SEANCE DU 17 DECEMBRE 2002
M. le président.
« Art. 2. - I. - A titre expérimental et, le cas échéant, par dérogation aux
dispositions des livres III et IV du code du travail, des accords d'entreprise
peuvent fixer les modalités d'information et de consultation du comité
d'entreprise lorsque l'employeur projette de prononcer le licenciement pour
motif économique d'au moins dix salariés sur une même période de trente jours.
Ces accords peuvent fixer les conditions dans lesquelles le comité d'entreprise
est réuni, a la faculté de formuler des propositions alternatives au projet
économique à l'origine d'une restructuration ayant des incidences sur l'emploi
et peut obtenir une réponse motivée de l'employeur à ses propositions.
« Ces accords peuvent aussi déterminer les conditions dans lesquelles
l'établissement du plan de sauvegarde de l'emploi prévu à l'article L. 321-4-1
du code du travail fait l'objet d'un accord.
« II. - Les accords prévus au I ne peuvent déroger aux dispositions des onze
premiers alinéas de l'article L. 321-4 du code du travail et à celles de
l'article L. 321-9 du même code.
« III. - La validité des accords prévus au I est subordonnée à une
consultation du comité d'entreprise et à leur signature par une ou plusieurs
organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ayant recueilli la
majorité des suffrages exprimés lors du premier tour des dernières élections au
comité d'entreprise.
« IV. - Les accords prévus au I peuvent être conclus dans un délai de dix-huit
mois à compter de la promulgation de la présente loi et pour une durée
déterminée n'excédant pas deux ans. Avant l'expiration du délai de dix-huit
mois, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport sur l'application du
présent article après avoir recueilli l'avis motivé de la Commission nationale
de la négociation collective. »
La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.
M. Guy Fischer.
Les accords de méthode actuellement signés conformément à la loi n'ont nul
besoin d'être confortés pour être valides. Ceux qui ont besoin de l'être sont
ceux qui ont été signés en contradiction avec la loi.
A titre d'exemple, certains accords actuellement signés ou déjà en vigueur
prévoient l'interdiction pour les signataires de l'accord de méthode de
contester ensuite le plan social. Cela est illégal au regard de la loi
actuelle.
Monsieur le ministre, l'article 3 du projet de loi, que nous aborderons tout à
l'heure, permettra-t-il à de tels accords de devenir légaux ?
Pour ce qui est de la portée de cette négociation expérimentale sur la
consultation du comité d'entreprise et sur ses prérogatives, chacun l'a bien
compris, il s'agit de supprimer le droit de veto suspensif ainsi que
l'intervention du médiateur et de réduire les délais, pourtant d'ordre public,
de convocation, d'information et de consultation.
Mais a-t-on bien saisi qu'il ne s'agit pas que de cela ? Ainsi, ces accords
détermineraient « les conditions dans lesquelles le comité d'entreprise est
réuni, a la faculté de formuler des propositions alternatives au projet
économique à l'origine de la restructuration ayant des incidences pour l'emploi
et peut obtenir une réponse motivée de l'employeur à ses propositions ». Il
s'agirait donc d'une faculté, et non plus d'un droit.
Or ce droit existe, et il résulte non de la loi de modernisation sociale mais
de l'une des lois Auroux, en l'occurrence la loi du 28 octobre 1982.
L'article L. 432-10 du code du travail dispose : « Le comité d'entreprise émet
des avis et voeux dans l'exercice des attributions consultatives définies aux
articles L. 432-1 à L. 432-4. Le chef d'entreprise rend compte en la motivant
de la suite donnée à ces avis et voeux. »
En d'autres termes, ces accords pourraient ne pas prévoir l'exercice de ce
droit dans le domaine pourtant essentiel des licenciements collectifs. Seul le
contenu de l'information, tel qu'il est défini par l'article L. 321-4,
resterait obligatoire.
En revanche, ne seraient plus obligatoires le délai dans lequel l'employeur
doit communiquer cette information, le délai dans lequel les élus pourraient
l'examiner avec leurs mandants, le recours à l'expert, le droit de faire des
propositions alternatives et d'obtenir des réponses motivées.
Rappelons que n'importe quel accord de méthode qui serait actuellement signé
sur de telles bases serait immanquablement annulé.
Il s'agit donc de dérogations très importantes qui visent des prérogatives
essentielles ainsi que la réalité de l'information et de la consultation du
comité d'entreprise, lesquelles existent dans le code du travail depuis de
nombreuses années.
Venons-en maintenant à un autre aspect, celui du plan social négocié.
