M. le président. L'amendement n° 183 rectifié, présenté par M. de Broissia et Mme Hermange, est ainsi libellé :
Après l'article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - L'article L. 213-1-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa ci-dessus, pour les activités de production rédactionnelle et industrielle et de distribution de presse, de radio, de télévision, de production et d'exploitation cinématographiques, de spectacles vivants, de discothèque, la période de nuit est fixée entre 24 heures et 7 heures. Une autre période de travail de nuit peut être fixée par une convention ou un accord collectif de branche étendu, un accord d'entreprise ou d'établissement. Cette période de substitution devra comprendre en tout cas l'intervalle compris entre 24 heures et 5 heures. »
II - Après le deuxième alinéa de l'article L. 213-4 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les activités visées au troisième alinéa de l'article L. 213-1-1, lorsque la durée effective du travail de nuit est inférieure à la durée légale, les contreparties visées aux deux alinéas ci-dessus ne sont pas obligatoirement données sous forme de repos compensateur. »
La parole est à M. Louis de Broissia.
M. Louis de Broissia. Voilà maintenant deux ans, presque jour pour jour, soucieux de la promotion de la culture, du cinéma, de l'édition, de la presse et de l'audiovisuel, j'avais défendu un amendement similaire à celui-ci. Vous siégiez alors dans nos rangs, monsieur le ministre !
Cet amendement avait obtenu davantage qu'un succès d'estime, puisqu'il avait recueilli l'accord de la commission des affaires sociales et que le Sénat, dans sa sagesse, l'aurait adopté si, eu égard à mon indéfectible soutien au Gouvernement, je ne l'avais retiré à la demande de M. François Fillon, à l'époque ministre des affaires sociales, au bénéfice du dépôt ultérieur d'un rapport sur cette très délicate question. Ce rapport, je l'attends toujours, et je crois comprendre, monsieur le ministre, qu'il est encore en gestation !
Ce rappel étant fait, j'en viens à mon amendement, qui a trait au travail de nuit dans les industries et les services de la culture, du spectacle, de la presse, de l'édition et de l'audiovisuel en France. Il ne s'agit pas ici, je le précise, du travail de nuit en général. Si, dans certains secteurs, les entreprises peuvent s'organiser pour travailler de jour, le travail nocturne est inévitable dans d'autres professions, en particulier dans la presse, où les dépêches d'agence doivent être livrées tôt le matin, ainsi que dans les milieux du spectacle, du cinéma, etc.
Nous attachons d'autant plus d'importance à ces industries, monsieur le ministre, qu'elles sont créatrices d'emplois. Nous sommes ici au coeur même du débat sur la cohésion sociale. Il faut favoriser l'emploi dans les secteurs d'activité que j'ai énumérés : tel est le sens de l'amendement que j'ai déposé.
La directive européenne que nous avons approuvée précise que la période de travail de nuit commence à minuit et s'achève à sept heures le matin. Les Français, qui font toujours un peu plus - cela s'appelle la spécificité culturelle française, mais, en l'occurrence, c'est plutôt la spécificité normative française ! - en ont rajouté : selon eux, cette période débute à vingt et une heures. Or cela pénalise lourdement les industries et les services de l'édition, du spectacle, du cinéma, de la presse et de l'audiovisuel.
M. Roland Muzeau. Et voilà !
M. Louis de Broissia. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé qu'une concertation soit organisée. De nombreux accords ont été signés par le biais de conventions, soit par entreprise, soit par branche, en particulier dans l'industrie du cinéma et de la presse, où la spécificité du travail de nuit a été reconnue par des avancées salariales et des repos compensateurs.
On va encore me rétorquer que ce n'est pas le moment d'adopter une telle mesure. Mais ce n'est jamais le moment ! Cela fait deux ans que l'on m'objecte cet argument.
La qualification de travail de nuit pénalise la fameuse spécificité culturelle française. Or on ne défend pas celle-ci avec des déclarations verbales, mais par des actes. Je propose donc au Sénat d'agir. J'espère pouvoir compter sur la compréhension de la commission des affaires sociales, que j'ai saisie de cette délicate question.
J'espère également que le Gouvernement ne me demandera pas de retirer mon amendement, sinon je ne comprendrais pas sa ligne de conduite. Des avancées décisives sont en effet nécessaires.
Je suis parlementaire depuis 1988. Les rapports que j'ai vu passer se comptent par centaines sans avoir pratiquement d'autre utilité que d'encombrer les bibliothèques.
Nous ne demandons pas un nouveau rapport. Nous voulons une décision ! Mes chers collègues, je souhaite que le Sénat, dans sa sagesse proverbiale, adhère à mes arguments.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement fait partie de ce qu'on appelle les chevaux de retour.
M. Roland Muzeau. C'est un cavalier !
M. Louis Souvet, rapporteur. Ils réapparaissent régulièrement au fil des textes. Je pense en particulier à l'incorporation du temps de trajet dans le temps de travail. Certaines questions ont d'ailleurs été réglées par des directives européennes.
Cet amendement a déjà été déposé par notre collègue Louis de Broissia à la fin de 2002. Il vise à modifier la définition du travail de nuit pour tenir compte des spécificités des entreprises du spectacle ou de la presse.
