Mme la présidente. L'amendement n° I-102, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Après l'article 84 A du code général des impôts, il est rétabli un article 85 ainsi rédigé :
« Art. 85. - Les déductions ou réductions du revenu imposable, autres que celles mentionnées aux 1° et 3° de l'article 83 ne peuvent avoir pour effet de réduire le revenu auquel s'appliquent les dispositions de l'article 193 de plus de 40 % par rapport à son montant hors application de ces déductions ou réductions. »
II - Les dispositions du I s'appliquent aux avantages procurés par les réductions et crédits d'impôt sur le revenu au titre des dépenses payées, des investissements réalisés ou des aides accordées à compter du 1er janvier 2006.
La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Si chaque dispositif fiscal dérogatoire introduit par le législateur peut se justifier, il est choquant que des contribuables fortunés puissent, par le cumul de ces avantages, réduire considérablement leur contribution à l'impôt sur le revenu.
Il est donc proposé, par cet amendement, un plafonnement global de la réduction du revenu imposable procurée par l'ensemble de ces dispositifs.
Cette réduction maximale serait de 40 %, en dehors de l'application de l'abattement de 10 % pour frais professionnels et de la déduction des cotisations sociales. Les divers plafonds applicables à chaque réduction ou déduction resteraient, bien sûr, applicables.
Cette solution, présentée par le groupe socialiste lors des précédents débats budgétaires, serait beaucoup plus claire et juste que le dispositif, en grande partie symbolique, proposé par le Gouvernement.
L'intérêt d'une telle mesure réside dans sa capacité à limiter fortement les effets d'aubaine liés à la multiplicité des niches fiscales existantes. Il reviendrait donc à chaque contribuable d'arbitrer entre différents dispositifs d'incitation fiscale, en fonction de ses objectifs propres d'allocation de ses revenus. Cette solution permettrait de parvenir rapidement à une réduction sensible du coût des dispositifs fiscaux dérogatoires.
Le plafonnement que nous proposons a pour but d'éviter les déductions excessives qui profitent toujours aux mêmes. Pour ce faire, il ne nous semble pas déraisonnable de plafonner l'ensemble des réductions d'impôt ou déductions du revenu imposable à 40 % de ce revenu. Il n'est tout de même pas absurde ni même incongru de faire en sorte que de gros contribuables ne puissent plus échapper totalement à l'impôt par le jeu du cumul des niches fiscales !
Ce n'est pas en prétendant défendre les contribuables modestes par la multiplication des niches fiscales que vous convaincrez nos compatriotes de votre souci de justice !
D'aucuns, dans la majorité, glosent sur leur souci de simplifier notre système fiscal en supprimant toutes les niches sans intérêt économique ou social. Mais, pour le moment, non seulement nous ne voyons rien venir dans ce sens, mais certaines niches fiscales vont même être consolidées. Il y aura bien une perte de recettes par la remise en cause de l'impôt de solidarité sur la fortune, l'ISF, mais il n'y aura ni suppression ni limitation de l'effet « anti-redistributif » de ces niches fiscales pour les contribuables soumis à l'impôt sur le revenu des personnes physiques. C'est tout simplement immoral !
L'amendement n° I-102 vise donc à tirer la conséquence du peu d'efficacité prévisible du plafonnement proposé par le Gouvernement, cette prévision ayant en effet de grandes chances, si l'on peut dire, de se réaliser, puisque ce plafonnement est proposé en parallèle à de multiples niches fiscales qui, nous disait-on, devaient être supprimées.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette question des différentes déductions et réductions, en d'autres termes des niches fiscales, nous a beaucoup occupés l'an dernier au cours de la discussion du projet de loi de finances. Et vous vous souviendrez sans doute que j'avais été assez critique - je n'étais d'ailleurs pas le seul au sein de la majorité - à l'égard de la démarche du Gouvernement, qui présentait un dispositif que je trouvais extrêmement complexe et, au total, assez inéquitable.
Cela peut s'expliquer aisément. Quand on examine, régime après régime, ces différentes déductions, réductions, dégrèvements, aides et dépenses fiscales de toutes natures, on voit bien que, au fond de chaque niche - si j'ose ainsi m'exprimer -, il y a un certain nombre de chiens, lesquels grognent, voire mordent, lorsque l'on veut s'attaquer à la niche ! (Sourires.)
M. Michel Charasse. Des dobermans ! (Rires.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Et, pour être plus technique - mais j'ai constaté que mon propos retenait votre intérêt, mes chers collègues -,...
M. Jean-Jacques Jégou. Comme d'habitude, monsieur le rapporteur général !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ...lorsque l'on veut s'attaquer à la réduction d'avantages particuliers dans un pays marqué par les clientélismes et les corporatismes, il ne faut pas s'étonner des réactions que l'on suscite.
À la vérité, l'État, depuis des décennies, est clientéliste, et les clientèles ne sont que son reflet. Nous sommes donc habitués à ce dialogue convenu qui conduit à un dispositif fiscal sans cesse plus complexe, sans cesse plus inéquitable, sans cesse plus inégalitaire.
L'an dernier, je constatais que le plafonnement des niches fiscales - certaines échappaient à la règle commune, ce qui était politiquement inévitable - était une demi-mesure d'une complexité non justifiable.
Je n'hésiterai pas à vous le dire, monsieur le ministre, j'ai été plutôt heureux que le Conseil constitutionnel soit de cet avis et qu'il invalide les dispositions correspondantes du fait de leur illisibilité, et donc des iniquités supplémentaires créées dans la loi fiscale par cette approche incomplète.
Cependant, la formule défendue par Bernard Angels ne me paraît pas être bien meilleure.
À mes yeux, la bonne approche - cette position me semble d'ailleurs partagée au sein de la commission des finances - serait de supprimer le plus grand nombre de ces régimes, ...
M. Michel Charasse. Les journalistes !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... au lieu de les plafonner, et d'élargir l'assiette de l'impôt sur le revenu (M. Jean-Jacques Jégou applaudit.),...
M. Yves Fréville. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ...de manière à faire baisser les taux et à augmenter le rendement fiscal. (M. Jean-Jacques Jégou applaudit.)
En effet, ce pays a besoin de recettes fiscales croissantes.
M. Jean-Jacques Jégou. Très bien !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne nous voilons pas la face ! Nos besoins en matière de services collectifs, notamment de solidarité, nous imposent de trouver la voie d'une politique fiscale dont le rendement augmente d'année en année, ce qui n'est pas à mon avis antinomique de la baisse des taux.
C'est pourquoi nous devons procéder à un réexamen global en la matière, en faisant preuve de clarté, de suite dans les idées, car il nous faut une vraie stratégie fiscale.
Je suis convaincu que nous pouvons nous retrouver, nombreux, sur la plupart de ces principes (M. Jean-Jacques Jégou applaudit.), sans pour autant nier l'existence de différences de visions quant à la stratégie à adopter, qui reflètent aussi la richesse de la démocratie.
Sur ce sujet, mon voeu serait que nous débattions, en citoyens majeurs que nous sommes, j'espère, en sachant bien faire ressortir les points de convergence et d'opposition entre nos grandes formations politiques, au regard du devenir de la fiscalité et des prélèvements obligatoires.
Tel est l'esprit qui conduit la commission à émettre sur cet amendement, s'il n'est pas retiré, un avis défavorable ; mais il lui paraît totalement légitime de soulever ce type de problème et de s'interroger sur le devenir de nos dégrèvements, de nos exonérations, de nos dépenses fiscales, mais aussi sociales.
