Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 288 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 283 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 289 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 506 rectifié bis.
M. Pierre-Yves Collombat. Je voudrais revenir sur le problème essentiel que pose ce sous-amendement, à savoir l’indépendance du parquet.
Tout le monde s’accorde pour dire qu’il n’est pas question que le parquet n’applique pas les instructions du garde des sceaux.
M. Michel Charasse. Ce n’est pas ce que pensent certains syndicats !
M. Pierre-Yves Collombat. Sauf erreur de ma part, il est toujours possible au parquet d’ordonner des poursuites. En revanche, il ne peut pas les empêcher.
Cela ne signifie pas pour autant, comme vous l’avez laissé entendre, madame la garde des sceaux, que les parquetiers sont dans une position de dépendance hiérarchique.
M. Patrice Gélard. Si !
M. Pierre-Yves Collombat. Dès lors, en quoi sont-ils des magistrats ? L’habit fait-il le moine ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cela ne change rien !
M. Pierre-Yves Collombat. Le même type de problème tout aussi peu compréhensible s’est posé lorsque l’on a examiné le texte relatif à la rétention de sûreté. En quoi des mesures de police prononcées par des magistrats sont-elles autre chose que des mesures de police ?
Cette confusion savamment entretenue me paraît préjudiciable à l’image de la justice. Tout le problème est précisément l’équilibre entre l’autonomie de décision et la responsabilité. Or confier au CSM, qui est quand même un organe responsable tout en étant indépendant, le pouvoir de garantir à la fois les carrières et la qualité des décisions disciplinaires permettrait d’établir cet équilibre et éviterait l’exercice direct du pouvoir disciplinaire, comme l’a dit tout à l’heure Robert Badinter.
Je le répète, nous ne pouvons pas accepter ce sous-amendement qui entretient la confusion au lieu de la dissiper.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je veux bien que l’on reprenne toujours les mêmes débats, mais je rappelle que c’est la commission des lois qui a souhaité que l’on modifie les sanctions disciplinaires applicables au parquet. En cette matière, l’avis du CSM est toujours suivi par le garde des sceaux.
Pour ma part, j’avais formulé une proposition pour des raisons de cohérence entre le recours pour excès de pouvoir et le recours en cassation.
M. Michel Charasse. Comme pour les fonctionnaires !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous avons toujours souhaité – même si M. Fauchon a un point de vue différent – que le corps judiciaire soit unique et que les procureurs soient des magistrats. Être magistrat ne veut pas dire uniquement être juge !
M. Pierre-Yves Collombat. Qu’est-ce que cela veut dire, alors ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C’est avoir un statut, une formation, une déontologie !
Monsieur Collombat, je veux bien que vous nous expliquiez ce soir toute l’organisation de la justice, mais j’ai l’impression qu’il nous faudrait beaucoup d’heures. Le choix qui a été fait par notre pays – et je souhaite qu’on le conserve – est que les magistrats du parquet comme ceux du siège demeurent des magistrats. Cet aspect est d’autant plus important que de nombreuses mesures alternatives créées au fil des années donnent aux magistrats du parquet des compétences juridictionnelles.
Nous n’allons pas rouvrir le débat ! Il y a quelques années, la commission des lois a conduit une mission d’information extrêmement intéressante sur l’évolution des métiers de la justice. C’est donc une question sur laquelle nous avons beaucoup réfléchi. La mission avait alors été unanime pour considérer qu’il fallait garder l’unité du corps des magistrats, qu’ils soient du siège ou du parquet. D’ailleurs, certains ne voulaient même pas que l’on passe de l’un à l’autre. Nous avions même imaginé que les jeunes magistrats effectuent au moins un stage au parquet afin d’apprendre à travailler en équipe.
M. Michel Charasse. Les magistrats du siège ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Les jeunes magistrats, avant d’être affectés, devaient commencer leur carrière par une affectation au parquet. Nous avons également demandé qu’ils fassent un stage de six mois chez un avocat. Ce stage est maintenant intégré à leur formation.
À cette heure tardive, on est bien obligé de réagir à des propos surprenants ! On peut remettre en cause bien des aspects, mais pas une organisation, qui, même si elle connaît des défaillances et du corporatisme, comprend 8 300 magistrats, dont la grande majorité est honnête, désintéressée et accomplit un travail difficile. À un moment où l’on parle négativement des magistrats, il est bon de leur rendre hommage.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 506 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Monsieur Lecerf, le sous-amendement n° 319 est-il maintenu ?