La commission s'en était alors remis à la sagesse du Sénat, considérant qu'une étude plus approfondie serait la bienvenue avant d'adopter une telle mesure. Le Gouvernement avait pris l'engagement, en séance publique, d'examiner cette question.
C'est la raison pour laquelle la commission souhaite, aujourd'hui, connaître l'avis du Gouvernement.
M. Roland Muzeau. On se refile la patate chaude !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le Gouvernement ne suggère pas de renvoyer cette question à un énième rapport ou à un énième audit qui viendrait surcharger votre bibliothèque, monsieur le sénateur. (Sourires.)
Le Gouvernement privilégie la voie du dialogue social, de la négociation et de l'accord collectifs ; c'est ce qu'il a fait dans le domaine médico-social ou dans le secteur des discothèques - secteur de loisir que vous n'avez pas cité, monsieur de Broissia - dans lequel un accord a pu être trouvé grâce à la négociation collective.
La presse, le spectacle et l'audiovisuel sont des sujets importants. Mais votre souhait de vouloir légiférer sur le travail de nuit m'apparaît contreproductif par rapport à la démarche du Gouvernement. Je rappelle que, même en matière de mutation économique, de droit de reclassement et de licenciement, nous avons privilégié pendant plus de vingt mois le recours au dialogue social.
Je n'ose pas vous demander de retirer votre amendement. (Sourires.)
M. Roland Muzeau. Courage !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cependant, si vous ne le retiriez pas, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
Cela étant, je prends l'engagement, non de lancer une nouvelle étude, mais de stimuler le dialogue social et la négociation collective avec les partenaires sociaux afin d'avancer dans ce domaine. Je vous adresserai d'ailleurs une copie de l'état des négociations avec les branches concernées.
M. le président. Monsieur de Broissia, l'amendement n° 183 rectifié est-il maintenu ?
M. Louis de Broissia. M. le ministre, à qui je voue une grande admiration en raison de sa maîtrise du dialogue parlementaire,...
M. le président. Cela commence mal pour lui ! (Sourires.)
M. Louis de Broissia. ...ne m'a pas convaincu. Je le dis en toute simplicité, car nous sommes au Parlement pour dire ce que nous pensons.
Mme Nicole Borvo. Oh oui !
M. Louis de Broissia. Le dialogue social, dans les industries du spectacle, du cinéma, de la presse, de l'édition ou de l'audiovisuel, existe depuis que la directive européenne a été votée. Cela fait longtemps.
Je crois que nous aurons prochainement un débat sur la construction européenne, y compris sur l'Europe sociale. En son temps, j'avais dénoncé le traité de Maastricht en raison de l'absence de clause sociale ; nous nous rejoignons tous sur ce point.
Depuis deux ans - je le mets à l'actif de vos prédécesseurs, monsieur le ministre - de nombreuses négociations ont été entamées, et j'ai pu le vérifier auprès des syndicats professionnels. Or les rapports sont toujours dans les limbes... ou sont restés dans les ordinateurs. En tout cas, ils n'ont pas été publiés, et ils ne m'ont pas été adressés. Je ne pense pas que vous en ayez eu davantage que moi.
Vous aviez parlé de vingt mois, monsieur le ministre. Le Gouvernement a eu vingt-quatre mois ! Rajouter un, deux ou trois mois de plus sera-t-il utile ? En tout cas, il faut vraiment donner un coup de pouce à ces industries. Elles attendent ce geste avec impatience.
Cela dit, je tiens à remercier M. le rapporteur, dont je connais la précision de langage, d'avoir fait allusion aux chevaux de retour à propos de mon amendement, et non aux cavaliers. (Sourires.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 37.
M. le président. L'amendement n° 174 rectifié quater, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
Après l'article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 15° de l'article L.934-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La définition et les conditions de mise en oeuvre à titre facultatif d'actions de formation économique en vue de mieux comprendre la gestion et les objectifs de l'entreprise dans le cadre de la concurrence internationale ».
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Le développement de la participation au sein des entreprises fait partie intégrante de la cohésion sociale. Mais la participation n'est pas uniquement financière. Pour être efficace, elle nécessite une formation économique de tous les salariés. Il faut en effet que ceux-ci puissent comprendre les mécanismes ainsi que les difficultés de la gestion financière et de la concurrence des entreprises.
Tout doit donc être fait afin que les salariés comprennent la finalité de leur travail et celle de leur entreprise. Ils doivent savoir que la finalité de l'entreprise est de satisfaire avant tout ses clients, que les produits fabriqués soient compétitifs, et que la concurrence est féroce. Il faut qu'ils comprennent que tout retard de livraison, toute augmentation des coûts peuvent être fatals à leur entreprise, donc à leur emploi.
Cette formation doit aussi s'accompagner d'information. Les salariés d'une entreprise, en général, ne savent pas ce qui s'y passe ; ils apprennent souvent par la presse ce qui les concerne. Ils se sentent isolés et démotivés. C'est aux chefs d'entreprise, aux cadres de les informer, sans détours, des bonnes comme des mauvaises nouvelles, des réussites et des échecs, des produits vendus et non vendus, de la concurrence, des problèmes financiers, du bilan des résultats, etc. Mais pour cela, il faut leur apprendre les mécanismes micro et macroéconomiques.
