SEANCE DU 15 OCTOBRE 2002


SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Candidatures à des organismes extraparlementaires (p. 1 ).

3. Dépôt d'un rapport en application d'une loi (p. 2 ).

4. Mandats sociaux. - Adoption d'une proposition de loi (p. 3 ).
Discussion générale : MM. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice ; Jean-Jacques Hyest, rapporteur de la commission des lois ; Simon Sutour, Philippe Marini, Robert Bret.
M. le secrétaire d'Etat.
Clôture de la discussion générale.

Articles 1er, 1er bis , 2 et 2 bis. - Adoption (p. 4 )

Articles additionnels après l'article 2 bis (p. 5 )

Amendements n°s 1 et 2 de M. Philippe Marini. - Retrait des deux amendements.

Article 3. - Adoption (p. 6 )
Vote sur l'ensemble

MM. Robert Bret, le rapporteur.
Adoption de la proposition de loi.
M. le secrétaire d'Etat.

5. Nomination de membres d'organismesextraparlementaires (p. 7 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 8 )

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

6. Attentat dans l'île de Bali (p. 9 ).

7. Hommage à une fonctionnaire du Sénat (p. 10 ).

8. Souhaits de bienvenue à une délégation du parlement de Louisiane (p. 11 ).

9. Conférence des présidents (p. 12 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 13 )

PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON

10. Commission d'enquête sur le groupe Vivendi Universal. - Demande de discussion immédiate d'une proposition de résolution (p. 14 ).

11. Démission de membres de commissions et candidatures (p. 15 ).

12. Marchés énergétiques. - Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 16 ).
Discussion générale : Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie ; MM. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques ; Bernard Fournier, Bernard Joly, Henri Revol, Daniel Raoul, Pierre Hérisson, Yves Coquelle.

PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL

MM. Gérard Delfau, Xavier Pintat, Pierre-Yvon Trémel, Paul Loridant, Jean Besson.
Mme la ministre déléguée, M. Gérard Delfau.
Clôture de la discussion générale.

13. Saisine du Conseil constitutionnel (p. 17 ).

14. Nomination de membres de commissions (p. 18 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 19 )

15. Marchés énergétiques. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 20 ).

Question préalable (p. 21 )

Motion n° 124 de Mme Marie-France Beaufils. - Mme Marie-France Beaufils, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie ; M. Daniel Raoul. - Rejet par scrutin public.

Intitulé du projet de loi (priorité) (p. 22 )

Amendements n°s 146 de M. Yves Coquelle, 233 de M. Daniel Raoul et 102 de la commission. - MM. Yves Coquelle, Daniel Raoul, le rapporteur, Mmes la ministre déléguée, Marie-France Beaufils. - Rejet des amendements n°s 146 et 233 ; adoption de l'amendement n° 102 modifiant l'intitulé.

Article additionnel avant le titre Ier (p. 23 )

Amendement n° 147 de M. Yves Coquelle. - MM. Yves Coquelle, le rapporteur, Mme la ministre déléguée. - Rejet.

Article 1er (p. 24 )

Amendement n° 1 de la commission. - M. le rapporteur, Mme la ministre déléguée, MM. Yves Coquelle, Daniel Raoul. - Adoption.
Amendement n° 2 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme la ministre déléguée, M. Daniel Raoul. - Adoption.
Amendements n°s 3 de la commission et 212 de M. Daniel Raoul. - MM. le rapporteur, Pierre-Yvon Trémel, Mme la ministre déléguée. - Retrait de l'amendement n° 212 ; adoption de l'amendement n° 3.
Amendement n° 148 de M. Yves Coquelle. - MM. Gérard Le Cam, le rapporteur, Mme la ministre déléguée. - Rejet.
Adoption de l'article modifié.

Article 2 (p. 25 )

Amendements n°s 213 de M. Daniel Raoul, 4 à 6, 7 rectifié, 8 à 12 rectifié de la commission, 173 à 175, 176 rectifié, 177, 178 de M. Yves Coquelle, 150, 151 de M. Henri Revol, 14 rectifié de la commission et sous-amendement n° 152 de M. Henri Revol ; amendement n° 15 de la commission. - MM. Daniel Raoul, le rapporteur, Yves Coquelle, Henri Revol, Mmes Odette Terrade, Marie-France Beaufils, MM. Gérard Le Cam, Mme la ministre déléguée, M. Pierre-Yvon Trémel. - Retrait du sous-amendement n° 152 ; rejet des amendements n°s 213, 173, 174, 176 rectifié, 177, 151, 178 et 246 ; adoption des amendements n°s 4, 150, 5, 6, 7 rectifié, 8 à 10, 11, 12 rectifié, 14 rectifié et 15, les amendements n°s 175 et 247 devenant sans objet.

Article 3 (p. 26 )

Amendement n° 16 de la commission. - M. le rapporteur, Mme la ministre déléguée. - Retrait.
Amendements n°s 17 et 18 de la commission. - M. le rapporteur, Mme la ministre déléguée. - Adoption des deux amendements.
Amendements n°s 179 à 181 de M. Yves Coquelle. - MM. Yves Coquelle, le rapporteur, Mme la ministre déléguée. - Rejet des trois amendements.
Amendement n° 19 de la commission. - M. le rapporteur, Mme la ministre déléguée. - Adoption.
Amendements n°s 182 de M. Yves Coquelle, 214 de M. Daniel Raoul, 20 de la commission ; amendements identiques n°s 107 de M. Xavier Pintat, 158 rectifié bis de M. Jean-Paul Amoudry et 215 rectifié de M. Jean Besson ; amendements n°s 21 à 28 de la commission. - MM. Gérard Le Cam, Pierre-Yvon Trémel, le rapporteur, Xavier Pintat, Jean-Paul Amoudry, Jean Besson, Mme la ministre déléguée. - Rejet des amendements n°s 182 et 214 ; adoption des amendements n°s 20, 107, 158 rectifié bis , 215 rectifié et 21 à 28.
M. le rapporteur.
Adoption de l'article modifié.
Renvoi de la suite de la discussion.

16. Commission d'enquête sur le groupe Vivendi Universal. - Rejet de la demande de discussion immédiate d'une proposition de résolution (p. 27 ).
MM. Jack Ralite, auteur de la demande ; Claude Belot, Jean Arthuis, président de la commission des finances.
La discussion immédiate n'est pas ordonnée.

17. Communication relative à des textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 28 ).

18. Dépôt d'une question orale avec débat (p. 29 ).

19. Transmission d'un projet de loi (p. 30 ).

20. Dépôt de propositions de loi (p. 31 ).

21. Ordre du jour (p. 32 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

CANDIDATURES À DES ORGANISMES
EXTRAPARLEMENTAIRES

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation des sénateurs appelés à siéger au sein de trois organismes extraparlementaires.
La commission des affaires économiques a fait connaître qu'elle propose les candidatures :
- de M. Yves Détraigne pour siéger au comité consultatif pour la gestion du fonds national pour le développement des adductions d'eau ;
- de M. Pierre Hérisson pour siéger au Conseil national de l'habitat ;
- de M. Jean-Paul Alduy pour siéger au conseil d'administration de la Cité des sciences et de l'industrie.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition, à l'expiration du délai d'une heure.

3

DÉPÔT D'UN RAPPORT EN APPLICATION D'UNE LOI

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre le rapport annuel pour 2001 du fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, établi en application de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.4

MANDATS SOCIAUX

Adoption d'une proposition de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi (n° 7, 2002-2003), adoptée par l'Assemblée nationale, modifiant certaines dispositions du code de commerce relatives aux mandats sociaux. [Rapport n° 13 (2002-2003).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Je voudrais tout d'abord vous remercier, monsieur le rapporteur, de la présentation très claire du texte de la proposition de loi qui est aujourd'hui soumise à discussion. A travers vous, je souhaite saluer le travail remarquable effectué par la commission des lois, qui a su apporter tous les éclaircissements utiles pour la qualité de nos débats sur un sujet d'une très grande technicité. Que son président soit également remercié de la promptitude du travail effectué.
J'ai bien conscience qu'il n'est pas satisfaisant de travailler dans l'urgence. J'aurais désiré que nous puissions, sur un sujet de cet ordre qui remet en cause une législation certes ô combien problématique, mais dans un contexte difficile, prendre davantage de recul. Mais, après y avoir bien réfléchi, je crois sincèrement que la proposition de loi du député Philippe Houillon était bienvenue. Je devrais même dire que c'était la seule réponse possible face à une échéance aussi proche que celle du 15 novembre. A cette date, les administrateurs et dirigeants qui auraient gardé un mandat en méconnaissance des dispositions de la loi relative aux nouvelles régulations économiques, la loi NRE, auraient été, aux termes de l'article 131 de ladite loi, réputés démissionnaires de l'ensemble de leurs mandats.
Le risque ne peut être couru d'introduire de tels dysfonctionnements dans la gestion des entreprises. Je pense, en particulier, aux PME, où les substitutions de personnes sont difficiles à mettre en place.
Je ne pense pas non plus qu'un report global dans le temps de l'ensemble des dispositions sur le cumul des mandats aurait constitué une solution satisfaisante. Cela aurait pu être perçu comme traduisant la volonté du Gouvernement de ne pas s'engager dans la voie de la réduction des cumuls des mandats, ce qui n'est nullement son intention. Par ailleurs, cela aurait suscité des demandes reconventionnelles pour des reports d'entrée en vigueur d'autres parties de la loi. Les débats à l'Assemblée nationale ont été, à cet égard, révélateurs.
La voie choisie me paraît donc la bonne, d'autant que le Gouvernement s'est parallèlement engagé dans une réforme d'ampleur sur la sécurité financière des marchés.
Le ralentissement de la croissance économique, la faillite retentissante aux Etats-Unis de certains grands groupes, le marché français qui, lui-même, n'a pas été épargné, démontrent la nécessité d'adopter un ensemble de règles sur le gouvernement d'entreprise et le contrôle légal des comptes. (M. le rapporteur approuve.)
Il s'agit d'attaquer le problème de front et non pas au travers de voies détournées et au moyen de règles parcellaires et rigides, comme l'a fait la loi NRE.
Le projet de loi sur la sécurité financière, préparé en étroite collaboration avec la Chancellerie par le ministère des finances, comportera, outre l'institution d'une nouvelle autorité de régulation puissante et efficace, des dispositions que le garde des sceaux présentera sur l'administration des sociétés et leur commissariat aux comptes, afin, notamment, de restaurer la confiance des investisseurs. Ce texte sera déposé au Parlement d'ici à la fin de l'année.
Vous savez, en outre, que des travaux seront menés sur la réforme du droit des sociétés.
La présente proposition de loi se situe sur un tout autre registre ; il s'agit d'une réponse pragmatique à un problème ponctuel : comment franchir une échéance prochaine sans risquer d'être contre-performant pour nos entreprises ?
A un moment où le Gouvernement s'attache à faciliter la création d'entreprise, où le Premier ministre manifeste son attachement à une France novatrice - il a présenté, le 7 octobre dernier, avec le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, un projet de loi intitulé « Agir pour l'initiative économique » - il eût été paradoxal de maintenir telles quelles des règles qui, à l'évidence, sont autant d'obstacles dogmatiques et artificiels à la gestion des sociétés et qui, ainsi que vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur, méconnaissent les réalités économiques.
La réalité économique, c'est d'abord ne pas priver les PME de dirigeants compétents en interdisant le cumul des mandats de direction hors groupe. Mais c'est aussi favoriser la gestion de groupes, y compris cotés, en facilitant un meilleur contrôle, par le biais de dirigeants communs, des sociétés mères sur leurs filiales.
La loi NRE a, par principe, écarté ces objections. Avec la proposition de loi que vous examinez aujourd'hui, nous vous invitons à suivre une voie plus mesurée.
Il ne s'agit pas de remettre en question le principe même des limitations de cumuls de mandats. Ce principe est en effet en parfaite adéquation avec le gouvernement d'entreprise, qui repose sur une plus grande responsabilisation des organes de direction et de contrôle de la société et, par conséquent, sur une meilleure disponibilité de ces organes. Cependant, les sociétés doivent pouvoir bénéficier de souplesse dans leur administration et leur gestion, pour répondre tant à la compétitivité interne qu'aux défis de l'internationalisation des marchés.
Mais il est un autre écueil de la loi NRE qui implique des corrections législatives sans tarder : il s'agit - vous l'avez fort bien souligné monsieur le rapporteur - de sa rédaction complexe et ambiguë.
Le domaine économique, pas plus qu'un autre et sans doute moins qu'un autre, ne peut se satisfaire de l'approximation juridique. Il y va de la sécurité des milieux professionnels et par là même, bien sûr, des actionnaires et de tous ceux qui sont, de près ou de loin, liés à l'entreprise. C'est l'entreprise qui fonde la prospérité d'une nation, d'un peuple.
Or le constat est unanime : les dispositions sur le cumul des mandats génèrent des interprétations diverses et des perplexités certaines. Tout milite donc en faveur d'un certain nombre d'aménagements, que je souhaite maintenant aborder.
La loi NRE du 15 mai 2001 avait tout d'abord introduit - vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur - des limitations spécifiques à chaque fonction.
C'est ainsi que le nombre de mandats d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance de société anonyme pouvant être détenus par une personne avait été fixé à cinq, sous réserve de la possibilité de détenir un mandat supplémentaire dans toutes les sociétés non cotées contrôlées par la société dans laquelle est exercé le premier mandat.
S'agissant du nombre de mandats de directeur général, de membre du directoire ou de directeur général unique que peut détenir une même personne, il avait été fixé à un, avec la faculté d'en détenir un second de même nature lorsque celui-ci est exercé dans une société non cotée contrôlée par la société dans laquelle est exercé le premier mandat.
La proposition de loi crée, tout d'abord, des dérogations supplémentaires dans les groupes de sociétés, dérogations qui sont de trois ordres.
En premier lieu, la proposition de loi étend au bénéfice des sociétés cotées les dérogations permises par la loi du 15 mai 2001, mais réservées aux seules sociétés non cotées, rejoignant en cela la position qu'avait adoptée le Sénat lors de la discussion de ce texte. (M. le rapporteur approuve.) La logique de gestion de groupes déborde, en effet, le clivage posé par la loi NRE.
Cette dérogation joue aussi bien pour les administrateurs que pour les membres de conseil de surveillance et, sur ce point, la proposition de loi lève une ambiguïté.
En deuxième lieu, à la faveur d'un amendement introduit lors du débat à l'Assemblée nationale, la proposition de loi institue une dérogation supplémentaire pour les administrateurs ou les membres de conseils de surveillance qui détiendraient des mandats de cette nature dans des sociétés « soeurs », à la condition toutefois que ces sociétés ne soient pas cotées. Le texte prévoit que cinq mandats pourront être détenus dans de telles sociétés tout en étant comptabilisés pour un seul.
Ce mécanisme dérogatoire dit du « râteau » tend ainsi à appréhender les groupes à structure horizontale. Le parallèle ainsi posé entre ce type de structures et les groupes à organisation verticale ne suscite pas en lui-même de critiques majeures. Il y a, dans les deux cas, la même logique d'une certaine souplesse de gestion des groupes.
Mais il est vrai que l'amendement ainsi adopté procède, par l'élargissement qu'il implique, d'une philosophie qui n'était pas celle de la proposition de loi initiale. Je m'en étais donc remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.
Concrètement, une même personne pourra, en effet, détenir quatre mandats dans des sociétés, qu'elles appartiennent ou non à un même groupe, un nombre non limité de mandats dans leurs filiales, cotées ou non cotées, ainsi que cinq mandats dans des sociétés soeurs non cotées.
Compte tenu de cet élargissement, il n'est toutefois pas apparu opportun à l'Assemblée nationale de permettre des mandats croisés dans des sociétés soeurs.
En définitive, et tout en partageant votre analyse nuancée, monsieur le rapporteur, je crois qu'il est possible de se rallier à ce dispositif, dont l'application devrait au demeurant rester très limitée.
En troisième lieu, le texte qui est soumis à votre vote assouplit les dérogations aux limitations des cumuls de mandats de direction. Plus précisément, il permet à un directeur général d'exercer un autre mandat de directeur général dans une société contrôlée, que celle-ci soit cotée ou non.
Il élargit, dans le même temps, les possibilités de dérogation en faveur d'un mandat qui n'est pas de même nature que le premier exercé. C'est le cas du directeur général qui pourra exercer soit un autre mandat de même nature, soit un autre mandat de membre de directoire ou de directeur général. Il en sera de même pour les membres des directoires qui souhaiteront détenir un autre mandat en tant que directeur général.
Nous nous trouvons toujours dans la même logique d'une gestion mieux contrôlée des groupes.
Ensuite, la proposition de loi tempère la stricte limitation du cumul des mandats de directeur général exercés dans des sociétés sans liens capitalistiques entre elles.
Le texte permet ainsi l'exercice de deux mandats de directeur général ou de membre de directoire ou de directeur général unique dans deux sociétés, en dehors de toute hypothèse de contrôle, dès lors qu'elles ne sont pas cotées. Il s'agit là très clairement de favoriser la direction des petites et moyennes entreprises.
Je rapprocherai de ces dispositions tout à fait pertinentes celles qui ont été introduites, par voie d'amendements, par l'Assemblée nationale et qui sont relatives à certaines sociétés aux particularismes marqués qui, bien qu'agissant sous la forme de sociétés anonymes, répondent à des logiques autres que purement commerciales.
L'économie du dispositif est de répondre au souci d'efficacité de certains secteurs professionnels obéissant à des organisations spécifiques.
Sont concernés les sociétés d'économie mixte dans lesquelles les mandats de gestion ou de direction sont détenus par un représentant d'une collectivité territoriale, les sociétés d'assurance mutuelle qui ont des sociétés anonymes comme filiales, ainsi que les établissements de crédit mutualistes et coopératifs.
La proposition de loi instaure, pour ces sociétés, des régimes dérogatoires aux règles de limitation du cumul des mandats.
Siègent, en effet, au sein de ces sociétés, des mandataires dont la mission est de représenter des organes extérieurs à la société ou de refléter les intérêts d'un groupe économique au statut mixte.
Les limitations actuelles sont, par conséquent, inadaptées.
Enfin, pour satisfaire un même objectif de cohérence, la proposition de loi harmonise le droit commercial et le code monétaire et financier en ce qui concerne l'organisation des SICAV.
Sur tous ces sujets, monsieur le rapporteur, vous avez manifesté votre accord et j'adhère à votre point de vue.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je terminerai en rappelant que le texte que vous examinez aujourd'hui, au-delà des aménagements nécessaires sur lesquels je viens de m'exprimer, procède à une heureuse clarification d'un certain nombre de dispositions sur le cumul des mandats qui ont donné lieu à des interprétations encore divergentes à ce jour.
La clarification porte notamment sur le cas de l'administrateur d'une société qui se voit confier la direction générale : la question s'est posée de savoir si ce cumul était comptabilisé comme deux mandats. La proposition de loi prévoit expressément que, dans ce cas, l'administrateur n'exerce qu'un seul mandat pour le décompte au titre du cumul.
Certes, j'en ai conscience comme vous, monsieur le rapporteur, le dispositif comporte encore certaines imperfections techniques, que vous avez d'ailleurs analysées avec la compétence que chacun vous reconnaît.
Notre seule excuse sera de vouloir apporter aux entreprises la réponse rapide qu'elles attendent : nous ne pouvons pas les décevoir.
C'est donc après vous avoir renouvelé mes remerciements, monsieur le rapporteur, à vous ainsi qu'à la commission des lois et à son président, que je demande à la Haute Assemblée d'adopter ce texte dans ses limites actuelles, sachant que le Gouvernement partage les préoccupations de l'auteur de la proposition de loi et qu'il est conscient de l'urgence qui s'attache à la mise en oeuvre de ce dispositif. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.) M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, certains feront sans doute mine de s'étonner de l'inscription à notre ordre du jour de cette proposition de loi, oubliant que nous avions mis en garde le gouvernement précédent et insisté sur le caractère impraticable de certaines dispositions de la loi dite NRE.
Ce texte, faut-il le rappeler, a été enfanté dans la douleur ; chacun se souvient des débats auxquels il a donné lieu à l'Assemblée nationale. Comme le notait, dans un récent rapport, la chambre de commerce et d'industrie de Paris, les règles applicables en matière de cumul des mandats sociaux, détaillées à l'extrême, ont fait l'objet de nombreux amendements et s'en trouvent si mal rédigées qu'il faut se référer aux travaux parlementaires pour tenter d'en appréhender la portée exacte. Mais peut-être faudra-t-il procéder de même pour la présente proposition de loi ! (Sourires.)
Toujours est-il que, face à des interprétations doctrinales divergentes, la Chancellerie a dû, à plusieurs reprises, préciser la portée de certaines dispositions, notamment du fait de l'articulation du nouvel article L. 225-94-1, qui fixe une limitation globale du nombre des mandats sociaux, avec les dispositions de la loi NRE prévoyant la dissociation des fonctions de président et de directeur général dans les sociétés anonymes à conseil d'administration. C'est dire l'urgence de ce correctif qui, contrairement à ce qui est dit parfois, ne remet pas en cause le principe de limitation du cumul des mandats, mais tient compte de la réalité du fonctionnement des sociétés, notamment de celles qui sont organisées en groupe. Je l'avais d'ailleurs proposé à l'époque, et je vous renvoie au rapport pour avis déposé le 5 octobre 2000, qui péconisait d'assouplir « les règles applicables en matière de cumul des mandats sociaux afin de prendre en considération les nécessités économiques résultant de l'existence de groupes ».
La présente proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale dès le premier jour de la nouvelle session. Compte tenu du délai de dix-huit mois imparti par la loi pour se mettre en conformité, il est urgent de corriger les imperfections qui se sont révélées source de graves incertitudes, d'autant que les mandataires sociaux, comme vous l'avez rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, se verraient déclarer démissionnaires de tous leurs mandats à défaut de modification de la législation avant le 16 novembre.
Certes, on pourra objecter que les sociétés n'ont pas attendu aujourd'hui pour s'organiser, comme le prouve un recours accru aux sociétés anonymes simplifiées, souvent sur le conseil d'excellents praticiens. En effet, ces sociétés anonymes simplifiées ne comportent aucune règle en matière de cumul, ce qui est très intéressant. Mais est-ce bien légiférer que d'adopter un dispositif si restrictif et si inapplicable qu'il aura pour seul effet de conduire les entreprises à le contourner ? Non, à l'évidence.
C'est pourquoi cette proposition de loi me paraît utile et pertinente. En effet, elle procède à un certain nombre de clarifications contribuant à restaurer la sécurité juridique en matière de réglementation du cumul des mandats dans les sociétés anonymes.
Elle est d'abord une réponse aux difficultés d'interprétation et aux incohérences grevant le dispositif actuel.
Comme je l'ai déjà indiqué, la mauvaise articulation entre les nouvelles dispositions régissant le cumul des mandats et celles qui prévoient la dissociation des fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général est une première ambiguïté qu'il convient de lever. Comme l'a précisé la Chancellerie, en cas de dissociation, les mandats d'administrateur et de directeur général doivent être comptés pour un seul. Cette précision doit être inscrite dans la loi.
La seconde ambiguïté qu'il convient de lever réside dans l'impossibilité des dérogations croisées en vue de faciliter la représentation au sein des groupes. En effet, il y a lieu de permettre qu'un second mandat détenu dans une société contrôlée par une personne physique exerçant un mandat de directeur général dans la société mère puisse être un mandat de directeur général unique ou de membre du directoire, et inversement.
Enfin, la proposition de loi vise à éliminer l'incohérence consistant à interdire au président du conseil d'administration de bénéficier de la dérogation de groupe, alors qu'il n'assume plus la direction générale de la société.
Le deuxième volet de la proposition de loi traite de l'assouplissement des règles de cumul pour tenir compte des réalités économiques. C'est ainsi que le texte étend aux sociétés cotées la dérogation de groupe. C'était, du reste, la position du Sénat, le fait, pour une société, d'être cotée ou non n'ayant aucune incidence réelle ; en fin de compte, c'est une fiction, raison pour laquelle il y a lieu de lever cette restriction.
En outre, le texte autorise le titulaire d'un mandat de direction à exercer un autre mandat de cette nature dans une autre société, sous réserve qu'aucune de ces sociétés ne soit cotée. Il s'agit ici de permettre l'organisation de synergies entre sociétés intervenant dans des domaines d'activité voisins ou complémentaires. Ces dispositions s'adressent plus particulièrement aux dirigeants des petites et moyennes entreprises qui, comme chacun le sait, font la richesse économique de la France.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez souligné l'extension du dispositif, par amendement, aux sociétés dites en râteau, ce qui assouplit les règles de cumul des mandats sociaux, un mandat comptant pour cinq dans la limite de cinq. Si cette nouvelle dérogation peut, dans son principe, paraître énorme, elle n'aura cependant pas une portée considérable dans les faits. Ainsi qu'un certain nombre de responsables de groupes dotés de nombreuses sociétés filiales nous l'ont fait savoir, il serait bientôt impossible de trouver des administrateurs si l'on n'admettait pas cette nouvelle dérogation ; je crois que cette dernière est acceptable, même si, c'est vrai, elle va au-delà de la philosophie de la proposition de loi et de la position que le Sénat avait adoptée lors de la discussion de la loi NRE.
Enfin, comme vous l'avez rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, outre ces assouplissements, la proposition de loi instaure de nouvelles exceptions au profit de secteurs pour lesquels la réglementation sur le cumul des mandats constitue un lourd handicap.
Sont ici visées, bien sûr, d'abord les SICAV, la proposition de loi adaptant une exception prévue dans le code monétaire et financier, à la suite d'observations formulées par la Commission des opérations de bourse. Il s'agit aussi des sociétés d'économie mixte, ce qui paraît normal, puisque, à défaut - les mandats étant, de surcroît, souvent gratuits - les collectivités locales auraient bien du mal à trouver des candidats pou siéger dans les sociétés d'économie-mixte ! Il s'agit, enfin des sociétés d'assurance mutuelle et des établissements de crédit mutualiste à organe central.
Ces difficultés n'avaient pas été prévues lors de l'élaboration de la loi NRE, et ce n'est qu'à la pratique que l'on s'est rendu compte des problèmes rencontrés pour y faire siéger des administrateurs dans ces sociétés. Ces nouvelles dispositions sont donc nécessaires.
La commission des lois souscrit au dispositif proposé, qui tend à restaurer la sécurité juridique et à privilégier l'efficacité économique. Elle vous propose donc, mes chers collègues, d'adopter sans modification la présente proposition de loi.
Contrairement a ce qui a pu être dit et écrit, cette proposition de loi, à moins de ne rien comprendre à la vie économique, ne mérite sans doute ni un excès d'honneur - elle comporte encore quelques imprécisions de rédaction - ni l'indignité dont certains voudraient la frapper parce qu'elle ne remet pas en cause les éléments positifs du gouvernement d'entreprise contenus dans la loi NRE, au moins dans la rédaction initiale du projet de loi, car les débats ont été l'occasion de nombreuses surenchères. C'est bien dommage, car je pense que, si le Sénat avait été entendu, un texte équilibré aurait pu être adopté alors.
M. Philippe Marini. Tout à fait !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La proposition de loi ne contredit en rien la volonté du Gouvernement d'instaurer une sécurité financière pour les entreprises. A cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez annoncé le dépôt d'un projet de loi dont nous aurons à débattre prochainement, de même que vous avez annoncé la réforme d'ensemble de la législation sur les sociétés, y compris la loi relative à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises. Sans cesse repoussées, ces réformes répondent cependant à une nécessité dont il nous faut bien tenir compte.
Mais je suis certain que le Sénat, qui a déjà beaucoup travaillé sur ces réformes - n'est-ce pas, monsieur Marini ? - est prêt à aider le Gouvernement dans ce domaine. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants).
M. Philippe Marini. Merci beaucoup, monsieur le rapporteur.
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la proposition de loi aujourd'hui soumise à l'examen du Sénat est non seulement injustifiée et empreinte d'hypocrisie, mais surtout choquante dans son principe. (Exclamations sur les travées du RPR.)
En nous invitant à adopter un texte qui a pour objet d'autoriser le cumul illimité des mandats sociaux, notamment pour les conseils d'administration des groupes de sociétés anonymes cotées, le Gouvernement et sa majorité ne tirent aucune leçon de l'actualité économique et financière.
En effet, depuis plusieurs mois, les marchés boursiers traversent une profonde crise de confiance. Aux Etats-Unis comme en Amérique du Sud et en Europe, les places financières connaissent des journées noires.
Pour l'anecdote - mais est-ce une anecdote ? -, à la veille du débat à l'Assemblée nationale sur cette proposition de loi, la Bourse de Paris terminait sur un violent décrochage, avec une baisse des valeurs de 5,87 %.
M. Philippe Marini. Vous devriez en être ravi !
M. Simon Sutour. L'économie française n'en finit pas de payer le dégonflement de la bulle des télécommunications et de l'Internet.
M. Jean Chérioux. Qui était au gouvernement à cette époque-là ?
Alain Gournac. Les socialistes !
M. Simon Sutour. Une débâcle encore aggravée par les scandales américains et la kyrielle de faillites en chaînes, d'Enron, la plus importante de l'histoire des Etats-Unis, à celle de WorldCom et Tyco, pour ne citer que les plus connues.
M. Philippe Marini. Vous êtes en dehors du sujet !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cela n'a vraiment rien à voir !
M. Simon Sutour. En France, la baisse de la bourse a précipité dans l'abîme les titans Vivendi Universal - il y aurait beaucoup à en dire -,...
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ah !
M. Simon Sutour. ... France Télécom et Alcatel.
Plusieurs facteurs conjoncturels sont à l'origine de cette crise, qui comporte également une dimension structurelle propre aux formes nouvelles du capitalisme mondialisé. Au mépris du respect des ressorts intrinsèques de l'économie réelle, les principaux acteurs du jeu économique ont admis l'idée que la poursuite du profit était plus importante que le respect des bonnes pratiques et des règles déontologiques. Or l'entreprise est un projet humain qui s'inscrit dans la durée. A quoi bon créer la valeur pour l'actionnaire si l'activité de l'entreprise ne profite pas également aux salariés et à la société tout entière ?
Ce que nous vivons ne se résume pas seulement à une crise de confiance, mais traduit aussi une crise de valeur. Nous raisonnons encore en France avec l'idée du patron de droit divin,...
M. Jean Chérioux. Oh !
M. Simon Sutour. ... mais ce concept rencontre ses limites. Ces grands patrons qui ont affolé les marchés se sont laissé griser par des rêves de conquête vertigineux. Quand ils ne pouvaient plus échanger de titres, ils payaient cash. Résultat, même si leurs chiffres d'exploitation apparaissaient florissants, ils se sont retrouvés asphyxiés par des dettes colossales et ont affiché des pertes par milliards pour remettre la valeur de leurs filiales au niveau du marché.
Manifestement, il existe des lacunes dans l'application des principes, de nature éthique et professionnelle, du gouvernement d'entreprise, dont l'objet principal s'intéresse à la répartition des pouvoirs au sein des sociétés, notamment dans les conseils d'administration.
Dans ce contexte fortement déprimé, au lieu d'ouvrir un espace de réflexion sur les modes de régulation qu'il convient d'adopter pour répondre à la crise actuelle, le Gouvernement choisit d'inscrire à l'ordre du jour du Sénat l'examen d'une proposition de loi dont le contenu est à l'opposé de l'exigence de respect des critères éthiques et responsables que l'on est en droit d'attendre d'un dirigeant d'entreprise. Ce manque de clairvoyance est stupéfiant.
M. Jean Chérioux. Ce qui est stupéfiant, c'est l'analyse que vous en faites !
M. Alain Gournac. Oui ! D'autant que vous avez, vous aussi, été stupéfiants !
M. Simon Sutour. Nous commençons cependant à nous y habituer.
Au mois de juillet dernier, au moment où ont été annoncées la hausse de certains tarifs publics et la progression des prix à la pompe, du fait de la suppression de la taxe flottante, le Premier ministre a fait valoir que la chute des Bourses ne présentait pas de « risques graves » pour la reprise économique.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Et qu'avait dit M. Fabius ?
M. Simon Sutour. Aujourd'hui, alors que l'INSEE vient de réviser à la baisse la prévision de croissance pour 2002, avec ce que cela implique pour 2003, et que nombre d'économistes et de chefs d'entreprise s'en préoccupent, le Gouvernement maintient sa prévision de croissance de 2,5 % pour l'année prochaine.
M. Alain Gournac. Vous êtes loin du sujet !
M. Simon Sutour. Les travailleurs du « capitalisme d'en bas » et les petits épargnants apprécieront !
Les entreprises comme Alcatel n'en finissent pas de supprimer des emplois. Quant aux petits porteurs, ils ne manqueront pas de se sentir doublement floués : pour n'avoir pas recueilli les bénéfices qu'ils étaient en droit d'espérer et qu'on leur avait fait miroiter, et parce qu'ils constatent qu'ils n'ont pesé en rien sur la stratégie des grands groupes, sauf à assurer leur trésorerie.
Une telle situation entraîne des conséquences néfastes sur la crédibilité de l'actionnariat salarié. Ce modèle, qui permet de renforcer le contrôle du capital et de la direction, est durablement remis en question, les actionnaires salariés ayant perdu 29 % de leurs avoirs en 2002, selon une enquête menée dans plus de quarante sociétés françaises.
Ce texte nous heurte, enfin, parce qu'il n'est pas sincère, parce qu'il tourne le dos à l'intérêt général et, surtout, parce qu'il dénature la force et la solennité de la loi.
Sous le prétexte de clarifier des dispositions techniques et de mieux conjuguer la logique économique et la logique juridique, la proposition assouplit considérablement le système anti-cumul tel qu'il avait été élaboré sous la précédente législature, dans le cadre du projet de loi sur les nouvelles régulations économiques.
Ainsi, en autorisant explicitement les dérogations croisées pour les administrateurs et les membres du conseil de surveillance comme pour les directeurs généraux, membres du directoire et les directeurs généraux uniques, en permettant le cumul d'un mandat de directeur général et de membre du conseil d'administration sans que cela compte pour deux mandats, en étendant aux sociétés cotées la dérogation de groupe, autrement dit la dérogation verticale, en autorisant le détenteur d'un mandat de direction d'une petite et moyenne entreprise à exercer un autre mandat de la même catégorie dans une autre société non cotée - il s'agit là de la dérogation horizontale -, en supprimant l'impossibilité, pour le président d'un conseil d'administration, de bénéficier de la dérogation de groupe, en visant les mandats de gestion et de direction exercés par un représentant permanent d'une société d'économie mixte ou d'un groupement de collectivités territoriales, en inscrivant une dérogation pour les sociétés d'assurance mutuelle, la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture a bien pour unique objet de revenir sur la limitation du cumul des mandats sociaux au profit des dirigeants d'entreprises.
Ce texte est une vaste hypocrisie, car il prétend ne rien changer alors qu'il brise l'équilibre du dispositif élaboré dans la loi NRE.
Nous sommes au coeur du problème. En matière de cumul des mandats sociaux, les choix qui ont présidé à l'élaboration de cette loi n'ont reposé en rien sur une attitude dogmatique, contrairement à ce qu'affirme notre excellent rapporteur. En effet, la loi NRE ne s'inscrit pas aussi nettement qu'une lecture rapide pourrait le faire croire dans une ligne résolument hostile au cumul des mandats. Si certaines dispositions durcissent la limitation du cumul, d'autres, au contraire, l'assouplissent. Ainsi le législateur a-t-il volontairement adopté une position franche et mesurée afin de prendre en considération la réalité des faits.
La plaie du capitalisme français demeure la faiblesse des conseils d'administration, dont la taille est parfois pléthorique, conjuguée à la puissance des réseaux issus des grandes écoles ou des amitiés d'affaires. Ces instances se sont trop souvent muées en chambres d'enregistrement des décisions de la direction. Si, au fil des ans, les participations croisées, tant décriées, ont été dénouées, les administrateurs croisés, eux, demeurent. De ce fait, l'adoption des comportements rigoureux prescrits par la loi est, dans la pratique, très adoucie : pourquoi embarrasser « un confrère » alors qu'on peut avoir besoin plus tard de sa compréhension ?
Cette situation anormale et dangereuse devait être assainie. C'est pourquoi le législateur a souhaité renforcer le dispositif anticumul qui existait dans la loi du 24 juillet 1966, car le cumul de trop nombreux mandats nuit à l'implication des dirigeants et peut conduire à des négligences coupables.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous sommes d'accord sur ce point !
M. Simon Sutour. Les buts recherchés sont l'efficacité et le contrôle : d'une part, une personne physique qui ne se disperse pas entre d'innombrables fonctions pourra mieux s'occuper de la ou des sociétés anonymes pour la direction desquelles elle a été mandatée ; d'autre part, les pouvoirs seront moins concentrés entre les mains d'un petit nombre de personnes se retrouvant dans une multitude d'entreprises. Les abus d'influences réciproques pourront, de ce fait, être limités.
Mes chers collègues, « être administrateur, c'est une véritable responsabilité et non un titre honorifique ». Ce n'est pas moi qui m'exprime ainsi, c'est M. Serge Weinberg, président du directoire de Pinault-Printemps-La Redoute.
M. Philippe Marini. Il a raison !
M. Simon Sutour. De son côté, M. Daniel Bouton, P-DG de la Société générale, qui a présidé un groupe de réflexion sur le gouvernement d'entreprise, invite les conseils d'administration à jouer leur rôle et évoque dans un rapport d'étude les administrateurs « compétents, actifs, présents et impliqués ».
Au fond, la différence essentielle qui nous distingue repose sur la définition du rôle que doit jouer la puissance publique et sur la capacité qu'a celle-ci d'introduire des contre-pouvoirs. Pour résoudre ces questions, l'idéologie libérale disqualifie le droit au profit de recommandations ou de préconisations devant prétendument apporter la souplesse nécessaire à ces mécanismes subtils de pouvoir.
On choisira de douter de la capacité des acteurs économiques à s'autoréguler. Le bon équilibre ne peut être trouvé à l'intérieur même du système. L'autorégulation n'existe pas, et c'est au politique qu'il revient de prendre ses responsabilités. Ce constat justifie le régime du cumul des mandats instauré par la loi NRE, qui s'appuie sur un dispositif juridique ferme, adapté et équilibré.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Et ambigu !
M. Simon Sutour. Les conditions d'examen de cette proposition de loi, monsieur le rapporteur, appellent également plusieurs observations.
Déposée dans l'urgence, puisqu'elle a été enregistrée à la présidence de l'Assemblée nationale le 20 septembre dernier, elle figure parmi les premiers textes inscrits à l'ordre du jour de la nouvelle session parlementaire. Or, y avait-il urgence à délibérer sur cette question ?
M. Jean Chérioux. Oui !
M. Simon Sutour. La loi NRE est entrée en vigueur il y a moins d'un an et demi. Elle n'a pas encore pu faire sentir tous ses effets. Au lieu de légiférer dans la précipitation, il eût été plus sage d'accorder un peu de temps aux usagers du droit des sociétés pour mieux découvrir, avec le concours de la doctrine, les multiples problèmes concrets posés par les nouvelles dispositions et pour rechercher plus sereinement les ajustements et les solutions appropriés.
Relativement au cumul des mandats, je rappelle que la loi n'a pas été d'application immédiate. Elle octroyait tout de même aux dirigeants un délai de dix-huit mois pour se mettre en conformité avec les nouvelles règles, afin de permettre aux intéressés de se préparer et d'éviter des surprises. En l'espèce, le mieux aura été l'ennemi du bien ! De plus, certaines ambiguïtés de la loi ont pu être levées grâce aux travaux parlementaires, grâce aux interprétations très claires que le gouvernement précédent avait énoncées sur le texte et grâce aux avis professionnels, tels ceux de l'Association nationale des sociétés anonymes, l'ANSA, notamment sur la question de l'application de la loi dans le temps.
Pourquoi agir avec une telle célérité, alors que le Premier ministre, notre ancien collègue M. Jean-Pierre Raffarin, interrogé sur France 2 le 26 septembre dernier, a réclamé « plus de transparence et de rigueur dans l'exercice du pouvoir financier dans les entreprises » et que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Francis Mer, a annoncé clairement son intention d'insérer dans la loi relative à la sécurité financière des mesures sur ce sujet ? Le Gouvernement et la majorité auraient pu attendre la présentation de ce futur projet de loi, qui constituera le cadre idéal pour clarifier les règles du jeu de la gouvernance d'entreprise !
En réalité, loin de défendre l'intérêt général, la proposition de loi a été taillée sur mesure pour répondre à la seule préoccupation des dirigeants d'entreprise qui ne veulent pas se voir appliquer d'office le régime anti-cumul des mandats sociaux. Le Gouvernement et la majorité obtempèrent, sans discuter, aux injonctions des organisations patronales. Mais, au lieu de le reconnaître et de l'assumer en toute franchise, M. Hyest, dans son excellent rapport, nous explique sans ambages que ce sont les rigidités excessives du dispositif légal en vigueur qui conduisent les entreprises à chercher à le contourner.
M. Jean Chérioux. Eh oui !
M. Simon Sutour. Cette justification suscite un grand trouble.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Vous pouvez être troublé, oui !
M. Simon Sutour. Que devient l'autorité de la loi si vous acceptez qu'on puisse ne plus exiger le respect d'une règle obligatoire et générale au motif qu'elle contrarie des intérêts particuliers ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Lorsqu'on fait de mauvaises lois, elles sont contournées !
M. Jean Chérioux. Quand elle est inapplicable, il faut bien changer la loi !
M. Alain Gournac. Cela ne vous a jamais contrariés !
M. Philippe Marini. Vous savez ce qu'est une entreprise, ce qu'est un groupe ?
M. Simon Sutour. Au contraire, il faut donner à la loi de la République sa force et sa solennité.
Ce trouble n'a pas été exprimé par les seuls représentants de l'opposition. Au sein même de votre majorité, il a été partagé par des membres éminents,...
M. André Vantomme. Absolument !
M. Simon Sutour. ... qui se sont ostensiblement abstenus ou qui ont refusé de prendre part au vote conforme d'un texte dont le contenu, après son passage à l'Assemblée nationale, a excessivement élargi le champ d'application de la dérogation aux règles de cumul des mandats sociaux. Ainsi, lors de la réunion de la commission des lois, M. Maurice Ulrich « s'est interrogé sur la compatibilité des assouplissements proposés avec l'objectif affiché de recherche d'une plus grande transparence dans le fonctionnement des entreprises et d'une meilleure responsabilisation des administrateurs ». De son côté, M. Pierre Fauchon a exprimé le regret que cette proposition « vienne en discussion au moment précis où plusieurs scandales conduisaient à observer une dilution des responsabilités dans la gestion des sociétés ».
Vous-même, monsieur le rapporteur, reconnaissez « que certaines rédactions auraient mérité d'être clarifiées ».
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oui !
M. Simon Sutour. Pourtant, vous estimez nécessaire d'adopter la proposition de loi sans modification.
J'ajouterai cependant à votre crédit que, ce matin même, la commission des lois a rejeté à l'unanimité les deux amendements de notre collègue M. Marini.
M. François Autain. M. Marini est un extrémiste !
M. Simon Sutour. Mais est-ce un rejet sur le fond, ou bien vise-t-il à obtenir ce fameux vote conforme ?
Une préoccupation demeure. En proposant de voter conforme la proposition de loi, la commission fait-elle le choix de transformer le Sénat en guichet d'enregistrement des textes adoptés en première lecture par l'Assemblée nationale dans les cinq ans qui viennent ? J'insiste tout particulièrement sur ce point, parce que nous avons entendu tellement de choses ces derniers mois !
M. Alain Gournac. Nous avons en effet cinq ans, ne l'oubliez pas !
M. Simon Sutour. Après l'examen de la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité intérieure, au cours duquel on a vu le Sénat s'aligner purement et simplement sur l'Assemblée nationale, la Haute Assemblée est de nouveau prête à émettre aujourd'hui un vote identique. N'est-il pas paradoxal que le Sénat choisisse de s'effacer de la sorte, alors que, dans le chantier constitutionnel qui va s'ouvrir, il entend occuper une place prépondérante ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La première !
M. Simon Sutour. La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale n'est qu'une réforme partielle et partiale, justifiée par la défense des intérêts partagés d'un cercle d'administrateurs tout terrain qui collectionnent les mandats. De façon générale, d'ailleurs, la droite est rétive au principe de l'application stricte des lois anti-cumul.
M. Philippe Marini. Je connais quelques sénateurs socialistes qui étaient satisfaits de pouvoir rester maires !
M. Simon Sutour. Ainsi a-t-on appris que, à la suite de ses consultations sur la modification des modes de scrutin, le ministre de l'intérieur propose de revenir sur la règle interdisant le cumul d'un mandat européen avec un mandat exécutif.
La question du cumul des mandats sociaux dans les entreprises mériterait d'être examinée au même titre que celles de la promotion des administrateurs indépendants, de la politique d'attribution des stock-options, du régime des activités de conseil et d'audit, de la sincérité des comptes,...
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'est vrai pour les deux derniers points, mais c'est un autre sujet : il s'agit de la sécurité financière !
M. Simon Sutour. ... autant de sujets que l'actualité a mis en avant de manière parfois dramatique et sur lesquels il conviendrait de réfléchir sereinement.
C'est la raison pour laquelle, vous l'aurez compris, le groupe socialiste, au nom duquel j'interviens, votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il s'agit aujourd'hui de rectifier, sur un point bien particulier, la loi relative aux nouvelles régulations économiques. Nous procédons donc à une rectification spécifique a minima d'un dispositif sur lequel il faudra probablement revenir à d'autres égards.
En quelques mots, je voudrais mettre l'accent sur un sujet parmi d'autres dont traite cette loi, qui ne concerne pas spécifiquement le droit des sociétés commerciales.
Mes chers collègues, je ne résiste pas au plaisir de vous citer des extraits d'une lettre que j'ai reçue voilà quelques mois, émanant du président de l'ordre des experts comptables de ma région, au sujet des articles 53 et 54 de la loi relative aux nouvelles régulations économiques. Vous verrez à quelles absurdités cette loi peut conduire !
« L'idée du législateur était au départ généreuse. Pour schématiser, il s'agissait de se rapprocher des règles européennes en instituant une sorte d'obligation légale de paiement en France qui n'excède pas trente jours et qui, sous certaines conditions, s'accompagne de la remise obligatoire d'un effet de commerce lorsque le délai excède quarante-cinq jours.
« On ne peut qu'applaudir ce projet généreux qui, s'il parvient à son terme, permettra d'éviter un certain nombre de dépôts de bilan.
« Malheureusement, cet article 53 fait l'objet de mesures d'accompagnement qui sont à la fois injustes et inapplicables.
« Ces mesures sont les suivantes :
« La facture mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir ; elle précise les conditions d'escompte applicables en cas de paiement à une date antérieure à celle résultant de l'application des conditions générales de vente, ainsi que le taux des pénalités exigibles le jour suivant la date à laquelle les fonds sont mis, par le client, à la disposition du bénéficiaire ou de son subrogé.
« Les obligations relatives aux conditions générales de ventes sont assorties d'une amende de 15 000 euros pour une personne physique, et de 75 000 euros pour une société ; l'omission sur une facture d'une mention obligatoire peut être sanctionnée par une amende de 75 000 euros pour une personne physique et 375 000 euros pour une personne morale. »
MM. Jean Chérioux et Lucien Lanier. C'est grotesque !
M. Alain Gournac. Ridicule !
M. Philippe Marini. Il ajoute, de façon tout à fait modérée et technique : « Il est important d'observer que cette rédaction méconnaît les règles habituelles du commerce et de l'artisanat. Il est, en effet, extrêmement rare de porter sur une facture la mention "facture payable au 14 juillet 2002". Les mentions habituellement utilisées et qu'il conviendrait, à notre sens, de continuer à employer sont du type "payable au comptant", "payable à 30 jours fin de mois", etc. Bien entendu, il semble normal de laisser le soin à l'entrepreneur d'apprécier s'il convient d'appliquer ou non les pénalités de retard, et surtout à partir de quel moment il convient de les appliquer.
« Sérieusement, monsieur le sénateur-maire, pouvez-vous imaginer que votre électricien, par exemple, vous adresse une facture de pénalités parce que vous auriez réglé avec huit jours de retard sa facture ? Pourtant, s'il ne le fait pas, il encourt un redressement fiscal. »
M. Jean Chérioux. Incroyable !
M. Philippe Marini. « D'autre part, s'il omet d'indiquer sur sa facture cette date "couperet" limite de paiement, il pourrait être condamné à 75 000 euros voire à 375 000 euros d'amende...
MM. Jean Chérioux et Alain Gournac. C'est Ubu !
M. Philippe Marini. ... s'il a le malheur d'être en EURL .»
Cet exemple, même s'il ne relève pas tout à fait du droit des sociétés, vous montre, mes chers collègues, que l'enfer peut être pavé des meilleures intentions.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'est évident !
M. Alain Gournac. Oui !
M. Philippe Marini. Croyez-moi, de nombreux exemples de cette nature, issus de la pratique, figurent dans la loi relative aux nouvelles régulations économiques. Des approches théoriciennes, accompagnées de mesures d'application, renforcent le caratère pointilliste et exagérément contraignant de certaines stipulations.
Il en va exactement de même au sujet du cumul des mandats d'administrateur au sein d'un groupe, point qui nous intéresse aujourd'hui.
Comme notre excellent rapporteur, je voudrais souligner que le problème de l'unité économique du groupe est posé. (M. le rapporteur acquiesce.) Qu'on le veuille ou non, les entreprises, aujourd'hui, sont des groupes. Même au sein des petites et moyennes entreprises, il est devenu très rare de trouver une entreprise significative, autonome économiquement, qui soit monosociétale.
Lorsqu'ils souhaitent développer ou diversifier leurs activités, les entrepreneurs créent des instruments juridiques, des sociétés commerciales, pour des questions de responsabilité et de transparence vis-à-vis des tiers. Ainsi, tout naturellement, des entreprises de taille économique relativement réduite - tout comme de très grands groupes, d'ailleurs - vont se trouver constitués en groupe.
Il est donc nécessaire de faire prévaloir le principe de réalité. Ce qui compte pour les tiers, pour les actionnaires, c'est naturellement le groupe et non pas chaque entité sociale prise individuellement.
Certes, chacune de ces entités pourra avoir un actionnariat légèrement différent, notamment des actionnaires minoritaires. Mais, s'il faut respecter le patrimoine individuel de chaque société commerciale, il faut aussi prendre en compte la notion de groupe. C'est ce que l'on a oublié de faire de manière réaliste dans la loi sur les nouvelles régulations économiques, et c'est ce qu'il nous est proposé ici de rectifier.
Cependant, sur la forme, comme notre excellent rapporteur Jean-Jacques Hyest, ainsi que l'orateur précédent, on peut regretter le fait que l'on ait demandé au Sénat de ne pas adopter d'amendements, afin d'adopter ce texte dans les mêmes termes dans les deux assemblées et à la date prévue.
Il est vrai que ce texte doit être promulgué avant une certaine date, sinon - certains ont évoqué le nom symbolique d'Ubu - nous serons confrontés à des situations pratiques que nous ne saurons plus gérer.
Nous ne pouvons naturellement qu'être sensibles, monsieur le secrétaire d'Etat, à cet impératif, tout en exprimant un regret, dans la mesure où nous considérons qu'il revient effectivement à la seconde chambre de travailler les textes, notamment sur des sujets où elle a, en particulier au sein de la commission des lois, l'antériorité d'une longue réflexion. Ce n'est cependant pas possible pour ce texte, compte tenu de son objet très spécifique et de la date à laquelle il faut se conformer. Nous le comprenons bien, au-delà de la petite frustration qui est nécessairement la nôtre parce que nous aimons faire notre travail législatif et que nous sommes là pour cela.
Monsieur le secrétaire d'Etat, bien entendu, je soutiendrai un texte de bon sens. J'appelle toutefois votre attention sur un effet pervers qui ne me semble pas avoir été mesuré, en tout cas que nos collègues de l'Assemblée nationale n'ont pas vu. Ils ont introduit des amendements, notamment pour traiter du problème des réseaux coopératifs. Ils ont bien fait, mais ils auraient pu concentrer aussi leur attention sur une situation que beaucoup de collectivités territoriales connaissent et que je voudrais souligner, celle du groupe de la Caisse des dépôts et consignations.
J'ai été sensibilisé à ce sujet, notamment en tant que membre, depuis peu, de la commission de surveillance. On m'a fait remarquer à juste titre que les dirigeants de la Caisse qui siègent dans les filiales - lesquelles peuvent être « en râteau », c'est-à-dire constituer des sociétés soeurs et non pas des sociétés mères et des sociétés filles - ne vont pas être concernés par le régime assoupli que vous nous proposez. Dès lors, chacun des mandats comptera pour un, alors que nous sommes bien à l'intérieur du groupe économique et juridique de la Caisse des dépôts et consignations.
Faut-il vraiment, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'Etat se tire ainsi « une balle dans le pied » ? Franchement, je ne le crois pas ; cet aspect me semble donc devoir être rectifié. Tel est l'objet de l'un des deux amendements que j'avais déposés.
Quant à l'autre amendement que je souhaitais présenter, je le reconnais, il exposait une vision plus large que nous ne sommes peut-être pas prêts aujourd'hui à adopter. Il s'agit de notions sur lesquelles il faudra cependant certainement revenir lorsque nous en aurons le temps.
Dans ces conditions, je suis prêt à retirer ces deux amendements, tout en insistant sur la situation spécifique de la Caisse des dépôts et consignations, qui me semble devoir être prise en compte.
S'agissant, monsieur Sutour, du secteur financier public, j'espère que vous auriez soutenu mon amendement au sein de la commission des lois si vous aviez eu connaissance des explications que je viens de donner. (M. Alain Gournac sourit.)
Monsieur le secrétaire d'Etat, ce texte se situe, il est vrai, dans le contexte beaucoup plus général de l'attractivité de notre système juridique. Nous avons besoin de faire des progrès dans un domaine qu'il faudra notamment traiter au sein du projet de loi relatif à la sécurité financière dont nous débattrons prochainement. Ce texte comportera des aspects de nature à mieux assurer la transparence de l'information et la sécurité sur les marchés, ce qui est indispensable dans le monde excessivement dangereux dans lequel nous vivons.
On nous annonce bien d'autres mesures qui devraient être de nature à rendre la confiance aux investisseurs, en particulier aux petits actionnaires. Il convient en effet de concevoir des ajustements en matières fiscale, juridique et financière.
Mais c'est une autre affaire, ce n'est pas l'ambition du présent texte, qui est un petit pas dans la bonne direction, ce dont il faut vous remercier, monsieur le secrétaire d'Etat. Bien entendu, mes chers collègues, il convient d'accepter ce petit pas et de voter la proposition de loi telle qu'elle nous est proposée par la commission des lois de notre Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et des Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, mon propos sera bref. Je ne peux que regretter à mon tour le caractère précipité de cette proposition de loi, qui est, de surcroît, en complète contradiction avec la situation économique actuelle, aussi bien internationale que nationale.
A la suite des graves crises financières qui ont touché les grandes compagnies internationales telles que Enron ou WorldCom, la France s'était juré que jamais cela n'arriverait sur son territoire. Pourtant, nous venons, nous aussi, de connaître des scandales financiers, avec France Télécom, Alcatel et Vivendi Universal.
Dans ce dernier cas, comment les administrateurs auraient-ils pu accorder du temps au groupe Vivendi Universal alors qu'ils étaient déjà complètement absorbés par leur propre entreprise ?
Les administrateurs doivent non seulement avoir une bonne connaissance du groupe, mais aussi pouvoir s'y rendre et s'y réunir souvent. Cela exige du temps et une compétence technique, mais également une bonne connaissance de l'entreprise. C'est pourquoi il était nécessaire de limiter le cumul des mandats sociaux, de garantir et surtout d'accroître la responsabilisation des administrateurs.
La loi sur les nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001 instaurait une limitation du cumul, dans un but d'efficacité et de contrôle.
Elle limitait les abus d'influence et la concentration des pouvoirs entre les mains d'un petit nombre de personnes se retrouvant dans de multiples entreprises. Par ailleurs, elle évitait qu'un dirigeant ne disperse trop son activité afin qu'il se consacre pleinement à la société dont il a la charge.
La « nouvelle gouvernance » allait enfin légiférer sur la « gouvernance d'entreprise », en instaurant la responsabilité financière comme principe de gestion. Le non-cumul des mandats devait être effectif dès le 17 novembre prochain, ce qui explique l'empressement qui a conduit au dépôt de la présente proposition de loi.
Le problème est que le patronat et les lobbies ont fait pression pour soulager les dirigeants d'une mesure prétendument trop rigide, en soutenant par exemple que ces derniers avaient besoin de contrôler les différentes entités qui composent leur groupe. Nous voyons aujourd'hui, mes chers collègues, ce que cela a donné chez Vivendi ! Le groupe détient des filiales devenues non rentables - en raison de la gestion hasardeuse de Jean-Marie Messier - que l'actuel P-DG, Jean-René Fourtou, s'empresse de vendre, telles que la presse grand public et, ce qui est plus grave encore, Vivendi Universal Publishing, qui détient notamment les éditions Robert et Larousse.
M. Houillon précise, dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi, que « l'objectif n'est pas de revenir sur la limitation du cumul des mandats sociaux, mais d'adapter les règles qui régissent ce domaine dans un souci de réalisme ».
Mais parlons-nous de la même réalité, à l'heure où les dirigeants, tel Jean-Marie Messier, ne pensent qu'à leur omniprésence et leur omnipotence dans plusieurs secteurs d'activités ?
Qu'est-ce qui est réellement en jeu ? Souhaitons-nous qu'une plus grande responsabilité financière soit assumée par les responsables économiques ou que le nombre de scandales et de faillites continue d'augmenter ?
Il est évident que, pour beaucoup de dirigeants, l'échéance du 16 novembre fixée par la loi NRE, qui les contraint à démissionner de leurs mandats excédentaires, doit être supprimée. Ils ont d'ailleurs bien su se faire entendre du Gouvernement puisque nous examinons dans l'urgence cette proposition de loi.
Ce n'est certainement pas dans l'urgence et la précipitation que des réponses justes et adaptées seront apportées à cette question, importante, aux yeux, bien sûr, de tous ceux qui dépendent des choix économiques du P-DG de leur entreprise.
En effet, il s'agit bien de cela lorsque des milliers de petits actionnaires se font abuser par l'entreprise dans laquelle ils ont placé leur confiance et leurs économies, et qu'ils perdent, la plupart du temps, ce que leur a rapporté une vie de labeur car le dirigeant de l'entreprise concernée n'a pas voulu se contenter de détenir un nombre raisonnable de mandats dans le groupe auquel elle appartient.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il aurait été souhaitable que cette question du cumul des mandats, sur laquelle vous souhaitez absolument revenir pour faire un cadeau supplémentaire au patronat et au MEDEF, soit intégrée dans le volet sur la gouvernance d'entreprise de votre futur projet de loi sur la sécurité financière, qui est actuellement en préparation à Bercy.
Au lieu de cela, vous décidez que les conseils d'administration resteront les chambres d'enregistrement des choix inopportuns et douteux des P-DG.
Au cumul des pouvoirs continuera de s'ajouter le cumul des jetons de présence, et donc des rémunérations, le tout dans une opacité bien peu contrôlée.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pourquoi ne pas instaurer dans les grands groupes un fichier des dirigeants et des actionnaires, comme celui qui a été établi par le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement à propos des établissements de crédit ?
Ce fichier centraliserait les informations de nature à mieux apprécier non seulement l'expérience et l'honorabilité des dirigeants, mais aussi leur compétence.
Par la suite, avant toute nomination de dirigeant, le groupe serait en mesure de vérifier la disponibilité du dirigeant dans ses emplois antérieurs ou bien encore les éventuels conflits d'intérêts au regard des différents mandats sociaux déjà exercés en dehors du groupe auquel appartient l'entreprise.
Mais vous ne voulez pas généraliser un tel principe.
Pourtant, dans tous ces cas de scandales et de faillites économiques, il s'agit de respect, du respect des petits actionnaires, qui souhaiteraient que la transparence financière soit la règle chez les personnes qui dirigent l'entreprise et dont leur salaire, leur retraite ou leur pouvoir d'achat dépendent.
Décidément, ce texte est bien dans l'air du temps, un temps où la dérégulation et les marchés financiers sont rois, où les petits actionnaires représentent une entité bien négligeable face aux intérêts de quelques-uns.
C'est tout aussi vrai pour les salariés des entreprises concernées.
Plus que tout, c'est parce qu'elle joue la finance contre le social que l'entreprise est aujourd'hui au bord du gouffre.
Depuis le début de l'année, comme chacun le sait, les quarante plus grandes sociétés françaises ont vu leur valeur dégradée de 40 % par les marchés financiers et leurs dettes s'accumuler. Beau résultat !
Certes, l'entreprise a besoin d'une nouvelle gouvernance, mais les responsabilités des dirigeants doivent être accrues vis-à-vis des résultats du groupe et de leurs conséquences sur les actionnaires, et en priorité, vous l'aurez compris, sur les plus modestes d'entre eux. Il faut aussi une plus grande démocratisation de la gestion.
Tout cela permettrait d'engager de meilleures politiques économiques, associant avec plus d'efficacité les différents acteurs de l'entreprise.
Hier, lorsque vous étiez dans l'opposition, vous n'avez cessé, avec raison, de reprocher au précédent gouvernement de vouloir faire passer dans l'urgence des projets de loi. Or, depuis le début de la nouvelle législature, que faites-vous, sinon demander l'urgence sur tous vos textes ?
M. Jean Chérioux. Il faut bien corriger les erreurs du passé !
M. Robert Bret. En tout cas, monsieur Chérioux, la présente proposition de loi est - M. le secrétaire d'Etat a lui-même parlé d'« imperfections techniques » - un texte bâclé, voté en catimini à l'Assemblée nationale. Mais M. le rapporteur de la commission des lois nous demande d'adopter le texte conforme, toujours avec la date butoir du 17 novembre prochain !
Pour toutes ces raisons, vous comprendrez l'opposition des membres du groupe communiste républicain et citoyen à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Je voudrais d'abord vous remercier, monsieur le rapporteur. Nous aurons effectivement l'occasion de poursuivre ce débat lors de l'examen du texte sur la sécurité financière annoncé par le Premier ministre. Par ailleurs, la réforme des procédures collectives, que vous évoquez, est une des priorités du garde des sceaux. A l'issue d'une large concertation, qui sera entamée l'année prochaine, ce dernier fera une proposition.
Je voudrais aussi remercier M. Marini, qui a parfaitement résumé l'économie de la proposition de loi. Il s'agit en effet d'une rectification spécifique a minima . M. Philippe Marini a d'ailleurs très bien montré que les précédentes dispositions de la loi NRE méconnaissaient la réalité économique du fonctionnement d'un groupe.
Il a également évoqué, sujet important, la Caisse des dépôts et consignations. Ce qu'il a observé mériterait effectivement réponse. Mais, pour des raisons de calendrier parlementaire, nous sommes convenus que ces réponses pourraient être apportées lors de l'examen du projet de loi sur la sécurité financière, qui sera soumis prochainement au Parlement.
J'ai écouté avec beaucoup de plaisir M. Simon Sutour dresser un réquisitoire implacable de la gestion de France Télécom par le précédent gouvernement. (Sourires sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.) J'ai également écouté avec beaucoup de plaisir l'orateur du groupe communiste républicain et citoyen condamner l'ancien président de la société Vivendi qui, chacun le sait, avait bénéficié de dispositions législatives votées très rapidement par la précédente majorité, et en particulier de mesures concernant les stock-options.
M. Robert Bret. Sans nous !
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Je les remercie, l'un et l'autre, d'avoir dressé ce brillant réquisitoire contre la majorité précédente. (Nouveaux sourires sur les mêmes travées.)
Plus sérieusement, je préciserai que, bien entendu, il ne faut pas confondre la loi sur la sécurité financière et la loi NRE : la loi sur la sécurité financière protégera les épargnants ; la présente réforme de la loi NRE ne vise qu'à lever les obstacles au bon management des entreprises, et non pas des grands groupes internationaux, mais des petites et moyennes entreprises.
Il convenait de rétablir la vérité ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 225-21 du code de commerce est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, ne sont pas pris en compte les mandats d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance exercés par cette personne dans les sociétés contrôlées au sens de l'article L. 233-16 par la société dont elle est administrateur.
« Pour l'application des dispositions du présent article, les mandats d'administrateur des sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé et contrôlées au sens de l'article L. 233-16 par une même société, ne comptent que pour un seul mandat, sous réserve que le nombre de mandats détenus à ce titre n'excède pas cinq. »
« II. - Le deuxième alinéa de l'article L. 225-54-1 du même code est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa :
« - un deuxième mandat de directeur général ou un mandat de membre du directoire ou de directeur général unique peut être exercé dans une société contrôlée au sens de l'article L. 233-16 par la société dont il est directeur général ;
« - une personne physique exerçant un mandat de directeur général dans une société peut également exercer un mandat de directeur général, de membre du directoire ou de directeur général unique dans une société, dès lors que les titres de celles-ci ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé. »
« III. - Le deuxième alinéa de l'article L. 225-67 du même code est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa :
« - un deuxième mandat de membre du directoire ou de directeur général unique ou un mandat de directeur général peut être exercé dans une société contrôlée au sens de l'article L. 233-16 par la société dont cette personne est membre du directoire ou directeur général unique ;
« - une personne physique exerçant un mandat de membre du directoire ou de directeur général unique dans une société peut également exercer un mandat de directeur général, de membre du directoire ou de directeur général unique dans une société, dès lors que les titres de celles-ci ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé. »
« IV. - Le deuxième alinéa de l'article L. 225-77 du même code est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, ne sont pas pris en compte les mandats de membre du conseil de surveillance ou d'administrateur exercés par cette personne dans les sociétés contrôlées au sens de l'article L. 233-16 par la société dont elle est déjà membre du conseil de surveillance.
« Pour l'application des dispositions du présent article, les mandats de membre du conseil de surveillance des sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé et contrôlées au sens de l'article L. 233-16 par une même société, ne comptent que pour un seul mandat, sous réserve que le nombre de mandats détenus à ce titre n'excède pas cinq. »
« V. - Le deuxième alinéa de l'article L. 225-94 du même code est ainsi rédigé :
« Pour l'application des articles L. 225-54-1 et L. 225-67, est autorisé l'exercice simultané de la direction générale par une personne physique dans une société et dans une autre société qu'elle contrôle au sens de l'article L. 233-16. »
« VI. - Les deux premiers alinéas de l'article L. 225-94-1 du même code sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Sans préjudice des dispositions des articles L. 225-21, L. 225-54-1, L. 225-67, L. 225-77 et L. 225-94, une personne physique ne peut exercer simultanément plus de cinq mandats de directeur général, de membre du directoire, de directeur général unique, d'administrateur ou de membre du conseil de surveillance de sociétés anonymes ayant leur siège sur le territoire français. Pour l'application de ces dispositions, l'exercice de la direction générale par un administrateur est décompté pour un seul mandat. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Articles 1er bis, 2 et 2 bis

