SEANCE DU 5 NOVEMBRE 2002


M. le président. « Art. 5. - Il est inséré au titre XII de la Constitution un article 72-1 ainsi rédigé :
« Art. 72-1 . - La loi fixe les conditions dans lesquelles les électeurs de chaque collectivité territoriale peuvent, par l'exercice du droit de pétition, obtenir l'inscription à l'ordre du jour de l'assemblée délibérante de cette collectivité d'une question relevant de sa compétence.
« Dans les conditions prévues par la loi organique, les projets de délibération ou d'acte relevant de la compétence d'une collectivité territoriale peuvent, à son initiative, être soumis, par la voie du référendum, à la décision des électeurs inscrits dans le ressort de cette collectivité.
« Lorsqu'il est envisagé de créer une collectivité territoriale dotée d'un statut particulier ou de modifier son organisation, il peut être décidé par la loi de consulter les électeurs inscrits dans le ressort des collectivités intéressées. La modification des limites des collectivités territoriales peut également donner lieu à la consultation des électeurs dans les conditions prévues par la loi. »
La parole est à M. Nicolas Alfonsi, sur l'article.
M. Nicolas Alfonsi. Dans la discussion générale, j'ai évoqué mes préoccupations au sujet des articles 4 et 5. Permettez-moi quelques observations complémentaires, pour bien vous faire comprendre la portée du texte que vous allez voter.
Le premier alinéa de l'article 5 n'appelle de ma part aucune observation particulière : le droit de pétition est un problème relativement accessoire, même s'il peut compliquer la vie des collectivités.
Le deuxième alinéa de ce même article 5 n'appelle pas non plus de ma part d'observation, même si le référendum est déjà une procédure plus lourde.
Mais le vrai problème se pose au troisième alinéa, qui risque, si vous n'y prenez garde, mes chers collègues, d'avoir une portée que vous ne mesurez sans doute pas en cet instant.
J'ai interrogé le Gouvernement en commission des lois sur la consultation prévue dans ce troisième alinéa. On m'a répondu que cette consultation aurait non un caractère décisionnel mais un simple caractère consultatif. S'agirait-il d'un simple avis ? Il ne m'a pas été répondu sur ce point.
Est-il sérieux de prétendre qu'un référendum pourrait n'être que consultatif ? Surtout lorsque son organisation aurait été décidée par le Président de la République.
Il s'agit d'une véritable rupture dans la mesure où des collectivités territoriales pourront désormais être supprimées, une collectivité particulière pourra être créée, et donc le paysage national pourra être modifié.
Deux scénarios sont alors possibles avec ce troisième alinéa.
Le premier est le bouleversement qui s'ensuit et qui m'inspire des sentiments contradictoires. Je ne peux me réjouir vraiment en raison du souci que j'ai du respect de l'unité nationale, même si cela me donne le sentiment, en tant que représentant d'une région qui connaît des problèmes, d'être en quelque sorte à l'abri de la collectivité nationale.
Dans le second scénario, il ne s'ensuit aucun bouleversement et cet alinéa ne concerne que la Corse. Il y a lieu d'être très préoccupé. En effet, comme je l'ai dit dans la discussion générale, j'ai le sentiment que l'on nous raconte des histoires.
Il tombe sous le sens que ce qui sera une consultation des électeurs en Alsace se transformera dans les faits, en Corse, en un référendum, en raison d'une situation qui dure depuis vingt ans. Et l'on tente, une fois encore, en prenant le relais de la politique de Lionel Jospin que j'ai dénoncée, d'évacuer cette question. Pardonnez-moi mais, sur ce point, la politique de Lionel Jospin me paraissait un peu moins hypocrite, car le choix avait été clairement fait, alors qu'ici on donne le sentiment de porter atteinte à l'unité de la République un peu par effraction ! Voilà les préoccupations qui sont les miennes.
Je vous le dis très clairement : si vous mettez le doigt dans l'engrenage, vous ne pourrez plus le retirez ! En effet, un référendum en appellera d'autres, alors que cette disposition n'a d'autre objectif que de tenter de régler un problème particulier.
Par une fausse analogie, on nous sert l'exemple de l'Alsace. Les préoccupations alsaciennes, nous les connaissons, monsieur le président. Mais il y a une différence entre la Corse et l'Alsace. Quand le ministre de l'intérieur nous dit que l'on ne touchera à rien si les collectivités ne sont pas d'accord, c'est vrai, par exemple, s'il s'agit du Haut-Rhin. Mais si, nous, nous ne sommes pas d'accord, le Gouvernement prendra l'initiative d'interroger la population. En fait, il le fera pour mettre fin à une crise. Mais vous n'y parviendrez pas de cette manière. Sur quoi voter ? L'opinion est désireuse de sortir de la situation que tout le monde connaît, mais elle n'a pas les moyens d'apprécier la portée de ce vote que nous ne connaissons pas nous-mêmes !
Si la cause qui justifie ce troisième alinéa remonte aux accords de Matignon, il va être difficile de sortir de la situation dans laquelle nous sommes, car il est bien évident que cette cause va perdurer. Demain, on contestera le corps électoral ; après-demain, on fera appel au pouvoir législatif et nous entrerons dans un cycle de référendums dont nous ne pourrons plus sortir. Si une cause le justifie et s'il y a des demandes aujourd'hui, les mêmes demandes, demain, justifieront d'autres référendums. Voilà ce que je voulais vous dire.
J'ai essayé de m'exprimer le plus clairement possible pour vous faire apprécier la portée de cette disposition, qui me fera réfléchir avant de voter. Sachez que l'inquiétude que nous éprouvons les uns et les autres gagne l'opinion. Tous les moyens médiatiques sont mis à la disposition d'une fraction seulement de cette dernière. Si une telle politique devait être conduite, nous serions dans un état de désespérance extrêmement fort, car on pouvait espérer qu'un terme serait mis à la politique conduite antérieurement et que vous aviez dénoncée avec énergie, chers collègues de la majorité sénatoriale, il faut dire les choses comme elles sont. Personnellement, je me retrouverais avec mon chagrin, isolé, hier avec la gauche, aujourd'hui avec vous, et je ne saurais présumer de ce qui va se passer. (MM. Jacques Pelletier et Yves Fréville applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. M. Alfonsi a souligné l'un des points importants de ce dossier qu'il connaît parfaitement, beaucoup mieux que moi ! On sent bien, effectivement, que tout un pan de ce projet de loi constitutionnelle concerne la Corse, et le troisième alinéa de cet article complète le premier alinéa de l'article 4 dans les conditions que vous savez.
Je centrerai mon intervention sur des points moins cruciaux : le droit de pétition et le référendum local décisionnel.
Je me suis étonné que certains, qui, naguère, étaient très hostiles aux conseils de quartier - c'est-à-dire à l'expression de la démocratie de proximité - proposés voilà un an dans ce même hémicycle, se convertissent soudain, avec une grande conviction, à la démocratie participative. Je n'insiste pas.
