M. Paul Blanc. Notre objectif est simplement de passer à une technologie beaucoup plus avancée, la fibre optique, pour remplacer le fil de cuivre, en utilisant les gaines déjà existantes.
Si l’on vous suit, on va retarder encore un peu plus le déploiement du très haut débit. Je suis d’ailleurs stupéfait de constater que toute notre discussion tourne autour des immeubles en ville. Je suis moi-même dans une situation similaire à celle qu’a décrite Claude Biwer, puisque, dans ma commune de 400 habitants, j’ai fait installer un réseau câblé, exploité par le biais d’une société d’économie mixte. Je ne suis donc vendu à personne !
Je vous le dis comme je le pense : j’ai bien l’intention de remplacer le câble coaxial par de la fibre optique et je ne vois pas pourquoi les opérateurs ne pourraient faire de même en ville. Je souhaite que mes administrés profitent de la technologie la plus récente, et pourquoi ceux qui habitent en ville n’y auraient pas droit ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à faire remarquer que la totalité de la représentation sénatoriale du département de la Meuse, comme cela arrive d’ailleurs assez souvent, est présente ce soir ! Je salue donc tout particulièrement mon collègue Claude Biwer, car nous avons, en la matière, exactement les mêmes soucis.
Cela étant dit, je rappellerai très amicalement à Paul Blanc que j’ai été amené en 1986, en tant que secrétaire d’État chargé des postes et télécommunications, à mettre fin au plan Câble, à déréguler ce secteur d’activité. J’ai alors été amené à faire ce constat : même au faîte de sa gloire, lorsque France Télécom était en position de monopole et donc en situation d’assurer une péréquation maximale, l’opérateur n’a jamais envisagé de câbler l’ensemble du pays – loin s’en faut ! –, alors même qu’il avait reçu une instruction forte en ce sens des gouvernements précédents, avec toutes les difficultés que M. le secrétaire d’État a évoquées.
De mémoire, je pense qu’il y a en France à peu près 20 millions de foyers. Or, dans le cadre du plan Câble, même dans les projets les plus ambitieux, il n’avait jamais été retenu de câbler plus de 10 millions ou 12 millions de foyers, du fait de raisons techniques liées à la densité de population.
Madame Goulet, – et je parle sous le contrôle de Claude Biwer, mais aussi de Philippe Leroy, président du conseil général de la Moselle –, les collectivités locales se sont effectivement engagées à promouvoir de nouvelles solutions technologiques, notamment le Wifi et le Wimax.
M. Paul Blanc. Oui !
M. Gérard Longuet. Toutefois, il n’est pas raisonnable de penser…
M. Alain Gournac. Et de faire croire !
M. Gérard Longuet.… qu’une société publique ou privée, même disposant d’un monopole, puisse assurer une péréquation totale et un câblage de l’ensemble des foyers français dans les mêmes conditions et au même prix. C’est tout simplement impensable !
En revanche, il nous faut réfléchir aux moyens d’accompagner le dispositif.
Le monde rural a ses faiblesses, mais aussi ses forces. Je constate avec plaisir que la population, en tout cas dans le rural périurbain, continue d’augmenter. C’est bien parce que, même sans avoir tous les avantages, nous disposons d’autres atouts. Il nous faut donc les valoriser, pour en tirer le meilleur parti. Claude Biwer l’a fait dans sa commune de Marville, tirant profit d’un héritage d’Électricité de France repris par Numericable, lequel a su racheter toute une série de réseaux. Ce rachat a eu lieu dans des conditions économiquement intéressantes puisque les investissements avaient été financés par d’autres. C’est son choix, mais il serait illusoire d’y voir une solution garantissant une péréquation pour assurer le câblage dans l’ensemble du pays.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Cessons de jouer au chat et à la souris entre nous ! Vous évoquez les uns et les autres la constitution d’un prétendu monopole par immeuble ou d’un duopole. Et vous vous abritez derrière cet argument, conjugué avec le nécessaire respect du droit de propriété, pour freiner le déploiement du très haut débit.
