SEANCE DU 16 JANVIER 2002
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 299 rectifié
bis,
présenté par MM. Delevoye, Braye,
Eckenspieller, Gournac, Lassourd, Ostermann, Vasselle, Larcher et les membres
du groupe du RPR, est ainsi libellé :
« Avant l'article 26, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le paragraphe I de l'article L. 2123-20 du code général des collectivités
territoriales est complété
in fine
par deux phrases ainsi rédigées :
« Ces indemnités n'ont pas le caractère d'un salaire, d'un traitement ou d'une
rémunération quelconque, et ne sont prises en compte ni pour l'attribution des
prestations sociales de toutes natures, et notamment celles relevant du code de
la sécurité sociale ou du code de l'action sociale et des familles, ni pour
l'attribution de l'allocation instituée par la loi n° 88-1088 du 1er décembre
1988 relative au revenu minimum d'insertion. Ces indemnités ne sont pas
assujetties aux cotisations de sécurité sociale sauf dans le cas visé à
l'article L. 2123-25. »
L'amendement n° 550, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
« Avant l'article 26, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 1621-1 du code général des collectivités territoriales,
est inséré un article ainsi rédigé :
«
Art. ....
- Les indemnités visées aux articles L. 2123-20 à L.
2123-24, L. 2511-33 à L. 2511-35, L. 3123-15 à L. 3123-19, L. 4135-15 à L.
4135-19, L. 5211-12, L. 5215-16, L. 5215-17, L. 5216-4, L. 5216-4-1 et L.
5216-13 n'ont pas le caractère ni d'un salaire, ni d'un traitement, ni d'une
rémunération quelconque. Elles ne sont prises en compte ni pour l'attribution
des prestations sociales de toutes natures, notamment celles relevant du code
de la sécurité sociale ou du code de l'action sociale et des familles, ni pour
l'attribution de l'allocation instituée par la loi n° 88-1088 du 1er décembre
1988 relative au revenu minimum d'insertion. Ces indemnités ne sont pas
assujetties aux cotisations de sécurité sociale, sous réserve des dispositions
prévues aux articles L. 2123-25 à L. 2123-30, L. 3123-20 à L. 3123-25 et L.
4135-20 à L. 4135-25 du présent code et aux articles L. 313-2 et L. 351-2 du
code de la sécurité sociale. »
Le sous-amendement n° 698, présenté par M. de Richemont, est ainsi libellé
:
« Compléter
in fine,
le texte proposé par l'amendement n° 550 pour
l'article L. 1621-1 du code général des collectivités territoriales par un
alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, lorsque les indemnités définies au précédent alinéa sont au moins
égales à 65 % de l'indice 1015, elles peuvent être prises en compte pour
l'attribution de l'allocation instituée par la loi n° 88-1088 du 1er décembre
1988 relative au revenu minimum d'insertion. »
La parole est à M. Lassourd, pour défendre l'amendement n° 299 rectifié
bis.
M. Patrick Lassourd.
L'amendement n° 299 rectifié
bis
concerne le caractère des indemnités.
En effet, un grand nombre d'élus locaux, maires et adjoints au maire notamment,
rencontrent des difficultés pour faire valoir leurs droits auprès des
organismes sociaux. Ces derniers, qu'il s'agisse des caisses d'allocations
familiales, des caisses primaires d'assurance maladie, des ASSEDIC, des URSSAF,
etc., procèdent, de temps en temps, et au coup par coup, dans différents
départements, à la réduction, voire à la suppression des prestations sociales
légalement dues aux élus, à due concurrence des indemnités de fonction qu'ils
perçoivent, en se fondant sur le seul motif de cette perception. Il s'ensuit
des redressements infondés et des contentieux multiples.
Ces difficultés résultent en grande partie d'une certaine méconnaissance des
règles spécifiques qui régissent le statut des élus locaux. Mais elles sont
également la conséquence de l'absence de disposition législative définissant
clairement la nature juridique et le régime de l'indemnisation des élus.