M. Jean-René Lecerf. J’ai cru comprendre que la formation plénière du CSM pourrait toujours se saisir elle-même, mais qu’il ne fallait pas que cela s’ébruite. Je retire donc ce sous-amendement sans bruit (Sourires), et j’en profite pour retirer également le sous-amendement n° 153.
Mme la présidente. Les sous-amendements nos 319 et 153 sont retirés.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 287.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Monsieur Cointat, le sous-amendement n° 149 rectifié est-il maintenu ?
M. Christian Cointat. Ce sous-amendement visait à améliorer l’image du Conseil supérieur de la magistrature afin d’éviter tout risque de suspicion de la part de l’opinion publique. En effet, la justice, comme on l’a rappelé, est rendue au nom du peuple français. Il faut en tenir compte !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Et le Premier président de la Cour de cassation ?
M. Christian Cointat. Cette proposition, qui se voulait équilibrée, n’a suscité l’enthousiasme ni de la commission des lois ni du Gouvernement. Je pense pourtant qu’elle aurait amélioré les choses. Mais j’ai l’impression d’être le seul à le savoir.
MM. Jean-René Lecerf et Hugues Portelli. Mais non ! (Sourires.)
M. Christian Cointat. Merci, mes chers collègues, de ne pas me laisser seul. (Nouveaux sourires.)
Cela étant, comme nous ne sommes pas nombreux à le savoir et sans avoir subi aucune pression, ce que je regrette presque, je le retire.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 149 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote sur l’amendement n°129.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la garde des sceaux, vous n’avez pas pris la peine de répondre à mes amendements. Ce n’est pas grave, je sais que vous y étiez défavorable.
Je suis quand même un peu surprise que nous ne soyons pas allés plus avant dans le débat. En 1998, l’Assemblée nationale et le Sénat avaient adopté un projet de réforme du Conseil supérieur de la magistrature plus ambitieux que le dispositif actuel élaboré dix ans plus tard. Il est regrettable que ce texte n’ait pas abouti, car cela nous aurait évité bien des problèmes depuis lors.
Je pensais que l’on aurait avancé sur la parité, pour laquelle il existe un large consensus notamment au sein de la profession, sur la présidence du Conseil supérieur de la magistrature, ainsi que sur l’absence de l’exécutif de droit au CSM. Hélas ! on n’a pas été très audacieux. On ne se donne pas les moyens de garantir l’indépendance de la justice, car là est bien le problème.
Personne ne remet en cause l’existence d’un ministre de la justice, garde des sceaux. Celui-ci ne détient pas un pouvoir direct, mais il fait respecter la loi pénale votée par le Parlement et l’explicite par la voie de circulaires. Nous sommes évidemment favorables à ce dispositif, car nous ne voulons pas que le parquet agisse seul dans son coin, si je puis dire. Néanmoins, on aurait pu mieux garantir l’indépendance de la magistrature, car nous sommes bien entendu pour l’unité de ce corps.
Le parquet représente la société et non le pouvoir politique en place. Pour cela, il dispose avant tout de la loi. Je le répète, on a été terriblement frileux en matière d’indépendance de la justice.
Mme la présidente. En conséquence, l'article 28 est ainsi rédigé et les amendements nos 416, 405 rectifié, 92, 64, 415, 406 rectifié, 404 et 407 n'ont plus d'objet.
Article additionnel après l'article 28
Mme la présidente. L'amendement n° 357, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 28, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 66 de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elle garantit également le droit au respect de la dignité des personnes privées de liberté. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement vise à inscrire dans l’article 66 de la Constitution un principe qui me semble largement nécessaire de graver dans le marbre.
Lorsqu’une personne est privée de liberté, l’autorité judiciaire assure le contrôle de la légalité de la privation de liberté ainsi que la légalité du maintien en détention. Je sais qu’un contrôleur général des lieux de privation de liberté vient d’être nommé, mais cela n’empêche pas de constitutionnaliser un principe. En effet, le suivi de la détention ainsi que les conditions de celles-ci en France sont souvent montrés du doigt par l’Europe. On ne compte plus le nombre de détenus qui se sont suicidés ces derniers jours ou qui ont été victimes de leurs codétenus.
