M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 619, adressée à M. le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
M. Georges Mouly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux me faire l'écho de quelques difficultés rencontrées par les élus locaux à l'occasion de la mise en oeuvre de l'Acte II de la décentralisation.
Parmi celles-ci, je soulignerai, dans un premier temps, la dérive des coûts des contrats de groupe pour la couverture complémentaire des agents territoriaux et, dans un second temps, la complexité des modalités de gestion des ressources humaines.
Les coûts des contrats d'assurance des risques statutaires, qui connaissent une véritable dérive, viennent s'ajouter à l'augmentation des dépenses réglementaires, telles que celles qui sont exposées au titre des analyses de l'eau potable ou encore de la lutte contre le radon. Les taux de cotisation des assurances enregistrent, selon les communes, des hausses allant de 30 % à 90 %, ce qui représente bien plus qu'un ajustement et, évidemment, une pression excessive pour les petites communes.
Certes, ce problème relève de relations privées entre les assureurs et les collectivités, mais, comme ce fut le cas pour l'assurance des risques médicaux, ne conviendrait-il pas de tout mettre en oeuvre pour y remédier et, notamment, ne serait-il pas opportun que le Gouvernement joue un rôle de médiateur ?
J'en viens à la complexité des modalités de gestion des ressources humaines et, plus précisément, au recrutement et à la progression des carrières.
Au moment où est enregistrée une forte progression des inscriptions aux concours de la fonction publique, un projet de réforme du recrutement de divers cadres d'emplois de catégories A et B de la filière médicosociale a reçu un avis défavorable du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale au motif que la suppression de l'épreuve écrite d'admissibilité entraînerait un ralentissement des procédures de licenciement.
Dans le même sens, esquissant une solution, M. Bernard Dreyfus préconise dans son rapport l'instauration de concours sur titre et la reconnaissance de l'expérience professionnelle. Il conviendrait peut-être de prendre cette suggestion en considération.
Une autre difficulté a trait à la gestion des emplois spécifiques. Des statuts particuliers ont prévu des dispositions permettant l'intégration de ces fonctionnaires. Néanmoins, certains d'entre eux n'ont pu en bénéficier et, tout en étant fonctionnaires, ne peuvent être ni mutés ni détachés. Pourrait-on envisager, monsieur le ministre, une solution de nature à résorber ces emplois spécifiques ? La question se pose également pour les emplois précaires, pour les agents contractuels qui n'ont pu bénéficier des dispositions de la loi Sapin.
J'en viens à un autre sujet, celui de la progression de carrière et de la formation.
Pour ce qui est de la progression de carrière, il semble que l'application des quotas joue un rôle de frein à la promotion sociale ; c'est d'autant plus regrettable que la promotion interne est l'un des fondements de la fonction publique. Un assouplissement de ce dispositif ne pourrait-il être envisagé ?
En matière de formation, enfin, le dispositif de formation initiale a été créé voilà quelque vingt ans, dans un contexte statutaire tout à fait différent. Aujourd'hui, les lauréats des concours de recrutement sont souvent très diplômés et la réduction des formations initiales semble s'imposer. En revanche, une adaptation statutaire serait à mes yeux bienvenue qui permettrait la formation tout au long de la carrière pour en franchir les différentes étapes.
Monsieur le ministre, j'ai bien conscience d'avoir posé plus d'une question et, par conséquent, je sais que vous n'allez probablement pas apporter, dès ce jour, toutes les précisions souhaitées, pour souhaitables qu'elles soient. Je sais bien que des projets de réforme des fonctions publiques d'Etat et territoriale sont à venir. J'ai cru pouvoir cependant, dans ces conditions, faire état de problèmes qui susciteront de plus en plus d'interrogations et se traduiront par des souhaits fermement exprimés.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le sénateur, j'ai bien pris conscience de l'élargissement du champ de votre question. Je veux vous répondre, au nom de Renaud Dutreil, que, en application du statut de la fonction publique, les fonctionnaires territoriaux ont droit, comme les autres fonctionnaires, aux congés de maladie, aux congés de longue maladie ou de longue durée.
Chaque congé de maladie donne droit à une rémunération à plein traitement ou à demi-traitement, selon la durée de la maladie. Les employeurs territoriaux qui assument la charge financière des congés de maladie peuvent souscrire un contrat d'assurance, directement ou par le biais des centres de gestion, afin de couvrir les risques financiers liés à ces congés.