M. le président. « Art. 1er bis . - L'article L. 225-95-1 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux articles L. 225-21, L. 225-54-1, L. 225-67 et L. 225-94-1, les mandats de président, de directeur général unique, de membre du directoire ou d'administrateur d'une société d'économie mixte locale, exercés par un représentant d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales, ne sont pas pris en compte pour l'application des règles relatives au cumul des mandats sociaux. » - (Adopté.)
« Art. 2. - I. - Le 4 de l'article L. 214-17 du code monétaire et financier est ainsi rédigé :
« 4. Une même personne physique peut exercer simultanément cinq mandats de directeur général, de membre du directoire ou de directeur général unique de SICAV ayant leur siège sur le territoire français. Les mandats de directeur général, de membre du directoire ou de directeur général unique exercés au sein d'une SICAV ne sont pas pris en compte pour les règles de cumul visées au livre II du code de commerce ; ».
« II. - Après le 4 du même article, il est inséré un 4 bis ainsi rédigé :
« 4 bis. Les mandats de représentant permanent d'une personne morale au conseil d'administration ou de surveillance d'une SICAV ne sont pas pris en compte pour l'application des dispositions des articles L. 225-21, L. 225-77 et L. 225-94-1 du code de commerce ; ».
« III. - Il est inséré, dans le code des assurances, un article L. 322-4-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 322-4-2 . - Pour l'application de l'article L. 225-21 du code de commerce, les mandats d'administrateur d'une société anonyme appartenant à un groupe d'assurance contrôlé, au sens du 1° de l'article L. 334-2 du présent code, par une société d'assurance mutuelle ou une société de réassurance mutuelle comptent pour un seul mandat. » - (Adopté.)
« Art. 2 bis. - Il est inséré, avant le dernier alinéa de l'article L. 511-31 du code monétaire et financier, un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application des dispositions de la section 2 du chapitre V du titre II du livre II du code de commerce, les mandats sociaux détenus au sein de l'organe central, au sens de l'article L. 511-30 du présent code, ou des établissements de crédit qui lui sont affiliés doivent être décomptés pour un seul mandat. » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 2 bis



M. le président.
L'amendement n° 1, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Après l'article 2 bis , insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les dérogations aux limitations au cumul de mandats sociaux prévues aux articles L. 225-21, L. 225-54-1, L. 225-67, L. 225-77, L. 225-94-1, L. 225-95-1 du code de commerce sont applicables aux présidents, directeurs généraux et directeurs des établissements publics de l'Etat titulaires de mandats sociaux dans les sociétés contrôlées ou sur lesquelles est exercée une influence notable au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce, par l'établissement public de l'Etat au sein duquel ils sont président, directeur général ou directeur.
« Pour l'application des dispositions qui précèdent, les fonctions de président, directeurs généraux et directeurs des établissements publics de l'Etat constituent un mandat aux fins des articles L. 225-54-1 et L. 225-67 du code de commerce. »
Cet amendement a été précédemment retiré par son auteur.
L'amendement n° 2, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
« Après l'article 2 bis , insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les dérogations au deuxième alinéa des articles L. 225-21, L. 225-54-1, L. 225-67, L. 225-77 et L. 225-94-1 sont étendues aux sociétés sur lesquelles est exercée une influence notable au sens de l'article L. 233-16. »
Cet amendement a été précédemment retiré par son auteur.

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - Le II de l'article 131 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régularisations économiques est ainsi rédigé :
« II. - Les administrateurs, présidents du conseil d'administration, directeurs généraux, membres du directoire, directeurs généraux uniques et membres du conseil de surveillance disposent d'un délai de deux mois à compter de la date de publication de la loi n° du modifiant certaines dispositions du code de commerce relatives aux mandats sociaux pour se mettre en conformité avec les articles L. 225-21, L. 225-54-1, L. 225-67, L. 225-77, L. 225-94 et L. 225-94-1 du code de commerce dans la rédaction issue de la loi précitée. A défaut, ils sont réputés démissionnaires de tous leurs mandats. » - (Adopté.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Avant de mettre au voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Robert Bret, pour explication de vote.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, vous l'aurez compris, le groupe communiste républicain et citoyen ne peut voter en faveur de ce texte.
En effet, cette proposition de loi permet d'étendre de manière incontrôlée le nombre de mandats que pourront détenir les administrateurs ou les dirigeants de groupe, et ce, bien évidemment, avec un manque total de transparence et de démocratie dans la gestion de l'entreprise. Le salarié est, une fois de plus, écarté au profit de l'accroissement démesuré du pouvoir des dirigeants.
Mes chers collègues, ce texte est examiné juste au moment où une étude réalisée par un cabinet spécialisé dans la défense des actionnaires minoritaires, le cabinet Deminor, fait apparaître que les entreprises françaises restent à la traîne en matière de gouvernance d'entreprise et de transparence.
Ce texte est également examiné au moment où les petits porteurs désirent responsabiliser les dirigeants, car ils ne veulent plus faire les frais de leurs choix économiques trop souvent hasardeux. En effet, des associations de petits porteurs ont esquissé une charte, monsieur le secrétaire d'Etat, qui sera soumise en novembre prochain aux pouvoirs publics, afin de « responsabiliser pénalement et personnellement les chefs d'entreprise en cas d'opérations lésant des actionnaires ».
Or c'est tout simplement l'inverse que le Gouvernement propose avec cette proposition de loi. Les dirigeants auront de nouveau carte blanche pour appliquer une politique économique qui ne servira que leurs intérêts propres, les rémunérations pourront s'additionner de nouveau sans scrupule. Les salariés et l'emploi seront, une fois de plus, sur le banc de touche.
Voilà les raisons pour lesquelles le groupe communiste républicain et citoyen votera contre cette proposition de loi.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. En définitive, nous avons surtout parlé de sécurité financière. Or il ne faut pas mélanger la gestion des sociétés et la sécurité financière, à savoir le contrôle. Toutes les grandes catastrophes que nous avons évoquées sont dues à une absence de contrôle. Du reste, elles ont beaucoup moins lieu en France où les comptes ne sont pas contestés. Si on mélange les deux choses, on aboutit, bien évidemment, à des contradictions.
Je rappelle que la présente proposition de loi est limitée - dans le cas contraire, je n'aurais pas proposé un vote conforme -, résout certaines ambiguïtés du texte précédent - il est tout de même important de préciser la loi - et assouplit certaines de ses dispositions car on s'est aperçu au fil des mois - tous les spécialistes nous l'ont dit - qu'il n'avait pas été tenu compte de certaines réalités au sein des groupes.
Je rappellerai d'ailleurs que ce sont des amendements qui ont rigidifié le projet de loi initial, lequel était acceptable dans un certain nombre de domaines. Mais, à l'Assemblée nationale, siègent un certain nombre de personnes qui veulent jouer les Saint-Just, qui en rajoutent toujours, notamment un certain député que chacun connaît (Sourires) et qui a continué à faire avancer ses idées. Or il y a les réalités économiques ! Certes, on peut s'amuser, on peut faire tout ce que l'on veut, mais, un jour, il faut rétablir les faits et tenir compte des réalités. C'est ce que nous avons fait.
Cette proposition de loi est très mesurée. Elle résout quelques problèmes, qu'il faut, bien entendu, régler avant le 16 novembre prochain. Certes, elle comporte des imperfections techniques. Mais nous aurons l'occasion, d'une manière globale, de revoir un certain nombre de textes, ce qui nécessitera une réflexion qui devra être menée de façon approfondie dans l'urgence.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Pierre Bédier secrétaire d'Etat. Je remercie la Haute Assemblée de sa diligence, et notamment M. le président de la commission des lois et M. le rapporteur.
Par ailleurs, monsieur le président, je vous remercie pour l'autorité bienveillante avec laquelle vous avez permis efficacement d'apporter une bonne réponse aux entreprises françaises.
M. le président. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis très sensible à vos propos.

5

NOMINATION DE MEMBRES D'ORGANISMES
EXTRAPARLEMENTAIRES

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires économiques a proposé des candidatures pour des organismes extraparlementaires.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du réglement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame :
- M. Yves Détraigne membre du comité consultatif pour la gestion du Fonds national pour le développement des adductions d'eau ;
- M. Pierre Hérisson membre du Conseil national de l'habitat ;
- M. Jean-Paul Alduy membre du conseil d'administration de la Cité des sciences et de l'industrie.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures quarante-cinq, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

M. le président. La séance est reprise.

6

ATTENTAT DANS L'ÎLE DE BALI

M. le président. Mes chers collègues, je voudrais exprimer la profonde indignation et la très vive émotion du Sénat devant l'effroyable attentat perpétré samedi 12 octobre dans l'île de Bali. (Mme la ministre déléguée, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)
Une fois de plus, le terrorisme aveugle a cruellement frappé, faisant plusieurs centaines de victimes : au moins 183 morts et plus de 300 blessés, parmi lesquels certains de nos compatriotes.
Après le 11 septembre 2001, les nations démocratiques sont à nouveau confrontées à la folie meurtrière et barbare, qui relève à l'évidence d'une volonté de fragiliser la paix et de menacer les libertés fondamentales dans le monde.
Au nom du Sénat tout entier, je voudrais assurer les victimes et leurs proches de notre profonde sympathie attristée.
Je souhaite également réaffirmer solennellement notre condamnation sans appel de cet acte lâche et odieux, ainsi que notre détermination unanime à mener un combat sans faille contre le terrorisme.

7

HOMMAGE
À UNE FONCTIONNAIRE DU SÉNAT

M. le président. Mes chers collègues, c'est avec une très grande tristesse et une vive émotion que nous avons appris le décès de Véronique Nguyen, jeune administratrice de vingt-huit ans, qui a trouvé la mort dans un dramatique accident de la circulation alors qu'elle se trouvait aux commandes de sa moto.
Dans ses différentes attributions, à la commission des lois, puis à la commission des finances, où je l'ai connue et appréciée, elle avait su se faire estimer de tous par sa personnalité forte et attachante, sa compétence et son total dévouement. Chacun se souvient notamment de sa contribution aux travaux de la mission commune d'information sur la décentralisation, de la commission spéciale sur le projet de loi relatif à la Corse ou de la commission d'enquête sur la délinquance des mineurs.
Au nom du Sénat tout entier, au nom de notre personnel, très affecté par sa disparition, j'exprime à sa famille et à ses proches notre sympathie sincèrement et profondément attristée.
Je vous propose, madame la ministre, mes chers collègues, de vous recueillir quelques instants. (Mme la ministre déléguée, Mme et MM. les sénateurs observent une minute de silence.)

8

SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION
DU PARLEMENT DE LOUISIANE

M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, je suis heureux de saluer la présence dans notre tribune officielle d'une délégation du Parlement de Louisiane, présidée par M. John Hainkel, président du Sénat de cet Etat.
J'ai eu l'honneur et le plaisir de recevoir à midi cette délégation, invitée par le groupe d'amitié France-Etats-Unis, présidé par notre éminent collègue M. Paul Girod.
Cette délégation séjourne en France à l'occasion du prochain bicentenaire du traité du 30 avril 1803 par lequel la France à cédé la Louisiane aux Etats-Unis.
J'exprime le souhait que ce bicentenaire soit l'occasion de fortifier les liens étroits que l'histoire a forgés entre cet Etat américain et la France, et qu'il permette d'intensifier les échanges culturels entre nos deux pays.

Au nom du Sénat tout entier, je souhaite la bienvenue à nos collègues louisianais et je forme des voeux pour que leur séjour en France soit agréable et fructueux, et contribue à renforcer l'amitié qui nous unit. (Mme la ministre déléguée, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.) 9

CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Mercredi 16 octobre 2002 :
A 15 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

1° Désignation d'un membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne en remplacement de Mme Maryse Bergé-Lavigne, démissionnaire ;
2° Suite du projet de loi relatif aux marchés énergétiques (urgence déclarée) (n° 406, 2001-2002).
Jeudi 17 octobre 2002 :
A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi relatif aux marchés énergétiques ;
A 15 heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance, avant 11 heures ;)

Ordre du jour prioritaire

3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du troisième avenant à l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles et à son protocole annexe (ensemble un échange de lettres) (n° 10, 2002-2003) ;
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à l'accord du 17 mars 1988, tel que modifié par l'avenant du 19 décembre 1991, entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne en matière de séjour et de travail (n° 9, 2002-2003) ;
(La conférence des présidents a décidé que ces projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune ;)
5° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 22 octobre 2002 :
A 9 h 30 :
1° Dix-sept questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :
- n° 3 de M. Jean-Patrick Courtois à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer (Règles de sécurité applicables aux pêcheurs à la ligne) ;
- n° 4 de M. André Trillard à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Conditions d'exercice du droit de vote) ;
- n° 6 de M. Claude Biwer à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Aides financières de l'Etat en faveur des départements) ;
- n° 12 de M. Philippe Madrelle à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Fonctionnement du système scolaire dans le département de la Gironde) ;
- n° 15 de Mme Brigitte Luypaert à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation (Renforcement de l'attractivité sociale du secteur de l'artisanat) ;
- n° 17 de M. Louis Souvet à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Effets de la loi du 11 mai 1998 par rapport à l'asile territorial) ;
- n° 25 de M. René-Pierre Signé à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants (Attribution du titre de reconnaissance de la nation aux réfractaires au STO) ;
- n° 29 de M. Dominique Leclerc à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable (Aménagement de la Loire et prévention des inondations) ;
- n° 34 de M. Didier Boulaud à Mme la ministre de la défense (Avenir du détachement de Fourchambault) ;
- n° 36 de M. Jean-Paul Alduy à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Procédure d'extension de périmètre des communautés d'agglomération) ;
- n° 37 de Mme Hélène Luc à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Postes de surveillants et d'aides éducateurs) ;
- n° 39 de Mme Marie-Claude Beaudeau à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Devenir de Vivendi-Environnement) ;
- n° 40 de M. Jean-Louis Masson à Mme la ministre déléguée à l'industrie (Conséquences des affaissements miniers en Lorraine) ;
- n° 41 de M. Joseph Ostermann à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Distillation à domicile) ;
- n° 42 de M. Jacques Oudin à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales (Retrait des insecticides Gaucho et Régent) ;
- n° 45 de M. Georges Mouly à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Développement de soins palliatifs à domicile) ;
- n° 50 de M. Jean-Claude Carle à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable (Réglementation du prix de l'eau) ;
A 16 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi (n° 21, 2002-2003).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 21 octobre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à trois heures, la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 21 octobre 2002.)
Mercredi 23 octobre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
Suite du projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi.
Jeudi 24 octobre 2002 :

Ordre du jour réservé

A 9 h 30 :
1° Question orale avec débat (n° 1) de M. Josselin de Rohan à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la politique ferroviaire ;
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe :
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance avant 17 heures, le mercredi 23 octobre 2002 ;)
A 15 heures :
2° Conclusions de la commission des affaires économiques (n° 360, 2001-2002) sur la proposition de loi de M. Jean-François Le Grand relative à l'implantation des éoliennes et la protection de l'environnement (n° 287, 2000-2001) ;
(La conférence des présidents a décidé de fixer au mercredi 23 octobre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;)
3° Conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi de M. Bruno Sido et de plusieurs de ses collègues relative à la couverture territoriale en téléphonie mobile de deuxième génération par la mise en oeuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale entre opérateurs (n° 409, 2001-2002).
(La conférence des présidents a décidé de fixer au mercredi 23 octobre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
Vendredi 25 octobre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 9 h 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir :
Suite du projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi.
Mardi 29 octobre 2002, à 10 heures, à 16 heures et le soir, mercredi 30 octobre 2002, à 15 heures et le soir, et jeudi 31 octobre 2002, à 9 h 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir :

Ordre du jour prioritaire

Sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi constitutionnelle relatif à la décentralisation.
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 28 octobre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à cinq heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 28 octobre 2002 ;)
Il sera procédé à un scrutin à la tribune lors du vote sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle).
Mardi 5 novembre 2002 :
A 9 h 30 :
1° Dix-sept questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :
- n° 43 de M. Francis Grignon à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Situation de la brasserie française) ;
- n° 44 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Pénurie de praticiens dans la région Nord - Pas-de-Calais) ;
- n° 46 de M. Pierre-Yvon Trémel à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Situation des établissements d'enseignement du breton) ;
- n° 47 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales (Avenir de la « prime à l'herbe ») ;
- n° 48 de Mme Danièle Pourtaud à M. le ministre de la culture et de la communication (Préservation du site de la « Ferme Montsouris ») ;
- n° 49 de M. Philippe Arnaud à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Modalités de calcul des pensions de réversion en cas de cumul avec des avantages personnels de vieillesse) ;
- n° 51 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de la culture et de la communication (Avenir de la haute couture et du prêt-à-porter) ;
- n° 52 de M. Jean-Louis Lorrain à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Assurances et responsabilité civile des hôpitaux) ;
- n° 54 de Mme Josette Durrieu à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable (Traitement des boues des stations d'épuration) ;
- n° 56 de M. Daniel Goulet à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Avenir des Pays) ;
- n° 57 de M. Nicolas About à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Déontologie médicale et libertés individuelles) ;
- n° 58 de M. Gérard Longuet à Mme la ministre déléguée à l'industrie (Application du pacte charbonnier) ;
- n° 59 de M. Yves Coquelle à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Respect du principe de liberté syndicale) ;
- n° 60 de M. Jean-Marc Todeschini à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer (Politique en matière de sécurité routière) ;
- n° 61 de Mme Michelle Demessine à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Situation des salariés licenciés de l'imprimerie SGIA) ;
- n° 62 de M. Bruno Sido à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Problèmes liés aux installations de distributeurs-échangeurs de seringues) ;
- n° 63 de Mme Hélène Luc à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Situation du service diabétologie du CHU Henri-Mondor de Créteil) ;
A 16 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi pour la sécurité intérieure.
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 4 novembre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 4 novembre 2002.)
Mercredi 6 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures :
1° Projet de loi autorisant la ratification de la convention pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international (n° 387, 2001-2002) ;
2° Projet de loi autorisant la ratification du protocole coordonnant la convention internationale de coopération pour la sécurité de la navigation aérienne « Eurocontrol » du 13 décembre 1960 suite aux différentes modifications intervenues (n° 388, 2001-2002) ;
A 16 heures et le soir :
3° Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure.
Jeudi 7 novembre 2002 :
A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure ;
A 15 heures et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;

Ordre du jour prioritaire

3° Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur le rapport du Gouvernement sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, déposé en application de l'article 52 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
(A la suite du Gouvernement interviendront successivement :
- le rapporteur général de la commission des finances [15 minutes] ;
- le rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux de la loi de financement de la sécurité sociale [15 minutes] ;
- le président de la commission des finances [15 minutes] ;
- le président de la commission des affaires sociales [15 minutes] ;
- et les orateurs des groupes.
La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ; l'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 6 novembre 2002.)
Mardi 12 novembre 2002 :

Ordre du jour réservé

A 10 heures :
1° Question orale européenne avec débat (n° QE-2) de M. Hubert Haenel à M. le ministre des affaires étrangères sur les travaux menés au sein de la Convention sur l'avenir de l'Europe ;
(La discussion de cette question orale européenne s'effectuera selon les modalités prévues à l'article 83 ter du règlement ;)
A 16 heures :
2° Question orale avec débat (n° 4) de M. Gérard Larcher à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la réorganisation des couloirs aériens en Ile-de-France.
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 8 novembre 2002.)
Mercredi 13 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure.
Jeudi 14 novembre 2002 :
A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure ;
A 15 heures et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures ;)

Ordre du jour prioritaire

3° Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure.
Lundi 18 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
Sous réserve de sa transmission, projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 (AN, n° 250).
(Les modalités de discussion de ce projet de loi seront fixées ultérieurement.)
Mardi 19 novembre 2002 :
A 9 h 30 :
1° Questions orales ;
A 16 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.
Mercredi 20 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et, éventuellement, le soir :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.
Jeudi 21 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 10 h 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir :
Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances pour 2003 (AN, n° 230).
(Les règles et le calendrier de la discussion budgétaire du jeudi 21 novembre au mardi 10 décembre 2002 seront fixés ultérieurement.)
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents s'agissant de l'ordre du jour établi en application de l'article 48, dernier alinéa, de la Constitution ?...
Ces propositions sont adoptées.
Par ailleurs, M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, a communiqué à la conférence des présidents le programme prévisisonnel de l'ordre du jour prioritaire du Sénat jusqu'à la fin du mois de février 2003.
Ce programme prévisionnel sera publié au Journal officiel et mis en ligne sur le site du Sénat. Je l'adresserai personnellement à chacun de nos collègues.
Je vais maintenant suspendre la séance pendant quelques instants pour me rendre auprès de la famille de notre excellente collaboratrice trop tôt disparue.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)

PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON,
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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COMMISSION D'ENQUÊTE SUR LE GROUPE
VIVENDI UNIVERSAL

Demande de discussion immédiate
d'une proposition de résolution



M. le président. En application de l'article 30 du règlement, M. Jack Ralite et Mme Danièle Pourtaud demandent la discussion immédiate de la proposition de résolution de M. Jack Ralite et des membres du groupe communiste républicain et citoyen tendant à la création d'une commission d'enquête sur l'utilisation des fonds publics par le groupe Vivendi Universal et sur le devenir des entreprises dudit groupe exerçant des missions de services publics lui appartenant (n° 405, 2001-2002).
Cette demande est signée par au moins trente sénateurs.
Conformément au quatrième alinéa de l'article 30 du règlement, il va être procédé à l'appel nominal des signataires.
Huissier, veuillez procéder à l'appel nominal.

(L'appel nominal a lieu.)
Ont signé cette demande et répondu à l'appel de leur nom : M. Jack Ralite, Mmes Danièle Pourtaud, Nicole Borvo, MM. Guy Fischer, François Autain, Mmes Marie-Claude Beaudeau, Marie-France Beaufils, Danielle Bidard-Reydet, MM. Robert Bret, Yves Coquelle, Mmes Annie David, Michelle Demessine, Evelyne Didier, MM. Gérard Le Cam, Paul Loridant, Mmes Hélène Luc, Josiane Mathon, MM. Roland Muzeau, Ivan Renar, Mme Odette Terrade, MM. Henri Weber, Serge Lagauche, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Yves Dauge, Jean-François Picheral, Daniel Raoul, Pierre-Yvon Trémel, Jean Besson, Bernard Piras, Guy Penne, Gilbert Chabroux, Michel Dreyfus-Schmidt, André Vantomme et Jean-Pierre Godefroy.

M. le président. La présence d'au moins trente signataires ayant été constatée, il va être procédé à l'affichage de la demande de discussion immédiate sur laquelle le Sénat sera appelé à statuer, conformément à l'article 30 du règlement, au cours de la présente séance, après l'expiration du délai minimum d'une heure et après la fin de l'examen du dernier texte inscrit par priorité à l'ordre du jour.
La demande va être communiqué sur-le-champ au Gouvernement.

11

DÉMISSION DE MEMBRES DE COMMISSIONS
ET CANDIDATURES

M. le président. J'ai reçu avis de la démission de :
- M. Jean François-Poncet comme membre de la commission des affaires culturelles ;
- M. André Vallet comme membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ;
Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats proposés en remplacement.
Ces candidatures vont être affichées et leur nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.