En effet, tous les propos que nous tenons en matière d'impôt valent également pour les cotisations sociales : les raisonnements et les clientélismes sont les mêmes ; et les complexités sont de part et d'autre tout aussi indéfendables. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Cela étant, permettez-moi de rebondir sur l'excellente intervention de M. le rapporteur général, même si, pour une fois, je diverge légèrement de ses vues.
L'ayant entendu indiquer avec humour que, dans chaque niche, il peut y avoir un chien, je dirai que chaque sénateur, chaque député, chaque Français a un avis sur les niches fiscales ! (Sourires.) Je me propose de vous livrer humblement le mien.
Pour ma part, je ne suis pas contre les niches fiscales. En réalité, elles constituent un outil de politique économique. C'est tout de même bien pratique de pouvoir disposer de la possibilité d'inciter au développement de tel ou tel axe, par le biais de mesures spécifiques.
Je prendrai l'exemple des zones franches dans les quartiers difficiles : on oublie qu'il s'agit d'une niche fiscale ! Mais les embauches dans ces quartiers bénéficient d'un dispositif totalement dérogatoire : zéro taxe, zéro charge sociale ! Ce n'est tout de même pas rien ! On est bien content de trouver cette niche ! Et je peux en témoigner, en tant que maire de Meaux. D'ailleurs, monsieur le rapporteur général, puisque vous êtes vous-même maire, peut-être avez-vous une zone franche chez vous ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, je n'ai pas de zone franche ! C'est une distorsion de concurrence ! (Sourires.)
M. Jean-François Copé, ministre délégué. C'est une distorsion de concurrence qui est liée, sans nul doute, à des situations sociologiques différentes !
J'attire votre attention, monsieur le rapporteur général, sur le fait que c'est ce dispositif qui a permis à ma ville de faire descendre son taux de chômage au niveau de la moyenne nationale. Lorsque j'ai été élu maire, Meaux connaissait un taux de chômage de 16 %, contre 9 % aujourd'hui. La création de la zone franche a largement contribué à une telle amélioration.
C'est la raison pour laquelle on ne peut balayer d'un revers de main le principe même des niches fiscales.
Je pourrais d'ailleurs en dire autant au sujet de la loi Malraux, ou encore des départements et territoires d'outre-mer. En effet, dans ces derniers, en dépit des critiques justifiées qui peuvent s'élever ici ou là, le dispositif a considérablement contribué au développement économique et social.
Cela étant dit, l'année dernière, au cours d'un débat au demeurant passionnant, j'avais évoqué l'idée d'un plafonnement des niches. Puisqu'il y avait, d'un côté, instauration d'un bouclier fiscal, il était normal, de l'autre, de ne pas échapper totalement à l'impôt.
Une fois ce système adopté par le Parlement, une mauvaise nouvelle est intervenue. Alors qu'il s'agissait d'une mesure revêtant plutôt un caractère social, l'opposition a saisi le Conseil constitutionnel pour en contester la conformité à la Constitution.
Ce qui devait arriver est arrivé : regrettant le caractère trop complexe du texte, le Conseil constitutionnel l'a censuré, de sorte que cette seule disposition de notre réforme fiscale a été annulée.
Je le regrette, car je croyais profondément à ce plafonnement.
Le Gouvernement a travaillé tout au long de l'année avec vous-même, monsieur le rapporteur général, et avec M. le président de la commission des finances, dans l'espoir de trouver une autre formule qui ne soit pas trop compliquée. Mais en vain ! Et je la cherche « en gémissant », selon la formule de Blaise Pascal !
Cependant, le combat continue.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut supprimer les niches !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Ne rouvrons pas le débat ! (Sourires.)
Voilà pourquoi, je le répète, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Angels, pour explication de vote.
M. Bernard Angels. Je me félicite du débat intéressant suscité par notre amendement et je remercie M. le rapporteur général de son analyse, que je partage à de nombreux égards, même si nous divergeons quant à la solution préconisée.
Monsieur le ministre, nous avons évoqué les chiens qui aboient, mais la caravane est passée, et elle passe encore ! (Sourires.)
En effet, non seulement les niches fiscales n'ont pas été limitées pendant cette législature,...
Mme Marie-France Beaufils. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Bernard Angels. ... mais elles ont augmenté de 20 % ! Excusez du peu !
Pour notre part, nous ne prônons pas la suppression de toutes les niches fiscales, car nous pensons, comme vous - et les exemples que vous avez cités confortent cette idée - que la fiscalité est un outil qui doit favoriser le développement de l'économie et permettre aux personnes en difficulté de mieux vivre.
Le problème réside, à nos yeux, dans le cumul des niches fiscales, qui permet à certains de ne plus payer d'impôt alors qu'ils en ont les moyens.
Par conséquent, ce que nous voulons, nous, c'est limiter ces dérogations, et nous proposons donc, par notre amendement, un plafonnement de 40 %.
Vous déplorez la censure de votre système par le Conseil constitutionnel, mais vous rejetez notre proposition d'un revers de main alors que, après un an de recherches, vous n'avez rien trouvé !
Mme la présidente. L'amendement n° I-103, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Avant le dernier alinéa de l'article 193 du code général des impôts sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les réductions d'impôt, autres que celle résultant du quotient familial mentionné à l'article 194, et les crédits d'impôt ne peuvent avoir pour effet de réduire l'impôt sur le revenu d'un montant total de plus de 7 500 euros, ni de porter au-delà de ce montant la somme de l'impôt réduit et de l'impôt restitué. »
II - Ces dispositions s'appliquent aux avantages procurés par les réductions et crédits d'impôt sur le revenu au titre des dépenses payées, des investissements réalisés ou des aides accordées à compter du 1er janvier 2006.
La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Dans le même esprit que l'amendement précédent, cet amendement prévoit que la réduction maximale de l'impôt obtenue grâce à la combinaison de plusieurs dispositifs soit de 7 500 euros.
Seraient exclus du calcul de ce total les effets de l'application du quotient familial.
L'intérêt d'une telle mesure, claire et immédiatement applicable, résiderait dans sa capacité à limiter fortement les effets d'aubaine, liés à la multiplicité des niches fiscales existantes.
Il reviendrait à chaque contribuable d'arbitrer entre différents dispositifs d'incitation fiscale, en fonction de ses objectifs propres d'allocation de ses revenus.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme pour l'amendement précédent, et pour les mêmes raisons - nous pourrions d'ailleurs reprendre la même discussion -, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° I-199, présenté par M. Arthuis, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 7 de l'article 158 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 7. Le montant des revenus et charges énumérés ci-après, retenu pour le calcul de l'impôt selon les modalités prévues à l'article 197, est multiplié par un coefficient. Ces dispositions s'appliquent :
« 1° Jusqu'en 2007, aux titulaires de revenus passibles de l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles, réalisés par des contribuables soumis à un régime réel d'imposition qui ne sont pas adhérents d'un centre de gestion ou association agréé défini aux articles 1649 quater C à 1649 quater H, à l'exclusion des membres d'un groupement ou d'une société mentionnés aux articles 8 à 8 quinquies et des conjoints exploitants agricoles de fonds séparés ou associés d'une même société ou groupement adhérant à l'un de ces organismes ;
« 2° Aux revenus distribués mentionnés aux c à e de l'article 111, aux bénéfices ou revenus mentionnés à l'article 123 bis et aux revenus distribués mentionnés à l'article 109 résultant d'une rectification des résultats de la société distributrice ;
« 3° Aux sommes mentionnées au 2° du II de l'article 156 versées en vertu d'une décision de justice devenue définitive avant le 1er janvier 2006.