La question se pose de savoir si les plans sociaux ainsi négociés pourront
déroger aux dispositions de l'article L. 321-4-1 du code du travail et au
contenu obligatoire du plan social, à peine de nullité dudit plan et des
licenciements en résultant.
L'examen du texte du projet de loi conduit à répondre par l'affirmative, dans
la mesure où le premier alinéa de l'article 2 prévoit sans ambiguïté que ces
accords sont conclus par dérogation aux dispositions des livres III et IV du
code du travail. Or l'article L. 321-4-1 du code du travail fait partie du
livre III.
Rappelons que, dans sa rédaction résultant de la loi du 27 janvier 1993, qui
serait donc réactivée par la suspension de la loi de modernisation sociale, cet
article dispose notamment que : « La procédure de licenciement est nulle et de
nul effet tant qu'un plan visant au reclassement de salariés s'intégrant au
plan social n'est pas présenté par l'employeur aux représentants du personnel,
qui doivent être réunis, informés et consultés. Ce plan doit prévoir des
mesures autres que les dispositions concernant les conventions de conversion
visées à l'article L. 321-5, telles que, par exemple, des actions de
reclassement interne ou externe à l'entreprise, des créations d'activités
nouvelles, des actions de formation ou de conversion et des mesures de
réduction ou d'aménagement de la durée du travail. »
Telles sont les précisions que je tenais à apporter.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon,
ministre.
Je voudrais répondre brièvement à M. Fischer, qui vient
d'évoquer des sujets importants. Je ne peux pas croire que le groupe communiste
ne dispose pas de juristes suffisamment qualifiés pour le rassurer sur toutes
les craintes qu'il vient de tenter de nous faire partager !
Revenons un instant sur la définition d'un accord de méthode.
Un accord de méthode vise à favoriser l'équilibre des pouvoirs. Il prévoit la
fixation du nombre de réunions, l'organisation de la concertation, les modes
d'intervention de l'expert, un comportement de bonne foi, l'interdiction des
comportements dilatoires, l'engagement à ne pas rester sur une proposition
unique, l'interdiction de négocier séparément avec certains syndicats, une
exécution loyale de la méthode définie paritairement.
Il vise à établir un climat de confiance dans l'entreprise, propice à la
recherche d'un compromis.
De tels accords ne peuvent en aucun cas déroger aux principes de l'ordre
public social. Ainsi, ils ne peuvent pas modifier les dispositions relatives
aux garanties du salarié, à la définition du licenciement économique, à l'ordre
des licenciements, à la priorité de réembauchage, à l'obligation de formation,
au contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, ou encore au contrôle de
l'administration. Ces accords ne peuvent en aucun cas déroger au droit de
recours que vous évoquiez tout à l'heure, droit absolu tant au regard des
principes constitutionnels que de la loi et de la Convention européenne des
droits de l'homme.
Je crois qu'il y a là une confusion, peut-être entretenue, sur la réalité de
ces accords de méthode.
Ils ne peuvent pas déroger aux principes d'ordre public, mais ils peuvent en
revanche déroger aux conditions de leur mise en oeuvre.
Dans tous les cas que nous avons examinés - et j'en ai cité plusieurs devant
la commission -, l'objectif visé à travers ces accords est de favoriser des
procédures plus claires, plus transparentes dans l'intérêt de tous. J'avais
d'ailleurs souligné devant la commission que la plupart des accords de méthode
ont été signés par la totalité des organisations syndicales présentes dans
l'entreprise.
M. Guy Fischer.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces précisions. L'avenir tranchera
!
M. le président.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 14 est présenté par MM. Chabroux et Godefroy, Mme Printz et
les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
L'amendement n° 46 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 47, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du I de cet article, après les mots : "A titre
expérimental", insérer les mots : "sans préjudice des dispositions de l'article
L. 132-4 du code du travail". »
L'amendement n° 48, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le III de cet article :
« III. - La validité des accords prévus au I est subordonnée à l'avis conforme
du comité d'entreprise, à leur signature par une ou plusieurs organisations
syndicales représentatives dans l'entreprise ayant recueilli la majorité des
suffrages exprimés lors du premier tour des dernières élections du comité
d'entreprise et à la consultation des salariés sur ces accords. »
La parole est à Mme Gisèle Printz, pour défendre l'amendement n° 14.
Mme Gisèle Printz.