12

MARCHÉS ÉNERGÉTIQUES

Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 406, 2001-2002) relatif aux marchés énergétiques. [Rapport n° 16 (2002-2003).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi relatif aux marchés énergétiques que le Gouvernement a l'honneur de vous soumettre aujourd'hui a pour objet principal la transposition en droit français de la directive communautaire de 1998 relative « aux règles communes du marché intérieur du gaz naturel ».
Faut-il le rappeler, la France détient, parmi ses partenaires européens, la peu glorieuse avant-dernière place en matière de transposition des textes européens. Cette situation met souvent notre pays au banc des accusés et l'empêche de négocier au mieux de ses intérêts. Le Gouvernement compte remédier à cette situation.
Le projet de loi que je vous propose revêt une urgence particulière, et ce pour au moins deux raisons.
Tout d'abord, la France, qui aurait dû transposer cette directive voilà deux ans, a fait l'objet de procédures devant la Cour de justice européenne ; ces procédures doivent aboutir avant la fin de l'année. Outre le coût important qui pourrait en résulter, cela place notre pays dans une posture exclusivement défensive et affaiblit fortement notre capacité à faire entendre nos différences à Bruxelles.
De plus, cette absence de transposition handicape considérablement le développement de GDF, Gaz de France, en Europe. Certains pays comme l'Espagne ou l'Italie refusent, en effet, que GDF prenne des participations dans des entreprises nationales, prétextant l'absence d'ouverture légale du marché français ou, du moins, une certaine insécurité juridique. Or l'Europe bouge. C'est aujourd'hui que le marché se structure et que les groupes de demain se forment.
Il est donc impératif que nous mettions GDF en situation de se développer, et c'est pourquoi il y a urgence à transposer la directive de 1998.
La voie de l'ordonnance avait été, dans un premier temps, envisagée, mais le Gouvernement a choisi la voie législative, à la fois par respect pour les prérogatives du Parlement et du fait du caractère symbolique et politique de la libéralisation du marché du gaz.
Pour concilier ces deux impératifs d'urgence et de transparence, le Gouvernement vous a donc demandé de bien vouloir examiner ce projet de loi rapidement. Il a également souhaité, en plein accord avec les présidents des deux assemblées, déclarer l'urgence sur ce texte.
A cet égard, je voudrais remercier spécialement M. le rapporteur et les membres de la commission des affaires économiques de la diligence et de l'efficacité avec lesquelles ils ont procédé à l'étude de ce texte.
Avant de détailler le contenu du projet que nous vous soumettons, je souhaiterais souligner qu'il s'inscrit dans un ensemble plus vaste de réformes qui visent à refonder la politique énergétique française face à un monde qui change.
Le monde est plus ouvert. La libéralisation des marchés, notamment ceux de l'énergie, se poursuit en effet partout dans le monde, entraînant des restructurations et la création de grands ensembles régionaux.
Le monde est plus complexe. Les problèmes environnementaux, notamment ceux qui sont liés à l'effet de serre, s'y posent de manière globale et deviennent un élément déterminant du dialogue Nord-Sud, comme nous avons pu le constater lors du sommet de Johannesburg.
Enfin, le monde, est, hélas ! plus incertain : le 11 septembre 2001, les événements dramatiques qui se déroulent actuellement au Moyen-Orient, les récents attentats survenus au Yémen et en Indonésie démontrent bien que la sécurité d'approvisionnement reste une exigence d'une parfaite actualité.
Face à ces évolutions, le Gouvernement entend poursuivre et encadrer la libéralisation des marchés de l'énergie en veillant à une coexistence équilibrée entre concurrence et service public. C'est l'objet du présent projet de loi et des discussions en cours à Bruxelles concernant le deuxième « paquet » de directives gaz et électricité.
Le Gouvernement entend également donner les moyens aux deux grandes entreprises nationales que sont EDF et GDF de s'adapter à cette libéralisation et de devenir deux grandes entreprises européennes. Cela passe par une ouverture minoritaire de leur capital, qui leur permettra, d'une part, de lier des alliances et, d'autre part, de réunir les capitaux nécessaires à leur développement autrement que par un endettement au risque difficilement maîtrisable, comme nous avons eu l'occasion de le constater dans le cas d'autres entreprises publiques ou privées. Cette évolution se fera évidemment sans remettre en cause le statut des agents et en veillant à ce que le système spécifique des retraites bénéficie des garanties nécessaires.
Le Gouvernement entend, enfin, doter la France d'une loi d'orientation sur l'énergie, qui définira et précisera, à l'issue d'un grand débat national qui se tiendra en début d'année prochaine, nos grandes options énergétiques en matière de nucléaire, d'énergies renouvelables, de maîtrise de la sécurité et de l'approvisionnement de l'énergie.
Aujourd'hui, il s'agit donc de la première étape de cette politique. Le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter vise à l'ouverture progressive à la concurrence du marché gazier français, cette ouverture devant contribuer à la constitution d'un marché européen unique de l'énergie, pour le plus grand bénéfice des consommateurs. Il vise notamment à renforcer la compétitivité de nos industries consommatrices d'énergie et ainsi, indirectement, à favoriser la croissance et l'emploi.
Il n'est toutefois de bonne libéralisation sans une régulation adaptée.
Parce que l'énergie n'est pas un bien comme les autres, ce projet de loi institue deux garde-fous fondamentaux pour encadrer l'ouverture du marché à la concurrence. D'une part, il impose des obligations de service public à tous les acteurs de la filière gazière. D'autre part, il institue une autorité de régulation dotée de pouvoirs étendus.
Dans ces deux domaines, nous avons choisi d'aller au-delà de la directive de 1998, soit en anticipant sur les prochaines directives, en cours de négociation, soit en reprenant certaines dispositions de la loi de modernisation et de développement du service public de l'électricité. Les pouvoirs du régulateur sont ainsi largement identiques à ceux qui ont été confiés à la Commission de régulation de l'électricité par la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, dite loi « électricité ».
Cette anticipation est d'ailleurs souhaitable pour Gaz de France. Il importe en effet que les principes de régulation et les pratiques du régulateur soient suffisamment clairs, stables et connus pour que les investisseurs puissent sans crainte participer à l'ouverture du capital de GDF.
Le projet de loi s'articule autour de ces dispositions principales.
En premier lieu, est posé le principe de la libéralisation progressive et maîtrisée du marché de la fourniture de gaz naturel.
Le projet de loi donne ainsi la possibilité de choisir librement son fournisseur de gaz naturel aux clients éligibles, c'est-à-dire aux clients dont la consommation excède, pour un site donné, un certain seuil fixé par décret. Cette procédure, légèrement différente de celle que prévoit la loi « électricité », ne vise en aucun cas, cela va de soi, à contourner les prérogatives des assemblées mais seulement à donner à l'Etat la souplesse nécessaire pour gérer le processus d'ouverture du marché.
Les clients éligibles seront, dans un premier temps, les entreprises fortement consommatrices de gaz, soit 450 sites industriels, dont la consommation représente 28 % de la consommation nationale.
Cette liberté de choisir son fournisseur ne fait d'ailleurs que transcrire dans la loi une ouverture réalisée dans les faits depuis maintenant deux ans. Nos opérateurs gaziers ont en effet mis en place dès le 10 août 2000 un régime transitoire d'accès au réseau, applicable aux clients consommant plus de 25 millions de mètres cubes sur un même site. La tarification de cet accès est, par ailleurs, proche de celles que pratiquent les autres gestionnaires de réseaux européens.
L'ouverture du marché français est donc bien réelle ; elle se situe à un niveau comparable à celui que connaissent une majorité de nos partenaires européens. C'est ainsi que 25 % des clients éligibles ont changé de fournisseur et que trois nouveaux opérateurs sont déjà présents sur le marché.
Cette loi, par conséquent, ne changera pas immédiatement le degré d'ouverture réelle du marché. Elle n'est toutefois qu'une première étape puisque, conformément aux conclusions du sommet de Barcelone de mars 2002, l'éligibilité sera étendue aux clients professionnels en 2004, ce qui représente un degré d'ouverture du marché d'environ 60 %.
En revanche, il n'est pas prévu de modifier, à ce stade, la situation actuelle des ménages et des petits consommateurs, pour lesquels la fourniture reste assurée par Gaz de France ou par les distributeurs non nationalisés, les DNN. Ce sujet fait néanmoins, comme vous le savez, l'objet de discussions à Bruxelles, dans le cadre de la négociation des prochaines directives gaz et électricité.
Le Gouvernement a souhaité rendre éligibles, outre les entreprises fortement consommatrices, l'ensemble des cogénérateurs, ce qui représente 1 500 sites, et les dix-sept distributeurs non nationalisés, qui desservent aujourd'hui 1,7 million de Français et fournissent 4 % de la consommation nationale. Ces distributeurs, qui ont encore l'obligation de s'approvisionner auprès des transporteurs de gaz, doivent en effet disposer des moyens de mieux maîtriser leur rentabilité, et donc de mieux se préparer aux étapes ultérieures de l'ouverture du marché.
Le projet de loi ouvre l'activité de fourniture à l'ensemble des entreprises européennes qui sont titulaires d'une autorisation délivrée par l'Etat au vu de critères précis fondés sur leurs capacités, à la fois techniques, économiques et financières. Cette autorisation peut imposer à son titulaire des obligations de service public particulières en fonction de la nature des clients fournis et en fonction de l'activité assurée, notamment en ce qui concerne la sécurité d'approvisionnement.
Enfin, afin de permettre ce lien direct entre nouveaux fournisseurs et clients éligibles, le projet de loi impose aux transporteurs de gaz, dont Gaz de France, de donner accès à leur réseau de transport dans des conditions transparentes et non discriminatoires.
Il supprime également le monopole d'importation de gaz naturel que détenait Gaz de France ainsi que les obligations faites aux transporteurs et aux distributeurs de disposer d'un capital constitué à 30 % de fonds publics.
En deuxième lieu, ce projet de loi définit les obligations de service public qui s'imposent à tous les acteurs de la filière gazière, et j'ai souhaité à cet égard qu'un titre spécifique leur soit consacré. Ces obligations portent principalement sur la sécurité d'approvisionnement, la péréquation tarifaire, la solidarité envers les plus démunis.
La sécurité d'approvisionnement de la France est, pour l'instant, assurée par la diversité des contrats de long terme conclus par GDF avec la Russie, l'Algérie, la Norvège et, demain, l'Egypte. L'ouverture du marché à la concurrence suppose que l'Etat dispose des moyens de vérifier que cette sécurité reste globalement garantie par la diversité des contrats de long terme des nouveaux fournisseurs. A cet effet, l'autorisation délivrée au fournisseur est assortie de l'obligation de communiquer chaque année un plan prévisionnel d'approvisionnement et, en fonction des volumes concernés et du type de clients desservis, de présenter une diversification d'approvisionnement suffisante. Le principe de la continuité de fourniture aux clients non éligibles et aux distributeurs est, bien entendu, réaffirmé.
S'agissant de la péréquation tarifaire, je rappelle que, à la différence des tarifs d'électricité, qui est une énergie non substituable, les tarifs de vente de gaz ne sont pas identiques sur tout le territoire. Toutefois, ils sont fortement harmonisés. Il est proposé d'inscrire ce principe dans la loi : les différences de tarif ne pourront ainsi excéder les différences relatives aux coûts de raccordement des distributions au réseau de transport du gaz naturel. Les prix seront donc identiques à l'intérieur des vingt-sept zones de desserte qui couvrent le territoire français, les six de Gaz de France et les vingt et une des distributeurs non nationalisés. Entre ces zones, les différences de prix resteront également limitées : de l'ordre de 10 %.
S'agissant de la solidarité avec les plus démunis, le projet de loi prévoit notamment le maintien de l'accès au gaz pour les personnes en difficulté. Par ailleurs, il convient de rappeler que le contrat de groupe entre l'Etat et Gaz de France institue déjà un dispositif gratuit d'actions de diagnostic des installations des particuliers qui se trouvent en situation de précarité.
Enfin, sont également prévues des obligations générales en matière de protection de l'environnement, de sécurité de réseaux et de qualité et de sécurité des produits fournis.
En troisième lieu, le projet de loi définit les principes d'une régulation destinée à garantir le bon fonctionnement du marché et la coexistence harmonieuse du service public et de la concurrence.
A cet égard, il reprend une grande majorité des dispositions qui sont déjà prévues par la loi « électricité » et propose d'élargir les compétences de l'actuelle commission de régulation de l'électricité au secteur du gaz.
Il confie également à l'Etat la fixation des tarifs de vente de gaz aux clients non éligibles, après avis de la commission de régulation de l'électricité et du gaz, la CREG, et celle des tarifs d'accès au réseau de transport, sur proposition de cette même autorité. Des dérogations à ces tarifs pourront être accordées aux opérateurs désireux de développer de nouvelles infrastructures, afin de garantir le maintien d'un réseau de qualité et adapté à une demande de gaz en forte croissance.
Ce projet de loi impose également aux opérateurs l'obligation de procéder à une séparation comptable des activités de transport, de distribution et de stockage afin de permettre à la CREG de vérifier l'absence de pratiques anticoncurrentielles ou de subventions croisées entre les activités qui font l'objet d'un monopole et celles qui sont soumises à la concurrence.
En revanche, à la différence de la loi « électricité », le Gouvernement ne propose pas de mettre en place chez les opérateurs gaziers l'équivalent du réseau de transport d'électricité - département largement indépendant au sein d'EDF dont, par exemple, les investissements sont arrêtés par la commission de régulation de l'électricité ou dont le directeur est nommé par le ministre.
Deux raisons justifient ce choix.
En premier lieu, le marché du gaz est profondément différent du marché de l'électricité. C'est un marché encore en développement, où il existe une véritable concurrence, à la fois avec d'autres énergies, comme le fioul, et entre les différents opérateurs publics ou privés. Il a donc semblé au Gouvernement que, dans la mesure où la renationalisation des groupes privés n'était pas à l'ordre du jour, un dispositif semblable à celui qui est applicable au secteur de l'électricité ne pouvait être adopté.
En second lieu, le projet permet de s'assurer que les transporteurs ne pourront utiliser le réseau de transport à des fins anticoncurrentielles. La CREG dispose en effet de la capacité de demander aux opérateurs de transport de procéder aux améliorations et aux investissements nécessaires pour permettre le raccordement d'un client le demandant, dans la mesure, bien entendu, où ces investissements se trouveraient justifiés en termes économiques.
En conclusion, les trois axes principaux de la loi - libéralisation progressive du marché, définition précise de missions de service public, régulation étendue - permettront d'ouvrir de manière maîtrisée le marché du gaz et de se conformer à la directive européenne actuelle.
Outre la transposition de la directive de 1998, le projet de loi comprend également deux autres volets mineurs.
L'un concerne des dispositions de simplification administrative en matière de réglementation relative aux stockages de gaz naturel, d'hydrocarbures liquides et de produits chimiques. Ces stockages sont en effet régis par trois ordonnances présentant des différences qui génèrent une certaine incompréhension de la part des collectivités locales. Nous avons souhaité une clarification.
L'autre volet concerne une disposition « électrique » concernant les obligations d'achat imposées à EDF et visant à éviter tout détournement de la loi « électricité » dans ce domaine.
Je tiens à préciser à cet égard, pour éviter tout malentendu, que cette disposition ne constitue en aucun cas une remise en question de l'engagement déterminé du Gouvernement en faveur des énergies renouvelables. La France entend en effet se donner les moyens d'atteindre l'objectif de 21 % fixé par la directive européenne quant à la part d'électricité produite par les énergies non renouvelables en 2010.
A cet effet, le Gouvernement est désireux de prendre au plus vite les dispositions nécessaires pour faciliter le développement des énergies renouvelables et achever de mettre en place les dispositions prévues par la loi « électricité », notamment les obligations d'achat ou la programmation pluriannuelle des investissements, dont une version provisoire pourrait être arrêtée dans l'attente des conclusions du débat sur l'énergie que j'ai mentionné tout à l'heure.
Par ailleurs, le Gouvernement n'avait pas souhaité introduire d'autres dispositions relatives à l'électricité pour éviter toute confusion. Il accueille néanmoins avec grand intérêt l'initiative de M. le rapporteur, qui a souhaité vous soumettre plusieurs amendements destinés soit à étendre certaines dispositions de ce projet de loi sur le gaz au secteur de l'électricité, soit à modifier certaines dispositions de la loi « électricité » qui ont été jugées inadéquates avec le recul. Je laisse à M. le rapporteur l'opportunité de les présenter avant de les commenter moi-même.
En conclusion, je souhaite que ce projet de loi contribue à témoigner de la volonté de la France de participer activement à la construction européenne et de tirer les bénéfices d'une libéralisation maîtrisée, tout en restant fidèle à ses principes d'égalité et de solidarité, qui sont au fondement même du service public.
En conclusion, ce projet constitue un pas supplémentaire vers les réformes structurelles dont notre pays a besoin pour affronter le monde d'aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées du groupe du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais dire, en guise d'introduction, qu'il y a lieu de se féliciter de la procédure qui a été choisie.
Transposer vite et bien, tel est l'objet du projet de loi sur les marchés énergétiques que le Gouvernement a inscrit à l'ordre du jour du Sénat au tout début de la session ordinaire.
J'étais favorable à l'urgence, je vous remercie de l'avoir rappelé, madame la ministre. Je l'ai dit devant notre commission des affaires économiques lorsque vous avez été auditionnée en juillet dernier. Le Premier ministre a eu le courage, qui avait fait défaut à d'autres avant lui, de présenter cette transposition par voie de projet de loi et non par le biais d'une ordonnance dont nous n'aurions eu à connaître que la loi d'habilitation.
Fallait-il discuter de ce texte selon la procédure de droit commun, qui prévoit, au minimum et au total, trois lectures dans chaque assemblée ? Je ne le crois pas et tiens à souligner que c'est effectivement à ma demande expresse - vous l'avez rappelé tout à l'heure, madame la ministre -, demande appuyée par le président de la commission des affaires économiques et du Plan, M. Gérard Larcher, que le chef du Gouvernement a accepté de déroger à la règle qu'il s'est fixée de ne pas recourir à l'urgence dans la discussion parlementaire.
Mes chers collègues, il y a bien urgence à transposer la directive n° 98-30 sur la libéralisation du marché du gaz qui a été négociée en 1997 sous présidence française. Elle prévoit une ouverture progressive du marché au 10 août 2000, au 10 août 2003 puis, au plus tard, au 10 août 2008, la part libéralisée du marché devant progressivement passer de 20 % à 28 % puis à 33 %.
Elle est entrée en vigueur le 10 août 2000, date butoir avant laquelle elle aurait dû être transposée. Malgré les demandes réitérées du Sénat, la commission des affaires économiques m'ayant désigné rapporteur à titre officieux dès le printemps 2000, le précédent gouvernement n'est pas allé au-delà du dépôt d'un projet de loi de transposition, le 17 mai 2000.
De ce fait, la France, seul pays en retard pour la transposition, est menacée d'être condamnée à une astreinte, par la Cour de justice des Communautés.
De son côté, le développement de Gaz de France est bloqué à la frontière des Pyrénées. Les Espagnols qui ont, au moins juridiquement, transposé la directive, lui refusent en effet l'accès à de nouveaux marchés, considérant que le marché français est fermé. Notre opérateur historique - vous l'avez rappelé tout à l'heure, madame la ministre - a pourtant pris, dès août 2000, des dispositions destinées à mettre la directive en application. Le résultat, c'est qu'aujourd'hui 5 % du marché total français a changé de fournisseur depuis deux ans.
A Bruxelles, les négociations relatives à la seconde directive sur la libéralisation des marchés progressent. Lors du Conseil européen de Barcelone de mars 2002 - que vous avez évoqué tout à l'heure, madame la ministre - les Etats sont convenus que les consommateurs européens autres que les ménages, c'est-à-dire, pour l'essentiel, les PME et les PMI, auront le libre choix de leur fournisseur d'électricité et de gaz à partir de 2004, ce qui représentera 60 % du marché.
Je saisis cette occasion pour dire au Gouvernement, en la personne de Mme la ministre déléguée à l'industrie, que nous le soutenons pleinement dans ses efforts - je pense notamment à la réunion du Conseil Energie qui s'est tenue il y a une dizaine de jours - pour préserver les intérêts français dans le secteur gazier.
Je note à ce propos que les services de Bruxelles évoquent de plus en plus des préoccupations qui nous sont chères. Ainsi, à Barcelone, ont été pour la première fois mentionnées de nouvelles mesures à prendre dans le domaine de l'énergie pour préciser les obligations de service public, renforcer la sécurité d'approvisionnement et protéger les régions les plus reculées et les groupes les plus vulnérables de la population.
Je voudrais, si vous le permettez, mes chers collègues, vous livrer quelques éléments qui seront utiles au débat qui s'engage et à l'examen des amendements qui ont été déposés par un grand nombre d'entre vous et par moi-même, au nom de la commission.
Je ferai d'abord un bref rappel du contenu de la directive, n° 98-30, qui se résume en trois idées forces : l'ouverture progressive du marché à la concurrence ; l'adaptation aux situations nationales grâce à la faculté d'imposer des obligations de service public et à la possibilité de préserver des contrats d'approvisionnement de long terme appelés aussi contrats take or pay ; enfin, l'institution d'un droit d'accès au réseau pour les clients éligibles, c'est-à-dire ceux qui jouiront du libre choix de leur fournisseur.
J'en viens à la situation du marché gazier mondial et à l'approvisonnement de la France et de l'Europe.
Les réserves mondiales de gaz naturel, de même que la production gazière, sont situées, environ pour les deux tiers, en Russie et au Proche-Orient. La Russie détient à elle seule plus de 40 % des stocks mondiaux.
L'Europe, de son côté, est autonome à hauteur de 40 %. Les grands producteurs européens sont la Grande-Bretagne, l'Allemagne et les Pays-Bas, auxquels on peut ajouter la Norvège et l'Italie. Ce sont les seuls à pouvoir à peu près satisfaire leurs besoins. Parce que les champs gaziers sont éloignés des zones de consommation, la question du transport de la matière première est, vous l'aurez compris, essentielle dans le secteur gazier : le coût d'acheminement constitue le principal coût de production.
Dans ce contexte, mes chers collègues, la question des stockages gaziers est cruciale puisque la consommation gazière intra-annuelle varie fortement en fonction de la température.
Nous consommons en effet beaucoup plus de gaz en hiver qu'en été. C'est pourquoi la question des stockages, qui fait actuellement l'objet de débats pour la seconde directive, n'était pas évoquée dans la première directive.
Je rappelle également que les investissements gaziers sont particulièrement lourds : 185 millions d'euros pour un méthanier de 135 000 tonnes, 250 millions d'euros pour un terminal de gazéification et un million d'euros pour un kilomètre de conduite à haute pression !
Sachez enfin, pour avoir une vision d'ensemble du problème posé, que la consommation de gaz a quintuplé en Europe depuis les années 1970. Selon les dernières projections, elle pourrait croître encore de près de 60 % entre 2000 et 2020, et ce pour deux raisons principales : d'une part, l'accroissement de la production d'électricité grâce à des installations gazières - d'où l'évocation de cet aspect du problème dans le projet de loi - et, d'autre part, la propreté du gaz, qui, parce qu'il est moins riche en carbone que les autres produits énergétiques classiques, émet relativement moins de gaz carbonique.
La France importe actuellement 96 % de sa consommation gazière. L'essentiel de sa production, désormais résiduelle par rapport aux besoins, est issue du gisement de Lacq.
Les importations françaises, quant à elles, proviennent, comme vous l'avez dit, madame la ministre, de Norvège pour 30 %, de Russie pour 29 %, d'Algérie pour 29 % également, ainsi que de nouveaux pays fournisseurs : Egypte, Oman, voire Nigeria. Cela montre que nos importations se diversifient. C'est un bon choix en termes de sécurité d'approvisionnement.
La consommation gazière française est marquée par son caractère fortement cyclique : on importe du gaz en été ; on le stocke et on le consomme en hiver. Ainsi, aux jours les plus froids de l'année, les stockages assurent 60 % de la demande.
En ce qui concerne le transport, comme en électricité, il existe deux réseaux gaziers. Le premier réseau de transport compte 36 000 kilomètres de conduites possédées par Gaz de France pour 90 % et par Gaz du Sud-Ouest pour 10 %. Globalement, Gaz du Sud-Ouest est une filiale de TotalFinaElf à 70 % et de Gaz de France à 30 %. Le second réseau, le réseau de distribution, s'étend sur 170 000 kilomètres et appartient, je tiens à le rappeler, aux collectivités locales. Il est exploité en grande majorité par Gaz de France, qui est en position de distributeur, y compris dans les zones où Gaz du Sud-Ouest assure le transport. Mais il est assuré à hauteur de 4 % par les distributeurs non nationalisés, les DNN.
Ces DNN sont des régies communales ou intercommunales ou des sociétés d'économie mixte locales qui n'ont pas été nationalisées en 1946 au motif qu'elles étaient détenues par des collectivités locales et qu'elles constituaient des services publics locaux.
Ces réseaux - Gaz de France et les DNN - permettent de desservir 75 % de la population française en gaz naturel.
Je vous rappelle que, contrairement à ce qui est prévu pour l'électricité, le législateur n'a jamais institué une obligation de desserte gazière en tous points du territoire. Tout au plus une loi de 1998 a-t-elle prévu une extension du réseau dans le cadre d'un « plan national de desserte », dans des conditions économiques qui assurent une rentabilité théorique minimale, c'est-à-dire sans perte pour Gaz de France.
En outre, le prix du gaz n'est pas totalement péréqué sur le territoire. Si le coût du transport l'est en partie, les tarifs de vente varient en fonction d'une grille qui comporte six niveaux. Celle-ci est établie selon la distance de chacune des distributions par rapport au réseau national de transport à haute pression.
Le projet de loi comporte trois grandes parties : les titres I à IV et le titre VI transposent le contenu de la directive ; le titre V insère le stockage de gaz dans le code minier et homogénéise les dispositions relatives au stockage souterrain : je reviendrai sur ce point au cours de mon exposé ; enfin, le titre VII comporte des dispositions diverses, notamment l'article 20 relatif à l'électricité, sur lequel je vous proposerai de revenir également dans quelques instants.
En tant que rapporteur de ce projet de loi, je vous proposerai deux grandes orientations.
Il faut savoir que, depuis la présentation du texte en conseil des ministres, le 25 septembre dernier, j'ai pu auditionner - le temps m'était compté - soixante-cinq personnes : syndicats, entreprises, régulateurs, experts, dont vous trouverez la liste dans mon rapport. J'en ai tiré la conviction qu'il fallait transposer vite et bien la directive.
Plusieurs interlocuteurs m'ont demandé d'anticiper sur les dispositions de la seconde directive relative à la libéralisation des marchés de l'énergie. J'ai refusé d'accéder à leur demande, car je considère qu'il faut examiner chaque chose en son temps.
C'est pourquoi je vous propose de conserver l'économie générale du projet de loi. Il est cependant possible d'en enrichir le contenu en ce qui concerne tant les dispositions ayant trait au gaz que les mesures relatives à l'électricité.
Dans le domaine du gaz, je vous soumettrai quatre propositions : premièrement, réaffirmer la valeur du service public et le rôle des collectivités concédant la distribution d'électricité ; deuxièmement, garantir la transparence des tarifs pratiqués aux clients non éligibles ; troisièmement, faciliter les échanges gaziers pour les clients éligibles ; enfin, quatrièmement, renforcer la sécurité des personnes au-delà du compteur - c'est un sujet qui est malheureusement de nouveau d'actualité à la suite des accidents que nous avons connus récemment.
Le titre V du projet de loi tend à modifier et à unifier le régime juridique des stockages souterrains de gaz, d'hydrocarbures liquides ou liquéfiés et de produits chimiques de base à destination industrielle. En effet, malgré la similitude des situations qui les caractérise, ceux-ci sont actuellement régis par trois textes : l'ordonnance du 25 novembre 1958 relative au stockage souterrain de gaz ; l'ordonnance du 23 décembre 1958 relative au stockage souterrain d'hycrocarbures liquides ou liquéfiés ; enfin, la loi du 31 décembre 1970 relative au stockage souterrain des produits chimiques de base à destination industrielle.
Comme le souligne l'exposé des motifs du projet de loi, ces textes prévoient plusieurs procédures différentes pour l'élaboration d'actes administratifs de même nature. Il en résulte des interrogations au sein tant des services chargés de la sécurité et de l'environnement que des collectivités locales et des populations.
Le droit minier, dont l'objet est d'allouer la ressource rare que constituent les richesses du sol, est particulièrement approprié pour régir les stockages souterrains. C'est ce qui me conduit à ne vous présenter que des amendements rédactionnels sur ce titre V.
S'agissant, enfin, de l'électricité, je crois utile de saisir l'occasion offerte par ce texte pour procéder à un « toilettage » de certaines dispositions de la loi « électricité » du 10 février 2000, qui avait été excellement rapportée par notre collègue Henri Revol.
Je ne vous cacherai pas que j'avais initialement envisagé le dépôt d'une proposition de loi sur ces sujets, notamment avec mes collègues Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques, Henri Revol et Jacques Valade. Mais le calendrier de l'Assemblée nationale est si chargé qu'il interdit d'envisager l'adoption d'un tel texte avant le premier semestre 2003, voire ultérieurement, quand bien même le Sénat aurait profité d'une « niche » parlementaire. C'est pourquoi, tout en rendant à César ce qui lui appartient et en remerciant mes collègues de leur contribution à la préparation de ce texte, j'ai choisi de vous suggérer d'insérer dans le présent projet de loi un titre VII ; ces dispositions s'ajouteraient à l'actuel article 20, qui tend à préciser le régime de l'obligation d'achat de courant aux cogénérateurs.
Je vous présenterai donc divers articles additionnels, sous forme d'amendements qui tendent, pour l'essentiel, à simplifier les modalités de financement du fond du service public de la production d'électricité - le fameux FSPPE - en le transformant en mécanisme de financement du service public de l'électricité, et à modifier le mode de calcul de la taxe qui abonde ce dispositif, afin de ne pas pénaliser la compétitivité des entreprises qui consomment de l'électricité.
Je vous proposerai, en outre, mes chers collègues, d'abord de faire bénéficier EDF et les distributeurs non nationalisés de l'obligation d'achat de courant électrique dans les mêmes conditions que les autres acteurs, ensuite de modifier la procédure relative à l'abaissement du seuil d'éligibilité en électricité, enfin de supprimer de la loi « électricité » des dispositions contraires à la directive de 1996.
Avant de conclure mon propos, je souhaite vous demander, madame la ministre, de confirmer devant le Sénat ce que vous avez dit devant la commission des affaires économiques, à savoir que la transposition de cette directive sera sans incidence sur le statut des personnels gaziers ; vous avez d'ailleurs répondu pour les personnels gaziers et pour les électriciens.
Si j'ai pris acte des réserves exprimées par les membres de l'opposition sénatoriale, notamment la semaine dernière et encore ce matin, j'ai aussi observé que, sur de nombreux sujets, nous partagions l'objectif de préserver les intérêts des clients non éligibles et de protéger la sécurité des utilisateurs. Je forme donc des voeux, au début de ce débat, pour que notre discussion offre l'occasion d'échanges fructueux, afin que nous puissions tenir compte des propositions qui ont été présentées par la majorité la semaine dernière et ce matin, ainsi que de celles qu'a faites l'opposition. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Gérard Larcher, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, enfin, après deux ans d'attente, de tentatives avortées, de réticences et d'oppositions réitérées, et ce malgré les demandes du Sénat, la directive relative à la libéralisation du marché gazier est soumise à notre discussion.
Sans vouloir « pleurer sur le lait répandu », quel retard pris sur ce sujet ! La France n'aurait-elle pas pu transposer ce texte que l'opérateur historique gazier lui-même attendait ? Notre position dans la négociation en cours sur la seconde directive gazière n'aurait-elle pas été renforcée, au lieu d'être affaiblie par le sentiment persistant que notre pays « traîne les pieds » pour transposer les normes qu'il élabore à Bruxelles ?
La situation de GDF a-t-elle été renforcée par cette attitude dilatoire ? L'image de l'Europe et de la construction européenne en a-t-elle été améliorée dans notre opinion publique ? A ces deux questions, les réponses sont, à l'évidence, négatives.
Mais, après le temps des regrets, hâtons-nous désormais de transposer ce texte, comme nous y invite le Gouvernement.
Se hâter, voilà un verbe bien approprié pour qualifier les conditions dans lesquelles ont travaillé la commission des affaires économiques et son rapporteur, auquel je souhaite tout spécialement rendre ici un hommage public : soixante-cinq auditions, une capacité d'attention, d'écoute des uns et des autres... Et ce n'est pas un propos de circonstance qu'en tant que président de commission j'adresse à un rapporteur !
M. François Truçy. Très bien !
M. Ladislas Pontiatowski, rapporteur. Je vous remercie !
M. Gérard Larcher, président de la commission. M. Poniatowski a réalisé, en moins de quinze jours, un travail qui permettra à nos collègues de toutes sensibilités de prendre la mesure du problème auquel nous sommes confrontés, et de le faire publiquement et sereinement, dans le respect des opinions de chacun. C'est aussi cela la discussion parlementaire : il s'agit d'ouvrir le débat.
C'est pouquoi nous sommes tous ici sensibles, madame la ministre, au fait que vous ayez su entendre ceux, à commencer par M. le rapporteur, qui vous demandaient de ne pas légiférer par ordonnance.
M. le rapporteur vous a présenté ses observations sur le texte et les conclusions de la commission ; il continuera de le faire au cours de la discussion. Pour ma part, je souhaite évoquer des sujets qui intéressent la commission et qui sont abordés par le présent projet de loi : je veux parler du service public, de l'ouverture au marché et de la régulation des activités autrefois sous monopole.
A mes yeux, le service public constitue l'un des éléments essentiels du lien social et du mode de vivre ensemble. Le coeur du service public, c'est bien le cahier des charges des prestations auxquelles la collectivité publique considère que chacun de ses membres a droit. La nature, l'histoire, leurs désirs placent nos concitoyens dans des situations différentes selon qu'ils vivent en ville ou à la campagne, dans des zones denses ou dans des zones d'habitat dispersé, sur le causse du Larzac ou dans la métropole lilloise. Par-delà ces différences objectives, la France a estimé - et estime toujours - que ses citoyens avaient droit à un accès partagé et pour tous à un certain nombre de services tel que le gaz.
Dans ce cadre, la référence aux « obligations » de service public qui est faite dans les documents européens - cette référence est de plus en plus fréquente - m'apparaît comme une chance. La conception française des missions de service public, au financement desquelles, reconnaissons-le, l'Etat ne s'intéresse guère, nous induit malgré tout souvent en erreur. Les services publics ont un coût. Il appartient à l'Etat de le répartir de façon équitable entre les Français et non pas de faire comme si de rien n'était, sans se préoccuper des semelles de plomb attachées aux pieds des opérateurs historiques. Je prendrai l'exemple du financement du service public de l'électricité. Le mécanisme, institué de façon inappropriée en 2000, malgré les mises en garde du Sénat - et tout particulièrement celles de notre collègue Henri Revol - montre aujourd'hui toutes ses limites et sa précarité.
Je n'insisterai pas, au surplus, sur le poids que les obligations d'achat d'énergies renouvelables - éoliennes ou micro-centrales - font peser sur EDF, d'abord, sur le consommateur français, ensuite, pour développer des énergies à un prix sans rapport avec les coûts de production des filières traditionnelles.
Je voudrais évoquer également la concurrence et le service public, deux objectifs qui ne sont, à mon avis, ni incompatibles ni inconciliables.
La transposition de cette directive gazière s'inscrit dans un effort résolu de clarté qui doit amener à accroître la compétitivité des entreprises dans le cadre du marché unique européen.
Aujourd'hui, les grands consommateurs européens d'énergie sont handicapés par le prix des fournitures et des consommations intermédiaires. Comme le disait l'un de nos collègues devant la commission des affaires économiques lors de la présentation du rapport de Ladislas Poniatowski, le prix du sodium importé de Chine est dramatiquement plus faible que celui de cette même matière première produite en France. Il faut éviter que cela ne se produise pour l'énergie. La libéralisation du marché de l'énergie tend donc à la pérennisation de certaines industries fortement consommatrices d'électricité ou de gaz, telles les productions de verre, d'acier, d'aluminium ou de papier.
Reste à savoir, M. le rapporteur l'a rappelé il y a un instant, quelles garanties de transparence seront données aux clients non éligibles. Il ne convient pas, en effet, que ceux-ci et, en premier lieu, les particuliers, fassent les frais de la fin du monopole et de la libéralisation et que les transferts de charges entre les activités des entreprises intégrées - contrôlées par Bruxelles - n'aient pas leur pendant dans des transferts de charges des clients éligibles vers les clients non éligibles.
M. Gérard Delfau. Eh oui !
M. Gérard Larcher, président de la commission. En la matière, le projet de loi contient des dispositions sans ambiguïté, que notre rapporteur vous proposera d'ailleurs de rendre encore plus explicites afin de préciser que les clients non éligibles ne paieront pas les baisses de prix pouvant être obtenues par les clients éligibles.
J'aborderai enfin la régulation, sujet essentiel qui mériterait à lui seul de longs débats.
Mes chers collègues, la régulation doit être une réponse technique à des problèmes techniques.
Dans ce jeu complexe entre le service public et la libéralisation et dans les relations entre les entreprises elles-mêmes pour l'accès aux réseaux gaziers, quelle doit être la position de l'autorité de régulation ?
D'aucuns défendront ici, je le sais, la vision quelque peu romantique d'une suppression de l'autorité de régulation au bénéfice de l'exercice direct par le Parlement de l'ensemble des compétences en matière de régulation.
Hélas ! il serait vain de croire que le Parlement puisse, eu égard aux délais qu'implique le débat dans nos assemblées, régler les problèmes d'accès aux réseaux gaziers : en matière de régulation, mieux vaut confier à une autorité indépendante des pouvoirs encadrés et limités - j'insiste sur ces deux mots -, comme nous y obligent les directives européennes. La vision idyllique d'un Parlement omnipotent y perd, certes, mais cette vision est-elle conforme à l'esprit de nos institutions ? La Constitution de 1958 n'est ni celle de 1793 ni celle de 1848...
Je tiens d'ailleurs à souligner qu'en matière de régulation seul le politique conserve « la compétence de sa compétence » et qu'il ne saurait être question de voir les autorités de régulation sortir du régime auquel le législateur les a soumises. Il revient à la régulation de procéder à des choix techniques, conformément aux principes définis par le législateur, et, s'il advenait que le régulateur suive une autre voie, nous serions là - j'en suis certain - pour lui rappeler le droit chemin !
Il m'apparaît donc nécessaire de renforcer les moyens dont disposent les autorités de régulation, à commencer par ceux de la future commission de régulation de l'énergie. L'intitulé même que nous propose notre rapporteur nous invite à nous interroger sur ce point. Je sais que des amendements vous seront présentés en ce sens.
Permettez-moi de vous faire part, madame la ministre, du soutien des membres de la commission dans la négociation, la rude négociation à laquelle vous participez, dans le cadre de la préparation de la seconde directive.
Ne donnons pas à nos concitoyens le sentiment qu'une nouvelle fois nous nous serions fait imposer par Bruxelles ce avec quoi nous n'étions pas d'accord. Il m'apparaît essentiel d'être clair. Eventuellement, marquons nos divergences dans le débat que nous avons avec nos partenaires : je pense ici à la nécessité essentielle, stratégique, même, de préserver nos stockages souterrains. Ne redoutons pas le conflit : c'est aussi le conflit qui fera avancer le débat.
Les faux-semblants et les accords d'apparence - trop souvent des accords « retour de Bruxelles » - ne sont pas seulement mauvais pour la France : ils sont aussi parfois catastrophiques pour la construction de l'Europe.
Vous l'aurez compris, madame la ministre, le Sénat et sa commission des affaires économiques vous soutiennent dans ces efforts, et ils vous le démontreront tout au long de ce débat, voire au-delà si cela s'avérait nécessaire.
En tout cas, je fais confiance à notre rapporteur et au Sénat tout entier pour que la transposition de la directive soit aussi l'occasion pour nous de donner notre vision du secteur énergétique, notamment gazier, pour le développement économique et social de notre pays et, au-delà, pour son avenir. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 57 minutes ;
Groupe socialiste, 52 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 39 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 34 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 25 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 25 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Bernard Fournier.
M. Bernard Fournier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous discutons aujourd'hui en première lecture du projet de loi relatif aux marchés énergétiques qui, adopté en conseil des ministres le 25 septembre 2002, transpose dans notre droit la directive n° 98-30 du 22 juin 1998 concernant les règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel.
Le Gouvernement, dans sa sagesse, a inscrit ce texte à l'ordre du jour du Sénat, répondant ainsi à une demande de la Haute Assemblée que le précédent cabinet n'avait malheureusement pas voulu entendre.
Une fois n'est pas coutume, il faut, me semble-t-il, saluer l'urgence déclarée sur ce texte, car cette urgence-là est à propos. En effet, contrairement à ce que nous avons pu observer sous la dernière législature, elle n'est pas motivée par le souci de court-circuiter les travaux parlementaires, mais se veut être la réponse rapide à une situation de blocage juridique et politique qui mettait notre pays, et son industrie gazière, dans l'embarras.
Quoique certains me considèrent comme un « européiste » un peu frileux, je ne peux pas me réjouir de ce que la France, qui reste l'une des chevilles ouvrières de l'Union, en soit l'un des plus mauvais élèves lorsqu'il s'agit d'appliquer les règles qui touchent à la substance historique de l'Europe : le marché commun des matières premières et de l'énergie. N'oublions pas que l'Europe moderne a commencé par la Communauté du charbon et de l'acier !
Depuis deux ans, à cause des divisions de l'ancienne majorité, notre pays est en position délicate dans la négociation de la seconde directive, et notre entreprise nationale, fleuron de notre tissu industriel, Gaz de France, est gênée dans sa conquête des marchés européens. Tout cela sans compter que le contribuable français risque d'être sollicité pour contribuer au paiement des astreintes qui ne manqueraient pas d'assortir une condamnation par la Cour de justice des Communautés pour défaut de transposition. Madame la ministre, la facture que vous laisse votre prédécesseur est donc lourde, et je salue le courage politique du chef du Gouvernement qui a su réagir efficacement.
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Bernard Fournier. Ne nous y trompons pas : c'est à cause des contradictions idéologiques et des positions dogmatiques des membres de son gouvernement que M. Jospin avait fini par renoncer à s'engager à ouvrir le marché du gaz.
Je vous rappellerai simplement les propos que M. Pierret, alors secrétaire d'Etat à l'industrie, tenait en novembre 1999 : « Je proposerai au Parlement d'examiner le projet de loi de transposition avant la date limite du 10 août 2000. »
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Exact !
M. Bernard Fournier. « J'ai d'ailleurs pour cela une motivation supplémentaire : la France, qui prend la présidence de l'Union européenne en juillet 2000, se doit d'être exemplaire pour le gaz. »
M. Dominique Braye. Et pour le reste !
M. Bernard Fournier. A la veille de l'élection présidentielle, nous demeurions comme soeur Anne, mais nous n'avons rien vu venir depuis notre gauche...
Sans être rébarbatif, je veux dresser le tableau de la situation, car la question est importante : notre production nationale de gaz est en baisse, ce qui a déjà été signalé. Elle reste sinon anecdotique du moins minime, puisqu'elle ne représente que 5 % environ de la consommation, ce qui signifie - c'est une lapalissade - que les 95 % restants sont importés. Nous sommes donc dépendants du reste du monde pour notre approvisionnement en gaz et, pour l'essentiel, de pays non européens. Je ne disserterai pas sur le contexte international du moment, mais chacun comprend l'impérieuse nécessité qu'il y a, pour notre pays, à sécuriser ses importations.
Cette nécessité est d'autant plus impérieuse que la consommation, nationale et mondiale, connaît, elle, une phase de croissance. Ce n'est pas un hasard, l'intérêt environnemental du gaz naturel étant évident : parmi les énergies fossiles, c'est celle qui génère le moins de gaz carbonique. Cependant, nous avons à faire à une industrie très capitalistique, aux investissements coûteux du fait des infrastructures nécessaires. Il faudra donc entre 800 milliards d'euros et 1 400 milliards d'euros d'investissements pour faire face à la croissance de la demande mondiale de gaz d'ici à 2030.
Tout cela signifie que l'ouverture du marché du gaz est envisagée à un moment où la conjoncture est porteuse, mais où elle connaît aussi d'importantes évolutions. Ces bémols doivent être toutefois eux-mêmes tempérés, car l'avenir de l'industrie gazière s'incrit dans une perspective optimiste : les ressources sont importantes - soixante-dix ans de consommation, contre trente ans pour le pétrole - et la demande croît puisque, si le gaz représentait 18 % de la consommation mondiale en 1980, il comptait pour 23 % dans cette même consommation en 2000 ; il devrait atteindre 25 % en 2020, selon certaines prévisions.
Le gaz est donc une énergie d'avenir à moyen terme : il s'agit de l'énergie fossile la moins polluante et son industrie bénéficie d'avancées technologiques qui permettent de réduire les coûts, notamment en matière de transport.
Il me faut ajouter, pour compléter ce tableau, que les frontières entre secteurs énergétiques - gaz, pétrole, électricité - se font moins certaines et que le temps est aux alliances et acquisitions entre les entreprises. GDF, qui apparaît donc comme l'un des grands négociants, est pourtant de taille modeste par rapport à ses concurrents, même si l'entreprise nationale reste le troisième acheteur européen. Le statu quo sur la question de la transposition de la directive n'est pas sans conséquences sur l'absence de croissance de GDF, d'ailleurs.
Dès lors, les enjeux de l'ouverture du marché du gaz sont capitaux, puisqu'elle devra permettre d'améliorer les services rendus et d'abaisser les coûts pour les consommateurs, concourant ainsi à la compétitivité de nos industries. Cette ouverture devra faciliter l'insertion des grandes entreprises françaises dans un contexte mondialisé, puisque la mondialisation est un fait dont il faut tenir compte, faute de quoi nous courrons évidemment le risque de la subir.
Pour résumer, soyons clairs : la situation juridique actuelle est délicate. L'entreprise Gaz de France s'est engagée, seule, dans une application loyale et transparente de la directive dès le 10 août 2000, alors que la transposition d'un texte européen relève normalement des Etats. Je dois saluer ici la clairvoyance de la direction de Gaz de France, qui a pallié les défaillances des pouvoirs publics. Cependant, malgré cette clairvoyance, l'activité de notre opérateur ne peut se développer sur le marché européen, car les autres Etats membres invoquent régulièrement la fermeture du marché français pour ne pas ouvrir leur propre marché.
La passivité du précédent gouvernement a donc pu mettre GDF en péril, nos concurrents européens s'étant déjà organisés et ayant procédé à des alliances ô combien pertinentes. Ainsi, en juillet dernier, le rachat de Ruhrgas par E.ON en Allemagne a donné naissance à un géant de l'électricité et du gaz qui couvre près de 60 % du marché.
Notre organisation gazière n'est pas adaptée au contexte international, aux évolutions récentes ou à celles qui sont à venir. Son régime relève de dispositions législatives adoptées après guerre ; le réseau de transport appartient à l'Etat et non aux entreprises, et il est utilisé par le biais de concessions de service public, cas unique en Europe, il faut le signaler ; la distribution de gaz s'opère dans le cadre de concessions communales ; Gaz de France a le monopole des importations et de l'exploitation, mais ne produit pas de gaz et, bien que n'ayant pas le monopole de stockage, a réalisé d'importantes infrastructures.
La directive Gaz du 22 juin 1998 que nous transposons aujourd'hui a été négociée à partir de 1997, voilà donc cinq ans, rien de moins ! En outre, nous aborderons bientôt la négociation de la seconde directive. Autant dire que notre pays à un train de retard !...
La directive de 1998 est relative aux règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel : elle vise le transport, la distribution, la fourniture et le stockage ; elle exclut donc la production. Elle programme la fin du monopole d'importation de GDF, qui va ainsi se trouver en concurrence avec des entreprises productrices de gaz. Les enjeux sont donc absolument considérables pour notre industrie nationale.
Sur le fond, le marché concurrentiel du gaz devra s'abstenir de toute discrimination, mais des garanties sont accordées, puisque le service public est légitimé. Sur ce point, nous ne pouvons, nous, parlementaires de la majorité, que nous réjouir. En effet, le projet de loi définit les obligations de service public qui s'imposent aux différents acteurs, afin de garantir notamment la sécurité de l'approvisionnement, la protection de l'environnement et la solidarité entre les territoires comme envers les plus démunis. Les élus locaux sont sensibles à ces dispositions, de même que le consommateur et le citoyen, qui montrent fréquemment leur attachement à ces impératifs.
Il nous semble encore tout à fait fondamental que, en cas de menace pour la sécurité d'approvisionnement du pays en gaz naturel, le ministre chargé de l'énergie puisse prendre les mesures conservatoires nécessaires ; les dispositions de l'article 11 répondent à cette attente. En outre, la création d'une autorité de régulation pour le secteur du gaz, par l'élargissement à ce secteur des compétences de l'actuelle Commission de régulation de l'électricité, est de nature à garantir le bon fonctionnement du marché gazier et la coexistence harmonieuse du service public et de la concurrence.
Sur l'ouverture à la concurrence, la notion de « client éligible », c'est-à-dire apte à contracter pour s'approvisionner librement en gaz naturel, signifie que l'accession aux règles du marché est progressive et s'étale de 2000 à 2008.
Les modalités de transposition choisies par le Gouvernement sont sages, madame la ministre. Je me félicite que le projet de loi ne traite à titre principal que de cette transposition : le Gouvernement a ainsi affirmé son souhait de laisser la place à la négociation pour régler d'autres questions importantes - que la représentation nationale devra entériner comme celles du statut de l'entreprise et de l'ouverture de son capital et celle de l'avenir du régime de retraite des salariés de GDF.
Enfin, je tiens à remercier Mme la ministre, qui, lors de son audition par la commission des affaires économiques le 16 juillet dernier, a rappelé que l'ouverture minoritaire du capital des deux entreprises, EDF et GDF, « se ferait dans le cadre d'une concertation préalable approfondie avec les personnels et leurs représentants syndicaux, que les personnels conserveraient leur statut et que leur système spécifique de retraite recevrait les garanties nécessaires ». Ces propos, dont je me réjouis, ont été rappelés par le ministre de l'économie et des finances le 3 octobre dernier et prouvent - ô combien ! - l'attachement du Gouvernement au dialogue social.
Cela ne signifie pas pour autant que la transposition de la directive ne doive pas être l'occasion d'une réflexion globale sur l'organisation de notre marché du gaz, car les entreprises françaises doivent continuer d'obtenir le meilleur prix possible pour abaisser leurs coûts d'approvisionnement, et GDF doit pouvoir affronter la concurrence à armes égales en offrant à ses clients une gamme de services complète pour rester l'un des premiers gaziers au monde.
L'ouverture du marché entraînera nécessairement des recompositions et des restructurations ; Gaz de France devra changer de dimension et nouer des alliances. La direction, me semble-t-il, en a eu pleinement conscience et y a préparé l'entreprise bien en amont.
La commission des affaires économiques, sur l'initiative du rapporteur du projet de loi, M. Poniatowski, a décidé de faire figurer explicitement dans le texte le concept de service public et la répartition des compétences entre Etat, communes et EPIC, établissements publics de coopération intercommunale. Ce sont des points, madame la ministre, auxquels nous sommes sensibles en notre qualité d'élus locaux, de même que nous sommes attentifs aux apports de la commission sur la sécurité des installations et des personnes.
Sur le volet du texte relatif à l'électricité, les propositions de la commission nous semblent enrichir le texte en assurant le financement du service public de l'électricité. A ce propos, cependant, un point nous semble devoir être éclairci, sur lequel, madame la ministre, je me permets d'appeler votre attention : il s'agit des recettes des communes, des départements et des syndicats d'électricité tels que celui que je préside dans mon département, le SIEL, le Syndicat intercommunal d'électricité et de gaz de la Loire.
Selon le Conseil européen du 4 octobre, les consommateurs domestiques pourront, à court terme, acheter de l'électricité en basse tension à des fournisseurs autres que EDF. Ces consommateurs ne supporteront ni la contribution au Fonds d'amortissement des charges d'électrification, le FACE, ni les taxes locales sur l'électricité. C'est un vrai problème ! Aussi, afin que les ressources des collectivités locales concernées ne diminuent pas, il conviendrait de procéder à une modification technique des dispositions en vigueur, notamment de celles qui relèvent du règlement. Ce point, madame la ministre, est ô combien important pour nos communes, nos département, et nos établissements de coopération intercommunale. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons a un triple objet : d'abord, et surtout, il transpose en droit français une directive européenne de 1998 relative à la libéralisation du marché du gaz ; ensuite, il tend à améliorer le régime juridique du stockage souterrain de produits à base de gaz ou d'hydrocarbures ; enfin, il vise à moderniser certaines dispositions de la loi du 10 février 2000 relative à l'électricité.
Comme l'a souligné M. Gérard Larcher, ce texte, qui concerne essentiellement le gaz, nous est enfin présenté, après des années d'hésitation due aux passions que soulève l'idée d'une quelconque modification de notre système de fabrication et de distribution du gaz naturel. Plus de quatre années se sont écoulées entre l'adoption de la directive et la présentation au Parlement d'un texte tendant à la transposer dans notre droit interne. Il y a quelques mois encore, les membres de la majorité sénatoriale réclamaient en urgence l'adoption d'un texte qui permettrait à la France de s'aligner sur ses partenaires européens. C'est chose faite ; je tiens à vous en féliciter madame la ministre.
Pourquoi avoir tant attendu, alors que certaines données relatives à la gestion du gaz naturel nous permettent de mieux comprendre l'urgence de cette transposition ? En effet, le gaz est essentiellement un produit d'importation. La production nationale baisse régulièrement et ne représente plus aujourd'hui que 5 % de la consommation, comme cela nous a été dit. Les 95 % restants sont importés de pays majoritairement extérieurs à l'Union européenne. C'est, de plus, une industrie de réseaux qui requiert des investissements importants, aux infrastructures lourdes et d'un coût élevé. Les caractéristiques mêmes des investissements de production et de transport ont contribué à ce que s'impose dorénavant la conclusion de contrats de longue durée qui engagent les parties de façon assez rigide sur les prix et les volumes.
L'organisation gazière française méritait donc un « coup de jeune », d'autant plus qu'elle est régie par des lois votées immédiatement après la Seconde Guerre mondiale. A ce jour, elle repose sur la ventilation suivante : les réseaux de transport appartiennent à l'Etat et sont utilisés par le biais de concessions de service public ; la distribution de gaz s'opère dans le cadre de concessions communales ; GDF a le monopole des importations et de l'exploitation ; GDF ne produit pas le gaz ; en matière de stockage, bien que n'ayant pas le monopole légal, GDF a réalisé d'importantes infrastructures qui représentent 90 % de la capacité de stockage national.
Pourtant, même si, formellement, la France n'a pas encore transposé la directive de 1998 en droit interne, GDF et d'autres opérateurs ont mis en oeuvre certaines de ses dispositions. Ainsi, 150 groupes industriels, dont la consommation annuelle représente 20 % de la consommation nationale, peuvent choisir leur fournisseur. GDF adapte ses structures à son nouvel univers concurrentiel, et l'entreprise s'articule désormais autour de trois grands pôles : infrastructures, développement en amont et commercial.
En 2001, GDF a poursuivi son développement international dans deux directions : l'acquisition de réserves ou de capacités de production dans les zones susceptibles d'alimenter le marché européen, et les prises de participation chez des distributeurs sur le marché intérieur européen ou dans des zones géographiques où le gaz présente de bonnes perspectives de croissance.
Compte tenu de toutes ces données, je me félicite que GDF et les grands distributeurs français aient su dépasser l'immobilisme et la frilosité injustifiés qui étaient de mise ces dernières années et montrer leurs capacités à anticiper. En effet, le développement international de GDF s'est trouvé à plusieurs reprises entravé par l'absence de transposition de la directive. D'abord, la carence de l'Etat français permettait aux Etats membres de l'Union européenne de faire jouer la clause de réciprocité introduite dans leur législation. Ensuite, l'absence d'équivalence dans la libéralisation des différents marchés européens avait pour effet de susciter une opposition très forte des autorités nationales à toute tentative d'expansion des opérateurs français, au motif que ceux-ci bénéficiaient sur leur territoire d'un monopole incontestable. Enfin, l'absence de transposition de la directive de 1998 a toujours provoqué l'hostilité de la Commission européenne à l'égard des opérateurs français ; elle a par ailleurs entraîné la condamnation de la France par la Cour européenne de justice.
Je dirai quelques mots de l'électricité. Il s'agit surtout de poursuivre le développement de EDF dans un contexte européen et international en pleine mutation. Autrement dit, il s'agit de renforcer la compétitivité de l'entreprise afin qu'elle puisse lutter à armes égales avec les autres grands opérateurs énergétiques et ne plus susciter l'hostilité des autorités étrangères compétentes en cas d'acquisition hors de France.
Je regrette, madame la ministre, mes chers collègues, que le projet de loi ne prévoie aucune disposition concernant une éventuelle ouverture du capital de EDF. Pourriez-vous nous éclairer sur cette questions majeure ? Dans sa déclaration de politique générale à l'Assemblée nationale, M. le Premier ministre suggérait de modifier la forme juridique de EDF pour permettre une ouverture progressive du capital de l'entreprise et lui donner la possibilité de nouer des alliances et de développer sa stratégie en Europe et dans le monde, tout en respectant les exigences du service public. Dans quelle mesure cette évolution de EDF vers un statut de droit privé remettrait-elle en cause ses missions de service public ?
En outre, les réformes atteindront un jour un seuil tel que des mesures courageuses s'imposeront. Au risque d'une confrontation avec les organisations syndicales, ces mesures ne sauraient admettre ni atermoiement ni recul face aux pressions de tous ceux qui, peut-être déçus par les résultats des dernières élections, ne penseraient qu'à faire basculer notre pays dans l'affrontement et le chaos social. Il y va de la vitalité de EDF et de la survie de notre système d'exploitation énergétique.
Fort de ces multiples observations, sachez-le, madame la ministre, je suivrai les recommandations de M. le rapporteur - je tiens d'ailleurs à mon tour à souligner la qualité de ses travaux - et je voterai en faveur du texte que vous nous proposez. (Applaudissement sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Henri Revol.
M. Henri Revol. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c'est au nom du groupe des Républicains et Indépendants, mais aussi en tant que président du groupe d'études sur l'énergie au Sénat, que je m'exprime aujourd'hui.
Nous voici enfin réunis pour mettre notre droit en adéquation avec nos engagements communautaires et avec les faits, puisque l'ouverture de notre marché gazier est d'ores et déjà effective.
Nous sommes tous conscients des problèmes qu'a posé, à la France et à Gaz de France, le retard pris dans la transposition de la directive Gaz. La Fance vit sous la menace de sanctions imposées par la Cour de justice des communautés européennes et a perdu beaucoup de sa crédibilité à Bruxelles. Gaz de France a, pour sa part, fait l'objet de mesures de rétorsion de la part de nos partenaires européens, en particulier italiens et espagnols.
Je regrette profondément que l'inutile politisation de ce dossier et le lien opéré par le précédent gouvernement entre la transposition de la directive et le changement de statut des opérateurs historiques aient conduit à une telle impasse.
Nous en sortons aujourd'hui et je me réjouis que, en dépit de la réelle urgence dans laquelle il se trouvait, le Gouvernement ait écarté l'hypothèse d'une transposition par ordonnance afin de privilégier le débat parlementaire. Il va de soi que nous sommes soucieux que le texte puisse être définitivement adopté d'ici à la fin de l'année ; nous comprenons parfaitement que, en contrepartie, la procédure d'urgence ait été utilisée.
Je ne reviendrai pas sur le contenu précis de ce projet de loi, auquel nous adhérons pour l'essentiel, sous réserve de l'adoption d'un certain nombre d'amendements.
Je vous ferai part de quelques réflexions et je poserai à Mme la ministre quelques questions.
Tout d'abord, la démarche du Gouvernement français, empreinte de pragmatisme et non de dogmatisme, me semble être la bonne. Elle consiste, en particulier, à veiller à l'équilibre entre l'ouverture des marchés à la concurrence et la défense des services rendus à nos concitoyens.
L'ouverture des marchés de l'électricité et du gaz est progressive, maîtrisée et régulée. Avec elle, nos deux opérateurs historiques ont perdu leur monopole territorial, tout en bénéficiant d'une extension de leur champ d'activité à toute l'Europe.
Désormais, Gaz de France réalise près de 20 % de son chiffre d'affaires à l'international, chiffre qui a enregistré une hausse de 38 % au premier semestre 2002. Ses succès commerciaux auprès de grands consommateurs industriels en Europe ont représenté plus de deux fois les volumes qui ont été perdus en France depuis l'ouverture. C'est donc avec confiance et sérénité que l'entreprise publique et ses salariés peuvent envisager l'avenir.
Nos entreprises publiques auraient, par ailleurs, tout à gagner à une évolution de leur statut. L'ouverture de leur capital devrait leur permettre de nouer les partenariats industriels nécessaires à leur développement. L'Etat, bien entendu, resterait majoritaire et le statut des salariés serait garanti.
En 1998, la commission d'enquête sur la politique énergétique de la France, dont j'avais l'honneur d'être le rapporteur, avait déjà évoqué et proposé cette mesure ; mais c'est l'objet d'un autre débat.
La question des garanties de service public et celle de l'effectivité de l'ouverture des marchés de nos voisins méritent toutefois une vigilance particulière.
L'ouverture du secteur à la concurrence permet de clarifier les missions de service public, qui ont parfois été confondues - il faut bien le reconnaître - avec les intérêts des opérateurs historiques.
Madame la ministre, vous avez, au dernier Conseil de l'énergie, à Luxembourg, posé deux conditions à l'acceptation par la France d'une date pour la libéralisation totale des marchés électrique et gazier, à savoir, d'une part, des garanties de service public et, d'autre part, l'obtention d'un bilan des étapes précédentes de la libéralisation.
La France reste-t-elle totalement isolée ou pensez-vous obtenir gain de cause sur la réalisation de ces conditions lors du prochain Conseil de l'énergie le 25 novembre prochain ? Par ailleurs peut-on espérer que la France sera entendue pour l'élaboration de la directive cadre sur les services économiques d'intérêt général ?
Il me semble essentiel que l'ouverture des marchés aux professionnels fasse régulièrement l'objet de bilans afin de mesurer le degré effectif d'ouverture des marchés de chaque Etat membre. Plus qu'au degré théorique d'ouverture des marchés, je souhaite que l'on s'attache à leur ouverture effective, ainsi qu'aux règles et aux modes de régulation permettant d'assurer la transparence et la concurrence. Or, comme l'a montré un rapport de la Commission européenne, il n'existe pas de corrélation entre le degré théorique d'ouverture des marchés et l'exercice réel de la concurrence, d'où qu'elle provienne.
Ainsi, la France, souvent pointée du doigt par ses partenaires, enregistre un taux réel d'ouverture de ses marchés qui est loin d'être négligeable, dans des conditions de transparence et de régulation irréprochables.
M. Daniel Raoul. Très bien !
M. Henri Revol. Dès l'été 2001, près de 15 % des clients éligibles de Gaz de France avaient changé de fournisseur. Je déplore, à l'inverse, que le degré d'ouverture des marchés de l'Allemagne et de la Belgique, par exemple, qui sont théoriquement de 100 % et de 59 %, soient en fait inférieurs à 5 %. (Très bien ! sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
A l'occasion d'un colloque organisé le 26 juin dernier par la commission des affaires économiques et par le groupe d'études sur l'énergie, le président de la commission de régulation de l'électricité relevait que les surcoûts liés au passage d'un réseau national à un autre pouvaient être importants, plus élevés parfois que le prix du transport lui-même. Il s'agit d'obstacles sérieux à la concurrence, alors même que rien ne nous empêche de supprimer ces quasi-péages aux frontières, même en cas de congestion physique.
La Commission européenne doit veiller à ce que chacun « balaie devant sa porte » et remédie aux dysfonctionnements de la concurrence. La mise en place du marché européen de l'énergie implique avant tout l'harmonisation des modalités de la régulation au sein de l'Union. Que peut-on espérer dans ce domaine, madame la ministre ?
La libéralisation du secteur, comme toute décision en matière de politique énergétique, doit aussi répondre, selon moi, à deux grands défis : la sécurité d'approvisionnement et le défi environnemental.
La sécurité énergétique est une priorité absolue. Si rien n'est entrepris dans les vingt prochaines années, l'Union européenne couvrira ses besoins énergétiques avec 70 % de produits importés, contre 50 % aujourd'hui. Cette sécurité implique la construction de nouvelles infrastructures, afin de mettre fin aux problèmes d'acheminement et aux goulets d'étranglement.
Le marché ne pouvant pas à lui seul garantir l'adéquation à long terme de l'offre à la demande, il convient de mettre en oeuvre les instruments de régulation et d'incitation adéquats et coordonnés au niveau européen.
A cet égard, je m'interroge sur les propositions de la Commission européenne concernant l'accès des tiers aux installations de stockage de gaz - au-delà des besoins de modulation - et les mécanismes de gestion de crise.
Avec l'Allemagne et l'Italie, la France est l'un des rares pays à avoir créé des sites de stockage. Ces stocks, qui représentent plus de 26 % de la consommation française de gaz, sont particulièrement vitaux pour notre pays, qui ne dispose que de très faibles ressources gazières ; ils suscitent d'ailleurs la convoitise de nos partenaires. J'aimerais, madame la ministre, que vous puissiez nous rassurer sur ce point.
La sécurité de l'approvisionnement et la prise en compte du défi environnemental impliquent une diversification des sources d'énergie. Si le gaz et les énergies renouvelables devaient prendre une part croissante dans notre bilan énergétique - vous l'avez rappelé tout à l'heure, madame la ministre -, les engagements que nous avons pris vis-à-vis de l'Union européenne sur les énergies dites renouvelables nous créeraient des obligations contraignantes pour les années qui viennent.
Je m'inquiète des conséquences des surcoûts liés au tarif de rachat par Electricité de France de l'électricité produite par la cogénération et les énergies renouvelables. L'importance de ces surcoûts ne risque-t-elle pas d'amputer très sensiblement les baisses de prix liées à l'ouverture à la concurrence ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Bien sûr !
M. Henri Revol. La commission des affaires économiques, par amendements, proposera utilement de modifier les modalités d'alimentation du Fonds du service public de la production d'électricité. Notre vigilance devra également porter, madame la ministre, sur l'importance des sommes qui sont en jeu.
Le projet de loi qui nous est soumis trace la voie à suivre. Grâce à l'excellent travail de notre rapporteur, M. Ladislas Poniatowski, la commission des affaires économiques, de manière raisonnable et équilibrée, en renforce l'audace.
Sans entrer dans le détail des amendements, je dirai seulement que je me réjouis des précisions qui ont été apportées au régime juridique de la Commission de régulation de l'électricité. J'approuve la transformation de sa dénomination en « Commission de régulation de l'énergie », qui prélude à l'extension de ses missions. Comme M. Gérard Larcher vient de l'évoquer, je plaide cependant pour qu'un accroissement moyens de la CRE lui permette d'assumer pleinement ses missions.
Nous aurions préféré qu'une proposition de loi soit consacrée à l'électricité. Elle était prête, comme l'a rappelé notre rapporteur, et je me réjouissais, en tant que rapporteur de la loi relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité du 10 janvier 2000, d'en être le coauteur.
Nous savons que l'ordre du jour de l'Assemblée nationale ne l'a pas permis, c'est donc pour des raisons d'efficacité que nous nous sommes résolus à agir par voie d'amendements. J'en présenterai moi-même ultérieurement quelques-uns qui, je l'espère, connaîtront un sort favorable.
Je conclurai en me réjouissant de voir l'Europe de l'énergie avancer. La France, en raison de sa situation géographique, y occupe une place privilégiée, au centre des « plaques régionales » qui se dessinent. L'Union européenne constituera ainsi le plus grand marché régional intégré et ouvert du monde. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la transposition de la directive Gaz est une nécessité, sinon une ardente obligation, au regard des contraintes qui pourraient peser sur la France. Nul ne peut le nier.
Pourtant, nous nous interrogeons sur la méthode qui a été employée. Je vous en donne acte, madame la ministre, le Gouvernement a abandonné le projet de procéder par ordonnance. Cependant, le fait de déclarer l'urgence sur ce projet de loi - de surcroît à la demande de parlementaires qui ont par ailleurs excellemment travaillé - aura pour effet de priver le Parlement d'une deuxième lecture. Cette dernière aurait pourtant été nécessaire, si l'on s'en tient au calendrier des négociations qui vont avoir lieu, en particulier le 25 novembre prochain.
Cette procédure et le fait de fixer les seuils par décret ont pour effet de déposséder les assemblées de leurs prérogatives, dans le contexte mouvant que l'on connaît.
Depuis le 10 août 2000, les choses ont beaucoup évolué. Nous devons tirer les conséquences de la crise de l'énergie en Californie, des déboires que connaît la Grande-Bretagne avec British Rail et British Energy.
Par ailleurs, depuis cette même date, les principales mesures prévues par la directive Gaz sont en vigueur - cela vient d'être réaffirmé - et la France n'est pas le « mouton noir » de l'Europe dans le domaine du gaz. Il y a l'esprit et la lettre : en effet, sans avoir transposé la directive, la France a fait mieux, en termes d'ouverture du marché, que des pays comme l'Allemagne ou l'Espagne, qui ont pourtant effectué cette transposition mais se servent de notre situation législative comme prétexte justifiant le manque d'ouverture de leurs marchés.
Enfin, c'est par le biais d'amendements au projet de loi de transposition de la directive Gaz que l'on veut procéder, en catimini, à une réforme de la loi relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité de février 2000.
Lors de la discussion de ces amendements, madame la ministre, nous vous demanderons des précisions sur les seuils d'éligibilité, car il nous semble que vous anticipez l'adoption éventuelle d'une deuxième directive ou que vous précipitez le calendrier et préjugez les conditions d'ouverture du marché.
Il n'est pas certain que cette attitude facilite la tâche du Gouvernement, le 25 novembre, alors que, à en croire vos déclarations récentes, madame la ministre, vous souhaitez obtenir l'appui du Parlement. Tandis que vous annoncez la tenue d'un débat parlementaire à l'occasion de l'examen d'un projet de loi relatif à l'énergie, pourquoi ne pas permettre une deuxième lecture au vu des conclusions de ce débat, et ne pas attendre un éclaircissement de la situation tendue qui prévaut à l'échelon international ? En effet, ce qui se passe actuellement sur le plan international n'est pas sans susciter des interrogations quant à la sécurité, à terme, de l'approvisionnement. Il serait peut-être dangereux qu'intervienne un second « Yalta » sur l'énergie !
La discussion de ce projet de loi survient à un moment où les salariés des deux entreprises nationalisées EDF et GDF s'inquiètent pour leur avenir, et ce n'est pas l' unbundling juridique et comptable des trois fonctions qui va les rassurer, puisque vous envisagez de soulever la question du changement de statut des personnels et de procéder à une ouverture - minoritaire, certes - du capital. Mais du capital de quelle entreprise s'agit-il ? Et quid d'EDF-GDF Services ?
Pour reprendre vos propres termes, madame la ministre, nous avons besoin de pédagogie, de communication et de temps. Afin que ces trois facteurs puissent être réunis, nous vous demandons donc solennellement de renoncer à la déclaration d'urgence sur ce texte.
Sur le fond, il s'agit d'une directive qui anticipe, je l'ai déjà dit, sur le contenu d'une deuxième directive dont vous devez déjà connaître, pour l'essentiel, la teneur, et qui sera de nature à mettre la France en position de faiblesse le 25 novembre. Pourquoi faire des concessions avant que l'on soit parvenu à un accord, en particulier sur la spécificité de la culture française du service public, alors que vous auriez, paraît-il, obtenu des avancées significatives de la part de nos partenaires ?
Nous souhaiterions d'abord trouver dans ce texte une vraie définition du service public, comme cela était prévu dans le projet de loi initial de mai 2000 de M. Christian Pierret ; mon collègue Pierre-Yvon Trémel explicitera notre position sur ce point. Telle est également l'attente des usagers domestiques, qui sont satisfaits du service actuel.
Si la procédure d'examen du projet de loi que je viens d'évoquer n'est pas allée jusqu'à son terme - ce fait a été interprété de diverses façons -, c'est sans doute qu'il fallait se nourrir de l'expérience des autres, et l'on peut constater, à cet égard, que l'ouverture des marchés dans différents pays n'a pas été synonyme de baisse des prix, au contraire ! La comparaison qu'établira notre collègue Pierre-Yvon Trémel le prouvera.
Nous souhaiterions aussi, madame la ministre, vous entendre préciser la position du Gouvernement quant au stockage, quant à la péréquation tarifaire, et définir les moyens que vous pourrez mettre en oeuvre pour améliorer la desserte du territoire et répondre à la demande des communes non desservies actuellement, tout particulièrement dans le monde rural, même si l'on sait que, techniquement et économiquement, on ne peut pas atteindre le service universel.
Certains amendements d'origine parlementaire tendent en fait à créer une rente aux distributeurs, en donnant priorité au négoce sur la production, la sécurisation et la recherche-développement.
En donnant, par ailleurs, des pouvoirs exorbitants à la commission de régulation par rapport au politique, vous privez le Gouvernement, en particulier le ministre chargé de l'énergie, de moyens lui permettant d'assumer ses prérogatives en matière de sécurité de l'approvisionnement.
En outre, le Gouvernement n'utilise pas la possibilité d'une ouverture progressive et maîtrisée - je reprends vos propos, madame la ministre - alors que vous pouviez procéder à une transposition a minima de la directive.
Quant au contrôle démocratique du service public, il n'est pas assuré. Le fonctionnement de la CRE et des observatoires pose un vrai problème de fond s'agissant des décisions, fondamentales pour notre pays, relatives à la sécurité de l'approvisionnement et à la péréquation tarifaire, décisions qui devraient relever essentiellement du politique.
Enfin, au travers d'amendements, on modifie la loi « électricité » de février 2000 en modifiant les seuils, sans verrou et par simple décret, et en remettant à plat le financement du service public de l'électricité, en mélangeant d'ailleurs des fonds de distribution et des fonds de production, ce qui ne simplifiera pas leur gestion.
Sur tous ces points, madame la ministre, nous attendons des réponses et des précisions, par le biais de la discussion de nos amendements, tout particulièrement de ceux qui concernent le service public. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la libéralisation du marché européen de l'énergie n'est pas une question d'idéologie. L'indépendance de notre continent dépend en effet en grande partie d'une action sur l'offre, assurant l'ouverture des marchés nationaux dans les délais impartis par l'Union européenne. Cela implique une redéfinition progressive du statut et de la place des différents acteurs du marché, publics et privés.
Mais, comme Mme la ministre, relayée par M. le rapporteur, l'a indiqué avec force, l'ouverture à la concurrence du marché de l'énergie est non seulement une obligation sur le plan économique et stratégique, mais aussi une obligation juridique. Faute de transposition de la directive Gaz, la France se trouve à présent sous la menace de lourdes sanctions financières. Nous n'en sommes plus au stade des débats idéologiques, dont la France est friande, entre étatisme et libéralisme.
En matière d'énergie, notre pays est engagé dans un processus inexorable de libéralisation ; il ne peut plus durablement se dérober à ses engagements européens. Notre marge de manoeuvre est limitée, elle existe néanmoins : elle fait l'objet de nos débats d'aujourd'hui. Il convient d'apporter des solutions conformes aux traditions de notre pays, attaché plus que d'autres aux principes du service public. Le grand mérite du nouveau gouvernement, sur ce dossier comme sur d'autres, est d'avoir pris les problèmes à bras-le-corps, sans préjugés, avec courage et méthode.
Quatre échéances se présentent à nous. Nous en sommes à la première, à savoir la transposition de la directive Gaz. Il restera à régler le problème du financement du régime spécial de retraite des personnels de EDF et de GDF, à adapter le statut des deux entreprises et enfin à transposer une prochaine directive, d'inspiration sensiblement plus libérale que les précédentes. C'est là une lourde tâche, à laquelle sera associé le Parlement, le Sénat comptant jouer tout son rôle. La grande qualité du travail mené depuis des années par la commission des affaires économiques et par le groupe d'études sur l'énergie fait de notre assemblée un interlocuteur indispensable.
Dans mon propos, je reviendrai successivement sur les deux volets du projet de loi : premièrement, la transposition de la directive de 1998 et les perspectives d'évolution du secteur gazier ; secondement, les propositions de la commission des affaires économiques relatives à l'électricité, que mon groupe approuve.
Le principal objet du projet de loi est la transposition de la directive Gaz, qui aurait normalement dû intervenir avant le 10 août 2000. Elle tend à procéder à une ouverture progressive du marché. Mon groupe approuve évidemment l'ensemble du dispositif, lequel va dans le bon sens, qu'il s'agisse du droit d'accès aux ouvrages de transport et de distribution de gaz naturel au profit de tous les opérateurs dans des conditions non discriminatoires ; de la possibilité, pour les consommateurs de gaz naturel, de faire appel aux fournisseurs de leur choix dès lors que leur consommation annuelle, pour un site, est supérieure à un certain seuil, ce que le projet appelle les « clients éligibles » ; de l'élargissement des compétences de la commission de régulation de l'électricité au secteur du gaz, afin de garantir le bon fonctionnement du marché et la coexistence harmonieuse du service public, d'une part, et de la concurrence française et européenne, d'autre part ; de la séparation comptable entre les activités de transporteur, de distributeur et de producteur, qui s'impose à Gaz de France comme elle s'impose, depuis l'année 2000, à Electricité de France ; de la définition des obligations de service public qui s'imposent aux différents acteurs afin de garantir, notamment, la sécurité d'approvisionnement, la protection de l'environnement et la solidarité entre les territoires et envers les plus démunis.
Cependant, il est évident que le processus est loin d'être achevé : une deuxième directive européenne est actuellement en cours de négociation, laquelle se revèle âpre et difficile. Elle prévoit le libre choix du fournisseur pour tous les consommateurs autres que les ménages dès 2004, et son entrée en vigueur aurait pour conséquence l'ouverture d'au moins 60 % du marché.
Outre qu'elle permettra d'éviter une sanction de l'Union européenne, la transposition de la directive devrait permettre à GDF de développer ses activités sur le territoire de nos partenaires européens, en particulier en Espagne et en Italie, deux pays qui s'opposent actuellement à l'implantation de l'entreprise française pour cause de trop grande fermeture du marché hexagonal.
Dans sa stratégie de développement, Gaz de France a également besoin de trouver des partenaires industriels et financiers, afin de saisir les occasions qui se présenteront à court terme en Europe. L'entreprise va devoir consentir des investissements particulièrement importants. Par ailleurs, un certain nombre de projets ne peuvent être financés par le seul endettement, car les banques exigent un apport de fonds propres. Cela implique une évolution du statut de GDF, qui, d'établissement public à caractère industriel et commercial, doit devenir société de droit commun. Madame la ministre, tel est le choix clair et courageux que vous avez effectué avec le gouvernement auquel vous appartenez et que nous soutenons.
Une participation minoritaire au capital pourrait être accordée à EDF. Suez est également sur les rangs ; quant à la société TotalFinaElf, elle semble plus hésitante. Gaz de France réclame depuis plusieurs années une ouverture de son capital : avec l'ouverture du marché du gaz à la concurrence, GDF risque d'être marginalisé s'il n'est pas en situation de participer au mouvement en cours. Il y a donc urgence : l'idéal serait bien sûr une réforme dès 2003 du statut de EDF-GDF.
Quoi qu'il en soit, il faut trouver, parallèlement, une solution au grave problème des retraites des personnels de Gaz de France et Electricité de France. Dès le début du mois de septembre, des négociations ont commencé entre les partenaires sociaux. Le Gouvernement s'est d'ores et déjà engagé en faveur de la préservation du statut spécifique de la branche des industries électriques et gazières, notamment en matière de retraite.
La question du statut de l'entreprise est complètement indépendante de celle du statut du personnel : ainsi, continueront à coexister, au sein de Gaz de France, des employés sous statut et d'autres hors statut, sous CDI ou en intérim.
Sur le plan social, il reste à régler la question du déficit chronique du régime spécial de retraite, dont la charge croissante, pour les deux entreprises, est un handicap majeur dans la perspective de l'ouverture de leur capital.
Rappelons que le financement des retraites est intégralement assuré par les entreprises et leurs salariés : cette charge devrait passer de 2,6 milliards d'euros pour l'année 2002 à plus de 4 milliards d'euros d'ici à 2020. La seule entreprise Electricité de France a provisionné 52 milliards d'euros pour le paiement des retraites ces prochaines années, alors que 94 milliards d'euros seraient nécessaires. Mon collègue et ami Jean Arthuis et moi-même avions tiré la sonnette d'alarme à propos de ce grave problème lors de l'examen, en 1999, du projet de loi relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité. Le gouvernement de M. Jospin nous avait alors répondu qu'une concertation serait menée entre la direction de EDF-GDF et les syndicats, dans le cadre d'une réflexion globale sur les régimes spéciaux. Il aura finalement fallu attendre trois années et un changement de majorité politique pour qu'une négociation soit enfin engagée !
S'agissant à présent des amendements de notre rapporteur relatifs au volet « gaz », ils sont particulièrement opportuns, qu'il s'agisse de l'affirmation du service public du gaz organisé, chacun pour ce qui le concerne, par l'Etat, par les commmunes et par leurs groupements, du renforcement de la sécurité ou de la garantie des droits des clients domestiques et du renforcement des droits des clients éligibles.
En ce qui concerne les tarifs d'utilisation des réseaux gaziers, la commission comble une lacune du projet de loi en proposant que la CRE émette ses avis après avoir consulté les différents acteurs du marché de l'énergie, c'est-à-dire les fournisseurs, les transporteurs, les clients éligibles et non éligibles, ainsi que les organisations représentatives des salariés et de la distribution des autres énergies concurrentes.
Par ailleurs, dans un souci d'aménagement du territoire, les tarifs, ainsi que les conditions d'utilisation des réseaux, tiendraient compte du coût des extensions de réseau restant à la charge des distributeurs.
La commission procède également à un toilettage indispensable de la loi « électricité » du 10 février 2000. Le rapporteur rejoint ainsi tout à fait les préoccupations exprimées par le groupe de l'Union centriste dès l'examen de ce texte en 1999.
En effet, au nom de notre groupe, j'avais, à cette tribune, regretté, à la fin de l'examen du projet de loi, l'échec de la commission mixte paritaire et le caractère à la fois trop timide et tardif de la transposition de la directive européenne de 1996 relative à l'ouverture du marché de l'électricité.
L'un des amendements emblématiques de la commission vise à favoriser le développement du négoce de l'électricité, en supprimant l'obligation pour les négociants de détenir des capacités de production : ces restrictions et l'absence de bourses de l'électricité ont abouti à une délocalisation des activités de négoce d'électricité.
Rappelons que le négoce connaît un essor important en Europe. Des bourses de l'électricité existent ainsi en Scandinavie et dans des pays comme le Royaume-Uni, l'Espagne, les Pays-Bas ou l'Allemagne. Il est temps de nous adapter.
Un autre amendement particulièrement utile concerne la simplification des modalités de financement du fonds du service public de l'électricité et la modification du mode de calcul de la taxe qui abonde ce dispositif, afin de ne pas pénaliser la compétitivité des entreprises qui consomment de l'électricité.
Il me reste à féliciter notre rapporteur, M. Ladislas Poniatowski, de son excellent travail, ainsi que le président Larcher et, bien sûr, Mme la ministre déléguée à l'industrie, notre amie Nicole Fontaine.
Vous l'avez compris, le groupe de l'Union centriste votera le projet de loi sur les marchés énergétiques tel qu'il devrait être amendé par le Sénat.
M. Daniel Raoul. C'est un scoop !
M. Pierre Hérisson. L'Europe de l'énergie avance dans la bonne direction sans laisser le volet social sur le bord de la route. Je m'en réjouis. C'est la bonne méthode pour ne pas être marginalisé par nos divisions, dont certains ne manqueraient pas de profiter. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du Rassemblement pour la République et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous devons débattre d'un projet de loi visant à transposer en droit français la directive européenne relative aux règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel.
Nous nous félicitons de ce que, finalement, le Gouvernement ait renoncé, sous la pression sociale, à sa première intention qui consistait à procéder par voie d'ordonnance. Cependant, le fait de déclarer l'urgence de ce texte, qui réduit la navette entre les deux assemblées, ne nous semble pas normal.
Une telle méthode, pour le moins expéditive, nous prive d'un réel débat démocratique et transparent sur le contenu d'un texte européen qui comporte des enjeux extrêmement importants pour l'avenir de la politique gazière de notre pays.
Madame la ministre, nous ne négligeons pas la portée et la signification symbolique du choix qui a consisté à déposer sur le bureau du Sénat, et donc à soumettre d'abord à notre Haute Assemblée, un tel projet de loi dont les enjeux, en termes de choix de société et d'intérêt national, sont capitaux.
Vous aviez annoncé votre intention de transposer a minima la directive européenne.
Or, et c'est là que le bât blesse, nous observons que ce projet de loi va bien au-delà des recommandations de la directive de 1998.
Non seulement il ouvre la voie à une accélération de la déréglementation et de la libéralisation, permettant ainsi de devancer le calendrier prévu par Bruxelles, mais encore, sur bien des points, il remet en cause notre service public.
Par ailleurs, le titre « marchés énergétiques » montre votre volonté de généraliser aux autres types d'énergie, en particulier à l'électricité, le contenu régressif de votre projet.
D'emblée, par ce titre, vous donnez le ton en élargissant le domaine qui sera soumis aux exigences du marché, au détriment de l'élaboration d'un projet de loi plus soucieux de préserver l'intérêt général, j'entends par là les missions de service public et les choix de la nation en matière de politique énergétique.
L'enjeu porte, ici, sur la question de notre indépendance énergétique, qui, à terme, risque d'être compromise, compte tenu des orientations qui se dessinent à travers ce texte.
Faut-il ajouter que ces deux aspects sont bien sûr liés, tant les liens que les services publics entretiennent avec la notion de souveraineté nationale sont intimes ?
D'un côté, la fin du monopole d'importation de GDF, en soumettant nos importations de gaz à une multiplicité d'opérateurs privés, risque de nous faire perdre le contrôle de nos flux d'importation, compromettant ainsi notre sécurité d'approvisionnement.
La directive, certes, nous y contraint. Soulignons cependant que le monopole d'importation existe depuis plus de cinquante ans, et qu'il a toujours été contraire au traité de Rome.
Nous avons de bonnes raisons de penser que certaines prescriptions européennes relèvent plus de l'idéologie et des dogmes libéraux que de la recherche d'une meilleure efficacité économique et sociale.
Une autorité de régulation sera mise en place. Elle sera chargée de gérer instantanément les flux de gaz, avec tous les aléas liés aux multiples sources d'approvisionnement, dont certaines sont très éloignées de la France.
Jusqu'à présent, c'était une entreprise publique qui assurait la distribution sur l'ensemble du territoire. Ce rôle sera désormais dévolu à un organisme dont l'étroitesse hexagonale soulève des doutes quant à sa capacité à réguler des flux en provenance de l'extérieur, domaine qui relève naturellement de la politique extérieure de la France.
D'un autre côté, relevons le désengagement de l'Etat au profit d'une autorité de régulation dite indépendante, en l'occurrence la commission de régulation de l'électricité, dont les compétences sont élargies au secteur gazier. Cette autorité de régulation doit, autant que possible faire coexister harmonieusement le service public et la concurrence.
Une telle autorité consacre, dans bien des cas - et qui le nierait ? - la primauté de la concurrence sur les obligations de service public.
Nous l'avons observé dans le domaine des télécommunications : lors des litiges, la commission de régulation a souvent tranché au profit des concurrents des opérateurs historiques.
Permettez-moi encore, madame la ministre, de dénoncer l'opacité de la CRE, organisme d'experts, qui mériterait d'être démocratisé et d'accueillir des experts issus de la société civile : des représentants de salariés, des collectivités territoriales, des membres d'organisations syndicales du secteur énergétique.
Nous sommes-nous réellement demandé si cette compatibilité entre obligations de service public et loi de la concurrence, qui doit être assurée par la commission de régulation de l'électricité et du gaz, la CREG, était possible ?
La crise californienne, la faillite au Royaume-Uni de British Energy et de Railtrack sont autant d'exemples qui font naître de sérieux doutes quant aux vertus de la concurrence et à la capacité régulatrice d'une instance externe, autrement dit d'une autorité de régulation.
Il semble aberrant, madame la ministre, de rester aveugle face aux méfaits du libéralisme dans les pays pionniers en matière de déréglementation et de privatisation.
Ce sont des secteurs entiers de l'économie qui, étant devenus la proie de groupes privés, ont été soumis à la logique de la rentabilité à court terme.
Ces secteurs ont été complètement destructurés et leur efficacité économique et sociale a été fortement atteinte, ce qui a conduit l'Etat à intervenir financièrement.
Les conséquences sur le plan humain furent aussi dramatiques : la catastrophe de Paddington nous le rappelle.
Nous devrions tirer les leçons des expériences du « modèle » libéral britannique.
Plus globalement, nous devrions dresser un bilan de la déréglementation et des privatisations, tant au niveau européen qu'à l'échelle nationale.
C'est en tout cas ce que réclament depuis longtemps les organisations syndicales et les usagers.
Ce n'est pas un hasard si, après la crise des années trente et la faillite des économies de marché, un certain nombre de biens dits publics ou collectifs ont, en raison de leur caractère d'intérêt social, été soustraits à la gestion purement privée pour être organisés par la puissance publique. C'était reconnaître que de tels domaines d'activité ne pouvaient, au risque de perdre en efficience, être soumis aux logiques purement privées. C'était reconnaître également que certains d'entre eux ne pouvaient être contrôlés qu'à travers la propriété publique du capital.
Le préambule de la Constitution de 1946 est significatif à cet égard. En effet, il dispose que « tout bien, toute entreprise dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public ou d'un monopole de fait doit devenir la propriété de la collectivité ».
Loin de tenir compte à la fois des expériences historiques et des expériences récentes de l'échec du libéralisme, votre projet de loi peut être analysé comme la première étape vers la privatisation de grandes entreprises publiques comme EDF et GDF, entreprises qui ont pourtant fait preuve, par le passé, de leur efficacité économique et sociale.
Notre industrie énergétique est compétitive - le prix de notre électricité est l'un des plus faible sur le plan mondial - et elle garantit notre indépendance énergétique.
Certes, notre service public n'est pas exempt de critiques et, aujourd'hui, nous savons tous qu'il mériterait d'être modernisé et développé.
Selon le principe même de subsidiarité, aux termes duquel les Etats gardent la liberté d'organiser des secteurs dits « d'intérêt général », la transposition de la directive nous offre précisément l'opportunité de conforter nos services publics du gaz.
Au-delà du secteur gazier à proprement parler, et en nous appuyant sur une industrie dont la compétitivité nous est enviée par la plupart de nos partenaires européens, nous pouvions même songer à mettre en place un grand pôle public de l'énergie.
Ce pôle public s'étendrait de l'amont à l'aval à travers des filiales communes entre des pétroliers comme Total-FinaElf, des gaziers comme GDF et des électriciens comme EDF. Le caractère public d'un tel pôle n'est pas contraire à l'esprit des traités de l'Union européenne.
Si, aujourd'hui, l'étroitesse des nations est considérée comme un obstacle au développement de nos industries, rien dans les traités ne s'oppose à la réalisation d'un pôle public énergétique.
Dans un marché aussi vaste et qui a une tendance naturelle à s'élargir, il n'y aurait évidemment pas d'abus de position dominante.
D'ailleurs, on observe de tels mouvements de rapprochement entre pétroliers, gaziers et électriciens.
Un tel rapprochement entre entreprises dont on souhaiterait qu'elles aient ou qu'elles continuent à avoir un caractère public permettrait de valoriser les synergies industrielles et de conférer à ces entreprises la taille nécessaire pour conforter leur position au sein de l'espace unique européen.
Ce serait là, madame la ministre, donner sens à une véritable politique énergétique en la rattachant à un réel projet industriel.
Une telle orientation aurait encore l'avantage de donner corps à une grande entreprise de services publics à l'échelon européen.
Elle permettrait de relancer réellement et dans des conditions saines la dynamique de la construction européenne, en y réintroduisant concrètement un contenu social, du fait du statut de ces entreprises et des missions de service public qu'elles assument, comme le système de péréquation tarifaire, ainsi que de leur indépendance par rapport aux critères fixés par les marchés financiers.
C'est en tout cas un axe de réflexion essentiel qui doit figurer dans le débat sur les services publics que réclament les partenaires sociaux, les salariés et les usagers.
Madame la ministre, vous n'échapperez pas à un tel axe de réflexion à partir de votre projet de loi que vous avez significativement intitulé - j'insiste sur ce point - « marchés énergétiques ».
Vous devez répondre positivement aux aspirations des salariés et des usagers qui, voilà une quinzaine de jours, étaient des milliers à manifester dans les rues de Paris pour défendre leur service public, et en particulier ceux de l'électricité et du gaz !
Le gaz n'est pas une marchandise. C'est un bien de première nécessité, dont la gestion ne peut être abandonnée à la seule initiative privée.
A l'heure où les malversations financières de toutes sortes se multiplient, où les scandales du type Enron ou Worldcom éclatent, où, en raison d'une course folle au gigantisme sans réel projet industriel, des entreprises comme Vivendi ou France Télécom se voient contraintes, compte tenu de l'impasse financière dans laquelle elles se trouvent, de céder des actifs, nous refusons que notre secteur énergétique fasse à son tour l'objet de telles dérives affairistes.
Nous pensons a contrario que de telles entreprises, qui ont fait leur preuve par le passé, doivent être préservées des logiques purement financières et spéculatives.
Pour le dire autrement, nous refusons catégoriquement que nos services publics puissent être placés sous la coupe des intérêts des actionnaires, qui exigent des taux de profit incompatibles avec la nature même de l'activité de ces services publics, à savoir répondre aux besoins essentiels des populations.
A fortiori, une partie du bénéfice généré par ces activités doit être réinvesti à des fins de développement et de modernisation des services publics, dans un contexte de bouleversement important des technologies, au lieu d'alimenter les intérêts privés des actionnaires.
Force est de le constater, ce n'est guère l'orientation que vous avez inscrite dans votre projet de loi,
C'est pourtant bien une question de choix de société, où la solidarité doit primer sur l'intérêt purement privé des plus forts, où la notion de contrat social prend tout son sens !
Tel n'est pas votre choix. Une fois de plus, ce seront les usagers qui devront subir la dégradation des services publics !
En matière d'aménagement du territoire, par exemple, nous savons que de nombreuses communes inscrites au plan de desserte n'ont pas encore été desservies.
Or les pertes financières de GDF occasionnées par une stratégie à court terme de développement à l'international auraient permis le raccordement de 500 communes !
Lorsque le développement à l'international de nos entreprises devient une fin en soi, il y a péril en la demeure.
Sous un autre angle, votre texte de loi, qui privilégie les opérateurs et leur zone de desserte, risque de remettre en cause la péréquation tarifaire, élément essentiel de l'égalité de traitement des usagers non éligibles, autrement dit des petits consommateurs. Ce sont encore ces derniers qui risquent de subir des hausses de leur facture, tandis que des baisses de prix seront accordées aux gros clients !
On observe déjà dans la pratique que des marges se réalisent sur le dos des usagers non éligibles.
Nos PME, elles aussi, verront sans doute augmenter leurs tarifs !
Bref, on va privilégier une fois de plus les multinationales au détriment des usagers, en remettant en cause les missions de service public !
Dans le même esprit, comment ne pas souligner que la régulation d'un tel secteur qui exige des investissements lourds suppose une programmation des investissements sur le long terme pour favoriser le développement des réseaux de transport ?
De même, la sécurité de nos approvisionnements exige l'élaboration de plans prévisionnels sur une dizaine d'années.
Votre texte fait malheureusement fi de toutes ces obligations !
Vous abandonnez, madame la ministre, la régulation aux marchés spot, règne du court terme par excellence !
Jusqu'à présent, l'intervention de tels marchés dans la régulation était restée marginale.
L'extension de leur rôle et, par voie de conséquence, du rôle des fameux traders , ces sociétés de négoce plus attirées par la spéculation sur les variations des cours que par le métier même de gazier, risque de compromettre à terme le développement, l'entretien et donc la sécurité de nos installations.
En ce domaine, votre projet de loi - permettez-moi de le dire - est particulièrement léger !
La libéralisation du secteur énergétique permettra demain à n'importe quel opérateur d'avoir accès aux réseaux de transport de gaz, d'en construire ou d'en exploiter de nouveaux.
Or il s'agit ici d'ouvrages de transport de très haute pression avec des installations de recompression, des terminaux méthaniers et des stockages souterrains.
Ainsi, GDF possède 5 sites classés Seveso 2, 46 stations de recompression, qui sont susceptibles, à terme, d'être classées Seveso 2. Plus de 4 000 postes de gaz à très haute pression sont situés à proximité des lieux d'habitation. Plus de 30 000 kilomètres de canalisation de très haute pression sont enfouis sous nos routes et sous nos voies de chemins de fer. Leur maintenance et leur entretien nécessitent l'emploi d'un personnel qualifié, formé aux risques que présentent de tels ouvrages.
La logique actuelle de réduction des coûts, de diminution des emplois, de développement de la sous-traitance, de recours à des formes précaires d'emploi et à des emplois peu qualifiés remet directement en cause la sécurité sur les sites classés.
M. Gérard Le Cam. Très bien !
M. Yves Coquelle. A la suite du drame de l'usine AZF, le rapport de la commission parlementaire a permis de mettre en évidence les risques industriels liés à l'exploitation des réseaux de transport de gaz, d'insister sur la nécessité de renforcer les normes de sécurité sur tous les sites présentant des risques industriels majeurs, d'éviter le recours à la sous-traitance et à une main-d'oeuvre peu qualifiée pour effectuer les travaux de maintenance et d'entretien.
Votre projet de loi fait totalement abstraction de ces recommandations, madame la ministre !
Toute procédure d'autorisation de construction et d'exploitation doit être encadrée par des normes fixant les exigences en matière de sécurisation des réseaux de transport. Les obligations d'entretien et de maintenance, comme les exigences en matière d'effectifs et de qualification du personnel, doivent figurer dans le cahier des charges des opérateurs. Or rien de tel n'est prévu dans le projet de loi que vous nous soumettez ! Ce sont pourtant là des éléments fondamentaux visant à assurer la sécurité des populations !
La réglementation actuelle propre à GDF doit être renouvelée en fonction des évolutions techniques et doit s'imposer à tout nouvel opérateur.
Je n'aperçois, dans votre projet de loi, aucune trace faisant peser sur les opérateurs éligibles des contraintes de cette nature, contraintes que, pour notre part, nous souhaitons voir imposer aux opérateurs, dans un souci d'éviter que ne se reproduisent des catastrophes semblables à celle de l'usine toulousaine AZF.
Bref, votre texte, madame le ministre, fait pratiquement l'impasse sur toutes les questions concernant des enjeux vitaux et fondamentaux pour les populations : la sécurité et la sûreté des infrastructures, la sécurité d'approvisionnement, la péréquation tarifaire.
A y regarder de près, c'est finalement une liquidation rampante du service public du gaz que vous nous avez préparée ! Voilà pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen combattra ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)