Certes, une décision de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du
23 mai 1996 a nettement précisé le droit positif, en posant comme règle
générale que le versement des allocations ne peut pas être remis en cause
consécutivement à une introduction dans le revenu de référence des indemnités
des élus. Cette décision n'a pourtant pas suffi à faire disparaître les
contentieux locaux, qui embarrassent souvent les élus pendant de longues
périodes en les obligeant à des démarches complexes et injustifiées. Elle n'a,
enfin, rien réglé en ce qui concerne les prestations sociales, comme le RMI. Or
le nombre d'élus qui en bénéficient est en augmentation.
En conséquence, mes chers collègues, l'amendement qui vous est proposé vise à
préciser que les « indemnités n'ont pas le caractère d'un salaire, d'un
traitement ou d'une rémunération quelconque », à l'exclusion, bien entendu, des
indemnités visées par l'article L. 2123-25, qui, lui, ne concerne que les élus
ayant totalement abandonné leur profession.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, pour présenter l'amendement n° 550.
M. Alain Vasselle.
Cet amendement puise à la même source que celui que vient de présenter à
l'instant même notre collègue M. Lassourd. Je me suis efforcé, en ce qui me
concerne, de faire référence à tous les articles de la loi qui visent le régime
indemnitaire des élus locaux.
L'amendement n° 550 a pour objet de mettre un terme aux difficultés que
rencontrent certains élus locaux en matière de prestations sociales, comme
vient de le développer très justement M. Lassourd. Je rappelle à nos collègues
et à M. le ministre que, malgré un arrêt de la Cour de cassation du 23 mai
1996, ces difficultés perdurent. La solution de clarification pourrait donc
être de donner une définition de l'ensemble des indemnités de fonction. Une
disposition voisine avait d'ailleurs été adoptée par le Sénat, mais rejetée par
l'Assemblée nationale, lors de la discussion de la loi du 5 avril 2000 relative
à la limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs
conditions d'exercice.
J'espère qu'enfin, après cette navette entre les deux assemblées et après que
la rédaction de ce texte aura été affinée autant que faire se peut, nous
pourrons trouver la sécurité juridique qui permettra aux élus de ne plus
rencontrer de difficultés quant à leurs indemnités de fonction.
M. le président.
Le sous-amendement n° 698 n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 299 rectifié
bis
et 550 ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
La commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur
l'amendement n° 299 rectifié
bis
, tout en soulevant deux questions
d'ordre technique.
En premier lieu, la protection sociale de l'élu, améliorée par le projet de
loi, rend-elle opportune une mesure susceptible d'être diversement perçue par
l'opinion dans la mesure où il s'agit de remédier à la non-prise en compte de
certaines ressources pour la détermination des droits sociaux ?
En deuxième lieu, en ce qui concerne les prestations sous condition de
ressources, on déduit du revenu pris en compte la fraction représentative de
frais. Le vote de l'amendement pourrait avoir pour effet de mettre fin à cette
déduction, et l'amendement ne serait pas forcément toujours avantageux pour
l'élu.
Je tenais à soulever ces deux questions. La commission s'en remet à la sagesse
du Sénat, mais il ne faudrait pas que l'on puisse lui reprocher de ne pas avoir
décelé à temps quelques éventuels écueils.
L'amendement n° 550 se situe dans le même ordre d'idée, puisqu'il concerne
également la nature juridique de l'indemnité de fonction. Là aussi, la
commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
Cependant, tout en s'en remettant à la sagesse de la Haute Assemblée sur ces
deux amendements, la commission souhaiterait, compte tenu des questions
pratiques soulevées, connaître l'opinion du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je pense que les réserves dont a fait part le
rapporteur doivent être prises en compte.
L'amendement n° 299 rectifié
bis
vise essentiellement à permettre
d'attribuer aux élus locaux des prestations sociales, y compris le RMI, sans
prendre en compte leur indemnité dans le montant de leur revenu. Ainsi, les
élus locaux se trouveraient favorisés par rapport aux autres citoyens, ce que
le Gouvernement et, probablement, l'opinion publique, ne sauraient admettre,
comme l'a souligné M. le rapporteur, notamment en ce qui concerne l'attribution
du RMI.