« 4º Aux revenus soumis à l'évaluation forfaitaire définie aux articles 64 et suivants.
« Le coefficient s'appliquant aux revenus figurant au 1° est de 1,20 au titre des revenus de 2006 et de 1,10 au titre des revenus de 2007 ; le coefficient s'appliquant aux revenus et charges figurant aux 2°, 3° et 4° est de 1,25 ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'abaissement progressif du coefficient s'appliquant aux revenus des contribuables soumis à un régime réel d'imposition qui ne sont pas adhérents d'un centre de gestion ou association agréé est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la réserve de cet amendement jusqu'après l'examen de l'article 5, afin qu'il soit examiné en même temps que l'amendement n° I-46 bis rectifié concernant le même sujet.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La réserve est ordonnée.
L'amendement n° I-232, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 2 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa (a), après les mots : "constatée au titre de l'année précédente" sont insérés les mots : "ou, pour les personnes qui n'ont pas été fiscalement domiciliées en France au cours des trois années civiles précédant celle au cours de laquelle elles s'y domicilient, au titre de cette dernière année,"
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
"d. Les personnes qui n'ont pas été fiscalement domiciliées en France au cours des trois années civiles précédant celle au cours de laquelle elles s'y domicilient bénéficient au titre de cette dernière année d'un plafond complémentaire de déduction égal au triple du montant de la différence définie au a."
II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise à renforcer l'attractivité du territoire français au regard des personnes impatriées ou rapatriées, en leur permettant de bénéficier d'une majoration du plafond de déductibilité des cotisations d'épargne retraite pour tenir compte du fait qu'elles n'ont pas eu la possibilité d'obtenir une telle déduction au cours des années où elles résidaient à l'étranger.
Il s'agit ainsi d'inciter des personnes qui n'étaient pas fiscalement domiciliées en France depuis au moins trois ans à devenir, ou à redevenir, des résidents fiscaux français.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° I-236 rectifié, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa de l'amendement n° I-232, après les mots :
les personnes qui
insérer les mots :
pour des raisons qui ne sont pas liées à la mise en oeuvre de procédures judiciaires, fiscales ou douanières
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Nous avons examiné l'amendement n° I-232 ce matin en commission.
Le groupe socialiste a formulé un certain nombre d'observations en indiquant qu'il n'était pas d'accord sur le fond. Je n'y reviendrai pas.
Pour autant, si cet amendement devait être adopté, je préférerais qu'il le soit avec une légère modification tendant à préciser que le geste fiscal proposé ne peut naturellement pas s'appliquer aux personnes qui ont quitté la France pour des raisons de poursuites judiciaires, fiscales ou douanières. Cela me paraît être la moindre des choses.
En effet, on ne va tout de même pas faire un cadeau à des gens qui ont fui leur pays pour ne pas tomber sous le coup d'une sanction et qui, une fois rentrés, n'auraient plus qu'à passer à la caisse !
Tel est l'objet du sous-amendement n° 236 rectifié.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n°I-236 rectifié ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mon cher collègue, nous avons eu en effet une discussion intéressante sur ce thème en commission, et vous avez appelé l'attention des membres de cette dernière sur certains risques que pourrait présenter le dispositif en question. Votre sous-amendement est la traduction de cet échange.
Il me paraît effectivement nécessaire de préciser qu'il s'agit de personnes qui ont résidé à l'étranger pour des raisons non liées à la mise en oeuvre de procédures judiciaires, fiscales ou douanières.
La mention des raisons professionnelles, qui figurait dans votre amendement initial, me gênait davantage, mais dans la mesure où vous l'avez supprimée dans votre amendement rectifié, la commission émet un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. L'amendement n° I-232 me paraît excellent, car il correspond très exactement à l'esprit dans lequel nous travaillons, les uns et les autres, pour essayer de renforcer l'attractivité de notre territoire.
En effet, depuis quinze ou vingt ans, notre pays souffre de ce que l'on appelle « la fuite des cerveaux », un certain nombre de nos compatriotes s'étant expatriés.
Je souscris totalement à l'idée, très bonne, de les inciter au retour dans de bonnes conditions sur le plan fiscal et social. J'émets donc un avis favorable sur cet amendement.
Le sous-amendement n° I-236 rectifié présente l'avantage de préciser que le dispositif proposé par la commission doit se mettre en place dans le respect des législations fiscales et douanières en vigueur. Ce n'est certainement pas moi qui m'y opposerai, monsieur Charasse ! Vous savez que, dans ce domaine, je suis aussi regardant que vous le fûtes vous-même lorsque vous exerciez mes fonctions actuelles ! Je ne peux donc que vous rejoindre sur ce point.
Puisque nous faisons un pas l'un vers l'autre, le groupe socialiste s'honorerait en confirmant ce souhait que nous avons de nous retrouver, démentant ainsi les propos que j'ai tenus au début de cette séance - je ne vois plus M. Massion, et j'espère ne pas l'avoir blessé tout à l'heure ! Nos amis socialistes pourraient ainsi accepter un paquet global, constitué par l'amendement et le sous-amendement, et voter ce package, selon le terme utilisé par les Anglo-saxons lorsqu'ils accueillent nos compatriotes délocalisés... qui finissent par se lasser et reviennent en France pour ne parler que le français !
Cela étant dit, je lève le gage sur l'amendement n° I-232.
Mme la présidente. Il s'agit donc de l'amendement n° I-232 rectifié.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Pour faire suite à la discussion que nous avons eue tout à l'heure en commission, je dirai que le sous-amendement de notre collègue Michel Charasse a le mérite de préciser les choses, notamment pour les personnes qui fuient le territoire national, et il y en a de célèbres. Je ne donnerai pas la liste complète des noms publiés au grand jour parce que ces personnes exercent des fonctions qui les exposent au regard du public. Certes, des limites sont posées, précisant que les personnes qui ont été en infraction avec la législation fiscale ne pourront bénéficier de cette mesure, mais, monsieur le ministre, ce n'est pas pour autant que nous voterons l'amendement, ...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Oh !
Mme Nicole Bricq. ... car il nous pose un problème de fond, dans la mesure où la disposition proposée par M. le rapporteur général est trop uniforme. On sait très bien que, dans ceux qui partent à l'étranger, il convient de distinguer deux catégories.
D'une part, il y a ceux qui cherchent à l'étranger un moyen d'échapper à la solidarité nationale en ne payant ni l'impôt ni les cotisations sociales. Le nombre de personnes concernées n'a jamais été vraiment calculé. Malgré les nombreuses études qui ont été lancées pour l'évaluer, aujourd'hui encore nous sommes incapables de le faire avec précision. Mais il y a eu suffisamment de déclarations publiques de patrons d'entreprise et de cadres supérieurs dans les médias pour attester ce phénomène.
D'autre part, il y a ceux qui vont conquérir à l'étranger une première expérience professionnelle. Je connais pour ma part beaucoup de salariés qui vont, notamment dans le domaine de la restauration, faire leurs armes à l'étranger, par exemple en Grande-Bretagne, pour en revenir avec un bagage, une expérience supplémentaires et qui trouvent effectivement à s'employer dans des économies qui sont en pleine croissance alors qu'en France le trend de croissance est très faible.