Il est vrai que les cotisations aux organismes d'assurance ont augmenté, semble-t-il, sous l'effet de la croissance des arrêts de maladie. Le Gouvernement est sensible à ce problème, mais considère qu'il n'est pas possible de diminuer la protection sociale des fonctionnaires territoriaux. Une telle mesure contreviendrait aux principes de parité entre les fonctions publiques et ne saurait donc être envisagée.
Les collectivités ont, en tout état de cause l'entière maîtrise des conditions de couverture du risque. Elles peuvent négocier leur contrat, voire le résilier et changer de prestataire. Elles peuvent aussi assumer la charge financière des arrêts de maladie selon le principe de l'auto-assurance. A ce sujet, je rappelle que le principe de liberté contractuelle, qui permet aux parties de déterminer librement les clauses du contrat, s'oppose à l'intervention des pouvoirs publics dans les relations qui se nouent entre les collectivités et leurs organismes d'assurance.
Sur les autres points évoqués, le ministre de la fonction publique présentera au Sénat, dès le mois de mars 2005, un projet de loi de transposition de la directive du 28 juin 1999 sur le travail à durée déterminée, qui interdit de renouveler sans fin les contrats à durée déterminée. Dorénavant, les CDD ne pourront plus être renouvelés après six ans que sous la forme d'un contrat à durée indéterminée, ou CDI. Il s'agit d'une mesure très importante qui mettra enfin un terme à la précarité dans la fonction publique.
Enfin, le Gouvernement prépare actuellement différentes dispositions concernant plusieurs volets importants du droit de la fonction publique, en particulier un projet de modernisation de la fonction publique territoriale et la mise en place du PACTE, ou parcours d'accès aux carrières territoriales, hospitalières et de l'Etat, dispositif qui permettra à des jeunes sans diplôme ni qualification de recevoir une formation en alternance de deux ans aux métiers de la fonction publique, puis d'être titularisés après une épreuve de sélection professionnelle. Le projet comprendra, par ailleurs, une modernisation de la formation et du recrutement.
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Monsieur le ministre, je vous remercie d'une réponse qui, à plus d'un titre, ne manque pas d'intérêt, qu'il s'agisse de la protection sociale ou de la résorption de l'emploi précaire, avec la perspective de la suppression du CDD, qui sera obligatoirement transformé en CDI au bout de six ans.
Il me reste à espérer que, pour les autres problèmes que j'ai évoqués - et il en est d'autres encore -, le projet de loi à venir nous donnera l'occasion d'apporter les solutions qui conviennent.
difficultés de recrutement de sages-femmes en seine-saint-denis
M. le président. La parole est à Mme Eliane Assassi, auteur de la question n° 615, adressée à M. le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Mme Eliane Assassi. Monsieur le ministre, le président du conseil général de Seine-Saint-Denis a appelé mon attention sur les difficultés que rencontre aujourd'hui le service de protection maternelle et infantile de ce département pour recruter des sages-femmes territoriales.
Ainsi que vous le savez, à la suite du mouvement national de revendication des sages-femmes du printemps 2001, le décret n° 2003-679 du 23 juillet 2003, entré en application le 1er août 2003, est venu modifier les dispositions statutaires relatives aux sages-femmes. Le cadre d'emplois de ces professionnelles comporte dorénavant trois grades soumis à de nouveaux quotas.
Dans un premier temps, le décret a prévu un reclassement des sages-femmes territoriales dans les nouveaux grades, mesure qui a profité aux quarante et une sages-femmes composant le cadre d'emplois en Seine-Saint-Denis. En revanche, les reclassements hors quotas sont en pratique atteints pour la classe exceptionnelle et largement dépassés pour la classe supérieure.
Cette situation empêche tout nouveau recrutement par voie de détachement sur ces grades d'avancement, de même que les recrutements par voie de mutation de sages-femmes expérimentées sont aujourd'hui entravés.
Les départs à la retraite qui doivent intervenir entre 2008 et 2012, l'assouplissement des quotas mis en place par la loi Hoeffel modifiée et le recrutement de sages-femmes ne permettront pas une ouverture des quotas suffisante pour envisager les recrutements nécessaires.