Cet amendement paraît aujourd'hui d'autant moins justifié que, lorsqu'il a
élaboré le projet de loi, le Gouvernement a attentivement examiné l'ensemble
des prestations sociales dont les élus sont susceptibles de bénéficier. Cette
analyse a fait apparaître que les services compétents en la matière veillent à
appliquer les textes de façon suffisamment souple pour que, quelle que soit la
prestation concernée, et sous réserve du cas particulier du RMI, les élus ne se
trouvent pas, du fait de l'exercice de leur mandant, défavorisés par rapport
aux autres citoyens.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 299
bis
ainsi que sur l'amendement n° 550, qui est d'inspiration voisine.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 299 rectifié
bis
.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Dans la mesure où nous devons choisir entre les amendements n°s 299 rectifié
et 550, j'aurais souhaité être éclairé par M. le rapporteur sur celui qui a sa
préférence.
Je n'ai pas été insensible à la partie de son argumentation concernant la
déductibilité, sur le plan fiscal, des indemnités perçues par les élus. Cet
élément doit effectivement être pris en compte.
J'aimerais donc savoir si l'un ou l'autre de ces amendements permet de mieux
remédier à la difficulté qu'a évoquée M. le rapporteur.
J'ajoute que, pour répondre aux observations pertinentes de M. le ministre
concernant le RMI, nous pourrions supprimer tout ce qui est relatif à cette
allocation dans notre amendement. Celui-ci pourrait-il, dans ces conditions,
être accepté par le Gouvernement ?
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Sous réserve de ce que dira le rapporteur, il me semble que l'amendement n°
550 est
a priori
plus complet dans la mesure où les références
législatives y sont beaucoup plus précises.
Cela étant, il faudrait effectivement supprimer la fin de la deuxième phrase
du texte proposé, de manière qu'il n'y soit plus question du revenu minimum
d'insertion.
M. Jean-Jacques Hyest.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest.
Nous avons déjà eu de nombreux débats sur ce sujet.
On a estimé que l'indemnité représentative de frais correspondait à
l'indemnité du maire d'une commune de 500 habitants. Dès lors, cette indemnité
n'est même pas soumise au prélèvement à la source au titre de l'impôt sur le
revenu puisqu'on considère qu'il s'agit strictement de frais.
Mais on a aussi prévu une indemnisation à due concurrence pour ceux qui
abandonnent totalement leur activité professionnelle. Cela signifie bien que
c'est l'équivalent d'un revenu.
A la limite, un maire de grande ville devrait se contenter du RMI. Personne ne
le comprendrait ! Il y a donc vraiment un problème d'interprétation.
C'est pourquoi je conseille à mes collègues de retirer leurs amendements,
faute de quoi on aboutira à des situations totalement absurdes.
Je rappelle que la question s'est posée pour le maire d'un petit village qui
percevait le RMI : les services de l'Etat ont entendu l'en priver alors même
que son indemnité était inférieure à l'indemnité représentative de frais ! La
chambre sociale de la Cour de cassastion a tranché. Il n'est peut-être pas
nécessaire de rouvrir le débat sur ce sujet.
M. Jean-Claude Frécon.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Frécon.
M. Jean-Claude Frécon.
Nous pouvons tous citer des exemples invitant à aller plutôt dans un sens ou
plutôt dans un autre.
Je connais, moi, le cas d'un maire de petite commune qui a été licencié en
cours de mandat et qui n'a pas pu percevoir ses indemnités de chômage parce que
son indemnité de maire a été comptabilisée dans ses revenus. Il y avait là de
quoi être choqué.
De même, il est choquant que le maire d'une grande ville, comme l'a dit M.
Hyest, doit se contenter du RMI.