Enfin, ne nous cachons pas derrière notre petit doigt ! Je le dis comme je le sens, cette manœuvre dilatoire a pour seul objectif de laisser le temps à un troisième larron d’arriver au pied de l’immeuble ou à l’endroit de mutualisation.
Puisqu’on sait pertinemment que cet opérateur n’arrivera pas avant une dizaine d’années, disons sans ambages que, pour le droit à la fibre, il faudra s’armer de patience !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Contrairement à notre collègue Longuet, je pense que tout le monde doit avoir accès aux nouvelles technologies et au haut débit.
M. Gérard Longuet. Payez-le sur vos revenus !
Mme Marie-France Beaufils. Au moment où a été engagée la privatisation de France Télécom, nous avions souligné qu’il aurait été préférable de poursuivre le développement du plan Câble. Un débat assez houleux a eu lieu à l’époque sur la technologie utilisée, notamment sur le déploiement de la fibre optique. On a alors voulu nous faire croire que le coaxial allait répondre aux besoins futurs.
M. Gérard Longuet. C’était il y a 20 ans ! Les techniques ont changé !
Mme Marie-France Beaufils. Je me souviens encore de l’âpreté des débats. Je n’ai pas oublié que les salariés de France Télécom se sont alors battus pour le déploiement de la fibre optique, convaincus qu’elle était beaucoup plus performante et qu’elle allait nous permettre de mieux répondre à l’avenir. Et l’on n’a pas voulu les écouter à l’époque.
Quand j’entends ce qu’on nous dit aujourd’hui, je voudrais remettre cette histoire en mémoire. En fait, aujourd’hui, nous nous apprêtons à payer pour n’avoir pas voulu entendre quand il était encore temps ! Il faut parfois avoir le courage de dire les choses telles qu’elles sont.
Dans quelles conditions peut se faire ce déploiement ? Je suis d’accord avec ceux qui veulent aller vers la péréquation. Encore faut-il rappeler que cette péréquation était tout à fait possible si nous avions gardé un opérateur unique.
M. Gérard Longuet. Vous n’auriez rien eu du tout !
Mme Marie-France Beaufils. Bien sûr que si ! Il y aurait eu un seul opérateur qui, grâce au monopole public, aurait pu faire en sorte que les secteurs les plus rentables participent au financement des moins rentables. C’était un gage d’efficacité.
Aujourd’hui, on se trouve tout à coup piégé parce qu’on s’est privé de cet outil ; on se retrouve en difficultés. Et comment pourrait-il en aller autrement ?
On en est réduit à demander aux collectivités territoriales de participer à l’équipement de l’ensemble des territoires. Quand elles n’en ont pas les moyens, il est évident que les besoins ne sont pas satisfaits !
Le texte tel qu’il est proposé aujourd’hui est au milieu du gué, et les quelques amendements qui nous sont soumis ne permettent pas d’aller au-delà.
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy, pour explication de vote.
M. Philippe Leroy. Je voudrais quitter le débat général pour revenir au texte de l’amendement. Je soulignerai plus tard, à propos d’un autre amendement, la nécessité de déployer le haut débit, comme le très haut débit, au bénéfice d’un nombre maximum de Français. Pour l’instant, nous discutons d’une rédaction spécifique qui a trait à l’aménagement du haut débit et du très haut débit dans les immeubles.
L’amendement proposé par Paul Blanc et modifié par le sous-amendement de notre collègue Raoul est généreux en apparence. Si je me rallie à la position de la commission, c’est parce qu’il donne, en réalité, un avantage concurrentiel énorme à ceux qui sont déjà installés dans les immeubles et qui utiliseront – comme l’histoire récente nous le démontre – cet avantage concurrentiel pour gêner le développement des services dans les immeubles. N’assassinons pas, au nom des campagnes, les intérêts des villes ! C’est la raison pour laquelle je me rallierai volontiers à la position de la commission.
M. le président. Monsieur Blanc, maintenez-vous votre amendement ?
M. Paul Blanc. Témoin attentif du débat qui vient de se dérouler, j’ai entendu notre collègue de la Meuse dire que mon amendement était généreux.