Cette formation doit concerner tout le personnel, depuis le manoeuvre, jusqu'au cadre supérieur. Elle doit être globale et inclure tous les mécanismes de la gestion.
La formation est complémentaire de l'information, car elle fournit la base du langage qui permettra de comprendre cette dernière. En effet, les malentendus et les conflits proviennent souvent du fait que le personnel ne parle pas le même langage que la direction, ne le comprend pas. (Murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Il est donc indispensable de démystifier la gestion et le profit. Il faut notamment expliquer à tous les salariés que, dans les entreprises, ce n'est pas le patron qui paie les augmentations de salaire, mais les clients. Si les clients disparaissent par suite d'une fabrication inadaptée, les salaires ne peuvent plus être payés, et l'entreprise doit licencier pour survivre.
Les grèves déclenchées à la suite de ces décisions ne font qu'aggraver la situation en ralentissant la production et en augmentant les coûts. Elles compromettent tous les emplois de l'entreprise.
Les salariés doivent comprendre le rôle difficile des chefs d'entreprise : fabriquer des produits adaptés aux goûts des clients et compétitifs, trouver les moyens de financement, faire face à la concurrence, chercher l'innovation et améliorer sans cesse les produits, gérer la trésorerie, etc.
Il ne faut pas oublier que l'entreprise joue un rôle fondamental dans la reconstruction sociale. C'est elle, et elle seule, qui fournit les emplois : sans entreprises, pas d'emplois - c'est donc le chômage -, mais sans salariés motivés, pas d'entreprises. Les intérêts des salariés et des entreprises sont intimement liés ; les uns ne peuvent rien sans les autres. Ils sont obligés de s'associer pour réussir ce difficile et incessant combat de produire toujours mieux que les autres et moins cher.
Il faut que tous les salariés soient conscients de ce problème. C'est pourquoi il faut le leur enseigner. Ainsi, les salariés mieux informés, mieux formés, intéressés aux bénéfices, comprendront mieux leur intérêt et celui de leur entreprise et deviendront de véritables associés.
Permettez-moi tout de même de regretter que, dans sa rédaction rectifiée, cet amendement ne rende pas obligatoire la formation économique. Celle-ci demeurera donc facultative. Elle risque ainsi, malheureusement, de ne pas être très suivie, mais au moins est-ce un début.
Enfin, je suis heureux d'avoir entendu ce matin M. le Premier ministre s'intéresser à la participation. J'espère qu'il poursuivra cette réflexion.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission n'a pas pu examiner l'amendement de M. Dassault sous sa forme finale. Elle a jugé intéressante l'idée d'une formation des salariés à l'économie, mais elle s'est interrogée sur la charge supplémentaire occasionnée aux entreprises. Elle souhaite donc connaître l'avis du Gouvernement.
J'observe que la nouvelle rédaction de l'amendement ne crée plus une obligation, mais ouvre une faculté d'organiser de telles formations, ce qui répond, au moins en partie, à notre préoccupation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur le sénateur, nous partageons votre souhait que chaque salarié puisse accéder à une formation économique pour mieux connaître l'environnement dans lequel évolue son entreprise.
A cet égard, la loi du 4 mai 2004 offre des opportunités intéressantes qui peuvent être utilisées dans chaque entreprise. Vous proposez d'aller plus loin et de faire de ce sujet l'un des thèmes possibles de négociation au niveau de la branche dans le cadre des négociations triennales sur les objectifs et les moyens de la formation.
Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. M. Dassault parle d'or ! Avec cet amendement, il nous propose, sans coup férir, de mettre les fonds de la formation professionnelle à disposition des patrons afin de convaincre les salariés du bien-fondé de la non-augmentation de leur salaire, de leur licenciement, de la non-progression de leur carrière, de leur rétrogradation, voire de l'évolution négative de leurs conditions de travail.
M. Josselin de Rohan. Ce n'est pas ce qui est écrit !
M. Roland Muzeau. Bref, ces bougres de salariés vont-ils enfin commencer à comprendre - c'est le fond de votre explication, monsieur Dassault - le monde dans lequel nous vivons et où il n'y a strictement aucun avenir en termes de progrès social ? Les seuls objectifs que M. Dassault nous présente sont ceux des pays du tiers monde, voire des pays en voie de développement. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Beau projet de société !
En fait, monsieur Dassault, vous dites à voix haute ce que probablement quelques-uns ici pensent silencieusement et n'ont jamais osé dire !
M. Alain Gournac, rapporteur. Il lit dans nos pensées !
M. Roland Muzeau. Vous pouvez lire dans les miennes, ce n'est pas un problème !
M. Alain Gournac, rapporteur. Il est très fort !
M. Roland Muzeau. En conclusion, je dirai qu'il faut cesser de prendre les salariés pour des imbéciles et, lorsque je parle de salariés, je pense aussi aux personnes privées d'emploi qui aimeraient travailler. Ils sont suffisamment grands et intelligents pour savoir de quoi il retourne, comprendre les mouvements de notre société et ses mécanismes, et ne pas être d'accord avec vous, monsieur Dassault, ou quelques-uns de vos semblables, qui leur proposez toujours moins et leur demandez toujours plus de sacrifices.
