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souhaits de bienvenue à des délégations parlementaires de pays du Caucase du sud
M. le président. Mes chers collègues, j'ai l'honneur et le plaisir de saluer la présence, dans notre tribune présidentielle, de M. Aleskerov, président de l'Assemblée nationale de la République azerbaïdjanaise, de M. Baghdassarian, président de l'Assemblée nationale de la République d'Arménie, et de Mme Burdjanadze, président du Parlement de Géorgie. Je salue aussi les délégations qui les accompagnent. (Mmes et MM. les ministres, ainsi que Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
Après une première réunion, tenue à Versailles, en 1999, et une deuxième réunion, à Tbilissi, en 2001, c'est la troisième fois que les présidents de parlements des pays du Caucase du Sud se rencontrent ainsi sur l'initiative du Sénat pour évoquer la situation régionale complexe et les perspectives de coopération entre nos assemblées.
Je me réjouis que la présence et la participation active des trois présidents confortent et pérennisent le processus que nous avons engagé ensemble, à Versailles, il y a bientôt cinq ans, malgré une situation régionale particulièrement tendue. J'y vois une illustration vivante de ce que la diplomatie parlementaire peut apporter à la diplomatie traditionnelle.
Je souhaite, au nom du Sénat tout entier, que cette coopération, modèle de la coopération interparlementaire et de la coopération régionale, se renforce et s'enrichisse, car je suis convaincu qu'elle a son rôle à jouer au service de la paix et de la concorde entre les peuples. J'assure les trois délégations, que nous avons le plaisir et l'honneur d'accueillir aujourd'hui dans l'hémicycle du Sénat, de la pleine et entière disponibilité de l'institution sénatoriale de la République française à y concourir activement. Je leur souhaite une cordiale bienvenue au Sénat. (Applaudissements.)
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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CANDIDATURES À des organismes extraparlementaires
M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de seize organismes extraparlementaires.
La commission des finances a fait connaître ses candidats.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition, à l'expiration du délai d'une heure.
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Cohésion sociale
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi complété par une lettre rectificative de programmation pour la cohésion sociale.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 51, qui avait été précédemment réservé.
Article 51 (précédemment réservé)
I. - Le e du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts est ainsi modifié :
A. - Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de la déduction forfaitaire, mentionné au premier alinéa, est fixé à 40 % lorsque le contribuable a exercé l'option prévue au h, à la double condition qu'il donne, pendant toute la durée d'application de cette option, le logement en location à un organisme sans but lucratif ou à une union d'économie sociale qui le met à la disposition de personnes défavorisées mentionnées à l'article 1er de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement autres qu'un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un descendant du contribuable, l'organisme ou l'union ayant été agréé à cet effet par le représentant de l'État dans le département, et qu'il s'engage, dans les conditions prévues au h, à ce que le loyer et les ressources du locataire, appréciées à la date de conclusion du bail, n'excèdent pas des plafonds fixés par décret et inférieurs à ceux mentionnés au deuxième alinéa ci-dessus. Ces dispositions s'appliquent aux logements acquis neufs ou en état futur d'achèvement à compter du 1er janvier 2005 et aux logements que le contribuable fait construire et qui ont fait l'objet, à compter de la même date, d'une déclaration d'ouverture de chantier. Elles sont également applicables aux locaux affectés à un usage autre que l'habitation acquis à compter du 1er janvier 2005 et que le contribuable transforme en logement, ainsi qu'aux logements acquis à compter de cette date que le contribuable réhabilite en vue de leur conférer des caractéristiques techniques voisines de celles des logements neufs.»
B. - A l'alinéa devenu le cinquième alinéa, les mots : « à compter du 1er janvier 2002 » sont remplacés par les mots : « entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2004 ».
L'alinéa devenu le sixième alinéa est complété par les dispositions suivantes :
« À l'issue de la période de trois ans en cours au 1er janvier 2005, le propriétaire peut bénéficier, qu'il y ait ou non changement de titulaire du bail, de la déduction forfaitaire majorée de 40 % prévue au deuxième alinéa, à la condition de respecter les plafonds de loyer et de ressources fixés par le décret prévu à ce deuxième alinéa. »
C. - Aux alinéas devenus les septième et neuvième alinéas, les mots : « mentionnés au deuxième ou au quatrième alinéa » sont remplacés par les mots : « mentionnés au deuxième, au quatrième ou au cinquième alinéa » ;
À l'alinéa devenu le huitième alinéa, les mots : « ou au quatrième » sont supprimés.
II. - Aux quatrième et septième alinéas des g et h du 1° du I de l'article 31 du même code, les mots : « au taux de 40 % ou de 60 % » sont remplacés par les mots : « prévue aux deuxième et cinquième alinéas du e ».
III. - Au c du 2 de l'article 32 du même code, les mots : « deuxième à quatrième alinéas » sont remplacés par les mots : « deuxième à cinquième alinéas ».
M. le président. L'amendement n° 141, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la dernière phrase du texte proposé par le A du I de cet article pour insérer un alinéa après le troisième alinéa du e du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts :
Elles sont également applicables aux locaux affectés à un usage autre que l'habitation acquis à compter du 1er janvier 2005 et que le contribuable transforme en logements, ainsi qu'aux logements acquis à compter de cette date qui ne satisfont pas aux caractéristiques de décence prévues à l'article 6 de la loi nº 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi nº 86-1290 du 23 décembre 1986 et qui font l'objet de travaux de réhabilitation définis par décret permettant aux logements d'acquérir des performances techniques voisines de celles des logements neufs.
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur pour avis.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Il s'agit d'un amendement rédactionnel de cohérence, qui rend le libellé du dispositif proposé par l'article 51 identique, s'agissant des logements anciens réhabilités, à celui qui avait été retenu au moment de l'élaboration du dispositif d'amortissement fiscal pour les investissements locatifs, donc le dispositif Robien, dans le cadre de la loi urbanisme et habitat du 2 juillet 2003.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur de la commission des affaires sociales. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 100, présenté par Mme Létard, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le C du I de cet article :
C. - 1. Dans la première phrase du sixième alinéa, les mots : « mentionnés au deuxième ou au quatrième alinéa » sont remplacés par les mots : « mentionnés au deuxième, au quatrième ou au cinquième alinéa ».
2. Au septième alinéa, les mots : « ou au quatrième » sont supprimés.
3. Au huitième alinéa, les mots : « prévues au deuxième ou au quatrième alinéa » sont remplacés par les mots : « prévues au deuxième, au quatrième ou au cinquième alinéa ».
La parole est à Mme Valérie Létard, rapporteur.
Mme Valérie Létard, rapporteur. Il s'agit, là encore, d'un amendement rédactionnel, qui vise à rédiger de nouveau le C du I de l'article 51.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 51, modifié.
(L'article 51 est adopté.)
Article additionnel après l'article 51 (précédemment réservé)
M. le président. L'amendement n° 164, présenté par M. Girod, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 51, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Après le 4º ter du 1. de l'article 207 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4º quater. Les unions d'économie sociale dont la gérance est désintéressée, pour leurs activités effectuées, dans le cadre du conventionnement prévu par l'article L. 3512 du code de la construction et de l'habitation, en faveur du logement des personnes défavorisées mentionnées à l'article 1er de la loi n° 90449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement ».
II.- La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Paul Girod, rapporteur pour avis.
M. Paul Girod, rapporteur pour avis de la commission finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. finances. Cet amendement tend à exonérer les unions d'économie sociale d'impôt sur les sociétés pour leurs activités en faveur du logement des personnes en difficulté.