Les idées qui nous sont proposées ne sont pas mauvaises. Ainsi, le droit de pétition est intéressant, tout comme le référendum local ; qu'il soit décisionnel, c'est une autre affaire, j'y reviendrai. Le droit de pétition reconnu aux électeurs est-il pour autant une révolution ? Ne faut-il pas l'encadrer pour éviter les surenchères démagogiques ou populistes ? Il serait souhaitable que nous obtenions quelques explications sur la loi qui précisera une telle disposition.
Si le référendum local décisionnel n'est pas très satisfaisant pour la démocratie représentative, on peut toutefois accepter une telle disposition, à condition de l'encadrer aussi et de nous l'expliciter dès maintenant.
Je souhaite poser trois questions.
D'abord, le fait d'utiliser le mot « référendum », qui qualifie le suffrage universel au niveau national, pour une consultation locale ne constitue-t-il pas un abus de langage ? Il conviendrait, selon moi, de trouver un autre terme.
Ensuite, le recours au référendum à un échelon donné - départemental ou régional, par exemple - ne risque-t-il pas de susciter des conflits avec le niveau de collectivité inférieur en raison de la gêne qu'il occasionnerait pour ce dernier ?
Enfin, que se passerait-il si une commune refusait d'organiser un référendum local ou régional ? On connaît les obligations d'un maire pour un référendum ou un vote national.
Pourriez-vous apporter des réponses à ces différentes questions ? Il serait bon que nous puissions nous faire une opinion avant que la loi organique qui va présider à la mise en oeuvre de ce référendum local ne soit expressément connue.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Nous abordons effectivement un fondement historique de la décentralisation, à savoir le fait de rapprocher la décision du citoyen et de donner à ce dernier des instruments visibles pour maîtriser son destin.
La parole des habitants n'est pas un sujet consensuel.
Pourtant, quand elle ne trouve pas de débouché organisé, quand elle n'est pas nourrie d'informations transparentes, elle peut devenir cri de colère, fût-ce par le détour des urnes.
M. le Premier ministre a affirmé dans cette enceinte que les décentralisateurs n'avaient pas peur des consultations populaires. Pourtant, moi, je me souviens de la commission Mauroy. Les modestes propositions sur la participation des habitants que j'avais formulées avec Mme Jacqueline Fraysse, la courageuse maire de Nanterre, avaient été accueillies par l'hostilité de vos amis. Je me souviens aussi, lors de l'examen de la loi relative à la démocratie de proximité, des débats dans cet hémicycle sur les comités de quartier, modeste outil non décisionnel mais déjà objet de tous les commentaires désobligeants. M. Delevoye nous disait qu'ils allaient perturber la vie des quartiers. Ils allaient être peuplés des recalés du suffrage universel, privilégier les minorités agissantes, nous disait M. Vallet.
M. Hilaire Flandre. C'est une experte qui parle !
Mme Marie-Christine Blandin. Ils allaient ankyloser l'initiative locale, nous disait M. Sido.
Et voici que l'opposition d'hier, aujourd'hui au pouvoir, se lance dans l'écoute du citoyen. C'est rassurant ! On pourrait s'en réjouir si la proposition n'était pas une demi-mesure, qui risque de ne satisfaire personne, ni les élus, jaloux de leur maîtrise du débat - il suffit d'examiner les amendements à venir - ni les habitants. Je parle bien des habitants, et pas seulement des électeurs : les jeunes non inscrits, les étrangers non européens ne trouveront pas, dans cette loi, l'occasion de participer aux débats et aux choix.
La modification de la Constitution, je le répète, aurait mérité un signal fort de reconnaissance envers ceux qui sont venus travailler et qui paient des impôts dans nos villes de France. La démocratie participative, qui n'est pas soluble dans des référendums aux arbitrages mal préparés, peut revêtir mille autres formes, comme les conférences de citoyens, dont vous ne dites mot, ou l'accès à l'information pour lequel vous ne prévoyez rien.
Par ailleurs, le champ du référendum est limité, dans votre projet, par les compétences de la collectivité. Comment cette situation sera-t-elle tenable ? Qui fixera l'arbitrage ? Comment expliquerez-vous aux habitants et aux élus de Chamonix qu'ils n'ont pas voix au chapitre sur l'enfer qu'est devenue leur vie quotidienne ? Cette limitation n'est-elle pas un serpent qui se mord la queue ? Allez-vous refuser un référendum à ceux qui voudraient s'exprimer localement sur une compétence qu'ils ne possèdent pas, et qui souhaitent se donner les moyens de la prendre, éventuellement, demain ?
Enfin, la rédaction initiale du projet précisait, au dernier alinéa : « En cas de nouvelles collectivités à statut particulier, la loi peut prévoir la consultation préalable des électeurs des collectivités concernées. » Cette phrase a migré à l'article 4. Nous retrouverons ce débat lorsque nous évoquerons la situation des DOM-TOM. On observe là une troublante schizophrénie : soit on fait confiance au peuple et la loi prévoit qu'on doit le consulter, soit on ne lui fait pas confiance et il est incorrect de lui faire miroiter de faux espoirs.
Finalement, à ce point du débat, après l'occultation des intercommunalités, on sent de plus en plus l'immobilisme de certains choix qui contraste avec les paillettes de la communication initiale du projet. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 73, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
« Supprimer le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 72-1 de la Constitution. »
L'amendement n° 96 rectifié, présenté par M. Charasse et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 72-1 de la Constitution :
« La loi fixe les conditions dans lesquelles un cinquième au moins des électeurs inscrits sur les listes électorales de chaque collectivité territoriale peut exercer un droit de pétition et obtenir l'examen de sa requête par l'assemblée délibérante intéressée sous réserve qu'elle ait compétence dans la matière concernée. »
L'amendement n° 13, présenté par M. Garrec, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour insérer un article 72-1 dans la Constitution, remplacer le mot : "obtenir" par le mot : "demander". »
La parole est à M. Alain Vasselle, pour défendre l'amendement n° 73.
M. Alain Vasselle. J'ai déposé cet amendement parce que je ne partageais pas, au fond, les dispositions prévues dans le premier alinéa du texte proposé par l'article 5 pour l'article 72-1 de la Constitution. Je fais en effet partie de ceux qui considèrent que, dès lors que le suffrage universel s'est exprimé et qu'un véritable climat de confiance est né entre la population et l'équipe municipale, c'est au suffrage universel, le moment venu, de sanctionner celles et ceux qui n'ont pas été dignes de la confiance qui leur a été confiée.
Le droit de pétition est l'occasion pour des minorités, agissantes ou non, de perturber, contre la volonté de la majorité de la population, le fonctionnement du conseil municipal.
Je m'exprime en qualité d'élu d'une petite commune rurale. Etant maire depuis très longtemps, je considère qu'un climat de confiance existe dans ma commune depuis que j'assume cette fonction. Je suis suffisamment proche de mes électrices et de mes électeurs pour apprécier les difficultés qu'ils vivent au quotidien, pour en débattre et pour décider, avec mes conseillers municipaux, des sujets qui intéressent mes concitoyens.