Vous comprenez bien qu'il s'agit de deux cas tout à fait différents. Or l'amendement de M. Marini traite tout le monde de la même manière. Nous savons bien, compte tenu d'autres débats, notamment celui que nous venons d'avoir sur les niches fiscales, lequel de ces deux cas prime dans l'esprit du législateur. Ce n'est pas le deuxième !
S'agissant de la première catégorie de personnes, j'ai bien observé le mouvement actuel qui consiste à aller faire de l'argent à l'étranger, puis, quand on a une famille, quand on commence à penser à la retraite, à revenir en France pour bénéficier du système de solidarité nationale : retraites, service public et un certain nombre d'autres choses dont les Français ont su se doter depuis une cinquantaine d'années.
Ceux-là auraient, passez-moi l'expression, « le beurre et l'argent du beurre ». Ils partiraient faire leur pelote sans s'acquitter de leurs devoirs sur le territoire national et bénéficieraient en prime d'une sorte de blanchiment par le biais de la législation que nous aurions faite. Je trouve que cela n'est pas raisonnable.
En conséquence, le groupe socialiste ne votera pas l'amendement de M. Marini, même si cela ne vous fait pas plaisir, monsieur le ministre !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Madame Bricq, j'hallucine ! (Sourires.) J'avoue que je n'en reviens pas !
Mme Nicole Bricq. Ne me dites pas que vous connaissez mieux le sujet que moi. Je sais très bien de quoi il s'agit !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Madame Bricq, vous connaissez peut-être le sujet, mais ce n'est pas une raison pour m'interrompre : vous ne savez pas ce que je vais vous répondre !
Il est tout de même extraordinaire de voir à quel point la gauche française, et en particulier le parti socialiste, n'en finit pas avec ses démons d'un autre siècle.
Mme Nicole Bricq. Oh ! Ne nous faites pas le coup des « démons » !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je le dis d'autant plus que je vous connais un peu, madame Bricq. Je sais que vous appartenez plutôt à la tendance « moderne » du parti socialiste. Vous êtes proche de Dominique Strauss-Kahn, qui, des trois candidats à la candidature socialistes, est celui qui a le plus accepté l'idée que le parti socialiste français devrait peut-être s'aligner un peu sur les autres partis socialistes européens.
Mme Nicole Bricq. Pas de cette manière !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Peut-être pas de cette manière, mais tout de même !
Avez-vous lu l'amendement ? Il y est question de permettre à des Français, c'est-à-dire à certains de nos compatriotes qui sont des citoyens français, expatriés parce que leur carrière l'a rendu nécessaire pour quelque temps, d'avoir le droit de revenir en France et, à partir du jour de leur retour, d'ouvrir un PERP, un plan d'épargne retraite populaire.
Jusqu'à présent, on leur interdisait, pendant cinq ans, de cotiser à un PERP après leur retour. L'amendement proposé par M. le rapporteur les autorise à le faire dès l'année de leur retour. Et vous vous opposez à cela ! On croit rêver ! Nous sommes en 2006 : quand le parti socialiste français va-t-il enfin vivre avec son temps ?
M. Roger Karoutchi. Il n'y arrivera jamais !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Excusez-moi de vous le dire aussi brutalement, mais, à quelques mois des élections présidentielles, il serait quand même temps que nous nous parlions franchement sur ce type de sujet !
Je veux que les Français entendent que le parti socialiste en est encore à parler de « blanchiment », à considérer que les gens se planquent à l'étranger alors que, pour notre part, nous parlons de l'excellence française.
Autant que je sache, dans un pays moderne, ou tout simplement dans une démocratie, on a le droit d'aller travailler ailleurs, d'y apprendre des choses et de revenir en France pour faire bénéficier son pays de son expérience à l'étranger. On a même le droit de cotiser pour sa retraite sans être considéré comme un paria.
Il y a un moment où on doit pouvoir débattre de ces questions de façon dépassionnée. Il y a suffisamment de sujets sur lesquels nous ne sommes pas d'accord ! Vous n'êtes pas d'accord avec nous sur le bouclier fiscal, soit ! Vous n'êtes pas non plus d'accord sur la baisse de l'impôt sur le revenu, soit ! Mais vous vous opposez même à cette mesure-là ! Je dois vous dire que, vraiment, les bras m'en tombent.
D'autant que, par ailleurs, j'ai naturellement considéré avec beaucoup d'intérêt le sous-amendement de Michel Charasse, qui est de bon sens. En effet, il va de soi qu'il n'est pas question de cautionner des fraudeurs. Je regrette donc une position aussi « ringarde », alors que nous essayons quant à nous de nous tourner résolument vers la modernité.
M. Roger Karoutchi. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Il est inutile de nous fâcher pour cette disposition !
Mme Bricq n'a pas dit, sauf erreur de ma part, que l'idée était mauvaise.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout de même !
M. Michel Charasse. Ce que nous avons contesté ce matin en commission, c'est le caractère trop général et peu prudent de cette mesure, qui recouvre des cas très différents. Pour certains, son intérêt est évident, mais pour d'autres, il l'est beaucoup moins.
Monsieur le ministre, je ne reviendrai pas sur ce qu'a dit Mme Bricq il y a un instant, mais plutôt sur vos propos. Vous avez dit que la disposition concernait « les Français ». Or, ce sont tous les contribuables qui sont concernés.
M. Michel Charasse. L'amendement de M. Marini vise « les personnes », sous-entendu celles qui sont imposables, et elles peuvent ne pas être françaises. Je voudrais que vous précisiez bien qu'il n'y aura pas d'exception, que la disposition s'appliquera à tous les contribuables, quelle que soit leur nationalité, à partir du moment où leurs revenus sont imposables en France. Dans le cas contraire, il s'agirait d'une grande novation dans notre droit fiscal !...
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'interprétation de M. Charasse est effectivement la bonne. M. le ministre a été très éloquent, il a évoqué un cas de figure couvert par l'amendement, mais ce dernier est plus large. Je parlais effectivement des impatriés ou des personnes qui reviennent en France, redeviennent résidents fiscaux après l'avoir été dans le passé. Cela vaut aussi bien pour ceux qui n'ont jamais été résidents fiscaux et qui le deviennent pour la première fois que pour ceux qui le redeviennent, quelle que soit leur nationalité.
M. Michel Charasse. Je suis d'accord avec vous, monsieur le rapporteur général !
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° I-236 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-232 rectifié, modifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 2.
L'amendement n° I-233, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- Dans le troisième alinéa du 1 de l'article 170 du code général des impôts, les mots : « de l'article 81 A » sont remplacés par les mots « des articles 81 A et 81 B », après les mots : « l'article 150-0 D bis », sont insérés les mots : « , les revenus exonérés en application des articles 163 quinquies B à 163 quinquies C bis », et les mots : « les plus-values exonérées en application du » sont remplacés par les mots : « les plus-values exonérées en application des 1, 1 bis et » ;
II.- Le 1° du IV de l'article 1417 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le a, après les mots : « 163 tervicies » sont ajoutés les mots : « ainsi que du montant des cotisations ou des primes déduites en application de l'article 163 quatervicies ;
2° Dans le c, les mots : « à l'article 81 A » sont remplacés par les mots : « aux articles 81 A et 81 B », les mots : « ainsi que » sont supprimés et après les mots : « doubles impositions » sont ajoutés les mots : « ainsi que de ceux exonérés en applications des articles 163 quinquies B à 163 quinquies C bis » ;
3° Dans le d, les mots : « en application du » sont remplacés par les mots : « en application des 1, 1 bis et ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d'un amendement technique qui rectifie à la marge la notion de « revenu fiscal de référence », utilisée pour déterminer les droits à abattement, exonération et dégrèvement prévus en matière d'impôts locaux et pour l'ouverture de certains dispositifs tels que la prime pour l'emploi.