Je rappelle que d'autres organismes de logement sont exonérés d'impôt sur les sociétés et que ceux-ci, qui s'occupent de gens en situation de grande précarité, ne le sont pas, ce qui leur cause un certain nombre de difficultés. Notre demande n'est d'ailleurs pas nouvelle et la commission des finances avait reçu des engagements du Gouvernement, qu'il faut maintenant tenir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. La commission est très favorable à cet amendement. En effet, les unions d'économie sociale sont souvent des partenaires importants des sociétés d'HLM, dans l'accompagnement des dispositifs de renouvellement urbain et dans toutes les actions qui sont menées avec les populations en difficulté associant des établissements publics, différents organismes et les associations. Il serait donc tout à fait justifié de leur accorder cette exonération.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à une évolution du régime fiscal de l'impôt sur les sociétés des unions d'économie sociale qui mettent des logements à disposition des ménages les plus modestes. L'amendement de la commission des finances correspond tout à fait à cet objectif.
Le Gouvernement y est donc favorable et il lève le gage.
M. Paul Girod, rapporteur pour avis. Merci, monsieur le ministre.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 164 rectifié
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté à l'unanimité.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 51.
Article 52 (précédemment réservé)
Le III de l'article 234 nonies du code général des impôts est complété par un 11° ainsi rédigé :
« 11° Des logements qui ont fait l'objet, après une vacance continue de plus de douze mois, d'une mise en location assortie d'une convention conclue à compter du 1er juillet 2004 en application du 4° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation, le bénéfice de l'exonération s'appliquant jusqu'au 31 décembre de la troisième année suivant celle de la conclusion du bail. » - (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 52 (précédemment réservés)
M. le président. L'amendement n° 142 rectifié, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article L. 421-1 du code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :
A- Le cinquième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ils peuvent également gérer, en qualité de syndics de copropriété et d'administrateurs de biens, après accord du maire de la commune d'implantation et dans les conditions fixées par l'article L. 442-11, des logements situés dans le périmètre défini pour une opération programmée d'amélioration de l'habitat visée à l'article L. 303-1 ainsi que les logements appartenant à des personnes privées et vacants depuis plus d'un an ; »
B - Le sixième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ils peuvent également réaliser des prestations de services pour le compte de syndicats de copropriétaires d'immeubles faisant l'objet d'un plan de sauvegarde en application de l'article L. 615-1 ou situés dans le périmètre défini pour une opération programmée d'amélioration de l'habitat visée à l'article L. 303-1. »
II. L'article L. 422-2 du code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :
A- Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elles peuvent également gérer, en qualité de syndics de copropriété et d'administrateurs de biens, après accord du maire de la commune d'implantation et dans les conditions fixées par l'article L. 442-11 des logements situés dans le périmètre défini pour une opération programmée d'amélioration de l'habitat visée à l'article L. 303-1 ainsi que les logements appartenant à des personnes privées et vacants depuis plus d'un an. »
B - Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elles peuvent également réaliser des prestations de services pour le compte de syndicats de copropriétaires d'immeubles faisant l'objet d'un plan de sauvegarde en application de l'article L. 6151 ou situés dans le périmètre défini pour une opération programmée d'amélioration de l'habitat visée à l'article L. 303-1. »
III. Après le onzième alinéa de l'article L. 422-3 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« Elles peuvent également gérer, en qualité de syndics de copropriété et d'administrateurs de biens, après accord du maire de la commune d'implantation et dans les conditions fixées par l'article L. 442-11, des logements visés dans le périmètre défini pour une opération programmée d'amélioration de l'habitat visée à l'article L. 303-1 ainsi que les logements appartenant à des personnes privées et vacants depuis plus d'un an.
« Elles peuvent également réaliser des prestations de services pour le compte de syndicats de copropriétaires d'immeubles faisant l'objet d'un plan de sauvegarde en application de l'article L. 6151 ou situés dans le périmètre défini pour une opération programmée d'amélioration de l'habitat visée à l'article L. 303-1. »
IV - Après l'article L. 442-10 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article L. 44211 ainsi rédigé :
« Art. L. 442-11. - Les logements situés dans le périmètre défini pour une opération programmée d'amélioration de l'habitat visée à l'article L. 303-1 ainsi que les logements appartenant à des personnes privées et vacants depuis plus d'un an pris en gérance et donnés en location par les organismes d'habitations à loyer modéré doivent satisfaire aux normes minimales de confort et d'habitabilité mentionnées à l'article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée. Ces logements sont attribués selon les règles fixées par la section 1 du chapitre Ier du présent titre et leur loyer ne peut excéder un plafond fixé par l'autorité administrative. »
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur pour avis.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. Cet amendement vise permettre aux organismes d'HLM - qu'il s'agisse des offices publics d'aménagement et de construction, les OPAC, des sociétés anonymes d'HLM ou des sociétés anonymes coopératives de production d'HLM - de prendre en gérance, en tant que syndics et administrateurs de biens, des logements appartenant à des propriétaires privés qui accepteraient de louer leur bien à des personnes aux ressources modestes moyennant un loyer modéré.
Ce dispositif ne s'appliquerait bien sûr qu'aux logements vacants depuis au moins un an ou situés dans le périmètre d'une opération programmée d'amélioration de l'habitat, et après accord du maire de la commune.
Cet amendement vise également à permettre aux organismes d'HLM de réaliser des prestations de services pour le compte de syndicats de copropriétaires d'immeubles faisant l'objet d'un plan de sauvegarde de copropriété.
Permettez-moi d'ailleurs de rappeler que cette proposition avait déjà été faite par notre collègue Marcel-Pierre Cléach dans son rapport d'information sur le logement locatif privé, qu'il a présenté l'année dernière au nom de la commission des affaires économiques.
Nous savons tous qu'un certain nombre de propriétaires hésitent à mettre en location leur logement, soit par peur du contact avec le locataire, soit en raison des risques d'impayés, soit parce qu'ils craignent, s'agissant personnes âgées, de voir libéré le logement à un moment donné. Le fait de confier la gérance du logement à un syndic permettrait à la fin du bail de prendre l'engagement vis-à-vis du locataire de le reclasser dans un logement social, si c'est possible.
De plus, il s'agit de permettre aux organismes d'HLM d'être des syndics, notamment dans les cas de copropriété en difficulté, qui sont le principal problème des quartiers sensibles. En effet, dans ces quartiers, les syndics privés et les administrateurs de biens ne se bousculent pas pour gérer les copropriétés en difficulté.
Il s'agit donc d'une disposition importante pour permettre à ces copropriétés en difficultés, auxquelles nous consacrons parfois des moyens importants, de sortir de l'ornière dans laquelle elles se trouvent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. L'amendement présenté par M. Braye complète utilement la loi Meyer du 19 février 1998, qui permettait déjà à ces organismes de sous-louer des logements privés vacants et de gérer des logements dans des copropriétés dégradées.
En conséquence, la commission émet un avis très favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué. Dans le contexte actuel de crise du logement et de mobilisation très volontariste du Gouvernement à travers le plan de cohésion sociale, le dispositif proposé par M. Braye est tout à fait intéressant, d'autant que les organismes d'HLM n'entreront pas en concurrence avec les gestionnaires privés. En effet, ce dispositif ne concerne que les logements hors marché, soit laissés vacants depuis plusieurs années, soit abandonnés et nécessitant des travaux très importants dans le cadre d'une opération programmée de l'amélioration de l'habitat.
Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 52.
L'amendement n° 328, présenté par MM. Repentin, Raoul et Desessard, Mmes Le Texier et San Vicente, M. Vezinhet, Mmes Printz et Boumediene-Thiery, MM. Godefroy, Lagauche et Mélenchon, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le troisième alinéa de l'article L. 135 B du livre des procédures fiscales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elle est également tenue de leur transmettre, à leur demande, les informations nominatives dont elle dispose sur la vacance des logements. »
La parole est à Mme Michèle San Vicente.