C'est ainsi que six postes titulaires de sage-femme territoriale sont vacants, dont quatre depuis une à deux années. Ces vacances de poste concernent notamment deux villes comptant annuellement 3 500 naissances domiciliées, soit 14 % de l'ensemble des naissances domiciliées du département en 2002.
Dès lors, on ne peut que s'interroger sur la possibilité pour la Seine-Saint-Denis de s'inscrire dans un schéma régional de la périnatalité, dans la mesure où le département n'a pas les moyens d'assurer ses missions ainsi que la continuité du service public auprès des femmes enceintes et des nouveaux parents.
Par ailleurs, la mobilité entre les fonctions publiques et au sein même de la fonction publique territoriale ne pouvant être effective dans les grades d'avancement, seul le recrutement d'agents contractuels est dès lors envisageable. Or, le département de Seine-Saint-Denis, attaché au service public, ne souhaite favoriser ni la précarité de l'emploi de ces agents, ni l'instabilité au sein des équipes de protection maternelle et infantile.
Dans la mesure où l'assouplissement statutaire des quotas du cadre d'emplois des sages-femmes territoriales, voire la disparition de ces quotas, pourrait lever l'obstacle aux recrutements par détachement ou par mutation, envisageriez-vous, monsieur le ministre, de déroger à ce quota statutaire afin de répondre, de façon urgente, aux besoins de recrutement de sages-femmes territoriales ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Madame la sénatrice, à la suite du protocole d'accord signé en 2001 avec cinq organisations syndicales de la fonction publique hospitalière, le Gouvernement a souhaité assurer une transposition à la fonction publique territoriale des mesures de revalorisation indiciaire et d'amélioration du déroulement de carrière intervenues pour les professions de santé de la fonction publique hospitalière.
Des améliorations très substantielles ont aussi été apportées. En particulier, le troisième grade culmine à l'indice brut 850, alors que l'ancien terminait à 720, avec une bonification indiciaire de l'indice de 35 points pour celles qui exercent des fonctions de coordinatrice.
De plus, s'agissant de l'avancement de grade, le quota d'accès au deuxième grade est porté de 25 % à 30 %. Pour l'avancement au troisième grade de sage-femme de classe exceptionnelle, le quota est porté de 7 % à 25 %, et un dispositif rend possible un avancement dans le grade supérieur chaque fois que l'effectif de celui-ci a diminué d'un nombre égal à deux, afin d'éviter le blocage des avancements.
Toutefois, le Gouvernement en est conscient, malgré le large éventail des possibilités prévues par les dispositions statutaires existantes, il demeure certaines contraintes et rigidités liées à ce statut, notamment en matière de quotas d'avancement.
Le Gouvernement a donc engagé une réflexion qui porte en particulier sur l'institution d'un mécanisme qualifié de ratio « promus-promouvables ». Ce dispositif permet d'ajuster le nombre des promotions de grade en lissant l'aléa démographique et en respectant les durées de carrière déterminées par les règles statutaires.
L'avantage de cette méthode réside dans un lissage des promotions, contrairement au système des pyramidages ou des quotas, qui entraîne des cycles de promotion souvent discontinus et très contrastés, conséquences des disparités démographiques et des recrutements aléatoires constatés pour certains cadres d'emplois.
Le Gouvernement entend donc avancer rapidement sur cette question.
M. le président. La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.
J'ai voulu évoquer cette question parce que la Seine-Saint-Denis fait des efforts considérables en matière de périnatalité et de protection maternelle et infantile. Or l'inquiétude est grande, dans ce département, compte tenu des problèmes que je viens d'évoquer. J'ai, par ailleurs, tendance à penser que ce n'est pas le seul département concerné par cette question, comme votre réponse le laisse entendre.
Il y a, me semble-t-il, urgence en la matière. J'ai bien noté que vous proposiez de nouvelles méthodes ; elles seront l'objet d'un examen particulièrement vigilant de notre part.
conduite sans permis de conduire
M. le président. La parole est à M. Alain Gournac, auteur de la question n° 634, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.
M. Alain Gournac. Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis réellement inquiet : aujourd'hui, d'après les informations dont je dispose, 1 millions d'automobilistes conduiraient sans permis !