L'article 2 de ce projet de loi est extrêmement important. Il ne prévoit pas
de changer les règles du droit du licenciement, qui constitue un secteur certes
fondamental du droit du travail, mais qui demeure limité à son objet. Ce n'est
cependant pas un hasard, j'y reviendrai, si vous avez choisi ce point de notre
droit pour attaquer, comme le demande le MEDEF depuis vingt ans, la hiérarchie
des normes : cet article vise à changer l'architecture du droit du travail et à
bouleverser la hiérarchie des normes qui l'organise.
La possibilité que des accords d'entreprise dérogent non seulement à des
accords de branche mais aussi, directement à la législation est un scandale
juridique. Nous avons perçu sur ce point une opposition claire de l'ensemble
des syndicats que nous avons auditionnés. Tous voient un extrême danger dans
cette disposition et expriment une profonde inquiétude.
Pour être efficace et crédible, la négociation collective a besoin de
s'appuyer sur des règles claires. Du côté des salariés, la négociation a pour
objet de conférer des garanties, des protections, et non d'en supprimer. Alors
que les représentants du personnel sont soumis à une pression terrible face à
un plan social et à une vague de licenciements, votre texte donne à la
négociation la possibilité de déroger à la loi.
En clair, les délégués du personnel ne pourront plus s'adosser à la
législation pour maintenir les garanties des salariés. Le socle minimum prévu
par la loi disparaît.
Cette liberté totale du renard dans le poulailler, au moment où les salariés
sont sous la menace du plan social, est l'expression du cynisme absolu.
La procédure elle-même est attaquée, puisque, pour la première fois, les
droits des comités d'entreprise pourront être revus à la baisse, les procédures
et les modalités de licenciement adaptées en fonction des circonstances.
Comment faire respecter l'égalité des citoyens devant le droit du travail si
chaque entreprise fixe ses propres règles, ses propres procédures ?
Vous tentez d'abriter vos turpitudes derrière la règle de l'accord
majoritaire. La CGT, qui est le syndicat majoritaire en France, comme les
élections prud'homales viennent de le démontrer une nouvelle fois, voit dans
cette notion appliquée à l'entreprise un grand danger. Lors de la dernière
réunion de la commission de la négociation collective, elle vous disait voir
parfaitement comment vous alliez essayer de procéder par accords majoritaires
juxtaposés, dans les entreprises. Mais vous vous gardez bien d'exiger la même
condition de majorité pour la négociation collective interprofessionnelle,
celle qui est un peu plus compromise chaque jour, et où vous risquez de ne pas
obtenir ce que vous demande le MEDEF !
Sur le fond, cette atomisation du droit a pour but de faire prendre en charge
les plans sociaux par les salariés eux-mêmes. On veut que les représentants du
personnel entrent pleinement dans cette logique de suppression d'emplois, quel
qu'en soit le prétexte, et participent à l'élaboration du plan social. Sans
doute leur demandera-t-on bientôt de participer à l'élaboration de la liste des
personnes licenciées, et non pas selon des critères sociaux, bien entendu.
Vous aspirez au triomphe du libéralisme, non seulement en droit, mais dans les
esprits. Ceux qui sont exclus doivent eux-mêmes prononcer leur exclusion, se
reconnaître coupables de coûter trop cher à l'entreprise, ou de ne pas être
assez performants. Ils doivent se considérer comme responsables de leur rejet
par la structure. Cette conception des rapports humains et sociaux, quel que
soit le domaine où elle s'applique, est trop terrible pour que j'y insiste. Il
appartient à chacun d'y réfléchir.
En conséquence, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter les amendements n°s 46, 47 et
48.
M. Roland Muzeau.
Intervenant sur l'article 2, mon ami Guy Fischer s'est exprimé contre les
accords de méthode qui, selon nous, visent à mettre les salariés et leurs
organisations syndicales sous la contrainte de l'agenda des patrons. La
définition du contenu des discussions est tellement cadrée qu'il est impossible
de discuter des choix du chef d'entreprise, ou de solutions alternatives.
Le code du travail étant quasiment muet sur les cas de fusion, certains
accords de méthode intervenus chez Hewlett-Packard, par exemple, ont été
positifs dans le sens où les interlocuteurs sociaux ont été reconnus. Pour
autant, les contreparties, puisque c'est bien de cela qu'il s'agit, ont été
importantes : un agenda prédéfini, 1 100 suppressions d'emplois, aucune
discussion au fond.
Nous vous avons opposé, monsieur le ministre, de nombreux arguments de droit
contre ces accords qui, malheureusement, ont vocation à durer.