Mme Michèle San Vicente. Cet amendement avait déjà été présenté lors de l'examen du projet de loi relatif aux responsabilités locales.
La lutte contre la vacance des logements et la mobilisation du parc privé constituent des éléments de réponse à la crise du logement, d'autant que la vacance atteint des proportions importantes dans les grandes agglomérations, là où le marché immobilier est tendu.
Selon l'INSEE, au 1er janvier 2002, la France comptait 2 millions de logements vacants, soit 6,8 % du parc total de logements et 8,2 % des résidences principales. Or ce chiffre doit être comparé à celui des demandeurs de logement, dont le nombre ne cesse de croître.
Cet amendement vise à autoriser les collectivités territoriales et leurs groupements à utiliser les fichiers fiscaux relatifs aux logements vacants. Il s'agit de mettre à leur disposition un moyen supplémentaire pour inciter les propriétaires à louer leur bien immobilier.
L'exploitation de ce fichier se fera dans le respect de la confidentialité des données et selon les modalités d'utilisation qui seront fixées par la Commission nationale informatique et libertés, la CNIL, comme le prévoit l'article du livre des procédures fiscales modifié par cet amendement.
Compte tenu de la priorité affichée pour remettre sur le marché des logements vacants, ce dispositif serait un moyen de dynamiser l'offre locative, tout en favorisant le conventionnement ANAH.
M. François Autain. Très bien dit !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. L'objectif de lutte contre la vacance est louable.
M. François Autain. Mais...
Mme Valérie Létard, rapporteur. Toutefois, il faut garantir le respect des libertés personnelles telles qu'elles sont définies par la CNIL, dans la mesure où il s'agit de la transmission de données nominatives.
En conséquence, la commission s'en remet à la sagesse de notre assemblée.
M. Roland Muzeau. C'est pas mal !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué. L'élu local qui cherche à mobiliser le parc locatif privé se heurte à la méconnaissance des logements à trouver.
Pour autant, l'expression « informations nominatives » me semble trop large. Cependant, comme je considère que vous allez dans le sens de l'objectif visé, je suis l'avis de Mme le rapporteur, étant entendu que la CMP sera mise à profit pour trouver une formulation conforme aux exigences de la CNIL et permettant de bien cibler les informations nominatives.
Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. Roland Muzeau. Cohésion sénatoriale !
M. François Autain. Il a un caillou dans la chaussure !
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur pour avis.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. Je suis un peu moins prudent que M. le ministre et que Mme le rapporteur car j'ai souvent discuté de cette question avec Thierry Repentin. Je suis, personnellement, favorable à cet amendement. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Cette proposition, je tiens à le répéter, avait été faite par notre collègue Marcel-Pierre Cléach dans son rapport sur le logement locatif, au nom de la commission des affaires économiques.
Une telle disposition, comme vous l'avez rappelé, madame San Vicente, permettrait aux collectivités locales de mener des actions ciblées de lutte contre la vacance des logements afin de déterminer les raisons qui amènent les propriétaires à ne pas louer et de proposer des solutions d'accompagnement. Cela leur permettrait sûrement de mobiliser un parc de logements important. En effet, il ne faut pas oublier que l'on compte environ 2 millions de logements vacants dans notre pays et que, si l'on prend en compte la rotation normale, au moins 1 million de logements pourraient être mobilisés.
Sous les réserves judicieuses que viennent de faire M. le ministre et Mme le rapporteur quant à la CMP et au respect des prescriptions de la CNIL, je souhaite que cet amendement soit adopté.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 52.
Article additionnel avant l'article 53 (précédemment réservé)
M. le président. L'amendement n° 143, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Avant l'article 53, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
A la fin du dernier alinéa du III de l'article 75 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, l'année : « 2005 » est remplacée par l'année : « 2006 »
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur pour avis.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à repousser d'un an l'entrée en vigueur des dispositions relatives à la comptabilité des copropriétés prévues par l'article 14-3 de la loi du 10 juillet 1965 et introduites par la loi SRU du 13 décembre 2000. Ces dispositions indiquent que les comptes du syndicat sont établis conformément à des règles comptables spécifiques et obligent le syndic à établir un budget prévisionnel et à tenir, pour chaque syndicat, une comptabilité séparée qui fait apparaître la position de chaque copropriétaire à l'égard du syndicat.
Or le décret d'application fixant les règles comptables spécifiques prévu par cet article n'est pas encore paru.
M. Roland Muzeau. C'est un scandale !
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. Il devrait être publié d'ici à la fin de l'année.
Toutefois, et nous le comprenons bien, les organisations professionnelles de la gestion d'immeuble et de l'administration de biens souhaitent disposer d'un délai supplémentaire, afin de s'adapter et de mettre en place tous les systèmes comptables nécessaires.
C'est pourquoi cet amendement tend à faire entrer en vigueur ces dispositions au 1er janvier 2006.
Je rappelle à ce propos à la Haute Assemblée que nous avions déjà procédé à un report d'un an lors de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions relatives à l'urbanisme, à l'habitat et à la construction dont j'étais rapporteur.
Je souhaiterais, monsieur le ministre, pouvoir prendre devant le Sénat l'engagement que le report prévu par cet amendement sera le dernier et que le décret d'application paraîtra prochainement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. Dans la mesure où le décret d'application n'est pas encore publié près de quatre ans après le vote de la loi SRU, il paraît en effet difficile de demander aux gestionnaires des copropriétés de s'adapter avant le 1er janvier 2005 aux dispositions qu'il prévoit, car cela suppose, en outre, une formation spécifique du personnel.
C'est pourquoi la commission est favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Roland Muzeau. Le décret !
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué. M. Braye a raison de soulever ce problème. A un moment où nous sommes en train de mobiliser l'ensemble des acteurs pour produire plus, il ne me semble pas approprié de faire de la bureaucratie comptable tatillonne.
Si tout va bien, le décret d'application sera publié d'ici à la fin de l'année, mais sans le principe des quatre sous-comptes de la comptabilité qui me semble ubuesque dans la situation où nous sommes.
Je trouve tout à fait opportun de reporter d'un an l'entrée en vigueur de ces dispositions. Le Gouvernement est favorable à cette solution de bon sens.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 53.
Article 53 (précédemment réservé)
Le Gouvernement est autorisé, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, à prendre, par ordonnances, les mesures de nature législative nécessaires à la lutte contre l'habitat insalubre et des mesures de même nature relatives aux immeubles menaçant ruine et aux établissements à usage total ou partiel d'habitation hébergeant des personnes dans des conditions indignes.
A cet effet, les ordonnances auront pour objet de :
1° Simplifier et harmoniser les divers régimes de police administrative ;
2° Faciliter la réalisation des travaux ainsi que l'hébergement et le relogement des occupants et préciser en la matière les responsabilités respectives des autorités de l'État et des collectivités locales ou de leurs groupements ;
3° De mieux préserver les droits des occupants et propriétaires de bonne foi ;
4° Aménager et compléter le régime des sanctions pénales ;
5° Créer un dispositif de séquestre immobilier spécial permettant de récupérer tout ou partie de la créance due à la collectivité publique qui a assuré des travaux d'office ou supporté des dépenses d'hébergement ou de relogement des occupants incombant au propriétaire.
Les ordonnances seront prises au plus tard dans les douze mois suivant la publication de la présente loi, ce délai étant porté à seize mois pour les mesures prévues au 5°. Le projet de loi portant ratification devra être déposé devant le Parlement au plus tard dans un délai de trois mois suivant la publication de ces ordonnances.