Cela étant, je ne représente qu'une toute petite partie de ce beau pays qu'est la France et je peux comprendre que ce que je vis est sans doute vécu d'une autre manière dans d'autres collectivités de taille différente.
J'arrêterai là mon propos et je retire cet amendement, monsieur le président. Je préfère en effet faire confiance au Gouvernement, à l'esprit et à la lettre des propositions qu'il nous fera le moment venu, lorsqu'il nous soumettra les textes précisant les conditions dans lesquelles ce droit de pétition pourra être exercé par la population.
M. le président. L'amendement n° 73 est retiré.
La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter l'amendement n° 96 rectifié.
M. Michel Charasse. Pour ne pas fragiliser ou déstabiliser le fonctionnement des assemblées locales, ni saper leur autorité, et pour éviter les excès du droit de pétition dont la Révolution française a été le témoin et la victime - je vous rappelle que les règlements de nos assemblées ont encadré le système de façon que l'on ne puisse plus porter de pétition « aux barres des assemblées », comme on disait sous la Révolution -, il paraît indispensable d'encadrer strictement ce droit de pétition.
L'une des solutions consiste à prévoir que les pétitions ne pourront être valablement exprimées que si elles ont recueilli au moins 20 % des électeurs inscrits. Sans cette règle, qui peut certes être posée par la loi, mais que le Conseil constitutionnel appréciera alors souverainement, les assemblées locales - notamment les conseils municipaux - risquent d'être constamment « à la botte » des minorités les plus diverses et des mécontents les plus isolés ou minoritaires.
Pour soumettre une assemblée élue au suffrage universel direct au dictat d'un « mandat impératif », il faut que la volonté de la population soit claire et, surtout, suffisamment représentative.
C'est pourquoi je vous propose de n'admettre le droit de pétition que lorsqu'il est exercé par au moins un cinquième des électeurs inscrits.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 13 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 96 rectifié.
M. René Garrec, rapporteur. En ce qui concerne l'amendement n° 13, le premier alinéa du texte proposé pour l'article 72-1 de la Constitution tend à instaurer un droit de pétition par lequel les électeurs pourront obtenir l'inscription à l'ordre du jour d'une assemblée délibérante locale d'une question relevant de sa compétence, dans les conditions fixées par la loi.
Le droit de pétition consiste, pour les citoyens qui en font usage, à émettre un voeu. Aussi serait-il choquant qu'il permette aux signataires d'une pétition d'imposer leurs vues aux élus du peuple sur l'ordre du jour des assemblées délibérantes des collectivités territoriales.
Afin de concilier l'exercice du droit de pétition et le bon fonctionnement desdites assemblées, l'amendement prévoit de remplacer le droit d'« obtenir » l'inscription à l'ordre du jour par celui de « demander » cette inscription. De la sorte, on conserve l'essence du droit de pétition, tout en permettant aux conseillers élus concernés de débattre de l'intérêt d'inscrire telle ou telle question à l'ordre du jour et de rejeter les demandes manifestement irrecevables. S'agissant de l'amendement n° 96 rectifié, il n'est pas compatible avec l'amendement n° 13 de la commission, qui a accepté le droit de pétition et a supprimé l'automaticité de l'inscription.
En revanche, la question du seuil de mobilisation des électeurs nécessaire pour valider la pétition sera tranchée par le Parlement lorsqu'il sera saisi de la loi prévue à cet effet au premier alinéa du texte proposé pour l'article 72-1 de la Constitution. Les délais dans lesquels le droit de pétition sera autorisé devront alors être également précisés.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 96 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. En ce qui concerne l'amendement n° 96 rectifié, je tiens à souligner la pertinence de l'avis qui a été exprimé par M. le rapporteur. J'ajoute qu'il s'agit là d'un texte constitutionnel et que l'organisation des seuils et les conditions d'exercice du droit de pétition sont, à l'évidence, du domaine de la loi organique, voire de la loi ordinaire. C'est à ce moment-là qu'il faudra prévoir les conditions pratiques d'exercice de ce droit, et notamment le seuil de recevabilité par rapport au nombre d'inscrits sur les listes électorales.
C'est un point très important, mais qui n'a pas sa place dans la Constitution.
Pour ce qui est de l'amendement n° 13 de la commission, il s'agit d'une modification sensible du texte proposé par le Gouvernement. Cela étant, nous comprenons bien l'hésitation qu'il peut y avoir quant à l'exercice du système représentatif, sur lequel M. Vasselle a insisté tout à l'heure, à juste titre.
Compte tenu de cette recherche d'équilibre, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur l'amendement n° 13.
M. le président. La parole est à M. Charasse, pour explication de vote sur l'amendement n° 96 rectifié.
M. Michel Charasse. J'ai bien compris ce qu'ont dit le président-rapporteur et le ministre s'agissant du seuil. Mon souci n'est pas d'encombrer le texte constitutionnel d'un luxe inutile de détails, ni de prolonger indéfiniment nos discussions sur ce sujet. En réalité, il s'agit de faire en sorte de ne pas se trouver dans une situation qui conduirait le Conseil constitutionnel à juger, par exemple, que le seuil que nous inscririons dans la loi serait trop important.
La rédaction « les électeurs de chaque collectivité territoriale peuvent » peut donner à penser qu'il s'agit de très peu d'électeurs, car aucun seuil n'est fixé. Mon souci, c'est la manière dont le Conseil constitutionnel interprètera cette disposition.
Si vous considérez qu'il faudra, pour les raisons que j'explique dans cet amendement, que le seuil soit tout de même un peu significatif - j'ai proposé 20 % : un électeur sur cinq ce n'est pas la mer à boire ! - et si cela résulte clairement des travaux parlementaires, je peux ne pas insister pour ne pas encombrer la Constitution par ce genre de détail.
Mais si nous ne prenons pas la précaution de prévoir que le seuil devra être significatif et qu'on ne peut pas soumettre à un mandat impératif d'une poignée d'électeurs un conseil municipal, un conseil général ou un conseil régional, alors j'insisterai.
MM. Hilaire Flandre et Gérard Longuet. Il a raison !
M. Michel Charasse. S'agissant de l'amendement n° 13 de la commission, qui vise à remplacer le mot : « obtenir » par le mot : « demander » et sur lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat, il présente tout de même le risque d'ouvrir la porte à une pratique que personnellement je condamne mais qui, malheureusement, existe, à savoir celle de l'invasion des assemblées locales par des foules hurlantes venant dire : « Il faut inscrire cette question à l'ordre du jour ; on peut le "demander" ».
En France, nous avons une pratique qui est très simple : chaque fois qu'un avis est sollicité pour telle procédure, on considère qu'il s'agit d'un avis conforme. Je pense, par exemple, monsieur le garde des sceaux, à l'article de la Constitution relatif à la nomination des procureurs : on estime que c'est l'avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature qui est requis. C'est entré dans les moeurs ! C'est pourquoi je me méfie.