Les mesures dont il s'agit ont déjà été votées dans la loi de finances pour 2006. Mais elles sont tombées dans la trappe du Conseil constitutionnel car elles figuraient dans l'une des dispositions annulées par celui-ci concernant le plafonnement des niches fiscales. Il s'agit en quelque sorte d'un dégât collatéral causé par cette décision du Conseil constitutionnel, alors même que les dispositions en cause à propos du revenu fiscal de référence sont indépendantes d'un éventuel plafonnement des divers avantages fiscaux évoqués tout à l'heure.
Le présent amendement vise donc à rétablir la disposition votée l'année dernière et qui concerne en particulier - mais en particulier seulement - les personnes évoquées au sujet du précédent amendement, c'est-à-dire les impatriés, les personnes qui deviennent ou redeviennent des résidents fiscaux français.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Très favorable, car cette proposition va contribuer à mieux apprécier les capacités contributives des contribuables, notamment en regard des allègements d'impôts locaux.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 2.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-104, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa du 1°, les mots : « une réduction d'impôt » sont remplacés par les mots : « un crédit d'impôt ».
2° Dans le deuxième alinéa du 1°, les mots : « de la réduction prévue » sont remplacés par les mots : « du crédit d'impôt prévu ».
3° Le troisième alinéa du 1° est ainsi rédigé :
« Le crédit d'impôt est égal à 50 % du montant des dépenses effectivement supportées, retenues dans la limite de 2 200 € pour les dépenses engagées à compter du 1er janvier 2003. Ce plafond est porté à 4 400 € pour les contribuables mentionnés au 3° de l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale, ainsi que pour les contribuables ayant à leur charge une personne, vivant sous leur toit, mentionnée au 3° dudit article, ou un enfant donnant droit au complément d'allocation d'éducation spéciale prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 541-1 du code de la sécurité sociale. »
4° Dans le quatrième alinéa du 1°, les mots : « à la réduction d'impôt prévue » sont remplacés par les mots : « au crédit d'impôt prévu ».
5° Le début de l'avant-dernier alinéa du 1° est ainsi rédigé : « Le crédit d'impôt est accordé sur présentation... (le reste sans changement) ».
6° À la fin du 2°, les mots : « de la réduction d'impôt », sont remplacés par les mots : « du crédit d'impôt ».
II. - Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Il s'agit, par cet amendement, de transformer une niche fiscale destinée à quelques familles très aisées en un réel outil d'aide fiscale aux ménages, au bénéfice de l'emploi.
Comme le soulignait le Conseil des impôts dans son rapport 2003 consacré à la fiscalité dérogatoire, la réduction d'impôt pour emploi d'une personne à domicile bénéficie actuellement « essentiellement aux foyers fiscaux dont les tranches de revenu sont les plus élevées, avec l'impossibilité, pour les foyers non imposables, de bénéficier de cet avantage ».
Le Conseil démontrait notamment que, sur 2,2 millions de déclarants, seules 1,3 million de personnes avaient pu bénéficier d'une réduction fiscale.
En conséquence, le Conseil étudiait la mise en place d'un crédit d'impôt dans les proportions proposées ici, c'est-à-dire à coût constant pour l'État, toutes choses égales par ailleurs. Il soulignait notamment qu'« une telle réforme pourrait accroître la demande de services de proximité des bénéficiaires potentiels ».
Avec notre proposition, la justification en termes d'emploi invoquée par le Gouvernement pour les hausses du plafond proposées en 2003, 2004 et 2005 serait ainsi beaucoup mieux respectée.
La restriction visant à n'appliquer cette disposition qu'en déduction de l'impôt dû n'est justifiée qu'au regard des règles de la recevabilité financière des amendements d'origine parlementaire.
Mme la présidente. L'amendement n° I-105, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi rédigé :
« La réduction d'impôt est égale à 50 % du montant des dépenses effectivement supportées, retenues dans la limite de 6 900 € pour les dépenses engagées à compter du 1er janvier 2006. Ce plafond est porté à 10 000 euros pour les dépenses engagées à compter du 1er janvier 2006 pour les contribuables mentionnés au 3° de l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale, ainsi que pour les contribuables ayant à leur charge une personne, vivant sous leur toit, mentionnée au 3° dudit article, ou un enfant donnant droit au complément d'allocation d'éducation spéciale prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 541-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Alors que la hausse du plafond des dépenses prises en compte au titre de la réduction d'impôt pour emploi à domicile ne devait bénéficier, de l'aveu même du rapporteur général, qu'à 70 000 familles très aisées au maximum, le Gouvernement et sa majorité ont été incapables de fournir une quelconque preuve de son effet positif sur l'emploi.
La revalorisation de ce plafond constitue pourtant une mesure systématiquement mise en oeuvre par la majorité actuelle dès qu'elle en a l'occasion. Le plafond initialement fixé à 3 811 euros a ainsi été relevé à 3 964 euros par la loi de finances pour 1994 et 13 720 euros dans le cadre du budget pour 1995. Alors que les députés socialistes l'avaient réduit de moitié dans le budget pour 1998 en le portant à 6 860 euros, la majorité est revenue en 2005 à un niveau de déduction proche de celui atteint en 1995, avec un plafond de 12 000 euros, pouvant atteindre 15 000 euros compte tenu de diverses majorations.
La majorité ne peut éternellement se cacher derrière le fait que la mesure a été mise en place par un gouvernement socialiste pour refuser d'admettre que les hausses massives du plafond des dépenses prises en compte la font totalement changer de cible et de nature.
Dès lors, en conformité d'ailleurs avec les multiples engagements qui ont été pris de remettre en cause les niches fiscales, nous proposons de revenir au plafond qui valait en 2002, soit 6 900 euros.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Voilà de nombreuses années que, de façon un peu rituelle, nous nous livrons à ce débat, et j'ai le souvenir d'avoir assisté de ma place de sénateur à des discussions portant exactement sur le même sujet lors de l'examen de projets de loi de finances défendus par le ministre du budget Nicolas Sarkozy, du temps du gouvernement d'Édouard Balladur.
La majorité de la commission estime qu'il faut considérer l'intérêt des personnes modestes employées ou susceptibles d'être employées à domicile avant l'intérêt fiscal des personnes mieux pourvues qui les emploient. C'est notre différence d'approche, et elle a toujours existé : nous nous intéressons au vecteur de la création d'emploi.
En matière de services à la personne, la nouvelle Agence nationale des services à la personne - encore une, monsieur le ministre ! -, qui est présidée par Laurent Hénard, a diffusé des informations statistiques tout à fait impressionnantes sur la réalité des créations d'emploi, sur leur nombre et sur le vivier que représente ce secteur. La réduction d'impôt est un moyen de faciliter le développement des emplois à domicile.