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 342, présenté par MM. Repentin, Raoul et Desessard, Mmes Le Texier et San Vicente, M. Vezinhet, Mmes Printz et Boumediene-Thiery, MM. Godefroy, Lagauche et Mélenchon, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Michèle San Vicente.
Mme Michèle San Vicente. Autoriser le Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures de nature législative nécessaires à la lutte contre l'habitat insalubre et les mesures de même nature relatives aux immeubles menaçant ruine n'est pas acceptable. En effet, ces ordonnances traiteront de sujets aussi divers que la simplification ou l'harmonisation des divers régimes de police administrative, la réalisation de travaux, l'hébergement ou le relogement des occupants, la préservation des droits des occupants ou propriétaires de bonne foi, etc. Autant de mesures qui relèvent, selon nous, des prérogatives du Parlement.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons supprimer cet article.
M. le président. L'amendement n° 144, présenté par M. Braye, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa de cet article, supprimer les mots :
de nature législative
et les mots :
de même nature
La parole est à M. Dominique Braye, rapporteur pour avis.
M. Dominique Braye, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement rédactionnel. Une ordonnance, au sens de l'article 38 de la Constitution, contient, par définition, des mesures de nature législative. Une telle précision est donc inutile.
M. le président. L'amendement n° 452, présenté par MM. Ralite, Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le cinquième alinéa (3°) de cet article :
3° De mieux préserver les droits des occupants, qu'il s'agisse d'occupants de droit commun ou relevant du régime des hôtels meublés et propriétés de bonne foi ;
La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Il s'agit d'un amendement de précision, qui vise à spécifier que le Gouvernement est autorisé à légiférer par ordonnances - ce que je n'approuve pas - uniquement dans le but de protéger les catégories de la population qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire celles qui sont les plus vulnérables ou qui souffrent le plus de l'insalubrité et de la précarité au quotidien.
C'est pourquoi cet amendement tend à prévoir qu'une attention particulière doit être portée aux droits des occupants des hôtels meublés et garnis, victimes, dans de trop nombreux cas, d'une forme extrême de précarisation du logement.
M. le président. L'amendement n° 453, présenté par MM. Ralite, Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début du septième alinéa (5°) de cet article :
Faciliter et simplifier le financement des travaux d'office, la préservation des droits des copropriétaires de bonne foi et/ou impécunieux ; aider les collectivités publiques à réaliser des travaux d'office en simplifiant le préfinancement de ces travaux, et en assurant le recouvrement des créances, notamment en créant un dispositif de séquestre... .
La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. L'objectif est le même.
La mise en oeuvre des travaux de substitution, en cas d'insalubrité irrémédiable, a été simplifiée par différents dispositifs depuis la loi SRU. Cependant, elle se heurte encore dans les faits à de réelles difficultés : d'une part, dans le recouvrement des créances ; d'autre part, dans l'application des mesures réglementaires à l'égard des copropriétaires lorsque ces derniers sont impécunieux.
Certes, le projet de loi prévoit un dispositif de séquestre immobilier spécial en faveur de la collectivité publique qui a effectué des travaux d'office ou assuré l'hébergement ou le relogement des occupants incombant au propriétaire.
Cet amendement vise à aller plus loin, en facilitant la mise en oeuvre des travaux d'office par une plus grande simplification de l'ensemble du mécanisme financier. Cette simplification doit intervenir dès le stade du préfinancement des travaux et doit bénéficier aux collectivités publiques qui en ont la charge. En outre, il importe que les droits des copropriétaires de bonne foi et impécunieux soient protégés.
M. le président. L'amendement n° 287, présenté par M. Alduy, est ainsi libellé :
Après l'avant-dernier alinéa (5°) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° Aménager la loi du 10 juillet 1970 relative à la suppression de l'habitat insalubre, notamment pour accélérer l'expropriation des immeubles déclarés insalubres irrémédiables.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 288, présenté par M. Alduy, est ainsi libellé :
Après l'avant-dernier alinéa (5°) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° Créer au code de la santé publique un dispositif pour permettre le traitement d'urgence de situations d'insalubrité graves, préalablement à l'instruction réglementaire de l'arrêté d'insalubrité.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 651, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'avantdernier alinéa (5°) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° Faciliter le traitement d'urgence des situations d'insalubrité.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué. A l'amendement n° 288 de M. Alduy, qui n'a pas été défendu et dont l'objet est identique à celui de cet amendement, le Gouvernement préfère la rédaction de l'amendement n° 651, qui ne préjuge ni de la nature du dispositif de traitement d'urgence des situations d'insalubrités graves ni de sa place éventuelle dans le code de la santé publique.
M. le président. L'amendement n° 454, présenté par MM. Ralite, Muzeau, Fischer, Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'avant-dernier alinéa (5°) de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° Permettre l'application par le maire de la commune concernée des mesures d'urgence prises par le Préfet en application de l'article L. 13114 du code de la santé publique, et le recouvrement des sommes ainsi engagées.
La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. Lors du débat sur le projet de loi relatif à la politique de santé publique, le Parlement a modifié l'article L. 13-11-4 du code de la santé publique, qui permet au préfet de prendre des mesures d'urgence lorsque les situations présentent un danger immédiat pour la santé publique. Dans leur majorité, ces situations relèvent de problèmes d'habitat insalubre, notamment de coupures d'eau potable.
La question de l'intervention des maires dans ce dispositif n'a pas été complètement réglée à l'occasion de ce débat, pour des raisons essentiellement juridiques de clarification des compétences respectives.
A la lumière des premiers mois de mise en oeuvre du nouvel article L. 13-11-4 du code de la santé publique, il semble indispensable de régler cette question de l'implication des maires dans les dispositifs d'urgence. C'est pourquoi je vous propose d'adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 481, présenté par M. Delfau, est ainsi libellé :
Après l'avant-dernier alinéa (5°) de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
... ° Sécuriser les propriétaires, bailleurs privés, par un mécanisme d'incitation à la souscription d'une assurance pour perte de loyer ;
... ° Instaurer un moratoire des loyers pendant 5 ans à compter de la promulgation de la présente loi dans les collectivités locales victimes de mouvements spéculatoires immobiliers en tenant compte d'indices techniques déterminés par les organismes publics chargés d'étudier lesdits mouvements.
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Cet amendement a pour objet de mettre l'accent sur un élément d'insécurité sociale que représentent la spéculation foncière et, surtout, l'augmentation des loyers dans des conditions qui ne sont pas compatibles avec les ressources d'un certain nombre de nos concitoyens.
Pour cela, il est sans aucun doute nécessaire, et vous y avez songé dans le projet de loi, de rassurer les propriétaires, les bailleurs privés. Encore faut-il que le mécanisme d'incitation soit suffisamment attractif pour être efficace.
Devant la hausse vertigineuse des loyers dans quelques grandes villes ou dans quelques régions spécifiques - la région Languedoc-Roussillon dont je suis l'élu connaît cette situation -, ne serait-il pas nécessaire, symboliquement, d'instaurer un moratoire de cinq ans - cette durée est indicative -, le temps que le marché immobilier retrouve son équilibre et que les relations entre bailleurs et locataires accèdent à un minimum de régularité et de sérénité ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. En ce qui concerne l'amendement n° 342, devant l'urgence à lutter contre l'habitat insalubre, il convient de prendre rapidement les mesures qui s'imposent en aidant au mieux les collectivités à assurer leurs missions tout en sécurisant le droit des locataires de bonne foi. C'est pourquoi la commission est défavorable à cet amendement de suppression.
La commission est en revanche favorable à l'amendement rédactionnel n° 144.
