes déboursent déjà pour les mises aux normes tous azimuts,
les marchés publics qui ne cessent d'augmenter et le financement des
emplois-jeunes et des 35 heures. Cela dit, je vous fais grâce du financement
des services publics !
Quant aux dépenses de personnels, je ne connais pas une seule commune qui ait
réduit son personnel sous prétexte de transfert de compétences. Au contraire,
les 35 heures mettent en évidence des besoins supplémentaires en emplois pour
faire face aux tâches qui leur incombent.
Dans le domaine économique, 70 % des investissements publics sont réalisés par
les collectivités locales alors qu'elles encaissent seulement 10 % de l'impôt
global. Cela met en évidence la perte d'autonomie fiscale des collectivités.
Cette perte d'autonomie ne cesse de croîre. Sachez ainsi que, en 2003, plus de
50 % des ressources fiscales des collectivités seront des dotations d'Etat, ce
qui n'est pas sans poser la question du vrai pouvoir des élus locaux, des
moyens de leur expression politique, de leur originalité de gestion. Leurs
facultés propres sont affadies au profit d'une harmonisation au service des
idées dominantes.
La progression de la dotation globale de fonctionnement ne suffit pas - loin
s'en faut ! - à répondre aux besoins des populations, aux projets des élus. Les
différences importantes de dotation par habitant résultant de la loi relative
au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale
traduisent en effet un réel mépris des 20 % de Français qui vivent en milieu
rural, une profonde méconnaissance et une importante sous-estimation des
besoins réels du monde de la ruralité.
Il est absolument nécessaire d'augmenter la masse globale de la DGF afin de
donner les moyens aux communes et aux EPCI de répondre aux attentes des
administrés. Le partage différent du même gâteau, qui correspond à la politique
actuelle, ne peut se faire qu'au détriment des communes.
Les communistes et leur association d'élus proposent d'abonder les moyens
destinés aux collectivités locales en taxant à 0,3 % les 4 000 milliards
d'euros d'actifs financiers des entreprises, ce qui représente une source de 12
milliards d'euros, soit 78 milliards de francs. Cette mesure juste aurait le
quadruple intérêt de taxer la spéculation, d'inciter à l'investissement
productif, de ne rien coûter à l'Etat et de créer des emplois.
Les autres impôts tels que la taxe d'habitation, les taxes professionnelle et
foncière ne correspondent aujourd'hui à aucune réalité économique. Leur
révision doit viser une plus grande justice fiscale en s'appuyant, d'abord, sur
les profits réels des entreprises et sur les moyens réels des personnes
concernées. Quant à leur répartition, elle doit contribuer à augmenter
l'autonomie fiscale des collectivités locales.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je constate que nous sommes à un
tournant de l'intercommunalité. Il est temps de donner le signal pour
harmoniser les discours et les actes. Sur toutes les travées, dans cette
enceinte, on parle de la défense de l'échelon communal. Mais quel est le sens
exact des mots les plus flatteurs ?
Certains n'ont-ils pas été animés par la volonté de réduire très sensiblement
le nombre des communes en France en les vidant de leur substance et de leurs
moyens ? Cette intention a aujourd'hui trouvé ses limites. Il faut prêter
attention à ce que dit et pense la très grande majorité de nos concitoyens à ce
sujet !
Pour ce qui nous concerne, nous, les communistes, nous avons depuis toujours
promu l'identité communale au sein d'une coopération intercommunale non
contrainte, en évitant toute tendance à la supracommunalité.
Si nous avons la volonté de rapprocher le citoyen de ses élus et des
décisions, si nous avons la réelle volonté de faire évoluer la démocratie
participative, de revitaliser la politique, de rétablir la confiance à l'égard
du politique, c'est bien par la commune, structure de base et de proximité par
excellence, qu'il faut commencer, en lui donnant les moyens administratifs,
techniques et financiers d'exister et de se développer.
Je pense m'être fait l'écho de milliers d'élus, de maires, de millions
d'administrés et de leur conception d'une gestion démocratique qui ne demande
qu'à progresser.
C'est avec eux qu'il convient de poursuivre ce débat, de l'amplifier et de
corriger par la loi tout ce qui, dans la législation actuelle, porte préjudice
à ces grands principes républicains et originaux de notre pays.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen, sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je centrerai
mon intervention sur les enquêtes publiques, qui constituent un point important
de ce projet de loi, pour expliciter un certain nombre d'amendements présentés
par le groupe socialiste.
Vous le savez, mes chers collègues, la procédure actuelle d'enquête publique a
le grand inconvénient de remplir simultanément trois fonctions : la
concertation, la prise en compte des contraintes de l'Etat et la décision
politique.
Un équipement est-il ou non d'utilité publique ? Il n'est pas bon d'avoir une
seule procédure pour trois fonctions et le grand mérite du texte que vous nous
présentez, monsieur le ministre, est justement de dissocier les choses.
Premièrement, la concertation : il est clair qu'elle n'a de sens que si elle a
lieu en amont. Il ne faut pas être dans l'obligation, ce qui est le cas avec le
système actuel, de présenter un projet complètement bouclé pour ouvrir la
concertation. Les citoyens ont dès lors, et à juste titre, le sentiment que
celle-ci ne sert à rien puisque la décision est déjà prise. C'est avant qu'il
faut poser les questions, émettre des hypothèses, présenter les arguments et
les contre-arguments. Le débat public dans toute son ampleur est donc
salutaire.
Deuxièmement, la prise en compte des contraintes dues à l'Etat qui doit, bien
entendu, veiller à l'intérêt général : il existe, vous le savez, une procédure
un peu archaïque appelée l'IMEC, l'instruction mixte à l'échelon central, qui
est d'une lourdeur extrême lorsqu'une collectivité locale essaie de mener à
bien un grand projet. Il faut envoyer au ministre de l'intérieur et à la
direction générale des collectivités locales dix-huit, voire vingt dossiers,
tous très épais et qui sont répartis entre tous les ministères concernés. Puis
chaque ministère doit donner son avis. Il faut donc attendre longtemps avant
d'obtenir l'avis du Gouvernement.
Nous approuvons donc la procédure que vous proposez de mettre en place, à
savoir une concertation entre l'Etat et la collectivité locale. Nous avons
cependant déposé des amendements, monsieur le ministre, afin que cette
concertation soit clairement déconcentrée, conformément d'ailleurs à la charte
de la déconcentration qui figure dans la loi de 1992, et aux principes de bonne
gestion des intérêts de l'Etat comme de ceux des collectivités locales.
Il ne sert à rien de tout faire remonter à Paris. Il y a des préfets de région
et des préfets de département. C'est à leur niveau, nous semble-t-il, que cette
phase de la procédure doit se dérouler.
Troisièmement, se pose la question de savoir qui, finalement, est habilité à
décider de l'utilité d'un projet. On peut penser que, conformément à l'esprit
de la décentralisation, les collectivités locales sont les mieux placées. C'est
pourquoi il est bien que l'innovation que constitue la déclaration de projets
figure dans votre projet de loi. Celle-ci permettra en effet à la collectivité
locale de préciser son projet en prenant en compte le résultat de l'enquête
publique.
C'est très positif. Mais cela entraîne, monsieur le ministre, deux
conséquences.
La première concerne l'enquête publique elle-même. A quoi sert l'enquête
publique dès lors qu'existe à la fois une procédure claire visant à prendre en
compte les impératifs publics de l'Etat et une déclaration de projet ? Elle
sert à recueillir l'avis des citoyens, des associations et des corps constitués
sur un projet.
Toutefois à notre sens, cela doit être là son seul objectif. En effet, toute
appréciation subjective des commissaires enquêteurs - légitime mais subjective
- doit être exclue avec toutes les conséquences que cela entraîne pour une
collectivité, qui, ensuite, doit aller devant le Conseil d'Etat et attendre un
an ou deux avant d'obtenir une déclaration d'utilité publique.
Le rapport de Mme Questiaux rappelle un certain nombre d'événements qui sont
bien connus : des rapports de commissaires enquêteurs faisant référence, par
exemple, au fait que tel ou tel projet de transports en commun en site propre
avait pour effet de rendre plus difficile la circulation des automobiles, alors
même que la loi vise à restreindre la part des automobiles au bénéfice des
transports en commun !
La création d'une déclaration de projet entraîne une seconde conséquence. Il
arrive assez souvent qu'un conflit de domanialité éclate entre des
collectivités locales. Il n'est pas acceptable qu'une collectivité qui n'a pas
compétence en matière de transports bloque longuement le projet d'une autre
collectivité ou intercommunalité qui, elle, a compétence en matière de
transports publics urbains, au motif qu'elle dispose d'un terrain et que le
droit à la domanialité prévaut sur l'intérêt général ou public. C'est pourquoi
nous déposerons un amendement sur ce sujet.
En conclusion, monsieur le ministre, tout en soulignant l'intérêt du processus
qui est mis en cause, je voulais mettre l'accent sur le risque que comporte
toujours l'empilement de bonnes intentions. Il est bon de clarifier les
procédures. Dans le même temps, il ne faut pas que l'ensemble du processus dure
trop longtemps. Or, entre la concertation préalable, le débat public, l'étude
d'impact - qui reste nécessaire -, la concertation entre l'Etat et la
collectivité locale, l'enquête publique, la déclaration de projet et, enfin, la
décision, il peut se passer bien du temps. C'est pourquoi nous proposons des
amendements, qui vont d'ailleurs dans le sens de ceux qui ont déjà été acceptés
par la commission des lois, pour encadrer les délais de telle manière que l'on
n'assiste pas à des procédures sans fin. L'intérêt du projet n'est-il pas de
définir les étapes en toute clarté ?
En un mot, nous sommes d'acord avec la réforme que vous nous proposez, dès
lors qu'elle permet de concilier la concertation la plus large possible avec
l'efficacité nécessaire à la mise en oeuvre des projets d'intérêt public
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées
du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une fois de
plus, - M. Hoeffel l'a dit - un texte nous est soumis avec l'urgence déclarée.
Qui plus est, il porte sur les collectivités territoriales. Les dispositions
dont nous débattons transforment parfois notablement la situation existante.
Par ailleurs, le nombre des articles, déjà imposant, a doublé lors de l'examen
du projet par l'Assemblée nationale.
En conséquence, les modifications qui seront apportées par le Sénat seront
débattues non pas en séance publique, mais en commission mixte paritaire. Cela
revient manifestement à amputer le rôle du Parlement, plus spécifiquement celui
de la Haute Assemblée. En effet, son mode de désignation lui confère une
représentativité spécifique qui n'a jamais été remise en cause, celle des
collectivités territoriales. Alors qu'il est d'usage que les textes se
raportant à ces dernières soient déposés en priorité sur le bureau du Sénat,
c'est pourtant l'inverse qui a été fait. Les conditions dans lesquelles,
justement, on évoque la démocratie sont restrictives !
Le caractère hybride du projet ne peut échapper à quiconque. Ainsi nous est
soumis un texte articulé en cinq titres, regroupant cent vingt-quatre articles,
et traitant successivement de la démocratie de proximité, des droits des élus,
de l'amélioration du fonctionnement des services départementaux d'incendie et
de secours, de la participation du public à l'élaboration de grands projets et,
enfin, de la mise en place d'un nouveau mode d'exécution du recensement de la
population.
Cette inflation d'encadrement va à l'encontre de l'intitulé du projet. Au lieu
de laisser l'initiative locale se développer, ce qu'elle arrive à faire tant
bien que mal - heureusement ! - il est proposé une codification qui « arase »
la diversité. Posséder un mandat représentatif rendrait-il son détenteur inapte
à solliciter spontanément la manifestation de la démocratie participative,
monsieur le ministre ? C'est pourtant ce que suggère la lecture de certaines
dispositions du projet de loi. Or les consultations communales sont chose
courante dans la mesure où la situation requiert des avis engageant les
communautés.
On peut également s'interroger sur l'opportunité de consacrer, dès maintenant,
un chapitre au fonctionnement des services départementaux d'incendie et de
secours, les SDIS, alors que le projet de loi de modernisation de la sécurité
civile, qui aurait dû être examiné au cours de cette législature, n'a été, pour
l'instant, ni inscrit ni prévu. La cohérence et l'efficacité auraient voulu
qu'un seul et même dispositif regroupe les dispositions relatives aux SDIS.
Je ferai la même remarque en ce qui concerne les collectivités territoriales.
Actuellement se met en place la coopération intercommunale. Au lieu de laisser
se concrétiser ces ententes toujours délicates à mettre en oeuvre et de leur
donner le temps de parvenir à un fonctionnement équilibré, il est question,
dans ce texte, de procéder à l'élection de délégués intercommunaux dans les
établissements à fiscalité propre.
Au moment où l'on devrait s'acheminer vers une simplification des structures,
n'est-on pas en train de créer un niveau de décision supplémentaire «
concurrençant », en quelque sorte, les conseils municipaux ? Il est heureux,
néanmoins, que notre commission des lois propose, pour chaque commune, un
délégué au sein des organes délibérants de ces établissements publics de
coopération intercommunale. Par ailleurs, tous les membres de ceux-ci seront
bien des élus municipaux ou d'un conseil d'arrondissement. Cette composition
n'apparaissait pas clairement.
Depuis près de trente ans, fusions ou regroupements de communes sont tentés et
rencontrent les aléas que l'on sait. La prudence aurait voulu que l'on autorise
l'épanouissement de la démarche volontaire dans le respect des identités avant
d'introduire de nouvelles donnes.
Pour avoir été maire pendant près de vingt ans d'une commune de mille
habitants, j'ai été particulièrement attentif aux dispositions nouvelles qui
les concernent, d'autant que mon département ne totalise que sept communes de
plus de 3 500 habitants sur 545.
Ainsi, il est proposé que l'indemnité du maire soit fixée au taux maximal
prévu par l'article L. 2123-23, sauf si le conseil municipal en décide
autrement. Soyons clairs : dans cette tranche de population, combien de budgets
municipaux peuvent supporter une indemnité de maire d'un montant de 7 079
francs ? Combien perçoivent seulement une indemnité, sans parler de chiffres ?
Il faut oser le proposer lorsque les dépenses d'investissement sont presque
nulles. Non seulement l'Etat impose un barème, sans pour autant compenser la
dépense à due concurrence, ce qu'il conviendrait de faire, mais, mieux encore,
il taxe cette indemnité en la soumettant à l'impôt sur le revenu des personnes
physiques.
De plus, il ne faut pas négliger les effets financiers de la réduction du
temps de travail. Dans les communes de moins de 1 000 habitants, une secrétaire
de mairie intervient en général sur une base de vingt heures hebdomadaires.
Comme le travail ne pourra pas être assumé par une tierce personne, si sa
présence est moindre, ce sont 11 % de charges supplémentaires sur salaires qui
sont enregistrés.
Par ailleurs, du fait de la loi du 5 avril 2000, un réajustement des
indemnités des adjoints figure dans l'article 29. Plus loin, il est question de
remboursements de frais des élus municipaux ainsi que des frais de garde
d'enfants, de séjour, de transport, de compensation pour interruption
d'activité professionnelle.
Sur le principe, tout ce qui peut faciliter et compenser le dévouement à la
collectivité me semble bon. Il n'est pas normal qu'après trente ou quarante
années ou plus de mandat un maire ne se voie décerner que l'honorariat. Mais je
pose la question, monsieur le ministre : qui va payer ? Les bons sentiments ne
suffisent pas pour faire entrer dans les faits ce que vous nommez « la
démocratisation des mandats ».
Dans les communes de moins de 500 habitants, la dotation d'élu local ne suffit
même pas à couvrir la totalité de ce à quoi peut prétendre son maire, à savoir
3 882 francs. A cet égard, il semble que beaucoup de maires appellent une
révision de cette dotation.
En effet, pour qu'ils puissent en bénéficier, il faut que les communes aient
un potentiel fiscal par habitant inférieur au potentiel fiscal moyen par
habitant des communes de moins de 1 000 habitants. Ce potentiel s'appuie sur
les quatre taxes directes. Il suffit d'avoir affaire à un conseil municipal
dynamique qui cherche à attirer entreprises et particuliers par une fiscalité
incitative pour que le produit des taxes en question dépasse la moyenne
nationale et lui fasse perdre le bénéfice de la dotation de l'élu local. Il y a
là une contradiction. Or plus de 20 000 communes sont concernées.
Il convient de revoir les critères d'éligibilité des communes à ce soutien
financier de l'Etat, peut-être d'en élargir le champ et aussi d'en assouplir
les seuils afin qu'ils n'agissent pas comme des couperets sanctionnant des
situations qui ne devraient pas conduire à des pénalités, contrairement à ce
que l'on peut observer aujourd'hui.
Là encore, si la réforme tant attendue du statut de l'élu local avait été
élaborée et proposée au Parlement, on n'en serait pas réduit à procéder par
touches successives, à apporter des réponses partielles et, surtout, en
porte-à-faux par rapport à une réalité majoritaire.
C'est également ce qu'on peut dire de l'ensemble du texte qui laisse des zones
d'ombre trop importantes et qui comporte trop d'effets d'annonces complaisants.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et
des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la
commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je n'ai que douze
minutes pour vous parler de ce projet de loi relatif à la démocratie de
proximité. Les sujets qu'il serait nécessaire de développer ici, à la tribune,
sont si nombreux qu'il faudrait bien entendu beaucoup plus de temps. Les
orateurs qui se sont succédé s'étant exprimés à loisir les uns et les autres,
je m'attarderai principalement sur un point : l'article 7
ter.
S'il me
reste un peu de temps, je vous parlerai également des services d'incendie et de
secours et du statut de l'élu.
Mais sur ce dernier point je serai bref, car j'ai déposé en son temps une
proposition de loi sur le sujet. Je remercie encore M. le président Poncelet
d'avoir accepté qu'elle soit examinée par le Sénat. Le rapporteur désigné par
la commission des lois, M. Jean-Paul Delevoye, avait retenu dans son rapport
l'essentiel des propositions que j'avais formulées, et je sais que M. Hoeffel,
le rapporteur du texte que nous examinons, s'est beaucoup inspiré de cette
proposition de loi pour les amendements de la commission. Je souligne aussi que
M. Vaillant - mais est-il nécessaire de lui rafraîchir la mémoire sur ce point
? - avait lui-même approuvé nombre des dispositions que j'avais proposées.
Toutefois, il ne trouvait pas utile que nous légiférions alors dans ce domaine,
puisque le Gouvernement préparait un texte, celui que nous examinons
aujourd'hui.
A la suite des différentes initiatives qui ont été prises, notamment par nos
collègues communistes à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a ajouté à ce
texte un volet sur le statut de l'élu. Mes chers collègues, nous pouvons donc
dire que nous avons judicieusement incité le Gouvernement à agir dans ce
domaine puisqu'un certain nombre des dispositions relatives à ce sujet sont
largement inspirées de celles que nous avions proposées. Mais il faudra sans
aucun doute aller au-delà. C'est pourquoi, si j'en ai le temps, j'aborderai ce
point dans quelques instants.
Je commencerai donc par l'article 7
ter,
qui prévoit l'élection au
suffrage universel des délégués des structures intercommunales à fiscalité
propre.
S'agit-il d'une bonne réforme ? Est-ce le moment de légiférer dans ce domaine
? Ce n'est pas mon sentiment. Je comprends la démarche qui a été adoptée par la
commission et son rapporteur. Ils ont essayé, autant que faire se peut, en
déposant un amendement rédigeant l'article 7
ter,
de limiter les dégâts
et de définir le contexte dans lequel s'appliquerait le principe de l'élection
au suffrage universel direct, tout en renvoyant à une loi ultérieure la
détermination du régime électoral.
Je fais partie de ceux qui pensent que le moment n'est pas venu pour légiférer
sur ce point. En effet, un grand problème de fond se pose dans notre pays :
celui du devenir de nos institutions locales. Quand on analyse la situation, on
constate que la France est un des rares pays de la Communauté européenne à être
doté d'un nombre important de niveaux de gestion.
Après le niveau européen, viennent le niveau national - mais la France
s'efface de plus en plus au profit de l'Europe, nous le constatons chaque
année, et l'euro en est une étape importante -, le niveau régional - la loi de
1992 avait même prévu des interrégions -, le niveau départemental, le niveau
intercommunal - avec les structures intercommunales à fiscalité propre - et,
enfin, le niveau communal, sans parler de la multitude de syndicats à vocation
simple !