Par conséquent, s'il est entendu que, de toute façon, un chiffre suffisamment significatif sera fixé par la loi pour ne pas soumettre les assemblées locales aux desiderata et au blocage systématique d'une poignée d'agités, je veux bien retirer mon amendement, sans pour autant être satisfait de celui de M. Garrec, même si j'en comprends très bien le motif. Mais je dois dire que, malheureusement, on a l'habitude des coups de force dans les assemblées locales, même en l'absence du droit de pétition ; par conséquent, à plus forte raison...
Cela dit, je retire mon amendement n° 96 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 96 rectifié est retiré.
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. J'allais donner le motif permettant à M. Charasse de retirer son amendement, mais, même s'il l'a fait avant que je n'intervienne, je vais quand même répondre à sa question.
Je crois que vous avez raison de dire, monsieur Charasse, que le seuil fixé devra être suffisamment significatif. Je peux même ajouter que le chiffre que vous avez donné ne me semble pas extravagant, mais ce sans aucun engagement de la part du Gouvernement : un pourcentage de cet ordre me paraîtrait en effet raisonnable.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, contre l'amendement n° 13.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. En 1981, lorsque la gauche est arrivée au pouvoir, en raison de la loi électorale municipale, une seule majorité occupait tous les postes dans les assemblées. Dès lors, il était évident que les minorités avaient du mal à se faire entendre.
Mais une loi qui a été proposée par la gauche et que vous connaissez a renforcé les droits des minorités au sein des assemblées locales. Rien n'empêche maintenant un élu local de demander l'inscription à l'ordre du jour d'une assemblée locale d'une question relevant de sa compétence.
Or voilà que, dans la Constitution, vous voudriez enfoncer une porte ouverte en prévoyant que l'on peut demander, au travers du droit de pétition,...
M. Gérard Braun. On n'a qu'à supprimer la pétition !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... d'inscrire une question à l'ordre du jour. Mais il y a des représentants qui sont élus pour cela ! Et si n'importe qui veut le demander, il peut le faire ! Il est donc inutile de l'inscrire dans la Constitution. Le droit de pétition, on le connaît au Sénat : n'importe qui peut présenter une pétition au Sénat.
En général, ces pétitions sont téléguidées par les minorités : il s'agit de faire pression. Mais elles existent ! Alors, modifier la Constitution pour enfoncer une porte ouverte, ce n'est vraiment pas la peine !
C'est pourquoi nous voterons contre cet amendement.
Le terme « demander » est moins dangereux que celui d'« obtenir », car il s'agit d'une toute petite minorité.
Monsieur le ministre, vous ne nous dites pas que la pétition devra représenter tel pourcentage de la population. Vous vous en remettez à une loi ! J'ai bien entendu notre collègue Alain Vasselle nous expliquer que c'est parce qu'il n'est pas d'accord qu'il votera. C'est une conception de godillot que nous n'avons pas, bien évidemment !
M. Hilaire Flandre. Vous deviez dormir un peu !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non, je ne dormais pas : je l'ai parfaitement entendu nous expliquer qu'il avait déposé cet amendement parce qu'il pensait avoir raison et que, aujourd'hui, il ne le pense plus, ou, plus exactement, il continue de le penser, mais ailleurs ce n'est peut-être pas pareil que dans sa commune. (Sourires.)
Cela étant, inscrire ces dispositions dans la Constitution, ce n'est vraiment pas sérieux !
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Peyronnet. Michel Dreyfus-Schmidt a fort bien expliqué l'exercice du droit de pétition en général. Mais si l'on remplace le mot « obtenir » par le mot « demander », on vide complètement de son sens cette disposition : on a l'impression qu'un petit groupe de citoyens vient humblement demander aux élus de bien vouloir, si cela leur convient, etc. Cela devient vraiment ridicule, et nous voterons donc contre cette mesure.
M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, pour explication de vote.
M. Laurent Béteille. Je m'interroge sur la proposition de la commission des lois. Je pense que certains amendements étaient mieux venus, dans la mesure où cette disposition a pour effet de vider de son sens le texte du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste, républicain et citoyen et du groupe socialiste.)
M. Robert Bret. Très bien !
M. Laurent Béteille. N'importe qui peut solliciter l'inscription à l'ordre du jour du conseil municipal d'une question relevant de sa compétence.
Mme Nicole Borvo. Cela fait longtemps que cela existe !
M. Laurent Béteille. Je crois que cela n'apporterait rien de voter ce texte. Sauf à suivre la démarche de notre collègue Alain Vasselle, c'est-à-dire la suppression, mieux vaut, à mon sens, garder la rédaction du Gouvernement.
Si la loi prévoit un seuil suffisant d'électeurs pour faire la demande, nous avons tous les apaisements nécessaires. Je pense, comme Michel Charasse, qu'il ne faut pas laisser une petite minorité obtenir l'inscription des mêmes questions à l'ordre du jour des assemblées territoriales. Mais si le nombre requis est suffisant, on ne risque rien à permettre l'inscription à l'ordre du jour.
Notre collègue Alain Vasselle a indiqué qu'il était élu local depuis longtemps. Pour être moi-même maire depuis vingt-cinq ans, je crois n'avoir rien à redouter de telles demandes d'inscription.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Je vais être très brève parce que M. Béteille a dit exactement ce que je voulais dire ! (Exclamations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.) Formidable, n'est-ce pas ? (Sourires.)
Je trouve simplement que le fait d'inscrire le droit de pétition dans la Constitution prête à sourire. On peut toujours demander quelque chose, même en France ! Alors, évitons de tomber dans le ridicule !
M. Robert Bret. C'est grotesque !
M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'avocat du diable !
M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, votre observation n'est pas tout à fait dans le sujet !
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. Je trouve notre débat un peu surréaliste !
M. Claude Estier. Ah oui !
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. La proposition serait dangereuse, ou pas, mais il faudrait en tout état de cause maintenir le texte du Gouvernement, alors qu'on est contre le droit de pétition et qu'on ne voudrait pas qu'on l'obtienne !
Il faut être sérieux dans cette affaire : le Gouvernement demande que le droit de pétition soit inscrit dans la Constitution. C'est un droit légitime qui a sa place dans la Constitution, mais qui ne doit pas se substituer - et là je vais dans le sens de M. Vasselle - à la démocratie représentative, et donc aux conseils municipaux élus.
Par conséquent, exiger et obtenir, par une pétition, le droit d'inscription à l'ordre du jour serait aller à l'encontre de la démocratie représentative.
M. Robert Del Picchia. Absolument !
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. C'est la raison pour laquelle il faut se rallier au point de vue de M. le rapporteur : on a le droit de demander l'inscription ; le conseil municipal votera, acceptera ou refusera,...