L'amendement n° 452 tend à introduire une précision inutile. En effet, on peut supposer que le contenu des ordonnances englobera l'ensemble des aspects visés. La commission émet donc un avis défavorable, non pas parce que ce souci de précision n'est pas légitime, mais parce qu'il compliquera la rédaction du texte.
M. Jack Ralite. En êtes-vous sûre ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. De la même manière et pour les mêmes raisons, la commission est défavorable à l'amendement n° 453, qui participe de la même démarche.
Si l'amendement n° 651 a le même objet que l'amendement n° 288, sa rédaction me semble toutefois préférable, car elle ne préjuge ni du dispositif qui sera choisi ni de sa place éventuelle dans le code de la santé publique. C'est pourquoi la commission y est favorable.
La possibilité que tend à instaurer l'amendement n° 454 est déjà prévue dans la loi relative à la politique de santé publique. C'est pourquoi cet amendement me paraît satisfait. Pour nous en assurer, je demande l'avis du Gouvernement sur le sujet.
Enfin, les dispositions que tend à mettre en place l'amendement n° 481 soulèvent plusieurs difficultés. Pour ce qui concerne l'assurance, le dispositif ne me semble pas aller dans le sens d'une responsabilisation des bailleurs et des locataires. Par ailleurs, s'agissant du moratoire, il paraît délicat à la fois de l'imposer à des propriétaires privés dans un contexte de liberté des prix et d'en fixer les modalités techniques. C'est pourquoi je demande le retrait de cet amendement, sinon la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué. Madame San Vicente, il n'est pas possible de déposer un amendement de suppression d'un article de lutte contre l'habitat indigne quand, vous comme nous, nous parcourons la France et voyons la situation à laquelle nous sommes confrontés.
Si les ordonnances souffraient d'un manque de transparence et que leurs objectifs fussent contestables, je comprendrais votre position. Mais nous avons apporté toutes les garanties nécessaires et nous avons besoin d'agir vite sur ces questions, qu'il s'agisse de la lutte contre les marchands de sommeil, de la mise sous séquestre immobilier, de la possibilité d'agir sur une partie de la copropriété, etc.
Au regard des conditions, sordides dans certaines agglomérations, dans lesquelles certains de nos compatriotes vivent aujourd'hui, il est plus qu'urgent d'agir, me semble-t-il.
Le Gouvernement ne peut donc être favorable à l'amendement de suppression n° 342.
Nous sommes favorables à l'amendement n° 144, qui est d'ordre rédactionnel.
Les amendements proposés par M. Ralite soulèvent de vraies questions.
S'agissant de l'amendement n° 452, la précision apportée paraît toutefois inutile, car, comme l'a dit Mme le rapporteur, tous les occupants des locaux utilisés à des fins d'habitation, quel que soit le régime juridique applicable à ces locaux, sont visés dans les ordonnances qui seraient prises en application de l'article 53, y compris les occupants des hôtels et autres locations meublées. Nous avons donc déjà répondu à votre préoccupation, monsieur Ralite, et sommes défavorables à cet amendement.
Dans l'amendement n° 453, vous soulevez la question très importante des travaux d'office de sortie d'insalubrité ou de péril réalisés par les communes. Nous sommes évidemment en phase avec cette préoccupation.
La loi énonce qu'en cas de carence des propriétaires le maire ou, à défaut, le préfet exécute les travaux d'office aux frais du propriétaire. Pour faciliter l'action des communes, le décret de l'ANAH prévoit une subvention importante en leur faveur, à savoir 50 %. Un projet de décret modificatif des aides de l'ANAH est en cours de préparation. Ce décret va donc dans le sens que vous souhaitez, monsieur Ralite. Il n'y a donc pas lieu de faire figurer ce point dans l'ordonnance.
La seconde préoccupation qui est évoquée dans cet amendement concerne les travaux d'office à exécuter dans les copropriétés. Il est prévu, dans le projet d'ordonnance, de faciliter les travaux en permettant aux collectivités publiques de ne se substituer qu'aux seuls copropriétaires défaillants, ce qui permet d'intervenir beaucoup plus vite sur les copropriétés. Nous répondons donc, par ce biais, à votre préoccupation.
En ce qui concerne l'amendement n° 454, ma position est plus ouverte que celle de Mme le rapporteur. J'ai en effet soumis la question qui est posée par M. Ralite aux services compétents. En cas d'urgence, notamment en présence d'un danger imminent pour la santé publique, le préfet peut ordonner l'exécution immédiate de mesures, telles que les règles prescrites par l'hygiène ou prévues par le code de la santé publique.
Vous prévoyez, monsieur Ralite, que le préfet saisi par le maire puisse faire injonction à un logeur de faire rétablir l'eau, par exemple, dans un immeuble d'habitation. L'amendement que vous proposez prévoit, outre l'application de la mesure par le maire, la possibilité de l'appliquer d'office en cas de carence. Cette disposition allant tout à fait dans le sens que nous souhaitons, nous y sommes favorables. (Très bien ! sur les travées du groupe CRC.)
Enfin, pour les raisons déjà évoquées par Mme Létard, nous sommes défavorables à l'amendement n° 481.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote sur l'amendement n° 452.
M. Roland Muzeau. Monsieur le ministre, vous avez fait référence aux ordonnances qui seront prises s'agissant des questions qui ont été soulevées par mon ami Jack Ralite. Vous mesurez bien, ainsi que vous venez de l'indiquer, l'urgence des décisions à prendre, qui, pour avoir une réelle portée, doivent être appliquées dans les meilleurs délais. C'était d'ailleurs l'objet des amendements qui ont été défendus par M. Ralite.
Vous savez que les ordonnances ne sont pas notre tasse de thé, comme l'on dit. Cela étant, c'est le mode opératoire que le Gouvernement a choisi. Quand ces ordonnances seront-elles prises et pouvez-vous nous assurer qu'elles tiendront compte des préoccupations que nous avons exprimées ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué. En tant qu'ancien vice-président de l'Assemblée nationale, je tiens à vous dire, monsieur Muzeau, que les ordonnances ne sont pas non plus ma tasse de thé.
Mais compte tenu de la situation à laquelle nous sommes confrontés, il faut agir vite. Ces ordonnances sont prêtes. La transparence est totale. Les rapporteurs nous ont interrogés sur ce sujet. Il en va de la salubrité publique, qui est une cause d'intérêt national, qui transcende les clivages politiques. Mme Nancy Bouché qui a travaillé sur ce sujet peut évidemment donner à l'ensemble des groupes politiques de la Haute Assemblée toutes les informations nécessaires. Nous souhaitons, quant à nous, aller le plus vite possible : dès la promulgation de la loi, nous pouvons prendre les ordonnances.
J'ai indiqué à M. Ralite que deux des trois problèmes qu'il a soulevés seront résolus soit par les ordonnances, soit par le décret qui est en cours de préparation. Je me suis rallié volontiers à sa troisième proposition, parce qu'il s'agit vraiment d'une cause d'intérêt national.
M. le président. Monsieur Ralite, les amendements nos 452 et 453 sont-ils maintenus ?
M. Jack Ralite. Compte tenu des engagements pris par M. le ministre, je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 452 et 453 sont retirés.
Je mets aux voix l'amendement n° 651.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission sur l'amendement n° 454 ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote sur l'amendement n° 481.
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, l'avis que vous avez émis sur mon amendement ne me surprend pas. Je suis un peu plus perplexe s'agissant de celui qui a été donné par la commission. Je suis surtout très insatisfait que, constatant comme moi et sans doute même mieux que moi, monsieur le ministre, la situation créée pour les catégories les plus pauvres de la population ou tout simplement d'ailleurs pour les « petits salariés », la situation résultant de l'envolée des loyers, sans parler de la spéculation foncière, vous n'ayez donné qu'un lapidaire avis défavorable, au lieu de dire que le Gouvernement se penche sur ce problème et prépare, d'une façon ou d'une autre, les mesures pour y remédier.