Vous avez donc un ensemble de niveaux institutionnels qui lèvent l'impôt : la
commune, l'intercommunalité, le département, la région. Les Français n'ont pas
le sentiment que le ménage ait été fait entre tous ces niveaux. On constate des
chevauchements et le poids de la fiscalité est devenu de plus en plus
insupportable.
Le législateur, en son temps - je n'en faisais pas partie à ce moment-là - est
peut-être allé trop vite en besogne lorsqu'il a décidé d'instituer la région en
collectivité territoriale, avec sa propre fiscalité. Il aurait été préférable -
et c'est ce que je propose au moment où nous discutons ce projet de loi -
d'effectuer une analyse au fond sur le devenir de ces différents niveaux
institutionnels. L'avenir réside-t-il dans l'intercommunalité, avec un niveau
de supracommunalité, comme l'a dit tout à l'heure M. Legendre, puis avec la
région et l'Europe, c'est-à-dire que le pays s'effacerait au profit de
l'Europe, les départements au profit des régions et les communes au profit de
l'intercommunalité ? Ou bien pensons-nous que peuvent continuer à coexister
l'ensemble de ces niveaux institutionnels ?
Nous ne pourrons pas faire l'économie d'une clarification des compétences
s'agissant de ces différentes institutions. Aucun Gouvernement - aussi bien
ceux de droite que de gauche, d'ailleurs - n'a eu le courage de s'attaquer à la
clarification des compétences au cours de ces dernières années. C'est un
domaine dans lequel il nous faudra bien légiférer un jour ! Pour l'instant, on
laisse s'additionner ces différents niveaux, avec les fiscalités
correspondantes. Il serait préférable de se poser la question du devenir des
communes et des départements avant de décider d'instaurer l'élection au
suffrage universel des délégués des structures intercommunales, car la loi de
1992 sur l'intercommunalité comme la loi Chevènement ont introduit des
dispositions financières qui se traduiront par la mort à petit feu de nos
communes.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Effectivement !
M. Alain Vasselle.
En effet, aujourd'hui, pour bénéficier de la DGF à son taux maximum au niveau
de l'intercommunalité et des avantages liés à la taxe professionnelle unique,
de nombreuses communes transfèrent un maximum de compétences au niveau de
l'intercommunalité, des communautés d'agglomération et des communautés
urbaines. Dès lors que la plupart des compétences exercées par les communes
auront été transférées à des structures intercommunales et que la DGF aura «
pompé » l'essentiel de ce qui était consacré autrefois aux communes, il est
certain que se posera un jour la question de savoir si nous devons continuer à
maintenir le niveau de concours de DGF au minimum garanti pour l'ensemble des
communes du territoire national et, dans le même temps, attribuer à toutes les
structures intercommunales à fiscalité propre un niveau de DGF correspondant à
celui qu'elles connaissent aujourd'hui. D'ailleurs, ce n'est pas le président
du comité des finances locales qui me démentira sur ce point.
Des questions sont posées régulièrement au Gouvernement sur le devenir de la
DGF et le maintien à un même niveau, dans leur globalité, des concours de cette
dotation pour les communes et les structures intercommunales. La DGF évolue,
mais pas suffisamment et pas au même rythme que la création des différentes
structures intercommunales.
Le grand risque est de voir les maires de nos communes réduits à exercer
uniquement leur fonction régalienne, c'est-à-dire celle d'officier de police
judiciaire ou d'officier d'état civil, l'essentiel des compétences ayant été
transféré aux structures intercommunales. Dès lors, les communes seront
progressivement appelées à disparaître et elles ne rempliront plus leur rôle de
proximité, qui est très apprécié par l'ensemble de nos concitoyens.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, tous ces éléments
devraient être intégrés dans une réflexion plus profonde sur le devenir des
communes et des départements, donc de notre pays. Il me semble que nous
pourrions trouver une solution qui mettrait tout le monde d'accord : il s'agit
de l'application du principe de subsidiarité, que Valéry Giscard d'Estaing a
développé en son temps et dont tout le monde s'est fait largement l'écho.
D'après ce que j'ai compris, selon ce principe, une collectivité pourrait
continuer, seule, à exercer une compétence, créer un service ou un équipement.
Et, lorsqu'elle se trouverait dans l'impossibilité de le faire, elle pourrait
alors s'associer avec d'autres collectivités pour répondre aux besoins de nos
concitoyens. C'est ce principe de subsidiarité qui devrait guider le
législateur dans tous les choix qu'il aura à effectuer en ce qui concerne aussi
bien les institutions européennes que les institutions nationales ou
locales.
Il est donc urgent d'attendre ! Prendre une décision aujourd'hui, ce serait
mettre en cause, me semble-t-il, le devenir de nos communes et ce serait
dangereux pour notre démocratie. Tels sont les points essentiels que je voulais
soulever à propos de l'article 7
ter.
En ce qui concerne le statut de l'élu, il faudra prendre des mesures - vous le
faites dans vos propositions, monsieur le ministre, et nous l'avions nous-mêmes
suggéré - qui aillent bien au-delà des dispositions actuelles s'agissant de la
formation des élus ou de la disponibilité dont devraient bénéficier les
conseillers municipaux, les conseillers généraux, les conseillers régionaux,
les maires, tous ceux qui exercent des fonctions dans le cadre de
l'intercommunalité.
Au cours de la campagne des élections sénatoriales, je me suis rendu compte
que les élus étaient de plus en plus sensibles aux difficultés qu'ils
rencontraient pour assurer une véritable compatibilité entre l'exercice de leur
vie professionnelle et l'exercice de leur vie publique. Plusieurs exemples
m'ont d'ailleurs amené à vous saisir, monsieur le ministre, soit par courrier
soit par question écrite, des problèmes que rencontrent même des fonctionnaires
du ministère de l'intérieur. Dans mon département, un agent de police d'Etat
s'est vu refuser par son supérieur hiérarchique la possibilité de disposer du
temps nécessaire pour exercer son mandat de maire dans une commune rurale.
Par conséquent, aujourd'hui, même au niveau du ministère de l'intérieur, les
instructions données à l'échelon local ne sont pas suffisamment claires pour
permettre l'application de la loi en vigueur, qui est très nettement
insuffisante en termes de disponibilité des élus pour pouvoir exercer leur
mandat. Une avancée significative serait donc nécessaire en la matière pour
répondre aux attentes des élus.
Il est un domaine pour lequel je me réjouis que nous ayons adopté des
dispositions, qui ont été confortées par des amendements de M. Hoeffel : il
s'agit de la couverture maladie et de la retraite des élus locaux, notamment de
celles et ceux qui décideront d'abandonner leur activité professionnelle pour
se consacrer complétement à leur mandat électif.
Pour en terminer avec le statut de l'élu local, je reviens sur la
compatibilité entre l'exercice de la vie professionnelle et l'exercice de la
vie publique. Actuellement, les Français ne sont pas égaux devant la loi dans
ce domaine. Les retraités, les fonctionnaires et aujourd'hui les salariés font
partie des catégories professionnelles - ou non professionnelles, puisque les
retraités ont abandonné leur activité - qui, en raison de leur statut,
bénéficient pour l'exercice de leur mandat de conditions plus avantageuses et
plus souples que les autres : je pense notamment aux élus qui exercent une
profession libérale, une profession indépendante, ou qui sont cadres supérieurs
dans une entreprise.
Aujourd'hui, il est quasiment impossible de pouvoir, dans le même temps, être
chef d'une entreprise importante et, par exemple, parlementaire, président de
conseil régional ou maire d'une grande ville, sauf à abandonner sa vie privée
pour se consacrer au mandat que l'on a décidé d'exercer, mais avec des niveaux
de rémunération qui ne sont en rien comparables.
J'avais d'ailleurs proposé, monsieur le ministre, un amendement qui visait à
permettre à un artisan, un commerçant, un agriculteur ou à celui qui exercerait
une profession libérale et qui serait amené à constater, de par son choix
d'exercer un mandat électif, une perte de revenus de plus de 30 % par rapport à
ceux que lui procurait son activité professionnelle, de bénéficier au moins
d'une compensation partielle de cette perte de rémunération.
Lors du débat que nous avions eu lorsque Jean-Paul Delevoye avait défendu les
positions du Sénat sur le statut de l'élu, vous m'aviez indiqué, monsieur le
ministre, que vous feriez des propositions lors de l'examen du projet de loi
relatif à la démocratie de proximité. Or, j'ai lu et relu votre texte, mais je
n'y ai rien trouvé à cet égard. J'espère donc qu'au cours du débat vous pourrez
nous apporter quelques éléments de réponse de nature à nous rassurer.
Puisque j'ai épuisé mon temps de parole, je n'évoquerai malheureusement pas
les services départementaux d'incendie et de secours. Je conclurai sur les
moyens logistiques, techniques, administratifs et humains dont disposent les
élus locaux pour exercer leur mandat.
Aujourd'hui, ces moyens ne sont pas dignes de notre société et ne tirent pas
les enseignements de toutes les évolutions législatives qui ont été adoptées
par le Parlement. Il faudrait, monsieur le ministre, que les conseillers
régionaux, les conseillers généraux, les maires des communes, petites ou
moyennes, puissent bénéficier de moyens logistiques, techniques, administratifs
et humains qui soient comparables à ceux qui sont accordés aux parlementaires
dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions.
A l'heure actuelle, être conseiller général, vice-président ou président d'une
assemblée départementale, c'est, en fonction du niveau de responsabilités ou du
département dans lequel on siège, y consacrer pratiquement les trois quarts ou
les deux tiers de son temps, voire, pour certains, la totalité de leur temps.
Or, aujourd'hui, compte tenu des dispositions législatives, ils ne peuvent
bénéficier du concours d'une secrétaire, de l'équipement d'un micro-ordinateur
ou de la prise en charge des dépenses de téléphone que dans la limite d'un
quota correspondant au total du montant des indemnités des élus versé aux
groupes politiques, mais qui est très nettement insuffisant par rapport aux
besoins qui sont à couvrir dans l'ensemble des départements.
Il faudrait donc également que, dans ce domaine, il y ait des évolutions
significatives et j'espère que nous les trouverons au travers de ce projet de
loi.
Tel est l'essentiel de ce que je voulais dire, monsieur le président, en vous
priant de m'excuser d'avoir été un peu long.
(Applaudissements sur les
travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Mon cher collègue, le temps de parole est imparti à l'ensemble de votre
groupe. Vos collègues en auront donc un peu moins !
M. Philippe Marini.
C'est le principe des vases communicants !
M. le président.
La parole est à M. Détraigne.
M. Yves Détraigne.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il n'est pas
facile d'intervenir en fin de discussion générale après que beaucoup de choses
ont été dites. Mais, tant en raison de la diversité des questions relatives au
fonctionnement des collectivités locales qu'il aborde qu'en raison des risques
qu'il fait courir à un fonctionnement serein de la démocratie locale au travers
de plusieurs de ses dispositions, le projet de loi que nous examinons ne peut
laisser aucun élu local indifférent. C'est pourquoi je voudrais, en quelques
minutes, revenir sur quelques-unes de ses dispositions.
La première, qui est certainement celle qui fait le plus réagir les élus
communaux, et sur laquelle d'ailleurs la plupart des orateurs qui m'ont précédé
sont déjà intervenus, porte sur l'élection au suffrage universel direct des
membres des organes délibérants des groupements de communes à fiscalité
propre.
Si cette proposition peut trouver sa justification dans le fait que ces
groupements lèvent l'impôt et assument une part de plus en plus importante de
l'investissement local, elle n'en fait pas moins courir un risque énorme à la
poursuite du développement de l'intercommunalité dans notre pays alors que tout
le monde s'accorde à voir dans ce développement la solution aux problèmes posés
par l'éparpillement de nos communes.
Comment peut-on espérer, en effet, que l'intercommunalité se renforce si l'on
coupe l'automacité du lien existant actuellement - et qu'a renforcé la loi du
12 juillet 1999 - entre le conseil municipal de chaque commune membre d'un
groupement de communes et l'assemblée délibérante de ce groupement ? Ne risque-
t-on pas de voir les élus communaux et intercommunaux passer plus de temps à
régler des conflits les opposant qu'à travailler ensemble au développement du
territoire ?
Et que penser de l'impasse qui est faite sur la conséquence inéluctable d'une
telle proposition ? Les intercommunalités s'érigeront en collectivités locales
de plein exercice, et l'on risque de glisser insensiblement d'une gestion
intercommunale à une gestion supracommunale, de nature à décourager bon nombre
de responsables communaux et à ouvrir la porte à la disparition des communes,
lesquelles constituent pourtant, on l'a dit, le socle de la démocratie de
proximité.
En tout état de cause, je ne puis que regretter qu'une telle disposition ne
s'inscrive pas dans une réflexion plus large sur l'articulation et la
répartition des tâches entre l'ensemble des collectivités locales existantes,
alors même que, selon nombre d'observateurs, nous avons déjà, en France, trop
de niveaux d'administration.
Cette disposition me paraît donc, à tout le moins, prématurée, et les
amendements proposés par la commission des lois constituent, selon moi, le
minimum de garde-fous nécessaires si l'on veut éviter les dérives que
j'évoquais à l'instant.
Je souhaite également tirer la sonnette d'alarme sur les articles 8 à 11,
regroupés sous le titre : « Droits des élus au sein des assemblées locales
».
Ces dispositions, qu'il s'agisse des séances du conseil municipal réservées à
l'examen des propositions de l'opposition, de la création de missions
d'information et d'évaluation, de la relation, dans les procès-verbaux des
séances du conseil municipal, de toutes les opinions individuelles émises ou de
l'expression spécifique de l'opposition municipale dans les bulletins
d'informations générales, ne peuvent que conduire à la « rigidification » et à
la politisation du fonctionnement de nombreux conseils municipaux qui, jusqu'à
présent, échappaient à la politique politicienne pour le plus grand bien de la
commune et de ses élus, qu'ils appartiennent à la majorité ou à l'opposition
municipales.
En voulant imposer un cadre strict et uniforme au déroulement du débat
municipal, on alourdit la gestion des communes et on prend le risque d'ériger
en opposition systématique l'expression de positions différentes qui,
aujourd'hui, alimentent et enrichissent très naturellement le débat au sein des
conseils municipaux.
Plus qu'une volonté d'améliorer le débat local, ces propositions démontrent au
contraire une certaine méfiance, pour ne pas dire de la défiance, vis-à-vis de
la manière dont celui-ci se déroule aujourd'hui. C'est pourquoi, et la
commission des lois le propose dans sa sagesse, la suppression de ces
dispositions s'impose.
Enfin, je souhaite dire quelques mots des conditions d'intervention de la
commission nationale du débat public dans l'élaboration des grands projets
d'infrastructures.
Etant élu d'un département - la Marne - qui comptait trois des huit sites
envisagés pour l'implantation du virtuel troisième aéroport du grand Bassin
parisien, j'ai eu tout loisir d'observer les malentendus que peuvent faire
naître des exercices de démocratie directe mal maîtrisés comme ceux qu'est
chargée d'organiser cette commission et auxquels il m'a été donné de
participer.
Tous les débats auxquels j'ai pris part entre les mois d'avril et d'octobre
derniers ont principalement servi à l'expression - parfois houleuse et toujours
excessive - d'opposants en tous genres, les responsables publics ne parvenant à
se faire entendre que s'ils s'exprimaient dans le sens souhaité par leurs
contradicteurs. Et ces débats ont finalement débouché sur une décision qui, en
l'occurrence, donne le sentiment d'avoir été prise par avance, le débat public
ayant alors pour objectif plus de donner bonne conscience que d'éclairer le
choix à faire.
La démocratie directe - car c'est de cela qu'il s'agit - ne s'improvise pas.
L'intérêt général ne correspond pas nécessairement à la somme des intérêts
particuliers qui s'expriment dans ces débats, lesquels risquent, au contraire,
de faire naître bien des malentendus et d'alourdir plus que de raison la prise
de décision sur de grands projets.
Il importe donc de bien clarifier le stade auquel ce débat intervient et d'en
fixer clairement l'objet et les limites, ce qui n'était de toute évidence pas
le cas pour le dernier grand débat qu'a organisé la commission nationale du
débat public. J'espère que la discussion qui se déroulera dans cet hémicycle
ira dans ce sens et que, en tout état de cause, le champ d'intervention de
cette commission restera limité aux projets d'une importance exceptionnelle.
Voilà, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
quelques points sur lesquels je souhaitais intervenir à mon tour, en émettant
le voeu que ce projet de loi ne ressorte pas des travaux de notre assemblée en
ayant alourdi et compliqué la gestion des collectivités locales, ce que l'on
peut malheureusement craindre à la lecture du texte actuel, mais, au contraire,
en ayant garanti la souplesse et le pragmatisme dont la démocratie de proximité
a besoin pour bien s'exprimer.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants ainsi, que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Sido.
M. Bruno Sido.
En présentant votre projet de loi, le 13 juin dernier, vous avez exposé,
monsieur le ministre, les six priorités du Gouvernement, précisant que ce texte
était « la première traduction législative de la nouvelle étape de la
décentralisation ». En fait, ce texte, ce
patchwork,
devrais-je dire, ne
traite que de la sixième d'entre elles ainsi que, très partiellement,
d'ailleurs, de la deuxième.
Je m'attacherai à traiter quelques aspects du dispositif qui nous est proposé,
en commençant par la procédure utilisée par le Gouvernement : l'examen en
urgence.
Cette méthode, monsieur le ministre, vous est familière, me semble-t-il.
Pourquoi ? La majorité actuelle aurait-elle les mêmes symptômes que le
laboureur de la fable ? Le Gouvernement peut-il prétendre qu'il y avait urgence
à modifier le mode de réalisation du recensement, par exemple ?
De plus, ce texte se trouve profondément modifié par des amendements
gouvernementaux qui en changent, du même coup, tant la portée que le sens. Il
me semble que la procédure utilisée, certes légale, n'est pas en phase avec
l'esprit des textes de la Ve République.
M. François Fillon l'a dit avec éloquence avant moi, à la tribune de
l'Assemblée nationale, cette méthode est acceptable quand elle est utilisée
parcimonieusement et à la marge, mais elle constitue un dévoiement de procédure
quand il s'agit de traiter un problème aussi prégnant que celui de la
décentralisation, s'agissant singulièrement des transferts de compétences aux
collectivités territoriales. Est-il vraiment raisonnable de court-circuiter le
Conseil d'Etat et le conseil des ministres ? Cette méthode prend les assemblées
et leurs commissions au dépourvu et ressemble, à s'y méprendre, à celle qui est
utilisée par les hussards !
Etait-ce bien utile ? Etait-ce bien nécessaire, aussi ?
Urgence, amendements gouvernementaux, voilà qui prouve, à tout le moins, que
ce texte de loi était « mal ficelé » dès sa conception, que sa préparation
s'est réalisée en urgence, sinon dans la précipitation, pour des raisons que
l'on entrevoit clairement : il s'agissait d'occuper le terrain politique et
médiatique pour donner le change à la suite du rendez-vous manqué des élections
municipales, confirmé, d'ailleurs, six mois plus tard.
En fait, vous traitez à la légère les droits du Parlement, car cette
précipitation engendre un manque de concertation, singulièrement entre les deux
assemblées.
Pour autant, je souhaite que la première et probablement seule lecture à
laquelle nous aurons droit soit, pour nous, l'occasion d'enrichir et de
corriger le dispositif qui nous est proposé afin de le rendre acceptable.
Je reconnais que tout n'est pas si mauvais dans ce texte, monsieur le
ministre, puisque vous reprenez, dans le titre II, l'essentiel du texte voté
par la Haute Assemblée concernant la démocratie locale.
Cependant, vos propositions ainsi que les amendements votés par les députés de
votre majorité manquent de précision. Je ne citerai, pour illustrer mon propos,
que l'article 7
ter
traitant de l'élection au suffrage universel direct
des membres des EPCI, qui renvoie à une future et hypothétique loi, ou bien
encore les articles 43 et suivants, concernant les SDIS, qui ne disent
nullement comment les conseils généraux trouveront les moyens nécessaires pour
financer ces services à 80 %.
Non, monsieur le ministre, nous sommes vraiment loin des ambitions que vous
annonciez. Il est vrai, en revanche, que nous sommes proches des élections !
Opportunément, vous étant rendu compte des insuffisances patentes de ce projet
de loi, vous en modérez la portée en précisant, toujours le 13 juin dernier,
que « les ambitions du Gouvernement ne sont pas épuisées et que d'autres
mesures sont souhaitables et envisageables ».