(M. Daniel Hoeffel remplace M. Adrien Gouteyron au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL,
vice-président

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, par souci de réalisme et en raison des obligations déjà souscrites par le gouvernement français en 1998 quant à la mise en concurrence du marché du gaz, je ne me joindrai pas aux sénateurs qui ont déposé une motion tendant à opposer la question préalable. Pourtant, les arguments en faveur d'un refus a priori de discuter de ce projet de loi ne manquent pas.
L'époque où la « libéralisation » des activités des entreprises publiques faisait rêver est révolue : suppressions massives d'emplois, baisse de la qualité du service, hausse des tarifs pour le petit usager, drames à répétition comme dans l'histoire du rail en Grande-Bretagne, sous-investissement chronique sur le long terme dans les réseaux ou la sécurité, le bilan des privatisations d'entreprises publiques depuis une dizaine d'années a viré au noir. L'opinion publique mondiale en a pris conscience, comme le montrent les grandes manifestations de ces dernières années.
Jusqu'à quand continuerons-nous à ignorer ces leçons d'une histoire récente, à défaut de nous rappeler l'expérience de nos anciens, à la Libération?
La voie médiane que cherche à frayer la commission des affaires économiques du Sénat me laisse sceptique, même si je reconnais la qualité du travail de M. le rapporteur.
Quoi qu'il en soit, je ne veux pas me dérober à ce débat, dont la technicité masque une série d'enjeux cruciaux. Rappelons-en quelques-uns : une fois le marché du gaz, et plus généralement de l'énergie, ouvert à la concurrence, aurons-nous l'assurance d'un service aussi fiable et de tarifs aussi modérés ? Comment sera maintenue l'indépendance énergétique de la France si la pression des clients, y compris étrangers, peut peser sur l'équilibre des comptes de nos opérateurs nationaux ? Comment sera financée l'égalité d'accès à l'énergie de tous les citoyens, quelle que soit la densité de population de leurs lieux de résidence ? Comment imposer à un opérateur en partie privatisé des normes de sécurité publique à la hauteur des risques encourus ? Qui nous assure que le statut des agents et l'identité de l'entreprise ne seront pas remis en cause ? Comment, enfin, seront desservies les petites et moyennes communes qui sont éloignées des grandes agglomérations ? Ce sont ces questions, parmi d'autres, qui doivent guider notre appréciation du projet de loi que vous nous présentez.
Je connais votre argument, madame la ministre : la France, dites-vous, s'est placée à la traîne de l'Europe en ce qui concerne la transposition de la directive de 1998 touchant au marché du gaz. C'est vrai ! Mais de là à vous précipiter comme vous le faites, il y a un abîme ! En effet, fallait-il, comme vous nous le proposez, anticiper, par certains articles du projet de loi, sur la directive n° 2, qui est en cours de négociation et prendra effet seulement en 2004 ?
En outre, les orientations que vous préconisez sont graves : s'agissant de la nature et de la pérennité à moyen terme de l'entreprise Gaz de France - vous envisagez une filialisation ou même une vente par appartements ! -, s'agissant de la création d'une autorité de régulation dotée de pouvoirs étendus et de la fixation des péages confiée à ladite autorité, vous adoptez d'emblée une position maximaliste de « bon élève » à l'égard des recommandations de la Commission européenne. Pendant ce temps, l'Allemagne, quant à elle, n'hésite pas à multiplier les obstacles, une fois son marché théoriquement ouvert.
Vous prenez des risques pour les salariés, pour l'entreprise et pour l'indépendance énergétique, sans que l'on perçoive les raisons de cette position. Est-elle idéologique ? Vise-t-elle à nous concilier les bonnes grâces de nos partenaires européens ? Dans ce cas, il faudrait, pour que ce geste ait quelque chance d'être apprécié, que l'ensemble du Gouvernement adopte une attitude plus inventive et plus volontariste lors des grandes négociations sur l'élargissement de l'Union.
En réalité, malgré votre expérience, qui est grande, madame la ministre, vous ne portez pas ici le message d'une politique européenne digne de notre grand pays.
Votre projet de loi est à l'image du Gouvernement : conservateur et néolibéral, mais avec des remords et des prudences, d'où l'antienne sur les missions de service public...
Le Sénat attendait autre chose : les prémices d'une politique européenne de l'énergie. Vous nous offrez une nouvelle, banale et dangereuse privatisation, déclinée au travers du marché du gaz et de l'électricité.
Nous ne vous suivrons pas. Nous ne voulons pas porter plus tard la responsabilité de ce type de décision. Nous sommes néanmoins disponibles pour faciliter avec vous la mise en place d'une politique industrielle de l'énergie à l'échelle de l'Europe. C'est l'impératif que le Sénat devrait aujourd'hui se donner. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen).
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, je tiens à vous faire remarquer que les travées qui nous font face sont vides. C'est incroyable !
M. le président. Le débat ne s'en poursuit pas moins, madame Luc.
La parole est à M. Xavier Pintat.
M. Xavier Pintat. Madame le ministre, dès votre prise de fonctions, vous nous proposez la transposition de la directive européenne sur le gaz. « Enfin ! », dirai-je. En effet, un texte tendant à cette fin était devenu absolument nécessaire. Nous vous remercions donc de votre détermination à présenter ce projet de loi au Parlement aussi rapidement.
En quatre mois, madame le ministre, vous avez fait ce que vos prédécesseurs n'ont pas su ou pu faire en quatre ans.
En effet, après une difficile ouverture à la concurrence du marché européen de l'électricité, le gouvernement précédent avait fini par renoncer à engager l'ouverture de celui du gaz.
C'était choisir de faire primer les a priori idéologiques sur la compétitivité économique d'une des plus grandes entreprises françaises du secteur énergétique.
Les conséquences ne se sont pas fait attendre : impossibilité pour les gros consommateurs de choisir leurs fournisseurs en espérant un meilleur prix ; risque de sanctions financières coûteuses pour la France de la part des autorités européennes ; insécurité juridique pour l'entreprise Gaz de France qui s'est logiquement engagée à appliquer la directive à partir de la date limite de transposition, à savoir août 2000 ; enfin, handicap au développement international des entreprises françaises, leurs concurrents invoquant toujours la non-ouverture du marché français pour ne pas ouvrir le leur.
Le texte qui nous est proposé aujourd'hui permet de remédier à cette délicate situation. Si le projet de loi, au départ, traitait essentiellement du gaz, il a été fort judicieusement complété par notre rapporteur LadislasPoniatowski d'un volet « électricité », qui permet d'actualiser et de préciser la loi de février 2000.
Ainsi, l'économie générale du texte va dans le bon sens.
Tout en transposant les règles communautaires présidant à l'ouverture du marché gazier, ce projet de loi préserve de manière équilibrée les spécificités de notre organisation gazière.
Très importants pour la compétitivité de nos entreprises, les enjeux devraient permettre d'améliorer les services rendus, d'abaisser les coûts pour les consommateurs, notamment industriels, et d'insérer l'action des grandes entreprises françaises dans un contexte mondialisé.
Je me réjouis particulièrement des orientations retenues par M. le rapporteur qui, tout en réaffirmant les valeurs du service public du gaz, répondent à des attentes fortes.
A ce titre, madame le ministre, je me permettrai d'insister sur plusieurs points significatifs.
En ce qui concerne le gaz, tout d'abord, la reconnaissance du rôle, de la compétence et des droits des collectivités locales concédantes est primordiale. Le service public du gaz est un service collectif de proximité, au même titre que l'eau ou l'électricité. La règle nationale doit pouvoir être adaptée afin que prévalent la spécificité des territoires et les intérêts locaux. Je pense notamment au nécessaire maintien du régime de la concession.
Il nous faut par ailleurs renforcer, toujours et encore, la sécurité de nos installations. Des préoccupations se font jour à ce sujet. Il conviendrait que le Gouvernement indique les mesures qu'il entend imposer pour veiller à ce que l'ouverture à la concurrence ne s'accompagne pas d'une dégradation du service et de la sécurité.
Ainsi, dans les centres-villes, de nombreuses canalisations publiques sont encore en fonte grise cassante. Il faudrait les remplacer, ce qui est particulièrement onéreux.
La recherche du moindre coût qui pourrait s'imposer à Gaz de France et aux distributeurs non nationalisés ne devra pas freiner le remplacement de ces canalisations vétustes. De même, elle ne devra pas réduire les campagnes de prévention systématiques des fuites.
Il faut donc veiller à ce que les distributeurs se donnent les moyens financiers d'une politique de sécurité.
A cet égard, le diagnostic des installations gazières des logements devraient faire l'objet d'une intégration dans les missions de service public. Il me semble très opportun de réfléchir aux modalités de cette intégration.
S'agissant maintenant du volet relatif à l'électricité, je voudrais attirer votre attention, madame le ministre, sur la nécessité d'adapter le fonds d'amortissement des charges d'électrification, le FACE, et le mode de perception des taxes locales sur l'électricité.
Je commencerai d'abord par évoquer le FACE.
Ce fonds a été créé avant même la nationalisation de la fourniture de l'électricité, afin que la logique d'entreprise des concessionnaires - qui peut ne pas toujours correspondre à l'intérêt général - soit équilibrée par la puissance publique. Cet instrument national de péréquation des investissements dans les réseaux de distribution trouve aujourd'hui une utilité accrue avec la libéralisation du marché. Il s'agit là d'un outil essentiel pour le maintien de la cohésion nationale entre les territoires. C'est d'ailleurs pour cette raison que la loi du 10 février 2000 n'a en rien modifié le FACE.
Ce fonds, alimenté par EDF, permet l'externalisation de la maîtrise d'ouvrage des investissements dans les réseaux ruraux, qui, je le rappelle, sont la propriété des communes, la maîtrise d'ouvrage étant en effet assurée par les collectivités locales compétentes, communes ou regroupements de communes. Celles-ci décident des investissements selon des critères économiques et sociaux liés à l'intérêt général et non en fonction de critères de rentabilité interne.
Les contributions des distributeurs - qu'il s'agisse de EDF ou des régies - au profit du FACE sont assises sur les montants des factures acquittées par les consommateurs alimentés en basse tension. Ces montants sont actuellement calculés selon des tarifs intégrés, c'est-à-dire comprenant à la fois la fourniture et l'acheminement d'électricité. Or, prochainement, la fourniture en basse tension sera, elle aussi, assurée par des opérateurs autres que les distributeurs.
L'actuel dispositif de perception n'est pas conçu pour cette évolution. Il conviendra donc d'adapter les textes correspondants. C'est pourquoi je m'interroge sur les intentions du Gouvernement sur ce sujet essentiel.
Par ailleurs, dans le respect des règles actuelles comme dans la perspective d'une nouvelle étape de la décentralisation destinée à donner plus de liberté aux collectivités - notamment pour leur permettre de passer des accords entre elles, pour simplifier certaines procédures administratives ou éviter les doublons techniques - le temps me semble venu de laisser aux syndicats départementaux d'électricité le soin de répartir les crédits du FACE. Je vous ferai donc une proposition en ce sens.
Je souhaiterais ensuite aborder la question du mode de perception des taxes locales sur l'électricité.
Ces taxes constituent une recette non négligeable pour les collectivités locales - communes ou départements - et leurs établissements de coopération. Or la modification du paysage de la fourniture de l'énergie électrique impose de revoir le mode de perception de cet impôt indirect.
Il semblerait résulter de la réunion des ministres de l'énergie, qui s'est tenue à Luxembourg le 4 octobre dernier, que tous les consommateurs professionnels en basse tension deviendraient éligibles en 2004. En conséquence, il conviendrait que de nouvelles modalités soient arrêtées afin que les différents opérateurs puissent avoir le temps de s'adapter.
Je ne doute pas que ce problème trouvera sa solution par un ajustement technique de la partie législative du code général des collectivités territoriales.
Je souhaiterais aussi connaître l'état de la réflexion du Gouvernement sur cette question, car elle a un impact très important sur l'organisation du service public de l'électricité par les collectivités locales qui, je le rappelle, sont propriétaires des réseaux.
Madame le ministre, telles sont les quelques précisions que je sollicite de votre part. Nous vous savons gré d'avoir présenté votre projet de loi en premier lieu au Sénat et nous espérons qu'il sera rapidement adopté, car c'est le seul moyen de clarifier la situation juridique du marché de l'énergie dans notre pays et de favoriser l'action de nos entreprises sur le marché européen et mondial.
A l'heure où s'achève la négociation européenne sur une plus large ouverture des marchés énergétiques, nous apprécions la manière dont vous avez procédé, par étapes, en commençant, d'abord, par la transposition de la directive sur le gaz et l'amélioration de notre législation sur l'électricité pour en venir, ensuite, aux autres sujets qui conditionnent l'avenir des entreprises françaises du secteur.
Cette méthode me semble la bonne. Il faut en effet aborder une à une les questions et savoir donner toute sa place à la négociation. En tout cas, l'adoption de ce projet de loi permettra à la France de conduire une politique énergétique ambitieuse. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à l'origine, le projet de loi relatif aux marchés énergétiques avait pour principal objet de transposer, en droit français, la directive communautaire, adoptée en 1998, sur les règles communes du marché intérieur du gaz naturel. Finalement, il vise aussi à modifier amplement la loi « électricité » du 10 février 2000 et donne l'occasion aux honorables orateurs de la majorité sénatoriale de jouer les doctes professeurs, distributeurs de blâmes et de mauvaises notes.
M. Pierre Hérisson. Oh !
M. Pierre-Yvon Trémel. Certes, la France n'a pas à s'honorer de son retard à transposer.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. En effet !
M. Pierre-Yvon Trémel. Néanmoins, trois éléments permettent de relativiser les cris d'orfraie.
A la demande du gouvernement de l'époque, Gaz de France a ouvert, dès le 10 août 2000, son réseau de transport de façon transparente et concurrentielle aux clients éligibles. A ce jour, 20 % des industriels éligibles ont effectivement changé de fournisseur dans l'Hexagone, ce qui représenterait environ 5 % de la demande globale.
Malgré quelques résistances de la part de l'Espagne notamment, Gaz de France a consolidé sa présence en Europe, en particulier en Italie et en Grande-Bretagne. L'entreprise est aujourd'hui présente au sein de l'Union européenne dans l'exercice de ses cinq métiers, à savoir l'exploration, la production, le négoce, le transport, la distribution et les services. Les parts de marché conquises dans le domaine international seraient deux à trois fois supérieures à celles qui ont été perdues en France.
Enfin, comme Ladislas Poniatowski le démontre fort bien dans son rapport, au-delà des incantations simplistes, il faut surtout se montrer attentif à la situation réelle dans les pays de l'Union européenne. J'ai apprécié à ce sujet les propos tenus par notre collègue Henri Revol.
Ainsi, comment ne pas être frappé par les grandes différences entre taux d'ouverture théorique et taux d'ouverture réel !
L'Allemagne déclare un taux d'ouverture théorique de 100 % pour un taux d'ouverture réel de 1 % ; le Danemark un taux théorique de 30 % pour un taux réel nul ; l'Espagne un taux théorique de 72 % pour un taux réel de 3 % ; le Royaume-Uni un taux théorique de 100 % pour un taux réel de 25 % ; enfin, la Finlande déclare un taux théorique de 90 % pour un taux réel nul.
Décidément, le mauvais élève n'est pas forcément celui qui est désigné du doigt...
Au demeurant, foin de tergiversations ! La France doit se mettre en règle avec le droit européen. Il importe donc de transposer la directive, mais toute la directive et rien que la directive.
En réalité, le vrai problème ne réside pas dans le retard pris par la transposition.
La question de fond, qui n'est pas exprimée officiellement dans les textes mais qui est clairement sous-entendue, tant dans le projet de loi déposé en mai 2000 par M. Christian Pierret que dans celui que vous nous présentez aujourd'hui, madame la ministre, est celle du débat entre libéralisation, ouverture du marché et exercice des missions de service public dans un secteur clé comme celui de l'énergie. Vous avez parlé, madame, dans votre présentation du projet de loi de « la recherche de la coexistence équilibrée entre concurrence et service public ». Mais alors, où plaçons-nous la barre ?
En fait, c'est la difficulté à trancher ce débat qui explique, à mes yeux, la non-inscription à l'ordre du jour du Parlement du projet de loi Pierret.
Ce débat, loin d'être clos, continue de se dérouler dans différents lieux : conseil des ministres de l'Union européenne, Parlement européen, formations politiques, entreprises publiques, syndicats, médias ; nos concitoyens s'en sont même saisis. Il était déjà très présent dès le début de la négociation de la première directive Gaz.
A cet égard, il n'est pas inutile de rappeler la durée de cette négociation - plus de six années - ainsi que les vifs débats qui ont eu lieu au Parlement européen en 1993 et en 1998.
Dans ce difficile accouchement, la France a réussi à faire accepter certaines de ses exigences : la reconnaissance de la notion de service public ; la sécurisation des approvisionnements ; la préservation de notre système de distribution ; la maîtrise et la progressivité de l'ouverture du marché.
Bien entendu, derrière ce débat, derrière ces négociations, se profilent les interrogations fondamentales sur le devenir de GDF, de EDF, sur le statut de leurs personnels, sur leur projet industriel et commercial et sur leurs alliances éventuelles.
Le débat parlementaire qui nous réunit aujourd'hui est très différent de celui que nous aurions eu voilà encore quelques mois. Le contexte a, en effet, radicalement changé et il n'est pas possible d'ignorer des éléments majeurs qui doivent éclairer et influencer notre réflexion.
Je me bornerai à en citer trois : la déréglementation de l'énergie et ses effets dans les pays dits « ouverts » ; la libéralisation dans d'autres secteurs clés comme celui des télécommunications ; enfin la négociation de la deuxième directive Gaz.
Nous disposons d'un recul suffisant pour commencer à évaluer les effets de la libéralisation sur les prix de l'énergie.
Les tenants de la libéralisation considèrent que la libération des énergies créatrices et la suppression de ce qu'ils appellent les « carcans réglementaires » doivent permettre, par le seul jeu de la concurrence, de disposer de services au moindre coût, avec une offre diversifiée pour l'ensemble des publics.
Or que constatons-nous ?
Pour le prix du gaz, la dernière étude d'Eurostat, janvier 2002, montre que la France est bien placée en Europe : ses tarifs industriels, hors taxes et toutes taxes comprises, sont en deçà de la moyenne européenne et ils sont inférieurs aux tarifs pratiqués dans les pays dits ouverts, comme le Royaume-Uni et l'Allemagne.
Sur la période comprise entre 1996 et 1999, le prix de l'électricité a augmenté, en moyenne, de 0,8 % en Allemagne et de 13,2 % au Royaume-Uni. En France, sur la période considérée, le prix de l'électricité a baissé de 9,3 % pour les consommateurs domestiques, secteur qui demeure sous un régime de monopole.
En outre, des leçons doivent être tirées des graves dysfonctionnements observés en Grande-Bretagne, avec British Energy, et aux Etats-Unis, avec la crise du secteur électrique en Californie.
Deux conclusions me paraissent indiscutables : d'une part, la libéralisation totale soulève de vrais problèmes en matière de sécurité ; d'autre part, la libéralisation n'incite pas à l'investissement.
M. Gérard Delfau. Cest évident !
M. Pierre-Yvon Trémel. La recherche première de la rentabilité à court terme se heurte de plein fouet aux impératifs de base d'une politique énergétique durable.
La déréglementation vient en outre de montrer, à l'occasion de catastrophes qui ont beaucoup marqué l'opinion publique - je pense notamment aux déraillements de trains de Railtrack, en Grande-Bretagne - que certaines limites ne pouvaient être franchies. On peut également mentionner à cet égard les fortes augmentations du prix des timbres en Suède et en Allemagne ou le spectre de la catastrophe boursière pour les actionnaires de France Télécom.
Nous débattons cet après-midi de la transposition de la première directive gaz alors que se négocie difficilement une deuxième directive. Les enjeux de cette négociation sont clairement établis.
Que peut-il sortir d'un nouveau choc entre des cultures différentes du service public, pour reprendre votre heureuse expression, madame le ministre ?
Les libéraux vont-ils réussir à imposer un calendrier, à marche forcée, vers une déréglementation débridée ?
Quelles règles du jeu seront retenues sur des points aussi essentiels que l'accès au stockage, la sécurité des approvisionnements ou la séparation juridique des « métiers » ?
Nous comptons sur votre fermeté, madame la ministre, et nous serons très attentifs à ce qui sortira de la réunion du 25 novembre.
Nous tenons à vous le dire, nous attachons une grande importance à la pérennité du système de péréquation tarifiaire des prix du gaz et de l'électricité pour les particuliers,...
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Pierre-Yvon Trémel... à la pérennité des services communs à EDF et GDF pour la distribution, à la prise en compte de l'aménagement du territoire en matière de desserte gazière.
Transposition nécessaire, ai-je dit, mais dans un contexte nouveau.
Oui, on peut parler, cher Daniel Raoul, d'une « ardente obligation », celle de prendre une position parfaitement claire sur la définition, les contours des missions de service public dans le cadre d'une loi sur les marchés énergétiques.
Le Gouvernement aurait pu reprendre le projet de loi qui avait été préparé par Christian Pierret et que connaît bien notre rapporteur. Tel n'a pas été votre choix, madame la ministre.
Il est vrai qu'il s'agissait d'un projet de loi relatif à la « modernisation du service public du gaz naturel et au développement des entreprises gazières ». Il est non moins vrai que ce projet de loi consacrait tout son premier titre et plusieurs articles à la définition du service public, de ses missions. Il désignait ses acteurs - principalement GDF, qui n'est d'ailleurs jamais cité dans votre texte - et les collectivités locales concédantes.
Dans le texte que vous nous présentez, il est, au contraire, principalement question de « marchés », comme l'indique son intitulé. Les avants-projets de loi qui ont circulé ne faisaient d'ailleurs même pas état du service public. Celui-ci est relégué, dans votre texte, au titre III. Un seul petit article - l'article 11 - y est consacré.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Mais il est très bien rédigé ! (Sourires.)
M. Pierre-Yvon Trémel. Il n'y est traité qu'en termes d'obligations, donc de contraintes pour les opérateurs. En fait, les dispositions intéressantes concernant le service public se comptent sur les doigts de la main.
Monsieur le rapporteur, je vous rends cet hommage : vous avez beaucoup travaillé, beaucoup auditionné. Par conviction personnelle, je le crois, et aussi pour tenir compte d'un certain nombre de risques, vous avez bien senti la nécessité de procéder à un rattrapage. Au demeurant, d'améliorer l'article 11. Cependant, même assorti de vos amendements, cet article reste fort loin de nos attentes et nous avons nous-mêmes déposé plusieurs amendements sur cet article. Si nous en avons vraiment la volonté commune, nous parviendrons à une rédaction satisfaisante.
La transposition doit être, pour nous, l'occasion de définir positivement les missions du service public du gaz, de rappeler les principes qui le fondent.
L'occasion aussi de préciser la contribution du service public du gaz aux objectifs de la politique énergétique et à ceux de la nation en général.
L'occasion également d'affirmer le rôle de l'Etat et des collectivités locales dans l'organisation du service public du gaz et de renforcer les obligations du service public sur la sécurité des installations.
L'occasion encore de définir clairement les missions de service public applicables aux clients domestiques en proposant concrètement des services répondant à des soucis d'aménagement du territoire et de sécurité des installations de gaz des particuliers.
L'occasion enfin d'étendre les compétences des observatoires du service public de l'électricité et du gaz et de préserver ce qui fonctionne bien sur le terrain.
Au demeurant, la discussion à propos de cet article 11, tout à fait insuffisant dans sa rédaction actuelle, présente, pour nous, une double opportunité : celle d'un renvoi vers la nécessité de l'élaboration d'un droit européen des services publics...
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Pierre-Yvon Trémel. ...et celle d'une prise de rendez-vous pour les débats à venir que vous avez évoqués, madame la ministre.
Avec l'article 16 du traité instituant la Communauté européenne, introduit par le traité d'Amsterdam en 1997 et l'article 36 de la Charte des droits fondamentaux, approuvée au sommet de Nice en 2000, les services publics - « services d'intérêt économique », en « eurolangage » - ont fait l'objet d'un début de reconnaissance de la part de l'Union européenne.
Mais nous voyons bien que ce sont les objectifs liés à la réalisation du marché intérieur et le principe consubstantiel de la concurrence libre, équitable et parfaite - la fameuse notion de level playing field - qui régissent les directives et règlements sectoriels d'ouverture dans différents domaines : poste, télécoms, gaz, électricité, transports collectifs.
Cela introduit deux dérives majeures dans l'approche européenne des services d'intérêt économique général.
Première dérive : la logique de la libéralisation des marchés s'impose par rapport aux objectifs d'intérêt général des missions de service public et à leurs spécificités, la régulation par le prix étant réputée y satisfaire malgré les limites qu'elle a révélées en matière postale - en Suède, notamment - ferroviaire ou aérienne - en Grande-Bretagne dans les deux cas.
C'est la même logique qui conduit à la mise en place d'un service universel faisant prévaloir la charité sur la solidarité,...
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Pierre-Yvon Trémel. ... d'un service public cantonné dans des modes d'accès insuffisants, obsolètes, inadaptés.
Deuxième dérive : faute d'une conception homogène de la subsidiarité, d'importantes distorsions dans l'ouverture des marchés nationaux et locaux n'empêchent pas, paradoxalement, la compatibilité avec une transposition des directives et des règlements sectoriels.
L'exemple de l'Allemagne, dont le réseau de distribution d'électricité et de gaz est décentralisé au niveau des Länder et des communes, illustre bien ce paradoxe : l'Allemagne affiche un taux d'ouverture national proche de 100 %, alors que le taux d'ouverture réel du marché reste, au niveau local, proche de zéro.
M. Paul Loridant. Eh oui !
M. Pierre-Yvon Trémel. Il faut vraiment envisager une évolution vers un droit autonome des services publics qui ne se réduise pas à des principes dérogatoires du droit commun du marché intérieur et de la concurrence.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Pierre-Yvon Trémel. C'est bien l'idée d'élaborer une directive cadre qui a été retenue, sur le principe, au Conseil de Barcelone. Or force est de constater que la Commission manifeste une grande circonspection à l'égard de ce mandat qui lui a été donné à Barcelone.
Dès lors, ne faut-il pas plaider pour que la Convention sur l'avenir de l'Union se saisisse de cette question et envisage de consolider, une fois pour toutes, dans les traités, un droit positif des services d'intérêt général ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen et du RDSE.)
M. Paul Loridant. Ou des services publics tout court !
M. Pierre-Yvon Trémel. Madame la ministre, vous avez une expérience et une compétence européennes qui font autorité. Elles m'autorisent à solliciter votre opinion sur cette importante question.
Une prise de rendez-vous s'impose au regard du programme très fourni qui s'annonce : Conseil européen du 25 novembre, annonce d'une loi d'orientation sur l'énergie pour le début de l'année 2003, projet du Gouvernement concernant l'ouverture du capital de EDF et de GDF, orientations stratégiques des opérateurs historiques - quels projets industriels et commerciaux, quelles alliances pour demain ? - sans oublier, parce que le problème de fond est le même, les débats futurs sur le devenir de France Télécom et de La Poste.
Comment, dans ces conditions, le projet de loi que vous nous soumettez ne susciterait-il pas de nombreuses interrogations ?
Vous proposez une transposition libérale de la directive en allant bien au-delà de ce que demande Bruxelles.
Vous ne prévoyez pas dans le texte la place pourtant indispensable à une définition et à une description des missions de service public du gaz et de l'électricité.
Vous procédez non pas à un toilettage de la loi « électricité », que nous aurions pu accepter, mais à une réécriture de cette loi.
Vous supprimez les verrous dont disposait jusqu'à présent le Parlement en permettant la négociation des seuils d'ouverture du marché du gaz et de l'électricité par décret, donc sans débat devant nos assemblées. Notre collègue M. Revol a bien relevé les dangers d'une telle disposition en défendant, ce matin, des amendements devant la commission.
Vous vous placez ainsi en nette contradiction avec la volonté affirmée de M. Jean-Pierre Raffarin de revaloriser le rôle du Parlement et de renforcer le dialogue social, ainsi qu'avec des propositions de loi déposées par certains de nos collègues de la majorité sénatoriale et tendant à donner toute sa place au Parlement dans le processus de transposition des directives.
Le président de la commission des affaires économiques, M. Gérard Larcher, s'exprimant le 26 juin dernier à l'occasion d'un colloque sur le thème de l'énergie, « Quelle politique française pour la nouvelle législature ? », présentait quatre voies possibles, avec des formules chocs dont il a le secret,...
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Le talent ! (Sourires.)
M. Pierre-Yvon Trémel. Bien sûr !
M. Pierre Hérisson. Les deux !
M. Gérard Larcher, président de la commission. Des formules affectives ! (Nouveaux sourires.)
M. Pierre-Yvon Trémel. ... des formules telles que « la vie gémellaire », « le mariage arrangé », « le ménage à trois » ou « la réconciliation amoureuse ». (Rires.)
M. Gérard Larcher, président de la commission. N'est-ce pas affectif tout cela ?
M. Pierre-Yvon Trémel. Quel choix difficile !
Le président Larcher prenait bien soin de préciser que, pour adapter EDF et GDF à la nouvelle donne énergétique, il fallait « se hâter mais non se précipiter ».
Daniel Raoul rappelait à l'instant, madame la ministre, les propos que vous avez tenus à l'issue du Conseil des Quinze consacré à l'énergie, réuni le 4 octobre à Luxembourg : « Nous avons besoin de pédagogie, de communication et de temps. »
Tout cela est parfaitement vrai.
J'ai été très intéressé par ce qu'a dit tout à l'heure le président Larcher sur le service public, car j'ose affirmer, à l'occasion de ce débat, qu'il n'y a plus de fuite possible : du côté de la majorité comme d'ailleurs du côté de l'opposition, à Paris comme à Strasbourg, une politique claire doit être affimée quant au service public que nous voulons en France et en Europe. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Jusqu'à ce jour, notre pays pouvait s'enorgueillir de disposer d'opérateurs publics dans le secteur de l'énergie qui alliaient l'expérience technologique et la performance économique tout en garantissant un mieux-disant social à leurs salariés et en assurant une prestation de qualité aux consommateurs ainsi qu'une desserte d'énergie minimale aux plus démunis de nos concitoyens.
Ce projet de loi relatif aux marchés énergétiques et introduisant dans la législation nationale la directive européenne concernant le gaz nous paraît dès lors être un véritable marché de dupes et semble présenter un grave danger pour notre pays.
Il s'agit d'un marché de dupes pour les consommateurs, à qui l'on promet à la fois une baisse des prix, par le biais de la concurrence, et une amélioration des services. L'expérience montre, hélas ! que la réalité est souvent tout autre : la concurrence se traduit certes par des baisses de prix, mais pour les acteurs économiques les plus puissants, et elle s'accompagne souvent d'une stagnation du prix, voire de hausses de tarifs pour les consommateurs domestiques, notamment pour les plus vulnérables d'entre eux.
Le service public du gaz fait preuve, en France, d'une très grande performance économique qui place notre pays, disons-le, dans le peloton de tête des pays européens en matière de prix et de services. Ce projet de loi présente donc un grave danger pour nos concitoyens.
Au nom des exigences de la libre concurrence imposée, on le sait, par le traité de Maastricht et par le compromis de Barcelone - autrement dit par le coeur de l'idéologie européenne, - notre indépendance énergétique sera à la merci d'entreprises privées soumises à la pression des actionnaires, bref à la loi d'airain des marchés financiers, dont on connaît les mouvements erratiques.
Dans un secteur aussi stratégique et vital que celui de l'énergie, où l'on raisonne en termes d'investissements et de stratégie à vingt, à trente ans, voire beaucoup plus, les défaillances technologiques et financières des opérateurs rendraient notre pays et nos entreprises très vulnérables.
Il ne s'agit pas de ma part de pures spéculations : les déboires des entreprises électriques en Californie et les terribles accidents ferroviaires en Grande-Bretagne devraient nous appeler à la prudence.
La poursuite de cette libéralisation du marché de l'énergie relève, je le pense vraiment, de l'autisme politique.
En effet, à l'heure où les Etats-Unis redécouvrent le concept français d'établissement public dans le domaine de l'énergie, à l'heure où la Grande-Bretagne envisage de renationaliser les chemins de fer,...
M. Gérard Delfau. C'est fait !
M. Paul Loridant. ... au moment où ces deux pays reconnaissent que l'idéologie du tout-marché, censé faire mieux que les services publics, a failli, le Gouvernement et sa majorité ne trouvent rien de mieux à faire que de désorganiser le secteur du gaz !
Pis, alors que rien ne l'y oblige, le gouvernement de M. Raffarin veut engager EDF et GDF dans la voie de la privatisation. Oh non ! excusez-moi, le mot est trop grossier : disons plutôt de l'ouverture du capital.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. C'est mieux !
M. Paul Loridant. Loin du pragmatisme affiché de M. Raffarin, il s'agit là d'une mesure de nature plutôt idéologique, empreinte d'un petit côté revanchard dirigé contre les services publics, qui sont pourtant plébiscités par nos concitoyens selon tous les sondages. Avant de conclure, madame la ministre, je voudrais vous faire part d'un souvenir d'étudiant. Non loin d'ici, au Panthéon, il y a quelques années - disons avant-hier (Sourires) -, je suivais les cours sur la politique économique du professeur Jeanneney, le fils de Jules et le père de Jean-Noël, et je me souviens très bien de ce qu'il disait à propos de la France et de la nécessité de préserver cette indépendance. Madame la ministre, il se réclamait du gaullisme !
Madame la ministre, je vous informe enfin que les quatre sénateurs appartenant au pôle républicain - mais membres à part entière du groupe communiste républicain et citoyen - soucieux de l'« intérêt national » - je reconnais que c'est un gros mot ! - attachés à l'égalité de traitement entre tous les citoyens - cela n'aurait-il pas un petit côté scandaleux ? - avec l'idée d'un service public fort et efficace chevillée au corps - mais cette notion n'existe pas dans la phraséologie européenne - bref, très attachés à la défense des entreprises publiques, voteront contre votre projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur certaines travées du RDSE.) M. le président. La parole est à M. Jean Besson.
M. Jean Besson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés aujourd'hui à débattre de la transposition en droit interne de la directive européenne sur le marché du gaz.
Plusieurs des collègues qui se sont exprimés avant moi à cette tribune ont fait observer que ce débat avait lieu tardivement.
Pour ma part, je dirai avec pragmatisme qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire et je rappellerai que M. Christian Pierret, votre prédécesseur, madame la ministre, avait demandé aux opérateurs de prendre les initiatives nécessaires pour rendre effective l'ouverture à la concurrence. Les opérateurs, en premier lieu Gaz de France, s'y sont conformés avec une diligence que je tiens à souligner.
Dans les faits, l'ouverture du marché fut bien effective dès le 10 août 2000, en conformité avec les termes de la directive.
Je centrerai donc mon propos sur le rôle essentiel des collectivités locales, puisque l'organisation de la distribution du gaz naturel, comme de l'électricité, est une compétence communale. Aujourd'hui, cette compétence est le plus souvent déléguée à des syndicats départementaux qui, sous l'égide de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies, la FNCCR, incarnent une capacité collective de négociation et de contrôle plus importante à l'égard des opérateurs.
Dans ce contexte irréversible d'ouverture des marchés, le rôle des collectivités concédantes doit être clairement réaffirmé.
Ces dernières seront plus que jamais les garantes du service public et de l'équité, équité territoriale et équité à l'égard des petits et moyens consommateurs.
Notre débat doit donc contribuer à améliorer et à préciser la rédaction du projet de loi, à conforter le périmètre du service public local et de l'énergie. La directive de 1998 nous le permet.
En premier lieu, il est indispensable de lever les ambiguïtés qui tiennent à la définition du terme de « distribution ». Ce terme est aujourd'hui confiné au seul acheminement de l'énergie jusqu'au consommateur final.
Les contrats de concession ou les règlements de service des régies couvrent une réalité beaucoup plus large et structurante. En effet, au sens de la loi de 1946, la distribution englobait aussi la production, l'importation et la commercialisation de l'énergie, activités que nous désignons aujourd'hui sous le terme de « fourniture ».
C'est pourquoi je propose de substituer la notion de « service public local de distribution de l'électricité et du gaz » à celle, trop restrictive, de « distribution ».
Il s'agit ensuite de rappeler la dimension décentralisée de ce service public.
Les communes et leurs groupements concourent, aux côtés de l'Etat, à l'organisation du service public. En particulier, le champ du régime des autorisations ministérielles, concernant principalement l'activité de fourniture, ne doit pas être étendu au détriment du pouvoir concédant local. Il convient également de donner aux acteurs du service public local les moyens financiers et juridiques nécessaires à l'accomplissement de leurs missions.
S'agissant des moyens financiers, le loi doit prendre acte que les coûts des extensions gazières sont pris en compte pour la détermination du tarif d'utilisation des réseaux de distribution.
S'agissant des moyens juridiques, le régime de concession des réseaux de gaz comme d'électricité est une véritable délégation de service public, avec les impératifs que celle-ci impose en termes d'engagements des deux parties, de fixation d'objectifs et de contrôle de leur exécution.
Sur ce dernier aspect, la Cour des comptes, dans son rapport de 2001, a constaté des insuffisances tenant autant à l'opacité des informations transmises par les concessionnaires qu'au manque de moyens de certaines autorités concédantes.
Pour exercer efficacement leurs obligations de contrôle, encore faut-il que ces dernières puissent réellement accéder aux informations nécessaires. J'ajoute que les agents de contrôle désignés par les collectivités concédantes sont soumis aux mêmes obligations statutaires de discrétion et de secret professionnel que ceux de l'Etat.
S'agissant du secteur gazier, je terminerai mon exposé sur un appel à la vigilance et sur un souhait, madame la ministre.
Mon appel à la vigilance concerne les options qui seront retenues pour la nouvelle politique tarifaire de l'utilisation des réseaux : l'abandon du simple tarif dit « timbre-poste » au profit d'un tarif lié à la localisation induirait des augmentations de coût pour les usagers éloignés des terminaux gaziers.
Je souhaite par ailleurs un relèvement des plafonds des redevances d'occupation du domaine public - ils n'ont pas été modifiés depuis 1953 - dues par les gestionnnaires des réseaux gaziers. Cela a été fait récemment pour l'électricité, et cette majoration devrait également, selon nous, s'appliquer au secteur gazier.
Permettez-moi de profiter de la discussion de ce projet de loi pour évoquer deux points très importants qui concernent l'électricité. En effet, quand on parle gaz, l'électricité n'est pas loin, et réciproquement ! (Sourires.)
Je commencerai par le financement de l'électrification des zones rurales.
Le temps me manque pour rappeler l'attachement de tous les maires à ce remarquable instrument de péréquation qu'est le Fonds d'amortissement des charges d'électrification, le FACE.
La distinction, que je rappelais à l'instant, entre acheminement et fourniture vaut pour l'électricité comme pour le gaz. La réglementation des contributions des distributeurs au FACE doit désormais prendre en compte cette distinction. En effet, l'assiette de ces contributions comprend actuellement le chiffre d'affaires réalisé au titre de l'acheminement, d'une part, et de la fourniture, d'autre part.
La possibilité pour un nombre croissant de consommateurs de choisir leur fournisseur aura pour conséquence immédiate une réduction du chiffre d'affaires du gestionnaire de réseau de distribution, et donc de l'assiette du FACE. Il faut relever le taux des contributions pour compenser cette réduction de l'assiette et pour maintenir les ressources du FACE à leur niveau actuel.
Le second point important tient à la nécessité d'engager une politique volontariste d'enfouissement des lignes électriques, préoccupation de tous les élus locaux. Nous conservons tous en mémoire les conséquences des intempéries de décembre 1999. Dans la logique de marché dans laquelle nous évoluons désormais, il est impératif que l'Etat détermine des objectifs clairs en termes de normes techniques à atteindre et de calendrier, et, surtout, qu'il dégage les financements correspondants.
Enfin, et je conclurai sur ce point, madame la ministre, je profite de ce débat pour vous faire part des inquiétudes des syndicats d'irrigation, fortement consommateurs d'électricité, vous le savez. La tarification actuelle les pénalise et risque de les mettre en difficulté. Je souhaite, madame la ministre, que vous soyez attentive à cette préoccupation du monde rural. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais vous dire très sincèrement combien j'ai apprécié la qualité de cette discussion générale. Il me semble - je vous donne mon avis, vous n'êtes pas obligés de le partager - que nous avons vécu un grand débat.
Certains ont dit : « L'Europe de l'énergie est en marche. » J'ai bien aimé cette formulation et la contribution très substantielle que vous y avez apportée par chacune de vos interventions. Je vous en remercie très sincèrement.
J'ai noté dans toutes vos interventions une convergence assez large, au-delà des différences politiques, pour regretter le retard que nous avons pris dans la transposition de cette directive et pour affirmer la nécessité de construire un dispositif législatif conciliant à la fois le service public et la libéralisation du marché des énergies. Comme l'a dit l'un d'entre vous, il faut trouver le bon équilibre. C'est évidemment tout le problème !
Les questions que vous avez posées s'articulent essentiellement, me semble-t-il, autour de quatre thèmes.
Le premier d'entre eux est l'ouverture du capital de EDF-GDF. Les choses sont très claires sur ce sujet que vous connaissez bien : il n'est pas question d'inscrire l'ouverture du capital dans ce projet de loi. Ce serait tout confondre ! Je peux néanmoins rassurer M. Joly : nous mènerons à bien ce processus, avec détermination mais sans précipitation, comme plusieurs d'entre vous l'ont demandé, et dans un souci d'efficacité, pour donner à EDF et à GDF les moyens de leur développement industriel dans un contexte européen de plus en plus ouvert et donc de plus en plus concurrentiel. Je réponds à cette occasion à M. Trémel que notre objectif est vraiment de permettre à ces entreprises de mener à bien leur projet industriel, objectif qui nous est commun.
L'ouverture minoritaire du capital, qui s'impose dans l'intérêt non seulement des entreprises mais aussi - et je le pense profondément - des salariés ne pourra se faire qu'après le changement de forme juridique des entreprises concernées. Mais il s'agit d'une étape que nous entreprendrons lorsque les conditions du marché le permettront.
MM. Hérisson et Fournier se sont interrogés sur l'avenir de Gaz de France dans ce contexte. Nous pensons vraiment que Gaz de France dispose d'éléments tout à fait solides pour exercer un rôle très important en Europe. L'entreprise possède en effet un vaste réseau de transport et de distribution, un portefeuille de clients extrêmement étoffé, une variété de contrats d'approvisionnement à long terme, autant d'éléments qui ne rendent pas l'avenir de Gaz de France inquiétant.
Vous m'avez également posé, sur le statut des agents, plusieurs questions auxquelles je vais répondre très volontiers.
Il est bien évident qu'il n'est pas question de remettre en cause ce statut. C'était votre première interrogation, monsieur Poniatowski. Nous avons pris cet engagement - nous l'avons dit et nous ne le redirons jamais assez - et, je me permets de le rappeler, mais vous vous en souvenez certainement, cet engagement a été évoqué par M. le Président de la République lui-même dans l'intervention qu'il a prononcée le 14 juillet dernier.
J'en viens au régime de retraite des agents, dont M. Hérisson a souligné très opportunément la spécificité, que nous connaissons tous. Je confirme qu'ils recevront les garanties nécessaires. M. Francis Mer et moi-même avons demandé aux partenaires sociaux d'engager immédiatement des négociations et de nous faire des propositions permettant de garantir le système de financement de ces retraites et la gestion spécifique de ce régime.
Monsieur Trémel, il n'est pas exact de dire que le dialogue social ne nous intéresse pas. C'est au contraire, vous le savez très bien, un grand principe de notre gouvernement. Nous avons d'ailleurs reçu, Francis Mer et moi-même, les syndicats de EDF et de GDF. Nous avons eu avec eux une première concertation au mois de juillet et dans les premiers jours du mois d'août et même une deuxième concertation, encore tout récemment, avant la manifestation. Nous poursuivrons d'ailleurs ce dialogue social, car il est absolument essentiel que les agents soient étroitement associés à l'avenir de leur entreprise par un dialogue social de qualité, à la hauteur de l'enjeu.
J'en viens à l'attachement au service public, que nous avons en commun, puisqu'il y a bien eu, sur toutes les travées de cette assemblée, convergence sur cette notion. Ceux d'entre vous qui ont eu la très grande gentillesse - cela m'a beaucoup touchée - de rappeler mon passé récent de député européen savent parfaitement que, dans le cadre de cette vie professionnelle antérieure, nous nous sommes battus, mes collègues députés européens français, tous groupes confondus, et moi-même, pour faire triompher cette notion de service public à la française que nos autres collègues avaient eu tendance, dans un premier temps, à trouver - pardonnez-moi l'expression - quelque peu ringarde ! Cette idée a fait son chemin et nous pouvons en être fiers. Nous la retrouvons d'ailleurs dans la directive postale et dans le projet d'article 3 de la future directive « électrique », où sont définies des missions de service public inspirées largement de notre notion de service public à la française.
Il ne vous a pas échappé que j'ai souhaité, dans cet esprit, en faire un chapitre spécifique du projet de loi. Cela a, bien évidemment, une signification évidente. Toutefois, si la Haute Assemblée estimait, dans sa grande sagesse, nécessaire de préciser encore ce concept de service public, j'accueillerais avec beaucoup d'intérêt et de façon très positive les amendements qui seraient proposés.
Il s'agit bien d'un service public consolidé. Je crois qu'il n'y a pas d'ambiguïté dans ce domaine.
Vous avez eu raison d'évoquer les négociations de Bruxelles, même si ce n'est pas l'objet de cette discussion, raison pour laquelle je n'en ai pas parlé dans mon intervention liminaire. Je pense toutefois qu'il est important que vous puissiez avoir un éclairage sur ces négociations.
En participant pour la première fois au Conseil Energie le 4 octobre dernier, j'avais comme objectif - naturellement, ce n'était pas le seul, je le précise bien - de rompre l'isolement très grand dans lequel se trouve la France sur ce dossier.
Je vous rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs - mais vous le savez parfaitement -, que la directive relève de ce que l'on appelle la majorité qualifiée. Ainsi, si d'aventure le Danemark souhaite que cette directive soit adoptée sous sa présidence, il peut parfaitement demander un vote le 25 novembre. Il est par conséquent impérieux que le compromis qui sera vraisemblablement proposé intègre de la façon la plus harmonieuse possible vos préoccupations - comme les miennes, puisqu'elles nous sont communes.
Ces préoccupations, quelles sont-elles ?
J'ai déjà évoqué celle qui concerne le service public. En son état actuel, l'article 3 de la proposition de directive peut tout à fait nous convenir.
Notre deuxième préoccupation consiste à subordonner la prochaine étape de libéralisation du marché de l'énergie aux ménages à l'établissement d'un bilan - car je connais bien les dysfonctionnements évoqués par M. Trémel. C'est d'ailleurs la méthode que nous avons fait triompher pour la directive postale. Un tel bilan sera ici possible puisque le marché aura été ouvert pour les entreprises à partir de 2004.
M. Gérard Delfau. Me permettez-vous de vous interrompre, madame la ministre ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Je vous en prie, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, avec l'autorisation de Mme la ministre déléguée.
M. Gérard Delfau. Je vous remercie beaucoup, madame la ministre, de me permettre d'avoir avec vous cet échange.
Je souhaite vous faire part à la fois de notre soutien lorsque vous vous battez pour les objectifs que vous évoquez et, en même temps, de notre inquiétude et de notre scepticisme. Depuis de longues années, en effet, on nous promet un bilan sur chaque chantier de service à intérêt économique et général. Or, au dernier moment, pour des raisons qui sont chaque fois différentes, ce bilan n'est pas fourni, même lorsqu'il a été prévu dans la loi.
Je citerai un exemple qui m'inquiète beaucoup. J'ai récemment assisté à l'étranger à un colloque international, où étaient représentés vingt-trois pays, sur les services publics et l'économie sociale. A cette occasion, la chargée de mission de M. Prodi, le président de la Commission européenne, nous a dit que, tout bien réfléchi, s'agissant de la directive cadre concernant les services d'intérêt général - et je reviens sur ce que vous disiez précédemment -, la Commission pensait que ce n'était pas opportun et qu'elle allait proposer, à la place, un Livre vert.
C'est cela le fond du problème ! Nous ne doutons pas de votre sincérité ni de celle du Gouvernement, mais nous nous heurtons souvent, sur le sujet des services d'intérêt général, à un refus de la Commission, qui a des moyens puissants de blocage, encouragée, il faut le dire, par un ensemble de pays européens qui ne partagent pas nos préoccupations.
Voilà ce que je tenais à vous dire, madame la ministre, tout en vous assurant néanmoins de notre soutien quant aux objectifs que vous fixez.
M. le président. Veuillez poursuivre, madame la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine ministre déléguée. Au cours de ces négociations, j'ai parlé du service public et du bilan qui devra être, oui, très sérieux et probant.
S'agissant de la séparation juridique, question qui a été évoquée par un certain nombre d'entre vous, je partage également tout à fait votre sentiment. Nous nous interrogeons sur l'utilité de cette mesure, que la présence d'un régulateur fort ne devrait pas imposer. Ce sera l'un des points chauds de la négociation.
Sur la question de la propriété des stockages de gaz, je ne peux que vous confirmer la réserve qui est la nôtre, pour ne pas dire notre opposition. Nous considérons que le stockage gazier constitue, à titre principal, un instrument de mission de service public et, ensuite seulement, un instrument de flexibilité économique.
M. Revol a souligné l'absence d'ouverture réelle de certains marchés, notamment du marché allemand. Il est vrai que c'est une situation assez paradoxale. D'ailleurs, sur le plan de la communication et de la pédagogie, il est parfois injuste d'avoir l'impression d'être désignés comme les mauvais élèves de la classe, alors que des pays cherchent, d'une façon beaucoup plus habile, à se protéger.
Je dirai simplement que nous avons soutenu la suppression de l'accès négocié au réseau, comme nous soutenons également l'accroissement des pouvoirs du régulateur, notamment dans le projet de directive que propose la commission. J'ai d'ailleurs l'intention de saisir la commissaire chargée de ce dossier en lui indiquant les chiffres que vous avez cités, les uns et les autres, et en lui demandant ce qu'elle compte faire concrètement. A l'évidence, j'interviendrai avant le 25 novembre prochain, de façon que la réalité soit adaptée au droit.
Une question importante a été posée, notamment par MM. Pintat et Fournier, en ce qui concerne les conséquences de l'ouverture du marché aux professionnels en 2004 sur les recettes des syndicats d'électricité, sur le dispositif de perception du FACE ou sur celui des taxes locales sur l'électricité. A cet égard, je serai très claire : bien entendu, le Gouvernement modifiera les dispositions actuelles et la future loi portant transposition des prochaines directives compensera les conséquences financières de l'ouverture du marché aux professionnels.
Cette modification a été suggérée par M. Besson, qui a formulé d'autres propositions fort intéressantes. Celles-ci seront retenues, je puis vous en donner l'engagement, dans les suggestions que nous ferons lors de la transposition de la prochaine série de directives.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques réponses que je souhaitais apporter à vos questions. La discussion des amendements, lors des séances de nuit que j'aurai le plaisir de passer avec vous, nous fournira peut-être l'occasion d'approfondir l'un ou l'autre de ces points. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centristre, ainsi que sur certaines travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.