Mme Nicole Borvo. C'est incroyable !
M. Louis de Broissia. C'est comme cela que ça se passe !
M. Robert Piras. Ce n'est pas viable !
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. ... en fonction, notamment, du nombre de signatures et de l'incidence obtenus par cette pétition.
Par conséquent, je le répète, la sagesse consiste à se rallier purement et simplement à la position de M. le rapporteur ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Mme Nicole Borvo. Je ne savais pas que le droit de pétition n'existait pas en France !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous venez d'enfoncer une porte ouverte !
M. Robert Piras. C'est stupide !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 207, présenté par MM. Delfau, Fortassin, A. Boyer, Baylet et Collin, est ainsi libellé :
« Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour insérer un article 72-1 dans la Constitution, insérer deux alinéas rédigés comme suit :
« La loi fixe les conditions dans lesquelles tous les citoyens ont accès à une information transparente sur les décisions, notamment d'ordre budgétaire, des collectivités territoriales.
« La loi fixe les conditions dans lesquelles chaque groupe d'élus minoritaires a accès à une information transparente, bénéficie des moyens d'exercer son mandat, dispose d'un droit d'intervention au sein de l'Assemblée délibérante. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 97 rectifié, présenté par M. Charasse et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 72-1 de la Constitution :
« Dans les conditions prévues par une loi organique, les projets de délibération ou d'acte relevant de la compétence de l'assemblée d'une collectivité territoriale peuvent, à son initiative, être soumis, par la voie du référendum, à la décision des électeurs inscrits dans son ressort. Toutefois, la délibération ou l'acte ne peut être adopté que si la moitié au moins des électeurs inscrits a participé au scrutin. »
L'amendement n° 190, présenté par Mmes Borvo et Mathon, MM. Bret, Autain et Autexier, Mmes Beaudeau et Beaufils, M. Biarnès, Mme Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam et Loridant, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 72-1 de la Constitution, après les mots : "à son initiative," insérer les mots : "ou à l'initiative des électeurs inscrits dans son ressort". »
L'amendement n° 14, présenté par M. Garrec, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour insérer un article 72-1 dans la Constitution, supprimer les mots : "inscrits dans le ressort". »
L'amendement n° 68, présenté par M. Peyrat, est ainsi libellé :
« Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour insérer un article 72-1 dans la Constitution par une phrase ainsi rédigée : "La loi organique fixe les conditions de mise en oeuvre et de validité de ce référendum". »
La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter l'amendement n° 97 rectifié.
M. Michel Charasse. Monsieur le président, mes chers collègues, nous en sommes au deuxième alinéa du texte proposé par l'article 5 pour l'article 72-1 de la Constitution qui concerne la possibilité, pour les assemblées de collectivités locales, de soumettre au référendum local un texte relevant de leur compétence, c'est-à-dire, par exemple, une délibération du conseil municipal.
Cet amendement, c'est presque du Gélard dans le texte (Exclamations sur les travées du groupe socialiste), puisque c'est notre collègue le doyen Gélard qui, lors d'une réunion conjointe de la commission des finances et de la commission des lois, m'en a donné l'idée.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Bravo !
M. Michel Charasse. En effet, mes chers collègues, aujourd'hui, pour adopter une délibération en conseil municipal, général ou régional, il faut le quorum ! Si le quorum n'est pas atteint, le conseil peut être convoqué trois jours après ; là, le nombre des présents est valable quel qu'il soit.
Pensez-vous vraiment que l'on puisse accepter, demain, qu'une minorité de 10 % ou 15 % des électeurs inscrits qui viennent voter au référendum puisse adopter une délibération ?
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission. Ce sera la loi.
M. Michel Charasse. Ce sera la loi locale. Mais il faut bien voir que, dans la plupart des cas, un référendum local est organisé parce qu'un sujet suscite une polémique bruyante. Or nous savons les uns et les autres que ces polémiques ne correspondent généralement pas à ce que pense l'immense majorité de la population.
M. Sueur, qui était assis à côté de moi pendant cette réunion, me confiait qu'un référendum organisé à Caen sur la mise en place d'un tramway n'avait recueilli qu'un taux de participation de 18 %, après avoir fait naître de formidables polémiques.
L'amendement n° 97 rectifié est très simple, mes chers collègues. Il vise à préciser que « la délibération ou l'acte ne peut être adopté que si la moitié au moins des électeurs inscrits a participé au scrutin ». Dans ce cas-là, cela intéresse vraiment les gens. Sinon, on perd son temps et on fait adopter des résolutions relevant d'assemblées élues au suffrage direct qui représentent toute la population par des minorités, ce qui n'est pas acceptable ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. le vice-président de la commission applaudit également.)
Mme Nicole Borvo. Ce n'est pas une raison !
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour défendre l'amendement n° 190. M. Robert Bret. Je dirai un mot sur l'intervention de notre collègue Michel Charasse. Je sais que comparaison n'est pas raison. Cependant, on doit se méfier, car, dans certaines élections partielles notammment, les représentants sont élus avec 20 %, voire moins, des suffrages du corps électoral.
Mme Nicole Borvo. Voilà !
M. Michel Charasse. Il faut le quorum, en conseil municipal !
M. Robert Bret. Si nous devons établir des seuils, prenons garde à la légitimité du suffrage universel et des élus.
S'agissant de l'amendement n° 190, le moment est venu, nous semble-t-il, de donner un contenu actuel à la souveraineté populaire, en développant toutes les formes directes de participation individuelle et collective des citoyens à la vie politique et institutionnelle de notre pays.
Créer les conditions d'association maximale des citoyens à la gestion des affaires publiques devient tout à fait urgent. L'élection présidentielle du 21 avril a révélé avec acuité l'ampleur de la crise politique dans notre pays ; elle exige de repenser en profondeur les rapports des citoyens aux pouvoirs de décision, aux institutions.
Nos concitoyens se sentent écartés des pouvoirs, ils exigent d'être consultés, et pas seulement au moment des élections tous les six ans, monsieur Vasselle ! Ils exigent de participer à la vie locale, de débattre, de décider, et c'est bien normal, puisqu'il s'agit de leur vie et de leur avenir. Oui, il est urgent de les entendre.
Or, nous avons regretté, lors de l'examen du projet de loi relatif à la démocratie de proximité, comme vient de le rappeler Josiane Mathon, qu'un grand pas n'ait pas été fait en ce sens. L'opposition résolue et constante de la majorité de notre assemblée, il est vrai, n'y a pas contribué ! C'est pourquoi nous ne pouvons que nous réjouir qu'apparaissent dans le texte que nous examinons des propositions - le droit de pétition, le référendum local - que nous défendons depuis longtemps. Ce sont des outils intéressants de la démocratie locale, de la démocratie participative.
Par notre amendement, nous proposons d'aller plus avant dans cette logique, en permettant aux citoyens d'être à l'initiative d'un référendum local. Ce serait la moindre des choses.
Mme Marie-France Beaufils. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 14.