Les députés de votre majorité, se précipitant dans la brèche, ont adopté
l'article 15
quinvicies
et transformé par amendement les conseils
généraux en « conseils départementaux », arguant d'une nécessité de
clarification. Je m'interroge sur la pertinence de cette volonté de changer un
nom historique, porteur d'un contenu bien identifié par nos concitoyens et
existant depuis plus de deux cent dix ans, soit avant même la Ire République
!
Si l'intention était de rapprocher la population des lieux de décision, il me
semble que l'objectif - louable - n'a pas été atteint. Changer le nom d'une
assemblée territoriale qui fait ses preuves tous les jours sans accompagner
cette modification d'un approfondissement des compétences de ladite assemblée,
cela fait gagdet, monsieur le ministre !
M. Philippe Marini.
Absolument !
M. Bruno Sido.
A tout le moins, cette volonté, subalterne, de votre majorité plurielle est
tout à fait à l'image de ce projet de loi : c'est de la poudre aux yeux !
Puis-je ajouter, sans aucun esprit de polémique, que cette proposition a un
relent de vichysme ?
M. Jean-Claude Peyronnet.
C'est une demande de l'ADF !
M. Bruno Sido.
Certes,
errare humanum est !
M. Philippe Marini.
Perseverare diabolicum ! (Sourires.)
M. Bruno Sido.
Voilà donc un texte de circonstance, qui n'apporte rien de très novateur, qui
ne traite pas les sujets au fond et qui ne règle aucune question.
J'aborderai, plus précisément, deux aspects de ce projet de loi qui me
paraissent importants pour nos EPCI et pour nos départements.
A l'article 7
ter
, on retient le principe de l'élection au suffrage
universel direct des membres des organes délibérants des structures
intercommunales à fiscalité propre, la méthode utilisée étant, pour un sujet
aussi sensible, celle de l'amendement. Il me semble que, les futures élections
se déroulant dans six ans, l'urgence ne peut être invoquée et que les moyens
utilisés ne sont pas opportuns.
L'intercommunalité se met en place par étapes, parfois difficilement, pour des
raisons qui tiennent à ce que l'on peut appeler le « syndrome Marcellin ». En
effet, la pression des pouvoirs publics d'alors a été si forte en faveur de la
fusion-association que nombre de communes ont réalisé un « aller et retour »
rapide, constatant que cette formule n'avait pas fait la preuve de son
efficacité, pas plus que leur bonheur. Les séquelles sont encore bien lisibles
sur le terrain, personne ne peut le nier.
Une confiance mutuelle doit présider à l'établissement des liens durables
tissés entre les communes qui désirent mettre en commun - et non transférer ou
abandonner - un certain nombre de leurs compétences. Or ce brutal virement de
bord, ce changement de mode de scrutin risque de briser cette belle confiance
enfin retrouvée. En effet, les conseils municipaux entendent - vous le savez -
« garder la main » sur ces compétences partagées. Cet amendement introduit par
l'Assemblée nationale dépouille, de fait, les assemblées communales de leurs
prérogatives essentielles. Enfin, il suscite méfiance et suspicion entre
communes et EPCI, ce qui se traduira immanquablement par un très net
ralentissement de cette mise en commun volontaire. Dès lors, il sera donné un
coup d'arrêt brutal à ce mouvement tout à fait nécessaire, ce qui sera
réellement dommageable pour l'avenir de ces collectivités et de leurs
habitants.
Enfin, je constate une certaine incohérence : si ces EPCI ont été créés par
une décision des conseils municipaux et non par la population - ce qui n'a pas
la même portée, tant s'en faut - les responsables de ces EPCI sont, eux,
désignés par le suffrage universel direct. Rendons donc à César ce qui
appartient à César, et continuons de faire confiance aux communes pour la
gestion de leurs compétences mises en commun.
Si cet article était définitivement adopté, je crains, à l'instar de M.
Delevoye, « une dévitalisation de la légitimité politique des conseils
municipaux et des maires ».
M. Philippe Marini.
Un conflit de légitimité !
M. Bruno Sido.
Mais, au fond, n'est-ce pas l'objectif ?
M. Jean-Pierre Schosteck.
Bien sûr !
M. Bruno Sido.
D'ailleurs, M. Mauroy a jeté le masque hier, de cette même tribune !
M. Philippe Marini.
C'est diviser pour régner !
M. Bruno Sido.
Je note, par ailleurs, que les chantres du suffrage universel direct, lequel
n'a pas plus de force et ne confère pas plus de légitimité que le suffrage
universel indirect, selon, quoi que l'on en dise, l'article 3 de la
Constitution, n'ont pas cru nécessaire d'appliquer à ces futurs édiles la loi
sur le cumul des mandats. Cela signifierait-il, en fait, malgré des apparences
trompeuses, qu'il ne s'agit que d'élus de second rang et que ce mandat n'aurait
pas la force et l'importance que vous semblez vouloir lui conférer ?
Non, vous l'avez bien compris, tout cela n'est pas cohérent, et la Haute
Assemblée, par la voix du rapporteur de la commission des lois, que je salue,
demandera que cette disposition, introduite par amendement, soit supprimée.
M. Philippe Marini.
Très bien !
M. Bruno Sido.
Le second aspect de ce texte que je voulais examiner devant vous concerne le
titre III et, plus précisément, les articles 43 et suivants, traitant des
SDIS.
Ces articles n'abordent pas vraiment la question au fond, comme il aurait été
souhaitable. Quelques aménagements à la marge nous sont proposés, mais aucun
choix politique fondamental n'est opéré. En effet, s'agissant de la mise en
oeuvre d'un service aussi important, aussi sensible et utile pour les
habitants, aussi emblématique également, deux choix fondamentaux et novateurs,
aussi légitimes l'un que l'autre, d'ailleurs, étaient envisageables. M. Mauroy
l'a également indiqué hier.
Soit le Gouvernement proposait la création d'un grand service public national
de la sécurité civile, et dans ce cas l'Etat en prenait la charge au sein du
ministère de l'intérieur, comme il le souhaitait.
Soit le choix se tournait vers les départements qui créeraient pour ce faire
un grand service en leur sein, à l'instar des services sociaux. Ce second
choix, qui aurait eu mes faveurs, ne nécessiterait en aucune façon ni budget
annexe ni fiscalité additionnelle. Il serait lisible par nos concitoyens,
efficace et surtout égalitaire vis-à-vis de la population.
Au lieu de cela, vous nous proposez une solution temporaire,
a minima,
qui pérennise quelques années encore l'inéquité actuelle devant la
sécurité, qui ne clarifie pas les compétences entre Etat et départements et
qui, en définitive, ne résout durablement rien.
Il vous faut pencher vers la décentralisation, monsieur le ministre ; vous
devez en faire une doctrine politique. Lancez-vous ! Osez !
Mais, bien au contraire, grâce à diverses mesures et aux méthodes qui peuvent
être qualifiées de dilatoires, vous restez, à votre corps défendant bien
entendu, au milieu du gué, en retrait, comme si le Gouvernement et sa majorité
étaient secrètement réticents face à cette évolution non seulement
indispensable mais également inéluctable.
En conclusion, monsieur le ministre, vos propositions souffrent d'un manque
d'ambition et de vision fondatrice pour des sujets qui en valent la peine, qui
méritent que l'on fasse preuve d'une véritable volonté et d'une réelle audace
dépassant la limite des quartiers.
Sans vouloir être cruel, permettez-moi de reprendre les propos de M. Mamère
expliquant en commission à l'Assemblée nationale que « ce texte dont la
préparation précipitée et le manque d'ambition sont sans doute les deux points
les plus noirs constitue une mauvaise réponse d'une majorité débordée sur sa
gauche ». Il parlait, par ailleurs, de « réforme bâclée, fourre-tout... ».
Que dire de plus ? De vos six priorités, rien n'est traité et nous sommes bien
loin du débat de fond sur l'avenir de nos institutions que nous appelons de nos
voeux.
A l'heure où nos concitoyens aspirent à une plus grande efficacité, grâce à
une décentralisation accrue, nous n'avons qu'un texte décevant, mal ficelé,
sans cohérence ni transparence.
Mais, fort heureusement, ce qu'une loi fait, une autre peut le défaire. Si les
Français le veulent bien, nous ferons mieux en articulant vraiment les communes
et les EPCI, les départements et les régions ; nous remettrons cette loi et
d'autres sur le métier. Au fond, les socialistes ne savent faire que des lois
socialistes - on ne vous le reprochera pas, monsieur le ministre -, et la
décentralisation ne s'en accommode pas.
Par excès de dogmatisme et de formalisme, vous semblez vouloir instaurer
toujours plus de normes, au nom de je ne sais quelle proximité, au nom d'une
prétendue plus grande transparence dans l'exercice du pouvoir local.
Mais, vous le savez mieux que moi, la proximité, notion qui, soit dit en
passant, n'est pas nécessairement porteuse de toutes les vertus cardinales,
demeure efficace et pertinente à condition qu'elle n'ankylose pas toute
initiative locale. C'est pourtant bien ce qui risque malheureusement d'arriver
en multipliant à l'envi des instances de concertation qui remettront
nécessairement en cause la légitimité des élus, seuls investis du pouvoir issu
du suffrage universel.
Vous semblez ignorer ces incomparables lieux d'expression démocratique que
sont une commune, un département, une région.
Finalement, par un texte confus qui jette une fois de plus le trouble sur la
répartition des compétences, vous restreignez à une « peau de chagrin » nos
enthousiasmes sur ce que nous étions en droit d'attendre de cette nouvelle
étape de la décentralisation, dont nous nous apprêtons précisément à célébrer
dans quelques semaines le vingtième anniversaire.
De grâce, cessez, comme vous le faites plus ou moins sournoisement depuis que
vous êtes en charge des affaires de l'Etat, de considérer que décentraliser,
c'est déconcentrer vos ambitions !
Monsieur le ministre, vous l'avez compris, je ne voterai pas votre projet de
loi qui, à l'issue de son examen à l'Assemblée nationale, comprend maintenant
124 articles, ce qui n'a fait que l'aggraver. Toutefois, ces articles seront
considérablement améliorés par les amendements que nous proposerons et qui, je
n'en doute pas, seront acceptés par la Haute Assemblée. Ainsi modifié, votre
projet, sera acceptable, sans plus, à nos yeux tout au moins. Sous réserve de
l'adoption de ces modifications, nous le voterons donc.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union Centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne me
livrerai pas à une analyse exhaustive de ce projet de loi, les rapporteurs
s'étant déjà excellement exprimés, et de brillantes interventions ayant été
faites.
En tant que maire, j'ai soumis ce projet de loi, comme on le fait pour les
voitures, à un banc d'essai démocratique.
J'ai consulté plusieurs comités de quartier pour savoir ce que les gens
pensaient de ce texte.
J'ai commencé par exposer les articles concernant les mairies annexes et les
comités de quartier. Les gens se sont étonnés qu'il soit nécessaire de
légiférer en ce domaine et m'ont dit : « Cette loi n'est pas utile. Qu'est-ce
qui empêche les 36 000 maires de France, dans le cadre de la libre
administration de leur commune, de réunir quand et où ils le souhaitent la
population afin de discuter avec elle des choix à faire en ce qui concerne
l'aménagement et l'avenir de la commune ? ». D'ailleurs, les maires le font
puisque un grand nombre d'entre eux sont réélus. « Légiférer sur cette
question, m'ont-ils dit, c'est rigidifier la démocratie. Ce n'est pas
rapprocher la démocratie de la population. »
M. Philippe Marini.
Tout à fait ! C'est un carcan !
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Jean-Paul Virapoullé.
Je leur ai dit que l'on allait créer des mairies annexes. Là aussi, ils m'ont
rétorqué : qu'est-ce qui vous empêche de créer des mairies annexes ?
M. Philippe Marini.
Le manque d'argent !
(Sourires.)
M. Jean-Paul Virapoullé.
A cet égard, monsieur le ministre, j'ai une question à vous poser.
Toutes les communes de la Réunion - il y en vingt-quatre - ont des mairies
annexes. A Saint-André, on en dénombre huit pour 43 000 habitants. Pourquoi ces
mairies annexes ont-elles été constituées ? Tout simplement pour rapprocher le
service public de la population. Dans le cadre du conseil municipal, les
adjoints étant élus sur l'ensemble du territoire, rien n'empêche les maires qui
ont une bonne administration de louer un local dans un quartier de la commune,
de désigner ensuite un adjoint délégué qui y installe une secrétaire, des
bureaux, reçoit la population et apporte ainsi le service public dans ce
quartier.
On ne va pas faire une loi à chaque fois qu'on a une idée !
(Rires sur les
travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
J'ai dit à mes concitoyens qu'il y avait quand même des nouveautés dans ce
texte.
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Voyons !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Il y en a une qui concerne « le bureau des temps ».
(Murmures amusés sur les mêmes travées.)
A ce sujet, mes administrés m'ont tenu un propos qui m'a fait réfléchir. «
Monsieur le maire, m'ont-ils dit, qu'avez-vous fait au 1er janvier ? » Je leur
ai dit que j'avais appliqué les 35 heures. « Vous avez donc réduit le temps de
travail puisque maintenant la mairie ferme à 16 heures et que vous avez donné
douze jours de congé supplémentaires par an. Donc, il n'y a plus de temps pour
le bureau des temps. Vous pouvez le fermer, votre bureau des temps ! » Voilà ce
que ces personnes m'ont dit.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Mes concitoyens n'étaient donc pas contents. Mon mandat étant en jeu, je leur
ai alors parlé de l'article 7
ter
, aux termes duquel seraient désormais
élus au suffrage universel direct les conseillers délégués aux EPCI. Même avec
cela, ils n'étaient pas satisfaits !
Ils m'ont posé une question que je vous soumets, mes chers collègues : en
élisant au suffrage universel direct les conseillers des EPCI, ne crée-t-on pas
de facto
une nouvelle collectivité locale ?
M. Philippe Marini.
Nécessairement.
M. Jean-Paul Virapoullé.
Je pose la question, car la réponse ne figure ni dans les rapports ni dans le
projet de loi. Je ne connais pas d'élu au suffrage universel, autres que le
Président de la République et les députés, qui ne soit pas membre d'une
collectivité locale. Peut-être en connaissez-vous, mes chers collègues ?...
Non, personne ? Adjugé !
(Rires sur les mêmes travées.)
Donc, il n'y a pas d'élu qui siège ailleurs que dans une collectivité
locale.
M. Pierre Mauroy.
Tous les membres d'une communauté urbaine ou d'agglomération sont membres d'un
conseil municipal !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Mais ils sont élus au suffrage universel indirect. Dans le cas présent, il
s'agit de les faire élire au suffrage universel direct.
M. Pierre Mauroy.
C'est la démocratie !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Dans ce cas, on crée
de facto,
sans le dire, une collectivité locale
qui va exercer un pouvoir de tutelle sur toutes les communes et l'on est en
contradiction avec la Constitution.
M. Philippe Marini.
Quelle confusion !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Voilà les propos que mes administrés m'ont tenus, qui relèvent du bon sens
populaire.
Ces questions méritent examen. Je me demande si l'on n'est pas en train de
créer une usine à gaz. Alors que, dans son excellent rapport, M. Mauroy
affirmait qu'il fallait simplifier les procédures de décision en supprimant
certaines strates, on va ajouter une nouvelle strate de décision, avec
l'élection au suffrage universel des membres des organes délibérants des
EPCI.
M. Jean-Pierre Schosteck.
Il faut dire le mot pour ne pas faire la chose !
M. Philippe Marini.
C'est du raisonnement socialiste !
M. Jean-Paul Virapoullé.
J'en viens aux SDIS, sujet très important s'il en est.
Les départements métropolitains sont contigus, et peuvent donc être solidaires
entre eux. Dans les îles, cette solidarité est plus difficile à mettre en
oeuvre et un effort financier considérable est nécessaire pour disposer d'un
minimum de moyens.
J'ai lu le rapport de M. Jacques Fleury et je vous donne un chiffre : l'Etat
consacre à la sécurité civile 1,6 milliard de francs et les collectivités
locales environ 16 milliards de francs, c'est-à-dire dix fois plus. Dans la
mesure où c'est le préfet qui utilise les moyens des collectivités locales, on
aurait pu légitimement espérer un partage des charges entre l'Etat et ces
dernières. Non, on transfère l'ensemble des charges au conseil général d'ici à
2006 ! La morale de l'histoire, c'est que le conseil général sera asphyxié par
deux charges qui pèsent aujourd'hui sur son budget : le SDIS d'une part, et
l'aide aux personnes âgées, d'autre part, qui représente une dépense
croissante, sans oublier les dépenses d'insertion !
M. Philippe Marini.
Sans capacité à arbitrer !
M. Jean-Paul Virapoullé.
L'ensemble de nos interlocuteurs relèvent l'incohérence entre l'analyse de la
situation et la solution apportée.
Dans son rapport, M. Pierre Mauroy propose deux solutions différentes. L'une
prévoit que le président du conseil général devient le président du SDIS et
gère cet organisme. Je ne suis pas partisan de cette solution, ayant été
moi-même conseiller général. L'autre solution prévoit que c'est le préfet qui
gère le SDIS. En tout état de cause, une discussion doit avoir lieu, un
compromis doit être trouvé. Mais traiter le sujet par le biais d'un projet de
loi qui comportait initialement 60 articles et qui finit par en compter
aujourd'hui 124, au terme d'une grossesse difficile, ne me paraît pas être la
bonne solution.
M. Philippe Marini.
Et en procédure d'urgence !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Les seuls sujets du SDIS et du statut de l'élu méritaient chacun un projet de
loi discuté au fond.
M. Jean-Pierre Schosteck.
Ils éludent la discussion !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Traiter quatre sujets fondamentaux qui déterminent la vie de nos collectivités
et celle de nos concitoyens, en fin de législature et en urgence, me paraît
relever d'une procédure cavalière.
M. Philippe Marini.
C'est de la gesticulation ! Ce n'est pas sérieux !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Mes chers collègues, la demande que j'ai perçue sur le terrain est simple. Les
gens n'ont pas étudié le droit, ils ne sont pas des technocrates. Ce sont eux
qui nous ont mandatés pour exercer nos fonctions. Ils me disent simplement : «
Monsieur Virapoullé, lorsque vous participerez au Sénat à ce débat, qui est
fort intéressant, dites simplement qu'on a besoin de voir la démocratie
respectée. »
M. Bruno Sido.
Voilà !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Respecter la démocratie, c'est respecter les lois votées par le Parlement. Or,
comité de quartier ou pas, aujourd'hui, dans de nombreux quartiers, la loi de
la République n'est pas respectée.
(Applaudissements sur les travées de
l'Union centriste et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Philippe Marini.
Très bien !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Un comité de quartier s'est créé voilà quelques semaines à Chevilly-la-Rue,
dans la banlieue sud de Paris. Des personnes âgées et des personnes seules se
sont plaintes de ne plus pouvoir aller chercher de l'argent à La Poste, de ne
plus pouvoir se rendre au marché forain sans se faire insulter. Quelle réponse
le comité de quartier pourra-t-il leur apporter ?
M. Philippe Marini.
Ça leur fait une belle jambe d'avoir un comité de quartier !
M. Jean-Paul Virapoullé.
Lorsque, dans les écoles situées dans des quartiers en difficulté, des élèves
appartenant à cinq, six, dix ou quinze nationalités différentes ne peuvent pas
apprendre le français faute d'un encadrement spécialisé, que fera le comité de
quartier ?
Le remède envisagé est largement insuffisant, inadapté aux maux réels qui
affectent notre démocratie. On fait un texte dans l'urgence, par crainte
d'aller au fond des problèmes.
Monsieur le ministre, je me souviens que François Mitterrand disait : « Quand
une loi est mauvaise, on ne l'amende pas, on la rejette. » En l'état actuel des
choses, je rejette cette loi.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
Bravo !
M. le président.
La parole est à M. Lardeux.
M. André Lardeux.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous n'avons
que l'embarras du choix pour qualifier le projet de loi qui nous est soumis :
patchwork, bric-à-brac, fourre-tout rassemblant des éléments sans souci de
cohérence... en somme, une auberge espagnole.
Il ne constitue pas une nouvelle étape de la décentralisation, il n'est pas
l'acte II de la décentralisation que les collectivités territoriales attendent,
il n'est donc sûrement pas un grand texte de décentralisation. On y décèle en
outre une contradiction fondamentale : en effet, à côté de dispositions à visée
décentralisatrice, du moins en apparence, des mesures centralisatrices tendant
à accentuer la tutelle de l'Etat sur les collectivités locales sont plus ou
moins subrepticement introduites, notamment à l'article 50, relatif à la
concertation ; j'y vois la poursuite d'une centralisation rampante.
