SEANCE DU 12 NOVEMBRE 2002


M. le président. « Art. 5. - Le troisième alinéa de l'article L. 301-3 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée : "Il donne notamment priorité aux engagements pris par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale en application de l'article L. 302-8". »
L'amendement n° 16, présenté par M. Coquelle et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L'article 5 pose quelques questions qui motivent de notre part un rejet pur et simple.
En effet, une fois déterminés des objectifs pour le moins modestes de réalisation de logements sociaux, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale répondant à la définition posée par les articles précédents de la proposition de loi bénéficieraient d'une priorité dans l'attribution des financements de la politique de l'habitat.
Permettez-nous, là encore, de nous poser des questions.
Nous touchons, en effet, l'une des données essentielles de la situation des dernières années, à savoir l'inadéquation entre les financements existants pour la réalisation de logements sociaux et la demande collective en cette matière.
Quelques avancées ont eu lieu ces dernières années, telles que la baisse de la TVA sur les travaux d'entretien ou de réhabilitation, mais les conditions générales de financement demeurent largement insuffisantes et continuent, singulièrement en Ile-de-France, à renchérir le coût des opérations.
Même si nous touchons largement au domaine réglementaire, puisque le niveau de subvention des prêts locatifs aidés ou des primes à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, les PALULOS, est directement dépendant de l'enveloppe ouverte à ce titre par la loi de finances, nous constatons que la sous-consommation des crédits trouve en partie son origine dans la difficulté à boucler les financements.
Nous ne pouvons d'ailleurs que souligner que l'enveloppe inscrite dans le projet de loi de finances pour 2003, monsieur le ministre, est très largement insuffisante et risque d'aggraver la situation, déjà fort compromise.
Alors, accorder une priorité aux communes et aux EPCI engagés dans un processus de « rattrapage » par la mise en oeuvre de plans locaux de l'habitat est tout sauf une solution égalitaire et respectueuse des besoins.
Pourquoi en effet donner plus à certains quand, dans le parc social existant, il faut aussi faire face à des besoins importants ?
Que voulez-vous, nous ne croyons pas aux vertus de la priorité qui serait soudainement accordée à ceux qui se seraient si longtemps dispensés de réaliser des logements sociaux. Elle aurait d'ailleurs un caractère pour le moins injuste, ne tenant pas véritablement compte des réalités.
Il nous semble en outre, mais ce n'est sans doute qu'une impression, que la mesure préconisée par l'article 5 relève plus du domaine réglementaire que du domaine législatif.
C'est sans doute le travers d'une proposition de loi mal ficelée, qui n'aspire, au fond, qu'à rendre vaine toute initiative de solidarité nationale en matière de logement.
Au bénéfice de ces observations, je ne peux qu'inviter le Sénat à adopter notre amendement tendant à supprimer l'article 5.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Le rapporteur est toujours étonné par les propos de M. Le Cam.
L'article 5 tend tout simplement, dans l'hypothèse où les communes décident de s'engager dans la démarche contractuelle prévue à l'article 3, à permettre au préfet, dans son pouvoir de répartition des crédits, de favoriser les communes et les EPCI qui ont un déficit de logements sociaux.
Je croyais que nos collègues communistes souhaitaient mieux répartir le logement social sur le territoire. Alors, pourquoi ne pas aider ceux qui ont le moins de logements sociaux ? J'avoue, monsieur Le Cam, que je ne comprend absolument pas. Je peux, bien sûr, admettre que les crédits sont parfois insuffisants pour réaliser les opérations et vous avez pu constater, monsieur le ministre, à la lecture des lettres que j'ai pu citer au début de notre débat, que les maires se plaignaient de n'avoir pas pu engager des opérations, faute de bénéficier d'un soutien financier.
En tout cas, si le financement est insuffisant, monsieur Le Cam, et si nous voulons, comme vous le demandez depuis le début de la soirée, mieux répartir les logements sociaux, vous conviendrez avec moi que votre amendement de suppression de l'article 5 est excessivement étonnant dans la mesure où ce dernier permet précisément de construire plus de logements sociaux là où il y en a le moins !
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gilles de Robien, ministre. Le Gouvernement souhaiterait d'abord répondre à l'interpellation de M. Le Cam sur les crédits du logement puisqu'ils augmentent, comme vous le savez, monsieur le sénateur, de 15 millions d'euros pour la ligne fongible et que, concernant les subventions pour surcharge foncière en Ile-de-France, c'est une augmentation de 25 % que vous aurez à voter, le cas échéant.
Voilà pour l'aspect budgétaire de la question...
En ce qui concerne votre amendement, je vous avoue franchement que vous allez exactement à contresens de ce que l'on pourrait appeler « le mieux-disant social », puisque la disposition à laquelle vous vous opposez donne la priorité aux communes qui sont soumises à l'article 55 pour l'obtention des aides de l'Etat destinées à la réalisation de logements locatifs sociaux.
Par conséquent, l'adoption de votre amendement aurait pour conséquence de freiner la construction de logements sociaux dans les communes qui en ont le plus besoin. A notre sens, c'est complètement illogique. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Article 6