Le décret instaurant l’encellulement individuel est important pour garantir la dignité des personnes privées de liberté, mais il reste encore aujourd’hui en suspens.
On nous dit sans cesse que des enquêtes sont en cours sur les différents malheureux incidents qui se produisent, mais cela ne nous suffit pas non plus. Nous attendons une loi pénitentiaire depuis le mois de novembre 2007. Il semble qu’un tel texte sera proposé au Parlement en octobre 2008. Mais, pour le moment, nous n’avons encore rien.
Cet amendement vise tout simplement à constitutionnaliser notre attachement au respect du principe de dignité humaine des personnes privées de liberté. Il s’agit plutôt là d’une garantie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Madame Boumediene-Thiery, la commission des lois et le Sénat attendent la loi pénitentiaire depuis 2000, mais elle ne saurait tarder !
M. Robert Bret. Incessamment sous peu !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Non, elle va venir !
Après, nous aurons à l’examiner, mais elle arrive !
Il appartient naturellement à l’autorité judiciaire de veiller au respect de la dignité des personnes détenues. De surcroît, il existe maintenant un contrôleur général des lieux de privation de liberté. C’est tout de même une belle institution !
Il n’est pas utile d’ajouter une telle mention dans la Constitution, au risque de devoir y multiplier peu à peu les affirmations relatives à la protection des droits fondamentaux, sous la forme d’un catalogue. Or, malheureusement, les catalogues se gravent difficilement dans le marbre ! (Sourires.)
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Il est question de dignité : ce n’est pas un catalogue, monsieur le rapporteur, c’est un principe !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Vous souhaitez compléter l’article 66 de la Constitution pour qu’il soit affirmé que l’autorité judiciaire garantit le droit au respect de la dignité des personnes privées de liberté.
Les dispositions de l’article 66 de la Constitution occupent une place essentielle dans notre droit constitutionnel. Elles affirment le principe d’interdiction de toute détention arbitraire. Elles confient à l’autorité judiciaire le rôle de gardienne de la liberté individuelle.
Sur ce fondement, le Conseil constitutionnel juge que le législateur doit prévoir l’intervention de l’autorité judiciaire dès lors qu’une limite est apportée à la liberté individuelle.
Je ne crois pas qu’il soit nécessaire d’y ajouter le respect de la dignité des personnes privées de liberté.
En effet, le juge administratif est compétent pour connaître notamment du fonctionnement du service public pénitentiaire et des modalités du traitement pénitentiaire. Depuis 1995, il opère d’ailleurs un contrôle beaucoup plus approfondi dans ce domaine.
Je crains que votre proposition ne vienne compliquer la répartition des contentieux : lorsque la dignité de la personne serait en cause, le juge judiciaire serait seul compétent ; pour les autres litiges concernant les modalités du traitement pénitentiaire et du service public pénitentiaire, ce serait le juge administratif.
Il n’est peut-être pas utile d’inscrire ce principe dans la Constitution.
En tout état de cause, le respect de la dignité des personnes privées de liberté est contrôlé, notamment par le juge judiciaire.
Je rappelle également que le contrôleur général des lieux de privation de liberté s’assurera du respect de la dignité des personnes privées de liberté.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 357.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel avant l'article 28 bis
Mme la présidente. L'amendement n° 36 rectifié, présenté par M. Charasse, Mme N. Goulet et M. Fortassin, est ainsi libellé :
Avant l'article 28 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans le deuxième alinéa de l'article 67 de la Constitution, après les mots : « ou autorité administrative française », sont insérés les mots : «, y compris la Cour des comptes à l'occasion de la vérification et de l'apurement des comptes de la Présidence de la République, ».
II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le Président de la République désigne l'ordonnateur et le comptable des recettes et des dépenses de la Présidence de la République. »
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Le Président de la République a choisi, comme il en avait le droit, de mettre un terme à une longue tradition républicaine qui veut que le budget et les comptes de la Présidence de la République ne relèvent pas du jugement de la Cour des comptes en raison de la séparation des pouvoirs.
Il a donc décidé de donner compétence à la Cour des comptes pour examiner la régularité du budget et des comptes de la Présidence de la République.
Cette décision pose quelques questions qui ne sont pas seulement techniques. Jusqu’à plus ample information, les crédits de la Présidence de la République sont virés en principe sur deux comptes ouverts à la Banque de France, …
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ah bon ?