En vertu du principe : « Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais »,
ce projet de loi ne prévoit d'ailleurs nullement d'imposer à l'Etat ce qu'il
impose aux collectivités locales, ce qui vient confirmer une détestable
tendance, qui s'est accentuée ces dernières années et qui n'est pas étrangère à
la perte d'autorité et de crédibilité de l'Etat.
Les omissions majeures sont trop nombreuses pour que ce texte soit acceptable
tel quel : il n'y a rien sur la réforme de l'Etat - lequel doit recentrer son
action sur ses missions régaliennes pour être fort et accomplir ce qui est
attendu de lui - qui doit accompagner, sinon précéder de nouvelles avancées de
la décentralisation ; il n'y a rien sur les finances locales, alors qu'il est
urgent de fixer des règles claires pour maintenir l'autonomie financière des
collectivités et garantir la libre administration de celles-ci ; il n'y a rien
sur la fonction publique territoriale, alors que, par exemple, il est
nécessaire d'ouvrir le droit d'option pour les personnels des directions
départementales de l'équipement, les DDE, au moins dans les départements où est
appliqué l'article 7 de la loi de 1992.
Les propositions qui nous sont soumises témoignent donc plutôt d'un esprit non
pas d'ouverture, mais de fermeture.
A cet égard, l'expression « démocratie de proximité » figure-t-elle à bon
escient dans l'intitulé du projet de loi ? On peut en douter.
En effet, dans votre vision centralisatrice des choses, monsieur le ministre,
vous présentez de nombreux dispositifs comme « obligatoires », alors que le
principe de libre administration des collectivités devrait amener à ouvrir
simplement la faculté d'y recourir, les élus devant rester maîtres de leurs
décisions. Pourquoi vouloir imposer pour uniformiser ? De plus, comment
imaginer que l'on va ranimer le civisme et l'engagement citoyen par le biais de
procédures qui sont plutôt sclérosantes ?
Vous parlez beaucoup de démocratie participative, monsieur le ministre, mais
que devient la démocratie représentative ? Vous remettez en cause, quoi que
vous en pensiez, la légitimité de l'élection au suffrage universel de la
majorité chargée de diriger la collectivité. Ainsi, avec les conseils de
quartier, tels qu'ils sont conçus, vous mettez en avant la logique des
minorités dites « agissantes » et des groupes de pression, au détriment des
majorités.
Quant aux droits des élus au sein des assemblées locales, seuls ceux des élus
minoritaires semblent être pris en compte. J'y reviendrai dans quelques
instants, mais il faudra veiller à ce que ces dispositions ne conduisent pas au
développement des surenchères démagogiques, au « toujours plus ». Par ailleurs,
quand on voit quelle sollicitude vous déployez à l'égard des élus minoritaires
au sein des collectivités locales, on ne peut que regretter que vous ne
manifestiez pas la même attitude vis-à-vis de l'opposition nationale ici
représentée !
Aussi me paraît-il préférable de laisser « respirer » la démocratie locale,
plutôt que de chercher à l'enserrer dans un carcan de contraintes.
Si ce texte avait vocation à devenir une grande loi de décentralisation, les
départements, fondement même de la République, ne seraient pas oubliés comme
ils le sont, sauf quand il s'agit de leur imposer des charges sans
contrepartie.
Je pense - et je ne suis pas forcément d'accord, sur ce point, avec tous les
orateurs qui m'ont précédé - que le changement de dénomination des conseils
généraux pouvait représenter une éventualité intéressante, mais une affirmation
claire et solennelle, à la suite d'un débat en bonne et due forme, eût été
largement préférable à une introduction en catimini, au détour d'un alinéa
d'article.
En ce qui concerne les conseils de quartier, pourquoi imposer l'extension
uniforme de ce que nombre de collectivités ont déjà inventé ? Prévoir la
possibilité de créer de tels conseils me paraît plus démocratique qu'instaurer
une obligation.
Pour en revenir aux droits des élus minoritaires dans les conseils, le travail
quotidien des assemblées vous montrerait, monsieur le ministre, que les
dispositions que vous nous présentez ne sont pas essentielles, sauf à vouloir
limiter les droits de la majorité, accroître la lourdeur du fonctionnement et
rendre conflictuels les rapports entre majorité et minorité. Il est, me
semble-t-il, paradoxal de souhaiter davantage de participation et de dire
ensuite aux électeurs que la légitimité de la majorité qu'ils ont désignée est
remise en cause. Le citoyen normalement constitué ne peut qu'être conduit à
penser que la légitimité conférée par le suffrage universel est superfétatoire.
C'est un paradoxe que de vouloir renforcer la démocratie locale en
affaiblissant ceux qui sont chargés de la faire fonctionner. Prenons garde que
ces dispositions ne nuisent à l'action et à l'efficacité des collectivités
locales et ne conduisent à de nouveaux alourdissements de leurs charges !
S'agissant du statut social des élus, il est souhaitable qu'il y ait cohérence
entre les différents niveaux, notamment en ce qui concerne les indemnités, et
il est indispensable de veiller à ce que cela ne mène pas non plus à une
professionnalisation de la vie publique locale, avec les risques que cela
comporte, pour l'élu, de se couper du réel et d'être dépendant de sa
réélection, ce qui nuit, c'est le moins que l'on puisse dire, à l'autonomie de
la décision.
Les départements, quant à eux, sont prêts à exercer de nouvelles compétences,
pourvu qu'on leur en donne les moyens et que cela soit décidé après une
concertation élargie et approfondie visant à évaluer les avantages et les
inconvénients d'une telle évolution : il ne s'agit pas seulement de prendre des
mesures de circonstance.
Dans ce domaine, le projet de loi manque de cohérence, baigne dans le flou et
se révèle finalement assez inopérant. La clarification nécessaire des
compétences mérite autre chose qu'une rédaction à la sauvette.
En effet, de nombreuses questions se posent s'agissant des départements. Il
faudra bien les traiter un jour, mais l'on évite de le faire ici, bien qu'elles
soient pendantes depuis longtemps : je pense par exemple à la cogestion des
fonds départementaux du RMI, qui constitue une source de lourdeurs et un frein
manifeste aux initiatives des départements, les représentants de l'Etat se
montrant parfois plus attentifs à la lettre qu'à l'esprit des textes, ou aux
DDE, de plus en plus de départements choisissant d'appliquer l'article 7 de la
loi de 1992 pour la mise à disposition à leur profit des personnels de ces
directions.
A cet égard, je crois nécessaire non pas d'imposer un changement de statut,
mais d'ouvrir le droit d'option pour la fonction publique territoriale, dans le
cadre des réorganisations partages mises en place. Il y va non seulement de
l'intérêt du service, lequel se trouve réduit puisque les 35 heures
s'appliquent dans les DDE sans compensation en effectifs, mais aussi de la
cohérence de l'exercice de l'autorité, ainsi que des carrières des personnels
et du déroulement de celles-ci. Derrière cette question se profile d'ailleurs
celle du devenir des parcs départementaux, dont le maintien pose problème.
Un autre domaine mérite de faire l'objet d'une remise en route de la
décentralisation : je veux parler de l'éducation nationale. En effet, on ne
peut continuer à gérer de façon centralisée plus d'un million de
fonctionnaires. Le chantier est si vaste qu'il doit être abordé par étapes
clairement programmées. Ce serait peut-être l'occasion de mettre enfin à jour
la loi Falloux et d'élaborer une législation moderne sur cette question. Il en
est de même pour les politiques culturelles.
En matière sociale, on attend en vain une clarification des compétences
respectives de l'Etat et des collectivités territoriales. Par ailleurs, la
question du devenir des routes nationales, auquel il n'est pas fait allusion
dans le projet de loi, reste posée.
S'agissant du fonctionnement et du financement des SDIS, la situation actuelle
est très insatisfaisante. Pour s'en convaincre, il n'est que de lire le rapport
présenté par M. Charasse devant la commission des affaires économiques et du
Plan. L'équilibre existant est certes fragile, mais l'on attend une loi sur la
sécurité civile, qui pourrait d'ailleurs rendre obsolètes la plupart des
dispositions contenues dans ce projet de loi.
Dans ce domaine, je crois qu'il faut viser à dégager des solutions simples.
Il pourrait s'agir de la transformation des SDIS en services de l'Etat, mais
l'on ne voit pas comment ce dernier pourrait disposer des moyens de financement
nécessaires, surtout après la distribution des cadeaux de Noël. Cette solution
n'est d'ailleurs guère envisageable si l'on veut que les sapeurs-pompiers
volontaires gardent toute leur place dans les dispositifs de sécurité.
Il pourrait également s'agir de l'intégration des SDIS en tant que services
départementaux, au besoin par la voie d'un budget annexe, après transfert de la
part de DGF correspondant à la charge nouvelle ainsi créée. Il est nécessaire
aussi que certaines dépenses indues soient non pas maintenues au compte de la
collectivité, mais prises en charge par les assurances, par les ARH, les
agences régionales de l'hospitalisation, et par d'autres financeurs. En effet,
si la sécurité n'a pas de prix, elle a un coût, et bien que, dans le discours
politiquement correct ambiant, il soit malséant de le dire, ce coût a une
limite.
Cette dernière solution aurait l'avantage de la simplicité : plus de
désignation d'un conseil d'administration, plus de calcul savant de
participation !
Dans ce cadre, il faudra, bien entendu, veiller au partage de l'autorité, pour
éviter les inconvénients de la cogestion. Actuellement, le représentant de
l'Etat reçoit des félicitations, souvent justifiées, pour la mise en oeuvre des
dispositifs de sécurité, tandis que les élus sont désignés à la vindicte comme
responsables de l'accroissement de la fiscalité et des charges. Le financement
des SDIS à la charge de la collectivité pourrait être identifié au moyen d'une
fiscalité
ad hoc
apparaissant sur la feuille d'imposition. Quoi qu'il en
soit, il faut sortir de l'application trop fréquente par l'Etat du mauvais
principe selon lequel « je décide, tu paies ».
En conclusion, tel qu'il est, ce texte de circonstance, destiné à faire
illusion, ne répond pas aux attentes, mais s'inscrit dans une logique de court
terme. Il va à l'encontre de l'intérêt général, est fondé sur des
a priori
idéologiques difficilement acceptables. En somme, je dirai, pour
paraphraser Napoléon, que « ce n'est pas forcément avec des intentions qu'on
fait une bonne politique ».
(Applaudissements sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. Claude Estier.
N'est pas non plus Napoléon qui veut !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Mes chers collègues, avant que M. le ministre réponde aux orateurs, puis que
nous abordions la discussion des articles, nous allons interrompre nos travaux
quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit
heures dix.)
M. le président.
La séance est reprise.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, au terme de quelque sept heures de discussion générale et après
avoir entendu tous les orateurs des groupes du Sénat, je veux vous faire part
de mon sentiment et de mes réactions, mais brièvement. En effet, nous aurons
l'occasion de revenir sur ces points tout au long de l'examen des 677
amendements.
Je ne m'étendrai pas sur les interventions ou les parties d'intervention que
j'ai trouvées quelque peu excessives, mais je prends acte d'un certain nombre
de critiques ou de suggestions, surtout lorsqu'elles sont constructives.
Je veux faire preuve du plus grand pragmatisme. A ceux qui considèrent que la
réflexion et la concertation ont été insuffisantes, je rappelle que ce projet
de loi a été envoyé aux principaux acteurs, y compris aux commissions et à la
présidence du Sénat, en mars dernier, après avoir été largement détaillé dans
les interventions du Premier ministre et dans les miennes au mois de janvier
dernier. Depuis, j'ai également rencontré les présidents d'associations
d'élus.
Aujourd'hui, 9 janvier 2002, est soumis à votre examen un projet de loi qui
comprend 124 articles. Toutes ces dispositions sont connues depuis au moins six
mois, d'autres depuis plus longtemps. Certaines ont été adoptées par le Sénat
sous cette forme ou sous une forme proche, qu'elles émanent du Sénat, de
l'Assemblée nationale ou du Gouvernement.
Je rappelle, à ce sujet, que trois propositions de loi d'origine
parlementaire, sénatoriale en fait, votées ces derniers mois concernaient au
premier chef les collectivités locales : la loi sur les sociétés d'économie
mixte, la loi sur les établissements publics de coopération culturelle, et
celle, à peine plus ancienne, concernant les conseillers d'arrondissement de
Lyon, Marseille et Paris.
Nombre d'entre vous, la quasi-totalité même, ont relevé les dispositions
positives et attendues de ce projet de loi. Les députés également puisque ce
texte, je le rappelle, a été adopté par l'Assemblée nationale.
Ces dispositions sont, pour l'essentiel, liées les unes aux autres, dans un
souci de cohérence, cette cohérence que j'ai rappelée dans mon discours initial
et qui souligne l'équilibre nécessaire de ce texte entre approfondissement
indispensable de la démocratie participative et renforcement de la démocratie
représentative, ce dernier passant également par une décentralisation de
compétences.
Le noyau dur peut certainement être amélioré, et plusieurs des 677 amendements
d'origine sénatoriale, notamment, bien sûr, ceux qui sont présentés par vos
commissions, pourront y contribuer, mais il n'est pas sécable. S'il l'était,
cela ne lui conférerait d'ailleurs pas la cohérence que beaucoup d'entre vous
appellent de leurs voeux.
La loi est indispensable - ce n'est pas à vous que je vais le dire - non
seulement pour fournir un cadre général, mais aussi pour permettre à tous de
bénéficier des mêmes droits. Il faut le dire : tout ne se passe pas partout
aussi bien que peuvent le laisser entendre certains des témoignages entendus
ici.
Quant aux transferts de compétences proposés, nous souhaitons, bien sûr, tous
aller au-delà, et je l'ai déjà dit, mais ce n'est pas si simple ; pour s'en
convaincre, il suffit de se référer au compte rendu des débats dans vos
commissions.
Les transferts simples et consensuels proposés par le Gouvernement répondent
d'ailleurs à des demandes, parfois anciennes, de l'Assemblée des régions de
France, notamment, et, même s'ils peuvent être améliorés sur le plan technique,
ils ne sont pas ou sont peut contestés en tant que tels. Pour aller plus loin,
l'expertise et la concertation sont indispensables dans ce domaine qui concerne
plusieurs niveaux de collectivités, parfois concurrents, les personnels des
services transférés et dont les conséquences financières sont loin d'être
neutres.
S'agissant des services départementaux d'incendie et de secours, de nombreux
intervenants, vos commissions elles-mêmes ont rappelé l'inadaptation de
certaines dispositions de la loi de 1996 visant à départementaliser les SDIS.
Les dispositions proposées par le Gouvernement, celles qui sont présentées par
la commission des lois, notamment, vont dans le sens d'une amélioration et
règlent les problèmes existants, tout en conservant un lien indispensable entre
les maires, le conseil général, et les conditions d'exercice des secours comme
leur financement.
En ce qui concerne certains points précis sur lesquels plusieurs orateurs
m'ont interrogé, je rappellerai mes prises de positions sur l'intercommunalité
et l'avenir des communes, sous le contrôle des membres de l'Association des
maires de France, l'AMF, ici présents et, particulièrement, du vice-président
de cette association chargé d'animer la table ronde du congrès de l'AMF
consacrée à cette question. Je me suis également exprimé dans les mêmes termes
au congrès de l'Association des petites villes de France comme aux rencontres
des grandes agglomérations. Quant au Premier ministre, devant l'AMF, il s'est
prononcé dans le même sens.
Je ne suis pas partisan de la supracommunalité. L'élection au suffrage
universel des délégués communautaires, introduite par amendement parlementaire
dans ce projet de loi, ne peut donc, à mon sens, se concevoir que dans une
circonscription communale, le même jour et sur une même liste.
Mais le débat reste ouvert et je n'avais aucune raison de m'opposer en
première lecture, à l'Assemblée nationale, à un amendement qui rappelait un
principe, en renvoyant à une loi ultérieure pour en définir les modalités.
Plusieurs orateurs, sans remettre en cause le principe de la revalorisation de
l'indemnité des maires et adjoints, ont posé le problème de son financement
pour les plus petites communes. C'est une question qui mérite attention, en
effet. Elle me paraît pouvoir trouver sa place dans la réflexion sur la réforme
des finances locales.
En ce qui concerne la question posée par M. Jean-Paul Delevoye sur les
nouvelles modalités de recensement, je puis dire que ce nouveau recensement,
plus juste que les recensements décennaux, fera l'objet, bien sûr, d'un groupe
de travail avec les associations d'élus pour toutes les conséquences qui en
découlent. Je crois savoir qu'il y a d'ailleurs déjà eu des réunions de cet
ordre entre les services de l'INSEE, ceux du ministère de l'intérieur et ceux
de l'AMF, notamment.
En conclusion de cette intervention et, quoi qu'on en dise, avant les
prochaines étapes qui permettront d'aller plus loin encore dans la
décentralisation, ce projet de loi a deux vertus fondamentales.
D'abord, comme l'a dit Pierre Mauroy, hier soir, il innove et approfondit la
démocratie locale ; à cet égard, il ne faut pas se laisser aller à des craintes
injustifiées et, pour tout dire, peut-être à une certaine résistance au
changement. Comme Pierre Mauroy l'a rappelé, souvent, ceux qui résistent au
changement n'y résistent pas longtemps et deviennent finalement des adeptes
dudit changement ! Bien sûr, il évoquait là les lois de décentralisation de
1982, maintenant revendiquées par tout le monde. Il en ira peut-être aussi
ainsi de cette nouvelle étape, avant d'autres.
Par ailleurs, le présent projet de loi apporte un grand nombre de solutions
concrètes aux problèmes que tous les élus connaissent quotidiennement, et nous
avons le moyen de répondre à l'attente de ces derniers en adoptant ce texte
dans des délais compatibles avec la fin de la session parlementaire. C'est
d'ailleurs, me semble-t-il, l'opinion constructive exprimée par la commission
des lois, comme par les trois autres commissions saisies pour avis, et leurs
rapporteurs respectifs, Daniel Hoeffel, Michel Mercier, Patrick Lassourd et
Xavier Darcos, que je remercie.
Ces dispositions, vous le savez, sont très attendues par les élus et par la
population qu'ils représentent. Vous avez les moyens de répondre aux
préoccupations de ces derniers, et je vous ai rappelé les éléments fondamentaux
auxquels le Gouvernement tient, notamment les liens étroits entre les
différents titres du projet de loi.
N'attendons pas le ou les grands soirs, n'attendons pas des réformes de la
Constitution, qui prennent forcément du temps. N'attendons pas des transferts
de compétences ambitieux et souvent légitimes, certes, mais pas encore
maîtrisés à ce jour dans leurs modalités. N'attendons pas des « réformes
d'ensemble », termes, qui, je m'en souviens, avaient fait réagir la commission
des finances lorsque je les avais employés en présentant le processus pour la
prochaine réforme des finances locales.
Il m'avait alors été rétorqué : « Oh, quand nous entendons "réforme
d'ensemble", nous estimons qu'il s'agit d'un moyen pour ne pas faire de simples
réformes ». Je ne suis pas sûr de partager cette analyse mais, puisque c'est
celle de la commission des finances, je l'entends volontiers aujourd'hui !
(Sourires.)
Prenons nos responsabilités. Le Gouvernement et l'Assemblée nationale ont pris
les leurs. Que chacun les prenne à l'égard des élus locaux et de la population,
qui, au-delà de ce débat devant la Haute Assemblée, attendent des avancées en
matière de démocratie locale, de démocratie de proximité et de
décentralisation.
J'espère donc que le débat que nous allons maintenant entamer article par
article, amendement par amendement, permettra de répondre à cette attente. En
tout cas, c'est le souhait du Gouvernement, et je veux croire que, finalement,
vous voudrez bien, mesdames, messieurs de la majorité sénatoriale, le partager.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines
travées du RDSE. - M. Bret applaudit également.)
M. le président.
Nous passons à la discussion des articles.
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président.