Dans ces conditions, je ne le retirerai que si la commission spéciale trouve le moyen, en commission mixte paritaire, de faire en sorte que cette générosité, dont je voudrais vous convaincre, mes chers collègues, se retrouve dans un texte de synthèse, un texte médian, un texte qui permette aux opérateurs de continuer éventuellement le câblage de haut débit par la fibre optique sans oublier les zones rurales.
Je souhaiterais que M. le président de la commission spéciale m’informe de son sentiment à cet égard.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Gérard Larcher, président de la commission spéciale. Cette discussion a pour moi des relents proustiens, car elle me ramène quelques années en arrière, à l’époque où je participais à des débats sur ces sujets et rédigeais avec Jean Faure un premier rapport.
Je rejoins Gérard Longuet : nous n’avions pas la même connaissance de ces technologies. Alors que François Fillon était le ministre de tutelle, nous évoquions le portable de deuxième génération et nous enhardissions jusqu’à imaginer deux ou trois millions d’abonnés ! Nous voyons bien aujourd’hui à quel point nous étions en dessous de la réalité.
Ce soir, nous sommes partis de l’aspect copropriété et avons appréhendé pêle-mêle les immeubles, les villes moyennes, jusqu’à l’émergence des duopoles. J’en conviens volontiers, tout cela ne répond pas à la problématique du monde rural.
Or la fracture numérique est indéniable. Nous n’avons pas la prétention de pouvoir amener tout partout : le système de péréquation a montré ses limites, qui rejoignent celles de la pauvreté.
Nous allons nous employer à trouver la meilleure solution dans le respect des principes de la concurrence, en nous gardant d’un débat théologique ou idéologique. Ce que nous recherchons, c’est une concurrence équilibrée, stimulant l’aménagement du territoire en matière de très haut débit. C’est ainsi que nous répondrons à l’ensemble des préoccupations de notre assemblée.
M. le président. Monsieur Blanc, que décidez-vous ?
M. Paul Blanc. Je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 545 rectifié ter est retiré et le sous-amendement n° 1092 n’a plus d’objet.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, je reprends l’amendement de M. Paul Blanc.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 545 rectifié quater.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur Raoul.
M. Daniel Raoul. Ce qui motive ma démarche, c’est que le texte de l’Assemblée nationale n’est pas satisfaisant et qu’il faut le supprimer.
J’ai voulu faire un pas en avant pour régler les problèmes en suspens. J’en ai encore discuté avec Mme le rapporteur cet après-midi : il faudra, avant la commission mixte paritaire, arriver à un texte d’équilibre.
Monsieur Retailleau, vous vous faites le chantre du droit de propriété. Je ne comprends pas votre position puisque c’est l’assemblée générale qui va statuer. On ne l’a pas écartée !
Cela dit, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 545 rectifié quater est retiré.
L’amendement n° 791 rectifié, présenté par M. Raoul, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Repentin, Sueur, Teston, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le 1. du III de cet article pour l’article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques par une phrase ainsi rédigée :
Elle fixe aussi la date de fin des travaux d’installation, qui doivent s’achever au plus tard six mois à compter de sa signature.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Cet amendement vise à faire en sorte que les opérateurs qui souhaiteraient « fibrer » un immeuble ne procèdent pas à une généralisation préventive des propositions aux propriétaires qui auraient pour effet de geler les offres de leurs concurrents.
En effet, en l’état actuel du texte, un opérateur qui souhaiterait geler la situation à son profit dans certains territoires n’aurait qu’à proposer des offres types à un fichier de propriétaires, autant dire que ce serait là un avantage de situation pour les entreprises disposant des meilleurs fichiers clients !
Vous ne voulez pas d’avantages entre les concurrents. Je vous suis dans ce domaine. Si vous consentez à admettre que les offres doivent être proposées en toute transparence et loyauté, la solution réside dans la fixation d’un délai entre la décision du propriétaire – et, monsieur Retailleau, je ne me place pas au-dessus de son droit ! – et la livraison des travaux.
