Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Notre collègue a raison d’attirer l’attention sur la situation des photographes, même s’il ne paraît pas utile d’énumérer les différentes catégories professionnelles qui sont susceptibles de se constituer en organismes de défense professionnels.
La commission souhaite entendre l'avis du Gouvernement sur ce sujet. S’il nous rassure, nous demanderons à Mme Alima Boumediene-Thiery de bien vouloir retirer son amendement ; si tel n’est pas le cas, nous émettrons un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Madame Boumediene-Thiery, nous partageons votre souci de défendre les droits des photographes. Naturellement, ceux-ci sont couverts par les dispositions du projet de loi. Je crains, si nous les mentionnons explicitement, que nous ne nous exposions à des demandes reconventionnelles de toutes les autres associations.
Mme la présidente. Madame Alima Boumediene-Thiery, l'amendement n° 118 est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Au bénéfice de cette confirmation, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 118 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 97, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-22 du code de la propriété intellectuelle.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Albanel, ministre. Cet amendement vise à limiter la saisine de la Haute autorité aux sociétés de perception et de répartition des droits, aux organismes de défense professionnels et au CNC, qui sont les seules entités habilitées, en vertu de l'article L. 331-2 du code de la propriété intellectuelle, à désigner des agents assermentés chargés de constater la matérialité des infractions au droit d'auteur et aux droits voisins.
Ces mêmes organisations sont également habilitées, en vertu du 4° de l'article 9 de la loi du 6 janvier 1978, à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel dans le cadre d'une infraction aux droits de leurs membres.
L'objectif visé par les dispositions supprimées est de permettre aux licenciés exclusifs de défendre leurs droits. Il peut être pleinement atteint par l'intermédiaire des sociétés de perception et de répartition des droits ou des organismes professionnels dont ces licenciés sont membres.
Il en va de même, par exemple, pour les entreprises de communication audiovisuelle, dont l'ALPA, l’Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle, a vocation à traiter les difficultés.
Mme la présidente. L'amendement n° 21, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-22 du code de la propriété intellectuelle :
« - les bénéficiaires valablement investis à titre exclusif d'un droit exclusif d'exploitation conformément aux dispositions du livre Ier ou d'un droit exclusif d'exploitation appartenant à un producteur de phonogrammes ou de vidéogrammes ou à une entreprise de communication audiovisuelle, conformément aux dispositions du livre II ;
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 97.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement tend à compléter le texte afin de permettre aux entreprises de communication audiovisuelle et aux éditeurs de logiciels, c'est-à-dire tous ceux qui, de près ou de loin, peuvent se trouver concernés par les problèmes de piratage, de saisir la Haute autorité.
Les entreprises de communication audiovisuelle sont visées par le livre II au même titre que les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et elles subissent, comme elles, le phénomène du piratage. Il en est de même des éditeurs de logiciels visés par le livre I.
S'agissant de l’amendement n° 97, nous émettons un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 21 ?
Mme Christine Albanel, ministre. Je suis favorable à cet amendement, mais celui-ci serait satisfait si l’amendement du Gouvernement était adopté.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Effectivement, si l’amendement n° 97 est adopté, l’amendement n° 21 n’aura plus d’objet !
Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 21 n’a plus d’objet.
L'amendement n° 61 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 331-23 du code de la propriété intellectuelle par un alinéa ainsi rédigé :
« La commission de protection des droits ne peut connaître des faits pour lesquels la juridiction judicaire a été antérieurement saisie sur le fondement de l'article L. 335-3.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. L'article L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle dispose : « Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d'une œuvre de l'esprit en violation des droits de l'auteur, tels qu'ils sont définis et réglementés par la loi. »
Or un abonné peut également être sanctionné s'il méconnaît l'obligation prévue à l'article L. 336-3 de ce code, c'est-à-dire la nécessité de veiller à ce que l'accès à internet « ne fasse pas l'objet d'une utilisation à des fins de reproduction, de représentation, de mise à disposition ou de communication au public d'œuvres ou d'objets protégés par un droit d'auteur ou par un droit voisin. »
En l'état actuel de la législation, les ayants droit peuvent donc clairement à la fois engager des poursuites pénales et saisir la HADOPI pour les mêmes faits, même si, in fine, je le reconnais, les qualifications juridiques sont différentes. Cette question est importante, parce qu’il s'agit là de l’une des critiques qui sont souvent formulées à l’encontre de ce texte.