Le phénomène recouvre plusieurs hypothèses. Dans les conducteurs sans permis, il y a, bien sûr, ceux qui n'ont jamais passé les épreuves du permis de conduire ; les statistiques montrent que leur nombre est plutôt faible. Mas il y a aussi tous ceux qui se sont vu retirer leur permis et qui continuent de conduire malgré tout. Ces derniers ont même les honneurs de la télévision, où ils sont consultés par les uns et par les autres pour savoir quel est leur secret pour conduire ainsi sans permis !
Mon inquiétude, celle de mes collègues et de nos concitoyens, monsieur le secrétaire d'Etat, s'amplifie à la lecture de certaines statistiques. Ainsi, 37 000 automobilistes ont perdu leur permis en 2004 - soit une augmentation, d'une années sur l'autre, de 74 % -, et ce, notamment, grâce aux radars.
Vous savez, monsieur le secrétaire d'Etat, combien je suis favorable à l'installation de ces radars, mais, alors que nous nous apprêtons à en implanter bien plus dans les deux années qui viennent, je veux simplement attirer votre attention sur l'énorme augmentation du nombre d'automobilistes conduisant sans permis qui risque d'en résulter.
Certes, monsieur le secrétaire d'Etat, si ces automobilistes ont été privés de leur permis, c'est pour une bonne raison et ils se mettent en tort en conduisant malgré tout ; mais leur sort m'importe moins en cet instant que celui de leurs victimes éventuelles, s'ils sont impliqués dans un accident grave. Que se passe-t-il, par exemple, si un piéton est renversé sur un passage protégé ? L'automobiliste privé de permis est-il encore couvert par l'assurance de la voiture ? C'est une inquiétude terrible, car, lorsque l'on est victime d'un accident de la circulation, on ne choisit pas le responsable, qui peut fort bien être de ceux qui conduisent sans permis !
Mon inquiétude se double d'un certain sentiment de malaise devant le peu de réactions que suscitent ces comportements. Il me semble même, monsieur le secrétaire d'Etat, et croyez que j'en suis désolé, que les télévisions mettent au contraire en vedette des personnes qui n'hésitent pas à reconnaître devant les caméras que, bien que privées de leur permis, elles continuent de conduire parce qu'elles ont besoin de leur véhicule pour travailler, par exemple !
Je n'ai pas l'impression que des mesures soient prises, monsieur le secrétaire d'Etat, pour enrayer ce phénomène, mais je suis persuadé que vous allez m'éclairer sur ce point.
Cela étant, monsieur le secrétaire d'Etat, comme certains de mes collègues de la commission des lois, intéressés par la question que je pose ce matin, me l'ont confirmé, il faut reconnaître que l'on a vite fait aujourd'hui de perdre son permis de conduire. Voilà qui est tout de même ennuyeux : on retire de plus en plus facilement leur permis de conduire aux conducteurs, mais c'est au prix de difficultés accrues pour les populations ! Cet état de fait me préoccupe.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Goulard, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le sénateur, votre interpellation est parfaitement légitime. Le Gouvernement partage les préoccupations que vous venez, très justement, d'exprimer sur ce sujet qui nous concerne tous.
Le nombre de conducteurs sans permis est, par définition, impossible à évaluer précisément. On dispose cependant d'une estimation du pourcentage de conducteurs sans permis impliqués dans des accidents - 3 % -, ce qui permet de réfuter les chiffres les plus alarmistes mentionnés dans la presse.
Par ailleurs, le nombre d'infractions relevées par les forces de l'ordre au motif d'une conduite pour défaut de permis de conduire ou de permis de conduire non valide, s'élevait, en 2001, à 43 446, en 2002, à 46 926, et, en 2003, à 48 148.
Cette augmentation régulière de la conduite sans permis peut s'expliquer, en partie, par l'augmentation du nombre des contrôles effectués - en augmentation de 18 % entre 2002 et 2003 pour la gendarmerie nationale -, mais peut-être aussi par une augmentation de cette pratique, extrêmement critiquable.
Le phénomène de la conduite sans permis est suffisamment préoccupant pour que le Gouvernement y prête la plus grande attention.
Trois axes sont privilégiés pour remédier à cette situation.
Premièrement, et votre question y concourt, monsieur Gournac, nous voulons privilégier une information du grand public sur les risques de la conduite sans permis, sur le défaut d'assurance, sur le système du permis à points et sur les modalités de récupération de ces points. Il est vrai, monsieur le sénateur, qu'il y a une sévérité nouvelle ; mais elle se traduit par des résultats en matière de sécurité routière, nous nous accordons sur ce constat.