En fait, c'est une question de niveau de l'indemnité. Pour éviter de fixer des
seuils supplémentaires, pourquoi ne pas retenir comme base le montant fixé
voilà déjà un certain temps par la loi, ainsi que vient de le suggérer M. Hyest
? Ainsi, on mettrait à part l'indemnité représentative de frais de mandat, qui
est la même pour tout le monde, et tout le reste de l'indemnité serait
considéré comme un revenu.
Quoi qu'il en soit, je m'accorde avec M. Hyest pour considérer que ces
amendements, tels qu'ils nous sont présentés, devraient être retirés.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Il fallait évoquer les risques sous-jacents que peuvent faire
peser ces deux amendements. Je ne suis pas en mesure d'apporter une réponse
définitive quant à celui des deux qui apporterait le plus de garanties, mais je
crois pouvoir estimer que c'est encore l'amendement n° 550 qui présente le
moins de risques.
M. le président.
L'amendement n° 299 rectifié
bis
est-il maintenu, monsieur Lassourd
?
M. Patrick Lassourd.
Eu égard aux arguments qui ont été avancés, je le retire. Cela dit la question
reste entière.
J'ai bien entendu les arguments de M. Hyest et de M. Frécon. On pourrait
certes considérer que, au-delà de la part représentative de frais, l'indemnité
constitue un revenu et que, à ce titre, elle soit intégrée dans le calcul de
certaines prestations sociales. Mais n'oublions pas la fiscalité.
M. Jean-Jacques Hyest.
Il y a le prélèvement à la source !
M. Patrick Lassourd.
C'est vrai !
En tout cas, il me semble qu'il y a lieu d'élaborer un texte plus fouillé et
plus précis sur ce point. Le problème est réel, et le retrait de cet amendement
ne suffit pas à le régler.
M. le président.
L'amendement n° 299 rectifié
bis
est retiré.
L'amendement n° 550 est-il maintenu, monsieur Vasselle ?
M. Alain Vasselle.
M. le rapporteur ne pouvant pas m'assurer que cet amendement est dénué de tout
risque, le plus sage est que je le retire.
M. le ministre a en partie apaisé nos inquiétudes en indiquant que les caisses
de sécurité sociale faisaient une interprétation assez souple au moment de
calculer les prestations. Je vous demande toutefois de rester vigilant,
monsieur le ministre. Si d'aventure nous étions confrontés à une interprétation
qui ne serait pas conforme à celle dont il a été fait état, nous ne manquerions
pas de vous saisir pour essayer de trouver une solution.
Pour l'heure, à partir du moment où nous sommes d'accord sur la manière dont
il faut interpréter le dispositif, la sagesse consiste, pour moi, à retirer cet
amendement.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je salue la sagesse actuelle de M. Vasselle.
(Sourires.)
M. Jean-Jacques Hyest.
Actuelle et habituelle !
(Nouveaux sourires.)
M. le président.
L'amendement n° 550 est retiré.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Tous deux sont présentés par M. Vasselle.
L'amendement n° 308 est ainsi libellé :
« Avant l'article 26, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
« Les II et III de l'article L. 2123-20 du code général des collectivités
territoriales sont supprimés. »
L'amendement n° 311 rectifié, est ainsi libellé :
« Avant l'article 26, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
« Le II de l'article L. 2123-20 du code général des collectivités
territoriales est ainsi rédigé :
« II. - L'élu municipal titulaire d'autres mandats électoraux ou qui siège à
ce titre au conseil d'administration d'un établissement public local, du centre
national de la fonction publique territoriale, au conseil d'administration ou
au conseil de surveillance d'une société d'économie mixte locale ou qui préside
une telle société ne peut percevoir, pour l'ensemble de ses fonctions, un
montant total de rémunération et d'indemnités de fonction supérieur à une fois
et demie le montant net de l'indemnité parlementaire telle qu'elle est définie
à l'article 1er de l'ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi
organique relative à l'indemnité des membres du Parlement. »
La parole est à M. Vasselle, pour présenter ces deux amendements.
M. Alain Vasselle.
Il s'agit là d'un sujet extrêmement sensible, surtout à la date à laquelle
nous nous trouvons, et je ne me fais pas d'illusions quant au sort qui va être
réservé à ces amendements.