13

SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

M. le président. J'ai été informé par le Conseil constitutionnel qu'il avait été saisi, le 9 octobre 2002, d'une requête contestant les opérations électorales auxquelles il a été procédé dans le département de la Haute-Saône, le 29 septembre 2002, pour l'élection d'un sénateur.
Acte est donné de cette communication.

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NOMINATION DE MEMBRES
DE COMMISSIONS

M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe du Rassemblement démocratique et social européen a présenté une candidature pour la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et une candidature pour la commission des affaires culturelles.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :
- M. Jean François-Poncet, membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, en remplacement de M. André Vallet, démissionnaire ;
- M. André Vallet, membre de la commission des affaires culturelles, en remplacement de M. Jean François-Poncet, démissionnaire.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

15

MARCHÉS ÉNERGÉTIQUES

Suite de la discussion
d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. Nous reprenons la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 406, 2001-2002) relatif aux marchés énergétiques. [Rapport n° 16 (2002-2003).]
Je rappelle que la discussion générale a été close.

Question préalable



M. le président.
Je suis saisi, par Mmes Beaufils et Terrade, M. Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, d'une motion n° 124, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3 du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi relatif aux marchés énergétiques (n° 406, 2001-2002). »
Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la motion.
Mme Marie-France Beaufils. Madame la ministre, vous nous avez présenté le projet de loi sur les marchés énergétiques, qui fait suite à la directive du Parlement européen et au Conseil du 22 juin 1998, concernant les règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel.
Nous constatons d'emblée votre tendance à l'extrapolation. Elle apparaît non seulement dans le texte, qui va bien au-delà de la directive - et je le démontrerai ultérieurement -, mais aussi dans son titre, dans lequel vous avez voulu inclure l'ensemble des marchés énergétiques.
Le texte que vous nous présentez, madame la ministre, n'est pas neutre. Il représente bien une première tentative pour amener la question de la privatisation. Personne n'est dupe, et surtout pas les salariés, qui l'ont bien exprimé le 3 octobre.
En fait, madame la ministre, votre projet de loi, dont l'objet devait être la seule transposition d'une directive - directive détournée par les pays l'ayant intégrée -, devient une offensive brutale contre les services publics. Il constitue une première ouverture pour mettre en place ce qui, à l'échelle européenne et mondiale, n'est pas un exemple à suivre : la privatisation des services publics et des biens communs.
La déréglementation accrue, loin de vous dissuader, vous incite bien au contraire à aller encore plus loin, même si vous ne le faites pas toujours immédiatement. Les conséquences en seraient désastreuses à plusieurs égards.
Madame la ministre, vous le savez, l'ouverture du marché pour aller vers la privatisation signifie la hausse des tarifs pour les particuliers, et leur baisse pour les grandes entreprises.
L'argument que vous avancez généralement est que l'ouverture du capital et la concurrence seraient de nature à faire baisser les tarifs, à rendre plus efficaces les entreprises.
Qu'avons-nous constaté, par exemple, aux Etats-Unis ? Le mégawatt d'électricité est passé de 30 dollars avant la crise à 300 dollars en avril 2000 et à 1 900 dollars en 2001, soit un prix multiplié par plus de 60. Pour un ménage californien, la facture a été augmentée de 270 %.
En Suède, la privatisation des postes a entraîné, dans les cinq années suivantes, une augmentation de plus de 60 % du tarif de base des lettres.
En France, nous avons l'exemple d'un service public confié au secteur privé, l'eau, dont le prix a connu en dix ans une augmentation de plus de 60 % avec des distorsions selon les territoires de 1 à 24, le mètre cube coûtant de 0,25 euro à plus de 6 euros.
La revue économique de l'OCDE reconnaît les incidences de la privatisation : « La privatisation de producteurs appartenant de longue date au secteur public pourrait aussi bien provoquer un renchérissement des prix à court terme ».
L'OCDE constate aussi que « les clients industriels bénéficient de façon disproportionnée de la réforme », puisqu'ils monopolisent les baisses tarifaires tandis que la « discrimination des prix persiste » au détriment des ménages et des petites entreprises.
A qui profitent toutes ces augmentations ? Non, pas aux usagers, bien entendu ! Et leurs conséquences ne sont pas neutres.
Madame la ministre, l'ouverture du marché pour aller vers la privatisation, c'est la hausse des profits.
Aux Etats-Unis, par exemple, l'augmentation des tarifs de l'électricité avait pour seul objet un profit suffisant pour garantir les 15 % de rentabilité qu'exigeaient les fonds de pension.
En Grande-Bretagne, pendant la période dorée de la privatisation, l'action de Railtrack passe de 4 à 8 livres, le patron s'octroie un salaire de 0,4 million d'euros et, en 1998, le montant cumulé des profits s'élève à 1,7 milliard d'euros.
France Télécom voit, dans sa période euphorique, son action monter à 219 euros en mars 2000.
Ces hausses vertigineuses des actions et ces gonflements rapides des profits s'accompagnent le plus souvent de lendemains qui déchantent du fait des gâchis économiques.
Madame la ministre, l'ouverture du marché pour aller vers la privatisation, c'est un fiasco économique.
Railtrack, entreprise britannique de chemins de fer, dépose son bilan ; elle est placée sous administration judiciaire en 2002. Pour redresser le secteur, le gouvernement anglais opte pour une « renationalisation » : le contribuable paiera, la dette devra être remboursée. Quel gâchis !
En France, les entreprises en voie de privatisation sont poussées à une frénésie d'acquisitions, ce qui les conduit à s'endetter à outrance : c'est l'exemple de France Télécom et de EDF. C'est alors que le signal d'alarme est tiré et que les entreprises concernées se retrouvent dans des situations de rupture. La logique de rentabilité incite les dirigeants à favoriser les stratégies financières au détriment d'orientations économiques à long terme. Les entreprises sont livrées pieds et poings liés aux caprices de la Bourse et aux politiques d'achat débridé. La dette de France Télécom, qui s'élève à 75 milliards d'euros, est deux fois supérieure au déficit du budget de l'Etat.
Ce qui caractérise les privatisations, c'est le désinvestissement massif, et les responsables politiques de 1946 l'avaient bien compris qui avaient confié le marché énergétique au secteur public. Le service public a ainsi participé, de façon essentielle, à l'aménagement du territoire en répondant aux besoins des populations.
Madame la ministre, l'ouverture du marché pour aller vers la privatisation, c'est la dégradation des services rendus.
La crise californienne - la Californie est la cinquième puissance économique mondiale - a plongé dans l'obscurité la Silicon Valley et Hollywood ; les coupures d'électricité ont fait vivre à la population des situations similaires à celles des périodes de guerre.
Les Anglais, avec leurs chemins de fer privatisés, sans parler des retards qu'ils ont subis et des tarifs qui ont flambé, ont vécu dans cette période les accidents ferroviaires les plus graves de leur histoire. Le 5 octobre 1999, on dénombrait trente et un morts et soixante-quinze blessés ; le 28 février 2001, treize morts et soixante-quinze blessés. Avec les autres accidents, ce sont plus de soixante personnes qui ont péri dans les trains britanniques : la dégradation, cette fois-ci, s'est accompagnée de la mise en péril des usagers.
Aujourd'hui, la France a une entreprise publique, EDF-GDF, qui fait la preuve au quotidien du service qu'elle rend et qui sait, dans des situations extrêmes, comme la tempête de l'hiver 1999-2000 et les inondations du Gard, se surpasser pour venir en aide aux populations en détresse.
Madame la ministre, l'ouverture du marché pour aller vers la privatisation, c'est la régression sociale pour les salariés.
La privatisation de Royal Mail va entraîner la disparition de 30 000 emplois en Grande-Bretagne. En Belgique, dans le même secteur, ce sont 1 500 bureaux de poste qui vont disparaître dans les campagnes. France Télécom prend le même chemin.
La remise en cause annoncée des statuts, des salaires, des retraites : tel est le lot qui accompagne les privatisations.
Aujourd'hui, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés à débattre de ce sujet, qui est au coeur des préoccupations de nos concitoyens, et il vous est difficile de le sous-estimer, tant il soulève de questions. Les services publics sont ancrés au plus profond de notre peuple, et vous avez pu constater, le 3 octobre, l'ampleur du mouvement.
Vous auriez bien tort de vouloir réduire à une revendication portant uniquement sur les statuts et les retraites la grande manifestation parisienne.
Madame la ministre, au lendemain de cette manifestation, alors que vous sembliez avoir reçu le message « cinq sur cinq », vous vous êtes dite prête, au cours du Conseil des Quinze consacré à l'énergie, à débattre du principe d'une libéralisation totale du marché du gaz et de l'électricité, y compris pour les particuliers, et à discuter de la date de son entrée en vigueur.
Dans la foulée, vous invoquez « la pédagogie, la communication et le temps » afin, somme toute, de faire passer la pilule de l'ouverture minoritaire du capital : le galop d'essai pour le marché énergétique n'a d'autre objet que de tester les réactions pour savoir jusqu'où vous pouvez aller.
Pour toutes ces raisons, nous sommes fermement opposés à vos intentions. Nous savons, madame la ministre, que c'est une première étape vers d'autres privatisations.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens à attirer solennellement votre attention sur le fait que le projet de loi remet en cause l'un des principes fondamentaux de notre Constitution : « Le peuple français proclame solennellement son attachement aux droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils sont définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946. »
Ce préambule rappelle un des fondements de notre société, que votre projet de loi raye d'un trait de plume : « Tout bien, toute entreprise dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité. »
Or, madame la ministre, vous entendez, par votre texte, céder aux intérêts privés, partiellement ou totalement, un bien, une entreprise qui est depuis 1946 la propriété de notre collectivité.
A ce titre, je vous demande, mes chers collègues, de vous opposer au projet de loi, parce qu'il porte atteinte aux principes de souveraineté nationale, aux principes mêmes de notre Constitution.
La nouvelle étape que vous nous proposez vers la déréglementation, madame la ministre, devrait nous amener à réfléchir sur ses conséquences. Si vous considériez que l'énergie est une marchandise comme une autre, vous pourriez avoir raison. Mais je crois que tel n'est pas le cas. M. Jacques Valade lui-même déclarait, le 26 juin 2002, au Sénat, que l'énergie n'est pas un bien comme les autres et que les choix énergétiques relèvent de la responsabilité de l'Etat, et j'ai entendu des propos semblables au cours des réunions de notre commission, la semaine dernière et aujourd'hui. Il y va, je crois, de notre indépendance nationale.
Qu'advient-il lorsque le marché s'empare de tels secteurs avec pour objectif la rentabilité financière ? Nous venons d'évoquer ce qui s'est passé en Californie, avec Enron et son scandale financier, et certains n'ignorent pas que le krach de 1929 aux Etats-Unis a son origine dans une spéculation boursière très forte sur l'électricité.
La question de l'indépendance énergétique est bien au coeur du débat, et la remise en cause du monopole d'importation du gaz serait lourde de conséquences. Pouvez-vous, pouvons-nous imaginer un instant que des opérateurs privés s'emparent de ce secteur ? Philippe Choquet, directeur stratégie gaz-électricité du groupe TotalFinaElf, pense que des investissements lourds seront nécessaires, en matière de logistique, en matière de transport, et que le financement ne sera possible que si la visibilité sur la rentabilité future est assurée.
Nous pensons, quant à nous, que le maintien de ce monopole est indispensable à la garantie d'un approvisionnement permanent et régulier, qu'il est un gage de notre indépendance énergétique. Celle-ci ne peut être assurée que si l'Etat définit clairement un projet et une stratégie industrielle. Or nous avons l'impression, aujourd'hui, que le projet de loi que vous présentez définit des moyens avant même qu'une politique nationale de l'énergie à long terme ne soit proposée.
Cette stratégie du « coup par coup » n'est pas digne d'un pays comme le nôtre ; nos entreprises publiques ne peuvent être bradées, et les salariés l'ont bien compris. La transposition de cette directive dans d'autres pays, par exemple en Allemagne, montre qu'elle n'a pas suscité une plus grande ouverture du marché : 1 % au lieu de 5 % en France. Notre collègue Yves Coquelle a cité tout à l'heure d'autres cas allant dans le même sens.
C'est parce que le projet de loi remet en cause l'indépendance de nos choix sans définir de stratégie énergétique à long terme que nous ne pouvons l'accepter. L'énergie est un bien commun public, elle ne peut être livrée aux aléas de la Bourse.
Le projet de loi que vous proposez fait l'impasse sur la question de la sécurité. Le rapport de la commission d'enquête parlementaire du 29 janvier 2002 formulait des recommandations sur les installations à risques, dont font partie tous les ouvrages mettant en oeuvre du gaz. Le gaz n'est vraiment pas une marchandise comme les autres.
C'est parce que nous disposons, avec Gaz de France, d'un opérateur efficace et moderne, que la distribution publique et industrielle est aujourd'hui dotée d'un réseau de transport comportant un ensemble interconnecté de stockages, de canalisations de grand transport et de stations de compression appelées « système intégré national », alimentant des réseaux régionaux qui irriguent ensuite l'ensemble du territoire.
Pour assurer la régularité et la permanence de l'approvisionnement, GDF tient compte de trois aléas : les aléas climatiques, quelles que soient les conditions, les aléas d'approvisionnement, tels que la défaillance technique ou la politique d'un fournisseur et les aléas liés au développement des ventes. La conjoncture économique, les besoins en énergie et la concurrence des autres énergies peuvent en effet nécessiter des modifications d'ouvrage du réseau.
Si j'ai insisté longuement sur les aspects liés à la sécurité, c'est que le stockage et le transport des produits gaziers doivent être intégrés dans une politique à long terme.
En effet, les contrats de gaz instaurent des relations durables avec les pays producteurs de gaz et sont souvent signés avant même que les sites n'entrent en exploitation. Il faut en outre planifier des investissements pour la construction des ouvrages et des installations. Il faut également prévoir le dimensionnement des installations pour répondre à des situations extrêmes. Enfin, il faut fixer une prévision de stockage sur six mois, afin d'éviter les ruptures d'alimentation pour des raisons techniques ou politiques, en sachant que nos sources d'approvisionnement sont la mer du Nord, la Russie, l'Algérie et la Norvège.
Les ressources s'épuiseront naturellement ; il faut savoir que, en 2015, le doublement de la croissance nous obligera à chercher des sources de plus en plus lointaines.
Il serait tout de même hasardeux de confier de telles infrastructures à des entreprises privées sans mettre en danger nos populations. Aujourd'hui, l'entreprise publique GDF le gère très bien.
Votre projet de loi, madame la ministre, ouvre la voie à des risques industriels très importants en libéralisant ce secteur et il ne permet pas une programmation à long terme. Le seul principe de précaution devrait vous conduire à ne pas présenter cette loi, le risque accidentogène étant trop sérieux. L'expérimentation - le mot est redevenu à la mode - qui a été tentée par les Anglais s'agissant des chemins de fer doit être prise en compte ; une privatisation suivie d'une renationalisation ne serait pas sans nous faire courir de gros risques.
En ouvrant le secteur du gaz aux appétits industriels privés, le projet de loi remet en cause l'égalité de traitement des utilisateurs et des régions, par des tarifs déterminés par zone et non plus de façon unique sur le territoire national. S'il doit y avoir une baisse des prix, elle concernera les industriels qui pourront faire pression pour négocier ; les petits utilisateurs et les PME, qui constituent l'essentiel des 30 millions d'usagers, verront le prix augmenter de façon inégalitaire, selon la région.
C'est parce que nous pensons que votre projet de loi remet en cause l'un des fondements de notre société, à savoir l'égalité entre les citoyens, que nous le refusons.
L'expérimentation conduite en France avec l'ouverture du marché des télécommunications devrait nous faire réfléchir, afin de ne pas recommencer les mêmes erreurs.
Les tarifs n'ont pas baissé ! Seuls les coûts des communications « longue distance » entre l'Europe et les Etats-Unis ont enregistré une baisse, au détriment de l'abonnement du simple usager, dont le prix a été multiplié par trois depuis 1993.
La situation de l'entreprise, avec un endettement faramineux, est catastrophique !
Voulez-vous, madame la ministre, entraîner le marché de l'énergie dans les mêmes ornières ?
Nous pensons que le projet de loi qui vous est présenté n'est pas acceptable parce qu'il porte en lui, de façon essentielle, les prémisses de la privatisation.
C'est donc, madame la ministre, parce que votre projet de loi remet en cause l'indépendance énergétique de la France, qu'il n'intègre pas de choix et de stratégie industrielle dans une politique à long terme, qu'il traite à la légère les éléments de sécurité et les risques industriels, qu'il remet en cause l'égalité des citoyens devant l'énergie que nous nous y opposons fermement.
Ce projet de loi s'appuie sur un dogme - le libéralisme - et non sur la réalité des industries énergétiques de notre pays, modernes et efficaces.
Vous devez en outre avoir à l'esprit, madame la ministre, que notre dénonciation des privatisations-déréglementations s'appuie sur des exemples tangibles.
Vous qui revendiquez le pragmatisme - c'est en tout cas une formule que les membres du Gouvernement utilisent fréquemment -, vous devez savoir qu'il n'y a pas de bon remède sans un bon diagnostic, et le diagnostic est éloquent.
« Le marché est myope » est une formule revendiquée par les libéraux en économie. Vous semblez l'avoir oublié, madame la ministre.
Pour toutes ces raisons, nous proposons le rejet de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. La commission a émis un avis défavorable sur la motion et souhaite au contraire poursuivre la discussion du projet de loi, déclaré d'urgence. A ce sujet, madame la ministre, vous avez entendu l'ensemble des orateurs.
Je ne souhaite pas répondre sur tous les points qui ont été évoqués par Mme Beaufils.
Mme Hélène Luc. Il vous faudrait beaucoup de temps et vous seriez peut-être embarrassé !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je ferai simplement cinq remarques.
En premier lieu, les auteurs de la motion estiment que ce projet de loi risque de remettre en cause le service public. La commission considère, au contraire, qu'il y est fait état du service public et propose d'enrichir le dispositif ; plusieurs membres de la commission l'ont rappelé et nous le montrerons avec les amendements que nous avons déposés.
En deuxième lieu, les auteurs de la motion estiment que le gaz et l'électricité ne sont pas des marchandises comme les autres. J'en suis tout à fait d'accord et Mme la ministre l'a elle-même déclaré lors de son audition par la commission.
Mme Hélène Luc. Il faut en tirer les conclusions !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Justement, nous n'en tirons pas du tout les mêmes conclusions que vous.
Mme Hélène Luc. Eh non, pas du tout !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. En troisième lieu, c'est de façon impropre que les auteurs de la motion évoquent une privatisation. En aucun cas une privatisation n'est envisagée dans ce texte. Mme la ministre a présenté clairement la position du Gouvernement, position que partage la commission.
Mes chers collègues, nombre d'entre vous ont interrogé Mme la ministre sur l'ouverture du capital de Gaz de France. Nous ne sommes à aucun moment allés au-delà.
En quatrième lieu, les tarifs gaziers sont d'ores et déjà distincts sur l'ensemble du territoire. Ils varient notamment en fonction de la distance qui sépare le lieu de la distribution du réseau national de transport. Ce n'est donc pas un élément nouveau,
En dernier lieu, vous pouvez être rassurés, car Mme la ministre envisage d'organiser un grand débat sur la politique nationale de l'énergie. Ce débat fut annoncé à quatre ou cinq reprises au moins par son prédécesseur, mais nous l'avons attendu en vain pendant près de deux ans et demi.
Mme Hélène Luc. C'est avant qu'il faut le faire !
M. Pierre Hérisson. Comme pour La Poste ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine ministre déléguée à l'industrie. Le Gouvernement, cela ne vous surprendra pas, n'est pas favorable au vote de cette motion. Je serai brève, car M. le rapporteur a fort bien présenté la situation ; j'ai moi-même déjà eu l'occasion de m'exprimer à deux reprises aujourd'hui et de développer les principaux arguments qui répondent aux objections qui ont été formulées par les auteurs de la motion.
S'agissant du service public, de la sécurité et de l'approvisionnement, notre position est très claire.
Certes, M. le rapporteur l'a rappelé et je l'ai moi-même affirmé avec force, le gaz et l'électricité ne sont pas des marchandises comme les autres. Le Gouvernement en a d'ailleurs tiré les conséquences, puisqu'il prévoit une obligation de continuité avec la garantie du maintien d'une fourniture de gaz aux personnes en situation de précarité.
En fait, il s'agit essentiellement de transposer la directive européenne dans la législation française. J'ajouterai toutefois une précision de caractère technique qui n'a pas encore été évoquée dans le débat. Elle n'est pas essentielle, je vous le concède, mais il est tout de même intéressant de savoir que si la France est condamnée sous astreinte financière, comme cela risque malheureusement de se produire à la fin de l'année, elle devra régler 750 000 euros par jour, avec un éventuel effet rétroactif au 10 août 2002.
Je n'ai pas le sentiment que nous puissions prendre cette responsabilité, sans compter, bien sûr, l'image désastreuse que la France donnerait à ses partenaires européens.
Pour ces raisons, monsieur le président, le Gouvernement n'est pas favorable à l'adoption de la motion tendant à opposer la question préalable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Nous sommes sensibles à certains arguments, en particulier sur la notion de service public, et nous avons dit tout à l'heure que nous aurions souhaité que la directive européenne soit transposée a minima. En revanche, nous sommes conscients que la transposition de la directive est une ardente obligation.
Aussi, nous nous abstiendrons et nous laisserons la majorité assumer le reste de la discussion.
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 124, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 4:

Nombre de votants 313
Nombre de suffrages exprimés 224
Majorité absolue des suffrages 113
Pour l'adoption 23
Contre 201

En conséquence, nous passons à la discussion des articles.

Intitulé du projet de loi (priorité)



M. Ladislas Poniatowski,
rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Monsieur le président, en application des dispositions de l'alinéa 6 de l'article 44 du règlement du Sénat, la commission demande que soient appelés en priorité les amendements n°s 102 de la commission, 146 de M. Coquelle et des membres du groupe communiste républicain et citoyen et 233 de M. Raoul et des membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Favorable.
M. le président. La priorité est ordonnée.
Je suis donc saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 146, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'intitulé du projet de loi :
« Projet de loi relatif au service public du gaz et à la transposition de la directive concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel. »
L'amendement n° 233, présenté par MM. Raoul, Trémel et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'intitulé du projet de loi :
« Projet de loi relatif au service public du gaz et à la transposition de la directive 98/30/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel. »
L'amendement n° 102, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter in fine l'intitulé du projet de loi par les mots : "et au service public de l'énergie". »
La parole est à M. Yves Coquelle, pour présenter l'amendement n° 146.
M. Yves Coquelle. Ce projet de loi a pour objet de transposer en droit français la directive européenne relative aux règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel. Cette directive laisse aux Etats la possibilité d'imposer des obligations de service public ; comme cela a été le cas pour la transposition de la directive Electricité et en vertu du principe dit de subsidiarité, la transposition de la directive Gaz doit être l'occasion de préserver, de moderniser et de développer le service public du gaz.
C'est pourquoi nous proposons cette nouvelle rédaction de l'intitulé du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour défendre l'amendement n° 233.
M. Daniel Raoul. Conformément à la position qui est la nôtre, nous souhaitons que l'on s'en tienne à la transposition de la directive : toute la directive, mais rien que la directive !
Il serait donc souhaitable d'adopter, pour l'intitulé du projet de loi, une rédaction correspondant exactement à celle qui avait été retenue pour la loi « électricité ».
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 102 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 146 et 233.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'amendement de la commission est plus simple que ceux qui viennent d'être exposés. Il ne donnera que partiellement satisfaction, j'en suis conscient, à leurs auteurs.
Madame la ministre, j'ai bien entendu la réponse que vous avez faite aux différents orateurs au terme de la discussion générale. Nous tenons absolument à réaffirmer la valeur essentielle du service public dans le domaine énergétique, et le faire dans l'intitulé du projet de loi me semble être un geste fort.
J'ajouterai que je n'ai pas fait preuve d'originalité en formulant cette proposition devant la commission, puisque j'ai repris les termes de la loi « électricité », qui a été adoptée en 2000.
Par voie de conséquence, la commission est défavorable aux amendements n°s 146 et 233.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, je suis favorable à tout ce qui peut renforcer la notion de service public dans le projet de loi, y compris dans l'intitulé de celui-ci.
Néanmoins, je ne puis être favorable aux amendements n°s 146 et 233. En effet, ils sont trop restrictifs, dans la mesure où cette loi comprendra vraisemblablement des dispositions concernant l'électricité.
En revanche, je suis favorable à l'amendement n° 102.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement n° 146.
Mme Marie-France Beaufils. Je souhaite insister de nouveau sur le fait que, si nous proposons de retenir cet intitulé pour le projet de loi, c'est afin qu'il corresponde au contenu de la directive. Nous ne souhaitons pas que l'on aille au-delà.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 146.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 233.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 102.
M. Daniel Raoul. Puisque nous n'avons pas obtenu entière satisfaction, nous nous abstiendrons sur cet amendement. M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 102.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé du projet de loi est ainsi complété.

Article additionnel avant le titre Ier (avant l'article 1er)



M. le président.
L'amendement n° 147, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé:
La présente loi transpose en droit français la directive européenne 98/30/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 concernant les règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel.
Par son article 3 notamment et, de façon plus générale, par les traités européens, chaque Etat membre peut imposer aux entreprises de gaz naturel dans l'intérêt économique général, des obligations de service public.
« Le service public du gaz a pour objet de garantir l'alimentation en gaz du territoire national, dans le respect de l'intérêt général.
Dans le cadre de la politique énergétique, il contribue à l'indépendance et à la sécurité d'approvisionnement, à la qualité de l'air et à la lutte contre la pollution atmosphérique, à la gestion optimale et au développement des ressources nationales, à la maîtrise de la demande d'énergie, à la compétitivité de l'activité économique et à la maîtrise des choix technologiques d'avenir, à l'utilisation rationnelle de l'énergie.
Il concourt à la cohésion sociale, en assurant le droit au gaz pour tous dans la zone desservie, à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire, dans le respect de l'environnement, à la recherche et au progrès technologique, ainsi qu'à la défense et à la sécurité publique.
Le service public du gaz, produit de première nécessité, est géré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité, et dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix et d'efficacité socio-économique et énergétique.
Le service du gaz est organisé, chacun pour ce qui le concerne, par l'Etat et les communes ou leurs établissements publics de coopération.
Gaz de France, entreprise publique, est l'instrument essentiel de la mise en oeuvre du service public. »
La parole est à M. Yves Coquelle. M. Yves Coquelle. Dans notre pays, l'alimentation en gaz combustible est assurée depuis plus de cinquante ans sur le fondement de la loi de nationalisation de 1946.
Celle-ci s'est révélée largement bénéfique, puisqu'elle a permis à notre pays, quasiment dépourvu de gisements gaziers, de développer une industrie gazière de réputation internationale et d'assurer l'alimentation en gaz naturel de plus de dix millions de familles.
Il faut donc tout faire pour préserver, moderniser et développer le service public du gaz. L'amendement n° 147 vise ainsi à définir, en préambule, les principes objectifs régissant le service public que nous voulons pour notre pays et qui est notamment tributaire des choix effectués en matière de politique énergétique nationale, d'où notre référence à celle-ci.
Il est également nécessaire de rappeler que Gaz de France est l'instrument essentiel du service public du gaz.
Tel est l'objet de l'amendement n° 147, que nous proposons au Sénat d'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
2182iM. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'amendement de la commission que nous avons précédemment adopté visait à faire référence, dans l'intitulé même du projet de loi, au service public. Est-il nécessaire d'aller maintenant plus loin en insérant un article additionnel en préambule au texte ? La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 147.
Cela ne signifie pas que nous ne souscrivons pas à certaines des dispositions que comporte ce dernier, en particulier à celle qui vise à préciser que le service public du gaz est organisé par l'Etat et les collectivités locales, en fonction de leurs rôles respectifs. C'est une précision que nous proposerons d'ailleurs au Sénat d'apporter, par le biais d'un amendement n° 65 tendant à insérer un article additionnel avant l'article 11.
Certes, je ne prétends pas que celui-ci vous satisfera totalement...
Mme Hélène Luc. Non, mais vous, vous pouvez voter l'amendement n° 147 !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. ... mais il répondra à vos souhaits au moins sur ce point.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Je ne suis pas favorable à cet amendement.
Sur le fond, je le répète, nous sommes disposés à examiner sous un jour favorable toutes les propositions pouvant permettre de confirmer les missions de service public. C'est la raison pour laquelle l'article 11 du texte est spécifiquement consacré au service public. Lorsqu'il viendra en discussion, nous pourrons étudier quelles sont les dispositions les plus adéquates en vue du renforcement des missions de service public.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 147.

(L'amendement n'est pas adopté.)