Il y a, je vous l'ai dit, urgence pour quelques grandes villes dans l'Hexagone ; il y a une urgence extrême pour ma région, le Languedoc-Roussillon. Je ne comprends pas que cela ne figure pas dans les projets du Gouvernement, s'agissant de la cohésion sociale, qui est l'objet même de nos débats.
Je maintiens donc mon amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué. Monsieur Delfau, j'avais suivi les arguments de la commission pour justifier mon avis défavorable à votre amendement n° 481, mais, puisque vous m'y invitez, je vais développer mon argumentation.
Tout d'abord, sur la forme, votre amendement n'a pas réellement sa place à cet article 53 qui traite des dispositions relatives à la lutte contre l'habitat indigne, mais c'est un détail.
Sur le fond, je suis d'accord avec vous pour dire que, si nous voulons mobiliser le parc locatif privé, la sécurisation du risque locatif est un préalable indispensable pour rétablir la confiance des bailleurs privés et les inciter à remettre à disposition les logements vacants. Il ne suffit pas que l'Etat injecte des moyens financiers, il faut une véritable sécurisation du risque locatif. Je travaille sur cette question.
Avant d'être membre du Gouvernement, j'étais président du Conseil national de l'habitat et, à ce titre, j'ai missionné plusieurs experts, qui viennent de me remettre leur rapport. Des propositions sont actuellement à l'étude. C'est la raison pour laquelle je n'ai inscrit aucune disposition à ce sujet dans le présent texte. Cette question a fait l'objet d'une large concertation, d'une part, avec les organisations de propriétaires immobiliers et, d'autre part, avec les partenaires sociaux et tous ceux qui concourent à l'action en matière de logement.
Nous sommes donc très favorables à un dispositif de sécurisation du risque locatif, et nous présenterons des propositions à ce sujet le moment venu, puisque nous venons d'achever l'expertise.
En revanche, nous sommes beaucoup moins favorables à un moratoire sur les loyers, qui n'est pas souhaitable parce qu'il ne faut pas non plus décourager l'investissement locatif dans le parc privé et que cela n'aurait pas d'effet sur les prix des transactions immobilières.
Telles sont les raisons de fond pour lesquelles je suis défavorable à votre amendement. Pour autant, je m'engage à ce que soit présenté un dispositif de sécurisation du risque locatif dans le parc privé.
M. le président. Monsieur Delfau, l'amendement n° 481 est-il maintenu ?
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, je suis maintenant en partie rassuré sur la volonté du Gouvernement s'agissant de ce que l'on appelle « la sécurisation » des propriétaires et sur l'incitation à ce qu'il y ait moins de logements vides et plus de logements mis à disposition.
Je prends acte que vous avez travaillé sur cette question, que vous allez très rapidement, si j'ai bien compris, informer le Parlement. Sur ce premier point, votre réponse me satisfait et j'attends avec impatience votre communication.
Sur le second point, je sais bien que le moratoire n'est pas facile à appliquer et, dans mon esprit, cet amendement a plutôt valeur de signal. Je n'attends pas, aujourd'hui, à l'occasion de ce débat, qu'une décision soit prise. Néanmoins, je souhaite que le problème de la spéculation immobilière dans certaines parties du territoire fasse l'objet, non seulement d'une étude, mais de mesures, peut-être moins brutales que le moratoire, permettant de contenir cette envolée des loyers, d'autant que, dans ma région, mais aussi sans doute ailleurs, on commence à percevoir un tassement de la hausse des loyers, ainsi qu'une stabilisation des prix du foncier.
Sous le bénéfice de ces réflexions, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 481 est retiré.
La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote sur l'article 53.
M. Jack Ralite. L'échange de vues que nous avons eu avec M. le ministre m'a semblé très intéressant, ce qui montre qu'il est possible, lorsqu'on se place sur un terrain de vérité, en l'approfondissant, de parvenir à de bonnes décisions.
Puisque tel est le cas, je souhaiterais vous faire part d'une réflexion que m'a inspiré un article paru dans Le Monde de ce week-end. Ce journal se faisait l'écho d'une décision de justice touchant au saturnisme.
Sans qu'il soit question de commenter cette décision en elle-même, je pense que les aspects évoqués par le journaliste ne sont en rien étrangers au débat sur la « cohésion sociale » qui nous anime depuis quelques jours.
Il semblerait - je résume - que soit évoquée une violation délibérée d'une obligation de sécurité ; il semblerait également que l'insuffisance des capacités du parc HLM ait été considérée par le juge comme sans effet sur la notion d'infraction ; il semblerait enfin, permettez-moi de dire « surtout », que l'indemnisation des enfants soit désormais conditionnée à une expertise témoignant d'une incapacité et de lésions irréversibles. Attendons de connaître les considérants détaillés du jugement et les conclusions des experts.
Mais il me semble que ce jugement interpelle directement le politique, et signe plusieurs de ses échecs.
Le premier de ces échecs est lié à l'intervention en elle-même du judiciaire dans le champ du saturnisme : si l'on veut bien se rappeler que le saturnisme est une pathologie dont l'effet est difficilement perceptible à l'échelle de l'individu mais l'est de façon très nette à l'échelle de la collectivité, en l'occurrence de la génération d'enfants, on admettra sans peine qu'il s'agit d'une pathologie dont la gestion et la prévention relèvent éminemment du politique.
Le glissement vers le terrain judiciaire, par essence celui du rapport de l'individu au droit - et non celui de l'homme à ses droits -, traduit malheureusement l'incapacité des pouvoirs politiques à agir dans l'intérêt commun d'une façon suffisamment énergique, efficace et convaincante. C'est aussi parce que l'intérêt commun, c'est-à-dire la défense de tous, aura été insuffisamment porté par ceux ayant à en connaître, c'est-à-dire les politiques, que le débat s'est déplacé sur le terrain de la défense de chacun, c'est-à-dire sur le terrain du judiciaire.
Et je crains que ce déplacement ne se traduise par un effet boomerang sévère. Désormais, si j'en crois l'exégète de l'arrêt de la cour d'appel de Paris, il conviendra, pour que le droit « judiciaire » de l'enfant soit reconnu - à travers une indemnisation, certes, mais enfin reconnu -, que les lésions soient irrémédiables, qu'elles entraînent une incapacité. Si le droit de l'enfant n'est pas réaffirmé dans une démarche collective et préventive, s'il reste cantonné à la réponse judiciaire, autrement dit si le politique ne s'en « réempare » pas, nous allons acter les conditions d'une primauté conceptuelle donnée à l'irrémédiable sur le préventif, à l'indemnisation sur l'action, et ce sera notre deuxième échec.
Nous sommes loin de la « cohésion sociale », direz-vous. Certes non : à Aubervilliers - je vous l'ai rappelé tout au long de ces dernières années - la lutte contre le saturnisme a été une obsession de la municipalité, sous ma direction, puis sous celle du nouveau maire Pascal Beaudet. Nous avons appliqué tous les textes de loi, jusqu'au moindre interstice, pour réaliser les travaux d'office prévus par la loi de 1998, pour mobiliser les bailleurs sociaux et pour soutenir les équipes qui font preuve de vigilance chaque jour.
Nous continuerons de le faire pour les nouveaux textes qui ont été adoptés cet été. J'ai déjà eu l'occasion de vous donner quelques chiffres : en dix ans, on a constaté une baisse des deux tiers des intoxications et un nombre toujours plus élevé de travaux de réduction des expositions.