Cela étant, je considère que nous devrions tirer les enseignements des
dispositions législatives que nous avons adoptées antérieurement, notamment
celles qui sont relatives au cumul des mandats.
A partir du moment où nous avons considéré qu'un élu national ou un élu local
pouvait cumuler deux mandats ou un mandat et une fonction exécutive, c'est bien
parce que nous estimions qu'il avait la capacité d'assumer les responsabilités
correspondantes.
Dès lors, je ne vois pas au nom de quoi nous continuerions à plafonner le
montant des indemnités par référence à l'indemnité parlementaire. Si c'est
trop, il nous faut encore limiter le cumul des mandats.
Si la loi limitant le cumul des mandats a été votée, c'est notamment parce
qu'on s'est dit : il y a des élus qui s'amusent à cumuler les mandats de façon
à atteindre un niveau d'indemnité suffisamment important pour faire face à la
totalité des charges qu'ils assument et retrouver un niveau de rémunération se
rapprochant le plus possible de celui dont ils bénéficiaient lorsqu'ils
exerçaient leur activité professionnelle.
Mon but n'est autre que la recherche de la cohérence : il s'agit de tirer les
conséquences des dispositions législatives que nous avons adoptées
antérieurement. Cela vaudrait bien entendu pour l'ensemble des élus, élus
nationaux ou élus locaux.
L'amendement n° 311 rectifié est un amendement de repli. Actuellement, le
montant des indemnités ne peut pas dépasser une fois et demie le montant brut
de l'idemnité parlementaire, déduction faite des cotisations sociales. Mais les
cotisations sociales ne recouvrent pas l'ensemble des cotisations que nous
devons acquitter sur nos indemnités.
Je propose donc que l'élu municipal titulaire de plusieurs mandats ne puisse
percevoir plus d'une fois et demie le montant net des indemnités perçues par
les parlementaires.
En faisant un pas dans cette direction, nous irions vers une revalorisation
des indemnités des élus qui n'aurait rien d'excessif et qui serait acceptable
tant au niveau local que national.
Tel est l'objet de ces deux amendements qui posent une question de fond. Y
apporterons-vous une réponse ce soir ?
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 308 et 311 rectifié
?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Il s'agit incontestablement de deux amendements intéressants,
dont M. Vasselle vient de préciser qu'ils soulèvent une question de fond. J'ai
toutefois le sentiment qu'en les présentant de cette manière il est bien
conscient que, sur un plan pratique et dans une période psychologiquement plus
délicate que d'autres, leur adoption pourrait entraîner une série de
commentaires, d'analyses qui iraient à l'encontre de l'intention du Sénat.
Il a certes eu raison d'écrire, à la fin de l'exposé des motifs de
l'amendement n° 311 rectifié : « La démocratie locale a un coût, nos
concitoyens le savent et sont prêts à l'accepter ». Il a par ailleurs raison de
dire qu'il faut que la fonction d'élu soit suffisamment attractive pour
susciter de nouveaux talents. Comment ne pas adhérer à cette vision globale et
stimulante des choses ?
Malheureusement, en ce début de l'année 2002, je ne suis absolument pas en
mesure, au nom de la commission des lois, de donner un avis favorable à
l'amendement n° 308. Il faut à tout moment soulever les questions de fond qu'on
ne peut pas passer sous silence, mais le choix du moment nécessite parfois
quelques modulations.
Je suis d'ailleurs sûr, cher collègue Alain Vasselle, que vous comprendrez
que, tous ensemble ici, nous avons le souci de donner du Sénat une image
réaliste et consciente des quelques répercussions que pourrait susciter
l'adoption de tel ou tel amendement.
Quant à l'amendement n° 311 rectifié, qui plafonne l'indemnité de l'élu
municipal cumulant plusieurs mandats à une fois et demie le montant de
l'indemnité parlemantaire selon le droit en vigueur, il en revient
essentiellement aux dispositions actuellement en vigueur du code général des
collectivités territoriales...