L'amendement n° 465, présenté par Mmes Mathon et Borvo, M. Bret et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 2141-1 du code général des collectivités territoriales est
ainsi rédigé :
«
Art. L. 2141-1
. - Les habitantes et habitants de la commune doivent
être informés des affaires de celle-ci. A cette fin, la commune réunit
régulièrement ses habitantes et ses habitants, elle crée des structures leur
permettant de faire des propositions et de prendre des initiatives, de
contrôler et d'évaluer la mise en oeuvre des décisions prises. La forme de ces
structures et leurs modalités de fonctionnement est décidée par le conseil
municipal après consultation des habitantes et habitants. Le droit des
habitantes et habitants de participer à la vie démocratique est un principe
indissociable de la libre administration des collectivités territoriales. Il
s'exerce dans toutes les communes, sans préjudice des dispositions en vigueur
relativement notamment à la publicité des actes des autorités territoriales
ainsi qu'à la liberté d'accès aux documents administratifs. »
La parole est à Mme Mathon.
Mme Josiane Mathon.
En proposant une nouvelle rédaction pour l'article L. 2141-1 du code général
des collectivités territoriales, nous avons souhaité préciser les modalités
d'association des habitants à la prise et au contrôle des décisions, ainsi que
leurs pouvoirs d'initiative.
Comme nous l'avons déjà dit, nous considérons que tous les citoyens, où qu'ils
soient, doivent pouvoir participer activement à la vie locale.
Dans le projet de loi dont nous débattons, il est proposé, pour l'instauration
des conseils de quartier, un seuil de 50 000 habitants. Des amendements visent
à revenir au seuil de 20 000 habitants, fixé dans le texte initial. Quoi qu'il
en soit, ces seuils nous semblent nettement trop élevés si l'objectif de la loi
est bien de renforcer la participation de tous les citoyens aux affaires de la
cité. De nombreuses communes seront en effet exclues de son application.
Aussi, nous avons voulu que la loi affirme d'emblée quelques principes qui
puissent s'appliquer à toutes les communes, à tous les citoyens. Ces principes
permettraient aux habitants d'être associés aux décisions, d'avoir un droit
d'initiative, de contrôle, d'évaluation. Ils permettraient d'offrir aux élus
des références sur cette question extrêmement importante de la démocratie
participative, sans chercher à corseter quoi que ce soit et en conservant donc
une certaine souplesse.
Avec cet amendement, nous entendons permettre la démocratie locale,
participative, sur l'ensemble du territoire national.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
La
commission émet un avis défavorable. En effet, cet amendement n'apporte rien de
nouveau en matière d'information et de participation des habitants. En
revanche, son adoption introduirait, à travers le concept d'« habitants », une
différence par rapport à la situation existante, fondée, quant à elle, sur les
électeurs.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Madame la sénatrice, les textes en vigueur,
comme le présent projet de loi, aboutissent à la création - facultative ou
obligatoire selon les cas - de comités consultatifs, de conseils de quartier,
de commissions consultatives des services publics locaux et de missions
d'information et d'évaluation.
Le Gouvernement pense que la charge ainsi imposée est nécessaire mais aussi
suffisante. Il n'est donc pas favorable à l'obligation faite aux communes de
créer de façon générale des structures de proposition et de contrôle qu'elles
devraient obligatoirement réunir de façon régulière pour rendre compte de leur
activité.
Cette mesure introduirait une rupture de l'équilibre entre la démocratie
représentative et la démocratie participative, contraire au principe de libre
administration des collectivités locales.
En conséquence, je souhaite soit le retrait de l'amendement - formule que je
préférerais bien évidemment -, soit son rejet.
M. le président.
Madame Mathon, l'amendement n° 465 est-il maintenu ?
Mme Josiane Mathon.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 465, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 466, présenté par Mmes Beaufils, Borvo et Mathon, M. Bret et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les articles L. 2142-1 à L. 2142-8 du code général des collectivités
territoriales sont ainsi rédigés :
«
Art. L. 2142-1. -
Les électeurs de la commune, du département, de la
région ou des territoires peuvent être consultés sur les décisions que
respectivement les autorités municipales, départementales, régionales ou
territoriales sont appelées à prendre pour régler les affaires de leur
compétence. La consultation peut ne concerner que les électeurs d'une partie de
la commune, du département, de la région ou du territoire pour des affaires
intéressant spécialement cette partie du territoire concerné.
«
Art. L. 2142-2. -
Sur propositions respectivement du maire, du
président du conseil général ou du conseil régional, ou sur demande écrite du
tiers des membres du conseil municipal, pour les communes de 3 500 habitants et
plus, ou du tiers des membres du conseil général, régional, ou de l'assemblée
territoriale ou pour des communes de moins de 3 500 habitants, sur demande
écrite de la majorité des membres du conseil municipal, l'assemblée élue
délibère sur l'organisation de la consultation dans le territoire de sa
compétence. Dans ce cas, l'urgence ne peut être invoquée.
« La délibération qui décide la consultation indique expressément que cette
consultation n'est qu'une demande d'avis.
«
Art. L. 2142-3. -
Un cinquième des électeurs inscrits sur les listes
électorales peut saisir le conseil municipal, l'assemblée départementale,
régionale ou territoriale en vue de l'organisation d'une consultation sur une
opération d'intérêt général relevant de la décision des autorités municipales,
départementales, régionales ou territoriales.
« Dans l'année, un électeur ne peut signer qu'une seule saisine tendant à
l'organisation d'une consultation.
« Cette saisine ne peut intervenir avant la fin de la deuxième année ni après
la fin de la quatrième année suivant l'élection de l'assemblée de la commune,
du département, de la région et du territoire concerné.
« La consultation est également précédée du débat public prévu à l'article L.
2142-2.
« L'assemblée délibère sur l'organisation de cette consultation.
« La délibération qui décide la consultation indique expressément que cette
consultation n'est qu'une demande d'avis.
«
Art. L. 2142-4.
- Après délibération du conseil municipal, du conseil
général ou du conseil régional ou de l'assemblée territoriale, le maire, le
président du conseil général ou le président du conseil régional ouvre un débat
public sur la délibération qui est destinée à être soumis à la consultation
décrite aux articles précédents.
« Un commissaire de la consultation est nommé par le maire, le président du
conseil général, du conseil régional ou de l'assemblée territoriale ainsi
qu'une commission de la consultation.
« La durée de ce débat ne peut être inférieure à un mois.
« Au cours de ce débat, la population peut formuler des observations sur des
registres ouverts à cet effet.
« La publicité de la délibération soumise à débat est organisée par l'autorité
territoriale concernée dans la semaine qui précède le débat.
« Un dossier d'information sur l'objet de la consultation est mis à la
disposition du public sur place dans la ou les mairies de l'espace géographique
concerné et, le cas échéant, aux mairies annexes ou aux mairies
d'arrondissement, quinze jours au moins avant le scrutin. L'accès du public au
dossier est assuré dans les conditions fixées par l'article 4 de la loi n°
78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations
entre l'administration et le public.
« Dans un délai d'une semaine, suivant la fin du débat, le commissaire à la
consultation établit un rapport relatant le débat.
« Ce rapport est présenté à l'assemblée délibérante concernée.
«
Art. L. 2142-5.
- Après avoir pris connaissance du résultat de la
consultation, l'assemblée délibère dans les conditions prévues aux articles L.
2121-20 et L. 2121-21.
«
Art. L. 2142-6.
- Aucune consultation ne peut avoir lieu à partir du
1er janvier de l'année civile qui précède l'année du renouvellement général des
conseils municipaux, généraux, régionaux ou assemblée territoriale, ni durant
les campagnes électorales précédant les élections au suffrage universel direct
ou indirect. Deux consultations portant sur un même objet ne peuvent intervenir
dans un délai inférieur à deux ans.
« Un délai d'un an doit s'écouler entre deux consultations.
«
Art. L. 2142-7.
- Lorsque l'élection du conseil municipal ou du
maire, du conseil général ou du Président du conseil général, du conseil
régional ou du président du conseil régional ou de l'assemblée territoriale,
fait l'objet d'un recours contentieux devant le tribunal administratif et, s'il
y a lieu, devant le Conseil d'Etat, aucune consultation ne peut avoir lieu tant
que cette élection n'a pas fait l'objet d'une décision devenue définitive.
«
Art. L. 2142-8.
- Un décret en Conseil d'Etat détermine les
conditions d'application du présent chapitre. »
La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam.
Nous saisissons l'opportunité offerte par ce débat pour poser publiquement la
question de la consultation des populations dans les différentes collectivités
territoriales.
Comment, en effet, évoquer la démocratie de proximité sans élaborer un
processus de participation des citoyens aux décisions, qu'elles soient prises
au niveau communal, au niveau départemental ou au niveau régional ?
En effet, s'il est un constat largement partagé, c'est bien celui de la crise
de la population de notre pays à l'égard de la politique ou plutôt d'une
manière de faire de la politique.
Le référendum sur le quinquennat, mais aussi, de manière moins spectaculaire,
l'ensemble des dernières élections auront été sujets à abstention forte ou
croissante, ce que je soulignais tout à l'heure dans mon intervention.
Nos concitoyens s'interrogent fortement sur le moyen de peser sur les
décisions et de faire prendre en compte leurs opinions, souhaits ou
exigences.
La mondialisation de l'économie, l'accélération de l'intégration européenne,
mais aussi les progrès parfois vertigineux de la science et des technologies
accentuent ce sentiment de l'élargissement du fossé entre l'individu, les
collectivités et les centres de pouvoirs réels.
Les auteurs de cet amendement n'ont, bien entendu, pas l'ambition de régler
cette question historique que pose l'évolution de la démocratie dans ce
contexte.
Ils cherchent modestement à contribuer à retisser le lien entre le citoyen et
l'institution, entre le citoyen et la vie politique, en permettant, par un
développement de la démocratie participative, l'expression plus fréquente de la
volonté populaire.
L'objet de cet amendement est, en effet, d'étendre aux départements et aux
régions la procédure de consultation des habitants existant à l'échelon
communal et prévue par les articles L. 2142-1 et suivants du code général des
collectivités territoriales.
Les auteurs suggèrent par ailleurs d'améliorer la procédure actuelle, à
l'occasion de cette extension, afin d'éviter toute manipulation plébiscitaire
par l'utilisation de questionnements par trop simplifiés.
Ils proposent ainsi d'instaurer une procédure de débat public préalable à
l'organisation de la consultation qui permette, à l'instar des procédures
d'enquête dans le cadre des règles d'urbanisme, de définir démocratiquement les
enjeux et la portée du processus et de parvenir à une élaboration collective de
la question ou des questions posées.
Cette disposition, qui avait fait l'objet d'une proposition de loi déposée par
les députés communistes et apparentés, aurait par exemple permis de consulter
les Corses sur l'avenir du statut de leur région. Chacun a pu constater et
regretter, tout au long de cette discussion, la mise à l'écart des premiers
concernés : les habitants de l'île.
(M. Charasse s'exclame.)
Cet amendement important a toute sa place dans le projet de loi. Il rappelle
que la démocratie doit être non pas simplement horizontale, mais aussi
verticale.
Nous vous proposons, mes chers collègues, de débattre de ce texte et, bien
entendu, de l'adopter.
M. Michel Charasse.
La démocratie, cela consiste aussi à aller voter !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable, pour des raisons de
fond évidentes mais également pour des raisons formelles puisque le présent
amendement tend à modifier la partie du code général des collectivités
territoriales relative aux communes.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
L'extension aux départements et aux régions de
la possibilité de procéder à la consultation des électeurs, comme cela est
prévu au niveau communal, ne peut être envisagée.
La consultation des électeurs organisée par les communes en application des
articles L. 2142-1 et suivants du code général des collectivités territoriales
nécessite la mise en oeuvre de moyens, tels que les bureaux de vote, que seules
les communes détiennent à l'heure actuelle. Si les maires, en tant qu'agents de
l'Etat, sont tenus d'organiser les élections, le département et la région n'ont
pas le pouvoir d'imposer aux maires d'organiser à leur profit une consultation
des électeurs.
De plus, et surtout, la conformité à la Constitution de telles pratiques me
paraît poser de sérieuses difficultés, car une telle mesure conduirait à
distinguer des parties du peuple français. C'est d'ailleurs l'argumentation qui
avait été développée ici même, lors de la discussion du projet de loi sur la
Corse, à propos de la consultation que vous souhaitiez et dont j'avais dit que
le Gouvernement n'avait rien à craindre.
Suivant la même logique, j'émets un avis défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 466, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 420 rectifié, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon,
Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et
Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar,
Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les étrangers résidant en France depuis au moins cinq ans ont le droit de
vote et d'éligibilité aux élections municipales. »
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Mon amie Josiane Mathon l'a indiqué d'emblée lors de la discussion générale :
comment peut-on débattre de démocratie de proximité si une part importante de
la population de nos villes, de nos quartiers est écartée de l'exercice premier
de la citoyenneté, c'est-à-dire du droit de vote ?
Depuis 1992, en effet, le principe du droit de vote aux élections municipales
a été retenu pour les étrangers ressortissants d'un Etat membre de l'Union
européenne.
Les sénateurs communistes, de nombreuses associations et personnalités se sont
émus, alors, de la mise à l'écart de la population originaire des autres pays
du monde.
Une distinction était ainsi créée entre les travailleurs algériens, tunisiens
ou marocains, participant depuis des décennies au développement de la France
par leur travail, et leurs collègues ou voisins d'origine portugaise, espagnole
ou grecque.
Cette discrimination - certains ont parlé d'« euroracisme » - est porteuse,
selon moi, d'une remise en cause de l'intégration, y compris des jeunes
générations. Parmi d'autres éléments, le fait d'avoir toujours vécu l'exclusion
du système démocratique de leurs parents n'a pu avoir que des conséquences
négatives sur le rapport de jeunes Français issus de l'immigration aux
institutions de notre pays.
La proposition des sénateurs communistes d'accorder le droit de vote aux
étrangers résidant en France depuis cinq ans est une proposition déjà ancienne.
Les difficultés grandissantes auxquelles sont confrontées nombre de communes,
notamment de communes urbaines, la violence croissante dans les quartiers
populaires, le sentiment d'insécurité ressenti de plus en plus fortement par la
population renforcent la nécessité de créer les conditions d'une participation
de toute la population des communes à la vie de la cité, à la politique.
Avec mes amis, je saisis l'occasion offerte par ce débat sur la démocratie de
proximité pour poser sans ambiguïté la question du droit de vote de tous les
étrangers aux élections municipales.
Nous proposons que ce droit de vote soit accompagné d'un droit d'éligibilité,
droit qui ne concernerait pas, dans notre esprit, les postes d'exécutif
municipal.
Nous saisissons cette occasion avec d'autant plus de conviction que, le 5 mai
2000, une proposition de loi en ce sens a été adoptée par l'Assemblée
nationale. Depuis, ni la majorité sénatoriale - cela est-il étonnant de la part
de la droite parlementaire ? - ni le Gouvernement - ce qui est paradoxal -
n'ont souhaité continuer le débat au Sénat.
La France n'échappera pas à cette question : peut-on écarter des milliers de
personnes qui enrichissent notre pays sur le plan économique, mais aussi
culturel, de la citoyenneté sur le plan local ? Peut-on continuer à le faire
sans élargir le fossé entre les populations, entre les quartiers ?
Voilà de grandes questions qui exigent que chacun prenne ses responsabilités.
C'est pourquoi nous demandons que cet amendement soit voté par scrutin
public.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement,
car le problème du vote des étrangers non communautaires aux élections
municipales doit être précédé d'une révision constitutionnelle. C'est dans ce
contexte que, le cas échéant, le débat de fond pourrait avoir lieu.
M. Josselin de Rohan.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Monsieur le sénateur, avant d'en venir à une
argumentation juridique qui me conduira à m'opposer à l'amendement proposé, je
veux dire clairement que, sur le plan politique, le Gouvernement est favorable
à la capacité donnée aux étrangers, dans certaines conditions de régularité et
de durée de séjour, de voter aux élections locales, car c'est un élément parmi
d'autres susceptible de favoriser leur intégration. J'ai bien dit : « un
élément parmi d'autres », car, s'il suffisait que, pour s'intégrer, les
étrangers puissent voter, je crois que ce débat, que nous menons depuis
longtemps, aurait abouti.
Au demeurant, cet élément concourrait sans doute à la reconnaissance des
étrangers et à leur faculté d'intégration dans notre société. C'est pourquoi le
Gouvernement y est favorable, comme d'ailleurs la majorité à l'Assemblée
nationale, qui a voté pour la proposition de loi que vous avez évoquée.
Cela étant, quand on défend un objectif, il faut se donner les moyens de
l'atteindre, sans prendre le risque de le faire battre.
Or, sur les plans juridique et constitutionnel, les conditions ne sont
actuellement pas réunies. Les conditions politiques ne le sont pas non plus,
sauf à ce que, lors du vote qui va intervenir tout à l'heure, la démonstration
du contraire soit faite.
Les conditions politiques et juridiques n'étant pas réunies, le Gouvernement
n'a pas inscrit la proposition de loi dont vous parliez à l'ordre du jour
prioritaire du Sénat. Cette question devra faire l'objet d'un débat au sein de
la société de manière que, le moment venu, le vote des étrangers puisse avoir
lieu sous une forme quelconque. Je pense que ce pourrait être par le biais d'un
projet de loi.
Monsieur le sénateur, dois-je vous rappeler que, s'agissant d'une proposition
de loi, d'initiative parlementaire par définition, la sanction définitive ne
pourrait intervenir que par...
M. Michel Charasse.
Référendum !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
En effet !
Quoi qu'il en soit, l'adoption de l'amendement en discussion nécessiterait une
révision de la Constitution, ce qui suppose un vote conforme des deux
assemblées et donc un large accord politique. Comme je l'ai indiqué tout à
l'heure, je ne crois pas que cet accord existe actuellement.
Diverses propositions de loi constitutionnelles ont été déposées et débattues
à l'Assemblée nationale, déjà en 1999 et, vous l'avez rappelé, en 2000. La
seule proposition de loi constitutionnelle qui a été adoptée par l'Assemblée
nationale, dans sa séance du 3 mai 2000, est celle qui visait à accorder le
droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales aux étrangers non
ressortissants de l'Union européenne résidant en France.
Je le répète, d'un point de vue juridique, cet amendement n'a pas sa place
dans un projet de loi simple et doit être déclaré irrecevable.
Je comprends fort bien le problème politique que vous avez posé, monsieur
Bret. J'y ai répondu favorablement, mais il me paraît difficile d'insérer la
disposition que vous préconisez dans ce projet de loi. Je souhaite que
l'avenir, de ce point vue, soit plus ouvert.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 420 rectifié.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Cet amendement n'a pas particulièrement de quoi nous effrayer mes amis et
moi-même. Mais, comme l'ont souligné très justement M. le rapporteur et
surtout, après lui, M. le ministre, il pose un problème technique majeur :
c'est la Constitution elle-même qui détermine les conditions à remplir pour
être électeurs. L'Assemblée nationale l'a d'ailleurs parfaitement compris
puisqu'elle a adopté, voilà six ou huit mois, une proposition de loi
constitutionnelle, actuellement en instance devant le Sénat, qui vise à
modifier l'article 3 de la Constitution, selon lequel seuls sont électeurs les
nationaux français.
Si nous adoptions cette disposition - nous pouvons toujours nous faire plaisir
- elle serait probablement annulée par le Conseil constitutionnel ; en tout
cas, elle serait inopérante.
J'ajoute au passage que ce débat rebondit avec le présent texte alors que, à
ma connaissance, ni le Gouvernement ni un groupe politique, en tout cas pas le
mien, n'a jamais demandé l'inscription à l'ordre du jour du Sénat de la
proposition de loi constitutionnelle votée par l'Assemblée nationale.
De toute façon, un autre élément me conduit à être réservé, pour des raisons
techniques.
En effet, chers amis du groupe communiste républicain et citoyen, votre
amendement est mal rédigé, car il introduit une discrimination entre les
nationaux et les étrangers.
En France, la qualité d'électeur est accordée aux nationaux au regard des
conditions de résidence dans la commune. Or, vous ne posez qu'une condition de
résidence en France. Cela signifie que quelqu'un pourrait s'inscrire sur les
listes électorales de n'importe quelle commune, puis changer tous les ans de
domiciliation électorale. Certes, ce que vous voulez dire se comprend
parfaitement : pour pouvoir être électeur, il faut être domicilié en France.
Mais il faudrait au moins préciser que cette condition ne suffit pas, sinon il
y aurait une inégalité de traitement entre les nationaux et les étrangers.
Pour ces divers motifs, je ne peux donc voter l'amendement n° 420 rectifié.