Et pourtant, cet engagement se heurte à des murs, et le plus important de ces murs, c'est la quasi-absence de solidarité entre les territoires qui agissent contre le saturnisme, et plus généralement l'insalubrité, et ceux qui sont à l'abri de ces fléaux.
Dans l'article 53 du projet de loi, vous proposez d'améliorer par ordonnances les dispositifs législatifs en matière de lutte contre l'insalubrité. C'est indispensable, et nous entendons contribuer à la rédaction de cet article. Mais l'acte politique majeur serait ailleurs : il serait dans l'obligation pour tous les territoires de construire, vite, des logements sociaux de grande taille, accessibles aux familles les plus pauvres ; il serait dans l'obligation pour les territoires qui ne sont pas confrontés à ce fléau de l'insalubrité d'instaurer une vraie solidarité envers les populations des zones qui en souffrent ; il serait dans des mesures plus générales d'accès aux droits - droit au travail, aux papiers ; je pense même au droit opposable en matière de logement, que le Haut comité pour le logement des personnes favorisées, auquel j'appartiens, prône sans cesse depuis plus d'un an -, mesures sans lesquelles les familles sont enfermées dans le ghetto des logements indignes.
Ces arguments ne sont pas étrangers à l'échange que nous venons d'avoir, mais il faut vraiment marquer cet échange de cette pensée. J'ai été maire d'Aubervilliers pendant dix-neuf ans et je savais que, chaque matin, je serais une cousette et que, chaque soir, une paire de ciseaux viendrait couper le fil.
Par conséquent, tout ce qui peut apporter une amélioration au quotidien - on parle de « pragmatisme » ; je n'aime pas ce mot, car il est hautement théorique de s'occuper fondamentalement de ces questions - est opportun. C'est pourquoi le groupe CRC votera l'article 53. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Voilà quelques jours, le Sénat à voté un projet de loi habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnances. Le texte que nous examinons actuellement comporte également un article d'habilitation. N'aurait-il pas été préférable de faire figurer cet article dans le projet de loi précité ? Un débat global aurait eu lieu et nous aurions eu connaissance des intentions du Gouvernement.
Je déplore que, désormais, chaque projet de loi comporte un article d'habilitation. Ce n'est pas la bonne méthode !
Par ailleurs, la plupart des points sur lesquels le Gouvernement demande une habilitation pour prendre, par ordonnances, des mesures de nature législative peuvent recevoir notre approbation. Mais je suis ennuyé pour celui qui concerne l'habilitation du Gouvernement à modifier le code pénal. Il s'agit d'un domaine suffisamment important pour rester de la compétence du Parlement.
Dans quelques instants, avec l'adoption de l'article 53, le Gouvernement sera habilité à modifier le régime des sanctions pénales, et je le regrette. Il aurait été préférable de conserver pleine et entière la compétence législative en ce domaine.
J'ai bien compris que le groupe CRC allait voter cette habilitation, mais je ne voulais pas priver le Sénat de ces deux remarques.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué. Il s'agit d'un débat important. M. Jack Ralite pose les problèmes sous l'angle politique et humain ; M. Michel Mercier se situe sur le plan juridique.
La question de fond est la suivante : pouvons-nous accepter, au xxie siècle, dans une démocratie comme la France, l'exploitation sordide de personnes vivant dans des meublés et qui ont perdu toute dignité, comme le montre la télévision ? Alors que ma collègue Nelly Olin s'évertue à mettre en place des dispositifs pour renforcer les capacités d'hébergement, est-il acceptable de dépenser chaque année des sommes considérables pour favoriser des marchands de sommeil, qui exploitent la misère humaine. Face à une telle situation d'urgence, le temps manque pour engager un processus juridique formalisé.
La loi SRU a prévu des sanctions contre les personnes morales, mais elle n'a pas sérié le champ de ces sanctions. Nous proposons que figurent dans l'ordonnance des peines complémentaires pour les personnes qui détiennent des fonds de commerce. Par conséquent, nous n'allons pas au-delà de ce qui est déjà mentionné dans une loi.
Par ailleurs, comme le sait le président Michel Mercier, la loi d'habilitation reviendra en discussion devant les deux assemblées. Ancien premier vice-président de l'Assemblée nationale, je ne suis pas favorable aux ordonnances. Mais face au problème du saturnisme évoqué par Jack Ralite, devons-nous soumettre la décision finale au formalisme d'une décision judiciaire ? Il s'agit d'enfants qui ont eu la malchance de naître dans des familles habitant dans des logements locatifs indignes et qui, de ce fait, ont été soumis au risque du saturnisme.
Par conséquent, s'agissant de ces questions, il faut prendre en compte l'humain, et non pas réfléchir sur la forme. C'est pourquoi je vous demande de voter cet article habilitant le Gouvernement à prendre des mesures par ordonnances.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Après avoir entendu M. le ministre, nous voterons cet article, malgré le rejet de notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Je tiens à dire à M. le ministre que je n'ai rien contre l'habilitation qu'il nous propose, mais le projet de loi qui nous est soumis comportant environ 85 % de dispositions de nature règlementaire, si elles avaient été retirées, nous aurions pu garder ce qui est d'ordre législatif.
M. Michel Charasse. Tout à fait !
M. le président. Je mets aux voix l'article 53, modifié.
(L'article 53 est adopté à l'unanimité.)
TITRE III
PROMOTION DE L'ÉGALITÉ DES CHANCES
Division et article additionnels avant le chapitre Ier du titre III (avant l'article 54)
M. le président. L'amendement n° 643, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Avant le chapitre premier du titre III, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :
Chapitre premier A
Disposition fiscale
L'amendement n° 644, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Avant le chapitre premier du titre III (avant l'article 54), insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I- 1° Dans la première phrase du premier alinéa du 1 ter de l'article 200 du code général des impôts, le pourcentage : « 66 % » est remplacé par le pourcentage : « 75 % ».
2° Dans la deuxième phrase du même alinéa, les mots : « dans la limite de 414 euros » sont remplacés par les mots : « dans la limite de 470 euros ».
II- Les dispositions du I ci-dessus sont applicables à compter de l'imposition des revenus de l'année 2005.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Ces deux amendements revêtent une importance tout à fait particulière.
L'amendement n° 643 a pour objet de créer un chapitre spécifique afin d'insérer une nouvelle disposition relevant le pourcentage des dons donnant lieu à une réduction d'impôt lorsque ces dons bénéficient aux organismes sans but lucratif procédant à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, contribuant à favoriser leur logement ou leur fournissant gratuitement des soins. Ces organismes jouent en effet un rôle éminent en faveur de la cohésion sociale.
Le Gouvernement vous propose donc, par l'amendement n° 644, de relever le pourcentage des dons donnant lieu à réduction d'impôt - il passerait des deux tiers, soit 66 %, aux trois-quarts, c'est-à-dire 75 % - ainsi que le plafond pris en compte pour l'application de ce pourcentage de réduction, qui passerait de 414 euros à 470 euros.
Les associations qui oeuvrent contre l'exclusion et la précarité le font avec dévouement et abnégation dans des conditions parfois extrêmement difficiles. Nous avons tous le devoir de nous montrer solidaires et de faire en sorte qu'elles continuent à lutter contre une situation qui nous attriste tous.
La loi relative au mécénat, aux associations et aux fondations du 1er août 2003 avait porté à 60 % le pourcentage des dons aux associations donnant lieu à réduction d'impôt. La loi de finances rectificative pour 2003 a établi une différenciation en faveur des associations qui luttent contre la grande exclusion : elle a porté ce taux à 66 %. Aujourd'hui, nous proposons de le faire passer à 75 %. Il s'agit de montrer que la solidarité concerne tout le monde. Nous devons faire ce geste à l'égard de ces personnes qui oeuvrent dans des conditions particulièrement difficiles et dont on peut louer le courage et l'abnégation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Valérie Létard, rapporteur. Je ne peux donner l'avis de la commission puisque ces deux amendements ne lui ont pas été soumis.