Bien entendu, monsieur le ministre, le jour - que j'appelle de mes voeux -, où toutes les niches fiscales disparaîtraient, celle-là connaîtrait le même sort ; mais serait alors en vigueur un barème dont les taux seraient plus bas pour tout le monde, et nous serions dans une autre logique. On peut, en attendant, gérer au mieux le transitoire, même si l'on aspire à un état de choses différent qui, je le reconnais, se situe dans un avenir encore indéterminé.
L'adoption de l'amendement n° I-104 accentuerait la progressivité et la concentration de l'impôt sur le revenu. La commission y est donc évidemment tout à fait défavorable, de même que, pour les mêmes raisons, à l'amendement n° I-105.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je serai bref, car je rejoins totalement le propos du rapporteur général.
Baisser le plafond reviendrait naturellement à rendre cette mesure moins incitative : je suis personnellement pour qu'il soit en réalité le plus haut possible, jusqu'à une certaine limite naturellement. Il me semble que nous avons actuellement trouvé un bon équilibre, et je pense même que nous aurions éventuellement pu aller un petit peu plus loin.
La formule me paraît bonne parce que, premièrement, elle est très créatrice d'emploi, et je suis très étonné de la remarque de M. Angels, et, deuxièmement, elle crée de l'emploi légal - excusez-moi de devoir insister sur ce léger détail ; quand on est ministre du budget, on y est sensible ! C'est en effet un moyen d'inviter fortement nos compatriotes à déclarer les emplois et ceux qui les occupent à veiller à ce qu'ils soient légaux et non pas clandestins.
Par ailleurs, je pense, comme M. le rapporteur général, que la déduction immédiate est de loin préférable au crédit d'impôt, qui n'intervient qu'un an après la dépense : il serait dommage de ne pas pouvoir en disposer instantanément.
Toutes ces raisons me donnent à penser, monsieur le sénateur, que vos amendements seraient plutôt contre-productifs au regard de l'objectif fixé, et j'invite la Haute Assemblée à les repousser.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Angels, pour explication de vote.
M. Bernard Angels. Monsieur le ministre, il ne s'agit pas de supprimer la déduction fiscale, qui, vous le savez très bien, a été mise en place par un gouvernement socialiste.
M. Bernard Angels. L'objectif était précisément de lutter contre le travail clandestin, de faire diminuer le travail au noir et, en même temps, d'encourager la création d'emploi dans ce secteur.
Mais, chaque année, les plafonds augmentent : aujourd'hui, il ne s'agit plus seulement d'incitation, il s'agit surtout de procurer des niches fiscales à certaines personnes. À force de remonter le plafond, on crée un effet d'aubaine.
Mme la présidente. L'amendement n° I-59, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la première phrase de l'article 200 quater B du code général des impôts, les mots : « six ans » sont remplacés par les mots : « onze ans ».
II. - Les taux prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Rendre un peu de pouvoir d'achat aux ménages nous semble passer parfois par le fait de leur donner les moyens de disposer d'une certaine autonomie dans leur vie quotidienne. Ainsi la question des frais de garde des jeunes enfants se pose-t-elle clairement depuis plusieurs décennies, de même que celle de sa prise en compte fiscale.
L'article 200 quater B du code général des impôts est aujourd'hui ainsi rédigé : « Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 50 % des dépenses effectivement supportées pour la garde des enfants âgés de moins de six ans qu'ils ont à leur charge. Ces dépenses sont retenues dans la limite d'un plafond fixé à 2 300 euros par enfant à charge et à la moitié de ce montant lorsque l'enfant est réputé à charge égale de l'un et l'autre de ses parents. [...] »
Cette mesure fiscale s'avère d'un coût relativement maîtrisé, puisqu'il s'élèvera en 2007 à 660 millions d'euros, répartis entre 1 340 000 ménages, ce qui représente un crédit d'impôt moyen d'un peu moins de 500 euros. Son existence a au moins deux effets bénéfiques : d'une part, elle est génératrice d'un certain nombre d'emplois dans les établissements et services dédiés à la garde de jeunes enfants ; d'autre part, elle permet à de nombreuses femmes de conserver ou de reprendre leur activité professionnelle dès qu'elles sont pour partie libérées des contraintes nées de l'organisation du temps de la vie quotidienne.
L'existence de cette disposition fiscale est particulièrement importante pour l'ensemble des femmes salariées élevant seules leurs enfants, situation fréquente dans de nombreuses localités de notre pays. Cependant, elle souffre, de notre point de vue, d'une relative insuffisance.
En effet, les frais de garde ne sont pour l'heure pris en charge que pour les enfants ayant moins de six ans, alors que le problème se pose également, singulièrement pour les familles monoparentales, au-delà de cet âge, jusqu'à l'entrée au collège, un crédit d'impôt spécifique existant pour les enfants scolarisés normalement dans le second degré.
Notre amendement a donc pour objet de résoudre cette contradiction et de faire en sorte que les familles puissent continuer de bénéficier des dispositions de l'article 200 quater B jusqu'à ce que le ou les enfants atteignent l'âge de onze ans, âge généralement constaté à l'entrée au collège.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La loi de finances pour 2005 a marqué un premier effort en transformant la réduction d'impôt qui était accordée au titre des frais de garde des enfants à charge en un crédit d'impôt. La loi de finances pour 2006, second effort, a doublé le taux de ce crédit d'impôt, le faisant passer de 25 % à 50 %, ce qui en double aussi le coût, la dépense fiscale totale étant estimée à 660 millions d'euros pour 2007, contre 330 millions d'euros en 2006.
La majorité de la commission estime que, dans le contexte budgétaire actuel, il ne serait pas raisonnable de faire plus. C'est pourquoi elle vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement, à défaut de quoi il lui faudrait le rejeter.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Si nous avons soulevé cette question - et un récent rapport du Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts nous y incite encore davantage -, c'est que nous savons tous que, dans les foyers monoparentaux, la personne qui est seule pour prendre en charge les enfants travaille bien souvent à temps partiel, disposant donc de ressources notoirement insuffisantes, et qu'elle est généralement employée dans des secteurs d'activité où les horaires sont éclatés dans la journée, donc à des moments où les structures de garde collective existantes ne peuvent pas répondre à ses besoins.
Au moment où l'Assemblée nationale examine le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, par lequel on veut notamment inciter les familles à veiller à ce que leurs enfants soient mieux pris en charge, il serait bon de considérer comment ces personnes sont accompagnées dans cette démarche. On constaterait qu'elles n'ont pas les moyens d'y faire face parce qu'elles n'ont pas la possibilité de bénéficier de ce crédit d'impôt pour la garde de leurs enfants en dehors des horaires habituels des services de garde collective quand ils ont entre six et onze ans, âges où une certaine fragilité peut se constater chez certains d'entre eux.
Par cet amendement, nous proposons une mesure de bon sens qui, compte tenu de l'ensemble des analyses qui ont été faites de la situation dans les quartiers en difficulté, aurait tout à fait trouvé sa place dans le projet de loi de finances. Même si elle a un prix, elle peut s'avérer moins coûteuse, en termes sociaux et humains, pour l'avenir. Or je pense que c'est en ces termes que l'on doit considérer le budget.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-24 rectifié, présenté par MM. Goujon, Leroy, J. Blanc, Cointat, Houel, Texier, Gerbaud, Beaumont, Belot, Pasqua, du Luart, Cléach, Hérisson, Goulet, Vinçon, Braye, Esneu, Fournier, Legendre, Karoutchi, Cambon, François-Poncet, Longuet, Bizet, Béteille, Ferrand, Billard, Demuynck, P. André, Revet, Milon et Lecerf, Mmes Gousseau, Sittler, Papon, Bout, Hermange, Garriaud-Maylam et Mélot, MM. Del Picchia, de Broissia, Falco, Vasselle et César, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La première phrase du I de l'article 200 quinquies du code général des impôts est complétée par les mots : «, ou qui mesure moins de 3 mètres dès lors que ce véhicule émet moins de 120 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Goujon.