Ainsi, nous vous proposons d’ajouter, après le quatrième alinéa du II de l’article1er de la loi de 1966, un alinéa qui précise que les travaux, dans ce cas, doivent être réalisés dans un délai de six mois à compter de la décision du propriétaire, sinon, on pourra craindre une OPA sauvage sur un immeuble.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Il est important de prévoir une échéance pour l’achèvement des travaux de fibrage. Cela doit également permettre d’éviter que les opérateurs ne gèlent les offres de leurs concurrents en ne réalisant pas les travaux d’installation.
La commission est donc favorable à l’amendement n° 791 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, secrétaire d’État. Le délai de réalisation des travaux fait théoriquement partie des éléments de discussion libre entre les parties à la convention, opérateur et propriétaire. En même temps, le Gouvernement comprend que vous avez le souci que les conventions correspondent à des intentions réelles de déploiement. Aussi, il s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 780, présenté par M. Raoul, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Repentin, Sueur, Teston, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le troisième alinéa du texte proposé par le 1 du III de cet article pour l’article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques :
« La convention prévoit les conditions d’utilisation par d’autres opérateurs des gaines techniques et des passages horizontaux et toute infrastructure d’accueil de communication électronique éventuellement établis par l’opérateur. Tout en préservant la qualité de service fourni par l’opérateur, la convention précise les mesures prises par celui-ci pour assurer l’interopérabilité des technologies utilisées sur le réseau. La convention ne peut faire obstacle à l’application de l’article L. 34-8-3.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Si cet amendement est adopté, l’entreprise qui installera la fibre optique dans un immeuble devra le faire dans des conditions telles que plusieurs opérateurs pourront cohabiter sur un même réseau. La convention conclue avec les copropriétaires garantira cette interopérabilité.
M. le président. L’amendement n° 161, présenté par Mme Lamure, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début de la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par le 1. du III de cet article pour l’article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques :
La convention autorise l’utilisation par d’autres opérateurs de toute infrastructure d’accueil de câbles de communications électroniques éventuellement établie par l’opérateur,…
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Cet amendement vise à maximiser la mutualisation des infrastructures entre opérateurs.
M. le président. L’amendement n° 842 rectifié, présenté par MM. Leroy, Alduy, Bailly, Belot, Doligé, Le Grand, Richert, Vial, J. Blanc, Grignon, Fournier, Bernard-Reymond, Beaumont, A. Dupont, Houel, Fouché, Doublet et Martin, Mmes Sittler, Procaccia et Panis et MM. Cambon, César, du Luart, Cléach, Chauveau, Lardeux, Cornu, Pointereau et Revol, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa du texte proposé par le 1 du III de cet article pour l’article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques, après les mots :
la convention autorise l’utilisation par d’autres opérateurs
insérer les mots :
et exploitants d’une infrastructure ou d’un réseau d’initiative publique au sens de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales
La parole est à M. Philippe Leroy.
M. Philippe Leroy. Mes chers collègues, nous ne réussirons la mutualisation et la mise en place du haut et du très haut débit que si nous additionnons les capacités de tous les opérateurs.
Or, aux opérateurs historiques déjà présents sur le marché, où ils sont puissants, vient s’ajouter une nouvelle catégorie d’opérateurs, à savoir les collectivités locales. Celles-ci installent peu à peu des réseaux d’initiative publique, ou RIP, qui complètent l’offre purement privée et qui trouvent tout à fait leur place dans une législation libérale.
Ces réseaux d’initiative publique permettent de supprimer les zones d’ombre dans les campagnes, et on aura de plus en plus souvent recours à eux, même dans les villes !
Si nous voulons que le plus grand nombre possible de Français aient accès aux réseaux à haut et à très haut débit, nous devons solliciter tout le monde, c’est-à-dire les petits opérateurs, sur lesquels je reviendrai, mais aussi les réseaux d’initiative publique, que je propose de faire figurer dans la loi, à travers cet amendement, à côté de la notion générale de réseau.
Les réseaux d’initiative publique constituent un gage d’ouverture à la concurrence et garantissent l’accès de tous – les opérateurs comme le public – à ces techniques nouvelles. Je souhaite donc qu’ils soient mentionnés dans le code des postes et des communications électroniques et dans le code général des collectivités locales.