TITRE Ier

L'ACCÈS AUX RÉSEAUX DE GAZ NATUREL

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - Un droit d'accès aux ouvrages de transport et de distribution de gaz naturel et aux installations de gaz naturel liquéfié est garanti aux clients éligibles et à leurs fournisseurs par tout opérateur qui exploite de telles infrastructures pour :
« 1° Assurer la fourniture de gaz naturel aux clients éligibles conformément aux dispositions de l'article 2, ainsi que l'exécution des contrats d'importation et d'exportation de gaz naturel conclus par les fournisseurs autorisés au titre de la présente loi ;
« 2° Assurer l'exécution des contrats de transit de gaz naturel entre les grands réseaux de transport de gaz à haute pression au sein de l'Espace économique européen.
« A cet effet, des contrats sont conclus entre l'opérateur et les utilisateurs desdits ouvrages ou installations.
« Lorsque l'opérateur et l'utilisateur ne sont pas des personnes morales distinctes, des protocoles règlent leurs relations.
« L'opérateur s'abstient de toute discrimination entre les utilisateurs ou les catégories d'utilisateurs. »
L'amendement n° 1, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa de cet article, après le mot : "liquéfié", insérer les mots : "détenu ou exploité par un opérateur, y compris les installations fournissant des services auxiliaires". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement tend à apporter une précision relative au droit d'accès aux ouvrages de transport et de distribution de gaz naturel et aux installations de gaz liquefié, qui est visé par l'article 1er.
Je rappelle que l'alinéa 12 de l'article 2 de la directive n° 98-30 donne la définition suivante du concept de réseau : « tout réseau de transport et/ou de distribution et/ou toute installation de GNL détenu et/ou exploité par une entreprise de gaz naturel, etc. ».
La commission propose d'ajouter, au premier alinéa de l'article 1er, les mots : « , y compris les installations fournissant des services auxiliaires ».
Je rappelle également que, dans une déclaration interprétative, la Commission et le Conseil ont précisé la définition de ces services auxiliaires. Je le souligne, afin de rassurer ceux qui craignaient, notamment au sein de la commission, que le présent amendement puisse viser les stockages : « Le Conseil et la Commission considèrent que la notion de services auxiliaires visée à l'article 2-13 couvre également tous les services nécessaires à l'exploitation des réseaux de transport et/ou de distribution et/ou d'installation de GNL ». Cela ne va pas au-delà.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Je suis favorable à l'introduction dans le texte de la notion de « services auxiliaires », qui me semble compléter opportunément le concept de « réseau ». Elle est d'ailleurs en conformité avec l'article 2-12 de la directive.
M. le président. La parole est à M. Yves Coquelle, contre l'amendement.
M. Yves Coquelle. Nous sommes contre cet amendement, parce qu'il vise à introduire un droit d'accès aux services auxiliaires de Gaz de France, alors que la directive ne l'impose pas.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Je souhaiterais que Mme la ministre nous confirme les propos que vient de tenir M. le rapporteur, selon lesquels les services auxiliaires ne comprennent pas les stockages.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Je confirme entièrement les propos de M. le rapporteur, monsieur le sénateur.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« I. - Dans le premier alinéa de cet article, après le mot : "fournisseurs", insérer les mots : "et, le cas échéant, leurs mandataires,".
« II. - Par coordination, dans le premier alinéa de cet article, après le mot : "éligibles", supprimer le mot : "et,". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement vise à tenir compte d'une réalité du marché du gaz, où certains clients éligibles ont recours à un mandataire.
C'est la raison pour laquelle je propose une légère modification du texte, tendant à permettre aux mandataires des clients éligibles de fournir à ceux-ci du gaz naturel, au même titre que tous les autres fournisseurs.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Je suis favorable à cet amendement, à une légère réserve grammaticale près : je pense qu'il serait souhaitable d'introduire la préposition « à » au I, avant les mots : « leurs mandataires ».
M. le président. Monsieur le rapporteur, que pensez-vous de la suggestion de Mme la ministre déléguée ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. J'y suis tout à fait favorable, et je rectifie donc l'amendement n° 2 en ce sens.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, et ainsi libellé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 1er, après le mot : "fournisseurs", insérer les mots : "et, le cas échéant, à leurs mandataires,".
« II. - Par coordination, dans le premier alinéa de cet article, après le mot : "éligibles", supprimer le mot : "et". »
La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. J'aimerais savoir ce que recouvre exactement le terme « mandataires », qui ne figure pas dans le projet de loi.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Le mandataire agit pour le compte d'autrui, et, en l'occurrence, pour l'éligible.
Mme Marie-France Beaufils. C'est donc le négoce !
M. Daniel Raoul. Dois-je comprendre de la réponse de M. le rapporteur qu'il s'agit du négoce ou des traders ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Non !
M. Daniel Raoul. Mais cela ne les exclut pas !
Mme Marie-France Beaufils. Cela les inclut !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Ce n'est pas l'objet !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 3, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Après le quatrième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'exercice du droit d'accès mentionné au premier alinéa ne peut faire obstacle à l'utilisation desdits ouvrages ou installations par l'opérateur qui les exploite afin d'accomplir les obligations de service public qui lui incombent. »
L'amendement n° 212, présenté par MM. Raoul, Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Après le quatrième alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'exercice du droit d'accès mentionné au premier alinéa ne peut faire obstacle à l'utilisation desdits ouvrages ou installations par l'opérateur qui les exploite afin d'accomplir les missions de service public qui lui incombent. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'article 1er du projet de loi institue un droit d'accès aux ouvrages de transport et de distribution de gaz naturel et aux installations de gaz naturel liquéfié.
Cet amendement tend à prévoir que l'exercice de ce droit d'accès ne peut faire obstacle à l'accomplissement des missions de service public. Il tend donc à concilier droit d'accès et service public. Cela renforce la notion d'obligation de service public.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour défendre l'amendement n° 212.
M. Pierre-Yvon Trémel. Cet amendement visait à bien marquer que la priorité doit être donnée au bon accomplissement des missions de service public. Mais cette préoccupation étant satisfaite par l'amendement n° 3 de la commission, je retire l'amendement n° 212.
M. le président. L'amendement n° 212 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 3 ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Dire que le droit d'accès au réseau et aux installations de gaz prévu dans cet article 1er ne primera pas sur le respect pas l'ensemble des entreprises gazières de leurs obligations de service public est tout à fait positif. Je tiens d'ailleurs à réaffirmer, si besoin était, l'engagement du Gouvernement sur ce point.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 148, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le début du dernier alinéa de cet article :
« Sous réserve du respect des obligations de service public mentionnées dans les articles suivants de la présente loi, notamment à l'article 11, l'opérateur... »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Affirmer la volonté d'une concurrence loyale, sans discrimination, va dans le sens de la volonté libérale de la directive européenne. Mais il n'est pas utile d'en oublier pour autant l'existence du service public !
Il est indispensable de rappeler, dès cet article, que les obligations de service public peuvent primer sur les conditions de la mise en concurrence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement. Je pense d'ailleurs, monsieur Le Cam, que vous avez eu satisfaction avec l'adoption de l'amendement n° 3.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 148.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - Sont reconnus comme clients éligibles :
« 1° Les producteurs d'électricité à partir de gaz naturel quel que soit le niveau de leur consommation annuelle ;
« 2° Les consommateurs finals dont la consommation annuelle de gaz naturel pour un site est supérieure à un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat. Ce même décret détermine les modalités d'application de ce seuil en fonction des variations de consommation annuelles de gaz naturel et la procédure de reconnaissance de l'éligibilité.
« Le seuil mentionné ci-dessus est défini de manière à permettre une ouverture du marché national du gaz naturel au moins égale à 20 % de la consommation annuelle totale ; il ne peut être supérieur à 25 millions de mètres cubes. Ce seuil est abaissé au plus tard le 10 août 2003, puis au plus tard le 10 août 2008, de manière à permettre une ouverture du marché national du gaz naturel au moins égale respectivement à 28 %, puis à 33 %. Il ne peut être supérieur à 15 millions de mètres cubes à partir du 10 août 2003 et à 5 millions de mètres cubes à partir du 10 août 2008 ;
« 3° Les distributeurs mentionnés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz et ceux mentionnés au sixième alinéa du I de l'article 50 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, au titre de l'approvisionnement effectif de l'ensemble des clients situés dans leur zone de desserte, lorsque leur volume d'achat de gaz naturel est supérieur au seuil mentionné au 2° ci-dessus.
« Un client éligible peut faire assurer sa fourniture en gaz naturel par un fournisseur de son choix, qu'ils constituent ou non, l'un et l'autre, des personnes juridiques distinctes. Lorsqu'un client éligible exerce les droits accordés au présent article, les contrats en cours, conclus avant l'entrée en vigueur de la présente loi, sont résiliés de plein droit sans qu'il y ait lieu à indemnité à la charge de l'une ou l'autre partie. »
Je suis saisi de vingt-deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune ; mais, pour la clarté du débat, je les appellerai séparément.
L'amendement n° 213, présenté par MM. Raoul, Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« Sont reconnus comme clients éligibles :
« 1° Les producteurs d'électricité à partir de gaz naturel, dans la limite de leur consommation de gaz naturel utilisée pour la production d'électricité sur un site donné, à l'exception des installations de cogénération bénéficiant d'un contrat pour l'achat de l'énergie électrique qui relève de l'obligation d'achat prévue à l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, ou qui relève des dispositions de l'article 50 de cette même loi ;
« 2° Les consommateurs finals dont la consommation annuelle de gaz naturel pour un site est supérieure à un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat. Ce décret détermine les modalités d'application de ce seuil en fonction des variations de consommation annuelles de gaz naturel et la procédure de reconnaissance de l'éligibilité.
« Conformément aux dispositions de l'article 18 de la directive 98/30/CE du Parlement européen et du Conseil concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel, le seuil mentionné à l'alinéa précédent est défini de manière à permettre une ouverture du marché national du gaz naturel égale à 20 % de la consommation annuelle totale ; il est au moins égal à 25 millions de mètres cubes par site. Il est abaissé à compter du 10 août 2003, puis du 10 août 2008 pour permettre une ouverture du marché national du gaz égale respectivement à 28 %, puis à 33 %. Il est au moins égal à 15 millions de mètres cubes par site à compter du 10 août 2003 et au moins à 5 millions de mètres cubes par site à compter du 10 août 2008 ;
« 3° Les distributeurs, au titre de l'approvisionnement effectif leurs clients éligibles situés dans leur zone de desserte.
« Le ministre chargé de l'énergie établit et rend publique la liste des clients éligibles.
« Lorsqu'un client éligible exerce les droits accordés au présent article, son contrat de fourniture conclu avant l'entrée en vigueur de la présente loi est résilié de plein droit sans qu'il y ait lieu à indemnité à la charge de l'une ou l'autre partie. Cette résiliation devient effective dans un délai de trois jours à compter de la date à laquelle le client notifie à l'entreprise gazière sa décision de résiliation. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux contrats de fourniture conclus par des clients éligibles depuis le 10 août 2000, dès lors que les conditions de ces contrats ont été librement négociées entre les parties. »
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. La définition des clients éligibles, c'est-à-dire ceux qui pourront choisir librement leurs fournisseurs, est, avec les conditions de tarification de l'accès des tiers aux réseaux de transport et de distribution de gaz, une question qui doit être traitée avec une grande attention tant elle conditionne la qualité de l'ouverture du marché, mais aussi du service public.
Pour notre part, nous avons toujours soutenu que l'ouverture du marché doit être progressive et maîtrisée, rejoignant ainsi les propos de Mme la ministre.
La directive adoptée en 1998 le permet. Elle laisse aux Etats membres une grande latitude pour transposer ce texte. C'est ce qu'on appelle la subsidiarité. Malheureusement, ce n'est pas le choix du Gouvernement puisque vous-même, madame la ministre, avez indiqué que ce dernier souhaitait anticiper les textes européens à venir. Telle n'est pas notre position. C'est pourquoi nous proposons un amendement de réécriture de cet article.
En ce qui concerne les producteurs d'électricité, M. le rapporteur a bien montré les effets d'aubaine que la rédaction proposée par le Gouvernement peut provoquer : des opérateurs pourraient profiter de leur éligibilité totale pour acheter du gaz en gros, au motif qu'ils produisent de l'électricité, et en revendre une partie pour dégager une marge.
Nous proposons donc de limiter l'éligibilité des producteurs d'électricité à leur seule consommation de gaz naturel destinée à la production d'électricité, cette éligibilité s'entendant par site, comme le stipule la directive. Sur ce point, nous rejoignons M. le rapporteur.
Nous proposons ensuite d'exclure la cogénération de l'éligibilité dès lors qu'elle bénéficie de l'obligation d'achat par EDF et les distributeurs non nationalisés. En effet, si la cogénération mérite d'être encouragée pour ses performances énergétiques et ses avantages environnementaux par rapport au fioul ou au charbon, il n'apparaît pas souhaitable de susciter un encouragement ou un bonus supplémentaire à un marché qui n'a pas encore fait la preuve de sa viabilité économique, d'autant que le financement des surcoûts engendrés par l'obligation d'achat est, pour l'heure, imparfaitement assuré. Le Gouvernement est soucieux de mettre en place une concurrence loyale. Il se doit d'aller jusqu'au bout de ce raisonnement.
S'agissant des consommateurs finals, le texte du Gouvernement ne nous convient absolument pas - nous l'avons dit à plusieurs reprises -, car il permet d'accélérer l'ouverture du marché, voire d'aller jusqu'à l'ouverture complète de ce dernier, simplement par le biais d'un décret, sans que le Parlement ait à se prononcer. Nous n'acceptons pas cela, d'autant plus que, s'agissant des clients domestiques, la position du Gouvernement n'est ni claire ni ferme puisqu'il n'est pour l'heure opposé qu'à une ouverture précipitée de ce marché.
Or chacun sait que l'ouverture totale à la concurrence n'induit pas systématiquement une baisse des prix pour les consommateurs domestiques. On a pu le constater dans des pays ayant transposé cette directive communautaire, et mon collègue Pierre-Yvon Trémel l'a aussi démontré tout à l'heure.
Chacun sait que cette option est déconnectée de la réalité : les clients domestiques n'ont qu'une capacité théorique à négocier les prix avec les opérateurs. Chacun sait enfin que l'ouverture totale à la concurrence risque de mettre fin à un instrument de cohésion sociale et territoriale important, à savoir la péréquation tarifaire.
Pour les consommateurs finals, enfin, nous proposons d'en rester strictement aux obligations de la directive. Une référence explicite à la directive 98-30 est introduite à cet effet.
Nous proposons ensuite, pour les distributeurs, de s'en tenir à l'éligibilité dite « partielle » exigée par la directive, à savoir l'éligibilité en vue d'approvisionner leurs clients éligibles.
Une éligibilité totale des distributeurs ne présente aucun avantage au regard des missions de service public qui leur sont confiées. A court terme, les distributeurs ne pourraient pas faire bénéficier les clients domestiques des éventuelles baisses de prix qu'ils auraient pu obtenir auprès de nouveaux fournisseurs, les tarifs de vente à ces clients faisant l'objet d'une péréquation et étant réglementés. A plus long terme, on peut craindre une remise en cause de la distribution publique de gaz et de la péréquation qui lui est associée.
Nous proposons par ailleurs de réintroduire une disposition du projet de loi du 17 mai 2000 qui n'a pas été reprise par le Gouvernement et qui prévoit que, dans un souci de transparence, le ministre chargé de l'énergie publie la liste des clients éligibles.
Enfin, nous souhaitons encadrer la procédure de résiliation des contrats en cours. Les clients qui ont pu librement négocier, dans le cadre de leur éligibilité, les conditions de leur contrat de fourniture depuis le 10 août 2000, date à laquelle la directive est entrée en vigueur, ne pourront demander de nouveau une résiliation anticipée de leur contrat.
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa (1°) de cet article, après les mots : "gaz naturel", insérer les mots : "dans la limite de leur consommation de gaz utilisé pour la production d'électricité sur un site donné". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il ne paraît pas souhaitable que les producteurs d'électricité à partir de gaz naturel puissent revendiquer l'éligibilité quel que soit le niveau de leur consommation annuelle. On risque, en effet, de voir se multiplier les petites cogénérations créées uniquement pour contourner les dispositions de la loi : les producteurs d'électricité à partir de gaz naturel, éligibles de plein droit, sans seuil minimal, pourraient acheter du gaz au meilleur prix au-delà même des seuls besoins de gaz de l'installation de production d'électricité, et revendre le surplus, si ce n'est la totalité, pour réaliser une marge. Voilà pourquoi l'amendement n° 4 tend à limiter l'éligibilité des producteurs d'électricité à partir de gaz naturel à la consommation de gaz utilisé pour la production d'électricité sur un site donné.
M. le président. L'amendement n° 173, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Compléter le deuxième alinéa (1°) de cet article par les mots : "destinée à cette activité". »
La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Cet amendement va dans le sens des propos tenus par M. le rapporteur. En effet, les entreprises qui produisent de l'électricité à partir du gaz sont aussi consommatrices de gaz pour d'autres de leurs activités. La directive leur accorde l'éligibilité pour la production d'électricité, mais elle ne la leur donne pas sans conditions pour la totalité de leur consommation de gaz.
Par conséquent, en leur conférant un avantage concurrentiel par rapport aux autres entreprises consommatrices de gaz dont l'éligibilité est soumise à un seuil minimal, en prenant en compte la consommation de gaz utilisé pour la production d'électricité, nous restreignons le champ d'éligibilité et nous évitons ainsi, dans le respect des principes mêmes de la directive, toute distorsion de concurrence entre les entreprises consommatrices.
M. le président. L'amendement n° 174, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Après le deuxième alinéa (1°) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Cependant, les cogénérateurs qui bénéficient d'une obligation d'achat de leur production d'électricité en vertu du troisième alinéa de l'article 10 de la loi du 10 février 2000 ou par un contrat pré-existant qui entre dans le champ d'application de l'article 50 de cette même loi ne sont éligibles que si leur consommation annuelle de gaz naturel est supérieure au seuil mentionné au troisième alinéa (2°) de l'article 2 de la présente loi. »
La parole est à M. Yves Coquelle.
M. Yves Coquelle. Cet amendement constitue, dans une certaine mesure, un complément à notre amendement n° 173.
Il s'agit, en effet, de restreindre le champ d'éligibilité des entreprises de cogénération qui bénéficient de l'obligation d'achat de leur électricité.
Le fait qu'elles aient des débouchés assurés pour leur production constitue déjà un avantage concurrentiel considérable, d'autant que les tarifs d'achat sont exorbitants.
Il est donc nécessaire qu'elles ne puissent accéder au rang de clients éligibles que si leur consommation annuelle de gaz est supérieure au seuil minimal fixé par la présente loi.
M. le président. L'amendement n° 150, présenté par M. Revol, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du troisième alinéa (2°) de cet article, après les mots : "consommateurs finals", insérer les mots : "non domestiques". »
La parole est à M. Henri Revol.
M. Henri Revol. Le 2° de l'article 2, s'il était adopté en l'état, permettrait une ouverture du marché à la concurrence plus rapide que ne le prévoit la directive de 1998.
Le Gouvernement pourrait, en effet, abaisser par décret le seuil d'éligibilité et anticiper ainsi l'application de la seconde directive, actuellement en négociation.
L'hypothèse d'une ouverture totale du marché du gaz, et donc de l'égibilité de l'ensemble des consommateurs - jusqu'aux ménages -, me semble relever toutefois d'une décision politique d'importance, qui devrait être débattue au sein des assemblées parlementaires le moment venu. Ce n'est pas au détour d'un décret qu'une telle décision doit être prise.
Le présent amendement vise donc à éviter qu'un simple décret en Conseil d'Etat ne permette la libéralisation totale du marché gazier, en excluant les consommateurs domestiques.
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début de la deuxième phrase du troisième alinéa (2°) de cet article : "Ce décret...".
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début du quatrième alinéa de cet article :
« Le seuil mentionné au précédent alinéa permet une ouverture... »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit également d'un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 176 rectifié, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans la première et la deuxième phrase du quatrième alinéa de cet article, supprimer les mots : "au moins". »
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Nous tenons à ce que les échéances et les taux d'ouverture à la concurrence de notre marché intérieur du gaz soient strictement limités aux minima fixés par la directive.
Ce n'est qu'en 2003 que le taux d'ouverture devra atteindre 28 % de notre consommation annuelle totale de gaz et ce n'est qu'en 2008 qu'il devra atteindre 33 % de notre consommation annuelle.
Nous savons que la Commission européenne a décidé, au sommet de Barcelone, d'accélérer le processus de déréglementation. Mais nous n'avons pas à anticiper sur les directives futures.
Nous tenons, madame la ministre, par cet amendement, à attirer votre attention sur deux points.
Premièrement, contrairement aux décisions peu démocratiques prises à Barcelone, le texte de la directive, largement amendé par le Parlement européen, reconnaît explicitement, dans son septième considérant, la nécessité de la progressivité de l'ouverture à la concurrence, au risque, s'il n'en allait pas ainsi, compromettre l'avenir même de notre industrie gazière et des services publics.
Deuxièmement, le respect de la progressivité de l'ouverture doit permettre une juste et loyale protection de notre secteur gazier national. Une ouverture plus rapide mettrait en difficulté notre pays, qui est le plus dépendant des pays de l'Union européenne en matière d'approvisionnement.
Plus de 95 % du gaz consommé est importé et l'ampleur de cette dépendance impose une anticipation des contrats d'approvisionnement et des durées de contrats très longues. Pour cela, il ne faut pas déstabiliser Gaz de France par une explosion de marchés à court terme.
M. le président. L'amendement n° 7 rectifié, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Après les mots : "annuelle totale ;", rédiger comme suit la fin de la première phrase du quatrième alinéa de cet article : "il ne peut excéder 25 millions de mètres cubes par site.". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit de préciser que le seuil ne peut excéder 25 millions de mètres cubes par site. Cette mention figure d'ailleurs au troisième alinéa de l'article 2 de la directive.
M. le président. L'amendement n° 175, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Compléter la première phrase du quatrième alinéa de cet article par les mots : "par site de consommation...". »
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, je vais défendre simultanément les amendements n°s 175 et 177.
Il s'agit, une fois de plus, de respecter les dispositions de la directive, qui retient comme critère d'évaluation du seuil d'éligibilité le volume de gaz consommé par site.
Cette précision est importante pour éviter que l'opérateur historique ne perde des clients devenus éligibles en raison du simple groupement des volumes de leur consommation de gaz sur plusieurs sites de consommation. Chaque site alimenté entraîne pour l'opérateur des dépenses spécifiques de réseau et d'exploitation et le coût d'une alimentation multisite est très différent de celui d'un site unique. La consommation par site est donc le seul critère acceptable.
Autrement dit, nous tenons, conformément d'ailleurs à l'esprit de la directive et, plus généralement, à celui des traités, à préserver le service public du gaz assuré par Gaz de France. La délimitation du champ de l'éligibilité constitue une garantie contre la rupture de contrats d'approvisionnement de long terme que GDF a négociés, comme elle constitue une garantie de préservation des contrats négociés ou qui pourraient être négociés à l'avenir.
C'est donc pour la défense de notre service public du gaz que nous vous demandons, mes chers collègues, d'adopter nos deux amendements.
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Au début de la deuxième phrase du quatrième alinéa de cet article, remplacer le mot : "Ce seuil" par le mot : "Il". »
L'amendement n° 9, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans la deuxième phrase du quatrième alinéa de cet article, remplacer les mots : "de manière à" par le mot : "pour". »
L'amendement n° 10, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la dernière phrase du quatrième alinéa de cet article :
« Il ne peut excéder 15 millions de mètres cubes par site à compter du 10 août 2003 et 5 millions de mètres cubes par site à compter du 10 août 2008. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces trois amendements.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Les amendements n°s 8 et 9 sont purement rédactionnels. Quant à l'amendement n° 10, il découle de l'amendement n° 7, puisqu'il s'agit également de préciser que le seuil de 15 millions de mètres cubes est un seuil par site.
M. le président. L'amendement n° 177, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans la dernière phrase du quatrième alinéa de cet article, après les mots : "il ne peut être supérieur", insérer les mots : "par site de consommation". »
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 151, présenté par M. Revol, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le cinquième alinéa (3°) de de cet article :
« 3° Lorsque leur volume d'achat de gaz naturel est supérieur au seuil mentionné au 2° ci-dessus, les distributeurs mentionnés à l'article 23 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz et ceux mentionnés aux sixième alinéa du I de l'article 50 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, au titre de l'approvisionnement effectif de l'ensemble des clients situés dans leur zone de desserte, ainsi que les distributeurs visés à l'article 3 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946, sur la nationalisation de l'électricité et du gaz au titre de l'approvisionnement effectif de leurs clients éligibles. »
La parole est à M. Henri Revol.
M. Henri Revol. La commission des affaires économiques a présenté un amendement reconnaissant la qualité de client éligible à Gaz de France au titre de l'approvisionnement de l'ensemble des clients, aussi bien éligibles que non éligibles, situés dans la zone de desserte.
Il est à craindre, cependant, que cette disposition, qui va au-delà des exigences posées par l'article 18-8 de la directive, ne renforce la position dominante de Gaz de France. L'entreprise publique détient déjà des parts de marché largement supérieures à 50 %, aussi bien sur le marché des éligibles que sur celui des non éligibles.
Tant que l'ouverture du marché gazier n'est pas totale, on imagine mal que Gaz de France bénéficie ainsi de dérogations aux règles de concurrence - notamment aux articles 82 et 86 du traité sur l'Union européenne - alors que ces dérogations ne semblent pas pouvoir être justifiées par les missions d'intérêt économique général dont cette entreprise à la charge.
Dès lors, l'amendement a pour objet de limiter l'éligibilité de Gaz de France exclusivement à ce qui concerne la fourniture de gaz naturel à ses clients éligibles.
M. le président. L'amendement n° 11, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début de la première phrase du cinquième alinéa (3°) de cet article :
« 3° Les distributeurs visés à l'article 3 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, les distributeurs... ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Le projet de loi prévoit de rendre éligibles deux catégories de distributeurs de gaz : les distributeurs non nationalisés qui relèvent de l'article 23 de la loi de nationalisation de 1946 et les distributeurs exerçant leur activité en dehors du plan de desserte prévu par l'article 50 de la loi du 2 juillet 1998.
Cette disposition, telle qu'elle est rédigée, ne s'applique pas à Gaz de France lorsque celui-ci se trouve en position de distributeur et qu'il doit acheter son gaz, ce qui arrive dans la partie sud-ouest de la France, où GSO, Gaz du Sud-Ouest possède le réseau de transport et fournit le gaz. Il en résulte une discrimination qui est contraire au principe d'égalité.
Je suis tout à fait conscient qu'en voulant être équitables entre les distributeurs non nationalisés et Gaz de France distributeur nous risquons de renforcer la position bizarrement dominante de Gaz de France dans ce secteur.
On peut se demander a contrario s'il est souhaitable de renforcer la position dominante, dans une zone donnée, du transporteur qui achemine du gaz pour GDF distribution. Je crois qu'il faut laisser les opérateurs concernés saisir éventuellement les autorités de la concurrence pour trancher en cas d'opposition.
Quoi qu'il en soit, le présent amendement étend l'éligibilité à tous les distributeurs de gaz, quels qu'ils soient.
M. le président. L'amendement n° 178, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après les mots : "et du gaz", remplacer la fin du cinquième alinéa (3°) de cet article par les dispositions suivantes : "en vue de l'approvisionnement effectif des clients éligibles situés dans leur zone de desserte dans la mesure où ces clients veulent recourir à leur distributeur pour leur fourniture et si le volume d'achat du gaz est supérieur au seuil mentionné au 2° ci-dessus".
« Il en est de même pour les distributeurs mentionnés au sixième alinéa du I de l'article 50 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, existant à la date de promulgation de la présente loi. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. La directive européenne n'impose pas d'attribuer l'éligibilité aux distributeurs sans condition. Le cinquième alinéa de l'article 2 va donc au-delà des prescriptions de la directive. Il est évident qu'il consacre une discrimination contre le distributeur historique, Gaz de France.
Les distributeurs non nationalisés ainsi que les régies reconnues comme distributeurs au titre de l'article 50 de la loi du 2 juillet 1998 disposeraient donc d'un avantage concurrentiel non négligeable, d'une véritable « rente de situation » en pouvant, sans aucune condition, alterner des approvisionnements auprès de Gaz de France et des approvisionnements sur le marché de court terme.
En somme, Gaz de France serait le bouche-trou inconditionnel des distributeurs non nationalisés. Nous proposons donc d'en rester à la stricte application de la directive, qui limite l'éligibilité des distributeurs à la fourniture du gaz pour leurs seuls clients éligibles qui leur confient leur alimentation.
M. le président. L'amendement n° 12 rectifié, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début de la première phrase du dernier alinéa de cet article :
« Un client éligible peut, le cas échéant par l'intermédiaire de son mandataire, se fournir en gaz naturel auprès d'un fournisseur... »
L'amendement n° 14, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Remplacer la dernière phrase du dernier alinéa de cet article par deux phrases ainsi rédigées :
« Lorsqu'un client éligible exerce cette faculté, son contrat de fourniture conclu avant l'entrée en vigueur de la présente loi est résilié de plein droit, sans qu'il y ait lieu à indemnité à la charge de l'une ou l'autre partie. Cette résiliation deviendra effective dans un délai de trois jours à compter de la date à laquelle le client notifie à l'entreprise gazière sa décision de résiliation. »
Le sous-amendement n° 152, présenté par M. Revol, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du texte proposé par l'amendement n° 14 pour la dernière phrase du dernier alinéa de cet article, remplacer les mots : "trois jours" par les mots : "trois mois". »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 12 rectifié et 14.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'amendement n° 12 rectifié est un simple amendement de coordination avec l'amendement n° 2, que nous avons adopté tout à l'heure.
Quant à l'amendement n° 14, il a un double objet. Outre une modification de nature rédactionnelle à la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 2, il vise à compléter cet alinéa afin de préciser que la résiliation d'un contrat ne deviendra effective que dans un délai de trois jours à compter de la date à laquelle le client notifie à l'entreprise gazière sa décision de résiliation.
Il est en effet souhaitable de tenir compte des contraintes techniques dues à l'acheminement du gaz. Il semblerait que trois jours soient suffisants pour cela.
M. le président. La parole est à M. Henri Revol, pour présenter le sous-amendement n° 152.
M. Henri Revol. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 152 est retiré.
L'amendement n° 247, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« A la fin de la seconde phrase du dernier alinéa de cet article, remplacer les mots : "sans qu'il y ait à indemnité à la charge de l'une ou l'autre partie" par les mots : "moyennant un préavis de trois mois". »
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. La rupture de plusieurs contrats de fourniture peut placer GDF dans une situation économique et financière délicate, source d'une mise à mal du service public du gaz.
Cet amendement vise à protéger GDF en lui accordant notamment un délai d'adaptation de transition de trois mois pour qu'il puisse faire face, dans les meilleures conditions possibles, à la perte éventuelle de certains clients éligibles.
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'un client a conclu un contrat dans des conditions distinctes du tarif en vigueur avant le 10 août 2000, après cette date, il ne peut être fait application des dispositions des deux dernières phrases de l'alinéa précédent. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission a estimé qu'il ne serait pas légitime qu'un contrat conclu conformément à la directive mais après le 10 août 2000, date à partir de laquelle la directive gazière aurait dû être transposée et date à partir de laquelle Gaz de France s'est auto-appliqué les règles de la directive, soit résilié en vertu de la loi alors même que le client a bénéficié des dispositions de libéralisation que prévoit la directive.
Cette disposition répond, bien sûr, à une demande de Gaz de France, qui se trouve confronté à ses clients. Ces contrats durent à peu près un an ; autrement dit sont concernés les clients dont le contrat n'est pas terminé, pour la période restant à courir.
M. le président. L'amendement n° 246, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Compléter in fine cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le ministre chargé de l'énergie établit et rend publique, chaque année, la liste des clients éligibles. »
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade. Par cet amendement, nous voulons faire en sorte que la loi et la réglementation qui en découlent soient respectées par tous.
C'est donc à chaque client qui revendique son éligibilité d'apporter annuellement les preuves qu'il entre dans les critères de réglementation.
Au-delà, c'est à l'Etat de contrôler la bonne application des textes afin d'éviter les tricheries du genre de celles qui ont pu être constatées pour l'électricité et qui sont de nature à introduire des distorsions de concurrence. Elles génèrent par ailleurs des dégâts pour Gaz de France et les autres opérateurs qui sont soumis à l'accès des tiers.
C'est la raison pour laquelle nous proposons que le ministre chargé de l'énergie établisse la liste annuelle des clients éligibles. En outre, le respect de la démocratie, la transparence exigent que chacun puisse vérifier qui est éligible, d'où notre souhait que cette liste soit publiée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements autres que ceux qu'elle a déposés ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Donner l'avis de la commission sur tous ces amendements est un exercice un peu particulier, parce que je vais devoir donner un avis sur des problèmes qui n'ont rien à voir les uns avec les autres.
Mme Marie-France Beaufils. C'est clair !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Nous avons passé en revue tous les amendements déposés sur l'article 2 en traitant d'au moins une dizaine de sujets différents ! Je suis donc obligé de donner un avis sur tous ces sujets, qui n'ont rien à voir les uns avec les autres. J'aurais préféré que l'on examine séparément chacun d'eux.
M. le président. Je regrette, mon cher collègue, mais nous n'avons pas d'autre procédure à notre disposition.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je le sais, monsieur le président, c'est la raison pour laquelle j'ai simplement exprimé un regret.
J'en viens aux avis émis par la commission.
L'amendement n° 213 doit beaucoup à l'article 6 du projet de loi de M. Pierret. Je connais bien ce texte, déposé en 2000 devant l'Assemblée nationale, puisque j'en ai été le « rapporteur officieux » alors que nous l'avons attendu en vain au Sénat.
M. Daniel Raoul. N'en rajoutez pas !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je dis cela sans aucune agressivité, soyez-en persuadé, mon cher collègue !
Certaines dispositions de l'amendement n° 213, le 1° et le dernier alinéa du texte proposé, sont bonnes ; elles sont d'ailleurs analogues à ce que prévoit le projet de loi.
Il reste que cet amendement reflète une autre philosophie : premièrement, il interdit d'abaisser le seuil d'éligibilité plus vite que ne le prévoit la directive ; deuxièmement, il prévoit que le ministre chargé de l'énergie établit et rend public la liste des clients éligibles, ce que nous proposons d'abroger dans la loi « électricité » et que ne prévoit pas le projet de loi « gaz ».
Pour ces deux raisons, je ne peux que confirmer l'avis défavorable de la commission.
Sur les amendements n° 173 et 174, la commission a émis un avis défavorable, considérant qu'il étaient satisfaits par l'amendement n° 4.
La commission est tout à fait favorable à l'amendement n° 150.
L'article 2 prévoit que c'est un décret en Conseil d'Etat qui fixera le seuil d'éligibilité au titre du gaz. La question est de savoir si, pour abaisser ce seuil au-delà de la limite que constitue la consommation des clients domestiques, on prendra un décret ou on votera une loi. Comme vous, monsieur Revol, je considère que, lorsque ce seuil sera atteint, le problème sera suffisamment important pour que le Parlement en débatte.
La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 176 rectifié. L'article 18 fait référence à une consommation égale à 20 % « au moins » ; en supprimant ces mots, monsieur Coquelle, vous interdisez d'aller plus vite.
M. Yves Coquelle. Justement, nous, nous voulons aller lentement !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission est également défavorable à l'amendement n° 175 qui est totalement satisfait par l'amendement n° 7 rectifié.
Sur le principe, je suis tout à fait favorable à l'amendement n° 177. Cela étant, je lui préfère l'amendement n° 10 de la commission. Comme moi, monsieur Coquelle, vous avez le souci d'instaurer un seuil de consommation par site. Je pense donc que l'amendement n° 10 est de nature à vous donner satisfaction.
Sur l'amendement n° 151, la commission a émis un avis défavorable. En effet, son amendement n° 11 permet à Gaz de France d'être éligible au même titre que les DNN, les distributeurs non nationalisés, pour la consommation des zones où il est distributeur.
Par votre amendement, monsieur Revol, vous proposez, certes, d'aller plus loin que le texte du Gouvernement, mais moins loin que ne le prévoit notre amendement n° 11. En fait, vous voulez restreindre l'éligibilité de Gaz de France à la consommation nécessaire pour desservir les clients éligibles dans les zones où le transport de gaz est assuré par GSO.
J'attends, comme vous, que le Gouvernement se prononce sur ce problème de fond. J'ai indiqué que, par l'amendement n° 11, nous voulions mettre, sur le secteur de GSO, Gaz de France à égalité en tant que distributeur avec les DNN. Avec l'amendement n° 151, ce n'est plus Gaz de France qu'on favorise, c'est le transporteur, en l'occurrence TotalFinaElf, qui est le propriétaire majoritaire de tout le réseau dans le sud-ouest de la France.
Il y aurait donc une contradiction, au moment où l'on veut supprimer le monopole, à faire de TotalFinaElf, dans le sud-ouest de la France, à la fois le transporteur et le vendeur de molécules de gaz puisque Gaz de France devra payer à la fois pour utiliser le réseau et pour acheter le gaz qu'il redistribuera en fin de réseau.
Cela étant, j'en suis conscient, monsieur Revol, si votre amendement aboutit à une vraie anomalie en ce qu'il favorise l'entreprise TotalFinaElf, le mien n'est pas satisfaisant non plus parce que, en voulant traiter Gaz de France comme les DNN, je favorise plutôt Gaz de France.
J'entendrai donc avec beaucoup d'intérêt l'avis du Gouvernement sur nos deux amendements.
S'agissant de l'amendement n° 178, la commission a émis un avis défavorable, considérant qu'il est, en quelque sorte, un amendement « anti-DNN ».
Je rappelle que, en 1946, le législateur a choisi de ne pas nationaliser toutes les entreprises de distribution de gaz naturel. Ainsi, par dérogation, l'article 23 de la loi sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, n'a pas nationalisé les régies, les sociétés d'économie mixte dans lesquelles l'Etat ou les collectivités publiques possédaient la majorité, ainsi que les coopératives d'usagers et les sociétés d'intérêt collectif agricoles, concessionnaires du gaz ou d'électricité. Certains de ces distributeurs non nationalisés ont constitué des sociétés d'économie mixte et dégagent un chiffre d'affaires important ; c'est notamment le cas à Bordeaux et à Grenoble. La question, pour nous, est de savoir si ces entités seront ou non éligibles.
Le projet de loi prévoit de leur reconnaître une éligibilité pour la totalité de leur consommation, et non simplement pour leurs clients éligibles.
Il y a là une décision dont les conséquences seront importantes. Le souffle que nous sommes susceptibles d'apporter, les gros DNN n'en avaient pas nécessairement besoin. En revanche, il rendrait vraiment service aux petits DNN.
Or, l'amendement n° 178 tend à ne reconnaître aux DNN une éligibilité qu'au titre de leurs clients éligibles. C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
L'amendement n° 247 soulève le problème du délai. Techniquement, le délai de trois jours suffit. Je ne vois pas bien l'intérêt d'un délai de trois mois. A moins que la raison ne soit autre que technique : peut-être s'agit-il de maintenir, sur une période un peu plus longue, une part de marché, alors que cela ne se justifie pas tout à fait...
Enfin, je suis tout à fait opposé à l'amendement n° 246.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 213, qui modifie substantiellement l'article 2 dans un sens contraire à l'esprit dans lequel a été élaboré le projet de loi. Comme l'a très bien dit M. le rapporteur, il relève d'une tout autre philosophie.
Le Gouvernement est, en revanche, favorable à l'amendement n° 4, qui est conforme au souhait des rédacteurs de la directive de rendre éligibles l'ensemble des producteurs d'électricité pour leur seule activité de production électrique et non pour l'ensemble de leur consommation de gaz sur un sité donné.
L'amendement n° 173 est satisfait par l'amendement n° 4.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 174, dont l'adoption rendrait très difficile la mise en oeuvre du tarif d'obligation d'achat actuellement en vigueur, qui suppose des conditions d'approvisionnement identiques pour tous les opérateurs.
Pour les mêmes raisons que la commission, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 150.
Le Gouvernement n'ayant pas d'amour-propre d'auteur, il est favorable à toute proposition susceptible d'améliorer la rédaction de son texte ; c'est le cas des amendements n°s 5 et 6.
La rédaction proposée dans l'amendement n° 176 rectifié est manifestement contraire à l'article 18 de la directive de 1998. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
L'amendement n° 7 rectifié améliorant la rédaction du texte, j'y suis favorable.
L'amendement n° 175 est satisfait par l'amendement n° 7 rectifié.
Le Gouvernement accepte l'amendement n° 8, qui est un amendement rédactionnel.
Il en va de même pour les amendements n°s 9 et 10.
L'amendement n° 177 est satisfait par l'amendement n° 10.
S'agissant de l'amendement n° 151, sur lequel M. le rapporteur attend avec intérêt la position du Gouvernement, nous y sommes favorables parce qu'il rejoint, sur le fond, la position du Gouvernement. En effet, nous souhaitons donner aux DNN les moyens de se préparer à l'ouverture du marché aux professionnels. A cet égard, il nous semble fondamental qu'ils aient la faculté de choisir leur fournisseur.
M. le rapporteur ne sera pas surpris que, dès lors, je ne puisse être favorable à son amendement n° 11, qui nous donne le sentiment de renforcer la position dominante de GDF, ce qui serait contraire aux objectifs visés par le présent projet de loi.
L'amendement n° 178 réduirait considérablement la portée de l'éligibilité des distributeurs, et nous y sommes donc défavorables.
Nous sommes, en revanche, favorables à l'amendement n° 12 rectifié, qui est cohérent avec les amendements n°s 1 et 2, précédemment adoptés.
S'agissant de l'amendement n° 14, nous ne sommes pas favorables à la première phrase du texte proposé. Une telle disposition reviendrait en effet à limiter fortement la capacité des clients éligibles à changer de fournisseur, ce qui serait contraire à l'esprit du texte. Nous pourrions cependant accepter cette première phrase si elle visait le contrat de fourniture et de transport.
A l'inverse, nous considérons que la deuxième phrase, c'est-à-dire l'introduction d'un délai de trois jours pour la résiliation effective d'un contrat de fourniture antérieur à la loi, permettra au transporteur de prendre les dispositions techniques nécessaires à la continuité de fourniture, ce qui nous paraît opportun.
L'amendement n° 247, présenté par M. Coquelle, vise à revenir sur une disposition prévue par le Gouvernement : pour permettre une ouverture réelle du marché, les clients peuvent dénoncer leurs anciens contrats sans que le contractant puisse bénéficier des indemnités prévues au contrat.
En outre, l'amendement tend à revenir sur un autre point : les offres de prix des contrats de fourniture ont une durée limitée à quelques jours seulement. En allongeant le délai d'une façon inconsidérée, on empêchera un client éligible de faire jouer la concurrence.
Le Gouvernement n'est donc pas favorable à l'amendement n° 247.
En revanche, il est favorable à l'amendement n° 15, car la plupart des clients éligibles au sens de la directive de 1998 ont renégocié leurs contrats depuis le 10 août 2000 dans des conditions distinctes du tarif en vigueur. Ils ont profité de cette éligibilité virtuelle. Dans ces conditions, il n'est pas anormal que ces clients aient à acquitter des indemnités en cas de résiliation de leur contrat.
Enfin, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 246, par souci de simplification administrative.
M. le président. Nous avons achevé la présentation des différents amendements qui affectent l'article 2.
Je mets aux voix l'amendement n° 213.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.).
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 173.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 174.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour explication de vote sur l'amendement n° 150.
M. Pierre-Yvon Trémel. Nous avons, nous aussi, pris beaucoup de plaisir à écouter l'argumentaire de M. Revol sur cet amendement.
M. Daniel Raoul. Je pense bien !
M. Pierre-Yvon Trémel. Cet amendement nous donne l'occasion de rappeler de nouveau notre position : nous sommes favorables à la transposition de la directive de 1998, toute la directive, mais rien que la directive. Et M. Revol a attiré l'attention ici sur un point important.
Nous campons également sur une autre position de principe ferme : toute nouvelle directive adoptée par le Parlement européen ou par le Conseil des ministres européen doit être discutée par le Parlement français.
L'amendement est intéressant, mais il ne répond pas pleinement à notre préoccupation. Nous le voterons cependant.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 150.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 176 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 175 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 177.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Henri Revol, pour explication de vote sur l'amendement n° 151.
M. Henri Revol. Je maintiens cet amendement, car, si l'amendement de la commission était adopté, je crains qu'il ne suscite les foudres de la Commission européenne et ne soulève des problèmes, comme le laissent supposer les analyses juridiques dont j'ai pu avoir connaissance.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 151.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 11.
M. Daniel Raoul. Cet amendement a le mérite de reconnaître à Gaz de France la qualité de client éligible, alors qu'aux termes du texte du Gouvernement, seront éligibles tous les distributeurs sauf Gaz de France.
Cette différence de traitement est injustifiée. Néanmoins, cet amendement demeure toujours inacceptable, puisqu'il ne limite pas l'éligibilité des distributeurs à la seule fourniture de gaz à leurs clients éligibles.
Je rappelle, mes chers collègues, que le Conseil de la concurrence, consulté, en 1999, s'était prononcé contre l'éligibilté totale des distributeurs.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 178.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 12 rectifié.
M. Daniel Raoul. Nous voyons encore apparaître le fameux mot « mandataire », qui peut regrouper le négoce et les traders, c'est pourquoi nous serons contre cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Monsieur le rapporteur, acceptez-vous de rectifier l'amendement n° 14 dans le sens souhaité par Mme la ministre déléguée ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je maintiens la première phrase de cet amendement, mais, afin de rapprocher nos positions, madame la ministre, je propose d'y ajouter les mots : « et de transport ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 14 rectifié, présenté par M. Poniatowski au nom de la commission des affaires économiques, et ainsi libellé :
« Remplacer la dernière phrase du dernier alinéa de cet article par deux phrases ainsi rédigées :
« Lorsqu'un client éligible exerce cette faculté, son contrat de fourniture et de transport conclu avant l'entrée en vigueur de la présente loi est résilié de plein droit, sans qu'il y ait lieu à indemnité à la charge de l'une ou l'autre partie. Cette résiliation deviendra effective dans un délai de trois jours à compter de la date à laquelle le client notifie à l'entreprise gazière sa décision de résiliation. » Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine ministre déléguée. Tout à fait favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement 247 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 15.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 246.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - I. - Sont reconnus comme fournisseurs les personnes installées sur le territoire d'un Etat membre de la Communauté européenne ou, dans le cadre d'accords internationaux, sur le territoire d'un autre Etat, qui sont titulaires d'une autorisation délivrée par le ministre chargé de l'énergie.
« La fourniture de gaz naturel consiste à alimenter les clients éligibles et non éligibles et à assurer la continuité de fourniture aux distributeurs.
« L'autorisation précise les catégories de clients auxquels peut s'adresser le fournisseur.
« Cette autorisation est nominative et incessible. En cas de changement d'opérateur, l'autorisation ne peut être transférée au nouvel opérateur que par décision du ministre chargé de l'énergie. Elle est délivrée ou refusée en fonction :
« - des capacités techniques, économiques et financières du demandeur ;
« - de la compatibilité du projet du demandeur avec les obligations de service public mentionnées à l'article 11 de la présente loi.
« II. - Les fournisseurs exercent leur activité dans les conditions fixées par leur autorisation. Un décret en Conseil d'Etat fixe les obligations qui s'imposent aux titulaires, en tenant compte des diverses catégories d'opérateurs et des caractéristiques de leurs clients, et, en particulier, fixe les conditions de révision de ces obligations. Il peut être imposé aux fournisseurs de communiquer chaque année au ministre chargé de l'énergie leur plan prévisionnel d'approvisionnement en gaz naturel pour l'année suivante.
« Lorsque le bénéficiaire de l'autorisation de fourniture doit présenter une diversification suffisante de ses approvisionnements en gaz naturel de manière à préserver la sécurité d'approvisionnement, il peut être mis en demeure, par le ministre chargé de l'énergie, de procéder à cette diversification ou de prendre toute mesure utile pour assurer la continuité de fourniture.
« En cas d'absence de proposition de diversification par le bénéficiaire mentionné à l'alinéa précédent ou de désaccord sur la proposition de diversification de celui-ci, le ministre chargé de l'énergie peut soumettre à son approbation préalable, pour une période d'un an renouvelable, tout nouveau contrat d'importation de gaz naturel conclu par le bénéficiaire. Le non respect de ces dispositions par le bénéficiaire peut faire l'objet des mesures prévues à l'article 18 de la présente loi.
« Les modalités de délivrance des autorisations sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
L'amendement n° 16, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du I de cet article, remplacer les mots : "alimenter les" par les mots : "livrer ou vendre aux". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement tend à définir la fourniture de gaz naturel en précisant qu'elle consiste non pas à « alimenter », mais à « livrer ou vendre » aux clients éligibles et non éligibles.
Cette définition est souhaitable, car elle est plus conforme à l'alinéa 7 de l'article 2 de la directive.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Selon le Gouvernement, cet amendement n'est pas seulement rédactionnel. La définition selon laquelle la fourniture de gaz consisterait à « livrer ou vendre » plutôt qu'à « alimenter » risquerait d'introduire une certaine confusion.
C'est la raison pour laquelle je demande à M. le rapporteur de bien vouloir retirer cet amendement. Si tel n'était pas le cas, le Gouvernement s'en remettrait à la sagesse du Sénat.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 16 est-il maintenu ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cela vaudrait la peine, d'ici à la lecture à l'Assemblée nationale, de rechercher ce que recouvrent, sur le plan technique, les mots « alimenter » et « livrer ou vendre » en matière de gaz, et de savoir pourquoi, dans la directive, ce sont ces derniers qui sont utilisés.
Cela dit, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 16 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements présentés par M. Poniatowski, au nom de la commission.
L'amendement n° 17 est ainsi libellé :
« Au début du troisième alinéa du I de cet article, après les mots : "L'autorisation", insérer les mots : "de fourniture". »
L'amendement n° 18 est ainsi libellé :
« Dans la dernière phrase du quatrième alinéa du I de cet article, après les mots : "ou refusée", insérer les mots : "de manière objective et non discriminatoire". »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces deux amendements.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'amendement n° 17 est un amendement rédactionnel tendant à préciser que l'on a affaire à une autorisation de fourniture.
L'amendement n° 18 a pour objet de préciser que cette autorisation est délivrée ou refusée « de manière objective et non discriminatoire », termes que la commission s'est contentée de reprendre, entre autres, dans le considérant n° 24 de la directive, qui fait état de « critères objectifs, transparents et non discriminatoires ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le Gouvernement est favorable à ces deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Les trois amendements suivants sont présentés par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 179 est ainsi libellé :
« Compléter l'avant-dernier alinéa du I de cet article par les mots :
« de la compatibilité du projet du demandeur avec les choix de la nation en matière de politique énergétique. »
L'amendement n° 180 est ainsi libellé :
« Compléter in fine le dernier alinéa du I de cet article par les mots : "notamment l'égalité de traitement, la sécurité et la sûreté des installations gazières, la sécurité d'approvisionnement à travers notamment la programmation pluriannuelle des approvisionnements, le dimensionnement et la programmation des investissements de réseaux, de stockage et d'installations de GNL, la continuité de fourniture, la régularité, la qualité et le prix des fournitures, la protection de l'environnement et le développement équilibré du territoire". »
L'amendement n° 181 est ainsi libellé :
« Compléter le I de cet article par un alinéa ainsi rédigé : « Du respect de la législation sociale. »
La parole est à M. Yves Coquelle, pour défendre ces trois amendements.
M. Yves Coquelle. Le groupe communiste républicain et citoyen, dans son intervention générale et dans sa question préalable, a souligné que l'approvisionnement en gaz de notre pays relevait de la politique énergétique nationale. Nous tenons à le réaffirmer dans cet article 3 pour éviter que les choix des fournisseurs ne puissent être en contradiction avec les choix énergétiques de la nation.
Chacun sait en effet qu'aujourd'hui les intérêts et, en conséquence, les stratégies des firmes multinationales ne sont pas forcément compatibles avec les orientations fondamentales définies par la nation.
Tel est le sens de l'amendement n° 179, que nous vous demandons d'adopter.
S'agissant de l'amendement n° 180, il nous semble primordial de réaffirmer les trois grands principes fondateurs de nos services publics que sont l'égalité, la continuité et l'adaptabilité, comme d'en décliner les multiples aspects propres au service public du gaz et auxquels sera soumis tout fournisseur.
Nous ne pouvons, sur une question d'une telle importance, renvoyer la définition du service public du gaz à des décrets qui relèvent du seul pouvoir exécutif.
S'agissant de l'amendement n° 181, l'ouverture à la concurrence contraint les entreprises à diminuer de manière drastique leurs coûts.
Dans la plupart des cas, cette réduction des coûts, au nom de la compétitivité, est obtenue à travers une remise en cause des normes sociales et salariales des entreprises.
Notre amendement vise donc à éviter le développement des pratiques de dumping social en obligeant les industries gazières à respecter le statut du personnel et les accords collectifs de branche pour tous les salariés et retraités qui relèvent des industries gazières. Cela vaut pour les fournisseurs comme pour les autres opérateurs. Cela vaut pour les maisons mères comme pour leurs filiales. Pour le cas où vous douteriez de la détermination de ces salariés à faire respecter leurs droits, je ne vous rappellerai qu'une date : le 3 octobre 2002.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Voilà deux ans que nous demandons l'organisation d'un grand débat sur la politique énergétique de la France. Mme la ministre nous a rassurés en disant qu'il aurait lieu l'année prochaine.
La commission est défavorable à l'amendement n° 179, car le fait de conditionner, comme vous le proposez, la délivrance d'une autorisation de fourniture à sa compatibilité avec les choix de la nation en matière de politique énergétique risquerait d'entraîner des refus d'autorisation de fourniture de gaz contraires à l'esprit et à la lettre de la directive, voire des blocages ! Vous en êtes conscient, mais peut-être est-ce ce que vous souhaitez ?
Mme Hélène Luc. Nous avions demandé l'organisation d'un débat avant !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 180, qui n'a pas du tout la souplesse du dispositif retenu dans le projet de loi, notamment au II de l'article 3. De plus, l'amendement n° 21 de la commission, en prévoyant que le ministre chargé de l'énergie peut imposer aux fournisseurs de lui communiquer chaque année leur plan prévisionnel d'approvisionnement en gaz naturel, va déjà dans le sens de votre amendement n° 180, même si la disposition de la commission ne vous satisfait pas totalement.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 181 car, en vertu du principe de spécialité des législations, il n'est pas possible de transformer le refus de délivrer l'autorisation de fournir du gaz en une sanction qui toucherait ceux qui violent la législation sociale.
M. Yves Coquelle. Ce serait pourtant bien !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Attendez, monsieur le sénateur ! Les violations du statut des industries électriques et gazières et celles du code du travail et du code de la sécurité sociale font l'objet de sanctions spécifiques, qui ont leur champ d'application propre et qui ne sauraient interférer avec celui de l'article 3 du projet de loi. Les dispositions de cet amendement, si elles étaient adoptées, non seulement seraient source de confusion, mais créeraient des éléments de jurisprudence quelque peu compliqués.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. La précision qui est proposée dans l'amendement n° 179 nous apparaît d'ordre politique, alors que les critères que doivent remplir les demandeurs d'autorisation de fourniture sont de caractère technique. Le Gouvernement n'est donc pas favorable à cet amendement.
Il est également défavorable à l'amendement n° 180, car les précisions qui sont proposées sont redondantes.
Le Gouvernement est aussi défavorable à l'amendement n° 181, car il n'y a pas lieu d'intégrer des références au respect de la législation sociale, qui s'impose en tout état de cause à toute entreprise en France.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 179.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 180.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 181.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 19, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les modalités de délivrance des autorisations sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Cet amendement vise à déplacer la référence au décret en Conseil d'Etat de la fin de l'article 3 à la fin du I de cet article, car elle ne concerne que les problèmes liés aux modalités de délivrance des autorisations, autrement dit que le I, le II ne visant que les conditions dans lesquelles les fournisseurs exercent leur activité.
Maintenir la référence à la fin du II pourrait donc prêter à confusion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine ministre déléguée. Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui améliore la lisibilité de l'article.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de quinze amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune ; mais, pour la clarté du débat, je les appellerai séparément.
L'amendement n° 182, présenté par M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier et Terrade, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« Remplacer le II de cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
« II. - 1° Pour réaliser la politique énergétique nationale, notamment définie par la loi d'orientation sur l'énergie et assurer la continuité de fourniture de gaz dans le futur, le ministre chargé de l'énergie arrête et rend publique la programmation pluriannuelle de l'approvisionnement en gaz naturel du pays et des investissements de réseaux, d'installations de gaz naturel liquéfié et de stockage utiles.
« 2° Cette programmation met en évidence pour les usagers non éligibles du service public l'exigence d'une diversification et d'une fiabilité des sources d'approvisionnement.
« Elle implique par ailleurs pour chaque fournisseur qui compte parmi ses clients des usagers non éligibles du service public la nécessité d'un plan prévisionnel d'approvisionnement tel que 90 % du volume approvisionné chaque année soient assurés par des contrats de long terme.
« Concernant les autres fournisseurs, ils communiquent tous les ans au ministre chargé de l'énergie, leur plan prévisionnel d'approvisionnement en gaz naturel pour les deux années suivantes.
« 3° La programmation détermine par ailleurs un schéma de développement des réseaux de grand transport, et de transport, ainsi que des installations de gaz naturel liquéfié. Ce schéma de développement définit également les évolutions des capacités de stockage nécessaires au service public.
« Il prend aussi en compte les besoins présents et futurs de consommation et de transit. Il intègre l'obligation du service public en matière de continuité de fourniture, quelles que soient les fluctuations de la consommation, et ce, même en cas de :
« - scenari d'hivers froids au risque 2 % ;
« - scenari de crise d'approvisionnement (par exemple interruption d'une source principale d'approvisionnement).
« 4° Le schéma de développement précise également les exigences de sécurité auxquelles sont soumis les fournisseurs et les opérateurs pour chaque type d'infrastructures, tant en termes de conception, de construction, d'exploitation que de couverture des incidents et des accidents.
« 5° Des décrets en Conseil d'Etat fixent les modalités d'application du paragraphe II de cet article. L'un de ces décrets précise l'obligation pour tout fournisseur et tout opérateur de respecter a minima un cahier des charges type dont le contenu fera l'objet d'un arrêté ministériel.
« 6° La programmation ci-dessus définie fait l'objet d'un rapport présenté pour la première fois au parlement par le ministre chargé de l'énergie dans l'année suivant la promulgation de la présente loi.
« Cette programmation est mise à jour au moins tous les deux ans. Cette révision s'appuie notamment sur le schéma des services collectifs de l'énergie, sur un bilan de la situation et sur une prévision pluriannuelle des évolutions de la consommation. Cette prévision est établie par Gaz de France sous le contrôle de l'Etat prenant en compte la capacité des infrastructures.
« III. - Lorsqu'un contrat de fourniture en cours de réalisation apparaît difficilement compatible avec la programmation pluriannuelle, le ministre chargé de l'énergie peut demander au fournisseur de modifier son approvisionnement.
« Lorsqu'un projet de contrat de fourniture apparaît incompatible avec la programmation pluriannuelle, le ministre chargé de l'énergie peut exiger du fournisseur une révision de son projet, sous peine de refus d'autorisation pour cause d'incompatibilité avec la politique énergétique nationale ou d'incompatibilité avec les exigences de service public.
« Les modalités de délivrance des autorisations sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement porte sur la nécessité d'une programmation pluriannuelle. En effet, l'ampleur des dépenses d'investissement pour la mise en exploitation d'un gisement de gaz est telle que ses propriétaires veulent être assurés de pouvoir vendre le gaz extrait pendant la longue période nécessaire à l'amortissement de leurs investissements.
De même, les investissements pour le transport international du gaz sont très lourds et supposent, avant leur réalisation, l'assurance que du gaz circulera dans leurs tuyaux suffisamment longtemps pour amortir leurs dépenses.
Il découle de ces constats que le marché international du gaz est d'abord un marché de long terme.
Or la France dépend de l'étranger pour plus de 95 % de son approvisionnement, et de contrats de long terme résultant d'une anticipation des besoins matérialisée par un programme pluriannuel d'approvisionnement.
D'ailleurs, GDF procède ainsi depuis des décennies. Il y a encore peu de temps, tout le monde admettait que le monopole d'importation de Gaz de France était indispensable à l'approvisionnement de la France dans les meilleurs conditions.
De même, les investissements pour les canalisations, le transport, la distribution, l'installation de gaz naturel liquéfié et le stockage doivent également être programmés.
La directive européenne elle-même admet ce besoin de planification. Or dans le projet de loi, l'impasse totale a été faite sur ces nécessités par dogmatisme libéral. Notre amendement vise à combler ce manque dramatique pour l'avenir du pays et à définir autant que faire se peut le contenu d'une telle programmation.
Il est évident que cette dernière doit être prise en considération dans l'examen des demandes d'autorisation de fourniture.
M. le président. L'amendement n° 214, présenté par MM. Raoul, Trémel et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Remplacer les deux premiers alinéas du II de l'article 3 par trois alinéas ainsi rédigés :
« Les fournisseurs exercent leur activité dans les conditions fixées par leur autorisation ainsi que, le cas échéant, par les cahiers des charges de concessions ou les règlements de service des régies mentionnés à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales. Ils sont chargés de l'accomplissement des missions de service public dans les conditions définies au titre III de la présente loi. Un décret en Conseil d'Etat fixe les obligations qui s'imposent aux titulaires, en tenant compte des diverses catégories d'opérateurs et des caractéristiques de leurs clients et, en particulier, fixe les conditions de révision de ces obligations.
« Tout bénéficiaire de l'autorisation de fourniture communique chaque année au ministre chargé de l'énergie un plan prévisionnel d'approvisionnement en gaz naturel pour l'année suivante, les mesures mises en oeuvre pour assurer le respect des obligations fixées par son cahier des charges en cas de disparition d'une ou plusieurs sources d'approvisionnement en gaz naturel, ainsi que les informations définies par arrêté du ministre en charge de l'énergie sur les contrats d'importation du gaz naturel excédant un volume ou une durée fixés par ledit arrêté.
« Afin de garantir la diversité et la fiabilité des sources d'approvisionnement en gaz naturel de tout bénéficiaire d'une autorisation de fourniture chargé de l'accomplissement des missions de service public mentionnées au premier alinéa, lorsque ses approvisionnements en gaz naturel ne font pas l'objet d'une diversification suffisante, et risque d'affecter la sécurité d'approvisionnement, le ministre chargé de l'énergie peut, dans les conditions prévues par le décret en Conseil d'Etat mentionné au premier alinéa, mettre en demeure le bénéficiaire de diversifier son plan d'approvisionnement. »
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Nous avons eu l'occasion d'affirmer dans le débat toute l'importance que nous accordions à la sécurité des approvisionnements. Nous estimons que les dispositions qui sont prévues dans l'article 3 du projet de loi et qui permettent d'assurer cette sécurité des approvisionnements sont insuffisantes. Nous souhaiterions par conséquent qu'elles soient renforcées, et c'est ce à quoi tend cet amendement.
Nous proposons en particulier que la procédure d'information du ministre en charge de l'énergie soit détaillée et renforcée, afin que celui-ci puisse s'assurer que la sécurité d'approvisionnement est bien préservée, et que le plan prévisionnel d'approvisionnement soit rendu obligatoire, tout comme sa communication au ministre en charge de l'énergie. En résumé, nous privilégions le « doivent » au « peuvent » dans les dispositions concernées !
Par ailleurs, en cas d'insuffisance de diversification des sources d'approvisionnement, nous proposons que la procédure de mise en demeure porte aussi sur la fiabilité de ces sources. Je terminerai en disant que les dispositions que nous proposons figuraient dans le projet de loi Pierret de mai 2000.
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter in fine la première phrase du premier alinéa du II de cet article par les mots : "de fourniture" ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 107 est présenté par MM. Pintat et Fournier.
L'amendement n° 127 est présenté par M. Pépin.
L'amendement n° 158 rectifié bis est présenté par MM. Amoudry, Arnaud, Moinard et Christian Gaudin.
L'amendement n° 215 rectifié est présenté par MM. Besson, Sergent, Raoul, Trémel et les membres du groupe socialiste apparenté, et rattachée.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
« Compléter in fine la première phrase du II de cet article par les mots : "ainsi que, le cas échéant, par les cahiers des charges de concessions ou les règlements de service des régies mentionnés à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales". »
La parole est à M. Xavier Pintat, pour défendre l'amendement n° 107.
M. Xavier Pintat. Cet amendement a pour objet d'éviter un transfert à l'Etat d'attributions exercées aujourd'hui par les collectivités.
Il convient tout d'abord de rappeler que le service public dont les communes ou leurs groupements sont les autorités organisatrices comprend la fourniture. Par conséquent, les fournisseurs concessionnaires de ce service public doivent respecter, outre l'autorisation délivrée par l'Etat, les clauses des contrats de concession passés avec les autorités organisatrices. Or, désormais, selon le projet de loi, ils ne devraient respecter que la seule autorisation délivrée par l'Etat.
A la veille d'une relance de la décentralisation sur l'initiative du Gouvernement, une telle centralisation n'apparaît pas souhaitable. Il conviendrait donc, au travers de cet amendement, d'indiquer clairement que la fourniture relevant du service public local doit être exercée dans les conditions fixées non seulement dans une autorisation délivrée par l'Etat, mais également dans les contrats de concession ou les règlements locaux s'il s'agit de régies. Il est donc proposé d'inscrire dans la loi le maintien du statu quo dans les attributions respectives de l'Etat et des collectivités locales.
M. le président. L'amendement n° 127 n'est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Paul Amoudry, pour défendre l'amendement n° 158 rectifié bis .
M. Jean-Paul Amoudry. Cet amendement a pour objet d'obliger les fournisseurs à exercer leur activité, selon les cas, soit dans les conditions prévues par leur autorisation, ce qui figure dans le projet de loi, soit en vertu des cahiers des charges de concessions et des règlements de service des régies mentionnés à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales.
Ces cahiers des charges de concessions et ces règlements de service comportent, en effet, des dispositions relatives à la fourniture d'électricité et de gaz aux petits et moyens consommateurs, et il importe de faire mention dans la loi de l'existence du régime juridique de ces concessions locales.
M. le président. La parole est à M. Jean Besson, pour défendre l'amendement n° 215 rectifié.
M. Jean Besson. Cet amendement tend à prévoir que les fournisseurs doivent exercer leur activité dans les conditions prévues non seulement par leur autorisation, mais aussi par les cahiers des charges de concessions et les règlements de service des régies mentionnés à l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales. Ceux-ci comportent, en effet, des dispositions relatives à la fourniture d'électricité et de gaz aux petits et moyens consommateurs.
M. le président. Les huit amendements suivants sont présentés par M. Poniatowski, au nom de la commission.
L'amendement n° 21 est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la dernière phrase du premier alinéa du II de cet article : "Le ministre chargé de l'énergie peut imposer aux fournisseurs de lui communiquer chaque année leur plan prévisionnel d'approvisionnement en gaz naturel." »
L'amendement n° 22 est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du II de cet article, après les mots : "de fourniture", remplacer le mot : "doit" par les mots : "est tenu de". »
L'amendement n° 23 est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du II de cet article, remplacer les mots : "de manière à" par le mot : "pour". »
L'amendement n° 24 est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du II de cet article, remplacer les mots : "il peut être mis en demeure, par le ministre chargé de l'énergie," par les mots : "le ministre chargé de l'énergie peut le mettre en demeure". »
L'amendement n° 25 est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le début du troisième alinéa du II de cet article :
« En cas d'absence de proposition de diversification émanant du bénéficiaire... ».
L'amendement n° 26 est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du troisième alinéa du II de cet article, remplacer les mots : "sur la proposition de diversification de celui-ci " par les mots : "sur le contenu de sa proposition de diversification". »
L'amendement n° 27 est ainsi libellé :
« Après les mots : " le bénéficiaire ", rédiger comme suit la fin de la dernière phrase du troisième alinéa du II de cet article : " peut faire l'objet des sanctions prévues à l'article 18 ". »
L'amendement n° 28 est ainsi libellé :
« Supprimer le dernier alinéa du II de cet article. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 21 à 28, et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 182 et 214, ainsi que sur les amendements identiques n°s 107, 158 rectifié bis et 215 rectifié.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. L'amendement n° 21 a un double objet : il vise d'abord à améliorer la rédaction de l'article 3, ensuite, et surtout, à supprimer la formule selon laquelle le ministre peut demander aux fournisseurs leur plan prévisionnel d'approvisionnement en gaz naturel pour « l'année suivante ». En effet, dans un secteur où les investissements s'amortissent sur vingt ans - plusieurs orateurs y ont fait allusion lors de la discussion générale - et où des contrats à long terme sont passés, il est souhaitable que le ministre puisse demander le plan prévisionnel d'approvisionnement non pas pour l'année suivante, mais pour une période qui dépasse cette seule année.
On éviterait ainsi deux obstacles : celui qui aboutirait au fait que le ministre ne connaîtrait rien des plans d'approvisionnement des opérateurs et celui qui apparaîtrait si on obligeait les opérateurs à entrer dans une planification prévisionnelle des investissements.
Les amendements n°s 22, 23, 24, 25, 26 et 27 sont rédactionnels.
L'amendement n° 28 est un amendement de coordination eu égard à ce que j'ai dit tout à l'heure pour la référence au décret en Conseil d'Etat.
J'en viens aux avis de la commission sur les autres amendements.
S'agissant de l'amendement n° 182, la commission a émis un avis défavorable.
La commission comprend les motivations des auteurs de cet amendement, qui sont de trois ordres : assurer la continuité de la fourniture de gaz ; diversifier l'origine des approvisionnements ; accroître les exigences de sécurité.
En revanche, la commission ne peut souscrire aux modalités de mise en oeuvre des mesures proposées tendant à établir une programmation pluriannuelle des investissements qui remplacerait la procédure souple instituée par l'amendement n° 21 de la commission.
Cet amendement n° 182 a également pour objet d'établir des cahiers des charges types et, surtout, de permettre au ministre de refuser l'autorisation de fournitures pour cause d'incompatibilité avec la politique nationale de l'énergie.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 214, qui doit beaucoup, si je ne me trompe, à l'article 7 de la loi Pierret.
Je tiens à souligner que cet amendement est globalement satisfait puisqu'il prévoit une rédaction différente des mesures que le Gouvernement a inscrites dans son projet de loi.
Une partie du premier alinéa de cet amendement n° 214 figure dans l'amendement n° 107 de M. Pintat qui tend à renforcer les droits des collectivités locales et qui, lui, a reçu un avis favorable de la commission.
Par ailleurs, le début du deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement, quoiqu'il soit également tiré du projet de la loi Pierret, est moins rigoureux, en ce qui concerne les obligations faites aux fournisseurs de communiquer leur plan prévisionnel d'approvisionnement en gaz naturel au ministre, que l'amendement n° 21 de la commission. En effet, ce dernier prévoit que le plan prévisionnel qui doit être communiqué au ministre est établi sur plusieurs années, alors que la rédaction du début du deuxième alinéa de l'amendement n° 214 limite cette obligation à l'année suivante.
En ce qui concerne les amendements identiques n°s 107, 158 rectifié bis et 215 rectifié, la commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. S'agissant de l'amendement n° 182, le Gouvernement émet un avis défavorable. En effet, cet amendement reprend des obligations qui figurent déjà dans le projet de loi.
Par ailleurs, cet amendement prévoit que les opérateurs d'infrastructures gazières soient soumis à un schéma de développement des réseaux.
Je tiens à préciser qu'il n'est pas dans l'intention du Gouvernement de se substituer aux opérateurs en matière de décisions d'investissements futurs. Cependant, l'Etat veillera, naturellement, à ce que les investissements projetés permettent d'assurer le respect du bilan gazier et de faire face à la demande croissante de gaz naturel.
Dans l'hypothèse où une mauvaise programmation des investissements aurait conduit à un refus d'accès au réseau, le I de l'article 4 permettrait à la Commission de régulation de l'électricité et du gaz d'ordonner les investissements nécessaires.
Sur l'amendement n° 214, le Gouvernement émet un avis défavorable pour les mêmes motifs que ceux que j'ai évoqués s'agissant de l'amendement n° 182.
En ce qui concerne l'amendement n° 20 de la commission, le Gouvernement émet un avis favorable.
S'agissant des amendements identiques n°s 107, 158 rectifié bis et 215 rectifié, le Gouvernement considère que la précision apportée relève plutôt du domaine réglementaire. Il s'en remet néanmoins à la sagesse du Sénat.
En ce qui concerne l'amendement n° 21, je tiens à remercier M. le rapporteur de l'avoir déposé. En effet, au-delà de son aspect rédactionnel, que nous apprécions, cet amendement est particulièrement important. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis favorable.
Enfin, pour ce qui est des amendements n°s 22, 23, 24 et 25 le Gouvernement émet un avis favorable, car ils améliorent la rédaction du texte.
Le Gouvernement émet également un avis favorable sur l'amendement n° 26, la précision apportée lui semblant utile, ainsi que sur les amendements n°s 27 et 28, ce dernier étant un amendement de coordination.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 182.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 214.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 107, 158 rectifié bis et 215 rectifié.