J'aurais pu déposer un amendement qui aurait eu pour objet de favoriser la formation des employeurs. Mais pour ce faire, je n'aurais pas choisi de prendre l'argent sur les fonds de la formation professionnelle ! Cela aurait peut-être enfin permis aux patrons de comprendre ou d'essayer de comprendre la détresse de millions de salariés qui vivent dans de mauvaises conditions, qui sont mal payés, et celle de quelques autres millions de personnes qui cherchent tout simplement du travail. J'aurais pu ainsi vous convaincre qu'il est possible d'agir et, cette fois-ci, dans le sens d'une amélioration de la cohésion sociale.
Bien évidemment, vous l'avez compris, je voterai avec la plus grande énergie contre cet amendement éhonté.
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, pour explication de vote.
M. Serge Dassault. Monsieur Muzeau, vous n'avez vraiment rien compris ! (Rires et exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Serge Dassault. Vous avez bien besoin, vous aussi, d'une formation économique, car vous ne connaissez rien à l'entreprise. Vous n'y avez jamais mis les pieds !
M. Roland Muzeau. C'est la meilleure ! J'y ai travaillé pendant vingt ans à l'établi !
M. Serge Dassault. Vous ne savez pas ce qu'est une entreprise où les salariés vivent en complet accord avec leur direction pour travailler mieux, produire mieux, gagner plus, obtenir davantage de bénéfices et en profiter grâce à l'intéressement. Voilà ce qu'est la participation !
Vous dites que cela ramènera nos entreprises et nos salariés au niveau des pays sous-développés. Mais c'est vous qui les y conduisez en les incitant à faire en sorte que l'entreprise fasse faillite ! Chaque fois que l'on veut agir, vous êtes contre. Autrement dit, vous êtes contre l'entreprise, contre les salariés et contre l'emploi. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Monsieur Muzeau, si vous le souhaitez, je vous donnerai une explication !
M. Roland Muzeau. Je vous remercie de me faire tant d'honneur ! (Sourires.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 37.
L'amendement n° 480, présenté par M. Delfau, est ainsi libellé :
Après l'article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
A compter du 1er janvier 2005, il est institué une taxe du travail prélevée sur les entreprises qui procèdent à des licenciements économiques massifs en reversant simultanément des dividendes aux actionnaires.
Cette taxe, d'un montant de 1 %, est directement prélevée sur ces mêmes dividendes.
Cet amendement n'est pas défendu.
Articles 37-1 à 37-8 (précédemment réservés)
M. le président. Je rappelle que les articles 37-1 à 37-8 ont été réservés jusqu'après l'article 66.
chapitre v
Dispositions de programmation
Article 38
I. - L'aide apportée par l'État aux maisons de l'emploi, en application de l'article L. 311-9 du code du travail, s'établit comme suit entre 2005 et 2009 :
Fonds maisons de l'emploi |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
Autorisations de programme (en millions d'euros valeur 2004) |
300 |
330 |
50 |
0 |
0 |
Dépenses ordinaires et crédits de paiement (en millions d'euros valeur 2004) |
120 |
405 |
530 |
375 |
300 |
II. - 1° Le nombre de contrats d'avenir proposés entre 2005 et 2009 s'élève à un million, selon l'échéancier suivant :
Année |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
Nombre de contrats |
185 000 |
250 000 |
250 000 |
250 000 |
65 000 |
2° L'aide apportée par l'État à ces contrats en application du deuxième alinéa du II et du III de l'article L. 322-4-12 du code du travail est fixée comme suit pour les années 2005 à 2009 :
Année |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
Aide de l'État (en millions d'euros valeur 2004) |
383 |
1 119 |
1 285 |
1 285 |
1 120 |
III. - L'État apporte à un fonds, ayant pour objet de garantir à des fins sociales des prêts à des personnes physiques ou morales et des prêts à des chômeurs ou titulaires de minima sociaux créant leur entreprise, les montants suivants de 2005 à 2009 :
Année |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
Apport de l'État (en millions d'euros valeur 2004) |
4 |
12 |
19 |
19 |
19 |
IV. - La programmation des aides aux structures d'insertion par l'activité économique s'établit comme suit :
1° Le nombre de postes aidés dans les entreprises d'insertion en application de l'article L. 322-4-16 du code du travail est fixé comme suit pour les années 2005 à 2009 :
Année |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
Nombre de postes aidés |
13 000 |
14 000 |
15 000 |
15 000 |
15 000 |
2° Les chantiers d'insertion bénéficient d'une aide destinée à financer l'accompagnement. Un montant de 24 M ? en valeur 2004 est inscrit à cet effet au budget de l'État chaque année de 2005 à 2009 ;
3° La dotation de l'État au titre de l'aide à l'accompagnement pour les associations intermédiaires prévue à l'article L. 322-4-16 du code du travail est fixée comme suit pour les années 2005 à 2009 :
Année |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
Dotation de l'État (en millions d'euros valeur 2004) |
13 |
13 |
13 |
13 |
13 |
4° La dotation de l'État au fonds départemental d'insertion prévu à l'article L. 322-4-16-5 du code du travail est fixée comme suit pour les années 2005 à 2009 :
Année |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
Dotation de l'État (en millions d'euros valeur 2004) |
13,4 |
18 |
21 |
21 |
21 |
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, sur l'article.