M. Michel Charasse. … le premier au nom de la Présidence de la République et le second au nom de l’actuel Président de la République.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C’est intéressant !
M. Michel Charasse. Les crédits ne sont donc pas déposés au Trésor public. Ils sont virés en bloc en début d’année par le ministre du budget.
Le comptable de l’Élysée est un trésorier-payeur général mis à disposition par le ministère des finances. Mais il n’a jamais eu le statut de comptable public et n’a jamais prêté serment devant la Cour des comptes, à laquelle il ne rend donc pas compte.
Tout cela va changer dès lors que la Cour des comptes va contrôler le budget de l’Élysée.
Je voudrais qu’il soit bien entendu que, dans cette affaire, nous devons protéger le Président de la République, et cette fonction est mon seul souci.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Bien sûr !
M. Michel Charasse. L’article 67 de la Constitution précise que, pendant qu’il est à l’Élysée, le Président ne peut faire l’objet d’aucune poursuite de la part d’aucune juridiction. Je propose de préciser que la Cour des comptes est concernée.
On peut considérer que cela va de soi, …
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Eh bien oui !
M. Michel Charasse. … et je serais prêt à renoncer à cet alinéa.
En revanche, il faut compléter l’article 67 de la Constitution pour préciser que le Président de la République désigne l’ordonnateur et le comptable des recettes et des dépenses de la Présidence de la République, c'est-à-dire qu’il n’est pas lui-même l’ordonnateur, ce que laisse penser la situation actuelle.
En effet, s’il est l’ordonnateur, il pourra être mis en cause par la Cour des comptes. Il pourra même être mis en cause personnellement par la Cour de discipline budgétaire et financière puisque, si les ministres en sont exonérés, le Président de la République ne l’est pas, car la loi sur la cour de discipline l’ignore dès lors qu’il n’était pas concerné jusqu’à présent par les investigations de la Cour des comptes. Or, aujourd’hui, il peut relever de la cour de discipline budgétaire et financière. En outre, comme ordonnateur, il peut éventuellement être mis en débet. Certes, on ne le poursuivra pas tant qu’il sera à l’Élysée. Mais, à sa sortie de fonction, le Trésor public pourra le poursuivre en remboursement d’un éventuel débet.
Pour mettre la fonction présidentielle à l’abri, je pense qu’il faut préciser dans la Constitution ou ailleurs, mais j’attire votre attention sur ce point, que le Président de la République n’est pas lui-même l’ordonnateur, ni naturellement le comptable, et que sa responsabilité ne pourra donc pas être recherchée par la Cour des comptes.
Je propose d’inscrire cette précision dans l’article 67 de la Constitution. On dira peut-être que je charge abusivement la Constitution. Dans ce cas, je suis prêt à ne pas insister si le Gouvernement me confirme que les dispositions seront prises pour que le Président de la République ne se retrouve pas dans cette situation humiliante dans laquelle la République a prévu de ne jamais placer un ministre.
Car j’insiste sur ce point : un ministre ne relève pas de la Cour de discipline budgétaire et financière, mais le Président ne figure pas dans la liste des responsables qui ne peuvent être poursuivis devant elle.
Telles sont les raisons de cet amendement n° 36 rectifié.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Le I de cet amendement ne me paraît pas indispensable puisque, en vertu de l’article 67 de la Constitution, le Président de la République ne peut « faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite » devant une juridiction. Cette disposition s’applique donc à la Cour des comptes.
Quant au II, la disposition ne paraît pas relever de la Constitution.
Il s’agit d’une vraie question, mais rien n’interdit au Président de la République de désigner un ordonnateur. Ce n’est pas la peine d’introduire une telle précision dans la Constitution.
Je demande donc à M. Charasse de bien vouloir retirer son amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Il s’agit d’un amendement important.
Vous me permettrez, monsieur Charasse, de vous répondre de manière assez détaillée.
L’intervention de la Cour des comptes dans les finances de la Présidence constitue une avancée sans précédent voulue par le Président de la République lui-même.
Monsieur Charasse, vous nous invitez, finalement, à nous interroger sur les conséquences de cette décision.
S’agissant de la possibilité pour la Cour des comptes de soumettre le Président de la République à une procédure juridictionnelle, cette hypothèse est clairement écartée par la rédaction actuelle de l’article 67 de la Constitution : la Cour des comptes est une juridiction et toute procédure juridictionnelle est interdite à l’encontre d’un Président de la République, actuel ou passé, dès lors qu’il s’agit de faits liés à l’exercice de ses fonctions.