M. Michel Mercier.
Cela ne change rien, en effet.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
... sous la réserve d'une redaction un peu différente.
Compte tenu de la très grande analogie entre les dispositions du code général
des collectivités territoriales et le libellé de cet amendement rectifié, je
pense que vous avez en grande partie satisfaction.
Après avoir entendu ces arguments, chacun d'entre vous comprendra, mes chers
collègues, combien il serait difficile, pour la commission des lois, d'émettre
un avis favorable en cet instant, surtout sur l'amendement n° 308.
Je vous le redis, monsieur Vasselle, vous avez eu raison de poser le problème.
Mais vous savez bien qu'en France le moment est rarement le bon pour procéder à
des réformes, à des changements qui, psychologiquement, dans l'opinion ne
seraient pas nécessairement perçus d'une manière positive.
(Sourires. - M.
Mercier applaudit.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Le Gouvernement n'est pas loin de partager les
réserves émises par M. le rapporteur mais, en tant que ministre - je ne suis
pas sénateur ! - ...
M. Patrick Lassourd.
Cela viendra !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
... j'en dirai un peu plus.
L'amendement n° 311 rectifié a pour objet d'augmenter le plafond du cumul des
indemnités de fonction qu'un élu local peut percevoir pour l'ensemble de ses
mandats, le plafond étant fixé à une fois et demie le montant net de
l'indemnité parlementaire.
Cet amendement soulève des difficultés juridiques et de principe. Si l'objet
de l'amendement est de permettre aux seuls élus locaux qui sont également des
parlementaires de déduire leurs cotisations sociales de leur indemnité de
député ou de sénateur, ce n'est pas le code général des collectivités
territoriales qu'il faut modifier, mais l'ordonnance du 13 décembre 1958
portant loi organique relative à l'indemnité des membres du Parlement.
De plus, cet amendement ne concerne que les élus municipaux. Son adoption
aboutirait donc à fixer des règles de plafonnement différentes alors que, par
définition, le plafond qui s'applique à l'ensemble des mandats locaux ne peut
être différent selon la catégorie du mandat exercé.
En tout état de cause, et sur le principe, l'amendement n° 311 rectifié
conduirait à relever le montant total des indemnités que les élus locaux
peuvent percevoir. Or, si le projet de loi relatif à la démocratie de proximité
vise à améliorer les conditions matérielles d'exercice des mandats locaux, il
ne doit pas placer leurs titulaires dans une situation que nos concitoyens ne
comprendraient pas.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de l'amendement n°
311 rectifié comme celui de l'amendement n° 308. Dans le cas contraire, le
Gouvernement demandera leur rejet.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 308.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
En déposant ces amendements, j'avais bien conscience que leur rédaction
n'était pas totalement satisfaisante puisqu'ils ne visaient que les élus
locaux. Il eût fallu, idéalement, modifier l'ordonnance à laquelle vous avez
fait référence. Mais, dans le cadre de ce texte, je ne pouvais déposer un
amendement tendant à modifier une ordonnance, qui plus est portant loi
organique et concernant les parlementaires, les députés comme les sénateurs.
Cela étant, comme l'a bien compris M. le rapporteur, ce sont des amendements
d'appel au Gouvernement pour que nous tirions les conséquences et les
enseignements du vote des textes précédents, notamment de la loi relative à la
limitation du cumul des mandats électoraux et des fonctions et à leurs
conditions d'exercice.
L'amendement n° 308 est certes bancal, puisqu'il ne permet effectivement pas
de régler dans sa globalité la situation des élus, des élus nationaux,
régionaux, départementaux et municipaux. Il n'avait d'ailleurs pas vocation à
être maintenu. Il visait simplement à poser le problème.
J'ai pourtant du mal à accepter que l'on dise, parce que je l'entends
évidemment dans des conversations privées ou ailleurs, que nos concitoyens ne
sont pas du tout prêts à accepter une revalorisation de l'indemnité des
élus.