S'agissant de la consultation du comité d'entreprise et de ses prérogatives
sur le plan social négocié, le projet de loi prévoit des dérogations au code du
travail alors que la question des licenciements économiques relève de l'ordre
public. En cela, il est vrai, monsieur le ministre, votre texte innove. Je suis
d'ailleurs plus tenté de dire qu'il bafoue les fondamentaux de notre droit du
travail, toute la hiérarchie des normes et le principe de faveur.
Pourquoi, également, prévoir une durée d'application si longue - deux ans -
pour ces accords ? On ne trouve, dans la prose ministérielle et dans le rapport
sénatorial, aucune réponse à cette question. On est alors réduit à se demander
à quoi peut bien servir une telle durée. Certainement pas à assurer le suivi du
respect par l'employeur des obligations auxquelles il a souscrit dans le cadre
du plan social ! Les syndicats signataires ou non de l'accord de méthode n'ont
nul besoin d'une telle durée pour exercer leur contrôle et, le cas échéant,
agir en justice en cas de non-respect par l'entreprise des obligations ainsi
souscrites.
On peut supposer, en revanche, qu'il s'agit, avec un seul accord de méthode,
de couvrir plusieurs plans sociaux étalés dans le temps, ou bien encore
d'étendre le périmètre initial du plan social d'origine sans avoir à consulter
de nouveau le comité.
Ici encore, c'est non pas la loi de modernisation sociale qui est visée mais
la jurisprudence selon laquelle, lorsque le nombre de licenciements dépasse
celui qui est fixé par le plan social, la consultation doit reprendre dès son
début. L'arrêt de la Cour de cassation du 4 juillet 2000, « CFDT contre Crédit
Lyonnais », en témoigne.
Il s'agirait, en quelque sorte, de ligoter les syndicats signataires pendant
deux ans et de rendre ainsi illusoire l'action éventuelle des non-signataires.
En effet, la plupart des accords de méthode actuellement en négociation - et
que votre projet de loi, monsieur le ministre, cherche à conforter -, prévoient
une clause par laquelle les signataires s'interdisent de se prévaloir de toute
violation des dispositions des livres III et IV. C'est ce que le rapporteur
appelle la sécurité juridique.
Deux ans, c'est le temps nécessaire pour couvrir les dix-huit mois de
suspension de la loi de modernisation sociale, la négociation
interprofessionnelle, la présentation et l'adoption d'un nouveau projet de loi
relatif au régime des licenciements économiques.
Dès la promulgation de votre loi, monsieur le ministre, et sans attendre ces
échéances, le patronat disposera donc des moyens juridiques pour renvoyer aux
oubliettes l'un de ses cauchemars favoris, à savoir la loi du 27 janvier 1993
portant diverses mesures d'ordre social, sans que le présent projet de loi le
mentionne le moins du monde.
Au-delà de ces griefs de fond, l'article 3 crée la confusion généralisée.
Inutile de chercher ce qui est sujet à dérogation, le texte est trop peu
précis.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, nous sommes résolument opposés aux
accords de méthode que vous proposez, car nous n'entendons désarmer ni le
comité d'entreprise ni les salariés. Nous demandons donc la suppression de
l'article 2.
Par ailleurs, l'article 2 du projet de loi prévoit des dérogations générales
au code du travail. Aucune condition minimale n'étant posée, comme en matière
de délai d'information des salariés annualisés, par exemple, où la loi prévoit
un plancher en dessous duquel, par convention, on ne peut descendre.
L'amendement n° 47 pose un verrou, le respect du principe de faveur. Si
dérogations au code du travail il y a, elles doivent être plus favorables aux
salariés.
En outre, vous avez pris la précaution, monsieur le ministre, d'exiger que les
accords de méthode soient signés par les syndicats majoritaires en voix lors
des dernières élections de comités d'entreprise. S'agissant d'accords
dérogatoires, n'est-ce pas une obligation ? Cette concession doit être d'autant
plus relativisée que la protection prétendument instituée n'est pas sans
failles.
En effet, s'agissant d'un accord d'entreprise, on connaît la pression
considérable qui peut être exercée, lors d'une restructuration, quand des
dizaines d'emplois sont menacés, sur le syndicat récalcitrant qui se voit
reprocher d'accroître les difficultés. Ce dernier ne peut prendre le risque
d'une suppression d'emplois encore plus importante, voire celui de la
disparition de l'entreprise s'il ne signe pas un accord présenté comme un
simple accord de méthode qui est censé ne pas modifier le droit existant, même
si, nous l'avons vu, il n'en est rien.
L'amendement n° 48 a un double objet. D'une part, il s'attache à prévoir un
avis conforme du comité d'entreprise et non une simple consultation - ce sont
quand même les droits du comité d'entreprise qui sont visés - et, d'autre part,
il renforce la nécessaire démocratie sociale au sein de l'entreprise en
prévoyant la consultation des salariés sur l'accord de méthode lui-même.