Pour éviter qu'une double action ne soit possible, nous proposons que la commission de protection des droits ne puisse connaître de faits faisant déjà l'objet de poursuites pénales.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Madame Morin-Desailly, le problème que vous soulevez ne se poserait en réalité que dans des cas extrêmes, très limités. Nous pouvons penser que la voie administrative consistant à saisir d'abord la HADOPI sera largement privilégiée par les ayants droit.
En outre, les dispositions de cet amendement susciteraient des difficultés juridiques, car on ne peut priver un ayant droit de la possibilité d’avoir recours au juge pénal.
D'ailleurs, la jurisprudence constitutionnelle permet qu’un même fait puisse donner lieu à des sanctions à la fois administratives et pénales, la qualification juridique n’étant pas la même, comme vous l’avez-vous-même souligné, madame Morin-Desailly.
C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Comme vient de le rappeler M. le rapporteur, la possibilité qu’une personne soit sanctionnée deux fois pour un même fait existe dans notre droit, la double peine ne posant aucune difficulté sur le plan juridique.
Les infractions boursières et bancaires, par exemple, peuvent être sanctionnées par le juge pénal mais aussi par des autorités administratives. De même, le comportement condamnable d’un agent public est susceptible de faire l’objet de sanctions aussi bien disciplinaires que pénales.
Toutefois, nous ne souhaitons pas instaurer une double peine en la matière. De tels cas resteront rarissimes, car nous estimons tous que les ayants droit se tourneront spontanément vers la procédure qui est la moins coûteuse et la plus rapide.
Les ayants droit se sont d'ailleurs engagés, au moment où ils demanderont à la CNIL l’autorisation d’obtenir les adresses IP, à choisir pour un même fait l’une ou l’autre procédure, ce qui signifie qu’un même acte ne sera pas poursuivi à la fois par la HADOPI et par la juridiction pénale.
En revanche, il pourrait arriver, de façon tout à fait exceptionnelle, qu’un contrevenant soit traduit à la fois devant la HADOPI, pour des faits insignifiants, et devant le juge pénal, pour des actes de piratage massifs, ce qui d'ailleurs ne serait pas choquant, me semble-t-il, mais cette personne ne sera jamais sanctionnée deux fois pour un même acte.
Je le répète, ce problème ne concernera qu’un nombre de cas infinitésimal. Nous pensons que toutes les conditions sont réunies pour que la HADOPI soit choisie, et les ayants droit s’y sont d'ailleurs engagés dans le cadre des discussions que nous avons entamées avec eux.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Madame Morin-Desailly, l'amendement n° 61 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Morin-Desailly. C’est un amendement auquel l’ensemble du groupe tient beaucoup.
J’ai bien entendu toutes les explications : il s’agit de cas extrêmes et rarissimes, en quantité infinitésimale. Cependant, nous ne souhaitons pas courir ce risque.
Mme la présidente. L'amendement n° 155, présenté par MM. Renar, Ralite et Voguet, Mme Gonthier-Maurin et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le texte proposé par cet article pour l'article L. 331-23 du code de la propriété intellectuelle, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Aucune sanction ne peut être prise en l'absence de l'existence d'une offre légale des œuvres ou objets protégés par un droit d'auteur ou un droit voisin. La Haute Autorité apprécie l'existence, l'accessibilité et le contenu de cette offre.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. La disposition présentée est l’une de celles que nous proposons pour inciter au développement de l’offre légale en ligne, sans laquelle aucune lutte contre le téléchargement ne saurait être complète. Il s’agit là de l’une des conclusions du rapport Olivennes, mais également de l’un des engagements des accords de l’Élysée. Nous ne saurions assez le répéter : nous regrettons fortement que le projet de loi n’ait pas prévu de véritables dispositions allant dans le sens du développement de cette offre.
Si les pratiques de téléchargement se sont généralisées de manière si massive, c’est aussi en raison de la faible réactivité d’une grande part des industries culturelles qui commencent à peine à développer cette offre, alors que Napster est né il y a maintenant dix ans.