(Ces amendements sont adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 21.
M. Daniel Raoul. Monsieur le rapporteur, tout à l'heure, vous avez dit que le deuxième alinéa de notre amendement n'était pas assez rigoureux. Je vous renvoie la balle, si j'ose dire : je vous suggère de durcir votre amendement en remplaçant les mots : « peut imposer » par le mot « impose ».
M. le président. Que pensez-vous de la suggestion de M. Raoul, monsieur le rapporteur ?
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je trouve que vous allez un peu loin, monsieur Raoul ! Si l'on remplace les mots « peut imposer » par le mot « impose » - cela concerne directement le ministre chargé de l'énergie ! -, il faudrait indiquer : « impose en tant que de besoin ».
Or les formulations « peut imposer » et « impose en tant que de besoin » ont le même sens.
M. Daniel Raoul. Pas tout à fait !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Par conséquent, je maintiens la rédaction de mon amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 24.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

(L'amendement est adopté).
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté).
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Au cours de la discussion de l'article 2, M. Raoul et moi-même avons eu un échange sur la définition du mot « mandataire ». Je tiens à rassurer mon collègue : le mandataire n'est pas un négociant, ce n'est pas un trader . La définition du trader , ou courtier, est précise : c'est une « personne dont la profession consiste à mettre en relation vendeurs et acheteurs, moyennant un courtage, pour des opérations de Bourse ou de commerce ». Ce n'est pas cette catégorie que visaient mes deux amendements sur lesquels vous vous êtes abstenus.
Le mandataire est également défini très précisément : c'est celui qui « signe un contrat synallagmatique par lequel une personne - le mandant - donne à une autre - le mandataire - le pouvoir de faire quelque chose pour elle, en son nom ». Ce n'est pas un négociant, ce n'est pas un trader , son statut est bien distinct.
Vous aviez fini par instiller le doute dans mon esprit, mon cher collègue, et c'est pourquoi je suis heureux de pouvoir vous apporter ces précisions.
M. Daniel Raoul. Le doute est le début de la vérité, monsieur le rapporteur ! (Sourires.)
M. le président. Madame la ministre déléguée, mes chers collègues, nous avons examiné cinquante-trois amendements en deux heures. A ce rythme, nous devrions sans difficulté parvenir jeudi au terme de ce débat, ainsi que l'a prévu la conférence des présidents.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

16

COMMISSION D'ENQUÊTE
SUR LE GROUPE VIVENDI UNIVERSAL

Rejet de la demande de discussion immédiate
d'une proposition de résolution

M. le président. Je rappelle au Sénat que, en application de l'article 30, alinéas 1 et 4, du règlement du Sénat, M. Jack Ralite et Mme Danièle Pourtaud et trente-deux de nos collègues ont demandé la discussion immédiate de la proposition de résolution de M. Jack Ralite et des membres du groupe communiste républicain et citoyen tendant à la création d'une commission d'enquête sur l'utilisation des fonds publics par le groupe Vivendi Universal et sur le devenir des entreprises dudit groupe exerçant des missions de services publics lui appartenant (n° 405, 2001-2002).
Le délai prévu par l'article 30, alinéa 2, du règlement est expiré et le Sénat a terminé l'examen de l'ordre du jour prioritaire.
En conséquence, je vais appeler le Sénat à statuer sur la demande de discussion immédiate.
Je rappelle que, en application de l'alinéa 6 de l'article 30 du règlement, le débat engagé sur cette demande ne peut jamais porter sur le fond. C'est sur la demande de discussion immédiate que le Sénat se prononce et non sur le fond.
Ont seuls droit à la parole : l'auteur de la demande, un orateur « contre », le président ou le rapporteur de la commission.
Aucune explication de vote n'est admise.
La parole est à M. Jack Ralite, auteur de la demande.
M. Jack Ralite. Monsieur le président, mes chers collègues, depuis l'ouverture de la session extraordinaire du mois de juillet, je suis intervenu régulièrement à propos des problèmes de Vivendi Universal.
Je rappelle brièvement mes actions : le 13 juillet, un rappel au règlement ; le 19 août, une lettre au président du Sénat, M. Christian Poncelet ; le 6 septembre, une réception au Sénat de tous les syndicats français et européens de Vivendi Universal ; le 13 septembre, une lettre au Premier ministre cosignée par soixante-dix écrivains, syndicalistes et éditeurs ; le 25 septembre, une lettre à M. Marc Tessier, président de France Télévision, pour souhaiter un débat à la télévision ; le 25 septembre, une lettre au président de la commission des affaires culturelles, M. Jacques Valade, pour demander que celle-ci siège en formation secrète, sur l'initiative des parlementaires des groupes communiste et socialiste ; enfin, le 1er octobre, j'ai pris la parole pour m'étonner que la conférence des présidents n'ait pas retenu l'idée d'une commission d'enquête. J'ajoute que, les 14 et 25 septembre, je suis allé rencontrer les personnels devant l'immeuble de Vivendi Universal, avenue de Friedland.
Pour le moment, rien n'est venu. Ou plutôt, si : on m'a dit que la question posée était intéressante, mais qu'un argument ne permettait pas de conclure : la question concerne une entreprise privée.
A l'occasion du débat sur le projet de loi relatif à la rémunération au titre du prêt en bibliothèque et renforçant la protection sociale des auteurs, qui s'est déroulé le 8 octobre et qui concernait aussi le privé, selon les termes de M. le ministre de la culture et de la communication, je suis intervenu pour proposer à celui-ci de réunir une table ronde sur l'édition. Mais toujours rien, si ce n'est une amorce de discussion avec M. Valade et avec M. le ministre lui-même.
Je rappelle que, à l'Assemblée nationale, trois propositions de résolution ont été déposées en ce sens : la première émanait de M. Ayrault, du parti socialiste, et visait la création d'une mission sur Vivendi Universal ; la deuxième était signée de M. Houillon, du groupe UMP, et tendait « à la création d'une commission d'enquête sur les dysfonctionnements qui ont entraîné l'effondrement du cours boursier de Vivendi Universal » ; la troisième, déposée pas M. Brard, apparenté communiste, avait pour objet la création d'une commission d'enquête portant sur Vivendi Environnement.
Avec une trentaine de mes collègues du groupe communiste républicain et citoyen et du groupe socialiste...
Un sénateur du RPR. Où sont-ils ?
M. Jack Ralite. ... j'ai demandé, comme le règlement du Sénat m'y autorise, une discussion immédiate. Nous y voilà !
Je veux argumenter sur notre objectif - je condense mon propos -, qui est d'élucider le séisme culturel, social, économique, financier, que constitue l'actuel état de Vivendi Universal et d'avancer des propositions pour que cela ne se reproduise plus et que personne, quelle que soit sa puissance ou son imagination, ne puisse jouer dramatiquement avec la culture, la création artistique et littéraire, l'environnement, ainsi qu'avec les hommes et les femmes sans qui cela n'existerait pas et les hommes et les femmes pour qui cela existe.
J'examinerai maintenant deux points qui inspirent la démarche commune des deux groupes parlementaires.
Tout d'abord, c'est une question urgente.
Vous connaissez tous le groupe éditorial VUP, qui regroupe les deux tiers de l'édition de référence, 35 % de l'édition scolaire, 20 % des éditions littéraires. Si je dis : Larousse, Le Robert, Nathan, Dalloz, Dunod, Plon,Laffont, Seghers, La Découverte, Julliard, Belfond, Pocket, 10/18,... je dis l'ampleur de la question.
La situation financière du groupe - 19 milliards d'euros de dettes - conduit M. Fourtou, son actuel P-DG - qui pendant quatre ans, je dois le souligner au passage, a toujours été d'accord avec M. Messier - à chercher un acheteur, un point c'est tout, avec l'objectif que la vente ait lieu dans le mois qui vient.
Dans la presse, les articles polémiques s'opposent, entre ceux qui proposent un achat par les fonds d'investissement et ceux qui proposent un achat par Hachette.
Je ne peux m'empêcher de citer un éditeur américain, André Schiffrin, qui, dans un petit ouvrage intitulé L'Edition sans éditeurs, écrit, à propos des fonds d'investissement : « Dans un premier temps le groupe acheteur publie une déclaration enthousiaste, faisant l'éloge de la société achetée et promettant de maintenir ses glorieuses traditions ; aucun changement majeur n'aura lieu et, dans toute la mesure du possible, il n'y aura pas de licenciements. Puis on annonce des économies absolument nécessaires pour améliorer l'efficacité : les services administratifs vont être fusionnés, et bientôt la comptabilité, les entrepôts, les services d'expédition se retrouvent sous le même toit. Ensuite on réunit les forces de vente, car il est inutile que le même territoire soit couvert par des équipes différentes. Après quoi on découvre de malencontreux recoupements dans le domaine de la production éditoriale, ce qui nécessite certaines rationalisations. Pour finir on annonce la création d'une nouvelle structure éditoriale qui sera commune aux différentes sections des catalogues collectifs, qu'il s'agisse de reprises en livres de poche des titres anciens ou de nouveautés produites en dépassant les anciennes et "inefficaces" divisions du travail. »
Du groupe Hachette, on a souligné que c'était un groupe national. C'est vrai. Hachette et Vivendi, cependant, représentent à eux deux 80 % de la distribution, ce qui entraîne un risque de monopole, donc de « retoquage », si vous me permettez l'expression, par la Commission de Bruxelles.
Un coin de ciel bleu est apparu grâce à un article, paru dans Le Monde, de Pierre Cohen-Tanugi, ancien haut cadre éditorial chez Gallimard, qui estime que, lorsqu'il s'agit d'art, on a le droit, en France, quand il y a vente aux enchères et s'il est question de patrimoine national, d'exercer un droit de préemption.
Pourquoi, dit-il - et je me prête au rêve -, pourquoi n'utiliserions-nous pas un droit de préemption qui, appuyé sur la Caisse des dépôts, contribuerait à créer un espace public dans lequel pourrait mûrir, après une mise à plat, un traitement général du problème de l'édition en France ?
De toute façon, il faut une table ronde.
J'ajoute que, à côté de l'édition, ou trouve le groupe Canal Plus, un fleuron de l'audiovisuel français créé par André Rousselet et qui possède 5 000 films, dont près de 4 000 sont des films français et européens dont on ne sait toujours pas s'ils resteront dans notre patrimoine.
On voit bien qu'on ne peut laisser au seul marché le soin de tout régler. Il y a comme un arraisonnement de la culture par le marché. Je citerai Octavio Paz : « Le marché est efficace, soit, mais il n'a ni conscience ni miséricorde. » Or nous sommes une société de conscience.
Après l'examen de la question dans ses aspects urgents, voyons-la dans ses aspects fondamentaux.
Je ne veux pas être méchant, mais tout de même ! M. Jean-Marie Messier déclarait il y a quelques années : « Vivendi Universal va tourner la page du siècle et du millénaire en devenant le leader mondial de la communication. Quelle réponse aux sceptiques, aux résignés, aux adeptes du pré carré ! »
Mais lui répondait dans le même temps le rédacteur en chef du journal d'Hollywood, Variety : « Même si les gens ne s'en rendent pas compte, beaucoup d'argent européen contribue au financement du cinéma américain », ajoutant : « Les Français ont toujours été furieux de la domination des Américains sur les films. Aussi, le fait que ce soient maintenant les Français qui financent le cinéma américain ne manque pas de piquant. » A l'évidence, cette situation fait penser à la phrase de Coluche : « La victoire est brillante, puisque l'échec est mat. »
Mais je veux aller plus loin sur le fond, sur les fondamentaux.
C'est une question fondamentale sur le plan de l'économie. Les chiffres sont là : l'endettement, je l'ai dit, était de 19 milliards d'euros ; Vivendi emploie 381 000 salariés dans soixante-dix pays, dont près de 100 000 dans les secteurs des médias et de la communication et 295 000 dans le secteur de l'environnement ; il y a 95 800 salariés en France, dont la moitié chez Vivendi Environnement ; enfin, 26 millions de Français sont fournis en eau par Vivendi Environnement.
Au-delà des chiffres, le problème était de regrouper des contenus pour passer dans les tuyaux. C'était la colonisation de la sphère culturelle par la sphère marchande. C'était une étape nouvelle dans la financiarisation. C'était le dogme de l'efficacité du management. C'était le messianisme technologique. C'était le déchargement du projet social et de l'utopie sociale et culturelle sur l'utopie technicienne. C'était l'américanisme des régulations, et tout cela avec le rachat, en quatre ans, de trente entreprises pour 100 milliards d'euros.
C'est fondamental également par rapport au personnel. En France, ils sont près de 100 000 à se poser la question de leurs droits. Ils avaient conquis des droits à l'échelle européenne, ce qui était une originalité de ce groupe. Tout cela leur a été retiré.
Ils ne sont associés à aucune des concertations pour une issue à la crise de Vivendi Universal. Ils se posent la question des licenciements boursiers. Ils réclament un véritable droit, non pas seulement à l'information, mais également de proposition et de contrôle. C'est le droit des salariés dans l'entreprise qui est nouvellement posé à ce niveau d'exigence.
C'est fondamental par rapport à la création. Il s'agit, en vérité, à l'orée du XXIe siècle, du statut de l'esprit, de la tâche de civiliser les nouveaux « nouveaux mondes » issus de l'oeuvre civilisatrice. Dans cette tâche assez inouïe, je le reconnais, il y a l'exception culturelle.
Or M. Jean-Marie Messier a déclaré que « l'exception culturelle franco-française était morte » et qu'il était pour la diversité culturelle, sous-entendu pour la diversité des clientèles. Il y a cinquante ans, dans La littérature à l'estomac, l'immense Julien Gracq nous avait déjà alertés sur le risque des « Galeries Lafayette » de notre littérature.
C'est fondamental par rapport à la France, à l'Europe et au monde. Chacun se souvient de l'AMI, l'accord multilatéral sur l'investissement, et des débats qui ont eu lieu ici même au Sénat pour en venir à bout, ce qui a été rendu possible grâce à l'initiative de l'ancien Premier ministre. C'était la tentative de créer une juridiction internationale privée supplantant la juridiction internationale publique.
Or, à regarder le groupe Vivendi Universal, M. Jean-Marie Messier, c'est l'AMI à lui tout seul ! On peut parler d'un « Etat Messier », d'un « Berlusconi cool », comme je l'ai déclaré l'année dernière aux rencontres cinématographiques de Beaune. Un grand libraire parisien a employé devant moi, pas plus tard qu'hier, l'expression de « messiérisation des esprits ». Cela pose la question d'un organisme international indépendant qui ne fasse pas de la culture une marchandise comme les autres, alors que cette dérive est au coeur de la constitution et des délibérations de l'OMC.
Permettez-moi de vous annoncer qu'un comité de vigilance regroupant quarante des plus grandes organisations françaises liées à la culture et à la création organise, au mois de février prochain, un colloque international rassemblant près de trente pays, précisément sur la création d'un organisme indépendant et opératif.
Se pose la question, et je la pose inlassablement depuis plusieurs années, d'une conférence internationale sur les problèmes de la culture, d'un « Rio » de la culture. L'homme sent en lui des unités plus grandes que ses ancêtres. Il est temps de penser, et Vivendi Universal nous y oblige, des régulations nouvelles pour la culture à tous les niveaux de la société, du local à l'universel.
C'est fondamental par rapport à l'éthique. Je ne prendrai qu'une illustration. Il existe aux Etats-Unis, dans les comptes des entreprises, un critère appelé EBITDA - earnings before interest, taxes, depreciation and amortization - qui est en fait un résultat d'exploitation avant intérêts, impôts, investissements et amortissements. Ce critère enjolive dans de très grandes proportions le chiffre d'affaires. Alors que ce critère était inusité en France, M. Jean-Marie Messier l'a utilisé sans aucune réaction et a pu tromper son monde sans vergogne.

J'ajoute que Barry Diller, l'homme d'Hollywood avec lequel Jean-Marie Messier a fait le dernier agrandissement de son empire, a bénéficié, dans le contrat signé avec ce dernier, de clauses léonines tout à son intérêt qui empêchent aujourd'hui tout délestage, dans ce domaine, de Vivendi Universal.
Il y a là une question de contrôle et de moralité des affaires qui doit être maîtrisée. Présentement, les libéraux américains nous donnent l'impression de faire mieux que nous en la matière.
C'est fondamental par rapport à la responsabilité publique. Je crois que le moment est venu, à la suite de l'énumération que je viens de faire, de mettre à jour une responsabilité publique, notamment en matière de culture, qui ne soit ni l'étatisme ni l'affairisme, mais qui soit une donnée nouvelle tenant compte des mutations, et qu'en tout cas Vivendi Universal impose, par ses gigantesques dérives, comme une ardente obligation.
Alors, la responsabilité est publique en matière de financement : comment ne pas être effaré que le capital de Vivendi Environnement, qui a des délégations de service public avec 8000 communes françaises regroupant 26 millions d'habitants, ait été ponctionné sans aucune réaction ? C'est un financement public détourné dont on sait aujourd'hui qu'une partie non négligeable a été déposée en Irlande.
La responsabilité est publique à raison des organismes créés précisément dans notre pays pour garantir l'accompagnement transparent et rigoureux des évolutions économico-industrielles. Or le Conseil supérieur de l'audiovisuel, le Conseil national de la concurrence, le Centre national de la cinématographie, la Commission des opérations de bourse et la Commission européenne de la concurrence ont tout avalisé, comme obnubilés par celui qu'on appelait alors un champion national, derrière lequel tout le monde a été appelé à se regrouper comme derrière le petit cheval blanc de Georges Brassens. Seul le CSA a bougé, quand les cinéastes ont bougé.
La responsabilité est publique en matière de culture : on voit bien, après avoir « troussé » la question culturelle et de communication de J6M, comme il aimait s'appeler - Jean-Marie Messier Moi-Même Maître du Monde - qu'il faut mettre à jour une responsabilité publique qui soit la loi du secteur public, mais aussi une obligation d'intérêt général pour le secteur privé.
Je la définirai à travers six processus vectorisant son intervention : audace de la création, élan du pluralisme, obligation de production, maîtrise de la distribution, atout d'un large public, coopération internationale toujours plus grande, toujours plus généralisée, toujours plus profonde et n'ignorant ni le Sud ni les ex-pays de l'Est.
Je me résume sur ces développements concernant l'urgence et les fondamentaux : quand un pays abandonne son imaginaire aux grandes affaires, il se condamne à des libertés précaires, et je lui oppose une déclaration de notre collègue aujourd'hui décédé, Maurice Schumann, qui, peu de temps avant son grand départ, eut cette parole à l'Institut : « La seule faute que le destin ne pardonne pas au peuple, c'est l'imprudence de mépriser les rêves. »
Permettez-moi pour conclure de lire la page de garde du livre de J6M.com, c'est une phrase de René Char : « Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder, ils s'habitueront. »
Nous ne nous habituerons pas, nous ne nous habituerons jamais, c'est pourquoi nos deux groupes ont demandé la création d'une commission d'enquête. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Claude Belot, contre la demande de discussion immédiate.
M. Claude Belot. Monsieur le président, mes chers collègues, nous sommes dans l'utopie.
Il est très agréable d'écouter M. Ralite rêver d'un monde qui n'existe pas et qui, malheureusement peut-être, ne peut pas exister. Or c'est précisément parce que le groupe Vivendi Universal a complètement perdu le sens de la réalité, qu'il s'est laissé aller au rêve, et sans doute essentiellement au rêve culturel, qu'il a rencontré les difficultés que nous connaissons.
Au sein du Sénat, il se trouve que j'étudie plus particulièrement les questions de l'audiovisuel et de la création sur le plan financier et cela m'oblige à regarder le contenu. J'ai donc assisté, d'abord avec surprise ensuite, avec un certain effarement, à une perte complète de repères, qu'il s'agisse de Vivendi Universal ou de Canal Plus, ou encore de AOL Time Warner sur le continent américain. Tous avaient le même objectif : ceux qui maîtrisent les « tuyaux » pourront diffuser les contenus, il faut donc aussi posséder les contenus. Tel était leur rêve.
Malheureusement, le rêve s'est révélé non adapté, ou non adaptable.
La convergence se produira sans doute un jour. Internet ne fera que progresser et ce seront sans doute ceux qui possèderont les contenus qui pourront utiliser les « tuyaux ». Ils ont peut-être eu raison trop tôt.
Il faut se souvenir de cette période de délire, comprise entre 1996 et 2002, et des paroles qui ont été prononcés en ces lieux par les deux derniers ministres de la culture. Il faut rappeler également que M. Jospin a lui-même donné sa bénédiction à M. Messier, qu'il avait reçu au cours d'une audience particulière.
Ce dossier a une histoire et les pouvoirs publics français y ont joué un rôle de grande bienveillance. C'est la vérité, c'est l'histoire, on ne la réécrit pas ! Aujourd'hui, la situation a changé, mais je crois qu'il ne pouvait pas en être autrement.
Regardons attentivement ce qui s'est passé à Canal Plus depuis quelques années. N'oublions pas que cette chaîne a bénéficié d'un monopole ! En contrepartie, elle devait participer à la création française. Au sein du Gouvernement, on finissait même par compter exclusivement sur Canal Plus pour favoriser la création audiovisuelle.
Il était prévu que 20 % des films seraient financés par Canal Plus, ce qui permettrait à la création cinématographique française de devenir l'une des plus performantes d'Europe. Mais Canal Plus n'en avait pas les moyens, on le sait aujourd'hui. Et n'oublions pas que Mme Tasca, au moment de la discussion budgétaire, nous indiquait qu'elle comptait sur les décodeurs de Canal Plus, l'Etat français n'ayant pas les moyens de financer les décodeurs destinés à la télévision numérique terrestre !
Monsieur Ralite, vous avez beaucoup parlé de culture. Pour vous parler très franchement, lorsque j'ai découvert l'ampleur des dégâts - je suivais ces affaires d'assez près - j'ai su que nous allions « droit dans le mur ». Celui qui aurait dû être derrière la caméra était devant, et sans doute un peu trop ! Nous avons alors pu légitimement connaître une période d'inquiétude.
Aujourd'hui, je crois que nous pouvons être quelque peu rassurés. Vivendi Environnement est une entreprise mondiale qui honore la France. La majorité du capital est française et nous trouvons des soldats de la France aux quatre coins du monde, dotés d'un savoir-faire qu'ils ont appris ici, grâce, sans doute, au système des délégations de service public qui a permis de fabriquer le modèle français, devenu quasi universel.
Dans ce contexte, il ne saurait y avoir de risque de délocalisation : il n'est pas question d'emmener les canalisations d'eau, d'assainissement ou de chauffage urbain qui se trouvent dans nos rues. Le risque est nul ! Le capital et le savoir-faire sont là. Les communes françaises ne risquent donc pas grand-chose.
En revanche, il serait certainement du plus mauvais effet que les efforts de prospection et de transposition du modèle français dans le vaste monde, sur l'initiative de cette entreprise et de son concurrent, soient compromis dans le déballage auquel procéderait une commission d'enquête, qui plus est concernant une entreprise privée, ce qui serait assez surprenant. Mais je ne m'étendrai pas trop longuement sur ce sujet...
Pour ce qui concerne Canal Plus, il faut revenir à la réalité : cette entreprise n'avait pas les moyens hier, et elle ne les a pas davantage aujourd'hui, de contribuer à la création cinématographique. Je le regrette avec vous, mais il faut quand bien même prendre conscience de la réalité : il faudra sans doute trouver d'autres moyens de financer la création française.
Enfin, la culture française, dont nous sommes tous usufruitiers et porteurs et que tous les Français contemporains contribuent à enrichir, est tout de même l'une des plus grandes au monde. Elle mérite d'être connue, et vouloir à tout prix qu'elle se replie sur elle-même - j'ai cru comprendre tout à l'heure que c'était le souhait de M. Ralite (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen) - est une erreur fondamentale.
A cet égard, je verserai un élément complémentaire au débat.
Pour quelle raison le film français ne s'exporte-t-il pas ? Tout simplement parce que le statut de la création française est unique au monde...
Mme Nicole Borvo. C'est inquiétant d'entendre cela !
M. Claude Belot. ... et que l'écrivain, le cinéaste et même l'acteur sont propriétaires des droits à titre éternel. Il en résulte que plus personne au monde ne veut acheter la création française, qui ne se vend pas, y compris au Canada francophone. Nous en sommes là !
Mme Nicole Borvo. Heureusement qu'il y a le cinéma français !
M. Claude Belot. Il faudra avoir un jour la lucidité - et je pèse mes mots à cet instant - de se mettre à l'unisson du monde, afin précisément que cette culture française puisse s'exporter sur toute la planète, grâce à des entreprises telles que celle dont nous parlons.
Mme Nicole Borvo. C'est inquiétant !
M. Claude Belot. J'ai été ici même le rapporteur de la loi de privatisation de 1993 et j'ai eu l'occasion de travailler, à l'époque, avec M. Fourtou. C'est un homme qui a conduit remarquablement l'entreprise qu'il dirigeait alors ; aujourd'hui, dans ses nouvelles fonctions, il a d'abord fait établir un état des lieux, lequel fait apparaître des données intéressantes, à savoir que l'actif est très supérieur au passif. D'ailleurs, les chiffres qui ont été donnés - 100 milliards d'euros d'actifs, pour 19 milliards d'euros de dettes sont sans doute à vérifier, car ils me semblent trop à l'avantage de l'entreprise.
Quoi qu'il en soit, la situation de Vivendi Universal n'est donc pas catastrophique. Il semble, au contraire, que les actifs nets sont importants, et des acheteurs, à la Bourse de New York, sont intéressés par l'ensemble du groupe. D'ores et déjà, trois investisseurs américains ont passé la barre des 5 % du capital. Par conséquent, ne faisons pas trop baisser la valeur du titre, qui a tendance à remonter depuis quelque temps, par des initiatives visant surtout à permettre à leurs auteurs de se faire valoir sur la place publique, au détriment de l'entreprise, et donc de la France.
En conclusion, je ne crois pas, monsieur Ralite, à l'utilité de la démarche que vous proposez d'engager. Celle-ci me semble au contraire nuisible, et c'est la raison pour laquelle je juge votre initiative inopportune. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Comme tous mes collègues présents ce soir dans l'hémicycle, j'ai écouté avec attention et respect M. Ralite, et ressenti la forte conviction qui inspirait ses propos.
Cependant, je voudrais indiquer que, en l'occurrence, il vise une entreprise privée, avec ses contraintes spécifiques, ses salariés, ses actionnaires. Il n'est donc pas envisageable que la puissance publique interfère dans le déroulement des opérations en cours, car ce serait alors une sorte d'ingérence de la sphère publique dans le devenir d'une entreprise privée.
Mme Nicole Borvo. C'est pour donner des fonds publics que la puissance publique intervient !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous sommes bien sûr préoccupés par la situation de cette entreprise, par son endettement, par l'effondrement du cours de ses titres à la Bourse et par les mesures drastiques arrêtées par son conseil d'administration, afin de tenter de sauver l'essentiel nous pensons aux salariés dont les emplois sont menacés.
Cela étant, il n'est pas dit que la sphère publique, que les responsables politiques que sont les parlementaires ou les membres du Gouvernement, soient en mesure d'assurer le devenir serein d'une telle entreprise. Il reste en effet à démontrer que l'Etat puisse être un actionnaire vigilant : malheureusement, la chronique, l'actualité nous délivrent un enseignement pour le moins préoccupant à cet égard. Je vous indique d'ailleurs, mes chers collègues, que la commission des finances a l'intention de procéder à des investigations sur l'Etat actionnaire.
Quoi qu'il en soit, quelle est l'urgence ?
Permettez-moi de vous faire observer, mes chers collègues, que Vivendi est une société ayant fait l'objet de considération de la part du gouvernement précédent. Celui-ci lui a donné son appui en certaines circonstances, pour tenter de concrétiser son rêve. Par ailleurs, M. Messier était apprécié de nombre d'élus locaux qui organisaient des festivals culturels, et Vivendi Universal menait ici et là des actions de mécénat jugées exemplaires. S'il y avait urgence, peut-être auriez-vous pu vous manifester plus précocement, monsieur Ralite.
M. Jack Ralite. Mais je l'ai fait !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Quelle est aujourd'hui la situation ?
Un nouveau président, Jean-René Fourtou, prend dans l'urgence des décisions lourdes et s'efforce de négocier, dans les meilleures conditions possibles, la vente de maisons d'édition regroupées au sein de Vivendi Universal Publishing. Pensez-vous, monsieur Ralite, que la constitution d'une commission d'enquête serait de nature à faciliter la conclusion de ces transactions difficiles ? Je ne le crois pas, et la majorité des membres de la commission des finances non plus.
Dans ces conditions, nous devons rejeter une initiative quelque peu improvisée, qui mettrait sans doute les pouvoirs publics en porte-à-faux (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Nicole Borvo. C'est excessif !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Nous devons prendre en considération le sort des salariés de ce groupe, celui de toutes les sociétés fédérées par Vivendi Universal. Nous devons également prendre en compte l'épargne des multiples actionnaires, dont certains sont sans doute des hommes et des femmes de condition modeste, qui ont vu leurs actifs boursiers, leurs valeurs mobilières perdre soudainement 90 % de leur valeur.
Mme Nicole Borvo. La « France d'en bas » !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je veux croire, comme M. Claude Belot, que l'essentiel peut être préservé. Il serait donc bien imprudent de notre part de prendre une initiative intempestive qui ne ferait que contrarier l'aboutissement des opérations en cours.
C'est pour cette raison que la commission des finances s'oppose à la constitution d'une commission d'enquête sur le groupe Vivendi Universal. Il s'agit d'un groupe privé, et s'il y a eu des manquements à la loi, les personnes concernées ne manqueront pas de saisir l'autorité compétente, en l'occurrence l'autorité judiciaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, la commission des finances souhaite donc le rejet de la demande de discussion immédiate. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. Je mets aux voix la demande de discussion immédiate.

(La discussion immédiate n'est pas ordonnée.)
Mme Hélène Luc. Seul un orateur « contre » avait le droit de parler !

17

COMMUNICATION RELATIVE À DES TEXTES
SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 11 octobre 2002, l'informant :
- du retrait d'un texte soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution suivant :
N° E 1105. - Proposition de directive du Conseil visant à garantir un minimum d'imposition effective des revenus de l'épargne sous forme d'intérêts à l'intérieur de la Communauté (fiscalité de l'épargne).
Retirée par la Commission le 18 juillet 2001.
- de l'adoption définitive des dix textes soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution suivants :
N° E 1184. - Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, et modifiant les directives 90/619/CEE du Conseil, 97/7/CE et 98/27/CE.
Adoptée le 23 septembre 2002.
N° E 1490. - Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil adoptant un programme d'action communautaire dans le domaine de la santé publique (2001 à 2006) : communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au comité économique et social dans le domaine de la santé publique, et au comité des régions sur la stratégie de la Communauté européenne en matière de santé.
Adoptée le 23 septembre 2002.
N° E 1502. - Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 76/207/CEE relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelle, et les conditions de travail.
Adoptée le 23 septembre 2002.
N° E 1599. - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant les règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à la consommation humaine.
Adoptée le 3 octobre 2002.
N° E 1653. - Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 80/987/CEE du Conseil concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur.
Adoptée le 23 septembre 2002.
N° E 1676. - Proposition de règlement du Conseil instituant, à l'occasion de la réforme de la Commission, des mesures particulières concernant la cessation définitive de fonctions de fonctionnaires de la Commission des Communautés européennes. Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CEE, EURATOM, CECA) n° 260/68 portant fixation des conditions et de la procédure d'application de l'impôt établi au profit des Communautés européennes. Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (EURATOM, CECA, CEE) n° 549/69 déterminant les catégories de fonctionnaires et agents des Communautés européennes auxquels s'appliquent les dispositions de l'article 12, de l'article 13 deuxième alinéa et de l'article 14 du protocole sur les privilèges et immunités des Communautés : communication de la Commission suite à la communication de la Commission du 26 juillet 2000 relative à l'adéquation entre ressources humaines et tâches de l'institution.
Adoption, le 30 septembre 2002, liée à celle du N° E 1988.
N° E 1906. - Proposition de décision du Conseil autorisant les Etats membres à signer et à ratifier, dans l'intérêt de la Communauté européenne, la convention internationale de 2001 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute (convention « Hydrocarbures de soute »).
Adoptée le 19 septembre 2002.
N° E 1974. - Projet de règlement (CE) n° ../.. de la Commission du [...] concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées dans l'industrie automobile.
Adopté le 31 juillet 2002.
N° E 1988. - Proposition modifiée de règlement du Conseil instituant, à l'occasion de la réforme de la Commission, des mesures particulières concernant la cessation définitive de fonctions de fonctionnaires de la Commission des Communautés européennes. Proposition de règlement du Conseil instituant des mesures particulières concernant la cessation définitive de fonctions de fonctionnaires du secrétariat général du Conseil de l'Union européenne. Proposition de règlement du Conseil instituant des mesures particulières concernant la cessation définitive de fonctions de fonctionnaires et d'agents temporaires des groupes politiques du Parlement européen. Proposition modifiée de règlement du Conseil modifiant le règlement (CEE, EURATOM, CECA) n° 260/68 portant fixation des conditions et de la procédure d'application de l'impôt établi au profit des Communautés européennes. Proposition modifiée de règlement du Conseil modifiant le règlement (EURATOM, CECA, CEE) n° 549/69 déterminant les catégories de fonctionnaires et agents des Communautés européennes auxquels s'appliquent les dispositions de l'article 12, de l'article 13 deuxième alinéa et de l'article 14 du protocole sur les privilèges et immunités des Communautés.
Adoptées le 30 septembre 2002.
N° E 2001. - Proposition de décision du Conseil sur la conclusion de la convention entre la Communauté européenne et l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient (UNRWA), concernant l'aide aux réfugiés dans les pays du Proche-Orient pour la période 2002-2005.

Adoptée le 23 septembre 200218

DÉPÔT D'UNE QUESTION ORALE AVEC DÉBAT

M. le président. J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante :
M. Gérard Larcher demande à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer de lui indiquer quel est le bilan pouvant être actuellement dressé de la réorganisation des couloirs aériens en Ile-de-France. La période probatoire de ces modifications arrivant à échéance, il souhaiterait savoir quelle évaluation en est faite. Dans l'hypothèse d'un renoncement au projet de troisième aéroport, la redéfinition des couloirs aériens d'une part, et le développement des plates-formes régionales d'autre part, pourraient-ils constituer une réponse aux attentes des populations survolées ? Il souhaiterait enfin savoir quelles sont aujourd'hui les perspectives de retrait de l'exploitation des avions produisant les nuisances sonores les plus importantes (n° 4).
Conformément aux articles 79, 80 du règlement, cette question orale avec débat été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.

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TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 21, distribué et renvoyé à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.20

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Louis Masson une proposition de loi relative aux professions de foi électorales bilingues dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 20, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. Jean-Louis Masson une proposition de loi tendant à rendre déductible la TVA payée par les entreprises pour l'achat de véhicules électriques ou de moins de trois mètres.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 22, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

21

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 16 octobre 2002, à quinze heures et le soir :
1. Désignation d'un membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, en remplacement de Mme Maryse Bergé-Lavigne, démissionnaire.
2. Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 406, 2001-2002) relatif aux marchés énergétiques.
Rapport (n° 16, 2002-2003) de M. Ladislas Poniatowski, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi (n° 21, 2002-2003).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 21 octobre 2002, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 21 octobre 2002, à dix-sept heures.
Question orale avec débat (n° 1) de M. Josselin de Rohan à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la politique ferroviaire.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mercredi 23 octobre 2002, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires économiques (n° 360, 2001-2002) sur la proposition de loi de M. Jean-François Le Grand relative à l'implantation des éoliennes et la protection de l'environnement (n° 287, 2000-2001).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 23 octobre 2002, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi de M. Bruno Sido et de plusieurs de ses collègues relative à la couverture territoriale en téléphonie mobile de deuxième génération par la mise en oeuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale entre opérateurs (n° 409, 2001-2002).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 23 octobre 2002, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 16 octobre 2002, à zéro heure quarante.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD






ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT ÉTABLI PAR LE SÉNAT DANS SA SÉANCE DU MARDI 15 OCTOBRE 2002 À LA SUITE DES CONCLUSIONS DE LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
Mercredi 16 octobre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
1° Désignation d'un membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne en remplacement de Mme Maryse Bergé-Lavigne, démissionnaire ;
2° Suite du projet de loi relatif aux marchés énergétiques (urgence déclarée) (n° 406, 2001-2002).
Jeudi 17 octobre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 9 h 30 :
1° Suite du projet de loi relatif aux marchés énergétiques ;
A 15 heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance, avant 11 heures) ;

Ordre du jour prioritaire

3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du troisième avenant à l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles et à son protocole annexe (ensemble un échange de lettres) (n° 10, 2002-2003) ;
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'avenant à l'accord du 17 mars 1988, tel que modifié par l'avenant du 19 décembre 1991, entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne en matière de séjour et de travail (n° 9, 2002-2003) ;
(La conférence des présidents a décidé que ces projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune) ;
5° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 22 octobre 2002 :
A 9 h 30 :
1° Dix-huit questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :
- n° 3 de M. Jean-Patrick Courtois à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer (Règles de sécurité applicables aux pêcheurs à la ligne) ;

- n° 4 de M. André Trillard à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Conditions d'exercice du droit de vote) ;

- n° 6 de M. Claude Biwer à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Aides financières de l'Etat en faveur des départements) ;

- n° 12 de M. Philippe Madrelle à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Fonctionnement du système scolaire dans le département de la Gironde) ;

- n° 15 de Mme Brigitte Luypaert à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation (Renforcement de l'attractivité sociale du secteur de l'artisanat) ;

- n° 17 de M. Louis Souvet à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Effets de la loi du 11 mai 1998 par rapport à l'asile territorial) ;

- n° 25 de M. René-Pierre Signé à M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants (Attribution du titre de reconnaissance de la nation aux réfractaires au STO) ;

- n° 29 de M. Dominique Leclerc à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable (Aménagement de la Loire et prévention des inondations) ;

- n° 34 de M. Didier Boulaud à Mme la ministre de la défense (Avenir du détachement de Fourchambault) ;

- n° 36 de M. Jean-Paul Alduy à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Procédure d'extension de périmètre des communautés d'agglomération) ;

- n° 37 de Mme Hélène Luc à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Postes de surveillants et d'aides éducateurs) ;

- n° 39 de Mme Marie-Claude Beaudeau à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Devenir de Vivendi-Environnement) ;

- n° 40 de M. Jean-Louis Masson à Mme la ministre déléguée à l'industrie (Conséquences des affaissements miniers en Lorraine) ;

- n° 41 de M. Joseph Ostermann à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Distillation à domicile) ;

- n° 42 de M. Jacques Oudin à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales (Retrait des insecticides Gaucho et Régent) ;

- n° 45 de M. Georges Mouly à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Développement de soins palliatifs à domicile) ;

- n° 50 de M. Jean-Claude Carle à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable (Réglementation du prix de l'eau) ;

- n° 64 de M. Bernard Joly à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Avenir du commissariat de police de Lure) ;

A 16 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi (n° 21, 2002-2003).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 21 octobre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à trois heures, la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 21 octobre 2002.)

Mercredi 23 octobre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
Suite du projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi.

Jeudi 24 octobre 2002 :

Ordre du jour réservé

A 9 h 30 :
1° Question orale avec débat (n° 1) de M. Josselin de Rohan à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la politique ferroviaire ;
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe. L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance avant 17 heures, le mercredi 23 octobre 2002) ;
A 15 heures :
2° Conclusions de la commission des affaires économiques (n° 360, 2001-2002) sur la proposition de loi de M. Jean-François Le Grand relative à l'implantation des éoliennes et la protection de l'environnement (n° 287, 2000-2001) ;
(La conférence des présidents a décidé de fixer au mercredi 23 octobre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte) ;
3° Conclusion de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi de M. Bruno Sido et de plusieurs de ses collègues relative à la couverture territoriale en téléphonie mobile de deuxième génération par la mise en oeuvre prioritaire de prestations d'itinérance locale entre opérateurs (n° 409, 2001-2002).
(La conférence des présidents a décidé de fixer au mercredi 23 octobre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)

Vendredi 25 octobre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 9 h 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir :
Suite du projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi.
Mardi 29 octobre 2002, à 10 heures, à 16 heures et le soir, mercredi 30 octobre 2002, à 15 heures et le soir, jeudi 31 octobre 2002, à 9 h 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir :

Ordre du jour prioritaire

Sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi constitutionnelle relatif à la décentralisation.
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 28 octobre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à cinq heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 28 octobre 2002.
Les explications de vote et le scrutin public à la tribune sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle interviendront le mardi 5 novembre 2002, à 16 heures.)
Mardi 5 novembre 2002 :
A 9 h 30 :
1° Dix-sept questions orales (L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :
- n° 43 de M. Francis Grignon à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Situation de la brasserie française) ;

- n° 44 de M. Jean-Marie Vanlerenberghe à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Pénurie de praticiens dans la région Nord - Pas-de-Calais) ;

- n° 46 de M. Pierre-Yvon Trémel à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche (Situation des établissements d'enseignement du breton) ;

- n° 47 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales (Avenir de la « prime à l'herbe ») ;

- n° 48 de Mme Danièle Pourtaud à M. le ministre de la culture et de la communication (Préservation du site de la « Ferme de Montsouris ») ;

- n° 49 de M. Philippe Arnaud à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Modalités de calcul des pensions de réversion en cas de cumul avec des avantages personnels de vieillesse) ;

- n° 51 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de la culture et de la communication (Avenir de la haute couture et du prêt-à-porter) ;

- n° 52 de M. Jean-Louis Lorrain à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Assurances et responsabilité civile des hôpitaux) ;

- n° 54 de Mme Josette Durrieu à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable (Traitement des boues des stations d'épuration) ;

- n° 56 de M. Daniel Goulet à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales (Avenir des Pays) ;

- n° 57 de M. Nicolas About à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Déontologie médicale et libertés individuelles) ;

- n° 58 de M. Gérard Longuet à Mme la ministre déléguée à l'industrie (Application du pacte charbonnier) ;

- n° 59 de M. Yves Coquelle à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Respect du principe de liberté syndicale) ;

- n° 60 de M. Jean-Marc Todeschini à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer (Politique en matière de sécurité routière) ;

- n° 61 de Mme Michelle Demessine à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité (Situation des salariés licenciés de l'imprimerie SGIA) ;

- n° 62 de M. Bruno Sido à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Problèmes liés aux installations de distributeurs-échangeurs de seringues) ;

- n° 63 de Mme Hélène Luc à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées (Situation de service diabétologie du CHU Henri-Mondor de Créteil) ;

A 16 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Explications de vote et scrutin public à la tribune sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle relative à la décentralisation ;
3° Sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi pour la sécurité intérieure.
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 4 novembre 2002, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;

- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 4 novembre 2002.)
Mercredi 6 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures :
1° Projet de loi autorisant la ratification de la convention pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international (n° 387, 2001-2002) ;
2° Projet de loi autorisant la ratification du protocole coordonnant la convention internationale de coopération pour la sécurité de la navigation aérienne « Eurocontrol » du 13 décembre 1960 suite aux différentes modifications intervenues (n° 388, 2001-2002) ;

A 16 heures et le soir :
3° Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure.