Pourquoi ne pas faire figurer explicitement dans la loi les réseaux d’initiative publique ? Cette mention n’allongera pas considérablement les codes et elle permettra de souligner le rôle que joueront les RIP dans le déploiement du haut débit en France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 780, la commission spéciale souscrit à l’objectif visé, à savoir mutualiser la fibre optique pour permettre aux consommateurs de choisir leur fournisseur d’accès au très haut débit. Cette mutualisation fait l’objet d’une convention spécifique entre opérateurs, prévue à l’article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques.
Toutefois, la convention dont nous discutons ici n’est pas conclue entre les opérateurs, mais entre le premier installateur de la fibre optique et les copropriétaires. Son objet n’est donc pas d’assurer la mutualisation de la fibre, mais d’organiser au mieux le déploiement de cette dernière dans l’immeuble et d’autoriser les opérateurs concurrents à utiliser les goulottes établies par l’opérateur qui aura installé la fibre en premier. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Avec l’amendement n° 842 rectifié, monsieur Leroy, vous souhaitez que soit explicitée la possibilité offerte aux collectivités territoriales compétentes d’utiliser, au même titre que les autres opérateurs, les infrastructures d’accueil de câbles qu’aura établies le premier opérateur à installer la fibre optique dans l’immeuble.
Toutefois, la rédaction actuelle du texte autorise déjà cette faculté, puisqu’une collectivité exerçant la compétence définie à l’article L. 1425-1 est réputée assurer une activité d’opérateur de communications électroniques, comme en dispose d’ailleurs expressément le premier alinéa du II de cet article.
Il est donc inutile d’apporter une telle précision. C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement, qu’elle considère comme satisfait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Besson, secrétaire d’État. S’agissant de l’amendement n° 780, le Gouvernement émet un avis défavorable, pour les raisons qui ont été développées par Mme le rapporteur.
Monsieur Leroy, je crois qu’il n’y a aucune ambigüité sur le point que vous soulevez : en application de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, les exploitants des réseaux d’initiative publique sont bien des opérateurs et ils bénéficient de l’ensemble des droits conférés à ces derniers par le projet de loi.
Votre amendement n° 842 rectifié vise donc à apporter une précision qui ne me semble pas indispensable et peut même se révéler contre-productive, dans la mesure où la rédaction que vous proposez, en distinguant les « opérateurs » et les « exploitants d’un réseau d’initiative publique » risquerait de laisser penser que ces derniers ne sont pas des opérateurs, ce qui pourrait poser problème.
Au nom même des objectifs que vous visez, je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
Enfin, le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 161 de la commission.
M. le président. Monsieur Leroy, l’amendement n° 842 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Leroy. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 842 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 780.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les six premiers sont identiques.
L’amendement n° 167 est présenté par Mme Lamure, au nom de la commission.
L’amendement n° 96 est présenté par M. Hérisson.
L’amendement n° 485 est présenté par Mmes Terrade, Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L’amendement n° 699 est présenté par M. Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union centriste — UDF.
L’amendement n° 782 est présenté par M. Raoul, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Repentin, Sueur, Teston, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 841 rectifié est présenté par MM. Leroy, Alduy, Bailly, Belot, Doligé, Le Grand, Richert, Vial, J. Blanc, Grignon, Fournier, Bernard-Reymond, Beaumont, A. Dupont, Houel, Fouché, Doublet et Martin, Mmes Sittler, Procaccia et Panis et MM. Cambon, César, du Luart, Cléach, Chauveau, Lardeux, Cornu, Pointereau et Revol.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le 3. du III de cet article.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, rapporteur.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Cet important amendement de suppression vise à rétablir l’équilibre du texte en revenant à la version initiale du Gouvernement.
La fibre optique constitue un réseau nouveau dont le déploiement doit se faire selon des règles symétriques pour tous les acteurs, afin que les immeubles soient équipés de façon à la fois rapide, concurrentielle et respectueuse des droits des copropriétaires. C’est sur cet équilibre délicat, mais précieux, que le Gouvernement a construit l’article 29 du projet de loi, et la commission partage ce souci.