Mme Gisèle Printz. Il est de notoriété publique que le ministre des affaires sociales a exigé et obtenu de haute lutte que son texte en faveur de la cohésion sociale soit un projet de loi de programmation.
On nous a dit avec force, dans cette assemblée et encore plus dans les médias, que cette programmation constituait la preuve de l'engagement pluriannuel du Gouvernement en faveur de la cohésion sociale, en un mot la preuve du sérieux de l'entreprise.
Sans vouloir vous faire de procès d'intention, monsieur le ministre, je ferai deux observations.
Première observation : votre programmation va jusqu'en 2009. Vous engagez donc le gouvernement qui aura succédé à celui-ci. Or, en 2008 et en 2009, il sera peut-être de droite mais peut-être de gauche !
Bien entendu, nul ne peut être opposé a priori à ces promesses de dotations en faveur de l'insertion. Je vous ferai tout de même observer que vous engagez les gouvernements futurs bien au-delà de l'annualité budgétaire !
M. Josselin de Rohan. Et les trente-cinq heures !
Mme Gisèle Printz. En outre, nous avons pu mesurer dans d'autres domaines la valeur des engagements pluriannuels face aux priorités et aux urgences budgétaires. Ne nous en veuillez pas, monsieur le ministre, si nous éprouvons quelques doutes quant à la réalisation de tous ces engagements dans la durée.
Ma seconde observation portera sur la logique de votre raisonnement. Je dois vous faire part de notre inquiétude sur les perspectives que vous nous proposez.
Vous indiquez, par exemple au paragraphe II, la montée en puissance du nombre des contrats d'avenir, qui devront atteindre un million, ainsi que la dotation qui y est assortie et qui, globalement, devrait s'élever, à partir de 2006 et jusqu'en 2009, à environ 1,2 milliard d'euros.
Pour les aides au poste dans les entreprises d'insertion, nous voilà à 13 000, 14 000, puis 15 000 postes, entre 2007 et 2009. La dotation de l'Etat pour le fonds départemental d'insertion devrait passer de 13,4 millions d'euros en 2005 à 21 millions en 2009.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous poser la question suivante : croyez-vous à la réussite de votre plan ?
Mme Gisèle Printz. Pour notre part, nous ne nous faisons pas d'illusions : vos mesures sont calibrées trop largement et leur financement est trop important. Si le dispositif fonctionne, ce que nous souhaitons sincèrement dans l'intérêt des personnes en difficulté, vous ne pourrez pas faire face à toutes les dépenses.
Nous n'excluons pas, si le nombre de radiations de l'ANPE connaît une forte accélération et que les emplois précaires connaissent un développement exponentiel, que l'on nous dise bientôt que la loi de programmation contient des mesures trop larges.
C'est une hypothèse assez crédible. Mais ce n'est pas la seule.
Le précédent gouvernement donnait le sentiment de fonder beaucoup d'espoirs sur le choc démographique à venir. En un mot, les enfants du baby boom de l'après-guerre partant à la retraite devaient libérer des postes pour des classes d'âge beaucoup moins nombreuses ; le problème devait se régler ainsi tout seul.
On estime en effet à 630 000 le nombre de départs annuels à partir de 2006. Il en résulte que le nombre d'actifs, qui s'élève actuellement à 26,8 millions, cessera d'augmenter à partir de 2015.
Cette thèse simpliste, qui est finalement celle du laisser-faire, est tout à fait à sa place dans un contexte libéral : la nature et le marché vont tout régler !
Malheureusement, les économistes et les démographes, vous le savez comme nous, jettent une douche froide sur cette vision optimiste.
Plusieurs éléments sont à l'oeuvre. Tout d'abord, les entreprises vont chercher des gains de productivité, ce qui ne se traduira pas par des créations d'emplois, mais seulement par celle d'emplois précaires, emplois auxquels votre texte ouvre largement la porte, grâce notamment au contrat initiative emploi, le CIE, au contrat d'insertion-revenu minimum d'activité, le CI-RMA ou aux dispositions prévues à l'article 37.
En ce qui concerne la population, l'Observatoire français des conjonctures économiques, l'OFCE, note que l'inversion démographique des prochaines années risque de se traduire, après une courte baisse du chômage, par un ralentissement de l'activité, de moindres investissements et une remontée du chômage par la suite.
Il n'y a pas de fatalité, mais une véritable incertitude. Ce texte sonne déjà comme un aveu d'échec par rapport à la politique du « tout au secteur marchand » de votre prédécesseur. Mais il reflète aussi le retour brutal à la réalité, la prise de conscience que le chômage ne va pas disparaître, sauf à réussir l'improbable exploit, dans le contexte économique mondial actuel, d'une croissance à 3 % !
Je rappelle à cet égard que, même dans la conjoncture plus porteuse des années 1998 et 1999, il avait fallu faire appel aux emplois aidés, notamment aux emplois-jeunes, pour tirer un bénéfice social de la croissance et l'enrichir en emplois, selon la formule consacrée.