Monsieur le ministe, pouvez-vous nous dire si les conditions de négociation de
l'accord de méthode sur la procédure de consultation, qui sont celles d'un
accord majoritaire, valent également sur le plan social ?
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Les amendements n°s 14 et 46 concernent un point sur lequel
je me suis exprimé tout à l'heure à la tribune. Notre conception est tout à
fait différente de celle de leurs auteurs : nous, nous sommes favorables aux
accords expérimentaux d'entreprise ; nous, nous considérons que les accords de
méthode doivent être respectés, étudiés, et devraient venir enrichir ce fameux
dialogue social que nous appelons de nos voeux.
Je l'ai dit, je le répète : nos voisins européens, l'Allemagne, l'Espagne et
l'Italie, notamment, subordonnent la mise en oeuvre des plans sociaux à la
recherche d'un accord. Les accords expérimentaux semblent alors adaptés aux
spécificités de chaque entreprise.
D'ailleurs, ils existent déjà, vous le savez. Certains ont été conclus avec
succès, d'autres avec grand succès.
La commission des affaires sociales donne donc un avis défavorable à ces deux
amendements.
L'amendement n° 47 vise à prévoir expressément que les accords expérimentaux
ne peuvent déroger aux dispositions d'ordre public et qu'ils peuvent être plus
favorables aux salariés que ne le sont les lois et règlements en vigueur. Je
rappelle, une fois encore, que le champ de la dérogation est très limité et
qu'il ne vise pas des dispositions d'ordre public. Il s'agit des délais, qui
pourront être raccourcis ou allongés, du nombre de réunions, qui pourra être
augmenté ou diminué. Quant au principe de faveur, l'objet de ces accords est de
favoriser une sortie par le haut - pas par le bas ! - lors d'une
restructuration. En cela, ils ne peuvent être que favorables aux salariés.
Dans ces conditions, l'amendement nous semble inutile. Il risquerait même
d'introduire une ambiguïté supplémentaire : la commission y est défavorable.
L'amendement n° 48 vise à préciser les conditions de validité des accords
expérimentaux. Il introduit ici une double modification : l'exigence d'un avis
conforme du comité d'entreprise, l'obligation d'une consultation des salariés
sur ces accords.
L'obligation d'un avis conforme ne semble pas indispensable. L'accord devant,
en effet, être conclu par les syndicats majoritaires lors des élections au
comité d'entreprise, on peut légitimement penser que ce critère satisfait
largement ce premier point.
J'observe d'ailleurs que c'est à la demande de la commission nationale de la
négociation collective que l'exigence d'un avis conforme a été retirée de
l'avant-projet. Tout à l'heure, on s'est servi de la commission nationale de la
négociation collective dans un sens ; je donne là une autre interprétation.
Je m'interroge également sur la consultation des salariés. De quoi s'agit-il ?
Est-ce un référendum ? Une information ? Une réunion ? Tout cela en même temps
? Cela ne me paraît pas très précis.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 48.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon,
ministre.
J'ai donné tout à l'heure à M. Fischer ma réponse à
l'argumentation developpée dans ces quatre amendements, auxquels je ne peux
qu'être défavorable.
Je me contenterai donc d'indiquer, s'agissant de l'amendement n° 48, que ce
sont bien les partenaires sociaux qui nous ont conduits à retirer de notre
texte initial l'exigence d'un avis conforme du comité d'entreprise.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Tout à fait !
M. François Fillon,
ministre.
Les partenaires sociaux, soucieux de l'autonomie de la
négociation collective par rapport au processus de consultation des
représentants du personnel, ont clairement affirmé qu'une telle exigence ne
serait pas conforme à leur souhait.
Par ailleurs, s'agissant de la question posée par M. Muzeau sur le point de
savoir si la règle de l'accord majoritaire s'appliquerait aux accords sur les
plans sociaux, je précise que nous ne modifions pas la législation antérieure
sur les plans sociaux. C'est donc la législation antérieure qui s'applique, qui
n'exige pas d'accord majoritaire.
En revanche, rien n'empêche, dans un accord de méthode, d'introduire la
condition d'un accord majoritaire pour les plans sociaux, mais c'est aux
partenaires dans l'entreprise de le décider. En l'état actuel de la
législation, l'accord sur les plans sociaux n'est pas soumis à la règle de
l'accord majoritaire.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 14 et 46.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 47.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 48.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3