M. René Garrec, rapporteur. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. La parole est à M. Jacques Peyrat, pour défendre l'amendement n° 68.
M. Jacques Peyrat. Nous avons déjà débattu amplement de ce sujet. Je retire donc cet amendement.
Je souhaite toutefois répondre à notre collègue des Bouches-du-Rhône et aller dans le sens - ce n'est pas habituellement ma tasse de thé - de ce que disait M. Charasse tout à l'heure : la démocratie existe - et c'est une bonne chose -, mais bien plus dans l'idée que dans la réalité.
Je veux bien dès lors que la politique et la participation au fonctionnement des institutions et de la République soient une question de climat. D'autres l'ont dit mieux que moi naguère, mais, finalement, les populations sont assez semblables du Nord au Sud et de l'Est à l'Ouest. Mon cher collègue, en cas de grave problème dans une municipalité, contrairement à ce que vous pensez, ou à ce dont vous rêvez, les citoyens ne se déplacent pas.
Je suis, comme à Caen, en train d'étudier la construction d'une ligne de tramway. Mon Dieu ! Quelle entreprise terrifiante ! Je ne souhaite à aucun maire de vivre une telle aventure ! (Sourires.)
M. Jean-Jacques Hyest. Si vous aviez fait un métro, cela aurait été pire !
M. Jacques Peyrat. J'ai bien sûr songé à faire des consultations sur des tracés, concernant des secteurs qui rassemblent quatre-vingt mille à cent vingt mille habitants. Seules trente à cinquante personnes se déplacent et cent à cinq cents personnes se manifestent par écrit.
Alors, prévoyons tout ce que nous voulons mais, en réalité, seuls les élus qui travaillent sur un projet, qui prennent en main les destinées de leur municipalité ou de leur collectivité territoriale ont la volonté, le jugement, la hauteur de vue et les compétences données par leur administration territoriale pour faire ce que peu de gens peuvent défaire.
Il faut donc prévoir un seuil dans la loi organique. Nous avions pensé à 25 %, monsieur le garde des sceaux ; votre proposition est proche ; après tout, un quart ou un cinquième, cela se tient à peu près.
Vous vous y êtes engagé, cela me suffit, et je retire donc mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 68 est retiré.
Quel est l'avis de la commission ?
M. René Garrec, rapporteur. L'amendement n° 97 rectifié est contraire à la position de la commission. Nous sommes à nouveau confrontés aux problèmes, que nous évoquions tout à l'heure, des seuils, des quotas, des quorums, qui seront fixés par la loi organique.
S'agissant de l'amendement n° 190, le référendum d'initiative populaire n'est pas conforme à l'esprit du texte ; seule la collectivité peut faire un référendum sur un problème qui la concerne. Monsieur Bret, vous ouvrez une voie tout à fait différente à laquelle la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je veux d'abord rappeler que ces amendements portent sur le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article 78-1 de la Constitution, c'est-à-dire que nous sommes dans le cadre du référendum local organisé sur la seule initiative des conseils locaux, à savoir le conseil municipal, le conseil général ou le conseil régional.
Le souhait exprimé par M. Charasse que tous les actes relevant de la compétence d'une collectivité territoriale ne puissent être soumis par la voie du référendum local aux électeurs me paraît pertinent. On n'imagine pas que les actes individuels, par exemple, le soient. (M. Michel Charasse acquiesce.)
De même, la notion du nombre significatif d'électeurs participants doit être retenue.
Cependant, monsieur Charasse, ces précisions relèvent de la loi organique et le Gouvernement veillera, bien entendu, à ce qu'un seuil de participation figure dans celle-ci. C'est indispensable.
A M. Bret, qui nous parle d'ailleurs de souveraineté populaire alors qu'il s'agit de la souveraineté nationale, je veux dire que son amendement n° 190 est satisfait par le texte proposé pour le premier alinéa de l'article 72-1 de la Constitution. En effet, rien n'empêche les électeurs de faire une pétition pour demander un référendum. Le deuxième alinéa, je le répète, concerne uniquement le référendum organisé à l'initiative d'une collectivité.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n°s 97 rectifié et 190 : l'amendement n° 97 rectifié relève de la loi organique et l'amendement n° 190 est presque satisfait du fait de l'adoption de l'amendement n° 13 présenté par M. le rapporteur.
Quant à l'amendement n° 14 de la commission, c'est un amendement rédactionnel de cohérence avec les dispositions précédemment adoptées ; le Gouvernement y est donc favorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur l'amendement n° 97 rectifié.
M. Michel Charasse. Comme pour le premier alinéa, tous mes collègues auront compris mon souci : éviter, alors que la majorité absolue des membres présents du conseil - qu'il s'agisse du conseil municipal, du conseil général ou du conseil régional - est exigée pour le vote d'une délibération, qu'une minorité, représentant 5 % ou 6 % des électeurs, puisse à elle seule faire la décision par la voie d'un référendum local.
Mon souci reste donc le même : comme nous n'introduisons pas dans la Constitution des précisions qui, je l'admets, l'alourdirait, il faut qu'à travers les travaux préparatoires le Conseil constitutionnel, qui examinera la loi organique le moment venu, puisse déceler l'intention du constituant.
L'intention de celui-ci, c'est qu'une clause particulière soit ajoutée le moment venu pour éviter que des séries de délibérations importantes d'assemblées locales soient adoptées par des minorités non significatives. (M. le ministre délégué acquiesce.)
Exiger que la moitié au moins des électeurs inscrits participe à ce type de scrutins, c'est tout de même la moindre des choses. Sinon, le référendum local ne présentera aucun intérêt pour la population. Je ne vois en effet pas pourquoi on perdrait du temps à consulter les 15 % ou 20 % de citoyens qui se font remarquer parce qu'ils crient plus fort que les autres ! (M. Jacques Peyrat approuve.)
Cela étant dit, dès lors que M. Devedjian a précisé clairement que la loi organique réglera la question par la fixation, comme pour la pétition, d'un seuil significatif, j'aurais mauvaise grâce à maintenir mon amendement n° 97 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 97 rectifié est retiré.
La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'amendement n° 190.
M. Alain Vasselle. Je voulais intervenir sur l'amendement de M. Charasse, et je me permets de le faire à travers l'amendement n° 190 du groupe CRC, pour inviter le Gouvernement - mais il paraît y être tout à fait disposé, ce dont je me réjouis - à réfléchir à la nécessité de responsabiliser, dans l'utilisation du référendum, à la fois celles et ceux qui pourront être à l'initiative de celui-ci, c'est-à-dire, en l'occurrence, le conseil municipal, mais également la population quant au comportement qu'elle doit elle-même adopter lorsqu'elle est saisie par voie de référendum.
En effet, j'ai, à titre personnel, assez mal vécu les résultats du référendum national sur la réduction de la durée du mandat présidentiel. J'ai même très mal vécu le fait qu'une réforme à caractère constitutionnel de cette importance ait été décidée par une minorité de Français inscrits sur l'ensemble des listes électorales. Je ne voudrais pas que ce que l'on a vécu sur le plan national se reproduise sur le plan local.