Est-ce finalement ce que vous espérez faire, monsieur le ministre, mais à moindres frais bien sûr et en développant l'emploi précaire ? Est-ce la raison des sommes considérables que vous prétendez engager pour les contrats emploi solidarité nouvelle formule, les actions d'insertion, les emplois destinés aux allocataires de minima sociaux ? Sommes-nous déjà dans la situation d'urgence d'une campagne électorale qui exigerait que, par tous les moyens possibles, l'on occupe tous les demandeurs d'emploi et l'on vide les statistiques du chômage et de l'exclusion ?
Si tant est que la programmation soit une procédure crédible et que nous retrouvions les montants indiqués dès le projet de loi de finances pour 2005, les chiffres que vous nous proposez sont le reflet de votre virage à cent quatre-vingt degrés par rapport au gouvernement précédent. Ils sont aussi la traduction budgétaire de ce que nous évoquions au début de la discussion : le tri des chômeurs que vous vous apprêtez à confier aux maisons de l'emploi et aux intervenants privés entre les employables et les personnes en difficulté, qui seront gérées par le secteur de l'insertion.
Cet article 38, lorsque l'on ne se laisse pas étourdir par les chiffres, est révélateur d'une politique qui ne cède rien en matière de libéralisme.
M. le président. L'amendement n° 80, présenté par M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du I de cet article, remplacer la référence :
L. 311-9
par la référence :
L. 311-10
La parole est à M. Louis Souvet, rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Il s'agit de la correction d'une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 185, présenté par M. Virapoullé, est ainsi libellé :
Au début du III de cet article, remplacer les mots :
L'Etat apporte à un fonds
par les mots :
L'Etat et les collectivités locales qui le souhaitent apportent à un fonds
La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé. Nous approuvons la volonté du Gouvernement de tendre, à travers son projet de loi de programmation de cohésion sociale, à remettre au travail, ou en tout cas à conduire vers un travail tous ceux qui le souhaitent.
Aider les personnes privées d'emploi à investir dans le domaine économique doit également être une voie à creuser. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que toutes les collectivités locales, pas seulement les départements ou les régions mais également les communes qui le souhaitent, puissent aider un chômeur qui veut investir dans une petite entreprise ou en reprendre une.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur Virapoullé, je comprends votre intention.
Toutefois, il s'agit de modifier un peu la portée de l'article 38, qui visait uniquement, à l'origine, à cristalliser les engagements financiers de l'Etat sur cinq ans. Avec votre amendement, on ouvrirait aux collectivités locales qui le souhaitent la possibilité d'apporter des fonds.
Vous sentez, monsieur le sénateur, ma réticence à donner totalement mon accord. Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat, dans un sens plutôt négatif, dirai-je.
M. le président. L'amendement n° 323 rectifié, présenté par MM. Seillier, Pelletier, de Montesquiou et Mouly, est ainsi libellé :
Le IV de cet article est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
...° L'aide apportée aux entreprises de travail temporaire d'insertion, au titre de l'article 5 du décret du 18 février 1999, est portée à 54 000 ? par poste d'accompagnement pour l'année 2005 et revalorisée chaque année.
Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de la compensation de la suppression de l'exonération de cotisations sociales spécifiques aux entreprises de travail temporaire d'insertion pour une revalorisation au poste d'accompagnement sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Seillier.
M. Bernard Seillier. En déposant cet amendement, j'ai souhaité que l'on fasse les comptes à propos des entreprises de travail temporaire d'insertion, les ETTI, à qui une ordonnance du 18 décembre 2003 supprime, à compter du 1er juillet 2005, l'exonération de cotisations sociales qui leur était accordée.
Certes, vous avez annoncé que l'aide dont bénéficiaient les ETTI serait portée à 51 000 euros dans la loi de finances pour 2005. Cependant, cette revalorisation devrait être complétée pour compenser la mesure relative aux cotisations sociales et atteindre un minimum de 54 000 euros.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur de la commission des affaires sociale. Cet amendement vise à augmenter l'aide apportée par l'Etat aux entreprises de travail temporaire d'insertion.
Je partage la volonté de notre collègue de soutenir ces entreprises, mais je m'interroge sur le coût budgétaire global d'une telle mesure. Je souhaiterais donc connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous comprenons les préoccupations sous-jacentes à cet amendement qui concerne les moyens alloués aux entreprises de travail temporaire d'insertion.
Je voudrais rappeler que, en vertu du IV de l'article L. 322-4-16 du code du travail, les modalités d'attribution des aides de l'Etat sont fixées par décret. Le décret du 18 février 1999 relatif aux entreprises de travail temporaire d'insertion renvoie la détermination du montant de l'aide au poste d'accompagnement à un arrêté. Sa fixation par un texte législatif empêcherait à l'avenir tout réajustement rapide du montant de l'aide en fonction de l'évolution du secteur et pourrait, à terme, être contreproductif.
Comme j'ai eu l'occasion de l'annoncer aux représentants du secteur de l'insertion par l'activité économique lors de la réunion du Conseil national de l'insertion par l'activité économique à laquelle vous étiez présent, monsieur le sénateur, la revalorisation de l'aide au poste d'accompagnement des ETTI sera portée à 51 000 euros au 1er juillet 2005.