Il convient de rappeler que la conduite sans permis est un acte illégal et dangereux ; ce comportement est lourdement sanctionné, conformément à la loi du 9 mars 2004, qui dispose que cette infraction est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
Deuxièmement, nous voulons privilégier l'intensification des contrôles, qui, à la fois, dissuadent de telles pratiques et permettent d'en sanctionner les auteurs.
Troisièmement, nous voulons privilégier non seulement la sécurisation de l'épreuve théorique générale de l'examen du permis de conduire pour éviter les fraudes, mais aussi la mise en place des dispositions de la future directive communautaire sur le permis de conduire et l'instauration d'un nouveau format du permis de conduire sous forme de carte plastique. Ce nouveau permis de conduire devra faire l'objet d'un renouvellement administratif tous les dix ans ; nous nous assurons ainsi de réduire le nombre de faux permis en circulation.
Comme vous l'avez indiqué, monsieur Gournac, lutter contre ces comportements est une vraie responsabilité pour les pouvoirs publics.
Nous devons également nous assurer que les jeunes peuvent accéder à une formation de qualité à la conduite et à la sécurité routière.
Une mission parlementaire sur les différents problèmes soulevés par cette question a été confiée à Jean-Michel Bertrand, député de l'Ain et maire de Bourg-en-Bresse. Son rapport nous sera communiqué très prochainement.
M. le président. La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac. Je remercie M. le secrétaire d'Etat. Sa réponse est tout à fait claire.
Je suis content d'apprendre qu'une mission parlementaire remettra un rapport sur ce sujet. En toute franchise, j'avoue que je l'ignorais.
Monsieur le secrétaire d'Etat, les chiffres que j'ai cités sont peut-être exagérés, puisque vous nous dites que le pourcentage de conducteurs sans permis impliqués dans des accidents est de 3 %. Pour autant, je ne me suis pas trompé en ce qui concerne l'augmentation du phénomène global de la conduite sans permis.
M. Alain Gournac. Certes, cela peut s'expliquer en partie par l'augmentation - de 18 %, avez-vous dit - du nombre des contrôles effectués par la gendarmerie notamment, mais on ne peut pas contester l'augmentation importante de la pratique de conduite sans permis elle-même.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis d'accord avec vous : la répression ne suffit pas et il faut mettre les personnes en infraction devant leurs responsabilités. C'est la raison pour laquelle je suis favorable à l'information du grand public. Il faut essayer de mieux faire passer le message, par exemple au travers d'émissions ou de conférences de presse et ne pas hésiter à informer les personnes qui conduisent sans permis qu'elles encourent une peine d'un an de prison et une amende très élevée. J'ai eu en effet l'impression, lors des interviews que je mentionnais, que les automobilistes concernés prenaient ce type d'infraction plutôt à la légère !
En ce qui concerne l'intensification des contrôles, reconnaissons qu'en ce moment la police fait son travail, contrairement à ce que j'ai pu lire dans un grand quotidien. Il est absolument faux de soutenir que la police ne fait pas son travail, alors que nous pouvons tous constater qu'elle est extrêmement mobilisée. Je veux, à cette occasion, rendre hommage au travail remarquable qui est accompli par les forces de police dans les Yvelines, et dans ma ville en particulier.
Cela étant, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ignorais que certaines personnes fabriquaient des faux permis de conduire, vous me l'apprenez. Fort heureusement, grâce à l'instauration d'un nouveau format de permis de conduire sous forme de carte plastique, cette fraude ne posera plus de difficultés.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi de souligner, mais je sais que le Gouvernement se préoccupe du problème, que le permis de conduire est bien cher pour les jeunes. (M. le secrétaire d'Etat opine.) Ne les poussons pas, au prétexte qu'ils ont un peu conduit la voiture d'un copain, à se dispenser des épreuves du permis ! Des initiatives ont été prises, mais il faut véritablement veiller à ce que ces jeunes ne prennent pas un mauvais départ dans l'existence en se comportant comme des délinquants.
transferts aux départements des personnels des dde
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, auteur de la question n° 625, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.
M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question est complexe et technique. Elle concerne le transfert aux départements des personnels des directions départementales de l'équipement, les DDE. Sa technicité explique peut-être qu'elle n'ait pas obtenu de réponse de la part du ministre de l'intérieur lors de l'examen du projet de loi de finances.