A titre personnel, je partage entièrement l'objectif du Gouvernement. En effet, en tant qu'élu de terrain, on est confronté quotidiennement à des situations d'extrême urgence. Lorsque toutes les solutions administratives classiques ont été épuisées - les aides financières, les secours de dernière minute -, lorsque la dotation disponible du CCAS a été utilisée parce que beaucoup sollicitée, les services sociaux sont bien contents de pouvoir faire appel, en dernier recours, à une association, qu'il s'agisse du Secours catholique ou des Restos du coeur, par exemple, pour dépanner une maman qui n'a plus de lait pour nourrir son bébé le week-end.
M. Michel Charasse. Très bien !
Mme Valérie Létard, rapporteur. Il n'est pas un service social où une personne bénévole ne partagerait pas cet objectif. En effet, comment dire « non » à ces personnes lorsqu'elles se trouvent en face de vous ? Or, pour favoriser les dons, il faut relever le pourcentage donnant lieu à réduction d'impôt. Cela ne fera qu'encourager la solidarité nationale, et nous en avons besoin plus que jamais. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Lorsque je vous ai interrogée hier à cet égard, madame la ministre, vous m'avez répondu que vous déposeriez un amendement. Tel est le cas et, sur le fond, je ne peux que m'en réjouir.
Je formulerai néanmoins une remarque : à l'Assemblée nationale, nos collègues socialistes avaient présenté un amendement analogue, mais au lieu de porter le taux à 75 %, comme vous le proposez, ils suggéraient de le fixer à 70 %.
Par ailleurs, il est prévu que la mesure sera applicable en 2005. Ne serait-il pas possible de la faire entrer en vigueur en 2004 ?
Ensuite, les allègements fiscaux proposés ne pourraient-ils pas être transformés en crédit d'impôt ? A terme, cela permettrait de ne pas réserver le bénéfice de l'incitation fiscale aux seuls ménages imposables, donc d'accroître fortement le nombre de personnes susceptibles d'effectuer un don. En 2000, 900 millions d'euros de dons ont été déclarés par un quart de foyers fiscaux. Il faut comparer ce chiffre avec ceux qui sont fournis par l'observatoire de la Fondation de France : la moitié des Français de plus de quinze ans font des dons.
Nous voterons bien sûr ces deux amendements.
Je tiens tout de même à vous signaler que, lorsque mon collègue Augustin Bonrepaux a présenté le même amendement à l'Assemblée nationale, voilà une quinzaine de jours, il n'a pas reçu la même réponse. En effet, M. le secrétaire d'Etat au budget lui a fait observer que le problème avait été réglé l'an dernier lorsque le pourcentage était passé de 60 % à 66 %, ce qui constituait, selon lui, un « équilibre intelligent et consensuel ». Il ajoutait : « Vous souhaitez le porter cette année à 70 %. Honnêtement, ce n'est pas utile. » Je vous prends ici en flagrant délit de double langage.
Je suis très heureux que le propos du Gouvernement, dans son ensemble, ait changé, et je vous félicite, madame, messieurs les ministres, d'avoir réussi entre-temps à imposer une juste mesure.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Comme mon ami et collègue Jean-Pierre Godefroy, je me réjouis vivement de l'initiative que prend le Gouvernement dans cette affaire puisqu'il s'agit, au fond, de « recaler » - sans doute pour un certain temps, mais cela va de soi - ce qu'on a appelé familièrement la « loi Coluche » que j'avais eu le plaisir et l'honneur de faire voter à l'unanimité par les deux assemblées en 1988.
Cette déduction fiscale a connu quelques avatars dans le passé récent, comme l'a d'ailleurs rappelé Mme Olin. Au moment du vote de la loi relative au mécénat, elle s'est effectivement trouvée banalisée, englobée, perdant ainsi toute son efficacité et suscitant une très grande inquiétude de la part des associations dont nous avons parlé, notamment les « Restos du Coeur ».
L'année dernière, le Gouvernement a bien voulu faire un geste, dans le collectif budgétaire, à la demande unanime de tous les groupes au Sénat et à l'Assemblée nationale en relevant le taux de la déduction à 66 %, les autres restant à 60 %. Et là, madame, messieurs les ministres, vous faites un pas supplémentaire qui est important puisque vous passez à 75 %, ce que, personnellement, je n'aurais jamais espéré. Je pense que, vingt ans après ce qu'avait proposé Coluche, c'est même « plus que bien » puisque lui-même s'était contenté d'un taux de 70 %.
Je fais évidemment miennes les observations de Jean-Pierre Godefroy. Ne faudra-t-il pas, dans un avenir proche, passer plutôt à un crédit d'impôt ? La question se pose, car nombre de donateurs ne sont pas imposables sur le revenu et le crédit d'impôt serait plus avantageux pour eux. Or c'est un élément important des ressources des associations. Je pense aux « Restos du Coeur » et aux autres associations citées par Mme Létard tout à l'heure. Il conviendrait donc d'y réfléchir. Il est peut-être regrettable que l'on attende l'année prochaine, mais, au fond, en 2004, les donateurs bénéficient des 66 % de l'année dernière et en 2005 ils passeront aux 75 %.
Je tiens surtout à dire aux ministres chargés des affaires sociales qu'il faut faire attention, à l'avenir, à ne pas bricoler n'importe comment le régime des dons. Lors de l'élaboration de la loi relative au mécénat, le Gouvernement et le Parlement de l'époque ont commis une erreur majeure que les associations et les exclus ont failli payer très cher l'hiver dernier.
Par conséquent, je souhaite que, cette fois-ci, le « don Coluche » soit définitivement distingué des autres régimes de dons de manière que l'on n'y revienne pas. Et comme il me paraît inconcevable que l'on augmente à 75 % les autres régimes de dons, Coluche atteint enfin, vingt ans plus tard, l'aboutissement et l'entrée en régime de croisière du système qu'il avait imaginé.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, veuillez m'excuser de prolonger les explications de vote.
Je partage l'objectif visé. Je me demande simplement si les dons concernent à la fois les personnes physiques et les personnes morales. La réponse n'est pas évidente, à la lecture du texte, à moins d'être un spécialiste du droit fiscal.
Si les dons proviennent des personnes morales, je m'interroge sur la façon dont ils seront encadrés parce que des effets pervers et quelques dérives peuvent apparaître. En revanche, s'ils ne concernent que les personnes physiques, je n'ai aucun état d'âme et je ne me pose aucune question.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Il s'agit de la déduction au titre de l'impôt sur le revenu des personnes physiques. Cela dit, la loi relative au mécénat, dont je parlais tout à l'heure, comporte des déductions fiscales possibles à hauteur de 60 %, je crois, au titre des personnes morales. Mais l'amendement d'aujourd'hui concerne les personnes physiques et principalement les petits donateurs.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, du travail, et de la cohésion sociale. Pour faire écho aux propos de M. Godefroy, je dirai simplement que ce débat a été rouvert à la suite d'un engagement pris par le Gouvernement à l'Assemblée nationale, conformément au souhait de M. Pierre Méhaignerie et de la commission des finances. Des conversations ont eu lieu - cela fait partie des choix parlementaires - notamment avec Michel Charasse il y a quelques jours et, finalement, conformément au souhait général, cet amendement a été déposé.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant le chapitre Ier du titre III.
Je mets aux voix l'amendement n° 643.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, une division additionnelle ainsi rédigée est insérée dans le projet de loi, avant le chapitre Ier du titre III.