Cette revalorisation tient pleinement compte de la suppression des exonérations spécifiques de charges sociales patronales dont bénéficient les ETTI et de l'application du nouvel allégement Fillon à compter de cette date. Ainsi, et compte tenu de cette réforme sur les exonérations, une aide de 51 000 euros sera attribuée pour l'accompagnement de douze salariés en équivalent temps plein dès le 1er juillet 2005.
Je voudrais rappeler que cette aide s'élevait à un peu plus de 18 000 euros depuis 1999. Nous revalorisons donc l'aide à l'accompagnement de plus de 180 %, ce qui représente un effort significatif de la part de l'Etat.
Enfin, les moyens nouveaux de l'Etat pour les ETTI visent principalement à consolider ces structures, qui connaissent depuis des années une conjoncture difficile. Je voudrais d'ailleurs rendre hommage à ceux qui les font vivre, car ce n'est pas toujours facile.
En effet, les irrégularités de versement depuis des années sont une cause d'angoisse permanente. C'est pourquoi nous avons notamment procédé à des versements réguliers au travers du CNASEA pour que les trésoreries ne soient pas affectées.
L'offre d'insertion ayant diminué de 16 % depuis 2001, il s'agit pour nous de consolider ces structures afin qu'elles puissent de nouveau participer pleinement au développement de l'offre d'insertion, conformément au plan de cohésion sociale.
A la lumière de ces explications, monsieur le sénateur, et compte tenu des efforts consentis par ma collègue Nelly Olin pour porter ces préoccupations auprès du pôle de cohésion sociale, je souhaiterais que vous retiriez cet amendement. Comme vous pouvez le constater, le Gouvernement s'est engagé fortement en faveur de ces entreprises de travail temporaire d'insertion.
M. le président. Monsieur Seillier, l'amendement n° 323 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Seillier. J'ai pris la précaution, en présentant mon amendement, d'en appeler à une réflexion sur les chiffres. J'étais en effet pleinement conscient de l'effort significatif engagé en faveur des entreprises de travail temporaire d'insertion. Je voulais néanmoins vérifier si cette revalorisation de plus de 180 % au 1er juillet 2005 comprenait la compensation de la suppression de l'exonération de cotisations sociales.
Je remercie M. le ministre pour les éclaircissements qu'il a apportés sur ces questions délicates. J'ai connu des entreprises de travail temporaire d'insertion qui créaient une entreprise de travail temporaire normale pour pallier les difficultés de versement des subventions et qui procédaient ensuite au basculement du salarié de l'une sur l'autre, ce qui n'était pas convenable. Je me réjouis donc de la clarification des modes de fonctionnement, et surtout de la régularité dans le versement des subventions que le passage par le CNASEA va permettre.
Dans ces conditions, monsieur le président, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 323 rectifié est retiré.
L'amendement n° 360 rectifié, présenté par MM. Seillier, Pelletier, de Montesquiou et Mouly, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe V ainsi rédigé :
... - Il est prévu une programmation pluriannuelle pour le travail d'accompagnement effectué par les groupements d'employeurs mentionnés à l'article L.127-1 du code du travail qui organisent des parcours d'insertion et de qualification.
La parole est à M. Bernard Seillier.
M. Bernard Seillier. Il s'agit, par cet amendement, de prévoir une programmation pluriannuelle pour le travail d'accompagnement effectué par les groupements d'employeurs. Je tiens à remercier M. le ministre d'en avoir accepté la reconnaissance officielle en permettant au Sénat de voter l'inscription des groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification.
Cet amendement vise donc à inscrire la programmation de l'aide au financement de cet accompagnement personnalisé. J'attire tout spécialement l'attention du Gouvernement sur un point qui, j'en suis persuadé, ne lui a pas échappé : la suppression des contrats de qualification adulte va mettre les groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification - GEIQ - en difficulté. En effet, les primes attribuées en contrepartie des contrats de qualification des adultes âgés de vingt-six à quarante-cinq ans, soit 1 525 euros, disparaissent sans qu'aucune exonération fiscale soit accordée. Or ceux-ci représentent actuellement 40 % des 2 500 salariés en parcours d'insertion au sein des groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification.
Le problème est donc sensible et la difficulté est d'autant plus forte que les organismes paritaires collecteurs agréés semblent vouloir favoriser les contrats de moins d'un an, en minorant les paiements des heures de formation pour les contrats plus longs. Or un adulte sans qualification qui veut passer un CAP a besoin d'un parcours de plus d'un an.
Il semble donc souhaitable d'étendre le bénéfice de cette aide à l'ensemble des publics prioritaires embauchés par les GEIQ, quel que soit leur âge. Cela permettrait de développer l'action d'accompagnement de ces structures au-delà du public des jeunes de moins de vingt-six ans, qui représentent aujourd'hui près des deux tiers des salariés des GEIQ, afin d'offrir à l'ensemble des publics prioritaires de la politique de l'emploi la possibilité de bénéficier d'un accompagnement vers l'emploi ordinaire d'une manière tout à fait favorable et efficace puisque les conditions de travail à l'intérieur d'un GEIQ sont celles d'une entreprise de droit commun.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir une programmation financière pluriannuelle au profit des groupements d'employeurs qui effectuent un travail d'accompagnement auprès de publics en difficulté. Il ne définit cependant aucun objectif financier précis.