Cela m'ennuie de voter contre pour des raisons de principe puisque j'ai servi
pendant quatorze ans un président de la République qui était depuis très
longtemps favorable à cette mesure, et ce, d'ailleurs, pas toujours avec
l'accord unanime de son propre parti, mais c'est un autre problème... Ne
refaisons pas l'histoire ! Pour ma part, en tout cas, je m'abstiendrai.
M. Patrick Lassourd.
Quel courage !
M. Michel Caldaguès.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès.
Dans la présentation de l'amendement du groupe communiste républicain et
citoyen, j'ai entendu une expression qui entache gravement les intentions de
ses auteurs : celle d'« euro-racisme ».
En France, personne n'est écarté, personne n'est exclu, mais ceux qui
construisent l'Europe avec nous bénéficient, dans le domaine que nous évoquons,
d'un privilège tout à fait justifié, sinon que serait l'Europe ? Dans ces
conditions, parler d'euro-racisme, c'est-à-dire exercer un chantage au moyen
d'une expression infamante sur ceux qui ne sont pas d'accord avec les auteurs
de l'amendement est un procédé que nous jugeons inadmissible. C'est l'une des
raisons, et non la moindre, pour lesquelles nous voterons contre cet
amendement.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. Pierre Mauroy.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Mauroy.
M. Pierre Mauroy.
J'ai entendu les arguments de Daniel Vaillant et je comprends parfaitement
qu'un ministre de la République puisse s'exprimer comme il l'a fait. La
proposition qui nous est soumise ne peut actuellement être opératoire car elle
n'est pas constitutionnelle. Il faudrait pour qu'elle le devienne que la
Constitution soit modifiée, modification à laquelle nous avons procédé
d'ailleurs pour permettre le vote des résidents européens.
Mais enfin, j'ai porté cette proposition pendant tellement d'années, notamment
auprès du président de la République François Mitterrand, en tant que Premier
ministre, que je veux être en conformité avec mes principes. Par conséquent, je
voterai cet amendement.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen,
ainsi que sur certaines travéessocialistes.)
M. Josselin de Rohan.
Il est anticonstitutionnel mais vous le votez quand même ! Et vous avez été
Premier ministre !
M. Pierre Mauroy.
Comme de toute façon il sera rejeté, j'aurai la satisfaction d'être en accord
avec mes principes.
M. Bruno Sido.
Quel homme d'Etat !
M. Patrick Lassourd.
Quel grand écart !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Il est vrai que mon groupe a vu le dépôt de cet amendement avec une grande
sympathie. Mais nous sommes des législateurs et il nous est difficile de nous
abstraire complètement des questions de forme. En conséquence, malgré la
sympathie que nous avons pour cet amendement, nous ne pourrons le voter, dans
la mesure où, en effet, il nous semble irrecevable.
M. Josselin de Rohan.
Vous allez vous rompre le dos en faisant le grand écart !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Donc, la majorité de mon groupe s'abstiendra.
Mme Nicole Borvo.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Je voudrais tout d'abord remercier M. Mauroy.
Bien entendu, il s'agit d'une question politique et nous avons conscience du
problème qui est posé. Mais, monsieur le ministre, nous savons que nous sommes
attendus les uns et les autres sur l'adoption d'une telle mesure. Saisissons
donc l'opportunité qui nous est donnée de nous prononcer sur cette question.
Quand nous parlons de démocratie de proximité, vous d'arguties pour expliquer
votre attitude.
(Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Josselin de Rohan.
Il s'agit de la Constitution, madame !
Mme Nicole Borvo.
En tout cas, s'agissant des ressortissants européens, rien ne justifie ce que
vous avancez, étant donné qu'il s'agit d'élections locales. Il est absolument
inadmissible, inexplicable, indéfendable et préjudiciable que les étrangers
résidant depuis longtemps dans une commune, payant leurs impôts, agissant,
travaillant, envoyant leurs enfants à l'école ne puissent pas voter.
M. Josselin de Rohan.
Qu'ils demandent à être Français !
M. Patrick Lassourd.
Ils peuvent devenir Français !
Mme Nicole Borvo.
Vous savez très bien que cela pèse lourd dans le regard que portent sur nous
les étrangers non communautaires qui habitent en France depuis de longues
années.
Il me semble donc opportun de saisir cette occasion où nous parlons de
démocratie de proximité, à laquelle, en ce qui nous concerne, nous sommes très
attachés, et de ne pas refuser encore une fois de prendre en considération le
cas des étrangers non communautaires.
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Bruno Sido.
Elle s'assoit sur la Constitution.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 420 rectifié, repoussé par la commission et
par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste
républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procécé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 241 |
Nombre de suffrages exprimés | 239 |
Majorité absolue des suffrages | 120 |
Pour l'adoption | 26 |
Contre | 213 |
TITRE Ier
DE LA DÉMOCRATIE PARTICIPATIVE
M. le président.
L'amendement n° 1, présenté par M. Hoeffel, au nom de la commission des lois,
est ainsi libellé :
« A la fin de l'intitulé du titre Ier, remplacer le mot : "participative" par
les mots : "de proximité". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
La commission des lois vous propose de revenir à l'intitulé
initial du titre Ier. En effet, l'expression « démocratie participative » nous
paraît porteuse d'un certain nombre d'ambiguïtés.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Le Gouvernement est attaché à la notion de
proximité, qui correspond à son souci premier de rapprocher les élus et les
citoyens. La notion de participation ne rend pas compte à elle seule de la
territorialisation du débat public, au plus près des habitants et des
associations, grâce à un travail en commun avec les élus.
En conséquence, j'émets un avis favorable sur cet amendement.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé du titre Ier est ainsi modifié. Je constate que cet
amendement a été adopté à l'unanimité.
Chapitre Ier
Participation des habitants à la démocratie locale
M. le président.
L'amendement n° 2, présenté par M. Hoeffel, au nom de la commission des lois,
est ainsi libellé :
« Dans l'intitulé du chapitre Ier, remplacer le mot : "démocratie" par le mot
: "vie". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Là encore, il est proposé de revenir à l'intitulé initial,
dont la rédaction nous paraît plus conforme à l'esprit dans lequel s'est
déroulée, en particulier, notre discussion générale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
La participation des habitants à la vie locale
est un droit reconnu par les articles L. 1111-2 et L. 2141-1 du code général
des collectivités locales. C'est dans cette optique que le projet de loi
organise les instances de consultation telles que les conseils de quartier ou
les commissions consultatives des services publics locaux.
J'émets donc un avis favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité.
En conséquence, l'intitulé du chapitre Ier est ainsi modifié.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - I. - 1. Le chapitre II du titre IV du livre Ier de la deuxième
partie du code général des collectivités territoriales est intitulé :
"Consultation des habitants sur les affaires communales".
« 2. Le chapitre III du même titre est intitulé : "Participation des habitants
à la vie locale".
« 3. Les articles L. 2143-1 et L. 2143-3 deviennent respectivement les
articles L. 2144-1 et L. 2144-3. Ils constituent le chapitre IV du même titre,
intitulé : "Services de proximité".
« II. - L'article L. 2143-1 du code général des collectivités territoriales
est ainsi rétabli :
«
Art. L. 2143-1
. - Dans les communes de 50 000 habitants et plus, le
conseil municipal fixe le périmètre de chacun des quartiers constituant la
commune.
« Chacun d'eux est doté d'un conseil de quartier dont le conseil municipal
fixe, en concertation avec les habitants et les associations, la composition et
les modalités de désignation. Si ce conseil comprend des conseillers
municipaux, ils sont désignés par le conseil municipal dans le respect du
principe de la représentation proportionnelle et de l'égal accès des femmes et
des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. Il comprend
également, pour une durée fixée par le conseil municipal, des personnes qui
n'appartiennent pas à celui-ci, notamment des représentants des habitants et
des associations du quartier. La liste des membres du conseil de quartier est
arrêtée par le conseil municipal sur proposition du maire. Le conseil est
présidé par l'adjoint chargé du quartier ou, s'il n'en a pas été désigné, par
un membre du conseil municipal délégué par le maire. Il peut être également
présidé par un de ses membres, élu par le conseil de quartier. Dans ce cas, le
maire y est représenté par l'adjoint chargé du quartier ou le conseiller
municipal délégué à cet effet.
« Le conseil de quartier peut être consulté par le maire sur toute question
concernant le quartier ou la ville. Il peut être associé par celui-ci à
l'élaboration, à la mise en oeuvre et à l'évaluation des actions intéressant le
quartier, notamment de celles menées au titre de la politique de la ville. Il
saisit le maire de toute proposition concernant le quartier, notamment en vue
du débat prévu au troisième alinéa de l'article L. 2312-1. Il adopte chaque
année un rapport retraçant son activité et la participation des habitants à la
vie locale. Ce rapport est transmis au maire par le président du conseil de
quartier en vue de son examen par le conseil municipal dans le cadre du débat
mentionné à l'article L. 2143-2, quinze jours au moins avant celui-ci. La
publication et la diffusion de ce rapport sont assurées par la commune.
« Il se réunit au moins deux fois par an sur convocation de son président ou à
la demande de la moitié des représentants ou à la demande du maire. Le conseil
municipal adopte une délibération portant sur les règles communes de
fonctionnement des conseils de quartier. Chacun des conseils de quartier
établit dans les trois mois suivant son installation son règlement intérieur
qui est approuvé par le conseil municipal. Les séances du conseil de quartier
sont publiques, sauf disposition contraire prévue par le règlement intérieur.
Le maire est entendu, à sa demande, par le conseil de quartier.
« Dans les conditions qu'il définit, le conseil municipal affecte aux conseils
de quartier un local administratif, des moyens matériels et prend en charge
leurs frais de fonctionnement. »
Sur l'article, la parole est à M. Lardeux.
M. André Lardeux.
Nous souhaitons que le système qui se mettra en place ne soit pas trop
centralisateur, trop uniformatisateur. Laissons la démocratie respirer. Evitons
de l'enfermer dans des règles trop précises afin de ne pas alourdir son
fonctionnement par des procédures compliquées. Laissons les présidents de
conseils généraux, les maires et les autres élus locaux décider par
eux-mêmes.
Ne vidons pas la démocratie représentative de sa substance, d'autant que
l'effet boomerang pourrait être redoutable, car on encouragerait les électeurs
à douter de l'utilité des élections. Or nous souhaitons tous que la
participation aux élections soit la plus forte possible.
En tout cas, si ces conseils de quartier doivent se mettre en place, il ne
faut pas laisser de côté les élus départementaux et régionaux, notamment les
élus départementaux eu égard aux imbrications de responsabilités et de
compétences entre communes et départements.
Nombre des sujets qui seront abordés dans les conseils de quartier relèvent en
fait de la compétence du département ; je pense en particulier à tous les
débats intéressant le domaine social. C'est pourquoi il est utile que les
conseils généraux soient représentés dans ces conseils de quartier et que l'on
tienne compte de la structure territoriale des cantons. Bien sûr, ces derniers
seront peut-être un jour remis en cause, mais ce n'est pas l'objet du présent
projet de loi. Pour l'heure, les conseillers généraux sont par essence des élus
territoriaux.
M. le président.
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Je centrerai mon propos sur deux aspects : les conseils de quartier et les
droits de l'opposition.
Nous avons assisté tout à l'heure, de la part de nos collègues de
l'opposition, à un concert de louanges sur leur propre gestion locale. On n'est
jamais si bien servi que par soi-même ! Ils nous ont expliqué que, chez eux,
l'opposition municipale était bien traitée, qu'elle disposait de moyens, de
locaux, de personnels, qu'elle s'exprimait lorsqu'elle le voulait.
M. André Lardeux.
C'est vrai !
M. Jean-Claude Peyronnet.
L'un d'entre eux nous a même affirmé que les publications du conseil général
étaient contrôlées par l'opposition ! Et pourquoi pas les discours du président
?
S'agissant des conseils de quartier, en revanche, nous avons assisté à un
véritable tir de barrage, quelquefois servi par un grand talent. Ainsi, M.
Virapoullé a parfois des formules qui le rapprochent d'un Raymond Devos, et
c'est un compliment de ma part.
Quoi qu'il en soit, on nous a expliqué que de tels conseils ne servaient à
rien puisque la population était déjà consultée sans cesse, que régnait une
sorte d'autogestion ou de démocratie locale permanente.
Ce discours serait tout à fait convaincant si ceux qui le tiennent n'étaient
pas ceux qui, par ailleurs, se sont opposés aux dispositions que nous avons
fait voter il y a quelques années concernant l'introduction de la
proportionnelle dans les commissions permanentes, qui est pourtant le meilleur
moyen pour que l'opposition, dans les conseils généraux et les conseils
régionaux, sache ce qui se passe effectivement.
Autrement dit, nous n'accordons guère de crédit à ces professions de foi. Au
contraire, compte tenu de ce que nous disent nos amis élus minoritaires dans
les conseils municipaux, les conseils régionaux et les conseils généraux
dirigés par l'opposition nationale, la réalité n'est pas aussi idyllique qu'on
nous l'a décrite.
Dès lors, il nous semble souhaitable de légiférer et d'apporter, par la loi,
un certain nombre de précisions.
Pas plus que la plupart de mes camarades, je ne suis un fanatique des conseils
de quartier tels qu'ils sont proposés. Je ne suis surtout pas un fanatique de
la séance réservée pour l'opposition. Sans doute ces dispositions
méritent-elles d'être amendées, mais nous croyons nécessaire qu'un minimum de
règles s'imposant à tous soient posées, pourvu qu'elles soient souples, et il
ne nous semble pas que le tableau qui a été brossé soit vraiment conforme à la
réalité.
M. le président.
Je suis saisi de quinze amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune. Mais, pour la clarté du débat, je les appellerai successivement.
L'amendement n° 401, présenté par M. Arthuis et les membres du groupe de
l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 1er. »
La parole est à M. Détraigne.
M. Yves Détraigne.
Cet amendement tire purement et simplement la conséquence de ce que nombre des
orateurs ont indiqué au cours de la discussion générale, à savoir que les
conseils de quartier existent déjà dans la plupart des villes, se développent
et fonctionnent très bien sans qu'il soit besoin de les encadrer plus avant.
C'est pourquoi nous proposons de supprimer purement et simplement cet article,
qui, en encadrant trop la possibilité d'établir des conseils de quartier,
risque plus d'en entraver le développement que de le favoriser.
M. le président.
L'amendement n° 3, présenté par M. Hoeffel, au nom de la commission des lois,
est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le 1 du I de l'article 1er pour l'intitulé du
chapitre II du titre IV du livre Ier de la deuxième partie du code général des
collectivités territoriales, remplacer le mot : "habitants" par le mot :
"électeurs". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
C'est un amendement de coordination avec la suppression, que
nous proposerons ultérieurement, de l'article 6
ter
relatif à la
consultation des habitants et non plus des électeurs.
M. le président.
L'amendement n° 424, présenté par Mmes Mathon et Borvo, M. Bret et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le 1 et le 2 du I de l'article 1er, après les mots : "des habitants",
insérer les mots : "et des personnes exerçant une activité professionnelle dans
la commune". »
La parole est à Mme Mathon.
Mme Josiane Mathon.
Les personnes exerçant leur activité professionnelle dans une commune doivent
pouvoir elles aussi être consultées sur les affaires communales.
Certes, une ville est composée avant tout de l'ensemble de ses habitants, qui
doivent tous pouvoir participer à la vie locale, mais il est aussi d'autres
citoyens qui contribuent à animer et à enrichir la vie sociale et économique de
nos collectivités locales, à savoir les salariés, qui sont parfois très
nombreux : nous pensons, par exemple, à tous ceux et à toutes celles qui
travaillent dans les services publics, communaux ou autres.
M. le président.
L'amendement n° 4, présenté par M. Hoeffel, au nom de la commission des lois,
est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le II de l'article 1er pour
l'article L. 2143-1 du code général des collectivités territoriales :
«
Art. L. 2143-1.
- Dans les communes de 20 000 habitants et plus, le
conseil municipal peut fixer le périmètre de chacun des quartiers constituant
la commune.
« Chacun d'eux peut être doté d'un conseil de quartier, quelle qu'en soit la
dénomination, dont le conseil municipal fixe la composition et les modalités de
désignation.
« Les conseils de quartier peuvent être consultés par le maire et peuvent lui
faire des propositions sur toute question concernant le quartier ou la ville.
Le conseil municipal leur alloue chaque année des crédits pour leur
fonctionnement. »
Cet amendement est assorti de neuf sous-amendements.
Le sous-amendement n° 525, présenté par MM. Jean-Claude Gaudin, Trucy et les
membres du groupe des Républicains et Indépendants, est ainsi libellé :
« I. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4 pour
l'article L. 2143-1 du code général des collectivités territoriales, remplacer
les mots : "un conseil de quartier" par les mots : "une assemblée de
quartier".
« II. - Au début du dernier alinéa du même texte, remplacer les mots : "Les
conseils de quartier peuvent être consultés" par les mots : "Les assemblées de
quartier peuvent être consultées". »
Le sous-amendement n° 266 rectifié, présenté par MM. Legendre, Esneu, Goulet,
Gouteyron, Karoutchi et Lassourd, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
le deuxième alinéa du texte proposé par
l'amendement n° 4 pour l'article L. 2143-1 du code général des collectivités
territoriales par une phrase ainsi rédigée :
« Les titulaires de mandats électoraux, autres que membres du conseil
municipal, électeurs dans le quartier, sont membres du conseil de quartier.
»
Le sous-amendement n° 354 rectifié, présenté par MM. Leroy, Braye, César,
Doligé, Dufaut, Esneu, Ginésy, Gouteyron, Goulet, Gournac et Lassourd, Mme
Rozier, MM. Schosteck et Trillard, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
le deuxième alinéa du texte proposé par
l'amendement n° 4 pour l'article L. 2143-1 du code général des collectivités
territoriales par une phrase ainsi rédigée :
« Les conseillers généraux, élus de cantons recouvrant totalement ou
partiellement le périmètre du quartier, sont membres du conseil de quartier.
»
Le sous-amendement n° 331 rectifié, présenté par MM. Gournac, Lardeux, Braye,
Doligé, Dufaut, Eckenspieller, Esneu, Goulet, Gouteyron, Ginésy, Lassourd,
Leclerc, de Richemont, Trillard et Vasselle, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
le deuxième alinéa du texte proposé par
l'amendement n° 4 pour l'article L. 2143-1 du code général des collectivités
territoriales par une phrase ainsi rédigée :
« Cette instance a un caractère exclusivement consultatif. »
Le sous-amendement n° 270 rectifié
bis,
présenté par MM. Lardeux,
Bailly, Doligé, Dufaut, Eckenspieller, Esneu, Ginésy, Goulet, Gouteyron,
Lassourd et de Richemont, Mme Rozier, MM. Schosteck, Trillard, Vasselle,
Larcher et les membres du groupe du RPR et apparentés, est ainsi libellé :
« Avant le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 4, insérer deux
alinéas ainsi rédigés :
« Les fonctions de membres de conseils de quartier prennent fin lors du
renouvellement du conseil municipal.
« Les délimitations de quartiers tiennent compte des périmètres des cantons et
des circonscriptions législatives. A cet effet, le conseil général est consulté
pour avis. »
Le sous-amendement n° 272 rectifié, présenté par MM. Lardeux, César, Doligé,
Eckenspieller, Esneu, Goulet, Gouteyron, Lassourd, Leclerc, Leroy, de
Richemont, Trillard et Vasselle, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement
n° 4 par une phrase ainsi rédigée :
« Pour toute question relevant des compétences du conseil général, ses
représentants sont associés aux conseils de quartier. »
Les trois derniers sous-amendements sont identiques.
Le sous-amendement n° 463 est présenté par MM. Revet, Puech et Falco.
Le sous-amendement n° 633 est présenté par M. Mercier.
Le sous-amendement n° 672 est présenté par M. Peyronnet.
Ces sous-amendements sont ainsi libellés :
« Compléter
in fine
le texte proposé par l'amendement n° 4 par un
alinéa ainsi rédigé :
« Le ou les conseillers généraux du ou des cantons inclus en tout ou partie
dans le périmètre retenu sont membres de droit des conseils de quartier. »
La parole est M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
L'amendement n° 4, que nous préférons à l'amendement n° 401,
présente un triple avantage.
Tout d'abord, il préserve le caractère facultatif des conseils de quartier.
Lorsqu'ils existent, ils doivent pouvoir demeurer et, si d'autres sont créés,
il faut qu'ils puissent fonctionner.