Par conséquent, écarter clairement l’hypothèse d’un contrôle juridictionnel du Président de la République par la Cour des comptes, comme vous proposez de le faire dans la première partie de l’amendement, est inutile. Cela pourrait même être ambigu, voire dangereux, car on se demanderait pourquoi il est fait spécialement mention de la Cour des comptes et pas de telle ou telle autre juridiction.
Pour ce qui est de l’obligation pour le Président de la République de désigner un ordonnateur et un comptable, comme vous le suggérez dans la seconde partie de votre amendement, il s’agit d’une question intéressante à laquelle je souhaite apporter quelques éléments de réponse.
Il n’existe pas, actuellement, de séparation formelle entre l’ordonnateur et le comptable à la Présidence de la République. Le ministre du budget est l’ordonnateur principal du budget de l’Élysée. Ce sont les collaborateurs du Président qui assurent la gestion de la Présidence au quotidien et exécutent le budget.
Les fonctions d’ordonnateur secondaire et de comptable sont placées sous une même autorité, et le comptable n’est pas soumis au contrôle de la Cour des comptes.
En outre, de réels progrès ont d’ores et déjà été accomplis, comme vous le savez, dans les services de l’Élysée pour un meilleur contrôle des dépenses.
Pour n’être pas formelle, la séparation entre l’ordonnateur des dépenses, d’une part, le comptable, d’autre part, n’en est pas moins réelle.
Enfin, plus fondamentalement, l’amendement pose une vraie question de fond.
Prévoir une séparation stricte entre l’ordonnateur et le comptable aurait pour effet de soumettre la Présidence de la République à l’ensemble des règles de la comptabilité publique, notamment et surtout au contrôle juridictionnel de ce comptable.
Cette solution est difficile à articuler avec l’absence de responsabilité financière du Président de la République et n’est pas compatible avec le principe selon lequel un pouvoir public constitutionnel doit pouvoir définir lui-même ses règles de gestion financière.
Je rappelle qu’aux termes de la décision du Conseil constitutionnel de décembre 2001 la règle de l’autonomie financière est inhérente au principe de l’autonomie financière des pouvoirs publics constitutionnels, qui garantit la séparation des pouvoirs.
En demandant à la Cour des comptes de contrôler le budget de l’Élysée, le Président de la République a souhaité faire prévaloir la transparence démocratique. Cependant il a également souhaité mettre en place à l’Élysée des règles de bonne gestion et de sécurité financière.
C’est pourquoi le Président de la République sera très attentif aux recommandations que la Cour des comptes lui fera sur l’exécution du budget de l’Élysée.
Dans ces conditions, monsieur Charasse, tout en reconnaissant l’intérêt de votre amendement, je vous demande de bien vouloir le retirer au vu des éléments de réponse que j’ai pu vous apporter.
Mme la présidente. Monsieur Charasse, l'amendement n° 36 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Charasse. Je souhaitais ces explications, et je remercie M. le secrétaire d'État de me les avoir données.
Néanmoins, je redis de la façon la plus claire qu’à partir du moment où la Cour des comptes entre à l’Élysée, ce qu’elle ne faisait pas jusqu’à présent, il faut prendre toutes les précautions nécessaires pour protéger la fonction présidentielle et pour que le Président de la République ne puisse à aucun moment être qualifié d’ordonnateur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oui, d’accord !
M. Michel Charasse. Cela signifie qu’il faut prendre les mesures nécessaires.
Vous me dites que le ministre du budget est l’ordonnateur. Je l’apprends parce que, jusqu’à présent, il ne fait rien d’autre que créditer les comptes à la Banque de France et il ne signe pas les ordonnances de paiement, ni les bons de commande.
Par conséquent, monsieur le ministre, je vais retirer mon amendement.
Mais je vous en supplie : mettez le Président de la République à l’abri de ce genre de chose en lui recommandant de ne pas faire d’acte qui pourrait conduire à le qualifier si peu que ce soit d’ordonnateur.
Cela étant, je retire cet amendement, mais je serai vigilant pour la suite !
Mme la présidente. L'amendement n° 36 rectifié est retiré.
(M. Christian Poncelet remplace Mme Michèle André au fauteuil de la présidence.)