Je souhaite donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous puissiez m'apporter une réponse précise aujourd'hui, car la mise en oeuvre de ce transfert est imminente.
La loi du 2 décembre 1992 relative à la mise à disposition des départements des services déconcentrés du ministère de l'équipement et à la prise en charge par des dépenses de ces services offre aux personnels, en ses articles 6 et 7, deux possibilités : l'article 6 maintient la situation antérieure à la loi de 1992, tandis que l'article 7 met en oeuvre ce que l'on appelle le mécanisme de « l'adaptation partage ».
Pour les départements qui ont opté pour le régime de l'article 7, la récupération des moyens supports ne se fera qu'après les transferts des routes nationales, c'est-à-dire au mieux en 2007, alors même que les transferts de personnels s'effectueront dès 2006. Comment cela pourrait-il techniquement fonctionner si ces moyens supports restent physiquement dans les DDE ? Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne comprends pas très bien ! Mais cette question est secondaire par rapport à ce qui suit.
Le point le plus important concerne en effet les départements régis par l'article 6, à savoir les départements qui n'ont pas encore pratiqué le partage et qui recevront, de fait, les plus gros effectifs.
La loi du 2 décembre 1992 prévoit que 2002 constitue un butoir d'effectifs, c'est-à-dire qu'elle est la référence en termes de nombre d'agents transférables. Cependant, le ministère de l'équipement continue à effectuer des réductions d'effectifs dédiés aux routes départementales, pour des raisons de gains de productivité. C'est une vieille affaire dont nous avons beaucoup parlé, monsieur le secrétaire d'Etat. La question est la suivante : lors du transfert des personnels - il est imminent -, est-ce le résultat des comptes du ministère qui sera pris en compte ou bien plutôt, comme il le faudrait, les effectifs de 2002, selon les termes de la loi ?
Dans ces deux cas, les situations sont différentes, puisque les effectifs seront plus ou moins importants.
De plus, en ce qui concerne les parcs d'équipement, la période transitoire de trois ans ouverte par la loi du 13 août 2004 est trop longue et, de fait, les fragilise. Il conviendrait de raccourcir les délais et d'aller plus vite, même si les situations sont très contrastées d'un département à l'autre.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, je veux vous poser une question complémentaire. Depuis 1992 - le ministre de l'époque avait beaucoup agi dans ce sens -, la bonne doctrine interdit aux départements d'aider les communes en matière d'ingénierie. L'Etat s'est beaucoup battu pour conserver cette mission régalienne. Le problème tient au fait que les DDE n'ont plus les moyens de fournir cette aide : les petites communes, en particulier, se trouvent donc dans une situation extrêmement difficile.
Il serait temps, monsieur le secrétaire d'Etat, de permettre aux départements d'intervenir. Certes, les départements seraient soumis au code des marchés publics, mais ne peut-on concevoir que, comme cela a été pratiqué pour l'Etat, certains appuis entre collectivités soient soustraits au champ concurrentiel ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Goulard, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Monsieur le sénateur, vous abordez des questions en effet très techniques concernant les transferts des moyens des DDE et les agents de cette grande administration.
Conformément à l'engagement du Gouvernement, l'intégralité des moyens en personnels consacrés par l'Etat aux compétences routières et qui sont transférés aux départements en application de la loi du 13 août 2004 donnera lieu à un transfert effectif.
Il en sera ainsi, en particulier, des personnels mis à la disposition des conseils généraux, en application de la loi du 2 décembre 1992, y compris ceux qui contribuent à la gestion des effectifs.
Les parties des services des DDE déjà placées sous l'autorité fonctionnelle directe du président du conseil général, en vertu de l'article 7 de la loi du 2 décembre 1992, comme c'est le cas en Haute-Vienne, devraient être transférées dès le deuxième trimestre de cette année. Les services relevant de l'article 6, régime dans le cadre duquel la mise à disposition de la DDE est globale, seront transférés à la fin de 2006 ou au début de 2007, avec ceux qui sont chargés des routes nationales d'intérêt local devenues routes départementales.
Les modalités de transfert sont en cours d'élaboration et font l'objet d'une concertation avec l'Assemblée des départements de France.