Ensuite, il rend au fonctionnement du conseil de quartier toute sa souplesse,
cette souplesse sur laquelle ont insisté tous les intervenants dans la
discussion générale.
Enfin, il préserve le principe de la libre administration des collectivités
locales. Or j'avais bien précisé, dans mon propos introductif au nom de la
commission des lois, qu'il était absolument nécessaire de préserver la primauté
du pouvoir élu sur tout autre pouvoir.
M. Michel Charasse.
C'est la République !
M. le président.
La parole est à M. Trucy, pour défendre le sous-amendement n° 525.
M. François Trucy.
Nous souhaitons éviter toute ambiguïté entre les pouvoirs démocratiques
conférés à un conseil - je pense, par exemple, à un conseil municipal - et
l'influence que l'on souhaite conférer ici à la représentation de la
population.
En ce sens, nous proposons de remplacer l'expression de « conseil de quartier
» par celle d'« assemblée de quartier ». En effet, je ne connais pas de conseil
qui ne comporte pas de membres élus, qu'il s'agisse des conseils municipaux,
généraux, régionaux ou nationaux. Mais l'assemblée de quartier, qui ne se
constitue pas ainsi - on s'y recrute et s'y coopte - n'a pas du tout la même
valeur.
Cet amendement, loin de répondre à un caprice, vise à bien séparer la
démocratie représentative de la démocratie participative.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd, pour défendre les sous-amendements n°s 266
rectifié, 354 rectifié, 331 rectifié et 270 rectifié
bis
.
M. Patrick Lassourd.
Il paraît souhaitable d'associer les élus du suffrage universel, tant les
parlementaires que les conseillers régionaux et généraux, aux travaux des
conseils de quartier dès lors qu'ils ne sont pas par ailleurs conseillers
municipaux et qu'ils sont inscrits sur la liste électorale du ou des bureaux de
vote compris dans le périmètre du quartier. Tel est l'objet du sous-amendement
n° 266 rectifié.
Le sous-amendement n° 354 rectifié vise à associer aux travaux des conseils de
quartier les conseillers généraux des villes.
Le sous-amendement n° 331 rectifié a pour objet d'inscrire dans la loi le
caractère exclusivement consultatif du conseil de quartier. Il est important de
le signaler et de l'inscrire au frontispice de cette loi, si jamais les
conseils de quartier devaient exister.
Le sous-amendement n° 270 rectifié
bis
vise à préciser que les
délimitations des quartiers tiendront compte des délimitations actuelles des
cantons et des circonscriptions législatives lorsque ces quartiers seront
créés.
M. le président.
La parole est à M. Lardeux, pour défendre le sous-amendement n° 272
rectifié.
M. André Lardeux.
Ce sous-amendement complète le précédent.
Pour toutes les questions qui relèvent de la compétence du conseil général,
les représentants du conseil général doivent être associés aux débats des
conseils de quartier.
M. le président.
Les sous-amendements n°s 463 et 633 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Peyronnet, pour défendre le sous-amendement n° 672.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
Le sous-amendement n° 672 est retiré.
L'amendement n° 370, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le II de l'article 1er pour
l'article L. 2143-1 du code général des collectivités territoriales :
«
Art. L. 2143-1.
- Dans les communes de 20 000 habitants et plus, le
conseil municipal fixe le périmètre de chacun des quartiers constituant la
commune.
« Chacun d'eux est doté d'un conseil de quartier dont le conseil municipal
fixe la composition ainsi que la durée et les modalités de désignation.
« Ce conseil comprend des personnes extérieures au conseil municipal,
notamment des représentants des habitants et des associations exerçant leur
activité dans le quartier. Il peut comprendre des conseillers municipaux
désignés par le conseil municipal. La liste des membres du conseil de quartier
est arrêtée par le conseil municipal sur proposition du maire. Le conseil de
quartier élit son président parmi ses membres.
« Le conseil de quartier peut être consulté par le maire sur toute question
concernant le quartier ou la ville. Il peut être associé par celui-ci à
l'élaboration, à la mise en oeuvre et à l'évaluation des actions intéressant le
quartier, notamment de celles menées au titre de la politique de la ville. Il
saisit le maire de toute proposition concernant le quartier. Il se réunit au
moins deux fois par an sur convocation de son président ou à la demande de la
moitié de ses membres ou de celle du maire.
« Dans les conditions qu'il définit, le conseil municipal affecte aux conseils
de quartier un local administratif, des moyens matériels et prend en charge
leurs frais de fonctionnement.
« Les dispositions ci-dessus ne s'appliquent pas aux conseils de quartier,
quelle qu'en soit leur dénomination, existant à la date de publication de la
loi n° du 2002 relative à la démocratie de proximité, dans la mesure où
ils satisfont déjà aux conditions et objectifs de participation des habitants
et des associations à la vie locale. »
La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
L'article L. 2143-2 du code général des
collectivités territoriales offre la faculté au conseil municipal de créer des
comités consultatifs sur tout problème d'intérêt communal concernant tout ou
partie du territoire de la commune.
Cette disposition a favorisé la création de nombreuses instances de
concertation visant à mieux associer les habitants à la préparation de projets
et à la réflexion sur les décisions locales qui les concernent directement.
Toutefois, la répartition inégale de ces initiatives et l'accroissement continu
du taux d'abstention aux élections municipales depuis 1977 conduisent à
améliorer l'implication des habitants dans la vie locale en s'appuyant sur les
conseils de quartier.
Le présent amendement vise ainsi à en rendre obligatoire la création dans les
communes de 20 000 habitants et plus, en ne retenant qu'un nombre minimal de
règles de fonctionnement.
Les conseils de quartier seront institués par le conseil municipal sur la base
d'une délimitation par quartier de la totalité du périmètre de la commune. Un
conseil sera créé pour chaque quartier de façon qu'aucune fraction de la
population ne puisse être exclue de son champ d'intervention.
Toutefois, afin de ne pas figer, voire remettre en cause les expériences
existantes, le projet de loi n'a pas fixé de critères de délimitation des
périmètres. Ils seront précisés par le conseil municipal en fonction des
spécificités de la commune.
La composition et les modalités de désignation des membres du conseil, qui
associera des personnalités représentatives des habitants et des associations
de quartier, seront du seul ressort du conseil municipal. La participation des
élus est, quant à elle, facultative.
Dans le respect du principe de libre administration des collectivités
territoriales, la loi réserve au maire l'initiative de consulter le conseil de
quartier sur toute question intéressant le quartier ou la ville. Les avis du
conseil de quartier pourront ainsi éclairer les délibérations du conseil
municipal sans constituer un préalable obligatoire.
Par ailleurs, le conseil pourra transmettre au maire toute proposition
concernant le quartier, et le conseil se réunira deux fois par an au moins.
La loi vise à garantir le bon fonctionnement du conseil de quartier en mettant
à la charge du conseil municipal les moyens matériels qui lui sont nécessaires
ainsi que ses dépenses courantes.
Enfin, les dispositions particulières d'application permanente exonèrent les
conseils de quartier d'ores et déjà opérationnels, et ce quelle que soit leur
dénomination, de l'application des mesures fixées par l'article 1er dès lors
qu'ils satisfont aux mêmes objectifs.
Le Gouvernement a déposé un certain nombre d'amendements d'assouplissement par
rapport au texte initial présenté à l'Assemblée nationale pour aller dans le
sens que vous souhaitiez, pour faire en sorte que personne n'imagine qu'il
voudrait remettre en cause les expériences qui sont déjà performantes et pour
répondre au souhait que vous aviez émis lors de mon audition par la commission
des lois. Cet amendement n° 370 est le premier d'entre eux.
M. le président.
L'amendement n° 511, présenté par M. Mercier, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le premier alinéa du texte proposé par le II de l'article 1er
pour l'article L. 2143-1 du code général des collectivités territoriales :
« Dans les communes de 10 000 habitants et plus, le conseil municipal fixe le
périmètre de chacun des quartiers composant la commune en concertation avec les
habitants. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 421, présenté par Mmes Mathon et Borvo, M. Bret et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de l'article 1er pour
l'article L. 2143-1 du code général des collectivités territoriales, remplacer
le nombre : "50 000" par le nombre : "3 500". »
La parole est à Mme Mathon.
Mme Josiane Mathon.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi, tel qu'il nous est présenté, fixe le seuil pour l'instauration obligatoire
des conseils de quartier à 50 000 habitants. Dans ces conditions, ce sont
seulement 112 communes - soit 14 millions de citoyens - qui seront concernées
par le texte. C'est bien peu quand on veut se donner pour objectif d'améliorer
la participation des habitants, du tissu associatif.
La commission des lois nous propose de revenir au seuil initial de 20 000
habitants.
Notre amendement n° 421, vise quant à lui à ce que toutes les communes, à
partir de 3 500 habitants, se dotent de conseils de quartier.
Des communes, dont la population n'atteint pas ces seuils, ont d'ores et déjà
créé des conseils de quartier ou d'autres structures ayant une finalité de même
nature. Elles entendent bien poursuivre l'expérience et les habitants concernés
ne souhaitent pas du tout voir disparaître ces lieux qui leur permettent
d'intervenir sur les décisions qui les concernent, qui concernent leur vie.
L'exigence des habitants d'être consultés et entendus, de participer à la vie
locale et de décider n'est pas le fait des seules grandes villes. Elle est
présente partout, dans l'ensemble de nos 36 000 communes. Or force est de
constater qu'il n'y est pas répondu partout.
Qu'on ne nous dise donc pas qu'il est besoin d'un tissu urbain suffisamment
dense pour légitimer la création de lieux de participation démocratique tels
que les conseils de quartier.
Une autre question nous préoccupe. Elle concerne les villes intégrées dans un
établissement public de coopération intercommunale. Bien souvent, seules les
villes-centres rempliront les conditions pour se doter des outils légalement
reconnus de concertation, de proposition et de contrôle. Et même si d'autres
communes membres de l'EPCI disposent de telles structures, la communauté
d'agglomération ne sera pas tenue de les consulter et de prendre en compte
leurs avis et propositions. Il y aura donc là une inégalité de traitement
injustifiée entre les habitants d'un même territoire intercommunal.
On peut se demander pourquoi les conseils de quartier seraient prévus sur le
territoire communautaire plutôt que sur le territoire communal ? Une telle
conception heurterait notre attachement à la reconnaissance de la commune comme
lieu privilégié de la démocratie participative.
M. Jean-Jacques Hyest.
Très bien !... pour la dernière phrase.
M. le président.
L'amendement n° 360, présenté par M. Peyronnet, Mme Blandin, MM. Debarge,
Domeizel et Dreyfus-Schmidt, Mme Durrieu, M. Frécon, Mme Herviaux, MM Lagauche,
Le Pensec, Marc, Masseret, Mauroy, Picheral, Raoul, Sueur, Teston et les
membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le paragraphe II de l'article
1er, substituer au nombre : "50 000" le nombre "20 000". »
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Cet amendement vise à abaisser à 20 000 habitants le seuil à partir duquel la
création de conseils de quartier est obligatoire. Il s'agit ainsi de favoriser
la répartition harmonieuse des quartiers et des assemblées qui les
représenteront sur l'ensemble du territoire.
M. Jean-Pierre Schosteck.
L'harmonie dans la contrainte !
M. le président.
L'amendement n° 512, présenté par M. Mercier, est ainsi libellé :
« Remplacer la troisième et la quatrième phrases du deuxième alinéa du texte
proposé par le II de l'article 1er pour l'article L. 2143-1 du code général des
collectivités territoriales par la phrase suivante :
« Il comprend également, pour une durée fixée par le conseil municipal, les
représentants des associations locales ou membres de fédérations ou
confédérations nationales qui en font la demande et qui exercent leur activité
dans le quartier. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 513, présenté par M. Mercier, est ainsi libellé :
« Remplacer dans la premièrre phrase du quatrième alinéa du texte proposé par
le II de l'article 1er pour l'article L. 2143-1 du code général des
collectivités territoriales, les mots : "au moins deux fois par an" par les
mots : "une fois par trimestre". »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 361, présenté par Mme Blandin, MM. Bel, Debarge, Domeizel et
Dreyfus-Schmidt, Mme Durrieu, M. Frécon, Mme Herviaux, MM. Lagauche, Le Pensec,
Marc, Masseret, Mauroy, Peyronnet, Picheral, Raoul, Sueur, Teston et les
membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début de la première phrase du quatrième alinéa du
texte proposé par le paragraphe II pour l'article L. 2143-1 du code général des
collectivités territoriales :
« Il se réunit au moins trois fois par an... »
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet.
L'objet de cet amendement est de porter de deux à trois la périodicité
minimale des réunions annuelles pour les conseils de quartier afin que
celles-ci soient plus fréquentes.
M. le président.
L'amendement n° 667, présenté par M. Charasse et les membres du groupe
socialiste, est ainsi libellé :
« Dans la troisième phrase du quatrième alinéa du texte proposé par le II de
l'article 1er pour l'article L. 2143-1 du code général des collectivités
territoriales, après les mots : "son règlement intérieur", insérer les mots :
"qui doit être conforme aux règles communes de fonctionnement et". »
L'amendement n° 668, présenté par M. Charasse et les membres du groupe
socialiste, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la dernière phrase du quatrième alinéa du texte proposé
par le II de l'article 1er pour l'article L. 2143-1 du code général des
collectivités territoriales : "Le maire ou son représentant sont entendus, à la
demande du maire, par le conseil de quartier". »
L'amendement n° 669, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par le II de l'article 1er pour l'article L.
2143-1 du code général des collectivités territoriales par un alinéa rédigé
:
« Les délibérations du conseil de quartier sont soumises au contrôle de
légalité dans les mêmes conditions que les délibérations du conseil municipal
et sont transmises au représentant de l'Etat par le maire dans les mêmes
conditions et délais que les délibérations du conseil municipal. »
La parole est à M. Charasse, pour défendre ces trois amendements.
M. Michel Charasse.
L'amendement n° 667 vise à préciser que le règlement intérieur du conseil de
quartier doit être conforme aux règles communes de fonctionnement, arrêtées par
le conseil municipal. Cela va de soi, mais mieux vaut l'écrire pour éviter des
chicaïas ultérieures.
L'amendement n° 668 vise à préciser que le conseil de quartier entend le maire
ou son représentant, mais à la demande du maire. Il faut en effet que les
choses soient claires.
Enfin, il me paraît nécessaire, et c'est l'objet de l'amendement n° 669, de
prévoir que les délibérations du conseil de quartier peuvent faire l'objet du
contrôle de légalité, comme les délibérations du conseil municipal. Je pense en
particulier aux voeux politiques. Puisqu'il n'appartient pas au conseil de
quartier d'adopter des voeux politiques, il faut bien que quelqu'un puisse les
déférer à la juridiction compétente.
M. le président.
L'amendement n° 422, présenté par Mmes Beaufils et Borvo, M. Bret, Mme Mathon
et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé
:
« Compléter l'article 1er par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Les dispositions de cet article ne remettent pas en cause l'existence
des structures de démocratie de proximité déjà existantes avant la promulgation
de la présente loi. »
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Les structures de proximité, comme les conseils de quartier, qui font l'objet
de l'article 1er, ne naîtront pas toutes, loin s'en faut, du présent projet de
loi.
De nombreuses expériences d'implication des habitants à la vie de leur cité
existent, parfois depuis fort longtemps, sous des formes et des structures,
diverses, dans des villes petites ou grandes.
Vous avez parlé, monsieur le ministre, d'expériences performantes. Je prends
l'exemple de Marseille où les CIQ existent depuis plus d'un siècle et où les
comités d'information et de consultation des associations, les CICA, issus de
la loi PLM, fonctionnent bien depuis près de vingt ans là où on les fait
fonctionner.
Nous souhaitons donc que la loi crée les conditions d'une dynamique
susceptible d'encourager et de généraliser les expériences favorisant autant
que faire se peut la participation des habitants et non de la corseter.
Il serait en effet tout à fait dommageable et contraire à l'objet du projet de
loi que toute cette richesse soit remise en cause par l'instauration d'un
seuil, quel qu'en soit le niveau, ou parce que telle ou telle structure aurait
un fonctionnement différent de celui qui est proposé par la loi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements et des
sous-amendements ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Pour expliquer la position de la commission des lois, je
rappellerai que l'amendement pivot est, pour nous, l'amendement n° 4 car il
précise la philosophie sur laquelle repose notre conception des conseils de
quartier : souplesse et libre administration.
L'amendement n° 401 vise à supprimer l'article 1er. Mais je suis persuadé que
son auteur ne demande pas la suppression de toutes les expériences existantes
de conseils de quartier et que, au fond, ses souhaits rejoignent tout à fait
les propositions de la commission. Dans ces conditions, M. Détraigne acceptera,
j'en suis sûr, de retirer son amendement n° 401 et de se rallier à l'amendement
n° 4.
L'amendement n° 424 est incompatible avec l'amendement n° 3. La commission a
donc émis un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 525, relatif à l'appellation des conseils de quartier,
n'a pas lieu d'être maintenu puisque l'amendement n° 4 prévoit que : « Chacun
d'eux peut être doté d'un conseil de quartier, quelle qu'en soit la
dénomination, dont le conseil municipal fixe la composition et les modalités de
désignation. »
Nous allons ainsi au devant du désir de l'auteur du sous-amendement.
M. Patrick Lassourd.
Tout à fait !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 266 rectifié, je
souhaite également que ses auteurs le retirent parce qu'il ne s'inscrit pas
dans la philosophie de l'amendement n° 4.
Pour ce qui est du sous-amendement n° 354 rectifié, la commission en souhaite
aussi le retrait. Je ne doute d'ailleurs pas que ses auteurs aspirent
finalement à cette solution.
(Sourires.)
La commission souhaite par ailleurs que le sous-amendement n° 331 rectifié
soit retiré car il est satisfait par l'amendement n° 4 de la commission.
Avec le sous-amendement n° 270 rectifié
bis
, monsieur Lardeux, vous
allez à l'encontre de l'objectif de simplification et de souplesse en prévoyant
que les conseils municipaux doivent tenir compte des périmètres des cantons
dans la délimitation des quartiers.
M. René Garrec,
président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Et s'ils
n'en ont pas envie ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
S'agissant des sous-amendements n°s 272 rectifié et 672, j'ai
été longtemps conseiller général, élu d'un canton urbain, et je comprends les
difficultés liées à l'identification d'un conseiller général dans un tissu
urbain dont les limites de circonscriptions n'épousent pas les contours des
quartiers naturels. Néanmoins, si nous réglementons sur ce point la vie des
conseils de quartier, nous ouvrons une première brèche, qui risque d'être
suivie de bien d'autres.
Il est bon d'avoir clairement exprimé ce souhait. Mais il ne convient pas de
prévoir des dispositifs rigides là où la souplesse doit prévaloir.
Pour ce qui est de l'amendement n° 370 du Gouvernement, je comprends, nous
avons compris ce qui le sous-tend, mais il va à l'encontre de ce que la
commission des lois, dans sa grande majorité, a voulu à travers son amendement
n° 4. Tout en comprenant la logique entre cet amendement et le texte du projet
de loi dans son ensemble, je me dois donc, au nom de la commission des lois, de
dire que nous ne pouvons pas émettre un avis favorable.
Je suis par ailleurs dans l'obligation de constater que l'amendement n° 421 ne
correspond pas à la logique de notre amendement n° 4. J'émets donc un avis
défavorable.
L'amendement n° 360 est également contraire à la position de la commission.
Quant à l'amendement n° 361, qui augmente le nombre de réunions des conseils
de quartier, il imposerait un carcan qui ne favoriserait pas la souplesse et
l'épanouissement des conseils. Je dois donc donner un avis défavorable.
Il en va de même pour les amendements de M. Charasse. Peut-être, ayant entendu
l'objectif que la commission des lois cherche à atteindre, acceptera-t-il de
renoncer à ses amendements ; car je connais sa volonté, en toutes
circonstances, de favoriser la souplesse dans le fonctionnement des
institutions.
Enfin, l'amendement n° 422 est satisfait par l'amendement n° 4.
J'ai conscience de demander un gros sacrifice à tous les auteurs des
amendements et sous-amendements. Cependant, nous avons, en début de séance,
exposé les règles de conduite qui doivent éclairer notre conception des
conseils de quartier.
Au nom de cette volonté, je compte sur la bonne volonté des auteurs des
amendements et des sous-amendements pour apporter leur contribution au vote de
l'amendement n° 4 qui reflète parfaitement l'esprit qui s'est dégagé des
différentes interventions.