Dans ces conditions, la commission a estimé qu'il serait plus judicieux d'examiner cette question dans le cadre du débat budgétaire et a souhaité le retrait de l'amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cet amendement appelle deux observations.
D'une part, il vise à prévoir à moyen terme la garantie d'une aide effective au travail d'accompagnement effectué par les groupements d'employeurs. Il nous paraît préférable de maintenir ces crédits au sein de l'article 15 du chapitre 44-79, qui regroupe l'ensemble des crédits permettant les dotations déconcentrées pour la promotion de l'emploi. Nous déterminerons lors de chaque exercice la part de ces crédits qui sera affectée au paragraphe 50 « accompagnement vers l'emploi des personnes en qualification ».
D'autre part, l'objectif de programmation visé par cet amendement n'est pas neutre en termes d'augmentation de la charge publique. Voilà pourquoi l'article 40 de la Constitution nous paraît s'appliquer. Evocation, invocation : tout dépendra de la position que vous prendrez, monsieur Seillier...
M. le président. Monsieur Seillier, l'amendement n° 360 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Seillier. A ce stade du débat, la prise en compte des groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification me semble très importante. Afin d'éviter au ministre le choix cornélien entre l'évocation et l'invocation de l'article 40, je retire l'amendement !
M. le président. L'amendement n° 360 rectifié est retiré.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l'article 38.
M. Jean-Pierre Godefroy. L'article 38, relatif aux dispositions de programmation, est fort intéressant. M. Jean-Louis Borloo, avait d'ailleurs souligné que c'était l'acte républicain par excellence, et nous lui avions fait observer que les lois de programmation, en matière militaire par exemple, étaient parfois l'objet de rectificatifs, d'annulations de crédits, bref, qu'elles n'étaient pas gravées dans le marbre !
Mais, dans cet article 38, il manque quelque chose : outre les aides apportées par l'Etat, il aurait été intéressant de connaître la programmation des collectivités territoriales. Force est de constater que nous ne savons pas ce que cela représentera pour ces dernières. Il est très difficile de voter un tel article sans en connaître précisément les conséquences.
Bien que la programmation envisagée puisse paraître satisfaisante, les manques que nous avons soulignés nous conduisent à voter contre l'article 38.
A cet égard, monsieur le président, nous avons déposé un amendement n° 280 tendant à insérer un article additionnel après l'article 38 afin qu'un rapport d'évaluation soit présenté régulièrement au Parlement. Nous serions ainsi informés de l'effectivité de la programmation, voire de la montée en puissance de l'effort communal et départemental.
Puisque nous en sommes parvenus à la fin de l'examen du titre Ier, madame, monsieur le ministre, je voudrais vous poser une question.
Nous avons eu le plaisir de lire dans un quotidien du matin, sous le titre « bonne nouvelle », que le Gouvernement envisageait de déposer un amendement rétablissant le différentiel de déduction fiscale des dons au profit des associations de type « Restos du coeur ».
Je rappellerai que le groupe socialiste à l'Assemblée nationale a proposé un amendement similaire - comme chaque année d'ailleurs - dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2005, amendement qui a été refusé par le Gouvernement.
Nous souhaiterions donc connaître l'intention du Gouvernement. Nous sommes prêts à déposer s'il le faut un amendement en ce sens ou à nous associer à celui que le Gouvernement soumettrait à notre assemblée.
M. le président. Il ne faut pas se laisser impressionner par ce qu'on peut lire dans les quotidiens du matin ! (Sourires.)
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. L'adoption par le Sénat de l'amendement de M. de Broissia sur les horaires de nuit dans la presse a conduit à une sortie très matinale des quotidiens ! (Sourires.)
Plus sérieusement, s'agissant de la mesure des effets réels, elle est du ressort du comité régional de l'emploi, sous l'autorité du préfet de région et du comité national de l'emploi. Néanmoins, nous partageons votre souci de disposer d'une mesure régulière et nous nous en remettrons à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 280.
S'agissant de l'amendement gouvernemental qui vient d'être évoqué, si vous le permettez, monsieur le président, je céderai le micro à ma collègue Nelly Olin, car il s'inscrit dans l'un des combats qu'elle mène !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, il est bien dans l'intention du Gouvernement de déposer un amendement portant article additionnel avant le chapitre Ier du titre III relatif aux organismes sans but lucratif procédant à la fourniture gratuite de repas, contribuant à favoriser le logement ou fournissant gratuitement des soins à des personnes en difficultés. Ces organismes jouent un rôle éminent en faveur de la cohésion sociale.
Le Gouvernement propose donc de relever le pourcentage des dons donnant lieu à réduction d'impôt, qui passerait des deux tiers aux trois quarts, ainsi que le plafond dans la limite duquel s'applique ce pourcentage de réduction, qui passerait de 414 euros à 470 euros.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Madame la ministre, nous attendrons que cet amendement soit déposé pour en discuter ; cependant, il nous satisfait sur le principe.
Quoi qu'il en soit, madame la ministre, je vous fais remarquer que le groupe socialiste avait déposé à l'Assemblée nationale un amendement en ce sens, qui n'a pas été accepté par le Gouvernement, mais il n'est jamais trop tard pour bien faire !
Par ailleurs, monsieur le président, vous voyez bien qu'il est utile de lire la presse le matin ! (Sourires.)