Ma proposition a un caractère provocateur parce qu'elle vise à établir une
cohérence avec la loi sur le cumul des mandats. Il n'en demeure pas moins qu'il
faut avoir le courage d'expliquer à nos concitoyens que cette démocratie a un
coût.
Nos concitoyens ne peuvent pas descendre dans la rue pour demander une
revalorisation salariale, certes tout à fait légitime au regard d'une évolution
de la croissance, et, dans le même temps, refuser une revalorisation du montant
des indemnités des élus.
En tant qu'élus nous avons fait le choix d'abandonner notre vie
professionnelle pour nous consacrer à la vie élective, avec toutes les
responsabilités que cela implique. Allez demander leur avis aux maires qui ont
été mis en examen, qui ont été placés en garde à vue, qui ont rencontré des
difficultés et qui, chaque jour, se demandent ce que demain sera. Allez
demander ce qu'en pensent ces maires qui, eu égard à la complexité du
dispositif législatif, ne sont jamais à l'abri d'un faux pas, tout en étant de
bonne foi et qui mettent tout en oeuvre pour défendre les intérêts locaux, ces
maires de petites communes qui continuent à faire du quasi-bénévolat, qui ne
voient pas leurs indemnités augmenter d'une manière significative.
Le problème que j'évoque ne vise pas une catégorie d'élus plutôt qu'une autre.
Il s'agit d'un problème général. Cela dit, je retire l'amendement n° 308.
M. le président.
L'amendement n° 308 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 311 rectifié.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Selon M. le rapporteur, l'amendement n° 311 rectifié serait satisfait par les
dispositions actuelles du code général des collectivités territoriales. Je n'en
suis pas persuadé, c'est une question d'interprétation.
Cet amendement vise en effet à ce que le cumul des indemnités des élus ne
dépasse pas une fois et demie le montant net des indemnités parlementaires et
non du montant brut des indemnités, déduction faite des cotisations
sociales.
Je n'ai pas le sentiment que la totalité des cotisations acquittées par les
élus locaux soit prise en compte. Il y a les cotisations sociales obligatoires,
les cotisations de retraite complémentaire et bien d'autres cotisations. Je
pense que, dans le calcul du plafond, seule la déduction des cotisations
sociales obligatoires est prise en compte.
Dans mon amendement, j'ai donc proposé comme référence le montant de
l'indemnité nette, déduction faite de toutes les cotisations. Tel était l'objet
de mon amendement, mais il semble se heurter à une autre difficulté, puisque,
si j'ai bien compris, M. le ministre a indiqué qu'il ne viserait que les élus
municipaux et non l'ensemble des élus.
Si l'on considère que cette proposition est fondée, je souhaiterais que l'on
mette à profit le délai qui va s'écouler entre aujourd'hui et la fin de
l'examen du texte ou la réunion de la commission mixte paritaire, pour que l'on
trouve une rédaction qui permette de prendre en compte la situation de tous les
élus, qu'ils soient nationaux ou locaux.
Enfin, pour rassurer complètement ceux qui pourraient avoir quelques états
d'âme sur le risque que l'opinion publique n'accepte pas une revalorisation,
j'ajouterai qu'aujourd'hui les élus sont traités comme n'importe quel citoyen
au regard de la fiscalité.
Il n'y a pas de raison d'avoir des états d'âme quant à une revalorisation
éventuelle des indemnités, d'autant plus que ma proposition ne va pas jouer sur
des milliards de francs. A mon avis, elle est donc tout à fait acceptable par
l'opinion publique.
Elle permettrait toutefois à l'ensemble des élus de voir leur situation
légèrement améliorée par rapport à ce qu'elle est aujourd'hui.
Je suis prêt à retirer l'amendement n° 311 rectifié, mais je souhaiterais,
monsieur le rapporteur, que vous preniez l'engagement d'étudier une rédaction
qui puisse répondre à notre attente, d'autant qu'elle serait très proche de la
rédaction actuelle du code.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
J'apporte une réponse affirmative à M. Vasselle !
M. le président.
L'amendement n° 311 rectifié est retiré.
Article 26