C'est pourquoi la proposition de M. Charasse me sied tout à fait. Je rappelle d'ailleurs qu'une proposition de loi avait été déposée dans cet esprit par Jacques Pelletier, président du groupe du RDSE : elle visait à fixer un seuil de participation pour la validité des référendums.
Cela me paraît essentiel, car il faut que chacun prenne ses responsabilités, nos concitoyens comme les élus qui seront à l'initiative des référendums locaux.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 190.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 191 est présenté par Mmes Borvo et Mathon, MM. Bret et Autain, Mmes Beaudeau et Beaufils, M. Biarnès, Mme Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam et Loridant, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar et Mme Terrade.
L'amendement n° 212 est présenté par M. Alfonsi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 72-1 de la Constitution. »
L'amendement n° 80, présenté par Mme Blandin, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 72-1 de la Constitution :
« La création par la loi d'une collectivité territoriale dotée d'un statut particulier ou la modification de son organisation ne peut intervenir sans que le consentement des électeurs de la collectivité intéressée ait été préalablement recueilli. »
L'amendement n° 213, présenté par M. Alfonsi, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 72-1 de la Constitution :
« Lorsqu'il est envisagé de créer une collectivité territoriale en lieu et place d'une ou plusieurs collectivités prévues au premier alinéa de l'article 4, ou de modifier son organisation, le Président de la République, sur proposition du Gouvernement, peut décider dans les conditions prévues par la loi de consulter les électeurs inscrits dans le ressort des collectivités intéressées. »
L'amendement n° 98 rectifié, présenté par M. Charasse et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
« I. - Dans la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 72-1 de la Constitution, après les mots : "décidé par la loi de consulter", insérer les mots : "pour avis".
« II. - Dans la seconde phrase dudit alinéa, après les mots : "donner lieu à la consultation", insérer les mots : "pour avis". »
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 191.
M. Robert Bret. Nous avons eu l'occasion d'affirmer à plusieurs reprises au cours de ce débat notre opposition à la notion de collectivité à statut particulier. Nous avons manifesté nos craintes de voir supprimer des communes et des départements, celles de voir se constituer de grandes régions à l'échelle européenne. Nous ne pouvons donc que demander la suppression de ce dernier alinéa.
Cette disposition porte en elle le germe d'une remise en cause de l'architecture républicaine.
De plus, l'article 5 prévoit que la consultation des électeurs est décidée par la loi. Si les électeurs doivent effectivement être consultés - c'est bien le minimum -, doit-on comprendre qu'il sera fait fi de l'avis des assemblées délibérantes ? Doit-on comprendre que les déclarations faites par M. Sarkozy en Corse, au mépris des conseils généraux, doivent devenir la règle ?
Ces interrogations méritent pour le moins une réponse de la part du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Nicolas Alfonsi, pour défendre l'amendement n° 212.
M. Nicolas Alfonsi. Je me suis exprimé voilà un instant, et je ne reviendrai donc pas sur les arguments que j'ai déjà développés. J'attends tout de même avec une certaine gourmandise la réponse de M. le garde des sceaux à la question que j'avais posée à propos du deuxième alinéa, à savoir : le référendum est-il décisionnel ? La question se répète pour la consultation prévue dans le troisième et dernier alinéa.
Je le répète : à qui fera-t-on croire qu'une consultation prévue par la loi et aboutissant à la suppression de collectivités n'aurait qu'un caractère consultatif et n'emporterait pas la décision de celui - en l'occurrence, le Gouvernement - qui en a pris l'initiative ? Répondez clairement, monsieur le garde des sceaux !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 80.
Mme Marie-Christine Blandin. Je retire cet amendement, qui a déjà été traité sous la forme d'un sous-amendement lors de l'examen de l'article 4.
M. le président. L'amendement n° 80 est retiré.
La parole est à M. Nicolas Alfonsi, pour présenter l'amendement n° 213.
M. Nicolas Alfonsi. Cet amendement peut paraître paradoxal puisque je demande la suppression du troisième alinéa de l'article 5. Mais, comme je devine qu'il y a peu de chance pour que la première phrase du troisième alinéa soit supprimée et puisqu'il faut sortir de l'hypocrisie, autant que, dans cette hypothèse, ce soit le Président de la République, sur proposition du Gouvernement - comme cela avait été, je le souligne, évoqué à un moment donné - qui décide de ce référendum ou de cette consultation.
La première phrase du troisième alinéa est une disposition dont les conséquences peuvent être extrêmement graves pour le paysage national puisqu'elle pourrait conduire à supprimer des collectivités : demain, il pourrait y avoir un département du pays basque, un département du Béarn, une collectivité d'Alsace...
Si cet alinéa devait prospérer, les modalités d'organisation de la consultation seraient confiées à la loi, de la même façon que la loi, selon la deuxième phrase, fixera les conditions de la consultation pour modifier des limites territoriales de collectivités.
Certes, il ne s'agit pas des mêmes enjeux, le premier alinéa étant d'une autre portée. Je ne reviens donc pas sur ce que j'ai dit voilà un instant, mais telle est la raison pour laquelle j'estime que tout le monde doit assumer ses responsabilités : s'il s'agit de créer une collectivité à statut particulier ou de modifier les limites d'autres collectivités, que le Président de la République prenne l'initiative de cette consultation ; mais j'anticipe sans doute sur la réponse du Gouvernement quant au caractère de celle-ci.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour défendre l'amendement n° 98 rectifié.
M. Michel Charasse. Cet amendement est justifié par le caractère à la fois imprécis et dangereux du troisième alinéa du texte proposé pour le nouvel article 72-1.
Mes chers collègues, sauf le peuple français lui-même s'exprimant sur le plan national, aucune autorité ne peut contraindre le législateur à agir dans un sens ou dans un autre, et j'ajouterai que la Constitution interdit par ailleurs le mandat impératif. Elle prévoit donc que la souveraineté nationale appartient au peuple dans son ensemble, qu'aucune section du peuple ne peut s'en attribuer l'exercice et qu'il n'y a pas de mandat impératif.
Il doit donc être clair dans notre esprit que, quelle que soit la réponse des électeurs aux consultations prévues au troisième alinéa de l'article 72-1, cette réponse ne peut être qu'un simple avis qui ne peut lier ni l'exécutif ni le législatif, c'est-à-dire ni le Gouvernement ni le Parlement. Sinon, ce serait reconnaître indirectement à une section du peuple le droit de s'attribuer l'exercice de la souveraineté nationale, ce qu'interdit l'article 3 de la Constitution.
Le Gouvernement et le Parlement, mes chers collègues, ne peuvent pas être les simples notaires d'une volonté locale, si légitime soit-elle.