Aujourd’hui que ces offres commencent à se développer, il importe que les co-acteurs de cette économie changeante qu’est l’industrie des contenus culturels soient clairement conscients que leur responsabilité est elle aussi engagée s’agissant de la baisse du marché du disque et de l’explosion du peer-to-peer. Ainsi que le note notre collègue Bruno Retailleau dans son rapport pour avis, « la responsabilité de la “concurrence gratuite” des échanges de fichiers par P2P dans cette baisse des ventes n'est sans doute pas exclusive », la désaffection pour certains supports ayant notamment joué un grand rôle.
Cette responsabilité nous semble encore loin d’être comprise par une partie des acteurs, qui peinent à accepter la redistribution des cartes économiques qu’induit la dématérialisation des contenus. Ainsi avons-nous entendu, en audition, un représentant des éditeurs vidéo nous dire qu’il ne croyait pas au développement de la vidéo à la demande.
C’est pourquoi il est nécessaire d’envoyer un signe fort qui puisse peser sur ce qui relève, il est vrai, du marché, donc du contractuel et non du législatif. Une manière efficace de le faire est de s’assurer qu’aucune sanction ne puisse être prise contre quelqu’un qui téléchargerait une œuvre qui ne serait pas déjà disponible en offre légale. Rééquilibrant la désignation des responsabilités, cette disposition rééquilibrerait le projet de loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Notre collègue a raison d’insister sur la nécessité d’une offre légale de qualité. Tout le projet de loi vise d’ailleurs à développer cette offre.
Nous craignons cependant que cette procédure ne vienne encombrer la HADOPI de manière importante si cette dernière doit vérifier, à chaque demande, si l’œuvre est disponible sous la forme numérique. Certes, il se trouve sans doute des cas extrêmes, mais nous pouvons imaginer que, même dans ces cas extrêmes, l’œuvre peut être trouvée sur des supports physiques. Il est improbable que l’on ne trouve l’œuvre ni sur des supports immatériels ni sur des supports physiques.
Par ailleurs, la commission a souhaité développer l’offre légale et a présenté un certain nombre d’amendements visant à permettre à la Haute autorité le développement d’une offre légale de qualité.
Compte tenu de tous ces arguments et bien que nous comprenions parfaitement les souhaits de nos collègues, nous demandons le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Nous partageons, bien sûr, les souhaits exprimés par Ivan Renar à propos du développement de l’offre légale. Cependant, nous estimons que l’on ne peut subordonner la protection du droit d’auteur à la quantité d’offres mises à disposition par les titulaires des droits. De plus, en pratique, il est extrêmement difficile d’apprécier le caractère suffisant de l’offre. Comme l’a dit M. Thiollière, cela pourrait encombrer la Haute autorité.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Renar, l'amendement n° 155 est-il maintenu ?
M. Ivan Renar. Oui, je le maintiens, madame la présidente. Comme en amour, cela ne peut pas être seulement platonique. (Sourires.)
Mme la présidente. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 70 rectifié, présenté par M. Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-24 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
faits susceptibles de constituer un manquement
par les mots :
faits constituant un manquement
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. L’objet de cet amendement est de sécuriser le déclenchement d’une procédure HADOPI en fondant celle-ci non pas sur des « faits susceptibles de constituer un manquement », mais bien sur des faits constituant un manquement. Il faut que les ayants droit puissent agir de la façon la plus professionnelle et la plus sécurisée possible, faute de quoi des procédures risquent d’être déclenchées à l’encontre d’internautes parfaitement innocents.
Mme la présidente. L'amendement n° 141, présenté par MM. Renar, Ralite et Voguet, Mme Gonthier-Maurin et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-24 du code de la propriété intellectuelle, remplacer les mots :
faits susceptibles de constituer
par les mots :
faits constitutifs d'un
La parole est à M. Jack Ralite.
M. Jack Ralite. J’ai peu de choses à ajouter à l’argumentaire que vient de développer notre collègue Bruno Retailleau. Effectivement, l’expression « faits susceptibles de constituer » est quelque peu brumeuse : la référence aux « faits constitutifs » est plus sérieuse. S’agissant de l’appréciation de la justice, c’est même une nécessité ! Autrement, la présomption d’innocence des internautes se trouverait mise en cause.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Ces deux amendements nous paraissent apporter une précision utile. La commission émet donc un avis favorable sur l’amendement n° 70 rectifié.