Pour les services concernés par l'article 7 - c'est un peu compliqué, mais c'est ainsi -, le décalage dans le temps du transfert des moyens supports ne devrait pas avoir de conséquences. En effet, ces moyens se justifient dès lors que les personnels visés sont pris en charge directement par le département, soit par intégration dans la fonction publique territoriale, soit par détachement sans limitation de durée. Or, à travers l'exercice du droit d'option offert aux agents, ces dernières procédures requièrent des délais supérieurs à ceux du dispositif de transfert en deux temps. Encore une fois, ce décalage n'aura aucune conséquence.
Par ailleurs, en application du IV de l'article 121 de la loi relative aux libertés et responsabilités locales, les compensations financières prévues par la loi du 2 décembre 1992 sont maintenues jusqu'à la date du transfert. Aussi les départements ont-ils la garantie que, en toute hypothèse, les éventuelles réductions d'effectifs pratiquées jusqu'à la date effective du transfert seront compensées financièrement.
Vous pouvez donc être totalement rassuré, monsieur le sénateur.
Les missions d'ingénierie exercées par les DDE pour le compte des communes relèvent des services non transférables. Parmi ces missions figure l'assistance technique pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire, ATESAT, prévue par le III de l'article 1er de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, ou loi MURCEF. Elle introduit, au nom du service d'intérêt général, un type particulier de concours de l'Etat hors du champ concurrentiel. Cette prestation est de droit pour les collectivités qui la demandent, sous réserve de remplir les conditions fixées par le décret du 27 septembre 2002.
Cette mission continuera donc d'être assurée par l'Etat. Les autres missions d'ingénierie publique habituellement réalisées par l'Etat s'inscrivent désormais dans le champ concurrentiel. L'intervention éventuelle des départements pour le compte des communes relève également de dispositions nationales et communautaires liées au droit de la concurrence.
Dans ce contexte de profondes évolutions locales qui vont marquer les DDE, vous avez abordé le sujet des parcs des DDE. La loi du 13 août dernier dispose qu'un rapport spécifique devra être présenté au Parlement dans les trois ans. Gilles de Robien a confié à un haut fonctionnaire, M. Courtial, maître des requêtes au Conseil d'Etat, une mission de réflexion associant les partenaires concernés, les représentants des personnels et ceux des conseils généraux. Cette mission devra dégager des éléments de diagnostic ainsi que des propositions adaptées à l'exécution du service public routier, par l'Etat et les départements, sur leurs réseaux respectifs. Elle intégrera une approche prévisionnelle et prospective des compétences, de l'emploi et des métiers des ouvriers des parcs et ateliers.
Il est nécessaire de dessiner l'avenir des parcs de l'équipement, concomitamment à la création des futurs services routiers nationaux, en liaison avec le calendrier des transferts prévus dans le domaine routier. Gilles de Robien a demandé que les premières propositions lui soient remises dès le printemps, de sorte que nous ayons des réponses avant l'expiration du délai de trois ans prévu par la loi.
M. le président. Il faut être au moins polytechnicien pour comprendre tout cela ! (Sourires.)
La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Sous réserve d'expertise, je crois avoir compris que les choses se présentent assez bien pour les personnels, à tout le moins conformément à ce que je souhaitais.
Cela étant, n'étant pas polytechnicien (sourires), je lirai avec beaucoup d'attention ce que vous m'avez répondu, monsieur le secrétaire d'Etat.
S'agissant des parcs, je suis très heureux d'entendre que la mission rendra rapidement ses conclusions. On peut donc espérer que des solutions seront vite trouvées ; elles seront d'ailleurs variables selon les départements.
Il serait sans doute nécessaire d'approfondir la question de l'assistance technique, afin de ne pas laisser les petites communes sans défense dans un monde concurrentiel. Il existe bien d'autres problèmes que ceux qui sont liés à la route. L'un d'entre eux, très concret, va prendre une importance croissante : je veux parler de l'assainissement individuel. Actuellement, seules les maisons neuves sont concernées ; à partir de cette année, l'ensemble des maisons, y compris le parc ancien, le seront. Leurs propriétaires seront incapables de se conformer à leurs obligations, tout comme les communes. Les grands groupes sont à l'affût, ainsi qu'en témoignent certaines publicités que j'ai vues. Il serait sage que nous puissions disposer d'un prix de référence afin que nous ne soyons pas livrés pieds et poings liés à cette concurrence quelque peu débridée.