M. Philippe Goujon. Cet amendement, cosigné par plus de quarante de mes collègues, propose des mesures favorables à l'environnement et à la lutte contre la pollution ; il devrait également permettre une circulation plus fluide et un stationnement plus facile dans les villes. Il n'y a donc aucune raison de s'y opposer !
Ces dernières années, plusieurs mesures ont été votées qui visent à encourager les automobilistes à acquérir des véhicules moins polluants : les acheteurs d'un véhicule ayant une motorisation électrique, GPL, GNV ou hybride bénéficient ainsi d'un crédit d'impôt ; récemment, les pouvoirs publics ont mis en place une étiquette classant les véhicules, du moins polluant au plus polluant, en fonction de l'émission de CO2 ; par ailleurs, le montant de la taxe sur les véhicules des sociétés dépend désormais de cette émission. Ce premier pas est très appréciable, mais il nous semble nécessaire d'aller jusqu'au bout de la logique, en particulier dans les villes.
Les petites voitures, chacun le sait, représentent un enjeu écologique incontournable, au même titre que les véhicules électriques ou que les voitures hybrides, sans parler des avantages qu'elles représentent en matière d'espace. Il est facile de comprendre que les embouteillages augmentent la pollution.
La fiscalité constitue un levier efficace pour faire évoluer les comportements, comme on l'a vu en matière d'économie d'énergie et de chauffage. Je crois qu'on peut le prouver encore davantage en matière automobile. C'est la raison pour laquelle cet amendement vise à élargir le crédit d'impôt aux véhicules à moteur thermique réellement les moins polluants, c'est-à-dire aux véhicules de moins de trois mètres émettant moins de 120 grammes de CO2 par kilomètre.
Puisque le mécanisme du crédit d'impôt a été mis en place justement pour encourager les industriels à construire des véhicules plus écologiques en prenant en charge une partie des surcoûts liés à la fabrication des motorisations GPL, GNV, électrique ou hybride - surcoûts très importants, comme chacun le sait -, il est parfaitement logique et légitime que les voitures qui consomment et polluent le moins, celles-là même qui prennent le moins de place sur la voie publique, en bénéficient également, car des investissements absolument colossaux ont été mis en oeuvre pour les concevoir. Sont ici visés les surcoûts liés à la médiatisation, au respect des normes de sécurité malgré leur petite taille - et l'on connaît la difficulté de la tâche - et surtout aux innovations destinées à diminuer les émissions polluantes.
Enfin, l'adoption de la mesure proposée dans cet amendement inciterait fortement les constructeurs à investir encore davantage dans la recherche et la production, à une époque où la préoccupation environnementale s'ancre dans les consciences de tous et qu'il convient, je crois que chacun partagera ce souhait, de la faire croître encore.
Mme la présidente. L'amendement n° I-94, présenté par MM. Goujon et Leroy, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La première phrase du I de l'article 200 quinquies du code général des impôts est complétée in fine par les mots : «, ou de véhicules qui émettent moins de 100 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre. »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Goujon.
M. Philippe Goujon. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d'un sujet tout à fait intéressant et la commission comprend bien vos orientations en la matière, mon cher collègue.
L'article 11 du projet de loi de finances rectificative modifie précisément le crédit d'impôt en question, et ce d'ailleurs à la suite des travaux que nous avons menés ensemble, monsieur le ministre, depuis l'examen de la loi de finances pour 2006 et grâce aux ouvertures que vous avez bien voulu faire en ce domaine.
Il me semble que la clarté des débats y gagnerait si ces deux amendements étaient examinés avec l'article 19 du projet de loi de finances rectificative pour 2006.
Au demeurant, s'il faut choisir entre les deux, je donnerai ma préférence au second amendement, qui porte sur un champ d'application plus large, le premier visant un modèle très spécifique de véhicule.
Toutefois, il serait souhaitable de disposer d'une évaluation de la portée de ce second amendement : du nombre de voitures concernées et du coût pour les finances publiques.
En outre, le crédit d'impôt n'est pas ouvert aujourd'hui aux véhicules fonctionnant uniquement avec des carburants traditionnels alors que cet amendement le permet.
Des précisions supplémentaires nous semblent donc nécessaires. Monsieur le ministre, pouvez-vous vous engager à nous les apporter d'ici à l'examen du projet de loi de finances rectificative, si M. Goujon accepte de reporter sa proposition ? Notre discussion s'intégrera alors dans le cadre d'une refonte plus globale du crédit d'impôt existant.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. L'avis du Gouvernement est très proche de celui de la commission.
Monsieur Goujon, votre démarche est tout à fait louable car elle va dans le sens que nous souhaitons les uns et les autres, à savoir le renforcement de la fiscalité écologique et l'incitation à l'utilisation de véhicules propres.
Nous sommes tous les deux franciliens, quoique vous le soyez plus que moi puisque, en tant que parisien, vous vivez au coeur de l'Île-de-France, ...
M. Éric Doligé. Nous, nous y venons de temps en temps !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. ...ce pourquoi nous autres, habitants de la banlieue, nous vous regardons avec admiration et envie...
M. Roger Karoutchi. Pas avec envie !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. En effet, pas toujours avec envie parce que l'on n'y circule pas bien... (Sourires.)
Bref, c'est un sujet sur lequel nous pouvons nous rejoindre. Comme le rappelait tout à l'heure M. le rapporteur général, nous proposons dans le collectif budgétaire un volet de fiscalité écologique assez innovant.
Cela dit, moi aussi, je considère que l'amendement n° I-24 rectifié est trop ciblé. Peut-être pourrait-on ne pas se limiter à la taille du véhicule et examiner si d'autres véhicules ne pourraient pas entrer dans cette catégorie. (M. Roger Karoutchi fait un geste dubitatif.) On peut en discuter en tout cas.
Bien entendu, comme l'a souhaité M. le rapporteur général, le Gouvernement est à votre disposition, monsieur le sénateur, pour procéder à toutes les évaluations nécessaires afin d'éclairer au mieux votre assemblée.
Par conséquent, si vous en étiez d'accord, nous pourrions reporter cette discussion de quelques jours.
Mme la présidente. Monsieur Goujon, les amendements sont-ils maintenus ?
M. Philippe Goujon. Nous approchons d'une solution commune ; je savais bien qu'entre Franciliens nous y arriverions.
Monsieur le ministre, vous dites que cet amendement est ciblé. Mais, lorsque le crédit d'impôt a été voté pour les véhicules hybrides, il n'y avait qu'un seul constructeur qui proposait ce type de modèle. Or, aujourd'hui, plusieurs projets de petits véhicules sont dans les tiroirs des constructeurs et attendent ce genre de mesures pour démarrer. Par conséquent, il s'agit d'un faux procès.
Aujourd'hui, entrent dans la catégorie des véhicules propres des voitures qui ont une motorisation électrique, GPL, GNV ou hybride, et les acheteurs de ces voitures bénéficient du crédit d'impôt.