En outre, comment admettre que le Parlement n'ait plus qu'à suivre sans broncher l'opinion exprimée par la population d'une collectivité territoriale si, par exemple, la modification des limites territoriales doit entraîner la modification des limites d'un département, d'un canton ou d'une circonscription législative ?
Certes, on peut imaginer que, s'il en était ainsi, la consultation des électeurs ne serait pas organisée. Mais on ne sait jamais, car on ne résiste pas toujours si facilement aux pressions locales !
C'est pourquoi je propose de préciser que, en tout état de cause, les deux consultations qui sont prévues, soit pour la création d'une collectivité territoriale, soit pour la modification des limites d'une collectivité territoriale, n'ont que valeur d'avis, le Parlement et le Gouvernement conservant toutes leurs prérogatives pour leur donner suite ou non.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. René Garrec, rapporteur. La commission souhaiterait entendre M. le ministre avant de prendre position, en particulier sur les amendements de notre collègue M. Alfonsi.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. S'agissant du troisième alinéa de l'article 5, je souhaiterais que l'on comprenne bien le sens de la proposition de modification de la Constitution.
D'abord, je veux confirmer à M. Alfonsi - il le sait d'ailleurs, puisqu'il a lu le projet - qu'il s'agit d'une consultation pour avis.
M. Michel Charasse. Ah !
M. Dominique Perben, garde des sceaux. C'est un élément très important, parce qu'il implique que c'est le Parlement qui consulte. Nous sommes en effet dans un processus législatif : le législateur prend la décision de consulter, puis il décide par la loi.
C'est parce qu'il s'agit d'un processus législatif qu'il n'est pas souhaitable que le Président de la République prenne la décision.
Dans ce processus législatif, on prend le soin de consulter une partie du corps électoral spécialement concernée par une loi qui sera ensuite approuvée par le Parlement.
Nous ne sommes pas dans une logique de référendum, par exemple dans la logique d'un référendum national qui ne serait organisé que sur une partie du territoire. Il ne s'agit pas de cela ; il s'agit d'une consultation s'inscrivant dans un processus législatif, et cela implique que le Gouvernement émette un avis défavorable sur les amendements identiques n°s 191 et 212, mais également, pour la même raison et selon la logique que je viens d'exposer en répondant en particulier à M. Alfonsi, sur l'amendement n° 213, qui porte sur l'initiative de la consultation.
Quant à l'amendement n° 98 rectifié, il est totalement redondant par rapport au texte présenté par le Gouvernement, qu'il alourdit inutilement. Le Gouvernement y est donc défavorable.
M. le président. Quel est, en définitive, l'avis de la commission ?
M. René Garrec, rapporteur. La commission des lois est défavorable aux amendements n°s 191 et 212, dont l'objet est identique à celui de l'amendement n° 15, qu'elle a retiré.
Par ailleurs, elle relève que l'amendement n° 213 remet en cause les prérogatives du Parlement. La commission souhaite donc son retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Quant à la précision apportée par l'amendement présenté par M. Charasse, la commission la considère inutile, puisque la rédaction du projet de loi constitutionnelle fait référence à la « consultation », et non à la « décision » et au « référendum ». Elle émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 98 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 191 et 212.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je fais partie des membres de la commission des lois qui, à leur grand regret, n'ont pu suivre ce débat dans son intégralité, pour la simple raison qu'ils étaient retenus par d'autres réunions - nous aurons l'occasion d'en reparler - consacrées à l'examen du projet de loi pour la sécurité intérieure, dont la discussion devait s'ouvrir ce matin même. Telles sont les conditions dans lesquelles nous travaillons !
Cela étant dit, j'avais pris connaissance du rapport de la commission et lu, en ce qui concerne les consultations locales sur la modification des limites d'une collectivité territoriale, que la mention dans la Constitution d'une « simple consultation facultative n'apparaît pas nécessaire », et que « ce dispositif souffre d'une grande imprécision et renvoie à la loi l'ensemble des mesures qui garantiront son effectivité : initiative de la consultation, définition des électeurs concernés ». Enfin, la commission des lois estimait que « la loi prévoit aujourd'hui des mécanismes de consultation des assemblées délibérantes des collectivités territoriales visées par la modification des limites territoriales ».
Telles sont les raisons, concluait M. le rapporteur, pour lesquelles la commission des lois - bien entendu, la majorité des membres de celle-ci l'avait automatiquement suivi - soumet au Sénat un amendement visant à supprimer le dernier alinéa du texte tendant à insérer un article 72-1 nouveau dans la Constitution.
Si j'examine le tableau comparatif joint au rapport, je constate d'ailleurs que figurent, dans la colonne intitulée : « Propositions de la commission », en face du dernier alinéa de l'article 5 du projet de loi constitutionnelle, les mots : « alinéa supprimé ». La suppression de cet alinéa était donc bien prévue pour des raisons de fond.
Certes, je sais bien que, cet après-midi, M. le rapporteur a expliqué - comme à l'habitude, il a été suivi par la majorité de la commission, c'est-à-dire par les membres de celle-ci qui appartiennent à la majorité sénatoriale - que, finalement, on acceptait ce que l'on avait refusé jusque-là avec justifications à l'appui.
Je veux bien que l'on change d'avis, mais je souhaiterais tout de même que l'on nous explique maintenant pourquoi on accepte aujourd'hui ce que l'on avait refusé hier pour des raisons exposées en long et en large dans le rapport !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 191 et 212.
MM. Michel Dreyfus-Schmidt et Jean-Pierre Sueur. Il n'y a pas de réponse ? (Non ! sur les travées du RPR.)
M. Robert Bret. Quel mépris pour le travail effectué en commission !
M. le président. La question a été posée : y répondre est non pas obligatoire, mais facultatif, mes chers collègues.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 213.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Charasse, pour explication de vote sur l'amendement n° 98 rectifié.
M. Michel Charasse. J'ai bien entendu les propos tenus par M. le rapporteur et surtout par M. le ministre, qui ont indiqué que la consultation, c'est la consultation, qu'il va de soi qu'il ne s'agit que de recueillir un simple avis et que le législateur ne peut pas avoir les mains liées. Cela me rassure complètement.
Toutefois, si j'ai déposé cet amendement, c'est tout simplement parce que, lors de la réunion commune de la commission des finances et de la commission des lois à laquelle je faisais référence tout à l'heure, s'agissant d'un article quasiment analogue visant l'outre-mer, Mme Girardin, ministre de l'outre-mer, a indiqué que, lorsque les populations auraient voté, le Parlement devrait en tirer logiquement les conséquences, sous-entendu suivre... Je dois dire que cette affaire m'a effrayé !
Cependant, à partir du moment où M. le garde des sceaux a indiqué que la consultation était destinée à recueillir un simple avis et que, bien entendu, aucune contrainte ne serait exercée sur les assemblées - je ne vois d'ailleurs pas de quelle manière on pourrait en exercer une -, je retire l'amendement n° 98 rectifié. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
M. le président. L'amendement n° 98 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 5, modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 5