Quant à l’amendement n° 141, il est satisfait par l’amendement n° 70 rectifié.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Seule la HADOPI peut juger que les faits dont elle est saisie constituent un manquement. Au stade de la constatation des faits et de la saisine de la HADOPI, il ne s’agit que d’une présomption.
L’amendement n° 70 rectifié nous semble contrevenir à la présomption d’innocence. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Il émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 141.
Mme la présidente. Monsieur Retailleau, l'amendement n° 70 rectifié est-il maintenu ?
M. Bruno Retailleau. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 141 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 71, présenté par M. Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-24 du code de la propriété intellectuelle, après les mots :
lui rappelant les prescriptions de l'article L. 336-3,
insérer les mots :
lui précisant les œuvres ou objets dont l'utilisation illicite a été constatée du fait du manquement à cette obligation,
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Toujours pour essayer de sécuriser la procédure, il s’agit de notifier tout ou partie de la liste des œuvres illicites qui auraient été téléchargées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Cet amendement ne nous paraît pas opportun, tout simplement parce qu’il importe que, lorsque la Haute autorité envoie une recommandation, elle puisse également garantir les libertés individuelles et la vie privée. Il convient donc de ne pas indiquer davantage de faits qu’il n’est nécessaire, de manière à éviter de porter atteinte au principe de respect de la vie privée.
C’est pourquoi nous souhaiterions que notre collègue retire son amendement. S’il le maintient, nous émettrons un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Albanel, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
La recommandation portant la mention d’une des œuvres piratées sera adressée à l’abonné, qui, effectivement, ne sera pas nécessairement le pirate ; ce pourra être, par exemple, un membre de sa famille. Même si elle peut présenter un caractère pédagogique, cette mention pourrait porter atteinte au respect de la vie privée.
Mme la présidente. Monsieur Retailleau, l'amendement n° 71 est-il maintenu ?
M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Non, je le retire, madame la présidente. J’entends les contre-arguments.
Mme la présidente. L'amendement n° 71 est retiré.
L'amendement n° 66, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-24 du code de la propriété intellectuelle par une phrase ainsi rédigée :
La recommandation doit également contenir des informations portant sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites pour la création artistique.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Dans un souci de pédagogie et de prévention, le présent amendement prévoit que la commission de protection des droits, à laquelle incombera la charge de mettre en œuvre la réponse graduée, informera les abonnés des dangers du piratage pour la création artistique dans le cadre des recommandations qu’elle leur adressera.
Cet amendement vient donc compléter celui de la commission des affaires culturelles, qui prévoit que les fournisseurs d’accès à internet informent régulièrement leurs abonnés des méfaits du piratage des œuvres culturelles.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Comme cette précision permettra de sensibiliser les abonnés et leur entourage, la commission émet un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 130 rectifié, présenté par Mme Blandin, MM. Lagauche et Assouline, Mmes Blondin et Bourzai, M. Domeizel, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-24 du code de la propriété intellectuelle, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Cette recommandation par voie électronique, ne divulgue pas les contenus des éléments téléchargés ou mis à disposition.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Madame la présidente, je présenterai à la fois l’amendement n° 130 rectifié et l’amendement n° 131 rectifié, car tous deux concernent la confidentialité.
Cela relève du bon sens : lorsqu’une personne est amenée à télécharger des contenus vidéo ou audio, elle le fait dans l’intimité de son domicile ou, peut-être, sur son lieu de travail. Dans tous les cas, cette personne ne s’attend pas à ce que le contenu de ce qu’elle télécharge soit divulgué à d’autres personnes, d’autant que ce que les individus téléchargent et le contenu des vidéos qu’ils conservent dans leur ordinateur relèvent très souvent de ce qu’il y a de plus intime.
Qu’il s’agisse de contenus vidéo ou audio ayant trait à l’orientation sexuelle, affirmée ou non, à la croyance religieuse, également affirmée ou non, ou à des convictions politiques, ils ne doivent pas tomber dans les mains d’une autre personne que celle qui a effectivement téléchargé de manière illicite ces documents ; ces derniers peuvent présenter un caractère sensible.