M. le président.
Monsieur Détraigne, l'amendement n° 401 est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne.
Je le retire, compte tenu du fait que l'amendement n° 4 assure toute la
souplesse nécessaire.
M. le président.
L'amendement n° 401 est retiré.
Monsieur Trucy, le sous-amendement n° 525 est-il maintenu ?
M. François Trucy.
Comment pourrais-je résister à la dialectique de M. le rapporteur ? Je le
retire, monsieur le président.
M. le président.
Le sous-amendement n° 525 est retiré.
Monsieur Lassourd, les sous-amendements n°s 266 rectifié, 354 rectifié, 331
rectifié, 270 rectifié
bis
et 272 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Patrick Lassourd.
Monsieur le président, je retire les sous-amendements n°s 266 rectifié, 354
rectifié et 272 rectifié.
En revanche, je maintiens les sous-amendements n° 331 rectifié et 270 rectifié
bis.
M. le président.
Les sous-amendements n°s 266 rectifié, 354 rectifié et 272 rectifié sont
retirés.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements et les sous-amendements
restant en discussion ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur
l'amendement n° 3 de la commission des lois. En effet, les dispositions
relatives à ce type de consultation telles qu'elles sont prévues à ce chapitre
ne concernent que les électeurs et non l'ensemble des habitants, qui peuvent
être consultés selon d'autres modalités.
S'agissant de l'amendement n° 424 présenté par le groupe communiste
républicain et citoyen, outre que l'adjonction proposée alourdit
considérablement les titres des chapitres concernés, il n'apparaît pas opportun
au Gouvernement de distinguer expressément cette catégorie de personnes
exerçant une activité professionnelle des habitants de la commune intéressés
par les affaires de leur quartier.
En outre, il est extrêmement malaisé de définir une telle catégorie, en
particulier dans des communes qui accueillent des activités très mobiles ; je
pense notamment aux commerces non sédentaires. Par conséquent, je demande le
retrait de cet amendement. Sinon, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement n° 4 de la commission des lois est un amendement central et
l'amendement n° 370 du Gouvernement, que j'ai présenté tout à l'heure,
représente une alternative.
La nouvelle rédaction proposée par la commission des lois, en rendant la
création des conseils de quartier facultative et en réduisant au strict minimum
leurs modalités de fonctionnement, vide la réforme de son sens.
M. Patrick Lassourd.
Mais non !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
L'article L. 2143-2 du code général des
collectivités territoriales suffisait déjà. Le Gouvernement ne peut se
satisfaire d'une telle perte de substance.
S'il faut reconnaître que d'heureuses initiatives ont permis de faire avancer
la participation des citoyens à la vie publique, un tel constat n'a rien d'une
généralité. Le besoin demeure d'une grande association de nos concitoyens aux
questions qui touchent la vie de leur cité. C'est pourquoi le Gouvernement vous
propose, par l'amendement n° 370, une rédaction qui concilie à la fois la
souplesse que vous souhaitez et le maintien de l'obligation de créer des
conseils de quartier dans les villes de 20 000 habitants. Cet amendement permet
également la reprise des expériences existantes, ce qui répond à la demande de
nombre d'entre vous.
Par conséquent, je demande le retrait de l'amendement n° 4. Quant au
sous-amendement n° 331 rectifié, l'exposé des motifs précise à plusieurs
reprises que les conseils de quartier constituent des instances purement
consultatives, ce que reflète la rédaction du projet de loi. Il n'y a pas
d'ambiguïté possible ! L'adjonction proposée est donc superfétatoire. Par
conséquent, j'en appelle au retrait de ce sous-amendement, sinon à son
rejet.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 270 rectifié
bis,
cette mesure
génératrice de contraintes supplémentaires va à l'encontre de la volonté du
Gouvernement de s'en tenir à un corps minimal de dispositions législatives pour
assurer le bon fonctionnement des conseils de quartier, que les élus communaux
et leurs partenaires peuvent librement compléter par la suite. J'émets donc un
avis défavorable sur ce sous-amendement.
S'agissant de l'amendement n° 421, le Gouvernement propose de fixer à 20 000
habitants le seuil démographique pour l'institution de quartiers dotés de
conseils consultatifs. Il ne peut donc être favorable à cet amendement.
L'Assemblée nationale elle-même a relevé le seuil à 50 000 habitants. J'ai
maintenu le seuil à 20 000 habitants. M. Bret et Mme Mathon comprendront que ce
chiffre peut être atteint dans toutes les communes, qu'elles soient membres ou
non d'un EPCI.
Pour ce qui de l'amendement n° 360, avec cette mesure conforme à l'esprit
initial du projet de loi visant à promouvoir la démocratie participative au
profit du plus grand nombre, un peu plus de quatre cents communes
bénéficieraient des conseils de quartier au lieu d'un peu plus d'une centaine.
Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.
S'agissant de l'amendement n° 361, en ce domaine comme en d'autres, le projet
de loi ne fixe que les règles de base visant à garantir un fonctionnement
minimal satisfaisant des conseils de quartier, sachant qu'il appartient à leurs
membres, le cas échéant, de les compléter librement lors de l'élaboration du
règlement intérieur. Je partage donc les préoccupations des auteurs de cet
amendement, sur lequel j'émets un avis favorable.
De même, en ce qui concerne l'amendement n° 667, il me paraît normal que le
fonctionnement des conseils de quartier obéissent à un corps de règles communes
définies par le conseil municipal. J'émets donc un avis favorable.
Pour ce qui est de l'amendement n° 668, bien qu'il ne soit pas nécessaire de
légiférer sur ce point, qui pourrait être traité par le règlement intérieur des
conseils de quartier, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
S'agissant de l'amendement n° 669, il est moins facile pour le Gouvernement de
se prononcer. Les conseils de quartier sont des instances purement
consultatives qui émettent des avis ou formulent des propositions, mais en
aucun cas ne procèdent à des délibérations, pour lesquelles seul le conseil
municipal est habilité. Par conséquent, ces avis et ces propositions n'ont pas
à être soumis au contrôle de légalité. Je souhaite donc le retrait de cet
amendement.
M. Michel Charasse.
Et les voeux politiques ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Ils sont irrecevables dans un conseil de
quartier !
M. Michel Charasse.
Ils peuvent quand même être adoptés !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Il y a des tas de choses qui peuvent être
adoptées, mais qui sont irrecevables !
J'en viens enfin à l'amendement n° 422. Soucieux de ne pas remettre en cause
les organes participatifs qui ont fait leurs preuves et dans la mesure où ils
se rapprochent du cadre général fixé par le projet de loi, le Gouvernement a
déposé un amendement visant à préserver leur pérennité. Il préfère donc
logiquement sa rédaction et demande aux auteurs de l'amendement de s'y rallier,
même s'il est favorable sur le principe.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je souhaite donner une précision à M. Lassourd : en ce qui
concerne le sous-amendement n° 331 rectifié, bien que l'amendement n° 4 prévoit
le caractère purement consultatif des conseils de quartier, j'accepte que les
termes « cette instance a un caractère exclusivement consultatif » soient
rattachés à cet amendement, ce qui pourrait dissiper les derniers doutes qui
subsisteraient dans tel ou tel esprit.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.
M. Robert Bret.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Madame Mathon, l'amendement n° 424 est-il maintenu ?
Mme Josiane Mathon.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 424, repoussé par la commission et par
leGouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 331 rectifié.
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Compte tenu des propos tenus par M. le rapporteur, il est effectivement
préférable que les mesures proposées par ce sous-amendement soient rattachées à
l'amendement n° 4 de la commission. Ainsi, les choses seront claires.
Par ailleurs, nous retirons le sous-amendement n° 270 rectifié
bis.
M. le président.
Le sous-amendement n° 270 rectifié
bis
est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 331 rectifié, accepté par la commission
et repoussé par leGouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Sans préjuger le vote de mon groupe sur cet amendement, je voudrais poser une
question à M. le rapporteur.
Dans l'amendement n° 4, il est indiqué : « Dans les communes de 20 000
habitants et plus, le conseil municipal peut fixer le périmètre de chacun des
quartiers constituant la commune. » Le conseil municipal a donc la simple
faculté de déterminer le périmètre des quartiers.
Ensuite, il est précisé : « Chacun d'eux peut être doté d'un conseil de
quartier... ».
Cela veut-il dire dans votre esprit, monsieur le rapporteur, que l'on peut
fixer un périmètre de quartier sans créer des conseils de quartier ? Dans le
cas contraire, ne vaudrait-il pas mieux écrire : « est doté » ? A partir du
moment où l'on définit le périmètre des quartiers, on les dote d'un conseil de
quartier !
Je cherche à savoir ce que vous voulez dire exactement : cela signifie-t-il,
premièrement, que l'on n'est pas obligé de faire des quartiers et,
deuxièmement, que si l'on fait des quartiers on n'est pas tenu de les doter de
conseils de quartier ?
M. Patrick Lassourd.
C'est la souplesse !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je crois, monsieur Charasse, que vous avez décelé, au travers
du libellé, que c'est la souplesse maximale qui est souhaitée.
(Rires.)
Il est des quartiers qui peuvent avoir envie de se doter de conseils de
quartier avec un périmètre clairement défini ; il en est d'autres qui peuvent
mettre sur pied une assemblée de quartier ou un comité de quartier sans que les
contours en soient précisément définis ; d'autres encore peuvent avoir envie de
ne rien faire au départ. C'est parce que tous les cas de figure existent
actuellement dans beaucoup de milieux urbains que nous en sommes arrivés à
cette conclusion.
Nous avons pris connaissance d'expériences très intéressantes de conseils de
quartier. Mais il ne s'agit que du reflet d'une réalité fluctuante et diverse.
En effet, les villes, même de taille identique, ont des philosophies, des
expériences et des conceptions différentes de l'organisation de la vie des
quartiers.
M. Jean-Pierre Schosteck.
Très bien !
M. Michel Charasse.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le rapporteur : désormais, tout
est clair !
M. le président.
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, les amendements n°s 370, 421, 360, 361, 667, 668 et 669 n'ont
plus d'objet.
Madame Beaufils, l'amendement n° 422 est-il maintenu ?
Mme Marie-France Beaufils.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 422 est retiré.
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
M. le président.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
4
DÉPÔTS DE PROJETS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation
d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement
de la République fédérale d'Allemagne relatif à la coopération dans l'exercice
des missions de police de la navigation sur le secteur franco-allemand du
Rhin.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 167, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation
de l'avenant n° 1 à la convention sur la sécurité sociale du 2 octobre 1980
entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la
République gabonaise.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 168, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
5
TEXTE SOUMIS AU SÉNAT
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE
LA CONSTITUTION
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil établissant un programme cadre sur la
base du titre VI du traité sur l'Union éuropéenne. - Coopération policière et
judiciaire en matière pénale.
Ce texte sera imprimé sous le numéro E-1905 et distribué.
6
DÉPÔT D'UN RAPPORT
M. le président.
J'ai reçu de M. Bernard Fournier un rapport fait au nom de la commission des
affaires culturelles sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée
nationale, après déclaration d'urgence, relative au régime d'assurance chômage
des intermittents du spectacle (n° 138, 2001-2002).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 166 et distribué.
7
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au jeudi 10 janvier 2002, à neuf heures trente et à quinze heures :
Suite de la discussion du projet de loi (n° 415, 2000-2001), adopté par
l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la démocratie de
proximité.
Rapport (n° 156, 2001-2002) de M. Daniel Hoeffel, fait au nom de la commission
des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
règlement et d'administration générale.
Avis (n° 161, 2001-2002) de M. Michel Mercier, fait au nom de la commission
des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la
nation.
Avis (n° 153, 2001-2002) de M. Patrick Lassourd, fait au nom de la commission
des affaires économiques et du Plan.
Avis (n° 155, 2001-2002) de M. Xavier Darcos, fait au nom de la commission des
affaires culturelles.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délai limite pour le dépôt des amendements
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, après déclaration
d'urgence, relative au régime d'assurance chômage des intermittents du
spectacle (n° 138, 2001-2002) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 16 janvier 2002, à
dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(la séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES
M. Philippe Richert a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 114
(2001-2002) de M. Nicolas About autorisant la restitution par la France de la
dépouille mortelle de Saartjie Baartman, dite « Vénus hottentote », à l'Afrique
du Sud.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Prise en charge des personnes âgées
1241.
- 9 janvier 2001. -
M. Jean-Paul Amoudry
appelle l'attention de
M. le ministre délégué à la santé
sur les très graves difficultés que rencontre le département de la Haute-Savoie
dans le domaine du maintien à domicile et de l'accueil en établissements
spécialisés des personnes âgées. En effet, ce département dont la population
des personnes âgées de plus de quatre-vingt-cinq ans a augmenté de 56 % entre
1990 et 1999, et qui connaît par ailleurs une très forte croissance
démographique, dispose aujourd'hui de la capacité en lits de maisons de
retraite et MAPAD la plus faible de la région Rhône-Alpes, du plus faible taux
de médicalisation des établissements pour personnes âgées de cette région, et
se situe en avant-dernière place au niveau régional pour son équipement en
services de soins à domicile. Il lui précise que, désormais, plus de 1 200
personnes sont en liste d'attente pour l'admission dans un établissement du
département et, lorsqu'il est possible, le maintien à domicile devient de plus
en plus difficile, faute de pouvoir salarier du personnel qualifié, en raison
du coût de la vie très élevé de la Haute-Savoie. Aussi, dans ces conditions, le
comité départemental de coordination gérontologique a récemment demandé que
cette situation particulière puisse être prise en compte, notamment par
l'attribution d'une enveloppe sanitaire spécifique permettant la création de
capacités nouvelles en nombre suffisant, le relèvement des quotas de formation
de personnel soignant, et la revalorisation de leurs rémunérations accompagnée
de possibilités accrues de formation pour les aides à domicile, afin de
restaurer l'attractivité de cette profession. De plus, la Haute-Savoie connaît
aujourd'hui une grave pénurie de personnel infirmier et d'aides-soignantes. En
conséquence, il lui demande si le Gouvernement envisage de prendre, en raison
de l'urgence et de la gravité de la situation, l'ensemble des mesures
préconisées par le comité départemental de coordination gérontologique de la
Haute-Savoie.
Obligations des communes en matière d'assainissement
1242.
- 9 janvier 2001. -
M. Bernard Piras
attire l'attention de
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement
sur les obligations des communes en matière d'assainissement au regard des
dispositions de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau. Avant cette loi, il
n'existait pas d'obligation générale pour les communes de mettre en place un
réseau d'assainissement et de traiter les effluents. Ce texte leur a donné des
compétences et des obligations nouvelles dans ce domaine. Ainsi, l'article L.
2224 du code général des collectivités locales stipule que « les communes
prennent obligatoirement en charge les dépenses liées aux systèmes
d'assainissement collectif, notamment aux stations d'épuration des eaux usées
et à l'élimination des boues qu'elles produisent, et les dépenses de contrôle
des systèmes d'assainissement non collectifs ». Ainsi, la mise aux normes
imposera à partir de 2005 des travaux importants engendrant des coûts
financiers très élevés. Même si des subventions publiques sont accordées aux
collectivités, les communes, notamment les plus petites qui ont par ailleurs
sur leur territoire un habitat fort dispersé, n'ont pas la capacité financière
suffisante pour financer ces travaux sans remettre en cause leur avenir. En
outre, ces communes rurales de petite taille - le problème étant aggravé
lorsqu'elles sont situées en zone de montagne - sont soumises à des contraintes
géographiques, physiques et humaines qui exigent une approche du dossier
particulière. Ce service d'assainissement étant de nature industrielle et
commerciale, les dépenses engagées pourraient et devraient même être
répercutées sur l'usager. Mais une telle solution n'est bien évidemment pas
envisageable, le prix de l'eau devenant alors prohibitif pour bon nombre de nos
concitoyens. Les maires sont très inquiets face à cette obligation qui leur
incombe, laquelle risque en l'état actuel des aides accordées de concentrer la
totalité des moyens financiers communaux, et de remettre ainsi en cause les
projets d'aménagement et de développement. Pour remédier à cette situation,
deux solutions pourraient être envisagées : soit une augmentation notable des
aides publiques, en déplafonnant le seuil des 80 % et en relevant le plafond
actuel de 5 millions de francs, soit un allongement des délais d'application de
la loi sur l'eau. Il lui demande de lui indiquer les mesures qu'il entend
prendre pour rassurer l'ensemble des élus locaux.
Fusion des centres d'appels d'urgence
de Nantes et de Saint-Nazaire
1243.
- 9 janvier 2001. -
M. André Trillard
appelle l'attention de
M. le ministre délégué à la santé
sur les conséquences prévisibles de la fusion programmée des centres d'appels
d'urgence de Nantes et Saint-Nazaire, qu'il est prévu de regrouper en un seul,
situé à Nantes, au cours du premier semestre 2002. Il souligne que si la
centralisation des appels au « 15 » peut facilement s'organiser à partir de
Nantes, la suppression du SAMU de Saint-Nazaire limiterait, pour les temps de
garde, la présence au niveau de l'arrondissement à une seule équipe de médecins
urgentistes, contraignant, en cas d'urgences simultanées, au recours à une
équipe venue de Nantes, ce qui, en période d'afflux touristique, et dans un
certain nombre de cas, peut sérieusement obérer les chances de survie des
victimes. Il lui demande donc de vouloir bien revenir sur une décision de
nature à porter préjudice à la sécurité de la population, permanente comme
saisonnière.
Déconventionnement de 60 000 logements
1244.
- 9 janvier 2001. -
Mme Marie-Claude Beaudeau
attire l'attention de
Mme le secrétaire d'Etat au logement
sur la gravité de la décision prise par la Société centrale immobilière de la
Caisse des dépôts (SCIC) et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) de
procéder au déconventionnement de 60 000 logements. Elle lui fait part de
l'émotion, de la colère de milliers de locataires concernés, confrontés à la
suppression de l'aide personnalisée au logement et donc à l'augmentation des
loyers. Elle lui demande de lui faire connaître les mesures qu'elle envisage
pour annuler de telles décisions contraires à une politique de logement social,
et leur substituer une politique radicalement nouvelle d'entretien, de
modernisation et de réhabilitation des appartements, des immeubles et de leurs
abords et le blocage des loyers de ces logements.
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 9 janvier 2002
SCRUTIN (n° 41)
sur l'amendement n° 420 rectifié, présenté par Mme Nicole Borvo et plusieurs de
ses collègues, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 1er du
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence,
relatif à la démocratie de proximité (droit de vote des étrangers non
communautaires).
Nombre de votants : | 238 |
Nombre de suffrages exprimés : | 236 |
Pour : | 22 |
Contre : | 214 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour :
19.
N'ont pas pris part au vote :
4. _ MM. François Autain, Jean-Yves
Autexier, Pierre Biarnès et Paul Loridant.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (20) :
Contre :
20.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :
Contre :
94.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Christian Poncelet, président du
Sénat.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour :
3. _ MM. Yves Dauge, Jean-Yves Mano et Pierre Mauroy.
Abstentions :
2. _ MM. Michel Charasse et Jean-Claude Peyronnet.
N'ont pas pris part au vote :
78, dont M. Bernard Angels, qui présidait
la séance.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (53) :
Contre :
53.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (41) :
Contre :
41.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (6) :
Contre :
6.
Ont voté pour
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Danielle Bidard-Reydet
Nicole Borvo
Robert Bret
Yves Coquelle
Yves Dauge
Annie David
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Gérard Le Cam
Hélène Luc
Jean-Yves Mano
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Roland Muzeau
Jack Ralite
Ivan Renar
Odette Terrade
Paul Vergès
Ont voté contre
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Nicolas Alfonsi
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
André Boyer
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Christian Cointat
Yvon Collin
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Robert Del Picchia
Jean-Paul Delevoye
Gérard Delfau
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Rodolphe Désiré
Sylvie Desmarescaux
Yves Détraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
François Fortassin
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Alain Joyandet
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Abstentions
MM. Michel Charasse et Jean-Claude Peyronnet.
N'ont pas pris part au vote
Michèle André
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Marie-Christine Blandin
Didier Boulaud
Yolande Boyer
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Jean-Claude Frécon
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
N'ont pas pris part au vote
MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Bernard Angels, qui présidait
la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 241 |
Nombre des suffrages exprimés : | 239 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 120 |
Pour : | 26 |
Contre : | 213 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.