SEANCE DU 8 OCTOBRE 2002


M. le président. La parole est à M. Philippe Marini, auteur de la question n° 30, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question fait écho aux problèmes que rencontre de façon persistante l'Etat actionnaire.
Dans un monde que nous savons semé d'incertitudes, c'est très soucieux que nous observons l'évolution de la situation financière de certains grands groupes publics, tout particulièrement Electricité de France.
Le président de ce groupe a récemment été auditionné par nos collègues de la commission des finances de l'Assemblée nationale. Or, bien que j'aie étudié avec la plus grande attention les réponses qu'il a, postérieurement à la rédaction de ma question, fournies à nos collègues, je n'y ai pas trouvé tous les éléments d'information que, à un moment ou à un autre, il faudra bien communiquer au Parlement pour que celui-ci soit en mesure d'assumer les responsabilités qui sont les siennes en la matière : nous devons, pour ce faire, avoir une vision précise de l'évolution du patrimoine public et des risques que cette évolution recèle.
Dans ma question, telle que je l'avais rédigée à l'origine, j'interrogeais en particulier M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur certains aspects liés aux participations internationales d'Electricité de France et, de façon encore plus spécifique, sur les engagements qui, à en croire certaines informations de presse, auraient été pris à l'égard de partenaires dans le cadre de l'acquisition d'une fraction du capital de l'ensemble Italenergia-Montedison. Si de tels engagements hors bilan existent, ils devront bien entendu apparaître aussi dans les documents d'information publics d'Electricité de France.
Cette interrogation me parassait singulièrement justifiée au regard de la transparence qu'exigent aujourd'hui de plus en plus les marchés, les investisseurs et l'opinion publique. Car l'opinion publique sera bien un paramètre essentiel lorsqu'il faudra prendre des décisions stratégiques afin d'accompagner le développement, voire le redéploiement de cette très grande entreprise nationale qu'est Electricité de France.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le sénateur, vos légitimes inquiétudes s'inscrivant dans un contexte international marqué par des faillites importantes, touchant en particulier de grands groupes du secteur énergétique, comme Enron, aux Etats-Unis.
Il ne m'appartient évidemment pas d'apprécier la qualité des réponses que M. le président d'EDF a fournies à vos collègues de l'Assemblée nationale. Je dirai seulement que l'information financière et les documents publics diffusés par EDF me paraissent de bonne qualité.
Des progrès dans ce domaine sont, bien entendu, toujours possibles et souhaitables, notamment en allant dans le sens d'un plus grand degré de détail quant aux informations fournies dans l'annexe des comptes. Ces améliorations iront d'ailleurs de pair avec l'évolution de l'entreprise et l'ouverture de son capital.
Les pouvoirs publics sont naturellement très attentifs à la qualité et à l'exhaustivité des informations financières fournies par l'entreprise, en particulier quant aux engagements hors bilan, et ils veillent à leur amélioration.
En ce qui concerne la dégradation en 2001 du résultat courant social d'EDF international, c'est-à-dire avant impôt et résultat exceptionnel, celle-ci résulte essentiellement d'événements exceptionnels survenus en Amérique latine.
Au Brésil, la crise de change, conjuguée à une période de rationnement de la consommation électrique, a contraint EDF à passer en 2001 une provision de 900 millions d'euros pour dépréciation des titres.
Parallèlement, la grave crise économique et financière que connaît actuellement l'Argentine a fortement affecté les industries locales dont l'endettement était en devises. EDF, présent de manière significative, notamment avec sa filiale Edenor, a été conduit, comme la plupart des autres groupes présents en Argentine, à passer des provisions significatives pour dépréciation afin de tenir compte de la situation économique et financière du pays. La provision pour dépréciation des titres de participation Edenor s'est élevée en 2001 à 217 millions d'euros.
Ces deux postes expliquent à eux seuls la perte d'EDF international, que nous déplorons autant que vous, monsieur le sénateur.
Enfin, en ce qui concerne les prévisions pour 2002 et 2003, le Gouvernement est évidemment disposé à ce qu'un point précis soit fait devant les commissions des finances des deux assemblées dès que les informations nécessaires à cet effet seront disponibles et suffisamment fiables.
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. Je vous remercie, madame la ministre, de la réponse très précise que vous m'avez apportée. Elle témoigne de la grande vigilance du Gouvernement ainsi que de celle de vos services à l'égard de la situation financière et patrimoniale d'EDF.
J'ai été très sensible à l'intention que vous avez affirmée en conclusion de permettre aux commissions des finances des deux assemblées de jouer pleinement leur rôle. Pour ce qui concerne la commission des finances du Sénat, je puis vous assurer qu'elle sera amenée, dans les semaines qui viennent, à demander des informations de manière à être bien éclairée sur cette question particulièrement complexe.
Il y va de la connaissance des risques et des atouts du patrimoine public. Il y va aussi de la connaissance des procédures selon lesquelles l'Etat actionnaire est en mesure d'assumer ses missions. Il y va enfin, tout simplement, de la stratégie d'une très grande entreprise française qui est un champion mondial et qui doit, comme toutes les autres entreprises de cette taille, sur un océan tumultueux, naviguer au milieu des périls.
La commission des finances du Sénat sera donc attentive à l'évolution de ce dossier, mais elle ne souhaite à aucun prix prendre des initiatives de nature à brider une entreprise qui doit demeurer réactive et prendre toutes les décisions qu'imposent les évolutions du marché.
Dès lors que le secteur public continue de représenter une part significative de l'économie nationale, il est à nos yeux essentiel de faire en sorte que l'opinion publique bénéficie de toutes les informations auxquelles elle a droit en la matière.

AVENIR DES CENTRES DE TRI DU COURRIER