Or si les dispositions actuelles sont maintenues, c’est-à-dire si un courrier électronique puis une lettre postale notifient l’acte illicite en précisant le détail du contenu téléchargé, cela pourrait entraîner des situations assez cocasses, voire contraires au respect de la vie privée et de l’intimité de chacun.
Je donnerai quelques exemples : une épouse ou un époux, ou encore un patron, pourrait ouvrir un courrier émanant de la HADOPI indiquant non seulement que la personne a effectué des téléchargements illicites, mais en outre qu’il s’agissait de films à caractère pornographique. Imaginez l’entourage familial, amical ou professionnel qui découvre les convictions, y compris religieuses ou politiques, de celui qui aura illicitement téléchargé quelque document vidéo ou audio les révélant.
Comme nous le savons, les accès de connexion peuvent être partagés ou piratés. Ce n’est pas forcément la personne qui effectue effectivement le téléchargement illicite qui sera destinataire du mail ou de la lettre postale de la HADOPI.
Je vous demande donc, madame la ministre, mes chers collègues, de prendre en considération la protection de la vie privée et le respect des convictions de tous en adoptant ces amendements, qui tendent à retirer la mention du contenu des téléchargements dans la lettre ou le mail d’avertissement. Il s’agit d’éviter de déstabiliser inutilement les couples, les familles, les amis ou les milieux professionnels.
Car il est aussi de notre devoir de garantir la confidentialité de la vie privée : c’est le droit de chaque individu !
Il me semble d’ailleurs que ces deux amendements ont été corrigés à la demande de la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Thiollière, rapporteur. Favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 22, présenté par M. Thiollière, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-24 du code de la propriété intellectuelle :
« En cas de renouvellement, dans un délai de six mois à compter de l'envoi de la recommandation visée à l'alinéa précédent, de faits susceptibles de constituer un manquement à l'obligation définie à l'article L. 336-3, la commission peut adresser une nouvelle recommandation par la voie électronique, dans les conditions prévues au premier alinéa. Elle peut assortir cette recommandation d'une lettre remise contre signature ou de tout autre moyen propre à établir la preuve de la date d'envoi de cette recommandation et celle de sa réception par l'abonné.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Thiollière, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de clarification rédactionnelle.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 131 rectifié, présenté par Mme Blandin, MM. Lagauche et Assouline, Mmes Blondin et Bourzai, M. Domeizel, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L.331-24 du code de la propriété intellectuelle, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Cette lettre ne divulgue pas les contenus des éléments téléchargés ou mis à disposition.
Cet amendement a été défendu.
Le Gouvernement et la commission se sont prononcés.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 63, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Remplacer le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 331-24 du code de la propriété intellectuelle par deux alinéas ainsi rédigés :
« Si l'abonné estime que sa responsabilité ne peut être retenue en se fondant sur les 1°, 2° ou 3° de l'article L. 336-3, il peut contester, auprès de la commission de protection des droits, le bien-fondé des recommandations définies aux premier et deuxième alinéas.
« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles les recommandations peuvent être contestées.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Pour le respect des droits de la défense, il est proposé que l’abonné puisse contester les recommandations. Celles-ci sont effectivement des actes générateurs pouvant aller jusqu’à la suspension du service en ligne. Or il ne nous paraît pas normal que l’abonné ne puisse prouver d’emblée que sa responsabilité ne peut être retenue.
Dans l’état actuel du texte, il devra attendre la suspension de son abonnement pour pouvoir prouver qu’il ne peut être considéré comme responsable, ce qui est d’autant plus grave que l’envoi d’une recommandation entraîne automatiquement son inscription dans le fichier automatisé.
L’exemple du permis à points pourrait illustrer cet amendement : il peut en effet être comparé à une sorte de réponse graduée. Or dès qu’un automobiliste est flashé et qu’on lui retire un point, il peut contester la décision.
Nous voulons, par cet amendement, non pas faire entrer la procédure dans une phase contentieuse, mais juste offrir à l’abonné la possibilité de répondre à la recommandation et de formuler des observations qui figureront ensuite dans son dossier, si la procédure va jusqu’à la sanction.
Cette précision nous paraît d’autant plus importante que les systèmes de protection sont perfectibles et qu’un internaute innocent peut se voir injustement condamné, parce qu’une tierce personne aura téléchargé illégalement en se servant de son adresse IP.