Dans cette perspective, chaque opérateur doit obtenir l’autorisation des copropriétaires pour déployer son réseau en fibre optique et desservir tous les occupants de l’immeuble. Il s’agit effectivement d’une contrainte, coûteuse en temps et dont le résultat est incertain, mais qui permet à terme d’assurer le respect du principe constitutionnel de propriété privée et de créer les meilleures conditions pour que les copropriétés accueillent favorablement le déploiement des réseaux à très haut débit en fibre optique.
Exonérer un opérateur de la nécessité d’obtenir l’accord de la copropriété pour déployer la fibre optique dans un immeuble, reviendrait à lui octroyer un avantage concurrentiel décisif. Celui-ci serait d’autant plus injustifié que cet acteur bénéficie déjà de l’avantage historique que constitue sa présence dans de nombreux immeubles, au titre du haut débit, mais surtout du service antenne.
Cet amendement de suppression n’est pas pénalisant pour l’opérateur du câble, qu’il remet simplement sur un pied d’égalité avec ses concurrents en ce qui concerne le déploiement de la fibre dans les immeubles.
Cette disposition n’affecte en rien les avantages que l’opérateur a hérités de l’histoire et qui sont doubles : d’une part, la détention de fourreaux qui facilitent pour lui le déploiement horizontal de la fibre jusqu’en pied d’immeuble ; d’autre part, la familiarité avec les copropriétés où il a déployé son câble pour distribuer la télévision ou le haut débit. Ce sont autant d’atouts que le présent texte ne remet absolument pas en cause.
Il faut aussi observer que le projet de loi n’interdit nullement au câblo-opérateur de transformer en fibre optique son réseau jusqu’en pied d’immeuble et de déployer celle-ci dans les immeubles où il y aurait été explicitement autorisé par une convention signée avec la copropriété.
M. le président. L’amendement n° 96 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Évelyne Didier, pour présenter l’amendement n° 485.
Mme Évelyne Didier. Nous aussi, nous proposons de supprimer le 3. du III de cet article, qui prévoit un régime dérogatoire pour les opérateurs ayant déjà déployé dans un immeuble un réseau à haut débit dans le cadre d’une convention antérieure.
Lors de la discussion générale, nous avons souligné qu’un certain nombre d’amendements avaient été intégrés dans le projet de loi à la demande expresse d’entreprises ou de lobbys. Il ne fait aucun doute que cette disposition introduite à l’Assemblée nationale en fait partie…
Mes chers collègues de la majorité, nous vous demandons de faire preuve d’un peu de cohérence si vous voulez que soit garanti le principe de non-discrimination entre les opérateurs – mais je crois que Mme le rapporteur partage mon point de vue.
En effet, le projet de loi introduit une exception au profit d’un seul opérateur, qu’il n’est plus nécessaire de nommer tant la presse l’a rendu célèbre !
Dans sa rédaction actuelle, cet article risque de mettre en péril tout le travail qui a été accompli, en accordant une exception non justifiée, qui constitue en réalité un passe-droit. Ainsi, cette disposition omet de mentionner la charte que vous souhaitez faire signer par les opérateurs, monsieur le secrétaire d’État, et dans laquelle vous leur demanderez de mettre à disposition des autres entreprises la partie terminale de leurs installations afin qu’une saine concurrence puisse s’appliquer.
Or ce document constitue la pierre angulaire de votre proposition ; sans lui, rien ne garantira un déploiement satisfaisant sur tout le territoire.
Nous pensons que le caractère incitatif du dispositif conjugué à la libre concurrence entre les opérateurs n’est pas la bonne solution pour assurer la péréquation tarifaire.
Si votre objectif est réellement de faire progresser les droits des consommateurs et d’améliorer sensiblement l’offre en matière de télécommunications, monsieur le secrétaire d’État, vous ne pouvez cautionner cette disposition dérogatoire.
Pour que votre projet de loi ait une chance de réussir, il convient au moins d’appliquer la même règle à tous les opérateurs !