SEANCE DU 17 DECEMBRE 2002
M. le président.
La parole est à M. Fernand Demilly, auteur de la question n° 90, adressée à M.
le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires
rurales.
M. Fernand Demilly.
Ma question s'adressait au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la
pêche et des affaires rurales. Lorsque je l'ai posée, j'ignorais que la réunion
du conseil des ministres chargés de la pêche aurait lieu cette semaine à
Bruxelles, et je comprends donc parfaitement l'absence de M. Gaymard.
Une cinquantaine de navires de pêche artisanale sont exploités à partir des
trois ports de la baie de Somme : Le Crotoy, Saint-Valéry et Le Hourdel. La
flottille est majoritairement composée de chalutiers de moins de douze mètres
et engendre une importante activité économique de pêche côtière, ciblée sur
quelques espèces à forte valeur marchande et à caractère saisonnier, avec une
production déclarée de soles, de plies, de limandes, de coquilles saint-jacques
et de crevettes grises qui s'est élevée à 2 265 tonnes en 2001. Elle concerne
plus de cent vingt marins.
Toutefois, la flotte de pêche picarde est soumise à un cadre réglementaire de
plus en plus contraignant et la Commission européenne propose de réduire
l'effort de pêche, en « cassant » encore des bateaux et en incitant les
pêcheurs à se reconvertir.
Les dispositions de ce projet de réforme de la politique commune de la pêche
sont particulièrement inquiétantes : réduction des quotas de capture selon les
espèces et retrait de navires conduisant à la disparition d'emplois,
suppression des aides publiques à la construction et à la modernisation des
navires de pêche et primes à la démolition. Ces mesures pourraient conduire, à
terme, à la désertification de nos côtes, qui sont animées par la pêche
artisanale.
Le groupe d'étude sénatorial sur la mer, dont je fais partie, a fait part de
son opposition à ces propositions et a déploré que les autorités européennes
n'aient pas retenu les suggestions formulées par le Parlement français.
Je sais que M. Hervé Gaymard a pris l'initiative de réunir les groupes des «
amis de la pêche », avec lesquels il a élaboré une synthèse équilibrée entre la
gestion durable de la ressource et la prise en compte de la dimension sociale,
économique et territoriale de la pêche artisanale sur le littoral national.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, faire le point sur la position
française et sur les négociations en cours à Bruxelles ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Dominique Bussereau,
secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.
Monsieur le sénateur, nous
sommes en pleine actualité. En effet, au moment où je vous parle, le ministre
de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, M.
Hervé Gaymard, participe à Bruxelles au conseil des ministres de la pêche, qui
durera peut-être toute la semaine. Il s'agit de défendre au mieux les intérêts
de la France, et vous connaissez les positions que M. le Président de la
République et M. le Premier ministre ont prises en la matière : nous
n'acceptons pas les propositions qui nous sont faites par le commissaire
européen Franz Fischler.
Les dossiers à l'examen concernent les projets de règlement relatifs à la
réforme de la politique commune de la pêche, le règlement du Conseil instituant
des mesures de reconstitution des stocks de cabillaud et de merlu, ainsi que la
décision relative aux totaux admissibles de captures, les TAC, et aux quotas
pour l'année 2003.
La proposition de la Commission européenne remonte à mai 2002. Le gouvernement
français, quant à lui, a toujours indiqué qu'il avait le souci d'une politique
de gestion durable de la ressource, mais qu'il souhaitait également que la
réforme prenne en compte la dimension sociale, économique et territoriale de la
pêche communautaire et de la pêche française. Tout comme vous, monsieur le
sénateur, il a jugé inacceptable, je le répète, la proposition initiale de la
Commission.
Quelles sont les demandes que formule actuellement à Bruxelles M. Hervé
Gaymard au nom du Gouvernement ? Je vais maintenant tâcher de répondre à cette
question, que M. Oudin a lui aussi posée voilà quelques jours.
La France souhaite voir mettre en oeuvre une gestion pluriannuelle des stocks
halieutiques qui soit adaptée à la réalité de la situation biologique et qui
distingue clairement des autres les stocks pour lesquels un plan de
restauration est nécessaire.
Elle désire en outre que soit appliqué un seul instrument de régulation des
captures pour la gestion d'un même stock et que soit absolument proscrite
l'utilisation simultanée d'instruments différents.
Il convient à notre sens de laisser au Conseil les compétences de décision en
matière de gestion de la ressource et de refuser tout transfert de pouvoir,
dans ce domaine, au bénéfice de la Commission, afin que la décision reste
politique.
Enfin, la France compte s'opposer à la suppression de la faculté donnée aux
Etats membres d'aider à la modernisation et au renouvellement de la flotte de
pêche, pour autant, naturellement, que les Etats n'augmentent pas globalement
les capacités de capture.
Nous avons bâti des argumentaires précis montrant que le maintien des aides
publiques est nécessaire pour le renouvellement et la modernisation de la
flotte de pêche et que l'utilisation de l'effort de pêche, en substitution ou
en complément des systèmes déjà existants, présenterait de nombreux
inconvénients sans offrir aucun avantage.
Ces documents ont déjà été remis à la Commission européenne et aux
professionnels de la pêche, que M. Hervé Gaymard a rencontrés le 11 décembre
dernier.
Par ailleurs, monsieur Demilly, vous avez reçu, comme l'ensemble des
parlementaires, un courrier adressé par M. Gaymard dans lequel celui-ci fait un
point précis sur les propositions que la France entend défendre. Au cours du
conseil des ministres de la pêche, nous allons essayer de faire évoluer la
position communautaire, afin de maintenir, pour la pêche française, de
véritables perspectives d'avenir.
En tout état de cause, nous n'accepterons pas un projet de réforme qui
remettrait en cause l'effort de modernisation de nos professionnels : tel est
le message, monsieur le sénateur, que vous pouvez transmettre aux pêcheurs de
votre département. La négociation n'est pas facile, mais la France n'est pas
isolée, puisqu'elle a constitué autour d'elle le groupe des Etats amis de la
pêche. Nous nous heurtons à une attitude résolue de la Commission, et c'est
donc un véritable combat politique, au sens noble du terme, que nous menons
cette semaine à Bruxelles, dans l'intérêt de la pêche française.
Je vous remercie, monsieur le sénateur, d'avoir montré au Gouvernement
l'importance que vous accordiez à ce dossier.
M. le président.
La parole est à M. Fernand Demilly.
M. Fernand Demilly.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de ces informations, que je
communiquerai aux élus et aux artisans pêcheurs de la baie de Somme.
Ma question avait, en réalité, un double objectif : faire le point sur les
négociations avec Bruxelles et M. Franz Fischler, le commissaire européen
chargé de la pêche, mais aussi apporter notre soutien à la position prise par
la France et par M. Hervé Gaymard, à qui vous voudrez bien transmettre ce
message.
Nous apprécions l'action menée avec les Etat amis de la mer, à savoir la
Grèce, l'Italie, l'Espagne, le Portugal et l'Irlande, et nous approuvons la
contre-proposition française concernant la gestion durable et responsable de la
ressource halieutique, l'effort de pêche et le maintien des aides publiques à
la construction et à la modernisation des navires de pêche.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nos pêcheurs et les élus qui les représentent
comptent sur la résolution et la volonté de M. Hervé Gaymard.
DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT DES SERVICES
DÉPARTEMENTAUX D'INCENDIE ET DE SECOURS