Jeudi 7 novembre 2002 :

A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure ;
A 15 heures et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;

Ordre du jour prioritaire

3° Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur le rapport du Gouvernement sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, déposé en application de l'article 52 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
(A la suite du Gouvernement interviendront successivement :
- le rapporteur général de la commission des finances [15 minutes] ;

- le rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux de la loi de financement de la sécurité sociale [15 minutes] ;

- le président de la commission des finances [15 minutes] ;

- le président de la commission des affaires sociales [15 minutes] ;

- et les orateurs des groupes.

La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ; l'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 6 novembre 2002.)

Mardi 12 novembre 2002 :

Ordre du jour réservé

A 10 heures :
1° Question orale européenne avec débat (n° QE-2) de M. Hubert Haenel à M. le ministre des affaires étrangères sur les travaux menés au sein de la Convention sur l'avenir de l'Europe ;
(La discussion de cette question orale européenne s'effectuera selon les modalités prévues à l'article 83 ter du règlement) ;
A 16 heures :
2° Question orale avec débat (n° 4) de M. Gérard Larcher à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la réorganisation des couloirs aériens en Ile-de-France.
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le vendredi 8 novembre 2002.)

Mercredi 13 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure.

Jeudi 14 novembre 2002 :

A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure ;
A 15 heures et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;

Ordre du jour prioritaire

3° Suite du projet de loi pour la sécurité intérieure.

Lundi 18 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
Sous réserve de sa transmission, projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 (AN, n° 250).
(Les modalités de discussion de ce projet de loi seront fixées ultérieurement.)

Mardi 19 novembre 2002 :

A 9 h 30 :
1° Questions orales ;
A 16 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.

Mercredi 20 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et, éventuellement, le soir :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003.

Jeudi 21 novembre 2002 :

Ordre du jour prioritaire

A 10 h 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir :
Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances pour 2003 (AN, n° 230).
(Les règles et le calendrier de la discussion budgétaire du jeudi 21 novembre au mardi 10 décembre 2002 seront fixés ultérieurement.)

A N N E X E 1
Questions orales inscrites à l'ordre du jour
de la séance du mardi 22 octobre 2002

N° 3. - M. Jean-Patrick Courtois appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer sur la sécurité des pêcheurs à la ligne à bord de leurs bateaux sur les rivières. Il est recommandé aux pêcheurs à la ligne par Voies navigables de France de porter un gilet de sauvetage lorsqu'ils pêchent à bord de leurs bateaux sur les rivières. Cela paraît compréhensible l'hiver dans la mesure où l'eau des rivières est froide. Une chute par-dessus bord pourrait ainsi leur être fatale. Cependant, l'été, le port du gilet de sauvetage paraît moins justifié. L'eau est chaude et, en cas de chute par-dessus bord, les pêcheurs pourraient facilement regagner les rives à la nage d'autant qu'elles sont relativement étroites dans les rivières. De surcroît, les pêcheurs sont extrêmement gênés, compte tenu de la chaleur, de porter durant toute la journée un gilet de sauvetage. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si les pêcheurs à la ligne doivent obligatoirement porter un gilet de sauvetage lorsqu'ils pêchent à bord de leurs bateaux sur les rivières et, dans l'affirmative, s'ils risquent d'être verbalisés dans l'hypothèse où ils n'en porteraient pas, ou s'il s'agit d'une simple recommandation.
N° 4. - M. André Trillard demande à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales si, au vu de l'importante abstention qui a caractérisé les récents scrutins dans notre pays, il ne lui paraît pas opportun d'assouplir les conditions de participation des citoyens empêchés ou momentanément absents aux différentes consultations électorales, sans pour autant ouvrir la voie à d'éventuelles pratiques frauduleuses. A cet égard, l'observation des dispositifs existant dans certains pays européens peut se révéler instructive, dans la mesure où, à côté du vote par procuration, existent d'autres procédures telles que par exemple le vote anticipé, la mise en place de bureaux temporaires ou le vote par correspondance. Il le prie de bien vouloir lui faire part des réflexions que lui inspirent ces exemples étrangers et de lui indiquer s'il envisage de mettre à profit les deux années à venir sans échéance électorale pour améliorer notre système et inciter nos concitoyens à une participation accrue.
N° 6. - M. Claude Biwer attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les préoccupations exprimées par les conseils généraux et, notamment, celui de la Meuse, à l'égard des transferts de charges insuffisamment compensés opérés par le gouvernement précédent qui risquent de les obliger à augmenter la pression fiscale pesant sur les contribuables locaux : il s'agit, notamment, de la montée en puissance de l'allocation personnalisée d'autonomie, de la généralisation des 35 heures, voire de la réforme des services d'incendie et de secours (SDIS). Il le prie de bien vouloir préciser les mesures que le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre visant à garantir aux départements des ressources suffisantes et évolutives leur permettant de faire face à ce surcroît, sans précédent, de dépenses.
N° 12. - M. Philippe Madrelle appelle l'attention de M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche sur le retard pris par le département de la Gironde, qui se positionne au 97e rang sur 100 en matière de taux d'encadrement ; il souligne les conséquences négatives de l'inadaptation et de l'inadéquation du mode de calcul de la répartition des postes budgétaires entre les départements. Il lui rappelle que les créations d'emplois n'ont fait qu'absorber les augmentations d'effectifs d'élèves et que seule une révision du mode de calcul adaptée à l'évolution démographique permettra d'envisager une modernisation et une dynamisation du système éducatif. Depuis la rentrée scolaire de septembre 2001, plus de 200 remplacements n'ont pas été effectués et les classes se transforment trop souvent en garderie. Le manque de personnel spécialisé dans les réseaux d'aide aux enfants en difficulté aggrave les difficultés de fonctionnement du système éducatif dans le département. En Gironde, 410 postes seraient nécessaires pour atteindre la moyenne nationale ; seulement 47 postes seront créés à la rentrée de septembre 2002. Ce manque de moyens prive la Gironde de nombreuses expérimentations pédagogiques et va à l'encontre de la détermination des enseignants et des chefs d'établissements animés par cette même volonté de réduire les inégalités de départ et d'offrir à chaque élève toutes les chances de réussite. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser de quels moyens significatifs il entend doter ce département afin que la rentrée 2002 puisse s'effectuer dans des conditions optimales.
N° 15. - Mme Brigitte Luypaert demande à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation de bien vouloir préciser les mesures que le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre visant à renforcer l'attractivité sociale du secteur de l'artisanat.
N° 17. - M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les dispositions relatives à l'asile territorial. Ce statut mis en place par la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 permet aux étrangers ne pouvant pas prétendre à l'obtention du titre de réfugié politique de bénéficier d'une procédure complémentaire. Cette complémentarité n'a pas échappé aux nouveaux arrivants, conduisant ainsi à un engorgement des services devant traiter les dossiers, d'où un allongement bien compréhensible des délais ; paradoxalement, durant cette période relativement longue, les intéressés n'ont pas le droit de travailler. Ils font donc, ne pouvant subvenir à leurs besoins, appel aux différents services sociaux, tant départementaux que communaux. Il lui demande quelles mesures il entend prendre pour stopper, d'une part, ce processus inflationniste, d'autre part, permettre aux demandeurs d'asile territorial de subvenir à leurs besoins, enfin, et ce compte tenu des effets pervers du dispositif, s'il est prévu une réforme de ce système.
N° 25. - M. René-Pierre Signé souhaiterait attirer l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants sur la situation des réfractaires au service du travail obligatoire (STO) et leur souhait de se voir attribuer le titre de reconnaissance de la nation (TRN). Celui-ci a été créé par l'article 77 de la loi n° 67-1114 du 21 décembre 1967, pour les militaires de tous grades et de toutes armes ayant pris part aux opérations d'Afrique du Nord, à une époque où ces opérations n'ouvraient pas droit à la carte du combattant. Le TRN a ensuite été attribué aux combattants des conflits antérieurs ou postérieurs par la loi n° 93-7 du 4 janvier 1993 et le décret n° 93-117 du 16 septembre 1993. Dans le respect intégral de la loi du 22 août 1950 caractérisant le réfractariat comme acte de résistance ayant fait courir des risques graves à ceux qui l'accomplirent, ne pourrait-on permettre aux réfractaires ne possédant pas la carte du combattant de bénéficier du titre de reconnaissance de la nation ? Il ne s'agirait pas d'attribuer systématiquement la carte du combattant aux réfractaires, mais d'attribuer le titre de reconnaissance de la nation à l'ensemble des réfractaires. Il s'agirait d'un témoignage renouvelé de reconnaissance morale de la nation à leur égard. Les anciens réfractaires au STO sont des témoins de cette période noire de l'occupation de la France. Les réfractaires ont pris des risques, pendant la Seconde Guerre mondiale, au péril de leur vie. Il lui demande simplement si les réfractaires au travail forcé dans les camps et usines nazis en Allemagne ne méritent pas la reconnaissance de la nation.
N° 29. - M. Dominique Leclerc souhaite, à la suite des inondations dans le Gard, qui ont eu des conséquences pour la population et l'économie locale, attirer l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur l'impérieuse nécessité de prévenir de telles catastrophes naturelles. L'Indre-et-Loire ayant eu à subir à plusieurs reprises de tels événements, il lui serait reconnaissant de bien vouloir lui faire connaître les mesures qu'elle envisage prendre afin d'aménager la Loire et de lui préciser la place qu'elle entend réserver dans cette optique au « plan Loire grandeur nature ».
N° 34. - M. Didier Boulaud attire l'attention de Mme la ministre de la défense sur l'avenir de la 13e base de soutien du matériel de l'armée de terre, région terre Nord-Est (BSMAT), et plus particulièrement sur l'avenir du détachement de Fourchambault. Un accord relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail (ARTT) a été signé le 11 juillet 2001 en accord avec le ministère de la défense. Cet accord précisait que l'état-major de l'armée de terre bénéficierait de 630 embauches d'ouvriers d'État. Selon la répartition effectuée par la direction centrale du matériel de l'armée de terre, 17 ouvriers devaient être affectés à la 13e BSMAT. Le détachement de Fourchambault, qui appartient à cette section, ne se trouve doté que de deux postes alors que ses missions ne cessent de croître. Les besoins réels en dotation de personnel existants au sein du détachement de Fourchambault n'ont pas été pris en considération ; c'est pourquoi il lui demande dans quels délais elle envisage de procéder à une nouvelle affectation ou à une réaffectation de postes d'ouvriers d'Etat prévus par l'accord ARTT.
N° 36. - M. Jean-Paul Alduy attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conditions d'application de l'article L. 5216-10 du code général des collectivités locales. Cet article a institué pour les communautés d'agglomération une procédure d'extension du périmètre arrêtée par le préfet après majorité qualifiée des communes et accord du conseil de communauté. La mise en oeuvre de cette procédure a été limitée par la loi au 13 juillet 2002 (soit 3 ans à compter de la publication de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale). Si un recours est engagé contre l'arrêté d'extension relevant de la procédure précitée, le résultat de ce recours connu après le 13 juillet 2002 imposera, en cas d'annulation de l'arrêté d'extension et d'après les termes actuels de la loi, de recommencer la procédure selon les dispositions de droit commun en cas d'extension, c'est-à-dire l'accord de chaque commune concernée par le nouveau périmètre. Il est donc demandé si, dans la configuration d'un recours abouti après le 13 juillet 2002, il ne serait pas nécessaire de conserver le principe de la majorité qualifiée pour l'extension du périmètre afin d'éviter que le refus d'une commune enclavée interdise tout retour au périmètre initial, objet du recours. Il est à noter que l'obligation d'un périmètre d'un seul tenant et sans enclave concerne les créations de communautés d'agglomération au titre de l'article L. 5216-1 mais n'est pas reprise dans le cadre des extensions de périmètre.
N° 37. - Mme Hélène Luc attire l'attention de M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche sur la suppression de postes de surveillants et l'extinction progressive des aides éducateurs prévues dans le projet de loi de finances pour 2003. Ce sont ainsi 5 600 postes de surveillants et 25 000 postes d'aides éducateurs qui ne seraient pas renouvelés en 2003 alors même que les professionnels de l'éducation nationale s'accordent sur la nécessité de tels emplois, notamment dans des établissements sensibles. Elle estime que le travail de proximité assuré par les surveillants et les aides éducateurs, très apprécié des élèves et professeurs, est indispensable au bon fonctionnement des établissements scolaires tant au niveau pédagogique que de la sécurité. Elle le met en garde contre les conséquences de ces suppressions et la décentralisation de ces postes qui accentueraient les inégalités déjà existantes et contre la remise en cause de l'unicité du service public de l'Etat. Aussi, elle lui demande s'il n'envisage pas de renoncer à ces mesures qui concernent le devenir de ces catégories de personnel.
N° 39. - Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le devenir de Vivendi Environnement, menacé par un rachat pour résorber une partie de l'endettement de Vivendi Universal. Elle lui fait remarquer qu'une telle décision aurait des conséquences dramatiques sur la qualité, la distribution de l'eau, l'assainissement, le traitement des déchets et compromettrait gravement les intérêts de 8 000 communes en France utilisant Vivendi Environnement comme partenaire. Elle lui demande de lui faire connaître les mesures envisagées pour s'opposer au rachat de Vivendi Environnement par un groupe étranger et s'il n'estime pas devenu nécessaire, pour se préserver de tout danger, de procéder à la nationalisation des services de distribution de l'eau.
N° 40. - M. Jean-Louis Masson attire l'attention de Mme la ministre déléguée à l'industrie sur le fait que, tout comme de nombreux parlementaires lorrains, il l'a déjà alertée à de nombreuses reprises au sujet de la gravité des affaissements miniers dans le secteur des anciennes mines de fer de Lorraine. En particulier, il semble que l'administration au sens large du terme a parfois une position attentiste qui la conduit à intervenir seulement après que les affaissements se soient produits. Une telle stratégie ne semble pas répondre aux besoins, ce qui a amené Mme Marie-Jo Zimmermann, député de la Moselle, à lui adresser un courrier rendu public dans la presse et dont l'extrait le plus significatif est le suivant : « Afin d'avoir le temps de définir les solutions les plus adaptées, les pouvoirs publics ont finalement décidé de reporter la mise en oeuvre de l'arrêté préfectoral autorisant l'ennoyage du bassin Nord. Cela suppose cependant que le délai correspondant soit mis à profit pour étudier les mesures préventives à mettre en oeuvre (consolidations localisées, création d'un organisme chargé du pompage...). Or, les élus locaux déplorent à juste titre que l'administration se contente pour l'essentiel d'intervenir là où les affaissements se produisent, sans qu'il y ait une réelle volonté de promouvoir des actions préventives. En outre, une loi votée depuis plusieurs années prévoit la mise en place d'une agence nationale de prévention des risques miniers. Il est pour le moins regrettable que cette agence ne soit toujours pas créée ». Ce courrier résume parfaitement le problème. Cependant, il convient également de souligner que, indépendamment des affaissements sous les immeubles, de graves dégâts sont aussi causés aux réseaux souterrains. Les communes sont alors confrontées à un préjudice d'autant plus préoccupant que l'indemnisation est l'objet de contestations récurrentes au prétexte de la vétusté alléguée des réseaux. La question est donc triple. Il souhaiterait tout d'abord savoir : si les pouvoirs publics ont l'intention d'utiliser le sursis à l'ennoyage du bassin Nord pour engager un plan de consolidation ou, à tout le moins, pour mettre en oeuvre des mesures de sauvegarde ; dans quel délai précis l'agence de prévention des risques miniers sera mise en place ; s'il serait envisageable que, lorsque les réseaux souterrains sont endommagés par les affaissements miniers, l'Etat prenne automatiquement en charge le coût des réparations.
N° 41. - M. Joseph Ostermann attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la fermeture récente de la recette locale des douanes et droits indirects de Villé, dans le Bas-Rhin, ainsi que sur le resserrement des critères relatifs à l'utilisation des alambics personnels pour les personnes qui ne bénéficient pas du privilège des bouilleurs de crus dans le canton. Les élus du canton de Villé s'inquiètent, en effet, tout d'abord, de la fermeture croissante des services de proximité en milieu rural. En outre, ils estiment que la distillation à domicile de sa propre récolte avec son alambic et pour son compte personnel fait partie d'une tradition locale qui permet de valoriser et d'entretenir les vergers du canton. Ils craignent ainsi que le scellement des alambics privés ne démotive les quelques personnes concernées par cette activité et n'entrave très fortement la dynamique d'entretien du paysage que la communauté de communes encourage. Il lui demande donc s'il ne conviendrait pas de procéder à un réexamen de ces deux dossiers dans les meilleurs délais afin de préserver le dynamisme de ce territoire.
N° 42. - M. Jacques Oudin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur le problème de la mortalité des abeilles due à l'utilisation de certains insecticides. Aujourd'hui, il ne subsiste plus aucun doute quant à la culpabilité des deux matières incriminées. Les abeilles sont systématiquement décimées chaque été au moment de la floraison. Les derniers résultats scientifiques présentés en juin 2002 par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) confirment la présence de matière active du Gaucho dans les fleurs de maïs ainsi que la présence dans le nectar de tournesol d'une dose moyenne d'imidaclopride vingt fois supérieure à celle susceptible de faire mourir les abeilles. Le monde agricole peut produire sans ces matières actives. Les enrobages des semences avec les produits Gaucho et Régent vont reprendre dès la fin du mois de novembre prochain. Si l'on veut éviter une sixième année noire pour les apiculteurs, il faut réagir rapidement. En l'absence de soutien économique d'urgence de la part du Gouvernement, les pertes massives de cheptels d'abeilles répétées chaque été depuis cinq ans ont amené de nombreux apiculteurs à cesser leur activité au cours des dernières années, ce qui est catastrophique pour le tissu économique rural. En conséquence, il lui demande s'il entend prendre les décisions immédiates, essentielles à la survie de nos apiculteurs, soit : le retrait immédiat du Gaucho, compte tenu des résultats présentés par des laboratoires scientifiques publics indépendants ; la suspension du Régent, au nom du principe de précaution, et ce pour une durée de trois ans minimum, permettant d'effectuer les contrôles qui s'imposent, après quoi le Gouvernement sera en mesure de remettre le Régent sur le marché, si les récoltes retrouvent un meilleur niveau, ou bien de l'interdire définitivement, si les problèmes perdurent ; la mise en place d'aides économiques d'urgence aux apiculteurs accompagnées d'un plan de relance de l'apiculture et le maintien des mesures collectives agri-environnementales contenues dans les contrats territoriaux d'exploitation (CTE) apicoles, qui viendraient en complément des aides à la reconstitution du cheptel déjà prévues.
N° 45. - M. Georges Mouly appelle l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur la nécessité de pérenniser le réseau « Onco-res », expérimentation mise en place dans son département en partenariat entre la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze et le service oncologie du centre hospitalier de Brive pour développer les soins palliatifs à domicile. L'expérimentation arrive à son terme le 31 décembre 2002 et le financement du réseau n'est plus assuré alors que le bilan est particulièrement positif. Il lui demande donc s'il envisage d'apporter une réponse qui permettrait d'installer le réseau définitivement.
N° 50. - M. Jean-Claude Carle attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur la réglementation actuelle fixant le prix de l'eau. En effet, la facturation est fonction de la consommation effectuée. Cette mesure, basée sur le principe d'égalité de tous les usagers, s'avère particulièrement inéquitable dans nombre de communes touristiques. Ces dernières doivent faire face à des investissements surdimensionnés pour répondre aux besoins des résidences secondaires. Compte tenu de la réglementation en vigueur, ce sont donc les habitants permanents qui assument la plus grosse partie de la charge de ces surplus d'investissements. Plusieurs communes, dans un souci d'équité, ont mis en place une part fixe. Elles se sont vu débouter par les tribunaux compétents. Il lui demande quelles mesures spécifiques elle compte prendre vis-à-vis de ces communes à l'heure où celles-ci doivent faire face à des investissements énormes, comme la reconstruction de leur station d'épuration (STEP). Ces mesures sont urgentes et indispensables, faute de quoi les communes seront dans l'incapacité de réaliser ces mises aux normes.
N° 64. - M. Bernard Joly attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conséquences qui pourraient résulter de la réorganisation des forces de police, de gendarmerie et de gendarmerie mobile relativement au maintien du commissariat de police de la commune de Lure, sous-préfecture de la Haute-Saône. Afin de donner aux forces de sécurité intérieure les moyens nécessaires pour lutter plus efficacement contre la délinquance, il est prévu une réforme bâtie sur un état des lieux et une procédure de concertation dont les préfets ont été chargés au cours de l'été. Le calendrier annoncé prévoyait les arbitrages pour fin octobre. L'unité luronne, outre les activités classiques relatives à la sécurité et à la proximité, assume celle de brigade de recherches mais assure aussi un nombre important de missions pour le tribunal d'instance et de grande instance. La moitié des faits traités est directement liée au fonctionnement de cette juridiction. Après le repli de la présence de l'Etat dont les compensations n'ont pas été au niveau des engagements annoncés ces dernières années, la population de cette cité haut-saônoise comme les fonctionnaires de police s'interrogent sur l'avenir de l'un des plus petits commissariats de France dont la suppression induirait à plus ou moins longue échéance, vraisemblablement, celle du tribunal et de la sous-préfecture. Il lui demande de bien vouloir lui préciser quelle approche a été faite de la situation évoquée et, en conséquence, quelle décision en a résulté.

A N N E X E 2
Question orale avec débat inscrite à l'ordre du jour
de la séance du jeudi 24 octobre 2002

N° 1. - M. Josselin de Rohan demande à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer de bien vouloir lui exposer la politique qu'il entend mener en matière ferroviaire et, plus particulièrement, en ce qui concerne la réalisation des lignes de TGV.

A N N E X E 3
Questions orales inscrites à l'ordre du jour
de la séance du mardi 5 novembre 2002

N° 43. - M. Francis Grignon appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la situation des brasseurs de France. Les brasseurs de France s'inquiètent d'une nouvelle augmentation des accises qui remettrait en cause toute la filière brassicole en France, notamment en Alsace qui réalise près de 60 % de la production nationale de bière. De surcroît, la perspective d'une baisse de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les boissons non alcoolisées en 2003 augmente leurs inquiétudes. Si la taxation peut être considérée comme un instrument de protection de santé publique, il convient qu'elle soit ciblée pour être efficace. Or, la bière est une boisson modérément alcoolisée. Sa consommation en France diminue régulièrement, alors que les spiritueux, fortement alcoolisés et majoritairement importés, ont vu leur consommation continuer à augmenter considérablement. Une diminution de la consommation de bière induit une baisse de la production et compromet à terme les 160 800 emplois directs et indirects qui dépendent de la filière brassicole. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer quelles mesures le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre afin de préserver cette filière.
N° 44. - M. Jean-Marie Vanlerenberghe appelle l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur le grave déficit en matière de personnels médicaux de la région Nord - Pas-de-Calais. En effet, 300 postes de praticiens sont actuellement vacants. Considérant la circulaire du 26 juillet 2002 du ministère de la santé, il lui indique que la région Nord - Pas-de-Calais, gravement sous-dotée en praticiens, n'obtiendra que le tiers des moyens supplémentaires alloués à la région Ile-de-France ! En conséquence, certains services hospitaliers, voire des hôpitaux, risquent de fermer, ce qui ne pourra qu'aggraver la prestation sanitaire de la région. Il lui rappelle aussi que, depuis 1997, la région Nord - Pas-de-Calais a bénéficié d'un rattrapage budgétaire en vue d'améliorer sa production de soins et de faire évoluer positivement certains indicateurs de santé. Il lui demande donc si le Gouvernement a prévu des moyens budgétaires suffisants pour la région dans le cadre du budget 2003.
N° 46. - M. Pierre-Yvon Trémel attire l'attention de M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche sur les difficultés rencontrées lors de cette rentrée 2002 par les établissements d'enseignement de la langue bretonne. Il s'avère en effet que de nombreuses modalités prévues par la convention additionnelle au contrat de plan Etat-région 2002-2006 sur le bilinguisme français-breton n'ont pas abouti à des traductions concrètes dans l'organisation de cette rentrée scolaire. Cette situation est d'autant plus regrettable que les élus, les enseignants, les associations et les parents exprimaient depuis de nombreuses années des attentes fortes dans le domaine de l'enseignement du breton. Aujourd'hui, leur déception est évidemment très grande devant le peu d'avancées concrètes de la filière. Il est nécessaire que les outils permettant la structuration du dispositif puissent se mettre rapidement en place, qu'il s'agisse de la mise en place du conseil académique des langues et cultures régionales, de l'élaboration de la carte académique et des cartes départementales des sites bilingues, ou encore des supports d'information des familles. En effet, en l'absence de ces structures et d'une réelle planification des moyens à mettre en oeuvre, les objectifs de l'avenant au contrat de plan seront difficiles à atteindre, et la concertation avec les partenaires rendue plus délicate. Un inventaire de la situation des établissements d'enseignement et de formation à la rentrée 2002 a été réalisé par la commission éducation du conseil culturel de Bretagne. De nombreux engagements n'ayant pas été tenus, les difficultés sont aujourd'hui réelles dans de nombreuses écoles. Malgré la complexité de ce dossier, en partie due à la décision du Conseil d'Etat relative à Diwan, des décisions opérationnelles doivent être prises rapidement. Aussi, il lui demande de bien vouloir l'informer de l'analyse qu'il porte sur ce dossier et lui indiquer les orientations qu'il entend prendre en faveur de l'enseignement des langues régionales.
N° 47. - M. René-Pierre Signé souhaiterait interroger M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur la prime au maintien des systèmes d'élevage extensif (PMSEE), plus communément appelée « prime à l'herbe ». Cette aide est destinée aux éleveurs herbagers qui s'engagent à maintenir durant cinq ans leur système d'élevage extensif. Cet engagement contractuel entraîne une contrepartie financière, sous la forme d'une prime à l'hectare. Ce dispositif vient à échéance, ce qui ne manque pas d'inquiéter les éleveurs de bovins de la Nièvre. Il était prévu que la prime à l'herbe disparaîtrait au profit des aides dispensées dans le cadre des contrats territoriaux d'exploitation. Or ces contrats territoriaux sont suspendus depuis le 6 août et on ne sait s'ils seront reconduits. En conséquence, se pose la question du maintien de cette prime, encourageante et vitale pour l'élevage extensif du bassin allaitant, qui est le plus fragile. En outre, il souhaiterait connaître les modalités de mise en oeuvre et le montant d'un nouveau dispositif annoncé par le Gouvernement : la prime herbagère agri-environnementale (PHAE).
N° 48. - Mme Danièle Pourtaud attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur l'avenir du site du 26-30, rue de la Tombe-Issoire, dans le XIVe arrondissement, dit « Ferme Montsouris ». Ce site de plus de 2000 mètres carrés à deux pas de la place Denfert-Rochereau héberge l'un des derniers vestiges du passé agricole de Paris, une ferme de Paris datant du xixe siècle, avec en sous-sol un cellier voûté devenu chapelle. Le terrain abrite aussi les derniers restes d'un aqueduc gallo-romain et, vingt mètres plus bas, les carrières de Port-Mahon datant du xve siècle, classées en 1994 monument historique. Depuis bientôt un an, 29 associations réunies en collectif luttent pour que le site ne soit pas transformé en appartements de standing et en parkings. L'archevêché, propriétaire du terrain à travers une société civile immobilière, est en effet en négociation avec des promoteurs immobiliers. Si l'opération est faite, ce sont 70 piliers de béton qui seront coulés dans un sol classé. Elle souhaiterait savoir ce qu'il est en mesure de faire pour préserver ce patrimoine inestimable de l'histoire de Paris.
N° 49. - M. Philippe Arnaud attire l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur les modalités de liquidation en usage pour les pensions de réversion en cas de cumul avec des avantages personnels de vieillesse. Il lui rappelle en effet que l'interprétation selon laquelle, en cas de pluralité de régimes débiteurs d'un droit à réversion, la limite forfaitaire doit être divisée par le nombre de ces régimes a été, à plusieurs reprises depuis cinq ans, remise en cause par la Cour de cassation. Or, en dépit de cette jurisprudence constante, cette pratique de la division de la limite forfaitaire par le nombre de régimes débiteurs d'un avantage de réversion continue à être systématiquement appliquée ; ce n'est que si l'assuré exerce son droit de recours, à condition bien entendu qu'il connaisse la position de la Cour de cassation, qu'il pourra bénéficier du mode de calcul plus favorable édicté par cette juridiction. Une telle situation, parfaitement illégale, ne pouvant perdurer, il lui demande si le Gouvernement entend mettre fin à de tels errements afin que les règles de calcul rappelées par la Cour de cassation en la matière soient respectées.
N° 51. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur la situation des salariés de Cerruti et celle de la haute couture et du prêt-à-porter en France. Sacrifiés sur l'autel de la productivité et de la rentabilité financière, ils se battent pour défendre leurs droits et leur dignité ainsi que pour préserver l'avenir de la haute couture et du prêt-à-porter à Paris et ailleurs. La haute couture et le prêt-à-porter sont des oeuvres culturelles qui font partie de l'exception culturelle et contribuent grandement au prestige de la France et de sa capitale dans le monde. Les faire passer sous les fourches caudines des logiques de rentabilité financière ne peut qu'avoir des conséquences désastreuses du point de vue économique, social et culturel. L'Etat doit au contraire affirmer la dimension culturelle de la mode en tant que patrimoine vivant qu'il convient d'enrichir et, dans une conjoncture difficile, de sauvegarder. Dans ce cadre, il devrait contribuer à relancer une véritable politique d'apprentissage, des transmissions de savoir et des compétences dans ce secteur, ce qui constituerait une des garanties pour assurer l'avenir de cette branche prestigieuse. Par ailleurs, ne s'agirait-il pas de créer un fonds d'aide à la création, comme cela existe pour le cinéma et la chanson ? Car si aujourd'hui il y a encore un cinéma d'auteur en France, on le doit à ce système. Peut-on faire moins pour la création dans la haute couture et dans la mode ? Il serait également souhaitable que la tutelle gouvernementale de la mode en tant qu'industrie culturelle se rééquilibre en faveur du ministère de la culture. Ce rééquilibrage constituerait un premier pas vers la véritable reconnaissance que celle-ci est partie intégrante de l'exception culturelle. Pour toutes ces raisons, elle lui demande que le Gouvernement accueille favorablement la proposition de créer une commission d'enquête parlementaire sur l'activité haute couture et prêt-à-porter parisienne et nationale. Dans l'immédiat, toutes les mesures pour sauver l'emploi et l'avenir de cette branche doivent être prises.
N° 52. - M. Jean-Louis Lorrain appelle l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur les difficultés rencontrées par les cliniques et les hôpitaux du secteur privé en raison du retrait des compagnies d'assurances du marché de la responsabilité civile médicale. Il lui rappelle, en effet, que la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 sur les droits des malades et la qualité du système de santé, notamment l'article relatif aux infections nosocomiales, provoque une inquiétude grandissante de la part des sociétés d'assurances concernant la couverture des risques liés à l'activité médicale. Il lui indique que, selon une enquête menée en juillet dernier par la Fédération de l'hospitalisation privée, 700 à 900 établissements privés risquent de se retrouver sans assurance d'ici à la fin de cette année et que cela va entraîner de fait leur fermeture. Il lui demande, en conséquence, si des discussions sont actuellement en cours entre son ministère et les représentants des assureurs et s'il envisage de saisir le Parlement d'une modification de cette loi.
N° 54. - Mme Josette Durrieu attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur la législation en matière de traitement des boues et des stations d'épuration. En effet, la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale permet de scinder en deux la compétence du service public d'élimination des déchets ménagers et assimilés. Ainsi, il existe, d'une part, la collecte dont les déchetteries font partie et, d'autre part, le traitement qui comprend le transfert, le transport, le tri, la valorisation énergétique et/ou la mise en décharge de déchets ultimes. Ce partage des compétences permet de mettre en oeuvre des organisations de traitement mieux à même de maîtriser les coûts d'équipement et de neutraliser les coûts de fonctionnement. Or, au sens de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux, les boues de stations d'épuration constituent un déchet. Leur traitement s'inscrivant dans le cadre du service public d'assainissement est lié à l'exploitation des stations d'épuration. Les producteurs de boues sont donc responsables de leur élimination. En conséquence, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer si elle entend faire évoluer la loi, afin de faire bénéficier les services public d'assainissement des mêmes possibilités d'organisation que celles prévues pour le service public d'élimination des déchets ménagers et assimilés.
N° 56. - M. Daniel Goulet souhaite interroger M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur l'avenir des PAYS. Cette entité s'est développée, en France, avec les lois n° 95-115 du 4 janvier 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire et n° 99-553 du 25 juin 1999. Très souvent, cette structure s'est purement et simplement superposée à celles bien nombreuses qui existent déjà, contribuant par là même à une croissance exponentielle des frais de fonctionnement. Les élus locaux s'interrogent sur le bien-fondé de cette structure et certains souhaitent que les lois concernant les PAYS soient remises en cause par la majorité nouvelle. Il lui demande quelle est sa position sur ce sujet et quel avenir il destine aux PAYS, et notamment à ceux dont le fonctionnement est le moins opérationnel.
N° 57. - M. Nicolas About attire l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur l'ordonnance du tribunal administratif de Lille en date du 25 août 2002 faisant injonction au centre hospitalier régional hôtel-Dieu de Valenciennes de ne pas procéder à l'administration forcée d'une transfusion sanguine à une femme témoin de Jéhovah. La façon dont la presse a rendu compte de cette décision et l'interprétation pour le moins hâtive qui en a été donnée ont suscité une vive émotion parmi les professionnels de santé et, semble-t-il, dans l'opinion publique. Les articles de presse ont en effet qualifié cette décision du tribunal administratif de « revirement jurisprudentiel » dans la mesure où elle privilégiait, disait-on, le respect absolu de la volonté du patient sur les obligations déontologiques du médecin. En réalité, cette interprétation ne résiste pas à l'examen de la décision du tribunal administratif, laquelle s'inscrit au contraire dans le droit-fil de la jurisprudence administrative en la matière. L'ordonnance considère en effet que l'absence de respect de la volonté de la patiente par l'hôpital constitue une atteinte « grave et manifestement illégale (aux) libertés fondamentales » dans la mesure où il n'est pas allégué par l'hôpital que « le refus de respecter la volonté de la patiente serait rendu nécessaire du fait d'un danger immédiat pour sa vie ». Cette ordonnance a de fait été rendue dans un contexte très particulier marqué par l'absence des représentants de l'hôpital à l'audience. Dans ce contexte de grande confusion, il apparaît aujourd'hui indispensable de dire le droit, de dissiper les malentendus et de rassurer pleinement les professionnels de santé. C'est pourquoi il lui demande de confirmer que cette décision de justice ne modifie en rien le droit positif, lequel prévoit que lorsque le pronostic vital d'un patient est en jeu et lorsque l'urgence commande de prendre une décision, il ne saurait être reproché à un médecin de pratiquer les actes indispensables à la survie du patient, au besoin contre la volonté de ce dernier.
N° 58. - M. Gérard Longuet rappelle à Mme la ministre déléguée à l'industrie qu'en octobre 1994 Charbonnages de France et les organisations syndicales des salariés concluaient, sous l'autorité du ministre de l'industrie, un accord d'ensemble sur la cessation d'activité programmée pour 2005, l'ensemble de ces mesures constituant le Pacte charbonnier. Alors que l'échéance de cessation d'activité se rapproche, l'application de ce pacte mérite d'être précisée, dans le domaine de l'énergie électrique principalement.
N° 59. - M. Yves Coquelle rappelle à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité que, dans le Pas-de-Calais, département massivement touché par la crise économique, le taux de chômage, dans de nombreuses communes de l'ex-bassin minier, dépasse 25 % de la population active. Il souligne que depuis quelques mois le paysage s'assombrit un peu plus avec des annonces en cascade de fermetures d'usines : Sollac-Biache : plus de 400 emplois supprimés ; la cockerie de Drocourt : 450 suppressions d'emplois directes, sans compter les très nombreux emplois induits ; Metaleurop : plus de 500 suppressions en attendant une inéluctable liquidation qui privera d'emploi plus de 1 000 personnes ; Alcatel : à Douvrin, moins 450 emplois ; Samsonite, à Hénin-Beaumont, près de 200 postes. A ces suppressions d'emplois s'ajoutent de très nombreuses fermetures de sites effectives ou envisagées à très court terme, Inergy à Grenay, l'entreprise Mossley, Testut à Béthune, LU à Calais, Solectron à Longuenesse. Cette liste est malheureusement bien loin d'être exhaustive, la situation est d'autant plus inquiétante qu'aucune création d'emploi sérieuse et durable n'est envisagée dans le secteur, or seule la création de très nombreux emplois pourra être une amorce de solution aux difficultés socioéconomiques que rencontre ce département. Les ouvriers, les salariés, face à cette situation dramatique, se battent pour préserver leur outil de travail. Il est concevable et compréhensible que, parfois, poussés par l'énergie du désespoir, leurs luttes soient fortes et déterminées. Or, de très nombreux délégués syndicaux sont actuellement en procédure de licenciement pour fautes lourdes pour avoir défendu leur emploi et celui de leurs camarades. Il lui rappelle que, à défaut de faire respecter le fondamental principe du droit au travail, il doit faire respecter la simple, mais tout aussi fondamentale, liberté syndicale aujourd'hui menacée. Il est du devoir du Gouvernement qui se réfère souvent à la France « d'en bas » de montrer dans ses actes et son action que ses propos correspondent à sa politique. Il est de son devoir de ne pas encourager la politique antisociale du patronat. Il lui demande quelles sont les mesures concrètes qu'il va prendre pour que cessent ces attaques contre les libertés syndicales.
N° 60. - M. Jean-Marc Todeschini attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur les problèmes de la sécurité routière et notamment de l'adéquation entre les moyens et les actions. En effet, le budget de la sécurité routière n'enregistre qu'une augmentation de 10 millions d'euros. Il s'interroge pour savoir comment le Gouvernement peut espérer améliorer significativement la situation sur les routes avec aussi peu de moyens : équiper les forces de l'ordre avec des éthylotests et des éthylomètres ; vérifier les sorties des discothèques, notamment les week-ends ; réaliser l'aménagement des points noirs sur notre réseau routier ; assurer une meilleure formation des conducteurs ; mettre en oeuvre un plan d'aide du Gouvernement conséquent pour les communes, notamment pour celles qui voient des nationales ou des départementales traverser leurs territoires et qui font de ces axes des voies mortelles pour leurs habitants. Il rappelle qu'il est malheuresement bien placé pour évoquer ce sujet, avec le drame qui a frappé cet été la commune de Talange en Moselle, dont il est l'un des élus. Il souhaiterait aussi que soient renforcés les dispositifs juridiques à l'égard des propriétaires qui prêtent des voitures mal entretenues et non assurées. Il souhaiterait que tout soit mis en oeuvre pour qu'enfin la vitesse dans notre pays ne soit plus considérée comme l'un des symboles de l'indépendance du conducteur. Pour conclure, il souhaiterait savoir si les actes suivront vraiment les paroles et ne seront pas contredites. Il souhaiterait connaître les dispositions que compte prendre le ministre sur ce dossier sur lequel le Gouvernement et les élus sont, tous ensemble, redevables de leur action devant les Français, devant chaque mère, chaque père, chaque fille et fils et chaque grand-mère et grand-père.
N° 61. - Mme Michelle Demessine souhaite attirer l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur la situation dans laquelle se trouvent les 150 salariés de l'imprimerie SCIA de La Chapelle-d'Armentières, dans le Nord, licenciés pour motifs économiques à la suite de la fermeture de leur entreprise et ne pouvant pas bénéficier du doublement de leur prime de licenciement prévu par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002.
N° 62. - M. Bruno Sido appelle l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur les problèmes liés aux installations de distributeurs-échangeurs de seringues. La mise en place de ces appareils soulève deux interrogations principales par rapport à leur efficacité et à la sécurité. Concernant leur efficacité, en terme de santé publique, y a-t-il aujourd'hui des évaluations officielles et précises attestant d'une baisse des cas d'hépatite B ou de HIV, liée à leur installation ? N'est-il pas plus dangereux, pour la population des toxicomanes qui y a recours, de les laisser livrés à eux-mêmes sans aucun encadrement, contrairement à celui qu'ils peuvent trouver dans les points d'accueil-écoute et alors même que l'objectif d'engager une démarche de désintoxication ne doit jamais être négligée. Ces appareils ne peuvent-ils pas être considérés comme une tolérance de la drogue, voire une incitation pour les jeunes ? En termes de sécurité, ne constituent-ils pas un risque de voir s'installer des zones de non-droit, préjudiciables tant pour les intéressés que pour le reste de la population ? Récemment un incident dramatique s'est produit à Chaumont, où la personne chargée d'approvisionner le distributeur a été agressée et criblée de coups de piqûres de seringues usagées. Elle est actuellement sous trithérapie. Il souhaiterait donc connaître sa position sur ce sujet, et lui demande si ces expériences ne lui paraissent pas aller dans le sens inverse de la politique de prévention qu'il a engagée concomitamment avec les ministères de l'éducation nationale et de l'intérieur.
N° 63. - Mme Hélène Luc souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur les conséquences dramatiques créées par la suppression du service de diabétologie au CHU Henri-Mondor de Créteil qui était le centre de référence du sud-est francilien. Réorganisé en unité de diabétologie rattaché au service de médecine interne, ce service a perdu sa vocation universitaire de recherche. Par ailleurs, cette suppression a entraîné une forte réduction de la capacité de soins pour les malades diabétiques de la région Ile-de-France qui voient leurs conditions de prise en charge se dégrader. Alors que le diabète touche en France près de 2 millions de personnes et qu'il est en constante progression, il s'avère absolument nécessaire d'améliorer la prise en charge et le suivi des diabétiques pour limiter les souffrances et endiguer l'augmentation des hospitalisations qui dénote souvent une prise en charge trop tardive. C'est pourquoi elle lui demande quelles mesures il compte prendre pour que soit recréé en urgence un pôle hospitalo-universitaire de référence au CHU Henri-Mondor.

ORDRE DU JOUR PRÉVISIONNEL
(Application de l'article 29, alinéa 3 bis, du règlement)

En application de l'article 29, alinéa 3 bis, du règlement du Sénat, M. le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du Gouvernement, a présenté à la conférence des présidents du mardi 15 octobre 2002 la communication suivante :
Monsieur le président,
En application de l'article 29, alinéa 3 bis, du règlement du Sénat, j'ai l'honneur de vous communiquer les grandes lignes de l'ordre du jour prioritaire jusqu'à la fin du mois de février 2003.
Conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 15 décembre 1995, ce calendrier prévisionnel revêt un caractère indicatif qui ne saurait lier le Gouvernement dans l'exercice des prérogatives mentionnées à l'article 48, alinéa 1er, de la Constitution.
Deuxième quinzaine d'octobre :
- projet de loi relatif aux marchés énergétiques ;

- projet de loi autorisant l'approbation du 3e avenant à l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs famille et à son protocole annexe ;

- projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à l'accord du 17 mars 1988, tel que modifié par l'avenant du 19 décembre 1991, entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne en matière de séjour et de travail ;

- projet de loi relatif aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi ;

- projet de loi constitutionnelle relatif à la décentralisation.

Première quinzaine de novembre :
- projet de loi pour la sécurité intérieure ;

- projet de loi autorisant la ratification de la convention pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international ;

- projet de loi autorisant la ratification du protocole coordonnant la convention internationale de coopération pour la sécurité de la navigation aérienne « EUROCONTROL » du 13 décembre 1960 suite aux différentes modifications intervenues ;

- débat sur la rapport du Gouvernement sur les prélèvements obligatoires et leur évolution.

Deuxième quinzaine de novembre :
- projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 ;

- projet de loi de finances pour 2003.

Première quinzaine de décembre :
- projet de loi de finances pour 2003 ;

- projet de loi constitutionnelle sur le mandat d'arrêt européen ;

- projet de loi constitutionnelle relatif à la décentralisation (deuxième lecture).

Deuxième quinzaine de décembre :
- projet de loi de finances rectificative pour 2002 ;

- projet de loi relatif à la négociation collective et aux procédures de licenciement économique ;

- projet de loi relatif au temps de travail, aux salaires et au développement de l'emploi (deuxième lecture) ;

- lecture des conclusion de la commission mixte paritaire sur le projet de loi modifiant la loi du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires, mandataires judiciaires et à la liquidation des entreprises et experts en diagnostic d'entreprise ;

- navettes diverses.

Deuxième quinzaine de janvier :
- projet de loi programmation militaire pour les années 2003 à 2008 ;

- projet de loi relatif à la zone de protection écologique en Méditerranée ;

- projet de loi organique relatif aux juges de proximité (deuxième lecture) ;

- projet de loi sur les risques ;

- projet de loi relatif à la bioéthique.

Première quinzaine de février :
- projet de loi sur la sécurité financière ;

- projet de loi relatif à la sécurité dans les ascenseurs ;

- projet de loi pour la sécurité intérieure (deuxième lecture).

Dernière semaine de février :
- projet de loi sur la création d'entreprises ;

- projet de loi relatif à la protection de l'environnement en Antarctique.

Pourraient également être examinés par le Sénat, en janvier et février 2003, les projets de loi portant ratification des ordonnances :
- n° 2000-549 du 15 juin 2000 relative à la partie législative du code de l'éducation ;

- n° 2000-550 du 15 juin 2000 relative aux parties législatives des livres VII et IX et à la mise à jour des parties législatives des livres Ier, III et VI du code rural ;

- n° 2000-1223 du 14 décembre 2000 relative à la partie législative du code monétaire et financier ;

- n° 2000-387 du 4 mai 2000 relative à la partie législative du code de justice administrative ;

- n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce.

Ce programme de travail prévisionnel n'inclut pas l'ensemble des navettes sur les textes de loi. Enfin, divers projets de loi autorisant l'approbation d'accords et conventions internationales ainsi que des débats et d'éventuelles propositions de loi pourront également être inscrits à l'ordre du jour prioritaire du Sénat.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le président, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Signé : Jean-François Copé

ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES

Comité consultatif pour la gestion du Fonds national pour le développement des adductions d'eau :
Lors de sa séance du 15 octobre 2002, le Sénat a désigné M. Yves Detraigne pour siéger au comité consultatif pour la gestion du Fonds national pour le développement des adductions d'eau, en remplacement de M. Louis Moinard, démissionnaire.
Conseil national de l'habitat :
Lors de sa séance du 15 octobre 2002, le Sénat a désigné M. Pierre Hérisson pour siéger au Conseil national de l'habitat, en remplacement de M. Louis Moinard, démissionnaire.
Conseil d'administration de la Cité des sciences et de l'industrie :
Lors de sa séance du 15 octobre 2002, le Sénat a désigné M. Jean-Paul Alduy pour siéger au conseil d'administration de la Cité des sciences et de l'industrie, en remplacement de M. Pierre André, démissionnaire.

NOMINATION DU BUREAU

Commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer les comptes :
Dans sa séance du mardi 15 octobre 2002, la commission a nommé :
Président : M. Jacques Oudin ;
Vice-président : M. François Trucy ;
Secrétaire-rapporteur : M. Marc Massion.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Situation des salariés licenciés de l'imprimerie SCIA

61. - 14 octobre 2002. - Mme Michelle Demessine souhaite attirer l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur la situation dans laquelle se trouvent les 150 salariés de l'imprimerie SCIA de la Chapelle d'Armentières, dans le Nord, licenciés pour motifs économiques à la suite de la fermeture de leur entreprise et ne pouvant pas bénéficier du doublement de leur prime de licenciement prévu par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002.

Problèmes liés aux installations
de distributeurs-échangeurs de seringues

62. - 14 octobre 2002. - M. Bruno Sido appelle l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur les problèmes liés aux installations de distributeurs-échangeurs de seringues. La mise en place de ces appareils soulève deux interrogations principales par rapport à leur efficacité et à la sécurité. Concernant leur efficacité, en termes de santé publique, y a-t-il aujourd'hui des évaluations officielles et précises attestant d'une baisse des cas d'hépatite B ou de HIV, liée à leur installation ? N'est-il pas plus dangereux pour la population des toxicomanes qui y a recours de les laisser livrés à eux-mêmes sans aucun encadrement, contrairement à celui qu'ils peuvent trouver dans les points d'accueil-écoute, et alors même que l'objectif d'engager une démarche de désintoxication ne doit jamais être négligée. Ces appareils ne peuvent-ils pas être considérés comme une tolérance de la drogue, voire une incitation pour les jeunes ? En termes de sécurité, ne constituent-ils pas un risque de voir s'installer des zones de non-droit, préjudiciables tant pour les intéressés que pour le reste de la population ? Récemment, un incident dramatique s'est produit à Chaumont, où la personne chargée d'approvisionner le distributeur a été agressée et criblée de coups de piqûres de seringues usagées. Elle est actuellement sous trithérapie. Il souhaiterait donc connaître sa position sur ce sujet, et lui demande si ces expériences ne lui paraissent pas aller dans le sens inverse de la politique de prévention qu'il a engagée concomitamment avec les ministères de l'éducation nationale et de l'intérieur.

Situation du service de diabétologie
du CHU Henri-Mondor de Créteil

63. - 14 octobre 2002. - Mme Hélène Luc souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées sur les conséquences dramatiques créées par la suppression du service de diabétologie au CHU Henri-Mondor de Créteil qui était le centre de référence du sud-est francilien. Réorganisé en unité de diabétologie rattaché au service de médecine interne, ce service a perdu sa vocation universitaire de recherche. Par ailleurs, cette suppression a entraîné une forte réduction de la capacité de soins pour les malades diabétiques de la région Ile-de-France qui voient leurs conditions de prise en charge se dégrader. Alors que le diabète touche en France près de 2 millions de personnes et qu'il est en constante progression, il s'avère absolument nécessaire d'améliorer la prise en charge et le suivi des diabétiques pour limiter les souffrances et endiguer l'augmentation des hospitalisations qui dénote souvent une prise en charge trop tardive. C'est pourquoi elle lui demande quelles mesures il compte prendre pour que soit recréé en urgence un pôle hospitalo-universitaire de référence au CHU Henri-Mondor.

Avenir du commissariat de police de Lure

64. - 15 octobre 2002. - M. Bernard Joly attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conséquences qui pourraient résulter de la réorganisation des forces de police, de gendarmerie et de gendarmerie mobile relativement au maintien du commissariat de police de la commune de Lure, sous-préfecture de la Haute-Saône. Afin de donner aux forces de sécurité intérieure les moyens nécessaires pour lutter plus efficacement contre la délinquance, il est prévu une réforme bâtie sur un état des lieux et une procédure de concertation dont les préfets ont été chargés au cours de l'été. Le calendrier annoncé prévoyait les arbitrages pour fin octobre. L'unité luronne, outre les activités classiques relatives à la sécurité et à la proximité, assume celle de brigade de recherches mais assure aussi un nombre important de missions pour le tribunal d'instance et de grande instance. La moitié des faits traités est directement liée au fonctionnement de cette juridiction. Après le repli de la présence de l'Etat, dont les compensations n'ont pas été au niveau des engagements annoncés ces dernières années, la population de cette cité haut-saônoise comme les fonctionnaires de police s'interrogent sur l'avenir de l'un des plus petits commissariats de France dont la suppression induirait à plus ou moins longue échéance, vraisemblablement, celle du tribunal et de la sous-préfecture. Il lui demande de bien vouloir lui préciser quelle approche a été faite de la situation évoquée et, en conséquence, quelle décision en a résulté.



ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mardi 15 octobre 2002


SCRUTIN (n° 4)



sur la motion présentée par Mme Marie-France Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen tendant à opposer la question préalable au projet de loi relatif aux marchés énergétiques (urgence déclarée).


Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages exprimés : 223
Pour : 23
Contre : 200

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 23.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (21) :

Contre : 13.
Abstentions : 8. _ MM. Nicolas Alfonsi, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, François Fortassin et Dominique Larifla.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :
Contre : 93.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (82) :

Abstentions : 82.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (54) :

Contre : 53.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Daniel Hoeffel, qui présidait la séance.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (41) :

Contre : 41.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (6) :

N'ont pas pris part au vote : 6.

Ont voté pour


François Autain
Jean-Yves Autexier
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Nicole Borvo
Robert Bret
Yves Coquelle
Annie David
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Gérard Le Cam
Paul Loridant
Hélène Luc
Josiane Mathon
Roland Muzeau
Jack Ralite
Ivan Renar
Odette Terrade
Paul Vergès

Ont voté contre


Nicolas About
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Christian Bergelin
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Yves Detraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kergueris
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto

Abstentions


Nicolas Alfonsi
Michèle André
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Marie-Christine Blandin
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Rodolphe Désiré
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
François Fortassin
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


MM. Philippe Adnot, Philippe Darniche, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Hubert Durand-Chastel, Bernard Seillier et Alex Türk.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Daniel Hoeffel, qui présidait la séance.



Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 313
Nombre des suffrages exprimés : 224
Majorité absolue des suffrages exprimés : 113
Pour : 23.
Contre : 201

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.