Mais on sait bien aussi que le marché des véhicules électriques n'a pas décollé aujourd'hui, que le GNV demeure confidentiel, que le GPL pose des problèmes de sécurité, et que, parfois, les propriétaires de 4x4 et de grosses berlines profitent du crédit d'impôt pour s'équiper en GPL, ce qui est tout de même assez paradoxal ! D'ailleurs, la commission interministérielle pour les véhicules propres et économes avait pointé du doigt cette aberration ; un plafond de 140 grammes de CO2 avait alors été ajouté.
Il est temps que la classification des véhicules propres évolue pour qu'elle soit enfin efficace.
Afin d'encourager les constructeurs à produire des véhicules de catégorie A - une nouvelle grille a été établie classant les véhicules de A à G, les moins polluants étant classés en catégorie A - et à imaginer des moteurs toujours moins polluants - en l'occurrence, ceux qui émettent moins de 100 grammes de CO2 par kilomètre -, puis pour inciter nos compatriotes à faire le choix de ce type de véhicules, l'amendement n° I-94 prévoit que ces véhicules intègrent la catégorie des véhicules propres et bénéficient du crédit d'impôt d'un montant de 2 000 euros et même de 3 000 euros si l'acheteur met au rebut un vieux modèle.
Cependant, je suis tout à fait prêt, dans un esprit d'ouverture, au nom de mes collègues signataires de cet amendement, à accepter que l'on attende encore quelques jours pour que notre proposition soit étudiée. Je suis convaincu que la solution qui sera trouvée nous donnera satisfaction ainsi d'ailleurs qu'à l'ensemble de nos collègues, car l'intérêt porté à cette question devrait dépasser les clivages politiques.
Mme la présidente. Les amendements nos I-24 rectifié et I-94 sont retirés.
L'amendement n° I-99 rectifié, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Dans le premier alinéa du 1 du IV de l'article 74 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005), les mots : « les collectivités territoriales » sont supprimés.
II - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. L'amendement que nous proposons vise à exclure les impôts locaux du calcul du seuil de 60 % à partir duquel le contribuable pourra demander restitution et que les collectivités locales devront prendre en charge à due concurrence du montant total des impositions.
La réforme proposée par l'article 74 du projet de loi de finances pour 2006 semble en contradiction avec le principe d'autonomie financière des collectivités locales, dont le levier fiscal - et la faculté de vote des taux - est un des éléments essentiels.
L'équilibre financier des collectivités locales est fragile alors que celles-ci font face à de nouveaux transferts de charges, notamment depuis l'adoption de la loi du 13 août 2004 et celle de certaines lois spécifiques telles que la loi transférant le RMI aux départements.
La compensation financière afférente à ces collectivités locales ne permet pas d'infléchir la tendance constatée depuis deux exercices sur la section de fonctionnement, à savoir une croissance plus soutenue des dépenses que des recettes.
De plus, l'enjeu financier - estimé à 43 millions d'euros - représenté par la somme que devraient reverser les collectivités locales et qui sera « pompée » sur la dotation globale de fonctionnement, est relativement faible par rapport aux coûts engendrés par l'instauration de cette mesure : les coûts des différentes tâches de contrôle et de calcul, ainsi que ceux qui seront induits par le jeu des circuits financiers qui en résulteront.
Pour toutes ces raisons, nous pensons qu'il faut supprimer la mise à contribution des collectivités locales au mécanisme du bouclier fiscal. Il faut en effet préserver les marges de manoeuvres fiscales et financières desdites collectivités pour leur permettre de faire face aux responsabilités qui ne cessent de leur être transférées, au prétexte d'une décentralisation qui a souvent « bon dos », puisqu'elle donne surtout, depuis 2002, la possibilité aux gouvernements de droite d'utiliser les finances locales comme variable d'ajustement des finances de l'État !...
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'an dernier, lors de l'élaboration du projet de loi de finances initiale pour 2006, nous avions trouvé un aménagement permettant de limiter la participation financière des collectivités territoriales due à la mise en place du bouclier fiscal.
Ainsi, l'État prend en charge l'intégralité de la restitution d'impôt lorsque le montant des impositions dû au titre de l'impôt sur le revenu et de l'ISF excède à lui seul le seuil de 60 % du revenu.
Cette disposition résultant d'un amendement parlementaire a permis de réduire la part des collectivités territoriales dans la prise en charge des conséquences du bouclier fiscal de 43 millions d'euros à 20 millions d'euros, sur un enjeu global chiffré à 400 millions d'euros.
La restitution a vocation à être prise en charge par les collectivités territoriales et leurs établissements publics, cette prise en charge étant imputée chaque année globalement sur le montant de la DGF.
Ainsi, nous pouvons considérer que la participation des collectivités territoriales au fonctionnement du bouclier fiscal fait l'objet d'une mutualisation pour éviter, par exemple- nous en avions parlé très concrètement l'année dernière - que les communes accueillant des contribuables plafonnés soient pénalisées par la situation fiscale de ces derniers.
Mes chers collègues, il semble que le dispositif adopté l'an dernier marque une réelle avancée sur ce qui nous avait été proposé initialement et que, à ce stade, il soit préférable de ne pas le modifier.
En effet, la prise en charge d'un droit à restitution par les collectivités territoriales aurait lieu sur la DGF de la troisième année suivant celle du paiement des impositions concernées. Cela signifie que nous avons donc encore du temps et plusieurs lois de finances pour savoir si ce système est perfectible.
Telle est la raison pour laquelle la commission souhaite le retrait de l'amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Le dispositif que nous avons proposé constitue une avancée importante dans la mesure où il met en place à la fois une responsabilité solidaire État-collectivités locales et une responsabilité assumée.
Une responsabilité solidaire dans le sens où c'est la première fois que nous mettons en place un dispositif de coresponsabilité de l'État et des collectivités locales sur des augmentations d'impôt pour l'application du bouclier fiscal ; c'est quelque chose d'extrêmement nouveau, qui s'inscrit dans la démarche visant à ce que chacun contribue à la modération de la dépense publique et de l'impôt.
Une responsabilité assumée au sens où celui qui augmente est celui qui assume la responsabilité et qui finance la restitution du trop-perçu en impôt.
À ces deux principes essentiels, nous en avons ajouté un troisième : il n'est pas question que l'un paie pour l'autre, autrement dit que celui qui n'a pas augmenté paie.
Nous avons mis en place un dispositif, sur initiative parlementaire, aux termes duquel désormais, en cas d'augmentation de l'impôt par l'État, la charge pesant sur les collectivités territoriales ou les EPCI serait atténuée.
Je pense que ce système est équilibré ; il fait partie des grandes innovations de la réforme fiscale que nous avons engagée l'an dernier et qui est applicable à compter de l'année à venir.
Mme la présidente. L'amendement n° I-100, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans le premier alinéa du 1 du IV de l'article 74 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) sont supprimés les mots : « les établissements et organismes à concurrence de la part correspondant au montant total des impositions mentionnées au 2 du même article perçues à leur profit » et avant les mots : « les collectivités territoriales » est inséré le mot : « et ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Angels.
M. Bernard Angels. Pour les mêmes raisons que celles que j'ai exposées dans l'amendement précédent, nous demandons la suppression de la participation des établissements publics de coopération intercommunale au mécanisme du bouclier fiscal.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement étant très proche du précédent, la réponse sera identique. La commission demande le retrait, sinon le rejet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?